Discussion:Marie de Bourgogne

Dernier commentaire : il y a 16 ans par Enguerrand VII
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Duchesse de Bourgogne =

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Bonjour,

Comment Marie de Bourgogne pourrait-elle être duchesse de Bourgogne titulaire alors que le duché est un apanage, créé par Jean II le Bon. En cas d'absence d'héritier mâle, l'apanage retourne au roi de France, ce que fit Louis XI à la mort de Charles le Téméraire. J'ai modifié l'introduction en conséquence. Ce détail a son importance lorsqu'on sait que Charles Quint, descendant de Marguerite de Bourgogne, eut des vélleités de reprendre le duché et le titre, ce en quoi il a toujours échoué... Cordialement, --   Sire Enguerrand   Un bref ou une missive? 14 octobre 2007 à 00:05 (CEST)Répondre

Faux. Il n'y a aucun élément décisif attestant que le duché de Bourgogne est un apanage masculin. Au contraire, à la mort du Téméraire, "la pratique des fiefs et des pairies de France n'était pas tellement constante qu'on ne pût citer beaucoup d'exemples de transmissions féminines" (Barante, Histoire des Ducs de Bourgogne de la Maison de Valois, s'appuyant sur ce point sur les travaux de Gollut et de Legrand). D'ailleurs l'acte d'apanage du duché de Bourgogne ne stipulait la réversion qu'en cas d'extinction de la race, sans faire mention de masculinité. La coutume de Bourgogne permettait aux filles d'hériter des fiefs. Et bien plus, si Jean II le Bon lui-même était entré en possession du duché de Bourgogne qu'il devait ensuite attribuer à son fils cadet, ce n'était pas par réversion à la couronne, mais c'était précisément comme héritier en ligne féminine de la maison capétienne de Bourgogne!
Certes, on a pu relever qu'en 1314, Philippe le Bel, et Charles V, en 1374, avaient déclaré que les apanages seraient à l'avenir restreints à la ligne masculine. Mais l'ordonnance de Philippe le Bel n'avait été appliquée par aucun des rois ses successeurs, et lorsque ces derniers entendaient qu'un apanage ne soit transmis que par les mâles, ils inséraient textuellement dans la donation cette clause restrictive. Clause délibérément omise dans l'acte de 1364 concernant la Bourgogne. Quant à l'ordonnance de 1374, elle ne disposait selon ses propres termes que pour l'avenir, et sans effet sur les apanages antérieurement attribués.
Enfin, en admettant même que le fief fût masculin, la maison de Bourgogne avait encore un héritier mâle : Philippe, comte de Nevers, petit-fils de Jean-sans-Peur. Louis XI n'y avait aucun droit, de quelque manière qu'on s'y prenne. Et Charles-Quint, s'il ne put faire prévaloir ses droits, n'en était pas moins le véritable héritier des ducs de Bourgogne, ce dont témoigne d'ailleurs le fait que l'Ordre de la Toison d'Or, attaché au duché, passa sans contestation, même des rois de France, à la maison d'Autriche. Fan2jnrc (d) 27 mars 2008 à 17:47 (CET)Répondre
Bonjour. je ne suis pas historien et, j'en suis confus, je ne connais pas les écrits des dénommés Gollut et Legrand (qui sont-ce?). En ce qui concerne Barante, l'avant-dernier paragraphe de sa biographie sur Wikipedia mentionne:

« Il commença en 1824 la publication de son Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois (1824-1826, 13 vol. in-8). Cet ouvrage, qui eut un grand succès et connut de nombreuses éditions, lui valut d'être élu membre de l'Académie française au fauteuil 33 en 1828. Ouvrage remarquable par ses qualités narratives et de style, caractéristique de l'école historique romantique, il pêche par son manque de recul critique et de rigueur scientifique, qu'avoue d'ailleurs sans détours l'épigraphe : Scribitur ad narrandum non ad probandum (Ce livre est écrit pour raconter une histoire, pas pour la démontrer). »

en évoquant l'ouvrage sur lequel tu appuies tes affirmations. Par ailleurs, il n'y a aucune raison que l'apanage donné par un roi de France se plie aux coutumes locales comme tu l'affirmes. Enfin, le Philippe de Nevers dont tu parles est-il celui mort en 1454 avant le début du règne de Louis XI? Cordialement, --  Sire Enguerrand   Un bref ou une missive? 27 mars 2008 à 19:41 (CET)Répondre


Bien, bien, bien. Alors on va procéder par ordre.
Gollut et Legrand, qui sont-ce. Ce sont deux jurisconsultes du XVIème siècle qui ont, entre autres, dans leurs savants ouvrages, particulièrement étudié le droit de transmission des fiefs. On doit au premier les Mémoires Historiques de la République Séquanaise et des Princes de la Comté de Bourgogne (Dôle, 1592) et au second les Pièces de l'Histoire de Bourgogne. On trouve ça dans toutes les bonnes bibliothèques, ce n'est pas difficile à vérifier, et le fait est qu'ils établissent que "la pratique des fiefs et des pairies de France n'était pas tellement constante qu'on ne pût citer beaucoup d'exemples de transmissions féminines". Point.
Barante. Ce n'est pas "l'ouvrage sur lequel j'appuie mes affirmations". Je citais une phrase de cet ouvrage à titre d'illustration, parce qu'elle exprime élégamment la question, mais sur ce point Barante ne fait qu'énoncer un fait qu'on retrouve dans tous les ouvrages sur le sujet. Il ne suffit pas de faire un copier-coller de trois lignes de Wikipédia pour anéantir les douze volumes qui ont longtemps été l'ouvrage de référence, et qui peuvent encore l'être sur bien des points. Si sur tel et tel point, il est avéré que Barante a commis une erreur, fort bien, il faut le démontrer au cas par cas. Sinon, lorsque je dirai que Barante raconte que Jeanne d'Arc a été brûlée à Rouen en 1431, on pourra me répondre que c'est faux parce que "wikipédia dit que Barante gnan gnan gnan". Donc, sur le point qui nous intéresse, si Barante est coupable de "manque de recul critique et de rigueur scientifique", qu'on me le démontre.
Jusque-là, du reste, nous n'avons abordé que des broutilles. Maintenant passons aux choses sérieuses. Alors je reprends. La coutume de Bourgogne permet aux filles d'hériter des fiefs. Ce n'est pas une "coutume locale". C'est ni plus moins ni moins la raison pour laquelle la Bourgogne a pu être donnée en apanage à Philippe le Hardi. Parce que pour que le roi de France Jean II le Bon puisse la donner en apanage, il a fallu d'abord qu'il la possède. Très bien. Or, pourquoi l'a-t-il possédée? Parce qu'il était le fils DE LA DERNIERE HERITIERE DU DUCHE. Et cette transmission ne put avoir lieu que conformément à la coutume dudit duché, car si l'on avait appliqué la loi du royaume de France, la Bourgogne n'aurait pas pu échoir au roi de France, puisque la loi salique n'admet pas de transmission en ligne féminine. Eh oui... Si la Bourgogne a pu être donnée en apanage à son fils cadet par le roi de France, c'est parce que ledit roi de France venait d'en hériter, de ladite Bourgogne, par sa mère Jeanne de Bourgogne, soeur de l'avant-dernier duc Eudes IV. Marie de Bourgogne ne pouvait hériter du duché de Bourgogne ni le transmettre à son fils Philippe le Beau, archiduc d'Autriche? Mais Jeanne de Bourgogne a fort bien pu hériter du duché de Bourgogne et le transmettre à son fils Jean II le Bon, roi de France... Cherchez l'erreur.
Mais, pourra-t-on toujours argumenter, en donnant la Bourgogne en apanage à son fils, Jean II le Bon aurait pu décider qu'à l'avenir, justement, la façon dont lui-même avait hérité de la Bourgogne ne pourrait se renouveler. L'a-t-il fait? Eh non. L'acte de donation du duché, du 2 juin 1364, ne parle nulle part d'une exigence de postérité MASCULINE. L'unique phrase relative à l'éventuel retour à la couronne est claire. "Sauf, en outre, et sous la réserve que si notredit fils ou sa postérité, comme il a été dit plus haut, viennent à manquer, ce que Dieu ne veuille, et restent sans héritiers de leur corps succédant audit duché, tous et chacun des objets ainsi donnés retournent de plein droit et intégralement à nous ou pour le temps à venir aux rois nos successeurs, pour être réunis au domaine de notre couronne". Point à la ligne. Postérité masculine ? Héritiers mâles? Non. C'est sous-entendu? Ca va de soi? Certainement pas. Lorsque cette exigence était requise, elle était stipulée en termes explicites. Et plus que jamais dans ce cas, c'était indispensable, puisque la transmission normale était féminine et masculine, et le roi Jean était bien placé pour le savoir. S'il voulait y changer quelque chose, à tout le moins une phrase devait le prévoir! D'autant que l'acte de donation entre ailleurs dans des détails infimes.
Enfin, non, le comte de Nevers qui de toute façon devait hériter du duché en admettant par l'absurde que le fief fût exclusivement masculin, ne se prénommait pas Philippe (j'ai confondu avec son frère mort enfant), mais Jean, comte de Nevers, d'Auxerre, d'Etampes, de Rethel et d'Eu (1415-1491), fils de Philippe (1389-1415 à Azincourt), fils de Jean sans Peur. Si encore Louis XI avait fait semblant, il aurait attendu 1491 pour prétendre au duché. Le fait que dès 1477 il ait déclaré rentrer en possession de la Bourgogne et envoyé ses lieutenants à Dijon à cet effet montre de façon flagrante que ce n'était qu'une voie de fait.
En tout état de cause, la formule de "duchesse de Bourgogne auto-proclamée" pour qualifier Marie de Bourgogne, comme une quelconque émule du roi de Patagonie, est à tout point de vue inadmissible. A la mort de son père, "les Etats de Bourgogne furent immédiatement convoqués à Dijon pour délibérer sur les prétentions de la couronne. Ils décidèrent en faveur de Marie de Bourgogne que le roi Jean n'avait lui-même hérité de la province que par les femmes et qu'en supposant que le fief fut masculin, il y avait des héritiers mâles plus proches que Louis XI, etc... Ces raisons demeurèrent inutiles contre la volonté bien arrêtée du roi." (Guilbert, Histoire des Villes de France, Paris, 1848). Marie de Bourgogne fut reconnue duchesse de Bourgogne par les autorités légitimes de son duché. Elle ne fut pas "auto-proclamée". Dans une situation de ce genre, le seul terme adapté est bel et bien titulaire. Elle eut le titre, mais pas la réalité.
Adoncques, messire Enguerrand, jusques à ce que vous m'establissiez point par point l'inanité des arguments susdits, je restablis madame la duchesse Marie dans ses droits et je remplace de nouveau "auto-proclamée" par "titulaire". Fan2jnrc (d) 17 avril 2008 à 14:57 (CEST)Répondre
Je vais essayer d'être un peu plus bref, moins condescendant et professoral, et éviter les suppositions et autres déductions pseudo-logiques en m'appuyant sur des médiévistes reconnus et sans doute plus fiables que Barante.
  • Jean le Bon hérite du duché de Bourgogne du fait de sa mère (Jeanne de Boulogne), fille de Robert II de Bourgogne (référence: page 290 de La guerre de Cent Ans de Jean Favier (Fayard 1980)). La loi salique n'a rien à voir là-dedans car i) le duché n'est pas un apanage à l'époque (la loi n'a jamais été supposée "s'appliquer" aux fiefs simples) et ii) cette fameuse loi n'a été réellement utilisée qu'à partir de 1410 (Jean de Montreuil), a posteriori pour justifier de l'éviction des femmes dans la succession royale (référence: page 862 du Dictionnaire de la France médiévale de Jean Favier (Fayard 1993)).
  • Dans le même Dictionnaire de la France médiévale, page 171, dans la descendance de Philippe de Hardi, Marie de Bourgogne n'est pas qualifiée de duchesse de Bourgogne alors que ses prédécesseurs le sont sans exception. À l'article la concernant (page 618), elle n'est pas désignée comme duchesse de Bourgogne mais comme héritière de l'État Bourguignon, ce qui n'est pas vraiment la même chose!
  • Enfin, pour tordre le cou à l'idée que les règles de succession dans le duché de Bourgogne, apanage et non fief simple, seraient applicables, je citerai Robert-Henri Bautier dans La royauté in La France médiévale, sous la direction de Jean Favier (Fayard 1983) (page 177): « Il ne s'agissait plus de la remise pure et simple d'un fief à condition d'hommage, mais d'une vaste province qui ne serait transmissible qu'aux héritiers masculins, donc non transportable par des filles à d'autres maisons, qui ne pourrait faire l'objet d'un démembrement entre des héritiers multiples, où le roi conserverait des droits supérieurs: appels judiciaires, garde des églises, collation aux bénéfices ecclésiastiques relevant du roi, frappe de la monnaie... ». Voilà à mon sens qui ramène les prétentions des héritiers de Marie de Bourgogne (voir Charles Quint) à leur juste valeur...
Je vais donc rétablir mon terme d'auto-proclamée et je ferai appel à l'arbitrage de connaisseurs membres de Wikipédia si tu persistes dans une posture qui pourrait sembler dictée par tes origines bourguignonnes s'élevant contre ce qui de ton point de vue pourrait passer pour une annexion pure et simple. Cordialement, --  Sire Enguerrand   Un bref ou une missive? 20 avril 2008 à 12:45 (CEST)Répondre


Je constate que dans tous ces raisonnements, aucun, et pour cause, ne répond de façon précise aux arguments clairs et nets que j'ai donnés précédemment. Toutes les justifications ici tirées de la "France Médiévale" sont "à côté" et noient l'évidence derrière un rideau de fumée, le plus énorme étant les extrapolations dudit Bautier que tu écris en gras, ce qui ne fait que mettre en évidence de façon plus flagrante leur contradiction avec le texte de la donation de 1364, où (j'ai vaguement l'impression de me répéter) ne figure nulle part la moindre restriction à une postérité masculine (moi aussi je sais mettre les textes en gras). De fait, tout cela est bien naturel. Comment pourrait-on justifier la spoliation de Louis XI autrement que par des arguments spécieux, quand, pour reprendre les termes de Georges-Henri Dumont, auteur de la biographie de référence de Marie de Bourgogne (Fayard, 1982), "les droits de Marie, comme nous l'avons montré précédemment, sont inattaquables"?
Je n'ai pas le temps de développer davantage maintenant, étant très pris ailleurs. Je ne pourrai pas d'ailleurs recopier ici toutes les pages définitives des "Droits de Charles-Quint sur le Duché de Bourgogne", d'Alfred de Ridder (Université de Louvain, 1890). Mais les bons passages, certes. Alors en attendant, je laisse subsister cet auto-proclamée, qui pourrait sembler dicté par tes origines françaises, mais ce n'est qu'une courte trêve, et assurément nous en irons jusqu'à l'arbitrage. To be continued... Fan2jnrc (d) 22 avril 2008 à 13:02 (CEST)Répondre
Bonjour,
à propos de cette discussion, il faut distinguer le titre de duc de Bourgogne, dans un contexte français de celui créé en 1477 dans un contexte impérial.
  • Le premier est porté par les princes capétiens de Robert Ier le Vieux à Philippe Ierde Rouvres, puis par les princes Valois de Philippe II le Hardi à Charles le Téméraire. Ce titre retourne à la Couronne et est parfois donné au fils aîné du dauphin, quand il y en a un.
  • En 1477, l'empereur germanique crée pour Marie de Bourgogne le titre de duchesse de Bourgogne et qui ne correspond pas en terre au duché de Bourgogne. Ce titre impérial se transmet ensuite aux Habsbourg, puis aux rois d'Espagne.
Cordialement, en espérant que cette explication vous éclaire. Odejea (♫♪) 23 avril 2008 à 13:45 (CEST)Répondre
Bonjour, et un grand merci pour cette explication éclairante et convaincante... Cordialement, --  Sire Enguerrand   Un bref ou une missive? 23 avril 2008 à 18:20 (CEST)Répondre
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