Lettres d’amour au Père Noël

Vincent Baker est un génie! Et à mon niveau, je peux juste me contenter de servir le jdr francophone et c’est ma joie! Tout ça pour en venir au sujet du jour: les love letters

Pour autant que je sache, les love letter, dans cette forme-ci, c’est une invention de Vincent Baker dans le module Hatchet City pour Apocalypse World. Mais la technique est aisément transposable à tout jeu de rôle qui se respecte. En Francophonie, on dit parfois lettres au Père Noël, mais on sait splendidement bien ce que cache son gros rire gras. Alors je vais rester sur le vocable love letter

C’est l’facteur!

Bon, c’est quoi ce bestiaux encore? Une love letter est un texte que vous (je dis « vous » parce que je m’adresse d’abord au Meneur de jeu*) écrivez au personnage d’une joueuse pour apporter des informations de contexte ou d’histoire pertinentes pour la prochaine partie. 

Bon, et alors, il est où le génie? 

Dans les détails, pardi, juste à côté du diable! Le truc d’une love letter, c’est que le contenu n’en est pas fixé avant le début de la partie. Soit qu’il est conditionnée à un test (comme ceux qu’on réalise lors d’une partie) ou un choix difficile, ou les deux en même temps. L’un comme l’autres sont une opportunité en or pour poser des questions au joueur et lui donner la main sur un bout de l’histoire qui touche particulièrement son personnage. Car LE truc à retenir, c’est que la love letter est lue, jouée et commentée en début de partie; même si les joueuses peuvent y avoir accès avant, histoire de se familiariser avec. 

Et ça sert à quoi? 

Une love letter est un chouette moyen d’introduire la partie et de favoriser l’immersion des joueuses. La combinaison test+choix difficile+question amène naturellement la joueuse à plonger au coeur de qui est son personnage. 

Quand vous mettez un test dans une love letter, c’est parce que vous estimez que certains enjeux sont incertains. Vous vous en remettez au hasard, vous jouez pour voir où ça vous mène. Quand vous mettez des choix difficiles, vous avez plutôt envie que la joueuse vous dise quelque chose sur son personnage. Quand vous combinez les deux, c’est que vous voulez laisser au hasard de forcer la joueuse à en dire plus sur son personnage. Ne riez pas, c’est utile pour titiller les cordes sensibles d’un personnage sans avoir l’air d’y toucher. 

L’autre effet intéressant des love letters, c’est qu’elles permettent de gérer des ellipses ou ce que j’appelle dans ma tête à moi « faire de l’intendance ». J’ai beaucoup utilisé les love letters dans ces deux optiques lors de la campagne des Terres barbares. 

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La gestion d’ellipses tombe assez sous le sens. Quand on mène en bac-à-sable et/ou pour voir où ça nous mène, on finit souvent une partie sur un climax. Et on ne joue pas l’épilogue. C’est-à-dire les quelques décisions qu’implique l’exploit, la terrible révélation, le choix cornélien, etc. qui forme le climax. La love letter est un outil rêvé pour revenir là-dessus et vous permettre de lier les deux parties en beauté. « Faire de l’intendance » avec des love letters, ça vous permet de jouer des quêtes utiles pour les personnages, mais pas intéressantes pour la tablée. Par exemple, le Magicien qui doit aller chercher une tonne de mithril au royaume nain voisin pour confiner le calice corrupteur de Tsher Nobil. 

Ça sert aussi quand un personnage doit régler un problème personnel qui est devenu urgent et prioritaire pour lui, mais qui concerne peu ou pas le groupe. C’est ça que j’appelle « faire de l’intendance ». Par exemple, le Barbare qui doit ramener au clan la dépouille de son oncle mort en donnant le coup de grâce au Dragon de pierre et effectuer le rituel de la mémoire pour que son âme rejoigne le festin des Braves. 

Une autre manière d’utiliser les love letters: gérer une joueuse absente. La love letter permet de justifier l’absence du personnage tout en lui faisant vivre des trucs sympas en deux temps trois mouvements en début de partie. 

Le plan, c’est foncer!

Je crois que j’ai fait le tour de ce que je voulais radoter sur les love letters, passons aux travaux pratiques! Un petit exemple issu de la campagne Hautepierre (mazette quel setting de Jeremy Strandberg!). Ce qui a été apporté en jeu est en gras et italique.

Chère Blodwen,

(1) Le printemps est toujours une saison très active pour toi car tes bons soins sont souvent requis. Sans compter qu’il te faut organiser la Fête de la fertilité pendant laquelle le village fait passer ses jeunes bêtes entre deux feux pour assurer la fertilité de leurs entrailles. C’est aussi la fête pendant laquelle tu offres ton corps pour assurer la fertilité des femmes du village. Cette année, le dévolu des soeurs de Danu s’est jeté sur Trystan, un choix évident après sa consécration par Tor. 

 (2) Lors de tes temps libres, tu en profites pour t’éclipser dans la Grande Forêt afin de voir comment venir en aide aux Hamadryads avec lesquelles tu as pactisé. 

(3) C’est pourquoi je vais te demander de lancer 2d6+SAG.

(4) Quel que soit le résultat, elles te demandent de « faire revenir Ceux de la Forêt » qu’elles appellent Coedlyon. 

Sur 10+: Apporte une réponse aux trois questions ci-dessous. Ensuite choisis 2 dans la liste qui suit. 

Sur 7-9: Apporte une réponse à deux questions, j’apporterai la troisième réponse. Ensuite choisis 1 dans la liste qui suit.

Sur 6-: Apporte une réponse, je me charge des deux autres. Ensuite je choisirai 1 dans la liste qui suit. >:-) 

(5) Pourquoi les Coedlyon se rassemblaient-ils à l’équinoxe d’automne autour du Bosquet rouge? Pour limiter les effets négatifs du Bosquet par un rituel sombre nécessitant un sacrifice.

Quelles traces des Coedlyon peut-on encore trouver autour d’An-Mohr Dun? Des bastions et même tout un fossé de défense, fossé qui est marqué par des runes magiques.

Pourquoi les attaques de Crinwin se multiplient-elles depuis le départ des Coedlyon? Ce sont d'anciens ennemis héréditaires. Depuis le départ des Coedlyon, les Crinwin ne sont plus contenus et se sont multipliés.

(6) 

[x] Les Hamadryads te confient l’une des leurs comme guide (nous déciderons de ses caractéristiques ensemble). 

[x] Les Hamadryads t’offrent une arcane mineur (je te dirai laquelle) 

[  ] Les Hamadryads n’exigent pas que tu accomplisses ta quête avant la fin de l’hiver. 

Regardons ça de plus près. Le paragraphe d’introduction (1) introduit ce qui va introduire préoccuper le personnage lors de la prochaine partie. Précisons d’emblée qu’il y avait accord des joueurs sur les thèmes évoqués. Ensuite, j'arrive avec des éléments d’avancement des objectifs du personnage (2) et paf! le test pour en déterminer aléatoirement les conséquences (3). Dans le résultat automatique du test, j’en profite pour avancer sur un des objectifs personnels du personnage (4). 

Les issues possibles du test déterminent la répartition de l’autorité narrative sur les questions et le choix difficile. (5) Les questions sont légèrement orientées et lient les Coedlyons à des endroits marquant de la forêt au pied de Hautepierre pour amener les joueuses à suivre cette quête des Coedlyons comme une réponse à la menace Crinwin. encore un truc qui avait été déterminé auparavant en demandant leurs attentes aux joueuses.

Enfin, le choix difficile. Ici la joueuse va devoir choisir entre un guide, un OBM ou un délai plus long (sachant qu’il y a déjà quelques quêtes sur le feu, ce n’est pas anodin). 

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Voilà, par le menu le genre de trucs que je mets dans les love letters pour mes joueuses. C’est un exercice parfois difficile. Il faut trouver/choisir sur quoi se concentrer, comment l’amener et formuler de vrais enjeux. Mais c’est un exercice gratifiant car souvent surprenant et très informatif. 

*En même temps, on peut aisément imaginer un moyen d’utiliser les love letters entre joueurs, histoire de donner de l’épaisseur aux relations entre leur personnage.


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Improviser sans filet - partie II

Voici donc la seconde partie de l’article de Thomas.

La première partie se trouve par ici.

Toujours dire oui

Le creux de créer par réaction, c'est de toujours répondre aux joueuses. Éviter de laisser une action sans réaction. Et si possible, toujours répondre oui. Quitte à nuancer par un “oui mais…”, un “oui et…” ou un “non mais…”

- La porte est-elle fermée ?
- Oui, et il y a une alarme dessus.
- Cette personne peut-elle m'aider ?
- Oui, mais elle va te demander un service en échange.
- Est-ce que je trouve une guilde des voleurs ?
- Non, mais il y a une guilde de mendiants et une guilde d'assassins.

On peut utiliser une table de réponse, inspirée du système FU, avec 1d6 :

  1. Non et
  2. Non
  3. Non mais
  4. Oui mais
  5. Oui
  6. Oui et

Pour aller plus loin :
Louis Bar, Etienne Bar, Pierre Gavard-Colenny, Nathan Russell : FU

Créer par réaction et toujours dire oui, c'est cultiver un jeu où on se contente de répondre aux joueuses. On peut se permettre de mener la danse sans être proactif.

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La parcimonie

Quand on improvise, nul besoin d'apporter de nouveaux éléments en permanence. 

Hormis si la partie se base sur un feu roulant d'adversité, de dilemmes moraux ou une mitraillage esthétique, cette méthode est fatigante et risque de rendre l'aventure indigeste. 

Au contraire, la parcimonie consiste à réutiliser jusqu'à satiété les éléments introduits en début de partie, que ce soit les décors, les figurants, les situations, les intrigues, les cadrages de scènes, les thèmes esthétiques. Quitte à décaler les choses au fur et à mesure, mélanger deux éléments pour en obtenir un troisième, métamorphoser un élément ou faire une révélation à son sujet.

Cette économie de narration abouti à des parties très resserrées et cohérentes, et moins fatigantes à mener.

Faire des pauses

La création en continu est fatigante et à terme, on perd en puissance. On la pratique pour entretenir l'illusion que les décors et les figurants sont solides alors que leur existence et leur comportement sont improvisés.

Si l'on se refuse à prendre des pauses, on finit par en prendre malgré soi : on bafouille, on a des blancs ou on crée sans voile.

- Attends, ce figurant, on va dire qu'il s'appelle… John… Euh non, Jim !

Ces pauses involontaires brisent le quatrième mur. Au lieu de ça, mieux vaut décréter des pauses réelles. Cela peut être des pauses de jeu, ou des pauses de l'interaction MJ-joueuses, comme donner cinq minutes aux joueuses pour élaborer un plan ou faire le point sur la situation.

Pendant ce temps, on peut faire un point à tête reposée, consolider les décors et les figurants, anticiper sur les futures situations.

La malle à souvenirs

Créer, c'est réinterpréter son expérience. C'est puiser dans sa malle à souvenirs, d'expériences réelles ou imaginaires. Et les restituer en jeu sous une forme adaptée. Penser aux événements de sa journée, aux derniers films visionnés, ou à la dernière conversation. Puis en ramener des éléments en jeu sous une forme détournée. Cela va réalimenter votre flow.

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Réutiliser son répertoire

Au cours de sa carrière de MJ, on se constitue un répertoire. C'est la somme des décors, des figurants, des situations, des mises en scènes, des gimmicks qu'on a déjà joués. À plus forte raison si ses joueuses varient, on peut puiser sans scrupules dans ce répertoire pour alimenter une partie en cours, quitte à les détourner pour se surprendre soi-même. Cela constitue une signature créative et un défi passionnant : revisiter en permanence ses propres classiques.

La méthode Keyser Söze

En cas d'écran blanc, il reste la méthode Keyser Söze. Dans le film Usual Suspects de Bryan Singer [Alerte : spoiler !], un personnage monte de toutes pièces l'histoire d'un criminel légendaire, Keyzer Söze, en s'inspirant de tout ce qu'il voit dans la pièce où il est interrogé. Il tire les noms des protagonistes du tableau d'affichage et de la marque inscrite sur sa tasse à café. Cela lui permet d'inventer avec aplomb car tous les détails sont inscrits à portée de vue, il suffit de les utiliser.

Quand on maîtrise avec la méthode Keyzer Söze, on utilise alors tout ce qui passe à portée de vue, de toucher ou d'oreille : la texture de la table va inspirer la texture du décor, l'image sur un t-shirt va inspirer un nouveau figurant, le slogan sur une affiche une nouvelle péripétie.

Mener en musique procède de la méthode Keyser Söze : chaque musique nous met des images dans la tête, qu'on réinjecte en jeu. 

Pour aller plus loin :
Usual Suspects, film de Bryan Singer

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Lâcher prise

On ne raconte pas une aventure, on la vit.

Parfois, il suffit de se replonger dans le monde imaginaire partagé pour que ses réactions nous viennent naturellement. Maîtriser la logique d'un univers, la réaction d'une adversité, ou l'enjeu moral d'une situation, est plus naturel si on fait l'effort de s'immerger dans le jeu, plutôt que de se placer dans une réflexion en retrait. En outre, on s'affranchit ainsi d'une obligation de qualité, génératrice de trac.

Être présent à l'aventure va offrir la détente nécessaire à la fluidité du jeu.

Valoriser sa préparation

Toutes ces techniques fonctionnent sans filet. Mais si on a un filet, en l’occurrence une préparation, il faut l'utiliser à bon escient.

  • Étaler ses notes de façon à les avoir bien en vue. Passer les mots les plus essentiels au fluo, ou les regrouper dans une liste de mots-clés. Réduire son scénario à une liste de mots-clés va aider votre mémoire : derrière chaque mot-clé, votre cerveau va stocker une grosse quantité d'informations et les restituer à la simple vue du mot-clé.
  • Utiliser ses notes comme générateur aléatoire. Lorsqu'on est à sec sur une réaction, pointer son doigt sur un des mots-clés, et broder dessus.
  • Pratiquer la fusion. Quand une joueuse fait une proposition ou pose une question, voir si on peut relier cela à un élément de sa préparation, quitte à le modifier pour qu'il corresponde. C'est assez facile car le cerveau humain est taillé pour faire des associations et c'est une excellente façon d'incorporer un élément de sa préparation sans faire de l'ombre aux idées des joueuses.

Valoriser ses connaissances

Être prêt pour ne pas avoir à se préparer !

Maîtriser sans préparation est plus aisé si l'on connaît à fond son univers de jeu, sa pente naturelle, le type d'adversité qu'il propose, les grands enjeux et les engrenages moraux, ou son canon esthétique.

Ce peut être une connaissance encyclopédique, mais dans la mesure où celle-ci peut être supplée par la présence du manuel de jeu à la table, on lui préférera une connaissance fonctionnelle : l'objectif est alors moins de connaître les éléments par coeur que de maîtriser la logique, la métaphysique de l'univers, son esthétique. On peut alors improviser décors, figurants et situations qui se conforment à cette connaissance fonctionnelle ou la détournent. Cela apporte une expérience de jeu vivante, fluide.

Conclusion

Qu'on prépare une partie à l'avance où qu'on construise sur du sable, qu'on connaisse son jeu sur le bout des doigts ou qu'on débute, qu'on s'appuie sur la proactivité des joueuses ou qu'on fonctionne en vase clos, il est possible de faire des parties mémorables en improvisation massive ou totale.

Cela nécessite de se forger quelques réflexes ou de se doter de quelques outils. Même vos parties les plus préparées bénéficieront de votre capacité à réagir quand les joueuses feront exactement ce que leur demande un jeu de rôle : sortir des sentiers battus.

On vient à l'improvisation quand on a fait son deuil du prévisible, on y reste quand on fait son
beurre de l'imprévisible.


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Improviser sans filet

Une fois n’est pas coutume (qui sait?), je ne vous sers pas un article de mon cru mais celui d’un autre. En effet, j’ai été contacté par Thomas Munier qui m’a proposé de publier cet article sur mon blog. Place à l’invité, donc!

Thomas Munier est l'auteur de jeux et de suppléments dans la forêt de Millevaux (Inflorenza,Millevaux Sombre, Odysséa) et dans des rêves (Marins de Bretagne, S'échapper des Faubourgs,Dragonfly Motel). Il anime Outsider, un blog sur l'énergie créative et les univers artisanaux. Il aime aussi les collages à la Prévert, les musiques sombres, le cinéma et la littérature mindfuck, et les petits chats. http://outsider.rolepod.net/

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INTRODUCTION

L'improvisation du MJ en jeu de rôle est un vieux sujet. Chacun dose l'impro à sa façon, mais elle est toujours nécessaire. 

Chaque base de jeu de rôle apporte des solutions spécifiques, certains sont devenues des classiques (poser des questions orientées aux joueuses, utiliser des tables aléatoires ou des tarots, déléguer des créations aux joueuses…). Des livres et des podcasts lui sont consacrés.

Pour aller plus loin :

Play Unsafe par Graham Walmsley
Unframed: The Art of Improvisation for Game Masters, auteur.e.s multiples
Autour de l'improvisation, avec Le Grümph, Podcast de la Cellule / Garage N°11
Les Carnets Ludographiques #4 : L'improvisation , Podcast de Radio Rôliste

Je voudrais apporter des techniques issues de ma propre pratique, qui me semblent transposables à d'autres tables.

Ma pratique est spécifique et c'est pourquoi j'ai développé des solutions à part. Je maîtrise depuis 25 ans, j'ai jadis maîtrisé des donjons où tous les cas de figure étaient rédigés, puis je suis passé à des jeux de rôles (L'Appel de Cthulhu, en premier lieu) où si l'on pouvait planifier l'essentiel, beaucoup de choses restaient dans le flou. J'ai d'abord rédigé des scénarios d'une dizaine de pages par séance. À la marge, j'ai maîtrisé des scénarios du commerce. Au fur et à mesure, mon volume de prise de notes a diminué jusqu'à se restreindre à une page ou deux. Il a repris du volume quand j'ai refait du jeu tactique, stat-blocks et arborescences de choix s'y taillant la part du lion.

Pour aller plus loin :

L'Appel de Cthulhu, Sandy Petersen & co.

Et depuis quelques années, je maîtrise sans filet. Je n'ai aucun scénario, ou alors un simple bac à sable ou deux lignes d'intention, et je joue surtout des one-shots, en variant les environnement et les ambiances d'une partie sur l'autre, et avec des personnes différentes presque à chaque fois.

Voici les méthodes que j'ai retenues pour proposer des parties mémorables avec parfois, rien dans les mains, rien dans les poches.

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Choisir ses jeux

Bien que les conseils suivants soient transposables à bien des jeux, le choix du jeu a son importance. Certains requièrent plus de préparation que d'autres.

Les jeux tactiques où l'équilibrage compte nécessitent de préparer des stats-blocks. D'autres proposent de jouer sans se soucier de l'équilibrage, auquel cas on peut utiliser une adversité à caracs flottantes : on improvise les statistiques des monstres et autres obstacles au fur et à mesure qu'elles sont nécessaires, plutôt que de déterminer la totalité du stat-block à l'avance.

Certains jeux fournissent tables aléatoires, plans et listes exhaustives de situations, d'autres se contentent de mettre l'accent sur le moteur physique (caracs, compétences, listes de capacités…). Ce sont ceux où votre capacité d'improvisation sera la plus sollicitée. Il vous est cependant possible de récupérer les tables aléatoires d'un autre jeu, ou des tables aléatoires génériques, ou encore de bricoler les vôtres à partir de tout inventaire que vous pourriez trouver. Vous pouvez créer des tables aléatoires à partir des éléments de l'univers de votre jeu, ou créer des tables à partir d'articles de conseils de maîtrise. Par exemple, la méthode du Donjon en 5 pièces peut donner cette table aléatoire de péripéties-types :

  1. Mission
  2. Passage ou Gardien
  3. Challenge de roleplay ou Énigme
  4. Piège, surprise, événement inattendu
  5. Antagoniste
  6. Récompense, révélation, retournement de situation

Pour aller plus loin :

La technique du donjon en 5 pièces, par Fabien Deneuville

Certains jeux proposent une caractérisation chiffrée complexe qui bride l'improvisation alors que les jeux dits freeform structurés (peu de règles, peu de chiffres, peu de matériel, peu de hasard) permettent d'improviser des situations à la volée sans être pris au dépourvu quand il s'agit de de les traduire en chiffres ou en règles.

Le summum d'un jeu freeform, c'est un jeu où l'on peut rapidement se passer du manuel pour maîtriser.

Pour aller plus loin :

What is structured freeform : a draft, par Jonathan Walton

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Créer par réaction

C'est facile de créer. Il suffit d'ouvrir la bouche et de dire n'importe quoi. Ce qui est difficile, c'est de savoir dans quel sens créer. Le jeu va vous guider, puisqu'il donne déjà un angle, mais pour affiner, on peut s'appuyer sur ce que recherchent les joueuses.

Cela peut signifier laisser les joueuses créer une partie du décor et des figurants, cela signifie surtout enquêter sur ce que les joueuses attendent comme ambiance et comme aventure.

Poser la question en début de jeu est une chose. Mais l'enquête doit se prolonger tout au long de la partie. Il suffit pour cela de prêter attention aux propositions des joueuses : les actions qu'elles tentent pour leurs personnages, les objectifs qu'elles se donnent, les suppositions qu'elles font au sujet du décor et des figurants. Et à leurs questions : ce qu'elles veulent approfondir au sujet du décors, des figurants, ce qu'elles veulent savoir sur les capacités d'actions de leurs personnages, les investigations que mènent leurs personnages. On rebondit dessus, on crée dans cette direction, pour répondre à ces questions. C'est parfois moins une création brute qu'une réinterprétation des dires des joueuses. Si une joueuse demande si un figurant est grand, on peut répondre que oui, il est très grand, d'ailleurs il se cogne la tête contre les portes.

On crée par réaction. Dans le jeu tactique, on offre une adversité taillée pour les personnages. Dans le jeu moral, on fait écho à leurs quêtes. Dans le jeu esthétique, on fait des descriptions qui mettent les personnages en valeur ou en contraste.

L'improvisation est une chaîne de transformations. Tout découle de ce qui est raconté ou supposé. Quelque soit le chemin emprunté par les personnages, on réagit en proposant une épreuve.


Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. Dans la seconde partie de l’article, Thomas vous entretient de techniques plus spécifiques. Un peu –beaucoup– comme si on gardait le meilleur pour la fin. Histoire de vous faire patienter un peu…


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Petite expérience de Potentiel Ludique

Vous vous souvenez de mes élucubrations sur le Potentiel Ludique. Ça fait un bout de temps que ça me chatouille de tester tout ça. Mais tout faire moi-même aurait impliqué un biais bien trop grand pour que je puisse prouver quoi que ce soit de manière valide. 

Il se fait que j’ai eu une opportunité en or de tester ma théorie tout récemment. Et vous savez comment ça va avec les jeux propulsés par l’Apocalypse: il faut saisir les opportunités en or pour frapper aussi fort qu’on veut. Je vais donc frapper. 

Le contexte

Je lance une campagne de partie au format résolument court (30-60 min. max.) sous Dungeon World avec deux joueurs. L’idée est de jouer une à deux fois par semaine, mais de ne pas « traîner ». Bref, tirer la substantifique moelle de DW. Comme j’avais plusieurs candidats, je leur ai proposé de m’écrire une concept de perso en 2-3 lignes. 

Et je les ai départagés en mesurant le Potentiel Ludique de leur proposition. 

Le truc, c’est que comme ils n’étaient pas conscients de ce fait, les résultats ne sont pas biaisés. Car il ne fait aucun doute qu’un candidat qui savait pour la méthode de partage aurait ciselé encore plus son texte et y aurait fait rentrer un maximum d’éléments. (En tout cas dans ma tête, mais c’est une autre expérience qui pourrait/devrait le montrer.) 

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Comment j’ai fait?

J’ai cherché dans les quatre textes soumis des accroches, des motivations, des éléments d’Univers que je pourrais facilement réintégrer dans un Canevas. On va appeler ça des accroches narratives. Ensuite j’ai calculé deux métriques différentes: nombre de mots par accroche narrative; nombre de signes par accroche narrative. 

Allez, hop, voici les textes (je vous ai mis les accroches narratives en gras – les fôtes ne sont pas de moi, et j’en ai même corrigé quelques unes qui piquaient aux yeux): 

Texte 1

Shéré, princesse-lionne des savanes barbares. Exilée par les siens pour être tombée amoureuse d'un voyageur* qui la laissa tomber dès qu'elle lui ouvrit les portes de la spire des cieux. En quête de rédemption ou de vengeance, selon le vouloir des esprits-totems. *Un certain Braz d'Ignéville. 

Texte 2

Morgennes est un insurgé de la Terre des Brumes, il a participé à l’insurrection du Prince Argail contre son oncle le Roi Malboth. Défait à la bataille de la Pleine des Tombes par l'acier et la magie noir le Prince tomba et Morgennes dû fuir la région comme d'autres. Aujourd'hui il arpente les routes, fidèle à ses idéaux le cœur meurtrie par son échec à mener son Roi légitime au pouvoir

Texte 3

Dépositaire d'un héritage mystique, la jeune YyY est fiancée de force à un puissant sorcier en quête d'immortalité. Alors que les préparatifs pour le mariage vont bon train, un mystérieux pouvoir se réveille en elle, et lui révèle quel funeste sort l'attend. A l'aide de ses nouvelles capacités, elle parvient à fuir la cérémonie, avec Perth et Fracah, les deux Vierges de guerre au service de sa famille

Texte 4

La légende raconte que Jorund Stenström, propriétaire fermier d'un domaine sur les Archipels Flottants, aurait pour ancêtre Eldingar, le dieu du tonerre. Alors qu'il se rendait au rassemblement annuel des archipelliens, il a été capturé par un mystérieux groupe. Durant sa captivité, Jorund a saisi quelques brides de conversation: en tant que porteur du sang d'Eldingar, on va le sacrifier pour invoquer un démon du dieu maléfique Odjur. Eldingar a réussi à s'échapper. Mais depuis il est poursuivi par les suivants d'Odjur. Il essaie de se débarrasser d'eux et recherche la vérité sur son ascendance

Les résultats

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La corrélation entre le faible nombre de mots et le Potentiel ludique montre que la concision paie! Maintenant, il faudrait reproduire cet exercice pour confirmer la tendance qui semble se dégager ici. Ce qui est plus intéressant, c’est qu’on dispose d’une métrique assez objective pour mesurer le Potentiel ludique d’un texte, et partant d’un scénario. Je dis bien « assez objective » car la détermination des accroches narratives reste subjective. 

Et je n’ai ni le temps, ni l’esprit, à pondre un protocole de détermination. Cependant, dans le cas d’un scénario, on peut reprendre ces deux métriques en utilisant les éléments de scénario pour lesquels on a une définition pratique.

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Et donc, en calculant le nombre d’éléments par mot et par signe, on pourrait avoir une vision du Potentiel ludique global du scénario. Ensuite, on peut raffiner en regardant combien il y a d’accroches narratives par élément et on nappe le tout en calculant les degrés de liberté (accroches uniques, vs. accroches partagées par deux ou plusieurs éléments).

La suite au prochain épisode comme on dit. Mais c’est pas sûr que ce sera le vrai prochain épisode comme dans le prochain billet de ce blog. En fin, je ne promets rien. Mais tout ça me gratte encore plus qu’en commençant ce billet.

Rontudjûûû!


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Sumerian insults

sumerianlanguage:

The Sumerians were big on putting one another down, and the language has quite a few mean insults! This post will give you some examples of useful Sumerian insults and how to use them, in case you need to tell anyone off in a dead language.

Sumerian insults I’ve found useful include uzuh “unclean person”, igibala “traitor”, and shabarra “bastard”. Less intense ones would be hara “rascal, ruffian”, lutumu “dishonest or unreliable person” or nungarra “foolish, disorderly (adj.)”. Many Sumerian insults refer to a person’s bad activities or behavior, like nibulung “pompous”, ninggu “glutton” and lunamtagga “sinner”.

My personal favorite insults in Sumerian are agaashgi “most awkward person” and sangdu nutuku “idiot”, which literally means “(one) not having a head”.

I don’t know if the Sumerians used any insults regarding specific foreign groups, but lukurra “stranger, enemy” is a pretty common negative word for anyone not Sumerian.

Make sure to know that, to insult just one person, use the subject pronoun zae and the singular verb form -men, as in Zae haramen “you are a rascal”. It’s important to use zae because otherwise it might be interpreted as (ngae) haramen “I am a rascal”, which is not what you mean. To insult several people, just take the noun and add -menzen “you (plural) are”, e.g. Haramenzen “y’all are rascal(s)”. In sentences with the verb “to be” you don’t specifically pluralize nouns (and a video on plural pronouns & verb me forms is coming soon!) Also note that if you’re using an insulting adjective, make sure to attach lu- “person” before it: Zae lunibulungmen “you are (a) pompous (person)”.

Now go forth and insult away!




Joe Banner n’aime pas le bondage

Or donc la récente campagne de financement de Serviteurs de la Reine des Cendres a libéré la traduction de trois scénarios de Joe Banner. Je n’avais pas le coeur à les balancer comme ça sans vous donner quelques clés pour en tirer un maximum.

C’est bien beau d’avoir trois scénarios, mais je fais comment pour les transformer en une campagne mémorable?

Je me suis fait plaisir en prenant le scénario Kheluz-Gund. Mais, je me suis aussi un peu facilité la tâche car c’est un scénario de voyage. Vous pouvez donc l’utiliser comme lien entre les deux autres sous prétexte d’un voyage un peu lointain et d’un mode de transport fort original. Non, monsieur, je n’ai pas troqué la qualité pour la facilité! C’est un excellent scénario, proche de ce que chaque voyage dans un univers de fantasy devrait être: profondément dépaysant, puissamment fantastique et à l’action échevelée. Rien que ça! Vous avez le moyen de transport et vous avez même la bonne raison pour fourrer vos Aventuriers dedans. Car Kheluz-Gund tourne autour d’un McGuffin (un objet que tout le monde veut) qui n’est pas défini et peut donc s’adapter aux besoins de votre campagne et/ou de ce qui a été joué avant. 

Et voici un outil qui vous permet de jouer ces scénarios dans l’ordre que vous voulez, résumé dans un petit diagramme que je détaille ci-dessous en partant d’un des trois scénarios.

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À partir du Monolithe de Quartz

Si le Titan se réveille, vous pouvez facilement orienter les Aventuriers vers le Kheluz-Gund et ses clous telluriques. Si cette magie est capable de rendre des élémentaires de pierre dociles, ça devrait fonctionner avec le Titan. Ou servir de base à une arme capable d’en venir à bout. De même, le filin spirituel de L’Étrange Appareillage pourrait être un bon moyen de neutraliser les armes de silex et siphonner le pouvoir du Titan pour le ramener à une puissance accessible pour les Aventuriers. 

Si le Titan n’est pas réveillé, la fouille de la tente de Magnus Nielsen (voir Épilogue) devrait naturellement orienter les Aventuriers vers Kheluz-Gund (résultats pairs) ou L’Étrange Appareillage (résultats impairs).

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À partir de L’Étrange Appareillage

Si Dirastratus est vaincu, vous pouvez utiliser les révélations données par une des âmes prisonnières du filin spirituel pour orienter les Aventuriers vers le Monolithe de Quartz ou Kheluz-Gund (voir Épilogue). Si Dirastratus n’est pas vaincu, les Aventuriers vont devoir contre-carrer ses plans tels que définis dans les Enjeux du Front Le sorcier libéré. Posez des questions orientées à vos joueurs pour les diriger vers l’un ou l’autre scénario. 

Pourquoi rechignes-tu à faire appel au pouvoir du Monolithe de quartz, pourtant le seul qui puisse contrer Dirastratus/le tuer définitivement à ta connaissance?

Pourquoi seuls des éclats de quartz primordiaux pourraient-ils renvoyer l’âme de Dirastratus/s’opposer à ses plans? 

Pourquoi seul le Dragon des profondeurs pourrait-il venir à bout de Dirastratus/annihiler son grand oeuvre? 

Que protège le Dragon des profondeurs et dont vous avez impérativement besoin pour éliminer Dirastratus/stopper le mal qu’il a mis en branle?

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À partir de Kheluz-Gund

Le plus facile est de déterminer que les Aventuriers empruntent le Kheluz-Gund pour se rendre au pied du Monolithe ou dans une ville proche du manoir de Dirastratus. J’ai ajouté deux destinations explicites (la quatrième et la cinquième) dans Kheluz-Gund. À peine moins facile est de jouer sur le bagage (le McGuffin du scénario). Il vous suffit d’en déterminer la nature en fonction de votre prochaine étape:

  • Le Monolithe de Quartz: un clou tellurique pour contrôler/détruire/affaiblir le Titan;
  • L’Étrange Appareillage: une complexe lentille de diamant primordial nécessaire à l’activation de l’étrange appareillage ou au contrôle du filin spirituel/des âmes qu’il contient.
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Ils sont bien gentils tes scénarios, mais je les inclus comment dans ma campagne?

Facile, il y a plein d’éléments qui peuvent être facilement liés à n’importe quelle campagne ou Front! Les voici par le menu:

  • un convoi d’élémentaires (Kheluz-Gund): le moyen le plus rapide pour franchir un obstacle (montagne, océan, chaîne de volcans, etc.);
  • un Dragon des Profondeurs (Kheluz-Gund): je ne vous ferai pas l’injure de vous dire comment l’intégrer;
  • un mercenaire renommé (Kheluz-Gund): vous lui courrez après ou vous en avez besoin?;
  • les clous telluriques (Kheluz-Gund): pour établir un lien télépathique ou réduire quelqu’un ou quelque chose en esclavage;
  • une kyrielle d’experts rassemblés en un seul lieu (Le Monolithe de Quartz): on a toujours besoin de plus instruit que soit;
  • un matériau unique au monde (Le Monolithe de Quartz): du quartz primordial, ma bonne dame, rien que ça!;
  • des armes « vivantes » (Le Monolithe de Quartz): et capable de trancher le métal avec ça!;
  • un Titan assoupi (Le Monolithe de Quartz): tout dépend de son humeur au réveil, mais vos Aventuriers savent y faire, non?;
  • un manoir abandonné (L’Étrange Appareillage): rempli de mystères magiques et à la bibliothèque bien fournie;
  • un étrange appareil (L’Étrange Appareillagege): son esprit est actif et qui sait quels secrets il détient;
  • un filin spirituel (L’Étrange Appareillage): qui attire et emprisonne les âmes. Ne me dites pas que vous ne saurez rien en faire;
  • une cabale de liches (L’Étrange Appareillage): un grand classique mais avec une approche originale;
  • une kyrielle de PnJ brossés en deux traits et faciles à recycler (surtout Kheluz-Gund et L’Étrange Appareillage).

Je viens de terminer les Serviteurs de la Reine des Cendres, comment j’embraie?

Kheluz-Gund est un choix évident et facile avec son convoi et son McGuffin. D’autre part, Thorde Crân pourrait être un descendant de Dirastratus (L’Étrange Appareillage) qui comptait bien sur celui-ci pour le libérer en appliquant l’Oeil de Gildarthe sur ledit appareillage. Si les joueurs l’ont vaincu, le fantôme du nécromant peut leur mener la vie dure. Sinon, Thorde Crân pourrait partir libérer son aïeul qui devrait pouvoir l’aider à assouvir son amour brûlant. 

Ou encore, Thorde Crân serait l’élève d’un scientifique ou d’un ecclésiaste qui a rejoint Camp aux quartz (Le Monolithe de Quartz), d’où proviendrait l’Oeil de Gildarthe. Et il pourrait y avoir un lien entre Gildarthe et le Titan. Ou le réveil du Cor de Hvitr pourrait avoir « secoué » le Titan, ou encore provoqué un flash lumineux dans le Monolithe, voire son illumination.

Deux Fronts pour les lier tous

Je vous propose deux Fronts pour vous lancer dans ces trois scénarios et les lier ensemble. Le premier est un Front que les joueurs subissent plus qu’autre chose. Le rôle du Meneur est de s’assurer que la protagoniste principale mène les Aventuriers en bateau jusqu’à ce qu’ils reprennent la main dans l’acte final. Le second leur demande d’être beaucoup plus actifs et leur laisse une totale liberté de choix quant à l’ordre dans lequel jouer les scénarios.

Et puis, non. Je les garde pour le pdf final.


dungeon world Designed by Acritarche scénario Serviteurs de la Reine des Cendres




Lancer ou relancer un bac-à-sable

Un article de Zack Smith datant de 2010 et certaines réactions sur Casus No ont provoqué un déclic chez moi. Mais avant d’en parler, je remets le contexte là où il faut, c’est-à-dire à sa place. 

Or donc Zack a écrit un article qui dit en gros (je résume tellement fort que vous serez obligés d’aller le lire): 

Dans un sandbox, les héros (genre les bons, gentils, loyaux et tout) n’ont pas de motivation propre pour partir à l’aventure puisque leur rôle de vigilantes les cantonne là où on a besoin de leur protection. Donc, en règle générale (et celle-là les joueurs ne l’enfreignent que trop rarement) ils attendent la prochaine mission que le Meneur a prévu pour eux en se tournant les pouces. Alors que les personnages sans foi ni/ou loi (rogues) s’organisent naturellement pour aller piller/nettoyer/mourir dans (biffer la mention inutile) le prochain donjon/antre/ruine sur la carte (idem). 

Il se fait que je ne suis pas d’accord, que ça n’a pas beaucoup d’importance et que vous n’en avez probablement pas grand chose à f… Toujours est-il que je considère que, de même que les rogues se fient aux rumeurs pour localiser le prochain donjon/antre/ruine sur la carte, les vigilantes peuvent se fier aux rumeurs pour localiser le prochain méchant/antre du mal/monstre à purger. Par contre, je suis d’accord avec le fond de l’article qui dit (toujours en gros et pour vous allécher) qu’un bac-à-sable sera d’autant plus jouissif et facile à maîtriser que les aventuriers (et par conséquent les joueurs) ont un agenda propre et bien touffu.

C’est bien beau tout ça, mais je viens de créer un beau bac-à-sable pour mes joueurs et ils ont créé leur bande de bras cassés, maintenant faudrait voir à faire monter les oeufs en neige. Allez-vous me dire. 

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Tel que je le vois, le problème de fond est de remplir l’agenda des aventuriers (et donc des joueurs, vous connaissez la musique). Quand votre bac-à-sable dure depuis un petit temps, normalement la pompe à objectifs est bien amorcée. C’est en début de bac-à-sable que ça pompe à vide (ou plutôt pas du tout). Le Meneur n’a encore rien posé ou presque sur l’Univers du bac-à-sable (sensu Le Grumph mod. Acritarche), les joueurs n’ont pas encore intégré la personnalité, les envies et les besoins de leur perso, etc. Bref, sans un bon coup de pied, ça patine comme Bambi sur une marre gelée. 

Rappelez-vous, dans mes articles sur les bac-à-sable, je disais: 

Le Meneur peut participer activement à la création de la dynamique du bac-à-sable en utilisant à fond son Canevas selon un quadruple principe:

> établir des menaces claires;
> créer un monde dynamique;
> intégrer les objectifs des joueurs au Canevas;
> lier les éléments du Canevas aux Aventuriers.

Ce qui nous préoccupe ici, c’est bien d’intégrer les objectifs des personnages/joueurs au Canevas puisque lors de la première partie du bac-à-sable (enfin, si vous jouez en mode OSR hard core), vous n’avez pas encore posé de menace claire, vous n’avez pas encore pu lancer la dynamique du monde, ni lier des éléments inexistants d’un Canevas vide aux Aventuriers.

Et donc, je me suis dit, que dans le contexte d’un bac-à-sable 100 % libre de type West Marches à la Ben Robbins ou Freebooters on the Frontier (la vf arrive, si, si!), ce serait sympa d’avoir une petite aide de jeu pour tirer 2-3 objectifs rapides. Histoire d’amorcer la pompe. En avant, donc.

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On s’en fait quelques uns? 

Nettoyer la Faille du Soleil Noir pour la Confrérie du Crépuscule.
Purger la Forteresse des Tempêtes du Colosse des Brasiers.
Ramener le Sceptre du Crépuscule de la Nécropole des Glaces.
Purger le Pic des Reflets du Fléau des Tempêtes.
Tuer le Saurien des Origines de la Gorge d’Obsidienne.

Pour les ceusses qui se demandent la différence que je fais entre purger et tuer, voici. Tuer, c’est aussi direct et évident que ça en a l’air. Purger, ça veut dire aussi qu’il faut débarrasser le lieu de l’influence du PnJ/Monstre ou de ce qui l’a créé. Faut donc chercher un peu plus.

Et comme je suis plutôt sympa dans mon genre, je vous ai fait un petit générateur sous Open Office et je vous mets le lien vers l’illustration ci-dessus.

C’est bien d’avoir des objectifs, mais c’est pas tout! Maintenant, la partie fun commence. Car vous allez poser deux ou trois questions orientées aux Joueurs pour étoffer leur agenda. Prenons la première entrée par exemple. Deux questions qui me viennent immédiatement :  

Pourquoi la Confrérie du Crépuscule est-elle entrée en contact avec vous par l’intermédiaire d’une relation interlope commune?
Quelle rumeur sur la Faille du Soleil Noir préféreriez-vous se révéler fausse? 

Je pense qu’une fois qu’ils auront répondu à ces deux questions, et que vous demanderez pourquoi le personnage nourrit cet objectif, il(s) vous fournira(ont) une motivation en or pour les quelques parties qui suivront. Ah, un petit conseil, tout de même: prenez toute réponse du style « parce qu’il y a un gros trésor à la clé » de manière très très littérale. Et rigolez sous cape en susurrant: “Bien sûr, bien sûr!”.

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Bon, vous allez me dire qu’avec dix petites articulations de motivations pour cent mille combinaisons, on ne va pas aller loin (d’ailleurs, enlevez la couleur locale et il ne reste que 1000 combinaisons). En même temps, si vous y avez recours plus de deux ou trois fois, c’est que soit vos joueurs sont peu coopératifs (ils sont légions mais ils se cachent), soit votre bac-à-sable s’éternise vraiment. Dans un cas comme dans l’autre, un peu de répétition ou de quiproquo ne pourront que vous faire du bien. Sinon, il vous reste toujours la solution de vous retrousser les manches et de passer ces listes au d12 (248832 combinaisons, 1728 sans couleur locale), d20 (3200000 combinaisons, 8000 sans couleur locale), ou plus si affinité.


jdr meneur (jdr) sandbox outils

Dawn of Procyon

I was a bit surprised when Mark Healy asked me to review his latest book. I’ve known Mark for two years, and only indirectly indeed, through his work both music-related and written. However I really enjoy both sides of his work and especially so when they collide and go transmedia.

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To say I like Mark’s works would be an understatement. I love his work! I even confess I’m kind of a fan. Both his music and his writings are full of good sci-fi stuff (which naturally attracts me) and humanity (which makes me love them). That’s why I was delighted to be able to read his work before it goes public and to give my opinion on it.

Dawn of Procyon evolves around Cait and Landry. They live in a far away outpost designed to protect Earth from an invasion. Both characters will see their lives messed up and their roots shattered. And this is good news! Because a great sci-fi book should always be more about people than about exoticism or technology. The shifting between Cait story arc and Landry’s allows for many cliffhangers that keep the reader asking for more.

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Dawn of Procyon is kind of a mix between The Martian and Enemy Mine. Many aspects of both works are also found in the novel, theme-wise and content-wise. I could go a long way into that but I would have to spoil you Mark’s novel. So I’ll let you uncover these by yourself. But I can tell you that Dawn of Procyon don’t have the cheap aspects of Enemy Mine although Mark has not exploded the special effect budget in his book.

All in all, Dawn of Procyon is such a good read because it delves into the nature of human beings and how they inefficiently strive to stay the same though inescapable changes burst in their lives. And we all can relate to that. Moreover, it takes place in an intelligent and believable sci-fi setting. Largely enough to win my vote. Oh, I nearly forgot, the aliens are very similar to the P'täär I designed for my amateur sci-fi roleplaying game. You rock, Mark!

I received a copy of Dawn of Procyon from Future House Publishing in exchange for an honest review.

Read more (honest) reviews on Goodreads: https://www.goodreads.com/book/show/29860848-dawn-of-procyon

You can try to win a copy over there : http://www.futurehousepublishing.com/2016/04/14/mark-r-healys-dawn-procyon/


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