Développer L'entrepreneuriat Social - Le Livre Blanc
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Le Livre Blanc
Ce livre blanc est le fruit dun travail collectif : celui du Cods et des 100 entrepreneurs sociaux qui se sont associs sa dmarche.
Les travaux et productions du Cods sont soutenus par la Fondation Crdit Coopratif et le Fonds Social Europen. LAvise assure lanimation, loutillage et la valorisation du Cods. Plus dinformations sur www.avise.org/codes
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SOMMAIRE
INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Osons Maintenant ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pourquoi ce livre blanc ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Vous avez dit entrepreneuriat social ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 6 8 9 Petite histoire de lentrepreneuriat social . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Une ralit plurielle, des fondamentaux communs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
OSER MAINTENANT : 15 PREMIRES INITIATIVES POUR DVELOPPER LENTREPRENEURIAT SOCIAL. . . . Dvelopper . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Former . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Analyser . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Promouvoir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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OSER DEMAIN : UNE VISION PARTAGE POUR DVELOPPER LENTREPRENEURIAT SOCIAL . . . . 17 Fabriquer de nouvelles alliances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 Avec les acteurs conomiques : changer lentreprise, ensemble ! . . . . . . . . . . . . . . 18 Avec les grandes entreprises de lconomie sociale : un combat commun . . . . . . . . 20 Pouvoirs publics et entrepreneurs sociaux : pour un New Deal . . . . . . . . . . . . . . . 21 La socit civile : le terreau de lentrepreneuriat social . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Dvelopper de nouveaux outils pour changer dchelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Des outils pour crer et prenniser de nouvelles entreprises sociales . . . . . . . . . . 27 Permettre aux entreprises sociales datteindre une taille critique . . . . . . . . . . . . 30
Passer d'un concept attractif mais flou une ralit opratoire et mesurable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
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INTRODUCTION
Justement, les entrepreneurs sociaux rassemblent car ils savent o ils vont. Ils proposent une voie mancipatrice et non destructrice, une voie despoir et de combat, non de haine et de rsignation. Ils font vivre des utopies concrtes, combinant esprit dentreprise et volont de changer le monde, convictions fortes et ouverture lAutre, russite individuelle et intrt collectif, capacit de rvolte et ancrage dans le rel. Par leur facult montrer quau fond, le souhaitable est vraiment possible, les entrepreneurs sociaux dessinent les contours dune conomie responsable, pleinement et rellement au service des hommes et de la plante. Mais des dfis de taille restent relever pour dvelopper lentrepreneuriat social et donner corps ce projet de socit. Ainsi, sa notorit a progress mais cet engouement ne se concrtise pas encore par une augmentation significative de cration et dveloppement dentreprises sociales. Ainsi, les initiatives et dispositifs se multiplient mais ce mouvement nest pas encore reconnu sa juste valeur, par les milieux conomiques, les pouvoirs publics, la socit civile et mme par lconomie sociale et solidaire. Ainsi, la fibre entrepreneuriale progresse dans le monde associatif mais les modles conomiques de nombreuses entreprises associatives sont renforcer et prenniser, car fragiles ou en mutation.
Osons Maintenant !
Lentrepreneuriat social contribue changer le monde. Sil est aujourdhui encore la marge, nous voulons agir pour le rendre central. Lentrepreneuriat social trace un chemin humaniste pour faire face aux dfis sociaux et cologiques du XXI sicle, que ni ltat, ni le march ne savent rsoudre seuls. Mais pour que sa charrue file droit et ne manque pas de force pour labourer ce sillon, il faut larrimer aux bonnes toiles. Celle de lengagement, pour un monde meilleur, pour une conomie saine et durable, pour que chacun puisse vivre dignement de son travail et satisfaire ses besoins essentiels (sant, ducation, logement, alimentation, nergie, culture). Celle de la rsistance, contre les exclusions et les pauvrets sous toutes leurs formes, contre lextension illimite du domaine de la marchandise, contre les drives du capitalisme financier et le productivisme qui mnent notre plante sa perte. Si les entrepreneurs sociaux ont la tte dans ce ciel toil, ils ont bien en revanche les pieds sur terre. Pleinement dans lconomie de march, ils sont acteurs de la rconciliation entre pouvoirs publics, milieux conomiques et socit civile. Gestionnaires de tensions, ils savent surmonter les contradictions inhrentes aux projets complexes runissant les dimensions conomique, sociale et cologique. Il nest point de vent favorable pour celui qui ne sait pas o il va, disait Snque.
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Et surtout, les problmes sociaux et cologiques persistent, saggravent et se transforment. Pour relever ces dfis et permettre un vritable changement dchelle, nous voulons impulser, partager et articuler un projet fort et une action forte. Un projet fort, ambitieux et offensif : nous ne nous contenterons pas dvolutions priphriques, mais souhaitons un changement de braquet, une vritable rupture. Une action forte dont nous dcrivons les grandes lignes dans ce livre blanc. Nous mettons ainsi en dbat un vritable plan dactions que nous vous invitons enrichir, critiquer et saisir pour agir lchelle des territoires, de la France, de lEurope et mme du monde, lentrepreneuriat social tant un mouvement vritablement international. Pour joindre lacte la parole, nous nous engageons sur 15 premires initiatives (cf. pages 11 16) dont nous rendrons compte de lavance dans un an. Ce livre blanc est fait par les entrepreneurs sociaux pour les entrepreneurs sociaux, mais il est aussi destin aux dcideurs conomiques, politiques et institutionnels, et plus largement ceux qui souhaitent dvelopper cette autre manire dentreprendre. Nous souhaitons creuser ce sillon de lentrepreneuriat social sans pour autant quil devienne une tranche, derrire laquelle nous chafauderions une nouvelle chapelle. Pour nous, le vritable enjeu nest pas de choisir un camp (conomie sociale, conomie
solidaire, entreprises classiques) et de le dfendre bec et ongles contre les autres. Il est de prendre bras le corps les grands dfis sociaux et cologiques du XXI sicle. Il est darriver rpondre aux besoins de ce nombre croissant de citoyens la recherche de sens et de pratiques diffrentes, plus humanistes. Il est dapporter une rponse, notre rponse, la conjonction de crises actuelles (financire, conomique, sociale, voire morale), qui va demander aux entrepreneurs sociaux dtre toujours plus innovants et toujours plus combatifs. Cette rponse ne pourra tre pertinente que si les entrepreneurs sociaux parviennent concrtiser le plein potentiel de cet entreprendre autrement. Que sils sassocient, avec tous ceux qui le souhaiteront, pour provoquer ce changement dchelle : jamais la demandedentrepreneuriatsocialnataussi forte. Travaillons donc tous ensemble dvelopper loffre qui y correspond en rendant cesalternativesplusvisibles,plusnombreuses et plus fortes ! Osons,maintenant,dvelopper lentrepreneuriat social ! Nous vous donnons rendez-vous en fvrier 2010, pour le premier Forum national des entrepreneurs sociaux, et sur toute lanne 2009, pour plusieurs forums et rencontres rgionales dentrepreneurs sociaux. Une formidable nergie est luvre dans nos territoires, dans lconomie sociale et solidaire, les milieux conomiques, les pouvoirs publics, la socit civile, chez toutes celles et ceux, majoritaires, qui croient dans lentreprise mais ne se satisfont plus dune conomie qui perd son sens, refuse la pluralit et ne pense qu la rentabilit maximale. Puisse cette publication contribuer la renforcer.
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A vous de jouer !
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OSER MAINTENANT
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15 PREMIRES INITIATIVES
POUR DVELOPPER LENTREPRENEURIAT SOCIAL
Les 100 signataires de ce livre blanc proposent 15 actions concrtes, pragmatiques et porteuses de sens, visant dvelopper lentrepreneuriat social ds maintenant.
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DVELOPPER
Constat : Les dispositifs dappui la cration dentreprises sociales sont nombreux, se caractrisent par une grande diversit de projets et de mthodes, mais maillent encore insuffisamment le territoire. Initiative : En sinspirant des dispositifs existants ou en cration (incubateurs, couveuses, ppinires, duplication), laborer un plan dactions pour les articuler, les dployer et les dmultiplier sur les territoires, afin de passer du stade du laboratoire celui de la production en srie dentreprises sociales. Objectif : Mailler lensemble du territoire, de manire cohrente et complmentaire, par des dispositifs dappui la cration dentreprises sociales.
Constat : Linnovation et lexprimentation sociales sont aujourdhui peu ou mal finances, y compris par les acteurs classiques du financement de lconomie sociale et solidaire. Initiative : Lencours de lpargne solidaire est important (1,7 milliards deuros en 2007) et en croissance (+ 33% par rapport 2006). Il va continuer crotre, dautant plus que la loi de modernisation conomique (LME) a tendu tous les plans d'pargne d'entreprise, l'obligation de proposer aux salaris un fonds finanant des entreprises solidaires (FCPES). Il sagit donc dapprofondir les moyens de mobiliser cette pargne pour financer la R&D sociale : quelques millimes ou centimes permettraient daugmenter considrablement sa capacit de financement. Objectif : Favoriser lmergence des innovations sociales les plus porteuses davenir (aux impacts sociaux potentiels trs forts long terme), souvent aussi les plus risques.
Constat : Si linnovation technologique est aujourdhui fortement soutenue par les pouvoirs publics, linnovation sociale ne bnficie encore que rarement daides ad hoc. Initiative : Faire reconnatre linnovation sociale comme une innovation part entire, reconnue par les milieux conomiques et les pouvoirs publics, au mme titre que linnovation technologique. Objectif : Ouvrir linnovation sociale les dispositifs existants dappui linnovation (Oso Innovation, crdit impt recherche, incubateurs publics).
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Constat : Des entreprises sociales fort potentiel, positionnes sur des secteurs historiques de lconomie sociale et solidaire ou sur de nouvelles filires dynamiques comme celles lies au dveloppement durable, ont des besoins de dveloppement ou de consolidation mal satisfaits. Initiative : En sappuyant sur les acteurs et comptences existants de lconomie sociale et solidaire, en les coordonnant et en les mettant en synergie, crer une fonction banque daffaires pour lentrepreneuriat social, visant appuyer, accompagner (voire susciter) des oprations de rapprochement, de fusion/acquisition et de croissance des entreprises sociales. Objectif : Constituer de vritables groupes dentreprises sociales ou de grandes entreprises sociales la taille critique suffisante.
Constat : Les acteurs de lentrepreneuriat social travaillent encore trop dans un cadre strictement franco-franais. Or, lentrepreneuriat social est une dynamique mondiale et son dveloppement grande chelle implique de dmultiplier les actions (partenariats, partage de bonnes pratiques, lobbying) au niveau international. Initiative : Sortir du cadre national et travailler avec les acteurs internationaux du dveloppement de lentrepreneuriat social sur des initiatives communes, en organisant des moments dchanges et de connaissance mutuelle, en sintgrant aux processus existants (rseaux, forums) et en enclenchant des premires collaborations avec des acteurs de lentrepreneuriat social (Angleterre, Italie). Objectif : Participer la reconnaissance institutionnelle internationale de lentrepreneuriat social et son dveloppement transnational.
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FORMER
Constat : Il nexiste pas aujourdhui dcole spcifiquement ddie lducation et la formation des porteurs de projet de cration ou reprise d'entreprises sociales, ainsi quaux cadres et dirigeants de ces entreprises. Initiative : Faire exister lentrepreneuriat social travers une institution autonome, l'Ecole de l'entrepreneuriat en conomie sociale (EEES) en Languedoc-Roussillon. Lieu d'changes et de formation pour renforcer les comptences managriales dans le secteur de l'conomie sociale, elle se donnera pour objectifs secondaires de favoriser la mobilit professionnelle au sein de lconomie sociale, de renforcer lidentit et lattractivit du secteur, et de contribuer sa reconnaissance. Objectif : Accueillir les premiers stagiaires de lEEES ds lanne 2009.
Constat : Sil existe dj des chaires ddies lentrepreneuriat social dans les grandes coles (exemples de lESSEC, dHEC), il reste encore de nombreux territoires dfricher. Initiative : Sinspirer des initiatives existantes pour promouvoir lentrepreneuriat social dans les grandes coles dingnieurs et de commerce, pour multiplier les chaires, les formations ddies (masters, options, majeures) et les modules de sensibilisation au sein des formations sur la cration dentreprise. Objectif : Mettre en uvre trois projets pilotes et crer un module de sensibilisation lentrepreneuriat social ciblant les tudiants.
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Constat : Les lves des lyces et collges sont les entrepreneurs sociaux de demain. Cependant, ils sont aujourdhui trs peu sensibiliss cet enjeu. Initiative : Sappuyer sur les dispositifs existants de sensibilisation lentrepreneuriat dans les collges et lyces (enseignement gnral et professionnel), tels Entreprendre pour apprendre, 100 000 entrepreneurs, Semaine de la coopration, etc., pour promouvoir lentrepreneuriat social auprs de leurs lves. Objectif : Crer un kit pdagogique sur lentrepreneuriat social destination des adolescents.
Constat : Les lus et techniciens des collectivits locales, hormis ceux positionns sur le soutien lconomie sociale et solidaire, mconnaissent souvent limpact des entreprises sociales sur leurs territoires. Initiative : Former et informer les lus et techniciens aux enjeux de lentrepreneuriat social, afin de renforcer lappui des collectivits locales son dveloppement et inscrire lentrepreneuriat social dans les schmas rgionaux de dveloppement conomique. Objectif : Crer un module de formation pour ces acteurs en collaboration avec le Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT).
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ANALYSER
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Constat : Les outils et indicateurs actuels de mesure de la performance sociale sont souvent complexes et mconnus, et les entreprises sociales valuant de manire systmatique leur impact social et environnemental sont encore rares. Initiative : Sappuyer sur les travaux dun groupe dentrepreneurs sociaux et les travaux dj mens en France et ltranger, pour identifier les approches les plus pertinentes (filire, territoire, performance globale de lentreprise, etc.). Objectif : A limage du Social Return On Investment (SROI New Economics Foundation au Royaume-Uni), parvenir une ralit opratoire et mesurable de la performance sociale des entreprises sociales.
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Constat : Les entreprises sociales sont parfois freines ou bloques dans leur dveloppement du fait de contraintes gnres par leur statut ou leurs pratiques. Initiative : Lancer une rflexion sur ces verrous de croissance : quelles volutions pour attirer du capital et des talents, tout en restant fidles la vocation et au projet de lentrepreneuriat social ? Quels mcanismes pour changer dchelle sans changer de valeurs ? Faut-il rflchir un nouveau statut dentreprise but social, faire voluer les existants ou simplement innover dans les pratiques et mthodes de management ? Objectif : Entamer un dbat approfondi partir dexpriences concrtes et publier un rapport prsentant les rsultats de cette rflexion.
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Assurer une veille et un suivi sur les thmes mergents relatifs au dveloppement des entreprises sociales
Constat : Lenvironnement des entreprises sociales est en pleine mutation : nouveaux acteurs, nouveaux financeurs, nouvelles rglementations Les entrepreneurs sociaux et leurs rseaux sont insuffisamment informs sur ces changements. Initiative : Organiser la veille et le suivi des volutions rglementaires (comme la cration en aot 2008 des fonds de dotation, nouvel outil financier cr par la Loi pour la Modernisation de lEconomie (LME) pour financer des actions dintrt gnral), normatives (cration doutils de labellisation et de prescription de projets dentreprises sociales pour la philanthropie prive), voire socitales (arrive de nouveaux acteurs privs venture philanthropy) redfinissant la pratique du don et de linvestissement. Objectif : Informer les entrepreneurs sociaux sur ces thmes mergents par des lettres dinformations et des vnements.
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PROMOUVOIR
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Constat : Il ne peut y avoir de changement dchelle de lentrepreneuriat social sans une forte mobilisation et implication des entrepreneurs sociaux. Or, il existe aujourdhui trop peu de lieux et de moments favorisant les changes et les projets communs entre entrepreneurs sociaux. Initiative : Lancer une dynamique collective en runissant 100 entrepreneurs sociaux au Salon des Entrepreneurs 2009 et en publiant ce livre blanc. Cet vnement constituera la premire tape dune dmarche collective qui se poursuivra tout au long de 2009 travers des vnements rgionaux et locaux, et lorganisation du 1er Forum national des Entrepreneurs Sociaux en fvrier 2010. Objectif : Rassembler 100 entrepreneurs sociaux au Salon des Entrepreneurs 2009, 500 au 1er Forum national des entrepreneurs sociaux.
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Constat : Il nexiste pas aujourdhui sur internet de centre de ressources identifi lorsque lon cherche entreprendre autrement : les initiatives sont clates, parcellaires ou peu communicantes. Initiative : Elaborer un site portail des entrepreneurs sociaux ayant vocation faire dcouvrir lentrepreneuriat social, appuyer la cration de nouvelles entreprises sociales et le dveloppement de celles dj existantes, informer sur lactualit, permettre lchange et le partage dinformations entre entrepreneurs sociaux. Objectif : Lancer ce site portail lautomne 2009.
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Constat : Malgr les efforts de communication de lensemble de ses acteurs, lentrepreneuriat social demeure encore peu connu du grand public. Initiative : A limage des initiatives menes pour faire connatre le commerce quitable ou lagriculture biologique, mener des campagnes de promotion, par des vnements attractifs et ouverts au grand public, mais aussi en investissant des mdias de masse, comme les mdias audiovisuels, sous des formes varies : documentaires, reportages, srie de films courts, etc. Objectif : Accrotre de manire mesurable et durable (sondages, tudes, baromtre) la connaissance et la reconnaissance de lentrepreneuriat social par le grand public.
Sur ces 15 initiatives, les 100 entrepreneurs sociaux sengagent : rendez-vous dans un an !
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Oser Maintenant : 100 Entrepreneurs Sociaux Sengagent
OSER DEMAIN
UNE VISION PARTAGE
POUR DVELOPPER LENTREPRENEURIAT SOCIAL
De nombreuses actions ont t menes ces dernires annes par des acteurs trs divers pour promouvoir et dvelopper lentrepreneuriat social. Il est ncessaire de sappuyer sur cet existant, pour ne pas le rinventer, mais plutt chercher agir sur ce qui tait mergent ou insuffisamment trait. Ce plan partag propose une vision structure de laction, des objectifs prioritaires et de leurs modalits. Nous la mettons en dbat.
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Le capitalisme actuel, domin par les marchs financiers et la recherche de la rentabilit maximale court terme, est en crise et se fissure. De plus en plus nombreux sont ceux qui au cur mme du systme (entrepreneurs, conomistes, banquiers), dnoncent ses drives et sengagent concrtement pour essayer de lui redonner du sens. Lentrepreneuriat social peut et doit exploiter et largir ces brches, la fois pour se dvelopper, mais aussi pour contribuer la transformation de lconomie de march, dans un sens plus humaniste.
Des partenariats forts et quilibrs entre entreprises sociales et classiques La multiplication des partenariats gagnant-gagnant avec les entreprises classiques est une bonne manire dy parvenir.
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Ces collaborations peuvent en effet permettre aux entreprises sociales de : Accder de nouveaux marchs. Dans le cadre de leurs politiques de RSE, les entreprises classiques peuvent choisir de crer des partenariats commerciaux ou de mtier avec des entreprises sociales (Envie / Darty, Adecco / Ides). Elles peuvent aussi choisir de les privilgier comme fournisseurs. Bnficier dun appui managrial et financier. De plus en plus de cadres et dentrepreneurs ayant russi souhaitent faire bnficier les entrepreneurs sociaux de leur exprience ; par exemple, travers le mcnat de comptences. Il merge par ailleurs une nouvelle gnration dentrepreneurs et dentreprises philanthropes qui souhaitent non seulement mobiliser leur argent, mais aussi utiliser leurs comptences et leurs rseaux au service du projet. Ils ne souhaitent pas seulement donner, mais aussi simpliquer et passer dune logique de don celle dinvestissement social (voir par exemple les business angels sociaux), do leur intrt plus marqu pour la mesure de limpact social et du SROI (Social return on investment). Rciproquement, les entreprises classiques peuvent aussi bnficier de lapport des entreprises sociales pour, par exemple : Rpondre leurs besoins de recrutement sur des marchs en tension. Le Medef a nou rcemment dans cette
optique un partenariat (guide, formations) avec le CNEI1 et le CNCE-GEIQ2 pour dvelopper les collaborations sur les territoires. Dfricher de nouveaux marchs, lis la consommation responsable et thique ou des modles conomiques innovants (exemple de la cration du social business Grameen Danone, joint-venture lucrativit limite, monte par Danone et M. Yunus). Elever leur niveau de responsabilit sociale et dvelopper de nouveaux outils et approches plus dmocratiques ou solidaires, concernant la gouvernance dentreprise, la participation des salaris, la rpartition des profits, lancrage territorial, etc. Les entreprises sociales et entreprises classiques peuvent, par ailleurs, gagner travailler ensemble sur des thmes dintrt commun, comme la diversit, la mesure de la performance globale des entreprises (conomique, sociale, environnementale) ou la meilleure prise en compte des externalits ngatives (comme lmission de gaz effet de serre). Ces partenariats ne doivent pas se limiter aux grandes socits. Il est essentiel de dvelopper galement les cooprations avec les TPE/PME locales, qui reprsentent lcrasante majorit des entreprises et dont beaucoup partagent le souci de proximit et dancrage territorial des entreprises sociales.
1 - CNEI : Comit national des entreprises dinsertion. 2 - CNCE-GEIQ : Groupement demployeurs pour linsertion et la qualification.
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Lengagement des entreprises dites classiques auprs de celles de l'entrepreneuriat social gagne du terrain. L'ouvrage Entreprises et insertion Collaborer et coproduire sur le territoire, ralis en 2008 par le Medef, le Cnei, le CNCE-Geiq et IMS-Entreprendre pour la Cit, en est une illustration concrte : il recense une vingtaine d'exemples de partenariats entre acteurs de l'insertion et grandes entreprises. Des collaborations qui prennent souvent la forme de co-traitance ou de sous-traitance. Mais d'autres possibilits d'alliances s'installent petit petit, l'image du partenariat entre Adecco et Id'es Interim (filiale du groupe Id'es, cre en 1991 et qui constitue un rseau de plusieurs entreprises de travail temporaire d'insertion (ETTI)). Depuis 1996, le premier est entr au capital du second hauteur de 34 %. "Ce n'tait pas le mtier d'Adecco que de faire de l'insertion, explique Dominique Fivre, directeur d'Id'es Interim. Participer au capital tait donc, pour Adecco, un bon moyen de dvelopper son investissement dans le secteur de linsertion par lconomique, puisqu'elle avait aussi des participations dans le capital d'ETTI comme Objectif Emploi ou Chorus Normandie". Dans le contexte des annes 2000, favorable au dveloppement des ETTI, ce partenariat a contribu l'ouverture de 15 nouvelles agences. Aujourd'hui au nombre de 34, les ETTI Adecco-Id'es Interim ont permis 4 912 personnes (988 quivalents temps plein) de travailler en 2007, avec 55 % de sorties dynamiques.
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ltre, ils doivent aujourdhui favoriser lmergence de ces nouvelles initiatives. Enfin, dun point de vue plus politique mais tout aussi porteur de sens, le Ceges, en tant que maison commune des entreprises de lconomie sociale et solidaire, a un rle particulier de moteur jouer en faveur du dveloppement de lentrepreneuriat social. A lui et ses reprsentants de prendre toute leur place cet gard, en imaginant, impulsant, coordonnant et soutenant les initiatives et actions menes par les diffrents acteurs et interlocuteurs de lentrepreneuriat social.
Afin de contribuer installer durablement l'conomie sociale sur le territoire franais, le groupe dassurances Macif a cr en 1993 la Fondation Macif. "Notre mission : dfendre lide que cette conomie sociale ne relve pas uniquement du champ de la rparation, explique Alain Philippe, prsident de la Fondation. Derrire toutes les activits dployes par les acteurs de l'conomie sociale, une part importante s'inscrit dans une approche entrepreneuriale et conomique part entire ". Au cours des quinze dernires annes, la Fondation Macif a apport un soutien financier plus de 2 000 acteurs de lconomie sociale issus de diffrents secteurs : protection de lenvironnement des zones littorales, promotion de l'emploi dans les mtiers d'art, appui au commerce quitable ou l'insertion par l'activit conomique, etc. Pour les reprer, la Fondation mne une action de proximit au cur des rseaux daccompagnement social. Des partenaires de terrain tels que Les jardins de Cocagne, le Coorace ou la Confdration gnrale des Scop portent sa connaissance les projets en recherche de financements. La Fondation repre galement les actions qu'elle soutient grce un concours qu'elle organise chaque anne, destination des entreprises de l'conomie sociale (mutuelles, coopratives et associations). Depuis 1993, le montant global des aides accordes par la Fondation atteint 17 M. En 2007, le budget annuel ddi ces financements tait de 2,3 M. Ds 2009, grce au dveloppement du groupe Macif, il passera 3,4 M.
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Dans ce contexte, la puissance publique doit notamment considrer autrement ses apports aux entreprises sociales, passant dune logique de subvention une logique dinvestissement.
reprsente 120 milliards deuros par an, soit 10 % du PIB) ; Renforant l'accompagnement des entrepreneurs sociaux par les dispositifs dappui la cration et au dveloppement dentreprises et de PME ; Instaurant des incitations fiscales favorables au dveloppement de lentrepreneuriat social ; Soutenant des campagnes de promotion pour faire mieux connatre et reconnatre cette autre faon dentreprendre ; Intgrant mieux lentrepreneuriat social dans les politiques publiques dintrt gnral (emploi, ville, dveloppement durable) ; Evaluant et rmunrant au juste prix les prestations dintrt gnral ralises par les entreprises sociales ; Favorisant la R&D et linnovation sociales, au mme titre que linnovation technologique ; Impulsant un travail statistique avec les oprateurs spcialiss pour amliorer la connaissance des entreprises sociales, de leur poids et contribution la cration de la richesse nationale.
Obtenir un portage politique national et un plan dactions ddi Les entrepreneurs sociaux nattendent pas de lEtat quil dveloppe leur entreprise leur place. Ils souhaitent quil cre les conditions favorables ce dveloppement. Ils ont besoin dun Etat partenaire, rgulateur et stratge. Le gouvernement anglais a bien compris cet enjeu et met en uvre depuis plusieurs annes un plan dactions ambitieux et oprationnel, ddi cet objectif (et rattach au Premier ministre). Il y a besoin en France dun portage politique similaire de lentrepreneuriat social, fort, visible et stable, par exemple au niveau du Ministre de lconomie ou du Ministre du Dveloppement durable, avec entre autres, lappui de la Caisse des Dpts, partenaire historique des acteurs de lentrepreneuriat social. Les entrepreneurs sociaux doivent prendre la parole et se mobiliser en ce sens. Un plan dactions public pluriannuel pourrait ainsi contribuer directement au dveloppement de lentrepreneuriat social, en : Ouvrant de nouveaux marchs pour les entrepreneurs sociaux, notamment dans la commande publique (qui
Les collectivits territoriales : des partenaires privilgis des entreprises sociales Les collectivits locales, qui simposent comme des acteurs cls du dveloppement conomique, sont des partenaires privilgis des entreprises sociales.
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Ces dernires annes, elles ont mis en place des politiques dappui lconomie sociale et solidaire et lentrepreneuriat social. Mais ces politiques gagneraient tre largies aux politiques de droit commun, tant il est transversal leurs attentes, car porteur de rponses concrtes aux enjeux de dveloppement local, de cohsion sociale, de dveloppement durable et demploi. Il est donc ncessaire de se mobiliser pour accrotre lengagement des collectivits sur lentrepreneuriat social, engagement pouvant se traduire de diffrentes manires : Favoriser davantage les entreprises sociales dans les marchs publics territoriaux (notamment, laccs aux filires dveloppement durable : nergie, dchets) et cesser dexclure de ces marchs certains types dentreprises sociales ; Ouvrir les dispositifsdappuilacration et au dveloppement dentreprises lensemble des entreprises sociales et crer des dispositifs dappui ddis spcifiquement la cration et au dveloppement dentreprises sociales ; Appuyer le dveloppement de lentrepreneuriat social sur des filires prioritaires ; Appuyer lexprimentation sociale (R&D), en sinspirant par exemple des politiques de soutien linnovation technologique (incubateurs, fonds, partenariats entreprises-universits) et en veillant notamment favoriser lmergence et le dveloppement de nouvelles initiatives particulirement innovantes ;
Travailler sur des indicateurs de performance sociale et cologique lchelle des territoires.
LEurope : lavenir des entrepreneurs sociaux et un tremplin pour une action mondiale Changer dchelle implique aussi de changer dchelle gographique : le dveloppement de lentrepreneuriat social passe assurment par une ambition europenne et internationale. En Angleterre, en Italie, en Belgique et dans beaucoup dautres pays europens, les entreprises sociales se dveloppent, et les pouvoirs publics, locaux et nationaux les soutiennent. Il est ncessaire dagir pour changer, mutualiser, confronter les regards entre acteurs de lentrepreneuriat social de diffrents pays ; pour renforcer le lobbying au niveau europen, en articulation et en synergie avec celui men pour lconomie sociale, avec lobjectif dtre mieux inscrits dans les politiques europennes de cohsion sociale et de dveloppement durable, et plus largement encore Car lheure actuelle, si la prise en compte par les institutions europennes dun entrepreneuriat certes diffrent mais au fort potentiel de cration demplois et dactivit conomique est croissante, elle reste limite aux cercles des experts. Ainsi, lOCDE travaille concrtement sur le sujet, notamment par lorganisation de sminaires et la publication douvrages de rfrence. Le Conseil de lEurope, de son ct, a manifest son intention de sappuyer
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sur les entreprises sociales pour contribuer au dveloppement des pays dEurope de lEst. Au niveau de la Commission europenne, cependant, si lide progresse, elle est encore trop souvent rduite la lutte contre lexclusion sociale. Les rcents dveloppements autour de la notion de services sociaux dintrt gnral illustrent la ncessit pour les entreprises sociales de peser sur les dbats : ds lors que la cohsion sociale est une priorit affiche pour lUnion Europenne, il est indispensable que lentrepreneuriat social, entrepreneuriat dintrt gnral sil en est, soit reconnu dans ses spcificits et encourag, tant au titre des politiques
europennes conomiques que sociales ou environnementales. Enfin, lhorizon ne doit pas se rduire lEurope : ces problmatiques doivent galement tre portes au-del du Vieux Continent. Les entrepreneurs sociaux, notamment dans le commerce quitable, agissent dj pour rapprocher Nord et Sud et conjuguer ensemble une autre manire dentreprendre et denvisager les relations conomiques. Dores et dj, lentrepreneuriat social est un mouvement mondial, qui doit, pour exister et peser toujours plus fortement et hauteur de ce quil reprsente, pouvoir se rencontrer et se structurer.
Si l'entrepreneuriat social n'a pas encore une notorit importante en France, c'est assurment qu'il manque d'une vraie reprsentativit politique. Un problme dont le "third sector" d'outre-Manche ne souffre pas, depuis le lancement, en 2006, du "Social enterprise action plan" par le Gouvernement du Royaume-Uni. Un programme pilot par l' Office of the Third Sector (OTS). Objectif : crer un environnement favorable aux entreprises sociales. Parce que la cration ou le dveloppement de ce type de structures touche des secteurs trs varis, l'OTS travaille avec tous les dpartements concerns : Communities and Local Government ; Environment, Food and Rural Affairs ; Children, Schools and Families; etc. Le Department of Health s'implique galement dans la dmarche : en deux ans, il a dj investi 15 M des 100 M du Social Enterprise Fund qu'il gre. Enfin, le ministre Innovation, Universities and Skills participe au financement de la recherche sur l'entrepreneuriat social, via un financement de 2,5 M. En septembre 2008, un Centre de recherche pour le "Third sector" a mme t lanc, avec un budget de 5 M, afin de mettre en place des outils de mesure de la "valeur ajoute sociale" de tous les acteurs du secteur. Les universits, elles aussi, s'impliquent dans la dmarche : ce jour, 47 conseillers d'orientation de l'enseignement suprieur ont suivi des formations pour mieux connatre les possibilits de dbouchs dans l'entrepreneuriat social ; et depuis septembre 2008, les programmes des coles de commerce comportent des cours sur ce secteur. La ralisation de nombreux guides vient complter cette multitude d'activits. Une dmarche couronne par le Social Enterprise Day, le 20 novembre 2008, dans le cadre de la Global Entrepreneurship Week.
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En se faisant connatre et reconnatre, par des campagnes de promotion, par des vnements attractifs et ouverts au grand public, limage des initiatives menes pour faire connatre le commerce quitable ou lagriculture biologique. Il importe aussi dinvestir des mdias de masse, comme les mdias audiovisuels, sous des formes varies : documentaires, reportages, srie de films courts, etc. La promotion de lentrepreneuriat social ne doit pas se faire sur la base dun discours idologique ou statutaire, mais mettre en avant de lexemplarit, des parcours et russites dentrepreneurs sociaux. Elle doit donner voir ces ralits dentreprises part entire, mais aussi entirement part. Elle doit montrer concrtement quoi sert lentrepreneuriat social et tre rsolument tourne vers lavenir. Les rgies de quartier, les Cigales, les Amap, le rseau Cocagne, sont des exemples dentreprises sociales impliquant fortement la socit civile. La Scic (socit cooprative dintrt collectif) est galement une forme juridique de socit qui permet de formaliser son implication (via les collges).
La socit civile, le nerf de lentrepreneuriat social Pour entretenir ce lien vital et profond avec la socit civile, il y a besoin de dvelopper cette relation directe aux citoyens, acteurs de lconomie. Comment ?
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Comme toute entreprise, les entreprises d'insertion ont besoin d'investissement pour prenniser ou dvelopper leurs activits. C'est pourquoi le Comit national des entreprises d'insertion (Cnei) cre en 2005 Sofinei, un fonds d'investissement destin exclusivement aux entreprises d'insertion. Objectif de cette socit anonyme cooprative capital variable : favoriser la cration, la consolidation ou la croissance des entreprises dinsertion afin de permettre aux 35 000 personnes en situation d'exclusion, accompagnes annuellement par les 556 entreprises membres du Cnei, de continuer leur parcours d'insertion socioprofessionnelle. Initialement dote dun capital de 225 000 , apport par le Cnei, le Crdit Coopratif et lIdes (Institut pour le dveloppement de lconomie sociale), Sofinei connat une monte en puissance trs rapide : en faisant le choix de lappel public lpargne pour augmenter son capital, elle montre sa volont de sinscrire en lien avec la socit civile. Lapport du Crdit Coopratif est alors dcisif : Nous sommes le banquier de 80 % des entreprises dinsertion, explique Didier Boissaye, responsable du dveloppement de linsertion par lactivit conomique au Crdit Coopratif. Naturellement, nous avons tout de suite mis notre rseau de distribution au service du Cnei. Grce cette campagne, lappel public lpargne collecte en six mois 1,5 millions d'euros supplmentaires ! Un message clair de la part des investisseurs citoyens ! Depuis 2007, Sofinei, agre Entreprise Solidaire, a investi 500 000 dans une quinzaine dentreprises dinsertion, sous forme de prts participatifs allant de 20 000 50 000 .
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lentrepreneur social (programme Fellowship dAshoka, Antropia) ; sur la duplication dexpriences russies (programme Entreprendre Autrement du rseau Entreprendre, Fonds de confiance de la Caisse des Dpts, FDI) ; sur le partenariat avec les collectivits et les laboratoires de recherche (Alter Incub, CRES Languedoc-Roussillon) ; sur la concrtisation de projets dormants sur les territoires (exprience des Fabriques initiatives mene par lAvise) ; sur linnovation sociale et la R&D sociale (appels projets DIIESES) ; sur laccompagnement du dveloppement et de la consolidation de lactivit (DLA, accompagnement direct par les rseaux), etc.
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Ces dispositifs ont galement un caractre structurant sur les territoires et permettent souvent la mobilisation de lensemble des acteurs de lconomie sociale et solidaire sur un projet concret. Il faut tirer des enseignements de ces initiatives (dont certaines sont encore au stade exprimental), adapter et optimiser leurs process et travailler leur multiplication (passer du laboratoire la grande srie), pour pouvoir mailler lensemble du territoire de manire cohrente et complmentaire.
co-construction, coproduits, production et distribution de produits bio, logiciels libres, commerce quitable, tourisme responsable, transports doux, etc. Filires forte valeur ajoute ou forte intensit capitalistique o les entreprises sociales ne sont pas forcment attendues, mais o elles sont prsentes (nouvelles technologies, communication, services aux entreprises) et pourraient se dvelopper bien davantage. Les prils cologiques imposent de revoir en profondeur les process de production industriels ou technologiques et dentreprendre autrement. Filires mergentes sur lesquelles il faut tre proactif et dfricher ds maintenant les marchs de demain (ducation, sant, par exemple).
Construire et mettre en uvre des stratgies sectorielles offensives Lapproche filire est pertinente pour dvelopper lentrepreneuriat social. En effet, les filires dactivit ont des problmatiques, des acteurs, des normes, des rapports de force et des besoins de financement spcifiques qui ncessitent des approches entrepreneuriales diffrencies. Diffrents types de filires sont considrer pour dvelopper les entreprises sociales : Filires historiques de lconomie sociale et solidaire (services la personne, tri et recyclage des dchets), dont certaines sont bouscules par lirruption du secteur marchand but lucratif, par de nouvelles rglementations ou par un dsengagement de lEtat Filires dynamiques lies au dveloppement durable, o les entreprises sociales sont souvent pionnires et progressent : nergies renouvelables,
Professionnaliser, former les entrepreneurs sociaux La formation et la professionnalisation des entrepreneurs sociaux est galement un enjeu important. Il peut tre trait de deux manires complmentaires, travers : Des dmarches autonomes comme lEcole de lentrepreneuriat dconomie sociale (CRES Languedoc-Roussillon), destine former les cadres et dirigeants, actuels ou venir, de lconomie sociale. Des dmarches sinsrant dans lexistant, comme les chaires et formations sur lentrepreneuriat social
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dans les coles de commerce et de gestion et dans les universits de management. Toutes les initiatives de ce type, mme pour des enseignements d ouverture (modules de quelques heures) sont pertinentes, car elles sont aujourdhui encore rares et difficiles faire exister et dvelopper. Leur poursuite et leur amplification implique un lobbying soutenu auprs des chambres de commerce et la mobilisation des entrepreneurs sociaux pour participer aux enseignements (tmoignages, tudes de cas). De manire complmentaire, il importe de favoriser lintgration de modules sur lentrepreneuriat dans les formations
spcialises sur laction sociale (comme les IRTS, Instituts rgionaux du travail social).
Mobiliser davantage et mieux le bnvolat Le bnvolat est un pilier historique des entreprises sociales associatives. Dans une optique de renforcement et de prennisation des modles conomiques, plusieurs axes sont approfondir : Dvelopper le bnvolat decomptences qui permet des actifs de mobiliser leurs comptences professionnelles pour aider une association, souvent
Crer une entreprise sociale ne s'apprend pas et demande des comptences bien particulires. Cest pourquoi Rseau Entreprendre a lanc en 2004 le programme Entreprendre Autrement, avec l'appui de la Caisse des Dpts, de l'Union europenne et du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Emploi ainsi que quelques partenaires privs. Objectif : accompagner les porteurs de projet investis dans le champ du handicap, de l'insertion professionnelle ou de l'environnement la cration ou la reprise d'une entreprise. Des entrepreneurs chevronns bnvoles assurent laccompagnement du projet, avant qu'il ne soit soumis l'apprciation de plusieurs membres de Rseau Entreprendre, runis dans un comit dengagement, qui le valident et lui attribuent un prt d'honneur (entre 15 000 et 50 000 , rembourser dans les cinq ans). Pendant les deux ou trois annes qui suivent, le chef d'entreprise continue daccompagner le crateur, via un rendez-vous mensuel. Un dispositif dont ont bnfici 70 porteurs de projet et qui a permis de gnrer prs de 1 400 emplois. "Nous avons aussi expriment un dispositif pour dupliquer des entreprises sociales. A la demande d'une collectivit, par exemple, nous recherchons un entrepreneur capable de crer une entreprise sociale telle qu'elle existe dj sur un autre territoire", explique Patrick Sapy, responsable du programme Entreprendre autrement. Vingt-deux entreprises d'insertion ont ainsi t dupliques ou sont en cours de duplication. De quoi donner encore plus de poids l'entrepreneuriat social en France, o 5 000 entreprises sociales emploient 70 000 personnes.
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avec une dure limite dans le temps (notion de mission) et lappui financier ou matriel de leur entreprise. Multiplier larrive dadministrateurs venant des milieux conomiques dans les entreprises sociales, la fois pour les soutenir dans leur dveloppement, mais aussi pour les faire mieux connatre et changer les reprsentations. Des exprimentations seraient par exemple monter avec lIFA (Institut franais des administrateurs) ou les fdrations professionnelles. Mobiliser les entrepreneurs sociaux retraits sur des sujets varis : tutorat de jeunes entrepreneurs sociaux, participation des comits de pilotage doutils ou de programmes locaux ou nationaux, participation et animation de Cods locaux, etc.
(notamment la sant, le mdico-social). Les entreprises sociales existantes, souvent associatives, nont que trs rarement encore la taille critique et ne sont gnralement pas armes (professionnalisation, fonds propres) pour faire face cette nouvelle concurrence. Mais il existe aussi des opportunits de croissance par le rachat dentreprises traditionnelles. De nombreuses entreprises industrielles par exemple, sont viables et prennes avec une rentabilit un chiffre. Mais ce niveau ne convient pas aux actionnaires strictement financiers qui exigent des rentabilits deux chiffres, au dtriment de la prennit long terme de lentreprise. Pourquoi les entreprises sociales, avec leur vision de long terme, dancrage territorial, de primaut de lhomme sur le capital, mais aussi dinnovation et de performance conomique, ne pourraient-elles pas constituer une alternative aux fonds financiers ?
Donner aux entreprises sociales les moyens de grandir Pour faire exploser ce plafond de verre bloquant la croissance des entreprises sociales et permettre de crer une nouvelle gnration de gazelles sociales, il faut agir sur plusieurs leviers : Dvelopper la capacit de financement en haut de bilan du secteur, pour faire face la puissance de feu du priv lucratif. Lentrepreneuriat social doit pouvoir se doter dun vritable fonds de capital-dveloppement et doutils financiers ad hoc.
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Mettre sur pied une fonction de banque daffaires de lentrepreneuriat social, capable dappuyer et daccompagner (voire de susciter) des oprations de rapprochement, fusions, acquisitions, croissance dentreprises sociales1, etc. Les comptences mtiers et financires existent mais elles sont disperses au sein de diffrents acteurs. Lenjeu : les coordonner et les mettre en synergie au sein dune nouvelle structure.
Faire sauter les verrous mentaux, briser certains tabous lis lchelle des salaires, la rmunration du capital et des dirigeants, au contrle de lentreprise, la possibilit de plusvalue (par exemple pour lentrepreneur social qui sest engag toute sa vie active pour la mme entreprise). Ces questions sont complexes et mritent un dbat approfondi partir dexpriences concrtes : quels assouplissements, pour attirer du capital, des talents, motiver les meilleurs, tout en
Investir dans les entreprises d'insertion ou adaptes est souvent considr comme un placement risqu. D'o une certaine difficult, pour ces dernires, d'accder des financements leur permettant de se dvelopper. C'est cet enjeu que rpond la Socit dinvestissement France Active (Sifa). "Nous octroyons des prts participatifs qui renforcent les entreprises solidaires, avec pour objectif de crer ou consolider des emplois", explique Jean Michel Lecuyer, directeur gnral de la Sifa. Aprs un dmarrage discret en 1991, la Sifa multiplie aujourd'hui ses investissements dans des structures d'insertion par l'activit conomique. Des apports de 39 000 en moyenne et qui parfois dpassent 1M , l'instar du prt accord aux Ateliers Fouesnantais, en Bretagne. Cette association, qui emploie 80 % de salaris handicaps, installe une nouvelle ligne dans le centre de tri des dchets lectriques et lectroniques quelle gre. En triplant la capacit de traitement des emballages mnagers, elle permettra de traiter 32 500 tonnes de dchets par an et d'amliorer les conditions de travail pour accompagner le vieillissement des personnes handicapes employes. Cot de lopration : 5,1 M, dont 1,5 M prt par Sifa. Pour pouvoir assurer ces apports financiers importants, la Sifa lve rgulirement des fonds auprs de banques et institutions financires (22 %), d'associations (10 %), d'entreprises publiques et prives (2 %) et de mutuelles et groupes de protection sociale (13 %) ; mais c'est l'pargne solidaire qui reste la principale source de capitaux (32 % pour l'pargne salariale solidaire et 21 % pour d'autres produits d'pargne solidaire). Entre septembre 2007 et mai 2008, la Sifa a ainsi lev 9 M et son capital a atteint 46 M. Des fonds qui ont permis le financement de 125 entreprises en 2008, pour un montant total de 5 M environ, favorisant la cration ou la consolidation de 7 028 emplois, dont 3 980 pour des personnes en situation d'exclusion.
1 - Toute dmarche de croissance doit commencer par une rflexion stratgique, axe notamment sur les modalits de dveloppement. Voir ce sujet, par exemple, le guide Changer dchelle. Dupliquer les russites sur de nouveaux territoires : une voie pour dvelopper lentrepreneuriat social, Caisse des Dpts, Avise, Essec (tlchargeable sur www.avise.org).
Oser Maintenant : 100 Entrepreneurs Sociaux Sengagent
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restant fidles la vocation et au projet de lentrepreneuriat social ? Quels mcanismes pour changer dchelle sans changer de valeurs ? Faut-il rflchir un nouveau statut dentreprise but social, faire voluer les existants ou simplement innover dans les pratiques et mthodes de management ?
Mais ces dmarches, complexes, restent encore confines une minorit de spcialistes et dinitis. Il y a besoin de poursuivre les travaux pour aller vers des outils oprationnels et appropriables grande chelle, par lensemble des entrepreneurs sociaux et par leur environnement (pouvoirs publics, milieux conomiques et financiers, socit civile). Des outils qui nont pas vocation la perfection mais lamlioration continue et dans la dure, fonde sur une valuation permanente de laction et la capitalisation des bonnes pratiques.
Passer d'un concept attractif mais flou une ralit opratoire et mesurable
Mesurer limpact social pour renforcer les modles conomiques Dvelopper lentrepreneuriat social implique damliorer et mme systmatiser la mesure de sa performance non conomique (sociale, cologique, citoyenne) et de dvelopper les outils permettant den rendre compte. Cette mesure contribue en effet : Accrotre la visibilit, la lgitimit, lattractivit et la crdibilit des entreprises sociales. Poser les bases dune relation plus saine avec les financements des pouvoirs publics. Faciliter les relations avec les investisseurs privs dimension philanthropique, habitus mesurer leur retour sur investissement (habituellement financier). De nombreuses initiatives ont t menes ces dernires annes pour valuer lutilit sociale des initiatives de lconomie sociale et solidaire, de manire gnrale ou lchelle dun territoire ou dune filire.
Jeter des ponts plutt que construire des murs : pour une dfinition ouverte de lentrepreneuriat social Ne faudrait-il pas dfinir plus prcisment lentrepreneuriat social ? La question, lgitime, est rgulirement pose. Il est vrai que le concept est attractif mais reste flou (peut-tre dailleurs est-il attractif parce que flou). Une dfinition plus fine permettrait en effet de mesurer plus prcisment cette ralit : il reste aujourdhui difficile dvaluer le nombre exact dentreprises sociales, leur poids conomique et social, etc. En Angleterre, les entreprises sociales ont t dfinies par les pouvoirs publics, avec les acteurs, comme tant des entreprises ayant en priorit des buts sociaux et dont les excdents sont principalement rinvestis dans le projet de lentreprise ou dans la local community, plutt que grs en fonction dun besoin de maximisation des profits des actionnaires ou des propritaires.
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Sur la base de cette dfinition, une enqute a valu 55 000 le nombre dentreprises sociales anglaises, 27 milliards de livres (35 milliards deuros) leur chiffre daffaires et 8 milliards de livres (plus de 10 milliards deuros) leur contribution au PIB anglais. De nombreuses autres tudes plus pousses et plus qualitatives ont galement t menes. Quid de la France ? Lentrepreneuriat social renvoie-t-il strictement linitiative prive avec une certaine activit marchande (seuil dfinir) au service de lintrt gnral ? Ou plus largement lensemble des entreprises de lconomie sociale et solidaire ? Un dbat complexe qui mriterait une concertation large et ouverte. Mais outre quil nappartient pas au Cods de trancher ce dbat, il peut tre contreproductif de chercher y rpondre prcisment trop rapidement. Dune part, car lentrepreneuriat social est en France une notion jeune, diverse et dynamique qui a plus besoin despaces que de cloisons. Dautre part, parce que vouloir dfinir absolument et dfinitivement les choses avant dagir, pourrait avoir un travers : exclure, crer des forteresses recroquevilles sur elles-mmes et ne pas agir ! Ainsi, plutt que construire des murs avec les gardiens du dogme, il est prfrable de jeter des ponts avec tous ceux qui se reconnaissent dans cette notion ou sy intressent.
dbat sur le sens de lentrepreneuriat social : Un premier cadrage de la notion dentrepreneuriat social en France avait t effectu travers la Note du Cods n1. Les retours positifs quelle a suscits font penser quelle peut tre une bonne base de travail. Eviter dopposer entreprises finalit sociale et entreprises gouvernance sociale (participative et thique), de confronter solidarits interne et externe lentreprise. Toutes ces entreprises partagent la mme culture socio-conomique, le mme projet de rhumaniser et dmocratiser lconomie : cest le plus important. Plus globalement, il importe de sortir des querelles de chapelles et du nombrilisme pour sinscrire dans une perspective beaucoup plus large, celle des dfis sociaux et cologiques du XXI sicle et du dveloppement durable, avec une dimension internationale (europenne notamment). Promouvoir une vision de lentrepreneuriat social qui nest pas limite aux structures dinsertion par lactivit conomique et aux entreprises adaptes (aux personnes handicapes), mme si ces entreprises reprsentent une part significative des entreprises sociales franaises. Une dynamique de montage dobservatoires des entreprises de lconomie sociale et solidaire est en cours, sur les territoires, anime par les CRESS. Mieux vaut sappuyer sur ces initiatives et tre force de proposition sur le
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thme de lentrepreneuriat social, que recrer des infrastructures statistiques strictement ddies lentrepreneuriat social.
La ncessaire technicit et prcision des dfinitions doit tre pense de manire ne pas nuire la fcondit et la dynamique dun mouvement jeune et foisonnant qui se construit et se transforme dans la rencontre, la connexion, laction.
Comment mesurer l'impact social d'une action ? En valorisant en termes montaires le rapport entre les budgets consacrs laspect social dune action et les apports sociaux qu'elle a gnrs sur le territoire o elle a t mise en place. L'exprience a dj t mene dans plusieurs pays d'Europe, notamment en Ecosse : des consultants se sont attachs mesurer le social return on investment (SROI) du Cadder environmental improvement project, men de fvrier 2006 mars 2007 par l'une des entreprises d'insertion les plus importantes de tout le Royaume-Uni, le Wise Group. Objectif de la dmarche : embaucher des personnes loignes du march de l'emploi pour nettoyer les zones dgrades situes l'arrire des immeubles, amliorer la collecte des dchets, rduire le nombre d'actes de vandalisme et lever des cltures entre les maisons pour protger la vie prive des habitants de ce quartier dfavoris, au nord de Glasgow. A la fin du projet, les consultants ont calcul le SROI de cette action sur trois ans, en identifiant les diffrents secteurs sur lesquels elle avait eu un impact direct : grce l'embauche de personnes loignes du march de l'emploi, moins de prestations ont t verses aux chmeurs ou aux personnes handicapes. Une conomie value 50 169 (59 185 ). Sur ce modle ont galement t pris en compte une multitude de critres mesurables d'un point de vue montaire : augmentation des recettes fiscales du territoire lies aux emplois temporaires ou durables crs et des revenus de ceux qui ont accd l'emploi ; renforcement de l'employabilit de ceux qui ont t embauchs, grce aux nouvelles qualifications qu'ils ont acquises ; augmentation du nombre de candidatures l'embauche envoyes au Wise Groupe ; rduction de consommation de drogues, des recours aux structures de sant mentale par les habitants, des actes de vandalisme et donc des cots de maintenance, etc. Une conomie totale, sur les trois annes suivant le projet, value 1 138 854 1. Or, le surcot li l'aspect social du projet tait de 71 974 /an, soit 201 645 sur trois ans. La "valeur ajoute sociale" (les avantages gnrs moins le "surcot social") tait donc de 937 209 . Restait aux consultants diviser cette "valeur ajoute sociale" par le "cot social" pour obtenir le SROI : 4,65. Un ratio permettant d'affirmer que, pour 1 investit dans le projet, 4,65 ont t "reverss" la socit, au sens large.
1 - Les calculs sont faits partir de la valeur actuelle nette des avantages gnrs sur trois ans, en appliquant chaque anne un taux d'actualisation de 3,5 % (taux retenu par le Trsor Britannique pour ce qui relve de linvestissement social). Les risques de dperdition sont inclus dans les calculs en amont.
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Les territoires et les filires ont besoin dune vritable diversit entrepreneuriale
Les entrepreneurs sociaux sont dabord des entrepreneurs. A ce titre, il est pertinent quils saisissent toutes les opportunits de rencontres avec leurs pairs : Sur les territoires, par exemple lors dvnements du patronat local ou de rseaux de chefs dentreprise comme Entreprendre. Inversement, les chefs dentreprises classiques locales pourraient tre davantage invits aux vnements organiss par les acteurs locaux de lconomie sociale et solidaire (UREI, URScop) en faveur de leurs entreprises adhrentes. A lchelle dune filire, par exemple lors des Salons professionnels (Btimat, SIAL). La diversit est un atout formidable pour le dveloppement des territoires et des filires, aussi bien en termes conomique que social ou cologique. Qui plus est, ces rencontres directes entre pairs partageant un mme projet de
territoire ou de filire sont aussi loccasion de faire tomber les ides reues de part et dautre, et de susciter des projets concrets de collaboration. Il ny a pas de mur de Berlin entre les entrepreneurs sociaux et les entrepreneurs classiques.
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Fonde par de grands acteurs de lconomie sociale, avec le soutien de la Caisse des Dpts, lAvise joue un rle essentiel pour promouvoir lentrepreneuriat social en France, favoriser lmergence de nouveaux entrepreneurs, consolider les initiatives existantes, accompagner la cration et le dveloppement de nouvelles entreprises sociales (entreprises associatives, nouvelles coopratives, etc.), favoriser linnovation sociale. Pour faire connatre aux chefs dentreprise et aux futurs crateurs les ressources et les outils existants pour entreprendre autrement, elle participe depuis plusieurs annes au Salon des Entrepreneurs, afin de dmontrer que les entrepreneurs sociaux ont toute leur place au sein de la communaut des entrepreneurs. De plus en plus d'entrepreneurs potentiels (jeunes diplms, cadres, etc.) s'intressent l'entrepreneuriat social parce qu'ils ont envie d'entreprendre et parce qu'ils veulent donner du sens leur engagement professionnel, explique Christian Valadou, directeur oprationnel de lAvise. Ils ont besoin d'informations, de rencontrer des entrepreneurs sociaux confirms, d'accder aux ressources et aux outils existants en matire d'accompagnement ou de financement, etc. Ce savoir-faire, lAvise le met galement au service des entrepreneurs sociaux en exercice : elle coordonne ainsi les Dispositifs locaux daccompagnement (DLA), financs par lEtat, la Caisse des Dpts et les collectivits locales, qui permettent chaque anne doffrir des milliers de responsables dentreprises sociales et associatives un accompagnement sur mesure pour consolider et dvelopper leurs activits. Elle contribue aussi la naissance et lmergence de nouvelles entreprises sociales en impulsant et accompagnant des actions innovantes, telles les Fabriques initiatives ou les incubateurs dentreprises sociales, dont lobjectif est la cration de nouvelles entreprises sociales. En montrant quentreprendre autrement, cest avant tout entreprendre, lAvise prne un entrepreneuriat social qui soit partie intgrante, moderne et porteuse de sens, dune conomie plurielle, et permet de renforcer la porosit entre deux mondes qui signorent encore trop souvent et sont pourtant complmentaires, conclut Christian Valadou.
Nul doute que le fil rouge de cette communaut dentrepreneurs sociaux serait le faire, plus que le discours, lidologie ou la reprsentation institutionnelle : le concret, la culture du rsultat, le souci de limpact rel, lthique de laction, le dveloppement dactivits, la cration de richesses conomiques et sociales.
Une dmarche intuitu personae, pas institutionnelle Cette communaut dentrepreneurs sociaux, se construira par des adhsionspersonnelles et volontaires plutt quinstitutionnelles et mcaniques. Qui plus est, la participation une telle communaut nest par dfinition pas
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exclusive dautres implications dans les rseaux patronaux ou de lconomie sociale et solidaire. Lconomie sociale et solidaire a tout gagner de la formation et du dveloppement dune communaut active dentrepreneurs sociaux. En sadressant directement aux entreprises elles-mmes, lentrepreneuriat social peut contribuer fluidifier et renforcer les collaborations, alliances et mobilisations collectives des diffrents rseaux de lconomie sociale et solidaire, secteur qui souffre souvent de latomisation de ses acteurs. En invitant le monde associatif approfondir son rapport au marchand et le monde coopratif son rapport lutilit sociale, lentrepreneuriat social joue le rle dun aiguillon, empchant de se complaire dans l'miettement et les batailles idologiques Il peut ainsi aider dpasser des antagonismes souvent striles, pour entrer dans des dmarches partages et offensives de dveloppement.
1) Permettre la rencontre entre entrepreneurs sociaux pour se connatre, dvelopper les cooprations et flux daffaires, mutualiser et rduire les cots, investir de nouveaux marchs, construire des offres communes sur les territoires ou filires, etc. 2) Montrer la ralit des entreprises sociales et de leurs ralisations actuelles ou venir (voil ce quon a fait, voil ce quon veut faire), pour fter ce qui a t fait, le faire connatre au plus grand nombre et donner envie. Montrer le plaisir dentreprendre autrement, cest encore le meilleur moyen de susciter des vocations et des ambitions et dattirer de nouveaux entrepreneurs ayant soif de dfis ! 3) Rflchir et prendre du recul sur son activit, se projeter et anticiper, sinterroger sur le sens du dveloppement durable pour lentrepreneuriat social, se confronter aux dfis sociaux, conomiques et cologiques locaux, nationaux et internationaux ; inviter et dialoguer avec les pouvoirs publics, milieux conomiques et socit civile ; travailler sur les moyens de dvelopper et prenniser la dynamique de lentrepreneuriat social (via des clubs locaux dentrepreneurs sociaux, par exemple). La mise en place dun site-web portail (dclinable sur les territoires) pour les entrepreneurs sociaux, afin de prolonger et damplifier sur Internet ce qui est fait sur le terrain. De tels sites cibleraient les candidats la cration dentreprises intresss par entreprendre autrement, les porteurs de projets dentreprises sociales comme les entrepreneurs sociaux dj existants.
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Ils auraient vocation faire dcouvrir lentrepreneuriat social, donner voir des exemples concrets, aider crer de nouvelles entreprises sociales et dvelopper celles dj existantes, informer sur lactualit, permettre lchange et le partage dinformations entre entrepreneurs sociaux.
De premires initiatives rgionales ont t lances (par exemple, le Guide web de lentrepreneur social en Nord-Pas-de-Calais) et sont multiplier. Un site vocation nationale est en prparation et verra le jour lautomne 2009.
8 700 entreprises voluent dans le secteur de lconomie sociale en Languedoc-Roussillon. Une difficult sest rvle cependant : elles ne se connaissent pas assez entre elles. Comment les faire se rencontrer ? La Chambre rgionale de lconomie sociale du Languedoc-Roussillon (CresLR) a choisi dinnover et a appel coopratives, mutuelles et associations se runir pour "Coventis, la convention des entreprises de lconomie sociale". Cette rencontre daffaires affiche un credo militant : "Lconomie sociale sera dautant plus forte que nous multiplierons les connexions entre les entreprises qui la composent". Un message qui semble dj tre pass : au lieu des 40 exposants prvus, ils taient 150 au rendez-vous du Palais des Congrs de Montpellier, les 8 et 9 dcembre 2008 ! "Si vous vous inscrivez dans lconomie sociale, cest parce que vous avez une conscience thique forte, explique Nathalie Laget de la CresLR. Pourquoi alors ne pas travailler avec des partenaires, clients et fournisseurs qui partagent votre engagement ?". Place donc aux rencontres et aux changes commerciaux, limage du speed-dating qui, tout au long de la journe du 9 dcembre, a permis aux participants de faire connatre leurs produits, prestations et actions. Mais Coventis, finance 60 % par le Conseil rgional, se veut aussi ouverte sur lextrieur : elle a accueilli gratuitement 1 500 participants venant du monde de lentreprise et de la socit civile. De quoi susciter, peut-tre, quelques vocations parmi les visiteurs et largir la communaut des entrepreneurs de lconomie sociale.
Europe. Dune intensit variable et de natures diffrentes, elles partagent nanmoins certains traits : cration de nouveaux statuts, mobilisation des pouvoirs publics, apparition de nouveaux dispositifs et acteurs, dveloppement de secteurs et filires dynamiques, intrt pour le sujet du systme ducatif, des mdias et dinstitutions internationales comme lOCDE.
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Le monde associatif a davantage besoin de professionnalisme ; le secteur entrepreneurial ne prend pas assez en compte la notion d'impact social d'une activit. Jeter des ponts entre ces deux univers, c'est le pari de l'organisation internationale Ashoka, cre en 1980 par Bill Drayton. Convaincu qu"il ny a rien de plus puissant au monde quune ide nouvelle dans les mains dun vritable entrepreneur", il a invent le terme d'entrepreneur social" et lanc cette structure pionnire de "capital-risque philanthropique" pour aider les entrepreneurs sociaux particulirement innovants dvelopper une approche entrepreneuriale de leur projet. Vingt ans plus tard, Ashoka slectionne chaque anne plusieurs centaines de porteurs de projet aux quatre coins de la plante et, outre un apport financier sur trois ans, les accompagne vie dans la structuration et le dveloppement de leur activit. L'occasion, pour les laurats, de rejoindre le rseau de tous les fellows du globe et de ctoyer les entrepreneurs issus du monde des affaires qui financent Ashoka (Ashoka support network). Grce cette communaut, l'organisation internationale facilite les collaborations entre tous ceux qu'elle accompagne, de faon ce qu'ils apprennent les uns des autres et puissent dvelopper leur projet avec toujours plus defficacit. "Ce qu'il faut, c'est inventer des modles conomiques prennes [] et crer de nouvelles formes d'entreprises vocation sociale, hybridant association et entreprise classique", partage Arnaud Mourot, Directeur gnral d'Ashoka France. Depuis 1981, l'organisation internationale a accompagn plus de 2 000 hommes et femmes, dans prs de 70 pays. Toutes les initiatives visant construire une communaut franaise dentrepreneurs sociaux doivent ainsi souvrir aux entrepreneurs sociaux dautres pays, leurs ralits et expriences. Une communaut europenne et mondiale dentrepreneurs sociaux merge progressivement. Un premier Social Enterprise World Forum a eu lieu dimbourg (Ecosse) en septembre 2008, tandis que dans le mme temps des rseaux internationaux dentrepreneurs sociaux comme Ashoka contribuent galement nourrir une dynamique dchanges et de dveloppement.
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PREMIERS
ENTREPRENEURS SOCIAUX ENGAGS
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Graud ACQUIER (ITER) Jos ALCORTA (Rescoll) Frdric BAILLY (La Compagnie du Commerce Equitable) Batrice BARRAS (Ardelaine) Mathieu BARROIS (OKHRA) Herv BAULME (Ecod'air) Kamel BENBOUGUERRA (SCOP MJN) Lucille BERNADAC (Papili) Laurent BOLON (Respec'table) Patrick BUSQUET (Reporters d'Espoirs) Sandra CARLIER (MJN domicile) Arnaud CASTAGNDE (Acta Vista) Jean-Pierre CAUME (Revi+)
Eric CHATRY (Reconnect) Rachid CHERFAOUI (MES du Bray) Claude CHEVASSU (SCIC Calao Productions) Pierre CHOUX (Groupe Ides) Jean-Pierre CLAIR (AIL 46) Carmen COLLE (World Tricot) Jean-Franois CONNAN (Extra Muros) Olivier DAMEZ (Union des peintres) Marie-Jose DAUBIGEON (SCOP Coop Alpha) Christian DE BOISREDON (Yunus Movie Project) Emmanuel DE LA VILLE (Ethifinance) Caroline DE RANCOURT (NTA) Bernard DEVERT (Habitat et Humanisme) Rgis DUBOIS (Un temps chez vous)
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Andr DUPON (Vitamine T) Olivier FLECKINGER (aiderdonner) Yann FRADIN (Espace) Michel FRMONT (Les 7 vents du Cotentin) Anne GALLOIS-PUJOS (Initiatives pour une conomie solidaire) Yves GARDET (L'Assiette sans frontires) Philippe GARZARO (Serviplus) Cyril GAYSSOT (FMS) Adrien GEORGE (Negocio) David GIFFARD (Alterna Dveloppement) Xavier GILLIG (Domicoop) Franois GOUDENOVE (Websourd) Pierre-Emmanuel GRANGE (Microdon) Pierre GROSSET (Juratri) Nicolas GUENRO (Auto Partage) Sad HAMMOUCHE (Mozaik RH) Antoine HORELLOU (La Vote nubienne) Jean-Michel JOYEUX (Groupe Etape) Emmanuel KASPERSKI (Replic) Belkacem KHEDER (Le Relais) Herv KNECHT (Flandres Ateliers) Claire LAGET (Ecole de l'entrepreneuriat en Economie Sociale) Laurent LAK (La Varappe) Franoise LEBOEUF (La Feuille d'Erable) Edwige LEPELLETIER (Champ des Cimes) Thierry LEQUES (Claires & mer) Benjamin LEROY (Eco-Sapiens) Rachel LIU (Ido)
Chantal MAINGUEN (Mom'artre) Jean MATA (Les Nouveaux Robinson) Nicolas MESSIO (Alter Mundi) Louis MONTAGNE (Bearstech) Olivier MUGLER (Biocoop) Bertrand MUNICH (IDEMU) Laurent NOUAILLAT (Sistra 86) Dominique OLIVIER (Sicaseli) Eric PARENT (ClimatMundi) Vincent PARET (OASIS) Atanase PRIFAN (Immeubles en fte) Jean-Guy PRILLAT (Micronov) Fabrice PONCET (La Fabrique) Mathieu POUPON (Green Buro) Martine POURRADIER (Sibils Interpretation SCOP) Laurent PRIEUR (Elan Crateur) Gerard QUITTARD (Ecole de l'entrepreneuriat en Economie Sociale) Jean-Louis RIBES (Distribution Services Industriels) Jean-Michel RICARD (Siel Bleu) Jrme SCHATZMAN (Fair Planet) Frdric SEGUIN (Envie 2E Aquitaine) Denis STOKKINK (Think tank "Pour la Solidarit") Nolle TATICH (Atla) Jean-Luc TISSIER (Fdration Envie) Marie TRELLU-KANE (Unis-Cit) Oumie YANSANE (Bbs en vadrouille)
Pour retrouver la liste des entrepreneurs sociaux engags et les rejoindre : www.avise.org/100entrepreneurssociaux
Directeur de publication : Patrick Gze - Rdaction et coordination : Tarik Ghezali, Matthieu Grosset. Maquette et conception graphique : Groupe Baton Rouge / Polyprint Avec la contribution de Reporters despoirs. L'agence d'informations Reporters d'Espoirs (www.reportersdespoirs.org) dveloppe et diffuse l'information porteuse de "solutions". Elle valorise auprs des mdias, des entreprises, des collectivits et de tous les acteurs de la socit, les initiatives utiles et durables dans de nombreux secteurs : conomie, finance, social, environnement Avise 2009 tous droits rservs - Avise - 167 rue du Chevaleret - 75013 Paris Edition dlgue Baton Rouge / Polyprint dition - 20/22 rue Labrouste - 75015 Paris, N dditeur 006/2006 ISBN : 2-908334-40-2, dpt lgal janvier 2009. Impression sur papier recycl Cyclus par limprimerie Comelli - Avenue des Deux Lacs - Z.A. Courtabuf 7 - 91140 Villejust
A VOUS DE JOUER !
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Les travaux et productions du Cods sont soutenus par la Fondation Crdit Coopratif et par le Fonds Social Europen. LAvise assure son animation, son outillage et sa valorisation. Plus dinfos sur www.avise.org/codes