Lachenmann
Lachenmann
Lachenmann
ATELIERS
CONTEMPORAINS
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HELMUT LACHENMANN
CONFRENCES-ATELIERS
LIEN ENTRE THORIE ET PRATIQUE MUSICALE
PROGRAMME
LUNDI 01 FVRIER 2016
10:00 - 13:00 Rptition partielle bois, cuivres
14:30 - 17:30 Rptition partielle piano, harpe, guitare
et percussion
18:30 - 20:30 Analyse des Bagatelles op.9 de Anton Webern
avec un quatuor de LHEMU par
Helmut Lachenmann, avec exemples
musicaux.
DITORIAL 4
LACHENMANN OU LA MUSIQUE 6
COMME UNE EXPRIENCE EXISTENTIELLE
HISTOIRE 6
TOURNANT 8
CONSTRUIRE UN INSTRUMENT 12
CRITIQUE DE L'APPARENCE 14
LA PETITE FILLE 16
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE 18
DITORIAL
William Blank
5
HELMUT LACHENMANN
HISTOIRE
N le 27 novembre 1935 Stuttgart dans une famille de huit
enfants dont le pre tait pasteur, Helmut Lachenmann est trs
tt attir par la musique; il suit dans sa ville natale des cours
de piano (avec Jrgen Uhde) et de thorie, puis entre 1955
et 1958, de composition avec un professeur qui met l'accent
sur la matrise du contrepoint: Johann Nepomuk David. Ainsi
acquiert-il des bases solides qui lui assurent la matrise de son
mtier, aussi bien comme pianiste que comme compositeur.
Ds ses premires uvres, toutefois, il dveloppe un rapport
critique la tradition, privilgiant une approche analytique
1
Helmut Lachenmann, Musik als existentielle Erfahrung, d. J. Husler,
Wiesbaden, Breitkopf & Hrtel, 2004. La traduction franaise d'un choix
de ses crits se trouve aux ditions Contrechamps (voir note 2).
de celle-ci, comme c'est le cas dans ses Fnf Variationen
ber ein Thema von Franz Schubert, une uvre compose
en 1956. Sa participation aux cours de Darmstadt un an plus
tard va toutefois prcipiter son dveloppement, lui rvlant
des possibilits nouvelles. Frapp par la musique de Nono
et touch par sa personnalit, il dcide de le suivre et de
travailler avec lui Venise. Nono est alors l'une des figures
majeures du mouvement sriel de l'aprs-guerre, et son Canto
sospeso, crit partir de lettres ultimes de condamns mort,
a reu l'anne prcdente un accueil triomphal. Sa musique se
nourrit d'un esprit de rsistance et de lutte contre l'oppression,
elle se veut tmoignage, la radicalit d'une criture sans
concession reposant sur un engagement la fois politique et
thique (Nono est membre du Parti Communiste Italien depuis
1952; il y jouera un rle important). En se rappelant ces annes
de formation auprs du compositeur italien, Lachenmann dira
plus tard que travailler avec lui signifiait un questionnement
de soi et la conqute de nouveaux repres dans un air plus
pur2 . Car au contact de cet homme inquiet, gnreux, exalt,
conflictuel, et engag dans toutes les luttes de son poque, on
se savait expos une fois pour toutes et pour le restant de sa vie
une dstabilisation intrieure constante, comme lui-mme
en fit l'objet jusqu'au dernier instant, et cela impliquait d'tre
prt s'exposer toute sa vie, conformment ce modle, aux
conflits et aux crises extrieures et intrieures3.
2
Helmut Lachenmann, Touch par Nono (1991), dans crits et
entretiens, Genve, Contrechamps, 2009, p. 178.
3
Ibid, p. 179.
7
La prise de position de Nono entrine l'clatement du groupe
de Darmstadt, au sein duquel les personnalits se sont
affirmes et empruntent dsormais des chemins divergents; il
dveloppera lui-mme ses recherches dans les studios lectro-
acoustiques, travaillant avec un petit groupe de musiciens
acquis sa cause, et donnera ses uvres une dimension
politique de plus en plus directe, au point que les ditions
Schott refuseront de publier ses uvres partir de 1965.
TOURNANT
Au mme moment, une tendance nouvelle se fait jour.
Renonant la combinatoire srielle, des compositeurs
d'horizons diffrents dcident de travailler directement sur
la matire sonore, privilgiant le timbre et la dynamique au
dtriment des hauteurs et des dures, dont les contours se
dissolvent l'intrieur de textures mouvantes et colores
ou de clusters puissamment expressifs. Apparitions (1959)
et Atmosphres (1961) de Ligeti, Quatre pices sur une seule
note de Scelsi (1959), Thrne aux victimes d'Hiroshima (1961)
de Penderecki signalent un tournant. Lachenmann se montre
toutefois mfiant vis--vis de ce qu'il peroit comme une
rgression de la pense menant une simplification du
matriau et un hdonisme sonore qui contrastent avec la
complexit et l'austrit des pices srielles. Il cherche
dpasser la fausse alternative qu'impose le mouvement de
balancier de l'histoire. Travaillant sur la rduction pour piano
de l'action scnique Intolleranza 1960 de Nono, il peroit
combien cette musique se rattache au grand ton expressif de
la tradition, l'lan pathtique, lyrique, dramatique et charg
d'affects hrit de Monteverdi, Beethoven et Schoenberg4,
que Nono maintient seul l'intrieur de sa gnration. Il
mesure aussi ce qui distingue ce lyrisme li un maniement
structuraliste du son des miroitements colors propres
aux musiques de timbre et de textures, ou aux formes
conventionnelles d'expressivit qui sont progressivement
revendiques par une nouvelle gnration, et qui dboucheront
en Allemagne sur un mouvement noromantique renouant avec
un matriau et une phrasologie issus de la musique tonale.
4
Ibid, p. 180-181.
L'exprience des cours de musique nouvelle suivis Cologne,
durant lesquels Lachenmann travaille tout particulirement
avec le percussionniste Christoph Caskel, va le conduire
explorer plus profondment le son, suivant l'injonction de
Stockhausen selon laquelle il faut non pas composer avec
les sons, mais composer le son (chez lui, il s'agissait
d'unifier les diffrents aspects de la composition, depuis le
son comme phnomne physique jusqu' la forme globale).
Significativement, Lachenmann se concentre ce moment-
l sur les instruments de percussion, qui offrent un ventail
trs large de sonorits avec ou sans hauteurs dtermines.
Il compose Introversion I et II (1963-1964), puis Intrieur I
(1965-1966). travers ces uvres, il parvient dpasser
les conceptions abstraites que la musique srielle posait a
priori, au profit d'une production sonore concrte lie aux
timbres et aux modes de jeu, ainsi qu' l'action physique des
musiciens. C'est partir de cette exprience que Lachenmann
va trouver sa voie. Il tente de rsoudre l'quation d'une musique
structure de part en part une musique organique et
d'une expressivit qui chapperait aux modles du pass.
Le lyrisme sriel hrit de Nono, dtach de ses rfrents
externes, est li aux diffrentes qualits des sons, leur
impact et leur dploiement, aux conditions mmes de
leur production et de leur mergence. Les sons deviennent
les signes d'une nergie, et non la reprsentation d'une
psychologie. Lachenmann renonce aux formes d'imitation
comme aux continuits homognes, privilgiant des sonorits
fortement caractrises, travers lesquelles l'auditeur est
amen ressentir intensment le phnomne pour lui-mme
tout en rflchissant sa singularit. Le son ne s'inscrit plus
l'intrieur d'un flux rhtorique allant de soi. S'il forme des
lignes et non des phrases au sens conventionnel , ce sont
des lignes brises, chaque son ayant son propre timbre, sa
propre dynamique, et une dure spcifique (la mlodie, que
Boulez traitait d'anecdote, et l'harmonie sont repenses).
9
hritent du lyrisme nonien et de sa manire de traiter le texte,
dans temA, les sons et les situations expressives, archtypales,
sont prsents dans une forme plus analytique, avec une
certaine distanciation.
SON ET GESTE
Dans les deux cas, le compositeur dtache la structure
musicale et sa construction temporelle du modle qu'offre
le langage verbal. Dans un essai crit en 1966, peu avant les
uvres que nous avons voques, Lachenmann cherche
construire une typologie des sons permettant de transformer
l'vnement sonore en fait structurel. Son texte commence par
cette phrase significative: L'mancipation du son, reprsent
acoustiquement et qui avait traditionnellement une fonction
plutt subordonne en musique, constitue l'un des acquis
essentiels de l'volution de la musique de notre sicle.
Mais aussitt, il met en garde contre les malentendus
produits par une telle libration, et propose de ramener
cette diversit apparemment infinie de l'exprience sonore
empirique quelques types de sonorits fondamentaux5.
Ce qui va diffrencier la musique de Lachenmann des
tendances propres aux musiques de timbre et de texture,
c'est ce souci de formalisation, cette volont de retrouver,
avec un matriau fortement largi, des fonctions musicales
adquates. Lachenmann veut arracher le timbre sa dimension
hdoniste, pittoresque, dcorative ou magique. Cette exigence
de rigueur conduit une radicalisation et un renversement
des critres d'coute. Le son n'apparat plus comme un
produit fini mais comme un processus faisant apparatre
l'nergie qui le constitue, le geste qui le manifeste : le son
comme information sur ses conditions de naissance, crira
Lachenmann dans l'un de ses textes6.
5
Typologie sonore de la musique contemporain, dans crits et
entretiens, op. cit., p. 37.
6
D'o O Vers o?, Ibid., p. 26.
et qui contient sa propre gnalogie, l'effort du musicien pour
le produire. Le son n'est plus une entit immatrielle, mais un
corps vibrant dans lequel celui du musicien est impliqu. Cette
dimension physique, qui signale une volont d'expressivit
qui ne reposerait plus sur une esthtique de l'imitatio,
touche directement l'auditeur, sans passer par les formes de
reprsentation habituelles.
7
Martin Kaltenecker, Avec Helmut Lachenmann, Paris,
van Dieren, 2001, p. 44.
8
Werkstatt-Gesprch mit Ursula Strzbecher, in Musik als
existentielle Erfahrung, op. cit., p. 150.
11
dans la tte du roi demi fou. Pour Lachenmann, le son d'un
violon ne renseigne gure sur sa valeur de consonance ou de
dissonance, mais indique ce qui se passe: la faon dont les
crins de l'archet appuient sur la corde de telle et telle manire,
tel endroit prcis entre la touche et le chevalet9. C'est de l
qu'il tire son expressivit.
CONSTRUIRE UN INSTRUMENT
Ds lors, Lachenmann va projeter son monde sonore dans le
mdium qui oppose a priori le plus de rsistance: l'orchestre
symphonique. En 1969 est cr Air pour grand orchestre
et percussion solo; puis c'est Kontrakadenz en 1970-1971,
Klangschatten mein Saitenspiel pour 48 cordes et 3 pianos
en 1972, Fassade pour grand orchestre et bande magntique
en 1973, Schwankungen am Rand pour cuivres et cordes en
1974-1975 Le rythme est soutenu. Il faut au compositeur
un certain courage pour affronter les musiciens d'orchestre
avec des partitions remplies d'indications sur des modes
de jeu inhabituels! Mais cette musique exprimentale, au
meilleur sens du terme, laisse percer, derrire la fascination
pour le souffle symphonique, le dsir de conserver un contact
avec la tradition. Alors qu'en Allemagne, les mouvements
libertaires de la fin des annes soixante accouchent d'une
gnration romantique flirtant avec la tonalit et les formes
traditionnelles, Lachenmann tablit un rapport critique avec
le pass, laissant entendre des bribes du concerto pour
clarinette de Mozart dans Accanto pour clarinette et orchestre
(1975-1976), jouant avec les formes de danses baroques et
avec l'hymne allemand dans Tanzsuite mit Deutschlandlied
pour orchestre et quatuor cordes (1979-1980), avec des
chansons populaires dans Harmonica pour orchestre et tuba
solo (1981-1983), dans Mouvement (-vor der Erstarrung) pour
ensemble (1982-1984) l'une des pices les plus populaires
du compositeur , et dans Ein Kinderspiel pour piano (1980).
Dans son deuxime quatuor cordes, Reigen, seliger Geister
(1989), rfrence est faite Gluck. Les sons ne portent pas
seulement l'empreinte du geste qui les a produits, mais celle
aussi de l'histoire dans laquelle ils s'inscrivent. L'espace-temps
lachenmannien met en rapport la mmoire et l'inou.
9
L'coute est dsarme sans l'coute, dans Helmut Lachenmann,
crits et entretiens, Genve, Contrechamps, 2009, p. 115.
Dans toutes ces uvres, Lachenmann construit en quelque
sorte un instrument spcifique, le monde acoustique
qui lui sert de base n'tant plus celui fourni par la tradition.
Ainsi, chacune des sept pices de Ein Kinderspiel dduit un
effet sonore de ce meuble qu'est le piano, comme le note
Martin Kaltenecker. Cette dconstruction de l'instrument
conventionnel au profit d'un instrument imaginaire qui est
reconstruit, mais autrement, travers l'uvre, dbouche sur
des sonorits exigeant des techniques de jeu trs particulires
(Lachenmann passera beaucoup de temps expliquer aux
instrumentistes comment parvenir au rsultat juste, la notation
n'tant pas toujours, pour le musicien novice, explicite). Ses
partitions ressemblent des tablatures qui indiquent la
position des doigts sur la corde, la pression de l'archet, la
densit du souffle dans une embouchure pouvant adopter des
positions diverses, la faon de gratter une corde avec l'ongle
ou de faire rsonner, de faon tnue, le corps de l'instrument.
Nous n'avons plus affaire des hauteurs disposes sur la
porte, mais des sons qui exigent un geste spcifique. Et les
techniques migrent d'un instrument un autre, interfrent
entre elles: les sons d'un instrument sont repris et travaills
par ceux d'un autre ou de plusieurs autres instruments. Les
cordes peuvent ainsi produire toute une panoplie de bruits
lis au souffle, comme c'est le cas dans le premier quatuor
cordes, Gran Torso (1971-1972) mais le souffle est quasiment
prsent dans toutes les uvres du compositeur.
13
eux-mmes dans leur ralit physique. C'est pourquoi il parle
de familles de sons, permettant de rassembler sous un
mme toit des lments sonores et des objets apparemment
irrconciliables pour en faire une unit de sens musical,
c'est--dire d'une catgorie d'exprience qui ne peut se
dfinir qu'ainsi10. Par l, Lachenmann dpasse la conception
srielle dont il avait hrit, fonde sur des structures unifies
et mesurables, au profit d'units de sens et de qualits
d'exprience mettant en jeu des constellations sonores plus
fondamentales. Il invente ses propres lois de continuit et de
rupture, de progressions et d'immobilisations, de similitudes
et de diffrences. Elles ne renvoient pas un ordre commun, ni
une thorie objective, mais sont labores dans le processus
mme de composition, qui est le lieu d'une interaction
constante entre imagination et rflexion.
CRITIQUE DE L'APPARENCE
La dimension bruitiste de la musique lachenmannienne a
dsaronn des auditeurs qui ne retrouvaient plus leurs
marques. De fait, elle ncessite une rorientation de l'coute.
Elle a entour la personnalit du compositeur d'une aura de
scandale tout en provoquant une fascination qui devait susciter
non seulement une perception nouvelle du phnomne sonore,
mais aussi un grand nombre d'pigones. Or, ce qui diffrencie la
dmarche de celui qui trace de nouveaux chemins des suiveurs
qui lui embotent le pas tient ce sentiment prouv au plus
profond de soi que les sons mis disposition, les combinaisons
dj prouves, les gestes trop connots ont perdu leur force
de vrit, ne rpondant plus une ncessit vitale. Il s'agit donc
de les rinventer, de contrarier ses propres habitudes. Ce fut le
lot de tous les grands compositeurs du pass: s'arracher ce
qui est us, ce qui est devenu banal. Mais chez Lachenmann,
la critique ne porte pas sur des questions stylistiques ou sur
l'organisation des sons; elle porte sur la nature mme de
ceux-ci et sur le sens qu'ils vhiculent. Sa mfiance pour le
beau son, qui donne une image idyllique de la ralit, masquant
ses propres conditions de production, est non seulement une
manire de combattre leur usure dans la routine des concerts
traditionnels, mais c'est aussi une critique de l'apparence qui
prolonge celle ne au XIXe sicle, lie tout autant l'hypocrisie
et au cynisme de la socit bourgeoise qu' l'acadmisme
10
Sur le problme du structuralisme, Ibid., p.171.
et au sens commun qui lui tait attach. Ce fut aussi, ses
dbuts, une stratgie pour surmonter les apories du srialisme,
puis une manire de ragir aux tendances nouvelles de la
musique dans les annes soixante: musiques de timbre et de
textures, minimalisme, musique spectrale, mouvements nos,
voire mme ce que l'on a appel la nouvelle complexit.
Elle s'inscrit moins chez lui dans le champ clos du domaine
esthtique que dans celui de l'thique. En dplaant le
matriau hors de son cadre traditionnel, en demandant aux
musiciens de produire des sons inhabituels, et en ayant recours
toutes sortes de techniques indites, Lachenmann cherche
nous faire prendre conscience de l'vnement pour lui-mme,
du phnomne musical comme ce qui nat dans l'instant et
produit un tonnement, une forme d'expression encore jamais
prouve. Il vise une musique qui, loin des rflexes acquis,
des conventions et des rfrences, redevient une exprience
existentielle, un moment o l'on dcouvre ce que l'on n'avait
jamais imagin auparavant tout en s'interrogeant sur sa
signification.
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Le son n'est plus peru l'intrieur d'une convention tablie,
d'une normalit consensuelle, mais il merge du silence, du
rien, produisant l'motion de sa propre prsence, rfractant ce
corps--corps avec le matriau et avec l'ide qui symbolise le
travail de composition. C'est par de telles formes d'apparition
partir d'un point loign d'un envers, d'une non-musique ,
que se dgagent l'aura des uvres et leur force expressive (de
mme que chez Van Gogh, les objets, les formes et les couleurs
naissent d'un arrachement, d'une blessure secrte, d'un
combat avec la peinture). D'une certaine manire, la faon dont
le discours est construit rpercute grande chelle ce qui se
passe au niveau du son lui-mme.
LA PETITE FILLE
On ne peut dtacher cette dmarche d'une prise de position
thique et politique. Car refuser la belle apparence dans le
domaine esthtique, c'est refuser une idologie qui cache ses
processus de domination et d'alination sous des formules
sduisantes et des apprts flatteurs. Le son lachenmannien
n'est pas seulement un dmontage du beau son visant faire
prendre conscience de ce qui le constitue, jusqu' l'nergie
ncessaire pour le produire, mais c'est aussi une forme de
rsistance, une rvolte contre l'ordre tabli, que l'on retrouvera
chez le compositeur qui est le plus proche de lui, Heinz Holliger.
Sa musique oppose au flot indiffrenci de sons auxquels on
ne prte plus qu'une attention distraite, quand bien mme les
uvres portent des significations profondes, l'exigence d'une
coute attentive et qui pose chaque instant la question de sa
propre lgitimit, de sa propre signification. Toute proportion
garde, la situation n'tait pas si loigne pour les auditeurs
du dernier Beethoven. Elle s'est retrouve plus tard chez ceux
qui ne supportaient pas la musique de Mahler, dans laquelle
le pathos expressif est articul une distanciation critique qui
dbouche sur le second degr et l'ironie. C'est dans une telle
filiation que se situe la musique de Lachenmann.
Philippe Albra
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ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
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