Chapter Text
« Est-ce ainsi que je vais mourir ? » pensa Sara.
Attachée au lit, elle était incapable de bouger. Elle avait laissé Joe utiliser la clé sur lui-même et se libérer, souhaitant le savoir en sécurité. Joe avait ensuite fait tout son possible pour la libérer : il avait remarqué des chiffres écrits sur le mur, et en avait déduit que c’était le code du coffre-fort présent dans la salle. Il avait réussi à l’ouvrir mais…il était vide. Et à présent, alors qu’il ne restait que quelques secondes avant la fin de la Première Epreuve, il frottait désespérément la clé contre le grattoir accroché au plafond sans que Sara ne sache pourquoi.
« -Joe, sanglota-t-elle, je voulais te dire…
-J’arrive Sara ! »
Il courut vers elle, et inséra la clé – le bout n’avait-il pas été cassé ? Et la clé n’était-elle pas rouge ? Elle avait l’impression qu’elle était devenue verte – et…ça fonctionna : Sara fut libérée. Rapidement, elle sauta du lit…juste à temps. Le lit commença à se replier sur lui-même, et Sara réalisa ce qui lui serait arrivée si elle était restée dessus.
« J’aurais été…broyée... »
« -Sara, est-ce que ça va ? lui demanda Joe.
-O-Oui, répondit-elle.
-La porte s’est ouverte, allons-y !
-Attends ! Bon sang, Joe ! »
Mais elle le suivit, et ils sortirent de la salle…pour tomber dans l’obscurité. Ils étaient sans doute dans une sorte de couloir, mais il n’était pas éclairé et ils étaient dans le noir. Impossible d’y voir quoi que ce soit.
« -Je ne vois rien, se plaignit Joe.
-Ne lâche pas ma main Joe, lui demanda Sara, et guidons-nous en touchant le mur.
-Bonne idée. »
Ils se déplacèrent vers la gauche, mais rencontrèrent rapidement un mur.
« -À gauche c’est une impasse…donc on dirait qu’on doit aller vers la droite. Sérieusement Sara, restons ensemble.
-Oui… »
Ils avancèrent pendant un long moment, dans le noir, sans avoir la moindre idée d’où ils allaient. Peu importe combien de pas ils faisaient, jamais une lumière n’apparaissait à l’horizon.
« Si ça se trouve » pensa Sara, « nous n’avançons même pas. Un couloir ne peut pas être aussi long, n’est-ce pas ? »
Elle eût alors une idée.
« -Joe, ce téléphone que tu as utilisé plus tôt…ne pourrais-tu pas l’allumer pour faire de la lumière ?
-Bonne idée Sara ! T’es maline !
-Tu l’as avec toi ?
-Ah…je l’ai laissé là-bas…
-…Je suppose qu’on peut abandonner cette idée alors.
-Hum…qu’est-ce qui pourrait faire de la lumière… ? »
Les deux amis commencèrent à tâter le mur en espérant trouver un interrupteur, quand soudainement, le sol se déroba sous leurs pieds.
« -Who…Whoaaa ?! cria Joa.
-AAAHHHHH ! » hurla Sara.
Et puis ce fut le noir.
« -Eh ! Lève-toi ! »
Une voix grave, mais douce sortit Sara de son sommeil. Elle entrouvrit les yeux : un homme blond de grande taille se tenait devant elle.
« -Bonjouuurrr ? Vous ne pouvez pas rester assise et tétanisée comme ça pour toujours, mademoiselle.
-Hein ? Où suis-je… ?
-Eh bien ça, je ne le sais pas plus que toi.
-Ah… »
La situation lui revint en mémoire : Joe et elle avaient été kidnappés, ils avaient été soumis à une épreuve au cours de laquelle, sans Joe, elle aurait perdu la vie, et puis…ils étaient tombés et elle avait cru que c’était la fin.
« Je suis en vie. » réalisa-t-elle. « Je ne suis même pas blessée. »
Soulagé, elle commença à faire attention à son entourage : elle se trouvait dans une immense salle bleue, et elle et l’homme blond n’y étaient pas seuls.
« -Qui êtes-vous tous bordel ?! s’énerva une femme punk. Où est-ce que je suis ?!
-Comme si on en avait la moindre idée nous-mêmes ! rétorqua un géant avec un drôle d’accent. Calmez-vous, madame.
-Il n’y a personne ici qui puisse nous expliquer ce qui se passe ? demanda une femme aux cheveux roses ayant l’air paniquée.
-Just, qu’est-ce qui se passe ? rajouta un homme portant un tablier. Comme c’est troublant… »
Il y avait aussi deux collégiennes – du moins Sara le supposait à leur uniforme, même si elles ne portaient pas le même – dont une était assise par terre et semblait terrifiée, un enfant habillé dans un costume de chat, un homme aux cheveux verts portant une écharpe rouge un vieil homme en costume qui semblait menaçant, et…
« Joe. Lui aussi va bien. Mais…qu’est-ce qui se passe ici ? »
En la comptant elle, ils étaient douze au total. Sara décida d’aller voir Joe, mais avant qu’elle ne puisse faire un pas : la femme punk cria de nouveau :
« -Aaahh ! On a été enlevés ! Par des enfoirés complètement fous !
-Sois silencieuse ! cria l’enfant étrange. Ne crie pas dans mon oreille !
-Tu dis quoi le sale gosse ?!
-Euh, intervint l’homme aux cheveux verts, je ne voudrais pas m’immiscer, mais ce n’est qu’un enfant, vous ne devriez pas lui parler comme ça…
-Toi, blêmit la femme punk en le voyant. Tu…dégage ! »
À la surprise de tous, elle poussa et, sans la moindre résistance, il tomba au sol.
« -Est-ce que ça va monsieur tête d’algues ?! s’exclama l’enfant.
-Je…vais bien, ne t’en fais pas, le rassura l’homme aux cheveux verts alors qu’il tentait de se relever.
-Hey ! cria à nouveau le géant. Mais tu ne vas pas bien ?! Calme-toi enfin !
-Grr, réagit la femme punk. Laissez tomber ! »
Elle ne semblait pas vraiment désolée, mais elle recula et se calma, laissant le calme revenir dans le groupe. Après un instant d’hésitation, Sara retourna voir Joe comme elle l’avait prévu. Elle passa à côté des deux collégiennes : celle qui était assise était blonde, et l’autre, qui était brune, semblait tenter de la réconforter.
« -Tu ne vas pas rester assise, si ? »
Mais elle n’obtint pas de réponses. Sara n’entendit par le reste de la conversation alors qu’elle rejoignait enfin Joe. Il écoutait l’homme blond, qui semblait s’être mis face au groupe pour bien se faire entendre.
« -Maintenant concentrons-nous une seconde, dit-il. Nous devons déterminer ce que chacun de nous sait.
-C’est bien beau tout ça, rétorqua la fille portant des bretelles, mais je n’ai aucune idée de ce qu’est cet endroit !
-J’ai vécu une terrible expérience plus tôt, renchérit l’homme en costume, donc je ne peux pas rester calme…Mwahaha. »
« Ils semblent tous confus. » pensa Sara avant de se reconcentrer sur Joe…et de remarquer quelque chose : « Il porte un collier ?! »
Et il n’était pas le seul : tout le monde autour d’elle semblait porter un de ces étranges colliers également. Elle ne pouvait pas confirmer que c’était le cas pour l’homme aux cheveux verts et pour l’enfant étrange, respectivement à cause de l’écharpe et du costume de chat, mais elle se doutait qu’ils devaient aussi en avoir un. Prise par un mauvais pressentiment, Sara toucha son propre cou…et sentit quelque chose.
« C’est…un collier ? Je…je ne peux pas l’enlever ! »
Sara se douta que c’était l’œuvre des kidnappeurs…elle avait vraiment besoin de parler à Joe.
« Pourquoi est-ce qu’il n’essaie pas de me parler ? » pensa-t-elle avec agacement. « Il a bien dû remarquer que je m’étais réveillée non ? »
Elle ressentait une forte envie de le frapper pour bien lui faire remarquer sa présence, mais la présence de tant de monde lui fit peur que son geste soit mal interprété et elle se contenta de l’appeler.
« -Joe ! »
Joe la regarda avec…surprise ? Perplexité ?
« -Ouf…reprit-elle, donc tu vas bien.
-…Qui es-tu ? lui demanda-t-il, la choquant.
-Qu…Qu’est-ce que tu dis ?! Je suis Sara ! Tu ne peux pas avoir oublié le visage de ton amie ! »
Un frisson saisit la lycéenne : se pouvait-il que Joe, son meilleur ami…l’ait vraiment oubliée ? Dans une situation comme celle-ci ? L’idée qu’elle ne puisse pas compter sur lui la fit trembler…jusqu’à ce qu’il dise, avec un sourire fier :
« -Serait-il possible que tu sois la Sara qui ne sait pas nager ? »
Sara mit cinq secondes à comprendre qu’il s’était bien moqué d’elle. Fâchée et rassurée en même temps, elle lui cria :
« -J-Joe ! Ce n’est pas le moment pour faire des blagues !
-Désolé, c’est ma faute, haha ! s’excusa Joe sur un ton absolument pas désolé.
-Hmm, les interrompit l’homme blond. Joe et Sara, hein…Vous deux êtes amis ?
-Hein… ? réagit Sara, ne comprenant pas ce qu’il leur voulait. O…oui, nous sommes amis.
-Merci pour ton intervention. Joe ici ne disait pas un mot avant, alors…il devait être sur ses gardes, il ne voulait même pas me dire son nom. »
Joe sembla énervé qu’il dise ça, et Sara se demanda si Joe était sur ses gardes, et peut-être qu’il avait voulu cacher qu’ils se connaissaient, ou si c’était juste cet homme qui lui était antipathique.
« -Très bien, reprit le blond, tout le monde, écoutez-moi. Je parie que nous pensons tous à la même chose. « Quel est cet endroit ? Pourquoi ai-je été amené ici ? » Et tout ce que vous savez, c’est qui vous êtes.
-Je me demande où vous voulez en venir, le coupa l’homme en costume.
-Et si nous nous présentions ? Au moins nous serions moins suspicieux les uns envers les autres je pense.
-Des présentations hein ? réagit l’homme portant un tablier.
-Ce n’est pas comme si nous pouvions faire autre chose, ajouta le blond. N’ai-je pas raison, Sara ?
-Euh, réagit la jeune fille, mal à l’aise. Tu me le demandes à moi ? Je suppose que…c’est vrai que j’aimerais clarifier notre situation.
-…Vous voyez ? Les personnes calmes savent quoi dire. Je pense que nous devrions nous connaître un peu plus les uns les autres.
-Pourquoi miaou ? intervint l’enfant chat. Maman m’a dit de ne pas donner d’informations personnelles aux gens étranges que je ne connais pas, wouf !
-Stupéfiant ! intervint l’homme en costume. Un enfant qui fait ce que ses parents lui apprennent ! Enfin, dans ce cas il s’agit d’une urgence…hum, donc nous devons prouver que nous les adultes ne sommes pas louches.
-Whaouh, réagit l’enfant, c’est super louche.
-Nous n’y pouvons rien, réagit l’homme au tablier. Bien, par où devrions-nous commencer ?
-Eh bien, reprit l’homme blond, vous pouvez vous présenter simplement. Dites simplement votre nom et votre occupation, et n’en dites plus que si vous vous sentez à l’aise pour le faire. Ceux qui sont le plus sur leur garde pourront parler après, et que ceux qui se sont prêts à parler en premier lèvent la main.
-Je m’appelle Kazumi Mishima, annonça l’homme en costume en levant sa main, et je suis professeur dans un lycée.
-Miaou ! Quelqu’un comme toi peut enseigner ? Les chiens vont dominer le monde, wouf !
-Bouh ! réagit puérilement Mishima.
-Je m’appelle Hinako Mishuku, déclara la jeune brune, et je suis collégienne. J’ai été enlevée alors que je rentrais chez moi…je n’ai pas eu le temps de voir le visage de mon kidnappeur. Je n’ai franchement rien d’autre à ajouter.
-Collégienne, murmura Sara, comme je l’avais deviné…
-Y a-t-il un problème ? lui demanda Hinako.
-Hein ? Non, rien !
-…Je suis Kai Satou, annonça avec un peu de réticence dans sa voix l’homme au tablier. Je suis un homme au foyer sans grande distinction. »
Un silence s’installa, puis l’homme aux cheveux verts prit la parole, mais pas pour se présenter :
« -Euh, je pensais que quelqu’un allait poser la question, et je m’inquiète sans doute pour rien, mais…c’est quoi ces trucs derrière toi ?
-C’est une poêle à frire…et une louche…et une spatule.
-Des outils pour cuisiner hein…ça me rassure.
-Tu sais qu’il pourrait s’en servir comme d’une arme n’est-ce pas ? s’adressa Hinako à l’homme aux cheveux verts.
-Ne-ne dis pas ça, ça m’effraie ! »
Il avait beau dire ça, Sara n’avait pas l’impression que cet homme était réellement effrayé…en fait, en faisant attention à lui, elle avait l’impression qu’il y avait quelque chose de sensiblement différent en lui par rapport aux autres, mais elle n’aurait pas su dire quoi. Mais elle n’eut pas le temps d’y réfléchir car les présentations continuèrent.
« -Q-taro Burgerberg ! se présenta le géant aux cheveux rouges. Je suis un joueur de baseball ! Remplaçant, cependant.
-Woow, réagit la fille en bretelles, c’est pourquoi tu es si grand.
-1 mètre 93 ! se vanta Q-taro. Et fort comme un bœuf, tu entends ? »
Puis…le silence. Plus personne ne semblait vouloir se présenter. Surprenant Joe, Sara leva la main.
« -Oui Sara ? demanda le blond. Tu veux rajouter quelque chose pour te présenter ?
-Non, répondit Sara en pointant son doigt sur le blond, mais je suis curieuse de savoir pourquoi celui qui a proposé qu’on se présente les uns aux autres ne s’est pas présenté lui-même.
-Hein ? réagit-il avec un petit sourire. Ne me suis-je pas présenté ? Mon nom est Keiji Shinogi. Je suis un policier. »
Pour le coup, cela attira l’attention de tout le monde.
« -Hein ?! s’écria Joe. La police ?
-Tu as bien compris. Donc n’embête pas ton ami le policier…je plaisante, je ne suis pas ce genre de flic.
-Mais…pourquoi ne l’as-tu pas mentionné plutôt ?! mentionna Joe.
-Peut-être parce que…commença l’homme aux cheveux verts.
-Tu as quelque chose à dire ? lui demanda Keiji.
-…Non, rien.
-…Je vois. Eh bien, pour répondre à la question de Joe, j’ai été enlevé alors que j’étais en plein milieu d’une enquête. C’était dur de trouver une occasion pour le dire.
-Je n’aurais pas dû être sur mes gardes, s’en voulut Joe. Mince !
-Je me demande si nous avons été capturés par ce groupe criminel…reprit Keiji.
-Un groupe criminel ? réagit Sara.
-Un groupe de petits voleurs, explicita Keiji. Je doute qu’ils soient reliés à tout ça, honnêtement.
-Et aucun de tes collègues de travail n’est ici ? demanda Sara.
-Non, aucun. »
« Donc tout le monde n’est pas arrivé ici par paire… » en conclut Sara.
« -Sara et moi sommes dans la même classe au lycée, décida de se présenter Joe. Sara était harcelée par un stalker, donc aujourd’hui je suis rentré des cours avec elle. Il y a eu un incident chez elle, donc j’ai appelé la police, mais…j’ai entendu Sara crier. J’ai couru vers sa chambre en haut des escaliers. Et il y avait ce fichu stalker ! »
« Hein ?! » réagit Sara.
Elle s’était évanouie avant de voir le visage de celui qui l’avait assommé, Joe avait-il pu voir à quoi ressemblaient leurs kidnappeurs ? Souhaitant une explication, elle s’écria :
« -C’est la première fois que j’entends ça !
-Ah oui, rit Joe, je n’ai pas eu l’occasion de le dire avant. Et donc, j’ai rassemblé tout mon courage pour frapper ce gars. Mais bien sûr, je ne sais pas me battre, donc…puisque je ne me souviens pas avoir gagné et que Sara et moi nous retrouvons ici, je suppose que j’ai perdu. Mais c’est pourquoi…je sais que le stalker est le coupable de notre enlèvement !
-…Intéressant, réagit Keiji. Continue.
-Désolé, répondit Joe, mais c’est tout ce que j’ai. Comme je me suis évanoui…Mais quand on y réfléchit, enlever autant de personnes et les réunir ici, ce n’est pas quelque chose qu’un simple stalker aurait pu faire seul. C’est un crime organisé, n’est-ce pas monsieur le policier ?
-…C’est possible, répondit Keiji sans sembler convaincu.
-…Je me demande s’il y en a un parmi nous, reprit Joe. Un collaborateur avec les kidnappeurs, jouant les innocents pour s’infiltrer parmi nous.
-Hein ?! »
Sara comprit alors que son hypothèse précédente était correcte : Joe avait fait semblant de ne pas la connaître car il soupçonnait qu’il y ait un traître parmi eux, et il ne voulait pas donner la moindre information sur lui ou sur elle. Il avait abandonné son simulacre lorsqu’elle a clairement montré qu’elle le connaissait, mais il était resté sur ses gardes…car il soupçonnait toujours la présence d’un espion dans le groupe.
« -AHAHAHAH ! éclata de rire Keiji.
-Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Joe, vexé. Tu veux rire ? Tu ne peux pas dire qu’il n’y a pas…
-Tu es vraiment très drôle, continua de rire Keiji.
-Je hais ce type… » marmonna Joe.
Malgré leurs pitreries, Sara continua de réfléchir à la possibilité que quelqu’un parmi eux collabore avec les kidnappeurs.
« Il pourrait bien y avoir quelqu’un comme ça dans notre groupe après tout… »
« -Excusez-moi, intervint l’homme aux cheveux verts. Je ne me suis pas encore présenté…et je ne suis pas sûr d’être prêt à le faire, donc c’est peut-être hypocrite de ma part de demander une chose pareille…mais est-ce que ceux qui se sont présentés peuvent en dire un peu plus sur eux-mêmes ?
-Hein ? Réagis Joe. Que veux-tu dire ? J’ai déjà dit tout ce que je savais.
-Je ne parlais pas forcément de t… de vous, Joe, mais par exemple…Kai, Hinako et Kazumi se sont à peine exprimés…cela ne me met pas vraiment en confiance, et comme je ne suis pas le seul à ne pas vouloir me présenter, je suppose que c’est la même chose pour les autres. Je me dis que si nous en savons plus sur eux, alors nous pourrions être plus à l’aise pour nous présenter ?
-Hum, y réfléchit Keiji, oui tu as raison. Dans ce cas, Sara…
-Super ! s’enthousiasma l’homme aux cheveux verts. Pouvez-vous donc nous en dire plus sur vous, monsieur Kai Satou ?
-Hum, mon meilleur repas est les œufs Benedict.
-Un chef hein ? réagit Q-taro.
-Non, le corrigea Kai sur un ton monotone, un homme au foyer.
-Aucune différence pour moi si vous faites tous les deux de la bonne nourriture. »
L’homme aux cheveux verts semblait amusé, Kai lui était plutôt pris au dépourvu. Sara elle…avait l’étrange impression de le connaître.
« Mais ça doit être mon imagination. Je m’en souviendrais si jamais rencontré quelqu’un d’aussi bizarre. »
« -Eh Sara ! la prit Keiji à part. Voudrais-tu bien essayer de faire parler les autres un peu plus ?
-Hein ? Pourquoi moi ?
-Eh bien, les autres ont l’air de se méfier un peu de moi…ils seront sans doute plus bavards si c’est une charmante jeune fille comme toi qui vient leur parler. »
Sara n’était pas sûre de vraiment comprendre cette logique, mais si elle pouvait faire avancer les choses…elle acquiesça à la demande de Keiji d’un signe de tête et se dirigea vers Hinako.
« -Euh, du coup, Hinako…
-Quoi ?
-Eh bien, as-tu quelque chose d’autre à dire ?
-J’ai donné mon nom et mon occupation. Je ne suis pas disposée à dire quelque chose de plus. »
Sara grimaça : elle se voyait mal insister et forcer une enfant à parler, donc elle abandonna. Elle décida d’aller voir la petite collégienne blonde, car son mutisme l’inquiétait et la petite fille semblait vraiment effrayée.
« -Est-ce…tu vas bien ? » lui demanda-t-elle doucement.
La petite fille ne lui répondit pas : elle laissa échapper des onomatopées et semblait encore plus effrayée. Sara se dit qu’elle n’avait vraiment pas de chance avec les collégiennes.
« -N’ais pas peur, tenta Sara de la rassurer, je ne te ferai rien de mal… »
Pour la réconforter, Sara posa sa main sur son dos. Cela fonctionna : la petite fille cesse progressivement de trembler, et murmura :
« -M…Merci beaucoup… »
« On dirait qu’elle s’est un peu calmée » pensa Sara avec satisfaction. Sara décida de revenir lui parler plus tard, lorsqu’elle serait plus calme, et elle rejoint Q-taro qui parlait avec l’homme aux cheveux verts.
« -Dis-moi Q-taro, l’interrogeait ce dernier, tu as un drôle d’accent. Tu viens d’un autre pays ?
-Aucune idée, répondit joyeusement Q-taro. Je n’ai aucun indice sur là où je suis né. Mes parents m’ont laissé à l’orphelinat ‘vant que je ne puisse me souvenir ‘eux. Cependant, je suis de nationalité japonaise. Mon dialecte…c’est un mélange. Il y avait beaucoup d’enfants d’origines différentes là où j’ai grandi, dans mon accent est un mélange de tous ceux avec qui j’ai parlé. Mais ça se travaille !
-Tu as dit être baseballeur plus tôt, se souvint Sara en essayant d’entrer dans la conversation. Tu, euh, joue à quelle position ?
-J’ suis un lanceur, se vanta Q-taro. Je suis aussi confiant en mes capacités de batteur, et j’ai été assez chanceux pour aller jusqu’à la Ligue Centrale !
-C’est génial ! s’enthousiasma l’homme aux cheveux verts ! Cela veut dire que tu es super doué pour lancer la balle et la frapper avec une batte !
-Un peu qu’j’le suis ! »
« Il semble très fier de sa force » nota Sara.
« -J’tais très heureux après mon r’tour dans l’équipe, j’vais dû arrêter de jouer pendant un long moment, donc j’suis allé boire, et je ne me rappelle plus de rien. Et quand j’me réveille, je suis ici ‘vec un collier autour du cou. Comme si j’étais un chien ! C’est nul ! J’arrive pas à l’enlever ! »
« Même sa force ne suffit pas à enlever ces colliers » constata Sara, dépitée.
Le regard de Sara se posa sur le professeur Mishima. Il était le seul parmi ceux à avoir pris la parole à ne pas encore avoir été interrogé, mais Sara n’avait aucune envie de parler à un type aussi louche. Elle balaya les autres du regard, espérant que quelqu’un voudrait prendre la parole, mais personne ne semblait plus en confiance malgré les présentations de Keiji, Joe, Kai et Q-taro.
« Eh bien, quand il faut y aller… »
« -Et donc, professeur Mishima, vous avez dit que vous étiez professeur dans un lycée, c’est bien ça ? demanda-t-elle. Qu’enseignez-vous ?
-Eh bien, j’enseigne l’art et le japonais…Mwaha !
-S’il refait un de ces rires insupportables je vais le frapper, murmura la femme punk.
-Un professeur hein ? intervint Keiji. Je n’arrive vraiment pas à l’imaginer.
-En effet, sourit Mishima, j’entends ça souvent.
-Je n’ai aucun droit à dire ça, continua Keiji, mais tu es suspect sous tous les angles.
-Vous n’avez vraiment aucun droit de dire ça ! s’énerva tout d’un coup la fille aux cheveux roses. Excusez-vous auprès du Professeur, et tout de suite !
-Wow ! s’écria Keiji. Qu’est-ce qui vous prend, petite demoiselle ?
-Excusez-la…intervint Mishima. Voyez-vous, elle est une de mes anciennes élèves. S’il vous plait, pardonnez-la…
-C’est un très bon professeur ! insista l’ancienne élève de Mishima. S’il vous plait, ne le jugez pas sur son apparence !
-Oh, réagit Mishima, je suis que mon apparence est louche après tout. Que c’est choquant…
-Eh bien, reprit Keiji, nous n’avons pas grand-chose pour juger les gens à part leur apparence. On peut en dire autant de vous, petite demoiselle.
-Dans ce cas je vais me présenter moi-même ! rétorqua la fille aux cheveux roses. Comme ça, il sera évident qu’il n’y a rien de louche à notre sujet ! »
« Bien » pensa Sara. « Keiji a malgré lui réussi à la faire s’ouvrir à nous…était-ce vraiment malgré lui ? »
En y réfléchissant, Sara trouvait que son choix de parole semblait fait pour l’inciter à se présenter, comme s’il l’avait manipulée…
« -Désolé, désolé » s’excusa Keiji.
« Je dois me tromper. Concentrons-nous sur le professeur Mishima. » se dit Sara.
« -Dites professeur, demanda l’homme aux cheveux verts pendant que Sara avait le dos tourné, avez-vous des souvenirs sur ce qui vous est arrivé avant que vous ne vous réveilliez ici ?
-C’était une joyeuse journée, se remémora Mishima. Mes étudiants voulaient que je leur apprenne la peinture à l’huile, donc j’ai tenu un cours dans mon atelier secret…
-Tout le monde adore le professeur ! renchérit la fille aux cheveux roses.
-J’ai reconduit tout le monde chez eux à la fin de la journée, et lorsque je ramenais ma dernière élève à sa maison, il y avait un point de contrôle de la sécurité et j’ai dû m’arrêter…et il semble qu’après ça, j’ai perdu conscience. Quand je me suis réveillé, la Première Epreuve a commencé. »
« Lui aussi est passé par cette épreuve ?! » pensa Sara.
« -Nous avons cependant réussi à nous en sortir en combinant nos compétences, continua Mishima. Dire que j’ai été sauvé par ma propre élève… »
Mishima n’en dit pas plus, mais Sara était toujours curieuse au sujet de cette histoire de Première Epreuve : elle commençait à supposer qu’ils avaient tous subi une épreuve au cours de laquelle leur vie avait été mise en danger, mais avaient-ils tous eu la même ? Curieuse, elle décida d’essayer d’en savoir plus auprès de l’élève de Mishima.
« -Mon…mon nom est Nao Egokoro, se présenta-t-elle. C’est grâce au professeur Mishima que je peux étudier dans une école d’art aujourd’hui. Le professeur est une bonne personne ! Crois-moi Saraaaaa !
-Je-je n’étais pas spécialement en train d’en douter… se défendit Sara.
-Je vous crois, mademoiselle Nao ! intervint l’homme aux cheveux verts. Au vu de la façon dont vous parlez l’un de l’autre, il est clair que vous tenez profondément l’un à l’autre. Je ne peux pas vous imaginer être de mauvaises personnes, vous avez vraiment l’air d’être quelqu’un de bien.
-Il n’y a que monsieur le policier qui l’a suspecté, voulut ajouter Keiji pour la rassurer, mais…
-Alors s’il vous plait, le coupa Nao, excusez-vous !
-Bien sûr, accepta Keiji. Le professeur Mishima n’a clairement plus rien de louche.
-Donc…donc vous comprenez. Dans ce cas, j’ai…j’ai fait ce que j’avais à faire… »
« Non » se dit Sara, « j’ai encore des questions à lui poser. »
« -Et Nao, reprit-elle, le professeur Mishima a parlé de la Première Epreuve, tu étais avec lui, non ?
-Le Première Epreuve ? se rappela Nao. C’était terrifiant…C’était un jeu où nous étions attachés à des lits…et on devait s’échapper avec juste une clé. »
« C’est exactement ce que Joe et moi avons fait ! » réalisa Sara. « Donc nous serions tous passés par cette épreuve... ? Mais d’après ce qu’a dit Keiji tout à l’heure, nous ne sommes pas tous arrivés par paire…et je suppose que quelqu’un d’autre aurait réagi s’il reconnaissait cette épreuve. »
« -Je…expliqua Nao, le professeur Mishima m’a dit d’utiliser le grattoir sur la clé, et ensuite j’ai pu le libérer. Honnêtement…c’est grâce à lui que j’ai pu rester calme… »
« De la confiance…était-ce un jeu fait pour évaluer la confiance qu’on avait en notre partenaire… ? Pourquoi est-ce que le coupable nous ferait faire ça ? …Est-ce qu’il regardait même ? Est-ce qu’il s’amusait à jouer ainsi avec les vies des gens ?! »
« -Sara, s’inquiéta Nao, est-ce que ça va ? Tu as l’air en colère…
-Evidemment, renchérit l’homme aux cheveux verts, penser qu’on joue ainsi avec nos vies, ça doit rendre quelqu’un d’aussi juste et droit que mademoiselle Sara furieuse.
-Tu la connais ? intervint Joe.
-Non, répondit-il, bien sûr que non. Mais je vois bien qu’elle essaye de rassurer et calmer tout le monde depuis tout à l’heure, donc je me dis…qu’elle doit vraiment être quelqu’un de bien. Ensuite, on me dit parfois que je ne suis pas doué pour juger les gens, donc peut-être que je me trompe, mais…mademoiselle Sara semble dotée d’une forte détermination et d’un esprit d’acier, je suppose que je suis un peu impressionné.
-Tu l’as dit, rit Joe. Peut-être es-tu plus doué pour juger les gens que tu ne le penses.
-Joe ! protesta Sara, gênée.
-Vous êtes amusants, sourit doucement Nao. Je n’aime pas Keiji, mais je pense que je vous aime bien tous les trois.
-Eh… ? réagit Sara.
-Sara, Joe…prenez bien soin l’un de l’autre.
-Bien sûr ! » répondit Joe pendant que Sara soupirait.
Mais le silence revint, et la situation redevint inconfortable.
« -Est-ce que quelqu’un d’autre veut se présenter ? » demanda Sara en tournant son regard vers l’homme aux cheveux verts et à l’écharpe rouge.
Il parlait beaucoup, mais il n’avait toujours pas dit son nom. Sara pensait qu’il serait temps pour lui de se présenter. Mais ce ne fut pas lui qui répondit à sa question :
-Bien, annonça la femme punk. Je suppose que ça ne sert plus à grand-chose d’être méfiante. Je m’appelle Reko Yabusame. Je suis chanteuse et parolière.
-Tu es LA Reko Yabusame ?! s’enthousiasma Joe. Je t’ai vue dans des magazines !
-Tu crois que c’est le moment connard ?!
-D…Désolé, s’excusa Joe, pris au dépourvu et se sentant honteux.
-Ce n’est pas une raison pour lui parler sur ce ton ! s’emporta Sara, ne supportant pas qu’on traite Joe de cette façon.
-La ferme ! De toute façon, j’ai dit ce que j’avais à dire.
-Mais…
-C’est bon Sara, lui dit Joe en la prenant par l’épaule. Passons à autre chose, si tu veux bien. »
Sara n’était pas du tout contente à l’idée de laisser ça passer, mais elle décida de ne pas insister pour respecter la volonté de Joe. L’homme aux cheveux verts lui continua d’interroger Reko :
« -Aurais-tu quelque chose à rajouter ?
-Je ne connais même pas ton nom alors tu n’as pas à me demander ça ! lui cria Reko.
-Certes, intervint Keiji, mais beaucoup d’entre nous ont partagé leurs derniers souvenirs avant de se réveiller ici. Peut-être pourrais-tu le faire ? Chaque élément nous permettant de mieux appréhender notre…situation, est à prendre.
-Grr…je venais de finir de composer un nouveau son, donc j’avais prévu un rendez-vous avec mon agent pour qu’on en discute…et puis cette merde est arrivée !
-Tu es aussi compositrice ? demanda timidement Joe.
-Qui d’autre composerait la musique de mes chansons abruti ?!
-Je…j’en sais rien, un membre de ton groupe peut-être…
-Cela va faire plus de deux ans que je ne suis plus dans un groupe. J’ai atteint la célébrité seule, un groupe n’aurait fait que me ralentir.
-Ce n’est pas un peu dur ? demanda Nao en détournant le regard, osant à peine poser sa question.
-Peuh, fit Reko. Dans la vie, quand on a du talent, y aura toujours des gens qui vont essayer de t’utiliser pour que tu les tires vers le haut. Le mieux, c’est de ne compter sur toi-même.
-Faut vraiment jamais rencontrer ses idoles, marmonna Joe.
-Recentrons le sujet, intervint Keiji avant que Reko ne s’énerve contre Joe, tu as dit qu’il tu avais été enlevée alors que tu allais rencontrer ton agent ?
-C’est ça…ils ont pris tout ce que j’avais sur moi…mes instruments…mes précieux tambours ! »
« Des tambours ? » nota Sara dans un coin de son esprit.
« -Putain de kidnappeurs ! Je jure que s’ils les ont jetés, alors je vais botter leur putain de cul à coups de pieds !
-Mademoiselle, intervint en étant clairement peu à l’aise le professeur Mishima, il y a des jeunes enfants ici, peut-être que vous devriez faire plus attention à votre language…
-Qu’est-ce que t’as le vieux ?!
-Ne parle pas au professeur comme ça ! se fâcha Nao. Et puis, est-ce vraiment le moment de se soucier de tambours ?
-Ces tambours sont plus importants que vos vies ou la mienne ! rétorqua Reko.
-Que…
-Assez ! intervint l’homme à l’écharpe rouge. Mademoiselle Reko s’est présentée, restons-en là. Je vais me présenter à mon tour. »
« Enfin ! » pensa Sara.
Ce type parlait beaucoup mais Sara ne le connaissait toujours que comme « l’homme aux cheveux verts et à l’écharpe rouge ». S’il avait continué sans se présenter, elle aurait fini par lui trouver un surnom – peut-être « Midori », en référence à sa couleur de cheveux.
« -Je m’excuse d’avoir tant tardé à me présenter, annonça-t-il, j’ai un peu du mal à faire confiance aux autres, mais je suppose que nous sommes tous dans le même bateau, et vous avez gentiment répondu à mes questions alors que vous n’aviez même pas mon nom, alors…Je m’appelle Shin Tsukimi. Je suis actuellement à la recherche d’un emploi…
-Donc tu vis au jour le jour, miaou ? demanda l’enfant costumé.
-Oh, lui sourit Shin, ma situation n’est pas aussi critique que ça. Mes parents m’ont donné de quoi tenir pendant un moment, je suis gâté…ah ah, c’est un pu embarrassant de le dire tout compte fait.
-Bah t’as juste à mentir alors, miaou ! Tu es beaucoup trop honnête, wouf !
-Mais si je mens, rétorqua Shin qui semblait embêté, cela n’irait-il pas à l’encontre du but de ces présentations ? Et puis, je suis quelqu’un d’assez ordinaire, je ne sais pas très bien mentir. Déjà que je suis timide et que parler devant tant de monde me fait me sentir mal à l’aise, si en plus je devais imaginer quelque chose à raconter… »
Il avait beau dire ça, Sara ne ressentait pas du tout sa timidité. Au contraire, il lui donnait l’impression d’être sûr de lui et confiant. Et olus il parlait, plus Sara se sentait sur ses gardes en sa présence, comme si être en compagnie de cet homme signifiait qu’elle pouvait se retrouver à tout moment en danger. Il la regarda, et une lueur amusée traversa ses yeux, la faisant tressaillir. Mais cette lueur disparut aussi vite qu’elle était apparue, faisant douter Sara de ce qu’elle avait vu, et l’expression de son visage manifesta soudainement de la frayeur.
« -Eh ?! Pourquoi me donnez-vous ce regard effrayant mademoiselle Sara ? J’ai fait quelque chose de mal ?
-Hein ? »
Sara ne s’était même pas rendue compte que l’expression de son visage avait changé. Elle retrouva son calme et Joe vint à sa défense :
« -Ne t’en fais pas, Sara peut souvent devenir intense, mais elle ne te veut aucun mal.
-Oh ? Je vois. C’est plutôt une qualité, je trouve. Désolé d’avoir surréagi, mademoiselle Sara.
-Non, s’excusa une Sara embarrassée, c’est moi… »
Voulant vite passer à autre chose, Sara s’empressa de lui demander ce dont il se souvenait avant d’atterrir ici. Mais, la surprenant, il ne répondit pas, gardant son regard dans le vide.
« -Shin ?
-Ah, désolé ! C’est juste que…plus que ce qui m’est arrivé avant de me réveiller ici, ce sont des informations que j’ai obtenues en me réveillant ici.
-Quoi ?! réagit Sara. Qu’est-ce que ça veut dire ?!
-Mademoiselle Sara, vous tous…je sais pourquoi nous avons tous été enlevés et réunis ici, et lorsque tout le monde se sera présenté, je vous dirai tout. »
Sa déclaration prit évidemment tout le monde de court, et provoqua une explosion de réactions :
« -QUOI ?!
-Pour’ quoi tu n’dirais pas tout c’que tu sais maintenant ?! beugla Q-taro.
-Et même, intervint Reko sur un ton menaçant, pourquoi est-ce que cet enfoiré aurait des informations en plus par rapport à nous ?! Il est avec les kidnappeurs ?!
-Tu as intérêt à tout nous dire, wouf !
-Attendez, intervint Keiji qui parvint à imposer le silence. Tu as dit « lorsque tout le monde se sera présenté », mais pourquoi seulement alors ?
-C’est simplement que…ce que j’ai à dire est important, et je ne veux pas que ça coupe nos présentations. De plus, j’ai une autre raison de me taire, et je préférerai vraiment attendre que nous ayons les noms de tout le monde. »
Son explication calma les ardeurs de tout le monde, mais Reko lui lançait tout de même un regard noir.
« -Eh bien, y réfléchit Keiji, il ne reste de toute façon que les deux enfants qui ne se sont pas présentés, alors ça devrait aller vite ?
-En effet, approuva le professeur Mishima. Nous ferions mieux de continuer la conversation comme il le demande et d’y revenir après.
-J’ai bien compris ce que vous voulez, wouf ! s’exclama l’enfant étrange. Je vais me présenter. Je m’appelle Gin Ibushi, wouf ! Je suis en CM2, miaou !
-Super présentation, gamin ! le félicita Keiji.
-Ne me traite pas de gamin ! Je me suis présenté parce que vous n’avez pas l’air d’avoir quoi que ce soit de spécial, wouf !
-Est-ce que tu te rappelles pourquoi tu as été amené ici ?
-Wouf…non. Maman rentrait tard ce soir, donc je l’attendais…et j’ai entendu la sonnette, donc je pensais qu’elle était de retour et j’ai ouvert la porte, miaou. Mais c’était pas Maman mais un grand homme qui était là, miaou ! ...Je ne me souviens de rien d’autre, wouf.
-Je vois…fit Sara.
-Gin…murmura Joe.
-Ne me regardez pas comme ça, wouf ! protesta-t-il. J’suis un grand garçon, miaou ! »
« Il a beau dire ça, il doit être terrifié. » pensa Sara, attendrie.
« -Travaillons ensemble pour nous évader, Gin ! lui dit-elle.
-Miaou ? réaagit-il. Travailler ensemble… ? Wouf wouf…
-Exactement, renchérit-elle. Tous les grands ne sont pas mauvais, Gin.
-Est-ce que je peux croire ça, miaou ?
-Bien sûr ! s’exclama Sara.
-…je ne ferai confiance qu’à toi, grande sœur Sara ! Wouf !
-G-grande sœur ? répéta Sara, prise au dépourvu.
-…Hein ? Ce n’est pas « grand frère », si, wouf ? Peut-être que j’ai tout faux, miaou…
-Ce n’est pas le problème ! » réagit Sara, finalement plus amusée qu’autre chose.
« Si j’avais un petit frère, je me demande s’il me parlerait comme ça… »
Il ne restait plus qu’une personne à interroger, la petite collégienne effrayée. Sara décida de lui parler à nouveau :
« -Est-ce que tu vas mieux ? Si tu es plus calme, peux-tu me parler ?
-…Hum…Je dirai…Je suis Kanna Kizuchi… »
« Elle commence à s’ouvrir » sourit Sara.
« -Kanna, pourrais-tu m’en dire plus à ton sujet ? lui demanda-t-elle pour l’encourager à prendre davantage la parole.
-Ok…je, euh, je suis au collège et, hem, hum…
-Tout va bien, la rassura Sara, tu n’as pas besoin de te presser.
-…Je rentrais à la maison…se souvint Kanna, avec ma grande sœur…nous mangions de la glace…on était juste en train de marcher et de parler…de ce qu’on allait manger ce soir…soudainement…des hommes effrayants sont sortis d’une voiture noire garée sur la route…
-Je vois…compatit Sara. Cela a dû être terrifiant.
-Oui… » confirma Kanna.
« Sa sœur…de ce qu’elle dit, on dirait qu’elles ont été toutes les deux kidnappées, mais…il n’y a que Kanna ici ? » réalisa Sara. « Je devrais peut-être l’interroger davantage à ce sujet, mais…j’ai un mauvais pressentiment…peut-être devrais-je éviter de l’interroger là-dessus. »
Mais avant qu’elle n’ait pu formuler une autre question, Shin intervint :
« -Si je comprends bien, ta sœur aussi a été enlevée ? Elle doit être retenue ailleurs…ne t’en fais pas, on ne partira pas sans elle !
-Ma…sœur…répéta Kanna. J’étais…avec elle…ma sœur…Aaahhhhh…AAAHHHHHHHHHHHH ! »
Kanna se mit à hurler, comme si elle était en transe.
« -Elle est morte ! Ma sœur ! Pourquoi ?! Comment ?! C’est de ma faute ! Ma faute ! Ma faute ! WAAHHHHHHHHHH ! »
Et c’est avec ce hurlement déchirant que Kanna perdit connaissance. Sara et Shin se penchèrent immédiatement vers elle, pour voir comment elle allait. Les autres les pressèrent de question, pour savoir à quel point son état était grave. Même Reko et Hinako semblaient s’en soucier.
« -Elle va bien, les rassura Sara, elle a juste perdu connaissance.
-Je savais qu’il y aurait sans doute déjà des morts, ajouta Shin, mais sa sœur ne devait pas être beaucoup plus âgée qu’elle, n’est-ce pas ? Ils ont tué une si jeune fille…
-Ah oui, grogna Reko, tu le savais ?
-Qu’y a-t-il mademoiselle Yabusame ? réagit le professeur Mishima.
-Il y a que j’en ai assez ! Ce type a dit qu’il avait quelque chose à nous dire ? Eh bien qu’il nous le dise ! Et il n’a pas intérêt à utiliser l’évanouissement de cette petite fille comme excuse !
-Ce n’était pas mon intention, se défendit Shin. Je vais tout vous dire. »
Il attendit que tout le monde se taise, et il déclara :
« -Vous tous, vous venez de subir une épreuve au cours de laquelle vous avez failli perdre la vie, pas vrai ? La Première Epreuve…eh bien contrairement à vous, ma Première Epreuve n’était pas mortelle. En fait, on m’a expliqué ce qui ce passe ici.
-Quoi ?! s’écria Reko. Mais pourq…
-Continue, l’incita à parler Keiji. Si tu sais pourquoi nous sommes ici, dis-le-nous.
-J’y viens…nous avons été réunis pour participer à un jeu de la mort.
-Un…jeu de la mort ? répéta Nao, effrayée.
-Qu’est-ce que ça veut dire, wouf ?! demanda Gin.
-Cela veut dire exactement ce à quoi vous êtes probablement en train de penser, répondit Shin. Nous allons subir plusieurs « jeux » risqués, comme la Première Epreuve, au cours desquels nous pourrions perdre la vie. Et quand bien même nous parviendrions à tous nous en sortir…nous serons alors obligés de participer au jeu suprême : un jeu où nous devrons déterminer par un vote à la majorité qui va mourir parmi nous. Il y a aura au moins deux morts à ce jeu.
-Pas possible ! s’exclama Q-taro. Ils ne peuvent pas nous forcer à faire ‘ne chose pareille !
-Ils le peuvent, rétorqua Shin en abaissant son écharpe et en montrant le collier autour de son coup. Tant que nous portons ça, nous sommes à leur merci. Si nous leur désobéissons, ils peuvent juste nous exécuter grâce à ça.
-T’veux dire que ce collier pourrait exploser ! s’écria Q-taro, semant la panique dans le groupe.
-Je n’en sais rien, répondit Shin, mais c’est possible je suppose.
-J’ai une question, annonça Keiji sur une voix forte pour couvrir les voix des autres et calmer tout le monde. Tu as dit qu’il y aurait deux morts au jeu suprême, pourtant nous ne devrions désigner qu’une seule personne pour mourir, non ?
-Bien observé, murmura Shin sur un ton presque lugubre. C’est parce que les règles seront plus compliquées que ça… « pour qu’il n’y ait pas de vote au hasard » m’a-t-elle dit.
-Les règles ? le questionna Sara.
-Lors du jeu suprême, expliqua Shin, nous aurons tous un rôle. Un Gardien, un Sage, un Sacrifice, et comme nous sommes douze et si nous sommes toujours aussi nombreux au moment du jeu suprême, neuf Roturiers. Si le Gardien est voté à la majorité, tout le monde meurt, donc c’est une solide armure. Le Sage, quant à lui, sait dès le début qui est le Gardien. Les Roturiers n’ont pas de pouvoirs spéciaux. Et le Sacrifice…mourra s’il n’est pas voté à la majorité, mais s’il « remporte » le vote, lui et une personne de son choix gagnent immédiatement le jeu de la mort et tous les autres sont exécutés. Autrement dit, au moment où un d’entre nous obtiendra cette carte, il deviendra l’ennemi du groupe ou il mourra. D’où le fait…qu’il y aura au minimum deux morts pendant le jeu suprême. »
Cette déclaration jeta un froid : le petit Gin semblait avoir du mal à s’empêcher de trembler, Nao s’était mise à pleurer, le professeur Mishima semblait interdit, Keiji restait impassible, Joe murmurait « pourquoi…pourquoi faire ça ? » - et Sara se posait la même question – et Q-taro, paniqué, demanda :
« -C…C’mment ils vont nous donner nos rôles. Personne veut le Sacrifice, alors…ils vont nous l’imposer non ?!
-De ce que j’ai compris, expliqua Shin, ces cartes vont être cachées dans ce bâtiment et placées de façon à ce qu’on les trouve. Pour vous piéger et vous forcer à les garder, il sera écrit dessus que si quelqu’un d’autre trouve cette carte vous mourrez, mais on m’a dit que c’était du bluff…
-Connerie ! le coupa Reko. Tu mens !
-Quoi ? réagit Shin.
-Ce que tu dis n’a aucun sens ! Pourquoi est-ce que tu recevrais un tel avantage ?! On a tous frôlé la mort mais toi tu reçois plein d’infos ?! La seule explication que je vois…c’est que tu es du côté des kidnappeurs !
-Mademoiselle Reko ! s’exclama le professeur Mishima. Shin vient de nous partager ces informations, le moins que nous puissions faire est…
-Tu as raison Reko, intervint Shin. C’est bien un avantage. Mais je ne l’ai pas pour les raisons que tu crois…je crois en fait que c’est pour se moquer de moi qu’on me donne tous ces avantages.
-Hein ?! s’énerva Reko.
-La raison pour laquelle j’ai eu une Première Epreuve si avantageuse…ça doit être ça. »
Shin sortit de sa poche quatre papiers et les tendit à Reko.
« -Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-elle agressivement.
-Disons…un autre avantage. »
Reko consulta les quatre papiers, puis, incitée à le faire par Keiji, les fit passer dans le groupe. Lorsque Sara les eût à son tour, elle les lut rapidement pour comprendre de quoi il s’agissait :
16,1% Sou Hiyori … Slasheur
15,5% Sara Chidouin … Lycéenne
9,0% Naomichi Kurumada … Boxeur
8,7% Keiji Shinogi … Ex-Détective
7,9% Q-taro Burgerberg … Baseballeur
7,1% Anzu Kinashi … Lycéenne
7,0% Reko Yabusame … Chanteuse
6,7% Shunsuke Hayasaka … Employé de bureau
6,6% Mai Tsurugi … Boulangère
4,9% Megumi Sasahara … Détective
4,5% Ranmaru Kageyama … Lycéen
2,1% Kazumi Mishima … Professeur de lycée
1,8% Kanna Kizuchi … Collégienne
1,2% Gin Ibushi … Elève de Primaire
0,9% Hinako Mishuku … Collégienne
0,0% Shin Tsukimi … Employé Indépendant
« -Que signifient ces nombres ? » demanda Sara.
Shin garda le silence.
« -Tu ne sais pas ? insista Joe.
-Si mais…c’est douloureux à dire. »
Sara fronça les sourcils, ne comprenant pas ce que Shin voulait dire. Elle s’apprêtait à insister pour qu’il en dise plus quand Shin reprit la parole :
« -De ce qu’on m’a dit…il s’agit des chances de victoire des candidats au Death Game.
-Les candidats ?! réagit Nao. C’est nous ? Et de victoire, tu ne veux pas dire…
-De survie, oui. »
Encore une fois, le groupe provoqua un brouhaha :
« -N’importe quoi ! s’écria Reko. Comment ils pourraient savoir ça d’abord ?!
-Vous allez me prendre pour un fou…mais apparemment, ils possèdent des intelligences artificielles répliquant nos personnalités à la perfection. Ils ont simulé des milliers de simulations et ces pourcentages sont basés dessus.
-C’est ridicule…commença Reko.
-Ils m’ont montré ces simulations, la coupa Shin. Certaines d’entre elles du moins. Et je me suis vu mourir, encore et encore… »
Sara se rappela alors ce que disait la ligne concernant Shin :
0,0% Shin Tsukimi … Employé Indépendant
« 0,0% ? Mais alors… » réalisa Sara.
« -D’après ces simulations, annonça Shin sur un ton grave, j’ai n’ai aucune chance de victoire. Une mort certaine m’attend. »