Gist

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 6

ANATOMIE ET CYTOLOGIE

THÉMATIQUE
PATHOLOGIQUES
À TAPER

Histologie et pathologie moléculaire


des tumeurs stromales gastrointestinales (GIST)
Jean-François Emilea, b, c,*, Jean-Baptiste Bacheta, b, c, Séverine Tabone-Eglingerd, Sabrina Brahimia, b, c

RÉSUMÉ
SUMMARY
Les tumeurs stromales gastrointestinales (GIST) sont les sarcomes les plus
fréquents du tube digestif. Ces tumeurs peuvent se développer à partir de Histology and molecular pathology of
tous les segments du tractus digestif, depuis l’œsophage jusqu’à l’anus, gastrointestinal stromal tumors (GIST)
ou exceptionnellement à partir du mésentère et du péritoine. Les circons-
tances de découverte les plus fréquentes sont des douleurs abdominales, Gastrointestinal stromal tumors (GIST) are the
des saignements digestifs, des troubles du transit ou la présence d’une most frequent sarcoma of the digestive tract. These
masse abdominale palpable. Toutefois ces tumeurs restent longtemps tumors can arise anywhere in the gastrointestinal
peu symptomatiques. De ce fait, 10 à 20 % sont de découverte fortuite et tract, from oesophagus to anus, and rarely from
15 à 50 % sont découvertes à un stade métastatique. Macroscopiquement, peritoneal cavity or mesentery. The most frequent
les GIST sont généralement des tumeurs bien limitées, à développement symptoms are abdominal pain, gastrointestinal
extra-pariétal, de consistance ferme, de couleur chair de poisson avec de bleeding, abdominal mass or bowel movement
fréquents remaniements hémorragiques. Les GIST se caractérisent his- disorder. GIST usually remain asymptomatic for
tologiquement par une prolifération importante de cellules le plus souvent a long time, and 10 to 20 % are found incidentally
fusiformes ou épithélioïdes. Le diagnostic doit être confirmé par l’immuno- at endoscopy or at time of surgery for others rea-
histochimie, avec une positivité de KIT dans 95 % des cas, ou par la biologie sons. At diagnosis, metastases are found in 15 to
moléculaire, avec des mutations de KIT ou PDGFRA dans 85 % des cas. 50 % of cases. Macroscopicaly, GIST are usually
Toute GIST est a priori maligne, et le risque de récidive ou de métastase est well limited, with extra-parietal development, firm
actuellement évalué en fonction de la taille tumorale et l’activité mitotique. in consistency, like flesh of fish in color and with
Des métastases se développent chez 30 à 50 % des patients atteints de frequent intra-tumoral hemorrage. Histologicaly,
GIST. Celles-ci sont totalement résistantes aux chimiothérapies convention- they are characterized by an important cellular
nelles, mais l’utilisation des thérapies ciblées avec des anti-oncogènes tels proliferation constituted of epithelioid or spindle
le Glivec® (Imatinib Mesylate), constitue l’un des progrès thérapeutiques cell. In all cases, diagnosis must be confirmed
majeurs de ces dernières années en cancérologie. by immunohistochemistry, with positivity of KIT
in 95 % of cases, or by molecular biology, with
Tumeur – sarcome – tractus digestif – KIT – récepteurs tyrosine kinase. «gain of function» mutation of KIT or PDGFRA
in 85 % of cases. All GIST have a malignant po-
tential. Mitotic activity and tumor size are the two
principal prognostic factors to assess the risk of
1. Introduction relapse or metastastatic evolution. Metastases
occured in 30 to 50 % of patients with GIST. GIST
Les tumeurs stromales gastrointestinales (GIST) ont été are highly resistant to conventional chemotherapy
décrites dès 1983 [17], mais ce n’est que depuis la décou- and results obtained with new targeted therapies
verte du phénotype particulier des cellules tumorales, like Glivec® are one of the major progress in on-
avec l’expression fréquente du CD34 [26] et celle quasi cology during the last ten years.
constante de KIT [15], il y a une dizaine d’années, que ces
Tumor – sarcoma – digestive tract – KIT
– tyrosine kinase receptors.
a Service de pathologie
Hôpital universitaire Ambroise-Paré (AP-HP)
9, av. Charles-de-Gaulle
92104 Boulogne cedex
b Faculté de médecine PIFO, UVSQ, Guyancourt.
c INSERM U602 – Villejuif. tumeurs sont réellement individualisées. En pratique, ce
d INSERM U590 – Lyon. n’est que depuis le début du millénaire que les GIST sont
diagnostiquées en routine, et clairement distinguées des
* Correspondance autres tumeurs mésenchymateuses digestives telles les
jean-francois.emile@apr.aphp.fr léiomyomes, léiomyosarcomes ou schwannomes.
La localisation des GIST à la musculeuse, tout le long du
article reçu le 21 septembre, accepté le 7 octobre 2007. tractus digestif, et leur expression quasi constante de KIT
© 2007 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés. suggèrent fortement que ces tumeurs dérivent de progé-

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398 // 53


niteurs des cellules interstitielles de Cajal. Ces cellules, sans encapsulation, qui se développent préférentiellement
décrites comme étant responsables du péristaltisme digestif sur le versant séreux de la paroi digestive (figure 1). Lors
et qui expriment KIT à l’état normal, sont localisées entre de la macroscopie, la mesure du diamètre maximal de la
les cellules musculaires, souvent concentrées autour des tumeur primitive est un paramètre majeur pour l’évaluation
plexus d’Auerbach. L’hyperplasie majeure des cellules du potentiel évolutif (tableau I). Il est important de bien
interstitielles de Cajal et la fréquence importante de GIST échantillonner la tumeur, pour le diagnostic différentiel avec
chez les patients ayant une mutation constitutionnelle de d’autres sarcomes (exemple : liposarcome), et parce qu’il
KIT [4] sont des arguments supplémentaires en faveur de peut exister des variations dans l’index de prolifération. À
cette hypothèse phylogénique. l’histologie, la densité cellulaire est généralement forte et
homogène, et des remaniements nécrotiques, œdémateux
2. Le diagnostic de GIST et/ou hémorragiques sont d’autant plus fréquents que les
tumeurs sont de grande taille. Les cellules sont fusiformes
dans 70 % des cas, avec une architecture le plus souvent
Le diagnostic de GIST est de plus en plus fréquemment
évoqué par les radiologues, devant une tumeur hypervas- fasciculée (figure 2a), évoquant une prolifération muscu-
cularisée développée à partir de la paroi de l’estomac ou laire lisse. Plus rarement, les cellules fusiformes se dis-
du grêle et sans métastase ganglionnaire. Toutefois, seule posent en palissade (figure 2b) ou en « bulbe d’oignon ».
l’analyse histologique permet de confirmer le diagnostic Les cellules fusiformes ont un noyau ovalaire court, et un
de GIST. Les GIST sont des tumeurs bien limitées mais cytoplasme éosinophile qui présente fréquemment des
pseudo-vacuolisations évocatrices du diagnostic. Le stroma
tumoral est généralement très peu abondant, constitué de
Figure 1 capillaires sanguins, et peut, dans les localisations intes-
tinales, contenir des fibres skénoïdes très spécifiques du
diagnostic (figure 2c). Dans environ 20 % des cas, les
cellules sont épithélioïdes (figure 2d). Ce type histologi-
que est plus fréquent dans les localisations gastriques.
Les autres variantes histologiques sont plus rares, avec
des variantes mixtes (fusiformes et épithélioïdes), ou des
aspects devant faire discuter d’autres diagnostics (formes
myxoïdes, pléomorphes, carcinoïdes…). Pour l’évaluation
du risque de reprise évolutive, le compte mitotique se fait sur
50 champs au fort grossissement (tableau I) ; ce qui n’est
généralement possible que sur les pièces opératoires.
Même lorsque la clinique et l’histologie sont évocatrices,
le diagnostic de GIST doit être confirmé par une étude
immunohistochimique, qui permet notamment de mettre
en évidence une expression de KIT par les cellules tumo-
rales dans 95 % des cas. L’expression de KIT est, dans
la grande majorité des cas, forte et diffuse à l’ensemble
des cellules tumorales. Le marquage peut être membra-
naire, cytoplasmique diffus et/ou cytoplasmique « golgien »
Macroscopie d’une volumineuse GIST développée sur la face externe de la paroi
gastrique. Il s’agit d’une gastrectomie atypique car un curage ganglionnaire n’est (figure 3). Dans quelques cas, le marquage est hétérogène
pas nécessaire ; la paroi gastrique reséquée est donc de petite taille (à droite). au sein de la tumeur et seuls de petits territoires tumoraux
La tumeur (à gauche) est arrondie, bien limitée en périphérie, avec quelques
remaniements œdémateux et hémorragiques. sont positifs, ce qui peut poser des problèmes de faux
négatifs sur des biopsies ou des micro-biopsies. Toutefois,
la présence quasi constante de témoins positifs sur les
Tableau I – Consensus international pour l’évaluation coupes histologiques, tels les mastocytes intra-muqueux
du risque de récidive ou métastase d’une GIST localisée ou intra-tumoraux et les cellules interstitielles de Cajal de
(d’après [Fletcher 02]). la musculeuse, permet d’éliminer facilement un problème
technique. À l’inverse, pour éviter les faux positifs, il est
Diamètre tumoral maximal Nombre de mitoses/50 hpf*
recommandé d’utiliser les anticorps dans des conditions
Très faible risque moins de 2 cm et moins de 5 mitoses assez stringentes ; ainsi l’anticorps polyclonal commercialisé
Faible risque 2 à 5 cm et moins de 5 mitoses par Dako doit être utilisé soit à la dilution finale de 1/300
moins de 5 cm et 6 à 10 mitoses
après restauration antigénique dans du tampon citrate à
Risque pH6, soit au 1/50 sans restauration antigénique. Enfin, il
ou
intermédiaire
5 à 10 cm et moins de 5 mitoses faut se souvenir que plusieurs autres tumeurs peuvent
5 à 10 cm et 6 à 10 mitoses exprimer KIT [29] dans la majorité (séminome, carcinome
ou adénoïde kystique) ou dans une proportion variable de cas
Haut risque plus de 10 cm indifférent (mélanome, carcinomes bronchique, etc…). Environ 5 %
ou
indifférent plus de 10 mitoses des GIST sont négatives pour KIT ; le diagnostic nécessite
alors la mise en évidence de mutations des gènes KIT
* hpf : champs au grossissement x 400.
ou PDGFRA au sein de l’ADN tumoral [1]. Les GIST les

54 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398


ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES

plus fréquemment négatives pour KIT sont des variantes


épithélioïdes de localisation gastrique, avec une mutation
3. Epidémiologie des GIST
du PDGFRA [16]. Les GIST surviennent généralement chez l’adulte, avec
D’autres marqueurs peuvent être utiles pour le diagnostic un âge moyen et médian au diagnostic de 60 ans, et la
de GIST. Le CD34 est positif dans 70 % des GIST gastri- fréquence est globalement identique entre les sexes. L’in-
ques et 50 % des GIST extra-gastriques. Il est préférable cidence est actuellement évaluée par des études rétros-
de considérer la tumeur comme positive seulement lors- pectives entre 10 et 20 nouveaux cas/an/million d’habitant
que plus de 20 % des cellules tumorales sont marquées. [19, 20], et ne semble pas varier en fonction des origines
Environ 70 % des GIST sont positifs pour la h-Caldes-
mone [6]. D’autres marqueurs, tels DOG-1 [30] ou PKC
theta [13] ont été décrits comme spécifiques des GIST. Figure 2
Dans environ 5 % des GIST, des cellules tumorales sont
positives pour la protéine S100, mais une positivité diffuse a b
doit faire envisager un autre diagnostic, tel une tumeur
nerveuse périphérique ou un mélanome. La desmine est
un marqueur important pour le diagnostic différentiel avec
un léiomyosarcome, car contrairement à ceux-ci les GIST
ne sont qu’exceptionnellement positifs.
Les diagnostics différentiels de GIST sont nombreux avec
notamment des léiomyomes et léiomyosarcomes, des
schwannomes et neurofibromes, des liposarcomes dédif-
férenciés ou d’autres sarcomes d’origine abdominale ou
pelvienne. Ces tumeurs sont habituellement KIT négatives,
ce qui implique d’être particulièrement vigilant au risque de c d
faux positifs. Les métastases de mélanomes, notamment
sur le grêle, peuvent quant à elles être positives pour KIT
et poser un problème difficile de diagnostic différentiel. Les
tumeurs desmoïdes abdominales constituent également
un diagnostic différentiel important, à distinguer sur des
critères histologiques.
En pratique courante, le diagnostic de GIST, de plus en
plus souvent évoqué par le radiologue ou le chirurgien, est
confirmé facilement par l’histologie et l’immunohistochimie
avec un panel de 3 ou 4 anticorps (KIT, CD34, PS100,
+/- h-caldesmone). Toutefois certains cas nécessitent le Les GIST ont le plus souvent une histologie fusiforme (A), avec parfois des
recours à la biologie moléculaire pour mettre en évidence agencements palissadiques des noyaux (B) ou, dans les localisations intestinales,
des fibres skénoïdes (C). L’histologie peut également être épithélioïde (D).
une mutation spécifique de KIT ou PDGFRA [1].

Figure 3

a b c

L’expression de KIT est généralement intense, cytoplasmique et/ou membranaire, et détectable sur la totalité des cellules tumorales de GIST (A). En cas de négativité,
la détection de quelques mastocytes positifs, au sein de la tumeur ou de la muqueuse adjacente, est indispensable pour éliminer un faux négatif (B). Dans certains
cas, le marquage des cellules tumorales est plus hétérogène, ou limité à un petit amas intra-cytoplasmique (C), considéré comme un marquage de l’appareil de Golgi.

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398 // 55


géographiques et ethniques des patients. Toutefois, les
données épidémiologiques sont encore très limitées pour
4. Les mutations de KIT
ces tumeurs dont le diagnostic était encore rarement fait
KIT est un récepteur membranaire de la famille des tyro-
il y a 10 ans. Des études de registre, telles MolecGIST
sines kinases, qui est la principale famille d’oncogènes
(http://www.gist-france.org) sont encore nécessaires
en pathologie humaine [3]. La fixation à KIT de son ligand
pour préciser ces données.
spécifique, le stem cell factor (SCF), induit son activation
Les GIST se développent à partir de l’estomac dans 60 à
et la transmission de signaux intracellulaires responsables
70 % des cas et de l’intestin grêle dans 20 à 30 % des cas,
de la prolifération et de la survie des cellules. Dans 70 à
mais tous les autres segments digestifs, œsophage (5 %),
80 % des GIST, mais également parfois dans d’autres
côlon, appendice, rectum, ainsi que le mésentère et la cavité
tumeurs telles les mastocytoses ou les leucémies, une
péritonéale peuvent être atteints. Dans l’estomac, les adé-
mutation du gène KIT est responsable de l’activation spon-
nocarcinomes sont de loin les cancers les plus fréquents,
tanée du récepteur KIT, y compris en l’absence de SCF ;
mais environ 95 % des tumeurs mésenchymateuses sont
il s’agit d’une mutation dite « gain de fonction » [15]. Il est
des GIST, et les diagnostics différentiels de schwannome
intéressant de noter que KIT est activé au sein des GIST,
et léiomyosarcome sont donc rares. Dans le grêle, environ
même en l’absence de mutations « gain de fonction » [25].
1/4 des tumeurs malignes sont des GIST.
Les GIST constituent 20 à 30 % des sarcomes des tissus Dans 5 à 10 % des GIST, une mutation « gain de fonction »
mous [18]. Leur survenue est sporadique dans la grande est détectée sur un gène très proche de KIT, le PDGFRA
majorité des cas, mais il existe quelques prédispositions [13]. Les mutations de ces deux gènes sont mutuellement
familiales, telles la neurofibromatose de type I [28] et d’ex- exclusives. Elles sont de nature très variable dans leur
ceptionnelles formes familiales décrites par Carney et localisation et leur type (délétion, insertion, substitution).
Stratakis [22] ou liées à une mutation constitutionnelle de Les plus fréquentes sont localisées sur les exons 11 et 9
KIT [21] ou PDGFRA [5]. de KIT et 18 de PDGFRA (tableau II).
La détection des mutations peut se faire sur des blocs
de tumeurs fixées en formol et incluses en paraffine.
Tableau II – Les mutations de KIT et PDGFRA dans les GIST Après contrôle histologique, l’ADN tumoral est extrait
(d’après [Corless 04]). puis amplifié par PCR. Le séquençage peut être précédé
Gène Exon Fréquence Type de mutation Sensibilité au Glivec® d’une étape de screening (figure 4) par LAPP [9] ou
DHPLC [13]. La recherche de mutation est indispensa-
KIT 9 10 % Unique (insertion) Oui (mieux à 800 mg/j*)
ble pour le diagnostic de GIST KIT négative [1], ou les
KIT 11 66 % Très variable Oui GIST d’histologie inhabituelle. Elle est souvent requise
KIT 13 1% Unique (substitution) Oui par les oncologues pour les patients atteints de GIST
KIT 17 <1% variable variable sévère. En effet, la présence de mutations de l’exon 11
de KIT est associée à une forte fréquence de réponse au
PDGFRA 12 <1% variable Oui
traitement par le Glivec® [14], alors que lorsqu’il existe
PDGFRA 14 <1% variable Oui une mutation de l’exon 9 de KIT, un doublement de la
PDGFRA 18 6% variable
Dépend du type dose est préférable [27]. Pour les autres patients, la
de mutation recherche systématique de mutations serait également
* la posologie usuelle est de 400 mg/j per os. utile pour mieux connaître les formes clinico-biologiques,
leur pronostic et leur sensibilité aux thérapies ciblées.
C’est l’objectif de l’étude MolecGIST, qui propose de
Figure 4 rechercher les mutations chez tous les patients dont le
a diagnostic à été fait en France entre juin 2006 et juin 2008
(http://www.gist-france.org).

5. Évolution et traitement
b Toutes les GIST sont potentiellement malignes, et le risque
de récidive après résection peut être évalué selon la taille
et l’index mitotique (tableau I). Il est probable que d’autres
paramètres, tels la localisation gastrique, la présence de
nécrose et le type de mutation, aient une valeur pronostique
[10], mais ceci mérite d’être évalué sur de grandes séries
prospectives de patients. La valeur pronostique des muta-
tions, publiée initialement [24], est actuellement débattue
[11]. Les métastases de GIST se localisent au foie dans
L’ADN tumoral peut être extrait sous contrôle histologique à partir des blocs fixés ou 2/3 des cas ou dans le péritoine dans 1/4 des cas. Les
congelés, puis les mutations de KIT et PDGFRA sont identifiées par séquençage métastases ganglionnaires sont rares, ce qui justifie de
des produits d’amplification. Une étape de screening par LAPP (A) permet ici de détecter
un pic correspondant à l’allèle sauvage (flèche rouge) et un allèle muté (flèche bleu). ne pas faire de curage lorsque le diagnostic est suspecté.
Dans le cas présent, le pic muté est nettement plus élevé, attestant d’une mutation Les métastases pulmonaires sont également rares, et leur
homozygote, qui est ensuite identifiée par séquençage (B).
survenue peut justifier de rediscuter le diagnostic.

56 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398


ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES

Le seul traitement curatif des GIST est la résection chirurgi- Un traitement adjuvant, après résection complète d’une
cale des tumeurs localisées. Les GIST métastatiques sont GIST, est également probablement utile [8]. Un essai cli-
actuellement incurables. Elles sont totalement résistantes nique visant à confirmer ceci est actuellement en cours
aux chimiothérapies usuelles [2] et à la radiothérapie. Le en Europe sur des patients ayant un risque intermédiaire
développement de thérapies ciblées avec des inhibiteurs ou élevé de récidive. Ici encore, la recherche de mutation
des récepteurs tyrosine kinase, tels le Glivec® (Imatinib pourrait être extrêmement utile pour la prise en charge
Mesylate) a heureusement fortement amélioré la survie des des patients.
patients atteints de GIST métastatiques. En effet, alors que
dans les séries historiques la survie globale de ces patients
était de l’ordre de 18 à 24 mois, le Glivec® permet d’obtenir 6. Conclusion
une réponse tumorale (réponse objective ou stabilité de
plus de 6 mois) chez 85 % à 90 % d’entre eux, avec des Les GIST sont un des meilleurs exemples de l’intérêt de la
survies sans progression de 24 mois et des survies globa- recherche actuelle en cancérologie. En effet, en l’espace
les supérieures à 36 mois. [23]. La réponse tumorale est de 3 ans, une tumeur pratiquement inconnue a pu être
nettement corrélée à la présence de mutations de KIT [14], individualisée et facilement diagnostiquée en raison de
avec des réponses plus fréquentes chez les patients ayant l’identification d’un oncogène (KIT), puis traitée efficace-
des mutations de l’exon 11 de KIT. De plus, les patients ment avec un inhibiteur spécifique de cet oncogène (Gli-
ayant une mutation de l’exon 9 de KIT ont une survie aug- vec®). Encore 3 ans plus tard, l’étude de grandes cohortes
mentée lorsqu’ils sont traités à double dose (800 ou lieu de de patients a permis de démontrer l’association entre le
400 mg/jour) [27]. De ce fait, les oncologues demandent de type de mutation et la réponse à ce traitement, et permet
plus en plus fréquemment la recherche de mutations chez maintenant d’envisager des traitements « à la carte » pour
les patients atteints de formes métastatiques. chaque patient.

Adjuvant GIST Study Team, Adjuvant imatinib mesylate increases recur-


Références rence free survival (RFS) in patients with completely resected local-
ized primary gastrointestinal stromal tumor (GIST): North American
[1] Blay J.Y., Bonvalot S., Casali P., Choi H., Debiec-Richter M., Dei Tos Intergroup Phase III trial ACOSOG Z9001, ASCO Ann. Meet. Proc.
A.P., Emile J.F., Gronchi A., Hogendoorn P.C., Joensuu H., Le Cesne A., No: 10079 (communication orale).
McClure J., Maurel J., Nupponen N., Ray-Coquard I., Reichardt P.,
[9] Emile J.F., Lemoine A., Bienfait N., Terrier P., Azoulay D., Debuire B.,
Sciot R., Stroobants S., van Glabbeke M., van Oosterom A., Demetri
Length analysis of polymerase chain reaction products: a sensitive and
G.D., GIST consensus meeting panellists, Consensus meeting for the
reliable technique for the detection of mutations in KIT exon 11 in gas-
management of gastrointestinal stromal tumors, Report of the GIST
trointestinal stromal tumors, Diagn. Mol. Pathol. 11(2) (2002) 107-112.
Consensus Conference of 20-21 March 2004, under the auspices of
[10] Emile J.F., Theou N., Tabone S., Cortez A., Terrier P., Chaumette
ESMO, Ann. Oncol. 16(4) (2005) 566-578.
M.T., Julie C., Bertheau P., Lavergne-Slove A., Donadieu J., Barrier A.,
[2] Blay J.Y., Landi B., Bonvalot S., Monges G., Ray-Coquard I.,
Le Cesne A., Debuire B., Lemoine A., Groupe d’étude des GIST,
Duffaud F., Bui N.B., Bugat R., Chayvialle J.A., Rougier P., Bouche O.,
Clinicopathologic, phenotypic, and genotypic characteristics of gastroin-
Bonichon F., Lassau N., Vanel D., Nordlinger B., Stoeckle E., Meeus P., testinal mesenchymal tumors, Clin. Gastroenterol. Hepatol. 2(7) (2004)
Coindre J.M., Scoazec J.Y., Emile J.F., Ranchere D., Le Cesne A., 597-605.
Recommendations for the management of GIST patients, Bull. Cancer.
[11] Emile J.F., Tabone-Eglinger S., Theou-Anton N., Lemoine A.,
92(10) (2005) 907-918.
Prognostic value of KIT exon 11 deletions in GISTs, Gastroenterology
[3] Blume-Jensen P., Hunter T., Oncogenic kinase signalling, Nature 131(3) (2006) 976-977.
411(6835) (2001) 355-365.
[12] Fletcher C.D., Berman J.J., Corless C., Gorstein F., Lasota J.,
[4] Chen H., Hirota S., Isozaki K., Sun H., Ohashi A., Kinoshita K., Longley B.J., Miettinen M., O’Leary T.J., Remotti H., Rubin B.P.,
O’Brien P., Kapusta L., Dardick I., Obayashi T., Okazaki T., Shinomura Shmookler B., Sobin L.H., Weiss S.W., Diagnosis of gastrointestinal stro-
Y., Matsuzawa Y., Kitamura Y., Polyclonal nature of diffuse proliferation of mal tumors : a consensus approach, Hum. Pathol. 33(5) (2002) 459-465.
interstitial cells of Cajal in patients with familial and multiple gastrointes- [13] Heinrich M.C., Corless C.L., Duensing A., McGreevey L., Chen
tinal stromal tumours, Gut 51(6) (2002) 793-796. C.J., Joseph N., Singer S., Griffith D.J., Haley A., Town A., Demetri G.D.,
[5] Chompret A., Kannengiesser C., Barrois M., Terrier P., Dahan P., Fletcher C.D., Fletcher J.A., PDGFRA activating mutations in gastroin-
Tursz T., Lenoir G.M., Bressac-De Paillerets B., PDGFRA germline testinal stromal tumors, Science 299(5607) (2003) 708-710.
mutation in a family with multiple cases of gastrointestinal stromal tumor, [14] Heinrich M.C., Corless C.L., Demetri G.D., Blanke C.D., von
Gastroenterology 126(1) (2004) 318-321. Mehren M., Joensuu H., McGreevey L.S., Chen C.J., Van den Abbeele
[6] Coindre J.M., Emile J.F., Monges G., Ranchere-Vince D., Scoazec A.D., Druker B.J., Kiese B., Eisenberg B., Roberts P.J., Singer S.,
J.Y., Gastrointestinal stromal tumors: definition, histological, immunohis- Fletcher C.D., Silberman S., Dimitrijevic S., Fletcher J.A., Kinase muta-
tochemical, and molecular features, and diagnostic strategy, Ann. Pathol. tions and imatinib response in patients with metastatic gastrointestinal
25(5) (2005) 358-385. stromal tumor, J. Clin. Oncol. 21(23) (2003) 4342-4349.
[7] Corless C.L, Fletcher J.A., Heinrich M.C., Biology of gastrointestinal [15] Hirota S., Isozaki K., Moriyama Y., Hashimoto K., Nishida T.,
stromal tumors, J. Clin. Oncol. 22(18) (2004) 3813-3825. Ishiguro S., Kawano K., Hanada M., Kurata A., Takeda M., Muhammad
[8] DeMatteo R., Owzar K., Maki R., Pisters P., Blackstein M., Tunio G., Matsuzawa Y., Kanakura Y., Shinomura Y., Kitamura Y., Gain-
Antonescu C., Blanke C., Demetri G., von Mehren M., Ballman K. and the of-function mutations of c-kit in human gastrointestinal stromal tumors,
American College of Surgeons Oncology Group (ACOSOG) Intergroup Science 279(5350) (1998) 577-580.

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398 // 57


[16] Lasota J., Dansonka-Mieszkowska A., Stachura T., Schneider- SDHC, and SDHD, Eur. J. Hum. Genet. (2007 Aug. 1) [Epub ahead of
Stock R., Kallajoki M., Steigen S.E., Sarlomo-Rikala M., Boltze C., print].
Kordek R., Roessner A., Stachura J., Miettinen M., Gastrointestinal stro- [23] Rubin B.P., Heinrich M.C., Corless C.L., Gastrointestinal stromal
mal tumors with internal tandem duplications in 3’ end of KIT juxtamem- tumour, Lancet 369(9574) (2007) 1731-1741.
brane domain occur predominantly in stomach and generally seem to [24] Taniguchi M., Nishida T., Hirota S., Isozaki K., Ito T., Nomura T.,
have a favorable course, Mod. Pathol. 16(12) (2003) 1257-1264. Matsuda H., Kitamura Y., Effect of c-kit mutation on prognosis of gas-
[17] Mazur M.T., Clark H.B., Gastric stromal tumors, Reappraisal of his- trointestinal stromal tumors, Cancer Res. 59(17) (1999) 4297-4300.
togenesis, Am. J. Surg. Pathol. 7(6) (1983) 507-519. [25] Theou-Anton N., Tabone S., Brouty-Boye D., Saffroy R.,
[18] Miettinen M., Majidi M., Lasota J., Pathology and diagnostic criteria Ronnstrand L., Lemoine A., Emile J.F., Co expression of SCF and KIT
of gastrointestinal stromal tumors (GISTs): a review, Eur. J. Cancer 38 in gastrointestinal stromal tumours (GISTs) suggests an autocrine/para-
Suppl 5 (2002) S39-51. crine mechanism, Br. J. Cancer 94(8) (2006) 1180-1185.
[19] Monges G., Coindre J.M., Scoazec J.Y., Bouvier A., Blay J.Y., Loria- [26] van de Rijn M., Hendrickson M.R., Rouse R.V., CD34 expression
Kanza Y., Mathieu-Boue A., Bisot-Locard S., Incidence of gastrointesti- by gastrointestinal tract stromal tumors, Hum. Pathol. 25(8) (1994) 766-
nal stromal tumors (GISTs) in France: results of the PROGIST survey 771.
conducted among pathologists, J. Clin. Oncol. ASCO 2007, Ann. Meet. [27] Van Glabbeke M., Owzar K., Rankin C., Simes J., Crowley J., GIST
Proc., Part I, Vol. 25,18S, 2007, 10047. Meta-analysis Group (MetaGIST) Comparison of two doses of imatinib
[20] Nilsson B., Bumming P, Meis-Kindblom J.M., Oden A., Dortok A., for the treatment of unresectable or metastatic gastrointestinal stromal
Gustavsson B., Sablinska K., Kindblom L.G., Gastrointestinal stromal tumors (GIST): a meta-analyis based on 1 640 patients, J. Clin. Oncol.
tumors: the incidence, prevalence, clinical course, and prognostication ASCO 2007, Ann. Meet. Proc., Part I, Vol. 25, 18S, 2007, 1 000.
in the preimatinib mesylate era-a population-based study in western [28] Yantiss R.K., Rosenberg A.E., Sarran L., Besmer P., Antonescu
Sweden, Cancer 103(4) (2005) 821-829. C.R., Multiple gastrointestinal stromal tumors in type I neurofibromatosis:
[21] Nishida T., Hirota S., Taniguchi M., Hashimoto K., Isozaki K., a pathologic and molecular study, Mod. Pathol. 18(4) (2005) 475-484.
Nakamura H., Kanakura Y., Tanaka T., Takabayashi A., Matsuda H., [29] Went P.T., Dirnhofer S., Bundi M., Mirlacher M., Schraml P.,
Kitamura Y., Familial gastrointestinal stromal tumours with germline Mangialaio S., Dimitrijevic S., Kononen J., Lugli A., Simon R., Sauter G.,
mutation of the KIT gene, Nat. Genet. 19(4) (1998) 323-324. Prevalence of KIT expression in human tumors, J. Clin. Oncol. 22(22)
[22] Pasini B., McWhinney S.R., Bei T., Matyakhina L., Stergiopoulos S., (2004) 4514-4522.
Muchow M., Boikos S.A., Ferrando B., Pacak K., Assie G., Baudin E., [30] West R.B., Corless C.L., Chen X., Rubin B.P., Subramanian S.,
Chompret A., Ellison J.W., Briere J.J., Rustin P., Gimenez-Roqueplo Montgomery K., Zhu S., Ball C.A., Nielsen T.O., Patel R., Goldblum J.R.,
A.P., Eng C., Carney J.A., Stratakis C.A., Clinical and molecular genetics Brown P.O., Heinrich M.C., van de Rijn M., The novel marker, DOG1, is
of patients with the Carney-Stratakis syndrome and germline mutations expressed ubiquitously in gastrointestinal stromal tumors irrespective of
of the genes coding for the succinate dehydrogenase subunits SDHB, KIT or PDGFRA mutation status, Am. J. Pathol. 165(1) (2004) 107-113.

58 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2008 - N°398

Vous aimerez peut-être aussi