Insertion Jeunes
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Insertion Jeunes
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Article rdig par Sandra Barlet (Gret), Andr Gauron
(consultant) et Annick Huyghe Mauro (consultante).
1. Sminaire Insertion et emploi des jeunes en Afrique subsaharienne , MAE/AFD/Gret, dcembre 2012. Voir les actes de
ces rencontres.
2. Facilit dinnovation sectorielle des organisations non gou-
CADRAGE DE LARTICLE
Larticle prcdent5 a prsent un cadrage de la notion dinsertion et la faon dont la problmatique
se pose en Afrique subsaharienne. Ce second article apporte des lments danalyse sur laction
des pouvoirs publics et des organisations de la socit civile (OSC) en Afrique subsaharienne, et sur
lapport que ces dernires peuvent avoir dans le
dveloppement de laction publique. Il cherche
comprendre quelles sont les relations existantes et
souhaitables entre les dispositifs mis en place par
des OSC et les rexions ou actions publiques en
matire dappui linsertion. De ce fait, larticle ne
traite pas des actions conduites par des structures
port laction publique et par rapport une organisation de solidarit qui elle-mme naura pas les
mmes postures selon son champ dintervention
(locale, internationale, thmatique). Cet article na
pas la nesse danalyse qui pourtant serait ncessaire pour rendre plus prcises et oprationnelles
les recommandations faites, qui restent trs larges.
Il tente toutefois lorsque possible de prciser quels
types dOSC sont plus particulirement concernes
lorsquil prsente leurs actions.
des interventions
La typologie prsente en dcembre 2012 loccasion du sminaire MAE/AFD/Gret sur le thme
Emploi et insertion des jeunes en Afrique subsaharienne sintresse aux initiatives dappui
linsertion qui ont en commun daccompagner les
parcours dinsertion des jeunes. En eet, linsertion
est dabord un parcours, jalonn dobstacles et dopportunits et qui prend du temps.
Dans un contexte de pnurie demplois et de fortes
ingalits, sinsrer exige une dmarche volontaire
et active pour valoriser ses capacits et faire face
aux dicults. Il existe par ailleurs une multiplicit
de parcours : il nexiste pas de trajectoire unique et
linaire vers lemploi. Face la multiplicit et la diversit des barrires lemploi, aucun appui apport de faon isole ne saura rpondre ecacement
aux besoins : cest la conjugaison de la diversit et
de la complmentarit des appuis qui est la plus
performante.
Les premiers sont centrs sur les dicults des individus, les seconds vont galement chercher agir
sur les obstacles au dveloppement dactivits de
leur environnement. Dans les deux cas, ces appuis
convergent vers limportance de laccompagnement
des jeunes, la diversit des ressources mobiliser et
la relation de proximit.
Plus les dispositifs sont focaliss sur un objectif
demploi atteindre, plus ils proposent des appuis
spcialiss et conditionns un public prcis, dtermin selon des critres de prol et de motivation. Inversement, moins le dispositif est focalis
sur lemploi, plus il est ouvert, gnraliste et ore
la possibilit daccompagner lindividu dans une
pluralit ditinraires dinsertion. Il peut toucher des
publics quantitativement importants et est adapt
la prise en compte des situations des jeunes les
plus loigns de lemploi ou particulirement vulnrables socialement. Centrs sur les nuds dorientation, il ore peu dappuis spcialiss pour laccs
lemploi.
Proposition de typologie
Rares sont les dispositifs qui envisagent simultanment daccompagner un jeune dans toutes les tapes
dorientation, de faisabilit et de mise en uvre de
son projet demploi. Si tous les dispositifs visent
terme laccs lemploi, leurs dirences de stratgie
les positionnent diremment dans leur environnement conomique.
Les expriences identies sont plus ou moins ancres dans les ralits et dans les potentialits de
dveloppement conomique.
.../...
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La typologie propose lissue de ce sminaire est
dtaille dans le tableau de la page suivante.
Articuler accs
lemploi et stratgie
de dveloppement
APPROCHE MICRO
APPROCHE MICRO ET
VENTUELLEMENT MSO
APPROCHE MSO-MICRO
Stratgie
Paramtres
Finalit
Dvelopper
l employabilit *
des jeunes.
Ex. outils entrepreneuriat BIT
Public cible
Intrts et limites
quit et diversit.
Quantitatif immdiat mais
impact emploi durable
limit.
quit et
diversit.
Impact emploi si
environnement
favorable.
Enjeux
Adaptation et intgration
de ces botes outils
aux autres approches.
Complmentarits
Connaissance
des parcours,
orientation et
prparation
ditinraires
cibls : + quit.
Slectif.
Impact emploi si
environnement
favorable.
Prospective et dveloppement
conomique : + opportunits.
Connaissances et interventions
sur lenvironnement des
parcours.
*Au sens de lacquisition des capitaux sociaux, relationnels, techniques et financiers adapte la finalit demploi vise.
met de crer un fonds euro-africain dinvestissement en faveur de la jeunesse ne sera pas suivie
deet. Par ailleurs, le sommet nannonce aucune
piste nouvelle et se contente de rarmer le rle
primordial de lducation et de la formation professionnelle pour accder lemploi, y compris dans
les zones rurales .
Domin par les questions de scurit et de migrations, ce sommet a toutefois permis de faire merger
la ncessit la fois dune action publique forte et
structure autour de lobjectif daccs lemploi
et dune mobilisation de la jeunesse elle-mme
travers lappui au dveloppement de ses organisations. Il marque aussi un double dplacement de
la cible, des jeunes dshrits (jeunes des rues ou
handicaps pris en charge traditionnellement par
les congrgations religieuses et les organisations
caritatives) vers les jeunes dscolariss et les diplms chmeurs et de groupes eectif faible vers
un enjeu de masse.
construira au fur et mesure et qui ncessite de mobiliser des ressources diverses (en termes nanciers,
dacteurs, de comptences, etc.).
Ce rapprochement entre ore et demande de travail peut aussi utiliser les outils modernes des TIC
comme dans le cas du programme Pejedec mis en
place en Cte dIvoire par la Banque mondiale n
2011 destin orir des jeunes une premire exprience professionnelle.
Le Pejedec
Programme emploi des jeunes et dveloppement
des comptences en Cte divoire
Le projet Pejedec (qui couvre la priode dcembre 2011juin 2015) propose dorir des jeunes lopportunit dune
formation ou dune premire exprience (type emploi
jeunes) partir dune inscription en ligne. Laccs lemploi
repose sur le partenariat institu avec les entreprises qui
participent au projet et qui doivent sengager embaucher
les trois quarts des jeunes pris en stage. Pour les jeunes mis
en formation, le programme ore une aide lauto-emploi.
La contrainte (volontaire) impose aux entreprises remplace
ici laccompagnement.
Avec un objectif de 30 000 jeunes de 18 30 ans pour un
budget prvu de 50 M$ (42 M), linsertion dun jeune dans
lun des dispositifs prvus dans le projet de la Banque mondiale reviendrait en moyenne 1 700 $ (1 400 ) par jeune.
Ces programmes sapparentent la notion dinsertion par lconomique en mobilisant des activits
qui orent la possibilit dune formation par le travail. Les chantiers cole, frquents dans le secteur
8. Source : site internet de lOIT.
Malgr ces conditions trs favorables la russite de la formation (on ne compte que 3 non diplms), sur 41 diplms
en 2010, 2011 et 2012, seulement 13 taient en emploi n
2012 et 7 en stage post-formation dans leur qualication,
soit un sur deux environ. Ce rsultat souligne la dicult du
passage de la formation lemploi pour un jeune diplm
mme sur des crneaux dits porteurs. Le fait que les besoins
en emploi aient t dnis partir des observations du SPE
et non avec les entreprises lexpliquent sans doute en partie. De plus, lembauche dun jeune, mme avec une bonne
formation professionnelle, nest pas forcment la priorit de
lentreprise. Lexprience professionnelle compte souvent
autant que la formation. Pour surmonter cet obstacle, il faut
connatre la politique de gestion des ressources humaines
des entreprises et construire avec elles des parcours dinsertion des jeunes aussi en amont que possible des formations. Les jeunes qui ont eu un accs un emploi dans leur
qualication lont trouv dans une entreprise qui avait un
accord avec les centres de formation pour les stages ou dans
celles ayant des besoins en main-duvre trs importants,
comme les entreprises minires.
La cration dactivits
et lauto-emploi
Dans des pays o la voie salariale est troite, la cration dactivit en auto-emploi apparat comme une
solution alternative. Lappui cette cration prend des
formes diverses, allant du kit dinstallation de jeunes
comme artisans lissue de leur apprentissage lachat
de matriels qui accompagne un projet de cration
dactivit gnratrice de revenus ou dentreprise.
Ces actions sappuient en gnral sur des outils gnriques, comme ceux mis au point par le BIT et diuss
auprs de tous les acteurs publics et des ONG, destins aider les candidats la cration dentreprise
(Germe, TRI, CREE). dits sous formes de livrets, ces
prt pour le renforcement des capacits des commerants-dtaillants (PRECACD) avec lappui de la Coopration belge ;
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publique : laccompagnement
Les limites rencontres par les direntes actions
publiques ont impos laccompagnement comme
une dimension ncessaire toute politique dinsertion. Au niveau de laction publique, deux types daction peuvent tre identis : laccompagnement la
cration dentreprise depuis la formation la gestion
et llaboration des plans daaires jusquau nancement et au suivi des premires annes dactivit ;
les services locaux dinformation-orientation-conseil
avec ventuellement la cration et la gestion de passerelles vers lemploi. Dans le premier cas, le public
vis est celui de jeunes qui ont dj un pr-projet
ou qui sont motivs par la cration dentreprise ;
dans le second, le public est au contraire plus large
et vise aussi bien des candidats la cration dentreprise individuelle ou collective que des jeunes qui
cherchent plutt un emploi salari.
Accompagner le prt la cration
dentreprise
Le Mali est sans doute le pays o les gouvernements
ont le plus explor les diverses modalits de cette
aide : dirents programmes ont tour tour expriment une gestion directe du prt par les agences
publiques ou par un oprateur avec ou non un adossement un fonds de garantie.
Les valuations de ces dirents dispositifs se rsument ainsi : dans le cas des prts de lANPE et de
lAPEJ, labsence de suivi a conduit les candidats a
considr que le prt tait en fait une subvention de
ltat et le trs faible taux de remboursement qui en
a rsult a condamn le dispositif ; en revanche, la
mise en place dun fonds de garantie et dun suivi
des bnciaires de prts a, dans le cas du PRECACD
9. Competency-based Economies through Formation of
Enterprise .
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et lorientation des jeunes vers des structures dinsertion. Les passerelles dinsertion sont des dispositifs
dinsertion dans des emplois temporaires qui assurent
une formation par lactivit (chantiers dinsertion et
rgie territoriale, activit-formation en entreprises).
La passerelle fournit une premire exprience, mais
elle nore pas un emploi dnitif. Cet emploi peut
tre soit un emploi salari dans lentreprise daccueil
soit la cration dune entreprise par les bnciaires
des passerelles titre individuel ou, le plus souvent,
titre collectif (sous une forme cooprative).
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de publics vulnrables
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Les OSC notamment les organisations de solidarit portent souvent une attention particulire aux
personnes dfavorises, dans une logique de lutte
contre la pauvret et les ingalits et dquit daccs.
Qualier autrement
En matire de qualication, les champs daction des
OSC et des institutions publiques sont assez similaires. Mais les faons de procder et les modles
recherchs dirent. Lenjeu est que les pouvoirs
publics soient en mesure de tirer parti des innovations pdagogiques, sociales, organisationnelles des
initiatives mises en place par les OSC.
Dvelopper des formations porteuses
dopportunits conomiques
Dassez nombreuses OSC crent ou renforcent des
centres ou des lires de formation an que la formation soit plus en ouverture sur et en lien avec son
milieu conomique et rponde mieux aux besoins
en qualications. Les projections de prennisation
des structures varient.
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Lexprience de Swisscontact
au Bnin
Laction de Swisscontact au Bnin (nancement Fisong formation-insertion /AFD), vient en appui linsertion des
jeunes en n de formation par alternance (menant au Certicat de qualication professionnelle/CQP). Cet appui prend
plusieurs formes : conception et conduite de formations complmentaires sur le plan technique dans cinq mtiers, dans
des domaines non abords lors de la formation ; formations
relatives la gestion dune entreprise artisanale ; accompagnement pour certains la dnition dun plan daaires et
lobtention de microcrdit pour faciliter linstallation du jeune.
Pour sa mise en uvre, le projet sest appuy sur les acteurs
locaux existants*, mobilisant notamment les collectifs des
artisans pour eectuer le suivi et la sensibilisation des jeunes.
* Les parties prenantes aussi bien du secteur public que du
secteur priv, utiles et ncessaires au projet, ont t associes
et intgres dans le comit de pilotage et/ou dans les comits de suivi : artisans, institutions de microfinance, mairies,
Confdration nationale des artisans du Bnin, Union des
Chambres interdpartementales des mtiers, ministre en
charge de la Formation professionnelle, de la Reconversion
et de lInsertion des jeunes, ministre en charge de lArtisanat.
Linitiative du groupement
professionnel Goticom
Madagascar
Six moyennes ou grandes entreprises du secteur des TIC,
membres du Groupement des oprateurs en technologie
de linformation et de la communication (Goticom) et ayant
des besoins similaires en recrutement, ont investi dans la
formation et ont ainsi permis de relancer le DESS de lcole
Polytechnique qui avait priclit. En retour, ces entreprises
peuvent embaucher les jeunes diplms. Les nancements
provenaient en 2009 des colages (10%), de la contribution
dun programme extrieur (Programme intgr de croissance PIC multi-bailleurs) sur la communication (10%),
de la contribution des entreprises (40%) et de la mise
disposition de professeurs de luniversit publique (40%).
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Tt ou tard, la grande majorit de la population active des pays dASS est confronte la problmatique
de la cration dune activit (cration dentreprise /
installation en auto-emploi). Il est ainsi fondamental
que la formation professionnelle (que ce soit en rsidentiel en centre ou en apprentissage en entreprise)
intgre dune part une connaissance de lentreprise
10. Voir les tudes AFD sur la formation professionnelle en secteur informel ralises dans huit pays par Richard Walther et
al. en 2006.
et un minimum de matrise de lenvironnement conomique local (quels mtiers existent et sont porteurs, quelles sont leurs ralits dexercice, etc.) ; et
dautre part la transmission de comptences de base
pour crer une activit (laboration dun projet, dun
plan daaires, gestion simplie, etc.). Direntes
OSC travaillent en concertation avec les entreprises
sur ces sujets. Les organisations professionnelles ont
notamment un rle jouer en la matire.
Certaines actions ou certains parcours de formation
qui visent plus particulirement la cration dactivit
restent largement proposs par des acteurs privs.
Ainsi, le centre Songha au Bnin ou la formationaccompagnement-cration propos par Essor au
Mozambique dans le cadre du dispositif UPA proposent des formations/accompagnements vers la
cration dactivit.
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de rponses adaptes et durables aux problmatiques que rencontrent les jeunes, les entreprises,
les populations et les territoires. Les OSC compltent
utilement les actions des tats et des collectivits
dans la mesure o elles sont en mesure de prendre
en charge la gestion oprationnelle dinterventions
demandant une certaine souplesse et une proximit
avec les populations et les acteurs locaux.
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Ainsi, en matire demploi, dirents acteurs (entreprises, jeunes et leurs familles, structures de formation
notamment) sont souvent peu entendus, au premier
rang desquels les reprsentants des entreprises, urbaines et rurales, notamment les plus petites.
et appui au dveloppement
conomique
Lappui linsertion, comme prsent dans la typologie rsume, repose essentiellement sur deux types
de stratgies :
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Professionnaliser les
comptences locales
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3. Professionnaliser les comptences en appui aux parcours dinsertion ; professionnaliser les reprsentations
des entreprises et des jeunes an quils puissent jouer
un rle dans les dispositifs.
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