Walendy Udo - Vérité Pour L Allemagne
Walendy Udo - Vérité Pour L Allemagne
Walendy Udo - Vérité Pour L Allemagne
VERITE
L’ ..hypothèse selon laquelle l’Allemagne serait coupable du déclenchement de la
ISBN 978-0-906879-99-3
Udo Walendy
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POUR
L’ALLEMAGNE
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Historical Review Press
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PO Box 62, Uckfield, Sussex, TN22 IZY, UK
Website: www.ety.com/HRP
UDO WALENDY
Copyright by
Verlag für Volkstum und Zeitgeschichtsforschung
D-32602 Vlotho / Weser
Druck: Kölle Druck GmbH, D-32361 Pr.Oldendorf
2002
ISBN 978-0-906879-99-3
2
Table des Matières
Leitmotiv: Vérité pour l’Allemagne 5
Résoudre la question des responsabilités de la guerre:
Une condition préalable à toute paix future 10
Versailles (1919) face à la question des responsabilités de la guerre 16
Jugements portés contre l’Allemagne depuis 1919
La peur comme moteur fatal de l’agitation 26
Winston Churchill et la «philosophie sanguinaire» 49
Vienne — Munich — Prague 72, 88, 122
La Pologne veut la guerre
Des terres allemandes aux mains des Polonais 140
Les revendications territoriales de la Pologne 149
La Pologne face à ses minorités
Principes fondamentaux 163
1938-1939: la situation s’aggrave 173
La politique étrangère de la Pologne envers l’Allemagne
Stratégie 184
De «Munich» à la guerre 194
Les interventions polonaises contre Dantzig 209
Hitler face à la Pologne
Sa position de principe à partir de 1933 225
Les propositions allemandes du 24 octobre 1938 229
Pourquoi avoir choisi cette date?
Le déroulement des négociations 233
Du printemps jusqu’au mois d’août 1939 240
L’état de l’armement en 1939
-Allemagne 255
Forces aériennes 270
Forces navales 271
-Grande-Bretagne 273
-France 276
-Tchécoslovaquie en 1938 278
-Pologne 278
-Union soviétique 279
Préparation psychologique à la guerre 281
La politique étrangère des grandes puissances à la veille de la guerre
Grande-Bretagne
La politique de «l’équilibre européen» dans les années précédant la guerre 290
3
La politique allemande de la Grande-Bretagne depuis «Munich»
jusqu’au 15 mars 1939 308
La réaction britannique au 15 mars 1939 316
Le blanc-seing anglais à la Pologne du 31 mars 1939 324
Politique de rumeurs et d’encerclement de mars à août 1939 340
L’extension du chèque en blanc du 25 août 1939 361
Objectif de la guerre: l’anéantissement de l’Allemagne 369
Les États-Unis d’Amérique 377
L’ Union soviétique 404
Les derniers jours de paix
Le pacte de non-agression germano-soviétique 420
L’ordre de marche du 23 août 1939 423
Les activités du gouvernement britannique du 25 au 28 août 429
L’entretien du 29 août entre Hitler et Henderson 441
Collaboration entre Londres et Varsovie, du 29 au 31 août 446
Initiatives du gouvernement du Reich 454
Un ambassadeur polonais indolent 460
La «ligne de conduite» de Lord Halifax 463
La responsabilité de la guerre devant le tribunal de Nuremberg 481
Documents hostiles à Hitler
Revendications d’espace vital dans «Mein Kampf » 490
«Documents-clés» du TMI
sur les conférences internes de Hitler 493
Le «Rapport Hoßbach»
Allocution de Hitler devant les commandants en chef
de la Wehrmacht le 5 novembre 1937 494
Allocution de Hitler devant la presse allemande
le 10 novembre 1938 498
Allocution de Hitler devant les officiers supérieurs
de la Wehrmacht le 23 mai 1939 499
Allocution de Hitler devant les commandants en chef
de la Wehrmacht le 22 août 1939 504
Allocution de Hitler devant les commandants en chef
de la Wehrmacht le 23 novembre 1939 514
Mémoires tchécoslovaques pour la Conférence de Paix de Paris
1919-1920 516
4
Leitmotiv: Vérité pour l’Allemagne
5
données capitales pour la question des responsabilités de la guerre et plus
généralement pour la vie des hommes et des peuples. Il est nécessaire de se
débarrasser des dogmes politiques, des préjugés et des explications gros-
sières, si l’on veut avoir une vue plus large de l’histoire des peuples et
pouvoir porter un jugement d’ensemble impartial. Vouloir imputer toutes
les responsabilités de la guerre aux seuls Allemands revient à créer une nou-
velle mentalité de haine.
La propagande de guerre des alliés de la première guerre mondiale, qui
consistait la plupart du temps à répandre la haine par le mensonge, a fini par
devenir le fondement spirituel des peuples, du fait que les hommes politiques
et les hommes d’affaires qui en furent les initiateurs sont restés en poste
après la guerre et ont continué d’exercer leur influence sur l’opinion publique.
Ce processus s’est répété dans les mêmes conditions lors de la seconde
guerre mondiale, mais les Alliés victorieux ont perfectionné leur tactique.
Les thèses développées dans leur propagande sont devenues par leur soin les
bases «historiques» du comportement de «tous» les peuples civilisés. Quoi
d’étonnant à ce que nous soyons confrontés à des crises mondiales de plus
en plus graves?
Seul celui qui sait apprécier également la pratique politique et militaire
des deux parties en présence et a conscience que les actes des responsables
de la politique et des peuples ne sont pas uniquement le fruit du libre-
arbitre, d’un calcul prémédité et de bonnes ou de mauvaises intentions, peut
comprendre les événements tragiques de la seconde guerre mondiale. On ne
peut porter de jugement sur cette époque que si l’on s’est efforcé de consi-
dérer objectivement la question des responsabilités de la guerre. Aucune
tentative de cet ordre n’a jamais été entreprise officiellement jusqu’ici.
Dans cette enquête, l’auteur s’est efforcé de rassembler des documents
sur un certain nombre de faits historiques et d’en faire une présentation qui
sera utile pour l’avenir. Pour pouvoir comprendre l’histoire, il faut savoir et
admettre que la politique est inséparable du pouvoir et que les moyens et les
méthodes employés par tout homme politique, fût-il allemand, fût-il Adolf
Hitler, lui sont en grande partie dictés par l’adversaire. Sous peine de suc-
comber, Hitler a dû employer les mêmes armes que son adversaire; il serait
donc injuste de ne reprocher qu’à lui seul l’usage des moyens et des métho-
des en question.
Prenons en considération certaines mesures prises par la NSDAP. Ont-
elles caractérisé le national-socialisme, ou plutôt les circonstances qui ré-
gnaient à l’époque? De sanglants soulèvements communistes ont été à l’ori-
6
gine de la République de Weimar.2) Dès le mois de janvier 1919, la direction du
parti social-démocrate allemand SPD levait les premières troupes de volontaires
pour combattre ces insurrections, entre autres le Rot-Front-Kämpfer-Bund, le
Stahlhelm (Casques d’acier), le Reichsbanner Schwarz-Rot-Gold (Bannière
d’empire), (ultérieurement «Eiserne Front»), la Rote Marine, les Corps francs,
le Wehrwolf, le Jungdeutscher Orden et les très nombreuses unités de pro-
tection. Il faut se rappeler que ni la direction autoritaire, ni les dictatures
présidentielles, ni la propagande, ni l’interdiction de partis d’opposition, ni
les camps de concentration ou les prisons pour détenus politiques, ni
l’antisémitisme, ni le réarmement ou le service militaire obligatoire, ni les lois
d’exception en temps de crise, ni la «politique de puissance», ni la stratégie
militaire, ni les crimes de guerre ne sont des inventions de Hitler, de la NSDAP
ou du peuple allemand. Ces phénomènes n’ont nullement été bannis de l’histoire
mondiale après 1945. Des pratiques semblables de gouvernement, qui se
multiplient aux quatre coins du monde, paraissent de nos jours attirer aussi
peu l’attention que les actes des adversaires de l’Allemagne de 1933 à 1945 ou
ceux des puissants de ce monde auparavant. Or aucune morale unilatérale
n’est en mesure de résoudre les problèmes politiques mondiaux. Si l’on veut
combattre ces phénomènes visiblement intemporels, objectif vers lequel
tendent tous nos efforts, il nous faut diriger nos regards au-delà des frontières
de l’Allemagne.
La souveraineté des peuples inclut le droit à la révolution dans la mesure
où elle peut vaincre un état de chaos intérieur et contribuer à restaurer le
crédit de ce pays à l’étranger. Cela vaut à plus forte raison encore pour un
parti qui a accédé légalement au pouvoir. De quelque manière que l’on
puisse voir les choses, notre jugement ne doit pas être lié à des considérations
d’intérêts nationaux: nous devons partir de principes valables et impératifs
pour tous les peuples. Il ne doit pas être influencé non plus par certains
événements qui ont pu se dérouler dans des moments de crise, à une époque
de guerre totale. Dans l’histoire, nous avons affaire à une foule d’événements
condamnables. Cela ne nous décharge pas du devoir de rechercher un critère
2) Le soulèvement des matelots à Kiel, le 3 novembre 1918, a donné le signal d’une rébellion
armée qui s’est bientôt étendue à la plupart des villes de l’empire allemand. Les insurrections
d’obédience communiste se sont multipliées. Pour ne citer que les premières d’entre elles:
Berlin, janvier 1919 (156 morts en une semaine); Halle, mars 1919; grèves générales et
affrontements entre révolutionnaires et forces de l’ordre dans de nombreuses villes (plus de
1000 morts pour la seule année 1919); Munich, avril-mai 1919, proclamation de la république
des soviets (800 morts); territoire de la Ruhr, mars-avril 1920 (quelque 1000 morts en trois
semaines) – tout cela à une époque où personne ne parlait encore de Hitler. H. Prinz zu
Löwenstein, Deutsche Geschichte, p. 511.
7
d’appréciation.3) Or on ne peut trouver ce critère que dans une vision objective
de l’histoire, qui en inclut tous les aspects essentiels. La question des
responsabilités de la guerre se trouve au cœur de ce débat; elle est devenue,
particulièrement à notre époque de guerres mondiales, une question de
puissance, de doctrine et de dogme. On a l’impression qu’il ne s’agit pas en
l’occurrence de rechercher la vérité, mais d’interpréter ces responsabilités
de guerre en vue de les rendre utilisables pour certains groupes de pression.
Pourquoi s’étonner dès lors si des intérêts nationaux ou «prolétariens»
décident de l’interprétation et de l’appréciation à donner à des faits
secondaires?
Déclarer une guerre, alors que ses propres intérêts ne sont pas menacés,
et étendre ainsi le conflit à un autre peuple est un acte dont la gravité ne doit
pas être méconnue. Et c’est là précisément l’origine de la seconde guerre
mondiale, qui a coûté la vie à quelque 55 millions d’êtres humains; tous les
autres événements n’en sont que des conséquences.
Le 3 septembre 1939 l’Angleterre et la France déclarèrent la guerre à
l’Allemagne. Ce faisant elles transformaient en guerre mondiale ce qui
n’était qu’un litige territorial limité à propos de Dantzig et tout à fait
soluble entre la Pologne et l’Allemagne. On ne peut comprendre le sens à
donner à ces événements qu’après analyse de l’enchevêtrement des causes
et effets qui ont poussé ces deux grandes démocraties européennes à opter
pour la guerre plutôt que pour la négociation.
On ne peut pas davantage se faire une idée juste de la situation si par
exemple on ignore les principaux crimes de guerre commis par les Alliés ou
futurs alliés avant et après le 3 septembre 1939 (cf. p. 45, n. 40), ou si l’on
ne tient pas compte du fait que l’Union soviétique s’est décidée à engager la
guerre contre l’Allemagne (pour la destruction du fascisme et l’extension
de la révolution mondiale) dès mai-juin 1940, soit un an avant le déclenche-
ment de la guerre germano-soviétique (ce fait a été confirmé officiellement
13 ans plus tard par les Soviétiques; cf. p. 404 et suivantes). L’auteur s’est
fixé pour objectif ici de faire la lumière sur les connaissances historiques
et de créer les conditions à partir desquelles il sera possible de tirer des
leçons de l’histoire et des conclusions pour l’avenir. Ainsi pourra-t-on
peut-être éviter une troisième guerre mondiale. L’exposition des faits
réveillera sans doute de vieux ressentiments nationaux de la part des
vainqueurs mais elle enterrera certains dogmes cimentés par des années de
propagande. On ne peut toutefois refuser la discussion en invoquant
8
péremptoirement la politique nationale-socialiste à l’encontre des Juifs pendant
la guerre. Il doit être permis à un Allemand de lever la charge qui accable le
nom «Allemand» en s’engageant – uniquement avec les armes de l’esprit –
dans un combat pour la paix du monde.
En tâchant de rétablir la vérité et de démasquer dans ce livre tous les
mensonges de propagande, l’auteur espère apporter une première contribution
pour atteindre cet objectif. Mais il ne s’agit, dans Vérité pour l’Allemagne,
que du premier chapitre d’une œuvre qui, dépassant le domaine historique,
abordera le domaine des sciences physiques et naturelles. Les questions qui
se posent, concernant les responsabilités de la guerre et l’avenir de
l’humanité ne sont plus uniquement politiques, elles sont aussi idéologiques.
Et ces dernières prennent elles-mêmes leur source dans les lois de la
nature.
Cette «conception globale du savoir» se donne pour objectif de com-
prendre, pour mieux s’en préserver, un mécanisme qui a abouti à la deuxiè-
me guerre mondiale et qui engendre ou engendrerait une troisième guerre
mondiale.
9
Résoudre la question
des responsabilités de la guerre,
une condition préalable à toute paix future
Tels des ouragans, deux guerres mondiales se sont abattues sur l’Europe.
Ceux qui ont survécu à ces tempêtes de la mort et de la misère sont
demeurés comme pétrifiés, sans comprendre. D’innombrables villes se sont
transformées en un tas de ruines et de cendres. Sur tous les fronts, des
armées entières pénétrées d’idéalisme ont versé leur sang, croyant servir
une cause juste. Femmes, enfants et vieillards ont trouvé la mort sous les
décombres, sous les bombes et le phosphore déversés par des escadrilles
aériennes ennemies. Des millions de personnes ont accepté leur destin avec
stoïcisme et bravoure. Combien de destinées ne se sont-elles pas
transformées en des tragédies insensées!
Qui est responsable de ces événements dramatiques? Un homme? Une ou
plusieurs cliques de criminels? Une «conspiration mondiale» de capitalis-
tes? Les «Juifs»? Les «nazis»? Les «fascistes»? Les «communistes»? Une
humanité chargée du «péché originel»? Dieu? Est-ce la nature, avec ses
innombrables lois cachées à nos yeux, qui fait que de minimes particules –
les hommes – ne cessent de se combattre sur une planète pourtant si
insignifiante dans l’immensité du cosmos? Y a-t-il un responsable? Est-ce
la destinée, la volonté de Dieu ou le hasard qui fait que les hommes sont
libres d’accomplir leur destinée comme ils l’entendent? La victoire et la
défaite ne sont-elles que l’expression du jugement rendu par l’histoire sur
les peuples et les individus? La vérité, la noblesse d’âme, la droiture,
l’amour, l’esprit d’humanité et le progrès triomphent-ils toujours dans ce
monde?
Seul le savoir peut nous éclairer sur ces questions élémentaires; la
croyance ne peut y parvenir. La gravité de la situation, la misère, les millions
de morts, de blessés, tous les peuples touchés par la guerre nous invitent à
résoudre cette énigme avec le sérieux, l’objectivité et le courage nécessaires.
Il va sans dire qu’une méthode de travail scientifique s’impose.
La recherche scientifique exige l’absence de tout préjugé et une indé-
pendance totale à l’égard des puissances politiques. L’humanité n’a que
faire de théories, d’hypothèses et de doctrines contradictoires. Et c’est
justement parce que nous savons qu’aucune croyance, aucune doctrine
10
scientifique ou politique ni aucune philosophie n’ont jamais apporté
d’explication définitive, claire, juste et précise aux phénomènes de ce
monde, que nous devons faire la critique de tous les dogmes politiques, en
particulier des plus intolérants d’entre eux et de ceux qui s’insinuent le plus
profondément dans la destinée de l’humanité. Les conséquences de ces
deux dernières guerres mondiales ont été trop désastreuses et les contra-
dictions trop manifestes pour que les peuples puissent plus longtemps
accepter comme explication de leur origine la folie, la sottise, la volonté de
puissance, la recherche du profit, la barbarie, l’erreur de calcul ou une
soudaine défaillance nerveuse.
En dépit des dévastations survenues dans le passé, de l’expérience de
deux guerres mondiales et de la misère qui a régné dans tous les pays
touchés, l’homme voit poindre quelques décennies seulement après la fin de
la plus terrible des guerres le danger d’un troisième conflit mondial. Face à
une réalité impitoyable, il cherche désespérément une issue, une réponse
satisfaisante aux questions qui le tourmentent. Ne peut-on empêcher que les
hommes se combattent? D’où cela provient-il? Par le moyen de la guerre, la
nature a-t-elle voulu mettre un frein à la multiplication illimitée de notre
espèce? Cette nature connaît-elle la justice et la pitié? Est-ce délibérément
que nos ancêtres ont choisi de vivre dans la misère, alors qu’il leur était
possible de se prononcer pour la paix? Pendant des millénaires, ils ont
aspiré à la liberté, à l’égalité, à la fraternité et au bonheur. Leurs déclarations
en faveur de la paix n’étaient-elles que de vaines paroles, dénuées de sens,
par lesquelles ils ont induit les peuples en erreur? Chaque génération n’a-t-
elle pas mis son point d’honneur à surpasser les précédentes en développant
l’altruisme et l’amour du prochain?
Il semble que l’on ait de tout temps essayé d’étouffer l’idéalisme de la
jeunesse et de nier ses plus nobles motivations. Mais qu’espère aujourd’hui
la nouvelle génération? Qui peut prétendre être plus fort et plus avisé que
ses ancêtres?
Si nous avions voulu les surpasser par notre lutte pour le maintien de la
paix, nous serions parvenus depuis longtemps déjà à écarter une fois pour
toutes les menaces de guerre; nous avons les moyens techniques de rendre
les peuples plus réceptifs à une bonne entente internationale. Le non-sens
de la guerre n’est jamais apparu avec plus de clarté qu’aujourd’hui. On a
déclenché deux guerres mondiales d’une atrocité inimaginable pour «abolir
les guerres», «rendre les peuples mûrs pour la démocratie», «vaincre la
tyrannie» et «rétablir l’esprit d’humanité», tout cela en vain. Chaque fois, on
a noté une aggravation nouvelle de l’injustice et des rivalités, ainsi qu’une
multiplication des sujets de discorde entre les peuples. Malgré l’existence
11
de nouveaux rapports de force, les phénomènes qui ont de tout temps
conduit aux guerres et les ont caractérisées: les slogans, la propagande, la
malhonnêteté, l’égoïsme, le refus du principe d’autodétermination des
peuples et la politique désastreuse de la haine et de l’intransigeance, toujours
au nom de valeurs humanitaires, sont plus manifestes que jamais. L’histoire
de l’humanité n’a jamais été réglée par la raison ou la justice, ni par la
fraternité, la générosité ou le progrès.
Une culpabilité de guerre fabriquée de toutes pièces, imposée aux moyens
de puissantes pressions politiques, a servi de point de départ et de justification
pour instaurer une nouvelle forme de société créée par les forces armées
des vainqueurs. Malgré la réfutation de cette thèse de propagande par la
recherche historique, malgré la violation manifeste par les Alliés du principe
d’autodétermination des peuples, et malgré l’instauration de structures socia-
les «démocratiques», la liberté d’expression, d’enseignement et d’action
s’arrête au principe de culpabilité de guerre, décisif pourtant pour la destinée
des peuples et de l’humanité.
Si nous entreprenons de faire une rétrospective historique, nous som-
mes tentés de nous demander si le monde s’est transformé au cours des
siècles. De nouvelles formes de domination sont apparues, qui ont succédé
à celles du passé, mais les structures sociales des sociétés antiques étaient-
elles bien différentes de celles d’aujourd’hui? Malgré la similitude des
situations dans l’histoire, sous des noms parfois différents, et avec des
nuances, il nous faut tenir compte de certains éléments nouveaux:
1) La capacité de jugement et la position sociale du citoyen «éclairé»
d’aujourd’hui;
2) L’apparition et l’ampleur prise par des moyens de communication
nouveaux, véritables formateurs de la vie moderne;
3) Les dimensions catastrophiques d’une guerre moderne;
4) Les problèmes nouveaux posés par son ampleur (la destruction de
toutes les valeurs établies, le danger de suicide collectif);
5) Notre expérience de toutes les formes de gouvernement possibles;
6) Les différents aspects de la co-existence entre les peuples.
L’homme pouvait-il faire davantage pour tenter de régler pacifiquement
les différends entre les peuples que de créer des institutions internationales
(Société des Nations, ONU) avec leurs annexes multiples, et les in-
dispensables Cours d’arbitrage? Ces institutions n’ont pas été créées pour
endormir les peuples, mais pour éveiller une conscience internationale.
Même si leurs conceptions, leurs actes, leurs règles de procédure et leurs
statuts sont souvent en contradiction avec les nécessités de la politique
internationale et le droit des peuples, on doit reconnaître la présence de
12
telles organisations.
L’homme politique doit tenir compte de la volonté souveraine des autres
hommes d’État: la collaboration internationale exige un libre consentement
des individus. Il manque à la politique mondiale une puissance, une loi et un
ordre de valeurs supra-nationaux. Est-ce faute de bonne volonté de la part
des hommes si la paix dans le monde est sans cesse menacée? Le cas
échéant, un gouvernement mondial pourrait, par d’autres chemins, parvenir
au maintien de la paix. Il devrait toutefois s’appuyer sur la confiance de
toutes les nations. Là, plusieurs conditions s’imposent, notamment une vue
objective de l’histoire, particulièrement de celle des hommes d’État et des
systèmes politiques dont la loi du destin a permis la destruction, et la
compréhension des facteurs de causalité auxquels l’humanité est soumise.
À ces conditions s’ajoute l’obligation de s’en tenir à des valeurs
universellement reconnues. Durant ces cent dernières années, la pratique a
montré que les organisations internationales ont toujours été créées à partir
de coalitions de puissances victorieuses et que la culpabilité ou la non-
culpabilité des États belligérants a directement dépendu du sort des armes.
Ainsi créées, les organisations internationales se sont efforcées de maintenir
une image fausse et partiale de l’histoire, puis de lui donner une valeur
«internationale» et «conforme au droit des peuples». C’est ainsi que les
organisations internationales se sont toujours refusées jusqu’ici à adopter
une attitude objective, à entreprendre des recherches historiques dans le but
de découvrir la vérité et qu’elles se sont toujours opposées à toute
modification du statu quo qui aurait exigé l’application du droit et la
reconnaissance de la vérité historique mais qui aurait aussi pu créer les
conditions d’une paix durable. Il n’est donc pas étonnant que les organisations
internationales ne bénéficient pas de la confiance des peuples et que les
diverses nations ne se sentent nullement liées par leurs arrêts. On a pu voir
que, profitant de sa victoire, le vainqueur avait déjà pu une fois s’attaquer
aux conceptions de droit de son adversaire et les déclarer criminelles. Il
n’avait pourtant aucun droit d’imposer ses conceptions personnelles à un
pays qui lui était égal en droit. Il va sans dire que le recours à de telles
méthodes est à la fois en opposition au droit des peuples et inhumain, pour
ne pas dire criminel.
D’autre part, il ne résout aucun des problèmes qui se posent. Les grandes
puissances – desquelles seules peuvent survenir les guerres futures – ne
sont prêtes à dialoguer que sur un pied d’égalité. Et c’est dans cet esprit que
l’homme politique, tourné vers l’avenir, et l’historien, confronté avec le
passé, devront se mettre au travail.
La guerre en tant que telle n’appartient pas qu’au passé, mais elle exige
13
aussi, aujourd’hui comme demain, que les peuples se tiennent prêts en cas
d’alarme, car elle n’est pas liée au temps et peut survenir à toutes les
époques. Toute personne souhaitant faire une tentative d’explication de ce
phénomène doit dès maintenant renoncer à établir des liens avec une époque,
un lieu, une puissance ou une idéologie.
La guerre mondiale est une tragédie pour toute l’espèce humaine, et non
pas seulement pour un peuple ou un parti. Nous ne pourrions jamais en
découvrir les causes si nous refusions la parole à notre ancien adversaire
sous prétexte que le sort des armes lui a été défavorable. L’humanité entière
veut être entendue et elle y a droit. Par égard pour le passé et pour l’avenir,
il est du devoir de tout homme politique et chercheur en histoire de l’écouter.
Les proportions gigantesques atteintes par les conflits mondiaux ont
amené la question des responsabilités de guerre au centre du débat dans
l’opinion publique. En enfermant Napoléon aux îles d’Elbe et de Sainte-
Hélène, on avait pu éluder cette question. Au vingtième siècle, trop de
passions se sont acharnées sur la recherche des origines, sur les fruits de
cette recherche et sur les leçons qu’il fallait tirer pour l’avenir. Des millions
de morts, de blessés, de sinistrés, de gens persécutés et de réfugiés
demandent la condamnation des coupables. Ils demandent que soient res-
pectés leurs droits individuels et les droits de leur peuple. L’absence de
tribunal international ou même d’une commission internationale pour la
recherche des causes de la première guerre mondiale, disposant des archi-
ves de tous les pays belligérants, semble avoir favorisé le déclenchement de
la seconde guerre mondiale. Même si l’on ne pouvait espérer, par le recours
à des exécutions capitales, dissuader les hommes politiques de livrer des
guerres massivement meurtrières, la connaissance des origines du conflit,
des coupables et des normes internationales du droit auraient peut-être pu
empêcher une nouvelle catastrophe de se déchaîner. Or on a recommencé
les mêmes erreurs en 1945.
On ne peut imputer au peuple ou au gouvernement allemand la responsa-
bilité de cette absence de juridiction. Toutes les propositions faites du côté
allemand dans le sens de la création d’une commission internationale
d’investigation des causes et des origines de la première guerre mondiale
ainsi que l’ouverture de toutes les archives se sont heurtées à un refus des
puissances victorieuses. Ces dernières n’avaient nullement l’intention, comme
elles le proclamaient, de faire régner la justice et le droit et de garantir par
ce moyen la paix mondiale.
Le professeur suédois Sven Hedin, spécialiste des questions d’Asie
centrale, a très justement écrit:
14
«Quand on étudie l’histoire contemporaine, il est rare de pouvoir
affirmer avec certitude qu’une guerre entre deux pays ou deux blocs de
nations commence lors de la déclaration de guerre, ou lors du déclen-
chement des hostilités. Les circonstances qui ont rendu inévitables les
deux guerres mondiales que notre génération a dû subir remontent as-
sez loin dans le temps. L’attentat de Sarajevo n’est pas un simple coup
du hasard, il a seulement fait éclater l’orage qui menaçait l’Europe de-
puis très longtemps.
La seconde guerre mondiale, quant à elle, n’a certainement pas
commencé le 1er septembre 1939, lorsque les troupes allemandes ont
franchi la frontière germano-polonaise. Elle tire sa source de la pre-
mière guerre mondiale, ou plutôt du jour où les représentants de trente-
deux nations se sont réunis dans la Galerie des Glaces de Versailles
pour apposer leur signature au bas d’un document que l’on a faussement
appelé un traité de paix.»1)
1) S. Hedin, Amerika im Kampf der Kontinente, p. 60. La date et le lieu d’impression des
ouvrages cités en référence sont indiqués dans la bibliographie.
2) G. Moltmann, Amerikas Deutschlandspolitik im Zweiten Weltkrieg, p. 4.
15
Versailles (1919) face à la question
des responsabilités de la guerre
16
l’humanité et contre la liberté des peuples qui ait jamais été commis
par une nation dite civilisée. Des années durant, les dirigeants alle-
mands, fidèles à la vieille tradition prussienne, ont tenté d’imposer leur
hégémonie en Europe. Par la suite, ils ont essayé de dominer et de
tyranniser l’Europe assujettie, comme ils avaient dominé et tyrannisé
l’Allemagne.
Pour atteindre leurs objectifs, ils ont fait tout ce qui était en leur
pouvoir pour persuader leurs sujets qu’en matière internationale, puis-
sance et droit étaient identiques.
Leurs préparatifs terminés, ils ont incité un de leurs alliés ... à
déclarer la guerre à la Serbie. Pour s’assurer du déclenchement d’une
guerre généralisée, ils se sont refusés à toute tentative de conciliation
et à toute consultation jusqu’au moment où il a été trop tard, où était
devenue inévitable cette guerre mondiale qu’ils ont déclenchée et pour
laquelle seule l’Allemagne était véritablement préparée.
La responsabilité qui incombe à l’Allemagne ne se limite toutefois
pas au seul fait d’avoir voulu et déclenché cette guerre. Elle est respon-
sable de son caractère cruel et inhumain.
Les Allemands sont les premiers à avoir utilisé les gaz nocifs, ...
l’arme sous-marine ... et à avoir envoyé avec une insigne brutalité des
milliers de personnes, hommes, femmes et enfants, en déportation à
l’étranger. Ce sont eux qui se sont permis, sur la personne des prison-
niers, des actes devant lesquels les peuplades les plus primitives auraient
reculé.
Le comportement de l’Allemagne est pratiquement unique dans
l’histoire de l’humanité. On peut ainsi résumer l’énorme responsabilité
qui pèse sur elle: plus de sept millions de personnes sont enterrées en
Europe, tandis que plus de vingt millions d’êtres humains peuvent té-
moigner par leurs blessures ou par les maux qu’ils ont soufferts de ce
que l’Allemagne a voulu imposer sa tyrannie par la guerre. Ce sont les
raisons pour lesquelles les puissances alliées et les pays associés
déclarent avec force que l’Allemagne doit se voir imposer le paiement
de réparations de guerre. Le montant de ce tribut devra correspondre à
la limite de ce que l’Allemagne est en mesure de payer. La réparation
des fautes que l’on a commises est l’essence même de l’équité.
Les puissances alliées et les pays associés considèrent en consé-
quence que leurs propositions de paix ne sont que l’expression du droit,
conformément aux principes reconnus à l’époque de l’armistice...»
17
vigueur les notes de protestation des gouvernements de Weimar ainsi que
leurs demandes de réhabilitation et de révision de cette thèse, sans toutefois
offrir d’autres arguments que celui de la «puissance». Aucun des vainqueurs
n’a jamais présenté de rapport historique à l’appui de ses attaques verbales
contre l’Allemagne, et pourtant, ils se sont tous refusés à restreindre ou à
rétracter ces attaques au vu des résultats auxquels sont parvenus
ultérieurement les historiens. Lors de la conférence de Londres sur le sujet
des réparations de guerre, le Premier ministre britannique David Lloyd
George déclarait:
18
en mai 1919:
19
«Jamais une paix sérieuse et durable n’a été bâtie sur le pillage, la
torture et la ruine d’un peuple, encore moins sur celle d’un grand
peuple. Or le traité de Versailles n’est rien d’autre que cela.»4)
«Si nous étions le peuple vaincu et que nous nous voyions dicter de
telles conditions, nous ne nous soumettrions certainement pas à ces
obligations. Nous enseignerions à nos enfants au contraire à se prépa-
rer pour une nouvelle guerre de revanche qui pût se libérer du joug
intolérable, insupportable des vainqueurs. Les conditions posées ne
sont pas seulement un coup porté à l’Allemagne et à l’Autriche, elles
sont aussi un complot contre la civilisation.»5)
20
sailles et demandé à ce que soit créé un tribunal neutre qui prononce un
jugement équitable; en vain, naturellement. Les grandes puissances n’ont
pas réagi. Entre les nations, la confiance a disparu. Par ses exigences
démesurées, le «traité» de Versailles a favorisé la formation d’un front uni
en Allemagne, qui a pris à cœur de combattre cette injustice; ce front
d’action ne s’est pas seulement manifesté en paroles, il a également agi.
Un Anglais, Lord Buckmaster, déclare:
Mais ce n’est pas tout. Lloyd George a reconnu, le 7 octobre 1928, lors
d’un discours qu’il a prononcé dans le Guild Hall de Londres:
Les délégués alliés qui, munis des pleins pouvoirs, se sont réunis au
Petit Trianon le 8 mai 1919 lors de la Conférence de Paix, ont reconnu
qu’ils n’avaient aucune connaissance des problèmes de l’Europe centrale.10)
Pourtant, aucun de ces aveux n’a conduit à une modification quelconque de
la situation.
Les gouvernements de ces peuples ont toujours manqué à la parole qu’ils
avaient donnée à l’Allemagne et au monde. L’Allemagne a déposé les armes
en novembre 1918 en croyant que les 14 points auxquels Lloyd George pour
la Grande-Bretagne et Clemenceau pour la France avaient donné leur accord
(au même titre que les États-Unis), seraient respectés. Or, la convention
d’armistice a été violée dès le départ par la poursuite du blocus économique
contre l’Allemagne. Elle l’a été de nombreuses fois par la suite, à une
époque pourtant où aucun gouvernement allemand ne lui en avait encore
donné l’occasion et où Hitler ne faisait qu’entrer dans la vie politique. Voici
la liste de ces violations des engagements:
8) R. Grenfell, Unconditional Hatred, p. 84.
*) Les adjonctions aux citations (toujours entre crochets) n’ont pour but que de rendre le texte
plus compréhensible. Elles sont le fait de l’auteur.
9) K. Rabl, Das Selbstbestimmungsrecht der Völker, p. 97; Henri Lebre in Les Origines Secrètes
de la Guerre 1939-45, p. 17.
10) H. Lebre, op. cit., p. 96.
21
1. Non-respect de la souveraineté du Reich et de la libre détermination
de son peuple;
2. Annexion par la Pologne de certaines parties de la Haute-Silésie, en
dépit d’un plébiscite favorable au rattachement à l’Allemagne;
3. Violation par la Pologne des frontières fixées par le «traité» de
Versailles;
4. Annexion sans plébiscite du territoire de Memel par la Lituanie;
5. Appropriation illégale des colonies allemandes par la France et la
Grande-Bretagne (en violation avec l’art. 5 des 14 points du «règlement
impartial» auxquels avait souscrit le président Wilson);
6. Non respect des droits, garantis par le traité, des minorités allemandes
dans les territoires détachés du Reich;
7. Occupation militaire, en 1921 de Ruhrort, Duisburg, Düsseldorf,
Mühlheim et Oberhausen, ainsi que de plusieurs villes situées dans la partie
occidentale de l’Allemagne, et déplacement des frontières; occupation mi-
litaire de la Ruhr par la France, en janvier 1923;
8. Interdiction de l’union douanière entre l’Autriche et l’Allemagne
(sans parler de l’interdiction de toute unification de ces deux pays);
9. Non-observation des promesses de désarmement;
10. Décision ultérieure du Conseil de la Société des Nations de res-
treindre encore les libertés dont jouissait le territoire de Dantzig;11)
11. Expulsion des Allemands de souche (Volksdeutsche), notamment
des territoires détachés du Reich allemand; leur nombre atteignait un million
en 1922, sans compter ceux qui furent internés par les Alliés:
200 000 Allemands de l’étranger et des colonies
120 000 Alsaciens-Lorrains
500 000 réfugiés des provinces de Prusse occidentale (Posen) et de
Haute-Silésie
100 000 Allemands de Russie et des États Baltes.
Tous ces faits n’ont pourtant conduit à aucune autocritique de la part de
ces pays. Les voix isolées de quelques courageux ont été noyées dans le flot
constant de la haine anti-allemande. Cette haine semble avoir été dans ces
pays un bon alibi, voire une preuve de bon caractère et de civisme; elle est
aussi devenue le fondement même de la politique européenne et internatio-
11) La politique extérieure de la «Ville libre» de Dantzig était laissée à l’initiative de la Pologne.
Dantzig était territoire douanier polonais, son réseau de chemin de fer était rattaché à
l’administration polonaise et son port ouvert à tous les bateaux polonais, y compris les
navires de guerre. Par ailleurs, la Société des Nations se chargeait de la «protection» de la
«Ville libre». Aucune prérogative n’était laissée par contre au Reich allemand.
22
nale. Les puissances victorieuses, nullement impressionnées par les voix
des critiques, ont vu dans l’élaboration de leur traité un moyen adéquat de
réaliser leur politique au détriment de l’Allemagne. Ce pays a été affaibli,
démantelé, déchiré, isolé politiquement, ruiné sur le plan économique et
perpétuellement soumis à la menace d’une intervention militaire étrangère.
Tous les territoires qui avaient été détachés de l’Allemagne, [Dantzig, Prus-
se occidentale (Posen), Haute-Silésie et Silésie orientale, Memel, Sarre,
Schleswig septentrional, pays des Sudètes, Eupen-Malmedy, Tyrol du Sud et
Alsace-Lorraine,*)] ont constitué autant d’obstacles à une réconciliation
entre les peuples. Et, à n’importe quel moment, un front européen uni
pouvait se construire contre l’Allemagne.
Adolf Hitler déclarait le 17 mai 1933, lors d’un discours au Reichstag:
«Les espérances que l’on avait fondées dans la création d’une nou-
velle conception du droit international ont été détruites par le traité [de
Versailles]. Pour justifier toutes les mesures de ce diktat, il a en effet
fallu déclarer l’Allemagne responsable [de cette guerre]. Une telle
procédure est aussi simpliste qu’inique. À l’avenir, le vaincu devra
toujours porter la responsabilité du conflit, puisque le vainqueur a la
possibilité d’imposer ses thèses. Si ce processus a eu des conséquences
aussi désastreuses, c’est parce qu’il a ainsi justifié la modification des
rapports de force à la fin de la guerre en lui assurant une base juridique.
Les notions de vainqueur et de vaincu sont devenues le fondement d’un
nouvel ordre juridique et social international.»12)
23
en est resté au stade des expédients, destinés à maintenir précaire un
équilibre des forces.
Tout le tragique de l’histoire de l’entre-deux-guerres s’exprime à
travers l’impuissance de la Société des Nations.
L’Allemagne était le pays qui avait le plus de raisons de se méfier
d’une institution qui était issue d’une alliance entre vainqueurs.
La France a voulu pousser l’Allemagne vaincue aux dernières extré-
mités. L’Allemagne a été acculée à la misère, mais la France n’y a rien
gagné...
La création d’“États nouveaux”, qui s’appuyait sur le principe du
“droit à l’autodétermination”, n’a pas apporté de solution satisfaisante
pour la simple raison que ce droit n’a été accordé en pratique qu’à
certains peuples majoritaires...
Par suite, les milliers de kilomètres de frontière créés en Europe
centrale et orientale n’ont résolu aucun des problèmes économiques; au
contraire.» 13)
13) Unser Europa, Paris 1958, ouvrage édité sous les auspices de la commission culturelle
de l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe (Institut international des livres
d’étude), pp. 132, 219-221; contributions d’Henry Brugmans, recteur de l’Europa-
Kolleg de Bruges, et de Christopher Dawson.
14) Th. Heuß, Hitlers Weg, p. 152.
24
cain, qui reconnaît par ailleurs «que Hitler lui était antipathique»,15) écrit:
25
Jugements portés contre l’Allemagne depuis
1919
La peur comme moteur fatal de l’agitation
1) TMI = Tribunal militaire inter-allié, dont les références dans le présent ouvrage se
rapportent à l’édition en langue allemande (IMT, Der Prozeß gegen die Hauptkriegs-
verbrecher vor dem Internationalen Militärgerichtshof in Nürnberg vom 14. Nov. 1945
bis 1.Okt. 1946, vol. I - XLII, Nuremberg 1948).
26
politique après l’écrasement de l’Allemagne en 1945, nous obligent à analyser
ses différents aspects en remontant jusqu’au «traité» de Versailles de 1919.
Si l’on avait calomnié le gouvernement impérial, le Haut Commande-
ment de l’Armée, les traditions prussiennes et le peuple allemand pour
gagner la première guerre mondiale, on poursuivit avec zèle ces campagnes
de diffamation une fois la guerre terminée, afin d’affaiblir et d’abattre
l’Allemagne en temps de paix. On prit l’habitude, à une époque où l’Allemagne
était faible et désarmée de se servir des moyens de communication modernes
pour se moquer d’autres nations et d’autres gouvernements, en les traitant
au besoin de revanchards. On se retranchait toujours derrière l’inviolable
liberté d’expression. Les dirigeants de ces pays rejettent aujourd’hui encore
la plus légère responsabilité dans la dégradation de la situation européenne
après 1919. Les hommes politiques de l’époque qui avaient pris conscience
du danger n’ont pu s’affirmer face à une opinion publique hostile. Ceux qui
prétendent nier les vérités les plus évidentes et continuer à prêcher
l’injustice, qui distinguent les peuples civilisés (dont le leur) des barbares
(le peuple allemand), qui propagent la peur et appellent aux armes, doivent
savoir qu’ils jouent avec le feu; la co-existence pacifique entre les peuples
se fonde sur un respect mutuel. Ce sont précisément ceux qui ont parlé le
plus à l’époque de la «défense de la culture occidentale» qui se sont refusés
à respecter les conceptions européennes du droit héritées de la tradition. Au
nom de quoi prétendent-ils juger d’autres peuples et leur dicter la conduite?
Peuvent-ils raisonnablement alléguer la menace nationale-socialiste d’après
janvier 1933, alors qu’ils n’ont eux-mêmes jamais cessé de manifester leur
hostilité à l’Allemagne? Il ne s’agissait pas en l’occurrence de conceptions
du monde, de professions de foi, de principes philosophiques ou de partis
politiques, mais c’était uniquement la place de l’Allemagne dans le monde
qui était visée.
L’empereur Guillaume II avait déjà déclaré:
27
Cette politique de la peur ne se fondait pas que sur des faits que l’on
aurait pu interpréter de différentes manières, mais aussi elle se traduisait
par des jugements de valeur simplistes et dénués de tout fondement: on prê-
tait à l’Allemagne certaines intentions, certaines manœuvres et certaines
motivations. Au mois de septembre 1932, un gouvernement de la République
de Weimar avait déjà quitté la Conférence du désarmement: il ne pouvait
supporter plus longtemps la discrimination dont l’Allemagne était victime,
et jugeait irrecevables les raisons invoquées par la délégation française
pour justifier de nouvelles mesures de sécurité. Lloyd George, Premier
ministre britannique de 1916 à 1922, déclarait en septembre 1932:
Puis, deux ans plus tard, le 29 novembre 1934, dans un discours pronon-
cé à la Chambre des Communes:
28
«Ainsi, les Alliés imposèrent d’abord le désarmement, puis recon-
nurent leur propre devoir moral de diminuer leurs armées. Ont-ils fait
ce devoir, oui ou non? La seule réponse que nous puissions donner à
cette question est “non”, parce que c’était en fait après la première
guerre mondiale que la France a tâché plus que jamais de devenir la
première puissance militaire en Europe et a incité ses alliés d’Europe
centrale à réarmer, en particulier la Pologne et la Tchécoslovaquie.»6)
La France a:
29
ainsi à son arrivée au pouvoir. La politique des puissances victorieuses à
Versailles, qui est esquissée dans les points suivants, a eu des conséquences
diverses sur la communauté des États souverains, indépendamment du fait
qu’ils aient considéré qu’une révision du «traité» de Versailles était justifiée
ou ne l’était pas:
1. La thèse de la culpabilité allemande est élevée au rang d’un principe
international;
2. Refus à l’Allemagne de l’égalité des droits;
3. Violation du «traité» de Versailles par les vainqueurs et leurs alliés,
avec l’appui, ou du moins l’autorisation tacite, de la Société des Nations (cf.
pp. 21-22);
4. Non-respect des droits garantis aux Allemands de souche dont le
territoire a été détaché du Reich, et qui ont été expulsés par la suite de leur
propre patrie;
5. Non-respect par les Alliés des promesses de désarmement;
6. Rejet des tentatives de conciliation des différents gouvernements de
Weimar (ce n’est que dans les dernières années précédant 1933 que l’on a
pu trouver un terrain d’entente, encore n’était-ce que sur des points de
détail);
7. Boycott économique de l’Allemagne à partir de mars 1933 par les plus
grandes puissances, surtout les États-Unis;12)
8. Rejet de toutes les propositions allemandes de désarmement, entre
autres celles qu’Adolf Hitler a formulées jusqu’à 1935:
Désarmement intégral: rejeté.
Limitation générale des troupes à 200 000 hommes: rejetée.
Limitation générale des troupes à 300 000 hommes sous contrôle inter-
national et conclusion de pactes de non-agression avec tous les pays voisins:
rejetées.
Pacte concernant l’armée de l’air: rejeté.
Règlement européen: rejeté.*)
Ceux qui s’indignent du comportement de Hitler par la suite, devraient
12) Le magazine Der Spiegel publiait, le 10 février 1965, les phrases suivantes (p. 56):
«Une délégation d’anciens combattants juifs a menacé M. Heinrich Knappstein,
ambassadeur d’Allemagne, d’exercer toute son influence pour empêcher une réunifi-
cation de l’Allemagne si une amnistie pour les crimes de guerre était votée.
“Nous avons fait allusion à l’efficacité de notre boycott des produits allemands en
1933”, poursuit l’organe de presse de cette organisation, The Jewish Veteran. “Nous
sommes prêts à recommencer si c’est nécessaire”.» Voir aussi p. 44 et la citation en
note 38. F. Berber, Deutschland - England 1933-1939, pp. 27, 98, 106.
*) Sur les raisons invoquées pour ces rejets, cf. p. 256.
30
condamner tout d’abord cette politique des puissances victorieuses (de la
France particulièrement), dont «l’opinion publique et le parlement sont
toujours restés hostiles à tout accord avec Hitler».17)
Les événements évoqués ici ont été souvent lourds de conséquences:
9. Juste avant l’ouverture de négociations qui s’annonçaient prometteuses,
le gouvernement britannique publie, le 4 mars 1935, un livre blanc sur le
«réarmement illégal de l’Allemagne», dans lequel le système éducatif
national-socialiste est présenté comme un danger pour la paix universelle**)
et où l’on annonce un accroissement de l’armement britannique. Les Anglais
ont ainsi pris prétexte d’un réarmement allemand, qui d’après les propres
termes de l’ambassadeur français à Berlin était encore à l’état embryonnaire
en 1936 (soit un an après la parution de ce livre blanc), pour réarmer à leur
tour.13) C’est ainsi qu’une hypothèse dénuée de tout fondement des
«démocraties pacifiques» a, une nouvelle fois, contribué à une aggravation
de la tension européenne;
10. Prolongation de la durée du service militaire en France à deux ans
(décret du 6 mars 1935, entrant en application à partir du 15 mars 1935);
11. Convention signée entre les états-majors anglais, français et belge,
le 14 mars 1935;
Le 16 mars 1935, l’Allemagne a réagi aux faits illustrés dans les points 8
à 11 par la proclamation du service militaire obligatoire et par la répudiation
des conventions de désarmement du «traité» de Versailles, non sans avoir
auparavant mis en garde les pays intéressés des conséquences possibles
desdits faits;
12. Pacte d’assistance mutuelle franco-soviétique, du 2 mai 1935, rati-
fié et mis en application le 27 février 1936. Ce pacte a été signé à Paris
alors que la France connaissait très bien les buts poursuivis par les bolche-
viques et que l’on savait que le propre beau-frère de Staline, Lazar Kagano-
vitch, chef du bureau politique («Politburo») du parti communiste, avait
publié un an plus tôt, le 27 janvier 1934, dans le journal Isvestia, la phrase
suivante:
31
16 mai 1935;
14. Réagissant au pacte franco-soviétique entrant en vigueur une semaine
auparavant et à la menace communiste qui se faisait jour en France à travers
le gouvernement du Front populaire (novembre 1935), Hitler remilitarise
symboliquement (avec 19 bataillons) la Rhénanie, le 7 mars 1936, pour des
raisons de sécurité (danger d’un encerclement communiste), et afin de
montrer la volonté du Reich d’accéder à l’égalité politique. Il montre que,
par la signature d’un traité avec l’Union soviétique, la France a délibérément
violé les accords de Locarno de 1925. Par ce traité, la France s’est engagée
à déclencher les hostilités contre l’Allemagne, sans consultation préalable
de la Société des Nations, si l’une des puissances signataires déclare qu’elle
est l’objet d’une agression ou d’une provocation de la part de l’Allemagne.
On sait par ailleurs que pour l’Union soviétique, l’Allemagne depuis 1933 et
la NSDAP depuis ses premiers succès intérieurs n’ont cessé d’être les
agresseurs. On n’a aucun mal à s’imaginer qu’un accord tacite commun et
quelques déclarations habiles auraient suffi pour que les conditions d’une
guerre «défensive» fussent remplies.
À la même époque, Adolf Hitler déclare, dans un discours au Reichstag,
qu’il est prêt:
a) À créer une nouvelle zone démilitarisée, à condition que la France et
la Belgique fassent de même;
b) À signer avec la France, la Belgique et les Pays-Bas un pacte de non-
agression, garanti par la Grande-Bretagne et l’Italie, pour une durée de 25
ans;
c) À rentrer dans la Société des Nations puisque l’égalité politique aura
été rétablie entre temps.
Ces propositions ont été rejetées.
15. Doublement des effectifs de l’armée soviétique, en août 1936;
16. Réarmement de la Tchécoslovaquie, de la Pologne, de l’Union
soviétique, de la France et de la Grande-Bretagne.
Ce concept de la «sécurité de la France» a déjà été à la source de
32
nombreuses tensions. On ne peut exiger d’un État souverain, et moins
encore d’une grande puissance d’Europe centrale, qu’elle fasse cadrer sa
politique avec les conceptions de ses voisins. (Il suffit de reporter ce
schéma à la propagande marxiste, qui taxe ses adversaires de militarisme,
d’impérialisme et fustigent leur «esprit de revanche» jusqu’à ce que les
communistes aient réussi à imposer leur ordre). Quelques années avant
l’accession d’Adolf Hitler au pouvoir, Julius Curtius, ministre des Affaires
étrangères allemand, avait très justement dépeint le problème de la sécurité
européenne aux yeux du gouvernement français:
15) Chr. Höltje, Die Weimarer Republik und das Ost-Locarno-Problem 1919-1934, p. 208.
16) cf. p. 255 et suivantes du présent ouvrage.
33
11. Par son alliance avec la Grande-Bretagne;
12. Avec la Belgique;
13. Avec la Pologne;
14. Avec la Tchécoslovaquie.
D’autre part, la sécurité de la France n’était nullement menacée; aucune
déclaration du Reich n’avait pu faire planer le moindre doute à ce sujet.
Que pouvait donc opposer l’Allemagne à ses puissants voisins (la France
n’était que l’un d’entre eux)? Depuis 1918 elle n’avait pas un seul allié, et
jusqu’à 1936 son potentiel d’armement n’a jamais atteint, et de loin, celui
d’un seul de ses voisins. Contrairement à la France, l’Allemagne ne semble
pas s’être préoccupée de sa propre défense. Si elle avait transgressé la «loi»
britannique de l’équilibre des forces, l’Allemagne aurait sans doute adopté
une attitude conciliante, en toute justice et en toute objectivité, ce qui aurait
eu sur les autres pays une influence tranquillisante. L’Allemagne, soumise
au pillage des vainqueurs et de leurs alliés à partir de 1918, était placée
devant l’alternative suivante, quels que fussent d’ailleurs les hommes politi-
ques qui la gouvernaient: ou elle renonçait à ses droits et à son indépendance,
ou elle s’exposait au mécontentement d’une coalition de puissances
intéressées à son affaiblissement. Les puissances alliées ont refusé de
reconnaître les droits auxquels l’Allemagne pouvait légitimement prétendre,
et nié les conditions particulières qui existaient en Europe centrale et dont
tout gouvernement allemand devait obligatoirement tenir compte.
On a construit de toutes pièces un «danger allemand» à une époque où
aucune des conditions nécessaires pour justifier un tel propos n’était remplie.
En 1936, la France a conclu son pacte d’assistance mutuelle avec l’Union
soviétique en prenant prétexte de ce fameux «danger allemand». Il semble
qu’elle ne se soit pas rappelé que c’était une alliance franco-russe qui avait
déjà contribué au déclenchement de la première guerre mondiale. D’après
les déclarations de l’ambassadeur français à Berlin, l’opinion publique
française était «hostile» à une réconciliation avec l’Allemagne.17) Le 18 mai
1936, le baron Konstantin von Neurath, ministre des Affaires étrangères
allemand, pouvait déclarer à juste titre à William C. Bullitt, ambassadeur
des États-Unis à Paris:
34
Avec l’accession de Hitler au pouvoir, on a poursuivi cette politique de
la peur, en se refusant toujours à reconnaître ses propres fautes et à en tirer
les conséquences; n’avait-on pas devant soi la «bête noire de la société
démocratique, Adolf Hitler»? Certaines personnes ont pu insulter impunément
l’Allemagne et rendre Hitler responsable de tout. Les hommes politiques se
sont donc empressés de louer cette politique, espérant bien ainsi se gagner
la faveur du «monde» et renforcer la sécurité de leur propre pays. En réalité,
ces agitateurs se sont tellement écartés de leurs propres thèses d’une
politique d’égalité, de souveraineté, de justice et de paix, que les matières à
conflit se sont singulièrement multipliées. En pratiquant une politique basée
sur la peur, ils ont précisément atteint ce qu’ils voulaient éviter. On ne peut
refuser durablement un droit, en matière internationale, en ne se fondant
que sur un sentiment de crainte, moins encore s’il s’agit d’une crainte
injustifiée.
Lors d’une interview accordée au quotidien anglais Daily Mail, en 1933,
Adolf Hitler déclarait:
35
Adolf Hitler sur le Tempelhof Feld à Berlin, le 1er mai 1934:
36
de Weimar? Non, simplement ils pouvaient la prendre plus rapidement
de vitesse. Les Juifs du monde entier me haïssent. Je le comprends et je
l’accepte. Mais grâce à leur puissance, ils incitent le monde entier à
combattre notre conception de vie. Pourquoi l’Angleterre me hait-elle,
pourquoi les États-Unis, pourquoi la France? J’ai l’impression que je
pourrais m’entendre plus facilement avec Moscou qu’avec ces dé-
mocraties repues et gorgées d’or. Je suis inquiet, il m’arrive de ne
pouvoir trouver le sommeil lorsque je pense au concert de haine qui
s’abat sur nous.»23)
«Il n’y a pas de partisans de la paix plus acharnés que les anciens
combattants du front. Je suis persuadé que, plus que tout autre, vous
avez le droit d’exiger la paix et de la construire. C’est à ceux qui, quatre
années durant, ont connu l’enfer de la guerre, aux combattants du front
qui ont particulièrement à cœur de préserver cette paix qui nous est
chère, qu’il appartient d’organiser la vie des peuples... Ceux qui n’ont
pas connu les horreurs de la guerre peuvent encore parler d’une nouvelle
guerre fraîche et joyeuse. Nous savons, nous autres, ce que coûtent les
conflits entre les peuples.»24)
37
«À ma connaissance, personne en Allemagne ne s’est jamais avisé de
menacer publiquement une nation quelconque; par contre, c’est quoti-
diennement que je puis lire de telles menaces dans la presse démocra-
tique. On y parle régulièrement de mobilisation, de débarquement de
troupes, de pressions exercées sur des États avec lesquels nous vivons
en paix et souvent même avec lesquels nous avons d’excellentes relations.
Les dirigeants de ces nations font preuve d’une inadmissible légèreté,
pour ne pas employer de mot plus fort, en se refusant à mettre un frein aux
manifestations de haine de leur presse; ce n’est qu’à ce prix pourtant
qu’ils pourraient préserver le monde du malheur d’un nouveau conflit.»
38
son peuple avec un minimum d’esprit pratique, de sens de l’économie et
d’efficacité est irresponsable et indigne de ses fonctions, quoi qu’en pensent
les autres puissances.
La reprise économique de 1933 peut aussi devenir une «mobilisation
industrielle»:
39
l’étiquette du réarmement, on entend: la construction de casernes, de terrains
d’aviation, de centres d’étude et de recherche, de laboratoires et de bâtiments
administratifs, etc.; ce sont là des installations dont disposaient déjà les
grandes puissances mais qui manquaient à l’Allemagne, vu qu’elle n’y avait
pas «droit»; la construction d’autoroutes, de bateaux à vapeur, les usines
nationalisées telles que celles de la Volkswagen ou les Hermann-Göring-
Werke (entreprise d’extraction des minerais), sans oublier la production de
bottes et de camions;30) la réorganisation de l’aviation civile, qui avait été
négligée sous la République de Weimar. Tous les autres pays, et plus parti-
culièrement l’Angleterre et la France, avaient depuis longtemps déjà consacré
toute leur attention à l’aviation civile sans que la «conscience internationale»
s’en inquiète. Les sommes d’argent investies dans chacun des pays concernés
étaient infiniment plus élevées que celles prévues par Hermann Göring dans
les années qui ont suivi l’arrivée au pouvoir des nationaux-socialistes.31)
Sous l’étiquette de réarmement sont également compris: la confection
d’uniformes pour la Wehrmacht, pour le Service du travail (Reichsarbeits-
dienst), pour la SS, la SA, l’organisation Todt et les Jeunesses hitlériennes;
la création du front du travail (Arbeitsfront) – le livret ouvrier étant synonyme
de livret militaire – l’établissement du plan quadriennal, l’appel à la commu-
nauté populaire et à la camaraderie, l’éducation sportive et militaire de la
jeunesse; tout ce qu’a pu faire Adolf Hitler est en somme compris dans
cette rubrique «réarmement».
40
répandre ainsi la haine pour pouvoir ensuite utiliser à son propre profit un
peuple tourmenté.
Une puissance qui, six à sept années durant, réarme avec une telle
intensité (dans l’intention d’entreprendre une guerre de conquête) et qui n’a
d’autre idée en tête que celle-là, doit avoir mis sur pied un potentiel de
guerre gigantesque. Or, il est stupéfiant de constater à quel point les réserves
en armes, en munition et en matériel du Reich étaient modiques. (cf. page
255 et suivantes). Ce n’est pas par sa supériorité matérielle que la Wehrmacht
a remporté de si éclatantes victoires dans les années 1939-1940, mais par
son moral à toute épreuve, par sa stratégie audacieuse, son avance technique
et son aptitude à concentrer un maximum de troupes aux emplacements les
plus exposés du front.
Plus que tout autre gouvernement, celui d’Adolf Hitler avait des raisons
de vouloir créer une puissance militaire allemande, en invoquant des néces-
sités d’ordre éthique et historique.
41
souhaité perpétrer une situation dans laquelle l’Allemagne était maintenue en
état d’infériorité, lorsqu’elles ont décliné toutes les propositions de
désarmement formulées par les différents gouvernements allemands, enfin
lorsqu’elles ont elles-mêmes commencé à réarmer, à conclure des alliances,
à former des blocs et à se donner des assurances mutuelles. La République
de Weimar était constamment sous la menace d’une intervention militaire
étrangère. Les incidents de frontière étaient d’ailleurs courants. La France
ne s’était résolue qu’à contre-cœur à renoncer à la rive gauche du Rhin.
D’autres pays réclamaient des terres allemandes dépassant largement les
limites fixées à Versailles: La Tchécoslovaquie revendiquait la région
montagneuse de Glatz (Silésie) et la Lusace, la Pologne ne souhaitait rien
de moins que l’annexion de la Haute-Silésie et de la Prusse orientale.
La situation ne s’est pas modifiée au profit du Reich après l’arrivée
d’Adolf Hitler au pouvoir. Ces facteurs expliquent aussi son comportement.
D’autre part, on ne trouve aucune trace d’un «militarisme allemand»
précurseur des projets d’agression. Si la presse internationale s’est plu
trente années durant à déformer les faits avec une monotonie déconcertante
et à accuser Hitler d’avoir été l’initiateur du réarmement, ce n’est
certainement pas pour servir l’histoire, mais bien plutôt pour protéger les
intérêts égoïstes de certaines personnalités au pouvoir. A.J.P. Taylor,
historien britannique, a établi avec d’autres experts que «les Français
donnèrent le coup d’envoi à la course aux armements».34)
La montée de la tension, due aux conceptions que certains États avaient
de leur défense nationale, n’a pourtant pas été mise à profit par Hitler pour
entreprendre un réarmement excessif. À chaque phase du réarmement alle-
mand, Hitler a formulé de nouvelles propositions et présenté de nouvelles
offres basées sur le principe de l’égalité des droits. Le 21 mai 1935, il
prononça, dans un discours au Reichstag, ces paroles qui méritent d’entrer
dans l’histoire:
Dans ce monde, les nations faibles n’ont aucun droit à revendiquer, pas
même le droit à l’autodétermination, comme le prouve la politique pratiquée
à Versailles. Après des années de faiblesse économique, militaire et donc
42
politique, l’Allemagne ne pouvait par conséquent que souhaiter un redresse-
ment de la situation à son profit. Elle ne pouvait reconquérir son honneur et
son égalité parmi les peuples qu’en faisant preuve de courage et d’audace.
«Il était important que Hitler puisse conclure ce pacte pour semer
le doute et la confusion chez les partisans de la sécurité collective,
pour prouver par là que l’Europe n’avait pas besoin de sécurité collective
et que des conventions bilatérales étaient préférables. L’agresseur alle-
mand pouvait ainsi choisir le pays avec lequel il allait signer un traité et
qu’il allait ensuite attaquer. ...
De plus en plus audacieux, Hitler entreprit un certain nombre
d’actions afin de...»36)
On reste sans voix devant le peu d’estime que l’on avait pour le droit à
l’autodétermination des peuples et le peu de cas qui était fait de la volonté
allemande de coopération internationale et de reconstruction. Une incitation
à la guerre? Non, de tels arguments et de tels jugements ne sont que les
signes caractéristiques d’une politique de paix. C’est du moins ce que le
peuple allemand s’est entendu dire dans les années qui ont suivi la fin de la
seconde guerre mondiale. Hitler n’a recherché l’amitié des pays voisins de
l’Est et n’a voulu la concrétiser par un pacte que pour pouvoir préparer sa
guerre d’agression. Un regard sur le temps présent nous montre que notre
monde moderne, toujours soumis à la propagande, n’est pas en mesure de
porter un jugement objectif sur les événements qui se sont déroulés au
cours de ces dernières décennies. Ce phénomène est d’autant plus étonnant
que cette propagande prend maintenant pour cible d’autres peuples et d’autres
«régimes».
35) G. Rühle, op. cit., vol. 1937, p. 47: le discours de Hitler au Reichstag, du 30 janvier 1937.
36) Geschichtsfälscher – Aus Geheimdokumenten über die Vorgeschichte des Zweiten
Weltkrieges, p. 14.
43
Nombreux sont les écrivains qui ont décrit sans ambiguïté l’état d’esprit
qui régnait alors en Angleterre, en France, en Union soviétique et dans
d’autres pays. I.M. Maiskii, ambassadeur soviétique à Londres, écrit:
Hitler ne pouvait avoir élaboré les plans de conquête qui lui sont imputés
pour la simple raison qu’il était contraint de compter avec l’hostilité des
puissances occidentales, des pays de l’Est européen, du judaïsme international
organisé – où il était présent et influent38) – et du bolchevisme. La première
guerre mondiale aurait suffisamment fourni de matériel pour décrire et
illustrer les positions stratégiques de la nation allemande. Il ne pouvait pas
non plus rejeter l’éventualité d’accords secrets entre l’Union soviétique, la
Tchécoslovaquie, la France et peut-être la Grande-Bretagne et de l’existence
d’un front massif dirigé contre l’Allemagne. Face à une telle coalition de
forces, aucun gouvernement allemand ne pouvait résister plus de quelques
semaines ou quelques mois. Dans l’élaboration de ses projets, Hitler devait
37) I.M. Maiskii, Qui a aidé Hitler? éd. russe, p. 32.
38) Le Daily Express (Londres) du 24 mars 1933 publiait en première page l’article suivant dont
les gros titres s’étalaient en première page: «Le peuple israélite du monde entier déclare à
l’Allemagne la guerre économique et financière.
Tout Israël s’unit en colère face à l’assaut nazi contre les Juifs en Allemagne.…
L’apparition du symbole de la croix gammée de la nouvelle Allemagne a réveillé à une nouvelle
vie le vieux symbole de bataille de Juda.
Quatorze millions de Juifs se sont réunis comme un seul homme pour déclarer la guerre à
l’Allemagne.…
Le gros négociant juif abandonnera sa maison, le banquier sa Bourse, le marchand son
magasin et le mendiant sa hutte misérable pour se dresser ensemble et pour combattre dans
une guerre sainte contre les gens de Hitler.»
Pierre-Antoine Cousteau in Les Origines Secrètes de la Guerre 1939-45, p. 117.
Qu’il ait existé ou non, à l’époque, une organisation juive internationale – ce n’était du moins
pas une invention allemande – un tel appel à la guerre, motivé par la politique interne d’un
peuple étranger, présentait toutes les caractéristiques d’une provocation.
44
tenir compte de cette possibilité-là, et les documents dont nous disposons à
l’heure actuelle montrent que son gouvernement l’a fait.
C’est pure calomnie que de prétendre que Hitler ait voulu attaquer
l’Angleterre ou la France, comme de déclarer que l’honneur de ces deux
pays ait été blessé par les accords de Munich (septembre 1938) quand
quatre hommes d’États souverains les ont signés et les ont complétés même
par une déclaration de paix et d’amitié. Il est tout aussi absurde de prêter à
Hitler l’intention d’exterminer les Tchèques, les Polonais, les Danois, les
Norvégiens, les Roumains, les Hongrois, trente millions de Slaves, ou les
Juifs, et qu’il voulait conquérir l’Ukraine ou même le monde entier!39) Ce
sont là autant de thèses de propagande qui ont été répandues de par le
monde.
De tels projets de conquête ou d’extermination ne sont que de pures
inventions.40) L’histoire montre que Hitler a jusqu’au dernier moment essayé
d’établir de bons rapports avec une Pologne forte. À cet égard, les campagnes
de propagande menées par le président des États-Unis F.D. Roosevelt ne
sont ni plus ni moins que des incitations à la haine et à la guerre. Ce dernier
39) L’absurdité d’une telle affirmation ressort clairement lorsque l’on compare la superficie des
territoires qui se trouvaient sous la domination des anciens Alliés avec celle de l’Empire alle-
mand. Ces mêmes puissances ne se gênaient d’ailleurs pas pour affirmer, parfois officiellement,
leur intention de régir le monde.
Grande-Bretagne : 40 millions de km2.
Russie: 19 millions de km2.
États-Unis: 9,5 millions de km2.
Allemagne: 0,6 millions de km2.
Dans l’hebdomadaire londonien Picture Post du 19 août 1939, Winston Churchill écrit que
l’Angleterre serait sous peu en mesure de mettre sur pied les trois-quarts de la population
mondiale contre l’Allemagne.
A. Buckreis, Politik des 20. Jahrhunderts, p. 231.
40) Un autre ouvrage de l’auteur traite de la «solution finale» de la question juive si accablante
pour Adolf Hitler et l’Allemagne. Il suffit de dire ici qu’il n’a existé avant la guerre aucun
programme d’extermination des Juifs. Les brutalités qui ont été commises pendant la guerre ne
peuvent être rattachées à la politique d’avant-guerre. Pour pouvoir porter un jugement réaliste
sur la «solution finale», il faut examiner les responsabilités de la guerre, savoir quelles sont les
personnes qui ont contribué à son extension et quel en a été l’enjeu, connaître et juger enfin
les sept premiers grands crimes de guerre ainsi que beaucoup d’autres de moindre importan-
ce, dans une perspective chronologique et en fonction des conditions et de l’atmosphère qui
régnaient à l’époque. Ces grands crimes sont les suivants:
1. Le massacre, en septembre 1939, de plus de 20 000 Allemands de Pologne;
2. La déportation et la liquidation partielle de plus d’un million sept cent mille Polonais qui se
trouvaient sous domination soviétique, de septembre 1939 à juin 1941. Les sources polonaises
parlent de 400 000 personnes tuées par les Soviétiques au cours de cette opération. (Maurice
Bardèche, Nuremberg II ou les faux-monnayeurs, p. 67);
3. L’assassinat de plus de 10 000 officiers polonais dans la forêt de Katyn, en avril 1940;
45
considérait que, du fait que son pays se trouvait «menacé» par le Reich (qui
projetait, disait-on, même de conquérir des États d’Amérique latine), il
devait établir ses frontières sur le Rhin.41) Des affirmations semblables
tiennent plus du conte de fée que de la réalité; malheureusement, c’est avec
de tels slogans que les démocraties ont pu mener leur politique belliciste et
conduire leurs peuples à la guerre.
Il est difficile par ailleurs de soutenir que l’antisémitisme régnant en
Allemagne ait pu justifier la politique belliciste américaine. En effet:
a) Aucun État n’est en droit de s’immiscer dans les affaires intérieures
d’un autre pays,
b) l’antisémitisme était inexistant au Japon, ce qui n’a ni arrêté de
semblables politiques bellicistes contre cette nation, ni empêché les deux
bombardements atomiques alors que le Japon s’était déjà déclaré prêt à
capituler,
c) l’antisémitisme était présent dans d’autres pays sans que cela conduisît
4. La guerre de partisans, qui a été préconisée par l’Angleterre en mai 1940 et plus tard par tous
les autres Alliés;
5. Les bombardements dirigés contre la population civile, dont les Anglais sont les initiateurs
(mai 1940);
6. La déportation, de 1940 à 1941, de 128 000 Baltes et le massacre de plusieurs milliers d’entre
eux;
7. La déportation de tous les Allemands de la Volga, soit 600 000 personnes, en été 1941.
Entre temps – à partir de 1940 – Vansittart, premier conseiller du gouvernement britannique,
lançait régulièrement ses appels au meurtre et à l’extermination, le plus officiellement du monde.
En 1941, Theodore Nathan Kaufman, président de la Ligue américaine pour la paix, fit paraître,
avec l’accord des autorités officielles, un livre dans lequel il appelait au génocide. Cet ouvrage
préfigurait le futur «plan Morgenthau», et préconisait ni plus ni moins de stériliser tous les
Allemands. Kaufman avait calculé que la population allemande serait ainsi exterminée au bout
de deux générations. Dans la succession des événements, la «solution finale» se situe juste
après, en automne 1941, alors que l’on connaissait, entre autres, les méthodes soviétiques de
conduite de la guerre. Les Alliés n’ont d’ailleurs jamais tenté de justifier ces crimes, ni
l’extension du conflit et son caractère inhumain (apparu quelques temps auparavant), la
déportation des Allemands des provinces de l’Est et les terribles événements qui s’y sont
rattachés, enfin le massacre bestial de centaines de milliers de prisonniers allemands désarmés
dans l’Europe de l’Est en se référant à la «solution finale» allemande. Tout comme les premiers
crimes de guerre, ceux-ci n’ont pour origine que la haine sans limite que la propagande alliée
avait semée dans le cœur des peuples.
Certes, nous devons regretter que des Juifs aient été tués au cours de cette guerre; mais on
ne peut nier que cette même période était marquée, du côté allié, par des crimes de guerre
abominables, qui ont peu d’égaux dans l’histoire de l’humanité tant par leur nombre et leur
perversité que par l’appui officiel qu’ils recevaient, quand ils ne faisaient pas partie d’un plan
gouvernemental centralisé. On ne peut condamner l’un sans condamner l’autre. Une étude des
causes et des origines de la seconde guerre mondiale est essentielle à la compréhension des
événements.
41) Discours annuel prononcé devant le Congrès (parlement), le 4 janvier 1939 (cf. p. 386).
46
à une déclaration de guerre (Pologne, Union soviétique),
d) les grandes puissances occidentales (l’Angleterre, la France et les
États-Unis) ont fortement limité l’immigration, y compris celle de Juifs
dans leurs pays et se sont opposées à ce que ces personnes s’insinuent aux
postes de commande de leurs sociétés. Ces pays devaient par la suite
refuser d’accueillir les réfugiés juifs venant d’Allemagne...43)
Il est donc peu vraisemblable qu’ils se soient particulièrement offusqués
quand un peuple se rebellait et se défendait alors que, réduit à l’impuissance
par la défaite, il avait dû accueillir quelque 70 000 Juifs de l’Europe de
l’Est42) et tolérer qu’ils parviennent à des postes-clefs de la société. À
présent il se redressait et voulait se défendre contre leur emprise.
Le traité de Versailles a rejeté toutes les culpabilités de guerre sur
l’Allemagne, sur ce peuple qui pour la «conscience internationale» est
toujours demeuré un peuple de «criminels». En 1914-1918, il «avait aspiré
à la conquête de l’Europe», on allait maintenant l’accuser d’avoir voulu
cette fois-ci «dominer le monde». Ironie du sort, ce sont précisément les
nations qui ont reproché avec le plus de vigueur à l’Allemagne d’avoir
souhaité régir le monde (les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Union
soviétique) qui eux-mêmes aspiraient à cette domination ou qui, tout du
moins, se voulaient être les policiers du monde. Les preuves?
Pour l’Union soviétique:
La doctrine internationaliste communiste, qui a toujours été (y compris
dans les années 1939-1941) et reste encore [1964] le fondement de la
politique étrangère soviétique.
Pour la Grande-Bretagne:
Peu de temps avant d’être nommé Premier ministre, Winston Churchill
écrivait à F.D. Roosevelt:
47
Cette attitude se retrouve bien avant la guerre (cf. le chapitre consacré à la
politique étrangère des États-Unis).
Le peuple allemand et son gouvernement n’ont pas été plus bellicistes que
les autres nations. Ils ont employé les mêmes méthodes que leurs adver-
saires. Si l’on entend condamner la manière dont la guerre a été conduite, il
faut s’en prendre à tous les gouvernements responsables. Cela vaut de même
pour la politique d’avant-guerre. On ne peut de bon droit condamner les
méthodes des uns et admettre celles des autres, pour en banaliser les
abominations. Et si l’on tente de parvenir à une appréciation équitable on ne
peut esquiver la question suivante: quel pays s’apprêtait en 1939 à renoncer
à ses provinces, aux terres habitées par son peuple, afin de sauvegarder la
paix? La juste réponse élucide les choses, car c’est l’Allemagne qui peut
dire qu’elle avait fait d’importantes concessions territoriales pour éviter un
nouveau conflit. Adolf Hitler avait solennellement renoncé à plusieurs
provinces allemandes détachées du Reich à la suite du «traité» de Versailles:
la Prusse occidentale (Posen), le Tyrol du sud, l’Alsace-Lorraine, Eupen-
Malmedy, la partie nord du Schleswig et les colonies allemandes.
La propagande, dirigée par les gouvernements avec l’appui de la presse a
constitué un facteur décisif du déclenchement de la seconde guerre mondiale
dans la mesure où elle a semé la peur et, par suite, la haine parmi les
peuples. Ce sentiment d’insécurité générale s’est traduit dans la pratique par
toute une série de mesures économiques et militaires prises pour «garantir
l’intégrité du territoire national» de chacun. La conséquence en a été que les
peuples furent préparés à la guerre par une chaîne de réactions psychologiques
savamment dosées par les vainqueurs de Versailles et par l’Union soviétique.
À partir du moment où ils ont pu créer chez les peuples un sentiment
d’insécurité et de malaise en les tenant constamment en haleine par des
nouvelles alarmantes, la moindre étincelle pouvait suffire pour faire éclater
un nouveau conflit. Là réside également le danger d’une troisième guerre
mondiale.
Les peuples ne peuvent plus se permettre de fonder leurs relations
réciproques sur une propagande mesquine, qui serait la base même de la
morale et du droit internationaux. Ils ont le droit d’exiger que soient
respectées la justice et l’objectivité, notamment en ce qui concerne le
passé, car l’histoire est le fondement de toute politique, elle détermine à la
fois le présent et l’avenir.
48
Winston Churchill et la «philosophie sanguinaire»
Dans les années qui ont suivi la première guerre mondiale, Winston
Churchill est apparu comme le reflet même de l’opinion publique britanni-
que. Cette image s’est encore précisée au fil des années. Or l’Empire
britannique était étroitement lié à chacune des puissances signataires de
Versailles. En 1934, Churchill avait déjà une brillante carrière politique
derrière lui. Il avait été plusieurs fois ministre et, de 1924 à 1929, il avait
occupé le plus haut poste de la hiérarchie ministérielle, celui de Chancelier
de l’échiquier.1) Durant toutes ces années, il s’était acquis de solides appuis
et il avait le soutien d’un bon nombre de personnalités diverses qui
partageaient ses vues, tant dans les partis politiques que dans le gouvernement
britannique, ainsi que dans l’entourage influent du Président Roosevelt.
Dans les années trente et jusqu’à la guerre, Churchill rédigeait régulièrement:
Ses arguments, que ses propres amis politiques dans le parti des «Tories»
(Conservateurs), qualifiaient d’irresponsables,2) étaient un modèle du genre.
Ils ont été repris par la suite dans les articles des journalistes et des
hommes politiques de son bord et dans la propagande de guerre (qui était
placée sous sa responsabilité). Après 1945, les «historiens» assermentés
les ont enfin livrés à la postérité. À travers lui, l’ordre des choses se
trouvait, au besoin, tout simplement renversé; ce qui était blanc devenait
noir, et inversement. Il était essentiel et de provoquer une agitation
permanente et de maintenir la haine à l’état d’ébullition au service d’intérêts
personnels. Churchill était passé maître en la matière.
49
Ses innombrables et grotesques prises de position cherchent en vain leur
semblable dans l’histoire par leur caractère déshonorant et grossier. Churchill
«n’a tenté de soulever l’Angleterre contre l’Allemagne nazie que pour
satisfaire son ambition politique».4) Elles dévalorisent ses conceptions en
d’autres matières (qui étaient d’ailleurs changeantes, extrêmes et contra-
dictoires). Qui peut encore prendre au sérieux ces paroles que Churchill
prononçait en novembre 1933 devant la Chambre des Communes?
50
était l’un des Trois Grands en 1945. Il faut toujours considérer ses déclara-
tions contre l’Allemagne et le national-socialisme à la lumière de cette
constatation et à la lumière de la politique étrangère britannique.
Même en 1934, Churchill considérait encore que le «traité» de Versailles
était «juste» et que la culpabilité allemande dans la première guerre mondiale
était établie, bien que la recherche historique fût entre-temps parvenue à
des conclusions nettement plus nuancées.8) Peu de temps après la conclusion
de ce «traité», Churchill avait déclaré:
51
fallait, pensait-il, faire jouer à l’Angleterre le rôle de chien de garde des
prescriptions de Versailles et de moralisateur pour l’humanité dans la société
des États européens souverains. Dans les rangs de son propre parti, il passait
pour «un politicien belliciste».
Durant toute sa vie, ou du moins jusqu’en 1945, Churchill n’a fait que
semer la haine entre deux nations, délibérément et sans motif.
Churchill était de ceux qui, en Angleterre, ont loué Mussolini et le
fascisme à une époque où Hitler était encore très réservé à l’encontre du
fascisme.14) La considération dont Churchill jouit encore dans les pays
anglo-saxons, malgré ses éternelles incitations à la haine, malgré ses attitu-
des contradictoires et son absence de tout principe, montre que ces peuples
n’ont pas encore compris les événements qui ont secoué l’Europe au cours
de ces dernières décennies.
Churchill, l’«homme politique conservateur» britannique qui déclarait
fièrement avoir passé les trois quarts de sa vie à combattre et à préparer la
guerre contre l’Allemagne15), qui pensait que la seconde guerre mondiale
n’était que le prolongement de «la guerre de Trente ans contre l’agression
allemande qui avait commencé en 1914», aimait à dire d’autres fois qu’elle
avait été «une guerre inutile». En 1935, il prononçait les paroles suivantes:
«Dans les 15 ans qui ont suivi cette résolution [de ce peintre en
bâtiment de regagner les territoires perdus par son pays à la suite du
traité de Versailles], il est parvenu à faire de l’Allemagne la première
puissance européenne. Non seulement il a rétabli la position de son
pays, mais il a aussi renversé les données de la Grande Guerre... Les
52
vaincus sont en passe de devenir les vainqueurs, et inversement...On
peut penser ce que l’on veut de ces succès, ils sont certainement parmi
les plus étonnants dans l’histoire du monde.»16)
53
«Nos dirigeants ont besoin d’un peu de l’esprit de ce jeune caporal
qui, lorsque tout n’était que ruines, lorsque l’Allemagne semblait plon-
gée dans le chaos pour l’éternité, n’a pas hésité à affronter la gigantes-
que coalition des nations victorieuses contre lesquelles il a retourné
leurs propres armes, de manière si décisive.»19)
L’homme qui:
«le seul espoir résidait dans la fermeté, le cas échéant dans la guerre,
et que si Chamberlain s’avisait de s’engager à nouveau dans l’une de ses
peu glorieuses opérations de retraite, il lui en ferait voir.»21)
«Nous avons subi une défaite totale, que rien ne vient racheter.
L’Angleterre et la France se trouvent confrontées à une situation
catastrophique.
Toute la politique d’alliance avec les pays d’Europe centrale, sur
laquelle reposait le système de sécurité français, se trouve brisée, réduite
à néant...
La route qui va de la vallée du Danube à la Mer Noire est libre, la voie
qui conduit à la Turquie est ouverte...
Jamais il ne pourra exister de sentiments d’amitié entre la démocratie
britannique et la puissance nazie, puissance qui repousse avec mépris les
principes de la morale chrétienne, qui exploite un paganisme barbare
pour s’encourager dans sa marche en avant, qui vante l’esprit d’agression
et de violence, qui tire sa force de la persécution et y prend un plaisir
pervers, et enfin qui utilise avec une impitoyable brutalité, comme nous
l’avons vu, la menace du meurtre et de la violence pour parvenir à ses
fins...»22)
19) E. Hughes, op.cit., p. 167 et H. Laternser, Nürnberg – Plädoyer vor dem IMT 1946, p. 36.
20) P. H. Nicoll, Englands Krieg gegen Deutschland, p. 35. Déclaration du célèbre journaliste
anglo-américain, Francis Neilson.
21) E. Raczynski, In Allied London, p. 8.
22) W. Churchill, Ins Gefecht, Reden 1938-1940 («Discours»), pp. 81-84.
54
Et c’est là le commentaire sur une conférence au cours de laquelle, pour
la première fois depuis 1919, le droit à l’autodétermination était reconnu
pour des Allemands, réglant ainsi pacifiquement le sort de quelque 3,5
millions de Sudètes allemands. Pour en rester au thème de la conférence de
Munich, une lettre de Lord Halifax, ministre britannique des Affaires
étrangères au président Roosevelt, datée du 25 janvier 1939, montre
l’honneur, la sagesse, la sincérité et l’esprit européen de communauté avec
lesquels on travaillait à la paix outre-manche:
Après avoir évoqué que le dictateur devait faire répandre le sang à des
intervalles de plus en plus brefs pour satisfaire la meute des gens de son
parti et qu’il était contraint de leur donner un terrain de chasse s’il ne voulait
pas lui-même être dévoré, il enchaînait:
55
tie de paix. Il nous faut vite réunir des forces pour pouvoir résister à une
agression à la fois militaire et morale.»25)
De telles déclarations allaient peser très lourd sur les relations interna-
tionales. Nos «historiens» d’aujourd’hui doivent regretter de ne pouvoir
produire de semblables déclarations émanant d’Adolf Hitler.
Ils doivent également regretter qu’un nombre impressionnant d’étrangers
de renom aient prononcé des jugements à l’égard de Hitler et du national-
socialisme qui étaient non seulement positifs, mais qui dénotaient aussi une
certaine admiration: Lloyd George, qui avait «obtenu» dans les années
1918-1919 «ce que nous voulions», c’est à dire «battre presque à mort l’un
de nos principaux adversaires économiques»26), disait à sa fille, qui le saluait
par plaisanterie d’un «Heil Hitler!» à son retour d’Allemagne en 1936:
«Oui, Heil Hitler! je le dis aussi, car c’est vraiment un grand hom-
me. 27)
Je n’ai jamais rencontré de peuple plus heureux que le peuple
allemand, et Hitler est l’un des plus grands hommes que j’aie jamais
rencontrés.» 28)
56
C’est ce que j’ai remarqué de plus impressionnant lors de mon bref
séjour dans la nouvelle Allemagne. Il y règne une atmosphère de renouveau
qui a été particulièrement utile pour l’unité de la nation.
Catholiques et protestants, Prussiens et Bavarois, patrons et ouvriers,
riches et pauvres ont été unis en un seul peuple. Les considérations de
confession, d’origine et de classe sociale ne peuvent plus diviser la
nation. Une passion, un feu sacré, une ferme volonté d’union sont nés de
la dure nécessité....»29)
29) P.H. Nicoll, op. cit., pp. 74 et 77. L’article y est intégralement reproduit.
30) R. Sherwood, op. cit., p. 639.
31) Th. Heuß, op. cit., p. 5.
32) ibid., p. 119.
57
Lloyd George. Lorsque l’on pose une question à Hitler, il donne aussitôt
une réponse excellente, tout à fait claire. Pour des affaires vraiment
sérieuses, j’aurais plus confiance en sa parole qu’en celle de tout autre
être humain de nos jours. Il pense que l’Allemagne doit remplir une
mission divine et que c’est au peuple allemand qu’il échoit de sauver
l’Europe des assauts révolutionnaires du communisme. Il a un sens aigu
du caractère sacré de la famille, contrairement aux communistes, les
pires ennemis de celle-ci; il a interdit en Allemagne la parution de livres
obscènes et la représentation de pièces de théâtre et de films indécents;
il a épuré la vie morale de la nation.
Il y a un an et demi, je me trouvais avec Hitler lorsqu’il a prononcé la
phrase: “Dans certains milieux, en Angleterre, on parle de moi comme
d’un aventurier. Je dis que ce sont des aventuriers qui ont construit
l’Empire britannique.”
Il est d’une extrême politesse et séduit, par son sourire désarmant,
tous ceux qui l’approchent, les hommes comme les femmes. C’est un
homme d’une rare culture, qui a des connaissances approfondies dans le
domaine de la musique, de la peinture et de l’architecture.
Beaucoup ont du mal à s’imaginer qu’un homme cultivé puisse être
décidé lorsqu’il s’agit de passer aux actes...
Si l’on organisait un référendum pour demander quel est le plus grand
homme politique que la Grande-Bretagne ait produit jusqu’ici, le nom de
Cromwell recueillerait certainement la majorité des suffrages. Mais
Cromwell était un homme de la plus grande détermination, et aux méthodes
impitoyables.»33)
58
et disciplinées de la classe ouvrière, de la bourgeoisie, de la presse, sur les
dirigeants de partis, sur l’idéologie dominante et sur les multiples influences
étrangères; un tel parti ne peut arriver au pouvoir en dépit de dix années de
répression, de diffamation, de discrimination économique, de misère, seul,
sans appuis, sans amis et sans protecteurs.
«Ce serait une erreur que de pousser plus loin son imagination de ce
côté-là [le financement de Hitler par la grande industrie] en oubliant que
la grande force de la NSDAP résidait dans son auto-financement par ses
membres et dans sa capacité à financer les réunions publiques grâce à un
droit d’entrée prélevé sur les participants.
[Cet auto-financement] n’est pas une simple performance économique,
il montre que le parti s’appuyait sur l’idéalisme et le dévouement de
milliers de personnes.»34)
Celui qui adhérait à la NSDAP avant 1933 devait être prêt à tous les
sacrifices et pas seulement à des sacrifices d’ordre matériel. Il mettait en
jeu sa situation et sa liberté, il y laissait même une partie de la maigre
allocation au chômage qu’il pouvait éventuellement toucher. Il mettait
volontairement sa santé, sa vie et le sort de sa famille au service du mouve-
ment. Il acceptait tous ces sacrifices, car son espoir d’une Allemagne unie,
digne, avec justice sociale et sans lutte de classes était plus fort que les
injustices qu’il endurait.
59
«Je constate avec étonnement et admiration qu’il [Hitler] est
pratiquement le premier à avoir attiré à lui les hommes en masse, sans
contrainte ni appât du gain, pour le suivre de leur propre gré.»36)
La prise du pouvoir par Hitler s’est déroulée sans effusion de sang et dans
la plus parfaite discipline, ce à quoi aucune révolution n’était jamais parvenue
jusqu’alors. Dès le 5 mars 1933, le peuple a eu la possibilité de se prononcer
sur les événements récents lors des élections communales, départementales et
nationales.
Il faut ici considérer en toute objectivité les paroles d’un démocrate de
grand renom, Friedrich Naumann (1860-1919):
36) Hans Grimm, Von der bürgerlichen Ehre und bürgerlichen Notwendigkeit, p. 17.
37) F. Lenz, Zauber um Dr. Schacht, p. 17.
38) Nation Europa, 1961/6 p. 40.
39) G. Rühle, Das Dritte Reich, vol. 1935, p. 327.
60
Allemagne, ni le retour à l’unité; peu lui importait. Ce redressement allemand
contrecarrait ses projets: on risquait de voir se compromettre un ordre
européen inique. Dès lors, on allait lancer une campagne de propagande
internationale pour condamner la manière dont l’Allemagne s’était sortie de
la misère, la manière dont elle envisageait son propre avenir, et pour qualifier
le national-socialisme de «philosophie sanguinaire lui rappelant l’époque
des barbares». Au reste, il importait peu à ce monde-là si on mettait ainsi en
danger la vie des peuples. Cette propagande de la haine allait si loin que
même en temps de paix, l’Allemand était représenté aux étrangers non pas
seulement comme un homme de seconde zone (il ne méritait même pas la
qualification d’homme), mais comme un barbare qui ne pouvait apporter que
le malheur et qui aspirait à la domination du monde. Un peuple à peine sorti
de la misère, écrivant encore l’histoire de sa révolution, n’a-t-il rien d’autre
en tête? N’est-ce pas un appel à la guerre pure et simple que de répandre à
travers le monde de tels jugements de valeur insensés et de tels slogans?
À l’exposé de ces contradictions et des arguments primaires avancés à
l’époque, même par d’éminents hommes politiques, on peut lire la mécon-
naissance et le refus de la réalité. Cette méconnaissance et ce refus ont
caractérisé bien avant 1933 ces chefs de «l’opinion publique», qui ont
ensuite formé les esprits. Mais c’est avec plus de suffisance encore qu’ils
ont imposé aux peuples, après 1945, une image défigurée de l’histoire.
À la lumière des événements marquants de la seconde guerre mondiale et
de la situation politique inquiétante dans laquelle se trouve le monde actuel,
ces hommes politiques et ces journalistes qui, des années durant, ont semé
la haine par leurs campagnes de propagande grotesque, ont toutes les raisons
de reconsidérer leurs actes avec l’objectivité nécessaire. Ils doivent se
demander dans quelle mesure ils ont eux-mêmes contribué à aggraver la
tension internationale de l’époque en répandant, par négligence ou délibéré-
ment, des affirmations mensongères, en les couvrant de leur autorité et en
préconisant à la légère en matière de politique étrangère une orientation qui
a pu être utile à leur carrière personnelle, mais qui fut préjudiciable à la
destinée des peuples. Par leur propagande, ils ont exploité l’antipathie,
l’envie, et tous les complexes d’infériorité, mais ce faisant, ils ont créé un
état de choses dans lequel l’objectivité et le réalisme n’avaient pas de place.
Ils se sont adjugé toutes les qualités imaginables et toutes les vertus, mais
se sont refusés à admettre celles de leurs adversaires. Par là même, ils ont
perdu tout droit de s’indigner des «méthodes» de Hitler. Non seulement se
sont-ils employés à entretenir en Europe un état d’injustice, mais ils ont
aussi tenté à l’infini et par tous les moyens de maintenir l’Allemagne en
61
position d’infériorité.
À cet égard, les diffamateurs du peuple et du Reich allemands n’ont fait
aucune différence entre la monarchie prussienne, la République de Weimar
et le Troisième Reich. Le contenu et la forme des pamphlets anti-allemands
utilisés contre Hitler étaient sensiblement les mêmes que ceux qui avaient
été conçus dans les années avant et après la première guerre mondiale. Un
coup d’œil sur la presse ou le marché du livre de l’époque montre clairement
quel est le peuple qui a manifesté le plus de générosité et qui a le plus
ardemment recherché la réconciliation: c’est sans aucun doute le peuple
allemand. Les pays dans lesquels par contre les hommes politiques, les
militaires et les journalistes bellicistes ont joué le plus grand rôle sont les
puissances victorieuses de 1918, les artisans du «traité» de Versailles.
L’Allemagne a toujours considéré l’Angleterre comme une nation sœur.
Elle a rendu hommage à la France pour sa riche culture artistique et aux
États-Unis pour leurs réalisations économiques et techniques. Elle a de
tous temps reconnu et souligné la nécessité d’une coexistence pacifique
avec la Pologne, avant comme après 1933. En dépit du fait que l’Allemagne
ait formé quantité de scientifiques et d’artistes et qu’elle ait apporté au
monde une riche culture, les «Alliés» n’ont jamais vu en elle que le «peuple
barbare» à mettre au ban des nations civilisées, avant Hitler, avant même la
première guerre mondiale, mais plus encore lors du «retour à la barbarie»
en 1933. Aucun gouvernement allemand n’a jamais manifesté de haine à
l’encontre de ses ennemis, pas plus avant qu’après 1918, malgré les condi-
tions impitoyables qui lui ont été imposées par le «traité» de Versailles et
malgré la politique alliée de l’entre-deux-guerres. Par contre, les hommes
politiques et les journalistes du camp adverse n’ont eu garde d’adopter eux-
mêmes une telle attitude. Année après année, ils ont semé la haine, multiplié
les condamnations en bloc, les mensonges et les calomnies contre le peuple
allemand. Ce faisant, ils prétendaient passer pour des êtres raisonnables,
moralement exemplaires. Tandis que la littérature allemande – même à
l’époque de Hitler – était marquée par un désir de réconciliation, par un
recours à la science et à la recherche de la vérité historique, l’étranger
encourageait chez lui tous les livres, revues et journaux dirigés contre le
peuple allemand (à quelques insignifiantes exceptions près de part et d’autre).
Churchill fut leur porte-parole pendant des années. Lorsqu’il était encore
ministre du Trésor public, Churchill a défendu la politique de chicanes
pratiquée par la France et le principe des réparations, tandis qu’il rejetait
tout compromis avec la République de Weimar. Par la suite, il devait fustiger
62
une telle «léthargie et [une telle] folie».40) Rempli d’admiration pour Hitler
pendant un temps, «il était décidé à en venir aux mains» avec lui après la
conférence de Munich, en 1938.41) «Churchill aurait déjà voulu déclencher
les hostilités contre l’Allemagne à l’époque de Munich».42)
Hitler était-il parvenu à établir de bons rapports avec ses voisins, avait-il
fait un pas vers la paix, Churchill, qui ne manquait jamais d’arguments,
déclarait que ces pays-là n’avaient agi que par peur de la puissance
grandissante de l’empire nazi.43) Adversaire acharné du «Corridor de Dantzig»
pendant un temps, il fut ensuite un adversaire farouche de son rattachement
à l’Allemagne et de la création d’une autoroute et d’une voie de chemin de
fer exterritoriales en Prusse occidentale, vœu qui était pourtant beaucoup
plus modeste que le règlement qu’il avait lui-même proposé, et jugé
indispensable.44)
Lui, qui a vu:
63
de 10 000 officiers polonais (dont plus de 4 000 cadavres venaient d’être
exhumés), avaient été abattus par les bolcheviques, Churchill expliqua ainsi
les raisons de son brusque revirement idéologique à ses «amis» polonais qui
vivaient en exil en Angleterre:
64
Pour faire plaisir aux Soviétiques, il fit censurer un passage de la résolu-
tion publiée par ses «amis» polonais qui exigeait la reconnaissance des
«principes de droit international» – «car cela pouvait irriter les Russes».53)
Après la seconde guerre mondiale, et sans doute après avoir lu Mein
Kampf, Churchill déclara qu’il avait «tué le mauvais cochon» (comme si le
monde était un abattoir et l’Angleterre le boucher).54) Quelques mois
auparavant, lors de la conférence de Yalta, il faisait ainsi l’éloge du futur
«bon cochon»:
«Cette fois, je lève mon verre [à Staline] avec une plus grande amitié
encore qu’aux réunions précédentes...
Nous avons le sentiment d’avoir [en sa personne] un ami auquel nous
pouvons nous fier.» 55)
65
666666
Winston Churchill n’en a pris conscience qu’après 1945 dans la mesure où il a
qualifié la seconde guerre mondiale de «guerre inutile» et où il a reconnu la
nécessité d’un rempart contre le bolchevisme, exactement ce que les Allemands
avaient voulu réaliser vingt à trente ans auparavant.58)
«Aucune guerre n’était plus facile à éviter que cette horreur que
nous venons de traverser.»59)
«... Churchill était toujours prêt à soumettre ses discours aux exi-
gences de l’heure.
... La constance n’avait jamais été le point fort de Churchill, mais on
aurait du moins pu s’attendre à ce qu’il se rappelle ce qu’il avait écrit. Il
se contredisait.» 61)
58) R. Churchill, The Sinews of Peace - Post War Speeches by Winston Churchill, p. 41.
59) ibid., p. 172, discours prononcé à Metz le 14 juillet 1946.
60) ibid., p. 94, discours prononcé à Fulton (Missouri, États-Unis) le 5 mars 1946.
61) E. Hughes, op. cit., pp. 152-153.
66
Si on y ajoute le fait que Churchill n’avait aucune connaissance stratégique ni
de conceptions générales pour l’après-guerre, on doit constater que son affirmation,
d’après laquelle il avait mené la «croisade des peuples libres» n’était rien d’autre
qu’une imposture.62)
Churchill signe la Charte de l’Atlantique sous prétexte d’humanité; peu de
temps après, il prétend l’interpréter dans un sens restrictif: son application ne
doit se faire qu’au bénéfice de l’Empire britannique. Cette restriction ayant été
acceptée, il donne l’ordre de «raser» les villes ouvertes allemandes, recommande
«tous les actes de violence»63) quel qu’en soit le degré d’abomination, demande
«que soient tués le plus d’Allemands possible»,64) paraphe le plan Morgenthau et
applaudit l’expulsion de plusieurs millions d’Allemands de leur patrie, ce qui
est pour lui «la solution la plus satisfaisante et la plus durable»,65) non sur le plan
du droit, mais en «compensation» des territoires gagnés sur la Pologne par
l’Union soviétique.66)
Les Trois Grands n’ont donc pas hésité, pour satisfaire leurs appétits, à
pratiquer sur des peuples civilisés une vulgaire politique de marchandage basé
sur des dommages et des compensations, comme dans l’antiquité lorsque le
vaincu était chassé de son pays, mis en esclavage et vendu. La seule différence,
c’est qu’au XXe siècle, on a agi au nom de l’humanité, de la justice, du droit, de
62) ibid., p. 239.
63) F.J.P. Veale, Der Barbarei entgegen, p. 217 et Maurice Bardèche, Nuremberg II ou les faux
monayeurs, pp. 45-46.
64) R. Grenfell, op. cit., pp. 104-105.
65) Voices of History 1944-1945: Speeches and Papers of Roosevelt, Churchill, Stalin, Chiang,
Hitler and other Leaders, p. 615 - Churchill devant la Chambre des Communes, le 15 décembre
1944.
66) Die Jalta Dokumente, pp. 164, 222, 298, 171.
67
la chrétienté, de la démocratie, et qu’il a été question ici non pas de quelques
milliers de combattants barbares, mais de millions de personnes civilisées. Il
est certainement de peu d’importance pour Churchill de savoir qu’au cours de
ce «transfert humanitaire» quelque 3,8 millions d’Allemands ont trouvé la
mort67) (selon d’autres sources, 3 millions)68), tandis que ce n’est qu’au prix de
tous leurs biens que les rescapés ont pu survivre. En plein XXe siècle, les
Allemands étaient déclarés hors-la-loi dans leur propre patrie. Mais n’était-il
pas inscrit dans le programme des Trois Grands que «le nombre des Allemands
devait si possible être réduit au cours de l’exode»69)? Mikolajczyk, Premier
ministre polonais en exil, reçut de Churchill le «tranquillisant» suivant:
«Ne vous faites aucun souci pour les cinq millions d’Allemands, Staline
va s’en occuper. Vous n’aurez aucun problème avec eux: ils auront cessé
d’exister.»70)
Celui qui a étudié les différentes phases de cette guerre sait qui sont en
vérité ces hommes dotés d’une «philosophie sanguinaire rappelant les temps
barbares». Winston Churchill en est le chef de file.
Lors des «procès de criminels de guerre», cet homme a délibérément passé
sous silence ou bien soutenu d’innombrables falsifications historiques. L’homme
qui «menait la croisade des peuples libres» pour la «sauvegarde du christianisme»,
qui n’agissait qu’«animé par des motifs d’ordre éthique», avoue à ses
contradicteurs:
68
En fait, il est aussi peu scrupuleux lorsqu’il s’agit d’inciter à la guerre, de la
conduire et de décider ensuite du sort du peuple vaincu que lorsqu’il s’agit de
sauver la Pologne «alliée».
En 1945, il déclare à Yalta:
Il semble que les Polonais l’intéressaient en 1939, car il pouvait grâce à eux
créer une psychose de la guerre dans l’opinion publique et dans le gouvernement,
et espérer par là pouvoir «contrôler le monde»75) avec le président des États-
Unis, comme il le télégraphiait à Roosevelt avant même d’être nommé Premier
ministre. Aux Polonais, qui entre temps avaient cessé de l’intéresser, et plus
précisément au ministre Mikolajczyk, qui en était le représentant à Londres, il
confiait, au plus fort de la guerre:
69
Au moment même où il refusait de prendre en considération les blessures et
les maux dont souffrait l’Europe ensanglantée et où il n’avait de cesse de
prouver son amitié à l’Union soviétique, il prenait les mesures nécessaires pour
tenter de réarmer les soldats allemands et de les envoyer combattre le
bolchevisme.80) Adolf Hitler, que plus tard il appellerait le «mauvais cochon»,
restait néanmoins celui «qui voulait dominer le monde», bien qu’il n’ait jamais
eu de telles aspirations, qu’il ait renoncé à des territoires, rapatrié en métropole
des groupes d’Allemands d’outre-mer et qu’en 1940 il se soit limité à n’occuper
qu’une partie de la France et pas du tout ses colonies. Churchill, qui ne pardonnait
pas à Hitler d’avoir su faire de l’Allemagne une forte puissance militaire pour
qu’elle pût former en Europe, seule ou avec l’aide d’autres nations, un rempart
contre l’extension du bolchevisme, prétendait à l’époque se mettre à la tête des
Trois Grands et faire ainsi la police dans toutes les autres nations du monde,81) y
compris en Pologne, cette Pologne qu’il manœuvrait dans tous les sens sans lui
demander son avis.82) En mai 1945, à l’issue d’une entrevue de huit heures avec
Churchill, Joseph E. Davies, l’envoyé spécial du nouveau président, Harry
Truman, et ex-ambassadeur des États-Unis à Moscou, pouvait noter:
70
même qu’ils possèdent une grandeur d’âme et une qualification morale suffisante
pour mener une politique responsable.
Malheureusement, les hommes politiques britanniques n’ont vu qu’après la
fin de la guerre sur quoi reposait en fait la propagande de Churchill; ils l’ont
définie justement en peu de mots:
Le quotidien Manchester Guardian:
«On pouvait se douter que des hommes politiques qui passent leur
temps à semer la panique n’agissent ainsi que parce qu’ils savent qu’ils
pourraient difficilement défendre leurs thèses en s’appuyant sur une
argumentation rationnelle.»84)
«Il est connu pour être un grand styliste qui lit sa propre prose avec
délectation.
L’une des raisons pour lesquelles il peut si allègrement noircir les
pages avec autant d’élégance est que son argumentation s’encombre d’un
minimum de faits.
Il peut ainsi remettre l’histoire dans le bon sens, comme le ferait un
sous-rédacteur avec un article de journal; et si, par hasard, un fait vient à
contredire ses affirmations, il le jette par-dessus bord. Ce trait a toujours
été caractéristique du très honorable Ministre.»85)
Churchill lui-même:
«C’est quand on a la haine au cœur que l’on peut faire le plus grand mal
à la paix dans le monde; la popularité éventuellement gagnée ne fait que
diminuer le député qui s’aventure à l’acquérir d’une telle façon.»86)
Il est peu probable que Churchill ne soit arrivé à cette conclusion que vers la
fin de sa vie, mais il ne lui est sans doute pas venu à l’esprit d’établir un parallèle
avec son propre comportement pendant plusieurs décennies. Ses multiples
incitations à la haine ont pourtant imprégné tout le déroulement de la seconde
guerre mondiale.
71
Vienne — Munich — Prague
Trois événements ont contribué, par leurs répercussions, au déclenche-
ment de la guerre:
1. Le rattachement de l’Autriche au Reich allemand (l’Anschluß)
2. La conférence de Munich, fin septembre 1938
3. L’entrée des troupes allemandes à Prague, le 15 mars 1939.
Le passage de la paix à la guerre a été marqué par ces trois étapes, qu’il
nous faut examiner, en essayant d’analyser leur origine, le contexte dans
lequel ces événements se sont déroulés, et leurs suites.
Lors des discussions d’un crédit qui devait être accordé à l’Autriche par
l’intermédiaire de la Société des Nations (Commission de contrôle des
finances), Renner demandait, le 4 octobre 1922, «le rattachement de
l’Autriche à l’État auquel nous sommes liés par la nature des choses».2) Les
plébiscites qui sont organisés en 1920-1921 en Carinthie, au Tyrol, dans la
72
province de Salzbourg et en Styrie donnent 99% de voix pour l’Anschluß.
Ceux qui devaient être organisés dans les autres provinces autrichiennes ont
été annulés et interdits par la France. Tandis que l’Autriche manifestait
clairement sa volonté d’être rattachée au Reich, la République de Weimar
demandait tout aussi fermement, dans sa constitution (art. 61, paragraphe 2)
le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne. Bien que ce paragraphe 2 n’ait
pu être mis en application du fait du veto des puissances victorieuses, il est
demeuré partie intégrante de la constitution, afin de donner l’orientation à
toute politique nationale.
Quelques années après (en ce siècle de l’intégration européenne!), la
France interdit tout rapprochement économique austro-allemand (il s’agissait
en l’occurrence de l’Union douanière de 1931) et accompagna son veto
d’une forte pression économique.
Les puissances de Versailles ont délibérément violé la volonté de la
population autrichienne, tandis qu’elles se sont accommodées de toutes les
crises, des troubles, de la guerre civile, de la misère et de l’interdiction de
tous les partis à l’exception du «front patriotique», de la dictature et des lois
d’exception. Il leur seyait fort mal, quelques années plus tard, de s’immiscer
à nouveau dans les affaires austro-allemandes sous le prétexte de sauver la
«démocratie autrichienne». Après s’être emparé du pouvoir grâce à un coup
d’État, en mars 1933, le chancelier Dollfuss avait abrogé la constitution; il
régnait depuis en dictateur. Son successeur, Schuschnigg, a pris la relève
par la suite. En cela, l’Autriche n’était certainement pas un État «démocratique
pacifique». Le pays avait connu deux révolutions sanglantes; les camps
d’internement étaient combles (comme en Pologne), ainsi que les maisons
d’arrêt, autant d’effets secondaires qui accompagnent une dictature. Une
grande partie de la population, qui souffrait spirituellement et moralement
de cette situation, était radicalement opposée au gouvernement (en
l’occurrence, il ne s’agissait pas des seuls nationaux-socialistes). De 1932
à 1938, il n’y eut aucune élection libre.
Sans entrer dans le détail de l’histoire autrichienne à partir de 1919, on
peut dire que la «pression intérieure s’était fortement renforcée avec le
gouvernement de Schuschnigg, en 1935 et au début de l’année 1936».3)
Cette «pression intérieure» était due en partie à la situation politique et
économique du pays et à son isolement, et en partie à la prospérité de
l’Allemagne, à la reprise économique de ce pays, à la réduction de son
chômage et à la volonté unificatrice d’une politique étrangère en plein
73
renouveau. Cette situation rendait plus sensible que jamais le contraste entre
une Allemagne forte et une Autriche en plein marasme économique.
Pour ce qui est de la situation extérieure, la Grande-Bretagne n’avait nulle
envie d’appuyer un pays qui avait soutenu l’Italie lors de la guerre d’Abyssinie.
La France du Front populaire, qui n’avait aucun lien idéologique avec un
régime catholique et autoritaire, attachait toutefois beaucoup d’importance à
son pouvoir d’intervention et de police.
Par contre, la population autrichienne était bien consciente de ce que la
France avait tout fait en 1919 pour empêcher l’Anschluß et favoriser ainsi la
misère économique de l’Autriche. Quant aux Tchèques, aux Slovaques, aux
Roumains, aux Serbes et aux Croates, ils ne s’étaient pas détachés de
l’ancienne monarchie austro-hongroise pour renouer des contacts amicaux
avec Vienne.
«Les événements qui se sont déroulés dans les années trente ne sont
que les conséquences logiques de Versailles et de Saint-Germain.
L’écrasement de la monarchie danubienne avait transformé toute
l’Europe à l’est du Rhin en un centre de conflits d’intérêts, et l’Autriche,
pays faible, était la plus touchée par cette situation. Jusqu’ici, les
rivalités qui existaient entre les grandes puissances avaient empêché la
dislocation de ce système artificiel et maintenu l’État autrichien en vie.
Isolée, l’Autriche, devenue le boutoir de tous les intérêts divergents
et tiraillée de toute part, était impuissante. Sa seule couverture était
l’Italie. Elle était tombée lorsque Mussolini s’était décidé à une guerre
contre l’Abyssinie. Il lui a donc fallu se résoudre à traiter avec Hitler au
lieu de le combattre, et à tenter de parvenir à un accord qui maintienne
l’État autrichien en vie.
Schuschnigg incarne cette tentative. Quatre années durant, il essaie
de résoudre un problème insoluble en ce que le principe des nationalités
exclut l’existence d’un second État allemand et en ce que Hitler a le
pouvoir de mettre son idéologie en pratique.»3)
«Il a été décidé de lever l’interdit qui pesait sur certains journaux....
74
À partir du 11 juillet 1936, c’est un flot de propagande nationale-
socialiste qui s’abat sur l’Autriche, le plus officiellement du monde et
dans le cadre même du traité. Les journaux autrichiens, qui sont autori-
sés en Allemagne, peuvent bien, tranquillement et dans la fidélité au
gouvernement, chanter les louanges de l’autrichien: les Allemands ne
lisent pas ces journaux et après tout, ce ne sont pas eux qui demandent à
être rattachés à l’Autriche. La clause des 1000 marks est abrogée, les
frontières s’ouvrent peu à peu à la circulation entre les deux pays;
chaque touriste allemand qui va passer ses vacances en Autriche est un
propagateur conscient ou inconscient du national-socialisme – ne serait-
ce que par le drapeau à croix gammée de la voiture ou sur le sac à dos –
les ressortissants allemands ont évidemment bien le droit de porter la
croix gammée...
... mais ils sont les preuves vivantes du redressement de l’Allemagne
nationale-socialiste, qu’ils le veuillent ou non...
Ils sont une propagande permanente à l’Anschluß pour les Autri-
chiens, qui subissent toujours les effets de la crise économique (le
nombre des chômeurs n’a pas diminué) et supportent de plus en plus
mal la situation intérieure et la politique autoritaire du gouvernement...
Il semble aussi que l’on a oublié que les 15 583 détenus relâchés le
1er janvier 1937 sont restés de fanatiques nationaux-socialistes.»4)
«Trois articles de cet accord [de juillet 1936] ont été publiés: la
reconnaissance de la souveraineté autrichienne par l’Allemagne, le
principe de non-ingérence dans les affaires intérieures et le fait que la
politique étrangère autrichienne reposait sur la constatation que
l’Autriche était un État allemand. Mais les points les plus importants
étaient précisément les annexes au texte. Elles concernaient l’interrup-
tion de la guerre journalistique entre les deux pays (point qui n’a été
respecté que par l’Allemagne), l’amnistie pour les nombreux prisonniers
politiques en Autriche, etc... Par ces annexes, l’Autriche s’était égale-
ment engagée à faire participer l’“opposition nationale” aux affaires
gouvernementales. Or, l’“opposition nationale”, c’était, depuis l’arrivée
au pouvoir de Hitler, les nationaux-socialistes autrichiens. Un plé-
biscite devait être organisé par la suite sur la question du rattachement
de l’Autriche au Reich allemand; toutefois, aucune date n’avait encore
été fixée. Adolf Hitler avait pris cet accord très au sérieux. Il restait
persuadé qu’il conduirait un jour ou l’autre à la formation d’un gouver-
nement d’“unité nationale”, comme il l’appelait. Il était sûr également
75
que le plébiscite donnerait au minimum 70% des voix pour l’Anschluß.
Un an et demi après la signature de cet accord, il est clair que le
gouvernement autrichien l’a interprété d’une toute autre manière. Seul
comptait pour lui l’accent mis sur la souveraineté nationale et sur la
non-ingérence réciproque. Il n’était pas question de faire participer les
nationaux-socialistes au gouvernement, encore moins d’envisager un
plébiscite sur le rattachement à l’Allemagne qui aurait très probable-
ment signifié la fin de ce gouvernement.»5)
76
destinées à harmoniser les intérêts austro-allemands) avec le programme
de Hitler, on constate que les différences sont minimes...
Une mise en parallèle du pacte signé et du projet de traité montre que
seule la question du remplacement du ministre de l’Intérieur et de la police
avait entraîné une concession de taille, qui dépassait le cadre de ce
qu’avait prévu Schuschnigg.»8)
Dans un rapport qu’il rédigea deux jours plus tard, Franz von Papen
confirma que l’issue de la conférence avait été très satisfaisante d’un côté
comme de l’autre et que «Schuschnigg, très impressionné, avait mené un
combat actif, durant ces deux jours, contre tous les adversaires de la détente,
car il voulait respecter les accords de Berchtesgaden».9) À son haut
responsable de la police, Skubl, qui lui demandait quelle impression lui
avait faite Hitler, Schuschnigg répondit:
77
évolution doit être adoptée, que la possibilité d’un succès puisse ou non
être prévue aujourd’hui. Le protocole signé par Schuschnigg est si lourd
de conséquences que, s’il est pleinement appliqué, le problème autrichien
se résoudra automatiquement”.
Hitler était satisfait. Il ne fit aucun préparatif pour une action quel-
conque mais attendit impassiblement la réalisation de cette solution
automatique.» 13)
«il n’y a aucune raison de polémiquer au sujet d’un pacte sur lequel
le Führer, le Duce et Monsieur von Schuschnigg sont visiblement
d’accord.»17)
13) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, pp. 142-144.
14) G. Brook-Shepherd, The Anschluss, p.83 .
15) ibid., p. 72.
16) ibid., pp. 90-91.
17) ibid., pp. 84-85.
78
Quelques jours plus tard, il ajoutait, dans son éditorial:
«Au fond, il est tout à fait naturel que les deux États allemands
vivent en bonne intelligence. L’interdiction du rattachement de
l’Autriche au Reich était l’une des mesures les plus extrêmes,
déraisonnables, fragiles et provocatrices des traités de paix... Les oiseaux
rentrent toujours au nid.
L’Autriche ne saurait être anti-allemande. Finalement, c’est là la
véritable force des revendications du Reich sur l’Autriche et la diffi-
culté principale que rencontre le chancelier autrichien consiste en la
défense de la souveraineté et la délimitation des frontières de son
pays.»17)
79
La question autrichienne était à nouveau au centre du débat en Europe.22)
Entre-temps, Schuschnigg avait été soumis à une forte pression de Londres
qui lui demandait de dénoncer l’accord passé avec le Reich allemand.23)
L’ambassadeur français Puaux notamment, ami personnel de Schuschnigg,24)
mais également d’autres diplomates (le seul que l’on ne voyait pas et qui ne
faisait pas parler de lui était l’ambassadeur allemand, Franz von Papen) le
pressaient d’avouer qu’il avait été soumis au chantage par Hitler.25)
«Comment l’a-t-on su ?
L’Intelligence Service était d’ordinaire bien informé, disait-on. Le
Dr Schmidt, nouveau ministre des Affaires étrangères et moi-même,
avons fait des déclarations pour tenter d’apaiser les choses et éviter
tout reportage à sensation. Elles se sont visiblement heurtées à une
certaine incrédulité.»26)
«Le baromètre économique devait réagir très rapidement: les firmes
étrangères retirèrent leur argent des banques et des caisses d’épargne.
Des milliers de télégrammes et de lettres supplémentaires affluèrent
dans les postes. Signes alarmants, notamment en Styrie.
On rencontrait plus de cris de panique que de prévisions optimistes...
Jour après jour, les caisses d’épargne faisaient état de retraits de
millions de schillings. Les étrangers repartaient. ...
La situation à l’intérieur et à l’extérieur devenait inextricable.
En politique étrangère (surtout sur le plan économique), parce que
l’on était menacé d’une situation qui présentait tous les inconvénients
de l’Anschluß – le boycott de l’étranger – sans présenter l’avantage
d’un territoire économique ample et uni.»27)
80
pagande du Front patriotique ne put dissiper.
Le nouveau gouvernement fut pris aussitôt sous le feu du nonce
apostolique à Vienne; 48 heures après la formation du gouvernement,
des rumeurs circulaient sur la démission possible du chancelier
[Schuschnigg].»28)
81
politique britannique envers l’Autriche pour décider Londres à agir. «En 48
heures», cette initiative avait obtenu l’appui de nombreux partisans du
gouvernement.31)
La Commission britannique parlementaire de politique étrangère se réunit
en session à huis clos, pendant laquelle des propos acerbes furent échangés.
L’indignation portait sur la réalité de «la montée d’une politique aventureuse
en Allemagne nationale-socialiste, sur laquelle il s’avéra que les prudents
s’étaient trompés». Churchill déclara qu’il fallait y mettre un frein.31)
La majorité des quelque 100 hommes présents était prête,
82
États dans le but d’atteindre par là ses propres objectifs. Dans ses mémoires,
Schuschnigg se contente d’évoquer ces interventions étrangères, en accen-
tuant au contraire les difficultés intérieures; il est hors de doute que le
chancelier autrichien n’a modifié le cours de sa politique que parce qu’il
comptait sur l’appui militaire des puissances occidentales pour garantir
l’indépendance de l’Autriche.
83
teinté de séparatisme:
Les accords passés avec Hitler sont rompus, tant dans leur esprit que
dans leur contenu. Les conditions qui règnent dans le pays ont atteint leur
summum; 40 000 réfugiés autrichiens ont déjà gagné le Reich.37)
84
de Berchtesgaden avec Schuschnigg. Par égard pour Mussolini, Hitler
s’accrochait, avec la fermeté dont il était capable, aux accords passés...
Nous savons par le journal du futur général d’armée, Jodl que Hitler
n’a signé l’ordre de déclenchement de l’“opération Otto”, qui ne
prévoyait un déploiement de troupes dans le cas d’une attaque contre
l’Autriche, que le 11 mars 1938, vers 13 heures.»40)
85
de sa patrie.46) Il ne pouvait pas prévoir avec certitude (à l’exception de
l’occupation de la Rhénanie, en 1936 ) une «Guerre des Fleurs», la première
dans l’histoire de l’humanité. Il ne pouvait non plus prévoir les réactions à
l’étranger. Certes, il connaissait l’opinion de Nevile Henderson, ambassadeur
britannique à Berlin. Celui-ci – en toute probabilité sans l’accord de son
gouvernement – «ne cachait pas qu’il souhaitait voir l’Allemagne et l’Autriche
réunies en un seul État».47)
Finalement, c’était bien la presse étrangère qui lui avait attribué l’intention
de rattacher l’Autriche à son pays et qui avait annoncé que l’Angleterre et la
France ne souhaitaient pas intervenir. Mussolini l’avait de son côté assuré
de son amitié. Ces trois facteurs l’ont décidé à réunifier l’Autriche et
l’Allemagne.
86
ils pouvaient difficilement affirmer que Hitler avait annexé une Autriche
récalcitrante par la force des armes. Ils ne pouvaient pas nier non plus que
son action avait ramené l’unité et l’ordre dans le vieux cœur de l’Europe.»49)
87
Munich
88
et la Grande-Bretagne que si les 40 divisions allemandes pouvaient être
retenues jusquà ce que la France puisse effectuer une percée importante de
lautre côté du Rhin. LAnschluß, la ligne Siegfried, la supériorité de
laviation allemande sur laviation tchèque et la consolidation de la situation
intérieure en Allemagne ne laissaient aucun doute à ce sujet.
e) Dans les années vingt, le gouvernement de Prague avait créé une
situation intérieure tellement tendue que les soldats provenant des minori-
tés ethniques passaient pour «peu sûrs».4)
f) Puissance victorieuse en 1918 au même titre que la France, la Grande-
Bretagne sétait plus ou moins tournée vers son empire. En 1938, elle
navait nullement lintention de se laisser entraîner dans une guerre pour
laffaire tchécoslovaque, dautant que les hommes politiques britanniques
étaient conscients du fait que Staline utiliserait cette guerre en fonction des
intérêts de la révolution bolchevique mondiale.
g) La France ne pouvait mobiliser aucune des puissances de lEurope de
lEst pour venir en aide à la Tchécoslovaquie. Les pays en question avaient
fait clairement comprendre à Paris quils ne bougeraient pas le petit doigt
pour sauver le gouvernement de Prague. Ils se refusèrent fermement à
laisser passer larmée soviétique au travers de leur territoire. La Roumanie
et la Pologne craignaient par-dessus tout «que la demande russe de passage
des troupes à travers la Roumanie ne cachât une pensée secrète: celle de
reprendre sans combat la Bessarabie».5) Au reste, la Pologne avait elle-
même formulé des revendications territoriales à la Tchécoslovaquie. Il ne
lui était plus possible, dautre part, de saligner sur Paris depuis que la
France avait conclu un pacte dalliance avec lUnion soviétique en 1935-
1936.
89
internes au moyen dune guerre européenne.7)
Créer un État composé pour 49,5 % de minorités refusant, pour beaucoup,
de cohabiter avec les Tchèques dans un même pays était en soi une affaire
délicate et dangereuse. Lord Maugham, Garde des sceaux et président de la
Chambre haute britannique, avait dit, lors dun débat sur la conférence de
Munich, que lÉtat pour lequel on avait failli déclencher une guerre naurait
jamais dû être.8) Le vicomte Rothermere, directeur du service de presse du
ministère de lInformation, déclarait de même:
90
La création de cet État, «dont le nom sonne bizarrement aux oreilles
anglaises»15) et sur lequel pesait lhypothèque dune hostilité envers
lAllemagne,16) était dautant plus délicate que les Tchèques, qui avaient été
contraints dinclure de si nombreux germanophones dans leur nouvel État,
aimaient qualifier ceux-ci de «rebelles», d«émigrants», de «colons», etc...
et les traiter comme tels.17)
91
restaient en place sans aucune autorisation des minorités. Lopposition
parlementaire demeurait sans influence, en dépit du résultat des élections.
Un petit groupe autour de Bénès détenait le pouvoir et accentuait légoïsme
national tchèque jusquà lui faire prendre des proportions démesurées,
toujours sous le masque de la démocratie. Les partis politiques tchèques
exerçaient une influence prépondérante dans la nomination des membres de
lAssemblée nationale constituante, des cinq commissions parlementaires
de la Pétka, et dirigeaient ainsi toute la politique sans tenir aucun compte de
la volonté populaire.22)
92
En 1936, la situation ne sétait pas améliorée. Le 15 avril 1936, le
journal tchèque Obrana (encore un exemple de la censure rigide qui pesait
sur la presse!) écrivait:
93
1936 à Bodenbach] que le préjudice infligé aux Allemands dans le
domaine des services publics, de ladministration et dans la question
linguistique a atteint un degré tel que la situation est intenable pour tout
le monde. La petite guerre des nationalités sétend à tous les fronts et
gâche latmosphère intérieure de lÉtat.»26)
94
Un historien a confirmé que «la vieille Tchécoslovaquie, alliée de la
France et de lUnion soviétique était un poignard dirigé contre lAllemagne,
un bastion ennemi en pays allemand, une plate-forme dattaque pour les
adversaires du Reich».30) Et, de fait, elle avait été créée à cet effet.
Lorsque par la signature du pacte germano-polonais de non-agression et
damitié, en janvier 1934, la France dut renoncer à lappui de «quelque 60
divisions polonaises»,31) elle accentua ses démarches pour ne pas perdre du
moins les 40 divisions tchèques et le seul pays de lEurope centrale ou
orientale à posséder une industrie de guerre (la Tchécoslovaquie fabriquait
à elle seule les huit neuvièmes de la production darmements de ces pays).
Cette volonté sest reflétée dans son empressement:
a) à multiplier les échanges avec le gouvernement tchèque, à lassurer de
son alliance et de son soutien en politique économique, intérieure et
étrangère;
b) à inciter Prague à écarter les minorités du pouvoir et de toute haute
fonction, pour maintenir la valeur de lalliance militaire avec larmée tchèque.
«Pendant vingt ans le président Bénès avait été lallié fidèle et pres-
que le vassal de la France, soutenant toujours, à la Société des Nations et
en toutes occasions, la politique et les intérêts français.»33)
95
à toute tentative de revoir les règlements manifestement injustes du
traité de Versailles.»34)
Sauf en septembre 1938, la France na jamais incité son alliée tchèque à
se réconcilier avec lAllemagne, au contraire: elle lui a toujours recommandé
de «rester ferme».32) Une requête que Bénès était fort disposé à satisfaire,
puisquil savait que lAllemagne noserait pas sengager dans une guerre
contre une telle coalition. Cet état de choses eut pour conséquence un
renforcement des mesures prises contre le Reich et une aggravation de la
situation intérieure qui était devenue dautant plus explosive quaprès les
élections du mois de mai 1935, le Front patriotique des Sudètes allemands
(Sudetendeutsche Partei Parti allemand des Sudètes) était le parti le plus
important de toute la Tchécoslovaquie, bien quil fût toujours exclu des
affaires de lÉtat.
Le président Bénès trouva une parade:
96
bien plutôt un État multinational maintenu en vie par une clique dhommes
politiques tchèques, dont toute la politique intérieure se résumait pratique-
ment dans le combat des nationalités. Le 19 avril 1938, Basil Newton,
ambassadeur de Grande-Bretagne à Prague, sest vu obligé de faire la recom-
mandation suivante:
Mais tout cela nétait également que belles paroles. Pour reprendre les
termes du Premier ministre Hodza, le pays était «trop petit pour se laisser
atomiser», «pour se suicider» par loctroi dune autonomie;36) ou, pour citer
la décision de la Commission plénière du tribunal administratif suprême de
Prague du 19 mars 1919 (soit trois mois avant la signature du «traité» de
paix de Versailles), on ne pouvait octroyer de droits aux minorités que pour
autant «quils ne mettent pas en danger le caractère national de lÉtat
tchécoslovaque». Il est sans doute inutile de préciser que cette formule
constituait le leitmotiv de la législation et de la pratique juridique:
97
Accessoirement, on peut noter que Bénès, qui était ministre des Affaires
étrangères de la Tchécoslovaquie dans les années 1918-1921, a apporté son
concours à la décision dimposer à lAllemagne la cession de certains terri-
toires à la Pologne.39)
Grâce à une politique étrangère toute personnelle quil décrit ici, Bénès,
devenu président de la République en 1935, se sentait habilité à mener sa
politique intérieure comme il lentendait:
«La Russie avait déjà livré 300 avions de combat aux Tchèques et
plusieurs escadrilles soviétiques stationnaient sur les terrains daviation
tchèques.» 43)
98
Ce nest pas Hitler, mais bien Édouard Bénès qui a provoqué la situation
de crise dans laquelle sest trouvé le pays des Sudètes et qui na eu de cesse
de laggraver. Lhistorien britannique A.J.P. Taylor a dû reconnaître quau
printemps de lannée 1938, Hitler ne savait pas encore par quel moyen il
pourrait venir à bout de la situation, tandis que Bénès était décidé à résoudre
le problème insoluble des Sudètes en le transférant sur un «plan
international».44) Les notes diplomatiques montrent que Göring avait assuré
aux Tchèques, le 12 mars 1938, «que lAllemagne navait pas lintention
dentreprendre une action contre la Tchécoslovaquie». Après avoir réalisé
lAnschluß, Hitler déclara que «le règlement de laffaire tchécoslovaque ne
pressait pas»45) et rien ne prouve quil ait agi autrement quen conséquence.
99
«Il na même pas jugé utile de répondre à la proposition par voie
télégraphique que lui avait faite le diplomate Eisenlohr, le 16 février
1938.» 49)
100
Aujourdhui encore, bien après la seconde guerre mondiale, une mobili-
sation générale signifie que le pays se trouve en état de guerre. Pourtant,
bien quil ait su par la suite que ces rumeurs émanaient de journalistes et de
correspondants de presse et quelles étaient sans fondement, Bénès a
maintenu la mobilisation; les réservistes nont été démobilisés quau milieu
du mois de juin 1938. Malgré le souhait formulé par Hitler, la Grande-
Bretagne et la France nont pas pu convaincre les Tchèques dannuler la
mobilisation générale.
Dans les consignes secrètes quil a fait donner dès le premier jour de la
mobilisation tchèque, le 21 mai 1938, Hitler déclare «quil na pas lintention
de déclencher les hostilités contre la Tchécoslovaquie dans un avenir
proche».52) En fait, il na jamais souhaité répondre à cette provocation et il
nétait certes pas non plus à laffût dun bon prétexte à présenter à lopinion
publique internationale pour écraser la Tchécoslovaquie. Sil avait voulu, à
cette époque, envahir ce pays, il naurait pu trouver de meilleure justification
que cette mobilisation générale de lennemi, accompagnée de lassurance
des attachés militaires français et britanniques que le motif invoqué par
Bénès était dénué de tout fondement. (Hitler a eu la même réaction lors de
la seconde mobilisation générale tchèque des 23 et 24 septembre 1938). En
1945, les Alliés se sont servis, pour tenter de montrer la volonté belliciste
de Hitler, dune phrase extraite du fameux faux, le «rapport Hoßbach»:
En fait, il na pas utilisé les occasions qui se sont présentées, ce qui
montre bien que cette «résolution» a été plus tard inventée de toutes pièces.
Les Tchèques ne se contentèrent pas, eux, de décréter la mobilisation
générale. Ils accentuèrent les mesures hostiles contre les populations fron-
talières et déclenchèrent en même temps une campagne de presse pour se
moquer de Hitler en présentant sa retenue et son inaction comme des
preuves de faiblesse. Si Hitler reculait devant la petite Tchécoslovaquie, ce
serait un jeu pour les grandes puissances den venir à bout!53) On pouvait
donc sans risque exiger davantage encore de lAllemagne. La presse
occidentale reprit cette argumentation en
101
«faisant léloge de lappareil militaire tchèque qui avait fonctionné
avec une rapidité et une efficacité inattendues. Nous reprîmes confiance,
voyant que nous nétions pas seuls.»54)
54) E. Moravec, op. cit., p. 242. Moravec était colonel à létat-major de larmée tchèque.
55) M. Freund, op. cit., vol. I, p. 56.
56) A. I. Nedoresow, «Le mouvement pour la libération nationale en Tchécoslovaquie», éd.
russe, pp. 37 et 39.
57) W. P. Bondarenko et P. I. Resonowa, «Le Mouvement de la résistance antifasciste dans les
pays dEurope pendant la seconde guerre mondiale», éd. russe, pp. 95-96.
102
«devait être considéré comme une incitation à la guerre en Europe,
qui ne pouvait avoir dautre conséquence que linstauration du bolche-
visme sur tout le continent.»56)
La conférence de Munich, qui sest réunie quatre mois après ces événe-
ments, aurait pu être évitée si Bénès avait accordé aux minorités allemandes
les droits qui leur avaient été garantis dès 1919 et sil ne sétait pas laissé
aller à dinnombrables provocations dans la certitude davoir à ses côtés de
puissants «amis».
Cinq cent mille chômeurs allemands vivaient à lépoque sur le territoire
des Sudètes sans recevoir aucune aide, ni de la caisse maladie, ni daucun
syndicat (800 000 dans toute la Tchécoslovaquie). Il faut encore ajouter à
ce chiffre les membres de familles nécessiteuses. Cette situation ne pouvait
pas durer éternellement. Le paiement dune indemnité de chômage nétait
garanti que pendant six mois et il était subordonné à ladhésion à un syndicat.
Laide sociale accordée par la commune sélevait à 10 couronnes pour les
célibataires et à 20 couronnes pour les personnes mariées (1 et 2
Reichsmarks respectivement).58) Cette situation sest traduite par une misère
croissante, par la malnutrition, la maladie, laugmentation de la mortalité et
la régression du nombre de mariages et de naissances. La politique qui
consistait à écarter systématiquement les Allemands des Sudètes de lacti-
vité économique et de ladministration, même dans les territoires proprement
allemands, devait conduire à une aggravation constante de la situation. La
«loi de protection de lÉtat» composée de 200 paragraphes et les décrets
dapplication du 23 juin 1936 fournirent la «matière juridique» permettant
dexclure les Allemands des Sudètes de la vie économique tchécoslovaque.
Le projet de cette loi était le premier auquel sattaquait, dès son investiture,
le 18 décembre 1935, le président et chef des forces armées, Édouard
Bénès. Ce fut aussi, de toutes ses lois, la plus durable. Grâce à des dispositions
élastiques concernant les nécessités dune sécurité de lÉtat, le gouvernement
de Prague pouvait, sans autre forme de procès, licencier un ouvrier ou
exproprier un chef dentreprise qui ne lui convenait pas. Des prescriptions
concernant la «zone frontalière» devaient enfin atteindre ceux dont les
possibilités dexistence navaient pas été compromises par la loi précédente.
Sans lintervention dAdolf Hitler, le refus de toute politique damélioration
de la situation générale, lexode de plus de 214 000 Allemands de Tchécos-
lovaquie, les pressions de tout ordre qui sexerçaient sur la population,
lassassinat de 200 Allemands des Sudètes devaient tôt ou tard aboutir à une
103
conflagration: tous les étrangers qui ont séjourné à lépoque dans cette
région étaient daccord pour dire que la situation était intenable.59) Lord
Runciman, envoyé spécial du gouvernement britannique, qui est resté en
Tchécoslovaquie du 25 juillet à la mi-septembre 1938 pour étudier la
situation sur place, est parvenu à cette même conclusion.
Le gouvernement britannique était très bien informé, pendant toutes ces
années, des conditions qui régnaient en Tchécoslovaquie. Depuis 1919, les
parlementaires allemands de ce pays lui avaient régulièrement fait part de
leurs préoccupations.
Jusquà larrivée au pouvoir des nationaux-socialistes [en Allemagne],
cétaient les agrariens, les démocrates et les sociaux-démocrates de Tché-
coslovaquie qui avaient demandé à Londres de les protéger contre loppres-
sion tchèque. Par la suite, Henlein et ses amis politiques se présentèrent
également à Londres dans ce même but. En été 1937, il avait conduit des
négociations indépendantes qui devaient aboutir à lautonomie des districts
allemands de Tchécoslovaquie. À lépoque, le gouvernement britannique,
sachant pertinemment que les revendications des Allemands des Sudètes
étaient justifiées, avait assuré Henlein de son soutien.60)
Les Allemands des Sudètes nont revendiqué leur droit à lautodétermi-
nation et à lindépendance que:
a) lorsque toutes les autres propositions, fruits dannées de patience et
de bonne volonté, eurent été rejetées;
b) après la proclamation par le gouvernement tchèque de létat dexcep-
tion, le 12 septembre 1938 (Henlein a formulé ses revendications le 15
septembre 1938);
c) à une époque où les journalistes britanniques, où Lord Runciman, le
Premier ministre Chamberlain et même Churchill avaient conseillé la cession
du territoire des Sudètes à lAllemagne. Ainsi dès le 14 mai 1938:
104
«donnait clairement à comprendre que le meilleur moyen de sortir
de la situation serait de faire transférer par la Tchécoslovaquie les
territoires des Sudètes à lAllemagne.»62)
105
Le but recherché par lUnion soviétique devait être clair pour tout hom-
me politique occidental. Lénine navait-il pas enseigné dès 1917 que la
révolution prolétarienne devait exploiter les contradictions des pays capita-
listes, pousser ces derniers à se combattre et à sentre-déchirer, de manière
à ce que la puissance soviétique puisse ensuite imposer sa force pour ins-
taurer le bolchevisme dans le monde?
Pour prouver au président Bénès sa bonne volonté et lencourager dans
sa politique de provocation, Staline prit les mesures suivantes:
«La loi martiale est décrétée dans la plus grande partie du territoire
de la République tchécoslovaque. Les Tchèques durcissent leurs
positions, la censure de la presse est renforcée, des mesures de police
sont prises à léchelon local, interventions militaires isolées, réunions
interdites. Konrad Henlein envoie un ultimatum au gouvernement, dans
lequel il exige labrogation de la loi martiale, le repli des troupes
tchèques dans leurs quartiers et le retrait des unités de police du
territoire des Sudètes. Après expiration du délai de six heures, la
délégation des Allemands des Sudètes rompt les pourparlers avec le
gouvernement et quitte Prague.»
Le 13 septembre:
106
Parti allemand des Sudètes quitte la Tchécoslovaquie.
La délégation qui accompagne Lord Runciman reconnaît que dans
les circonstances actuelles, les revendications du Parti allemand des
Sudètes sont légitimes.»
Le 15 septembre:
«quil ne doit plus compter sur leur aide militaire au cas où les
troupes allemandes franchiraient la frontière tchécoslovaque.»68)
107
coslovaque et passent la frontière du Reich. Bénès demande au général
darmée tchèque Sirovy de former un nouveau gouvernement.»69)
108
Godesberg de Hitler [22-23 septembre 1938]. Une des causes de ce
refus devait être lassurance reçue quelques jours plus tôt que les
Soviétiques apporteraient dans tous les cas leur appui à la Tchécoslova-
quie, même si la France venait à trahir.»72)
109
ques font sauter 247 ponts dans la région.76) Bénès veut amener lAngleterre
et la France à prendre des engagements en aggravant la crise due à sa politi-
que; son but: transformer une question de politique intérieure tchécoslovaque
en une crise européenne.77) Il est prêt à déclencher une guerre pour atteindre
ses objectifs. Ses mémoires «il sagit probablement de lune des parties
égarées de ses mémoires»78) contiennent lappel suivant:
Bénès, lors dun discours radiodiffusé prononcé le 22 septembre 1938:
Le 23 septembre 1938:
À ses généraux:
110
que lUnion soviétique devait être de la partie. Plusieurs mois avant Munich,
on était tout à fait conscient, en Angleterre comme en France, de la véritable
situation. On savait quen dépit des multiples provocations des hommes
politiques tchèques et jusquau dernier moment, lAllemagne navait exercé
aucune pression directe sur leur gouvernement.81) On savait également que
Bénès considérait son armée comme la meilleure dEurope et ses lignes de
fortification comme égales sinon supérieures à la ligne Maginot. Depuis
son élection à la présidence de lÉtat tchécoslovaque, le 18 décembre 1935,
Bénès a bâti sa politique sur le «sentiment que lEurope allait se trouver
confrontée à un vaste conflit». Il écrit:
111
tout plébiscite entraînerait la ruine de lÉtat et la guerre civile, (comme
il le répéta à plusieurs reprises).»83)
112
Roosevelt savait ou aurait dû savoir ce dont, à la conférence de Munich,
on allait discuter. En toute connaissance de cause, il avait négligé dinciter
la France et la Grande-Bretagne à sen tenir au statu quo. Il encouragea la
décision franco-britannique de céder le territoire des Sudètes au Reich
(messages de Roosevelt, le 26 septembre). Peu de temps après la ratification
de laccord, il manuvra néanmoins de telle manière que «lon puisse
accuser Chamberlain de toute cette honteuse affaire».88) Dans le même
temps, il invitait Londres, Paris et Varsovie à
113
Limmixtion du président Roosevelt dans les affaires européennes ne
provenait nullement de ses compétences personnelles en la matière ou de sa
volonté de trouver le plus sûr moyen de sortir de la crise et damener la
détente en Europe. Il sest mêlé des affaires européennes parce quelles lui
permettaient de rencontrer les gens qui lui donneraient loccasion de «jouer
un rôle» dans la politique mondiale. Sur cette base, il saccordait parfaitement
avec son homologue tchèque, Édouard Bénès.
Pourtant, la France et la Grande-Bretagne refusèrent de se laisser
entraîner à une guerre par Bénès ou par Roosevelt. Chamberlain, pour qui la
Tchécoslovaquie était un pays lointain [«a far away country»] et les Tchèques
«des gens dont nous savons si peu»,
«pensait aussi que le pays ne nous aurait pas suivis si nous avions
essayé de le pousser à la guerre pour éviter quune minorité puisse
obtenir son autonomie ou quelle se soumette à un autre gouverne-
ment.»91)
puisque lon nous dit que les archives ont été brûlées. En tous cas, ces documents sont
absolument authentiques, et les fac-similés montrent que les Allemands ont reproduit, dans
la plupart des cas, les originaux de ces documents et non pas seulement des copies.»
91) K. Feiling, The Life of Neville Chamberlain, pp. 361-62, 372, 353. Par cette déclaration, Neville
Chamberlain admet les intentions bellicistes de Bénès.
92) W. Jaksch, op.cit., pp. 318-319.
114
«Dans un contexte historique, il nest pas surprenant que Bénès et
Hodza se soient refusés à combattre pour sauvegarder la Tchécoslova-
quie. Hodza, ancien fédéraliste austro-hongrois et collaborateur de
François-Ferdinand navait sans doute jamais été convaincu de la viabilité
de la Tchécoslovaquie. Bénès était victime de sa mauvaise conscience.
Il savait que les territoires en cause navaient pas été acquis légalement.
Un homme dÉtat qui se serait fait linterprète et lexécutant dune
cause juste, loin de se soumettre à la contrainte franco-britannique, se
serait révolté contre toute tentative dintimidation.»92)
«Nous ne devons pas perdre de vue que les Tchèques ont annexé les
territoires allemands avant même la signature du traité de Versailles.
Plusieurs honorables membres de cette Chambre regrettent que le dé-
lai accordé pour la cession soit si court. Je vous ferai remarquer que
les Tchèques ont attendu vingt ans avant daccorder leurs droits aux
Allemands des Sudètes.»93)
115
On ne peut arguer du fait que Chamberlain se soit rendu à Munich et non
Hitler à Londres pour en conclure que les accords sont le fruit dun diktat de
Hitler. Hitler était soucieux déviter toute manifestation dhostilité suscep-
tible de compromettre le succès de la conférence. La politique de
Chamberlain exigeait par contre quil se rendît en Allemagne, ce quil
confirme dans une lettre quil rédige le 13 septembre 1938:
«Cela ne maurait pas arrangé [que Hitler vînt à Londres], car mon
coup aurait perdu bien de sa dimension théâtrale.»94)
Il devait ajouter:
Quel allait être lavis dun historien allemand en un temps plus serein,
après la seconde guerre mondiale?
116
même, réclamait un Anschluß au Reich allemand. Il nen fut rien.
Résultat: une Autriche inapte à toute vie économique et un État tchèque
pseudo-national englobant, sur un territoire multinational, les provin-
ces de Bohême et de Moravie. Les événements prirent leur revanche
sur lAutriche en mars 1938 et la Tchécoslovaquie paya ses fautes en
septembre de la même année.»96)
117
«Le [mercredi 28 septembre 1938], la Grande-Bretagne et la France
décrètent la mobilisation générale. La guerre semble imminente. Les
autorités londoniennes prennent leurs dispositions pour assurer la pro-
tection antiaérienne. Des batteries de D.C.A. apparaissent et se multi-
plient par toute la ville. Des dizaines de milliers denfants sont envoyés
hors de Londres. Les hôpitaux sont évacués en hâte.
À Paris, on creuse des tranchées antiaériennes; des sacs de sable
apparaissent aux devantures des magasins. Les trains quittant la ville
sont pris dassaut; ils sont presque tous bondés. La masse des automo-
biles qui fuient la ville bloque les voies daccès. On craint ces terribles
bombardements allemands prédits et dépeints par la presse depuis des
années, à une époque même où lAllemagne ne possédait aucun bom-
bardier. La panique sempare des hommes.»98)
118
Les accords de Munich ont été signés selon les règles du droit interna-
tional. Mais la mauvaise surprise, cette offense dont parle Chamberlain, ne
serait-elle pas plutôt la déclaration de Roosevelt et des cercles franco-
britanniques proches de lui, «aux termes de laquelle Hitler aurait abusé les
démocraties pacifiques»? Nest-elle pas aussi le programme darmement
britannique dont linitiative, liée au changement de cours de la politique
envers lAllemagne, revient à N. Chamberlain? Ce dernier navait-il pas
consigné par écrit à Hitler la nécessité dune consultation réciproque sur
les problèmes politiques les plus importants?
Les accords de Munich et les déclarations de paix et damitié («il ne doit
plus jamais y avoir de guerre entre nos pays») ont été signés lors du troisiè-
me voyage de Chamberlain en Allemagne. Si lon compare les accords et les
trois comptes rendus de négociation avec les déclarations de Chamberlain
au retour de son premier voyage à lObersalzberg, on en vient à douter de la
franchise et de la volonté dapaisement du Premier ministre britannique.
Dès son arrivée à Londres, le 17 septembre 1938, Chamberlain déclara:
119
conclusion de pactes internationaux anti-allemands.102) Ce qui était sans
aucun doute, pour reprendre les termes de Chamberlain, une «surprise
injurieuse» vis-à-vis du co-signataire de laccord!
Après la signature des accords de Munich, François-Poncet, ambassadeur
de France à Berlin, déclarait à A. Mastny, son homologue tchèque:
«On ne doit pas laisser Hitler sen tirer aussi facilement, car cest le
pistolet à la main quil a soutiré des concessions à lAngleterre.»106)
Pour Churchill, Lord Halifax, Duff Cooper, Vansittart, Eden et ceux qui
dirigeaient désormais la politique étrangère de lAngleterre, ne serait-ce
que dans la coulisse, les accords de Munich signifiaient «un bouleversement
de léquilibre européen.»107) Conformément aux lois de la politique étrangère
britannique, cette rupture de léquilibre européen devait déclencher une lut-
102) Informationen aus Politik, Wirtschaft und Kultur (PWK), Düsseldorf, 8 décembre 1961.
103) A. François-Poncet, Souvenirs dune Ambassade à Berlin, pp. 333-334.
104) F. Lenz, Zauber um Dr. Schacht, p. 45.
105) D. Hoggan, The Forced War, p. 188 (éd. all., p. 253).
106) ibid., p. 190 (éd.all., p. 255).
107) W. Churchill, op. cit., tome I, livre I: «Dune guerre à lautre», p. 335.
120
te armée contre «le tyran le plus agressif du continent européen», processus
qui était bien entamé lorsque survint la Kristallnacht [Nuit de cristal] du 9
novembre 1938!108)
Le comte Raczynski, ambassadeur de Pologne à Londres, résumait la
politique de la Grande-Bretagne après Munich en ces termes:
Il évoquait aussi une certaine phraséologie qui alimentait jour après jour
lopinion publique britannique.109) Un état de fait qui était une «surprise
injurieuse» pour lAllemagne!
Le parti conservateur de la Grande-Bretagne a reconnu la validité et
lutilité mêmes des accords de Munich jusque pendant la guerre.110)
Peut-on, prétextant des intérêts politiques de quelques-uns, bannir de ce
monde des faits historiques authentiques? Aucun conflit na été rendu
inévitable par Munich ou par lattitude de Hitler en 1939.
Le 28 avril 1939, Hitler commenta au Reichstag la politique des Alliés
après Munich:
«Où que nous allions de par le monde, une seule clameur sélève:
Plus jamais Munich. Rien ne leur est plus néfaste, à ces fauteurs de
guerre, que le règlement pacifique des problèmes.»
121
Prague
122
trouvé décho chez le peuple tchèque.»1)
123
slovaques, nen constituait pas moins un premier pas vers le développement
intérieur séparé des nationalités. Cette loi prévoyait la constitution dun
gouvernement slovaque doté du pouvoir exécutif et dune diète habilitée à
voter des lois dans tous les domaines, à lexception des questions relatives à
la fédération. Dans les débuts, Hitler avait tenté dapaiser limpatience des
Slovaques et des Hongrois quant à leurs revendications territoriales.4) (113
000 Allemands vivaient encore en Slovaquie même.)5) Toutefois, Hitler ne
pouvait enterrer les différences fondamentales qui existaient entre les deux
nationalités. En application de la loi dautonomie, les Slovaques demandèrent,
au printemps 1939, de participer aux débats et aux votes sur la répartition
des impôts, ladministration et la défense nationale. Cette revendication
ayant été rejetée, les Slovaques demeurèrent jusquà la fin des citoyens de
seconde zone à lintérieur de leur propre pays. Par contre, ils purent inter-
venir plus efficacement dans la vie politique pour réclamer leur autonomie.
Le 6 mars 1939, Newton, ambassadeur de Grande-Bretagne à Prague,
annonce limminence dune crise entre Tchèques et Slovaques.6) Un mémo-
randum du Foreign Office daté du 13 mars 1939, relatif à «la politique du
gouvernement de Sa Majesté face aux développements possibles de la crise
slovaque», fait néanmoins remonter la situation de crise en Slovaquie à
Munich. Selon les communiqués de presse allemands qui font état des actes
de terrorisme tchèque, Hitler pourrait marcher sur Prague. Littéralement:
4) M. Beloff, The Foreign Policy of Soviet Russia 1929-1941, vol. II, p. 214.
5) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 230.
6) J. Colvin, Vansittart in Office, p. 289.
124
étrangères tchèque, serait souhaitable.7)
«Hitler na agi que lorsque les faits avaient déjà trahi les promesses
contenues dans les accords de Munich.»8)
125
saire de lAnschluß et Göring est en vacances à San Remo.
Lorsquil apprend cette nouvelle provocation des Tchèques, lexas-
pération de Hitler ne connaît plus de bornes. Il ordonne aussitôt de tout
mettre en uvre pour une prochaine invasion de la Tchécoslovaquie.»10)
126
industrielles tchèques en exerçant de très fortes pressions «et, si nécessaire,
par la force».17+18)
Personne ne peut sérieusement prétendre que tous les petits États euro-
péens, en loccurrence ici la Pologne et la Hongrie, aient été «les vassaux
de Hitler». Churchill lui-même était surpris de lattitude polonaise, qui
contrariait ses projets:
127
de lEurope: ces mêmes Polonais ... témoignent souvent, dans la plu-
part des manifestations de leur vie gouvernementale, de déficiences
incorrigibles...
La Hongrie aussi était demeurée en marge des discussions de
Munich. Horthy sétait rendu en Allemagne à la fin daoût 1938, mais
Hitler avait observé à son égard une attitude très réservée.»21)
128
slovaquie. Elle ne pouvait rien entreprendre, ni contre la Pologne, ni
contre la France, car larmée tchécoslovaque, extrêmement bien entraî-
née et équipée, était pour lAllemagne un adversaire redoutable.»25)
25) Vorobiev et Kravzov, «La grande guerre patriotique de lUnion soviétique 1941-1945», éd.
russe, p. 24.
26) TMI, vol. XXXI, p. 129 2795-PS., éd. all.
27) F.O. Miksche, Donauföderation, Salzburg, 1953 pp. 29 et 34, cité daprès E. J. Reichenberger,
Wider Willkür und Machtrausch, p. 20. cf. F. O. Miksche, Unconditional Surrender, p. 203.
129
«Les consignes données par Hitler à la Wehrmacht, le 21 octobre et
le 17 décembre 1938, aux termes desquelles larmée doit se tenir prête
à écraser le reste de la Tchécoslovaquie si elle fait mine de poursuivre
une politique anti-allemande, étaient bien moins des plans dagression
quune mesure de prudence.
On a souvent cité ces consignes pour affirmer que Hitler navait
jamais été de bonne foi en acceptant les décisions de la conférence de
Munich. Il était vrai plutôt que Hitler doutait de la mise en uvre des
accords. Bien quil ait souvent été présenté comme un politique ignorant,
il connaissait mieux la question de Bohême que dautres hommes dÉtat
européens; et il croyait, sans nourrir dintention malveillante, quune
Tchécoslovaquie, privée de ses frontières naturelles et ayant perdu son
prestige, ne pouvait conserver son indépendance; il ne sagissait pas là
dun désir de détruire la Tchécoslovaquie. Cétait une conviction que
partageaient déjà Masaryk et Bénès, lorsquils créèrent la Tchécoslova-
quie en 1918. Cétait le principe sur lequel lindépendance tchèque avait
reposé du premier au dernier jour.»28)
«La presse britannique a soutenu avec éclat que Hitler avait manqué
au serment prononcé au Palais des Sports de Berlin, le 26 septembre
1938, de ne plus formuler de revendications territoriales. On a prétendu
quil navait pas tenu sa promesse et quil nétait plus possible de lui
faire confiance. Par contre, on oublie généralement que Chamberlain
na pas tenu ses engagements relatifs au pacte damitié germano-
britannique du 30 septembre 1938 en faisant savoir à Mussolini, au
cours de sa visite à Rome le 14 janvier 1939, quil prévoyait une
opération militaire contre Hitler, bien avant que ce dernier entreprenne
quoi que ce soit contre la Tchécoslovaquie.»29)
28) A.J.P. Taylor, op. cit., p. 193.
29) P. H. Nicoll, Englands Krieg gegen Deutschland, p. 66.
130
En dépit de lactivité diplomatique déployée par lAngleterre après Mu-
nich, la situation aurait évolué de manière différente si les Tchèques navaient
pas continué à opprimer leurs minorités comme ils le faisaient depuis 1919,
et si les Polonais navaient pas suscité une transformation de la scène poli-
tique internationale par leurs ultimatums répétés envoyés à Prague. Les Slo-
vaques ne se sont pas vu imposer la protection de troupes allemandes avec
laide de laquelle ils auraient obtenu de force leur indépendance. Mgr Tiso,
Premier ministre du gouvernement slovaque autonome, considérait que
lindépendance de la Slovaquie ne serait acquise que lorsquil serait mis un
terme aux revendications territoriales et politiques injustifiées des Polo-
nais, des Hongrois et des Tchèques.
Le rejet polonais des propositions allemandes de négociation sur Dantzig
et le Corridor de Prusse occidentale a précipité, sinon déclenché les
événements de Tchécoslovaquie.30) Ce refus polonais sest manifesté avec
toujours plus de clarté dès les mois de janvier, février et mars 1939. Il sest
accompagné de mesures de mobilisation et doppression des Allemands de
lOlsagebiet dès octobre1938 et dune activité journalistique constante.
Chamberlain devait déclarer, dans la matinée du 16 mars 1939, devant la
Chambre des Communes:
«Il [Hitler] avait entièrement tenu la promesse quil lui avait faite le
14 octobre 1938, bien que cela lui eût causé beaucoup dennuis.»32)
131
en 1939 aurait pu dégénérer en guerre sans lintervention de Hitler, et que
cette nouvelle situation a du moins permis déviter à ce moment toute
effusion de sang au cur de lEurope.
Les preuves affluent de la fragilité dun État tchécoslovaque amputé du
territoire des Sudètes mais poursuivant sa politique doppression des mino-
rités. Le 19 septembre 1938, le président Bénès déclarait aux ambassadeurs
de France et de Grande-Bretagne:
132
Prague, quaucune agression allemande ne sétait produite.36)
Toujours est-il que ce nest pas Hitler qui «a précipité les choses».40) Le
D Hacha na entrepris son voyage à Berlin quaprès avoir obtenu laccord
r
133
préalable de son Conseil. Il la fait pour éviter le chaos qui, en labsence de
toute manipulation hitlérienne, menaçait la Bohême-Moravie après la dé-
claration dindépendance de la diète slovaque le 14 mars 1939. Le Dr Hacha,
dont létat de santé ne lui permettait pas de prendre lavion, partit de Prague
en train spécial.41)
«Il a été reçu avec tous les honneurs dus à un chef dÉtat. La compa-
gnie dhonneur présente les armes devant la gare dAnstalt, on entend
lhymne national tchèque et le Deutschlandlied. Devant la Chancellerie
du Reich se forme une haie dhonneur composée de la garde personnelle
du Führer, la Leibstandarte Adolf Hitler, dont lorchestre joue le Prä-
sentiermarsch, tandis que le Dr Hacha passe les troupes en revue.» 42)
Sur son chemin entre la gare et lhôtel Adlon, le Dr Hacha confie, sur un
ton animé, au secrétaire dÉtat Meißner:
134
tout à fait conscient lorsquon lit le protocole de lentrevue Hitler-Hacha du
14 mars 1939 authentifié par le TMI. Pour pouvoir apprécier la valeur de ce
document, il convient de noter que le monologue introductif du Dr Hacha,
quil a prononcé librement devant Hitler, sans être interrompu et sans
connaître les projets de Hitler au début de lentretien, na généralement été
cité que par extraits. Le livre britannique Documents on International
Affairs renferme le passage suivant:
«La tâche la plus dure qui soit échue au Dr Hacha a été sa nomination
au rang de chef dÉtat. Cest la raison pour laquelle il avait demandé à
être reçu par le Führer. Il était convaincu que le sort du pays tchèque
dépendait du Führer et il pensait que sa destinée était en bonnes mains.
Il navait pas de griefs à formuler en ce qui concerne la Slovaquie. Il
était depuis longtemps déjà conscient de limpossibilité pour les nom-
breux groupes ethniques de cohabiter au sein dun même État. Bien que
leurs langues se ressemblent, ces populations ont évolué très différem-
ment. Historiquement la Tchécoslovaquie avait toujours été plus en
rapport avec lAllemagne quavec la Slovaquie, alors que les Slovaques
penchaient plutôt pour la Hongrie. Les Tchèques étaient seulement en
relation avec les protestants slovaques, tandis que les catholiques slo-
vaques avaient été rejetés par les Tchèques.... Il nétait dailleurs pas le
seul à partager cette opinion. Quatre-vingts pour cent de la population
étaient de son avis.»45)
135
Plusieurs éléments montrent que le Dr Hacha nétait pas seul à affirmer
cette opinion:
a) Son élection: il na pas acquis cette certitude à Berlin, sous leffet
dhypothétiques «drogues». Il faut noter que son adversaire à la candidature
présidentielle, Krulis Randa, défendait le même point de vue;47)
b) Le fait quil soit venu à Berlin avec un objectif clairement fixé, quil a
exposé la veille dans un discours radiodiffusé, où il annonçait de nouvelles
réformes internes et où il expliquait la démarche quil comptait entreprendre;
le fait quil nait pas été retenu à Prague par son ministre des Affaires
étrangères;
c) Lentretien téléphonique quil a eu avec les membres du Conseil à
Prague juste avant la signature de laccord avec Hitler et lapprobation
immédiate de Prague;
d) Labsence de résistance tchèque lors de lentrée des troupes alleman-
des en Tchécoslovaquie en dépit de la mobilisation de larmée et de la
présence dimportants stocks darmes.
Laissons de côté les conflits internes de la République tchécoslovaque.
La progression de larmée hongroise, la veille du 14 mars, sur des territoires
frontaliers quelle réclamait à cor et à cris et quelle avait envahis, ainsi que
la menace dune agression brutale de la Pologne, nont pas été sans effet sur
la décision du Dr Hacha de transformer son État en protectorat allemand.
Dès lépoque de la conférence de Munich, ces circonstances, tant exté-
rieures quintérieures, laissaient prévoir lévolution qui se dessinait pour
les mois ou les années à venir. Ceci explique le fait quà Munich personne
nait voulu garantir lexistence de la Tchécoslovaquie, bien quune telle
garantie fût prévue initialement. Cette garantie internationale avait été
subordonnée à laptitude du gouvernement tchèque à satisfaire les
revendications de ses minorités.
136
que le Dr Hacha pour les Tchèques se sont adressés à Hitler et à Mussolini et
non aux quatre grandes puissances pour trouver une solution aux revendica-
tions territoriales hongroises par lintermédiaire dun arbitre impartial.
Lors des négociations qui ont abouti à larbitrage de Vienne, le 2 novembre
1938, lAllemagne est nettement intervenue en faveur des Tchèques, ce qui
était dautant plus remarquable quau cours des vingt années qui avaient
précédé les récents accords, les Tchèques avaient toujours été hostiles au
Reich tandis que ce même Reich entretenait dexcellentes relations avec la
Hongrie. Cet arbitrage montre aussi que Hitler navait pas préparé de longue
date ni même souhaité lécrasement de la Tchécoslovaquie. Aucune occasion
ny eût été mieux adaptée en effet que cette commission darbitrage de
Vienne.
On peut regretter quaprès la visite du D r Hacha à Berlin, Hitler soit
intervenu militairement en territoire tchèque. Toutefois, il serait difficile
de condamner ce geste au nom de lhumanité, de la paix ou dun système de
valeurs occidental qui aurait force de loi. Car les puissances occidentales
avaient bien admis que lon force 3,5 millions dAllemands à cohabiter
contre leur gré avec 7 millions de Tchèques. Ces mêmes puissances se sont
approprié plus ou moins violemment dans le monde entier des territoires
coloniaux et des protectorats avec lintention de les conserver éternelle-
ment, ce qui ne leur confère aucun droit moral à protester lorsque le
gouvernement tchèque est amené à intégrer 7 millions de Tchèques, sous
réserve de leur accorder un statut dautonomie, dans un État de 75 millions
dAllemands. Si Hitler navait pas agi, sa passivité aurait été lourde de con-
séquences pour la paix en Europe centrale et pour la sécurité du Reich. En
effet, les autres puissances auraient mis à profit ces changements pour
alourdir, contre la volonté du gouvernement tchèque, latmosphère belliciste
en Europe.
Le Reich a respecté la nation tchèque, il lui a garanti tout au long de la
guerre lautonomie culturelle et la prospérité économique; les Tchèques
étaient exemptés de service militaire, et lentrée et limplantation de familles
allemandes en Bohême étaient soumises à une stricte réglementation. Cest
ainsi que Hitler a «violé» un pays qui a fait partie du Reich pendant 1000 ans,
dans lequel se trouve la plus vieille et la plus célèbre des universités
allemandes, dont la capitale même a été pendant 50 ans capitale de lEmpire
allemand. Ce que les Tchèques nont jamais accordé aux Allemands des
Sudètes, un statut dautonomie, le droit à une vie nationale, culturelle et
économique propres et la dispense de service militaire, Hitler la accordé
au protectorat.
137
À celui qui ne saisit pas le contexte européen de laffaire tchécoslovaque
et oublie les circonstances historiques de son déroulement, qui pense quil
ny a là rien dautre que le résultat dune politique impérialiste allemande et
qui reste prisonnier de la dialectique attachée au nom de Versailles (la
Tchécoslovaquie nexistait pas auparavant), il convient dopposer les événe-
ments qui se sont déroulés en Hongrie en octobre et novembre 1956. Peut-
être comprendra-t-il postérieurement ce que signifie ne pas verser le sang
et rester maître dune situation que dautres ont gâtée.
LAngleterre na jamais mis en parallèle Dantzig et Prague et elle na pas
jugé utile de recourir au principe dautodétermination des peuples en
proposant, par exemple, à Hitler déchanger la Bohême-Moravie, qui était
tchécoslovaque, contre la ville allemande de Dantzig. Un tel échange aurait
49) P. H. Nicoll, op. cit., pp. 65-67.
138
impliqué en effet que la Grande-Bretagne imposât aux Tchèques un nouveau
gouvernement, attendu que le gouvernement légitime avait accepté laccord
du 15 mars 1939. Toutefois, cette intervention extérieure en faveur du droit
à lautodétermination du peuple tchèque aurait renforcé considérablement
le prestige de la Grande-Bretagne, qui aurait ainsi prouvé quelle savait
allier une fidélité aux principes du droit des peuples à une politique étrangère
pacifique et constructive.
En avril 1939, Gafencu, ministre des Affaires étrangères roumain, se
rendant à Londres après un séjour à Berlin, laissa entendre à Lord Halifax
quune telle proposition faite par lAngleterre ne serait pas nécessairement
mal accueillie à Berlin. Halifax ne donna aucune suite à cette affaire.50)
Visiblement, la question tchèque intéressait aussi peu lAngleterre mainte-
nant quaprès la conférence de Munich du mois doctobre 1938, ou bien elle
ne lintéressait que dans la mesure où lentrée des troupes allemandes à
Prague pouvait servir les intérêts de sa propagande. Comme lAngleterre a
toujours évoqué par la suite le cas de «Prague» pour motiver sa déclaration
de guerre puis lextension du conflit, il semble que la deuxième explication
conviendrait mieux. Le gouvernement britannique préférait invoquer la
violation des droits de la petite Tchécoslovaquie pour amener un plus grand
nombre de nations à se coaliser contre Hitler plutôt que de sefforcer dob-
tenir le rétablissement de lindépendance tchèque par une politique positive.
Le 16 août 1939, dans une lettre à Strang, directeur du bureau central du
Foreign Office, Henderson, ambassadeur de Grande-Bretagne à Berlin, tente
une dernière démarche:
50) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. V, doc. 278, 279, 285.
51) ibid., vol. VII, doc. 37.
139
La Pologne veut la guerre
Des terres allemandes aux mains des Polonais
1) W. Recke, Die polnische Frage als Problem der europäischen Politik, pp. 286, 314, 315.
2) H. G. Dahms, Der Zweite Weltkrieg, p. 19, et W. Recke, Die polnische Frage als Problem der
europäischen Politik, p. 286.
3) W. Recke, op. cit., pp. 291-354.
4) S. Horak, Poland and her National Minorities 1919-1939, p. 36.
140
allemande de 1921. La Pologne annexait ainsi un territoire de 46 150 km
carrés. Ce traité de paix de Versailles, qui était «une façon de continuer la
guerre»,5) «une déclaration de guerre potentielle»6) et qui «pouvait devenir
un mal plus grand encore pour le monde que la guerre elle-même»,6) donna
davantage à la Pologne que ce à quoi elle était en droit de prétendre.
Nombreux ont été les hommes politiques de lépoque, puis les historiens, à
voir dans cette injustice la source possible dune nouvelle guerre.
On connaît la phrase célèbre du maréchal Pilsudski:
5) F. Nitti, Die Tragödie Europas und Amerika? p. 16: déclaration de Georges Clemenceau,
Premier ministre français et président de la Conférence de Paix de Versailles.
6) H. Lutz, Verbrechervolk im Herzen Europas? pp. 94 et 53: déclaration du général Smuts,
Premier ministre de lUnion sud-africaine.
7) F. Heiß, Deutschland und der Korridor, p. 122.
8) W. Recke, op. cit., pp. 291-292.
9) ibid., p. 299, et B. de Colonna, Poland from the Inside, p. 156. Le parti travailliste anglais avait
organisé plusieurs manifestations devant lambassade de Pologne à Londres contre cette mesure.
141
ouvertement le 5 février 1919), que «les frontières occidentales de la
Pologne étaient un cadeau des Alliés».10) Cette prise de conscience ne se
reflétait nullement dans leur politique.
Lloyd George, Premier ministre britannique lors des négociations de
Paris:
10) H. Roos, Polen und Europa, p. 4: citation de L. Wasilewski, «Joseph Pilsudski comme je lai
connu», Varsovie, 1935, pp. 171-172. Déclaration faite à Léon Wasilewski, son biographe et
conseiller pour les affaires de lEst.
11) Seraphim, Maurach, Wolfrum, Ostwärts von Oder und Neiße, p. 39.
12) Chr. Höltje, Die Weimarer Republik und das Ostlocarno-Problem 1919-1934, p. 10.
13) F. Grimm, Frankreich und der Korridor, p. 34.
14) L.L.Gerson, Woodrow Wilson und die Wiedergeburt Polens, p. 209.
142
La Pologne se voit ainsi attribuer des territoires auxquels elle na
nullement droit.»15)
«Une des tâches qui me tiennent le plus à cur est la correction des
15) F. Grimm, op. cit., p. 37, et W. Recke, op. cit., p. 344, et B. de Colonna, op. cit., p. 90, et R. S.
Baker, Woodrow Wilson and World-Settlement, vol. II, p. 60.
16) Chr. Höltje, op. cit., pp. 162, 164, 161.
17) René Martel, Les Frontières Orientales de lAllemagne, p. 5.
143
frontières à lest: la restitution à lAllemagne de Dantzig, du Corridor
polonais et la révision du tracé des frontières en Haute-Silésie.»18)
«Lors dun discours que je prononçai devant la commission de
politique étrangère, jai déclaré au grand regret des Polonais que nous
ne reconnaîtrions pas les frontières de lest. Jexpliquai quaucun gou-
vernement allemand, des nationalistes aux communistes, ne pourrait
jamais accepter les frontières fixées par le traité de Versailles.»19)
18) H. Bernhard, Gustav Stresemann, Vermächtnis-Nachlaß, vol. II, pp. 546-547: Stresemann
dans une lettre au prince héritier dAllemagne, le 7/9/1925.
19) ibid., pp. 233-236, 248.
20) Chr. Höltje, op. cit., p. 103.
21) ibid., pp. 209 et 193.
144
par le port de Dantzig, comme nous lavons fait pour la Tchécoslovaquie
par Hambourg et lElbe. Il nétait pas nécessaire de séparer la Prusse
orientale de la mère-patrie et de placer arbitrairement des centaines de
milliers dAllemands sous lautorité dune puissance étrangère qui
exerce à leur encontre une véritable politique de terreur et les incite
ainsi à quitter leur pays. LAllemagne ne saurait reconnaître une telle
injustice.» 21)
145
collaboration germano-polonaise profitable aux deux peuples. La
supression de ce Corridor est un élément essentiel de la pacification
européenne.» 23)
23) Herder éd., Staatslexikon, 5ème édition, vol. IV, p. 321, Friebourg 1931.
24) H. Grimm, Warum Woher Aber Wohin? p. 246.
25) K. Feiling, The Life of Neville Chamberlain, p. 247.
26) D. Hoggan, The Forced War, p. 111 (éd.all., Der erzwungene Krieg, p. 152).
27) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten, vol. I, p. 62.
146
lois de la morale internationale, comme la clairement montré Russell Grenfell,
historien britannique:
147
Polonais et lon disposait delle au mépris de tous les principes établis.»29)
Des hommes, tel Roman Dmowski, sont parvenus, à la suite dune longue
et violente campagne, à imposer par la force leurs annexions, mais pas tou-
tes. Ce sont précisément eux qui ont choisi pour fondement de lÉtat polonais,
comme sils navaient pu faire autrement, «linimitié érigée en dogme vis-à-
vis de lAllemagne»,30) inimitié hautement suggestive, constructive et censée
contribuer au maintien de la paix! Ils saccordaient en cela avec larmée et
lopinion publique polonaises, lesquelles ne se sont jamais départies de leur
attitude jusquen 1939.
Si les hommes lucides dEurope occidentale ont clairement perçu et re-
connu les injustices liées à la création du Corridor, en revanche, la politique
des puissances concernées est restée inchangée. Ce nest pas sans raison
que les États-Unis ont refusé de signer le traité de Versailles et dentrer à la
Société des Nations. Tout cela na pas empêché le futur président F.D.
Roosevelt de renverser la vapeur sans aucun scrupule, dans les années 1937-
1939, et de prétendre légitimer linjustice en lui conférant une sorte de
«statut juridique». Cette attitude était tout aussi irresponsable et tout aussi
superficielle que celle des communistes qui prétendent que:
29) C. J. Burckhardt, Ma Mission à Dantzig, p. 27; B. de Colonna, op. cit., p. 110 seq., donne en
plus de nombreuses références de sources étrangères.
30) R. Breyer, Das Deutsche Reich und Polen 1932-1937, p. 108.
31) R. Goguel, Polen, Deutschland und die Oder-Neiße-Grenze, p. 411.
148
Les revendications territoriales de la Pologne
149
Dmowski est plus clair encore dans son mémorandum de mars 1919:
150
151
Cet état de choses explique que dans aucun ouvrage, même polonais,
traitant du droit des peuples, il n’est question de recréer (en 1918) l’ancien
empire polonais.14) Les interminables discussions portant sur l’«indépen-
dance de la Pologne» dans les années 1917 à 1923 auraient été superflues
sinon absurdes s’il n’avait été question que de recréer l’ancien État polonais.
«Je n’ai pas lutté pour la reconstitution de la Pologne, elle était évi-
dente; j’ai combattu pour la création d’une Grande Pologne. La Pologne
actuelle est importante, mais nous ne devons pas perdre de vue qu’elle
n’est que l’embryon de la Grande Pologne. La Pologne n’est pas encore
un grand empire, mais elle doit le devenir pour que son existence soit
solidement garantie.»16)
152
153
«La Pologne doit insister sur le fait qu’elle ne peut exister sans
Königsberg et sans la totalité de la Prusse orientale. Nous devons
exiger à Locarno la liquidation de toute la Prusse orientale, qui pourra
jouir sous la souveraineté polonaise d’une relative autonomie. Ainsi
disparaîtra le problème du Corridor. Si ce but n’était pas atteint par des
voies pacifiques, il devrait y avoir un nouveau Tannenberg qui ramènerait
au sein de la patrie bien-aimée tous ces territoires.»24)
«Il n’y aura pas de paix en Europe tant que toutes les terres de
Pologne ne lui auront pas été restituées, tant que la Prusse, qui porte
aujourd’hui le nom d’un peuple disparu, n’est pas rayée de la carte, tant
que les Allemands n’auront pas déplacé leur capitale, Berlin, vers l’ouest,
à Magdebourg sur Elbe, par exemple, puisqu’elle fut capitale pendant
un temps, ou à Merseburg sur Saale, tant que l’Allemagne ne reprendra
pas son ancienne appellation, et tant qu’elle ne cessera pas de rêver à
21) ibid., p. 11, instructions données par le maréchal Pilsudski à son ministre des Affaires
étrangères, M. Wasilewski, alors en mission à Paris.
22) H. Laeuen, op. cit., p. 298.
23) K. S. von Galera, Geschichte unserer Zeit, vol. VI, p. 172.
24) C. Höltje, op. cit., p. 84.
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158
«Souvent, les auteurs polonais ont reproduit des cartes censées re-
constituer la Pologne telle qu’elle existait à l’époque des rois Boleslas
le Vaillant (Chrobry) et Boleslas III dit Bouche-torse, un empire dont
les frontières occidentales atteignaient l’Elbe et la Saale. Or, sous plus
d’un rapport, ces reconstitutions ne recouvraient pas les réalités
historiques. Quelques années avant le déclenchement de la seconde
guerre mondiale, un énorme panneau mural reproduisant la scène
légendaire de Boleslas le Vaillant (Chrobry) faisant planter les bornes
frontalières était inauguré à l’Institut de géographie militaire de
Varsovie.»39)
159
Bien que le tracé des frontières de 1921 (traité de paix de Riga entre les
Polonais et les bolcheviks) ait permis à la Pologne d’incorporer à son État
sept millions d’Ukrainiens et deux millions de Russes blancs, elle n’en a
pas moins continué à rêver d’un empire bordé par la mer du Nord, la mer
Noire et l’Adriatique, la «terre polonaise géopolitique». Le magazine Nasza
Przyszlosc préconisait une frontière polono-japonaise à l’Oural. Il n’était
pas rare de voir figurer sur des cartes géographiques polonaises les
frontières de l’État à la Volga ni de trouver des publications et déclarations
similaires de la part de personnalités polonaises.39) Le rêve d’une Grande
Pologne englobant l’Ukraine jusqu’à Kiev et d’une liaison territoriale jusqu’à
la mer Noire était tout aussi présent à l’esprit des milieux gouvernemen-
taux polonais en 1939 que dans les années 1919-1920.40)
«Lors de la visite de Ribbentrop à Varsovie, le 1er février 1939, Beck ne
lui cacha pas les visées de la Pologne sur l’Ukraine soviétique.»41)
Posen 1928, p. 16; G. Sappok, Polnische Wunschträume, Berlin 1943, illustration 13; St.
Kozierowski, Atlas der geographischen Namen des Westslaventums, Posen 1934-1938.
40) Documents on German Foreign Policy 1918-1945, vol. V, doc. 126: mémorandum
de Ribbentrop du 1er février 1939 relatif à ses entretiens de Varsovie fin janvier.
41) A. J. P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 196.
42) D. Hoggan, op. cit., p. 271 (éd. all., p. 363).
43) G. Moltmann, Amerikas Deutschlandpolitik im Zweiten Weltkrieg, p. 111.
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«Pilsudski savait très bien ce que la Pologne devait aux alliés victo-
rieux de la première guerre mondiale. Il connaissait la force des puis-
sances occidentales et il était conscient que leurs seuls intérêts les
44) L. de Jong, Die deutsche fünfte Kolonne im 2. Weltkrieg, p. 43, et Das östliche
Deutschland – ein Handbuch, p. 496.
45) H. Roos, op. cit., p. 182.
46) S. Sharp, Poland – White Eagle on a Red Field, pp. 266 et 150-151.
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Les insultes et les voies de fait étaient à l’ordre du jour. Dans la plupart
des cas, la police polonaise refusait toute aide aux Allemands qui en étaient
victimes. La vie culturelle de la communauté allemande en fut gravement
atteinte.
Cette «liquidation des propriétés allemandes et la dégermanisation des
Marches de l’Ouest» n’étaient pas de vains mots, lancés au hasard par le
Premier ministre Sikorski en 1923. C’était tout un programme de gouverne-
ment2) depuis 1919. En octobre de cette même année, Stanislaw Grabski,
futur ministre de l’Éducation, promulguait son programme de Posen devant
des délégués réunis en congrès:
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S’il est vrai que la réforme agraire de 1938 dépossédait la minorité alle-
mande des deux tiers de ses terres arables, en revanche la loi sur les
territoires frontaliers et la réforme agraire expropriaient en février 1939
des parcelles qui appartenaient à raison de 72 % à des Allemands (au cours
des années précédentes, les parcelles confisquées par l’État appartenaient
pour 66% à la communauté allemande).12) À l’intérieur d’une bande fronta-
lière de 30 km de large, aucun Allemand ne pouvait posséder de terres. Dans
le Corridor, large de 85 à 110 km, cette mesure touchait pratiquement l’en-
semble du territoire de Prusse occidentale.13) S’y ajoutait l’activité de
l’Association de la Marche de l’Ouest dont «l’unique programme était l’ex-
termination de l’élément allemand à la frontière occidentale du pays».13) À
la même époque, Zaleski, directeur de cette association, affirmait dans une
allocution prononcée à Kattowitz que le pacte germano-polonais de 1934
n’avait été conclu par la Pologne que pour des raisons tactiques, afin de
préparer le terrain pour un prochain conflit. Au reste, c’était une excellente
couverture que le gouvernement polonais pouvait utiliser contre la minorité
allemande,14) ce qu’avaient perçu depuis longtemps déjà les milieux
généralement bien informés.13) Parallèlement à cette réforme agraire, le
gouvernement fit fermer ou démolir un certain nombre d’entreprises alle-
mandes et de bâtiments communautaires. Les écoliers polonais, excités par
la campagne de haine généralisée, s’attaquaient à leurs condisciples alle-
mands. Des fermes allemandes furent incendiées à l’occasion de manifesta-
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Ces faits ont été confirmés après la guerre par de nombreux historiens
indépendants.
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«Durant tout leur règne, les autorités polonaises n’ont jamais tenté
d’apporter les preuves concrètes de la déloyauté des Allemands de Po-
logne, car à quelques exceptions près, c’eût été impossible.»29)
28) ibid., doc. 408 Ordonnance de l’administration polonaise des finances de Graudenz, été 1939.
29) R. Breyer, Das Deutsche Reich und Polen 1932-1937, p. 262.
30) ibid., p. 296.
31) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 388.
32) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 612.
33) T. Bierschenk, op. cit., pp. 351-352.
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Un historien allemand:
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Stratégie
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«Nous n’en avons pas, car nous comptons sur une guerre de mou-
vement et nous pensons envahir l’Allemagne dès le début des hosti-
lités.» 22)
Il n’est pas impossible que cette clause ait été destinée à pousser la
Pologne davantage encore dans les bras des Alliés:
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30) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 597.
31) K. Zentner, op. cit., p. 74.
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Ce texte indique que c’est dans les derniers mois de l’année 1938 que la
Pologne et l’Angleterre ont modifié leur attitude vis-à-vis de l’Allemagne.
Pour reprendre les termes de l’auteur polonais, ils refuseront désormais de
chercher un terrain d’entente avec le Reich et accepteront de négliger ce qui
peut contribuer à la sauvegarde de la paix. On pourrait même dire que toute
la politique étrangère de la Pologne se fondera sur le constat que la guerre
ne peut plus être évitée. C’est ainsi que des diplomates étrangers en poste à
Varsovie ont pu penser que la Pologne était sur le point de provoquer un
conflit.12) Le 16 mars 1939, Noël, ambassadeur de France à Varsovie, rap-
portait à son ministre des Affaires étrangères:
10) G. Gafencu, Derniers Jours de l’Europe, pp. 56-57 (éd. Egloff, Paris 1946).
11) Livre Blanc Polonais, p. 25.
12) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 524 et 523.
196
«que la manière dont l’Angleterre avait réglé cette affaire lui per-
mettait d’obtenir beaucoup plus facilement de la Pologne à peu près
tout ce qu’elle voulait.»14)
Beck savait que Hitler n’avait fait peser aucune menace sur lui, et il «ne
voulait pas croire à des intentions offensives de l’Allemagne». 15) Beck ne
pensait pas que Hitler pût constituer un danger pour la Pologne car:
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Ses craintes étaient tout à fait fondées. Pour le colonel Beck, il incom-
bait à la Pologne en tant que grande puissance européenne de décider de
l’évolution politique de l’Europe. Beck entendait dicter ses conditions; cela
explique qu’il n’ait pas attendu de recevoir la garantie britannique pour
brandir la menace d’une guerre. Cet «homme ambitieux et vaniteux» dont
«certains traits de caractère s’accordaient si mal au tempérament d’un homme
d’État»,19) qui croyait «que la Pologne n’avait rien à perdre par la menace
d’une action directe»,20) trouva le partenaire pour lui accorder sans scrupule
les pleins pouvoirs.
Ce n’était ni plus ni moins qu’un appel à la guerre, que le colonel Beck ne
tentait même pas de justifier en évoquant l’«agressivité» de Hitler, sa volonté
de «conquérir le monde» ou plus simplement ses «intentions bellicistes».
Beck partait du principe que Hitler ne voulait pas la guerre car il ne pouvait
se la permettre et qu’il lui faudrait donc tolérer, d’une Pologne résolue et
prête au combat, les pires provocations jusqu’à devoir envoyer à Varsovie
son ministre des Affaires étrangères. L’Angleterre se prêta à cette entreprise
bien que, d’une part, elle en connût les motivations et que, d’autre part, elle
fût consciente du véritable rapport de forces existant entre l’Allemagne et
la Pologne, plusieurs mois avant que la tension n’atteignît son paroxysme. Il
lui fallut par la suite témoigner d’un certain cynisme pour évoquer la
«protection des petites nations», le «christianisme» et ses «engagements
qui l’obligeaient à combattre un agresseur menaçant l’Europe et le monde».
Certains diplomates polonais ont reconnu que l’encouragement inces-
sant du gouvernement britannique, qui a précédé la garantie définitive, avait
été interprété comme un appel à la guerre:
198
Dans une note du 26 mars 1939 adressée au ministre des Affaires étran-
gères du Reich, Beck décrète que toute tentative allemande de règlement de
la question de Dantzig constitue désormais pour la Pologne un motif de
guerre suffisant: début avril il fait part de cette décision à son homologue
britannique.24) Donnant ses instructions aux diplomates polonais en poste à
l’étranger le 20 avril 1939, il signalait encore que malgré la garantie bilatérale
britannique, qui avait été rendue publique entre temps, «aucun signe de pré-
199
25) W. Jedrzejewicz, Poland in the British Parliament 1939-1945, vol. I, pp. 41-42.
26) ibid., p. 48, et Livre Blanc Polonais, doc. 77, p. 114.
27) Livre Blanc Allemand N° 2, doc. 216.
28) Vierteljahrshefte für Zeitgeschichte 1/1954, p. 88: G. Rhode, «Außenminister Joseph Beck
und Staatssekretär Graf Szembek».
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36) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 249.
37) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. Vl, p. 702.
38) C.J. Burckhardt, op. cit., pp. 352-353, et ADAP VI, doc. 771.
39) M. Gilbert et R. Gott, The Appeasers, p. 247, et Documents on British Foreign Policy
1919-1939, vol. VI, doc. 236.
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attribution définitive ni la puissance nécessaire pour imposer un règlement
constructif. Lété 1936, il créa un «Comité des Trois», composé des ministres
des Affaires étrangères de France, de Grande-Bretagne et du Portugal
(plus tard de la Suède), «chargé des affaires étrangères de la Ville libre».
La Pologne était également membre de ce Comité, ce qui, vu lattitude de
son représentant, conduisait à une situation paradoxale: «les rôles de la
Pologne et de la Société des Nations semblaient intervertis.»3) Ce «Comité
des Trois» devait décharger le Conseil de la Société des Nations des affaires
dantzicoises. En réalité, par la création du Comité, la France et la Grande-
Bretagne sengageaient plus profondément encore dans les affaires de
Dantzig. Désormais, pour le haut-commissaire de la Société des Nations, la
voie hiérarchique passait directement par Londres et Paris. Ce règlement
ne satisfaisait personne. Il nest donc pas étonnant que les différents hauts-
commissaires de la Société des Nations aient toujours plaidé en faveur
dune nouvelle réglementation des conditions régissant Dantzig (par cette
formule, ils entendaient la rétrocession de Dantzig au Reich), dautant que
largument invoqué par la Pologne (nécessité pour ce pays de disposer dun
port) avait été rendu caduc par suite de lextension du port de Gdynia, de
létranglement économique de Dantzig et de lassurance renouvelée à la
Pologne quelle pourrait disposer à lintérieur même de Dantzig dun port
libre. Le comte Manfredo Gravina, haut-commissaire de la Société des
Nations à Dantzig de 1929 à 1932, avait proposé le système suivant:
- relier la Prusse orientale au Reich en élargissant le territoire de Dant-
zig;
- doter la Société des Nations, en tant que protectrice de Dantzig, des
pouvoirs indispensables;
- libérer Dantzig de toute limitation polonaise de sa souveraineté (che-
mins de fer, douane, économie, politique étrangère, etc.);
- rattacher à la Pologne la ville de Gdynia et le territoire limitrophe,
ainsi quun port libre à lintérieur même de Dantzig et faire garantir ces
dispositions par la Société des Nations.3)
Dès 1937, Carl J. Burckhardt estima que le retour de Dantzig au Reich
était indispensable.4) Toutefois, il devait reconnaître son impuissance à
modifier la situation et avouer quen haut lieu, il lui avait été conseillé de
renoncer à son idée, car elle était «néfaste».5) Comme le note dans son
journal le comte Szembek, sous-secrétaire dÉtat aux Affaires étrangères
polonais:
210
«[Depuis 1935] beaucoup de personnes ont intérêt à amplifier le diffé-
rend polono-dantzicois. Ce sont les nationalistes polonais et les Alle-
mands antihitlériens de Dantzig, les Juifs, ainsi que les hommes daffaires
du port de Gdynia.»6)
211
«Les nazis des Sudètes, comme les Autrichiens avant eux, firent
monter la tension graduellement sans y être incités par Hitler. À Dantzig,
cette tension était déjà totale, et Hitler, si tant est quil fît quelque cho-
se, retint les nazis.»11)
11) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 248.
12) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten, vol. II, doc. 49, p. 122 Compte
rendu des entretiens de Beck à Londres, le 4 avril 1939.
13) O. Abetz, Histoire dune Politique Franco-Allemande, pp. 101-102. Après larmistice de
1940, Abetz fut nommé ambassadeur à Paris.
14) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 158. Lambassadeur de
Grande-Bretagne à Berlin au Premier ministre britannique, le 22 août 1939.
15) S. L. Sharp, Poland White Eagle on a Red Field, p. 143.
212
«durant les mois critiques de lannée 1939, il avait agi de telle sorte
que lon pût croire quil ne sagissait réellement que de Dantzig.»15)
16) Catalogue de timbres Yvert et Tellier et Livre Blanc Allemand, N° 2, doc. 198.
17) C. Tansill, Back Door to War, p. 523.
18) Livre Blanc Polonais, doc. 77.
19) Livre Jaune Français Documents Diplomatiques 1938-1939, doc. 175.
213
tomba à 4% en 1937 et à 2,3% en 1938. 20) À la fin du mois de juin 1939,
Budzynski, représentant de la minorité polonaise à la diète de la Ville libre,
déclarait à ses compatriotes, lors dune allocution prononcée à loccasion du
«Festival de la Mer» à Gdynia, que larmée rattacherait Dantzig à la Polo-
gne.10)
Le 11 juillet 1939, Lord Halifax rapportait à son ambassadeur à Varsovie
un entretien quil avait eu avec le comte Raczynski, ambassadeur de Pologne,
revenu à Londres peu de temps auparavant:
«Le colonel Beck est conscient de la trop grande passion qui agite
lopinion publique polonaise. Il a été amené à déclarer quil comptait
tenter de calmer les esprits...
Beck reconnaît que rien na été fait pour modifier la situation et que
la Pologne continue à gouverner la ville de Dantzig...
Cependant, Beck avait annoncé laccélération des préparatifs mili-
taires autour de Dantzig. Néanmoins, le colonel Beck a senti que cette
situation ne pouvait durer éternellement et quil fallait craindre de se
trouver un jour devant le fait accompli. Bien quil ne fût pas encore
parvenu à une décision définitive, le colonel Beck pensait que le meilleur
moyen denrayer cette évolution serait peut-être de rechercher un fait
spécifique qui, bien que constituant une violation caractérisée de la
constitution, ne serait pas de nature suffisamment grave pour provoquer
une explosion. Si la Pologne se maintenait avec fermeté sur ce terrain
bien choisi, il lui serait alors possible damener les Dantzicois à battre
en retraite. Le colonel Beck envisageait une action commune des trois
[puissances], non pas à Berlin, mais à Dantzig. Il croyait que cette solu-
tion serait plus appropriée car elle nimposerait pas directement au
chancelier allemand une perte de prestige probable, et il lui serait plus
aisé deffectuer une retraite par le biais [de la question] de Dantzig...
Le colonel Beck sopposait toutefois à lenvoi de notes dures qui ne
pouvaient avoir que des effets déplorables si elles nétaient pas rédigées
avec la plus grande circonspection...
En réalité, le colonel Beck ne voulait pas entreprendre de pourpar-
lers sur la question de Dantzig et il considérait quune lutte acharnée
serait nécessaire pour rétablir la situation, le statut de Dantzig ayant été
trop souvent bafoué.»21)
214
Le gouvernement britannique avait appris, au plus tard à la mi-juillet
1939:
a) que la Pologne songeait à singérer dans les affaires dantzicoises et à
rechercher les prétextes qui lui permettraient de restreindre puis de
réduire à un minimum linfluence allemande,
b) que Hitler ne fixait aucun délai de négociation au problème de Dantzig
et quil était prêt à négocier avec la Société des Nations («Nous avons
recours au Haut Commissaire, et non à Genève en tant que Genève»).22)
Néanmoins, la Grande-Bretagne et la France envoyèrent une mission
militaire à Moscou pour amener lUnion soviétique à intervenir en Europe
et combattre le Reich allemand.
LorsquAlbert Forster, gauleiter de Dantzig, avait proposé labandon
des récentes mesures militaires prises par la Pologne en cas de détente
entre les deux pays, la Pologne réagit si violemment que Lord Halifax dut
inviter Varsovie, sans succès dailleurs, à éviter «daffirmer de façon
provocante que le Gouvernement allemand faiblit».23)
Le 1er août 1939, Varsovie bloqua lexportation, libre jusqualors, des
harengs et de la margarine de Dantzig vers la Pologne. Cette mesure
concernait 10% du commerce dantzicois et aggravait considérablement les
perspectives déjà bien sombres de léconomie de la Ville libre. Le 1er août, le
consul français à Dantzig en informa son ministre des Affaires étrangères:
215
Tous ces événements se déroulaient à une époque où la Pologne savait
pertinemment que «le Sénat ne sétait jamais compromis et quil navait pas
pris très au sérieux la menace liée à une union douanière avec lAllemagne».
Le 2 août, Arciszewski, sous-secrétaire dÉtat adjoint au ministère des Af-
faires étrangères, laissait entendre à Kennard, ambassadeur de la Grande-
Bretagne à Varsovie, «que la situation générale risquait de devenir
dangereuse vers la fin du mois».
216
ser létat actuel de la situation et à démontrer ainsi que les allégations
contenues dans lultimatum étaient dénuées de tout fondement.27) Bien que
Chodacki ait accepté damener son gouvernement à conférer à lentretien
téléphonique la valeur dune note verbale, il tint à ce que le Sénat de
Dantzig confirmât par écrit «son acceptation des termes de lultimatum
polonais». Entre temps, Chodacki avait informé Burckhardt que les femmes
et les enfants polonais allaient être évacués. En menaçant la Ville libre le
gouvernement polonais sen prenait sans raison valable aux intérêts vitaux
de Dantzig et du Reich. Il ressort de la correspondance diplomatique
secrète:
217
«que si les nazis de Dantzig essayaient de créer un fait accompli, les
canons gronderaient.»29)
31) Ilustrowany Kurjer, 7 août 1939 et New York Times, 8 août 1939.
32) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VI, doc. 585 et 588.
33) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 15.
218
Le 8 août, lambassadeur Henderson en informait le ministre des Affaires
étrangères britannique:
219
Je parlerai au [prince] Lubomirski de larticle du Czas
En effet, Lubomirski est lun de ces fonctionnaires de lambassade de
Pologne qui, par ses déclarations hautement bellicistes, a alarmé la plu-
part de mes collègues.
À condition que nous maintenions notre fermeté nous ne perdons
rien et avons tout à gagner en donnant à Hitler une occasion de faire ce
geste de paix quil cherche peut-être. Nous avons tout à perdre si nous
ne lui donnons pas cette chance. En effet, il peut montrer à son peuple,
dans le cas contraire, quaucune occasion ne lui a été offerte de faire ce
geste pour sauvegarder la paix.
Non seulement les Allemands mais aussi les Italiens pensent que la
Pologne veut provoquer une réaction cette année même, car elle croit
que lappui britannique se relâchera avec le temps.»36)
220
prétexte daction.38) Lambassadeur Henderson avait perçu la portée de la
note polonaise: il «ne pouvait croire» que Hitler ne réagît pas avec plus de
violence à la lecture de cette note, dont il venait de prendre connaissance.39)
Burckhardt admet que les Polonais:
221
Halifax ne mit pas à profit les rapports de cet expert pour tenter de trouver
un règlement pacifique des problèmes.
Ce même 24 août, la Pologne interrompit les pourparlers dans laffaire
des inspecteurs des douanes à Dantzig.44) Les documents de lADAP ten-
dent à montrer que le Sénat de Dantzig a conduit ces négociations avec
beaucoup de réticences. Quand bien même ces documents seraient authen-
tiques, il est curieux que la Pologne ne se soit jamais plainte de la lenteur de
ces négociations et quelle nait pas réclamé une concrétisation des
discussions.45) En rompant les pourparlers, en sabstenant de faire appel à
un médiateur (tel que Burckhardt ou le gouvernement britannique par
exemple), et en refusant jusquà la fin dentamer des négociations sur
quelque sujet que ce fût avec le Sénat dantzicois ou avec le gouvernement
du Reich, enfin en exhibant très nettement ses projets dannexion, la Pologne
montrait le peu dintérêt quelle attachait à ces discussions et dévoilait ses
véritables objectifs.
Le soir du 26 août 1939, Chodacki conseilla à Burckhardt dévacuer sa
famille dans les plus brefs délais «car les hostilités pouvaient se déclencher
dun jour à lautre, Dantzig risquait dêtre bombardée».48)
45) Aucun document polonais ne permet de conclure à une réticence du Sénat. Lors du procès de
la WiIhelmstrasse (1946-1949), M. Veesenmayr, «signataire» des présents documents de
lADAP, a été reconnu innocent du chef daccusation n°1 (crime contre la paix). Le tribunal a
pu se convaincre quil navait pas eu connaissance des «projets dagression hitlériens». Ces
deux facteurs nous permettent de douter de lauthenticité de ces «documents reproduits
daprès originaux». Das Urteil im Wilhelmstraßenprozeß, p. 43.
46) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 14.
47) ibid., vol. III, p. 372. Lambassadeur Lipski, le 31 août 1939.
48) C. J. Burckhardt, op. cit., pp. 392 et 332.
222
naces de guerre. Il rejetait tout compromis et au plus fort de la crise, il
refusait encore de faire le moindre effort pour relancer une négociation.
Burckhardt a pu écrire que le 27 mai 1939 déjà, «il [Beck] lui aurait plutôt
donné limpression de lui adresser des instructions que de faire appel à sa
collaboration». 48) Lors de cet entretien, Beck confia à Burckhardt que
«Dans létat de tension actuelle, des pourparlers entre Berlin et Varsovie
nétaient pas possibles».48) Cette donnée nexcuse pas le peu denthousiasme
manifesté par les Polonais pour une reprise des négociations, un désinté-
ressement qui a précisément amené le pourrissement de la situation.
Comme nous lavons déjà signalé, Dantzig nétait pas lunique objectif
des Polonais; elle nétait pas non plus le seul terrain sur lequel sexerçaient
les provocations polonaises, elle nétait quun moyen datteindre de plus
vastes objectifs.49) La Pologne et ses alliés français et britanniques enten-
daient empêcher la Ville libre de vivre en conformité avec ses liens ethni-
ques et ils se sont efforcés de lui ôter les bases mêmes de sa vie économique.
Finalement, pour expliquer leur audace, ils ont pu proclamer que la «liberté»
du monde entier était menacée par Hitler.
«Dantzig est allemand, les seules élections le prouvent. Jai fait état
de lopinion dhommes illustres. Personne ne peut nier que la grande
majorité des Dantzicois est allemande et quelle souhaite le rattachement
à lAllemagne. Si les Polonais pensent le contraire, pourquoi ne pas
organiser un plébiscite sous contrôle britannique et sen tenir au résul-
tat de cette consultation populaire? Varsovie refuserait cette solution,
comme cela ma été confirmé là-bas, parce quelle sait pertinemment
quel en serait le résultat. Des Polonais mont confié que le test serait
sans valeur puisquils ont déjà proclamé leurs revendications sur lem-
bouchure de la Vistule. Ayant examiné ces revendications dans un autre
chapitre, je ne puis ici que répéter que de tels arguments reviendraient à
vouloir incorporer le delta hollandais du Rhin à lAllemagne ou la rive
Portugaise du Tage à lEspagne de Franco.
Se battre pour interdire à un groupe dAllemands de se joindre à un
autre groupe dAllemands na pas de sens. Cela équivaudrait à interdire à
lAngleterre et à la Nouvelle Zélande de former un gouvernement unique si
elles le voulaient. La ville de Dantzig a été construite par des Allemands. Le
fait que des Slaves, il y a des siècles et des siècles, y aient fondé un
comptoir ne peut être une raison de rattacher la ville à la Pologne. Les
223
Serbes sont aussi des Slaves, et on pourrait tout aussi bien leur donner
Dantzig, car nous navons aucune preuve montrant que les Polonais sont
les descendants de ces Slaves fondateurs. En fait, les historiens
saccordent à dire quils ne le sont pas. Pourtant, ce point ne présente
même pas un intérêt académique, et si nous laissions reposer les revendi-
cations sur une occupation antérieure des territoires, nous pourrions
commencer par céder la côte orientale de lAngleterre au Danemark, car
les Slaves qui ont ouvert leurs comptoirs à Dantzig étaient partis depuis
longtemps quand les Danois occupaient encore lAngleterre. Imaginons
lAllemagne ou pourquoi pas? la France, la Russie ou lItalie
soccupant à garantir les droits historiques du Danemark sur la côte
orientale de lAngleterre! Certes, les arguments historiques seraient pro-
bants, mais leur absurdité provoquerait lhilarité dans toute lEurope.»50)
50) B. de Colonna, op. cit., pp. 149-150. B. de Colonna fut pendant de longues années le
correspondant de plusieurs journaux britanniques et néo-zélandais. Il eut loccasion détudier
dassez près la situation qui régnait dans les pays de lEurope de lEst et plus particulièrement
en Pologne. En été 1939, il visita ce pays. Son livre parut en automne de la même année à
Londres.
224
Hitler face à la Pologne
Sa position de principe à partir de 1933
225
Les propositions allemandes de règlement des questions en suspens
depuis 1918 ont toujours tenu compte des intérêts polonais, à tel point que
Hitler a été le premier homme politique allemand depuis le traité de Versailles
à reconnaître la nécessité pour la Pologne dun libre accès à la mer Baltique,
à avoir fait des concessions territoriales et à avoir évité toute menace
dordre militaire pour faire pression sur la Pologne lors des négociations.
Le principe fondamental qui guida Hitler pendant ces années fut le suivant:
les questions frontalières et le problème des minorités sont secondaires
face à la nécessité dune entente entre ces deux peuples. Nous nen voulons
pour preuve que ces quelques témoignages:
1935:
1936:
226
des nationaux allemands, des socialistes et communistes, ceci aussi
bien à Dantzig que dans le Reich. On accusa le Chancelier davoir trahi
les plus impérieux intérêts allemands. Cependant le Chancelier nen a
nullement tenu compte; il na pas cédé dun pas et a suivi la voie quil
sétait tracée, celle notamment dune entente indispensable avec la
Pologne.» 4)
«M. Göring déclara que le Chancelier Hitler lui avait enjoint dinsis-
ter sur sa décision plus ferme que jamais de continuer sa politique de
rapprochement avec la Pologne... Du côté allemand il ny a aucune aspi-
ration à prendre à la Pologne quoi que ce soit de son statut territorial...
Il est dailleurs parfaitement compréhensible quune Pologne forte,
ayant un accès à la mer et avec laquelle lAllemagne peut coordonner
sa politique, est bien plus nécessaire et présente plus davantages pour
lAllemagne quune Pologne faible et amputée. On se rend parfaitement
compte en Allemagne quune Pologne isolée serait plus facilement
vulnérable; cest alors que toute la masse russe foncerait directement
sur la frontière allemande.»5)
1939: Les notes prises lors dun entretien entre Hitler et le colonel
Beck, le 5 janvier 1939:
227
«Le Chancelier déclara que, dans laffaire dantzikoise, il conviendrait
de rechercher quelque chose de tout à fait nouveau, une nouvelle forme
quil appela la Körperschaft, laquelle, dune part, garantirait les intérêts
de la population allemande et, de lautre, les intérêts polonais. Le
Chancelier affirma de plus que le Ministre pourrait être complètement
tranquille, quil ne se produirait à Dantzig aucun fait accompli et que
rien ne serait entrepris qui pût rendre difficile la situation du gouverne-
ment polonais.»7)
«...chaque division polonaise...épargnait une division correspondante
allemande. ...une Pologne forte était purement et simplement une né-
cessité pour lAllemagne.»8)
«Finalement, vainqueurs comme vaincus, nous serions enterrés sous
les mêmes ruines. Le seul à en tirer profit serait Moscou.»9)
8-9) Documents on German Foreign Policy 1918-1945, vol. V, doc. 119. p. 153 seq.
10) ibid., doc. 120, p. 159.
228
Les propositions allemandes du 24 octobre 1938
Pourquoi avoir choisi cette date?
229
avait, à plus dune reprise, donné des assurances au Gouvernement
polonais au sujet de la Ville Libre de Dantzig...
Enfin, le Gouvernement polonais soulignait que son attitude au sujet
des facilités de communications à travers la Poméranie dépendait de
lattitude du Reich au sujet de la Ville Libre de Dantzig.»3)
Cinq semaines avant que soit connu le contenu des propositions alle-
3) Livre Blanc Polonais, doc.78.
4) C. J. Burckhardt, Ma Mission à Dantzig, p. 184.
5) ibid., p. 25
230
mandes, le 20 septembre 1938, Lipski fit un premier pas en proposant à
Hitler un règlement de la question dantzicoise. Loffre de Hitler, formulée
«dune façon très amicale»,6) navait donc pas de quoi surprendre.
Début octobre, Beck demandait à lAllemagne un crédit de lordre de
120 millions de zlotys. Il lobtint. À cette époque, la cordialité des relations
germano-polonaises était bien connue des puissances européennes. Le 10
octobre, lors dune interview accordée à un journaliste de la presse de
Hearst (magnat des États-Unis), Beck fit démentir les rumeurs selon
lesquelles lAllemagne avait exigé le rattachement de Dantzig au Reich. Il
souligna que «la paix européenne ne se concevait que si les nations par-
venaient à une entente avec lAllemagne».7)
La Grande-Bretagne et la France critiquèrent vivement lattitude de la
Pologne pendant la crise tchécoslovaque (notamment son annexion de
Teschen) et sa politique en ce domaine. Par contre, les relations entre le
Reich et la Grande-Bretagne dune part, et entre le Reich et la France
dautre part, semblaient bonnes, même si depuis la conférence de Munich
on notait à Londres une certaine hostilité, dont le Reich ne pouvait dailleurs
mesurer limportance. Le gouvernement polonais craignant de son côté que
leur action contre la Tchécoslovaquie provoque une intervention soviétique
demanda au Reich de lassurer de sa neutralité bienveillante.8) Ses craintes
furent renforcées par une note soviétique du 23 septembre 1938 menaçant
de dénoncer le traité de non-agression polono-soviétique et par la concen-
tration de plusieurs corps darmée soviétiques à la frontière polonaise.9)
Potocki, ambassadeur de Pologne à Washington, confirma par la suite que
les relations polono-soviétiques «avaient grandement empiré après la crise
tchèque» au début doctobre 1938.10)
Cependant, le tournant se produisit à la suite dune rencontre entre
Lipski, ambassadeur de Pologne, et Weizsäcker, secrétaire dÉtat allemand,
une entrevue à laquelle ni Hitler ni Ribbentrop nont assisté. Le 22 octobre
1938, Lipski faisait savoir à Woermann, sous-secrétaire dÉtat allemand,
quil avait reçu de son gouvernement lordre de demander au Reich dappuyer
la proposition visant à incorporer lUkraine subcarpatique, qui était en terri-
toire tchèque, à la Hongrie. Weizsäcker transmit cette requête à Ribbentrop
et à Hitler en les priant d«examiner soigneusement» s«il ny avait pas lieu
6) H. Lebre in Les Origines Secrètes de la Guerre 1939-45, p. 52.
7) Archiv des deutschen Auswärtigen Amtes Série 52a, 34476, cité dans D. Hoggan, op. cit.,
p. 144.
8) ADAP V, doc. 54 et IV, doc. 83.
9) Documents on German Foreign Policy 1918-1945, vol. V, doc. 106 et 108.
10) Livre Blanc Allemand N° 3, Documents Polonais Relatifs à lHistoire des Origines de la
Guerre, doc. 7.
231
dentamer avec la Pologne un débat élargi et de lui demander des compensa-
tions». Il pensait en loccurrence à Dantzig et au territoire du Memel.8)
Le revirement brutal de la politique britannique après la déclaration de
paix et damitié germano-britannique signée fin septembre à Munich amena
Hitler à tirer au clair ses relations avec la Pologne. 11) Il ne pouvait savoir
avec quelle fermeté Roosevelt surtout avait changé dorientation en vue
dempoisonner toutes les mesures favorables à lAllemagne quelle que fût
la situation juridique et sans égard pour la volonté de Hitler de parvenir à un
accord par voie de négociations. De fait, le président Roosevelt disposait de
moyens de pression considérables. Bullitt, son envoyé spécial, sen est
souvent vanté au cours de ses entretiens diplomatiques avant la guerre.
Après sêtre entretenu avec Roosevelt, Potocki, ambassadeur de Pologne à
Washington, a pu dire de lui, le 21 novembre 1938, quil considérait:
232
Le déroulement des négociations
233
1938, une semaine après avoir pris connaissance des propositions alleman-
des, il donnait ses instructions à Lipski, son ambassadeur à Berlin. Le point
«4 b» renfermait le passage suivant:
234
rapprochement pouvait se concrétiser par une alliance défensive germano-
polonaise, par la reconnaissance allemande des frontières actuelles, par le
renoncement définitif de lAllemagne à la Posnanie, à la Prusse occidentale
et à la Haute-Silésie orientale, enfin par la signature dun pacte de non-
agression de vingt-cinq ans.6)
7) K. Zentner, Illustrierte Geschichte des Zweiten Weltkrieges, p. 60, et R. Breyer, Carl Goerde-
ler und die deutsche Ostgrenze, pp. 198-208.
8) G. Bonnet, De Munich à la guerre, p. 123.
9) Livre Jaune Français Documents Diplomatiques 1938-1939, doc. 42.
235
avait toujours consigne de sabstenir de publier tout article défavorable à la
Pologne. Hitler ordonna à son ministre des Affaires étrangères et au Sénat
dantzicois de ne pas répondre aux provocations.
236
précisément pour la même raison; il ne lui vint pas à lesprit quune rup-
ture fatale pouvait en résulter.»13)
237
Les documents diplomatiques nous montrent quelles étaient précisément
«les intentions des deux gouvernements».15)
Dans une lettre adressée à son ministre des Affaires étrangères, le 26 avril
1939, Nevile Henderson, ambassadeur de la Grande-Bretagne à Berlin, écrivait:
«Si Dantzig était tombée aux mains des Allemands il y a six mois,
personne ne sen serait soucié. Quant à la création dun passage exterri-
torial à travers le Corridor, ce nest là que justice. Si lÉcosse était sé-
parée de lAngleterre par un Corridor irlandais, nous nexigerions rien
de moins des Irlandais que ce que Hitler demande aujourdhui aux Polo-
nais. Si lon considère ces seules demandes, nous aurions tort de som-
brer dans une guerre mondiale pour cela. Pouvons-nous permettre au
gouvernement polonais dêtre trop intransigeant concernant ces points?
... Je narrive pas à croire quune politique visant à la confrontation
maintenant plutôt quultérieurement trouve actuellement une légitima-
tion morale ou pratique.»16)
238
Un historien allemand hostile à Hitler:
239
Du printemps jusquau mois daoût 1939
«Je viens de dire que Hitler avait pris dune façon très calme la com-
munication très dure et très grave de lambassadeur polonais[le 26
mars 1939]. Il me demanda ensuite de communiquer à lambassadeur de
Pologne quune solution ne pourrait naturellement pas être trouvée sur
cette base. Il ny avait pas lieu dévoquer la perspective dune guerre.»1)
240
ne lui donnât aucun avantage économique, aucune aide militaire ni aucune
certitude quant à la délimitation de ses frontières ou de son indépendance.
Les hommes politiques britanniques ont ainsi amorcé un tournant dans le
destin de lEurope. Ils ont compté sur une réaction violente de Hitler.4)
Laccès de rage ne sest pas produit. Hitler se borna à prendre quatre
dispositions:
1) Pour la première fois, il autorisa la presse allemande à rendre compte
de la situation en Pologne et même de lescalade des actes de violence et de
la répression dont était victime la minorité allemande. Encore la rigoureuse
censure du Deutsches Nachrichtenbüro limita-t-elle pendant de longs mois
la portée et la taille de ces reportages.
2) Jusquau mois daoût 1939, il convia le Sénat dantzicois à la modéra-
tion et lui conseilla déviter tout ce qui pourrait apparaître comme une
provocation.
3) Il donna lordre au haut-commandement de la Wehrmacht délaborer
un plan dopérations qui puisse entrer en vigueur à partir du ler septembre
1939 (Plan Blanc, 3 avril 1939) et qui faciliterait une action immédiate
contre la Pologne. Les opérations militaires ne devaient être déclenchées
que sil était possible disoler la Pologne et ainsi de limiter la guerre à la
Pologne. Il sagissait dinstructions secrètes, conçues pour une éventualité
spécifique et en aucune façon une préparation à la guerre: elles ne pouvaient
en aucun cas aggraver létat des relations germano-polonaises. Par ailleurs,
contrairement au plan polonais, aucune mobilisation nétait prévue.
En dehors même du fait quil était de coutume en Europe de disposer de
plans opérationnels contre des voisins avec lesquels les relations diploma-
tiques nétaient pas nécessairement rompues, la directive de Hitler répondait
à une nécessité née de la transformation de la situation européenne. Si,
après la création du protectorat de Bohême-Moravie, lAngleterre et la Po-
logne avaient voulu sassurer contre une nouvelle annexion allemande, ils
auraient dû tenter de supprimer les sources de conflit subsistant et favoriser
la naissance de négociations sur les motifs élémentaires de différends. Ils
auraient ainsi agi dans le sens des règles de droit international. Or, ils ont
préféré suivre les préceptes de l«équilibre européen». Si des engagements
multilatéraux pouvaient permettre de résorber les foyers de crise, la garantie
donnée à la Pologne ne pouvait par contre quaggraver la situation présente
en créant des perspectives totalement nouvelles: les forces bellicistes purent
agir efficacement.
La Pologne avait préparé depuis longtemps déjà son plan dattaque contre
4) Foreign Relations of the United States 1939, vol. I, p. 118.
241
lAllemagne, mais ce nest quà présent quelle se mit à prendre des mesures
pour son exécution. Lenjeu de la guerre était lannexion de Dantzig, de la
Prusse orientale et des «territoires de lOder». Par contre, le plan dopération
de Hitler ne comportait aucun objectif politique de guerre. Bien au contraire,
une semaine plus tard, le 11 avril 1939, Hitler déclarait dans une nouvelle
directive que le Plan Blanc nétait quune mesure préventive destinée à parer
à toute menace polonaise à lencontre de lAllemagne. La politique étrangère
de lAllemagne visait toujours à éviter tout incident avec la Pologne.5) Le
maréchal Keitel écrivit dans sa prison de Nuremberg:
Le Plan Blanc nétait que la mesure minimum qui aurait été prise par
nimporte quel gouvernement placé dans la même situation ou dans une
situation semblable.
242
Comme on le sait, celles-ci prévoyaient le renoncement à toute menace de
guerre et à lemploi de la violence.
La Grande-Bretagne a sans raison valable conduit lEurope à un tournant
de son histoire. Le gouvernement allemand navait aucunement menacé la
Pologne, et encore moins la Grande-Bretagne. Il peut donc paraître curieux
que Hitler ait encore cherché la faveur de lAngleterre, alors que dès la fin
de lannée 1938 le gouvernement britannique était résolu à refuser tout
compromis avec lAllemagne, quil avait agi dans le sens dune aggravation
de la tension (chèque en blanc à la Pologne, approbation des mesures prises
par celle-ci et pourparlers avec lUnion soviétique), et quil avait favorisé le
déclenchement dune campagne de haine contre lAllemagne (grossières
exagérations et utilisation du mensonge de «Tilea» un coup monté destiné
à persuader lopinion publique que Hitler avait des visées sur la Roumanie
déclarations de Chamberlain accusant Hitler de vouloir «conquérir le monde»,
etc...)
Dans son discours du 28 avril 1939, Hitler a tenté de rétablir le prestige
de lAllemagne mis à rude épreuve par ses ennemis. Ses déclarations, reposant
sur des faits concrets, ne pouvaient aggraver la crise. Aucune accélération
du programme naval nétait prévu.
Hitler nexcluait pas davantage les efforts visant à parvenir à un règle-
ment avec la Pologne.
«Dans son discours au Reichstag du 28 avril (n° 214) ainsi que dans
le Mémorandum du Gouvernement allemand du même jour (n° 213), le
Führer mettait le point final à six années defforts loyaux et patients en
vue de gagner lamitié polonaise, tout en tendant, en ce moment grave,
encore une fois la main à la Pologne et en déclarant que lAllemagne
était prête à accepter un nouveau règlement contractuel. La Pologne na
pas fait usage de cette offre: elle a, au contraire, répondu par larrogant
discours du 5 mai de M. Beck, par une recrudescence de lagitation
anti-allemande ainsi que par une série ininterrompue de discours et
darticles où lon exigeait pour la Pologne de nouveaux territoires de
minorité allemande et du Reich. Des milieux polonais autorisés, on a
eu la confirmation que M. Beck était non seulement le prisonnier du
chauvinisme polonais mais quil avait succombé également aux machi-
nations anglaises (n° 216).»8)
243
Les mois suivants, Hitler resta dans lexpectative, évitant tout ce qui
pouvait entraîner une aggravation de la situation. La signature du «Pacte
dAcier» avec lItalie, le 22 mai 1939, navait quun caractère défensif.
Hitler entreprit à la même époque un certain nombre de replis diplomatiques.9)
Il renouvela lassurance que le gouvernement du Reich ne souhaitait pas être
mêlé à une guerre pour Dantzig et quil était prêt à payer son tribut à la
détente.
244
état de ne pas se laisser envahir sans résistance. Elles disent aussi que
Dantzig doit se défendre contre une agression éventuelle des Polonais.
Cet argument nest pas dailleurs de pure propagande; il répond à une
inquiétude réelle de la population. Ces derniers jours, alors quen Eu-
rope occidentale on envisageait la possibilité dun prochain putsch à
Dantzig, les Dantzicois, eux, ont paru redouter sincèrement une initiative
polonaise.» 10)
245
Le 11 juillet 1939, «une haute personnalité nazie» a fait à lun des colla-
borateurs de lambassade de France à Berlin une déclaration que Coulondre,
ambassadeur français, a jugée autorisée par le gouvernement du Reich. Il
apparaît selon cette déclaration que Hitler était prêt à se désolidariser de
son ministre des Affaires étrangères Ribbentrop, qui avait été linitiateur
officiel du dialogue germano-polonais et à améliorer les relations avec la
Pologne, la France et la Grande-Bretagne. Le contenu de cette déclaration
était en effet le suivant:
246
Coulondre qui avait été envoyé en mission à Moscou de novembre 1936 à
octobre 1938 pour «parvenir à un accord franco-soviétique contre Hitler»
sétait déclaré très surpris de sa nomination à Berlin,13) dont le sens, appa-
remment, lui échappait. Il mit aussitôt en garde son ministre des Affaires
étrangères Bonnet contre ce «piège» et lengagea à «mettre tout en uvre
pour ouvrir les yeux à leurs opinions publiques», car lAllemagne voulait
«le retour aux frontières de 1914» et «ébranler la position des Puissances
occidentales». Il a toutefois admis que ces déclarations faites par «une
haute personnalité nazie»:
247
polonaise de conciliation.16) Là encore, la Pologne na pas su saisir loccasion
qui se présentait.
Comme on le sait, Hitler:
248
manuvres anglaises, quil savait que pour la Grande-Bretagne, Dantzig
nétait quun prétexte,21) et que sa promesse dengagement aux côtés de la
Pologne en cas de conflit nétait quune vaste escroquerie.22) Il nétait pas
nécessaire que Chamberlain dévoilât ses intentions véritables le 1er sep-
tembre, devant la Chambre des Communes.
Il va de soi que les concessions que Hitler était prêt à faire avaient une
limite. Cette limite était atteinte là où les Polonais auraient pu croire quils
pouvaient impunément intimider, provoquer lAllemagne et porter atteinte à
son prestige. Seul un homme politique de létoffe de Hitler pouvait imposer
aux Allemands labandon définitif de la Posnanie, de la Prusse occidentale
et de la Haute-Silésie orientale. Quel État pacifique, quel «État modèle pour
les peuples civilisés» a jamais accepté, ne fût-ce quune seule fois, semblable
abnégation? Aucun! Ce qui nempêche pas certains historiens de montrer
lAllemagne du doigt et de stigmatiser toute revendication de territoires
allemands, voire un prétendu manque de sincérité apportée au renoncement.
Ce faisant, ils détournent lattention de lopinion publique des conquêtes
mondiales qui se sont pourtant opérées avec la plus grande brutalité par les
Démocraties.
249
«Après avoir tant obtenu, Hitler trouverait peut-être plus sage dévi-
ter le déclenchement dun conflit pour la réalisation de ses derniers
objectifs.» 24)
24) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VI, doc. 460.
25) C. J. Burckhardt, op. cit., pp. 374 et 376.
26) M. Freund, op. cit., vol. III, pp. 58-60.
250
Si Burckhardt na pu remplir sa mission, la faute nen incombe pas aux
Allemands. Il sest abstenu de sexpliquer clairement là-dessus. Toutefois,
il a laissé entendre que certains milieux occidentaux avaient exprimé leur
intention de «compliquer» un repli allemand et lui avaient conseillé de «re-
noncer à ses manuvres néfastes dapaisement à Dantzig».27)
Quand il fut informé de la démarche entreprise par Hitler, Lord Halifax
communiqua le 15 août 1939 à son ambassadeur de Varsovie:
«Jai limpression que Herr Hitler est toujours indécis, quil est dé-
sireux déviter la guerre et de ne point frapper, sil peut faire ainsi sans
perdre la face.»28)
«Il [Hitler] entendait réussir sans guerre, ou, en tout cas, par une
guerre nominale à peine discernable de la diplomatie. Il nen voulait pas
de grande... Une longue guerre contre les puissances occidentales ne
lintéressait pas.
Sans le vouloir, la politique britannique venait de faire de Dantzig la
question décisive pour 1939, comme, avec plus de réflexion, elle avait
présenté celle des Allemands des Sudètes comme la question décisive
de 1938.
Dantzig constituait le grief le plus justifié des Allemands: la ville
avait une population exclusivement allemande qui, manifestement, dési-
rait rentrer dans le Reich et que Hitler ne refrénait quavec difficulté.
La destruction de la Pologne nentrait pas dans son projet originel.
Bien au contraire, il désirait résoudre la question pour que lAllemagne
et la Pologne pussent demeurer en bons termes.»29)
251
toutes les nations sen rendaient clairement compte. Quoi que lon puisse
objecter à ma méthode, quoi que lon croie devoir lui reprocher, il nest
pourtant pas permis dignorer ou de contester quil ma été possible de
trouver, dans de nombreux cas, sans nouvelle effusion de sang, des
solutions satisfaisantes pour lAllemagne et, qui plus est, de dégager,
grâce au procédé employé, les hommes dÉtat dautres peuples de
lobligation souvent intenable de prendre devant leurs propres peuples la
responsabilité de cette révision. [...] Pas un Français digne de ce nom,
vous non plus, Monsieur Daladier, naurait agi autrement que moi dans
une situation analogue. [...]
Cest un mensonge quon profère en certains endroits du monde,
lorsquon affirme que nous ne cherchons à réaliser toutes nos révisions
que par la force. Pendant quinze ans, avant laccession du national-
socialisme au pouvoir en Allemagne, on avait eu loccasion de réaliser
les révisions par la voie de lentente la plus pacifique. On ne la pas fait.
Dans chaque cas particulier, jai formulé par la suite, de ma propre ini-
tiative, non pas une fois, mais en des occasions réitérées, des proposi-
tions tendant à réviser ces situations intolérables...
Je suis maintenant profondément convaincu que si en particulier
lAngleterre, avait alors, au lieu de déchaîner dans la presse une violente
campagne contre lAllemagne et de lancer le bruit dune mobilisation
allemande, conseillé à la Pologne dêtre raisonnable, lEurope pourrait
jouir aujourdhui et pendant vingt-cinq ans de la paix la plus profonde.
Mais en agissant comme on la fait, on a tout dabord agité lopinion
publique polonaise en répandant la contre-vérité dune agression alle-
mande, on a rendu plus difficile au gouvernement polonais de prendre
les décisions claires et nettes qui simposaient et, surtout par la pro-
messe de garantie qui suivit, on a fait perdre de vue les limites des
réalités possibles. Le gouvernement polonais rejeta les propositions.
Dans la conviction absolue que lAngleterre et la France combattraient
désormais pour la Pologne, lopinion publique polonaise commença à
élever des revendications que lon pourrait caractériser peut-être de
folies ridicules si elles nétaient infiniment dangereuses. Alors débuta
un terrorisme sans bornes, oppression physique et économique des
Allemands des territoires enlevés au Reich, Allemands dont le chiffre
atteignait encore plus dun million et demi. [...]
Dantzig aussi eut de plus en plus conscience, par suite des empiéte-
ments continuels commis par les autorités polonaises, quelle était
apparemment livrée sans défense à larbitraire dun pouvoir étranger au
252
caractère national de la ville et à sa population. [...] Je vous prie de bien
comprendre ceci: il est impossible pour une nation qui a le sentiment
de lhonneur, de renoncer à presque deux millions dhommes et de les
voir maltraités à ses propres frontières.»30)
30) Livre Blanc Allemand N° 2, doc. 461, 471, et Adolf Hitler, Der Großdeutsche Freiheitskampf,
pp. 13-17.
31) B.H. Liddell Hart in Picture Post, 3 septembre 1949.
32) K. Rabl, Das Selbstbestimmungsrecht der Völker, p. 122.
253
Le colonel Beck devant le Sejm, le 5 mai 1939:
«Pour nous, Polonais, la notion dune paix à tout prix nexiste pas. Il
ny a quune chose dans la vie des hommes, des peuples et des États qui
soit sans prix: cette chose, cest lhonneur.»33)
«Si lAngleterre devait être acculée à une situation dans laquelle les
décisions les plus fondamentales seraient prises sans elle, où sa voix
ne compterait plus dans le concert des nations que pour quantité négli-
geable, je dirais que la paix serait une humiliation quun grand pays ne
pourrait se permettre.»34)
254
Létat de larmement en 1939
Allemagne
255
Times écrit que ses arguments auraient pu être exposés avec plus
dobjectivité.»1)
LAllemagne devait tenir compte du réarmement des autres puissances et
des dangers résultant du bellicisme de certaines nations qui, comme la Pologne,
envisageaient loccupation militaire de lAllemagne.
1) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten 1934-1935, pp. XVIII, 73, 93, 408,
436, I. Colvin, Vansittart in Office, p. 125, F. Berber, Deutschland-England 1933-1939, p.189.
2) H. Roos, Polen und Europa, pp. 88, 87.
3) ibid., p. 103. Déclaration sous serment du général Adam lors du procès Krupp, Verteidigungs-
dokumenten-Buch 2b, n° 104.
4) A.Francois-Poncet, Souvenirs dune Ambassade à Berlin, pp. 179 et 176. Déclaration du
ministre français Tardieu à lambassadeur Francois-Poncet au printemps 1934.
256
avait lui aussi ce sentiment: il fallait veiller à ce que léconomie allemande
ne puisse se relever:
Selon lui, il fallait tout mettre en uvre pour affaiblir et ruiner lAllema-
gne, de manière à ce que les communistes eux-mêmes se refusent à sengager
sur ce terrain.5) Un rapport issu de la commission de défense de la Chambre
des Communes (Defence Requirements Committee) réunie en mars 1934 à
linitiative du gouvernement nous montre linfluence que des prises de posi-
tions semblables pouvaient exercer sur létat-major et le gouvernement bri-
tanniques: ce rapport considère de prime abord que lAllemagne est
ladversaire potentiel.5) Or il est clair que ce document avait des antécé-
dents, et quil se fondait sur une situation datant pour une part de lépoque
où Hitler nétait pas encore parvenu au pouvoir, où lAllemagne nétait pas
encore nationale-socialiste et où elle ne disposait pas non plus daviation.
Or dès le mois de novembre 1932, les hommes politiques britanniques
envisageaient des plans dattaque prévoyant des manuvres de dissuasion
aérienne qui permettraient à la Grande-Bretagne «dexercer une influence
militaire en Europe sans quil lui soit nécessaire pour cela dentretenir une
importante armée sur le continent».
257
internationale (échec des négociations sur le désarmement, pacte dassistance
franco-soviétique). Les hommes politiques et les journalistes étrangers
avaient deux années durant accusé Hitler de réarmer en prévision dune
guerre dagression et de faire naître ainsi à travers le monde un sentiment de
crainte et dinsécurité. Vu les effets de ces accusations mensongères, il se
vit contraint de reconstruire larmée allemande de manière à protéger son
pays dans la perspective de la formation dun bloc de nations hostiles à
lAllemagne. Les mensonges touchant au réarmement allemand nont été
répandus que pour faire échec au désarmement, tout en justifiant chez les
Alliés les mesures de réarmement, les projets dalliance, la construction de
fortifications et les discussions détat-major, enfin pour rendre légitime la
politique de Versailles. Les attachés militaires et les services secrets
étrangers connaissaient très exactement létat de larmement allemand. Une
foule de documents témoigne de ce que les gouvernements étrangers (de
Pologne, Grande-Bretagne, France, États-Unis) ont pris leurs mesures contre
le Reich parce quils y étaient encouragés par les faiblesses de son arme-
ment.7) Cette situation na pas empêché les gouvernements et les journalistes
de ces pays dabuser consciemment les populations en leur fournissant des
données fausses et des conclusions erronées.
Lhistorien britannique A.J.P. Taylor écrit:
258
«Sous la direction de Hitler, lAllemagne fut équipée pour gagner la
guerre des nerfs, la seule quil comprît et aimât, non pour conquérir
lEurope...
En examinant larmement allemand de lépoque nous sortons du do-
maine mystique de la psychologie de Hitler pour trouver la réponse
dans celui des faits. Elle est claire: létat de larmement allemand en
1939 montre que Hitler navait pas envisagé de guerre généralisée et
quau reste, il navait probablement aucune intention den livrer une.»12)
}
1937 = 9%
1938 = 16% de ce quil était en 1944 13)
1939 = 18%
Selon dautres sources, en
1933 = 2%
1934 = 2%
}
1935 = 4%
1936 = 6% de ce quil était en 1943 14)
1937 = 9%
1938 = 20%
1939 = 25%
1940 = 44%
Le 4 juin 1946, à Nuremberg, le général Jodl fit la déclaration suivante:
259
Si nous ne nous sommes pas effondrés dès 1939, cela est dû sim-
plement au fait que, pendant la campagne de Pologne, les 110 divisions
françaises et britanniques à lOuest sont demeurées absolument inacti-
ves en face des 23 divisions allemandes.»15)
Or ces divisions nétaient dotées que dune très faible artillerie, elles
étaient peu mobiles et les défenses antichars manquaient.16) Même en
comptant les divisions de larmée territoriale, la Landwehr, et les divisions
de remplacement des troisième et quatrième «vagues», lhistorien améri-
cain T. Taylor en arrive pour lannée 1939 à un total de 106 divisions
allemandes; la seule armée française en avait autant, si lon tient compte des
troupes de réserve et des armées coloniales. Par ailleurs, les troupes
françaises avaient reçu une instruction militaire plus complète. 17) Si lon
ajoute les divisions britanniques, belges (23 divisions: 550 000 hommes) et
néerlandaises aux divisions françaises, dont la plupart étaient massées à la
frontière allemande, on en arrive à un total de 156 divisions.18) Le gouverne-
ment allemand devait tenir compte de la possibilité dune intervention de
ces troupes contre le Reich en cas de conflit avec la Pologne. En plus des
2,6 millions de soldats allemands répartis en «102 divisions»,19) 500 000
hommes rejoignirent en automne 1939 les formations para-militaires.20)
Pourtant, 52 divisions seulement pouvaient être engagées sur le front.19) En
1914, il y avait près dun million dhommes de plus sous les drapeaux.21)
«En 1935, la France, sans laide de ses anciens alliés, aurait pu enva-
hir et réoccuper lAllemagne presque sans lutte sérieuse. En 1936, son
écrasante supériorité ne faisait toujours aucun doute. Nous savons
15) TMI vol. XV pp. 385-386 (éd. fse., p.364-366). Ces déclarations sont confirmées par les experts
alliés. Leffectif dune division (15.000 hommes) était à peu près le même dans les divers pays.
16) D. M. Projektor, «La Guerre en Europe 1938-1941», éd. russe, p. 20.
17) T. Taylor, Sword and Swastika, pp. 256 et 306.
18) W. A. Sekistow, «Létrange guerre en Europe de louest et dans la Méditérranée 1939- 1943»,
éd. russe, p. 85.
19) H. Michaelis, Handbuch der deutschen Geschichte, vol. IV, p. 14.
20) F. Halder, Kriegstagebuch, vol. I, p. 48. dont 1,5 millions prévus pour la campagne de
Pologne. Voir aussi B. Müller-Hildebrand, Das Heer 1933-1945, vol. II, p. 15, qui donne de
chiffre de 109 divisions.
21) B. Klein, Germanys Economic Preparation for War, pp. 73 et 3.
260
maintenant, daprès les révélations allemandes, quil en était encore de
même en 1938...
Au cours de lannée qui suivit Munich [1939], larmée allemande,
quoique demeurée plus faible en réserves entraînées que larmée fran-
çaise, atteignit presque son rendement maximum...
Larmée allemande nétait pas capable de battre la France en 1938
ou 1939.
...quand larmée allemande pouvait aligner à peine une demi-douzaine
de divisions bien entraînées sur le front occidental, tandis que la France,
avec près de 60 ou 70 divisions, était en mesure de franchir rapidement
le Rhin ou doccuper la Ruhr.»22)
261
années [1925-1939]. Deux secteurs seulement étaient soumis à des
variations notables: lagriculture et ladministration. Des franges impor-
tantes de léconomie nétaient pas concernées par la mobilisation de
temps de guerre...
En 1939, léconomie civile disposait dimportantes réserves de main
duvre... Les investissements ne se sont nullement concentrés sur les
secteurs de léconomie chargés des préparatifs militaires... En fait, au
cours des années qui ont précédé la seconde guerre mondiale, léconomie
allemande a produit plus de beurre et moins de canons quon a bien
voulu le dire. En 1937, la consommation civile, les investissements pour la
production de biens de consommation et les dépenses publiques desti-
nées à des fins pacifiques égalaient ou dépassaient même les niveaux les
plus élevés des années précédentes. Il ne peut être question de parler
dun programme de réarmement si étendu quil aurait étouffé une reprise
de la production civile....
La production de munitions et le nombre des divisions mobilisées en
Allemagne étaient très modestes comparés aux estimations officielles.
Les investissements dont bénéficiaient les industries de guerre étaient à
peine plus importants en 1939 que pendant les années prospères précé-
dentes. Ils étaient faibles comparés à lensemble des investissements...»23)
«La répugnance du gouvernement à exiger de son peuple des sacrifi-
ces économiques se manifesta à plusieurs reprises. Cest ainsi quil se
refusa à augmenter les impôts plutôt que douvrir le déficit budgétaire.
En 1937, il sabstint de réduire les importations de produits alimentaires
au profit des matières premières. Il se refusa de même à déplacer les
ouvriers des secteurs économiques de moindre importance. Un autre
exemple nous est fourni par la relative inefficacité de ladministration
chargée du plan...
Lorsque Schacht [président de la Reichsbank] tenta de réduire les
crédits destinés au financement des travaux des communes, il se heurta
systématiquement à la résistance de membres influents du parti. Lorsquil
essaya à plusieurs reprises de réduire le budget du Front du Travail,
laffaire fut présentée à Hitler, qui sopposa au projet. Le parti se refu-
sa à intégrer dans la population active un plus grand nombre de femmes
car cette décision eût été contraire à lidéologie officielle...
En 1937 et en 1938, les dépenses publiques consacrées à des buts
non militaires étaient plus importantes que jamais...
23) B. Klein, op. cit., pp. 17, 37, 38, 56, 58, 57, 61, 72, 75, 15, 76.
262
Les motifs qui empêchaient les nationaux-socialistes dentreprendre
un réarmement plus important étaient:
a) la crainte de déficits plus lourds,
b) la répugnance du gouvernement à exiger de la population des sa-
crifices financiers,
c) lincapacité de Hitler de soumettre de nombreux intérêts privés à
ses objectifs,
d) un manque defficacité dans la réalisation du programme.»24)
263
de guerre et que le programme militaire navait pas été élargi avant le
déclenchement des hostilités».
Si le Reich avait prévu le conflit de longue date et sil avait entrepris son
réarmement plusieurs années auparavant en prévision dune guerre
dagression, il aurait été au moins en mesure de «réunir ses corps darmée à
temps»!
Les Soviétiques ont confirmé que la campagne de France avait été menée
avec des effectifs inférieurs en nombre aux troupes ennemies:
264
tique. Il était repris in extenso et sans commentaire par un recueil officiel du
ministre de la Guerre américain. Cet aveu dune puissance occidentale
supérieure était ici confirmé par lUnion soviétique:31)
265
Il convient de lire ces citations plusieurs fois et den noter la source. Une
page plus loin, on peut lire que lAllemagne na pu accroître aussi consi-
dérablement sa production davions et de chars que parce quelle avait pu
écraser larmée française, refouler les troupes britanniques hors du continent
et utiliser ainsi les riches provisions de lEurope occupée.
Par rapport à sa population (80 millions dhabitants), lAllemagne ne
disposait en 1939 que dun peu plus de la moitié de larmement de la
Grande-Bretagne, qui nétait que lun de ses adversaires principaux (50 mil-
lions dhabitants). Par ailleurs, il faut aussi mentionner les industries cana-
diennes, qui fournissaient une partie de larmement britannique, et les pro-
messes daide formulées plusieurs mois avant le déclenchement des hostilités
par le président Roosevelt. Il faut enfin tenir compte de linsularité de la
Grande-Bretagne, qui lui conférait une certaine protection.
266
cet exemple montre du moins que lAllemagne navait pas «projeté» la guerre
de 1939. En décembre 1938, un an avant que Hitler nentreprît de «conquérir le
monde», le haut-commandement de larmée de terre reçut lordre de se consacrer
jusquen 1945 à la restructuration de larmée et à linstruction des soldats, de
ne pas entreprendre de préparatifs de guerre et de renoncer même à garantir les
frontières du Reich.35)
267
puissances est lun des points faibles de la machine de guerre hitlérienne.
Cette insuffisance provient principalement de labsence de quantités
suffisantes de matières premières essentielles et de la dépendance
dans laquelle se trouvait larmée vis-à-vis de matières premières dont
limportation était toujours plus problématique. La réduction globale
des exportations et limportance de la dette publique de lÉtat allemand
posaient de graves problèmes économiques, qui pesèrent directement
sur la production de temps de guerre et sur létat des forces armées.
Il faut également noter que la Wehrmacht disposait dun arsenal
darmement restreint, comparé aux exigences dune guerre mondiale.
Lobservation vaut en particulier pour les stocks de matériel militaire
et, à un moindre degré, pour larme blindée. Linsuffisance du parc de
chars moyens et lourds, la prédominance de chars légers, qui, comme
lexpérience la montré, ne répondaient pas, ne serait-ce que du fait de
leur date de construction, aux normes de sécurité, obligea le haut-
commandement allemand à limiter le nombre des unités blindées et à
improviser leur composition....
LÉtat hitlérien était incapable de soutenir le poids dune guerre
longue contre la coalition des États européens.»43)
«Avec rien de moins que 270 divisions, des milliers de chars et davions»,
lAngleterre, la France et lUnion soviétique réunies auraient pu en 1939
«prendre lAllemagne en étau entre deux fronts».45)
Du 1er janvier au 5 septembre 1939, les États-Unis ont fourni pour 23
000 $ de matériel militaire à lAllemagne, pour 16 000 000 $ à la France et
268
21 000 000 $ à la Grande-Bretagne.46) On sait que lAllemagne arrivait en
dernière position pour ses achats de matériel militaire à létranger. En
1939, Hitler navait pas conçu de plan darmement particulier et lété de
cette année-là, il déconseillait encore à ses généraux daccroître la masse
des armements. Il nenvisageait la possibilité dune crise sévère que dans
les années 1943-1945, cest pourquoi il consacrait lessentiel de sa politique
économique à la construction de routes et à lextension des villes.
Lors du déclenchement des hostilités, il nexistait aucun plan allemand
dattaque contre la France, son voisin occidental, ni contre cette grande
puissance maritime quétait à lépoque la Grande-Bretagne.47 + 48) Jusquau
printemps 1939, il nexistait quun plan de défense des frontières orientales.
Létablissement dun plan dattaque contre la Pologne (Plan Blanc) date du
3 avril 1939,49) et il nétait explicitement prévu que «pour faire face à une
menace éventuelle sur ce front».50) Il a été conçu à lépoque de lannonce du
chèque en blanc britannique, au plus fort de la crise, lorsque le chauvinisme
des Polonais aveuglait ces derniers sur leurs propres forces et «les empêchait
de prendre conscience de la menace mortelle qui pesait sur eux»51) alors
quil y avait tout lieu de craindre un conflit armé. Au terme de la campagne
de Pologne, lAllemagne ne disposait toujours pas de plan dattaque contre
les puissances occidentales.52)
269
Forces aériennes
270
à partir de 1925. Le modèle davion le mieux adapté au combat aérien était
un bombardier lourd, bien armé, et qui disposait dun très grand rayon
daction. Conçu dès 1934, puis fabriqué en série à partir de 1936, il ne put
être engagé en nombre suffisant dans la guerre aérienne quen 1941.
Bien avant 1939, la Grande-Bretagne usait déjà de toute son énergie
pour la réalisation de cet objectif, qui permettait détablir un plan de
guerre aérienne contre lAllemagne. Les Anglais consacrèrent beaucoup
de temps au succès de lentreprise.»59)
«Les Allemands ne prévirent pas daviation de bombardement indé-
pendante [des opérations terrestres], ils la considéraient comme une
auxiliaire de larmée et durent improviser leurs attaques contre lAngle-
terre à lété de 1940.»61)
Forces navales
La flotte allemande était beaucoup plus réduite quen 1914.63) Elle était
inférieure à la flotte française et du fait de «lécrasante supériorité franco-
britannique... ne pouvait guère se risquer en haute mer».64) Elle navait pas de
porte-avions et ne disposait que de 57 sous-marins (U-Boot) dont 42 étaient
«aptes au combat».65) Si lon considère quun tiers seulement de lensemble
des sous-marins peut attaquer lennemi, les deux tiers restants effectuant le
271
trajet aller retour, étant en révision ou faisant fonction de navires-écoles, le
nombre des sous-marins prêts à intervenir en haute mer était en 1939
extrêmement modeste.
272
reconstituer et était dune puissance trop restreinte pour pouvoir même
former une ligne de bataille. [...]
Ainsi, aucune formation ne pouvait prétendre nous ravir la domina-
tion des mers. Sans aucun doute, la flotte britannique avait sur la flotte
allemande une supériorité écrasante en puissance comme en nombre et
rien ne permettait de supposer que lentraînement technique des équi-
pages et leur habileté dussent être inférieurs à ceux de lennemi...
Elle [la flotte britannique] avait moins à faire face à un ennemi quà
remplir de très nombreuses missions importantes.»70)
«Il existe les preuves les plus diverses établissant que je ne comp-
tais en aucune façon sur une guerre en automne [1939] et, en raison du
médiocre réarmement de la Marine allemande, cétait bien naturel. Jai
clairement exprimé à Swinemünde, dans une allocution aux officiers de
sous-marins, quil ny avait pas à compter là-dessus.»72)
Grande-Bretagne
70) W. Churchill, La deuxième guerre mondiale, tome I, livre II, «La drôle de guerre»,
p. 10.
71) Platanova, Pavlenko, Parotkina, op. cit., p. 97.
72) TMI, vol. XIV, p. 79 (éd. fse., p. 72).
73) E. Hughes, Winston Churchill British Bulldog His Career in War and Peace, p.
162.
74) H. Grimm, Die Erzbischofsschrift, p. 121.
273
Fin 1937, Churchill pouvait déjà écrire:
«Il y a un certain temps déjà que nous nous employons dans ce pays
à réaliser un grand programme de réarmement, programme de plus en
plus ample qui sexécute à une cadence de plus en plus accélérée.»76)
Même en admettant quil ait grossi la réalité, il ne faut pas perdre de vue
limpact durable que de telles paroles, venant dun Premier ministre, ont pu
avoir sur les nations «concernées». En fait, elles étaient destinées à inciter
les alliés français à consentir de nouveaux sacrifices en matière darmement.
Elles devaient créer dans chaque camp une psychose de guerre et accélérer
la course aux armements.
274
«Le grand point à observer, le point le plus satisfaisant, est que nous
navons aucun besoin, aujourdhui, de faire appel dune façon générale à
des recrues, comme le fit Lord Kitchener, il y a vingt-cinq ans. Cet
appel a été devancé de plusieurs mois et les hommes sont déjà prêts à
être employés..»79)
275
Cette tâche revenait à la flotte de la métropole [Home Fleet]. Le blocus
devait sétendre à la mer du Nord, à la Méditerranée et pour une part à la
mer Baltique.»80)
France
276
700 000 soldats français sans frapper au préalable. Sur les 5 500 000
hommes mobilisables, il ny avait en réalité quun peu plus dun demi-
million de combattants, le reste se composant de personnes qui effec-
tuaient leur service militaire à larrière etc...»83)
83) Documents on British Foreign Policy 1919-1938, vol. VII, doc. 442.
84) Deutsche Hochschullehrerzeitung 4/1961, p. 18 cite le colonel Goutard, The Battle of
France, 1940, New York 1959
85) B. Klein, op. cit., p. 19.
86) P. H. Nicoll, Englands Krieg gegen Deutschland, p. 120.
277
Tchécoslovaquie en 1938
Pologne
278
sous les drapeaux. Les effectifs du temps de paix sélevaient à 200 000
hommes (211 000), ce qui nétait pas négligeable. 93) Une comparaison de
ces chiffres démontre les intentions belliqueuses de larmée polonaise qui
entreprit des mobilisations partielles depuis le printemps 1939. Le 25 mars
1939, Kennard, ambassadeur de Grande-Bretagne à Varsovie, rapportait à
son ministre des Affaires étrangères que des personnalités bien informées
lui avaient confié que 750 000 hommes avaient déjà été touchés par cette
mobilisation.94) À lautomne 1939, larmée de lair polonaise comptait plus
de 1 200 avions.95)
Il ne fait aucun doute que létat-major polonais était prisonnier tant sur
le plan stratégique que technique de conceptions anciennes et dépassées: il
a accordé trop dimportance à la cavalerie et sous-estimé la valeur de
lennemi. La Pologne avait peu davions, de blindés et de canons antichars,
son artillerie et sa DCA étaient insuffisantes; le manque de mobilité de
larmée polonaise, labsence de toute stratégie défensive, le peu denthou-
siasme manifesté par le grand nombre des soldats des minorités ethniques
(52,7% seulement de la population de «lÉtat polonais» étaient des Polonais
authentiques) et les illusions quentretenait Varsovie sur les «amis» français,
britanniques et américains, tous ces facteurs ont contribué considérablement
au désastre militaire de septembre 1939. Le gouvernement allemand ne
pouvait pas prendre en considération ces insuffisances dont les dirigeants
polonais navaient pas conscience. Le gouvernement polonais avait fondé sa
politique sur une forte puissance militaire, et de fait, par rapport à la popula-
tion de lÉtat polonais, son armée était nombreuse. Le chancelier allemand
devait en tenir compte et ne pas se fier aux faiblesses hypothétiques de
larmée polonaise.
Union soviétique
279
5 000 canons de moyenne et longue portée, 9 à 10 000 chars et une flotte
dintervention de plus de 5 000 (certains parlent de 5 500) avions.96)
Or ce nétaient pas là pures fanfaronnades: en juillet-août 1939, lors des
pourparlers militaires anglo-franco-soviétiques, lUnion soviétique avait
proposé aux puissances occidentales dengager immédiatement la lutte contre
lAllemagne, ce qui nous donne une idée de létat desprit des Soviétiques à
la veille du pacte germano-soviétique de non-agression signé le 23 août
1939. Si ces pourparlers ont échoué, la faute nen incombe pas à la Grande-
Bretagne, mais essentiellement à la Pologne et à la Roumanie qui ont refusé
de laisser les troupes soviétiques traverser leur territoire et empêché ainsi
une intervention de lArmée rouge en Europe en 1939. Les auteurs soviéti-
ques confirment aujourdhui que lUnion soviétique avait très sérieusement
songé «avant la guerre à déclencher les hostilités contre lAllemagne,
lagresseur».97)
280
Préparation psychologique à la guerre
«Les dangers qui menacent la paix nauront pas disparu tant que les
vastes armées allemandes qui ont été mobilisées nauront pas regagné
leurs foyers. Quun pays qui nest lui-même menacé par personne, et
na personne à redouter, mette ainsi sur pied de guerre 1 500 000
soldats, cest une mesure très grave... Il me semble [...] quon ne mobi-
lise pas des forces aussi considérables sans avoir lintention dobtenir
une décision à très brève échéance.»100)
100) W. Churchill, op. cit., tome I, livre I, «Dune guerre à lautre», pp. 298-299.
281
«LAllemagne, pour sa part, ne craint personne. Elle réarme dune
manière encore inconnue dans les annales de son histoire. Elle est me-
née par une poignée daventuriers triomphants. Largent y est rare, des
mécontentements grandissent sous le despotisme de ces maîtres. Très
bientôt, il leur faudra choisir, dune part, entre un effondrement écono-
mique et financier ou une révolte des masses, et, dautre part, une
guerre qui ne pourrait avoir dautre objet, et en cas de victoire dautre
résultat, quune totale germanisation de lEurope sous la tutelle des
nazis. Il mapparaît donc que toutes les anciennes conditions se retrou-
vent, [la lutte pour lhégémonie dune puissance européenne qui doit
être éradiquée] et que, par la suite, notre salut national exige quune
fois encore nous rassemblions les forces européennes pour tenir en
respect, arrêter, et, au besoin, anéantir lentreprise allemande de domi-
nation.» 101)
282
exposa assez librement les motifs qui le portaient à propager les rumeurs
dun réarmement massif de lAllemagne:
«La machine de guerre allemande avait tant bien que mal traversé la
frontière [germano-autrichienne, mars 1938] pour simmobiliser près
de Linz. Malgré des conditions atmosphériques et des routes parfaites,
la majorité des chars refusa tout service. Des défauts apparurent dans
lartillerie lourde motorisée. La route de Linz à Vienne était bloquée
par des véhicules lourds en panne. Le général von Reichenau ... fut tenu
pour responsable de ce fiasco qui révélait au monde létat de préparation
insuffisante où se trouvait larmée allemande à cette étape de sa
réorganisation.» 106)
283
et de 100 000 sous-officiers seraient nécessaires pour porter larmée
[allemande] sur le pied de guerre, et en cas de mobilisation générale,
18 divisions au moins manqueraient dofficiers subalternes suffisam-
ment instruits.»107)
107) W. Churchill, op. cit., tome I, livre I, «Dune guerre à lautre», p. 320.
108) J. Eckert, Schuldig oder entlastet, p. 110.
284
Largumentation est intéressante. Si ces mesures, dordre purement éco-
nomique, avaient englouti des sommes aussi considérables, le budget stricte-
ment militaire devait être relativement restreint. Quen est-il en fait?
Quel que soit lobjet de létude historique que lon entreprend, on en re-
vient toujours à la constatation suivante: lAllemagne disposait dun arme-
ment minimum. Or ladversaire semployait désespérément à répandre la
haine et le mensonge, évoquant «le réarmement fébrile de lAllemagne
depuis 1933» et expliquant que «le Reich navait pu venir à bout de la crise
économique en 1933 que par un réarmement qui menaçait la paix entre les
peuples».
Il convient de sinterroger sur les droits que ces moralistes conféraient
aux différents États. Ont-ils le droit de se défendre? Comme nous lavons
vu, tous le peuvent à lexception de lAllemagne. Or le Reich était entouré
de nations hostiles, puissamment armées et liées par des accords militaires.
Pendant toute cette époque, lAllemagne «na construit aucune usine darme-
ment». Or ces mêmes puissances, parmi lesquelles les vastes empires
enrichis de rapines à travers le monde et sefforçant dacquérir la domination
mondiale, accusaient lAllemagne de prétendre à une telle domination, de
conspirer contre la paix et de concevoir des projets criminels.
Tout ce qui ne saccordait pas avec la thèse dune «conspiration contre la
paix» était expliqué par le seul mot de «dilettantisme»110) comme on le
sait, les Alliés étaient rarement à court darguments et de slogans. Hitler
naurait sans doute pas été accusé de «dilettantisme» si, comme les États-
Unis après la seconde guerre mondiale, il avait accumulé les trois quarts des
stocks de matières premières lui permettant de satisfaire toutes les demandes
de son industrie pendant trois à cinq ans et sil avait installé à travers le
monde plus de 2 200 points dappui dans 69 pays de la planète.111) Je ne parle
pas ici de lUnion soviétique, mais il va de soi que la démonstration y est
plus éclatante encore.
109) H. Michaelis, op. cit., p. 22.
110) W. Hofer, op. cit., p. 106.
111) Daprès les déclarations de A. Fleming, responsable américain de larmement et des mesures
de mobilisation, dans une interview accordée à lhebdomadaire US News and World Report;
cité in Nationale Rundschau, 27 mars 1957, p. 9, et Politische Informationen, 5 mars 1963.
285
Au reste, les puissances qui entouraient lAllemagne nétaient nullement
terrorisées à lidée dune guerre avec ce «Troisième Reich si puissamment
armé». Bien au contraire: confiants dans laide que pourraient leur apporter
leurs «amis», ainsi que dans la puissance de la résistance à lintérieur du
Reich, elles espéraient faire camper leur armée devant Berlin peu après
louverture des hostilités. Si les Polonais, les Britanniques, les Français et
les Soviétiques avaient craint une attaque de lAllemagne, lopinion publique
et les autorités polonaises nauraient pas manifesté une telle haine et une
mauvaise foi aussi évidente vis-à-vis des minorités allemandes et du Reich.
Les propagandes française, britannique, américaine et soviétique nauraient
pas osé se livrer à daussi grossières provocations. Lorsque lon craint la
force de quelquun, on ne foule pas aux pieds délibérément des droits aux-
quels il peut légitimement prétendre et quil serait facile de lui garantir.
Bien au contraire, on a soin de lui accorder ces droits, de manière à éviter
tout risque de conflit.
Or le Conseil des ministres britannique était remarquablement bien
informé de létat de larmement allemand. Les informations que Londres
recevait étaient dignes de foi. Il est dautant moins pardonnable dans ces
conditions que des hommes politiques britanniques influents, sans parler
même de la «presse libre» et de la BBC, aient constamment échauffé les
esprits dans les années 30 en invoquant «la fébrilité du réarmement allemand»,
tandis quen petit comité, ils portaient un jugement lucide sur le potentiel
militaire du Reich, comme en témoignent ces paroles prononcées lors dun
déjeuner le 9 mars 1939 par Robert Hudson, secrétaire dÉtat au ministère
du Commerce doutremer, en présence de lambassadeur de Pologne à
Londres, Raczynski:
«Quant aux Allemands, ils seront obligés de traiter car ils sont au
bord de la banqueroute: ils nont ni or ni devises, et les matières
premières leur font défaut.»112)
«On disait que les chars allemands nétaient faits que de carton-
pâte, que les soldats allemands désertaient en masse et que leurs uni-
formes ne tenaient quavec des ficelles.»113)
286
Aucun document ne nous permet daffirmer que la Pologne a cru, en
1939, à un réarmement massif de lAllemagne ou à sa volonté de conquérir
le monde. La signature du pacte germano-soviétique du 23 août 1939 était
même interprétée par les diplomates polonais comme une preuve évidente
de limpasse dans laquelle se trouvait le Reich.114)
Ces paroles nont pas été écrites entre 1933 et 1945. Telle est la conclu-
sion à laquelle est parvenu, aux termes dune étude, un écrivain, auteur dun
ouvrage sur la minorité allemande en Pologne paru en 1954, dans un chapitre
qui sintitule: «Le bellicisme en Pologne».
Le 26 février 1938, Paul Reynaud, ministre français des Finances (il
sera Premier ministre de mars à juin 1940), déclarait devant la Chambre des
députés:
«Nest-il pas admis que les Allemands nont pas la moitié des offi-
ciers nécessaires pour encadrer leurs divisions?»116)
114) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 112: lambassadeur de Pologne à Moscou, Waclaw Grzybow-
ski.
115) T. Bierschenk, Die deutsche Volksgruppe in Polen 1934-1939, p. 345.
116) H. Lebre et M. de Mauny in Les Origines Secrètes de la Guerre 1939-45, p. 31.
287
premières, de vivres, de ressources financières... Son armée ne disposait
pas de cadres expérimentés en nombre suffisant.»117)
«Cest ainsi que lon escomptait une victoire facile et rapide. Il faut
reconnaître que de nombreuses informations venues de létranger pou-
vaient nous faire croire que notre adversaire était déjà en bien mauvaise
posture. À côté des vieilles histoires bien connues sur les ouvriers
allemands qui se mettaient en grève et les soldats qui refusaient de se
battre, on nous rapportait périodiquement lespoir dun attentat qui se
préparait,... qui était prêt, et qui mettrait fin au nazisme.»119)
«Tandis que Halifax parlait, il était de plus en plus clair ... que la
Grande-Bretagne espérait mettre un terme au conflit avant lavènement
dune tragédie mondiale et quelle comptait pour cela avant tout sur un
écroulement intérieur de lAllemagne. Ils [les dirigeants britanniques]
se sont fiés aveuglément aux rapports de leurs services secrets, qui in-
diquaient que les stocks de pétrole et dessence dont disposait lAlle-
magne ne dureraient pas plus de quatre mois, quil régnait dans ce pays
288
une atmosphère résolument pacifiste et que Hitler serait renversé dès
les premières difficultés économiques.»120)
120) C. Tansill, op. cit., p. 554. Lambassadeur américain Kennedy au secrétaire dÉtat américain,
Hull, le 4 septembre 1939.
121) TMI, vol. XXII, p. 426 (éd. fse., p. 401).
289
La politique étrangère des grandes puissances
à la veille de la guerre
Grande-Bretagne
La politique de «léquilibre européen» dans les années
précédant la guerre
Dans ses mémoires, Winston Churchill nous décrit en toute sincérité les
fondements de la politique étrangère de la Grande-Bretagne avant la seconde
guerre mondiale. Les Anglais considèrent de prime abord que si un pays
européen acquiert une certaine puissance et quil jouit dune situation
intérieure stable, il est «agressif» et dirigé par des «tyrans». Peu importe au
reste lépoque et les circonstances de cette évolution ainsi que le type de
gouvernement. La loi qui a dicté de tout temps la politique étrangère
britannique, qui a perpétué la désunion de lEurope et permis à la Grande-
Bretagne dimposer sa loi aux autres peuples se fonde sur cette hypothèse
fondamentale. Churchill reconnaît lui-même que pour lui, et conséquem-
ment pour la politique britannique, le régime hitlérien ne différait aucune-
ment des autres formes de gouvernement rencontrées au cours de lhistoire
européenne. Il admet ainsi que sa «croisade» était dénuée de tout fondement
juridique et ne répondait à aucune norme éthique. Par là même, il nous
révèle que la politique britannique des 400 dernières années nétait pas
tournée vers le droit et la justice, lhumanité et lentente internationale,
mais vers une loi despotique qui, au gré des besoins, déclarait tel ou tel État
tyrannique, agressif et criminel.
290
lempire français, ou lempire allemand, ou le régime hitlérien. Cette
politique na rien à voir avec les nations ou leurs chefs, et seul nous
inquiète, quel quil soit, le tyran le plus puissant ou qui est prêt à
simposer. Aussi ne devrions-nous pas craindre de nous voir accusés
dêtre francophiles ou germanophobes. Dans des circonstances inverses,
nous serions de la même manière germanophiles et francophobes....»1)
291
politiques anglais reprocher de tenter la domination du monde à une nation
qui ne possédait que 600 000 km carrés, soit un peu plus que le centième de
la superficie des possessions britanniques. Mais il se trouvait des gens pour
y croire.
Et lorsque Churchill précise sa pensée en déclarant que la seconde guer-
re mondiale est une «guerre anglaise» (cest avec cet argument quil a reje-
té, dans un message radio-diffusé sur BBC Londres, loffre de médiation
faite conjointement par LL MM le Roi des Belges et la Reine des Pays-Bas
après la campagne de Pologne en 1939) et que cette guerre vise à la «des-
truction de lAllemagne»,4) lopinion publique internationale sabstient de
tout commentaire. De même, elle évitera tout commentaire du célèbre et
cynique avis de Churchill, par lequel il reconnaissait après la guerre avoir
«tué le mauvais cochon». Le droit des gens ne saurait être dicté par l«opinion
publique internationale».
Un diplomate britannique membre du parti conservateur, le propre parti
de Churchill, déclarait:
292
exigeant des réparations de guerre, ils avaient porté atteinte à sa réputa-
tion et à son honneur en répandant la calomnie et le mensonge, et en lui
faisant subir les pires affronts et les pires humiliations...
Comment sétonner dès lors quau vu des épreuves infligées à la Ré-
publique de Weimar, de 1919 à 1932, des experts aient pu dire que
cétait miracle quelle ait survécu à tant de maux et à tant doutrages?»6)
293
lequel il prônait ni plus ni moins la destruction de lAllemagne (Germaniam
esse delendam).10)
Des années durant, cet homme eut la plus haute fonction en tant que
fonctionnaire à lintérieur du Foreign Office, et il exerça une influence
durable sous le gouvernement Chamberlain, bien que ce dernier lui ait retiré
son poste en 1938 pour le nommer conseiller diplomatique du gouvernement.
Ces gens, qui jugeaient lunité de lAllemagne indécente,11) prirent prétexte
de la rupture par lAllemagne de léquilibre européen (symbolisée par son
travail de reconstruction) pour simmiscer dans ses affaires intérieures.
Pourtant, par opposition aux années qui avaient précédé la première guerre
mondiale, lAllemagne navait pas pris part à la course aux armements,12) et
son commerce extérieur ninfluait guère sur le marché mondial. Malgré
tout, elle était encore trop puissante et, pendant des années, ces mêmes gens
singénièrent à renforcer leur programme darmement et à créer autour du
vaincu un cordon de puissances hostiles. Il est significatif de constater que
dès le printemps 1934, à une époque où lAllemagne avait un potentiel
darmement incomparablement inférieur à celui de la Grande-Bretagne et
où elle navait formulé aucune revendication territoriale, la commission de
défense nationale britannique décrétait que le «véritable ennemi potentiel»
en cas de conflit élargi serait lAllemagne.13) De nombreuses personnalités
britanniques, françaises et américaines se justifiaient de leurs sentiments
hostiles à lAllemagne en évoquant sa trop grande puissance.
En 1943, Eden, donnant un petit-déjeuner dadieu à lambassadeur sovié-
tique, qui devait quitter Londres pour remplir ses nouvelles fonctions de
secrétaire dÉtat au ministère des Affaires étrangères à Moscou, déclara:
294
que pour la Russie, cest la raison pour laquelle ces deux pays sunissent
pour la combattre et la mener à sa perte.»14)
295
Rétrospectivement, le général J.F.C. Fuller, historien britannique, déclara
que ce nétaient pas les théories politiques de Hitler qui avaient provoqué la
guerre mais le succès de ses nouveaux principes économiques.17)
«Tout le sens de mon discours est (my whole point is) que lon ne
peut traiter avec lAllemagne nazie sans lui rendre justice. Mais si on
lui fait justice, deux possibilités se présentent. Dun côté, les éléments
modérés en Allemagne peuvent opposer une résistance (probablement
parce quils ne sont jamais arrivés à le faire vis-à-vis de la République
de Weimar). Dun autre côté, la Grande-Bretagne peut être amenée à
envisager une guerre si lAllemagne persiste à agir dans un sens qui
pourrait favoriser son hégémonie en Europe.»18)
Churchill en 1936:
17) J.F.C. Fuller, Decisive Battles of the Western World, vol. III, pp. 368-370; The Second
World War, 1939-1945: A Strategical and Tactical History, p. 412.
18) J.R.M. Butler, Lord Lothian, p. 216.
19) Das Neue Reich N° 15, 11 avril 1959, p. 4, H. Grimm.
20) Der Ring, avril 1959, p. 4.
296
excès du national-socialisme aideraient lAngleterre à créer un fort
système dalliances.»21)
Le simple fait quun grand peuple eût retrouvé son identité nationale
devenait un acte dagression (au début de lannée 1937) de par les rumeurs
que la centrale londonienne répandait à travers le monde. Lobjectif était
clair: il fallait «créer un fort système dalliances» pour détruire lAllemagne.
Le général américain Robert E. Wood rapporta devant une commission
du Sénat à Washington une phrase que Churchill lui avait dite en novembre
1936:
Ce témoignage nest pas unique. Lété 1937, lors dun entretien accordé
à Ribbentrop, qui était alors ambassadeur dAllemagne à Londres, Churchill
déclara: «Si lAllemagne devient trop forte, de nouveau il faudra la détruire
[comme en 1914].»
Ribbentrop: «Cette fois, la chose ne sera plus aussi facile quauparavant,
lAllemagne ayant désormais des amis.»
Churchill: «Oh, nous saurons bien leur faire changer davis en défini-
tive.»23) «Il ne faut pas que vous sous-estimiez lAngleterre... Ne jugez point
daprès lattitude de son gouvernement actuel. Quune grande cause soffre
à son peuple, et vous verrez de combien dactions inattendues seraient capa-
bles ce même gouvernement et la nation britannique!»24)
Le Tribunal militaire inter-allié de Nuremberg et les gouvernements bri-
tanniques daprès-guerre ont déclaré navoir retrouvé aucune trace ni aucun
document concernant cet entretien. Pourtant, plusieurs éléments permettent
dajouter foi à lauthenticité de ce témoignage:
a) l«inexistence» de tout document relatif à cet entretien, tant dans les
archives britanniques que dans les archives allemandes pillées par lennemi,
b) labsence de tout autre document présentant une version différente de
cette entrevue dont nous savons quelle a eu lieu,
c) le refus du Tribunal militaire inter-allié de Nuremberg dentendre le
témoignage de Churchill,
21) C. J. Burckhardt, Ma Mission à Dantzig, p. 77.
22) J.F.C. Fuller, Decisive Battles of the Western World, vol. III, p. 369,
E. Hughes, Winston Churchill British Bulldog His Career in War and Peace, p. 145
et Hearings on Lend and Lease, février 1941, p. 275.
23) J. von Ribbentrop, De Londres à Moscou Mémoires, p. 81.
24) W. Churchill, op. cit., p. 228.
297
d) le fait que Churchill mentionne cet entretien dans ses mémoires.
Ainsi, la requête présentée à Nuremberg par lavocat de Ribbentrop
relative à la situation de son gouvernement à lépoque, bien que rejetée,
avait une importance légitime et réaliste sur le plan politique:
«Il souligna avec force que son pays avait combattu pour cet équilibre
des puissances qui était si cher à plus dun cur britannique. Il exprima
le sentiment que lui et son pays avaient mission dempêcher une primauté
allemande sur le continent.»26)
25) TMI, vol. VIII, pp. 229, 230 (éd. fse., p. 209).
26) D. Hoggan, The Forced War, p. 181 ( éd. all., Der erzwungene Krieg, p. 243).
27) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 190.
298
«[Vansittart] est le principal moteur de la politique dencerclement
de lAllemagne, dirigée et encouragée par certains éléments gouverne-
mentaux anglais...
Ils désirent nous entraîner, nous aussi, dans la politique dencercle-
ment de lAllemagne et pour cette raison ils sont favorables à la pression
exercée chez nous en ce sens par tous les clans anglais de gauche qui ...
forment aujourdhui un parti de la guerre et acceptent même lidée
dune guerre préventive.»28)
Lord Halifax a révélé dans ses mémoires de telles relations qui existaient
déjà en février 1938, et évoqué les «pressions» auxquelles il était soumis:
299
«si un chien enragé est sur le point de mattaquer, je labats avant
quil ne puisse me mordre,»32)
on peut simaginer quil soit plus franc encore avec ses collègues. Lun
dentre eux, Lord Vansittart, nhésitait pas à dire:
«Mais mon cher Hesse, vous ne pouvez éviter une guerre entre
lAllemagne et lAngleterre. Voyez, Monsieur Hitler veut faire de
lAllemagne la première puissance européenne, et je crois que mes
renseignements à ce sujet sont exacts. Or, cela, nous ne pourrons le
tolérer.» 32)
De fait en Angleterre,
300
1919. En 1933, Churchill affirmait encore que lAllemagne portait lentière
responsabilité du déclenchement de la première guerre mondiale et que le
traité de Versailles avait établi une paix juste.37) Tout au long de sa vie, il est
resté fidèle aux principes qui lavaient guidé dans lélaboration de ses
campagnes de propagande. En février 1944, alors quil occupait le poste de
Premier ministre, il évoqua une fois encore cette «guerre de trente ans
contre lagression allemande de 1914».38) Il partit en guerre contre lempire
allemand, contre la République de Weimar puis contre le Troisième Reich,
il eut recours aux armes comme à la parole. Parallèlement pourtant, il
parlait de paix, de justice et dégalité entre les peuples et décrivait cette
Angleterre généreuse et pacifique qui venait en aide aux petites nations.
De nombreux personnages influents partageant la politique européenne
de Churchill étaient au Foreign Office, dans ladministration et aux leviers
de commande de la presse. Ils étaient de ceux, une «minorité» en Angle-
terre, qui, dès 1935:
Il nest pas surprenant que Lord Halifax ait très tôt pris une position qui
correspondait exactement à la politique britannique déquilibre des forces.
Dès les mois de septembre-octobre 1938, il intervint dans les relations
germano-polonaises à une époque où Hitler navait pas encore abordé ce
thème devant ses interlocuteurs polonais, en assurant le colonel Beck quil
allait faire tout son possible pour soutenir la Pologne dans la question
dantzicoise.40) Halifax donna cette garantie à la Pologne bien que, lui-même,
aimât à qualifier d«absurdité» le statut imposé à Dantzig par le traité de
Versailles, et en dépit du fait que son ambassadeur à Varsovie lui avait
déclaré:
«Il est assez clair quà plus ou moins brève échéance, Dantzig rede-
37) H. Lutz, op. cit., p. 21.
38) «Correspondance entre le Président du Conseil des ministres de lURSS, le Président des
États-Unis et le Premier ministre de la Grande-Bretagne pendant la grande guerre patriotique
1941-1945», éd. russe, vol. I, p. 204.
39) F. Hesse, op. cit., p. 40.
40) D. Hoggan, op. cit., p. 111 (éd. all., p. 152).
301
viendra allemand, et que Monsieur Beck aura le plus grand mal à per-
suader le peuple polonais de sen accommoder sans quelque compen-
sation.» 41)
En fait, Halifax préféra saccorder un délai plus long pour réaliser son
objectif: réduire la puissance de lAllemagne. Dans cet esprit, il incita
Hitler à formuler des revendications. Et aussitôt que Hitler fit mine de sui-
vre son conseil, il sinsurgea par tous les moyens diplomatiques et politiques
à sa disposition.
Son prédécesseur à la tête du Foreign Office, Anthony Eden, navait pas
agi différemment. Le 4 mai 1937, le diplomate britannique Lord Lothian
rencontrait pour la seconde fois le chancelier allemand. Il linformait dune
déclaration officielle que le ministre des Affaires étrangères britannique
avait rapportée dans un discours à Leamington, dans le centre de lAngleterre,
le 20 novembre 1936, déclaration aux termes de laquelle «la Grande-Bretagne
navait pas dintérêts essentiels en Europe orientale». Lothian lassura que
contrairement à Mussolini et au pape, lAngleterre ne ferait pas obstacle à
une solution du problème autrichien.42)
Un autre envoyé de lAngleterre, Halifax, se rendit chez Hitler le 19
novembre 1937. Il lui déclara:
41) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. III, doc 206. Kennard à
Halifax le 14 octobre 1938.
42) J. R. M. Butler, op. cit., pp. 341-342.
302
dans le peuple allemand un grand peuple, souverain, et que toute négo-
ciation doit être menée sur cette base. Les Anglais étant un peuple
réaliste, il est probablement plus que tout autre convaincu de la néces-
sité dune rectification des défauts du traité de Versailles...
Du côté anglais, on pense que le statu quo ne doit pas être maintenu
à tout prix. On admet la possibilité dune évolution correspondant à des
conditions nouvelles, dune rectification de certaines erreurs passées
et la nécessité dune modification de la situation actuelle...
Il lui faut à nouveau souligner au nom du gouvernement britannique
quaucune possibilité de modification de la situation actuelle ne doit
être exclue mais que des transformations ne seront possibles que sur la
base dun règlement acceptable...»43)
Un Anglais:
303
que Halifax, ministre des Affaires étrangères, et Duff Cooper, Premier
Lord de lAmirauté et député, avaient invité les Polonais à rejeter toute
exigence allemande tandis que Halifax avait déclaré à Hitler que la
Grande-Bretagne ne verrait pas dinconvénient à ce que Dantzig réintègre
le Reich. Le Premier ministre britannique savait pertinemment que
lambiguïté de la politique suivie par ses ministres pouvait très vite
déchaîner une nouvelle guerre, mais il neut pas le courage dévoquer la
situation devant Hitler.»45)
304
mation stupéfiante de Chamberlain: «LAmérique et la juiverie mondiale ont
poussé lAngleterre à la guerre.»49)
Létude des événements qui ont précédé le déclenchement de la seconde
guerre mondiale montre que la Grande-Bretagne sest refusée au printemps
1939 à reconnaître à la population dantzicoise, et à plus forte raison aux
habitants de Prusse occidentale, le droit à lautodétermination. Si elle sest
au contraire ingéniée à aggraver la tension germano-polonaise, ce nest pas
par attachement à certains principes éthiques ou par amour pour le statu quo.
La Grande-Bretagne a admis et même favorisé limpérialisme des milieux
polonais qui souhaitaient une révision du statu quo en leur faveur tout com-
me elle a admis et favorisé lexpansion soviétique aux dépens de la Pologne
et des États baltes. Il va sans dire que les Alliés ne se sont nullement préoc-
cupés de justifier le «déplacement vers louest des frontières de la Pologne».
Ils ne se sont même pas donné la peine de prétendre que cest par affection
pour les Polonais que cet arrangement territorial avait été conclu. Churchill
lors de la conférence de Yalta, en février 1945:
305
«Cela fait des années que, indépendamment de mes fonctions, je
défends lopinion que lÉtat polonais ne pouvait saffirmer en tant que
nation souveraine tant que se perpétuerait lexistence du Corridor...
Jai siégé à Genève comme rapporteur au parlement de cette lamen-
table affaire de Dantzig. Il était évident que le système ne pouvait fonc-
tionner...
Pour régler la question, il ny avait quune seule alternative: il fallait
céder la Prusse orientale à la Pologne et transplanter la population.» 51)
Le terme «des années» est important ici, car il nous ramène à la période
davant-guerre. De fait, cette déclaration concorde avec la politique menée
par les collègues de Eden et par Lord Halifax, dont il était le prédécesseur
et le successeur. En 1939, Eden était lune des personnalités les plus
influentes de la société britannique et de la politique du pays; et de décembre
1935 à février 1938, il fut ministre des Affaires étrangères de Sa Majesté.
Lattitude des hommes politiques avant le mois de septembre 1939 et
pendant la guerre montre à quel point ils se sentaient peu concernés par le
destin de la Pologne. Entre autres déclarations des hommes politiques bri-
tanniques, celle de Churchill à Yalta, en 1945:
306
«Les Grandes Puissances devraient déterminer ce qui reviendrait à la
Pologne.» 55)
Et, déjà au cours des années précédant le début de la guerre, les Grandes
Puissances concernées, à lexclusion de tous les États européens continen-
taux, «déterminèrent» en partie directement et en partie indirectement les
lignes directrices de politique étrangère de leurs propres alliés et des sym-
pathisants de Versailles, donc aussi de la Pologne.
Par leur propagande et leur potentiel économique, ils fixèrent des valeurs,
liées à leurs propres intérêts: les bonnes et pacifiques démocraties, et les
Allemands malfaisants et barbares. On ne peut, dans cet ordre didées, quap-
prouver les historiens communistes:
55) R. Sherwood, Roosevelt und Hopkins, pp. 581-582 (éd. anglaise, p. 710).
56) R. Goguel , op. cit., p. 863.
57) E. Rozek, Allied Wartime Diplomacy, p. 26.
307
La politique allemande de la Grande-Bretagne
depuis «Munich» jusquau
15 mars 1939
308
implacables des accords de Munich et qui comme par exemple Churchill
avaient coutume de traiter le chancelier du Reich de «voleur de grands
chemins», de «gangster» et de traiter les accords eux-mêmes de «chantage
allemand». Il se conforma plutôt petit à petit à leur ligne et renforça la
position de son ministre des Affaires étrangères, Lord Halifax. Celui-ci
aussi, eu égard à la résolution de Munich, avait soudainement menacé de
démissionner, si bien que progressivement la responsabilité exclusive de la
politique étrangère britannique revint à Halifax.4)
d) Sous le prétexte de la «menace allemande», Chamberlain annonça un
programme darmement, le plus important jusqualors.
e) La politique de «fatalité de la guerre» fut introduite avec emphase
sous forme de fausses alertes largement diffusées par les médias, daccords
de coalition conclus avec dautres puissances, dencouragements à refuser
tout compromis avec lAllemagne, en accentuant lagitation déjà suscitée
par les slogans (Allemagne =«nation agressive») et en passant publiquement
sous silence les efforts allemands pour la paix.
f) La pression exercée sur la France, en vue de linciter à «organiser la
défense» du pays, fut accrue. Par «pression», on entend ici tout au moins
lempressement sans relâche du gouvernement britannique à exposer au
partenaire français la nécessité dintensifier la production des armements.5)
g) La mise en place dun service national dassistance en temps de guerre
et les préliminaires de la propagande pour linstauration du service militaire
obligatoire furent bientôt recommandés.
309
exemple, lallocution de Lord Halifax, le 23 octobre 1938, à Édimbourg, dans
laquelle il soulignait:
«Cest dans ces semaines fiévreuses de novembre 1938 que les mi-
lieux dirigeants de Londres ont fait prendre à lAngleterre son tournant
belliqueux et ont résolu de faire la guerre à un adversaire qui menaçait
le commerce britannique dans ses uvres vives. La politique de ferme-
té intraitable qui ne pouvait avoir dautre issue que la guerre étant donné
la situation internationale, cest dès ce moment-là quelle est décidée.
Elle nattendit plus quune occasion de se manifester au grand jour;
cest la Pologne qui devait la fournir au gouvernement de Londres.»10)
310
quen Angleterre se répandait lidée quune entente avec lAllemagne était
impossible.7)
11) D. Hoggan, The Forced War, pp.194-195 (éd. all., Der erzwungene Krieg, p. 262).
12) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten, vol. I, p. 356.
13) I. Colvin, Vansittart in Office, pp. 287-288.
311
a) lintroduction du service national volontaire qui devait permettre à
lAngleterre «dêtre prête pour la guerre».14)
b) la déclaration publique du gouvernement britannique dintervenir mi-
litairement sur le continent en cas de menace des intérêts vitaux de pays
européens non désignés.
La politique selon laquelle une intervention militaire ne pouvait être
prévue quen cas dattaque sur les Îles britanniques était ainsi publiquement
révoquée.
Par cette mesure et par celle qui précède, Chamberlain a non seulement
fait sien le point de vue du président Roosevelt, exprimé par celui-ci le 4
janvier 1939 dans un message devant le Congrès, «de choisir des méthodes
juste en-deçà de la guerre»,15) mais il a aussi mis en uvre ces méthodes
mêmes.
Au cours des mois de décembre 1938 et de janvier 1939, Lord Halifax et
dautres personnalités publiques soutinrent le président Roosevelt dans sa
politique, en diffusant une série de fausses informations alarmantes et un
flot darticles de presse de même mouture: Hitler aurait lintention de créer
une Ukraine indépendante («ces informations provenaient dEurope
occidentale»16)): il voudrait anéantir les puissances occidentales par une
attaque surprise avant de se tourner vers lEst; il viserait à acculer lItalie à
un conflit dans la région méditerranéenne afin den faire le prétexte dune
guerre; il regrouperait des troupes allemandes le long de la frontière tchèque;
lAllemagne serait au bord dune crise économique et financière telle que
Hitler serait contraint à lagression; l«état mental de Hitler, sa rage insensée
envers la Grande-Bretagne et sa folie des grandeurs» seraient autant de
menaces imminentes.17) Dès lautomne 1938 la résistance clandestine
allemande intensifiait ses contacts amicaux avec Londres, qui sen trouvait
encouragée. Cette résistance nourrissait lespoir dune démonstration de
force, ou plutôt dune «guerre préventive», qui serait déclenchée par un
putsch militaire au sein du Reich allemand.
Parmi les initiatives britanniques, il faut mentionner le jeu diplomatique,
organisé à larrière-plan contre lAllemagne, «de crainte que la Pologne ne
puisse opter pour le côté allemand» et fasse échouer ainsi lencerclement
prévu. Quand les historiens parlent ici des «craintes» britanniques quant à
312
une entente ou même à une alliance entre la Pologne et lAllemagne, ils re-
connaissent involontairement que lAllemagne na jamais menacé son voi-
sin oriental mais désirait bien au contraire faire uvre commune avec la
Pologne. Le 1er novembre 1938 Halifax avouait à son ambassadeur à Paris:
«[Beck] prit grand soin de ne pas avertir les Britanniques que les
négociations avec lAllemagne se trouvaient dans une impasse, mais
laissa entendre, au contraire, que la question de Dantzig serait bientôt
réglée. Une fois de plus, les Britanniques salarmèrent. La Pologne,
craignaient-ils, pouvait se rapprocher de lAllemagne plus quelle ne
lavait fait en l938. La participation de la Pologne à un Front de la
paix leur parut vitale. Seule elle était capable de faire une réalité de la
menace dun second front...
La Pologne, supposaient les Britanniques, ne courait aucun danger
imminent de la part de lAllemagne. Bien au contraire, ils craignaient
quelle ne ralliât le camp germanique, surtout avec Memel en jeu. Les
Polonais non plus ne sestimaient pas en danger.»21)
313
que la France, du fait de nombreuses obligations dalliances (par exemple avec
la Pologne, lUnion soviétique, la Tchécoslovaquie), pouvait être impliquée
dans tous les foyers de crise possibles en Europe.22)
Mi-février 1939, la Grande-Bretagne et la France résilièrent dimportantes
dispositions des actes généraux de Genève sur le droit à la neutralité, et en
particulier sur le droit maritime: elles se soustrayaient ainsi, avec effet au
16 août 1939, à la procédure arbitrale neutre mesure visiblement étudiée
pour le cas dun conflit européen.
314
établie dès une époque où le prétexte nexistait pas encore. Loccupation de la
Bohême-Moravie neut lieu que six jours plus tard!
En octobre 1939, faisant la rétrospective des mois passés sous son mi-
nistère, Chamberlain écrivit quil ne croyait pas:
315
La réaction britannique au 15 mars 1939
316
«Le silence singulier de Halifax au cours des semaines précédant
loccupation de Prague par les Allemands, alors quil avait pleinement
connaissance de la crise imminente, et surtout son omission de répondre
à la note de Ribbentrop du 28 février, permirent aux Allemands de pré-
sumer que loccupation de la Tchécoslovaquie naurait aucune consé-
quence spéciale ou défavorable sur les relations germano-anglaises.
Lévolution ultérieure établit clairement que Halifax visait juste-
ment à amener les Allemands à penser que non seulement il ne ferait
aucune objection à laction prévue en Tchécoslovaquie, mais même
quil la favoriserait peut-être. Toute lattitude de Chamberlain et de
Halifax dans la question tchèque depuis novembre 1938 jusquau 15
mars 1939 montre clairement pourquoi ils nosèrent pas faire des
actions des Allemands leur raison officielle de protester et dameuter
lopinion publique britannique. Mais, grâce à laide de Vansittart, ils
purent offrir un faux prétexte au changement de cours de leur politique,
prétexte qui pouvait être inscrit sans problème dans un procès verbal
officiel.» 4)
Cest ainsi quà une date bien étudiée, le 17 mars 1939, le ministre
plénipotentiaire roumain, Virgil Tilea, «à la suite dun appel téléphonique de
Paris»5) très certainement arrangé par le Foreign Office,6) annonça au ministre
des Affaires étrangères britannique la fausse nouvelle selon laquelle
lAllemagne aurait adressé un ultimatum à la Roumanie, ou plutôt que le
gouvernement allemand aurait exigé de la Roumanie loctroi du monopole
des exportations roumaines, et des mesures de restrictions industrielles en
faveur des intérêts allemands, lui garantissant parallèlement la non-violation
des frontières roumaines par larmée allemande. Le prétexte lui en fut
fourni par lannonce du séjour dune délégation commerciale allemande,
tout à fait par hasard à la mi-mars 1939, en Roumanie. Les suppositions
émises jusque là, à savoir que le «mensonge de Tilea» aurait été mis en
circulation par le Foreign Office, sur la base dun «appel téléphonique»
fictif «de Paris», ont pu être confirmées et formellement prouvées.7)
Au sein des cercles dirigeants britanniques on était alors décidé à suivre
4) P. H. Nicoll, Englands Krieg gegen Deutschland, p. 131.
5) Déclaration orale de Tiléa à Helmut Sündermann.
6) P. H. Nicoll affirme avoir eu droit de regard dans des documents, selon lesquels des entretiens
secrets auraient eu lieu entre Vansittart et Tiléa avant le «mensonge de Tilea»; Tilea devait
toucher, en contrepartie de ses services, un pourcentage dun prochain crédit britannique à
son gouvernement destiné à lachat de munitions anglaises.
7) F. Lenz, Nie wieder München, vol. I, pp. 91-107. Le 28 août 1939 Lord Halifax réitéra cette
méthode de télégramme fictif dicté par téléphone dans une affaire encore plus lourde de
conséquences, «inventant» ainsi lapprobation de la Pologne aux débats. Voir, dans le
présent ouvrage, le chapitre «Les derniers jours de paix».
317
une voie axée sur des slogans, tels que «Stop Hitler», sur un refus absolu de
tout compromis et sur des «méthodes juste en-deçà de la guerre».8) Ces
plans étaient basés sur des activités et initiatives, sans que lon se donne
même la peine, ne serait-ce que par simple velléité de propagande, daffirmer
que la sécurité de lAngleterre serait menacée par Hitler. La décision
librement prise par la Roumanie de développer son commerce avec
lAllemagne était déjà qualifiée par les cercles britanniques autorisés de
nouvelle «perturbation de léquilibre européen». Cétait le moyen de con-
clure à la «nécessité» dintervenir contre lAllemagne. Et, pour reprendre
les termes du Premier ministre:
318
outre, le gouvernement anglais en était encore à «redouter», on le sait, «un
rapprochement entre la Pologne et lAllemagne».11) Il craignait donc ne pas
rencontrer lécho voulu en Pologne. Mettant à profit son réseau mondial
dinformation ainsi que les objectifs anti-allemands des autres pays, le
Foreign Office suggéra à lopinion publique mondiale quoutre la Rouma-
nie, lUkraine ainsi que les puissances occidentales et des pays de la région
méditerranéenne étaient confrontés, eux aussi, à la menace dune attaque
allemande imminente.12) La Pologne sempressa aussitôt de soutenir cette
psychose, engendrée à Londres, en propageant ses propres informations
alarmantes,13) et les Soviétiques, de leur côté, semparèrent de cette agitation
à leurs propres fins.
Cette information alarmante de Roumanie était trop soigneusement adap-
tée à la mentalité anglaise et au niveau intellectuel de lopinion publique
internationale: en outre, elle était trop précisément orientée vers lobjectif
dagitation choisi pour la propagande et avait déjà été considérablement
exagérée par Churchill lors des débats à la Chambre des Communes après la
conférence de Munich: «Ouverture de laccès à la Mer Noire».
a) Or lAllemagne navait pas de frontière commune avec la Roumanie.
Le point le plus proche du territoire roumain se trouvait à 350 km, séparé
par autant de territoire hongrois: on insinuait par cette information une
intention dagression contre la Hongrie.
b) Les causes de la désintégration de la Tchécoslovaquie pouvaient ainsi
être falsifiées, et une telle falsification pouvait être exploitée par la presse.
Celle-ci présentait la marche de Hitler sur Prague comme une étape supplé-
mentaire de son plan dagression contre les peuples du monde entier, comme
lavait prévu Eden lors des débats aux Communes le 15 mars 1939.14)
c) La susceptibilité britannique quant aux rapports économiques avec les
pays balkaniques était dans le cas de la Roumanie particulièrement
importante. En effet, la Roumanie était en passe de devenir le plus important
fournisseur de pétrole de lAllemagne et la Grande-Bretagne y possédait
une importante participation dans lindustrie du pétrole ainsi que dans dautres
secteurs.
La preuve formelle du rôle personnel joué par Lord Halifax dans
lélaboration de la «fable de Tilea» se manifeste par un enchaînement dindices
sur son comportement en cette journée du 17 mars:
11) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 207.
12) D. Hoggan, The Forced War, p. 240 (éd. all., Der erzwungene Krieg, p. 326).
13) ADAP VI, doc. 6.
14) J.M. Maiskii, op. cit., p. 93.
319
a) Dès le 16 mars, Halifax avait annoncé à lambassadeur soviétique, par
lentremise de Lord Vansittart, le changement de cap de la politique britan-
nique en rapport avec lallocution de Chamberlain du 17 mars;*)
b) Le fait que Halifax avait persuadé son Premier ministre de prendre
linitiative de manifester contre lAllemagne a été confirmé par plusieurs
historiens britanniques;*)
c) «Le matin» [du 17 mars], Halifax savait déjà que «Chamberlain allait
prononcer le soir un discours assez raide», puisquil en fit part au chargé
daffaires américain, Johnson. Évidemment, il ne lui dévoila pas tout, mais
juste assez pour amener Johnson à câbler à Washington:
320
port sur lultimatum allemand, paru le jour même dans le Times et le Daily
Telegraph. Il ny avait pas un mot de vrai.»17)
321
liens étroits menant aux entretiens diplomatiques et militaires avec lUnion
soviétique, liens déjà noués les 1er et 9 mars 1939 lors des visites de Chamber-
lain à lambassade soviétique à Londres.22)
Bien que Chamberlain ait appris au plus tard le 18 mars que jamais un
ultimatum allemand navait été adressé à la Roumanie, il prit linitiative d«une
manifestation immédiate contre une progression allemande»,23) en invitant
concrètement lUnion soviétique, la France et la Pologne à sunir en un
système de «sécurité collective».
Les historiens soviétiques ont certainement raison décrire:
«Si une guerre devait être déclenchée, il serait important de tenter dy
impliquer lUnion soviétique, sinon à la fin de la guerre, lorsque
lAngleterre et lAllemagne seraient en ruines lUnion soviétique,
disposant encore dune armée intacte, dominerait lEurope.»25)
22) E. Hughes,Winston Churchill British Bulldog His Career in War and Peace, p.168.
23) A. J. P. Taylor, op. cit., p. 207.
24) W.G. Truchanowsky, «La politique étrangère anglaise au premier stade de la crise
générale du capitalisme (1918-1939)», (éd. russe), p. 354.
25) ibid., p. 358, et Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. V, doc. 285, p. 331 et
doc. 589, p. 646.
322
Si cest le cas, je présage que tôt ou tard et probablement plus tôt
une autre grande guerre est inévitable.»26)
26) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 448.
27) ibid., vol. V, doc. 2 et 10.
323
Le blanc-seing anglais à la Pologne
du 31 mars 1939
1) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 551 (28 mars 1939), et vol. V,
doc. 278 et 279.
2) H. Roos, Polen und Europa, p. 395.
3) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. III, doc. 321.
4) ibid., vol. III, doc. 312.
324
Au moment où le ministre des Affaires étrangères français «avait
limpression»:
325
rallia à lavis de Bonnet de «tenter cette nouvelle tactique» 5) lambassadeur
britannique à Varsovie, Kennard, envoyait un télégramme à son ministre des
Affaires étrangères:
326
menacés par les méthodes nouvelles de la politique allemande, mais
encore dune lutte idéologique contre lhitlérisme et que le but final des
actions entreprises nest pas de maintenir la paix, mais de provoquer une
révolution en Allemagne...
Il est triste, voire presque tragique, que dans létat actuel des choses,
il ne sagisse pas seulement de sauvegarder les intérêts dun seul pays,
mais sans exagération déviter un conflit armé qui prendrait les
proportions dun cataclysme. Prenons comme exemple la Pologne. Je ne
connais ni le texte de la proposition anglaise, ni les intentions de Hitler.
Mais, me basant sur des éléments indubitables, je me fais une idée
personnelle de la situation véritable. Linitiative anglaise, imprudente
dans sa forme et pleine de lacunes quant au fond, place le Gouvernement
polonais devant lalternative de compromettre ses relations avec
lAllemagne ou de laisser échouer les négociations avec Londres. Au
premier cas, Hitler peut se voir contraint de recourir à la violence contre
nous, à quoi nous ne saurions répondre quen prenant les armes. Il en
résulterait un conflit général en Europe ...
Au second cas, léchec des négociations avec Londres sera pour
Hitler la preuve de linsincérité et de la faiblesse de la politique anglai-
se et française et lincitera à chercher dans lEurope orientale et cen-
trale des expansions nouvelles, qui tôt ou tard aboutiront à une cata-
strophe guerrière. Les choses en étant là, il est aussi puéril que criminel
de vouloir faire endosser à la Pologne la responsabilité du choix entre
la paix et la guerre. Il y a lieu de constater, une fois pour toutes, que
cette responsabilité pèse pour la plus grosse part sur la France et
lAngleterre, dont la politique, insensée ou ridicule dans sa faiblesse, a
produit cette situation et provoqué les événements dont nous sommes
témoins.» 8)
327
«grâce auxquels ils pouvaient effectivement user de contrainte envers
lAngleterre. Il songerait sérieusement à mobiliser ces moyens.»8)
«Comme vous le savez, je suis revenu hier soir dun court séjour en
Pologne, au cours duquel jai eu loccasion de discuter de la situation
avec un certain nombre de personnes à Varsovie. Au retour, jai con-
sacré une visite à Dantzig où, grâce à lamabilité de Monsieur She-
pherd, notre consul général, jai pu me faire une idée de la situation
locale. Pendant mon séjour à Varsovie, lambassadeur me montra une
dépêche quil avait reçue de Berlin, dont le contenu laissait entendre
que, du point de vue de larmée, loccasion semblait présentement très
opportune pour le déclenchement dune guerre préventive afin de con-
trecarrer les ambitions allemandes, et quil serait même avantageux
pour nous de provoquer nous-mêmes une telle guerre.»10)
328
monde pour imposer sa volonté de «politique de léquilibre des forces
européennes».
11) M. Gilbert et R. Gott, The Appeasers, p. 236 (éd. all., Der gescheiterte Frieden, p. 188).
12) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 484, et M. Gilbert et R. Gott,
op. cit., p. 235 (éd. all., Der gescheiterte Frieden, p. 187).
329
une forme qui ignorait délibérément «la question de lagresseur».13) Chamber-
lain accordait ce blanc-seing à un pays qui:
a) quelques jours auparavant avait nettement manifesté sa volonté de
guerre par une mobilisation partielle et par le déchaînement de son opinion
publique envers le Reich allemand et les minorités allemandes;14)
b) ne comptait absolument pas au nombre des proches alliés de lAngleterre
mais avait été auparavant et jusquen 1938 considéré avec scepticisme et jugé
peu fiable par le gouvernement britannique (cf. la crise des Sudètes);15)
c) depuis 1918, était passé fondamentalement et en permanence au-dessus
des principes de la Société des Nations, aussi bien dans la question des
minorités que dans son attitude de politique étrangère, et qui, même en 1938-
1939, navait donné aucun indice exprimant une quelconque volonté de
réorientation en faveur dune réconciliation avec ses minorités et ses voisins;
d) depuis 1919, avait déclaré et visé des objectifs expansionnistes;
e) était gouverné de façon dictatoriale;
f) ne pouvait même pas être protégé par lAngleterre;
g) nétait pas menacé par lAllemagne.
13) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 584.
14) cf. les télégrammes de lambassadeur britannique à Varsovie où celui-ci souligne cette psy-
chose polonaise de guerre dès le printemps 1939, dans Documents on British Foreign Policy
1919-1939, vol. IV, doc. 573.
15) ibid., vol. III, doc. 137 et 206. Dès octobre 1938, lambassadeur Kennard avait mis son
ministre des Affaires étrangères en garde contre lindépendance de Beck et lordre dictatorial
en Pologne.
16) K. Zentner, Illustrierte Geschichte des Zweiten Weltkrieges, p. 70.
330
soit maintenu le statut particulier et insensé de Danzig. Il tombe sous le sens
quen loccurrence aucun droit nétait garanti mais que de la sorte on contre-
venait à la paix.
Lambassadeur de Pologne à Londres, Raczynski, fut lui-même surpris de
cet «acte spontané»:
«On ne sait pas exactement qui était responsable, mais ce fut vrai-
semblablement Halifax. Et surtout, je ne sais pas comment le gouverne-
ment britannique a pu savoir que la situation était mûre pour une telle
garantie. En tout cas, ce nétait pas nous qui le lui avions rapporté.» 17)
331
dinformations en sa possession, qui semblaient indiquer léventualité
dactions contre la Pologne dans limmédiat.»22)
22) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 583.
23) A. Rein, Warum führt England Krieg? p. 10.
24) E. Raczynski, op. cit., p. 23.
25) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 573.
26) ibid., vol. IV, doc. 584 (Halifax le 31 mars 1939).
332
Neville Chamberlain avait donné cette garantie à la Pologne «au nom de la
France» également, sans toutefois y avoir été habilité par le gouvernement
français. Les Français ne sétaient montrés aucunement disposés à «mourir
pour Dantzig»: cette décision de Londres, tout comme plus tard lultimatum et
la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne, le 3 septembre 1939, les
impliqua pourtant dans une situation telle quelle ne leur offrait quasiment
plus aucune possibilité de sopposer à la politique belliciste de la Grande-
Bretagne. Aussi, de gré ou de force, Paris dut ultérieurement accepter de
concourir à la garantie britannique accordée à la Pologne «également au nom
de la France».
Si le gouvernement britannique, sachant que lAllemagne avait lintention
dattaquer la Pologne et soucieux de la menace quelle représentait pour la
paix, avait donné la garantie de soutenir la Pologne pour le cas dune
agression non-provoquée par la Pologne de la part de Hitler, cette
garantie aurait alors été légitime et pas nécessairement préjudiciable pour
la paix européenne. Une fois de plus, la Grande-Bretagne, sous prétexte de
la garantie donnée, sétait doffice adjugée le rôle «darbitre» sur des nations
européennes jouissant de légalité des droits et de gardien des valeurs de ce
monde bien évidemment dans son propre intérêt national. Cette politique
aurait encore pu être qualifiée de «britannique» si la Grande-Bretagne sétait
au moins réservé le droit de faire la différence entre provocation et agression,
et sétait efforcée dobtenir un équilibre impartial et juste.
Pour la première fois dans lhistoire britannique, Londres a abandonné
sans réserve la décision de guerre ou de paix à une puissance étrangère et
approuvé davance toutes les mesures envisagées par la Pologne. Les temps
étaient révolus où un Premier ministre français (Poincaré en 1923) pouvait
encore déclarer:
27) C. Höltje, Die Weimarer Republik und das Ostlocarno-Problem 1919-1934, p. 67: Poincaré
à lambassadeur de Saint-Aulaire le 23 janvier 1923.
333
férence de Téhéran en 194328) sans se soucier du chauvinisme polonais qui
faisait rage au printemps et en été 1939. Le chef du gouvernement britannique
écrivait à propos de la garantie à la Pologne:
«On peut fouiller dans tous ses recoins ce tableau ... quon appelle
lhistoire, sans quil soit possible dy trouver un équivalent à ce renver-
sement soudain et total, par lequel une politique de facilité et dapaise-
ment propitiatoire, vieille de cinq ou six ans, se trouva transformée
presque du jour au lendemain en une sorte dempressement à accepter
une guerre évidemment imminente, dans les plus mauvaises conditions
et sur la plus vaste échelle possible.29)... Notre garantie à la Pologne
[était]... une suite de tournants décisifs menant à la catastrophe...*)
Cétait, au bout du compte, une décision prise au plus mauvais moment,
sur le terrain le moins favorable, et qui devait sûrement provoquer le
massacre de dizaines de millions dhommes.»29)
Churchill reconnaît en outre quil nétait pas le seul, mais que «tout hom-
me politique au fait de la situation» se rendait compte ou laurait dû lors de
la conclusion de laccord, du pouvoir explosif belliqueux de la garantie à la
Pologne.
28) Foreign Relations of the United States Diplomatic Papers, The Conferences at
Cairo and Teheran 1943, doc. 598.
29) W. Churchill, La deuxième guerre mondiale, tome I, livre I, «Dune guerre à lautre»,
pp. 354-355.
*) W. Churchill, The Second World War, vol. I, book I, «The Gathering Storm», p. 271.
30) W. Jedrzejewicz, op. cit., vol. I, pp. 15-16.
334
Et Churchill poursuivait avec instance ses déclarations dans ce sens,
cest-à-dire dans le sens dun durcissement des fronts et de la conclusion
dune convention dalliance sans réserve avec lUnion soviétique.
Le secrétaire dÉtat auprès du ministère des Affaires étrangères allemand,
E. von Weizsäcker, qui fut membre de la résistance clandestine, écrit:
«Si cette garantie navait pas pour objectif de provoquer la guerre, elle
avait bien certainement celui dempêcher une nouvelle révision pacifique
des conditions du diktat de Versailles.»32)
335
Liddell-Hart, le célèbre auteur militaire et historien britannique, reconnaît
que la garantie à la Pologne, telle quelle fut accordée, avait «le pouvoir de
provoquer une guerre», pouvoir encore renforcé par linstauration du service
militaire obligatoire en Angleterre.35)
Russell Grenfell, autre historien britannique, saisissait que:
«Une garantie est en soi un défi. Elle met publiquement un rival au défi
de ne pas en tenir compte et subir les conséquences de ce choix, après
quoi il nest guère possible pour ladversaire denvisager une solution
pacifique de son litige avec le pays bénéficiant de cette garantie, sil ne
veut pas donner limpression davoir cédé au chantage.»36)
35) B.H. Liddell Hart, Warum lernen wir denn nichts aus der Geschichte? p. 56.
36) R. Grenfell, Unconditional Hatred, pp. 86-87.
37) M. Freund, op. cit, vol. II, p. 102.
336
contraire comme en de précédentes occasions déjà il perdit de vue la
mesure de ses possibilités.38)
Peu de jours après la publication de la garantie britannique, le ministre
polonais des Affaires étrangères se rendit à Londres. Après les entretiens
quil y eut du 4 au 6 avril 1939, le Colonel Beck était lui-même «très surpris» de
la manière dont on le «travailla» pour en faire le héros de la résistance contre
lAllemagne.39) Beck déçut les espoirs britanniques «avec son habituelle
arrogance de grande puissance,... il nallait pas se laisser émouvoir par les
aimables invitations de Chamberlain et de Halifax».40) Les espoirs britanniques
déçus par Beck et les suggestions auxquelles il sopposa tout comme les
rumeurs sans fondement sur les mouvements de troupes allemands vers la
frontière polonaise qui avaient été mises en circulation en temps opportun et
dans un but bien déterminé de la même façon que les rumeurs sur les
mouvements de troupes du 21 mai 1938 ne visaient quà refiler le «nain-
jaune» à la Pologne.41) Beck avait très bien enregistré ces manuvres du
Foreign Office: selon Joseph Potocki, chef du secteur occidental du ministère
polonais des Affaires étrangères, Beck considérait ces entretiens comme un
instrument dintimidation contre les Allemands et «les conditions exactes des
accords ne lintéressaient pas».42) Plus concrètement, cétaient les conditions
essentielles plus profondes de Londres qui ne lintéressaient pas.
38) J. F. C. Fuller, The Second World War 1939-1945, A Strategical and Tactical History,
p. 23, (éd. all., Der Zweite Weltkrieg Eine Darstellung seiner Strategie und Taktik,
p. 18).
39) H. Dahms, Roosevelt und der Krieg, p. 30.
40) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 212.
41) ibid., p. 210.
42) E. Raczynski, op. cit, p. 343.
43) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 212, et Documents on British
Foreign Policy 1919-1939, vol. V, doc. 1.
337
lAngleterre montre à quel point cet encerclement serait «défensif»: depuis
1919, la Pologne avait proposé à plusieurs reprises dattaquer lAllemagne
par lEst. Pourtant ou peut-être même de ce fait la Pologne représentait
un atout important dans le jeu britannique. LUnion soviétique avait ouverte-
ment menacé dextermination tous les États non-communistes. Pourtant
ou peut-être même de ce fait la Grande-Bretagne tentait de sassurer son
aide militaire contre lAllemagne.
À quel point ce plan dencerclement était en outre agressif, voilà qui
ressort des entretiens diplomatiques avec le ministre des Affaires étrangères
Beck, à Londres. Lord Halifax ne se contentait pas de ce que Beck avait
accepté de soutenir la Grande-Bretagne en cas dune guerre germano-
britannique. Il voulait que la Pologne prenne part à tout autre conflit dans
lequel lAllemagne serait impliquée. Beck devait aussi revoir son refus dun
soutien soviétique et enfin transformer en pacte anti-allemand le traité
polono-roumain contre lUnion soviétique.44) Beck lui-même refusa dassu-
mer simultanément tant daléas. Lord Halifax se faisait lartisan de cette
politique, tout en sachant et en reconnaissant que ni Hitler ni Mussolini ne
désiraient la guerre.44)
Précisons la situation: le gouvernement britannique poussait le ministre
polonais des Affaires étrangères à léventualité élargie dune guerre possible
et paraphait la garantie réciproque en pleine connaissance du fait que Beck
voulait humilier Hitler et lui imposer des conditions qui ne pouvaient aboutir
quà porter la crise à son paroxysme.45) Chamberlain, de son côté, suivait le
même cours:
«Le Premier ministre [Chamberlain] était daccord sur le fait que les
questions les plus graves (gravest matters) étaient en jeu, lavenir des
deux pays notamment. Il était essentiel quils ne soient pas finalement
confrontés aux deux pires alternatives possibles (that they should not
find themselves left with the worst of both worlds), cest-à-dire davoir
provoqué lAllemagne sans avoir pourvu en même temps à une défense
efficace.»44)
44) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. V, doc. 2 et 10. Protocole dun
entretien entre Chamberlain et Beck à Londres, les 4-6 avril l939.
45) Foreign Relations of the United States 1939, vol. I, p. 118: rapport de Bullitt au
secrétaire dÉtat américain, Hull, du 6 avril 1939.
338
Le chargé daffaires américain à Berlin, Geist, rapporte, le 6 avril 1939, à
propos de lhumeur de lopinion publique et des gouvernements dans les
principales capitales en cette période:
46) D. Hoggan, The Forced War, p. 351 (éd. all., Der erzwungene Krieg, p. 467).
47) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. V, doc. 275.
339
Politique de rumeurs
et dencerclement de mars à août 1939
Les efforts diplomatiques dont nous venons de parler ont joué un rôle
important dans les préparatifs de la seconde guerre mondiale. Il faut y ajou-
ter les rumeurs et diffamations systématiques répandues sur les prétendus
objectifs de la politique étrangère allemande, sur les mouvements des troupes
allemandes, sur les efforts allemands pour larmement, sur les plans alle-
mands de domination mondiale. Après lAnschluß, des diplomates britanni-
ques mirent la Tchécoslovaquie en jeu, ce qui «le [Hitler]surprit».1) De fausses
rumeurs à propos de mouvements de troupes allemands déclenchèrent la crise
de mai 1938: larmée tchèque fut mobilisée et ses effectifs de guerre furent
maintenus un mois encore après le strict démenti de ces rumeurs. Lensemble
des États de lEst, la Roumanie et la Pologne en tête, furent avertis des plans
fictifs doffensive allemands et les États voisins furent instamment invités à
faire savoir sils étaient ou non disposés à sengager dans le conflit armé
imminent. Après la conférence de Munich en 1938, la presse britannique
réservait, sans parcimonie, de larges colonnes au «problème ukrainien» et aux
«ambitions allemandes» en la matière: en même temps, certainement aux fins
dalarmer lUnion soviétique, elle sous-entendait que ce territoire nétait pas
dans la sphère des intérêts britanniques. Dans leurs déclarations, certains
représentants gouvernementaux observaient eux-mêmes cette ligne de
conduite.2) Citons un propagandiste britannique à propos de Staline et de son
allocution devant le 18e Congrès du PCUS, le 10 mars 1939. Staline était
340
«Le bruit qui court dans la presse nord-américaine, française et bri-
tannique concernant lUkraine soviétique est assez significatif. Les re-
présentants de cette presse crièrent à tue-tête que les Allemands se
dirigeaient vers lUkraine soviétique, quils détenaient déjà lUkraine
dite carpatique, comptant environ 700 000 habitants, et que les Alle-
mands réaliseraient au plus tard au printemps courant lannexion de
lUkraine soviétique, avec plus de 30 millions dhabitants, à ladite
Ukraine carpatique. Il semblerait que ces rumeurs suspectes aient pour
objectif dexciter la colère de lUnion soviétique contre lAllemagne,
dempoisonner latmosphère et de provoquer ainsi un conflit avec
lAllemagne, sans en donner des motifs évidents...
Plus caractéristique encore est le fait que certains hommes politiques
et représentants de la presse en Europe et aux États-Unis dAmérique,
devant lexpectative dune campagne contre lUkraine soviétique, aient
perdu patience et se soient décidés à dévoiler les dessous réels de la
politique de non-ingérence. Ils déclarent ouvertement, noir sur blanc,
être fort déçus des Allemands, étant donné quau lieu de poursuivre
leur avance plus à lEst, contre lUnion soviétique, ils se tournent
pensez donc! vers lOuest et exigent des colonies...»4)
341
Ainsi, la Pologne reçut à elle seule pendant lété 1939 un minimum de 49
informations prétendues secrètes quant à une agression imminente, infor-
mations chaque fois liées à la question de connaître ses intentions en la
matière. Dès mars 1939, les journaux polonais durent «mettre en garde contre
la diffusion de rumeurs qui inquiètent la population. Des arrestations de
semeurs de panique ont lieu continuellement».7)
Début juillet 1939, le ministre polonais des Affaires étrangères répondit à
lambassadeur britannique à Varsovie:
342
allemande est prête à marcher. Létat-major général français apprend de
source suisse que le Reich dresse les plans dune attaque surprise contre
la France.»10)
e) «Malgré les rumeurs sur les projets allemands portant sur linvasion
de lUkraine et de la Hollande, de la Suisse et de la Roumanie...»12)
Maiskii a très bien saisi ces pointes, lancées sans explications, parce que,
par de nombreux autres indices, il nétait pas sans savoir que Halifax agissait
en vue dimpliquer lUnion soviétique dans ces «mois perturbés», au lieu de
prendre des mesures pour détendre latmosphère.17) Au cours dun entretien
343
antérieur, le 22 mai 1939, à Genève, Maiskii sétait déjà vu contraint de répondre
à Halifax que visiblement, lui, Halifax, appréciait fort mal la psychologie dun
homme tel que Hitler.
«Il est loin dêtre un sot. Hitler ne se lancera jamais dans une guerre
sil pense quil pourrait la perdre. Nos négociations actuelles le poussent
même à une certaine réserve, le fait est quil na toujours pas attaqué la
Pologne. Mais si notre accord de soutien tripartite était conclu, il
serait bien contraint de reculer.»18)
344
Moscou visant à impliquer militairement lUnion soviétique en Europe centrale.
Ainsi, la puissance qui aurait dû représenter la plus grande menace à lordre
social et politique en Europe aux yeux de tout européen perspicace fut-elle
invitée à se mêler des litiges des nations européennes, litiges dont limportance
était comparativement ridicule. Le gouvernenement britannique promit aux
Pays-Bas, à la Suisse, à la Roumanie et à la Grèce de garantir leur indépendance;
il tenta dintégrer la Turquie et la Yougoslavie, se déroba aux efforts de
pacification germano-italiens, exigea, en exerçant une forte pression, en avril
1939, que la Suède se joignît à un blocus contre lAllemagne en cas de guerre,
et réaffirma la «déclaration morale de guerre» de Roosevelt (requête du 15 avril
1939 à Hitler et à Mussolini de promettre la non-agression à toute une série
détats et même à lextérieur de lEurope).20)
345
France avaient déjà entamé lintégration de lUnion soviétique à la coalition
anti-allemande.
Chamberlain introduisit le service militaire sans que lAllemagne ne lui en
fournît aucune raison et sans en référer au Parlement; il «justifia cette étape
décisive vers la guerre» en prétextant quil voulait éviter quon lui reproche
davoir uniquement repoussé lavance de Hitler sans plus.23) Le fait que le
gouvernement britannique ait refusé létablissement du service militaire en
1937 en faisant remarquer «que les troupes étaient bien mieux préparées à
entrer en action quen 1914» et «que les guerres ne se gagnaient pas seulement
par les armes et les soldats, mais plutôt avec des réserves de sources auxiliaires
et de crédits»,24) prouve limportance quattachait Chamberlain à cette
démarche. Lindustrie britannique ne devait pas être affaiblie et selon les
déclarations catégoriques de 1937 le service militaire ne devait être établi
quaprès lentrée dans la «phase définitive dapproche de la guerre».24)
En mars 1939 les cercles dirigeants avaient averti Chamberlain quil ne
devait donner aucune occasion à lAllemagne de se sentir encerclée et quil
fallait donc se garder «de mettre en jeu la Russie, ce qui pourrait provoquer
une guerre immédiatement». Quelle fut lattitude de Chamberlain devant ces
avertissements? Le 26 mars 1939 il professait:
23) K. Feiling, The Life of Neville Chamberlain, p. 405, et M. Freund, op. cit., vol. II,
p. 178.
24) K. Feiling, ibid., pp. 318-319.
25) ibid., pp. 403, 408, 407.
26) I. M. Maiskii, op. cit., p. 95.
346
des manuvriers dopinion de la presse), de chefs de parti et du Foreign Of-
fice. Il en assumait toutefois la responsabilité. Il connaissait lui aussi, tout
comme Lord Halifax et le gouvernement français, les menaces qui pesaient sur
la Pologne et la Roumanie, menaces engendrées par la politique britannique.
Dans ses mémoires, Halifax les résume franchement en ces termes:
Si Halifax avait confirmé, le 1er novembre 1938, dans une lettre à son
ambassadeur à Paris, Phipps, «que la Pologne ne pourra jamais sallier à la
Russie soviétique»,28) et si, devant la crise des Sudètes, ces thèmes avaient
déjà été débattus en détail à Paris en mai 1938,29) les entretiens de Beck à
Londres, début avril 1939, eurent pour conséquence de raviver la crainte des
Polonais non à légard de lAllemagne mais plutôt à celui des Soviétiques.
Malgré cette situation, Chamberlain et Halifax cherchaient continuellement
à persuader leur partenaire polonais de la «menace allemande» et tentèrent de
lui imposer laide soviétique, agissant ainsi nettement contre les intérêts
vitaux de la Pologne.
Sans aucun égard pour les parties concernées, et bien que nétant pas
membre du gouvernement à lépoque, Churchill tenta de faire accorder à
lArmée rouge un droit de passage à travers les pays de lEurope de lEst.
«Ce quil faut surtout, cest ne pas perdre de temps. Dix ou douze
jours se sont déjà écoulés depuis que la proposition soviétique a été
faite. Le peuple britannique, consentant au sacrifice de coutumes séculai-
res et profondément enracinées, accepte désormais le principe du service
obligatoire, et a le droit, de concert avec la république française, dexiger
de la Pologne quelle ne fasse rien qui soit de nature à nuire aux intérêts
de la cause commune. Non seulement il nous faut accepter la coopération
totale de la Russie, mais les trois États baltes, la Lituanie, la Lettonie et
lEstonie, doivent également faire partie de cette association.»30)
347
Le 18 mai 1939, Churchill appela lambassadeur soviétique:
«Cest grand dommage de ne pas lavoir placé [Hitler] alors dans cette
position fausse qui aurait pu lui coûter la vie...
Si par exemple M. Chamberlain, au reçu de loffre russe, avait ré-
pondu: Oui, liguons-nous tous les trois contre Hitler pour lui tordre le
cou ou quelque chose dans ce sens, le Parlement aurait approuvé, Stali-
ne aurait compris et le cours des événements aurait pu en être changé.»32)
348
loccasion du congrès de la Société des Nations à Genève, le 22 mai 1939, Lord
Halifax tenta une fois de plus damener lambassadeur soviétique à accepter la
proposition britannique sur laccord des garanties soviétiques aux pays est-
européens et de le convaincre du risque que comportait une véritable alliance
militaire dassistance mutuelle.
«Halifax comptait mintimider tout à coup: un tel pacte [le pacte tripar-
tite dassistance mutuelle, proposé par lUnion soviétique, concernant
tous les États dEurope orientale] pourrait mettre Hitler en rage, il com-
mencerait à vociférer sur le thème dun encerclement de lAllemagne et,
avec ce slogan, à rassembler tout le peuple allemand autour de lui et à
déclencher la guerre. Nous provoquerions ainsi ce que précisément nos
mesures visaient à empêcher.»34)
Mais, en juillet 1939, alors que «Hitler avait déjà effectué de nombreux
petits reculs diplomatiques»,35) le gouvernement britannique était déjà revenu
sur son jugement, voire sur ses scrupules. Au cours de la seconde moitié de
juillet 1939, un accord politique entre la Grande-Bretagne, la France et lUnion
soviétique amorça des pourparlers militaires à caractère offensif.
Cet accord du 24 juillet, qui devait entrer en vigueur après la conclusion
dune convention militaire, engageait la Grande-Bretagne, la France et
lUnion soviétique à sapporter une assistance mutuelle immédiate en cas de
guerre (sans attendre les démarches de la Société des Nations): soit en cas
dagression directe ou «indirecte» de lAllemagne contre lune des puissances
signataires ou «contre un autre État européen» au cas où une «partie inté-
ressée» considérerait quune action quelconque (même une unification pacifi-
que) représentait une «menace» pour lindépendance ou la neutralité de cet
État et aurait à y «répondre» militairement.
Ainsi formulé, ce texte daccord permettrait à toute «partie intéressée» de
se baser sur nimporte quel cas et de linterpréter comme «neutralité me-
nacée» ou «indépendance menacée» ou comme «agression indirecte» ou
encore «menace de violence», même si les pays concernés refusaient une telle
«interprétation». Selon le texte de cet accord, une guerre européenne et en
conséquence une guerre mondiale pourrait être déclenchée, par exemple, si
«une partie intéressée» qualifiait la cession volontaire de Dantzig de la Pologne
à lAllemagne ou encore un contrat économique germano-roumain ou un
soutien moral (pas même matériel) de lAllemagne aux partis de droite finlandais,
349
lituaniens, lettons ou estoniens, de «neutralité menacée» ou d«agression
indirecte».
Si le projet dabord discuté entre la Grande-Bretagne et la France, avait
déjà été formulé le 17 juin 1939, de manière que tout État dEurope, si petit
soit-il, ait pu se confronter à lAllemagne et déclencher une guerre sur tous
les fronts, cet accord politique avec les Soviétiques ne demandait alors
même plus un affrontement de lAllemagne avec lun de ses voisins. Selon
le texte de cet accord, le gouvernement du Reich aurait pu adopter nimporte
quelle attitude: même ses efforts de rapprochement amical avec ses voisins
déclencheraient lautomatisme des alliances militaires adverses. Lavis des
voisins était déclaré nul. Et, comme écrivit Kennard de Varsovie:
Ce fait nintéressait nullement Londres. Dès lors, seule lopinion dune des
«parties intéressées», cest-à-dire celle de la Grande-Bretagne, de la France ou
de lUnion soviétique, était valable.37)
«Les Français pensaient de façon plus pratique. Une seule chose les
intéressait: enrôler lArmée rouge dans un conflit avec Hitler, et peu leur
importait que ce fût aux dépens de la Pologne.»39)
36) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 90, Kennard à Halifax le
20 août 1939.
37) Rönnefarth, Helmut K. G., Konferenzen und Verträge: Vertrags-Ploetz, pp. 171-172.
38) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 130.
39) A.J.P. Taylor, op. cit., p. 258.
40) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 94.
350
Roumanie, sans le consentement des gouvernements des pays concernés.41) Il
est extrêmement important de remarquer que cet accord politique du 24 juillet
1939 et la convention militaire envisagée néchouèrent pas du fait des scrupules
de la Grande-Bretagne ou de la France, mais bien à cause du refus de Staline de
sortir les marrons du feu pour la Grande-Bretagne et dentrer en Pologne, en
Roumanie, en Lituanie, en Lettonie et Estonie sans laccord de ces États, alors
que la Grande-Bretagne ne laissait entrevoir que deux divisions de soutien
pour ce cas.41)
Ainsi, Chamberlain qui, dès avril 1939, parlait d«une zone ni de guerre, ni
de paix»42) na pas seulement rendu la situation européenne plus tendue, mais,
à partir du 9 mars et au plus tard à partir de la mi-juillet 1939, la aussi rendue
sans issue. Dailleurs, il ne croyait pas lui-même à la sauvegarde de la paix par
une alliance avec lUnion soviétique.43) Mi-juillet 1939, il définit son attitude à
ce sujet:
Par conséquent, cette solution «ne suffisait pas»! Le 1er septembre 1939, il
complétait devant les Communes:
351
Chamberlain a ainsi reconnu sans équivoque que, bien avant le litige de
Dantzig, le gouvernement britannique sétait fixé un cours qui prévoyait
l«extermination du régime nazi» du fait de la «politique étrangère de Hitler en
1938». Londres sadjugeait le droit de déterminer quelle forme de gouver-
nement pouvait se donner un autre État, avec lequel il entretenait des relations
diplomatiques. En fait, on «ne peut trouver trace de motifs idéologiques» dans
lattitude de Chamberlain.44) Oui, Chamberlain savait et reconnaissait que
Hitler avait sérieusement élaboré un accord avec lAngleterre ainsi quun
règlement généreux et pour une durée illimitée avec la Pologne.46)
«La manière dont fut traitée lAllemagne par le passé nétait ni géné-
reuse, ni sage: aussi longtemps que loccasion ne sera pas donnée à ce
peuple fort et viril daméliorer le sort commun en coopération avec les
tiers, on ne connaîtra en Europe ni la paix, ni le progrès, pour ce quil
en est des choses qui rendent la vie digne dêtre vécue.»48)
352
guerre en Grande-Bretagne. Bien que cette loi nait finalement pas porté de
fruits, elle a donné une impulsion psychologique importante à la Pologne,
dautant plus que linspecteur général de larmée britannique, le général
Ironside, arrivait le 19 juillet 1939 à Varsovie pour des consultations
complémentaires détat-major,50) et que, le 3 août, Londres garantissait un
crédit de 8,163 millions de livres à la Pologne pour lachat de marchandi-
ses au Royaume-Uni.50)
Lambassadeur britannique à Berlin était bien au fait de lattitude officielle
et, dans une large mesure également, des processus internes de la capitale
du Reich. Il adressa une première mise en garde à son ministre des Affaires
étrangères. Il se basait pour cela sur ses impressions tirées de la presse
internationale et sur la connaissance des procédés de la diplomatie britanni-
que secrète au cours des mois dété 1939. Dans cette note du 18 juillet
1939, Henderson reprochait à son gouvernement, en des termes assez directs,
de poursuivre rien de moins quune politique belliqueuse:
«Il est fort concevable quun jour les sages diront que nous aurions
dû livrer la guerre à lAllemagne en 1939, comme beaucoup disent
aujourdhui que nous aurions dû le faire en 1938 (that we should have
made war on Germany in 1939, just as many now say that we should
have done so in 1938). Mais tant que lon ne maura pas informé du
contraire, mon avis repose sur le principe que nous voulons si possible
éviter la guerre.
Ceci garanti, notre politique doit, à mes yeux, faire preuve de la plus
grande fermeté pour éviter tout ce qui pourrait être interprété comme
provocation délibérée ou comme lintention de notre part doser lancer
une guerre préventive, ou comme le ferme propos dhumilier person-
nellement Hitler. Si nous lacculons, il ne sera plus en mesure de se
libérer sans guerre...
Hitler peut bien penser que lAngleterre veut la guerre avec lAlle-
magne quoi quil arrive. Et sil nen a pas encore la conviction, il nen
faut pas tant pour len convaincre. Il a lavantage de pouvoir prendre
linitiative où et quand il le désire, sil en est convaincu. Et honnêtement
(honestly) je nestime pas quil soit politiquement sage, voire loyal,
démouvoir la Pologne excessivement (unduly)...
Tant de personnes, tels Otto Strasser et autres de même orientation,
cherchent avec un rare acharnement à nous acculer à une guerre avec
lAllemagne. Je redoute parfois que leur campagne visant à cette issue
ninfluence outre mesure les conseillers de chez nous.»51)
50) D. M. Projektor, «La Guerre en Europe 1939-1941», éd. russe, p. 35, et A. Buckreis,
op. cit., p. 221.
51) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VI, doc. 347.
353
Rien dans cette lettre confidentielle nindiquait que Hitler aurait fait peser
une menace sur la Grande-Bretagne ou tout autre pays avec pour motif la
«conquête de lespace vital» ou que Hitler aurait eu lintention de «faire la
guerre». En fait, Hitler avait bien peu contribué à la «marche des événements
diplomatiques» entre avril et août 1939.52)
Le 8 août 1939, le journal britannique Daily Mail remarque labsence
354
tefois entraînerait des obligations bien définies pour les grandes puis-
sances, qui doivent veiller à ce que, par la garantie de certains droits
fondamentaux politiques et humains, la stabilisation de cet espace, dans
lequel elles ont établi un nouvel ordre durable, ne soit pas menacée. Ces
obligations des principales grandes puissances seraient évidemment
étroitement liées à leur devoir envers les nations vaincues. La sauvegarde
de la stabilité interne et de la paix dans la région orientale de lEurope
centrale, grâce à une protection des minorités internationalement garan-
tie, devrait occuper un rang prioritaire.»55)
Mais ceci semblait être oublié depuis longtemps. Reconnaître que les
plaintes des minorités allemandes étaient justifiées était désormais qualifié
de «trahison envers les intérêts nationaux de la Pologne», de «menace de la
liberté et de lindépendance de la Pologne». Les désirs polonais dannexion de
la Prusse orientale et des régions de lOder étaient à présent tolérés, voire
approuvés en secret.56) Entre-temps, les Britanniques avaient coutume de
qualifier la persécution des Allemands de souche en Pologne de «point de
moindre importance».57) En faisant remarquer que les «Polonais nadmettraient
jamais que quiconque leur envoie un Runciman»,58) on disqualifiait aisément
les plaintes allemandes sans les approfondir ou tenter de faire cesser la po-
litique polonaise de «dégermanisation». En même temps, Londres simmisçait
pourtant dans les relations germano-polonaises, en imposant à la Pologne
une garantie sans réserve, dirigée toutefois exclusivement contre lAllema-
gne. Ni la Grande-Bretagne, ni les États-Unis nont fait le moindre pas pour
freiner les débordements du chauvinisme polonais qui duraient depuis des
mois si ce nest une tentative superficielle de Londres, à la veille du dé-
clenchement de la guerre.
Sans doute, les trois citations suivantes concernent-elles la Tchécoslo-
vaquie, mais elles sappliquent avec la même pertinence à la politique fran-
co-britannique à légard de la Pologne jusquau déclenchement de la guerre
en 1939:
Le 22 mai 1938 Lord Halifax déclarait à lambassadeur allemand von Dirksen
355
[qui rapporte à son ministre des Affaires étrangères]:
On voit donc quil est juste dappliquer ces trois citations au cas de la
Pologne, en 1939, dautant plus:
356
Mais, comme on devait le constater, le gouvernement de Londres nétait
précisément pas indifférent. Il ne sagissait évidemment pour lui ni de Dant-
zig, ni du Corridor, mais d«exterminer» ou écarter la «pestilence nazie»
cest-à-dire le concurrent allemand, selon les «principes» de la politique eu-
ropéenne britannique.
Pendant toute lannée 1939, la Grande-Bretagne ne contribua nullement à
la détente de la situation européenne de plus en plus critique, mais elle prit au
contraire plusieurs mesures désastreuses. Comme il est dit plus haut, même
lambassadeur britannique Henderson ne put réprimer ses scrupules face à
une telle politique. Le 23 mai 1939, il écrit à son collaborateur de longue date,
Kirkpatrick:
Henderson avait évidemment été laissé dans lignorance du fait que, deux
jours plus tôt, le 21 mai, à Genève, son ministre des Affaires étrangères,
Halifax, avait à nouveau clairement exposé ses «propositions» à Carl J. Burc-
khardt:
357
situation émotionnelle ici, la possibilité de certaines actions impulsives
ne doit absolument pas être écartée.»66)
«Jai fait comprendre à ces gens [les Polonais] que Hitler semble
présentement encore indécis et quil est donc essentiel quaucun inci-
dent, que pas un mot dans la presse et quaucun cas de mauvais traite-
ment des minorités ne puisse lui donner prétexte à foncer tête baissée (to
go off the deep end...)...
Jai évoqué devant mon collègue américain qui jouit ici dune forte
influence, quil serait bon de souligner quaux yeux de lopinion publique
américaine, il pourrait savérer bien désavantageux pour la Pologne que
Hitler présente une longue liste de mauvais traitements de la minorité
allemande ou puisse prouver dune manière quelconque que la Pologne
sest conduite de façon déraisonnable...
Vous pouvez être assuré que je ferai de mon mieux pour contenir
lémotion extrême ici, mais on ne peut naturellement pas exercer trop
de pression sur eux [les Polonais] en fait, cela serait inutile.» 68)
358
sabilité. Lhistoire condamnera la presse en général davoir été la cause
principale de la guerre...
Je suis convaincu que Hitler dit la vérité quand il déclare devoir retenir
ses généraux cette année. Que vous le croyiez ou non, de tous les
Allemands Hitler est le plus modéré en ce qui concerne Dantzig et le
Corridor...
Si une trêve doit être instaurée et cest le dernier espoir il faut
mettre terme aux sévices infligés aux minorités allemandes en Pologne.
Je souhaiterais que certains journaux anglais y envoient des correspon-
dants afin de leur permettre de sinformer eux-mêmes et de vous infor-
mer ensuite. Weizsäcker, avec amertume, ma déjà assez pressé en la
matière. Notre ambassade à Varsovie ne sait rien tout comme moi
dailleurs de ce qui se passe dans les provinces allemandes. Comment
le pourrait-elle? Varsovie et sa clique civilisée et intelligente, pour ne
pas dire astucieuse, que lon fréquente, est une chose. Mais, à lextérieur,
à la campagne, les Polonais constituent une masse extrêmement peu ci-
vilisée. Calmes et réservés. Oui, sans aucun doute, dans les hautes
sphères, et si ces mots ont un sens. Mais dautre part, non. Jai trop
entendu dhistoires de neutres bien disposés pour en croire un seul
mot.»69)
359
Hitler lors de son entretien avec Henderson le 25 août».71) Une nouvelle fois
la Pologne avait marqué sa préférence malencontreuse de recourir à la «violence
ou à la menace» comme méthode pour atteindre ses objectifs politiques. Ce
recours continu peut être démontré depuis la nouvelle formation de lÉtat
polonais à partir de 1918.72)
Lambassadeur britannique, Henderson, ne fut pas le seul à sémouvoir
singulièrement à la nouvelle que Hitler acceptait, même encore le 29 août,
de négocier un échange de populations avec la Pologne.73) Visiblement il
navait aucune connaissance du fait que, dès lété 1939, Berlin avait conseillé
aux chefs de famille allemands liés au régime denvoyer leurs femmes et
enfants en Allemagne.
«Si la guerre est fatale, elle viendra. Mais ce sera la plus stupide des
guerres et lhistoire expliquera que le monde était devenu complètement
fou...
Je suis convaincu et je le redoute que les Polonais essuieront des
coups atroces et il mest difficile dimaginer ce quils pourraient y gagner
en vérité. Lextension de leurs frontières néquivaudra certainement quà
des querelles réciproques pour les générations futures. Je prie pour que
nous nayons pas à regretter de les avoir menés en bateau à ce point,
uniquement pour éprouver le plaisir davoir envoyé quelques coups de
pieds dans les tibias de Hitler et des gangsters nazis.»76)
360
L’extension du chèque en blanc du 25 août 1939
361
position où la Grande-Bretagne s’était elle-même placée, il aurait été in-
dispensable de s’efforcer intensivement à arbitrer objectivement les diver-
gences d’opinion et à endiguer toutes les menaces (mobilisation, articles
incendiaires dans la presse, entre autres). Mais rien de tel. Chamberlain n’a
pas refréné la presse britannique, dont il affirmait que sa ligne de conduite
«signifiait évidemment la guerre». Il n’a même pas essayé de la refréner. Au
contraire. En ce mémorable 24 août 1939, Chamberlain a, de son côté aussi,
sciemment fourni des informations trompeuses aux députés de la Chambre
et livré ainsi à la presse de nouveaux slogans incendiaires qui «signifiaient
évidemment la guerre». Il déclarait notamment dans ce discours:
362
«La dégradation continue de la situation internationale» au cours des der-
niers mois ne permit toutefois pas à Chamberlain de réviser la politique
britannique: il mettait d’ailleurs en garde contre «des illusions si dangereuses».
Alors que Chamberlain citait exclusivement la «presse allemande» et l’assimilait
à «Berlin», il cachait aux députés que Hitler n’avait jamais jusqu’à ce jour exigé
«le retour inconditionnel et immédiat de Dantzig au Reich» et avait dans
l’ensemble fait preuve d’«une grande tranquillité et de réserve». Tandis que,
le 24 mars 1939, Lord Halifax faisait devant la Chambre des Lords une distinction
capitale entre «la presse polonaise agressive» et «l’attitude du gouvernement
polonais», Chamberlain ne reconnaissait plus une telle différence entre le
gouvernement allemand et la presse allemande. Pourtant la Pologne était régie
de façon tout aussi autoritaire et la presse polonaise – bien que basée sur des
fondements différents de ceux de l’Allemagne – était rigoureusement cen-
surée. De même, Chamberlain informait bien les députés de la Chambre des
Communes des préparatifs militaires en Allemagne, mais en revanche il ne
disait pas un mot des préparatifs en Pologne. C’était mentir de prétendre que
les dirigeants polonais n’étaient pas provocants et qu’ils avaient été, comme
ils l’étaient «encore à présent», prêts à «discuter des différends avec le
gouvernement allemand». Certes, jusqu’en janvier 1939, la Pologne avait été
disposée à de telles discussions – jusqu’à ce que Londres s’en mêle, le
gouvernement britannique «craignant» que la Pologne et l’Allemagne puissent
s’allier.4) Sa garantie sans réserve imposée à la Pologne – qui ne la souhaitait
même pas à l’origine – eut visiblement pour résultat que la Pologne n’était
plus disposée dès lors à «discuter de ses différends avec le gouvernement du
Reich allemand». Ce contexte était tellement évident – et Chamberlain avait eu
cinq mois pour l’étudier en détail – qu’il devait en être conscient ce 24 août. Et,
à la fin du mois de mars 1939, Chamberlain devait savoir que, sous la menace
d’une guerre, la Pologne avait refusé tout entretien avec le gouvernement du
Reich, tout comme il devait être au courant du fait que les rapports de presse
allemands de septembre 1938 sur les mauvais traitements infligés aux Allemands
des Sudètes par les Tchèques étaient fondés, l’ambassadeur extraordinaire,
Runciman, l’ayant confirmé depuis longtemps.5)
Tous ces mensonges et omissions ne pouvaient conduire qu’à pousser à
son paroxysme la crise internationale. D’autant plus que, dans son discours,
4) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 207 et J. Colvin, Vansittart in
Office, p. 301.
5) «Documents et matériaux traitant de la période précédant la seconde guerre mondiale
1937-1939», éd. russe, vol. I, 1937-1938, p. 226 seq.
363
Chamberlain n’avait pas jugé utile d’aborder la question de savoir comment
on pourrait «arranger les choses» par le biais d’une solution politique ou
diplomatique.
Il déclarait, bien au contraire:
«ne douta pas un seul instant que toute tentative d’arranger les
choses était hors de question depuis la conclusion de l’accord germano-
soviétique (had been out of the question).»7)
Son Premier ministre venait juste de reconnaître – sans pour autant saisir
cette occasion – qu’à Berlin cet accord germano-soviétique était salué comme
un pacte excluant la guerre et que la Grande-Bretagne avait été sollicitée pour
y mettre du sien et faire tout ce qui était en son pouvoir en vue d’éviter le
conflit. Halifax, par contre, croyait, selon la sentence:
364
franchise, on fit entendre aux diplomates «amis» que dès lors il fallait penser à
«l’inéluctabilité d’une guerre avec l’Allemagne». Cette position était bien de
nature à encourager à de nouvelles provocations les Polonais, «dont les
puissances occidentales sous-estimaient le courage et la pugnacité».10) Des
cercles non officiels mais très influents entouraient Lord Halifax.
L’ambassadeur de Pologne à Londres, Raczynski, rapporte à ce sujet:
Et les répercussions?
Ses arrières assurés par ces forces, Lord Halifax entreprit, au cours des
ultimes journées de paix, une nouvelle opération que les historiens qualifient
365
d’habitude de «malhonnête»13) (voir dans le présent ouvrage le chapitre «Les
derniers jours de paix»).
Bien que, depuis un an, le gouvernement britannique eût été régulièrement
mis en garde par ses propres diplomates contre l’entêtement des Polonais,14) il
n’a pas remis en question sa garantie sans réserve, même au cas où la Pologne
refuserait les négociations. Cette menace ne fut évoquée qu’une seule fois:
lors de la visite à Londres du ministre polonais des Affaires étrangères, du 4
au 6 avril 1939, Beck ne se déclarant pas disposé à conclure un pacte
d’assistance avec la Roumanie. Ce pacte devait être appliqué tant en cas
d’attaque de l’Allemagne contre la Pologne qu’en cas d’attaque de la Hongrie
contre la Roumanie.15) En d’autres termes:
13) A.J.P. Taylor, op. cit., p. 272, et D. Hoggan, The Forced War, pp. 605-606 (éd. all.,
p. 719).
14) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 110: Kennard à
Halifax, le 16 février 1939.
15) Foreign Relations of the United States 1939, vol. I, p. 117: Bullitt à Hull, le 6 avril
1939.
16) ibid., p. 112: Kennedy à Hull, le 5 avril 1939.
17) ibid., p. 211: Biddle à Beck, le 11 août 1939.
18) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 206 et 227.
366
polonais avait pris «des mesures militaires extrêmement graves conduisant à
la mobilisation des deux tiers de l’armée polonaise».18) Malgré ces nouvelles
alarmantes, le gouvernement britannique étendit de son propre chef, le 25
août, la garantie à la Pologne aux cas «de menace indirecte contre l’indépen-
dance» et de «menace contre la neutralité» des pays suivants: Belgique, Hol-
lande, Lituanie, Estonie, Lettonie – évidemment pour le seul cas où la
menace proviendrait de l’Allemagne. Quelques jours auparavant, le gouver-
nement se proposait encore de vendre la Pologne, ou plutôt la Pologne
orientale, ainsi que les États baltes, à l’Union soviétique. Il n’entrait donc
pas réellement dans les visées de l’Angleterre de garantir l’indépendance ou
la neutralité de ces États. Ce passage de la garantie élargie à la Pologne
devait donc viser un autre objectif que celui qu’on proclamait. L’accord en-
globait en outre l’obligation de ne conclure aucun armistice ou paix séparée,
clause qui jusque-là n’était d’usage que pour les accords entre belligérants.
Une autre innovation de cet accord du 25 août était le fait que Chamberlain
et Halifax approuvaient le soutien sans réserve de la Grande-Bretagne alors
que le texte publié ne mentionnait aucunement ce que cela pouvait signifier.
Dans un accord secret complémentaire, il fut toutefois signifié à la Pologne
qu’il s’agissait là de la Ville libre de Dantzig.
19) M. Gilbert et R. Gott, The Appeasers, p. 261; cf. le projet d’accord du 10 août 1939 dans
Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VI, doc. 613, surtout Art. 3, qui
considère aussi «des procédés de pénétration économique» comme «des tentatives de
miner l’indépendance de la Pologne.»
367
Londres n’était nullement inquiète de l’indépendance et de la situation des
biens de la Pologne. Churchill reconnaîtrait plus tard:
368
Objectif de la guerre: l’anéantissement de l’Allemagne
En tant que «protectrice des petites nations», l’Angleterre avait tenté, dès
le printemps 1939, par le biais de garanties, de fausses alertes, d’interpella-
tions et d’encouragements, de mettre la volonté des petites nations au pas,
d’une façon qui ne pouvait qu’accroître l’insécurité et les dangers. Pourquoi
Paris et Londres, dans leur aparté avec Moscou, avaient-elles pratiquement
offert à Staline les Pays Baltes et la Pologne orientale en guise de mise? Halifax
«avait parfaitement reconnu les inconvénients et les risques qu’impliquerait
l’admission des troupes soviétiques en territoire polonais».1) La déclaration
unilatérale de guerre à l’Allemagne au cours de la campagne polonaise, déjà
déterminée dans une clause secrète supplémentaire de l’accord anglo-polonais
[d’assistance mutuelle], prouve qu’il ne s’agissait aucunement de principes
éthiques. L’attitude ultérieure du gouvernement britannique et en particulier
sa coopération militaire avec l’Union soviétique et la capitulation devant
Staline lors des conférences de Moscou, Téhéran, Yalta et Potsdam, accrurent
encore les dimensions de ce déracinement moral. Il suffit de comparer le
volume des transferts de territoires accordés sans discussion aux Soviétiques
par les Alliés occidentaux (suprématie sur toute l’Europe orientale et les
Balkans, participation au pouvoir en Méditerranée et au Proche-Orient) avec
le désir du retour de Dantzig au Reich allemand, pris par ces mêmes puissances
comme prétexte d’une seconde guerre mondiale.
Nonobstant cet arrière-plan, Lord Halifax prétendait lutter pour les droits
de l’homme, la paix, les principes d’idéal, et déclarait, le 7 novembre 1939,
à l’antenne de la BBC à Londres:
369
l’Allemagne. À Londres, «droit», «égalité», «dignité personnelle» devaient
servir à l’«équilibre européen», c’est-à-dire aux intérêts de la puissance bri-
tannique. Une comparaison s’impose entre les objectifs de la guerre pro-
clamés ultérieurement et la pratique. Alors qu’on venait tout juste de déclarer
encore ouvertement que l’on serait entré en guerre contre l’Allemagne pré-
cisément à cause de la forme de son gouvernement, la Charte de l’Atlantique
établissait que tout peuple pouvait choisir la forme de gouvernement qu’il
désirait. Aucun des postulats dressés au cours des conférences de guerre des
Alliés ne fut pris en considération dès lors qu’il s’agissait de l’Allemagne,
mais aussi de la Pologne et des autres pays d’Europe orientale.
Le 31 août 1939, à la veille donc de la campagne de Pologne, Vansittart,
premier conseiller du ministre des Affaires étrangères britannique, «tremblant
d’excitation», déclarait à un résistant allemand:
«Cette guerre est une guerre britannique et son objectif est l’anéantis-
sement de l’Allemagne.»4)
«Ce n’est pas une question de lutte pour Dantzig ou la Pologne. Nous
luttons pour délivrer le monde entier de cette peste de tyrannie nazie et
pour défendre en particulier ce que l’homme a de plus sacré.»5)
370
Si l’objectif de la politique de Hitler avait été de délivrer «le monde entier»
de cette «peste de tyrannie britannique» et ainsi de «défendre tout ce que
l’homme a de plus sacré» – à quelles accusations ne se serait-il pas exposé?
Quelques semaines après le début de la guerre, le feld-maréchal britannique,
Lord Milne, mettait en garde:
371
promptitude avec laquelle notre gouvernement agit en vue d’enrayer et
de dissiper la diffusion du sentiment pour la “paix à tout prix”, qui avait
pour base les rumeurs de toutes sortes autour de ce que Welles pourrait
faire en Europe en vue de parvenir à une paix négociée, qui équivaudrait
à une victoire allemande.
Il disait que les efforts visant à établir une paix négociée pourraient
causer du tort à la situation militaire britannique et française.»8)
«Le futur traité de paix doit être bien plus dur et impitoyable que celui
de Versailles. Nous ne pouvons faire aucune différence entre Hitler et la
nation allemande. Après la victoire, les supplications des Allemands,
alléguant que bien peu d’entre eux, ou que seul le gouvernement de
Hitler, auraient commis ces crimes, ne doivent plus nous influencer. Nous
devons prendre Hitler au mot quand il déclare “être la nation allemande”.»9)
«Hitler n’est pas un caprice du hasard. Il est le produit d’une race qui,
depuis la nuit des temps, a la réputation d’être rapace et belliqueuse...
Par la grâce de Dieu et pour la sauvegarde de l’humanité, nous libé-
rerons la terre de l’Allemagne et l’Allemagne d’elle-même.»10)
372
Et dans une lettre à Staline du 24 janvier 1944:
«Nous n’avons jamais pensé à faire une paix séparée, même en cette
année où nous étions seuls et aurions pu aisément conclure une telle paix
sans dommages graves pour l’Empire britannique, et ce surtout à vos
[Staline] dépens. Pourquoi donc devrions-nous changer d’avis main-
tenant, alors que, pour nous trois, la conclusion victorieuse de cette
affaire est proche?»13)
373
La menace de Churchill d’extirper la tyrannie nazie ne pouvait certes
pas convaincre les Allemands que cette tyrannie était nécessairement
néfaste pour eux: au contraire, ils la considéraient comme une grande
réussite puisque les ennemis de l’Allemagne étaient si décidés à
l’anéantir....»14)
Et qu’écrivit Churchill après la fin de la guerre, dans ses mémoires, sur ses
objectifs de rage aveugle et ceux de ses Alliés?
374
«affaiblissement permanent de la puissance allemande en Europe centrale».16)
Juste après sa démission en tant que président tchèque, en octobre 1938,
Édouard Bénès alla jusqu’à proposer qu’au moins 800 000 à un million
d’Allemands des Sudètes, principalement l’intelligentsia et la bourgeoisie,
soient expulsés de leur patrie.17)
L’Allemagne ne devait plus avoir le droit de revendiquer aucun titre juridique
de droit international. Churchill définissait cet objectif en ces termes:
«Par les mots “reddition sans condition”, je veux dire que les Allemands
n’auront aucun droit à un traitement particulier quel qu’il soit. La Charte
de l’Atlantique, par exemple, ne leur sera pas applicable de droit.
Il ne pourra pas être question, par exemple, d’appliquer de droit la
Charte de l’Atlantique à l’Allemagne, ainsi que d’exclure la possibilité de
transferts ou d’ajustements dans les territoires ennemis.»18)
«Que l’on veuille bien se rappeler que la dernière guerre avait pour but
de détruire l’Allemagne.»19)
375
non, au lieu de cela nous déclarons que l’Allemagne devrait être
réunifiée.»20)
376
Les États-Unis d’Amérique
377
hémisphère pensaient que sa volonté de puissance les menaçait tout
autant que ses voisins européens.»2)
«Le processus que l’on a proposé n’a pas son pareil dans l’histoire.
L’Allemagne est considérée et administrée comme une société qui, n’étant
plus en mesure de remplir ses obligations de paiement, est adjugée au
tribunal et transférée au curateur de la faillite.
En fait, les affaires intérieures ont été soumises à des contrôles étran-
gers, sans précédent de nos jours comme dans le passé.
Il n’a jamais été proposé de s’emparer aussi totalement des biens
d’une nation.»4)
378
Jusqu’à présent, la question des réparations de Versailles et la politique
américaine d’emprunt branchée en parallèle (voir les plans Dawes et Young,
de 1924 et 1929 respectivement) avaient été établies exclusivement au pro-
fit des intérêts politiques et économiques des vainqueurs. En juin 1933,
F.D. Roosevelt pensait encore pouvoir continuer à mépriser, toujours aussi
radicalement, les problèmes vitaux de l’Allemagne et d’autres États euro-
péens en faveur de ses intérêts politiques. Il torpilla la conférence économi-
que mondiale assemblée à Londres le 12 juin 1933, en refusant d’adhérer à
nouveau à l’étalon or pour les échanges internationaux, et d’aborder la
question des problèmes monétaires découlant de la crise économique mon-
diale, de la politique de réparation et de la nouvelle situation politique de
l’Allemagne. Les questions de la politique des crédits, du niveau des prix, de
la limitation de la circulation monétaire, de la balance des paiements, des
tarifs douaniers, des quotas, des subventions et de la reprise de la circulation
internationale des crédits, restèrent en suspens. Plus les inconvénients pro-
voqués par son attitude étaient mis en lumière, plus Roosevelt en faisait
endosser la responsabilité aux «agresseurs» et ce de manière provocante et
arrogante. Pour les paralyser économiquement, il conclut bientôt des accords
bilatéraux avec les «démocraties pacifistes» et, le 31 janvier 1934, il fixa de son
propre chef une nouvelle parité entre le dollar et l’or, qui ne représentait que
59,66% de la parité courante. Le commerce extérieur avec les autres pays, et
particulièrement avec l’Allemagne, fut fortement entravé par cette dévaluation
radicale de la monnaie américaine. Le boycott par Roosevelt de la conférence
économique mondiale eut dans l’ensemble l’effet suivant:
a) La mise en difficulté des exportations allemandes déclencha inévitable-
ment des tentatives d’autarcie;
b) Les efforts d’entente des États européens (négociations pour un pacte
quadripartite entre l’Angleterre, la France, l’Italie et l’Allemagne en juillet
1933, conférences de désarmement, etc...) furent largement entravés, voire
anéantis;
c) La «presse libre» des États-Unis fut encouragée à envenimer sa polémique
hostile;
d) Vu la situation économique dépressive permanente des États-Unis, le
rétablissement économique de l’Allemagne, de l’Italie et du Japon n’était
pas propre à amener Roosevelt à changer sa position envers ces trois pays. Il
recherchait toujours de nouveaux prétextes pour distraire la population de
son pays inquiète sur le plan économique, par des alertes contre de pré-
tendues menaces provenant de l’étranger.
379
Dès avant 1937 des hommes politiques et des diplomates étrangers avaient
signalé que les travaux préparatoires des journalistes aux États-Unis n’allaient
pas par hasard dans le sens indiqué par Roosevelt. Le 11 avril 1935, le comte
Szembek, alors sous-secrétaire d’État au ministère des Affaires étrangères de
Varsovie, notait dans son journal l’entretien qu’il avait eu avec Bullitt,
l’ambassadeur américain:
380
Roosevelt était bien davantage inquiet des défaites électorales de son
propre parti que des mouvements des Japonais en Mandchourie. Une
récession économique aux États-Unis avait démontré clairement que le
battage des politiciens du New Deal avait été très mal reçu par les
ouvriers au chômage. Le journal de Morgenthau [Morgenthau Diaries]
renferme des preuves irréfutables de l’inquiétude profonde du gouverne-
ment devant l’ampleur de l’effondrement de l’économie nationale...
Ce “discours de la quarantaine” avait des résonances sinistres desti-
nées à terrifier le peuple américain. Dans de vastes contrées du monde
régnait un “régime de terreur” et les “événements marquants et les tradi-
tions qui caractérisent le progrès des civilisations dans une vie empreinte
de légalité, d’ordre et de justice” étaient balayés. “Des peuples et nations
innocents” étaient “sacrifiés cruellement à l’avidité de pouvoir et de
prédominance, vides de tout sens de justice et de conception philan-
thropique”. Si une telle situation alarmante existait dans d’autres contrées
du monde, ce serait vaine illusion de “s’imaginer que l’Amérique puisse y
échapper, puisse s’attendre à la clémence et que l’hémisphère occidental
échappe à l’agression et puisse continuer à développer les mœurs et les
arts de la civilisation dans le calme et la paix”.»7)
381
Le 28 janvier 1938, dans un message écrit adressé au Congrès, Roosevelt
recommandait un renforcement de la défense nationale, vu l’armement croissant
«à une vitesse alarmante et sans précédent» d’autres nations:
«Le président dit qu’une “défense suffisante” signifie que nous devons
arrêter tout ennemi potentiel à des centaines de kilomètres des frontières
de notre continent, non seulement pour la protection de nos côtes mais
aussi pour la protection de nos populations situées loin à l’intérieur des
terres. Nous ne pouvons croire, dit-il, que notre défense se limite à un
océan et une côte et que les autres resteront avec certitude à l’abri des
menaces.» 12)
Début février 1938, Roosevelt écrit dans une lettre privée à Lord Elibank,
homme politique influent en Angleterre, qu’il œuvre corps et âme pour:
12) Department of State, Peace and War – United States Foreign Policy 1931-1941,
pp. 52-53.
13) Lord Elibank, Contemporary Review, juin 1955, «Franklin Roosevelt, Friend of
Britain».
14) C. Tansill, op. cit., p.383.
15) H. Sündermann, Die Pioniere und die Ahnungslosen, p. 150.
382
Unis ne restera pas inactif lorsque la souveraineté du territoire canadien
sera menacée par un autre empire.»16)
383
La conférence de Munich ne concernait pas plus les États-Unis que, par
exemple, une conférence des États panaméricains sur la cession d’une zone
frontalière du Mexique aux États-Unis n’aurait jamais été l’affaire de l’Alle-
magne. Néanmoins, le président américain s’immisçait dans les problèmes
d’un continent étranger, fort lointain. Roosevelt qui, dès septembre 1938,
ayant un mauvais rhume, «voulait tuer Hitler et avoir le nez amputé»20) et qui
alors – peut-être pour mieux exécuter ce projet? – suggérait à Hitler d’accepter
une conférence internationale, en terrain neutre, sans la participation des
États-Unis,20) éprouvait – après la conférence de Munich
20) J. Burns, Roosevelt: The Lion and the Fox, pp. 387-388.
21) The Times, Londres, 15 octobre 1938, cité par H. Sündermann, op. cit., p. 155.
384
l’influence allemande. “Une telle Ukraine, continua Bullit, serait naturelle-
ment très dangereuse pour vous, car elle ferait sentir directement son
influence sur les Ukrainiens de la partie orientale de la Petite Pologne”...»22)
22) Livre Blanc Allemand N° 3, Documents Polonais Relatifs à l’Histoire des Origi-
nes de la Guerre, doc. 4, Potocki après Varsovie le 21 novembre 1938.
23) C. J. Burckhardt, Meine Danziger Mission 1937-1939, p. 225.
23a) C.J. Burckhardt, Ma Mission à Dantzig 1937-1939, pp. 252-253.
24) H. Sündermann, op. cit., p. 158, cite The Times, Londres, 2 décembre 1938.
25) G. Bonnet, Fin d’une Europe, De Munich à la Guerre, p. 40.
385
ainsi en bonne compagnie avec Staline, car sa politique visait à miner la paix et
l’amitié d’autres nations pour de simples motifs idéologiques. Le 4 janvier
1939 – deux mois et demi avant l’entrée de Hitler à Prague! – Roosevelt
demanda au Congrès la révision de la loi de neutralité, l’approbation d’un
crédit de près de 1,3 milliard de dollars pour l’armement26) et lança une mise en
garde provocatrice et vexatoire à l’Allemagne.27)
Ses motifs en étaient:
386
L’Ambassadeur extraordinaire américain, Bullitt, contesta certes ce mot de
Roosevelt «que la frontière de l’Amérique se situerait sur le Rhin», mais il
déclarait cependant:
La première partie de la phrase n’a certainement été rédigée que pour les
actes, car l’«évolution de la situation européenne» devait, selon le souhait du
président américain, aller dans le sens de:
387
n’est donc pas étonnant qu’à la mi-janvier 1939 le gouvernement polonais,
«influencé sans doute aussi par la diplomatie des États-Unis, se soit définiti-
vement décidé à un refus à l’égard du Reich», et ait préféré considérer une
«acceptation des propositions au sujet de Dantzig et des voies routières
comme équivalent à la perte de l’indépendance de la Pologne et à l’acquies-
cement d’un rôle de vassal».34) Ainsi, l’ambassadeur américain à Londres,
Kennedy, pouvait déclarer rétrospectivement, en décembre 1945:
388
tout entre les mains des Juifs; la radio, le cinéma, la presse et les pério-
diques leur appartiennent presque 100 p. c. [sic]...
La situation telle qu’elle se présente ici, constitue un excellent forum
pour les orateurs de tous genres et les émigrés d’Allemagne et de Tchéco-
Slovaquie qui n’épargnent mot pour exciter, par les calomnies les plus
diverses, le public de ce pays...
Il est très intéressant de constater que, dans cette campagne, très bien
conçue, menée principalement contre le national-socialisme, la Russie
soviétique est presque complètement exclue. Si jamais elle est mentionnée,
elle l’est de façon amicale et l’on présente les choses comme si la Russie
soviétique faisait partie intégrante du bloc des États démocratiques...
En dehors de cette propagande, on crée, de plus, artificiellement une
psychose de guerre: on raconte au peuple américain que la paix en Europe
ne tient plus qu’à un fil, qu’une guerre est inévitable. A ce sujet, on
démontre, sans équivoque, au peuple américain que, dans le cas d’une
guerre mondiale, l’Amérique devrait, elle aussi, intervenir activement
pour défendre les mots d’ordre de liberté et de démocratie dans le monde...
La méthode était très simple, il suffisait de mettre en scène adroite-
ment, d’une part, le danger de guerre que le Chancelier Hitler faisait
planer sur le monde, il fallait, d’autre part, créer un épouvantail évoquant
une attaque des États totalitaires contre les États-Unis. Le Pacte de
Munich a été une bonne aubaine pour le Président Roosevelt. Il l’a
présenté comme une capitulation de la France et de l’Angleterre devant le
militarisme belliqueux de l’Allemagne...
En outre, c’est la brutale action entreprise en Allemagne contre les
Juifs et c’est le problème des émigrés qui attisent toujours à nouveau la
haine existant contre tout ce qui se rapporte d’une façon quelconque au
national-socialisme allemand. A cette campagne ont participé les divers
intellectuels juifs... qui sont personnellement liés d’amitié avec le Pré-
sident Roosevelt. Ils veulent que le Président Roosevelt devienne le
protagoniste des Droits de l’homme, de la liberté religieuse et de la liberté
de parole; il doit, à l’avenir, punir les fauteurs de troubles. Ce groupe de
personnes, qui occupent les plus hautes situations dans le Gouverne-
ment américain et qui voudraient se faire passer pour les représentants du
“vrai américanisme” et pour les “Défenseurs de la démocratie” se
rattachent, au fond, par d’insolubles liens, à la juiverie internationale.
Pour cette Internationale juive, qui a surtout en vue les intérêts de sa
race, la promotion du Président des États-Unis à ce poste “idéaliste au
possible” de défenseur des Droits de l’homme, a été un coup de génie. Ils
ont de cette façon créé un très dangereux foyer de haine et d’hostilité
dans cet hémisphère et ont divisé le monde en deux camps ennemis. Tout
ce problème est machiné de façon mystérieuse. On a mis à la disposition
de Roosevelt les éléments fondamentaux qu’il fallait pour animer la politique
extérieure de l’Amérique et, ainsi, créer, en même temps, les stocks militaires
énormes à utiliser pour la guerre prochaine, à laquelle les Juifs poussent
389
en pleine connaissance de cause. Au point de vue politique, il est très
commode de détourner l’attention du public de l’antisémitisme toujours
croissant en Amérique, en parlant de la nécessité de défendre la foi et la
liberté individuelle contre les assauts du fascisme.»37)
«Ce texte pourrait émaner d’un diplomate allemand, [mais jamais un tel
diplomate n’aurait été aussi bien informé].»38)
On peut admettre avec certitude que Burckhardt avait des motifs solides
en 1960 pour émettre un tel commentaire. Ne se souvenait-il pas toujours
nettement du conseil que lui avait donné le président du Congrès juif mondial,
Nahum Goldmann, avant guerre?
390
Toutes ces données sont antérieures à l’entrée des Allemands dans
Prague. L’occupation de la Bohême-Moravie ne pouvait donc être la cause
de cette attitude.
Après que Hitler eut occupé la Bohême-Moravie, et Mussolini l’Albanie,
Roosevelt expédia une note de menace à Chamberlain, dont le contenu si-
gnalait que «l’Amérique ne soutiendrait plus les démocraties si celles-ci s’en
tenaient aux accords de Munich» (il était fait allusion ici aux déclarations de
paix et d’amitié avec l’Allemagne).41)
Le 19 mars 1939, Lukasiewicz et Bullitt affirmaient au ministre des Affaires
étrangères polonais que le président Roosevelt ferait tout pour affronter
militairement l’Allemagne.
391
Informé de la garantie britannique à la Pologne, envisagée pour le 31 mars
1939, le président Roosevelt déclara à son ambassadeur à Londres qu’il
«estimait cette déclaration excellente» et «qu’elle aurait une très grande
influence».
Roosevelt rendit l’atmosphère plus alarmante encore dans son pays par de
nombreux discours où il plaça aussi «la guerre au centre des délibérations»
(discours à Warm Springs des 8 et 9 avril, et à Washington le 14 avril devant
le comité directeur de l’Union panaméricaine). L’alerte fut donnée en secret
par des messages de Bullitt et du ministre des Affaires étrangères français,
Bonnet, à Paris. D’après eux «la guerre pouvait éclater d’un moment à l’au-
tre»,46) ce qui n’était pas de nature à calmer les esprits. Si Roosevelt déclarait
encore le 14 avril qu’il n’y aurait pas d’«encerclement... d’une nation pacifique
bien définie par d’autres nations pacifiques», il n’en comparait pas moins les
Allemands et les Italiens aux Huns et aux Vandales, montrant ainsi clairement
combien activement il avait lui-même travaillé à cet encerclement. Plus tard, à
la conférence de Yalta, le 8 février 1945, Staline devait lever son verre et porter
un toast à Roosevelt, le qualifiant de «premier forgeron des outils ayant
conduit à la mobilisation du monde contre Hitler» et cela «bien que son pays
ne fût pas immédiatement menacé».47)
Les intentions de Roosevelt devinrent d’autant plus claires qu’immédia-
tement après le discours du 14 avril 1939, il lança un appel à Hitler et à
Mussolini leur suggérant de faire une promesse de non-agression de dix
ans à 31 pays, dont deux États du Proche-Orient se trouvaient même sous
mandat étranger.
Les États-Unis participeraient aux négociations ainsi engagées. Aucun
des pays mentionnés ne s’était plaint jusqu’alors à Roosevelt d’une menace
de la part de l’Allemagne.
45) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 586.
46) C. Tansill, op. cit., p. 518.
47) Die Jalta-Dokumente, p. 225.
392
d’humeur belliqueuse – le président tint une conférence de presse le 15
avril [1939] et eut ici recours à ses talents de comédien afin de faire une
impression particulièrement forte sur ses auditeurs par la manière dont il
avait giflé en paroles Hitler et Mussolini.» 48)
Le 1er mai 1939, la prétendue clause «cash and carry» de la loi de neutralité
de 1937 (section 2) était arrivée à terme. Dès lors, les États-Unis approvision-
nèrent sans restrictions la Grande-Bretagne et la France «en matières premières
importantes pour la guerre» et en armements.51) Une nouvelle étape décisive
était franchie.
Le 23 mai 1939 le Premier ministre japonais, le baron Hiranuma, proposait,
au cours d’une conférence secrète avec le conseiller de l’ambassade américaine,
Eugène H. Doomann, de
393
desquels la situation avait changé. On avait ainsi manqué – ou évité –
une occasion favorable importante.
Les préparatifs de guerre américains progressaient silencieusement et
en secret. Le 23 juin 1939 un accord secret d’échange en troc fut conclu
avec la Grande-Bretagne, et une somme d’argent considérable fut engagée
pour l’achat de matériel de guerre. Dix-neuf nouveaux cargos furent
lancés avant le 9 août, cent autres commandés et, le 10 août, fut créé un
Service du Matériel de guerre.»52)
«Je pense que les États-Unis devront en tout cas participer à la guerre.
L’Europe n’est pas en mesure de gagner, seule, une guerre contre Hitler.
Et même si les États-Unis n’entrent pas en lutte contre le nazisme, le
nazisme, lui, attaquera les États-Unis. On ne doit pas oublier que Hitler et
ses adeptes sont des fous, incapables de se maîtriser, et donc prêts à
tout.» 55)
52) H.E. Barnes, op. cit., p. 207 (éd. all., pp. 133-134).
53) H. Dahms, op. cit., p. 24.
54) C. Tansill, op. cit., p. 556.
55) E. Benes, The Memoirs of Dr. Edouard Benes, p. 79.
394
Le 6 juillet 1939 le sous-secrétaire d’État au ministère des Affaires étrangères
polonais, le comte Szembek, résumait comme suit les impressions de l’ambassa-
deur polonais, le comte Jerzy Potocki, à son retour de Washington:
395
Roosevelt repoussa même les requêtes plus ou moins platoniques de
médiation et d’arbitrage de Chamberlain:
Malgré la volonté des deux pays d’éviter un conflit avec les États-Unis,
Roosevelt montrait peu de compréhension ou de prévenance envers l’Allemagne
et le Japon. Il refusait tout compromis dans l’espace européen ou asiatique, dans
des contrées donc qui ne le concernaient nullement. Afin de déjouer les
propositions d’autres hommes d’État, il poussait à la conclusion de nouvelles
59) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 272.
60) ADAP VII, doc. 239.
61) D. Hoggan, op. cit., pp. 517-519 (éd. all., pp. 683-684).
62) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 318.
396
alliances, de pactes militaires et de promesses d’assistance contre l’Allemagne.
Et ceci se passait des années avant le déclenchement de la guerre, d’une manière
qui dépassait même l’entendement des cercles gouvernementaux britanniques.63)
Il n’y a pour ainsi dire pas d’historiens qui nieraient qu’à partir de 1937-1938,
par ses interventions publiques, sa diplomatie secrète, ses pressions et son
influence sur l’économie d’autres pays, Roosevelt a téléguidé la Grande-
Bretagne, la France et la Pologne et a exercé de fortes pressions sur ces pays.
Il porte une large part de responsabilité dans le déclenchement, l’expansion
et la brutalité de la seconde guerre mondiale.64)
Ne citons que quelques exemples des mesures prises par Roosevelt dès le
début de la guerre européenne; elles sont consignées chronologiquement
dans de nombreux ouvrages.
Le président Roosevelt refusa toutes les propositions allemandes de
médiation:
63) Viscount Templewood (S. Hoare), Nine Troubled Years, pp. 270-271 (éd. all., p. 239)
et H. Sündermann, op. cit., p. 148.
64) F.J.P. Veale, Advance to Barbarism, pp. 273-274 (éd. all., Der Barbarei entgegen,
p. 302), C.A. Beard, President Roosevelt and the Coming of the War, F.R. Sanborn,
Design for War, W.H. Chamberlin, Amerikas Zweiter Kreuzzug et C. Tansill, Back
Door to War.
65) H. Sündermann, op. cit., p. 169.
397
«Vous pouvez assurer à Monsieur Roosevelt que s’il veut intercéder,
l’Allemagne approuvera un règlement, par lequel un nouvel État polonais
et un nouveau gouvernement tchèque indépendant verraient le jour. Je
propose Washington comme lieu de conférence.»66)
À son retour Davis avait essuyé un refus d’audience privée et donc fit
remettre au président Roosevelt un rapport écrit sur ses entretiens à Berlin.
Ni lui ni le gouvernement du Reich ne reçurent jamais de réponse.
c) Mi-octobre 1939 et début 1940, Göring réitéra son offre au cours
d’une conférence avec le président de la “General Motors Overseas Corpo-
ration”, J.D. Mooney, et la compléta même d’une remarque sur la possibilité d’un
remaniement du gouvernement du Reich.
d) Même les tentatives de rapprochement de l’ancien président de la Banque
du Reich, Hjalmar Schacht, furent refusées.67)
e) Par la volonté de Roosevelt, les contacts du chef de la presse du Reich,
le Dr Dietrich, avec le correspondant à l’étranger et chef du Bureau berlinois
de l’“Associated Press”, L.P. Lochner, restèrent infructueux.
Roosevelt justifiait son refus de médiation en ces termes:
398
«Le président est fermement décidé à nous faire gagner la guerre en
commun. N’en doutez pas!
Il m’a dépêché pour vous dire qu’il vous fera réussir quoi qu’il en
coûte et par tous les moyens, peu importe ce qu’il lui arrivera – il ne
négligera rien qui soit en son pouvoir.»69)
69) A. C. Wedemeyer, Wedemeyer Reports! p. 9, (éd. all., Der verwaltete Krieg, p. 20).
70) Documents on American Foreign Relations, vol. III, July 1940-June 1941, pp. 35, 36, 40.
71) Christian Century, avril 1941.
72) H. E. Barnes, op. cit., p.218 (éd. all., p. 143) et A. C. Wedemeyer, op. cit., pp. 6-7 (éd. all.,
p. 17).
399
Il fit rédiger la Charte de l’Atlantique, en d’autres mots la promulgation de
prétendus objectifs de guerre, bien avant l’entrée des États-Unis dans le
conflit: il la formula de telle sorte que, du fait de sa puissance, il plaçait tous les
autres États devant le seul «choix» possible: celui qui se déclare pour la
liberté, la démocratie et la paix – pour la Charte de l’Atlantique – doit suivre la
politique américano-britannique et lutter pour l’extermination du «nazisme»
ou fournir l’aide nécessaire à cette lutte. Ainsi, le 23 août 1941, Roosevelt
pouvait déclarer devant le Congrès:
et que, grâce à cette réserve, aucun des États signataires n’était obligé de
s’en tenir aux postulats de cette déclaration des objectifs de guerre – ce
que, d’ailleurs, aucun ne fit.
Le 1er septembre 1941, Fête du travail en Amérique, Roosevelt annonçait:
400
pouvoir en 1933. Ces plans visaient à la prédominance exclusive non
seulement sur une partie du monde, mais sur le monde entier et sur toutes
les mers...
La destruction des centres de culture matérielle et spirituelle est et a
toujours été l’objectif de Hitler et de ses figurants italiens et japonais. Ils
veulent abattre la puissance du Commonwealth britannique, de la Russie,
de la Chine et des Pays-Bas pour concentrer ensuite toute leur énergie
sur le but final: la conquête des États-Unis...
Le monde est trop exigu pour offrir un “espace vital” commun conve-
nable à la fois à Hitler et à Dieu. La preuve en est que les nazis ont
maintenant annoncé leur projet d’imposer leur nouvelle religion païenne
germanique au monde entier, et de prétendre remplacer la Sainte Écriture
et la Croix de grâce par Mein Kampf, la croix gammée et le glaive...»75)
401
les actes de Roosevelt. À la même époque, le 27 avril 1941, le sénateur
américain Nye, qui avait présidé en 1936 la Commission Nye chargée d’ana-
lyser des motifs de l’entrée des États-Unis dans la Grande Guerre, utilisait
presque les mêmes termes que Sven Hedin:
402
une offensive contre l’hémisphère occidental: mais on y trouve une foule
de témoignages pour montrer qu’il voulut justement l’éviter, jusqu’à ce
que l’Amérique entrât en guerre.”
Les provocations extrêmes n’ayant pas réussi à décider l’Allemagne à
nous faire la guerre, et n’ayant aucune chance d’amener le Congrès à
déclarer cette guerre, du fait de la détermination de la grande majorité
du peuple américain à ne pas intervenir activement dans le conflit,
Roosevelt se tourna vers le Pacifique. Peut-être le Japon se montrerait-
il moins réfractaire, car il était possible d’exercer une pression diplo-
matique et économique le contraignant pratiquement à nous faire la
guerre...»80)
403
LUnion soviétique
«Pas un seul marxiste ne peut nier sans rompre avec les principes du
marxisme et du socialisme en soi que les intérêts du socialisme sont
supérieurs aux intérêts du droit à lautodétermination des peuples.»1)
«Si la guerre ne vient pas delle-même, il faut la provoquer. Si nous
sommes contraints de tolérer des gredins, tels que ces voleurs de capita-
listes dont chacun affûte son couteau contre nous, il est de notre devoir
immédiat de dégainer à notre tour.»1)
«Aucune puissance au monde ne peut arrêter la révolution communiste
dans sa marche vers une République soviétique universelle.»1)
1) V. I. Lénine, Ausgewählte Werke, vol. II, p. 310, et ibid., vol. VIII, p.303, et J.
Bochenski et G. Niemeyer, Handbuch des Weltkommunismus, p. 174: allocution
devant lassemblée des secrétaires des cellules de Moscou, le 26 novembre 1920. V. I.
Lénine, «uvres», éd. russe, vol. XXIX, p. 125.
404
LAllemagne était lune des principales pierres de lédifice de la révolution
universelle soviétique, mais le «fascisme», ou pire «le fascisme hitlérien», en
entravait la construction et fut donc déclaré lennemi numéro un. (Selon une
définition de lencyclopédie soviétique, le fascisme est la dictature la plus
terroriste des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus
impérialistes du capitalisme.) Dès lors, lorientation et les intentions de la
politique étrangère soviétique des années 1933 à 1939-1941 vis-à-vis du Reich
allemand sont historiquement établies. Seule sa faiblesse militaire de lépoque
a empêché lUnion soviétique de se ruer sur lAllemagne. Depuis 1918, les
bolchevistes aspiraient sans relâche, et avec tous les moyens à leur disposition,
à la conquête de lAllemagne, à une époque où Hitler navait encore absolument
aucune activité politique et où lAllemagne était maintenue par le diktat de
Versailles à létat dimpuissance en politique étrangère, économique et militaire.
Les communistes ne se sont certes pas fixé cet objectif de révolution mondiale
pour repousser une invasion de lAllemagne en Russie. Cette révolution,
nétait-elle pas dirigée, non pas contre ces «peuples barbares et rapaces» ou
contre des intérêts nationaux, mais vers une conquête mondiale avec tous
les moyens violents disponibles?
Le cours de la politique étrangère de Moscou, depuis 1918, salignait ce
qui nest pas étonnant sur des directives résultant des revendications du
marxisme-léninisme, indépendamment de la politique ou de la composition
des gouvernements allemands. Les bolchevistes reconnaissent ouvertement
avoir adopté cette attitude de façon conséquente pendant des années jusquà
ce jour. Le 1er août 1931, Wilhelm Pieck, ex-président de la «République
démocratique allemande», déclarait, en tant que député au Reichstag:
405
évidentes sur la situation de la République de Weimar, que les historiens so-
viétiques devaient caractériser plus tard comme suit:
«Si toutefois la guerre éclate, nous ne resterons pas les bras croisés
nous serons obligés dintervenir, mais nous serons les derniers. Et nous
interviendrons afin de jeter le poids décisif dans la balance.»6)
Peu avant sa mort, Staline devait, une fois encore, confirmer cette stra-
tégie.6) Et dailleurs, le même Staline déclarait à un autre moment:
406
important que nous puissions retarder cette guerre inévitable avec les
pays capitalistes, car la guerre doit être repoussée soit jusquà ce que la
révolution saffirme dans les colonies, soit jusquà ce quen fin de compte
les capitalistes se combattent mutuellement... La base de nos relations
avec les pays capitalistes consiste à assurer une coexistence pacifique
entre les deux systèmes opposés.»7)
On exprime ici ouvertement une idée qui nest pas seulement conséquente
à lidéologie communiste, mais qui a été aussi arrêtée de longue date au sein
du Komintern (Organe exécutif central de la IIIe Internationale communiste).
Citons ici brièvement laveu soviétique déjà mentionné:
407
«Pendant toutes les années davant-guerre, le gouvernement soviéti-
que était disposé à recourir à la force armée contre lAllemagne.»9)
Ceux donc qui voulaient recourir à la force armée et montrer ainsi leur
agression au cours des années davant-guerre étaient bien, reconnaissons-
le, les Soviétiques. Si lon poursuit les arguments des communistes, la
Grande-Bretagne, la France et les États-Unis se sont donc principalement
imputé une «responsabilité historique» pour avoir mené une «politique de
non-ingérence» envers Hitler et ne sêtre pas joints immédiatement à la politique
soviétique dingérence et dextermination. Nikita Khrouchtchev avoue, dans
une interview de novembre 1958:
«En 1939, Staline vit une chance daffaiblir Hitler, avant son attaque
contre la Russie, en lencourageant à mener une guerre à lOuest.»11)
408
ce qui peut servir les intérêts du marxisme-léninisme ou plutôt le Parti
communiste révolutionnaire universel.
Le pacte entre Staline et Hitler na pas rendu caduc cet objectif de révo-
lution mondiale. La phraséologie de Moscou évitait certes depuis lors le ton
tranchant habituel envers lAllemagne, mais la dialectique, elle, restait
sauve et inchangée, éveillant ainsi la méfiance. Tous les indices montraient
que Staline navait conclu cet accord que dans le sens de la tactique de Lénine
ce que les historiens soviétiques avouèrent dailleurs ouvertement après la
guerre:
409
fut la pierre angulaire du mouvement de résistance du peuple français. Fin
1940, les communistes furent les organisateurs des premiers groupes
aptes au combat, qui engagèrent leur lutte en 1941. Cétait la période de
rassemblement des forces patriotiques antifascistes...
Les partis communistes ont partout encouragé les mouvements pa-
triotiques à créer un front antifasciste unifié et à former la résistance et
ils en étaient les organisateurs. En Pologne, en Tchécoslovaquie, en
Yougoslavie, en Albanie, en Grèce et dans dautres pays, des unités
armées furent dressées pour la lutte contre les conquérants étrangers.
Au printemps 1940, la défaite militaire de nombreux pays européens et
leur occupation par les troupes hitlériennes mirent les partis communistes
devant de nouvelles situations dans la lutte pour lunité des forces
prolétaires contre le fascisme.»14)
410
vêtiront alors pour nous un caractère dangereux.
Par contre, si nous acceptons les propositions de lAllemagne, lin-
tervention de la France et de lAngleterre deviendra inévitable. Quoi
quil en soit, nous devons nous tenir hors du conflit. Nos intérêts
lexigent. Nous devons donc accepter la proposition allemande et ren-
voyer la mission anglaise et française par un refus courtois.
Il est important pour nous que cette guerre éclate. Il nous faut ren-
forcer lactivité communiste de façon à être bien préparés pour le moment
où le conflit touchera à sa fin.»17)
17) Nation Europa, 10/1961, p. 26, cite Georges Suarez (et Guy Laborde), Agonie de la
Paix, Paris 1942, p. 97, note 1.
18) I. M. Maiskii, Qui a aidé Hitler? éd. russe p. 194.
19) Die Welt, 12 novembre 1958, p. 6.
20) W. Schellenberg, Memoiren, p. 377 seq, et H. Springer, Das Schwert auf der Waage,
pp. 99 et 210, et H. Springer, Es sprach Hans Fritzsche, pp. 88-89, et TMI, vol. X,
pp. 328, 589, 590 et vol. XV, pp. 425-432, 655.
411
croissantes contraires aux intérêts vitaux de lAllemagne. Staline les multipliait
en profitant de la tournure des hostilités en Europe, tout en intensifiant les
activités communistes clandestines et lespionnage, ainsi que la préparation
de sabotage dans les territoires sous administration allemande. Le
comportement des Soviétiques envers la Pologne orientale (motif et date de
lattaque, concentration renforcée des troupes au terme des combats, cons-
truction accélérée de nombreux aérodromes aux abords immédiats de la
ligne de démarcation, etc...) ne devait pas manquer de surprendre et dintriguer
les États baltes, la Finlande, la Roumanie, la Bulgarie, la Yougoslavie et la
Turquie, à une époque où il nexistait aucun indice de la volonté de Hitler de
violer le pacte damitié et de non-agression avec lUnion soviétique ne
serait-ce quen raison des périls dune guerre sur deux fronts. La pression
soviétique se maintint sur ces pays et, ainsi, la menace évidente contre les
sources vitales de matières premières (centre pétrolier de Ploesti et minerais
de nickel près de Petsamo). Pourtant dès lorigine, les exigences de Staline
avaient été satisfaites. Dautres revendications sétaient encore ajoutées,
allant jusquà létablissement de bases soviétiques dans les Dardanelles et
en Bulgarie, lextension de la Bulgarie jusquà la mer Égée, lannexion du
reste de la Bucovine (ce qui revenait à poursuivre le démembrement de la
Roumanie), jusquau droit dintervention dans les débouchés de la mer
Baltique autant de revendications annoncées comme «provisoires».
Lopération de mise en position offensive de lArmée rouge, commencée
dès la fin de lautomne 1939 bien que lAllemagne eût dégarni son front
oriental se renforçait sans cesse et prenait une ampleur sans précédent le
long de la frontière occidentale de lUnion soviétique.21) Lopération sétendait
de la Finlande et des Pays Baltes jusquà la mer Noire. Il fallait bien la
considérer comme nouvelle preuve de la menace imminente dune grande
offensive du bolchevisme. «Avec un luxe de précautions et très progres-
sivement»,22) on avait du côté soviétique du propre aveu des Russes23) mis
en place jusquau mois de juin 1941 dans les régions limitrophes occidentales:
13 armées avec 131 divisions dinfanterie, 23 divisions de cavalerie, 36
brigades motorisées et 40 divisions blindées avec environ 4 700 000 soldats.24)
Il faut remarquer, en comparaison, quen 1939 les effectifs de lArmée rouge
21) H.G. Seraphim, Die deutsch-russischen Beziehungen 1939-1941, pp. 62-68: déclara-
tion du général Halder devant la Commission de la cour militaire de justice IV (affaire
n°11): Nuremberg, 9 septembre 1948.
22) Platanova, Pavlenko, Parotkina, op. cit., p. 178.
23) Ph. Fabry, Der Hitler-Stalin Pakt 1939-1941, p. 396 seq., et «Histoire de la grande
guerre patriotique de lUnion soviétique 1941-1945», éd. russe, vol. I, p. 471 seq.
24) H.A. Jacobsen, Der Zweite Weltkrieg in Chronik und Dokumenten, vol. I, p. 372.
412
tout entière ne sélevaient quà deux millions dhommes.25) En juin 1941,
lUnion soviétique possédait 21 000 blindés, y compris les blindés légers et
obsolètes, ainsi que la surprise de cette campagne: les T34 et KV [pour K.
Voroshilov].26 + 24) Les services de renseignements allemands avaient sous-
estimé larmée soviétique de 100 formations et n«avaient par ailleurs aucune
notion de son armement moderne».27)
Face à ces données, cest-à-dire face à «la supériorité soviétique écrasante
à la veille de lattaque du 22 juin»,28) quelle était la situation du côté allemand?
Ce nest quà partir de janvier 1941 que lon a pu parler de déploiement de
forces allemandes. Pour la concentration de troupes extrêmement bien formées,
effectuée seulement à partir du 27 mai 1941, ainsi que leur mise en position
offensive, il fallut attendre le 15 juin 1941, soit une semaine avant lattaque du
22. À quelques exceptions près, aucune unité blindée nétait sur place jusque-
là.28) + 29)
Le bilan des forces allemandes était fort inférieur à celui de lennemi. Voici
quelques éléments et quelques chiffres: 118 divisions, 19 divisions blindées,
15 ¼ divisions motorisées, avec un total de 3 050 000 hommes (ce qui correspond
aux trois-quarts de larmée). Cela étant, le transfert des hommes et de leur
matériel exigeait quand même 17 000 convois de chemin de fer. Cet état de fait
nous amène à conclure que si Hitler avait seulement attendu le déferlement
massif de lArmée rouge, aucune armée européenne, ni en 1941, ni en 1942,
naurait pu larrêter dans sa marche vers les côtes de lAtlantique.
Les historiens soviétiques ne justifient pas les préparatifs dattaque de
lArmée rouge par des mesures concrètes du gouvernement du Reich. Cela
na rien de surprenant si lon se souvient de lobjectif de révolution mondiale
poursuivi avec constance depuis 1917. Toute prétendue recherche de domi-
nation mondiale, toute prédisposition à un désir effréné de faire la guerre,
tout délire de conquête et d«assujettissement» des peuples européens pour
sassurer des zones pour le déploiement de troupes contre lUnion soviétique,
ainsi que les énormes «contradictions du système capitaliste» etc., ne sont
pas des raisons valables mais des formules tirées par les cheveux, des insi-
nuations visant à dissimuler sous la propagande sa propre politique expan-
sionniste. Ce sont des slogans de ce genre que lon jette à la figure de tout
non-communiste dès quil met le pied sur la scène politique.
413
Les preuves dont disposaient les dirigeants du Reich sur la perspective
dune vaste offensive soviétique ont été détruites ou tout au moins soustrai-
tes au public à Nuremberg en 1945-1946. Mais un certain nombre déléments
probants purent malgré tout être rendus publics après la guerre. Ainsi, lex-
général soviétique, Alexei Markoff, qui, au printemps 1941, commandait un
détachement de troupes à la frontière occidentale soviétique, a publié dans
la revue américaine Saturday Evening Post du 13 mai 1950, un article
selon lequel Staline, après la défaite de la France lété 1940, ordonna des
«préparatifs de guerre contre lAllemagne, parce que Hitler avait gagné trop
vite».
414
damitié et de non-agression germano-soviétique restait axé sur les
préparatifs:
33) «Histoire de la grande guerre patriotique de lUnion soviétique 1941-1945», éd. russe,
vol. I, p. 388.
34) ibid., p. 476.
35) ibid., p, 440.
36) ibid., p, 441 (Projet de règlement sur le service en campagne 1939, p. 9).
415
conditions favorables pour porter atteinte à ceux-ci ou pour encercler les
unités adverses.»37)
«Une importance particulière fut attachée, lors des opérations
dattaque, aux unités de choc, cest-à-dire des troupes particulièrement
renforcées, destinées à laxe principal de poussée.»38)
«Selon les prévisions, la puissance au combat de ces unités de choc
devait être extrêmement forte: 3 ou 4 corps dinfanterie légère (12 à 15
divisions dinfanterie légère), 1 ou 2 corps motorisés ou corps de cavalerie,
3 ou 4 divisions daviation, 10 à 12 régiments dartillerie, quelques
régiments blindés, des bataillons de pionniers, des unités de défense
chimique, etc. Pour laxe principal de poussée, la densité opérationnelle
de percée des positions de défense de ladversaire était la suivante: 1
division dinfanterie légère sur 2 à 2,5 km, 50 à l00 pièces dartillerie et tout
autant de chars sur un kilomètre. On prévoyait 150 à 250 km pour les
opérations dattaque en profondeur, et 75 à 100 km pour les opérations
des armées de choc. La largeur générale du front pouvait varier de 150 à
300 km pour de telles opérations, celle des armées de choc entre 50 et 80
km. La largeur de lattaque principale, cest-à-dire du segment de percée
du front, pouvait atteindre 60 à 80 km, celle des armées de choc de 20 à 30
km. Les armées devaient avancer de 10 à 15 km en 24 heures, les unités
motorisées de 40 à 50 km. Les opérations dattaque devraient être pré-
cédées de préparatifs par lartillerie et le recours à linfanterie et aux
blindés.» 39)
«On attachait peu dimportance aux opérations de défense. La défense
nétait prévue quen tant quauxiliaire pour la garantie de lattaque.»40)
«La largeur dattaque dune division dinfanterie légère fut fixée à 3 ou
4,5 km, et pour un corps dinfanterie légère à 8 ou 12 km.
Larmée de lair avait pour mission dexécuter les opérations en pro-
fondeur afin de sassurer la suprématie aérienne. Selon lopinion sovié-
tique alors en vigueur, la suprématie aérienne rouge pouvait être obtenue
à léchelle opérationnelle, à condition que lentrée en ligne des forces
armées aériennes survienne soudainement, de façon massive et ininter-
rompue, par tous les temps.»41)
«Les ordres et principes directeurs des forces armées maritimes so-
viétiques étaient également orientés vers lattaque. Ici aussi, des coups
brefs, soudains et massifs portés contre les navires ennemis, les postes
de liaisons maritimes et les objectifs côtiers, ainsi que des barrages de
mines devaient mettre rapidement la flotte ennemie hors de combat.»42)
416
«La concentration des troupes était particulièrement forte dans la
zone militaire spéciale de Kiev. Dans cette zone se trouvaient cinq armées
et un certain nombre dunités mécanisées...
Les forces stationnées au front Sud-Ouest suffisaient à maîtriser non
seulement les opérations de défense, mais aussi dattaque...
Aucune mesure nétait néanmoins prévue pour le cas où lennemi
attaquerait sans déclaration de guerre, ni pour le cas où les combats
frontaliers nauraient pas dissue favorable pour nous.»43)
«que lattaque avait été prévue pour août-septembre 1941. Les Russes
avaient commencé dès le début de lannée leur acheminement, qui devait
durer assez longtemps, du fait des mauvaises liaisons ferroviaires russes.
Hitler avait vu juste et était intervenu en plein milieu de lopération
russe.» 44)
43) F.D. Vorobiev, V.M. Kravzov, «La grande guerre patriotique de lUnion soviétique
1941-1945», éd. russe, ibid., p. 56.
44) H.G. Seraphim, op. cit., p. 85.
417
le point culminant de lavance militaire allemande et le situait dans la période
de juillet à septembre 1941, bien quelle passe plus ou moins les détails sous
silence.34) Notons au passage que, lors de leur entrée en Union soviétique, les
troupes allemandes trouvèrent des cartes détat-major soviétiques portant
des objectifs dattaque profondément enfoncés en Allemagne. Il sy ajoute
des indices dautre nature mais qui ne trompent pas, tels que les manuels
scolaires soviétiques enseignant la nécessité dune conquête de lEurope.45)
On ne peut que juger étrange ce procédé qui consiste à considérer ces faits
comme autant de détails sans importance en les omettant complètement sans
accepter leur validité.
Il est vrai que, dans son livre Mein Kampf, Hitler a attiré lattention sur la
nécessité d«un espace vital à lEst» pour le peuple allemand. Il na pourtant
pas prétendu et cest là une différence de poids vouloir le conquérir sil
devenait un jour le chef du gouvernement allemand. Il ressort dailleurs de
tous les documents que le plan «Barbarossa» navait aucun rapport avec ce
fait. Le livre de Hitler était un écrit polémique, remontant à la période dune
lutte de politique intérieure; le plan «Barbarossa», quant à lui, était conçu
exclusivement pour devancer les attaques imminentes dextermination par
lArmée rouge.46)
Au cours du conflit meurtrier entre lAllemagne et lUnion soviétique, la
notion despace vital se fit plus vive et conduisit aux conséquences fatales
que lon sait. Cela est conforme aux réalités de ce monde.
Il nexiste guère dÉtats vainqueurs qui ne cherchent à compenser les
pertes en vies humaines qui leur ont été imposées par un accroissement de
leur influence, de leur espace économique et de leur sécurité stratégique. Il
nous semble inutile ici de renvoyer en particulier à Versailles en 1919, à
Yalta, à Potsdam et à Tokyo en 1945. Il est historiquement faux de faire
découler tout simplement le plan «Barbarossa» ou la campagne de Pologne,
voire la seconde guerre mondiale elle-même des commentaires de Hitler
dans Mein Kampf. Ni la Pologne, ni la Grande-Bretagne, ni la France, ni
lUnion soviétique, ni les États-Unis nont aligné leur politique sur ces
commentaires, mais, sans en tenir aucun compte, ils se sont activement mis
au travail au profit de leurs propres intérêts, de leur propre expansion.
Ce ne sont ni la personne dAdolf Hitler, ni la teneur de ses idées, ni
telles mesures individuelles prises par le gouvernement du Reich qui servaient
de valeur de référence aux communistes. Hitler na jamais voulu sengager
418
au profit des plans moscovites de révolution mondiale et il sest toujours
refusé à reconnaître que le marxisme-léninisme était lultime solution. Voilà qui
a suffi à condamner sommairement Hitler, son parti et, en fin de compte,
lensemble du peuple allemand dont il était le chef comme criminels,
agresseurs, conspirateurs, impérialistes, militaristes, capitalistes, etc.
Le fait davoir réussi à mettre un terme à linfiltration communiste était une
raison suffisante pour le système communiste de lancer une campagne mondiale
démesurée de diffamation et de mensonges. Sous lautorité de la structure du
pouvoir communiste des millions dêtres humains ont été contraints à
reconnaître les jugements de valeurs établis jusque-là comme «des vérités
prouvées scientifiquement», comme faisant partie du «bien commun universel
de lesprit» et à risquer leur vie pour cela. Il appartient à la tactique communiste
de soumettre les adversaires (cest-à-dire les hommes politiques non-
communistes) lun après lautre au feu roulant de sa propagande et dinciter
les autres «États capitalistes» à détruire ladversaire le plus proche «par tous
les artifices et combines». Ceux qui connaissent la question ne sétonneront
donc pas de voir précisément ces mêmes méthodes de diffamation et ces
mêmes slogans, jadis utilisés contre le Reich allemand, simplement réactivés
après la seconde guerre mondiale à lencontre des États-Unis.
Les communistes ne cachent absolument pas quils tiennent pour moral
même le mensonge, la diffamation, la rupture des traités, la falsification de
lhistoire, pourvu que cela serve leur intérêt, cest-à-dire celui de la révolution
mondiale. Cest là que lon reconnaît linconsistance et le danger de la base de
valeurs sur laquelle tablent les communistes. Tant quon accuse immédia-
tement de «crime», et menace même de liquider celui qui ne pense pas selon la
ligne marxiste-léniniste stalinienne à lépoque et qui refuse de se soumettre
à la volonté de Moscou, tant quon traite de prime abord tout non-communiste
dagresseur et dennemi de la paix, on ne peut
ni procurer ou garantir la paix,
ni résoudre les problèmes au plan national,
ni faire naître la confiance internationale,
ni surtout constituer des «principes de droit».
419
Les derniers jours de paix
Le pacte de non-agression germano-soviétique
1) B. Dahlerus, Der letzte Versuch, pp. 46-48, et Documents on British Foreign Policy 1919-
1939, vol. VI, pp. 743 seq et 751 seq: les entretiens de Dahlerus avaient déjà débuté en juillet.
420
Soviétiques les États baltes, la Pologne et la Roumanie.2) Ceci contre le gré de
leurs peuples et gouvernements et en pleine connaissance des «risques et
inconvénients quentraînerait ladmission de la présence de troupes soviéti-
ques sur le sol polonais».3)
Il est stupéfiant de constater que, le 22 août, le ministre des Affaires
étrangères français, Bonnet, mentait en affirmant à Londres que la Pologne
acceptait la traversée de son territoire par les troupes soviétiques, et que
Halifax, qui connaissait le caractère mensonger de cette affirmation, nen
transmettait pas moins une note au chef de la délégation britannique à
Moscou, lAmiral Drax. Par cette note Halifax le priait de saligner sur les
déclarations du général français Doumenc.4)
(En juillet 1940, après la reprise de ces contacts, à linstance de son
gouvernement, lambassadeur britannique à Moscou, Cripps, recommandait
à Staline doccuper aussi les Balkans et des réserves dans les Dardanelles).5)
En vue de ces circonstances ainsi manipulées, la garantie britannique à la
Pologne, qui ne concernait que la frontière germano-polonaise, se trouvait
démasquée et réduite à une vile imposture visant à dissimuler des intentions
belliqueuses. Le 22 août 1939, lambassadeur britannique à Berlin, Henderson,
reconnaissait, dans une lettre adressée à Lord Halifax, que cétait la Grande-
Bretagne qui avait contraint Hitler à cet intermède moscovite.
«Mais je ne peux dire avoir été surpris, étant donné que jai toujours
pressenti que notre politique à légard de la Pologne ne pourrait avoir
dautre issue que le rapprochement de lAllemagne et de la Russie. En fin
de compte, on ne peut en blâmer lAllemagne...»6)
2) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten, vol. III, pp. 96-124, et I. Colvin,
Vansittart in Office, p. 336, et K. Zentner, Illustrierte Geschichte des Zweiten Weltkrieges,
p. 69.
3) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 91.
4) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 124.
5) A. Seidl, Die Beziehungen zwischen Deutschland und der Sowjetunion 1939-1941, p.195.
6) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 158.
421
Hitler ne lavait pas non plus conclu avec lintention de déclencher une
guerre. Les efforts entrepris, du 23 août au 1er septembre 1939, par Hitler et von
Ribbentrop, mais aussi par le feld-maréchal Göring, dans une procédure
diplomatique non officielle, visaient à établir des rapports amicaux avec la
Grande-Bretagne et un équilibre avec la Pologne en profitant du changement
de cours de Moscou. Le gouvernement du Reich en avait dailleurs informé
Staline tout comme Chamberlain.7) La requête de Ribbentrop aux Soviétiques
de masser des troupes le long de la frontière polonaise ne doit en outre être
interprétée que comme un moyen utilisé pour amener la Pologne à céder et
à accepter ainsi un règlement pacifique.8) Avant le début de la guerre, il
nexistait aucun plan daction commune contre la Pologne et, avant la décla-
ration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France à lAllemagne, le
gouvernement du Reich navait déployé aucun effort pour pousser lUnion
soviétique à intervenir à ses côtés dans le conflit lopposant à la Pologne.
Ces faits démentent la thèse selon laquelle du côté allemand, le pacte de
non-agression avait eu pour objectif lanéantissement de la Pologne, voire
le déclenchement dune guerre.9)
422
De même, lex-conseiller dambassade Hilger:
«En ce qui concerne Hitler, il semble avoir cru, dans les 5 à 6 mois
suivant la conclusion des accords avec lUnion soviétique, que ceux-ci
non seulement atteignaient leur objectif immédiat mais aussi quils forme-
raient pour des années la base de relations avantageuses pour les deux
parties. Je possède des informations sûres, selon lesquelles Hitler se
serait souvent confié dans ce sens à ses proches collaborateurs au cours
de lhiver 1939-1940. Lidée que Staline aurait pu, le moment venu, exercer
une pression sur une Allemagne affaiblie par la guerre navait pas à ce
moment encore effleuré Hitler. Au contraire, il paraissait alors convaincu
que la supériorité militaire de lAllemagne était garantie à long terme et
que, par ce seul fait, Staline se verrait contraint de respecter les accords
existants.» 12)
Le 23 août,
423
À la question de savoir sil navait pas entendu parler du premier ordre
dattaque, le feld-maréchal Milch répondit devant le Tribunal militaire inter-
allié de Nuremberg:
«Oui, jen ai entendu parler. À vrai dire, pour être juste, il ne sagissait
pas du déclenchement dune attaque proprement dite, mais des disposi-
tions à prendre en prévision dune attaque. Si bien que le terme attaque
lui-même nétait ainsi pas encore utilisé. Cela fait une différence.»16)
Il est probable que Hitler sattendait également à ce que ses ordres mili-
taires soient communiqués à lAngleterre lAllemagne, en tant que «pays
ouvert», nétait nullement à labri de lespionnage comme lUnion soviétique.
Il tentait ainsi de contraindre Londres à prendre une initiative sérieuse en vue
darriver à un compromis. Il faut aussi considérer que Hitler voulait contrôler
lefficacité de la Wehrmacht en état dultime alerte. En tout cas et les
déclarations de tous les participants coïncident largement pour tirer profit
de leffet de surprise du pacte de non-agression avec lUnion soviétique,
Hitler, comme il a été dit plus haut, avait lié à son ordre de marche du 23 août
lintention politique damener lAngleterre et la Pologne à la table des
négociations. Mais ce calcul na pas réussi.
16) Procès de la Wilhelmstrasse, affaire XI, rapport du procès, vol. 77, p. 25558.
17) W. Görliz, op. cit., p. 210.
424
Le feld-maréchal von Manstein confirme cette attitude fondamentale:
«Quoi quil en soit, les mesures militaires prises en août 1939 pouvaient
effectivement être destinées malgré le plan de marche Plan Blanc à
renforcer la pression politique sur la Pologne afin de lamener à la conci-
liation. Par ordre de Hitler, on travaillait fiévreusement à la construction
dun Ostwall rempart de lEst léquivalent à lest de la ligne Siegfried.
Des divisions entières, dont la 18e, étaient stationnées en roulement
permanent pour quelques semaines à la frontière polonaise afin de travailler
à ce rempart. À quoi bon ce déploiement si Hitler avait eu lintention
dattaquer la Pologne? Et au cas où à lencontre de toutes ses assurances
il aurait envisagé la possibilité dune guerre sur deux fronts, ce rempart
aurait été tout à fait mal placé. Car, dans une telle éventualité, la seule
chose à faire serait de vaincre tout dabord la Pologne en lattaquant, le
front occidental restant sur la défensive. La solution inverse, à savoir
offensive à louest et défensive à lest, était hors de question vu les
rapports de forces de lépoque. Il nexistait dailleurs aucun plan pour
une quelconque offensive à louest, et aucun préparatif ne fut envisagé à
cet effet. Si donc la construction dun rempart de lEst devait revêtir un
sens quelconque dans la situation donnée, ce serait sans aucun doute
seulement pour exercer une pression sur la Pologne par une importante
concentration de troupes à la frontière polonaise. Le déploiement des
divisions dinfanterie sur la rive orientale de lOder pendant les dix derniers
jours du mois daoût et le stationnement des divisions blindées et moto-
risées dans les zones dattente tout dabord à louest de lOder, ne
constituaient pas nécessairement des préparatifs dattaque mais pouvaient
aussi être interprétés comme un moyen politique de pression.»18)
425
millions de tonnes de charbon, deux millions de tonnes dacier, sept millions
de tonnes de mazout etc., plus 150 batteries antiaériennes. Après cette réponse,
Hitler devait escompter que la Grande-Bretagne était au courant de lattitude
de lItalie et refuserait maintenant à plus forte raison tout compromis. Juste
après, Hitler reçut effectivement par câble la nouvelle que la Grande-Bretagne
sétait liée encore plus étroitement à la Pologne par un accord de garantie
élargie.
Lobjectif politique des mesures militaires devenait ainsi caduc. Lordre de
marche fut immédiatement annulé.
Hitler nescomptait ni ne voulait la participation militaire de lItalie au
conflit avec la Pologne, mais seulement la solidarité politique du partenaire
de lAxe. Cette rebuffade politique de lItalie, dautant plus sensible que la
Grande-Bretagne fut immédiatement avisée de la neutralité absolue de lItalie,
a particulièrement ébranlé Hitler du fait du durcissement inévitable de la
position britannique et de ses conséquences immédiates. Le 22 août, Cham-
berlain avait à nouveau insisté sur lalliance contractuelle avec la Pologne
le 25 août, Hitler ne pouvait être concerné par cette alliance. Hitler savait
très bien, dès le départ, quil navait aucunement le moyen de scinder le
front polono-britannique. Cela ressort de tous les documents à ce sujet. Le
23 août, en pleine connaissance de ces circonstances, il avait donné lordre
de mise en préparation. Il retira lordre en fait, sous les mêmes circonstances:
non-participation de lItalie, promesse dalliance de la Grande-Bretagne envers
la Pologne et manque de médiation de Londres. Oui, il lannula malgré la
décision prise le 23 août par la Pologne «de mobiliser une grande partie de
larmée [les trois-quarts]».19)
Ces faits prouvent que lordre du 23 août poursuivait uniquement lobjectif
politique de provoquer des négociations par le biais de la pression des déci-
sions militaires en gestation. Sans cette pression, aucune négociation naurait
pu être amorcée pendant des mois, au contraire. Les provocations polonaises
navaient cessé de se multiplier. Le 24 août, Henderson ne voyait:
19) Livre Jaune Français, doc. 219, et Documents on British Foreign Policy 1919-1939,
vol. VII, doc. 238.
20) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 241.
426
Dautres indices confirment la thèse que cet ordre de marche du 23 août
visait ledit objectif politique:
a) Alors quon dispose de la teneur écrite de la «Directive n°1 pour la
conduite de la guerre» du 31 août 1939 (document assez volumineux, au
demeurant), on ne connaît aucun écrit sur lordre dattaque du 23 août. Il
nétait pourtant pas dans les habitudes de la Wehrmacht de ne communiquer
quoralement un ordre dune telle portée.
b) Le plan de Hitler «Fall Weiß» (Plan Blanc) prévoyait le 1er septembre
1939 comme première date possible; hâter cette date aurait exigé de nom-
breuses modifications des opérations. Rien ne nous en est pourtant parvenu.
c) Le 25 août, les troupes allemandes sur la frontière de louest, par
exemple, noccupaient pas encore leurs bases de défense ce qui était prévu
pour le 1er septembre. Il nest fait cas daucun ordre qui aurait prévu doccuper
ces ouvrages défensifs avant la date.21)
d) Si des mesures ont été déclenchées à lavance dans des proportions
croissantes dès le 18 août, lordre de mobilisation camouflée ne fut donné,
lui, de Berlin que le 25 août, vers midi.22) Cette mobilisation camouflée, qui
devait se dérouler de manière à ne pas entraîner une aggravation de la situation
politique étrangère, fut donc commandée une nouvelle fois indépendamment
de lordre de marche du 23 août, et poursuivait donc bien un but politique
différent; elle nétait pas subordonnée à un ordre de marche; en revanche,
lordre de marche du 23 août nétait pas, quant à lui, subordonné à la mobili-
sation camouflée.
Si vraiment lordre de marche du 23 août avait été sérieux, Hitler naurait
eu aucune raison de le retirer le 25 août, puisque lattitude de ses adver-
saires ne sétait pas modifiée depuis le 23 août. Sil avait été prêt à marcher
plus tôt, alors il aurait dû le faire le 25 août. Étant donné que ce ne fut pas le
cas, il y a lieu de contester le sérieux politique de lordre de marche du 23
août. La question se pose toutefois: Hitler serait-il aussi revenu en dernière
minute sur son ordre de marche (ce quil fit le 25 août peu après douze
heures),23) si la Grande-Bretagne navait absolument rien entrepris le 25 août?
Faute de documents, on ne peut répondre à cette question, dailleurs
hypothétique. Le seul indice favorable à lhypothèse selon laquelle il aurait
427
annulé lordre même dans ce cas, pourrait être la proposition dalliance de
Hitler à la Grande-Bretagne, du 25 août vers midi.
On ne pouvait en effet sattendre à ce que la Grande-Bretagne saisît cette
proposition si, le lendemain, les troupes allemandes devaient entrer en
Pologne. Cette proposition de dernière minute ne peut donc pas non plus
être interprétée comme une diversion militaire tactique, la Grande-Bretagne
nétant de toute façon pas en mesure dintervenir tout de suite militairement
en cas dune invasion de la Pologne par les troupes allemandes; il faut pré-
sumer en outre que la Pologne était également déjà informée de lordre de
marche de la Wehrmacht et quune diversion était ainsi peu probable. En
tout état de cause, le 25 août à 13 h 30, Hitler avisait Henderson, lambas-
sadeur britannique, quaprès avoir réglé le problème germano-polonais, il
adresserait une proposition généreuse dalliance à la Grande-Bretagne. Il
est évident quun tel plan ne pouvait réussir que grâce à un «règlement
pacifique du problème germano-polonais». Devant ces perspectives dune
future coopération germano-britannique, énoncées par Hitler, la Grande-
Bretagne aurait pu aider à convaincre la Pologne de se raviser. Ni Chamberlain,
ni Henderson nont affirmé que Hitler aurait fait allusion à un «règlement
armé», ou quil aurait pu le faire. Bien plus, ils étaient plutôt convaincus quil
fallait rappeler les Polonais à la raison, et non les Allemands.24)
Dailleurs, le biographe de Chamberlain, K. Feiling, confirme que bien
quil eût connaissance de la mise en préparation de larmée allemande le
Premier britannique considérait la proposition du 25 août 1939 de Hitler à
la Grande-Bretagne comme étant soumise à un éventuel règlement pacifique
avec la Pologne:
24) A.J.P. Taylor, op. cit., pp. 272 et 275, entre autres.
25) K. Feiling, The Life of Neville Chamberlain, pp. 416-417.
428
Les activités du gouvernement britannique
du 25 au 28 août
429
la réaction britannique pour le 23 août on ne peut, par contre, absoudre
Londres de la responsabilité davoir somme toute provoqué le pacte Staline-
Hitler. La réaction britannique rendit la situation encore plus désespérée et
encouragea les forces intéressées par un conflit militaire avec lAllemagne.
On ne considéra même pas léventualité dun consensus pacifique.27)
Sur la recommandation de Hitler, lambassadeur Henderson se rendit, le 26
août, à Londres, porteur de la proposition allemande dalliance du 25 août. Il y
fut retenu jusquau 28 août à 17 h 00, un laps de temps qui entraîna la
«stagnation» des pourparlers.30) Lorsquen ce 28 août, à 22 h 30, Henderson
remit à Hitler la réponse britannique à son offre dalliance et à sa requête
dassistance dans le règlement des litiges germano-polonais (du 25 août),
Hitler était en droit despérer que le gouvernement britannique avait profité
de ces trois jours pour ménager des entretiens intensifs avec Varsovie, et
avait influé sur la Pologne pour lamener à négocier désormais sous la
protection de la Grande-Bretagne et de la France. On porta à la connaissance
de Hitler, en soulignant que la situation était «extrêmement urgente», que le
gouvernement britannique était prêt:
30) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 355, et N. Henderson,
Failure of a Mission, pp. 259-262.
31) op. cit., doc. 447, et Livre Blanc Allemand N° 2, doc. 463.
430
tentative de remettre les choses en ordre» était désormais «hors de question».32)
Cette escroquerie de Halifax, dissimulée sous différentes facettes jusquà
présent, est restée longtemps ignorée des historiens, car eux aussi avaient été
dupés par des documents falsifiés, voire par des documents reposant sur de
fausses informations. (Lun dentre eux dans les documents britanniques sur
la politique étrangère, les autres dans le Livre Blanc Polonais, le Livre Bleu
Anglais et le Livre Jaune Français.)
Le 28 août, Halifax inventait de toutes pièces une prétendue communi-
cation téléphonique avec Kennard, à 16 heures, dont la teneur aurait été
lacceptation des Polonais de négocier. Il la frauduleusement introduite
dans les documents britanniques. Lhistorien la retrouve aujourdhui dans la
pièce n°420 des Documents on British Foreign Policy. Ce «document» ne
peut être authentique. Et le mérite historique davoir découvert cette supercherie
vingt ans après la fin de la guerre et davoir mis en garde les historiens revient
à un chercheur allemand.33)
Preuves:
1.) Le Livre Bleu Anglais, publié immédiatement après le début de la guerre
en 1939, ne contient aucune mention de cette disposition des Polonais à
négocier. Pourtant le Premier ministre, Chamberlain, avait déclaré, le 1er sep-
tembre 1939, devant la Chambre des Communes que le Livre Bleu Anglais
(curieusement déjà presque complètement achevé avant même le déclenchement
du conflit germano-polonais)34) renfermait tous les documents importants.
2.) Le Livre Blanc Polonais, (Les Relations Polono-Allemandes et Polono-
Soviétiques au cours de la période 1933-1939) élaboré en Angleterre début
1940 par le gouvernement polonais en exil, comprend, sous le n° 96, une
communication du 28 août 1939 de Beck à ses ambassadeurs à Londres et
Paris:
431
Ce «document» semble aussi avoir été fabriqué ultérieurement «en
consultation» avec le gouvernement britannique: le 28 août Beck ne pouvait
absolument pas avoir choisi ces termes pour le gouvernement britannique, car
«une consultation» sur la note adressée à Hitler ne correspondait tout
simplement pas aux faits réels. Toutefois, le fait de mentionner ces fausses
indications à deux reprises dans la «note» rend la falsification encore plus
évidente. Halifax fit remettre la note britannique à Berlin, sans que la Pologne
ait été consultée auparavant. Encore moins avait-elle été appelée à émettre des
requêtes en vue de les transmettre à Hitler.
3.) Le 27 août Halifax reçut de son ambassadeur la nouvelle suivante,
télégraphiée de Varsovie à 22 h 46:
Ce nest que le 28 août (un jour plus tard) à 19 heures trois heures après
le prétendu accord des Polonais pour négocier! (document 420-16 heures) et
seulement après réception dun nouvel avis de mobilisation de Varsovie
(document 424) que Halifax senquit:
35) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 391.
36) ibid., doc. 436.
37) ibid., doc. 4, 280, 357, 372, 539, 576, et Livre Jaune Français, doc. 218, 222.
38) E. Raczynski, op. cit., p. 24.
432
«Le colonel Beck appréhendait les négociations, non parce quelles
étaient vouées à léchec, mais parce quil craignait que Hitler finît par
accepter quand même un compromis et que la Grande-Bretagne se mon-
trât disposée à imposer un tel compromis à la Pologne.»39)
«La menace dune guerre écartée, il ny avait plus aucune chance
dobtenir des concessions des Polonais, et les Britanniques en étaient
conscients.» 40)
433
c) Latmosphère au cours des ces trois jours (26-28 août) était absolument
singulière dans le contexte de cette période cruciale, et na jamais été expliquée.
6.) Lambassadeur Kennard fut reçu par Beck dans la soirée du 28 août. Les
dirigeants britanniques ne furent informés du résultat de lentretien que tôt
dans la matinée du 29 août.43) Il ne leur était donc pas possible de détenir déjà
cette réponse le 28 août à 16 heures. Par ailleurs, Kennard ne put insérer à
lentretien aucune remarque sur la disposition des Polonais à négocier, ni
évoquer un «nouveau cours» à Varsovie ou indiquer que lon attendait en fait
désormais une réaction diplomatique de Hitler. Au contraire, cest Beck qui
informa Kennard quau cas où lon «ne recevrait pas de réponse satisfaisante»
du Sénat de Dantzig, il fallait sattendre à un fait accompli à Dantzig pour la
nuit même. Sur ce, Kennard se vit contraint de mettre Beck en garde.43)
7.) Le 28 août à 14 heures,44) Halifax avait demandé à Kennard à Varsovie
de communiquer le résultat de sa conversation avec Beck non seulement à
Londres, mais aussi à Berlin, Paris et Rome. Dans la réponse donnée (pré-
tendument) deux heures plus tard, Kennard «confirme» (prétendument) sen
être acquitté. Le fait que ni Henderson (Berlin), ni Phipps (Paris), ni Loraine
(Rome) nen furent en réalité informés, prouve le caractère frauduleux de
ladjonction ultérieure de ce télégramme.45) Et aucun ambassadeur polonais
dans ces villes nen a jamais eu communication de Varsovie. En outre,
linsistance de Henderson auprès de Lipski, lambassadeur polonais à Berlin,
jusquaux dernières heures de paix, aboutit à la constatation, ou plutôt
fournit la preuve, que Lipski fut si étroitement assujetti aux instructions de
Varsovie quil ne devait sintéresser à aucune note du gouvernement du
Reich et quil nétait pas autorisé à entamer des négociations précises.
Pour cacher cette manuvre frauduleuse aux yeux des nations du monde
entier au début de la guerre, linstruction finale ne fut donc pas consignée
dans le Livre Bleu Anglais (doc. 73).
8.) Le 28 août à 18 heures, Lord Halifax télégraphiait à Kennard46) quil
avait communiqué la teneur de la note britannique de 14 heures, adressée à
Varsovie et portant sur la demande dacceptation de la Pologne à négocier, à
lambassadeur polonais à Londres, Raczynski. Halifax mentionne en outre: «Si
une réponse favorable à ce sujet nous parvient en temps utile...» Halifax ne
pouvait écrire ce passage dans son télégramme de 18 heures que sil navait
434
pas encore reçu cette acceptation. Le document 420, qui stipule que cette
acceptation des Polonais à négocier était déjà parvenue deux heures auparavant,
ne saurait donc être authentique.
Dans son comportement de faussaire, Halifax a commis une erreur et ce,
deux heures à peine après linsertion de la supercherie.
Les éditeurs des documents britanniques de politique étrangère se sont
également heurtés à ce fait puisque le document 430 comporte une notule
(5) pour avertir que «ce télégramme a vraisemblablement dû être envoyé avant
réception du document 420» sans avoir pour autant fourni dexplication à
cette anomalie.
9.) Le 29 août Halifax informe à retardement son ambassadeur à Varsovie
sur la manière dont sest déroulé son entretien (du 28 août) avec Raczynski. 47)
Halifax déclare que Raczynski «semblait être sans contact avec son gouver-
nement et navait aucune remarque à faire». Pas un mot de lambassadeur pour
indiquer sil avait par hasard transmis ou confirmé lacceptation de la Pologne
à négocier. Il ne voulait rien savoir non plus de ce que la Grande-Bretagne
entendait par «garantie internationale». En revanche, Raczynski senquit de la
réponse britannique à Hitler et demanda si
Halifax navait pas réclamé de trêve à la Pologne, mais il avait par contre
fait comprendre que cétait sur Berlin quil fallait faire pression pour mettre
terme aux provocations. Halifax navait exhorté les Polonais à négocier
avec lAllemagne ni dans son entretien avec Raczynski, ni dans sa note à
Varsovie. Il soulignait au contraire:
435
Devant cette déclaration et dautres analogues du ministre des Affaires
étrangères britannique à ce moment précis, la phrase suivante ne pouvait être
écrite que pour les archives:
436
ne comportent toutefois aucune mention dune acceptation polonaise
(obtenue, prétend-on, deux heures auparavant) qui aurait dû être annoncée.
Ce télégramme, justement, aurait dû faire sensation après tant dévénements
et après le refus permanent de négocier opposé durant de longs mois par
Varsovie. Ce nest quun jour plus tard, le 29 août à 10 h 50,51) que Halifax se
décide à informer les ambassadeurs à Washington et à Rome et précisément
et seulement ceux-ci que, devant le consentement de la Pologne à négocier,
reçu entre-temps, la note britannique à Hitler avait été modifiée. Cette
communication était un mensonge, étant donné que:
a) Comme il a été démontré, aucune acceptation par la Pologne de négocier
navait été communiquée:
b) La note à Hitler ne fut pas modifiée puisque plutôt que de la remettre à
Henderson qui partait pour Berlin comme chacun eût été en droit de le
supposer elle fut télégraphiée ultérieurement;
c) On ne comprend pas pourquoi si, dès 16 heures, Beck avait accepté
la négociation Halifax naurait pu déjà joindre cette importante communi-
cation dans sa dépêche envoyée à 18 heures.
En ce 28 août, Lord Halifax faisait un nouveau pas sur le sentier de la
guerre: dès 9 h 30 du matin, il fut informé par le chargé daffaires de lam-
bassade de Grande-Bretagne à Berlin, Ogilvie-Forbes, du résultat dune
conversation entre le feld-maréchal Göring et lindustriel suédois Birger
Dahlerus, auquel Göring avait fait appel depuis juillet 1939 comme médiateur
entre lAllemagne et la Grande-Bretagne. Le point 5 de cette communication au
Foreign Office disait:
437
teneur de la réponse britannique à Hitler et avait été prié de la transmettre
non chiffrée à Varsovie. La transmission de la réponse britannique, par deux
voies différentes, à Varsovie était déjà hors du commun. Il eût suffit de
remettre une simple copie à Raczynski pour sa propre gouverne. Il était
encore plus insolite dengager lambassadeur polonais à Londres à adopter
une attitude qui nétait pas usuelle et qui non seulement pouvait, mais devait
avoir un grand retentissement public. Car si le destinataire de cette infor-
mation, Raczynski, ne se sentait lié à aucune obligation de secret, les des-
tinataires de son information, quant à eux (les journalistes), semparèrent
naturellement aussitôt de cette nouvelle pour la publier et en faire une
«sensation». Ces journalistes («la presse») ne pouvaient ignorer leur part de
responsabilité. Le Premier ministre, responsable du gouvernement, quant à
lui, nétait pas informé de cet arrangement. Du fait de la succession désormais
rapide des événements, des recherches sur la source des informations auraient
certes conduit à Raczynski, mais pas plus loin.
Une fois de plus Halifax avait surclassé les «hommes politiques de la-
paisement» à létranger aussi bien quen Grande-Bretagne, dans la mesure où
ils occupaient encore des postes dautorité. Le discours, tenu le 29 août
1939, par Chamberlain devant la Chambre des Communes et bien quil ne
comptât plus à cette époque au nombre des «hommes politiques de lapaise-
ment» montre combien ce qui ressort en outre des lettres adressées à sa
sur il était indigné par cette manuvre, sans en reconnaître linstigateur:
«Il est une observation que je voudrais faire en cet instant au sujet de
la presse. Je pense quil est nécessaire, une fois de plus, de demander
instamment à la presse de faire preuve de la plus grande réserve, en un
moment où il est tout à fait possible que quelques paroles inconsidérées,
paraissant dans un journal, même dénué, peut-être, de toute importance
particulière, puissent ruiner tous les efforts que déploie actuellement le
Gouvernement pour obtenir une solution satisfaisante. Jai appris quun
compte rendu soi-disant textuel de la communication adressée par le
Gouvernement de Sa Majesté à Herr Hitler a été télégraphié hier soir ou ce
matin à létranger. Ce compte rendu na pu être, de bout en bout, que pure
invention. Il est très regrettable, selon moi, que des journalistes, dans
lexercice de leur profession, prennent sur eux de pareilles responsabilités,
qui ne les affectent pas eux tout seuls, mais peut-être les habitants de
tous les pays du monde...
Je serais heureux de pouvoir fournir à la Chambre les informations les
plus complètes sur le texte des communications échangées avec Herr
Hitler. Mais les membres de lAssemblée comprendront que, dans une
situation dune si extrême délicatesse, et alors que des problèmes si
graves font lobjet de discussions aussi périlleuses, il ne serait pas dans
438
lintérêt public de livrer à la publicité ces communications confidentielles,
ou de formuler dès à présent, à leur sujet, des commentaires détaillés.»55)
55) Livre Bleu Anglais N° 1, doc. 77, et F. Lenz, op. cit., vol. I, pp. 392-398.
56) ADAP VII, doc. 366.
57) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 539.
58) ibid., doc. 435, 491. Halifax se réfère à «une source allemande de premier ordre».
Lavis selon lequel Dahlerus aurait transmis cette nouvelle quil aurait apprise par
Göring (notule l, doc. 435) paraît invraisemblable. En effet, il est peu probable que
Göring ait dévoilé au médiateur suédois des détails opérationnels dun plan dattaque
allemand contre la Pologne. Dautre part, on nest pas loin de penser que lambassade
britannique à Berlin aurait pu camoufler par ce biais ses propres sources dinformation.
Selon le document 491, il est dailleurs fait allusion à une autre «source allemande de
premier ordre».
59) ibid., doc. 495.
439
août à 16 heures, le comte Szembek informa les ambassadeurs britannique et
français de cette mobilisation générale polonaise, décidée à linstant même et
«qui ne complétait toutefois que les mesures militaires déjà prises aupa-
ravant».60) En décrétant ces mesures, la Pologne se référa formellement à la
mise en garde de Londres la veille contre des mouvements de troupes
allemandes et à lintention de lAllemagne «dattaquer la Pologne par surpri-
se».60) La mobilisation générale devait être décrétée le lendemain matin de
bonne heure. Elle fut toutefois différée de quelques heures, jusque dans
laprès-midi du 30 août (14 h 30), du fait des échanges diplomatiques entre
Londres et Varsovie.
440
Lentretien du 29 août entre
Hitler et Henderson
Entre-temps, Hitler avait été informé par les services secrets de la mo-
bilisation polonaise supplémentaire du 28 août, ainsi que de la concentration
des formations polonaises à la frontière,61) et aussi de la décision interne de
mobilisation générale dans laprès-midi du 29 août. Hitler ne dissimula
même pas à lambassadeur britannique Henderson quil disposait de sources
de renseignements aussi considérables sur Varsovie.62) Au courant de ces
actions militaires et politiques secrètes à Varsovie, qui poussaient lAlle-
magne à prendre des contre-mesures immédiates, Hitler envoyait deux heures
trois quarts plus tard, cest-à-dire à 18 h 45, une note-réponse au gouvernement
britannique. «À cause du caractère extrêmement urgent de la situation, par le
fait que deux armées mobilisées se trouvaient à portée de fusil et que la
minorité allemande de la Pologne était victime de brutalités révoltantes et
barbares»,*) Hitler y demandait lenvoi, le 30 août, dun plénipotentiaire polonais
et déclarait expressément que lAllemagne navait pas lintention de porter
atteinte à des intérêts dimportance vitale pour la Pologne ou de mettre en
question lexistence dun État polonais indépendant.*) Hitler laissa entendre
par la même occasion quil faisait élaborer séance tenante des projets de
négociation.
Mais dans quelle disposition desprit lambassadeur britannique Henderson
se présenta-t-il à cette audience du 29 août? Avait-il été inspiré par les
membres de la résistance au sein du ministère des Affaires étrangères allemand
qui sétaient efforcés, pendant la «crise daoût», dempêcher «un nouveau
Munich ou un nouveau Prague»?63) Le secrétaire dÉtat, von Weizsäcker,
lavait souvent influencé en ce sens.64) Henderson était conscient de la gra-
vité de la situation et de lenjeu résultant justement de cet entretien avec
Hitler, donc de la réponse de Hitler à la note tardive des Anglais. Il recon-
naissait lui-même que, la veille encore, eu égard à la rencontre avec Hitler, «il
61) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 424.
62) ibid., doc. 493.
*) Livre Blanc Allemand N° 2, doc. 466 et 464.
63) TMI, vol. XII, p. 245.
64) E. von Weizsäcker, Erinnerungen, p. 251
441
ne désespérait pas» de pouvoir compter sur le bon sens de ce dernier. Pourtant,
avant cette conversation du 29 août, sans savoir donc quel serait le comporte-
ment de Hitler et quelle serait la réponse allemande à la note britannique du 28
août, «il avait décidé, après mûre réflexion»,65) de laisser libre cours à son
sentiment devant Hitler et dapostropher vertement le chancelier du Reich;
«Hitler est une anormalité; cela lui ferait du bien de recevoir une dose de sa
propre médecine». 65) Dans une lettre personnelle adressée à Lord Halifax,
Henderson poursuivait:
«Aussi, lui ai-je dit mes quatre vérités lorsquil men fournit loccasion
à propos dun point de détail mineur, à savoir notre complète indifférence
devant le massacre dAllemands en Pologne...
Il [Hitler] ne fit preuve daucune réaction particulière, mais je ne doute
pas que ce fût pour lui une surprise désagréable et inhabituelle...
Je dois ajouter que jétais prêt à me lever quand le pire fut passé,
mais il ne fit pas un geste.»65)
«Je me mettais donc à crier plus fort que Monsieur Hitler (I therefore
proceeded to out-shout Herr Hitler). Je lui dis que je nécouterais plus de
tels propos [sur le massacre dAllemands de souche en Pologne] proférés
par lui ou par un autre. De pareils propos sont intolérables et sont un
échantillon de ses outrances...
Il ne répondit pas et jai maintenu ce ton véhément tout au long de la
conversation.» 66)
65) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 565.
66) ibid., doc. 508.
67) J. von Ribbentrop, De Londres à Moscou, p. 150 (Zwischen London und Moskau, p. 191).
442
la garantie «on ne tiendrait pas compte de la question de lagresseur».68)
Même en ces journées décisives, le gouvernement britannique navait pas
tenté de faire enquête sur les plaintes des Allemands, et encore moins damener
la Pologne à se raviser, bien quil ait été informé de létat de choses par ses
services de renseignements.
Celui qui «après mûre réflexion» prend des constatations fondées
comme prétexte pour «vociférer» continuellement au cours dun entretien de
haute politique se met dans son tort et commet une faute.
2. Cette persécution des Allemands de souche en Pologne, que Hender-
son traitait maintenant de «point de détail mineur», voici comment il en parlait
dans ses télégrammes peu de jours avant:
Le 21 août à Halifax:
«Hier je prenais le thé avec lun de mes amis [le résistant von
Weizsäcker] et il insistait sur une action immédiate. Bien quil reconnût
une certaine exagération de la part de la presse, il massura que ce qui se
passait était une sorte dexode forcé des Allemands de Pologne, où il ne
leur était plus possible de trouver le moyen de gagner leur vie. Il sagit ici
dune question urgente.
Je parlais de patience mais il me dit immédiatement que la simple
mention en ferait enrager Hitler. Le problème essentiel aujourdhui
nest pas Dantzig mais la question des minorités...
Le correspondant local du Times vient de me raconter son entretien
téléphonique de la veille avec son collègue de Varsovie qui lui déclara
que les Polonais se comportaient de façon incroyablement insensée.»70)
68) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. IV, doc. 584.
69) ibid., vol. VII, doc. 112.
70) ibid., doc. 117.
443
Le 24 août à Halifax:
Henderson avait donc été mis au courant des faits par des informateurs
les plus divers, dignes de confiance. Quil relègue alors justement ce thème
au rang de «point de détail mineur» et le prenne comme base de provocation
vis-à-vis du chef du gouvernement allemand rend la préméditation de cette
provocation encore plus claire et insensée.
3. Afin de mieux mettre en lumière lattitude de Henderson au cours de
sa conversation du 29 août avec Hitler cest-à-dire mieux que nont pu le
faire les divers éclaircissements rapportés jusquici il convient de consi-
dérer dans quel état desprit se déroula lentretien de la veille, le 28 août,
tard dans la soirée entre Hitler et Henderson. Ce dernier écrivait lui-même à
ce sujet:
444
tater: aucune animosité, mais un silence absolu, peut-être un certain
malaise.
Je fus reçu avec une garde dhonneur dans tout son apparat, comme
sil sagissait de présenter mes lettres de créance. Je fus immédiatement
introduit, accompagné de Ribbentrop et de linévitable Dr Schmidt. Le
chancelier paraissait en forme, très calme et normal. Aucune sorte dartifice,
ni de tirade...
Hitler ne montra aucune émotion à la lecture du texte allemand [de
la note britannique].
Je ne suis pas sans espérer que la réponse de Hitler ne sera pas trop
déraisonnable...
Latmosphère était amicale, même de la part de Ribbentrop...
Un autre point de la conversation portait sur linsistance de Hitler
quant à la valeur de lamitié anglo-allemande...»73)
445
Collaboration entre Londres et Varsovie,
du 29 au 31 août
446
navait pas informé son collègue français à Berlin, lambassadeur Coulondre,
de ces prétendues revendications exprimées par Hitler.77) On ne trouve pas
davantage mention de ces prétendues revendications dans les dossiers du
ministère des Affaires étrangères allemand.78) Ces documents sont dautant
plus dignes de foi quils ont été publiés par le vainqueur. Mais quel que fût
lauteur de ces prétendues revendications de Hitler (tout le Corridor et la
Haute-Silésie orientale), Halifax, lui, dépassa ce stade en diffusant des
nouvelles, dont il accentuait la gravité, alors quil nen avait aucune preuve. Il
savait pourtant que le ministre des Affaires étrangères polonais:
Il savait aussi que Beck avait pris «le langage tenu par Hitler le 25 août»
comme prétexte de la mobilisation polonaise.80) Chamberlain assaisonna à son
tour la communication à Paris de largument pertinent:
447
Hitler correspondait en fait à ce que Londres avait attendu de Berlin, à savoir
des entretiens «immédiats» en dépit de tout cela «le gouvernement britannique
refusa de se hâter».83)
Jamais même à ce stade il na voulu faire de la disposition polonaise à
négocier une condition de laide britannique. Henderson brossait le tableau
avec justesse lorsquil écrivait, le 29 août, à son ministre:
«Il nest pas sans profit de relever qualors que tous les autres diplo-
mates demandaient à me parler, lambassadeur polonais avec lequel
jentretiens par ailleurs dexcellentes relations na montré aucun signe
dun quelconque intérêt.»84)
«Si nous acceptons que ces derniers [les Polonais] parlent sans cesse
de leur amour-propre, de leur prestige et de leurs signes de fléchissement,
nous ne serons pas innocents dans la responsabilité de ce désastre.»73)
448
tout comme son collègue américain, Biddle, il connaissait bien la volonté
belliciste des Polonais.87)
Kennard transmettait certes, à loccasion, les avertissements répétés de
Lord Halifax: que la Pologne devait se comporter de telle sorte que le rôle
dagresseur ne lui revienne pas, parce que cela pouvait avoir des effets néga-
tifs sur lopinion publique mondiale.88) Pourtant, il estima tout à fait légitime de
tenter de convaincre son ministre des Affaires étrangères de la justesse du
comportement polonais. Kennard savait fort bien quil était utile pour la
Pologne qui «voyait ses intérêts vitaux menacés à Dantzig», de négocier une
garantie internationale pour la protection de ces intérêts. Toutefois, par son
attitude, il soutint lintention de Beck de «ne pas, évidemment, se rendre à
Berlin»89) sur invitation officielle. Kennard savait aussi combien le ministre
des Affaires étrangères, Beck, attendait impatiemment les renseignements sur
les mesures prises à Londres afin daligner sur celles-ci la politique polonaise.90)
Pourtant il sabstint dexercer une pression quelconque en faveur de pourparlers
pacifiques.
Le 29 août à 16 h 00, après lannonce de la mobilisation générale polonaise,
Kennard attirait certes lattention sur le fait:
Malgré tout, cependant, tout comme son collègue français, Noël, il re-
commanda au sous-secrétaire dÉtat polonais, le comte Szembek,
«que la Pologne prenne toutes les mesures militaires pour contrer une
attaque-surprise, mais nous recommandions surtout que lon ne donnât
aucune publicité aux mesures extrêmes quils [les Polonais] pourraient
juger nécessaires.»92)
Une heure et demie plus tard, Beck confirma par téléphone cette sugges-
tion.93)
Le 29 août, Lord Halifax limita ses autres initiatives à conseiller, sans
insistance, dajourner la mobilisation générale polonaise et se montra satisfait
87) Foreign Relations of the United States 1939, vol. I, p. 367.
88) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 4, 280, 357, 372,
539, 576, et Livre Jaune Français, doc. 218, 222.
89) ibid., vol. VII, doc. 357, 512, 608.
90) ibid., vol. VII, doc. 371.
91) Livre Blanc Polonais, doc. 98.
92) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 473.
93) ibid., doc. 475.
449
dès que le colonel Beck promit de reculer de «quelques heures» lenvoi des
ordres de mobilisation. Halifax fournissait par ailleurs continuellement le
gouvernement polonais en «informations secrètes en provenance dAllema-
gne», selon lesquelles les troupes allemandes étaient en passe dattaquer la
Pologne sur tous les fronts.94) À 23 h 55, Halifax ordonna à son ambassadeur à
Varsovie de déclarer que, bien que la réponse allemande «ne semble pas
fermer toutes les portes», il ne pouvait «endosser la responsabilité de décon-
seiller au gouvernement polonais dentreprendre toute action quil jugerait
nécessaire à sa sécurité».95) Il avait ainsi accepté, le jour même, la mobilisation
générale polonaise et visiblement contribué à lévolution vers un conflit armé.
Le 29 août dans la soirée à un moment donc où, grâce à la tactique
britannique de temporisation, Varsovie ne connaissait ni la teneur des bases
de négociations allemandes, ni la limitation des délais le ministre des
Affaires étrangères, Beck, ne formula pas dobjections à Kennard quant à
lurgence du désir des Allemands de sentretenir avec lui, mais uniquement
au fait que Hitler ne voulait pas renoncer à Dantzig. Beck maintenait sa posi-
tion, à savoir quune reprise des pourparlers avec lAllemagne, sur la base des
propositions de mars, ne pouvait toujours quaboutir à la guerre. Si «dans les
prochaines heures de la nuit même [du 29 au 30 août]» Hitler «ne donnait pas
une réponse positive favorable [cest-à-dire: son renoncement définitif à
Dantzig et lamélioration des modalités de transit par le Corridor]», la
mobilisation générale serait maintenue.96) Beck en proférait la menace devant
les ambassadeurs britannique et français. Étant donné que cette mobilisation
générale représentait surtout en ce qui concernait les objectifs stratégiques
de la Pologne un pas décisif pour que la guerre éclate, ce souhait prononcé
par Beck élucide clairement la question de responsabilité. Et tandis que, deux
jours plus tard, lambassadeur polonais à Berlin, Lipski, qualifiait la proposition
allemande de «signe de faiblesse»,97) quelle valeur la Pologne aurait-elle alors
attribuée au renoncement de lAllemagne à Dantzig?
Le gouvernement polonais considérait tout «signe de faiblesse» des Alle-
mands comme une «victoire», tout en alignant en même temps son propre
comportement, de manière à ce que personne ne puisse lui trouver de «signe
de faiblesse».98) Il alla si loin dans cette voie quil parvint à provoquer à
plusieurs reprises le mécontentement de diplomates britanniques pondérés.
450
Même la visite à Moscou du ministre des Affaires étrangères du Reich, von
Ribbentrop, «lauteur du pacte anti-Komintern», et même la signature du
pacte germano-soviétique de non-agression étaient interprétées comme «un
signe de faiblesse» et comme une preuve de «la situation intenable pour
lAllemagne».99) Lambassadeur polonais à Moscou se montre lui aussi opti-
miste:
99) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 252.
100) G. Bonnet, Fin dune Europe, De Munich à la Guerre, p. 288.
101) C. J. Burckhardt, Ma Mission à Dantzig 1937-1939, p. 115.
102) H. Sündermann, Das Dritte Reich eine Richtigstellung in Umrissen, pp. 198-200.
451
naise, le ministre des Affaires étrangères britannique a négligé ce qui devait
avoir des répercussions lourdes de conséquences dinformer le gouverne-
ment polonais, le 29 août, de la disposition des Allemands à négocier, ne se
décidant à le faire que le 30 août, tard dans la soirée. Et même si, le 29 août au
soir, Halifax faisait encore prévenir Varsovie dun plan de marche allemand, la
consigne de «ne pas déconseiller à la Pologne de prendre des mesures quelle
jugerait utiles à sa sécurité»103) était maintenue pour le 30 août.
Tout en retardant la transmission de la proposition de négociations alle-
mande au 30 août à 19 h 00, Halifax demanda à Kennard de ne pas remettre
cette information à Beck avant minuit, cest-à-dire de la retarder encore.104) Il
devait en outre laisser entendre que la Grande-Bretagne considérait la présen-
tation de laffaire allemande [«presentation of the German case»] comme
«indéfendable et trompeuse» et avait émis une «stricte réserve à propos des
revendications allemandes»104) (télégramme de Halifax du 30 août à 19 h 00,
exécuté vers minuit).
Après la communication de la mobilisation générale polonaise à 14 h 30, le
gouvernement britannique na plus poussé le gouvernement polonais à négo-
cier, jusque dans la soirée du 30 août. Ainsi, la Pologne ne pouvait envoyer de
plénipotentiaire à Berlin en ce 30 août, tout au moins pas sous la pression
dune médiation des Britanniques. Il faut évidemment mentionner, dans ce
contexte, quaprès sa conversation avec Ribbentrop, lambassadeur britan-
nique Henderson avait rendu visite, dans la nuit même du 29 au 30 août (le 29
août juste avant minuit), à lambassadeur polonais Lipski et lui avait signifié
que la Pologne devait envoyer un plénipotentiaire le 30 août. Dès le 30 août à
midi, le gouvernement polonais était donc avisé par ce biais de la réponse de
Hitler à lAngleterre. Mais, là aussi, lambassadeur britannique se heurta à
lattitude raide de Lipski:
103) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 491, 495, 505.
104) ibid., vol. VII, doc. 539, 552 et 566.
105) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 318, et Documents on British Foreign Policy 1919-
1939, vol. VII, doc. 501.
452
septembre de Henderson au Livre Bleu Anglais (British Blue Book), non sans
intention. De même, il a supprimé du Livre Bleu Anglais les points 5, 6 et 7 du
rapport du 29 août de Henderson à Londres que voici:
106) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 493, et M. Freund,
op. cit., vol. III, p. 336.
107) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 455.
107a) ibid., doc. 504.
453
Initiatives du gouvernement du Reich
454
c) de laisser les membres des familles des minorités allemandes passer
librement la frontière;
d) de mettre un terme à la propagande dexcitation à la radio.
Cette recommandation sexpliquait par lintention dôter à Hitler «tout
prétexte justifiant une action démesurée».113)
Étant donné que la garantie de la Grande-Bretagne était valable sans
réserve pour toute action polonaise de tout genre et que, la veille, Halifax
avait donné son accord de principe à la mobilisation générale polonaise, on
ne pouvait espérer quune telle recommandation dans sa banalité namène un
revirement de Varsovie le 30 août au soir. La réaction de Beck (le 30 août à
19 h 15) était prévisible:
455
août pour aggraver encore la situation en annonçant dans laprès-midi la
mobilisation générale décrétée la veille, et en interrompant les transports
ferroviaires vers la Prusse orientale, dabord partiellement, puis complètement
le 31 août en faisant sauter le pont de Dirschau.117)
Le 30 août à 24 h 00 soit dix heures après lannonce et trente-quatre
heures après la mobilisation générale polonaise, décrétée en secret Hen-
derson remettait à Ribbentrop un mémorandum du gouvernement britannique,
disant que le gouvernement du Reich «devait évidemment sefforcer en toute
hâte» dobtenir un entretien direct avec Varsovie, même si «une prise de con-
tact était impraticable ce jour même».118) Par cette démarche, il fut signifié à
Hitler que, contrairement à sa promesse, le gouvernement britannique navait
fait aucun effort de médiation, ni même encouragé la Pologne à négocier.
Londres ne voyait pas comment le gouvernement du Reich voulait amener la
Pologne qui, depuis mars 1939, avait conclu les négociations par la menace
dune guerre à reprendre les discussions. Lord Halifax repoussa même la
requête allemande le priant de recommander à la Pologne denvoyer un repré-
sentant pour des négociations germano-polonaises immédiates.118) Halifax
avait chargé Henderson, avec insistance mais sans explication, de ne fixer
lentretien quà cette heure tardive, bien que les éléments prévus pour cette
entrevue soient déjà parvenus à lambassade à Berlin à 19 h 40. 118)
Dans sa réponse, Ribbentrop lut à lambassadeur britannique les proposi-
tions de négociations que lAllemagne envisageait de faire à la Pologne. Il lui
fut reproché ensuite de ne pas avoir remis ces propositions par écrit, mais de
sêtre contenté de les lire rapidement de façon inintelligible; ainsi aucune prise
de responsabilité ne pouvait se baser sur une telle communication orale. Le
ministre plénipotentiaire et interprète en chef Paul Schmidt nia que Ribbentrop
aurait lu rapidement et de façon inintelligible.119) La note du ministre plénipo-
tentiaire Schmidt a dailleurs été jointe aux dossiers allemands;120) il en ressort
que Ribbentrop «avait lu le document lentement et de façon distincte, et quil
avait même expliqué les points les plus importants».
Les propositions étaient prêtes. Le gouvernement britannique en connais-
sait la teneur depuis le 30 août au matin (voir les entretiens de Dahlerus à
Londres). Hitler sétait toutefois opposé à remettre ces propositions par écrit
étant donné quil voulait dabord les présenter au gouvernement polonais,
son interlocuteur réel dans toute négociation; dautant plus que la Grande-
456
Bretagne, pour navoir jusqualors tenté aucune médiation, ne pouvait
sattendre à une remise préalable de ces documents. La Grande-Bretagne ne
venait-elle pas dailleurs de laisser entendre que Londres nétait, même
maintenant, toujours pas disposée à intervenir? Pendant ces derniers jours,
le Foreign Office ne montra aucune hâte. Au cours de la conversation, Hen-
derson venait encore dexposer le point de vue de son gouvernement, fixé
dans un mémorandum, «quil serait irréalisable détablir un contact dès au-
jourdhui» entre lAllemagne et la Pologne.
Chacun savait avec quelle susceptibilité la Pologne réagissait à la question
concernant sa souveraineté. Pour cette seule raison déjà, Hitler ne pouvait
guère remettre les propositions allemandes aux mains des Britanniques. Le
ministre des Affaires étrangères du Reich, von Ribbentrop, écrivait plus tard à
ce sujet:
121) A. von Ribbentrop, Verschwörung gegen den Frieden, p. 493, et J. von Ribbentrop, De
Londres à Moscou, pp. 152-153.
122) J. Szembek, op. cit., p. 452.
457
réintégration de la province de Posen, ni les précieuses régions industrielles
de la Haute-Silésie orientale qui avaient été détachées arbitrairement et
sans motif légal en 1921, ni aucune autre sorte de révision.
De telles exigences de révision nont jamais été abordées par les dirigeants
allemands, ce qui nempêcha pas des diplomates français et britanniques, ou
dautres forces restées anonymes, dinclure de fausses communications dans
le Livre Jaune Français ou de les propager à partir de Londres.123) La
proposition allemande une «proposition véritablement dans le sens de la
Société des Nations»124) reposait sur le droit des peuples à lautodéter-
mination et renonçait même à lapplication de ce principe pour ces deux
régions. Le territoire précisé dans la proposition de Hitler ne comprenait quun
dixième de ce que la Pologne sétait illégitimement approprié en 1919. Tout
spécialiste en la matière était conscient même en 1939 du caractère généreux
de cette offre de dernière heure. Il na pas fallu recourir à un historien pour le
constater et pour faire des comparaisons avec les revendications des
démocrates de Weimar. Aux yeux des Polonais, cette proposition ne pouvait
pas sembler inférieure au plan initial, discuté dailleurs pendant cinq mois par
le colonel Beck. La Pologne, en effet, ne comptait-elle pas remporter la victoire
dun plébiscite dans les territoires litigieux, ou, tout au moins, ne propageait-
elle pas lassurance de sa victoire?
Juste avant lentretien avec Ribbentrop, Henderson écrivait à son ministre
des Affaires étrangères pour le mettre en garde:
«Si finalement une paix réelle doit régner à lavenir entre la Pologne et
son puissant voisin, les motifs de plainte de ce dernier, qui nont pas été
créés par Herr Hitler mais qui sont dordre national, doivent être éliminés.
Pour ce faire, la ville de Dantzig, à lexception du port, doit, à mon avis,
être restituée à lAllemagne; une voie exterritoriale entre le Reich et la
Prusse orientale doit être aménagée; et le problème des minorités alleman-
des doit être réglé par un échange de populations. Une paix réelle et
durable entre les deux États ne peut être bâtie sur une autre base. Il ny a
aucun espoir quun compromis diplomatique puisse être couronné dun
succès durable.
Si nous devons un jour convaincre larmée et la nation allemandes de
se révolter contre le gouvernement insupportable de Herr Hitler, cela ne
peut se faire, en ce qui concerne la Pologne, que sur une base que la
123) Livre Jaune Français, doc. 285, 287, 291, 293, et Documents on British Foreign Policy
1919-1939, vol. VII, doc. 450.
124) P. Schmidt, Statist auf diplomatischer Bühne, p. 456.
458
nation entière et même ses groupes modérés jugeraient loyale envers
lAllemagne...
Entre-temps, je ne peux quinsister une fois encore sur limportance
que revêt, pour la Pologne, son acceptation de la proposition de
négociation directe, afin de se montrer dans son droit aux yeux du
monde.» 125)
Henderson ne venait-il pas décrire que Hitler «refuserait une telle base»?
Combien dut-il alors être surpris, au cours de son entretien avec Ribbentrop,
en sapercevant que la proposition allemande contenait justement ce quil
avait lui-même esquissé comme exigence minimum des Allemands! Hitler
avait donc quand même accepté «cette base» et, à lissue de sa conversation
avec le ministre des Affaires étrangères du Reich, Henderson avait dit de
loffre allemande quelle nétait «pas déraisonnable».
125) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 537.
459
Un ambassadeur polonais indolent
«Je lui donnai dans les termes les plus tranchants, les conseils suivants:
il devrait appeler immédiatement le ministre des Affaires étrangères pour
lui dire avoir appris de moi que des propositions détaillées avaient été
élaborées et quil aimerait rendre visite à Herr von Ribbentrop afin de
prendre connaissance de ces propositions pour les communiquer sans
délai au gouvernement polonais. Je lui suggérai de sen acquitter dans la
nuit même, sous sa propre responsabilité.»127)
460
la proposition allemande (message reçu à 9 h 30).127) Entre-temps, cest-à-dire
le 31 août vers 1 ou 2 heures du matin, lintermédiaire suédois Dahlerus avait
communiqué par téléphone au Conseiller de légation de lambassade britanni-
que, Ogilvie-Forbes, la teneur de la proposition allemande. À 8 h 00, Henderson
donnait au secrétaire de légation polonais, Malhomme, le texte complet de
loffre allemande. Varsovie le reçut à 10 h 55.
À 9 h 05 au plus tard, Henderson savait sans aucun doute que léchéance
du 30 août avait été reportée au 31 août, puisquil en informait son collègue
français, Coulondre. Par la même occasion, il avait appris dun intermédiaire
de Göring quil suffisait même que Lipski puisse déclarer, dans ce laps de
temps, qu«un négociateur serait envoyé sous peu».128)
À 11 h 00 du matin, Dahlerus, accompagné du conseiller de légation
britannique, Ogilvie-Forbes, rendit visite à lambassadeur polonais Lipski.
Dahlerus, sur cette rencontre, écrit:
461
«Elles [les propositions allemandes] sont si exorbitantes, quil faut
que le gouvernement allemand soit devenu fou ou quil se livre aujourdhui
à une véritable provocation pour exciter le gouvernement polonais.»132)
462
La «ligne de conduite» de Lord Halifax
On nest pas loin de supposer que Lord Halifax ne pensait pas vraiment ce
quil disait. En effet ce nest que le 31 août à laube quil fit transmettre au
gouvernement polonais les documents qui devaient servir de base aux né-
gociations et que Hitler avait élaborés le 29 août au soir. Halifax émettait de
nombreuses réserves quant au contenu,134) au point de provoquer pratiquement
les Polonais à refuser le document. Halifax reconnaissait, dans ce télégramme
adressé à son ambassadeur à Varsovie (le 30 août à 19 heures; transmission le
31 août à laube), avoir «suivi une ligne de conduite» et il attachait de
limportance à ce que le ministre des Affaires étrangères polonais, Beck, «prît
note» de cette ligne de conduite.135) Il fallait entendre par là le retard délibéré
de la transmission ainsi que les réserves britanniques quant à la teneur de la
proposition allemande, mais aussi le comportement déloyal du ministre des
Affaires étrangères britannique depuis le 25 ou au moins le 28 août, y compris
lapprobation sans réserve de la mobilisation générale polonaise. Afin de
montrer encore plus clairement son intention à son homologue polonais,
Halifax compléta en lui recommandant de négocier, eu égard à la «situation
intérieure de lAllemagne ainsi quà lopinion publique mondiale».
Après ledit retard du 29 août au soir jusquau 31 août, tôt dans la matinée,
Halifax dit aux Polonais que les propositions allemandes ne recélaient «aucun
ultimatum». Il venait pourtant de refuser, pour cette raison, de recommander à
temps au gouvernement polonais (24 heures après la mobilisation générale
polonaise) denvoyer un plénipotentiaire à Berlin.
Le 31 août, tôt dans la matinée, le colonel Beck confirma aussitôt avoir pris
note de la «ligne de conduite» adoptée par Londres. Il semblait «fort soulagé».
Lambassadeur Kennard rapporte à ce sujet:
134) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 539 et 566.
135) ibid., doc. 539.
463
«Et il [Beck] reconnaît lénorme importance quattache le gouvernement
de Sa Majesté à la nécessité de ne donner au gouvernement allemand
aucune occasion de rejeter la responsabilité sur la Pologne, en cas de
refus de négociations directes.»136)
464
position de Hitler à recourir jusquau bout à la médiation de Dahlerus et à
envoyer Göring à Londres muni de pleins pouvoirs le 3 septembre, cest-à-dire
pendant la durée de lultimatum britannique à lAllemagne, prouve quil avait
dû accepter la suggestion de Mussolini dune conférence darmistice pour le
5 septembre.
Le 31 août à 12 h 50, (à peine deux heures après la proposition de Mussolini),
la première réaction de Chamberlain fut de refuser dapprouver la tenue dune
telle conférence «sous la menace darmées mobilisées».141) Le 31 août dans
laprès-midi, Chamberlain «se montrait beaucoup moins pressé».142) Il ne devait
plus changer davis. La Grande-Bretagne na pas accepté la proposition de
Mussolini mais la liée, après le déclenchement de la guerre, à la condition
irréaliste du retrait immédiat des troupes allemandes de Pologne avant
denvisager une conférence. Cela équivalait à un refus, dautant plus que,
même dans ce cas, aucune amélioration des perspectives de négociation ne fut
envisagée par rapport à la situation du 31 août. Le 2 septembre à 2 h 47 du
matin, le ministre des Affaires étrangères polonais refusait également ce projet
de conférence.143)
Pour juger ces événements, il ne faut pas oublier que la politique britannique
de lannée 1939 avait été orientée de manière à créer à tout prix une «menace
des armées mobilisées» et ce, grâce à des «méthodes quasi bellicistes»,144)
recommandées et appliquées par Roosevelt depuis janvier 1939. Hitler
navait pas provoqué les conditions actuelles: cest bien la Pologne qui avait
commencé dès le printemps 1939 par sa mobilisation injustifiée. Toutefois, une
conférence dans de telles conditions aurait constitué un acte pacifique de
plus grande valeur quun refus de toute négociation équivalant à lacceptation
dun conflit armé. Pour sa part, Hitler ne refusait toujours pas de négocier,
malgré la «menace des armées mobilisées», latente depuis des mois, menace
non seulement des armées polonaises mais aussi des armées françaises.
Mais revenons aux événements à Berlin, Londres et Varsovie en ce 31 août.
Dans la matinée du 31 août, tant le gouvernement britannique que le
gouvernement polonais étaient en possession des propositions allemandes
soumise à certaines conditions. Cette présentation des faits doit être rejetée comme falsifiée,
même si cela signifie que lon a empêché la publication de documents importants de cette
période. Pour une estimation historique objective de ces volumes des documents ADAP, cf.
Nation Europa, 5/1963, «Glatte Fälschungen» («Pures falsifications»).
141) M. Freund, op. cit., vol. III, p. 380.
142) G. Bonnet, op. cit., pp. 340-341.
143) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 693.
144) K. Feiling, op. cit., p. 392.
465
(Londres létait 24 heures avant Varsovie). Ces gouvernements étaient au
courant ou auraient dû lêtre de la prorogation de léchéance pour les
négociations. Ils nont toutefois rien tenté pour détendre la situation et
nont fait aucun effort pour convenir dun entretien ou dun nouveau report
de cette échéance. Le gouvernement britannique na reproché à Varsovie ni
ses provocations contre les Allemands de souche, ni son action contre
Dantzig, ni même les revendications prononcées par lopinion publique
polonaise sur la Prusse orientale et les territoires de lOder, ni son refus de
toute négociation, ni son ordre de mobilisation générale. De sorte quen fait
on «escamotait délibérément la question de lagresseur». En outre, par leur
politique de presse, particulièrement en ce 31 août, des membres du gouver-
nement britannique ont agi de façon sciemment belliciste en faisant circuler
des nouvelles quils savaient pourtant mensongères. Ainsi, le 31 août, le
Daily Telegraph publiait comment, sinon sur instruction officielle? les
fausses nouvelles suivantes:
a) La mobilisation générale de la Pologne ne serait quune conséquence
des «prétentions de revendication territoriale de Hitler» ou plutôt «de nouvelles
exigences émises par Hitler»;
b) Le gouvernement britannique aurait immédiatement communiqué la ré-
ponse de Hitler du 29 août à Varsovie;
c) La Grande-Bretagne aurait fait parvenir le plus vite possible, le 30 août,
une note à Hitler par «courrier aérien spécial»;
d) Des pouvoirs spéciaux auraient été conférés aux chefs des armées
allemandes dans les régions frontalières.
Aucune de ces nouvelles nétait vraie, mais elles étaient toutes conçues
pour provoquer lagitation et pour étaler une nouvelle fois, aux yeux des
Polonais surtout, la position des dirigeants britanniques.
466
Pendant ce temps (31 août, à midi), au Foreign Office, Sir Horace Wilson
refusait de donner à Dahlerus ce que Henderson avait approuvé: la possibilité
de se mettre en rapport avec Londres au moyen du câble de lambassade
britannique à Berlin. Dahlerus avisa Wilson que Lipski refusait de prendre
connaissance de la volonté allemande de négocier ainsi que des propositions
allemandes. Il appela lattention sur les conséquences immédiates de cet
entêtement pour la paix européenne. Puis il demanda à Londres duser
dinfluence sur les Polonais. Wilson claqua sèchement le combiné en disant:
«shut up!» «taisez-vous!», sommant donc Dahlerus de se taire.146) Le prétexte
que le renseignement allemand aurait pu écouter la conversation téléphonique
nest pas fondé, vu la teneur de lentretien et la neutralité de Dahlerus en
tant que médiateur. De toute façon le gouvernement du Reich était au courant,
par dautres voies, de la conduite de Lipski. En revanche, linterruption brutale
de lentretien surtout au cas où les services du renseignement allemand
seraient à lécoute ne pouvait que renforcer le gouvernement du Reich dans
sa conviction que Londres ne désirait décidément pas discuter. Par ailleurs, le
fait de couper la conversation en claquant le combiné à la figure du médiateur
neutre ne pouvait que prouver même sans écoute allemande que la Grande-
Bretagne ne voulait pas de médiation.
Ce ne sont ni Hitler ni Göring qui ont entravé la médiation de Dahlerus ou
qui doivent être jugés coupables de léchec de sa mission. Mais cest bien le
gouvernement britannique, qui pour reprendre les termes de Halifax depuis
la conclusion du pacte de non-agression germano-soviétique du 23 août,
nétait plus disposé à «remettre les choses en ordre».147)
Le 31 août fut le jour où Lord Halifax approuvait la «fermeté» de Beck et sa
décision de ne pas soumettre Lipski à une «pression extrême ou au chantage»
à Berlin. Mais en même temps il reprochait à Henderson davoir, de sa propre
initiative, exercé à nouveau une pression sur Lipski par le biais de Dahlerus.148)
Le 31 août fut aussi le jour où, comme le déclarait Beck à lambassadeur
français Noël, le gouvernement polonais décida que puisque:
146) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 589.
147) E. Raczynski, op. cit., p. 24.
148) H. Holldack, Was wirklich geschah, p. 160, note.
149) ibid., p. 163, Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 693 et Livre
Jaune Français, doc. 343.
467
Telle était lattitude fondamentale à Varsovie: qualifier lAllemagne
d«agresseur», alors quelle navait en rien agressé la Pologne, afin de pouvoir,
sous ce prétexte, déclencher des mesures militaires et compter sur le soutien
étranger. À 12 h 40, le service de renseignement de Göring intercepta un
télégramme chiffré de Varsovie à lambassadeur Lipski à Berlin, dont le contenu
lui signifiait de solliciter une audience avec Ribbentrop mais de ne se laisser
entraîner en aucun cas dans des discussions pertinentes. Les faits exposés ci-
après démontrent lauthenticité de cet ordre télégraphique, exclu du Livre
Blanc Polonais:
1) Dans son entretien à 18 h 30 avec Ribbentrop, Lipski sest conformé à
cette ligne de conduite et nétait muni daucun pouvoir;150)
2) Le 31 août à Varsovie, Beck déclarait à Kennard que Lipski nétait pas
habilité pour négocier à Berlin;151)
3) Ni la Pologne, ni Lipski personnellement, nont réfuté ce compte rendu
paru dans le Livre Blanc Allemand;
4) Larrivée du prince Lubomirski, envoyé à Varsovie par Lipski comme une
sorte de messager extraordinaire, était étroitement liée à cette note. Ce conseiller
dambassade arriva à Varsovie le 31 août avant midi.152) Du fait de cette
initiative, Lipski parut encore trop actif au goût de son ministre des Affaires
étrangères;
5) Aux yeux dun homme tel que Beck, et considérant quon se trouvait
déjà, selon ses propres dires, «en pleine guerre»,149) ce télégramme, retirant
pratiquement à son représentant à Berlin ses pouvoirs dambassadeur, nétait
que logique.
Le feld-maréchal Göring montra le texte de ce télégramme polonais à
Dahlerus en lui demandant de transmettre immédiatement cette nouvelle à
lambassadeur britannique Henderson. Il révélait ainsi volontairement que
le code du chiffre polonais était connu en Allemagne.
468
par des experts en économie preuve flagrante que les causes de la
seconde guerre mondiale ne furent pas dordre économique.»153)
Alors que Londres laissait sécouler cet après-midi du 31 août sans en tirer
profit, lambassadeur polonais Lipski, conformément aux instructions reçues à
12 h 40 de Varsovie, sollicita une audience chez Ribbentrop. Le ministre des
Affaires étrangères du Reich demanda tout dabord si Lipski désirait le voir
«en qualité de plénipotentiaire spécial ou en une autre qualité.» 154)
Beck, toutefois, ne réagit pas. Ainsi comme il a été dit plus haut
lambassadeur polonais se présenta à 18 h 30 sans pleins pouvoirs. Et, confor-
mément aux instructions de Varsovie, il refusa de sengager dans des discus-
sions concrètes, déclara navoir «reçu à ce sujet que des nouvelles indirectes»
et ne pouvoir accepter aucune proposition. En cette soirée du 31 août, Beck ne
se considérait «apparemment ni convié, ni sollicité».156) Même le gouvernement
britannique estimait que les Polonais allaient trop loin cette fois; il jugeait
même dune certaine manière tout au moins que lattitude du gouverne-
ment du Reich était justifiée, comme il ressort du télégramme déjà mentionné,
adressé pendant la nuit par Halifax à Kennard.157)
469
Cest à 18 h 40, après la vaine conversation entre Ribbentrop et Lipski158)
et non à 12 h 40 ou à 16 h 20, comme certains historiens lont souvent recopié
les uns sur les autres, sans indication de source159) que Hitler donna lordre
dattaque pour le 1er septembre 1939 à 4 h 45. Il lui fallait absolument profiter
des quelques heures qui pouvaient lui rester plus de quarante-huit heures
après la mobilisation générale polonaise. Il devait devancer une attaque de la
Pologne, attaque qui, comme on devait sen douter à Berlin, menaçait
visiblement. Cette attaque pouvait être synchronisée avec une avance des
troupes françaises. Il devait la prévenir également à cause de tous les
désavantages militaires quelle comportait.
Le 31 août à 21 h 15, la radio allemande faisait connaître au monde entier la
proposition de Hitler. Berlin offrait ainsi au gouvernement polonais une
nouvelle possibilité de se raviser.
Au lieu de quoi, à 23 h 00, Radio-Varsovie parlait de «proposition impu-
dente», rejetait toute négociation, décrivait en termes railleurs lattente inutile
des «nouveaux Huns», déclarait que la réponse de la Pologne ne pouvait être
donnée que par les armes et que la Pologne avait déjà répondu par «des
mesures militaires» aux dernières propositions allemandes de négociation.160)
Cette émission fut diffusée à un moment où le gouvernement polonais
navait pas encore connaissance de lordre dattaque de Hitler. Par contre,
on en conviendra, il était au courant depuis plusieurs jours de la disposition
allemande à négocier et de la situation extrêmement tendue. Cette déclaration
de guerre radiodiffusée témoigne donc de la détermination de la Pologne à
entrer en guerre. La Pologne sest décidée pour la guerre à un moment où
Hitler cherchait encore à régler la violation territoriale la plus importante
du diktat de Versailles, sans effusion de sang, en consentant à un compromis
équitable et ce dans des conditions dabnégation quaucun gouvernement de
la République de Weimar naurait été disposé à accepter. Hitler navait lié
aucun délai, aucun ultimatum pour la Pologne, au maintien de sa revendication
de Dantzig et dune voie exterritoriale daccès à la Prusse orientale. Le
chancelier du Reich avait certes, en avril 1939, reporté le «Plan Blanc», projet
158) Le Lieutenant-général Gerhard Engel, témoin oculaire de cet ordre, a confirmé cet
horaire (18 h 40) personnellement à lauteur.
159) ADAP VII, p. 479 éd. anglaise: Appendix I, p. 569: cette donnée (il ne sagit pas dun
document certifié authentique) exige un examen approfondi quant à son authenticité
et ne peut être reprise sans cette vérification; il en va de même pour la remarque du
feld-maréchal Erich von Manstein dans Verlorene Siege, p. 23 (éd. anglaise: Lost
Victories, p. 32) selon laquelle lordre lui serait parvenu à 17 heures.
160) M. Freund, op. cit., vol. III, doc. 158.
470
militaire contre la Pologne, au 1er septembre au plus tard. Il navait pas
cependant assorti ce projet dune intention définitive dattaque ou dun ordre
dagression contre la Pologne. Ce plan avait été élaboré pour le cas où la
Pologne «adopterait une attitude hostile envers le Reich» et en vue «de
neutraliser toute menace de ce côté».161) Cependant, alors quau cours des
mois dété 1939, Hitler comme mentionné plus haut opérait un nombre
important de petits «reculs diplomatiques»,161) la vague doppression contre
les minorités allemandes en Pologne grossissait de plus en plus, comme
laffirmait le résistant Weizsäcker, et noyait le problème initial: Dantzig et
le passage à travers le Corridor.161) Il est reconnu que laggravation à cette
date 1er septembre 1939 nest pas imputable à une initiative de Hitler,
mais bien à celle de la Pologne et de la Grande-Bretagne. En août 1939, ces
deux pays ne laissaient aux dirigeants du Reich que le choix entre une
humiliation inacceptable allant jusquà labandon définitif de Dantzig et
lexpulsion du reste des Allemands de la terre allemande en Pologne et la
lutte pour sauvegarder les droits dexistence inaliénables de lAllemagne.
Le 31 août 1943, le général polonais Kazimierz Sosnkowski, ministre sans
portefeuille du cabinet en exil, révélait aux représentants de la presse alliée:
«La décision prise par la Pologne le 30 août 1939, qui reposait sur le
décret de mobilisation générale, marque un tournant de lhistoire de
lEurope. Hitler fut placé devant lobligation de faire la guerre à une épo-
que où il espérait encore remporter dautres victoires non-sanglantes.»162)
161) M. Freund, op. cit., vol. II, pp. 130-131, et D. J. Dallin, Soviet Russias Foreign
Policy, p. 36, et E. von Weizsäcker op. cit., p. 242.
162) H. Sündermann, Alter Feind was nun? p. 85.
163) A.J.P. Taylor, op. cit., p. 219.
471
guider, à cet effet, en particulier à Varsovie, Londres et Washington par la
«crainte dune Allemagne hautement armée», mais au contraire par lassurance
illusoire dun effondrement interne rapide de lAllemagne. Lambassadeur
britannique à Berlin était également conscient de cet état de choses:
164) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 628: Henderson à
Halifax le 31 août.
165) F. Lenz, op. cit., vol. I, p. 575.
472
«avec la permission du Führer, ménagé une discussion très amicale
avec les ambassadeurs britannique et polonais.»166)
166) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 639 et 644.
167) A. von Ribbentrop, op. cit., p. 507.
168) Livre Bleu Anglais N° 1, doc. 105.
473
Il était tout aussi faux de prétendre que Ribbentrop avait lu ces proposi-
tions «à toute vitesse» donc de façon incompréhensible à lambassadeur
britannique, offrant ainsi «la preuve» que ces propositions ne devaient pas
être prises au sérieux. Cette allocution de Chamberlain contenait une nouvelle
fois des propos quil savait pertinemment faux (cf. son discours du 25 août).
Elle dévoilait les dispositions du pouvoir dans la démocratie anglaise, ayant
pour effet que le peuple ne fut pas consulté ni même informé correctement
sur ces décisions vitales. Lallocution révélait aussi que la politique de Londres
était dirigée contre la paix. Car comme on la dit lhonnêteté est la condition
première dune politique de paix. Et le gouvernement britannique manqua à
lhonnêteté pendant ces derniers jours de paix:
1) Sans y avoir été habilité inconditionnellement par la Pologne, il a simulé
devant Hitler la volonté des Polonais de négocier et le désir de médiation
britannique; il a également prié le chancelier du Reich délaborer des bases de
discussion. Halifax na toutefois pas tenu en réalité un rôle de médiateur; il
savait parfaitement:
«que le gouvernement polonais ne voyait même pas dun très bon il
la possibilité dune médiation [il est fait allusion ici au message de Roose-
velt du 25 août 1939].»169)
169) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 280.
170) E. Raczynski, op. cit., p. 24.
474
4) Londres némit aucune protestation contre la mobilisation générale
polonaise, due en partie aux nouvelles alarmistes propagées la veille par
Halifax;
5) Lord Halifax a rompu lui-même ses propres engagements quil avait fait
remettre à Hitler deux jours auparavant (28 août). Malgré lacceptation de
ceux-ci par Hitler, il a continué à refuser, même à partir de ce moment-là, dagir
comme intermédiaire;
6) Du 29 août au soir au 31 août au matin, le gouvernement britannique a
tellement fait retarder lenvoi dun plénipotentiaire polonais à Hitler, et a
finalement pourvu la communication envoyée à Varsovie de tant de réserves
quant à la teneur, quil a ainsi provoqué le refus de la Pologne de négocier.
De cette façon, le gouvernement britannique a fait échouer la prise de contact
directe germano-polonaise quil avait lui-même préconisée. Il a rendu insoluble,
en en exagérant considérablement limportance, la «question de procédure»
pour savoir comment les propositions allemandes devaient être portées à la
connaissance du gouvernement polonais. Le gouvernement britannique laissait
en même temps croire à Hitler quil poursuivait une médiation intensive, alors
quil a utilisé ces trois jours, du 28 au 31 août, à faire évoluer les choses dans
le sens de la guerre.
7) Pour les derniers entretiens entre Hitler et Henderson, Lord Halifax eut
également recours à des rumeurs non vérifiées, selon lesquelles les Allemands
en Pologne se livraient à des actes de sabotage. Il a ainsi également envenimé
sciemment ces dernières conversations.
8) Chamberlain et Halifax pour citer les responsables ont induit en
erreur et excité en bien des points tant leur Chambre des Communes que
lopinion publique mondiale.171)
On ne peut expliquer cette prise de position par le fait que Londres se
serait basée sur lassurance donnée secrètement par lItalie de ne pas inter-
venir par les armes (18 août et 1er septembre 1939). On ne peut davantage
lexpliquer par les renseignements de résistants allemands, selon lesquels
la majorité du peuple allemand serait opposée à Hitler et que, si le gouver-
nement britannique sexprimait fermement, on pourrait sattendre à un ren-
versement au sein du Reich.*) La pression des manipulateurs de l«opinion
publique» en Angleterre et aux États-Unis aussi bien que celle des conseillers
171) F. Lenz, op. cit., vol. I, p. 507: Analyse du discours de Chamberlain devant la
Chambre des Communes le 1 er septembre 1939.
*) De telles nouvelles étaient continuellement transmises à Londres depuis 1934-1935;
I. Colvin, Vansittart in Office, pp. 125-126, 135, 210, 234-237, 281, 315, 331 seq.
475
au Foreign Office, mais encore la position et les objectifs du gouvernement
britannique, étaient bien établis avant la réception de ces informations. Divers
documents dont dispose lhistorien dépeignent lambiance qui régnait à
Londres au cours des derniers jours de paix. En voici quelques exemples:
Chamberlain, dans une lettre privée du 10 septembre 1939 à sa sur:
«Plus tard dans la soirée [du 2 septembre 1939], Duncan Sandys vint à
lambassade afin de my rencontrer. Il me raconta que lui-même, Churchill
et ses amis ne cèderaient pas et quils pouvaient compter non seulement
sur le soutien moral du parti travailliste, mais aussi sur une grande partie
des conservateurs. Ils étaient tous décidés à ne pas capituler et si Cham-
berlain venait à nouveau à faiblir, il serait renversé.»173)
476
pour les dommages déjà causés à condition que nous obtenions Dantzig
et la voie traversant le Corridor, pour autant que lAngleterre accepte de
servir de médiatrice dans le conflit germano-polonais. Vous êtes habilité
par le Führer à soumettre cette offre au Conseil britannique et à engager
immédiatement des négociations en la matière.»175)
Le diplomate Sir Ivone Kirkpatrick, qui se tenait près de Lord Halifax, put
ajouter quelques remarques spirituelles de son propre cru:
«Halifax semblait soulagé que nous ayons pris cette décision [du 3
septembre 1939]. Il commanda une bière quun greffier endormi, qui logeait
dans la maison, lui servit en pyjama. Nous avons bien ri et plaisanté...»178)
477
«Hitler a commencé la guerre, mais il ne pourra pas y mettre fin.»179)
478
tout autant la France pacifiste, lorsque, avant et après le déclenchement de la
guerre:
a) Ils prirent la France au dépourvu avec la garantie accordée à la Pologne,
fin mars 1939;
b) Ils refusèrent immédiatement et définitivement les tentatives de médiation
de Mussolini, les 31 août et 2 septembre convocation dune conférence pour
le 5 septembre rendant ainsi inefficace lapprobation de ce plan par Paris;
c) Le 3 septembre, de leur propre initiative et sans consulter leurs alliés, ils
envoyèrent à lAllemagne un ultimatum limité à deux heures et peu après ils
pressèrent Paris den faire autant.
À 10 h 50 le 3 septembre, dix minutes avant lexpiration de ce délai, fixé par
Londres, Dahlerus avisait le Foreign Office depuis Berlin que Göring était prêt
à venir à Londres, sur lordre de Hitler, afin darriver à un règlement raisonnable
(cessation des combats à condition que les troupes restent sur leurs fronts
actuels pendant la durée des pourparlers).
182) Documents on British Foreign Policy 1919-1939, vol. VII, doc. 762.
479
révolutionnaire universel, allaient se charger de lui donner des dimensions
mondiales et den faire une guerre totale dune incroyable brutalité.
Mais, en ce 3 septembre 1939, Winston Churchill proclamait à son peuple
et au monde entier:
Une autre citation connue de ce dernier jour de paix est accablante pour
Lord Halifax qui avait refusé, dès le 21 juillet, la proposition de Henderson
de mettre terme aux campagnes de presse ou au moins de les apaiser:184)
183) W. Churchill, Ins Gefecht , 1938-1940, p. 204: Discours à la Chambre des Communes.
184) Documents on British Foreign Policy, vol. VI, doc. 395.
185) M. Freund, «Bis zur Stunde kein Friede», Frankfurter Allgemeine, 1 er septembre
1959 et 12 octobre 1963.
480
La responsabilité de la guerre
devant le tribunal de Nuremberg
481
Après 1918, il sétait avéré dannée en année plus évident que des accu-
sations contre ladversaire vaincu ne pouvaient faire comprendre, ni résoudre
ou «régler» historiquement le problème de la guerre. Ce qui nempêche quen
1945, les mêmes puissances victorieuses se basèrent à nouveau à Potsdam et
Nuremberg sur lesprit de Versailles, comme autrefois après la première guerre
mondiale. Rien na changé dans le procédé du jugement de ladversaire vaincu.
Aucun doute nest admis quant à sa «responsabilité»; une discussion nest
permise tout au plus que sur les arguments de laccusation. Le général Nikit-
chenko, reconnu coupable de «nombreux crimes contre ses propres compatrio-
tes», déclarait à lépoque du «procès des criminels de guerre» de Nuremberg:
«La responsabilité des accusés a déjà été décidée par les chefs dÉtat
à Moscou et à Téhéran; lunique tâche de ce Tribunal est donc de leur
infliger le châtiment nécessaire.»7)
482
Nuremberg, ville des congrès du parti du régime déchu, fut choisie pour le
jugement des «criminels de guerre fascistes», ces prisonniers allemands que
les juges du Tribunal militaire inter-allié (TMI) avaient qualifié de «criminels»
avant même le début du procès. Toute accusation ne pouvait être prononcée
que contre eux. Avec une telle «conception du droit», le TMI ne pouvait que
faillir, dès le départ, à la mission historique dont il se prévalait. Robert H.
Jackson, le procureur général américain, déclare sans équivoque:
«Nous navons pas à nous laisser entraîner dans un procès sur les
causes de la guerre.»8)
«Je pense que ce procès causerait bien des torts, si lon étudiait les
causes politiques de cette guerre.»9)
483
rapide et non formaliste» (articles 18 et 19);
«nexigera pas que soit rapportée la preuve de faits de notoriété publique
mais les tiendra pour acquis» (article 21). [Les thèses de la propagande
tombaient naturellement sous cet article].
*) R. T. Paget, Manstein His Campaigns and His Trial, pp. 66, 67.
484
preuves, et menace également darrestation les défenseurs et les emprisonne
dès quils protestent contre toute violation du droit;11)
lorsquil déforme le sens des documents par coupure, falsification ou
déplacement du centre de gravité des phrases, pour considérer ensuite authen-
tiques ces documents mutilés ou totalement falsifiés;
lorsquil minimise ou tait des contextes déterminants;
lorsquil garde à long terme des témoins en détention et fait pression sur
eux en menaçant de les livrer au GPU (police politique nationale en Union
soviétique) ou de porter plainte contre eux, ou les oblige à faire de fausses
déclarations, voire des parjures;
lorsquil appelle à la barre des agents de la puissance victorieuse;
lorsquil institue des procédures, selon lesquelles quiconque peut être
fiché comme «membre dorganisations criminelles» ou être traité comme passi-
ble de peine criminelle;
lorsquil abolit lui-même ses nouveaux «principes juridiques» pour tous
les autres peuples et également pour le futur droit des peuples dès quil les
a utilisés pour les besoins de sa vengeance.
Quil ait fallu recourir à de telles manuvres pour justifier les jugements
convenus davance, bien que la composition partisane du Tribunal et la par-
tialité des accusations eussent assuré leur résultat, prouve assez bien la fra-
gilité de la base sur laquelle se fondait laccusation.
11) Freda Utley, The High Cost of Vengeance, pp. 172-174 (162-181).
485
Jusquen 1946, rien navait été modifié en principe aux conceptions alliées.
Au cours des cinquante dernières années le peuple allemand et ses systè-
mes de gouvernement ont été jugés de façon extrêmement variable, cela en
fonction des intérêts individuels de quelques grandes puissances allant
jusquà la déclaration de Harry Truman, ancien sénateur et futur président
des États-Unis:
«Si nous voyons que lAllemagne est en train de gagner, nous devrons
venir en aide à la Russie; mais si la Russie est en train de gagner, nous
devrons soutenir lAllemagne. Car, de cette manière, ils sentretueront
encore plus à fond.»12)
12) The New York Times du 23 juin 1941, cité, entre autres, par B. S. Telpuchovski, Die
sowjetische Geschichte des Grossen Vaterländischen Krieges 1941-1945, p. 39.
13) H. Lutz, op. cit., p. XVII.
486
sur ceux quil avait déclarés coupables de prime abord (Grande-Bretagne,
France, États-Unis)? Comment concilier avec les principes fondamentaux du
droit le fait que lAllemagne soit accusée et «jugée» pour son offensive contre
la Pologne, et que lUnion soviétique, qui a également attaqué la Pologne en
septembre 1939 et qui, après sa victoire de 1945, a de nouveau incorporé la
Pologne orientale à son État, puisse siéger à la place dhonneur du juge?
«Il nexiste guère de principe juridique qui nait été bafoué à Nuremberg:
il nexiste aucun crime ni aucune sanction en labsence dune loi; aucun
acte commis conformément à des ordres ou sous la contrainte nest
passible de peine; nul ne doit être soustrait à son juge; nul nest juge en
sa propre cause; nul ne doit rendre compte des actes dautrui. Après la
capitulation sans condition, ces normes juridiques étaient dépassées et
ne comptaient plus pour les juges de Nuremberg.»14)
«La farce dun procès des vainqueurs contre les dirigeants vaincus
constituait en elle-même un délit contre lhumanité.»16)
487
juge ne se soit jusquà présent montré disposé à répondre à la critique
sérieuse de cette «justice», critique qui se manifeste dans de nombreux pays.
Il aurait fallu quun tel juge récusât le principe voulant que, pour connaître
dune violation de droit, il faut une juridiction légitime.
LOrganisation des Nations Unies a avalisé cette énormité juridique. Elle a
approuvé la campagne dextermination contre lAllemagne avec ses buts et
ses conséquences, tout comme les procès de Nuremberg et de Tokyo et cela
au nom de la «conscience universelle». Elle se considère à juste titre, depuis le
pacte de Washington du 1er janvier 1942, comme la créature issue des puissan-
ces coalisées contre le Troisième Reich et le Japon. Seuls étaient admis les
États qui acceptaient sans critique les objectifs et les méthodes de guerre des
Alliés dans la lutte contre ces «ennemis de lhumanité» et qui reconnaissaient
la Charte des Nations Unies, y compris les articles 53 et 107. Dans ces articles
étaient expressément déclarés légales toutes les mesures prises pendant et
après la guerre contre «tout État qui, au cours de la seconde guerre mondiale,
a été lennemi de lun quelconque des signataires de la présente Charte».17)
Dans une résolution de principe de décembre 1948 et pour se protéger des
effets prévisibles des «procès des criminels de guerre» sur le futur droit
international lAssemblée générale de cette ONU ainsi fondée a catégori-
quement refusé de reconnaître les «principes juridiques du TMI» comme droit
international en vigueur. Évidemment quand il sagit de condamner
lAllemagne, les Nations Unies y font appel encore aujourdhui. Il est grotesque
de constater que ce «droit», toujours en application contre lAllemagne, a non
seulement perdu sa validité depuis, mais a même été catégoriquement condamné
par linstance internationale qui est la création de ses propres initiateurs
sans pour autant que lAllemagne ou la politique allemande soit réhabilitée, ou
quune analyse historique loyale des causes de la guerre ait été entamée.
Lhistorien britannique A.J.P. Taylor déclarait à propos des documents du
«procès des criminels de guerre» de Nuremberg:
17) S. Boratünskyj, «La Diplomatie de la période de la seconde guerre mondiale», éd. russe,
pp. 152-154.
488
Souvent les éléments qui peuvent convaincre les juristes ne nous satisfont
pas; nos méthodes leur paraissent, par contre, particulièrement imprécises.
Mais même les juristes doivent à présent être pris de scrupules de
conscience devant les témoignages de Nuremberg. Les documents ne
furent pas seulement choisis pour mettre la responsabilité de la guerre à
charge des accusés, mais aussi pour dissimuler la responsabilité des
puissances accusatrices.»18)
Un historien américain:
18) A.J.P. Taylor, The Origins of the Second World War, p. 13.
19) H.E. Barnes, Perpetual War for Perpetual Peace, p. 536 (éd.all., Entlarvte Heuchelei, p. l97).
489
Documents hostiles à Hitler
Revendications despace vital dans
«Mein Kampf»
Les mentions dans Mein Kampf (pages 732, 740, 741, 742, 757) sur la
question de lespace vital à lEst (Russie), sont souvent invoquées comme
preuves des intentions agressives de Hitler et de ses plans de conquête à
long terme, et par là de sa responsabilité de la guerre.1) Il est ridicule de vouloir
prétendre que, depuis sa détention dans la prison de Landsberg en 1925,
jusquà sa mort en 1945, linitiative de la politique mondiale ait été aux mains
de Hitler. Tous les nombreux autres États souverains dEurope et du monde,
bien plus puissants que lui, nauraient-ils fait que réagir à cette initiative sans
être eux-mêmes entreprenants? Vouloir produire Mein Kampf comme «pièce à
conviction» dans le domaine de la politique étrangère reviendrait à confondre
la cause avec la conséquence. Si, par contre, on prend cet ouvrage pour base
danalyse de la responsabilité de la guerre, il naurait valeur de témoignage
que si toutes les dépositions publiques des publicistes et hommes politiques
français, anglais, polonais et soviétiques des années 20 étaient présentées à
ses côtés. Alors seulement, il serait possible dévaluer, dans le domaine de la
politique intérieure et étrangère, le degré dagitation qui régnait à lépoque.
Alors seulement, on verrait clairement quen publiant Mein Kampf Hitler ne
sortait pas du cadre coutumier de lépoque. Supposons que la responsabilité
de Hitler puisse être déduite tout simplement de son livre. Si on applique le
même raisonnement aux anciens écrits de Winston Churchill, aux objectifs de
Poincaré ou de Clemenceau, de Masaryk, de Bénès, de Pilsudski, de Lloyd
George, de Lénine ou de Staline ou seulement des représentants des partis
allemands de la période de Weimar, il serait tout aussi aisé den déduire une
responsabilité, voire une volonté de guerre. Le professeur Theodor Heuß
déclarait en 1932 à propos des écrits en question:
490
«Les souvenirs romantiques des grandioses réalisations de la coloni-
sation du moyen-âge allemand, vers lEst au-delà de lElbe, rejoignent
limpossible solution actuelle que le système de Versailles impose aux
frontières orientales allemandes. Comme on a créé avec ceci une zone
insupportable dirritation et de friction, le sentiment suit plus facilement
cette inclination, car on est conscient de la nature délicate des problèmes
européens à lEst.»2)
491
de Paris-Soir. Il fit ensuite publier cette interview ainsi que les passages liti-
gieux de Mein Kampf en première page de tous les journaux allemands («La
publication de cette interview devait rencontrer dextraordinaires difficultés à
Paris»5)).
«Une chose est sûre: si, en 1924, javais pu me douter que je deviendrais
chancelier du Reich, je naurais jamais écrit le livre.»6)
Homme dÉtat, Hitler navait sans doute plus le temps de corriger son livre.
Des corrections séparées auraient laissé des lacunes. Mein Kampf fut rédigé
pendant la première période de lhistoire de la NSDAP et restait centré sur la
politique quotidienne, le journalisme et lagitation de cette époque. Les exposés
sur la France étaient nés de la situation daprès-guerre et de loccupation
française de la Ruhr. De même ne faut-il pas considérer la conception de Hitler
sur la politique orientale dans Mein Kampf comme une ligne de conduite figée
de la politique étrangère du Troisième Reich face à une Union soviétique
consolidée. Mein Kampf nétait ni un catéchisme de lidéologie nationale-
socialiste, ni une base théorique de politique intérieure, étrangère, économique,
sociale ou culturelle du Reich allemand. Le programme de la NSDAP, qui allait
se concrétiser par la suite, le mûrissement de Hitler au cours des années que
lon en juge par ses discours en tant que chef dÉtat et les influences
multiples et imprévisibles de lintérieur comme de lextérieur sur la politique
allemande sont les facteurs qui ont déterminé la ligne de la NSDAP, pilier du
gouvernement, et non pas Mein Kampf, livre écrit précipitamment et dans des
intentions agitatrices propres à une époque de lutte politique interne pour le
pouvoir.
En ce qui concerne les revendications despace vital évoquées dans Mein
Kampf, il convient de tenir compte des réflexions suivantes qui pourraient
avoir influencé les pensées de Hitler:
a) Hitler voulait gagner la faveur de la Grande-Bretagne et tous les
historiens contemporains en conviennent. Réaliste, il savait quil serait pré-
férable de supprimer linquiétude de la Grande-Bretagne face à la possibilité
dune menace de lAllemagne, en lui signifiant, dès le départ, que les intérêts
allemands étaient orientés vers lEst;
b) Hitler tenta aussi de dissiper chez les États du continent européen les
craintes fondées sur largument dune pression démographique que la popu-
6) H. Frank, Im Angesicht des Galgens, p. 39, et P. Kleist, Auch Du warst dabei, p. 143,
et TMI, vol. X, p. 263: déclaration de J. von Ribbentrop.
492
lation allemande pourrait exercer à lavenir sur ces pays. Il voulait préciser
quil ne réclamait même plus rien à la France dont il cherchait à atténuer
lhostilité en se tournant résolument vers lEst;
c) Vu lidéologie communiste et la puissance soviétique, dont Hitler avait
reconnu la teneur et le caractère bien avant beaucoup dautres, il savait
quune attitude amicale à légard de lUnion soviétique naurait pas pu lui
rapporter plus que ce quil avait à perdre en maintenant une politique décidée
dindépendance;
d) Il importait à Hitler dacquérir la compréhension du monde pour le
besoin despace vital de lAllemagne, la densité de sa population et linjustice
causée par Versailles du fait de lusurpation de territoires surtout à lEst;
e) Les explications de Hitler concernant lespace vital avaient pour but
de sopposer aux tendances de renoncement et dapaisement de Weimar;
f) Au cours dun siècle, la population de lAllemagne avait quasiment
triplé; lespace vital allemand, par contre, avait considérablement diminué.
Aucun homme politique allemand ne pouvait négliger ces réalités. À lépoque
on ignorait les possibilités dordre technique et industriel pour nourrir un
peuple croissant même dans un espace réduit. La misère économique à lépoque
de Weimar ne permettait pas, en tout cas, de tels espoirs.
Et quand un Premier ministre français, Clemenceau, avait déclaré, comme le
prévoyait son programme, que 25 millions dAllemands pouvaient bien périr
parce quils étaient trop nombreux sur la terre, une telle recommandation ne
pouvait que provoquer justement une réaction inverse de la part de Hitler,
celle de tenter tout ce qui était possible pour garantir à son peuple les
possibilités de vie et les revendications despace vital, basées sur des droits
historiques.
«Documents-clés» du TMI
sur les conférences internes de Hitler
493
documents et eux seuls reflétaient la politique et les intentions réelles de
Hitler entre 1937 et 1939. Dailleurs cest sur la base de ces pièces entre autres
que les accusés allemands furent condamnés.
Lorigine, lauthenticité, la teneur, la date de tous ces «documents-clés»
du TMI sur les déclarations privées de Hitler sont controversées. Au point
que tout expert objectif aurait dû les refuser dès le début cest-à-dire dès leur
«découverte» en 1945 comme autant de faux ou de falsifications. Cest ce qui
fut fait en partie devant le Tribunal de Nuremberg, mais avec une prudence
diplomatique. Les puissances victorieuses ont réquisitionné en 1945 les
dossiers du gouvernement du Reich pour les administrer et les évaluer sous
leur propre régie. Ils en ont interdit toute enquête aux commissions neutres, et,
à Nuremberg, ont rejeté les demandes de la défense que soit prouvée lorigine
de certains écrits douteux. Cela nempêcha pas les «historiens» de reprendre
et de diffuser sans critique ce que le Tribunal de Nuremberg avait utilisé
comme «documents» daccusation. Ils les ont repris dans ces tomes comme
«documents» «issus des archives allemandes saisies». Que cela soit exact ou
non, ces «documents-clés» ont été lobjet dune publicité telle que lhistorien,
soucieux dobjectivité, se doit maintenant de les examiner.
Le premier de ces «documents-clés» est le prétendu «rapport Hoßbach».
Le «Rapport Hoßbach»
Allocution de Hitler devant les commandants en chef
de la Wehrmacht le 5 novembre 1937
494
Selon ses propres dires, le «secrétaire», le colonel Hoßbach, membre de la
résistance contre Hitler, ne garantit pas lauthenticité de «chaque mot» et a
refusé de certifier que la «photocopie de la copie dactylographiée» PS 386
présentée par laccusation du TMI soit conforme à ses notes manuscrites
originales.1) Il déposait comme témoin au procès de ce tribunal:
Le grand public lignore encore à ce jour. Le fait est quaucun rapport na
été rédigé officiellement et que ce nest que cinq jours après lallocution
que le colonel Hoßbach a confié au papier, de mémoire et à la main, les
déclarations de Hitler. Pour quelle raison? Cela na pas été élucidé; il nen
avait pas reçu lordre. Hoßbach ne savait pas sténographier; il navait pris
aucune note pendant lallocution; il nétait donc pas en mesure de reproduire
fidèlement et littéralement la session complète. Il ne pouvait se fier quà sa
mémoire, ce quil avoua lui-même dans sa déclaration sous serment du 18
juin 1946.4) Cette «copie en conformité de sens» est dautant plus douteuse
quen ce même 5 novembre 1937 des divergences dopinion opposaient déjà
le ministre de la Guerre du Reich, von Blomberg, au commandant en chef de
larmée de lair, le General-Oberst Göring, sur ce que Hitler avait réellement
dit et voulu.5) Avant la conférence, les commandants en chef de larmée de lair
et de la marine, Göring et Raeder, avaient déjà été informés que Hitler voulait
simplement remédier plus énergiquement aux carences de léquipement de
larmée.6) Le General-Oberst, futur General-Feldmarschall von Brauchitsch
navait même pas entendu parler de cet entretien jusquen 1945 à Nuremberg.7)
Ni le chef de lÉtat-Major général de larmée de terre, le General-Oberst Beck,
ni le commandant en chef de larmée (jusquen 1938), le General-Oberst von
Fritsch navaient attaché suffisamment dimportance à cet entretien pour en
aviser von Brauchitsch, en tant que successeur du commandant en chef de
larmée.8) Ce fait à lui seul rend invraisemblable la grande importance conférée
par la suite à cet entretien.
3) TMI, vol. XLII, p. 228 seq.
4) TMI, vol. XXI, p. 422 Dans son livre Von der militärischen Verantwortlichkeit in der
Zeit vor dem Zweiten Weltkrieg, p. 28, Hoßbach mentionne, en contradiction avec sa
déclaration au TMI, avoir pris des notes pendant la session. De même dans son livre
Zwischen Wehrmacht und Hitler, page 217 seq.
5) TMI, vol. XXVIII, p. 355, doc. PS-l780.
6) TMI, vol. XIV, p. 44 seq. (éd. fse., p. 42 seq.).
7) TMI, vol. XX, p. 620.
8) P. Bor, Gespräche mit Halder, p. 113.
495
Les déclarations de Hitler reposent sur des considérations hypothétiques
sur les conséquences, pour la politique allemande, dune guerre éventuelle
entre la Grande-Bretagne et lItalie. Il nétait nullement question de planification
dune guerre offensive, moins encore dune guerre mondiale. La décision dun
tel objectif navait donc pu être imposée aux commandants en chef. Aucun
plan concret ne fut ni suggéré, ni projeté. Les directives de politique étrangère
pour les années à venir ne furent même pas définies; seules les possibilités
dévolution de la situation furent tracées et des réactions à ces éventualités
ébauchées.
Par ailleurs, le ministre de la Guerre du Reich, von Blomberg, avait pris
linitiative de cet entretien «pour soumettre, conformément à la décision de
Hitler, les divergences dopinion entre le ministre de la Guerre du Reich et
le chargé du Plan de quatre ans sur la répartition des matières premières
entre les trois armes de la Wehrmacht».9) Il nest pas très convaincant de pré-
tendre que Hitler aurait choisi cette occasion et cette rencontre (von Blomberg,
von Fritsch, Raeder, Göring et le ministre des Affaires étrangères du Reich, le
baron von Neurath)10) pour régler des «successions testamentaires». En effet,
selon la photocopie présentée par le TMI, Hitler aurait, dans son introduction,
prié les personnes présentes de «considérer ses déclarations comme des
dispositions testamentaires sil venait à décéder». Il est toutefois absurde
davancer que Hitler, qui navait fait appel quà quelques notes, ait justement
choisi ce cercle des cinq personnes présentes (six avec Hoßbach) et même
pas son adjoint, Rudolf Heß pour leur faire un «legs», non consigné par
écrit, et qui ne prévoyait même pas de réponses aux questions essentielles.
Hermann Göring:
«En ce qui concerne le mot testament, son emploi ici est absolument,
contraire aux conceptions du Führer.»11)
496
nés que plus tard: par exemple, dans le «rapport Hoßbach», on prétend que
Hitler aurait fait valoir quune offensive française se heurterait à nos fortifica-
tions occidentales. Une telle affirmation naurait été possible quaprès lachè-
vement de la ligne Siegfried [West Wall]. La construction de la ligne Siegfried,
décidée certes en 1936 et commencée en 1937, prévue pour une durée de douze
années, ne devait pourtant être accélérée que devant la mobilisation tchèque
en mai 1938. Jusquà cette date, il ne pouvait être question de rempart fortifié.13)
Un indice supplémentaire de la falsification de cette photocopie tient dans
le fait que sa teneur nétait connue daucun membre du gouvernement. Il ne
pouvait donc encore moins être identique à un original contresigné, parce que
la reproduction altérée était agrémentée de quelques ajouts imaginaires, et que
le contenu en était de surcroît expurgé. Ainsi, par exemple, la discussion entre
Göring, von Blomberg et von Fritsch a été omise:
497
Allocution de Hitler devant la presse allemande
le 10 novembre 1938
«Nous nous sommes fixé pour cette année un grand nombre dobjectifs
à atteindre... par notre propagande... En premier lieu, la lente préparation
du peuple allemand lui-même. Les circonstances mont contraint pendant
des décennies à ne parler presque exclusivement que de paix...
Il va de soi quune telle propagande pacifiste de plusieurs décennies
nest pas sans risque; car dans lesprit de beaucoup elle peut facilement
conduire à croire que le régime actuel équivaut en soi à la décision et à la
volonté de conserver la paix à tout prix. Ce qui nentraînerait pas seulement
un jugement erroné des buts de ce système...
Cest par contrainte que pendant des années jai uniquement parlé de
paix...
Il [le peuple allemand] doit apprendre à croire avec le même fanatisme
à la victoire finale...»1)
1) H.A Jacobsen, 1939-1945, Der Zweite Weltkrieg in Chronik und Dokumenten, p. 91.
498
quil na pas été possible dauthentifier lenregistrement sonore de cette
allocution (seule pièce à conviction disponible) ni pour ce qui concerne son
support physique, ni le langage employé. On reconnaît aussi que le disque
que lon possède ne contient dailleurs quune fraction de la prétendue
allocution.
499
darmée de la Wehrmacht (von Brauchitsch, Göring, Raeder), le chef du haut
commandement de la Wehrmacht [OKW] (Keitel) et leurs chefs détat-major
(Halder, Jeschonnek, Schniewindt), le secrétaire dÉtat à laviation (Milch),
lofficier dordonnance en chef de la Wehrmacht auprès du Führer et chancelier
du Reich et les officiers dordonnance de la Wehrmacht. Warlimont en revanche
était chef de section des Opérations du haut commandement de la Wehrmacht
[Wehrmachtsführungsamt]. Puisque le chef du haut commandement [OKW]
(Keitel) son supérieur était lui-même présent, la participation de Warlimont
savérait superflue. Tant Warlimont en personne que tous les autres témoins
ont démenti sa participation à la conférence. Même plus tard, Warlimont na
jamais rien su de cette conférence. Les prétendues déclarations de Hitler nont
même pas été portées à la connaissance de la section de Défense nationale au
bureau des Opérations de la Wehrmacht [WFA].2)
Selon le «rapport Schmundt», Hitler aurait évoqué la nécessité de
sorganiser pour une guerre dune durée de quinze à vingt ans, et de préparer
une attaque systématique. (En réalité et cela est aussi abordé dans dautres
passages du «document» en question il avait maintenu en application les
modestes programmes darmement prévus pour les années 1943-1945. Il sétait
continuellement efforcé comme il est prouvé dassurer une limite à tout
conflit éventuel et il avait même ébauché une démobilisation après la campagne
de France).
500
La population de territoires non-allemands nest pas soumise au ser-
vice militaire et est donc disponible pour des prestations de travail...»3)
3) H. A. Jacobsen, 1939-1945: Der Zweite Weltkrieg in Chronik und Dokumenten, p.93; aussi
Documents on German Foreign Policy 1918-1945, Series D, vol. VI, doc. 433.
4) M. Freund, Weltgeschichte der Gegenwart in Dokumenten, vol. II, p. 348.
501
auraient sur la politique allemande. Vu quaucun plumitif daudience ne fut là
non plus établi, ni aucune distribution prévue, les explications de létat de
choses ne peuvent pas être considérées comme faisant suite à une décision
du Führer. Lobjectif de la conférence était la formation dun groupe détudes
au sein de lOKW (haut commandement de la Wehrmacht), «chargé de ren-
seigner le Führer». Sa mission était «dexaminer» toutes les situations mili-
taires possibles afin de pouvoir les traiter militairement et se donner des
chances de succès. Cest ce qui se fait dans tous les états-majors du monde.
Même ce «document» 079.L.-TMI, tome XXXVII, p. 546, ne permet pas de
savoir si ce groupe détudes avait reçu un ordre militaire définitif pour
exécuter une opération. On aurait alors pu en déduire «une volonté de guerre».
Le ministre des Affaires étrangères du Reich, von Ribbentrop, déclarait devant
le TMI à Nuremberg:
«À plusieurs reprises, il [Hitler] ma dit quil fallait toujours parler aux
militaires comme si la guerre devait éclater le lendemain.»5)
Ou:
502
que pour soutenir les mesures politiques prises, mais quil ne risquerait
en aucun cas un conflit armé avec la Pologne.»8)
503
Hitler à quel point la préparation de lItalie à la guerre était défaillante, une
pareille déclaration de Hitler était impensable en mai 1939. Ce nest quen juin
1940 quelle aurait été vraisemblable.
Il serait superflu de citer dautres déclarations de ce genre, figurant dans
ce «rapport». Un examen critique des sources du «document» conduit à un
jugement écrasant de la valeur historique de son témoignage. Même le
président du TMI devait en être conscient. En effet, lorsque le grand amiral
Raeder, qui avait participé à la conférence, voulut mettre en évidence la
contradiction et labsurdité de cet «acte» «document 079-L» le président,
en vertu de lexercice de sa mission politique, lui ôta la parole. Depuis lors,
aucun publiciste ou historien na semblé juger nécessaire de poursuivre là où
le grand amiral fut interrompu.
1) TMI, vol. XIV, pp. 76-77 (éd. fse., pp. 50-51 et p.70).
504
interrompu simplement par une pause pour prendre le café au «Berghof».
Dodd, du ministère public du TMI, dut reconnaître lui-même1) que, malgré le
titre différent, il sagissait bien dun seul et même discours. Les deux écrits
sans signature sont non seulement dactylographiés avec la même machine et
dans le même style, mais ils utilisent tous deux la première personne du
singulier. Hitler ne peut toutefois en être lauteur étant donné quil faisait
employer une machine à caractères particuliers et quil nétait certes pas de
son intérêt de fixer par écrit pour la postérité, et contrairement à ses habitudes,
des «expressions sanguinaires». La phrase finale: «Göring répond en remerciant
le Führer et en lui assurant que la Wehrmacht fera son devoir», rompt le style
de la forme de la première personne du singulier et montre bien que ni Hitler, ni
aucun autre participant à cette conférence ne peut avoir rédigé cet exposé. Il
est exclu quun greffier rédige un document à la première personne.
Le 22 août 1939, il ny avait aucune raison pour la Wehrmacht de faire une
déclaration de loyauté. Lexplication de lemploi de la première personne doit
certainement être cherchée auprès du rédacteur du «rapport» de cette confé-
rence, transmis dès le 23 août 1939 à lambassade britannique à Berlin. Là
aussi, pour donner plus de nerf à lécrit, on a recouru à la première personne,
bien que les déclarations ne portent que sur des banalités les plus primaires
(voir fin de ce chapitre).
Selon le rapport susmentionné document 798-PS Hitler aurait commencé
son discours en déclarant vouloir donner un aperçu politique de la situation.
Ceci, «afin de vous mettre au courant de chacun des éléments sur lesquels
repose ma décision dagir...» ... «Ensuite, nous aborderons les données
militaires». Les témoins survivants déclarèrent à lunanimité que les données
militaires navaient pas été prévues et quelles ne furent dailleurs pas discutées.
On na trouvé en fait aucun acte sur de telles discussions. En outre et
contrairement aux «documents» présentés la conférence du Führer ne
constituait pas une rencontre au cours de laquelle une «décision dagir»
devait être prise ou aurait été prise. Au cours de cette réunion, rien ne fut
décidé qui puisse revêtir une quelconque importance politique ou militaire.
Le rapport doc. 1014-PS na pas non plus dintroduction, de signature,
de date, etc. Il est bien trop court pour reproduire un discours de Hitler. Sa
teneur est absurde, contradictoire et décousue. Malgré toutes ces carences,
les «deux morceaux de papiers» furent acceptés à titre de «documents». Le
défenseur du grand amiral Raeder, le Dr Siemers, déclare à ce sujet:
505
Destruction de la Pologne, objectif principal. But: élimination des
forces vitales et non pas chercher à atteindre une certaine ligne. Ces
mots nont pas été prononcés et les commandants en chef allemands
nauraient pas accepté de se lancer dans une telle guerre; cest pour cela
quil importe de déterminer si ce document est authentique. Puis-je, à ce
propos, rappeler au Tribunal quune troisième version de ce discours a
été mentionnée au cours de ce Procès (document L-3). Elle est beaucoup
plus accablante encore que les deux précédentes et a été publiée dans la
presse du monde entier. Chaque fois que lon entend parler de ce discours,
on le qualifie de grotesque et de brutal. Je crois donc que, dans lintérêt
de la vérité historique, il faut sassurer si Hitler sexprima alors en termes
si brutaux. En fait, javoue quil a employé des termes frappants, mais pas
ceux-ci. Et cest la réputation de tous les commandants en chef présents
qui est en jeu. Laissez-moi citer les derniers mots:
Fermez vos curs à la pitié, adoptez une attitude brutale. De telles
paroles nont jamais été prononcées.»2)
Le président:
2) TMI, vol. XIV, p. 56 (éd. fse., p. 52). Lexpression «Destruction ... [de ladversaire],
objectif principal. But: élimination des forces vitales et non pas chercher à atteindre une
certaine ligne» correspond littéralement à la conception de guerre de Churchill en 1939.
Elle était visiblement si familière aux falsificateurs des documents allemands quils
lattribuèrent sans distinction aux dirigeants allemands, sans tenir compte du fait que des
manuvres aussi pitoyables ne manqueraient pas dattirer lattention. À Nuremberg, il ne
fut évidemment nullement question de Churchill et de sa conception de la guerre.
3) ibid., p. 59 (éd. fse., pp. 54-55); E. Raeder, Mein Leben, vol. II, pp. 165-167.
506
Lamiral Hermann Böhm affirmait au Tribunal, dans une déclaration sous
serment, que cette phrase naurait été prononcée ni à propos dune proposition
de médiation, ni à propos de la destruction de lhégémonie de lAngleterre. Il
sagirait là de grossières inventions, tout comme dailleurs ce terme de «cochon
(Schweinehund)». 4)
Le feld-maréchal Erich von Manstein:
507
géographique publiée en 1939 par la Pologne, fixant les frontières occi-
dentales polonaises sur lElbe] le prouve ainsi que la presse de la période
récente qui dévoile les pensées les plus profondes de la Pologne.»6)
«Je parle dun conflit menaçant. Cest-à-dire de quelque chose que lon
ne recherche pas précisément, mais que lon craint plutôt.»7)
«Je voulais tout dabord établir des relations tolérables avec la Pologne
pour me battre dabord à lOuest. Ce plan, qui me convenait, nétait
pourtant pas exécutable, parce que la situation ambiante sétait consi-
dérablement modifiée. Il me paraissait évident quen cas de conflit avec
lOuest, la Pologne nous attaquerait.»
Document 798-PS:
«Je créerai par la propagande un casus belli, que celui-ci soit plausible
ou non.»
508
éventuelle situation à venir. Elle tient compte de lattitude de ladversaire,
mais elle ne permet aucunement de conclure à une initiative de Hitler.
b) Pourquoi Hitler ferait-il des déclarations dun tel ordre de grandeur et
aussi accablantes pour lui, devant des hommes dont il pensait reconnaître
depuis longtemps la résistance passive?
c) Le fait demeure que le TMI na jamais consigné comme pièces à
conviction les instructions de Hitler à la presse allemande. Elles revêtaient
pourtant un caractère documentaire. Mais elles démentaient nettement les
thèses de ces «documents» falsifiés. Un tel dossier instruction définitive du
Führer à la presse allemande pour le déclenchement de la propagande de
guerre aurait eu valeur de déposition. Or, les instructions à la presse sont
restées soustraites dès 1945 à la recherche historique et ce nest pas sans
raison.
Tous les témoins qui déposèrent sous serment au sujet de cette «conférence
du Führer» protestèrent de façon plus ou moins véhémente contre les prétendus
propos inclus dans les «documents» présentés.
Le feld-maréchal Keitel:
Lamiral Böhm:
«La conférence prit fin sur les paroles de Hitler constatant que la
Pologne était isolée et que les négociations allaient se poursuivre...
Ici [parmi les autres participants] on eut surtout limpression que la
fameuse guerre des nerfs allait se poursuivre dans les conditions favo-
rables qui avaient créé lisolement de la Pologne; aucune décision ne fut
prise..»11)
509
Le feld-maréchal von Leeb, concernant la prétendue intention dattaquer
de Hitler:
a) en ce qui concerne la Pologne: «Non, au contraire!»
b) en ce qui concerne les puissances occidentales:
«Comme la déjà dit le général Hadler il faut ajouter que cette con-
férence était absolument publique. Les participants arrivaient en avion, la
plupart atterrissaient à Salzbourg via Munich. Ils faisaient alors en voiture
et en uniforme laller et retour jusquà lObersalzberg, au vu et au su de
tous, dans une région touristique fort fréquentée en août. Toute laffaire
me paraissait donc être un énorme bluff.»13)
510
sexpliquait par la construction dun rempart oriental. Une gigantesque
fête commémorant Tannenberg avait été préparée afin de dissimuler le
motif réel des déplacements de troupes vers la Prusse orientale. Les
préparatifs de grandes manuvres des formations motorisées furent pour-
suivis jusquau dernier moment. La concentration eut lieu sans mobilisa-
tion officielle. Il était certain que toutes ces mesures ne pouvaient échapper
à la vigilance des Polonais et quelles servaient donc parfaitement lobjectif
de pression politique. On sétait toutefois entouré du plus grand secret et
on avait employé toutes les feintes imaginables. Mais maintenant, à
lapogée de la crise, Hitler avait convoqué tous les chefs suprêmes de la
Wehrmacht à lObersalzberg ce qui ne pouvait, en aucune circonstance,
rester secret. Cela nous sembla pour ainsi dire le comble dune politique
délibérée de bluff. Ainsi, malgré ses propos bellicistes, Hitler nenvisa-
gerait-il donc pas, malgré tout, de parvenir à un accord? Cette conférence
ne devait-elle pas servir justement dultime moyen de pression sur la
Pologne?
Cest, en tout cas, avec de telles pensées que le général von Rundstedt
et moi-même quittâmes Berchtesgaden. Pendant que Rundstedt prenait
les devants et regagnait notre quartier général à Neiße, je passai encore
une journée avec ma famille à Liegnitz, ce qui prouve combien jétais
loin de penser à une guerre imminente.»14)
Une autre absurdité de ces «documents» est le fait que Hitler aurait déclaré
(document 798-PS): «Une proposition de compromis aurait exigé de nous un
changement dopinion, en paroles et en actes» Mais en réalité Hitler navait-
il pas fait reposer lensemble de sa politique étrangère sur des compromis? Et,
pendant les derniers jours daoût 1939, navait-il pas compté sur la disposition
au compromis de ses éventuels interlocuteurs? Et, même encore à ce moment-
là, navait-il pas préparé un projet de compromis, alors que ni la Grande-
Bretagne, ni la France, ni la Pologne navaient jamais soumis, proposé, voire
toléré aucun compromis dans la question germano-polonaise? Au contraire,
juste après la conférence de Munich et à linstigation du président américain
Roosevelt, ces pays sétaient définitivement écartés dune politique de compro-
mis avec Hitler.
Cette prétendue déclaration est dautant plus absurde que, juste après la
réunion, le feld-maréchal Göring avait à nouveau interpellé le médiateur
suédois Birger Dahlerus pour des contacts pacifiques avec la Grande-
Bretagne, et que Hitler avait donné son accord sans lombre dune hésitation.
Tous les généraux et amiraux allemands ayant pu déposer sur cette con-
511
férence, ont nettement rejeté à lunanimité les documents 798-PS et 1014-PS,
mais acceptèrent, bien quavec réserve, la version du document Raeder 27
(signé Böhm).
Il est caractéristique que les «historiens» daujourdhui publient les
«documents» sans signature, en tant que «reproduction authentique» du
discours de Hitler du 22 août 1939, sans prendre la peine dindiquer quil existe
une troisième version (signée Böhm) «la plus proche de la réalité», et sans
attirer lattention sur les contradictions et les absurdités du contenu, ni sur
les prises de position des intéressés.
Dès le début de la guerre, la propagande datrocités des Alliés dirigée
contre lAllemagne a tenté dexploiter cette conférence. Ou bien est-il vrai-
semblable quun journaliste du camp allié ait su découvrir de lui-même le
ton quil convenait dadopter pour cette propagande datrocités et en choisir
le thème avec autant de précision? Qui, finalement, avait intérêt à utiliser à
des fins de propagande belliciste la conférence du Führer à lObersalzberg
qui nétait pas dissimulée aux journalistes étrangers? Une chose est certaine,
cest que, le 25 août, le correspondant de lAssociated Press of America,
Louis Lochner, qui séjournait à Berlin à cette époque, transmit à lambassade
britannique à Berlin la prétendue teneur de cette conférence «secrète» du
Führer. Il affirma quun officier dÉtat-Major de la Wehrmacht lui aurait
remis ce rapport, le tenant lui-même dun général qui avait participé à lentre-
tien les sources nen devaient pas être révélées. Cet écrit provenait-il donc
dun résistant allemand? fit son entrée dans la collection des «Documents
de politique étrangère britannique» (Documents on British Foreign Policy),
volume VII, en tant que «document n° 314» avec une remarque du secrétaire
dambassade britannique, Ogilvie-Forbes:
Depuis lors, ce papier est devenu un «document». Son contenu est grotes-
que. En voici un résumé:
512
qui me propose quelque plan darbitrage. Il serait jeté au bas de lescalier,
même si je dois me charger de lui botter le derrière devant les photographes.
Je ferai attaquer la Haute-Silésie par quelques compagnies portant luni-
forme polonais. Que le monde y croie ou non, peu mimporte. Le monde
na foi que dans le succès. Pour vous, Messieurs, cest le commencement
de la gloire et des honneurs tels quon ne les connaît plus depuis des
siècles. Soyez durs, impitoyables, agissez plus vite et plus brutalement
que les autres. Les citoyens dEurope occidentale devront trembler de
terreur. Jai rencontré Daladier et Chamberlain à Munich, ce ne sont que
des larves...
Le discours fut accueilli avec enthousiasme. Göring sauta sur la table,
saluant férocement et faisant des promesses sanguinaires. Il dansait
comme un sauvage...»
15) Cf. la discussion publique sur «laffaire de la station démission de Gleiwitz» traitée dans
Nation Europa, 5/1961 et 5/1963.
513
Allocution de Hitler devant les commandants en chef
de la Wehrmacht le 23 novembre 1939
«Le pays des Sudètes nétait dès le départ quune solution stratégique,
et qui plus est, seulement partielle.»
«Conquête du reste de la Tchécoslovaquie comme base de conquête
de la Pologne.»
«La Wehrmacht structurée exclusivement en vue dintentions agres-
sives.»
«Décision fondamentale de combattre à lEst et à lOuest.»
«Les traités ne doivent être respectés que tant quils nous semblent
profitables.»
«Je ne reculerai devant rien.»
«Je veux que lennemi soit exterminé.»
514
outre, il ne se base que sur sa mémoire.1) On nest pas sans savoir que Halder
faisait partie de la résistance active contre Hitler et quil fut, dès 1938, lun des
promoteurs du projet darrestation du Führer et chancelier du Reich.
«Sur les quatre documents que nous avons examinés, nous avons dû
en refuser trois du point de vue critique de leurs sources, et émettre des
réserves quant au quatrième....
Du point de vue historique, le résultat est bouleversant. Il ressort
notamment de cet exemple quil est impossible de reprendre sans contrôle
chacune des constatations historiques du Tribunal militaire international
(inter-allié)....
Malheureusement, tous les historiographes ne lont pas reconnu. Il
en résulte une tentative décrire lhistoire selon les méthodes de Nuremberg.
Cette tentative et ses conséquences devront donc être réfutées tout
aussi formellement que la conception de lhistoire de Nuremberg.»2)
1) E. Korsthorst, Die deutsche Opposition gegen Hitler zwischen Polen- und Frankreichfeld-
zug, p. 109 .
2) Publication en lhonneur de Herbert Kraus, Mensch und Staat in Recht und Geschichte,
p. 454.
515
Mémoires tchécoslovaques
pour la Conférence de Paix de Paris 1919-19201)
Mémoire N° 2
Les revendications territoriales
de la République tchécoslovaque
516
nexclut pas la possibilité dannexer à ces territoires les régions avoisinan-
tes, où vit une population tchécoslovaque.
En fait, cest le cas pour quatre régions: deux en Silésie prussienne et deux
en Basse-Autriche.
En Silésie prussienne, il sagit tout dabord dune petite région, située à la
frontière nord-est de la Bohême, aux environs de Glatz. Cette région était jadis
complètement tchèque. Actuellement, une grande partie en est germanisée.
Ces régions pourraient toutefois encore être sauvées. Nous exigeons quelles
soient rattachées à la Bohême...
Mémoire N° 3
Le problème des Allemands de Bohême
... V. Raisons politiques: Les Allemands de Bohême ne sont que des colons
Il faut prendre en considération le fait que les Allemands en Bohême ne
sont que des colons ou des descendants de colons. Au cours de longs
siècles, les diverses maisons régnantes firent venir les colons allemands en
Bohême afin daccroître les revenus du Trésor royal....
517
non seulement disposée à accepter, le cas échéant, toute réglementation
juridique internationale, fixée par la Conférence de Paix, en faveur des minorités,
mais elle est également prête à dépasser le cadre dune telle règlementation
pour accorder aux Allemands tous les droits qui leur reviennent.
La République tchécoslovaque sera un État absolument démocratique;
toutes les élections se feront selon le droit de vote par suffrage universel,
direct et égalitaire; tous les citoyens auront accès à toutes les fonctions; la
langue des minorités sera respectée en tout lieu; le droit de gérer ses propres
écoles, davoir ses juges et ses cours de justice, ne sera jamais contesté à
quelque minorité que ce soit.
En Bohême, les Allemands jouiraient des mêmes droits que les Tchéco-
slovaques. Lallemand y serait la deuxième langue nationale et aucune mesure
doppression ne serait prise contre une partie quelconque de la population
allemande. Le régime serait analogue à celui de la Suisse.
Au dix-neuvième siècle, ils [les Tchèques] ont grandement fait preuve de
sens pratique, mais surtout de sens politique. Ils sont bien trop «réalistes» et
ils ont trop de bon sens pour ne pas voir que la brutalité et linjustice ont été
les causes du déclin de lAutriche-Hongrie et quune politique similaire ne
peut que nuire à leur propre État et à leur propre nation.
Mémoire N° 8
La Haute-Silésie tchèque
Mémoire N° 9
Le Problème de la région de Glatz
518
Mémoire N° 10
Problèmes de rectifications des frontières
tchécoslovaques et germano-autrichiennes
519
VI. ... Sil est vrai que les Polonais ont souffert linvasion et la dévastation,
ce qui leur procure un avantage en matière du droit à réparation des dommages
subis, il reste que nous avons dû, nous aussi, subir loccupation, linvasion et
lappauvrissement. Mais nous avons par contre apporté notre collaboration
efficace aux Alliés.
Je remarque en outre que tous les habitants dAutriche-Hongrie (hormis
nos ennemis, les Allemands et les Magyars), cest-à-dire les Yougoslaves, les
Roumains, les Italiens et les Polonais se trouveraient dans une situation
relativement meilleure que la nôtre si nos droits nétaient pas reconnus. La
Roumanie sera dédommagée; la Serbie sera dédommagée; tout comme lItalie
et la Pologne, du fait que non seulement certaines parties de lex-Autriche-
Hongrie mais aussi leurs propres territoires ont été envahis.
Si lon venait à refuser de nous donner satisfaction, toutes les autres
nations dAutriche-Hongrie seraient proportionnellement mieux traitées que
nous, qui avons malgré tout tenté tout ce qui était en notre pouvoir. Nous
serions alors placés sur le même pied que les Allemands et les Magyars.
520
HOMMES DÉTAT ET DIPLOMATES
(CONCERNE LANNÉE 1939)
ALLEMAGNE
Ambassadeur à
Londres Dirksen, Herbert von
Paris Welczek, Johannes comte von
Moscou Schulenburg, Friedrich Werner comte v.d.
Rome Mackensen, Hans G. von
Washington Dieckhoff, Hans
Varsovie Moltke, Hans A. von
Tokyo Ott, Eugen
Conseiller dambassade à
Moscou Hilger, Gustav
Washington Thomsen, H
DANTZIG
Forster, Albert Gauleiter de la NSDAP (Chef dÉtat)
Greiser, Arhur Président du Sénat
Burkhardt, Carl J. Haut-Commissaire de la Société des Nations
Chodacki, Marian Commissaire Général polonais
Shepherd, F.M. Consul Général britannique
ITALIE
Mussolini, Benito Chef du gouvernement, Premier Ministre,
Commandant en chef de larmée
Ciano, Galeazzo comte Ministre des Affaires étrangères 1936-1943
521
Ambassadeur à
Berlin Attolico, Bernardo
Paris Guariglia, Raffaele
Londres Grandi, Dino comte
Moscou Rosso, Augusto
Washington Colonna, Ascanio prince
Varsovie Valentino, Pietro Arone baron
GRANDE-BRETAGNE
FRANCE
Daladier, Edouard Président du Conseil
Bonnet, Georges Ministre des Affaires étrangères
Gamelin, Maurice Chef dÉtat-Major Général
Ambassadeur à
Londres Corbin, Charles
Berlin Coulondre, Robert
Moscou Naggiar, Paul-Émile
Varsovie Noël, Léon
Rome François-Poncet, André
Washington Doynel de Saint-Quentin, René
522
POLOGNE
Ambassadeur à
Berlin Lipski, Jozef
Londres Raczynski, Edward comte
Paris Lukasiewicz, Juliusz
Moscou Grzybowski, Waclaw comte
Washington Potocki, Jerzy comte
UNION SOVIÉTIQUE
Ambassadeur à
Londres Maiskii, Ivan M.
Paris Suritz, I. Z.
Berlin Merkalow, Alexei (jusquen avril 1939)
Schwarzer, Alexander (à partir du 2/9/1939)
Varsovie Scharonov, Nikolaus
Washington Umanski, Konstantin
Rome Helfland, L. (Chargé daffaires)
Conseiller dambassade à
Berlin Astakhov, Georgei
523
ÉTATS-UNIS
Ambassadeur à
Londres Kennedy, Joseph
Paris Bullitt, William
Moscou Davies, Joseph E.
Varsovie Biddle, Drexel A.J.
Rome Philipps, William
Berlin Wilson, Hugh (rappelé en novembre 1938)
Chargé daffaires à
Berlin Kirk, Alexander C.
524
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(Lauthenticité des documents parus dans les Livres Blancs Allemands a été
confirmée par les diplomates polonais en exil ; voir p. 111. La recherche historique
na pu réfuter le contenu dun seul des documents publiés dans ces volumes note
de lauteur)
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INDEX DES NOMS CITÉS
Abetz, Otto
Ambassadeur dAllemagne à Paris (1940-1944); 212.
Adam, Wilhelm
Chef détat-major allemand (1930-1933); 256.
Alderman, Sidney
Procureur adjoint pour les États-Unis auprès du TMI à Nuremberg; 132.
Arciszewski, Miroslaw
Sous-secrétaire dÉtat au ministère des Affaires étrangères polonais; 216.
Attolico, Bernardo
Ambassadeur dItalie à Berlin (1935-1940); 425, 464.
Avenol, Joseph
Secrétaire général de la Société des Nations (SDN); 203, 385.
Baginski, H.
Officier détat-major polonais; 154.
Baldwin, Sir Stanley
Président du Conseil de la Chambre des Communes en Grande-Bretagne (1931-
1935); Premier ministre (1935-1937); 255, 257.
Balfour, Arthur James
Ministre des Affaires étrangères britannique (1916-1919); 152.
Baruch, Bernard
Conseiller du président des États-Unis F. D. Roosevelt; 315, 384, 393.
Bauer, Gustav
Homme politique du SPD (Parti socialiste allemand), chancelier du Reich (1919);
481.
Beaverbrook, Lord William H. A.
Homme politique britannique et magnat de la presse; 49, 375.
Beck, Jozef
Ministre des Affaires étrangères polonais (nov. 1932-sept. 1939); 90, 126, 156, 160,
172, 179-180, 185, 187-190, 194-203, 207, 212-214, 217-218, 221, 223, 227-228, 230-
231, 233-237, 239-240, 243, 254, 301-302, 313, 323, 326, 329-331, 335, 337-338, 347,
358-359, 361, 366-367, 394, 431-434, 436-437, 447-450, 452-453, 455, 458, 463-464,
467-469.
Beck, Ludwig
Chef détat-major allemand de larmée de terre (1935-1938); 263, 495.
Bénès, Edouard
Président de la République tchécoslovaque (18 déc. 1935-5 oct. 1938), Ministre des
Affaires étrangères (1918-1919-1935); 39, 68, 88-89, 92, 95-103, 105-112, 114-115,
117, 121, 127, 130, 132, 134-135, 375, 490.
Bevan, Aneurin
Ministre de la Santé britannique (1945-1951); 71.
Biddle, A. J. Drexel
Ambassadeur des États-Unis à Varsovie (1937-1939); 221, 366, 385, 449.
Blomberg, Werner von
Ministre de la Guerre du Reich (1935-1938); 495-497.
Blum, Léon
Premier ministre français (1936-mars 1938); 98.
536
Bochenski, Adolf
Historien polonais; 185.
Bodenschatz, Karl
Général allemand de larmée de lair, général de brigade (Generalmajor)
(1939); 420.
Böhm, Hermann
Amiral (Generaladmiral) de la Marine de guerre allemande; 504, 507-509, 512.
Bohle, Ernst Wilhelm
Gauleiter, chef de lorganisation de la NSDAP à létranger; 171.
Boleslas Ier « le Vaillant » Chobry
Duc de Pologne (992); Roi de Pologne (1025); 159
Boleslas III « Bouche torse »
Roi de Pologne (1102-1138), soumit la Poméranie occidentale; 159.
Bonnet, Georges
Ministre des Affaires étrangères français (avril 1938-sept. 1939); 119, 192, 201-
202, 235, 247, 250, 276, 313, 325-326, 392, 421.
Boothe-Luce, Clare
Diplomate et écrivain américaine; 403.
Bracken, Lord Brendan
Homme politique britannique conservateur, habile homme daffaires, magnat de la
presse économique anglaise; 365.
Brauchitsch, Walter von
Général darmée allemand (Generaloberst) (1939), commandant en chef de larmée
de terre (4 févr. 1938 -21 déc. 1941), général-feldmaréchal; 495, 500, 502 .
Braun, Otto
Premier ministre de Prusse (1920-1932) (SPD); 144.
Brody, Andras
Premier ministre dUkraine carpatique (9 oct. 1938-1939); 123.
Brüning, Heinrich
Chancelier du Reich (1930-1932) (Zentrum); 185-186.
Buckmaster, Lord Stanley O.
Homme politique britannique; 21.
Budzynski, M.
Représentant de la minorité polonaise dantzicoise à la diète de Dantzig; 214.
Bullitt, William
Ambassadeur des États-Unis à Paris (1936-1940); 34, 102, 232, 326-327, 338, 340,
366, 380, 384-385, 387, 390-391, 393, 395.
Burckhardt, Carl J.
Professeur dhistoire à luniversité de Bâle; haut-commissaire de la Société des
Nations à Dantzig (1937-1939);146, 203, 206-207, 210-211, 216-217, 221-223, 230,
234, 244, 250-251, 296, 357, 385, 390, 451.
Cadogan, Sir Alexander
Sous-secrétaire dÉtat au ministère britannique des Affaires étrangères; succéda à
Lord Vansittart dans cette charge à partir de 1938; 219, 448.
Chamberlain, Sir Neville
Premier ministre britannique, de mai 1937 à mai 1940; 38, 54, 63, 82, 88, 104, 108-
109, 112-117, 119, 120, 130-133, 146, 199, 203, 243, 249, 274-275, 294, 299, 303-305,
308-318, 320-323, 325-327, 329-333, 337-338, 345-348, 351-352, 354, 361-364,
367-368, 371, 383-385, 391, 394, 396, 420, 422, 426, 428, 431, 438, 447, 451, 454,
465, 473-477, 478, 513.
537
Chatfield, Lord Alfred E.
Amiral de la flotte britannique; en 1939 ministre de la Coordination à la Défense;
283.
Chodacki, Marian
Commissaire général de Pologne à Dantzig; 206, 209, 217, 221-222.
Churchill, Winston
Homme politique britannique, écrivain politique, Premier ministre du cabinet de guer-
re; 29, 45, 47, 49-53, 55, 62-71, 82, 94, 104, 118, 120, 126-128, 132, 146, 264, 266,
272, 274, 276, 281-283, 290-292, 295-301, 305-306, 308-310, 314-315, 319, 333-335,
341, 347-348, 354, 361, 365, 367-368, 370, 372-375, 384, 393, 398-399, 401, 429, 476,
478, 480, 490, 506.
Chvalkowski, Frantisek
Ministre des Affaires étrangères tchèque (1938-1939); 124, 129, 131, 138.
Ciechanowski, Jan
Ambassadeur de Pologne à Washington; 70.
Clemenceau, Georges
Premier ministre français (1906-1909 et 1917-1920), principal artisan du traité de
Versailles, membre du «directoire» de la Conférence de Paix à Versailles; 21, 141,
354, 481, 490, 493.
Colonna, Bertram de
Ecrivain et journaliste britannique; 155, 224.
Corbin, Charles
Ambassadeur de France à Londres (1933-1940); 446-447.
Coulondre, Robert
Ambassadeur de France à Moscou (1938-1939), ambassadeur à Berlin (1939-1940);
90, 146-147, 207, 246-247, 447, 461.
Cranborne, Robert Gascoyne-Cecil vicomte
Sous-secrétaire dÉtat au ministère britannique des Affaires étrangères sous Anthony
Eden; 82.
Cripps, Sir Richard Stafford
Ambassadeur de la Grande-Bretagne à Moscou (1940-1942); 421.
Croft, Sir Henry
Homme politique, député britannique; 115.
Cromwell, Oliver
Homme dÉtat anglais du XVIIe siècle; 58.
Cudahy, John Clarence
Ambassadeur des États-Unis à Varsovie (1933-1937); 380.
Curtius, Julius
Ministre allemand des Affaires étrangères (DVP) (1929-1930); 33, 152.
DAbernon, Edgar vicomte
Ambassadeur de la Grande-Bretagne à Berlin (1920-1926); 143.
Dahlerus, Birger
Industriel suédois, en 1939 médiateur entre Berlin et Londres; 286, 420, 437, 439,
454, 456, 461, 465, 467-468, 472-473, 479, 511.
Daladier, Edouard
Premier ministre français (1938-1939); 88, 108, 112, 115,117, 119, 251-252, 309, 336,
385, 388, 394, 439, 464, 513.
Dalton, Hugh
Principal orateur du parti travailliste britannique, sous-secrétaire dÉtat au ministère
britannique des Affaires étrangères; 365.
538
Davies, Joseph E.
Ambassadeur des États-Unis à Moscou (1937-1938); 70, 192.
Davis, William R.
Négociateur américain (1940); 397-398.
Dawes, Charles
Homme politique américain, président de la commission internationale des experts
pour le plan qui porte son nom et pour lorganisation du paiement des réparations
allemandes (1923-1924); 378-379.
Dawson, William H.
Homme politique et journaliste britannique; 292.
Delmer, Sefton
Propagandiste britannique; 312.
Dieckhoff, Hans H.
Ambassadeur dAllemagne aux États-Unis (1937-1941); 382.
Dietrich, Otto
Chef du service de presse du Reich; 397-398.
Dirksen, Herbert von
Ambassadeur dAllemagne à Londres (1938-1939); 316, 341, 356.
Dmowski, Roman
Homme politique polonais; assistait à la Conférence de Paix à Versailles; 140-141,
145, 148-153, 161, 166.
Dodd, Thomas
Avocat général pour les États-Unis aux procès du TMI (1945-1946); 505.
Dollfuß, Engelbert
Chancelier fédéral dAutriche (1932-1934); 73.
Doomann, Eugene H.
Conseiller à lambassade des États-Unis au Japon; 393.
Doumenc, Joseph
Général, chef de la mission militaire française à Moscou (juillet-août 1939); 408, 421.
Drax, Sir Ernle
Amiral, chef de la mission militaire britannique à Moscou (juillet-août 1939); 421.
Duff Cooper, Alfred
Ministre de la Guerre britannique (1935-1937), Premier Lord de lAmirauté (1937-
1938), démissionna en 1938 pour protester contre la conférence de Munich; ministre
de lInformation (1940-1941); 120, 298, 304, 308, 335, 341, 372.
Eden, Sir Anthony
Depuis 1923, membre du Parlement britannique (parti conservateur); garde des
sceaux et ministre de la Société des Nations; de déc. 1935 à févr. 1938, ministre des
Affaires étrangères; après le début de la guerre, ministre des Dominions; depuis
déc. 1940 à nouveau ministre des Affaires étrangères; 78, 82, 120, 293, 294-295,
299, 302-303, 305-306, 309, 316, 319, 341, 348, 361.
Eisenhower, Dwight D.
Général américain; après la deuxième guerre mondiale, président des États-Unis
(1953-1961); 254.
Eisenlohr, Ernst
Ambassadeur dAllemagne en Tchécoslovaquie; 96, 100.
Elibank, Charles C. Murray vicomte
Homme politique britannique conservateur; 382.
Engel, Gerhard
En 1939, commandant, officier dordonnance de la Wehrmacht (armée de terre)
539
auprès de Hitler, plus tard général de division (Generalleutnant); 470.
Exner, Prof. Franz
Avocat du général darmée (Generaloberst) Jodl aux procès du TMI; 266.
Fabricius, Wilhelm
Ambassadeur dAllemagne en Roumanie; 321.
Faucher, Louis-Eugène
Général français; chef de la mission militaire française à Prague; 111.
Feiling, Keith
Biographe de Neville Chamberlain; 119, 146, 428.
Fleming, A.
Responsable américain de larmement et des mesures de mobilisation; 285.
Foch, Ferdinand
Maréchal français; Commandant en chef des troupes alliées en France pendant la
première guerre mondiale; conclut le 11 novembre 1918 larmistice à Rethondes;
94.
Forrestal, James
Vice-ministre de la Marine de Guerre américain (1940-1944); 395.
Forster, Albert
Gauleiter à Dantzig; 211, 215, 244, 247.
Franco, Francisco
Général, chef de lÉtat espagnol (à partir de 1937); 223, 277.
François-Ferdinand de Habsbourg
Archiduc autrichien, héritier au trône, assassiné en 1914 par un nationaliste serbe;
115.
François-Poncet, André
Ambassadeur de France à Berlin (1931-1938); 120, 256.
Freund, Michael
Historien allemand; 179, 255, 336, 501.
Fritsch, Werner baron von
Général darmée allemand (Generaloberst), Commandant en chef de larmée de
terre jusquen 1938; 495-497.
Fuchs, Martin
Attaché de presse autrichien à Paris (1938); 81.
Fuller, John Frederic Charles
Historien anglais et général; 56, 296, 393, 402.
Gafencu, Grigore
Ministre roumain des Affaires étrangères (1938-1940); 139, 195, 321, 345.
Gamelin, Maurice
Chef détat-major général français et vice-président du Conseil supérieur de la
guerre (1938-1940); 256.
Geist, Dr Raymond H.
Consul général puis Chargé daffaires américain à Berlin; 339.
Gercke, Rudolf
Colonel allemand, chef du département des transports de létat-major de larmée de
terre; pendant la guerre, général dinfanterie et chef des services de transport de la
Wehrmacht; 267.
Giertych, Jedrzej
Homme politique polonais (parti national-démocratique) à partir de 1915; 153.
Gleason, S. Everett
Professeur américain; 266.
540
Gluchowski, Janusz
Général, vice-ministre polonais de la Guerre; 189.
Goebbels, Dr Joseph
Ministre allemand de la Propagande et de lInformation; 70.
Goerdeler, Carl Friedrich
Premier bourgmestre de Leipzig; retraité en 1937, membre de la résistance; 235,
276, 368.
Göring, Hermann
Président du Reichstag, Premier ministre de Prusse, général-feldmaréchal, com-
mandant en chef de larmée de lair, président du Conseil des ministres pour la
défense du Reich, chargé du plan quadriennal, en 1940 maréchal du Reich; 37, 40,
76, 99, 119, 126, 227, 238, 397, 420, 422, 428, 437, 439, 454, 460-461, 465, 467-468,
472, 476, 479, 495-497, 499-500, 505, 511, 513.
Goldmann, Nahum
Co-fondateur en 1936 du Congrès juif mondial, dont il devint président en 1951; 390,
451.
Grabski, Stanislas
Homme politique polonais après 1918, ministre du Culte (1925-1926); 145, 152, 164.
Graebe, K.
Député de la communauté allemande au Sejm (parlement) polonaise; 155.
Gravina, Manfredo
Haut-commissaire de la Société des Nations à Dantzig (1929- 1932); 210.
Grazynski, Michal
Voïvode (préfet) en Haute-Silésie orientale; 136, 165, 170.
Greiser, Arthur
Président du Sénat de Dantzig et sénateur pour les Affaires étrangères; 216, 218.
Grenfell, Russell
Historien anglais; 147 336, 373.
Groener, Wilhelm
Ministre de la Reichswehr (1928-1932); 185.
Grzybowski, Waclaw comte
Ambassadeur de Pologne à Moscou; 90, 146, 287.
Guillaume II de Hohenzollern
Empereur allemand (1888-1918); 27, 290, 295.
Guillaume III dOrange
Roi dAngleterre (1689-1702); 290.
Habsbourg, Otto von, archiduc
Prince héritier de lempire dAutriche-Hongrie (1916-1918); 205.
Hacha, Emil
Président de lÉtat tchèque (oct. 1938-1939); 133-138.
Halder, Franz
Général darmée (Generaloberst), chef de lÉtat-major de larmée de terre (1 er
sept. 1938-24 janv. 1942), membre de la résistance; 412, 500, 509-510, 514-515.
Halifax, Edward Wood vicomte
Ministre des Affaires étrangères britannique (fév. 1938 - déc. 1940); en 1939 aussi
président du «comité des trois» de la Société des Nations pour Dantzig; 55, 90, 96,
108-109, 120, 130, 139, 146, 162, 199, 203, 214-215, 220, 222, 249-251, 288,
291, 299, 301-304, 306, 309-314, 316-317, 319-321, 323-325, 331-332, 335, 337-
338, 343-344, 347, 349-350, 355, 357, 360-361, 363-369, 392, 421, 430-439, 442-
444, 447, 449-450, 452-456, 462-464, 467, 469, 472-475, 477, 478, 480.
541
Hasbach, Erwin
Sénateur et président du Conseil des Allemands de Pologne, député à la Sejm
(parlement polonais); 172.
Hedin, Sven
Savant suédois, spécialiste des questions dAsie centrale; 14, 401-402.
Henderson, Sir Nevile
Ambassadeur de la Grande-Bretagne à Berlin (1937-1939); 86, 100, 108, 124, 133,
139, 203, 219, 221, 238, 249, 303-304, 353, 355, 357-358, 360-361, 421, 426, 428,
430, 432-434, 437, 441-446, 448, 452-454, 456-461, 466-468, 472, 474-475, 480.
Henlein, Konrad
Chef du Parti allemand des Sudètes; 95, 104, 106-107, 111-112.
Heß, Rudolf
Lieutenant de Hitler, gagna en vain lAngleterre en avion pour y négocier la paix
(1940); 171, 496.
Hesse, Fritz
Attaché de presse de lambassade dAllemagne à Londres; 299-300, 476.
Heuß, Theodor
Député (DDP) au Reichstag jusquen 1933, professeur, président de la RFA (1949-
1959); 57, 490.
Hilger, Gustav
Conseiller à lambassade dAllemagne à Moscou; 423.
Hindenburg, Paul von
Général-feldmaréchal et président de la République de Weimar (1925-1934); 20, 35,
256.
Hiranuma, Kiichiro baron
Premier ministre du Japon; démissionna après la conclusion du pacte germano-
soviétique; 393.
Hlinka, Andrej
Fondateur du Parti populaire slovaque; 122.
Hoare, Sir Samuel
Premier Lord de lAmirauté britannique (1935-1937), Ministre de lIntérieur (1937-
1939), garde des Sceaux (1939-1940); 320.
Hodza, Milan
Premier ministre de Tchécoslovaquie (6 nov. 1935-22 sept. 1938); 96-97, 107, 115.
Hoggan, David L.
Écrivain américain; 32.
Hopkins, Harry
Conseiller du président des États-Unis pendant la guerre; 393, 398.
Horthy de Nagybánya, Miklós duc
Amiral, régent du royaume de Hongrie (1920-1944); 128.
Hoßbach, Friedrich
Colonel auprès de létat-major général allemand, premier officier dordonnance de
la Wehrmacht auprès du Führer et chancelier du Reich (1934-1938), chef du
service central de létat-major de larmée de terre, général en 1945, commandant de
la 4 ème armée, membre de la résistance allemande; 101, 494-498.
Howard, Esme W. Earl of Penrith
Diplomate britannique; 20.
Hudson, Robert
Secrétaire au Département britannique pour le Commerce doutre-mer; 286, 310,
314.
542
Hull, Cordell
Secrétaire dÉtat américain (ministre des Affaires étrangères) (1933-1944); 289,
338, 361, 364, 366, 371, 382, 393-394, 483.
Hurtwood, Lord Allen
Homme politique britannique; 60.
Innitzer, Theodor
Archevêque de Vienne; 86.
Ironside, Sir William
Général britannique, chef détat-major de lEmpire; 353.
Jackson, Robert H.
Procureur général pour les États-Unis aux procès du TMI à Nuremberg; 483.
Jaksch, Wenzel
Homme politique allemand des Sudètes (SPD); 93.
Jebb, Gladwyn
Secrétaire privé auprès du ministre adjoint du ministère britannique des Affaires
étrangères; 203-204.
Jeschonnek, Hans
Général allemand, chef détat-major de la Luftwaffe (armée de lair); 500.
Jodl, Alfred
Général darmée allemand (Generaloberst), en 1939 général de brigade (General-
major), chef de létat-major général des forces armées au sein du haut commande-
ment de la Wehrmacht (OKW) (26 août 1939-1945); 85, 259, 266.
Johnson
Chargé daffaires américain à Londres; 320.
Johnstone, Harcourt
Homme politique anglais, du parti libéral; 365.
Jong, Louis de
Directeur de lInstitut néerlandais de documentation militaire à Amsterdam à partir
de 1945; 170.
Kaganovitch, Lazar
Beau-frère de Joseph Staline, rédacteur en chef des Isvestia, chef du bureau
politique du parti communiste soviétique; 31, 406.
Kasprzycki, Tadeusz
Général polonais, ministre de la Guerre (1935-1939); 190.
Kaufmann, Theodor Nathan
Écrivain juif américain, co-auteur du plan Nathan-Kaufmann pour la stérilisation et
le massacre du peuple allemand; 46.
Keitel, Wilhelm
Général-feldmaréchal allemand, en 1939 général darmée (Generaloberst), chef
du haut commandement de la Wehrmacht (OKW); 240, 423-425, 500, 502, 509.
Kennard, Sir Howard W.
Ambassadeur de la Grande-Bretagne à Varsovie (1934-1939); 176, 188, 199, 216,
279, 302, 324, 326, 330, 332, 350, 357-359, 366, 431-434, 437, 448-450, 452, 462-463,
468-469.
Kennedy, John F.
Président des États-Unis (1961-1963); 60.
Kennedy, Joseph
Ambassadeur des États-Unis à Londres (1937-1940); père du futur président ; 289,
361, 364, 366, 383, 388, 391-392, 394, 396.
543
Khrouchtchev, Nikita
Premier secrétaire du PCUS (1953), président du Conseil des ministres dURSS
(1958-1964); 106, 408, 411.
Kilarski, Jan
Écrivain politique polonais; 158.
Kirkpatrick, Sir Ivone
Premier secrétaire à lambassade de Grande-Bretagne à Berlin (1933-1938), ensuite
chef du service de linformation aux Affaires étrangères à Londres, haut commissaire
de la zone doccupation anglaise en Allemagne (1945-1950); 204, 357, 477.
Kisielewski, Joseph
Écrivain polonais; 158.
Kitchener, Lord Horatio H.
Ministre britannique de la Guerre (1914); 275.
Klein, Burton
Homme de science américain; 261.
Knappstein, Heinrich
Ambassadeur dAllemagne aux États-Unis après 1949; 30.
Kneeshaw, J. W.
Député (travailliste) britannique; 20.
Koch, Erich
Gauleiter de Prusse orientale; 244.
Koch, Hans
Professeur, homme de science de Prusse occidentale; 171.
Konopnicka, Maria
Poétesse polonaise; 157.
Kordt, Erich
Porte-parole au ministère des Affaires étrangères du Reich, membre de la résis-
tance; 368.
Kordt, Theo
Conseiller à lambassade dAllemagne à Londres, frère dErich Kordt, membre de
la résistance; 368.
Korfanti, Wojciech
Maître agitateur polonais en Haute-Silésie après la première guerre mondiale; 165.
Koscialkowski-Zyndram, Marian
Ministre de lintérieur polonais; 158.
Küchler, Georg von
Général-feldmaréchal allemand; 510.
Kwiatkowski, Eugeniusz
Vice-premier ministre polonais; 157.
Lalicki, Stephan
Vice-commissaire général polonais à Dantzig; 156.
Langer, William L.
Professeur américain; 266.
Lansing, Robert
Ministre des Affaires étrangères américain sous le président Wilson; 19, 143.
Lebre, Henri
Professeur dhistoire français; 178, 335.
Leeb, Wilhelm chevalier von
Général-feldmaréchal allemand; 510.
544
Léger, Alexis
Secrétaire général au ministère des Affaires étrangères français; 81.
Lénine, Vladimir I.
Révolutionnaire russe; fondateur du parti bolchevique, du léninisme et de lÉtat
soviétique; 106, 404, 406, 409-410, 419, 490.
Leopold, Joseph
Capitaine retraité, chef du Parti national-socialiste autrichien; 77.
Liddell-Hart, B. H.
Écrivain anglais et historien des questions militaires; 253, 336.
Lindsay, Sir Ronald
Ambassadeur de la Grande-Bretagne aux États-Unis (1930-1939); 396.
Lippmann, Walter
Journaliste américain; 408.
Lipski, Joseph
Ambassadeur de Pologne à Berlin (1934-1939); 113, 187, 192, 208, 219, 231, 234,
236, 434, 448, 450, 452, 460-461, 464, 467-470, 473.
Litvinov, Maksim
Commissaire soviétique du peuple aux Affaires étrangères (1930-mai 1939); am-
bassadeur dURSS à Washington (nov. 1941-août 1943); 105.
Lloyd George, David
Premier ministre britannique (1916-1920); 18, 21, 28, 31, 56, 58, 142, 162, 254, 478,
490.
Lloyd, Lord George Ambrose
Ministre britannique des colonies (1940-1941); 365.
Lochner, Louis P.
Journaliste américain en Europe; 398, 512.
Loraine, Sir Percy
Ambassadeur de Grande-Bretagne à Rome; 434.
Lothian, Lord Philip Henry Kerr
Homme politique britannique, homme daffaires et diplomate, à partir de 1939 am-
bassadeur aux États-Unis; 296, 302, 371.
Louis XIV de Bourbon
Roi de France, le «Roi Soleil» (1643-1715); 290.
Lubomirski, Stephan prince
Conseiller à lambassade de Pologne à Berlin; 220, 468.
Lück, Kurt
Ressortissant allemand en Pologne, bon connaisseur des questions dEurope
orientale; 171.
Lukasiewicz, Juliusz
Ambassadeur de Pologne à Paris (1936-1939); 113, 127, 192, 199, 201-202, 327,
387, 390-391, 461.
McDonald, Malcom
Secrétaire dÉtat britannique aux colonies (1938-1940); 311.
Maiskii, Ivan M.
Ambassadeur de lURSS à Londres (1932-1943); 44, 295, 314, 343-344, 411.
Makins, Roger
Délégué britannique de la Société des Nations; 207.
Malhomme
Secrétaire auprès de la légation polonaise à Berlin; 461.
545
Manstein, Erich von
Général de division allemand (Generalleutnant) (1939), puis tard Général-feldma-
réchal; 85, 425, 470, 507, 510.
Markoff, Alexei
Général soviétique; 414, 417.
Marlborough, John Churchill duc de
Chef de guerre et homme dÉtat anglais (1650-1722); 290.
Marshall, George
Chef de létat-major général américain (à partir du 1er sept. 1939), Secrétaire dÉtat
(Ministre des Affaires étrangères) des États-Unis (1947-1949), auteur du plan
daide à lEurope qui porte son nom (1947); 402.
Martel, René
Professeur français de slavistique; 143, 155.
Masaryk, Thomas G.
Fondateur et président de la République tchécoslovaque (1918-1935); 122, 130, 135,
490.
Mastny, Vojtech
Ambassadeur de la Tchécoslovaquie à Berlin; 120, 124, 133.
Maugham, Frederic H. vicomte
Garde des sceaux britannique; 90.
Maxwell-Fyfe, Sir David
Procureur suppléant pour la Grande-Bretagne aux procès du TMI à Nuremberg
(1945-1946); 506.
Meißner, Otto
Ministre du Reich, chef de la chancellerie présidentielle de Hitler; 134, 422.
Miklas, Wilhelm
Président fédéral dAutriche (1928-1938); 84.
Mikolajczyk, Stanislaw
Président du Conseil polonais en exil à Londres pendant la deuxième guerre mondia-
le, démissionna le 24 nov. 1944 en protestation contre la politique polonaise de
lAngleterre; 68-69.
Milch, Erhard
Général-feldmaréchal allemand ; secrétaire dÉtat des voies aériennes (1939); 424,
499-500, 502.
Miller, Douglas
Attaché commercial adjoint des États-Unis à Berlin; 378.
Milne, Lord Wardlaw
Feld-maréchal anglais; 371.
Moltke, Hans-Adolf von
Ambassadeur dAllemagne à Varsovie (1934-1939); 157, 188, 195.
Mooney, J. D.
Président de la General Motors Overseas Corporation; 398.
Moravec, Emanuel
Colonel à létat-major de larmée tchèque; 102.
Morgenthau, Henry
Ministre des Finances des États-Unis (1934-1945), auteur du plan qui porte son nom
selon lequel lAllemagne, mise en pièces, serait réduite à létat de pâturage; 46, 67,
381.
Moscicki, Ignaz
Chef de lÉtat polonais (1926-1939); 202.
546
Mussolini, Benito
Chef du gouvernement italien (1922-1943), Chef dEtat de la République sociale
italienne (1943-1945); 52, 74, 76, 85-86, 88, 130, 137, 302, 322, 338, 345, 351, 391-
392, 424-425, 464-465, 476, 479, 503.
Napoléon Bonaparte 1 er
Empereur des Français (1804-1814); 14, 290, 294-295, 478.
Naumann, Friedrich
Fondateur du parti national et social allemand (1896); 60.
Neilson, Francis
Publiciste anglo-américain; 54.
Neurath, Konstantin baron von
Ministre des Affaires étrangères allemand (2 juin 1932-4 avril 1938); à partir de
mars 1939 protecteur du Reich pour la Bohème-Moravie; 34, 496.
Newton, Basil
Ambassadeur de Grande-Bretagne en Tchécoslovaquie (1937-1939); 96-97, 109,
124, 133.
Nikitchenko, I. T.
Général soviétique; 482.
Nitti, Francesco
Premier ministre italien, représentant de lItalie à la Conférence de Paix de Ver-
sailles; 19, 481.
Noël, Léon
Ambassadeur de France à Varsovie (1933-1939); 191, 196, 235, 244, 449, 467.
Northcliffe, Lord Alfred Charles
Éditeur et publiciste anglais très influent; 57.
Norton, Sir Clifford
Chargé daffaires britannique à Varsovie (1937-1939); 355.
Nye, Gerald
Sénateur américain, président de la commission denquête sur les motifs de lentrée
des États-Unis dans la première guerre mondiale; 402.
Ogilvie-Forbes, Sir George
Conseiller à lambassade de la Grande-Bretagne à Berlin (1937-1939); 192, 339,
437, 461, 512.
Paderewski, Ignacy
Pianiste virtuose et homme politique polonais; en 1919 Premier ministre; 140, 149,
354.
Pal, Rahabinode
Représentant indien au procès de Tokyo contre les «criminels de guerre japonais»;
487.
Papen, Franz von
Chancelier du Reich (1er juin 1932-3 déc. 1932); vice-chancelier et commissaire du
Reich pour la Prusse (30 janv. 1933-30 juin 1934); de 1936 à mars 1938 ambassa-
deur à Vienne, davril 1939 à 1944 ambassadeur en Turquie; 76-77, 80.
Paul-Boncour, Joseph
Ministre français des Affaires étrangères (1938), après 1911 plusieurs fois ministre;
98.
Paul, Karadjordjevic prince
Régent de la Yougoslavie (1934-1941), déposé par un putsch dofficiers; 328.
Pechel, Rudolf
Chef de rédaction de la Frankfurter Rundschau fondée après 1945; 186.
547
Philippe II de Habsbourg
Roi dEspagne (1527-1598); 290, 295.
Phipps, Sir Eric
Ambassadeur de Grande-Bretagne à Paris (1937-1940); 276, 347, 434.
Pieck, Wilhelm
Député du parti communiste au Reichstag jusquen 1933; 405.
Pilsudski, Joseph
Maréchal et chef dÉtat polonais (1926-1935); 90, 141-142, 154-155, 158, 161-
162, 165, 177, 182, 184-186, 225, 293, 490.
Poincaré, Raymond
Président de la République française (1914-1920), Premier ministre et ministre des
Finances (1922-1924 et 1926-1929); 18, 333, 490.
Potocki, Jerzy comte
Ambassadeur de Pologne à Washington; 113, 218, 231-232, 384-385, 388, 390, 395.
Potocki, Joseph
Chef du service de propagande au ministère des Affaires étrangères polonais; 337.
Puaux, Gabriel
Ambassadeur de France en Autriche (1938); 80-81.
Raczynski, Edward comte
Ambassadeur de Pologne à Londres (1934-1945); 54, 113, 121, 161-162, 214, 221,
286, 299, 311, 331, 340, 364-365, 434-435, 437-439, 476.
Raeder, Erich
Commandant en chef de la marine de guerre allemande, amiral (Generaladmiral)
en 1939, puis grand amiral; 272-273, 496-497, 499-500, 504-508, 512.
Raikes, Victor
Parlementaire britannique, du parti conservateur; 115.
Randa, Krulis
Candidat à la présidence de la Tchécoslovaquie; 136.
Reichenau, Walter von
Général allemand, puis général-feldmaréchal; 283.
Renner, Karl
Homme politique autrichien social-démocrate, chancelier dÉtat (1918-1920); 72,
86.
Reynaud, Paul
Ministre français des Finances, puis (mars 1940) président du Conseil et ministre
des Affaires étrangères; 287.
Ribbentrop, Joachim von
Ambassadeur dAllemagne à Londres (1936-1938), Ministre des Affaires étrangères
du Reich (4 février 1938-1945); 60, 129, 160, 196, 226, 228, 231, 233-235, 237, 239-
240, 246, 289, 297-298, 313, 317, 324, 420, 422, 442, 445, 448, 451-452, 454, 456-
460, 462, 464, 468-470, 474, 502.
Roberts, Sir Frank
Fonctionnaire britannique influent au Foreign Office; 479.
Roosevelt, Franklin Delano
Président des États-Unis dAmérique (1933-1945); 25, 45, 47, 49, 55, 68-69, 102,
112-114, 119, 130, 148, 176, 232, 248, 266, 304, 306, 312, 315, 326, 343, 345, 352,
366, 371, 377, 379-389, 391-403, 465, 474, 481, 511.
Rothermere, Harold Harmsworth vicomte
Directeur de lagence de presse du ministère de lInformation britannique; un des
magnats de la presse, approuvait la politique dapaisement; 57, 90.
548
Runciman, Lord Walter
Envoyé spécial anglais en Tchécoslovaquie (1938); 99, 104-105, 107, 355, 363.
Rundstedt, Gerd von
Général darmée allemand (Generaloberst) (1939), puis général-feldmaréchal; 510-
511.
Saint-Aulaire, Auguste de
Ambassadeur français; 333.
Sandys, Duncan
Homme politique anglais conservateur, virulent adversaire de la politique dapaise-
ment, fut traité dagitateur aux Communes, gendre de Winston Churchill; 365, 476.
Sargent, Sir Orme
Diplomate britannique; 360.
Sasonov, Sergei D.
Ministre des Affaires étrangères russe (1910-1916); 153.
Schacht, Hjalmar
Président de la Reichsbank (mars 1933- janv. 1939) et Ministre de lÉconomie
(1934-1937); 262, 398.
Scheidemann, Philipp
Chancelier du Reich (1919), (SPD); 18.
Schleicher, Kurt von
Général allemand, chancelier du Reich (1932); 186.
Schmidt, Guido
Ministre des Affaires étrangères autrichien (1936-1938); 80.
Schmidt, Paul
Interprète en chef allemand du ministère des Affaires étrangères; 445, 456.
Schmundt, Rudolf
Général allemand, lieutenant-colonel (Oberstleutnant) (1939), premier officier
dordonnance de la Wehrmacht auprès du Führer et chancelier du Reich; 499-500,
503.
Schniewindt, Otto
Amiral allemand, chef de létat-major de la guerre maritime; 500.
Schuschnigg, Kurt von
Chancelier fédéral dAutriche (1934-1938); 73-74, 76-85, 100.
Seyß-lnquart, Arthur
Brièvement ministre des Affaires intérieures autrichien et chancelier fédéral; après
lAnschluß en mars 1938, gouverneur dAutriche; 83.
Shepherd, Sir Francis Michie
Consul général britannique à Dantzig; 221, 328.
Shirer, William
Journaliste américain; 377.
Siemers, Walter
Avocat du grand amiral Raeder aux procès du TMI (1945-1946); 505.
Sidor, Carl
Ministre slovaque; 125.
Sikorski, Wladislaw
Général polonais, Président du Conseil en exil à Londres (1939-1943); 164.
Simon, Sir John
Ministre britannique des finances dans le gouvernement de Chamberlain (1937-
1940); 133.
549
Sirovy, Jan
Général tchèque, succéda à Hodza au poste du Premier ministre de la Tchécoslova-
quie; 108.
Skladkowski, Felicjan
Général polonais; Premier ministre (1936-1939); 179.
Skubl, Michael
Secrétaire dÉtat autrichien (ministère de lIntérieur), directeur de la police (1938);
77.
Smigly-Rydz, Edward
Maréchal et Commandant en chef de larmée polonaise; 167, 191, 217, 219, 227,
354, 460.
Smuts, Jan Chr.
Premier ministre dUnion sud-africaine (1911-1924 et 1939-1948); 141, 481.
Sosnkowski, Kazimierz
Général polonais, ministre du gouvernement en exil à Londres; 471.
Sosnowski, Georg
Homme politique polonais pendant la première guerre mondiale et après 1918; 140-
141, 149.
Srokowski, Stanislaw
Homme politique polonais pendant la première guerre mondiale et après 1918; 145.
Stachiewicz, Waclaw
Chef de létat-major général polonais; 204.
Staline, Joseph
Dictateur soviétique, secrétaire général du PCUS; 31, 50, 57, 64-65, 68, 89, 102,
105-106, 306, 340-341, 348, 350-351, 364, 367-369, 373, 383, 386, 392, 406, 408-412,
414, 417, 419, 421-423, 430, 479, 485, 490.
Strang, William
Directeur du bureau central du Foreign Office; 139, 203-204, 355.
Strasser, Otto
Fondateur dune aile révolutionnaire de la NSDAP, quitta lAllemagne en 1933;
353.
Stresemann, Gustav
Ministre des Affaires étrangères du Reich lors de la signature du traité de Locarno
(1925); 143-144, 161.
Sündermann, Helmut
Adjoint du chef du service de presse du Reich, le Dr Dietrich; 245, 317.
Swinderen, René de Marees van
Ambassadeur des Pays-Bas à Londres; 20.
Szembek, Jan comte
Secrétaire dÉtat polonais aux Affaires étrangères; 179, 200, 210-211, 226, 298,
380, 395, 440, 449.
Tardieu, André
Homme politique français; Premier ministre en 1932; 256.
Taylor, Alan John Percivale
Historien anglais, qui manifesta tout au long de sa vie une haine particulière pour
lAllemagne; 42, 99, 251, 258, 298, 344, 375, 477, 488.
Taylor, Telford
Haut fonctionaire américain; avocat; procureur au TMI; 260.
Tilea, Virgil
Ambassadeur de la Roumanie à Londres (1939-1940); 243, 317-321, 323, 325.
550
Tiso, Mgr Joseph
Prélat, Premier ministre du gouvernement slovaque fondé le 7 oct. 1938; Président
de la République slovaque en 1939; 123, 125-126, 131, 136.
Todt, Dr Fritz
Inspecteur général du réseau routier allemand (1939); Ministre de larmement du
Reich (1940-1942); 40.
Truman, Harry S.
Vice-président des États-Unis sous Roosevelt; successeur à la présidence en avril
1945; 70, 291, 296, 486.
Tuka, Prof. Vojtech
Dirigeant slovaque; en 1938 vice-Premier ministre de Slovaquie; en 1939 Premier
ministre; 125, 132.
Umanski, Konstantin
Ambassadeur dURSS à Washington; 395.
Vachell, J. L.
Attaché de lAir britannique; 328.
Vansittart, Sir Robert
Haut fonctionnaire du Foreign Office (1930-1938), Premier conseiller diplomatique
du gouvernement britannique (1938-1941), en même temps chef du renseignement
militaire; 44, 46, 120, 185, 256, 291, 293-294, 299-300, 317, 320, 341, 368, 370, 372,
429.
Veesenmayer, Edmund
Responsable au service des Affaires étrangères allemand à Dantzig; 222.
Vlassov, Andrei A.
Général soviétique; après sa capture par les troupes allemandes, commandant en
chef de l«armée Vlassov» combattant du côté des Allemands; 417.
Vollgruber, Alois
Ambassadeur de lAutriche à Paris (1938); 81.
Voroschilov, Klement I.
Maréchal soviétique, commissaire du peuple pour la Guerre; 280, 408, 413.
Wankowicz, Melchior
Écrivain polonais; 158.
Warlimont, Walter
Colonel allemand à létat-major; à partir de 1942 adjoint au chef de létat-major
général des forces armées au sein de lOKW; en 1944 Général dartillerie; 499-500.
Warr, Herbrand Sackville comte de la
Ministre britannique de lÉducation; 311.
Wasilewski, Léon
Ministre polonais des Affaires étrangères; 142, 154.
Wasylewski, Stanislaw
Écrivain polonais; 158.
Wedemeyer, Albert
Général américain; 402.
Weigand, Karl von
Journaliste américain en Europe; 393.
Weizmann, Chaïm
Chef du mouvement sioniste, puis président de lÉtat dIsraël; 451.
Weizsäcker, Ernst von
Secrétaire dÉtat aux Affaires étrangères allemand, membre de la résistance; 174,
551
219, 231, 233-234, 335, 356, 359, 368, 441, 443, 448, 464, 471.
Welles, Sumner
Sous-secrétaire dÉtat aux Affaires Étrangères des États-Unis (1937-1943); 371-
372.
Wheeler-Bennett, Sir John W.
Écrivain anglais; 161.
Wiesner, Rudolf
Président du parti Jeune-Allemand de Pologne, député au Sejm (parlement); 172.
Wilson, Harold
Premier ministre britannique (1965), chef du parti travailliste; 376.
Wilson, Horace J.
Secrétaire dÉtat au ministère des Finances britannique et Ministre de la fonction
publique (1939-1942); 396, 467, 476.
Wilson, Hugh
Ambassadeur des États-Unis à Berlin, rappelé à Washington en novembre 1938 par
le président Roosevelt; 356, 385.
Wilson, Woodrow
Président des États-Unis (1913-1921); 20, 22, 123, 140-142, 145, 151, 161, 166, 239.
Wirth, Joseph
Chancelier du Reich (1921-1922), (Zentrum); 185.
Woermann, Ernst von
Sous-secrétaire dÉtat au ministère des Affaires étrangères allemand; 231.
Wohltat, Helmut
Diplomate allemand; 321.
Wojciechowski, Stanislaw
Président de lÉtat polonais (1922-1926); 152.
Wood, Robert
Général américain; 297.
Wszelaki, Jan
Chef du département économique du ministère des Affaires étrangères polonais;
204.
Young, Owen, D.
Industriel et économiste américain; président de la commission internationale dex-
perts pour le règlement des réparations allemandes; lapplication du plan «Young»,
qui remplaçait le plan «Dawes», rendit lAllemagne effectivement insolvable; 379.
Zaleski, M.
Directeur de lAssociation des Marches de lOuest de Pologne; 175.
Zarske
Directeur du bureau de la presse du Parlement dantzicois, rédacteur en chef du
journal Vorposten; 244.
Zetkin, Klara
Député du parti communiste au Reichstag, doyenne dâge; 405.
552
LES FRONTIERES DE LETAT TCHECOSLOVAQUE
AU POINT DE VUE STRATEGIQUE
Bohême et Moravie-Silésie
à la mort de Charles IV (1378)
1310-1437 Des rois luxembourgeois sur le trône de Bohême, en commençant par le fils de
lempereur (dAllemagne) Henri VII : le roi Jean, beau-frère de Wenceslas III.
1346-1378 Lempereur Charles IV réside à Prague.
1348 Lempereur Charles IV fonde à Prague la première université allemande.
1378-1400 Le fils aîné de Charles IV, de la maison de Luxembourg, Wenceslas IV de
Bohême, empereur dAllemagne. Après sa mort en 1419 commencent les
guerres hussites (1420-1436). Son héritage échoit par mariage à Albert II
dAutriche (1438-1439) de la maison de Habsbourg. Par lui, le trône dAllemagne
passa de la maison de Luxembourg à celle de Habsbourg. Après sa mort, la
Hongrie et la Bohême furent perdues pour les Habsbourg (de 1471 à 1526)
elles se trouvèrent sous la souveraineté des rois Jagellons.
1526 Mort du roi Jagellon de Hongrie Louis II. Sa sur épousa le Habsbourg
Ferdinand Ier (également empereur dAllemagne depuis 1556) et lui apporta les
couronnes de Bohême et de Hongrie. Cest ainsi que fut créée lalliance de ces
deux royaumes avec la monarchie habsbourgeoise. Elle dura jusquen 1918.
Bohême et Moravie-Silésie
avant 1866
Fédération allemande
Monarchie
Austro-
Hongroise
Il faudrait redécouper toute une partie de lEurope pour satisfaire les exigences des
Polonais, telles quelles apparaissent sur cette carte. Par exemple, des territoires importants
des pays voisins, peuplés à 99,9 % dAllemands, devraient être rattachés sans plébiscite à
la Pologne. Pour absurde que cela puisse paraître, les Polonais ne pourraient compter avoir
plus de 0,1 % des voix si un plébiscite était organisé dans ces régions. Mais pour montrer
que leurs exigences sont raisonnables, ils ont tracé leurs «revendications historiques» et
dessiné une grande enclave qui pourrait rester territoire allemand. Malheureusement, cette
propagande est si adroitement conduite que les personnes qui nont aucune connaissance
historique particulière se laissent aisément convaincre que le tiers de lEurope fut jadis
terre polonaise. Tous les Polonais napprouvent pas une telle propagande, mais certains
cercles tentent de donner limpression que le traité de Versailles na accordé lindépendance
quà une petite partie de la «vraie Pologne». En fait, la plupart des terres qui constituent
maintenant la Pologne comportent une population à plus de 50 % non-polonaise (cf. les
tableaux en annexe réalisés daprès des sources polonaises).
Déploiement des
troupes allemandes
et soviétiques
21 juin 1941
frontières soviétiques en 1941
frontières soviétiques en 1939
limites des groupes darmée
fortifications soviétiques en campagne
prétendue ligne Staline
Situation des divisions
XXVIIe Corps dArmée
Panzer = P Cavalerie = K
Unité de montagne
Unité motorisée
Unités de barrage
Zone de peuplement allemand vers 1500 Zone de peuplement polonais
vers 1500
Frontières en 1914
Frontières du
Royaume polono-
lituanien (de
Pologne et Lituanie)
vers 1500
Grand-duché de Varsovie
1807-1815
Frontières du grand-duché
Elections au Reichstag
Lantag de Prusse
Europe centrale en 1919
Territoires perdus par lEmpire allemand selon
le traité de Versailles en 1919.
Territoires perdus par lAutriche-Hongrie suite
aux traités de Saint-Germain et de Trianon
Texte polonais original :
«Chacun de vous porte en lui lembryon de ses droits futurs et des terres qui lui
seront acquises.» Adam Mickiewicz
[Les 2 lignes suivantes sont indiquées déjà sur loriginal polonais à la page
précédente: 272/3]
Cette carte, qui a le format dune carte postale (le verso la reproduit telle
quelle) a été très largement distribuée en Pologne et utilisée à des fins de
propagande. On y voit tracée une Pologne démesurée, qui sétend jusquaux
portes de Berlin. Le terme «frontières historiques» doit donner limpression
que la Pologne possède des droits sur ces territoires occidentaux. Les frontières
orientales «historiques» de la Pologne sont omises de manière à éviter toute
provocation à lencontre de ses voisins de lest.
On est contraint de se demander si la Pologne pense que le sang anglais
doit être versé pour défendre ces frontières imaginaires, dautant que
lacquisition de ces frontières par la Pologne serait source de nouveaux
conflits. La légende montre que les «frontières historiques» sont tournées
vers lavenir plus que vers le passé.
Memel et Dantzig
Galicie orientale et région de Wilna. Alors que, le 18 avril 1922, la Pologne annexait par la force la région de
Wilna, la souveraineté sur la Galicie orientale ne lui fut reconnue que par larrêté du Conseil des Ambassadeurs
du 15 mars 1923.
Galicie occidentale, accordée à la Pologne par le traité de Saint-Germain, le 10 septembre 1919
Frontière polono-soviétique, fixée le 8 décembre 1919 par le Conseil supérieur de lEntente ; la ligne dite Curzon
allant de la pointe sud-est de la Prusse orientale à la démarcation la plus au nord entre la Galicie orientale et la
Galicie occidentale.
Régions ôtées à lAllemagne en 1945
Zone doccupation soviétique en Allemagne en 1945
Frontière polono-soviétique en 1945
Corridor germano-polonais 1939
Propositions allemandes du 30
août 1939
Territoire du Reich allemand jusquen
1918
Territoire au sein duquel un référendum
devait être effectué dans les 24 mois
sous contrôle international
Zone exterritoriale de transit
A. Pour la Pologne, au cas où le
territoire reviendrait à lAllemagne
B. Pour lAllemagne, au cas où le
territoire reviendrait à la Pologne
jusquen 1939
Europe Centrale
1938-1945
Frontières 1938
Frontières 1945
Frontières des zones Territoires
doccupation
annexés par
lUnion
soviétique
Etats Baltes (Lituanie,
Lettonie, Estonie) 1940
par la Tchécoslovaquie
Carpato-Ukraine
8.10.38 autonome
23.3.39 Hongrie
1944 soviétique
par la Roumanie
Bessarabie 1945
Territoires allemands 1945
sous administration
polonaise
sous administration
soviétique