9782807306202

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MANAGEMENT

Jean-Pierre BOUCHEZ

L’entreprise
à l’ère du digital
Les nouvelles pratiques collaboratives

Avec des
témoignages
d’experts et
de praticiens
L’entreprise
à l’ère du digital
Les nouvelles pratiques
collaboratives

« Jean-Pierre Bouchez est un récidiviste, un brillant récidiviste. 


Après L’Économie du Savoir, le voici qui, avec le talent pédagogique 
qu’on lui connait, poursuit sa réflexion sur la place du savoir 
dans le développement des entreprises. À l’heure où les accords de Lisbonne sont
reconnus comme un échec patent, à une époque où le knowledge management
prend trop souvent dans les entreprises l’allure d’une mélopée incantatoire, 
Jean-Pierre Bouchez nous redonne le moral par ses analyses rigoureuses : 
il sait nous convaincre qu’à l’heure du digital, le savoir, source incontestable 
de compétitivité, impose aux entreprises un usage renouvelé 
de pratiques collaboratives structurées et maitrisées. »
Bernard Ramanantsoa
La collection Méthodes & Recherches poursuit un double objectif :
• présenter en langue française des états de l’art complets sur des thèmes de recherches
contemporains mais également pratiques, d’intérêt et de niveau international.
• réunir des auteurs et des lecteurs de divers champs disciplinaires (économistes, gestion-
naires, psychologues et sociologues…) et les aider à communiquer entre eux.
Rico Baldegger, avec la collaboration de Marilyne Pasquier, Le management dans un envi-
ronnement dynamique. Concepts, méthodes et outils pour une approche systémique
Christophe Assens, Le management des réseaux. Tisser du lien social pour le bien-être économique
Rémi Barré, Bastiaan de Laat, Jacques Theys (sous la direction de), Management de
la recherche. Enjeux et perspectives
Nicole Barthe, Jean-Jacques Rosé (sous la direction de), RSE. Entre globalisation et déve-
loppement durable
Emmanuel Bayle, Jean-Claude Dupuis (sous la direction de), Management des
entreprises de l’économie sociale et solidaire. Identités plurielles et spécificités
Maxime Bellego, Patrick Légeron, Hubert Ribéreau-Gayon (sous la direction de),  
Les risques psychosociaux au travail. Les difficultés des entreprises à mettre en place des
actions de prévention
Soumaya Ben Letaifa, Anne Gratacap, Thierry Isckia (Éd.), Understanding Business
Ecosystems. How Firms Succeed in the New World of Convergence?
Michelle Bergadaà, Marine Le Gall-Ely, Bertrand Urien (sous la direction de),  
Don et pratiques caritatives
Jean-Pierre Bouchez, L’économie du savoir. Construction, enjeux et perspectives
Jean-Pierre Bouchez, L’entreprise à l’ère du digital. Les nouvelles pratiques collaboratives
Denis Cristol, Catherine Laizé, Miruna Radu Lefebvre (sous la direction de),  
Leadership et management. Être leader, ça s’apprend !
Nathalie Delobbe, Olivier Herrbach, Delphine Lacaze, Karim Mignonac
(sous la direction de), Comportement organisationnel - Vol. 1. Contrat
psychologique, émotions au travail, socialisation organisationnelle
Xavier Deroy (sous la direction de), Formes de l'agir stratégique
Michel Dion (sous la direction de), La criminalité financière. Prévention, gouvernance et
influences culturelles
Jean-Claude Dupuis, Économie et comptabilité de l’immatériel
Assâad El Akremi, Sylvie Guerrero, Jean-Pierre Neveu (sous la direction de), Comportement
organisationnel - Vol. 2. Justice organisationnelle, enjeux
de carrière et épuisement professionnel
Alain Finet (sous la direction de), Gouvernance d’entreprise. Nouveaux défis financiers
et non financiers
Anne Gratacap, Alice Le Flanchec (sous la direction de), La confiance en gestion.
Un regard pluridisciplinaire
Denis Guiot, Bertrand Urien (sous la direction de), Comprendre le consommateur âgé.
Nouveaux enjeux et perspectives
Thomas Lagoarde-Segot, La finance solidaire. Un humanisme économique
Patrice Laroche (sous la direction de), La méta-analyse. Méthodes et applications en
sciences sociales
Alain Maes, Le management intégrateur. Fondements, méthodes et applications
Denis Monneuse, Le surprésentéisme. Travailler malgré la maladie
Claude Rochet, Politiques publiques. De la stratégie aux résultats
Claude Rochet, Michel Volle (sous la direction de), L’intelligence iconomique. Les nouveaux
modèles d’affaires de la 3e révolution industrielle
Jean-Jacques Rosé (sous la direction de), Responsabilité sociale de l'entreprise.
Pour un nouveau contrat social
Jacques Rojot, Patrice Roussel, Christian Vandenberghe (sous la direction de),
Comportement organisationnel - Vol. 3. Théories des organisations, motivation au travail,
engagement organisationnel
Patrice Roussel, Frédéric Wacheux (sous la direction de), Management des ressources
humaines. Méthodes de recherche en sciences humaines et sociales
Sylvie Saint-Onge, Victor Haines (sous la direction de), Gestion des performances au travail.
Bilan des connaissances
Stéphane Saussier (sous la direction de), Économie des partenariats public-privé.
Développements théoriques et empiriques
Laurent Taskin et Matthieu de Nanteuil (sous la direction de), Perspectives critiques en
management. Pour une gestion citoyenne
Sylvie Trosa, La crise du management public. Comment conduire le changement ?
Bénédicte Vidaillet, Véronique d'Estaintot, Philippe Abecassis (sous la direction de),  
La décision. Une approche pluridisciplinaire des processus de choix
Saïd Yami, Frédéric Le Roy (sous la direction de), Stratégies de coopétition. Rivaliser
et coopérer simultanément
Jean-Pierre BOUCHEZ

L’entreprise
à l’ère du digital
Les nouvelles pratiques
collaboratives
Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine
de spécialisation, consultez notre site web : http://www.­deboecksuperieur.com

© De Boeck Supérieur s.a., 2016 1re édition


Rue du Bosquet, 7 – B1348 Louvain-la-Neuve

Tous droits réservés pour tous pays.


Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment
par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker
dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque
forme et de quelque manière que ce soit.

Imprimé aux Pays-Bas

Dépôt légal : 
Bibliothèque nationale, Paris : octobre 2016 ISSN 1781-4944
Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2016/13647/166 ISBN 978-2-8073-0620-2
Sommaire

Remerciements................................................................................................. 7
Introduction générale
Une approche pluridisciplinaire fondée
sur un double regard combiné : académique et opérationnel......... 9
Plan de l’ouvrage..................................................................... 10

Partie 1
La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques
Chapitre 1
Le savoir, ses concepts, ses  enjeux et sa dynamique................................. 15

Chapitre 2
La capitalisation et ses usages, comme forme structurante
de  la  gestion des savoirs.............................................................................. 49

Chapitre 3
La collaboration et ses usages, comme forme interactive
de la gestion des savoirs.............................................................................. 87

Partie 2
Le nouvel écosystème collaboratif de gestion du savoir
Chapitre 4
L’environnement numérique et  ses  vagues. ................................................. 155
6 L’entreprise à l’ére du digital

Chapitre 5
Le nouvel écosysteme collaboratif de gestion du savoir :
une typologie des pratiques fondée sur les usages..................................... 185

Chapitre 6
Gérer les contenus et évaluer les bénéfices attendus
du nouvel écosystème. ................................................................ 249

Bibliographie générale.................................................................................... 285

Liste des encadrés. ......................................................................................... 311

Liste des tableaux............................................................................................ 315

Liste des schémas............................................................................................ 317

Index................................................................................................................ 319
Table des matières........................................................................................... 321
Remerciements

Cet ouvrage a bénéficié des nombreux échanges et témoignages que j’ai pu


réaliser auprès de plus d’une trentaine de professionnels et d’experts de la gestion
des savoirs et de la transformation numérique.
Je souhaite en premier lieu remercier ceux qui ont accepté de me consacrer beau-
coup de temps, me recevant à plusieurs reprises, en me livrant très librement leurs
précieux témoignages, avec enthousiasme, réalisme et lucidité :
Olivier Amprimo (à l’époque chez L’Oréal), Hugues Dumont (CEA), Manon Enoc (Miche-
lin), Jean Louis Ermine (Institut Mines Telecom, Association pour la Gestion des
Connaissances dans la Société et les Organisations), Louis-­Pierre Guillaume (Schnei-
der Electric), Eric Laurent (La Poste), Ziryeb Marouf (Orange), Pierre Milcent (IBM),
Martin Roulleaux-­Dugage (AREVA).
Mes remerciements s’adressent également à de nombreux autres acteurs qui ont éga-
lement contribué à témoigner de leurs expériences et pratiques, faisant preuve tou-
jours d’une grande disponibilité :
Sarah Alezrah (Bouygues Telecom), Gilles Balmisse (Knowledge Angels), Frédéric
Beaufils (Sogeti), Philippe Bedu (EDF), Benoit Berthomme (L’Oréal), Claire Bussac
(Crédit Agricole), Florence Cariou (Engie), Fréderic Chauvin (Gemalto), Richard Col-
lin (Nextmodernity), Frédéric Creplet (Voirin consultants), Jérôme Dubois (BNP Pari-
bas), Aurélie Dudezert (Université de Poitiers), Myriam Gorlier (Groupe Auchan),
Michel Grundstein (Université Paris-­Dauphine), Béatrice Javary (Groupe Auchan),
Lucile Leclercq (Sogeti), Béatrice Le Moing (Schneider), Denis Meingan (Knowledge-
Consult), Nathalie Morand-­Khalifa (L’Oréal), Jérémie Moritz (Pernod Ricard), Philippe
Pinault (talkSpirit & holaSpirit), Jean-­Yves Prax (Polia Consulting), Alain Quinque-
neau (Engie), Alain Rayrole (Lecko), Isabelle Reyre (Arctus), Nicolas Rolland (AXA
France), Frédéric Vacher (Dassault System), Charlotte Wieder (Groupe SEB), Lamis
Zolhof (SNCF).
Aux dizaines de community managers et aux membres de communautés de pratique
avec qui j’ai pu librement dialoguer et échanger.
8 L’entreprise à l’ére du digital

Je tiens à remercier mon éditrice Dominique De Raedt, pour sa confiance et ses


conseils.
Sans le bénéfice de ces nombreux témoignages, cet ouvrage comporterait assuré-
ment un goût d’inachevé. Mais, bien sûr, selon la formule consacrée, je reste le seul
responsable de mes écrits…

À Léa, Jules, Manon et Zoé


Introduction générale

Nous nous proposons, à travers cet ouvrage, de décrire, d’analyser et d’illus-


trer l’entreprise à l’ère du digital en se centrant principalement sur les pratiques col-
laboratives fondées sur le savoir et leurs usages. Nous souhaitons ainsi mettre en
exergue la « valeur collaborative » qu’elles peuvent en retirer, tant dans le champ des
interactions sociales entre les personnes que dans celui du business au sens large.
La rencontre et la combinaison, singulièrement depuis une dizaine d’années, des
technologies numériques de type 2.0 et de l’économie du savoir offrent pour les orga-
nisations en général – sous réserve qu’elles sachent les saisir et les déployer – des
opportunités prometteuses en termes d’accroissement de leurs performances globales.

Une approche pluridisciplinaire fondée sur un double


regard combiné : académique et opérationnel
Afin de bien saisir les enjeux et les effets potentiellement bénéfiques de cette
rencontre, il nous paraît indispensable de proposer une approche globale et transver-
sale qui combine plusieurs dimensions : historique, sociologique, managériale et écono-
mique. À cet effet, de manière à étayer nos propos, nous avons effectué un travail qui
s’appuie sur un double regard complémentaire, celui d’un chercheur et d’un praticien.
Le regard du chercheur consistera à éclairer ce travail par des apports théoriques et
illustratifs permettant de mieux appréhender les pratiques collaboratives et coopé-
ratives au sein des organisations. Mais de manière complémentaire, ce regard sera
largement enrichi et également illustré par une investigation de terrain approfondie
menée auprès d’acteurs parties prenantes de la gestion du savoir, soit une vingtaine
de dirigeants et managers investis dans cette activité au sein de grandes organisa-
tions (qualifiés sous le terme générique de « directeurs de la gestion des connais-
sances ») ainsi qu’une dizaine d’experts représentant au total plus d’une cinquantaine
d’entretiens. Le regard du praticien consultant de l’auteur apportera une coloration
très opérationnelle et pragmatique à ces investigations académiques et de terrain.
10 L’entreprise à l’ére du digital

De par cette présentation et le double regard combiné, académique et opérationnel,


l’ouvrage s’adresse ainsi à un large lectorat : dirigeants, managers, professionnels et
chercheurs notamment. Cette double perspective entend souligner l’impérieuse néces-
sité d’une coopération plus poussée entre ces deux mondes qui s’ignorent encore
trop souvent. Puisse cet ouvrage contribuer modestement pour sa part, à renforcer
cette coopération !

Plan de l’ouvrage
L’ouvrage sera structuré en deux parties.
La première partie sera consacrée au déploiement de la « gestion du savoir » de
manière à planter en quelque sorte le décor. Elle comportera à cet effet trois cha-
pitres.
Le premier chapitre, intitulé « Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique »,
nous permettra d’éclairer ce terme particulièrement flou et polysémique en précisant
ses formes et ses caractéristiques. Il pourra alors être mis en perspective au regard
de l’économie fondée sur le savoir de manière à en saisir les enjeux, la dynamique
et les pratiques.
Le deuxième chapitre, intitulé « La capitalisation et ses usages, comme forme struc-
turante de la gestion du savoir », de nature plutôt formelle, proposera un survol his-
torique des pratiques de capitalisation, puis abordera et développera les démarches
associées au versant du knowledge management.
De manière complémentaire, le troisième chapitre, intitulé « La collaboration et ses
usages, comme forme interactive de la gestion du savoir », présentera l’autre ver-
sant, celui de la « collaboration » fondée sur la « socialisation », notamment à travers
l’échange de pratiques. Partant d’un point de vue historique mais aussi sociologique
sur les approches de nature collaborative, il se focalisera ensuite plus spécifiquement
sur les réseaux sociaux et les communautés de pratique qui se déploient dans les
entreprises. La rencontre de ces deux versants (la « capitalisation » autour de savoirs
de type « formel » et la « collaboration » plus proche de « pratiques »), pourra alors
s’opérer dans le cadre « d’un nouvel écosystème collaboratif de gestion du savoir ».
La seconde partie de l’ouvrage mettra donc précisément en musique la dynamique
de ce « nouvel écosystème collaboratif fondé sur la gestion du savoir ». Trois nou-
veaux chapitres y seront également consacrés.
Le quatrième chapitre intitulé « L'environnement numérique et ses vagues » décrira
son cadre général et ses évolutions.
Le cinquième chapitre, intitulé « Le nouvel écosystème collaboratif de gestion du
savoir », présentera et illustrera concrètement ce nouvel écosystème tendant à com-
biner, d’une part, les logiques de « capitalisation » fondées sur le knowledge mana-
gement et les savoirs « formels » et d’autre part, les logiques de « collaboration »
reposant notamment sur les réseaux sociaux d’entreprise (RSE) et les communautés
de pratique (CoPs).
Quatre modèles types dominants de gestion du savoir fondés sur les usages mobili-
sés par les entreprises seront alors proposés, décrits et illustrés. Ils seront issus du
Introduction générale 11

croisement de deux axes : d’une part, horizontalement, de la logique de « capitali-


sation/savoirs » formels à la logique de « collaboration/pratiques », et d’autre part,
verticalement, de la logique de « flux » à la logique de « stock ». Ces modèles types
sont qualifiés de People centric (flux/collaboration), Heavy content centric (stock/capi-
talisation), Knowledgeable people centric (flux/ capitalisation), Soft content centric
(stock/collaboration). Ils permettront aux entreprises de se positionner en déployant
une stratégie pertinente et efficace de gestion des savoirs. Pour les visualiser d’em-
blée, on peut se reporter au schéma n° 4 de la présentation de la deuxième partie
de cet ouvrage, page 154.
Enfin, le sixième et dernier chapitre intitulé « Gérer les contenus et évaluer les béné-
fices socio-­économiques » attendus par ce nouvel écosystème se proposera d’appor-
ter des réponses concrètes à ces deux problématiques particulièrement complexes.
Il décrira et illustrera notamment à ce titre les différents modèles pratiques mobili-
sés par les entreprises, et mettra en exergue les bénéfices socio-­économiques poten-
tiels et la « valeur collaborative » issus de cette dynamique.
L’ouvrage se conclura par une triple perspective combinée en mettant en exergue les
enjeux auxquels elles sont confrontées. La première portera sur l’articulation entre
ordre et désordre. La deuxième, sur la question du don et du contredon. Enfin, la der-
nière proposera deux scénarios, soulignant l’une des problématiques de cette transfor-
mation digitale et culturelle. Le premier scénario, sur lequel nous entendons tabler,
se réfère au besoin renouvelé d’expression d’idées et de pratiques dans le cadre d’un
esprit communautaire, au moment où l’on assiste à une forme d’épuisement d’un
cycle managérial marqué notamment par une profusion de dispositifs de contrôle
et de process. Le second, de nature plus sombre ou grise, se traduit par la mise en
exergue de la transformation numérique simplement comme une forme avancée du
travail collaboratif, reléguant pour partie cet esprit communautaire à l’arrière-­plan.
PARTIE  1

La gestion du savoir :
concepts, enjeux et pratiques

SOMMAIRE

Chapitre 1 Le savoir, ses concepts, ses enjeux


et sa dynamique 15
Chapitre 2 La capitalisation et ses usages,
comme forme structurante
de la gestion des savoirs 49
Chapitre 3 La collaboration et ses usages,
comme forme interactive de la gestion
des savoirs 87
14 L’entreprise à l’ére du digital

Comme indiqué, cette première partie qui plantera en quelque sorte le décor
est illustrée par le schéma qui suit. Elle comportera trois chapitres.
–– Le premier chapitre clarifiera ce terme et le mettra en perspective au regard
de l’économie fondée sur le savoir.
–– Le deuxième chapitre figure sur la partie bas/gauche du schéma.
–– Le troisième chapitre figure sur la partie bas/droit du schéma.
La rencontre de ces deux versants, fondés sur la « capitalisation » et la « collabora-
tion », pourra alors s’opérer dans le cadre d’un « nouvel écosystème collaboratif de
gestion du savoir » qui apparaît encadré dans l’ovale au sommet du schéma.

Nouvel écosystème
collaboratif de gestion
du savoir :
convergence et
réconciliation

Milieu des années 2000

Logique de capitalisation Logique de collaboration

Schéma n° 1 — Vers la rencontre et la combinaison des logiques de capitalisation


et de collaboration.
Chapitre 1

Le savoir, ses concepts,


ses enjeux et sa dynamique

Sommaire

1. Savoir, connaissances et compétences…


question de sémantique 16

2. Les formes et les typologies de savoirs 22

3. L’économie du savoir 32
16 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

Ce premier chapitre comporte trois parties. La première va nous conduire à


éclairer la notion de savoir, particulièrement floue, polysémique et protéiforme. La
seconde partie nous conduira à affiner cette notion en nous focalisant sur les formes
et les typologies qui lui sont associées. La troisième partie pourra alors être plus lar-
gement consacrée à l’économie du savoir, singulièrement dans la période postindus-
trielle, en se focalisant particulièrement sur ses dynamiques et ses enjeux.

1.  SAVOIR, CONNAISSANCES ET COMPÉTENCES…


QUESTION DE SÉMANTIQUE
Cette première partie apportera ainsi un éclairage sur ce terme de savoir en
présentant ses deux acceptions combinées, sur la base desquelles nous nous référe-
rons dans cet ouvrage. La première renvoie à une conception objectivée et légitimée,
la seconde à une conception extensive et hiérarchique de composantes combinées.
Auparavant, nous ferons une rapide incursion sur les termes français en anglo-­saxon,
mobilisés à cet effet.

Ouverture : savoir or knowledge ?

On en conviendra aisément, le terme de savoir fait l’objet de confusions récur-


rentes avec celui de connaissance, y compris parmi certains chercheurs qui emploient
indifféremment ces deux notions. La langue française en effet, comme les langues
espagnoles et allemandes1, proposent l’usage de deux termes distinctifs, savoir et
connaissance, alors que la langue anglaise ne mobilise qu’un seul terme, celui de
knowledge. Dominique Foray (2004), spécialiste reconnu de l’économie de la connais-
sance, souligne que le terme français de savoir peut être converti en anglais en y
adjoignant le qualificatif certifié (certified knowledge), cela au regard de la légiti-
mation par un référentiel institutionnel (tel qu’une épreuve d’évaluation validée par
des pairs) ; référentiel qui ne serait pas exigé, selon lui, s’agissant de la connais-
sance (knowledge). D’autres auteurs (Ferrary et Pesqueux, 2006) rappellent que les
travaux anglo-saxons sont également très riches de distinction entre abilities (pouvoir
de faire quelque chose), capacities (potentiel permettant de faire quelque chose) et
capabilities (pouvoir remplir des objectifs attribués, cette notion étant inscrite dans
une perspective téléologique). Ces mêmes auteurs mentionnent également les skills
qui indiquent la capacité à mobiliser « la » bonne attitude, au « bon » moment, et
au « bon » endroit.

1.1. Une conception « objectivée » et « légitimée » par  extériorité

Cette première acceptation se réfère ainsi à la légitimation par les pairs ou


par une autorité considérée comme légitime.

1  Les Espagnols et les Allemands distinguent également les deux termes de savoir et connais-
sance (« Kenntnis » et « conoter »)
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 17

1.1.1  Le savoir comme composante cognitive formelle


et « objectivée »
Le savoir peut être appréhendé comme une composante cognitive formelle,
d’une certaine manière extérieure à la personne et relativement objectivable, mais
faisant l’objet d’une reconnaissance répondant à un certain nombre d’exigences. Il
est appréhendé et considéré comme « objet manipulable » (Cristol, 2014), tel un
diplôme. En pratique, cette reconnaissance est attribuée soit par des pairs, ou des
personnes extérieures habilitées et qualifiées, sur la base d’un référentiel d’exigences.

1.1.2  Le référentiel et ses formes


Le référentiel à atteindre et à valider est susceptible de prendre plusieurs
formes. Il peut être ainsi constitué par l’obtention d’un diplôme académique ou pro-
fessionnel reconnu (un BTS, une maîtrise, un master, etc.), dans telle ou telle dis-
cipline. Il peut être également associé une certification (constituant elle-­même une
reconnaissance associée à une épreuve validée, dans un domaine particulier), ou
d’une habilitation explicitement exigée pour accomplir certaines activités profession-
nelles. Dans un registre assez proche, Beillerot (2005) souligne que ce terme fait
référence aux énoncés et aux procédures socialement constitués et reconnus dans un
groupe donné, à une période donnée. Dans les grandes firmes technologiques, cette
reconnaissance et cette légitimation est attribuée par des statuts distinctifs comme
les Fellows.

Encadré 1 : Les fellows et les experts au sein des grandes firmes technologiques

On présentera successivement les fellows associés principalement aux grandes firmes


technologiques anglo-­saxonnes et les experts plus spécifiquement attachés aux grandes
firmes françaises de même nature. On observera, dans ce dernier cas, que le plus haut
niveau d’expertise est analogue de fait à celui de fellow.

FELLOWS D’ENTREPRISES TECHNOLOGIQUES ANGLO-­SAXONNES


Un certain nombre d’entreprises d’origine anglo-­saxonne ont créé des postes particuliers,
destinés à des personnalités scientifiques de très haut niveau, qui bénéficient en général
d’une large autonomie ainsi que d’importantes ressources pour poursuivre leur recherche.
IBM, entreprise pionnière
Ainsi, dans cette firme, le programme des fellows a été fondé dès  1962 par son
président, Thomas Watson Jr., comme un moyen de promouvoir la créativité chez
les professionnels techniques « les plus exceptionnelles » de l’entreprise. Les premières
nominations ont été effectuées en 1963. Francis E. Hamilton est considéré comme le
premier IBM Fellow, nommé en 1963 notamment pour son travail sur le développe-
ment de l’IBM  650.
Parmi les autres sociétés pionnières, il faut également citer  : Intel, Sun Microsystems,
Bell Labs, Microsoft, Google et Boston Scientific (appareils médicaux). Ces postes de
fellows correspondent au grade le plus élevé que l’on peut atteindre dans une carrière
technique ou scientifique. Certaines entreprises françaises, comme Schneider, mobilisent
d’ailleurs un processus analogue.
18 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

Des critères de sélection très rigoureux


Ils ne prennent en compte que les réalisations techniques et scientifiques et les publica-
tions de nature académique les plus significatives. Ainsi, chez IBM, c’est souvent une
petite dizaine de personnalités qui sont ainsi nommées annuellement par le PDG de
la compagnie. Cinq d’entre elles, depuis la création de ce programme, se sont vues
décerner un prix Nobel. Par ailleurs, depuis 1989, IBM dispose d’une « académie
des technologies » propre regroupant 800 experts de tous niveaux. Ses 80 experts les
plus gradés ont accès à la totalité des moyens en termes de développement techno-
logique (IBM, 2011).

LA GESTION DES EXPERTS AU SEIN DE GRANDES FIRMES FRANÇAISES


À ORIENTATION TECHNOLOGIQUE : LE CAS DE LA « DOUBLE ÉCHELLE »
DANS LES SECTEURS DE LA R&D
C’est principalement au sein des départements Recherche & Développement des grandes
firmes de hautes technologies que s’est mis en place, il y a environ une trentaine d’an-
nées, le dispositif de la « double échelle » (ou « échelle double »), visant à gérer la
carrière des spécialistes et des experts (le plus souvent au départ des chercheurs), au
regard de celle des managers.
Le principe de la « double échelle »
Son principe consiste à ce que ces populations bénéficient d’un positionnement et d’une
classification équivalente, parallèlement à celui de la filière hiérarchique, permettant
un alignement équitable (notamment sur le plan de la politique de rémunération), au
regard de celle des managers. Ces deux populations jouissent ainsi théoriquement de
la même reconnaissance et peuvent potentiellement avoir accès aux plus hauts niveaux
de responsabilité de l’organisation.
Naturellement pour ces firmes, les experts représentent un avantage compétitif consé-
quent, d’où la nécessité impérative de les identifier et de les reconnaître afin d’assurer
leur développement professionnel. Chez Thales, par exemple, il existe quatre niveaux
de responsabilité des experts : Spécialiste, Expert, Expert senior et Thales fellow expert.
C’est un Expert Committee qui statue sur la candidature, l’officialisation pour les deux
plus hauts niveaux étant formalisée par une lettre du Directeur Technique du groupe.
On notera ainsi l’usage du terme de fellow au plus haut niveau de l’échelle d’exper-
tise. De même, Air Liquide, pour sa part, possède quatre niveaux groupe dont les
deux derniers sont qualifiés de fellow et de senior fellow (Lauzol et Jonquière, 2015).
Des critères d’évaluation discriminants
Le plus souvent d’ordre qualitatif, ces critères sont en pratique les suivants : l’étendue et
la profondeur des compétences, la largeur du champ d’action et de réflexion, la capa-
cité à innover, l’importance de l’impact sur l’entreprise, le niveau de reconnaissance
et de notoriété, l’aptitude à communiquer dans toutes ses formes (colloques, produc-
tions expertes, transferts de compétences, etc.), la capacité à transférer les savoirs et
à enrichir le savoir collectif. Les experts reconnus et positionnés au plus haut niveau
bénéficient de fait donc d’un statut quasi analogue à celui des fellows.

(Sources : Wikipédia et sites des entreprises citées.)

Le savoir, dans cette perspective, constitue ainsi une référence formellement légiti-
mée par des pairs et socialement reconnue. Nous préférons ainsi mobiliser le terme
de savoir plutôt que de connaissance, pour des raisons qui vont être développées
dans la deuxième acception.
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 19

1.2. Une conception extensive de composantes combinées,


articulées, hiérarchisées et récursives

La deuxième acception à caractère extensive que nous proposons dans nos


différents écrits (Bouchez, 2008 ; 2012 ; 2015) consiste à présenter le concept de
savoir à travers quatre éléments liés (voir tableau 1) : ses composantes, son domaine,
sa nature et sa valeur.

1.2.1  Les composantes


Elles se déploient le long d’un continuum hiérarchisé et combiné, imbriquées
et entremêlées, qui s’échelonne successivement des « données » aux « informations »,
puis des « connaissances et compétences » aux « expertises ». Leur combinaison
est liée au fait, par exemple, que la détention d’une expertise reconnue se nourrit
interactivement et largement des autres composantes. Dans cette perspective, les
connaissances constituent donc une des composantes du savoir. Cet aspect combi-
natoire est valable pour tous ces éléments. Le tableau qui suit suggère un certain
nombre de définitions et d’illustrations.

Description
Éléments factuels, bruts, neutres et objectifs (associés à un instrument de
mesure standard), unitaires et autonomes, servant de base à un raisonnement
ou à la réalisation des traitements. De nos jours, les données numériques sont
devenues particulièrement volumineuses et susceptibles de faire l’objet d’une
Données

exploitation à travers l’usage combiné des algorithmes et de l’informatique.


La notion de big data s’est imposée ces dernières années pour rendre compte de
ce phénomène.
Illustration
Le bénéfice de l’entreprise Brain Services pour l’année 2015 avec le client Y est
égal à 50 000 €.

Description
Ensemble de collection de données structurées et organisées pour donner
Informations

de la forme, du sens et du lien à un message.


Illustration
Transformer une donnée en information utile, c’est connaître ce même bénéfice
de la société Brain Services (50 000 € en 2015), puis celui de l’année 2014
(par exemple 60 000 €), voire ceux d’autres années antérieures, ainsi que
leur décomposition.
20 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

Description
Nouvelles informations acquises par un processus intelligent, générant
une capacité à raisonner.
Formes
Les connaissances peuvent être explicites (savoir-­faire repérables, formalisables
Connaissances

et reproductibles, le plus souvent attachés aux organisations et plus proche de


l’information) ou tacites (savoir-­faire attachés aux personnes ou aux groupes,
difficilement codifiables).
Illustrations
Connaissance explicite : produit méthodologique commercialisable faisant partie
du patrimoine d’une firme de conseil, conçu et amélioré au fil du temps par un
groupe de travail pluridisciplinaire.
Connaissance tacite : capacité d’une personne à maîtriser un « tour de main »
ou une pratique complexe, reposant sur une accumulation d’expériences.

Description
Elles prennent appui sur la capacité à mobiliser des connaissances combinées
avec de l’expérience en se centrant plus délibérément vers la réalisation d’actions
Compétences

utiles et réussies dans un contexte donné. On emploie aussi l’expression plus


ramassée de « savoir-­faire opérationnel validé ».
Les pratiques empruntent le plus souvent aux compétences et aux savoirs
tacites.
Illustration
Réaliser un diagnostic sur le dysfonctionnement d’un système technique
classique, et mettre en œuvre les recommandations issues du diagnostic.

Description
Elles constituent un degré approfondi ou d’une compétence, généralement
Expertises

centrées dans un domaine où une discipline particulière.


Illustration
Résoudre un problème complexe ne pouvant être appréhendé dans l’exercice
professionnel normal (exemple : conception et réalisation d’un montage financier
particulièrement complexe et innovant).

Tableau 1 — Les composantes hiérarchisées et combinées du savoir

1.2.2  Le domaine
Il se déploie le long d’un espace public composé d’une quantité considérable
de données et d’informations, largement accessibles, de plus en plus numérisées, vers
un espace de plus en plus privatif car attaché à des personnes (c’est le cas de l’ex-
pertise, mais aussi de compétences dites tacites). Leur accessibilité pour des tiers,
dans ce dernier cas, est donc moins aisée et plus complexe.
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 21

1.2.3  La nature et la forme


Elle s’étend d’une forme plutôt explicite (qu’il s’agisse particulièrement des
informations et des connaissances dites explicites) vers une forme tacite (on parle
alors typiquement de connaissances tacites, mais aussi parfois d’expertises). En réa-
lité, comme cela a été souligné, l’expertise se nourrit des autres éléments (données,
informations, connaissances, compétences). Mais cette distinction permet de sou-
ligner d’ores et déjà que le transfert des connaissances tacites est plus long, plus
coûteux et plus complexe que celui des connaissances explicites.

1.2.4  La valeur
Cette valeur d’usage du savoir (notamment en termes marchands) suit parallèle-
ment et logiquement une progression croissante, en liaison avec le déplacement vers la
sphère privée, c’est-­à-­dire vers les expertises. Plus précisément, la valeur économique du
savoir peut s’appréhender en mobilisant trois facteurs : son utilité (c’est-­à-­dire sa pro-
pension à être exploitée et à être commercialisée), sa rareté et sa complexité. On peut
donc de manière simplifiée et raccourcie établir la formule qui suit :
Valeur économique du savoir = F (utilité × rareté × complexité)

Dans sa forme la plus aboutie, cette valeur est donc associée à des enjeux souvent
cruciaux pour l’entreprise qui la mobilise pour son propre usage pour la commer-
cialiser sur le marché à travers son incorporation dans des biens ou des services.
Cette valeur renvoie à la notion du rapport au savoir qui sera abordée au chapitre v.
Il faut cependant affiner valeur globale du savoir, en considérant que certaines de ses
composantes peuvent comporter en elles-­mêmes une valeur spécifique. Ainsi, le traite-
ment des mégadonnées (big data) permet, par exemple, de transformer les données et
informations (tels les profils des clients sur la toile ou les commentaires sur les réseaux
sociaux) en indicateurs pertinents. Ceux-­ci offrent aux entreprises la possibilité de déve-
lopper leur activité en décelant ainsi les attentes des consommateurs. De même, s’agis-
sant de l’information, on considérera que sa valeur est d’autant plus forte qu’elle est
précise, spécifique, utile, interprétable, finalisée, voire confidentielle. Cela est d’autant
plus vrai que l’infobésité tend à rendre l’information pertinente moins aisée à repérer.

Connaissances/
Composantes Données Informations Expertise
Compétences

Domaine Public Privé

Nature Explicite Tacite

Valeur(usages) + Faible + Forte

Tableau 2 — Perspective extensive et hiérarchique du savoir


22 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

2.  LES FORMES ET LES TYPOLOGIES DE SAVOIRS


Le savoir comporte naturellement de multiples formes. Par convention, nous
conserverons les différentes appellations habituellement associées à ces distinc-
tions, que ce soit en français (savoirs et connaissances) qu’en anglais (knowledge).

2.1. Les formes de savoir

Nous distinguerons successivement plusieurs formes, en respectant au pas-


sage le terme de « savoir » ou de « connaissance » qui leur sont le plus fréquem-
ment associés. Nous observerons sous forme de synthèse que ces distinctions sont
en définitive le plus fréquemment non exclusives et combinatoires.

2.1.1  Connaissances tacites et connaissances explicites


Curieusement, cette première distinction capitale, bien connue des chercheurs,
est peu prise en compte, au moins formellement, par les entreprises.

Les connaissances tacites

Si l’on peut trouver les références implicites chez l’économiste Marshall (1962
[1890]), lequel mobilisait le terme « d’emploi idiosyncrasique », ce type de connais-
sances a été surtout mis en évidence par Polanyi (1966) qui utilise une formule
lapidaire et illustrative devenue célèbre : we know more than we can tell, pour illus-
trer les tacit knowledge. En d’autres termes, les connaissances tacites (proches des
compétences tacites, mais moins orientées vers l’action), sont attachées à des per-
sonnes qui en sont en quelque sorte « propriétaires ». Elles se réfèrent à des savoirs
et savoir-­faire forgés dans la durée à travers l’accumulation d’expériences, tout en
reposant souvent au moins sur un minimum de substrat théorique.

Les connaissances explicites

Se positionnant d’une certaine manière en contrepoint des précédentes, elles


se réfèrent à des savoirs aisément formalisables, codifiables et donc réutilisables
par autrui et, partant, plus aisément transmissibles que les connaissances tacites.
En pratique, elles sont souvent plus attachées à une organisation (exemple : un dis-
positif méthodologique relativement standardisé, conçu et utilisé par un cabinet de
conseil et régulièrement mobilisé par les consultants). D’une certaine manière, elles
se positionnent entre l’information et les connaissances tacites. Naturellement, ces
deux formes ne sont jamais dissociées ni exclusives l’une de l’autre. Elles se com-
binent, coexistent et participent à la création de connaissances organisationnelles
(Nonaka, 1994). En d’autres termes, une connaissance explicite ne peut être totale-
ment disjointe d’une connaissance tacite et réciproquement.

Le régime économique de ces deux types de connaissances

Ainsi que le soulignent Ferrary et Pesqueux (2006), lorsque la connaissance


est « déshumanisable » au sens où elle est rendue explicite (sous la forme d’une
codification, d’une formalisation ou d’une informatisation), le bien échangé est alors
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 23

constitué par la connaissance elle-­même. Par contre, lorsque la connaissance est


tacite, donc difficilement détachable de la personne qui l’a accumulée, alors le mar-
ché du travail est celui sur lequel s’échange la connaissance.
Par ailleurs, le processus de codification des connaissances est souvent long et com-
plexe, et donc coûteux. Mais sa réutilisation (qui comporte nécessairement certaines
dégradations) génère des économies pour l’organisation. Toutefois, la durée de vie
des connaissances explicites dans un contexte environnemental mouvant et souvent
instable peut être brève compte tenu de son obsolescence.

2.1.2  Savoirs manuels et savoirs intellectuels


Cette distinction puise largement sa source dans la différenciation sociale,
culturelle et symbolique, qui remonte à l’Antiquité, entre les « arts libéraux » et les
« arts mécaniques ». Pour décrire de manière très ramassée et succincte cette distinc-
tion, rappelons que durant des siècles, elle a été largement entretenue et « étayée »,
en particulier par des philosophes et des religieux. Le philosophe Bacon (1620),
considéré comme l’un des pionniers de la société scientifique moderne, fut l’un des
premiers à revendiquer clairement la valeur cognitive des « arts mécaniques ». L’En-
cyclopédie participa également largement à la réhabilitation des « arts mécaniques »,
mais après la Révolution française, les débats sur cette distinction se poursuivront,
avec le célèbre juriste Raymond Théodore Troplong (1840), s’appuyant sur son pres-
tigieux prédécesseur Pothier. Il convient de souligner que, de nos jours, les « hono-
raires » des professionnels restent encore socialement plus prestigieux que la notion
de « salaires », en référence à la subordination juridique vis-­à-­vis d’un employeur.
Des travaux récents de chercheurs, tels Sennett (2008), Halleux (2009), ont montré
les limites de cette distinction, notamment dans certaines activités. Le premier cité
a particulièrement bien analysé le lien entre la tête et les mains chez trois sortes
d’artisan : les musiciens, les cuisiniers et les souffleurs de verre. On peut plus glo-
balement considérer que le savoir des artisans constitue une composante éminente
du savoir global combinant intelligence pragmatique et conceptuelle. Le chercheur
Paris (2010) illustre également cette totalité dynamique, qu’il s’agisse de grands
restaurateurs, de créateurs de parfums ou de mode, etc. De manière plus générale,
on peut considérer que la main prolonge en quelque sorte le cerveau, de même que
l’outil prolonge la main, mais le cerveau et les sens pilotent bien l’ensemble.

2.1.3  Savoirs experts et savoirs profanes


On rendra compte ici sommairement du débat entre « experts » et « pro-
fanes » depuis quelques décennies. La distinction opérée repose sur l’idée selon
laquelle l’expertise ne serait pas exclusivement réservée à une élite scientifique qui
en détiendrait ainsi le quasi-­monopole. Les premières « controverses » remontent
aux décennies 1960 et 1970, notamment en Allemagne et aux États-­Unis. S’agis-
sant de la France, ce courant est alimenté au début des années 2000 par un cer-
tain nombre de chercheurs tels que Michel Callon, Pierre Lascoumes et Yannick
Barthe. Ils soulignent dans un ouvrage collectif (2001) que le développement des
sciences et des techniques n’apporte pas, dans la connaissance, nécessairement
plus de certitudes. Ce constat leur paraît particulièrement significatif dans le champ
24 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

de la santé et de l’environnement, générant ainsi de nombreuses « controverses »


publiques (prise de conscience des risques liés à l’effet de serre, aux OGM, aux
déchets nucléaires, etc.). Ils prônent le recours à ce qu’ils qualifient de « démo-
cratie dialogiste », en se prononçant pour une expertise pluraliste permettant une
large confrontation des points de vue. Prolongeant cette analyse, le sociologue
Flichy (2010) observe que l’on assiste à l’émergence du « pro-­am » (pour « pro-
fessionnel amateur »). Pour ne prendre qu’un seul exemple, le chercheur évoque
le recours à la pratique de la conférence dite « de consensus » qui constitue une
réelle opportunité pour tenter de répondre aux incertitudes rencontrées notam-
ment dans certains secteurs, en organisant le débat public au-­delà du seul Parle-
ment et du gouvernement. Ainsi, un véritable travail d’hybridation original entre
universitaires et citoyens amateurs, volontaires et représentatifs, conduit ces der-
niers à rédiger une série de recommandations destinées au pouvoir politique et
qui sont rendues publiques.
Globalement, tout laisse à penser, selon Flichy (2010), que le Web participatif contri-
buera à cette « révolution silencieuse », en ouvrant des perspectives de plus en plus
prometteuses au regard de cette hybridation des « pro-­am », les premiers n’ayant plus
le monopole de la légitimité. Dans cet esprit, Cohendet et al. (2006) soulignent que
le modèle de production de connaissances que nous avons exposé plaide pour une
vision où l’innovation émerge de plus en plus des interactions entre savoir scienti-
fique et savoir profane.
Naturellement, cette démarche comporte des limites. En particulier – pour s’en tenir
à l’essentiel – des questions restent en suspens. Par exemple : sur quoi se fonde véri-
tablement la légitimité de l’avis des « profanes » ? L’examen approfondi de toutes les
solutions possibles justifie-­t‑il finalement la mise en exergue d’un tel collectif ? Ne
constitue-­t‑elle pas finalement un prétexte ? Etc. Flichy (2010) souligne lui-­même
que « la science de plein air » n’est pas près de remplacer la « science en labora-
toire ». La question n’est pas tranchée, notre propos dans le cadre de cet ouvrage
étant de signaler cette forme d’hybridation du savoir.

2.1.4  Connaissances déclaratives et connaissances procédurales


Cette distinction entre ce type de connaissances a connu trois développe-
ments parallèles dans le champ cognitif dans les domaines de l’informatique, de la
psychologie et de la pédagogie (Désilets, 1997). Dans ce dernier cas, le modèle ACT
(Adaptative Control of Though) d’Anderson (1982) est le plus fréquemment référencé.
Pour cet auteur en effet, les connaissances déclaratives se réfèrent à un assemblage
d’informations indispensables pour générer une action, alors que les connaissances
procédurales renvoient à des habiletés que nous savons exécuter, constitué de procé-
dures de mise en œuvre de l’action. Dans la présentation faite par Gagné (1985) et
reprise ensuite par de nombreux auteurs en pédagogie, cette distinction a tendance
à se rapporter de plus en plus à l’objet de la représentation plutôt qu’à sa forme.
Par exemple, Giasson (1991) propose d’appeler connaissance déclarative le fait de
« savoir quoi faire », connaissance procédurale le fait de « savoir comment faire »
quelque chose. Il y ajoute les connaissances pragmatiques qui se réfèrent au fait de
« savoir pourquoi et quand le faire ». Tardif (1992) reprend cette distinction entre
ces trois catégories de connaissances en considérant qu’elles portent respectivement
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 25

sur les faits, les règles et les principes (connaissances déclaratives), le comment
faire (connaissances procédurales), et le quand ? et le pourquoi ? (connaissances
conditionnelles).
Plus récemment, Weil-­Barais (2007) souligne et confirme que cette distinction déve-
loppée par la psychologie du traitement de l’information reprend en fait la distinction
ancienne entre savoirs et savoir-faire. Ainsi, si l’on suit Vink (1997), les caractéris-
tiques distinctives des connaissances déclaratives portent sur le savoir « quoi ? », et
sont indépendantes des actions susceptibles de les mettre en jeu. Elles sont donc
décontextualisées et statiques, comme les connaissances scientifiques. Par contre,
les connaissances procédurales qui relèvent du savoir « comment » sont à ce titre
inscrites dans l’action et dépendantes de leur contexte. Elles constituent donc un
savoir opérationnel (exemple : savoir conduire).
En résumé et de manière ramassée, on retiendra que le terme de déclaratif se réfère
principalement à des connaissances permettant de répondre à la question « savoir
quoi faire » alors que le terme de procédural renvoie plus spécifiquement à la ques-
tion « savoir comment faire ».

2.1.5  En synthèse : des distinctions non exclusives


et combinatoires
On pourrait poursuivre cette recension de ces distinctions des formes contras-
tées du savoir. Mais l’essentiel est de retenir, à ce stade, qu’elles ne sont jamais
totalement exclusives l’une de l’autre et coexistent de fait le plus souvent à des
degrés divers. Ce survol de la notion de savoir, dans sa conception extensive, met
en exergue, comme nous pouvons le constater, la présence de formes plurielles, dis-
tinctives, complémentaires et combinatoires, qui soulignent l’extraordinaire richesse
potentielle de son usage. Dans cette perspective, Nonaka (1991), que nous avons
déjà cité sur ce sujet, présentera et illustrera la « spirale du savoir » qui sera reprise
et approfondie avec son collègue Takeuchi (Nonaka et Takeuchi, 1995) dans ce
qui deviendra un ouvrage de référence. Pour ces auteurs, en effet, la dynamique
de la création de la connaissance organisationnelle intègre ces quatre types de
transformation et se développe sur deux dimensions  : épistémologique (différence
tacite-­explicite) et ontologique (de l’individu à l’organisation et de l’organisation
au domaine interorganisationnel), ces processus étant mutuellement complémen-
taires et interdépendants.

2.2. Les typologies de savoir

Plusieurs typologies ont été proposées par des auteurs. Elles se distinguent
des formes présentes ci-­dessus en ce qu’elles ne sont pas présentées a priori sous
une configuration binaire. Il n’empêche que beaucoup de ces intitulés recouvrent au
moins pour partie nombre de formes déjà évoquées. Nous présenterons successive-
ment dans les encadrés qui suivent la typologie classique de Blackler (1995), puis
celle proposées par l’OCDE.
26 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

2.2.1  La classification de Blackler


Collins (1993) avait élaboré ainsi cinq de types de connaissances que Blackler
(1995) fera pour sa part évoluer légèrement. C’est cette dernière classification que
nous présentons sommairement ci-­dessous.

Intitulé Description sommaire


Théorisée, intellectualisée et liée à l’habileté conceptuelle
Embrained knowledge
et aux capacités cognitives.
Mise en pratique et orientée vers l’action. Elle est
Embodied knowledge
seulement pour partie explicite.
Fait référence au processus de partage de savoirs de
Encultured knowledge manière à parvenir à une compréhension commune à travers
le développement d’une culture organisationnelle.
Réside dans les routines systémiques. Elle s’analyse
Embedded knowledge en termes de relation entre les technologies, les rôles,
les procédures formelles et les routines émergentes.
Véhiculée par des signes et des symboles sous forme
Encoded knowledge
manuelle ou électronique.

Tableau 3 — La classification de Blacker sur les types de connaissances

Ce que Blackler tente d’illustrer avec cette typologie, c’est que certains types de
connaissances dominent au sein de différentes formes d’organisations. Ainsi, il
suggère que les organisations fortement bureaucratisées mobiliseront principale-
ment sur les connaissances intégrées dans des routines et des règles, qualifiées
à ce titre d’encoded knowledge. A contrario, les connaissances des firmes plus
dynamiques et innovantes seront associées soit aux encultured knowledge si elles
sont fortement centrées sur la communication, ou bien aux embrained knowledge
si elles sont principalement dépendantes des compétences et des expertises des
personnes. On retrouve ainsi, sur un autre registre, des analogies avec la célèbre
distinction proposée par Burns et Stalker (1961) entre organisation de type méca-
niste ou organique.

2.2.2  L’approche distinctive propose par l’OCDE


L’OCDE (1996), dans une perspective d’analyse économique, établit pour
sa part une distinction entre les différents types de savoir mobilisables par les
gestionnaires. Elle vise à pouvoir s’adapter au rythme accéléré du progrès plus
spécifiquement dans le cadre d’une économie fondée précisément sur le savoir.
Les types de savoirs sont au nombre de quatre  : le « savoir-­quoi », le « savoir-­
pourquoi », le « savoir-­comment » et le « savoir-­qui » et sont présentés dans le
tableau qui suit.
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 27

Types de savoirs Description synthétique


Renvoie à la connaissance « factuelle » (exemple : le nombre
d’habitants que compte la ville de New York, la date de la bataille
de Waterloo, etc.). Ici, le savoir est voisin de ce que l’on appelle
normalement l’information -­et peut être fragmenté. Dans certains
Savoir quoi 
domaines complexes, les spécialistes doivent acquérir une grande
quantité de savoir de ce type pour mener à bien leurs tâches
professionnelles. Les hommes de loi ou les praticiens de la
médecine appartiennent à cette catégorie.
Se réfère à la connaissance scientifique des lois et des principes
naturels. Ce type de connaissances détermine le progrès
technologique et les avancées en termes de produits ou de
procédés dans la plupart des branches industrielles. La production
et la reproduction de savoir-­pourquoi sont souvent organisées
Savoir pourquoi  au sein de structures spécialisées, comme des laboratoires de
recherche ou des universités. Pour accéder à ce type de savoir, les
entreprises doivent avoir une interaction avec ces structures soit
en recrutant des éléments ayant reçu une formation scientifique,
soit directement, en entretenant avec elles des relations ou en
menant des activités conjointes.
Renvoie à des compétences ou à une aptitude donnée. Les
hommes d’affaires qui évaluent les débouchés commerciaux d’un
nouveau produit ou un directeur des ressources humaines qui
sélectionne le personnel ou organise sa formation doivent utiliser
ce savoir-­faire. Il en va de même pour le travailleur qualifié qui
Savoir comment  fait fonctionner des machines-­outils de maniement très complexe.
Le savoir-­comment ou savoir-­faire est, typiquement, une forme
de savoir élaborée et préservée au sein de l’entreprise. L’une des
principales raisons de la création de réseaux industriels est la
nécessité, pour les entreprises, d’être capables de partager et de
combiner ces éléments de savoir-­faire.
Se réfère à l’information sur « qui sait quoi ? » et « qui sait
comment faire quoi ? » Il a trait à la formation de relations
sociales privilégiées qui rendent possible d’entrer en contact
Savoir qui  avec des spécialistes et d’utiliser efficacement leurs connaissances.
Ce type de savoir a de l’importance dans les économies où les
compétences sont très dispersées en raison d’une grande division
du travail parmi les structures et les spécialistes.

Tableau 4 — Les savoirs mobilisables


dans le cadre d’une économie de la connaissance

Cette typologie comporte des analogies avec la distinction entre savoir explicite et
savoir tacite. Comme le souligne l’OCDE, les deux premiers types de savoir se réfèrent
plus spécifiquement à la notion d’information et peuvent s’acquérir par la lecture de
manuels, la participation à des conférences ou l’accès à des bases de données. On
se situe donc plutôt sur le registre de savoirs explicites.
Par contre, le « savoir-­comment » et le « savoir-­qui » relèvent d’un savoir plus tacite
et de l’expérience pratique. Ils sont plus difficilement quantifiables et codifiables.
Le savoir-­comment, s’acquiert principalement à partir de situations où un apprenti
28 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

suit un maître et s’en remet à lui comme autorité. Quant au « savoir-qui », toujours
selon l’OCDE, il s’apprend par la pratique sociale et parfois dans des environnements
éducatifs spécialisés ou encore au gré des contacts quotidiens que l’on peut entre-
tenir avec des clients, des fournisseurs ou des établissements indépendants. On relè-
vera ainsi implicitement que la distinction structurante entre le champ du tacite et
celui de l’explicite est toujours présent.

2.3. Le registre plus opérationnel des compétences,


de la pratique et des routines

Pour compléter cette présentation, il nous apparaît important de se focaliser


plus spécifiquement sur le registre des savoirs de type opérationnels : compétences,
pratiques et routines, qui comportent certaines proximités.

2.3.1  Le registre des compétences


Ce concept a fait l’objet de multiples formulations, variables selon les usages
qui en sont faits. Nous ferons ici l’économie de cette vaste revue de la littérature,
pour reprendre la formulation synthétique que propose Gilbert (2011). Ce dernier
souligne que l’on s’accorde à définir les compétences comme des caractéristiques
individuelles et collectives attachées à la possibilité de mobiliser, de manière effi-
cace, dans des contextes donnés, un ensemble de connaissances, de savoir-faire et
de comportements.
Bien que mobilisant logiquement pour une large part des connaissances, la tona-
lité des compétences en diffère cependant pour partie en ce qu’elles prennent en
compte de manière accentuée l’expérience et s’expriment dans l’action. Le terme de
compétences tacites ou explicites est parfois utilisé par des professionnels, notam-
ment dans le cadre de leur modalité de transfert entre les personnes.

2.3.2  Le registre de la pratique


Le terme de « pratique » a connu une réelle notoriété depuis les années 1990
à travers les travaux de Lave et Wenger (1991), Wenger (1998), Wenger, McDermott
et Snyder (2002) et de quelques autres, dans la mesure où il est largement associé
au concept de « communauté de pratique ». Cette notion sera largement présentée
et développée dans le chapitre III.
On soulignera simplement à ce stade que pour Wenger (1998), la pratique occupe
une place essentielle dans la théorie sociale de l’apprentissage. Elle est associée
au « faire » dans un contexte social, donnant « une structure et une signification à
ce que l’on accomplit ». Elle inclut ainsi le langage, les outils, les documents, les
images, les symboles, les critères, les rôles, les procédures, les règles et les contrats
élaborés au sein des différentes pratiques. Mais également, les relations implicites,
les conventions tacites, les indices subtils, les règles d’usages implicites, les intui-
tions, les perceptions et les préconisations. Wenger souligne toujours dans ce même
texte que la plupart de ces éléments « ne peuvent être verbalisés clairement », mais
ils n’en constituent pas moins des signes indéniables d’appartenance à une « commu-
nauté de pratique » et sont fondamentaux pour sa réussite. Précisément, l’expression
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 29

de « communauté de pratique » se réfère, selon une définition largement reprise,


à « des groupes de personnes partageant un intérêt ou une passion pour quelque
chose qu’ils font et apprennent à mieux le faire, car ils interagissent régulièrement »
(Wenger, et al., 2002).
Selon Brown et Duguit (1991), la nature de la pratique au sein des communautés
apparaît ainsi essentiellement comme un savoir-­faire, qui est tacite et socialement
localisé alors que pour d’autres auteurs comme Wenger (1998) et Chanal (2000), elle
englobe et combine de l’explicite et du tacite. Notre point de vue est plus proche
de celui de Brown et Duguit (1991), ainsi de celui de Gherardi (2009), pour qui les
pratiques possèdent une forte composante tacite (même si l’on peut considérer que
sa composante explicite est pour partie présente de manière variable selon les situa-
tions professionnelles).
D’autres auteurs d’origine québécoise ont également formulé des définitions qui s’ins-
crivent dans la lignée du sens retenu dans le cadre des communautés de pratique.
Ainsi, Davel et Tremblay (2011) soulignent que l’idée que la « connaissance issue
de la pratique » s’appuie sur le fait qu’apprendre n’est pas une activité isolée mais
qu’elle prend forme dans le flux d’expériences que l’on vit, que l’on en soit conscient
ou non. Gherardi (2006) observe pour sa part que ce concept est fécond, dans la
mesure où il permet d’analyser les connexions entre les individus, les collectivités,
les organisations, les institutions et les contextes au sein desquels ces connexions
prennent une forme spécifique.
On retiendra de cette première revue de la littérature la proximité du concept de
pratique avec celui de compétences à dominantes tacites, socialement localisé et
s’insérant dans le cadre d’un apprentissage contextualisé et donc « situé » dans un
environnement au sein duquel s’effectue le travail réel.

2.3.3  Le registre des routines


On distinguera successivement les routines générales et plus spécifiquement
les « routines défensives ».

Les routines générales


Nelson et Winter (1982) proposaient à l’époque, dans cette contribution réfé-
rente, une nouvelle vision évolutionniste du changement. Ils entendaient notamment
souligner l’imbrication des aspects organisationnels et technologiques nécessaires
pour saisir l’évolution de la croissance d’une organisation sur une période longue.
Dans cette perspective, ils proposaient de concevoir l’organisation évolutionniste
comme un « répertoire » de connaissances et de routines (on notera au passage l’ana-
logie avec le répertoire de Wenger), basé sur des savoir-­faire individuels et de ses
savoirs techniques et organisationnels. La routine y est définie « comme un schéma
comportemental prédictible et régulier ».
Depuis, la définition référente et régulièrement citée est proposée par un collec-
tif d’auteurs (Cohen, et al., 1996) : « Une routine est une capacité exécutable pour
une performance répétée dans un certain contexte qui a été appris par une orga-
nisation en réponse à des pressions sélectives ». Dans cette perspective, Cohendet,
et al. (2006) écrivent notamment que la routine est « une capacité à générer une
30 La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques

action collective, à guider ou diriger une séquence d’actions déployées. Les routines
garantissent la régularité et la prévisibilité du comportement individuel nécessaire
à l’action collective ».
En d’autres termes, la routine stocke et emmagasine des pratiques incorporées, inté-
grées, mobilisables et exécutables dès lors que l’organisation doit résoudre un pro-
blème déjà rencontré et résolu. Mais ces mêmes auteurs soulignent avec justesse que
les routines sont aussi essentiellement dépendantes du contexte donné, fournissant
pour son exécution un lieu d’attention pour une action collective. Elles contribuent
à la génération de connaissances collectives « car la création d’un langage commun
et de perceptions partagées proviennent de l’interaction des membres de l’organisa-
tion ». Leur insertion dans un processus d’apprentissage permanent fait que les rou-
tines évoluent, s’améliorent et s’adaptent dans le temps, bien que des résistances
au changement puissent se manifester.

Les « routines défensives »


Dans un registre quelque peu différent mais important, Chris Argyris a mobi-
lisé et popularisé le terme de « routines défensives » dans plusieurs de ses écrits,
notamment dans son ouvrage intitulé Knowledge for action (Argyris, 1993). Elles
apparaissent dès que l’individu, le groupe ou l’organisation perçoit un embarras,
une menace, de sorte que la stratégie de l’évitement devient dans ces conditions
la protection et l’esquive. Ces jeux politiques individuels ou collectifs constituent
pour Argyris un obstacle à l’apprentissage organisationnel (cette dernière notion
sera présentée dans l’annexe du chapitre III). Elles comportent de fortes analogies
avec le phénomène classique de résistance au changement largement mobilisé par
les sociologues.
De manière à clore la première partie de ce chapitre, on abordera la question des pro-
priétés spécifiques attachées aux connaissances (notamment tacites), en ce qu’elles
constituent un bien économique bien spécifique dans l’encadré qui suit.
Le savoir, ses concepts, ses enjeux et sa dynamique 31

Encadré 2 : Le savoir en ses différentes propriétés

Il existe un fort consensus parmi les chercheurs (Foray 2000, 2009) pour souligner un certain
nombre de propriétés attachées au savoir, qui diffèrent singulièrement des biens matériels.

UN BIEN NON EXCLUABLE, DONC DIFFICILEMENT CONTRÔLABLE


Cette propriété de bien « non excluable » illustre la difficulté à rendre ce bien « exclusif » et
d’assurer son contrôle, en particulier par celui qui l’a produit. En d’autres termes, une orga-
nisation a toujours plus de difficultés à contrôler ses connaissances que ses marchandises
ou ses machines. En conséquence, les risques et occasions de fuite ou d’évaporation des
connaissances, sans contrepartie, sont potentiellement nombreux. Le terme « d’externalités
positives » est mobilisé pour rendre compte de cet impact positif sur des tiers qui peuvent
naturellement être des rivaux et des concurrents. Par exemple  : la propagation dans des
réseaux informels d’échanges d’expériences, la coopération entre chercheurs appartenant
à des entreprises différentes, la mobilité interorganisationnelle de professionnels, etc.

UN BIEN NON RIVAL ET NON EXCLUSIF


L’usage du terme de « non-­rivalité » entend mettre en exergue que l’usage répété de
la connaissance n’entraîne pas sa destruction (contrairement à l’assimilation d’aliments
pour se nourrir) ni même son usure, et ne nécessite pas la fabrication d’un exemplaire
supplémentaire. S’agissant d’un bien « rival » (par exemple : le pantalon que je porte),
il ne pourra par nature être porté par une autre personne… On s’inscrit dans le cadre
d’un jeu à somme positive, ce qui a pour effet de multiplier potentiellement à l’infini
ses détenteurs. On peut donc considérer qu’il s’agit d’un bien inépuisable.
De manière complémentaire, la « non-­exclusivité » exprime le fait que la connaissance
peut également être mobilisée simultanément par plusieurs utilisateurs, ce qui n’est pas
possible s’agissant des biens dits exclusifs, lorsque l’utilisateur peut s’assurer de son
usage pour lui seul. Ces deux propriétés (sous réserve de certaines tendances à la
privatisation et à la marchandisation du savoir), confèrent à la connaissance la carac-
téristique d’un bien public, au même titre que l’air, l’eau, la mer ou l’éclairage public.

UN BIEN CUMULATIF
Cette caractéristique, déjà mise en évidence par Marshall (1961), entend souligner
que la connaissance constitue le moteur et le levier principal de la fabrication de nou-
velles connaissances, de nouvelles idées et de nouveaux concepts. En d’autres termes,
la production de nouveaux savoirs repose sur des savoirs existants et constitue une
source potentielle d’innovation (voir point 3.6.). Cette propriété est liée au point suivant.

CONSÉQUENCE : LE RENDEMENT CROISSANT DES CONNAISSANCES


Ce sont les travaux précurseurs de chercheurs comme Romer (1986 ; 1990), dans le
cadre de travaux sur la croissance endogène, qui positionnent la place des « idées » et des
connaissances au cœur de la croissance économique, compte tenu notamment de leurs
caractéristiques. Alors que l’économie physique et matérielle est caractérisée par la loi des
rendements décroissants (du fait de la rareté des matières premières), l’économie des idées
et de la connaissance génère des rendements croissants, à l’image du logiciel dont le coût
de développement (recherche, essai, mise au point) est élevé, alors que son coût de produc-
tion est faible et baisse en moyenne à chaque unité produite. Ainsi, Guellec et Ralle (2003)
relèvent que l’on est face à un processus d’accumulation des connaissances générant de la
croissance. Ces éléments associés à la croissance endogène tissent un lien avec l’innovation.
Liste des encadrés

Encadré 1. Les fellows et les experts au sein des grandes firmes technologiques.
Encadré 2. Le savoir en ses différentes propriétés.
Encadré 3. Le courant de « l’économie fondée sur les connaissances » (EFC).
Encadré 4. Le courant du « capitalisme cognitif ».
Encadré 5. Un nouveau business model hypercapitaliste fondé sur « l’économie colla-
borative » marchande.
Encadré 6. La bibliothèque d’Alexandrie, espace de capitalisation et de création de
savoir.
Encadré 7. De nouveaux espaces et de nouveaux acteurs : autour du renouveau de la
vie intellectuelle au Moyen Âge.
Encadré 8. Une découverte située au carrefour d’éléments contextuels, culturels et
techniques.
Encadré 9. L’organisation du système des connaissances de l’Encyclopédie.
Encadré 10. Les éléments constitutifs de la dynamique de création et de diffusion du
savoir associés à cette période.
Encadré 11. Construction de la médiatisation du Knowledge management  : confé-
rences, colloques, clubs, nominations en entreprise…
Encadré 12. Peut-­on définir le Knowledge Management ?
Encadré 13. La méthode MASK.
Encadré 14. Les éléments constitutifs de la dynamique de création et de diffusion du
savoir associés à cette période et leurs liens avec le Knowledge Management.
Encadré 15. Le concept, les composantes et l’évaluation du capital intellectuel.
Encadré 16. Communautés et sociétés selon Ferdinand Tönnies.
Encadré 17. Un « petit monde » sans clôture…
312 L’entreprise à l’ére du digital

Encadré 18. Granovetter et le réseautage dans la recherche d’emploi


Encadré 19. Le capital social dans sa version bourdieusienne (citation).
Encadré 20. Le capital social en ses différentes perspectives.
Encadré 21. Les enseignements issus de la communauté des techniciens de mainte-
nance de Xerox.
Encadré 22. Schlumberger et la genèse et la dynamique de développement d’Euréka,
fondée sur l’autonomie.
Encadré 23. Communautés de pratique (CoPs) : quelques définitions.
Encadré 24. L’engagement dans une communauté n’est pas toujours un long fleuve
tranquille
Encadré 25. Illustrations du développement des CoPPs au sein des grands groupes.
Encadré 26. Les différents niveaux d’évolution des communautés chez IBM Global Ser-
vices.
Encadré 27. Vers une gouvernance managériale hybride, bien pensée et bien pratiquée.
Encadré 28. Les niveaux de participation et d’implication des membres des commu-
nautés de pratique.
Encadré 29. Aperçu des résultats d’une recherche de l’APQC sur les meilleures pra-
tiques communautaires durables
Encadré 30. Aperçu illustratif des meilleures pratiques des entreprises identifiées par
l’APQC : ConocoPhillips Fluor, Schlumberger.
Encadré 31. La digital Academy d’Orange.
Encadré 32. Les « communautés épistémiques » : une forme mobilisée principalement
par la communauté académique.
Encadré 33. L’apprentissage organisationnel : éléments de présentations et limites.
Encadré 34. Le concept de « BA » au regard des communautés et de la création de
connaissance organisationnelle.
Encadré 35. L’article fondateur de Tim O’Reilly : Qu’est-­ce que le Web 2.0 ?
Encadré 36. Quatre visages du Web 2.0
Encadré 37. Le Web 2.0 : une nouvelle technologie de l’intellect ?
Encadré 38. Les réseaux sociaux : un levier de valeur pour l’organisation 2.0.
Encadré 39. Un modèle idéal pour l’entreprise 2.0 ?
Encadré 40. Quatre usages du management 2.0 fondés sur les technologies collaboratives.
Encadré 41. La réputation numérique : le phénomène des rising stars.
Encadré 42. Le concept de Digital Workplace.
Encadré 43. Alter et égo.
Encadré 44. La double dimension de la confiance en matière de transmission des
savoirs : affective et cognitive.
Liste des encadrés 313

Encadré 45. Les réticences contextuelles de certains travailleurs du savoir : le cas des


consultants et des avocats.
Encadré 46. L’évolution de rôle du destinataire dans la transmission des savoirs  :
récepteur passif, apprenant actif, co-­constructeur.
Encadré 47. Le travail « coopératif » versus le travail « collaboratif », comme forme
et pratique dominante de la structuration du savoir.
Encadré 48. Le travail « collaboratif » versus le travail « coopératif », comme forme
dominante de la socialisation des pratiques.
Encadré 49. L’encyclopédie interne de Schneider Electric.
Encadré 50. Des plateformes dédiées à l’innovation participative : le cas de la branche
d’investissement CIB (Corporate & Institutional Banking) de BNP Paribas.
Encadré 51. L’intelligence collective et collaborative et ses défaillances.
Encadré 52. The Wisdom of Crowds vu par Surowiecki.
Encadré 53. Une perspective académique sur la sagesse collective (Collective Wisdom).
Encadré 54. Le capital socio-­cognitif.
Encadré 55. Les Marketplace de Danone.
Encadré 56. Michelin, de la culture du secret à la culture du partage, à travers le
déploiement de son réseau social BipSpace.
Encadré 57. Accenture Suite Livraison.
Encadré 58. Le CEA, organisme pionnier et réfèrent en matière de capitalisation et
d’exploitation des connaissances (CEC).
Encadré 59. Les modes de transmission des savoirs dans l’industrie nucléaire.
Encadré 60. Le « praticien réflexif » selon Donald Schön.
Encadré 61. La curation de contenu.
Encadré 62. World Café et Forum ouvert.
Encadré 63. La Cathédrale et le Bazar.
Encadré 64. Cloud computing.
Encadré 65. Le Web sémantique autour de Tim Berners-­Lee.
Encadré 66. Le système d’information pour le management des connaissances de la DAM.
Encadré 67. Ce qu’il faut retenir synthétiquement des bénéfices de la gestion des
connaissances vus du côté de la recherche.
Encadré 68. Le point de vue de Louis-­Pierre Guillaume, Knowledge Management Offi-
cer de Schneider Electric.
Encadré 69. Ce qu’il faut retenir synthétiquement des pratiques de terrain en termes
de métriques.
Encadré 70. La communauté CoP-­1.
Encadré 71. Le club Gestion de Connaissances.
Liste des tableaux

Tableau 1. Les composantes hiérarchisées et combinées du savoir.


Tableau 2. Perspective extensive et hiérarchique du savoir.
Tableau 3. La classification de Blacker sur les types de connaissances.
Tableau 4. Les savoirs mobilisables dans le cadre d’une économie de la connaissance.
Tableau 5. Formes de collaborations inter-­organisationnelles.
Tableau 6. Le déploiement et l’enchainement cumulatif des composantes de création,
de diffusion et d’usage du savoir.
Tableau 7. Comment les firmes de conseil managent-­elles leur savoir ?
Tableau 8. Les différents niveaux de maturité d’une organisation.
Tableau  9. Facteur d’influence de la capitalisation dans un système de gestion des
connaissances.
Tableau  10. Comparaison simplifiée des COPs avec différentes formes d’organisation
ou groupes socio-­professionnels.
Tableau 11. Emprise et degré d’implication de la hiérarchie.
Tableau 12. Recension des différents intitulés et formes de communautés.
Tableau 13. Public ciblé des communautés au sein d’une entreprise.
Tableau 14. Bénéfices tangibles et intangibles d’une approche entreprise 2.0.
Tableau 15. Niveau de maturité au regard des dispositifs mobilisés.
Tableau 16. Niveau de maturité supposée.
Tableau 17. Les compétences clés pour les travailleurs du futur.
Tableau 18. Des outils fondés sur des usages.
Tableau 19. Caractéristiques et formes saillantes dominantes.
Tableau 20. Bénéfices des communautés.
Tableau 21. Apports et bénéfices d’une communauté pour l’organisation et pour ses
membres.
Liste des schémas

Schéma  1. Vers la rencontre et la combinaison des logiques de capitalisation et de


collaboration.
Schéma 2. La dynamique interactive de la nouvelle économie du savoir et ses diffé-
rentes composantes.
Schéma 3. La dynamique interactive de création, de diffusion et d’usage du savoir et
ses composantes.
Schéma  4. Typologie dynamique de la gestion et la circulation du savoir (GCS), du
nouvel écosystème de collaboratif fondé sur les usages.
Schéma 4 bis. Typologies dynamiques fondées sur les usages de la gestion et la circu-
lation du savoir (GCS) du nouvel écosystème collaboratif 2.0©.
Index*

A Confiance 187
dans le cadre des communautés 188
Apprentissage
dans la transmission des savoirs 188
organisationnel 147
Connaissances
situé 115
déclaratives 24
B explicites 22
procédurales 24
BA 150 tacites 22
Crowdsourcing 211
C
Culture de la collaboration 189
Capital
Curation de contenu 245
intellectuel 83
social 99, 264 D
sociocognitif 216
Capitalisme cognitif 35 Digital Workplace 181
Charte 143 E
Cloud computing 254
Échelle de prestige 174
Codification 71
Économie
des connaissances 34
collaborative 38
Collaboration interorganisationnelle 42
d’agglomération 40
Communauté fondée sur les connaissances 34
de connaissance 114 Encastrement 104
de pratique 114
Entreprise 2.0 164, 166
autonome ou autogérée 110, 118
« pilotée » 123 Experts 17
épistémique 146 Externalités géographiques de connaissances 42
« pilotée » 129
Community managers 141 F
Compétences 28 Fellows 17

* Les principaux termes retenus dans cet index renvoient aux passages significatifs de l’ouvrage
qui les concernent.
320 L’entreprise à l’ére du digital

G Pratique 28, 116


Gestion des contenus 250 R
I Rapport au savoir 186
Intelligence Répertoire
collaborative 207 de pratique 108
collective 207 partagé 118
Réputation numérique 173
K Réseaux sociaux d’entreprises 119
Knowledge 16 Return On Engagement 227
management 66, 70 Rising stars 173
L Routines 29
défensives 30
Liens
faibles 98 S
forts 97
Sagesse collective 214
Livre de connaissances 77
Savoir 16, 32
M expert 23
intellectuel 23
Management 2.0 170 manuel 23
Many-to-many 160, 161 profane 23
Marchés « bifaces » 39 Sociétés de capital-risque 45
Maturité
T
collaborative 168
numérique 190 Technologie
Métadonnées 253 de l’intellect 53
Méthode numérique de l’intellect 40, 163
MASK 76 Théorie C-K 79
MEREX 78 Transformation numérique 175
REX 78 Transitivité 97
TRIZ 79
Travail
Métriques « collaboratif » 201
de « valeur » 273 « coopératif » 198
« d’usage » 273
Travailleurs numériques 180, 182
Mondes de grandeur 277
Trou structural 100
Moteurs de recherche 254
sémantique 255 W
Multitude 209 Web 1.0 156
O Web 2.0 156, 157, 159, 162
Web 3.0 255
Objet cognitif 235
Web sémantique 255
One-to-many 160
Wikipédia 159
P World Wide Web 157
Personnalisation 71
Planneurs 197
Praticien réflexif 242
Table des matières

Remerciements................................................................................................. 7
Introduction générale
Une approche pluridisciplinaire fondée
sur un double regard combiné : académique et opérationnel......... 9
Plan de l’ouvrage..................................................................... 10

Partie 1
La gestion du savoir : concepts, enjeux et pratiques
Chapitre 1
Le savoir, ses concepts, ses  enjeux et sa dynamique................................. 15
1.  Savoir, connaissances et compétences… question de sémantique.... 16
Ouverture : savoir or knowledge ?................................................................ 16
1.1. Une conception « objectivée » et « légitimée » par extériorité............ 16
1.1.1  Le savoir comme composante cognitive formelle
et « objectivée »......................................................................... 17
1.1.2  Le référentiel et ses formes......................................................... 17
1.2. Une conception extensive de composantes combinées, articulées,
hiérarchisées et récursives................................................................... 19
1.2.1  Les composantes......................................................................... 19
1.2.2  Le domaine................................................................................ 20
1.2.3  La nature et la forme................................................................. 21
1.2.4  La valeur.................................................................................... 21
2.  Les formes et les typologies de savoirs................................................. 22
2.1. Les formes de savoir............................................................................ 22
322 L’entreprise à l’ére du digital

2.1.1  Connaissances tacites et connaissances explicites........................ 22


Les connaissances tacites.............................................................. 22
Les connaissances explicites.......................................................... 22
Le régime économique de ces deux types de connaissances............... 22
2.1.2  Savoirs manuels et savoirs intellectuels....................................... 23
2.1.3  Savoirs experts et savoirs profanes.............................................. 23
2.1.4  Connaissances déclaratives et connaissances procédurales............ 24
2.1.5  En synthèse : des distinctions non exclusives et combinatoires.... 25
2.2. Les typologies de savoir...................................................................... 25
2.2.1  La classification de Blackler........................................................ 26
2.2.2  L’approche distinctive propose par l’OCDE.................................... 26
2.3. Le registre plus opérationnel des compétences, de la pratique
et des routines.................................................................................... 28
2.3.1  Le registre des compétences........................................................ 28
2.3.2  Le registre de la pratique............................................................ 28
2.3.3  Le registre des routines............................................................... 29
Les routines générales.......................................................................... 29
Les « routines défensives »................................................................... 30
3.  L’économie du savoir................................................................................ 32
3.1. Les éléments constitutifs de l’économie du savoir............................... 32
3.1.1  Le savoir proprement dit............................................................. 32
Les précurseurs récents : Fritz Machlup, Kenneth Arrow,
Daniel Bell et Alvin Toffler............................................................ 32
Les courants associés à ce nouveau régime de croissance :
« l’économie fondée sur la connaissance »
et le « capitalisme cognitif ».......................................................... 33
3.1.2  Le pôle des finances, associé à la « grande transformation »
du capitalisme............................................................................ 36
La fin des « Trente Glorieuses » et le basculement
dans un « nouveau monde »........................................................... 37
Les références doctrinales et « idéologiques »
à cette métamorphose néolibérale.................................................. 37
Le retour des propriétaires et de nouvelles règles
de gouvernance............................................................................ 37
Une organisation interne remodelée................................................ 37
Vers une économie collaborative marchande, hypercapitaliste
et dérégulée ?.............................................................................. 38
3.1.3  Les « Technologies Numériques de l’Intellect » (TNDI)................. 40
3.1.4  Les espaces territoriaux fondés
sur les « économies d’agglomération »........................................ 40
Une brève histoire des « économies d’agglomération » :
Alfred Marshall (1842‑1924) et Jane Jacobs (1916‑2006).................. 40
Une description illustrative des « économies d’agglomération ».......... 41
Un regroupement et une concentration des activités........................ 41
La question des « externalités géographiques
de connaissances »....................................................................... 42
Les typologies des formes de collaboration interorganisationnelle
et de leurs effets.......................................................................... 42
Table des matières 323

3.2. Les liaisons interactives entre ces différents éléments,


comme dynamique de l’économie du savoir......................................... 43
3.2.1  Les interactions entre « SAVOIRS » et « TNDI »........................... 44
L’abolition des distances et des coûts............................................. 44
La constitution d’entrepôts et de bases de savoirs codifiés................ 44
Le partage interactif des savoirs et des pratiques (collaboration)....... 44
L’accès potentiellement généralisé à une multitude
de formes de savoir...................................................................... 44
3.2.2  Les interactions entre « SAVOIRS » et « FINANCES ».................... 44
Une auto-­alimentation entre ces deux formes d’actifs....................... 45
Des échelles de temps différentes entre les actifs cognitifs
et financiers................................................................................ 45
Des interactions illustratives fondées sur de fortes prises
de risque : les sociétés de capital-­risque......................................... 45
3.2.3  Les interactions entre « TNDI » et « FINANCES »......................... 46
3.2.4  Un équilibre fragile..................................................................... 46
Pour conclure : Planter le décor.................................................................. 48

Chapitre 2
La capitalisation et ses usages, comme forme structurante
de  la  gestion des savoirs.............................................................................. 49
1.  Un survol historique des pratiques de capitalisation........................... 50
Ouverture : cadrage d’une dynamique.......................................................... 50
Les « Technologies De l’Intellect » (TDI) et leurs supports.................... 50
Les lieux.............................................................................................. 51
Les acteurs........................................................................................... 51
Le contexte et « l’atmosphère »............................................................ 51
1.1. L’écriture manuscrite............................................................................ 53
1.1.1  Illustration majeure d’une « technologie de l’intellect » (TDI)..... 53
1.1.2  Les supports et espaces associés à cette technologie :
tablettes, volumen et bibliothèques............................................ 54
Des supports de stockage : les tablettes d’argiles
et les rouleaux de papyrus............................................................. 54
Des espaces appropriés : les bibliothèques....................................... 55
Des acteurs : scribes, savants et lettrés........................................... 56
1.2. L’alphabet comme technologie permettant la codification
et la rationalisation de l’écriture......................................................... 56
1.2.1  Une économie du caractère…..................................................... 56
1.2.2  …autorisant une préservation et un développement quasi infini
des savoirs et des idées.............................................................. 56
1.2.3  Le support du codex, métamorphose du volumen,
comme innovation durable.......................................................... 56
Une innovation capitale et durable…............................................. 56
…génératrice d’optimisation, de rationalisation et de confort............ 57
En forme de transition : le renouveau de la vie intellectuelle
au Moyen Âge : ses espaces et ses acteurs.......................................... 57
324 L’entreprise à l’ére du digital

1.3. L’apparition de l’écriture mécanique.................................................... 58


1.3.1  Une atmosphère propice combinée
avec une combinaison systémique d’objets.................................. 59
1.3.2  Un déploiement progressif de l’innovation
fondé sur l’industrialisation du livre et « l’explosion du savoir ».... 60
Une capacité de reproduire à l’identique et illimitée de lettres.......... 60
Un abaissement considérable des coûts et de la durée de fabrication.... 60
1.3.3  Les acteurs et les supports associés à la formalisation des savoirs
artisanaux (xv e-­xviii e siècles) sur fond d’émergence du capitalisme...... 60
Du côté des acteurs : la démarche de captation,
d’appropriation et de formalisation des savoirs
artisanaux tacites......................................................................... 61
Du côté des supports : le déploiement des connaissances
formalisées à travers la réalisation de traités
et d’encyclopédies........................................................................ 61
1.4. Les technologies, les supports et les acteurs associés
à l’industrialisation, la rationalisation et le traitement
de l’information................................................................................... 62
1.4.1  Babbage (1791‑1871) et la « mécanisation des opérations
de l’esprit »................................................................................ 63
1.4.2  Le projet d’Encyclopédie du savoir ou Mundaneum d’Otlet
(1868‑1944), nouvelle bibliothèque du monde........................... 63
1.4.3  Les travaux de Bush (1890‑1964) et son memex........................ 64
1.4.4  Douglas Engelbart (1925‑2013) et l’augmentation des capacités
de l’intellect humain................................................................... 64
1.4.5  Ted Nelson (1937) et son projet Xanadu.................................... 64
1.4.6  Une nouvelle dynamique interactive…........................................ 65
Pour conclure sur cette partie..................................................................... 65
Un enchaînement cumulatif des technologies de l’intellect (TDI)........ 65
Un processus quasi ininterrompu combinant innovation
et rationalisation du savoir............................................................ 66
Une tendance continue de concentration du savoir........................... 66
Un raccourcissement considérable de l’échelle de temps
dans l’enchaînement successif des différentes TDI............................ 66
2. L’émergence et le déploiement progressif
du knowledge management...................................................................... 66
2.1. Les origines, les circonstances et les causes
ayant contribué à l’émergence du knowledge management................... 67
2.1.1  Aux origines contemporaines du knowledge management........... 67
2.1.2  Les causes et les circonstances ayant favorisé son émergence...... 67
Le départ de la génération des « baby-­boomers »............................. 67
Des supports associés aux TNDI...................................................... 68
L’engouement managérial.............................................................. 68
2.1.3  Que recouvre en définitive le knowledge management ?............. 70
2.2. Deux terreaux émergents en termes de pratiques
de knowledge management (projets pionniers) : les grandes firmes
de conseil multinationales et les entreprises industrielles à risque..... 71
Table des matières 325

2.2.1  Du côté des grandes firmes nationales de conseil........................ 71


Stratégies et pratiques de codification ou de personnalisation........... 71
Deux récits illustratifs : Andersen Consulting et Ernst & Young
d’une part, et Bain & Company et McKinsey & Company d’autre part.. 72
2.2.2  Du côté des firmes industrielles dites « à risque » :
le cas du CEA............................................................................. 75
La méthode REX (Retour d’EXpérience)............................................ 78
La méthode MEREX (Mise En Règle de l’Expérience).......................... 78
Les méthodes TRIZ et la théorie C-­K............................................... 79
2.3. Une courte synthèse de la nouvelle dynamique interactive
dans la période contemporaine............................................................ 79
Pour conclure : des dynamiques sans limite........................................ 80
Une prolongation et une accélération sans limite
des caractéristiques antérieures...................................................... 80
De nouvelles perspectives pour le knowledge management................. 81

Chapitre 3
La collaboration et ses usages, comme forme interactive
de la gestion des savoirs.............................................................................. 87
1. Un survol historique et sociologique
sur les pratiques de collaboration.......................................................... 88
1.1. Regards sur l’histoire ancienne............................................................ 88
1.1.1  La préhistoire et l’Antiquité........................................................ 89
Du côté des réseaux sociaux.......................................................... 89
Du côté des communautaire........................................................... 89
1.1.2  Compagnonnages et corporations et la centration sur le métier.... 90
1.2. Une Approche fondée sur les origines et les sources sociologiques :
Tönnies, Weber, Durkheim et Simmel................................................... 90
1.2.1  Communautés et sociétés selon Tönnies (1855‑1936)................. 91
1.2.2  Communalisation et sociation selon Weber (1864‑1920)............. 92
1.2.3  Solidarité mécanique et organique selon Émile Durkheim
(1858‑1917).............................................................................. 93
1.2.4  Microsociologie et macrosociologie autour de Georg Simmel
(1858‑1918).............................................................................. 93
La construction du social : « sociabilité » et « cercles sociaux »......... 93
Métropole et mentalité.................................................................. 94
1.2.5  Une typologie structurante.......................................................... 94
1.3. L’analyse sociologique contemporaine des réseaux et communautés :
nature et densité des liens sociaux..................................................... 94
1.3.1  Charles Cooley (1864‑1924) :
le groupe primaire et le groupe secondaire.................................. 95
1.3.2  John A. Barnes (1918‑2010) en son île norvégienne................... 95
1.3.3  Jacob Moreno (1889‑1974) et la sociométrie.............................. 95
Le test sociométrique.................................................................... 96
Le sociogramme........................................................................... 96
1.3.4  Stanley Milgram (1933‑1984) et son « petit monde »................. 96
326 L’entreprise à l’ére du digital

1.3.5  Mark Granovetter (1943) et « la force des liens faibles »............ 97


Des liens forts sur la base d’un réseau primaire................................ 97
Des liens faibles autour de relations périphériques........................... 98
1.4. Le capital social................................................................................... 99
1.4.1  Le concept de capital social........................................................ 99
1.4.2  Les auteurs canoniques référents : Nan Lin, James Coleman,
Ronald Burt, Pierre Bourdieu, Mark Granovetter et quelques autres..... 99
Nan Lin (1938) et le processus d’accès aux ressources pertinentes..... 99
Ronald Burt (1949), les « trous structuraux » et le capital social........ 100
James Coleman (1926‑1995) et sa tentative d’une approche globale... 101
Pierre Bourdieu, le capital social comme reproduction
des positions de pouvoir............................................................... 102
Granovetter et la notion d’encastrement.......................................... 104
1.4.3  Une perspective du capital social fondée sur la confiance
et la réciprocité autour de Michel Lallemand
et de quelques autres................................................................. 104
Raffiner et clarifier l’usage du capital social.................................... 104
Une centration sur la confiance, la solidarité et la réciprocité........... 105
2. Les communautés de pratique (COPs), première génération, en action :
auteurs, caractéristiques et illustrations............................................... 106
2.1. Les travaux empiriques sur les communautés de pratique
à travers deux récits fondateurs : Xerox et Schlumberger.................... 106
2.1.1 Les CoPs autogérées des techniciens de maintenance Xerox......... 106
Le contexte du récit ethnographique............................................... 106
L’entrée en scène de l’anthropologue Julian Orr............................... 107
Le récit d’une journée de travail des techniciens.............................. 107
La construction d’un « répertoire de pratique »
autour de la « communauté des techniciens ».................................. 108
Le lancement du projet Eureka en 2001 : fonctionnement et effets.... 109
2.1.2  Schlumberger : une entreprise référente,
à l’avant-­garde des communautés de pratique............................. 111
2.2. Les Approches théorico-­pratiques :
Lave, Wenger, Brown, Duguit et quelques autres................................. 113
2.2.1  Qu’est-­ce qu’une communauté de pratique ?................................ 113
2.2.2  Les principaux concepts associés aux CoPs.................................. 115
Les perspectives de « l’apprentissage situé » (Situated Learning)......... 115
Le concept de « pratique »............................................................. 116
Un concept associé au « faire », dans un contexte social donné…..... 116
…composé d’éléments difficilement verbalisables............................. 116
La perspective communautaire : l’engagement mutuel,
l’entreprise commune et le répertoire de ressources partagé.............. 116
L’engagement mutuel.................................................................... 117
L’entreprise commune.................................................................... 117
Le répertoire partagé.................................................................... 118
2.2.3  L’inscription au départ dans une logique de communauté
de pratique autonome ou autogérée........................................... 118
Une position initialement presque constante................................... 118
…qui tendra à évoluer par la suite................................................. 119
Table des matières 327

2.3. Caractéristiques comparatives des CoPs avec différentes formes


d’organisations, notamment les réseaux sociaux.................................. 119
2.3.1  Communautés de pratique (CoPs) et réseaux sociaux d’entreprises
(RSE)......................................................................................... 119
Plusieurs combinaisons possibles entre ces deux formes réticulaires
et communautaires....................................................................... 119
Une distinction fondée sur l’intensité des liens
et les critères de leur mesure......................................................... 120
2.3.2  CoPs, équipe de travail et équipe projet :
une perspective comparative....................................................... 121
3. Les communautés de pratique « pilotées » (CoPPs) et la coopération
avec la hiérarchie : auteurs, caractéristiques et illustrations............. 123
3.1. L’évolution des CoPs « auto-­organisées » aux CoPPs « pilotées ».......... 123
3.1.1  L’évolution vers un basculement progressif.................................. 123
Émergence du pilotage.................................................................. 123
Vers une reconnaissance officielle, source de légitimation................. 124
Des parties prenantes actives : leaders, sponsors,
community managers, etc............................................................... 124
3.1.2  Les enjeux et les intérêts associés à cette évolution
vers une gouvernance « pilotée »................................................ 124
Les limites de l’auto-­organisation................................................... 125
Le déploiement des CoPPs dans les grandes organisations................. 125
Les raisons de cet intérêt pour les CoPPs......................................... 126
3.1.3  Les différents types de cohabitation
entre les CoPs et la hiérarchie.................................................... 127
Commentaire de ce tableau.......................................................................... 129
(1) Les communautés « informelles » :
(1.1.) « autonomes » et (1.2.) « tolérées »......................................... 129
(1.1.) Les communautés « autonomes » (non parrainées).................... 129
(1.2.) Les communautés « tolérées » (acceptées de fait)...................... 129
(2) L es communautés « pilotées » :
(2.1.) « soutenues et légitimées » et (2.2) « institutionnalisées »........ 129
(2.1.) Les « communautés soutenues et légitimées »
(reconnues et gouvernées) : un idéal type hybride prometteur.... 129
(2.2.) Les communautés « institutionnalisées » (encadrées et intégrées),
assimilables à une dérive potentielle : le cas des « communautés
de projet » et des « communautés hiérarchiques »...................... 131
3.2. Le pilotage et la gouvernance associés aux CoPPs
« soutenues et légitimes »................................................................... 134
3.2.1  Les travaux de l’APQC................................................................. 134
Commentaires............................................................................... 136
Commentaires............................................................................... 138
3.2.2  Les conditions de réussite du déploiement et de la pérennisation
des CoPPs « soutenues et légitimes ».......................................... 138
Pour conclure sous forme de transition vers la seconde partie................... 145
328 L’entreprise à l’ére du digital

Partie 2
Le nouvel écosystème collaboratif de gestion du savoir
Chapitre 4
L’environnement numérique et  ses  vagues. ................................................. 155
1.  Du Web 1.0 au Web 2.0........................................................................... 156
1.1 De Tim Berners-­Lee à Tim O’Reilly....................................................... 156
1.1.1  Aux origines du Web : une base de données documentaire
pour les chercheurs du CERN....................................................... 156
1.1.2  À l’origine du concept de « Web 2.0 »........................................ 157
1.2 De nouvelles perspectives et de nouveaux usages associés
au Web 2.0.......................................................................................... 159
1.2.1  Wikipédia, pionnier du 2.0........................................................ 159
1.2.2  Du one-­to-­many au many-­to-­many........................................... 160
1.2.3  Le Web 2.0 en ses différents visages......................................... 160
1.2.4  La nature et l’ampleur du changement induit par le Web 2.0.... 162
2.  L’entreprise 2.0 et le management 2.0.................................................. 163
2.1 L’entreprise 2.0.................................................................................... 164
2.1.1  Une organisation mobilisant les technologies de type 2.0
en vue de leur usage.................................................................. 164
2.1.2  L’entreprise 2.0 : « augmentée », amplifiée et étendue............... 166
L’étude du cabinet McKinsey :
les bénéfices associés au modèle de l’entreprise 2.0......................... 166
La synthèse des cabinets Voiron et Atelya....................................... 166
Vers un référentiel idéal de l’entreprise 2.0..................................... 167
2.1.3  Le niveau de maturité d’une organisation
évoluant vers la forme 2.0.......................................................... 167
Une approche fondée sur la maturité collaborative
et les dispositifs mobilisés............................................................. 168
Une approche fondée sur la maturité organisationnelle
et les dispositifs mobilisés............................................................. 168
Une approche fondée sur les « piliers de la transformation numérique »... 169
2.2 Le management 2.0 : acteurs et fonctions.......................................... 170
2.2.1  Des acteurs multi-­connectés dans le cadre d’une gouvernance
managériale hybride et collaborative........................................... 170
Des acteurs multi-­connectés........................................................... 170
De nouveaux enjeux et challenges managériaux............................... 171
2.2.2  Les usages du management 2.0 au regard de l’organisation........ 171
2.2.3  La question de la réputation numérique...................................... 173
Le cas des rising stars................................................................... 173
Une « échelle de prestige » attachée à la réputation et à la visibilité... 174
Une échelle déployée des professionnels « repérés »
aux professionnels « consacrés »..................................................... 174
Les tensions entre l’organisation et les professionnels
réputés et consacrés..................................................................... 175
Table des matières 329

3.  La transformation numérique.................................................................. 175


3.1 Une terminologie non stabilisée à double lecture................................ 175
3.1.1  Une terminologie non stabilisée.................................................. 175
3.1.2  Une perspective plus restrictive centrée sur l’organisation :
l’approche des cabinets de conseil en management..................... 176
3.1.3  Une perspective plus globale de caractère sociétale..................... 177
Le rapport référent et étayé de Philippe Lemoine............................. 177
Les approches proposées par Wikipédia........................................... 177
Deux points de vue complémentaires : « le numérique est partout »... 178
3.2 Du côté des cabinets de conseil : de la conduite de « changement »
à celui de la « transformation »........................................................... 178
3.2.1  Le changement et ses différentes formes..................................... 179
3.2.2  La transformation....................................................................... 179
3.2.3  Posture offensive ou posture défensive........................................ 180
3.3 Travail et travailleurs numériques........................................................ 180
3.3.1  Le nouvel environnement du travail numérique........................... 180
3.3.2  Une nouvelle manière d’envisager le travail................................. 181
3.3.3  Quelles compétences pour les travailleurs numériques du futur ?.... 182
Pour conclure :
La « grande transformation des organisations » en question............... 183

Chapitre 5
Le nouvel écosysteme collaboratif de gestion du savoir :
une typologie des pratiques fondée sur les usages..................................... 185
1. Les principales variables clés à prendre en compte
dans le cadre du déploiement de la gestion du savoir........................ 186
1.1 Le rapport au savoir............................................................................. 186
1.2 La question de confiance..................................................................... 187
1.2.1  Alter et ego................................................................................ 187
1.2.2  La confiance dans la transmission des savoirs............................. 188
1.2.3  La confiance dans le cadre des communautés............................. 188
1.3 La culture de la collaboration.............................................................. 189
1.4 La structure organisationnelle du travail et le style de management...... 189
1.5 La maturité numérique......................................................................... 190
1.6 Autres variables................................................................................... 190
2. Deux perspectives dominantes en matière de gestion du savoir :
structuration et socialisation.................................................................. 190
2.1 Autour de la logique de la capitalisation :
une perspective coopérative fondée sur la structuration du savoir
en vue de leur partage et de leur transmission................................... 191
2.1.1  Qu’est-­ce qu’une démarche de capitalisation ?............................. 191
2.1.2  Les enjeux de nature économique............................................... 192
330 L’entreprise à l’ére du digital

2.1.3  Les enjeux de nature sociologique............................................... 192


2.1.4  Les enjeux de nature pédagogique et la dynamique
de la transmission : motivations, capacités
et confiance............................................................................... 194
Le transfert et ses modalités.......................................................... 194
De la motivation, de la capacité et de la vision des acteurs.............. 195
Les différentes postures du destinataire récepteur
dans la transmission de savoirs....................................................... 196
2.1.5  Une dérive à l’œuvre ? La généralisation de l’explicitation
et de la rationalisation du travail intellectuel............................. 197
Le rôle des « sachants » et des « planneurs »................................... 197
Les risques de dérive associés à la généralisation des dispositifs
normatifs et la rationalisation du travail intellectuel :
le cas des dispositifs de process..................................................... 198
2.1.6  Le travail « coopératif », pratique cohérente
avec la structuration du savoir.................................................... 198
2.2 Une perspective de la gestion des connaissances
fondée sur la socialisation et l’échange de pratiques.......................... 199
2.2.1  Caractéristiques et enjeux........................................................... 199
Une perspective valorisant le travail de type collaboratif................... 200
Un rapport au savoir moins asymétrique
qu’en matière de capitalisation...................................................... 200
Une perspective valorisant le travail de type « collaboratif ».............. 200
Collaboration soft et collaboration hard........................................... 202
2.2.2  Une mobilisation des outils fondés sur les usages....................... 202
2.2.3  Deux illustrations fondées sur les usages :
l’encyclopédie interne de Schneider Electric
et les plateformes dédiées à l’innovation participative
chez BNP Paribas........................................................................ 203
L’encyclopédie interne de Schneider Electric.................................... 203
2.2.4  De la coopération vers la dynamique
de l’intelligence collaborative...................................................... 207
Une dynamique de la collaboration…............................................. 207
…qui possède aussi ses limites et ses défaillances........................... 207
2.2.5  Le pari de la multitude, forme aboutie
de sagesse et d’intelligence ?...................................................... 209
The Wisdom of Crowds selon Surowiecki........................................... 210
Le crowdsourcing selon Jeff Howe................................................... 211
L’« Alchimie des multitudes » selon Francis Pisani
et Dominique Piotet...................................................................... 211
La puissance contributive de la multitude,
selon Nicolas Colin et Henri Verdier................................................ 212
Des perspectives académiques........................................................ 214
Quelques illustrations : Crow Spirit Innocentive, YourEncore,
Nine Sigma, etc............................................................................ 214
2.2.6  Le pari recevable et conditionnel de la multitude :
vers des « capacités cognitives collaboratives potentiellement
décuplées » en vue de leur usage............................................... 215
En guise de synthèse de cette partie : vers le capital sociocognitif..... 216
Table des matières 331

3.  Les quatre modèles types d’entreprises, fondés sur les usages.......... 218
3.1 Présentation du schéma 4 bis et structuration des modèles
du nouvel écosystème collaboratif de gestion et de circulation
des savoirs (GCS)................................................................................. 218
3.1.1  L’axe horizontal structuration – socialisation............................... 218
3.1.2  L’axe vertical flux – stocks.......................................................... 218
La logique de « stock » : autour des contenus.................................. 219
La logique de « flux », autour de la circulation :
plus horizontale et plus interactive................................................. 219
3.1.3  Quatre modèles types d’usages dominants,
mobiles et dynamiques, de gestion du savoir.............................. 219
Des modèles types évolutifs........................................................... 219
Une dynamique vertueuse.............................................................. 219
Le cas de Michelin et du CEA......................................................... 220
3.2 Le Modèle type 1 et usages dominants : People centric....................... 221
3.2.1  Description de l’esprit et des pratiques dominantes
du modèle.................................................................................. 221
Un état d’esprit : People before process........................................... 221
Des dérives potentielles et des limites............................................ 222
La question de la capitalisation et de la gestion des contenus :
comment sauvegarder les contenus pertinents ?............................... 222
Le calcul du retour sur investissement............................................ 223
3.2.2  Illustrations : les cas Danone et Michelin.................................... 224
3.3 Le modèle type 2 et usages dominants mais dépassés :
Heavy content centric........................................................................... 229
3.3.1  Un modèle en voie de désuétude................................................ 229
3.3.2  Une culture verticalisée............................................................... 229
3.4 Le modèle type 3 et usages dominants :
Knowledgeable people centric................................................................ 230
3.4.1  Description de l’esprit et des pratiques dominantes
du modèle.................................................................................. 230
Situation 1 : revitaliser le modèle type 2
(Heavy/hard content centric).......................................................... 230
Situation 2 : démarrer en amont, d’emblée et durablement,
le modèle de type 2..................................................................... 231
3.4.2  Illustrations : les cas d’Accenture, du CEA et d’EDF..................... 231
La firme Accenture....................................................................... 231
Le cas du CEA.............................................................................. 233
La division Ingénierie Nucléaire d’EDF............................................. 237
3.5 Le modèle type 4 et ses usages dominants : Soft content centric........ 240
3.5.1  Description de l’esprit et des pratiques dominantes
du modèle 4............................................................................... 240
Son positionnement...................................................................... 240
3.5.2  Illustration : le cas de l’entreprise Brain Services........................ 241
Présentation de l’entreprise et de son fondateur.............................. 241
Un positionnement stratégique : une offre personnalisée
et singulière fondée sur la « réflexivité »......................................... 242
332 L’entreprise à l’ére du digital

Les conditions du développement : une hybridation apparemment


improbable fondée sur une présomption de confiance qui se déploie
dans la durée............................................................................... 243
Stratégie de gestion du savoir et gestion des contenus..................... 244
Pour conclure :
Un cadre structurant pour une démarche stratégique
et opérationnelle active en matière de gestion du savoir.................. 245
Un cadre structurant et dynamique................................................. 245
Permettant une démarche de (re)positionnement
stratégique et opérationnel de la gestion du savoir.......................... 245

Chapitre 6
Gérer les contenus et évaluer les bénéfices attendus
du nouvel écosystème. ................................................................ 249
1.  La question de la gestion des contenus................................................ 250
1.1 Une croissance volumétrique exponentielle des contenus.................... 250
1.1.1  Court survol historique................................................................ 250
1.1.2  Des organisations et des employés surchargés............................. 251
1.2 Organiser les contenus......................................................................... 251
1.2.1  Définir et positionner les contenus.............................................. 251
Un positionnement dans la partie basse du schéma
sur la gestion du savoir dans le nouvel écosystème
collaboratif de gestion du savoir.................................................... 252
Des types de contenus attachés à la socialisation
et à la structuration....................................................................... 252
1.2.2  Gérer des espaces de contenus.................................................... 253
1.2.3  Gérer des métadonnées............................................................... 253
1.2.4 Naviguer..................................................................................... 254
1.2.5  Trouver : les moteurs de recherche traditionnels.......................... 254
1.3 La perspective sémantique de la recherche.......................................... 255
1.3.1  Vers des moteurs de recherche sémantique.................................. 255
1.3.2  Des dispositifs associés au Web sémantique................................ 256
L’agent intelligent........................................................................ 257
Le text mining.............................................................................. 257
1.4 L’illustration du CEA............................................................................. 257
2. La question de l’évaluation des bénéfices attachés à la gestion
des savoirs................................................................................................. 259
2.1 Le cadre du problème : faut-­il s’engager dans cette démarche ?......... 259
2.1.1  Arguments et contre-­arguments................................................... 259
Du côté des réserves au regard de cette démarche........................... 259
Des contre-arguments à entendre pour cette démarche .................... 260
2.1.2  Deux grandes familles de métriques mobilisables :
l’une fondée sur l’« usage » et l’autre fondée sur la « valeur »
créée par le système de gestion du savoir (S.G.S.)...................... 261
Table des matières 333

2.2 Les bénéfices vus du côté de la recherche........................................... 261


2.2.1  Les recherches à dominante économique..................................... 261
Une contribution à l’amélioration des performances,
complexe cependant à établir........................................................ 261
La réduction des « coûts d’exploitation »......................................... 262
Une recherche fondée sur le ratio coût/bénéfices............................. 262
De la transmission des savoirs et de ses impacts
en termes d’avantage concurrentiel................................................. 263
2.2.2  Une approche synthétique
sur les enjeux et les apports des communautés
pour une organisation et pour ses membres................................ 263
2.2.3  L’amélioration par les CoPs de la performance
par le développement du capital social....................................... 264
Retour sur le capital social............................................................ 264
Confirmation de la dynamique capital social-­capital
intellectuel-­avantage concurrentiel................................................. 265
2.2.4  Une synthèse des principaux travaux de recherche....................... 265
2.3 Du côté des praticiens du savoir :
métriques mobilisables et bénéfices potentiels.................................... 266
2.3.1  Du côté de métriques plus orientées knowledge management..... 266
Des métriques opérationnelles : business outcome, business value,
output et activités......................................................................... 266
Des métriques complémentaires originales :
mesure du « risque » et mesure du « service rendu »......................... 267
2.3.2  Du côté des métriques plus orientées sur les CoPs....................... 268
Des métriques orientées sur l’« activité »......................................... 269
Une métrique se réfère aux « belles histoires »................................. 270
Une métrique émergente issue de la théorie des jeux....................... 270
Une illustration : le point de vue d’un expert de Schneider Electric.... 270
2.3.3  Une synthèse des métriques liées aux pratiques de terrain.......... 272
Pour conclure : gérer impérativement les contenus,
évaluer avec perspicacité les bénéfices attendus................................. 274
Du côté de la gestion des contenus :
pour une activation de la démarche................................................ 274
Du côté de l’évaluation des bénéfices : une réponse plus nuancée...... 275
Conclusion générale.................................................................................... 277
1. L’entreprise et ses « mondes de grandeur », ou janus à deux faces :
ordre et désordre...................................................................................... 277
Le monde homogène vertical, plutôt conforme et ordonné................ 278
Le monde hétérogène plus transversal et diversifié........................... 278
Vers un monde hybride et dynamique............................................. 278
2. Donner et recevoir au temps des sociétés archaïques
et à l’ère numérique : « le lien importe plus que le bien ».................. 279
3. La transformation numérique à la croisée des chemins....................... 280
Une perspective prometteuse......................................................... 280
Une version plus grise................................................................... 280
La confiance rapporte plus que le contrôle...................................... 281
334 L’entreprise à l’ére du digital

Bibliographie générale.................................................................................... 285

Liste des encadrés. ......................................................................................... 311

Liste des tableaux............................................................................................ 315

Liste des schémas............................................................................................ 317

Index................................................................................................................ 319
L’entreprise à l’ère du digital
Les nouvelles pratiques collaboratives
Nous entrons durablement dans l’ère de la grande transformation digitale des
entreprises conduisant à revisiter profondément les pratiques collaboratives
ainsi que la gestion du savoir, variables clés de cette transformation et
génératrices de performances durables.
De manière à éclairer cette métamorphose, l’auteur propose une approche
diversifiée, à la fois historique, sociologique, managériale et économique,
enrichie par de nombreux témoignages d’experts et de praticiens.
Cette perspective pluridisciplinaire et pragmatique, renouvelée et novatrice,
offrira ainsi à un large public composé de dirigeants, de managers, de
professionnels, de consultants et de chercheurs, la possibilité de mieux saisir
les enjeux de cette transformation digitale et d’assurer son déploiement ou
son évolution, dans les meilleures conditions.

« Le livre de Jean-Pierre Bouchez est une articulation remarquable entre les
références académiques et les pratiques de terrain, révélées par une investigation
approfondie auprès des acteurs concernés. Les pistes qu’il ouvre dans ses
recommandations sont prometteuses pour l’avenir de ce domaine en pleine
expansion. » Jean-Louis Ermine, Expert en knowledge management, Fondateur
du club Gestion des connaissances.
« Jean-Pierre Bouchez a réussi à interpénétrer dans son ouvrage les modèles
théoriques du knowledge management avec les retours d’expérience des praticiens
de terrain. Son modèle de nouvel écosystème collaboratif est très pertinent. »
Louis-Pierre Guillaume, Knowledge Manager Officer du groupe Schneider Electric.
« Un livre intelligent et pragmatique sur la capitalisation des savoirs et le knowledge
management. Avec un message fort : l’approche systémique dans l’écosystème
collaboratif. » Joël de Rosnay, Président exécutif de Biotics International.
« Dans cet ouvrage remarquablement documenté, Jean-Pierre Bouchez s’attache
à combiner théorie et pratique. Il démontre par l’exemple en quoi les économies
de collaboration créent une nouvelle frontière de compétitivité.» Martin Roulleaux-
Dugage, VP Expertise et KM d’AREVA (Direction de la R&D).
« Le capital humain devient la pierre angulaire du changement. C’est ce que démontre
par une approche à la fois concrète, pratique et documentée académiquement,
l’ouvrage de Jean-Pierre Bouchez, particulièrement bienvenu et très riche. »
Dominique-Turck, Président de Boostzone Institute, ancien Partner de McKinsey.

Jean-Pierre Bouchez, titulaire d’un PhD en sciences de gestion,


est Président de PlaNet S@voir, consultant, conférencier et chercheur
(Université de Versailles). À ce titre, il est intervenu auprès d’une centaine
d’organisations en France et à l’étranger. Il a été auparavant dirigeant au
sein de grands groupes et est par ailleurs auteur de plusieurs ouvrages, ainsi
que de nombreuses publications à caractère académique et professionnel.
Il publie régulièrement des points de vue dans les grands médias français (Le Monde,
Les Echos, La Tribune).
Contact : http//jeanpierrebouchez.com.

BOUCHEZ
ISBN : 978-2-8073-0620-2
ISSN : 1781-4944

www.deboecksuperieur.com

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