Les Problemes Theoriques de La Traductio
Les Problemes Theoriques de La Traductio
Les Problemes Theoriques de La Traductio
Louis Leboucher connu sous le nom de Georges Mounin est un linguiste français qui est né
en 1910 et décédé en 1993, était un professeur de linguiste et de sémiologie à l’Université
d’Axe-de- Province. Souvent reconnu comme le disciple d’André Martinet, les œuvres de
Georges Mounin ont traité un vaste ensemble de sujets, comptant de l’histoire de la
linguistique à la définition de celle-ci de ses branches et problèmes linguistiques
(sémantique, sémiologie et la traduction à sa relation avec d’autres domaines de
connaissances.
Son œuvre intitulé les problèmes théoriques de la traduction, publié en 1963 chez Gallimard
est un ouvrage qui a pour objectif de mettre en évidence les problèmes auxquels les
traducteurs de toutes les langues font face dans leur opération traduisante. On sait bien que la
traduction s’occupe principalement de la recherche des équivalences de sens dans deux
langues différentes et Georges Mounin dans cet essai nous propose son idée qu’on a pu
trouver une explication ou bien une solution à des problèmes linguistiques grâce aux apports
des théories linguistiques.
Ici, il faut remarquer que ce livre, est le premier ouvrage français à apparaitre marchant sur
les traces de Nida, de Féderov et de tous les autres pionniers qui ont réalisé dans leur œuvre
les liens entre la traduction et le linguistique. Mounin dans ce livre a examiné d’une façon
très objective et empirique les théories de la linguistique générale pour voir ce qu’elles ont à
offrir spécifiquement pour aider à résoudre certains problèmes théoriques rencontrés par
tout traducteur. Ainsi, il essaie de traiter la théorie du structuralisme moderne selon laquelle
la traduction totale est impossible mais plutôt que maintenir l’opposition entre les théories
linguistiques et la pratique de la traduction, Mounin professe l’opinion que malgré cette
perspective peu rassurante, il doit y avoir beaucoup que la linguistique peut offrir pour aider
la tâche du traducteur. Mounin présente la traduction comme un domaine méritant la
considération des linguistes à cause de sa position très spéciale parmi les langues dites « en
contact ». Cet état résulte quand « deux ou plusieurs langues être dites en contact si elles sont
employés par les mêmes personnes »1.
En revanche, c’est l’opinion d’A.V. Fédorov et de Vinay et Darbelnet, auteurs de traités sur
la traduction, qu’elle mérite incorporation dans la linguistique. Ils croient que « la traduction
est une discipline exacte, possédant ses techniques et ses problèmes particuliers » qui
méritent d’être étudiés à la lumière des « techniques d’analyse actuellement à l’honneur (en
linguistiques) 4 ». Cette position, qui ne consiste pas à voir la traduction comme une
opération basée sur un seul aspect, est celle partagée aussi par Mounin. Il constate que, pour
réaliser toute opération traductionnelle, il faut effectuer « une série d’analyses et
d’opérations qui relève scientifiquement de la linguistique et que la science linguistique
appliquée correctement peut éclairer plus et mieux que n’importe quel empirisme
artisanal5 ».Il insiste que la traduction, est bien un art : mais comme la médecine, c’est un art
qui doit se baser solidement sur une science celle de la linguistique.
Comme nous avons déjà indiqué que ce travail de Mounin est également une tentative de
mettre en relief les obstacles linguistiques au sein de l’entreprise traductionnelle. Le premier
obstacle au quel le traducteur fait face est celui le plus menaçant problème de signification.
Les recherches de certains linguistes structuralistes dans ce champs ont mis en cause la
possibilité de saisir le sens d’un énoncé linguistique et par conséquent, met en doute la
légitimité de l’opération traduisante. Chez Saussure, la valeur c’est-à-dire, le sens d’un terme
est ce que les autres termes ne sont pas. Quoique cet argument de la notion de langue-
répertoire établisse que les mots d’une langue ne peuvent pas être mis en équation que les
mots d’une langue, l’analyse saussurienne « n’entame pas la validité des opérations de
traductions, parce que, fondée sur la physiologie classique…l’expérience humaine
universelle6 ».
1
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963 citée de Weinreich,
language in contact, p.1
2
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963 P 8
3
Ibid., p.12
4
Ibid., p.13 citée de Vinay et Darbelnet, Stylistique comparée du français et de l’anglais, p.23.
5
pg
6
Ibid., p.23, citée de Saussure,
Au contraire, d’autres linguistes comme Bloomfield et Harris, en formulant une théorie de la
linguistique qui oppose à la toute utilisation des significations, posent, à leur tour, un obstacle
à la traduction. Bloomfield, en tant que behaviouriste, considère que le sens d’un énoncé
linguistique est « la situation dans laquelle le locuteur émet cet énoncé, ainsi que le
comportement –réponse que cet énoncé tire de l’auditeur7 » qui nous mène à conclure que la
détermination de la signification d’un énoncé nécessiterait une connaissance plutôt
inaccessible de toutes les choses du monde, ce qui indique une négation de la possibilité de
toute traduction.
Selon martinet, un tel système, essayant d’opérer sans nul recours au sens, ne peut décrire, ni
exhaustivement ni sûrement, les structures d’une langue. Sans recours au sens, on serait mené
à dégager de fausses corrélations et à l’impossibilité de distinguer les fonctions diverses d’un
élément dans une série distributionnelle déterminée.
Une autre théorie que Mounin examine à propos de la sémantique est celle avancée par
Hjelmslev, un structuraliste de l’Ecole de Copenhague. Il conçoit la langue composée de
deux substances, celle de l’expression, c’est-à-dire, la partie physique et matérielle des sons,
et celle du contenu, c’est-à-dire la partie sémantique. Ainsi, conclut Mounin, ce n’est pas
pour des raisons de méthode d’analyse hjelmsleevienne évite la notion de signification.
Comme Saussure et Bloomfield, Hjelmslev « essaie de mettre la connaissance du sens au-
delà du point d’arrivée de la linguistique descriptive, au lieu de la mettre (sans le lire) au
point de départ8 ».
Un autre aspect à propos de la notion du sens que la linguistique a bouleversée, c’est la vue
traditionnelle de l’universalité de l’expérience humaine. C’était Wilhelm Von Humboldt qui
a lancé la nouvelle hypothèse, qui regarde « tout système linguistique comme renfermant
une analyse du monde extérieur qui lui est propre et qui diffère de celle d’autres langues 9 ».
Cette position, longtemps négligée, trouve une grande place dans la linguistique
structuraliste.
Jost Trier reprend les thèses de Humboldt, disant que « les éléments de réalité du langage
dans une langue donnée ne reviennent jamais tout à fait sous la même forme dans une autre
langue…, relie et distingue les données de la réalité10 »
Hjelmslev partage aussi la vue de Trier, professant que, puisque le sens d’un énoncé
linguistique ressort de son rapport avec les institutions sociales dans une civilisation donnée,
il ne se peut que la même chose physique possède la même signification dans des sociétés
diverses. Ainsi, cette thèse nie avec beaucoup de force la possibilité de traduire, puisqu’elle
affirme que l’on ne peut jamais être sûr de rendre le sens d’un énoncé linguistique de la
langue-source dans la langue-cible, de telle manière qu’il exprime le point de vue propre à
cette langue-ci.
7
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963 p.27 citee de Bloomfield,
language,Londres, Henderson & Spadling, 1955, p. 139
8
Ibid., p.38
9
Ibid.,p.44,
10
Ibid., 44-45 citée de Das sprachliche dans Neue Jahrbücher für Wissenschaft.u.Bildun. 10 (1934),pp 428-449
Mounin avoue qu’il n’y a pas de moyen de contester ces thèses sur les langues comme vision
du monde, thèses qui sont acceptées en soi dans tout argument de la linguistique générale.
Selon lui, « les problèmes théoriques de la traduction ne peuvent être compris, et peut-être
résolus, que si l’on accepte –au lieu de les éluder, de les nier, voire de les ignorer –ces faits
apparemment destructeurs de toute possibilité de traduire 11 ».
La meilleure analyse de ce problème se trouve chez Eugène Nida. Selon lui, il y existe cinq
domaines où le traducteur peut heurter contre des obstacles en cherchant des équivalences
entre une civilisation et d’autre. Ce sont : l’écologie, la culture matérielle, la culture sociale,
la culture religieuse et la culture linguistique.
Quant à l’écologie, Nida montre que, toute fois qu’on passe d’une zone géographique à une
autre, on se trouve en face de particularités écologiques tout à fait différentes. Par
conséquent, il arrive parfois, en traduisant dans une langue dont les locuteurs ne connaissent
pas certaines caractéristiques géographiques décrites dans la langue de départ. La culture
matérielle présente bien des exemples de la difficulté qui se présente dans le passage d’un
monde ethnographique à un autre. A cause des technologies différentes existant dans des
civilisations diverses ou même dans des étapes différentes de la même civilisation, il y a
beaucoup d’objets matériels dont une correspondance ne se trouve pas dans une autre culture.
En ce qui concerne la culture sociale, les problèmes s’élèvent surtout de la difficulté de
traduire, dans une langue, des relations familiales et sociales qui existent dans une culture
dont une autre langue est l’expression. La réalisation que ces mondes ne sont que dans une
certaine mesure pénétrable les uns pour les autres, aggrave la tâche du traducteur.
11
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963, p. 58.
Plus encore l’hypothèse de J. Prieto, essaie de structurer le lexique à partir des unités plus
petites que le mot, est fondé sur la conception du signe linguistique. On considère que tout
signe est construit de « non-signes » ou de « figures » qui n’ont pas de sens en eux-mêmes.
Les phonèmes sont classés comme de telles « figures ». Ils n’ont pas de signification, mais le
signe qui en est formé en a une qui survient du contexte dans lequel il se trouve. Suivant les
recherches de Hjelmslev qu’il y existe pour chaque énoncé linguistique deux articulations sur
le plan de l’expression et celui du contenu, Luis J. Prieto propose de vérifier l’existence de
ces « figures » du contenu et de les décrire. Essayant d’appliquer les mêmes processus de
commutation utilisée pour dégager les phonèmes, il introduit le concept de « traits pertinents
de signification » pour désigner les « figures de contenu » analogues aux phonèmes sur le
plan de l’expression. Pour illustrer sa méthode, Prieto donne l’exemple suivant : « … le mot
latin vir, offres les deux traits homo et masculus ; par la commutation du trait masculus, on
obtiendrait le terme mulier : celle du trait homo donnerait equus, par exemple 12 ».
Un autre aspect qui vient de figurer dans la terminologie de la linguistique, est le mot
connotation comme le mot dénotation. La description de leur usage moderne se trouve dans
la logique de Stuart Mill. Il considère que la dénotation d’un terme, c’est « l’extension du
concept est l’attribut13. » la connotation chez lui, est, « la compréhension su concept, c’est-à-
dire, l’ensemble des caractères appartenant à un concept 14 ». Mais la première mention de
« connotation » dans un traité proprement linguistique se trouve dans le language de
Bloomfield. Pour lui, les connotations sont des « valeurs supplémentaires » ou subjectives,
qui s’attachent à la dénotation, c’est-à-dire, la définition objective d’un terme.
La notion bloomfieldienne est prise comme centrale dans le traitement de connotation dans le
domaine de la linguistique, mais depuis son temps, certains études linguistiques ont
néanmoins approfondi la notion de connotation et par la suite ont posé des difficultés à
propos de son usage. La première est de savoir si les connotations font partie de la
signification car il réfère à des connotations seulement comme des « valeurs
supplémentaires » dans la signification. Jusqu’à ici, toute analyse du concept de la
connotation n’est jamais restée au niveau purement linguistique. Cependant, une autre
analyse de Martinet, semble définir l’usage de connotation d’une manière strictement
linguistique. Martinet considère que le sens du mot, ce soit connotatif ou dénotatif, s’apprend
par son rapport à la situation dans laquelle il se trouve.
Pour conclure, Mounin dit qu’il n’importe comme nomme-t-on ou classe-t-on les
connotations. Ce qui est important, c’est qu’elles appartiennent au langage et il faut les
traduire au juste comme les dénotations. Cependant, la chose qui rend si difficile la traduction
des connotations, c’est qu’elles sont des rapports individuels entre des signes et des usagers
qui varient de personne en personne et de moment en moment pour la même personne.
Comme dit Mounin « quand on dit que la traduction est impossible, neuf fois sur dix, on
12
Ibid., p.100, citée de Prieto, L.J: « Figuras de la expression y figuras del contenido », dans Estructuralismo y
historia, Miscelanea homenaje a André Martinet, Canarias, Universidad de la leguna, 1957, pp 243-249.
13
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963 p.144.
14
Ibid.,p.145
pense à ses connotations qui mettent en cause non seulement la possibilité de transfert …, soit
de la possibilité, soit des limites de la communication interpersonnelle intersubjective 15».
Une autre tendance manifestée surtout par les psychologues, les philosophes et les littéraires,
qui se fonde sur le postulat que la communication entre les hommes est impossible, que rien
ne peut se communiquer, jamais. Suivant ce courant de pensée, la traduction aussi devient
impossible, puisque, si la possibilité de communication est niée, alors la communication
unilingue ne peut se faire non plus. Nicole Roubakine, un disciple de Humboldt, était le
premier à déclarer cette théorie en disant « qu’un livre n’est autre chose que la projection
extérieure de la mentalité du lecteur. Personne ne sait rien des livres que les impressions st
opinions qu’il en a16 ».
La Linguistique contemporaine de son côté, ne partage pas cette notion fixe de la non-
communication, cependant au lieu de professer le point de vue tout à fait opposé que l’on
peut tout communiquer, elle regarde le langage comme un système où l’on communique
quelque chose et dirige ses analyses à la description de partie communiquée.
Mais, selon Mounin, la possibilité de communiquer dans une deuxième langue et par
conséquent, la possibilité de traduire dans une deuxième langue, est fondé sur le postulat qu’il
existe des traits communs entre les langues. Ce sont des « situations bloomfieldiennes »
communes à toutes les langues, qui légitiment cette communication.
15
Ibid.,p.168
16
Ibid., p.171, citée de Roubakine,N: Introduction à la psychologie bibliologique, 1921, Université de
Strasbourg.pp 12,82,86.
17
Mounin, Georges, les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, 1963 p.247.