La QPC et la matière pénale: Deux ans d'application
Par Bruylant
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La QPC et la matière pénale - Bruylant
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ISSN : 2294-7205
ISBN : 9782802740568
9782802740568_Collection.jpgChapitre 1.
L’importance de la QPC en matière pénale
par
Christine Courtin
Maître de Conférences, Habilitée à diriger des recherches à l’Université de Nice Sophia Antipolis
Directrice du « Pôle pénal » du CERDP (E.A. n° 1201)
L’actualité récente montre que la question prioritaire de constitutionnalité s’est imposée dans le paysage tant juridique que médiatique français. De fait, chacun pressentait que la question prioritaire de constitutionnalité introduite par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 trouverait à s’exercer en matière pénale avec une acuité particulière et que l’introduction de ce contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori ouvrirait aux praticiens autant qu’à la doctrine, des horizons nouveaux (1). Cet ouvrage qui a pour objectif de dresser le bilan de deux années d’application de cette QPC en matière pénale en constitue une parfaite illustration.
Lors de l’entrée en vigueur de la QPC, la doctrine apparaît pourtant extrêmement contrastée : les opinions divergentes allant du catastrophisme à l’euphorie (2). Le professeur Jacques-Henri Robert a pu ainsi qualifier cette avancée de « Nouvelle nuit du 4 août » affirmant que « Deux cent ans de législation (allaient être) offerts à une joyeuse contestation civique qui ressemble à un chamboule-tout dans lequel les joueurs n’ont rien à perdre et tout à gagner ». Mais ne vous y trompez pas, le Professeur Robert ne parlait pas alors de Questions pour un champion mais bien de la question prioritaire de constitutionnalité et de poursuivre en affirmant que « Le droit pénal et la procédure pénale n’échapperont évidemment pas à ce grand ébranlement, tant leur objet est lié aux libertés fondamentales ». (3) C’est au contraire l’optimisme qui anime d’autres commentateurs, l’un d’entre eux considérant que la mise en œuvre de la question prioritaire de culpabilité a été fulgurante et que ce n’est pas un succès mais un triomphe (4). Au final, chacun s’accorde à reconnaître aujourd’hui que la question prioritaire de constitutionnalité constitue une avancée considérable pour la protection des droits et libertés dans notre pays. En effet, en deux ans d’application, comme a pu le souligner le président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré, la question prioritaire de constitutionnalité n’a pas seulement gagné un acronyme, QPC, désormais connu de tous, elle a connu un véritable succès (5).
De plus, l’insécurité juridique tant redoutée par certains ne s’est pas franchement réalisée.
Un bref rappel préalable du dispositif mis en place s’impose. C’est la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 (6) qui a introduit dans la Constitution du 4 octobre 1958 un article 61-1 dont le premier alinéa dispose : « lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». La loi organique du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution est venue fixer la procédure à suivre pour contester la constitutionnalité d’une disposition législative devant une juridiction (7). Ce moyen peut être soulevé à toute hauteur de procédure et est filtré par la juridiction devant laquelle il est soulevé puis, éventuellement et selon les cas, par le Conseil d’État ou la Cour de cassation, avant d’être examiné par le Conseil constitutionnel. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er mars 2010 après avoir été complétées par deux décrets du 16 février 2010. En effet, le pouvoir réglementaire est venu fixer les modalités de cette nouvelle procédure avec les procédures civiles, administratives et pénales, en modifiant les Codes de justice administrative, de procédure civile, de procédure pénale et de l’organisation judiciaire. Pour finir, l’article 62 alinéa 2 de la Constitution prévoit « qu’une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition produits sont susceptibles d’être remis en cause ».
Ainsi, depuis le 1er mars 2010, le justiciable français peut contester la constitutionnalité d’une disposition législative lors d’une instance en cours devant une juridiction, lorsqu’il estime que le texte, applicable au litige ou à la procédure, ou constituant le fondement des poursuites, porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Il peut ainsi demander au juge de poser au Conseil constitutionnel une question prioritaire afin de vérifier si la disposition litigieuse est conforme à la Constitution. Après examen de la demande, le juge transmet, le cas échéant, la question à la Cour suprême de son ordre (le Conseil d’État ou la Cour de cassation) qui transmet à son tour la demande au Conseil constitutionnel lorsque les conditions posées par la loi organique sont réunies.
La réforme entreprise a poursuivi un triple objectif. Tout d’abord, il s’agit de donner un droit nouveau au justiciable en lui permettant de faire valoir les droits qu’il tient de la Constitution. Ainsi, désormais plusieurs procédures contentieuses sont offertes au justiciable français pour défendre ses droits et libertés : le contrôle de conventionnalité et depuis le 1er mars 2010, la QPC. Dès lors, l’introduction de cette nouvelle procédure dans notre droit soulève la question de son articulation avec les contrôles de conventionnalité. Ensuite, la QPC doit permettre de purger progressivement l’ordre juridique national de ses dispositions inconstitutionnelles. Enfin, l’introduction de la QPC permet d’assurer la prééminence de la Constitution dans l’ordre interne. En effet, d’une manière générale, le contrôle de constitutionnalité contribue à la cohérence de l’ordre juridique interne. Lorsqu’il conduit à contrôler la conformité des lois au regard de la Constitution, ce contrôle permet alors d’assurer la prééminence de cette dernière sur le pouvoir législatif. Le contrôle a priori est sans aucun doute la forme la plus radicale, puisqu’il permet de faire échec à l’entrée en vigueur d’une loi contraire à la Constitution. Concernant le contrôle de constitutionnalité a posteriori, il contribue à la diffusion de la garantie des droits fondamentaux dans l’ordre juridique interne. En effet, tel est bien le cas en droit français, puisque ce contrôle de constitutionnalité est exercé par la voie d’un renvoi préjudiciel émanant des juridictions de droit commun. Du fait de cette organisation, ce contrôle a posteriori permet à l’ensemble des justiciables mais aussi à l’ensemble des juges de droit commun de s’approprier les droits garantis par la plus haute norme de leur ordre juridique.
Mon propos introductif est de mettre en évidence que si la QPC constitue une arme juridique nouvelle pour le Conseil constitutionnel (I), elle constitue également un nouvel outil de défense pénale pour le justiciable (II).
I. – La QPC : une arme juridique nouvelle pour le Conseil constitutionnel
Si depuis plus de cinquante ans, avec le contrôle de constitutionnalité a priori, le Conseil constitutionnel a dégagé en matière pénale une jurisprudence désormais bien établie, cette dernière a été renouvelée par l’instauration de la QPC, contrôle de constitutionnalité a posteriori.
« Les décisions du Conseil constitutionnel intéressant la matière pénale sont particulièrement nombreuses. Le droit répressif est, en effet, fondé sur des principes ayant pour beaucoup d’entre eux, reçu l’onction constitutionnelle et la multitude des réformes que connaît la matière favorise ces occasions de rencontre » (8). De plus, l’abondance des lois pénales soumises au Conseil constitutionnel, l’importance des enjeux dégagés à l’occasion de leur examen, le développement du contrôle de conventionnalité des lois et l’apparition d’un droit pénal communautaire ont renforcé et complexifié les liens entre la Constitution et le droit pénal. « Il n’est pas de discipline juridique sans principes directeurs. La matière pénale, à l’évidence, n’échappe pas à ce précepte. Le constat, qui n’est plus à faire, de la constitutionnalisation du droit pénal, s’est accompagné non seulement de la reconnaissance de la valeur constitutionnelle des principes qui gouvernent la matière mais également, et surtout, de la redécouverte du sens dont sont dotés ces mêmes principes » (9). En effet, en droit pénal et en procédure pénale, nombreux sont les principes qui bénéficient d’une valeur constitutionnelle ou, à tout le moins, d’une protection constitutionnelle. Citons le principe de la légalité des délits et des peines, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, le principe de nécessité des peines ou encore le principe de respect de la liberté individuelle. D’ailleurs, il peut être souligné que depuis 2002, tous les grands textes nouveaux en matière pénale ont été soumis au contrôle du Conseil constitutionnel. Peut-on considérer alors que le Conseil constitutionnel puisse jouer un rôle en matière de politique criminelle entendue comme stratégie de réponses étatiques et sociétales au phénomène criminel ? (10) Par ses décisions, ce dernier valide ou non une politique criminelle législative. En effet, les décisions du Conseil constitutionnel recèlent orientations données au législateur, conseils fermes aux juges du fond et à la Cour de cassation ou encore mises en garde adressées au Gouvernement révélant adhésion ou non adhésion à la politique criminelle conduite. Ainsi, son pouvoir de contrôle de la constitutionnalité des lois, renforcé depuis l’introduction de la QPC, tend à faire de lui un acteur de la politique criminelle grâce aux outils remarquables dont il peut user : la validation totale ou partielle, la censure totale ou partielle et la validation avec réserve d’interprétation.
De la sorte, « le Conseil constitutionnel peut être à l’origine du travail parlementaire : en cas d’abrogation différée, la date butoir indiquée prescrit au législateur l’adoption rapide d’une nouvelle loi » (11). Ainsi, en a-t-il été avec la loi du 14 avril 2011 portant réforme de la garde à vue (12). Mais le Conseil constitutionnel peut également suggérer les conditions d’élaboration d’un nouveau texte. Monsieur Jean-Raphaël Demarchi traitera d’ailleurs de l’influence de la QPC sur le travail parlementaire et sur l’action judiciaire.
Ainsi, le Conseil constitutionnel dispose aujourd’hui d’une arme juridique nouvelle, la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui lui a permis depuis deux ans de remettre en cause certains pans de la législation française avec une rapidité parfois surprenante (13). Et la matière pénale est loin d’être épargnée par ce mouvement, qu’il s’agisse du droit pénal de fond, de la procédure pénale ou encore du droit de la peine. C’est à une réflexion sur l’influence de la QPC dans ces matières que se livreront, Mesdames Haritini Matsopoulou, Coralie Ambroise-Castérot et Fabienne Ghelfi. Il suffit d’invoquer la censure intervenue concernant le régime de la garde à vue, les peines accessoires, le tribunal maritime commercial et diverses inégalités procédurales imposées aux suspects et aux victimes dans leurs rapports avec le ministère public ou plus récemment la censure concernant la définition du harcèlement sexuel (14).
Ainsi, depuis l’entrée en vigueur de la QPC, « le Conseil constitutionnel a marqué de son empreinte la matière pénale et plus spécifiquement la procédure pénale. Il a joué son rôle de gardien des libertés fondamentales et on lui doit d’importantes réformes, à l’image de la loi du 14 avril 2011 sur la garde à vue » (15). Toutefois, il peut être également relevé que l’impact des décisions du Conseil constitutionnel a parfois été limité. Sur ce point, on peut citer la question de la motivation des arrêts des Cours d’assises. Dans sa décision du 1er avril 2011 (16), le Conseil constitutionnel avait considéré que l’absence de motivation des arrêts rendus en Cours d’assises ne violait pas les principes garantis par la Constitution. Cette décision a d’ailleurs été relayée par la Cour de cassation à l’occasion de deux arrêts en date du 15 juin 2011 (17). Mais finalement, le législateur est venu contrarier cette belle harmonie entre le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation. En effet, la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs (18), est venue imposer désormais la motivation des arrêts de Cours d’assises à compter du 1er janvier 2012. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2011-635 du 4 août 2011, a déclaré conforme à la Constitution cette nouvelle exigence de motivation des arrêts en matière criminelle. Dès lors, on ne peut que constater que la décision rendue sur QPC du 1er avril 2011 aura été sans grande incidence sur l’évolution de la matière.
« La constitutionnalisation de la matière pénale rend nécessaire une cohérence jurisprudentielle au sein du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation mais aussi une cohérence entre ces deux juridictions » (19). Or, quelques exemples mettent en évidence l’absence de cohérence entre le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation. Dans le cadre de la mise en œuvre de