Optique Ondulatoire
Optique Ondulatoire
Optique
Modele
s
alaire des 6
ondes lumineuses
La nature ondulatoire de la lumière, objet de controverse scientifique aux XV II ème et XV III ème
siècles, fut définitivement établie par la découverte, au début du XIX ème siècle, des phéno-
mènes d’interférence et de diffraction. Ces phénomènes sont observés avec tous les types
d’onde.
L’optique ondulatoire est une théorie élaborée au début du XIX ème siècle qui les interprète.
Elle englobe les résultats de l’optique géométrique qui est une approximation de l’optique
ondulatoire valable dans la limite des très faibles longueurs d’onde (par rapport à la dimension
des obstacles rencontrés par la lumière).
Avec sa théorie électromagnétique, Maxwell élucida à la fin du XIX ème siècle la question
de la nature de l’onde lumineuse : c’est une onde électromagnétique. La théorie scalaire de
l’optique ondulatoire est donc une approximation par rapport à la théorie des ondes électro-
magnétiques, ondes vectorielles. On discutera la validité de ce point de vue.
Enfin, la découverte au début du XX ème siècle des propriétés corpusculaires de la lumière
contraint les physiciens à admettre la dualité onde-corpuscule de la lumière. On découvrit au
cours de la même période que toutes les particules élémentaires ont également une double na-
ture, ondulatoire et corpusculaire. La mécanique quantique fut élaborée pour tenir compte
de cette double nature. La mécanique classique est une approximation de la mécanique
quantique exactement comme l’optique géométrique est une approximation de l’optique on-
dulatoire.
Dans ce chapitre on pose les bases de l’optique ondulatoire.
le vide. Dans le cas d’une onde plane (voir chapitre 18), ces vecteurs sont perpendiculaires
entre eux et à la direction de propagation que l’on supposera être celle du vecteur #»
u z dans la
discussion qui suit.
y #»
E
z
direction de propagation
x
#»
Dans le cas de la lumière naturelle, la direction du vecteur E change de manière aléatoire
au cours du temps ; la durée moyenne entre deux changements est le temps de cohérence
τc qui sera défini plus loin dans ce chapitre. À ce stade, il suffit de savoir que ce temps
est extrêmement bref par rapport à la durée d’une expérience. Ainsi il n’est pas possible
#»
d’attribuer une direction au champ E . On dit que la lumière naturelle est non polarisée.
La lumière polarisée a la particularité de présenter une géométrie précise pour le champ
électrique dans le plan perpendiculaire à la direction de propagation. Elle est produite à partir
de la lumière naturelle à l’aide de dispositifs appropriés (voir chapitre 18).
Pour une lumière non polarisée, les deux composantes Ex et Ey du champ électrique dans le
plan perpendiculaire à la direction de propagation sont parfaitement équivalentes.
182
LE MODÈLE SCALAIRE DE LA LUMIÈRE
b) Propriétés
La vibration lumineuse se propage dans les milieux transparent, le long des rayons
c
lumineux, à la vitesse v = où n est l’indice optique du milieu.
n
L’indice n est le même que celui qui intervient dans la loi de la réfraction.
On admet aussi le théorème de superposition :
s(M,t) = ∑ si (M,t)
i
#» #»
E1 E2
u#»1
u#»
2
L’œil Pour observer à l’œil, on place un écran diffusant (par exemple une feuille de papier)
dans le champ éclairé de telle manière qu’il soit approximativement orthogonal aux rayons
183
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
lumineux. Chaque point M de l’écran renvoie dans toutes les directions de l’espace (et en
particulier en direction de l’œil) l’énergie lumineuse qu’il reçoit. La sensation visuelle dépend
de la puissance reçue par l’œil, qui est différente suivant le point M de l’écran. Le temps de
réponse est typiquement τ ≃ 0, 1 s.
Exemple
Un film de cinéma est projeté à raison de 24 images par seconde. Les mouvements filmés
1
semblent continus parce que le temps de réponse de l’œil est supérieur à s ≃ 0, 04 s.
24
La pellicule photographique On peut mettre à la place d’un écran une pellicule photogra-
phique. Le signal enregistré est l’énergie reçue pendant la durée d’exposition τ ∼ 10−4 à 10−2 s
qui joue le rôle de temps de réponse.
Le capteur CCD Le capteur CCD, acronyme du nom anglais Charge - Coupled Device, est
l’élément sensible des appareils photographiques numériques. Il fournit pour chaque pixel
de l’image les valeurs des trois puissances lumineuses pour les trois couleurs rouge, vert
et bleu du système RGB. Un capteur de 12 millions de pixels est typiquement un tableau
rectangulaire de 4000 × 3000 cellules comportant chacune 4 photorécepteurs (1 pour le rouge,
2 pour le vert et 1 pour le bleu) et dont la taille est de l’ordre de quelques micromètres. Son
temps de réponse est inférieur à 10−2s.
184
L UMIÈRE MONOCHROMATIQUE
On verra dans le cours d’électromagnétisme que la puissance lumineuse surfacique est pro-
portionnelle au carré de la vibration lumineuse s2 (M,t).
où K est une constante positive et où le symbole h...i désigne la moyenne dans le temps.
Remarque
I = hs2 (M,t)i .
2 Lumière monochromatique
2.1 Définition
c 2π c
λ0 = cT = = .
ν ω
λ0 est la distance sur laquelle la lumière se propage pendant la période T de l’onde.
185
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
Remarque
On peut aussi définir la longueur d’onde dans un milieu matériel où l’onde se propage
c
à la vitesse :
n
c c λ0
λ= T= ou encore λ = . (6.3)
n nν n
telle que la vibration réelle est : s(M,t) = Re(s(M,t)). Son amplitude est : s0 (M) = |s(M,t)|.
1 1
E (M) = K|s(M)|2 = Ks(M,t)s(M,t)∗
2 2 (6.6)
1 1
I(M) = |s(M,t)|2 = s(M,t)s(M,t)∗
2 2
186
C HEMIN OPTIQUE
3 Chemin optique
3.1 Définition
On a vu que la vibration lumineuse se propage le long des rayons lumineux. Soit un rayon
lumineux passant par M puis par N (figure 6.3).
P
N
M
187
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
J
I N
n1 n2 n3
On peut écrire :
(MN) = (MI) + (IJ) + (JN)
(6.10)
= n1 MI + n2IJ + n3 JN
On retiendra la méthode pratique suivante :
Le chemin optique le long d’un rayon lumineux est égal à la longueur du rayon multi-
pliée par l’indice du milieu transparent qu’il traverse.
#»
On peut alors écrire : (AB) = n #»
u · AB, où #»
u orienté dans le sens de parcours de la lumière.
On en déduit :
ω 2π
ϕ (N) = ϕ (M) + ω tMN = ϕ (M) + (MN) = ϕ (M) + (MN)
c λ0
188
C HEMIN OPTIQUE
Par exemple, si la lumière, se propageant dans un milieu homogène d’indice n, passe par M,
se réfléchit en I sur un métal puis arrive en N :
λ0
(MN) = nMI + + nIN,
2
λ0
le terme provenant de la réflexion métallique.
2
Une surface d’onde relative au point source S est une surface formée des points M
tels que (SM) = constante, ou encore, ce qui est équivalent, ϕ (M) = constante.
(SM)
Étant donné que la vibration en M reproduit la vibration à la source avec le retard tSM =
c
(et éventuellement une diminution d’amplitude) on peut dire que :
189
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
Théorème de Malus : Les surfaces d’onde relatives au point source S sont orthogonales
aux rayons lumineux issus de S.
Conformément au programme, on admet ce résultat qui est illustré dans les deux paragraphes
suivants.
rayon 2
M1
système A′
A
optique
M2
rayon 1
n n′
Avant le système optique, les rayons lumineux sont des droites passant par A. Les surfaces
d’onde doivent être orthogonales à ces droites d’après le théorème de Malus ; ce sont donc des
sphères de centre A. Pour une raison analogue les surfaces d’onde, après le système optique,
sont des sphères de centre A′ .
On veut comparer le chemin optique de A à A′ le long de deux rayons différents numérotés
1 et 2. Soient M1 et M2 des points situés sur ces rayons, après le système optique et sur
une même surface d’onde (figure 6.5). Par définition des surfaces d’onde on a (AM1 ) =
(AM2 ). De plus, M1 et M2 se trouvant sur une sphère de centre A′ , M1 A′ = M2 A′ donc
(M1 A′ ) = n′ M1 A′ = n′ M2 A′ = (M2 A′ ), n′ étant l’indice du milieu à la sortie du système op-
tique. On trouve donc :
Lorsque deux points A et A′ sont conjugués par un système optique, le chemin optique
(AA′ ) est le même le long de tous les rayons allant de A à A′ .
190
O NDE SPHÉRIQUE , ONDE PLANE
Une onde sphérique est une onde ayant l’une des caractéristiques suivantes :
• les rayons lumineux sont des droites concourantes en un point S,
• les surfaces d’onde sont des sphères centrées sur S.
S S
a) b)
Exemple
Sur la figure 6.5, l’onde émise par le point A est une onde sphérique divergente. L’onde
sortant du système optique est une onde sphérique convergente jusqu’au point A′ , puis
une onde sphérique divergente.
191
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
Dans le cas d’une onde sphérique convergente, le rayon passe par S après le point M donc
2π 2π 2π n
ϕ0 = ϕ (M) + (MS) soit ϕ (M) = ϕ0 − (MS) = ϕ0 − SM . (6.13)
λ0 λ0 λ0
A
s0 (M) = ,
SM
où A est une constante. Dans toutes les applications des chapitres suivants, la distance SM sera
quasiment constante dans la zone d’intérêt et on fera pour l’onde sphérique l’approximation :
s0 (M) ≃ constante = s0 .
2π n
s(M,t) = s0 cos ω t − ϕ0 ± SM , (6.14)
λ0
Une onde plane est une onde ayant l’une des caractéristiques suivantes :
• les rayons lumineux sont des droites parallèles entre elles,
• les surfaces d’onde sont des plans parallèles entre eux appelés plans d’onde.
u
#»
S
192
O NDE SPHÉRIQUE , ONDE PLANE
Notons #»u le vecteur unitaire parallèle aux rayons dirigé dans le sens de propagation de la
lumière. Une onde plane peut être considérée comme l’onde émise par une source ponctuelle
S située à l’infini dans la direction − #»
u.
Dans les situations concrètes l’onde plane est :
• l’onde d’un faisceau laser dans une modélisation très simple,
• la lumière provenant d’une source très éloignée (c’est-à-dire à distance très supérieure aux
dimensions des instruments utilisés) et quasi-ponctuelle (c’est-à-dire de dimension très
inférieure à sa distance) par exemple une étoile,
• l’onde produite par un collimateur c’est-à-dire une source ponctuelle S placée dans le plan
focal objet d’une lentille convergente (voir plus bas).
d’où, puisque r0 ≫ OM :
s
# » # »!
u · OM OM 2
#» u · OM
#» # »
SM = r0 1+2 + 2 ≃ r0 1 + u · OM
= r0 + #»
r0 r0 r0
2π n #» # »
ϕ (M) = ϕ (O) + u · OM . (6.15)
λ0
Remarque
On peut retrouver la formule (6.15) par le raisonnement suivant. Soit H le projeté or-
thogonal de M sur le rayon passant par O (figure 6.8). D’après le théorème de Malus,
M et H sont dans un même plan d’onde donc ϕ (M) = ϕ (H). D’autre part :
2π 2π 2π n #» # »
ϕ (H) − ϕ (O) = (OH) = nOH = u · OM.
λ0 λ0 λ0
193
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
S
M
H u
#»
s0 (M) = constante = s0 .
• en notation complexe :
2π n #» # »
s(M,t) = s0 exp (−iϕ0 ) exp i ω t − u · OM .
λ0
194
O NDE SPHÉRIQUE , ONDE PLANE
• Cas (d) : l’onde plane se propageant dans la direction et le sens de l’axe de la lentille est
transformée en onde sphérique convergente (puis divergente) de centre F ′ , foyer image
principal de la lentille.
• Cas (e) : l’onde plane se propageant selon le vecteur #»
u est transformée en onde sphérique
convergente (puis divergente) de centre φ ′ , foyer image secondaire, intersection du plan
focal image et de la droite (O, #»
u ).
Les cas (b) et (c) correspondent à un collimateur, appareil comportant une lentille conver-
gente et une ouverture ponctuelle placée dans le plan focal image la lentille. En éclairant
l’ouverture avec une source on fabrique une onde plane.
A A′
(a)
u
#» φ
u
#»
F F O
(b) (c)
u
#» φ′
u
#»
F′ O F′
(d) (e)
195
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
5 Lumières réelles
5.1 Composition spectrale
Il n’existe pas dans la réalité de lumière parfaitement monochromatique.
Cependant, toute vibration lumineuse « réelle » s(M,t) peut se décomposer en somme de
vibrations monochromatiques. C’est que l’on observe expérimentalement en faisant passer un
pinceau de lumière dans un prisme de verre : les différentes composantes monochromatiques
sont séparées et on observe le spectre de la lumière. Les spectromètres à réseau permettent
une détermination du spectre plus précise qu’avec un prisme.
La méthode mathématique correspondant à cela est la transformation de Fourier (voir ap-
pendice mathématique).
L’éclairement est la somme des éclairement dus aux différentes composantes monochroma-
tiques.
Le spectre de la lumière, tel qu’on l’observe dans l’expérience du prisme, est l’image de la
fonction Eλ (λ0 ).
Remarque
On définit aussi une densité spectrale Eν par rapport à la fréquence. Ces deux densités
c
spectrales sont liées puisque ν = . L’intervalle de longueur d’onde [λ0 , λ0 + dλ0 ]
λ0
correspond à l’intervalle de fréquence [ν + dν , ν ] avec :
c c
dν = d = − 2 dλ0 .
λ0 λ0
On a donc :
dE = Eλ (λ0 )dλ0 = Eν (ν )|dν |,
d’où :
λ02 c c
Eν (ν ) = Eλ (λ0 ) = 2 Eλ ,
c ν ν
et de même :
c c
Eλ (λ0 ) = 2 Eν .
λ0 λ0
196
L UMIÈRES RÉELLES
Une lumière blanche est une lumière dont le spectre est continu et contient toutes les
longueurs d’onde du domaine visible.
C’est le cas de la lumière du Soleil dont le spectre, représenté sur la figure 6.10, contient ces
longueurs d’onde avec un poids sensiblement égal.
Les lampes à filament fonctionnent sur le principe de l’émission thermique : émission de
lumière par un corps chaud. Elles émettent un spectre continu, assez pauvre en courtes lon-
gueurs d’onde ce qui explique l’aspect jaune de cette lumière (voir figure 6.10). L’émission
de lumière visible s’accompagne aussi d’une forte émission dans le domaine des infrarouges,
ce qui a pour effet de chauffer la lampe et faire diminuer très fortement le rendement énergé-
tique.
Les lampes dites « à économie d’énergie » fonctionnement différemment. Un tube à dé-
charge, analogue à celui d’une lampe spectrale (voir paragraphe suivant) produit une lumière
au spectre discret. Cette lumière est en partie absorbée par une substance fluorescente qui
réémet une lumière au spectre continu. Le spectre de la lumière émise contient des pics cor-
respondant aux longueurs d’onde émises par le tube à décharge superposés au spectre continu
de la fluorescence (voir figure 6.11).
Les diodes électroluminescentes fonctionnent sur le même principe, à partir d’une raie bleue
assez large, émise à la suite d’une recombinaison électron-trou à la jonction entre deux semi-
conducteurs.
Eλ
Eλ
λ (nm) λ (nm)
400 500 600 700 400 500 600 700
Figure 6.10 – Spectres de la Figure 6.11 – Spectre d’une
lumière solaire (trait plein) et de la lampe « à économie
lumière d’une lampe à filament d’énergie ».
(pointillé).
197
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
Une lampe spectrale émet une série de longueurs d’onde caractéristique de l’élément
qu’elle contient. Le spectre est constitué de pics fins appelés raies spectrales.
La figure 6.12 montre l’allure du spectre d’une lampe au mercure utilisée en travaux pra-
tiques : on trouve principalement une raie violette (404,7 nm), une raie indigo (435,8 nm),
une raie verte (546,1 nm) et un doublet jaune orangé (577,0 et 579,1 nm) non résolu sur la
figure. Il existe aussi une raie ultraviolette assez importante, qui est en dehors de la figure.
Eλ
λ (nm)
400 500 600 700
La lumière d’une lampe au sodium (utilisée en travaux pratiques ou pour l’éclairage urbain)
est jaune orangé et contient essentiellement deux longueurs d’onde très voisines 589, 0 et
589, 6 nm. C’est le « doublet jaune » du sodium.
La lumière d’un faisceau laser présente une raie spectrale unique beaucoup plus fine
qu’une raie de lampe spectrale.
Les lasers plus courants sont les lasers hélium-néon et les diodes laser à semi-conducteurs.
Les lasers hélium-néon les plus répandus émettent une radiation rouge de longueur d’onde
633 nm.
Le faisceau laser présente une divergence très faible. Il se caractérise aussi par un éclairement
exceptionnellement élevé, ce qui fait qu’il est dangereux de le recevoir dans l’œil.
6 Trains d’ondes
6.1 La largeur des raies spectrales
On sait mesurer le profil fin des raies spectrales. Ces raies ont une allure voisine de la figure
6.13 et sont caractérisées par :
• la longueur d’onde λ0m correspondant au maximum d’émission,
• la largeur à mi-hauteur ∆λ qui est telle que ∆λ ≪ λ0m ,
• la forme de la raie qui peut correspondre à différentes fonctions mathématiques.
198
T RAINS D ’ONDES
Eλ
∆λ
λ0 (µ m)
λ0m
Figure 6.13 – Raie spectrale. L’échelle horizontale est fortement dilatée par rapport à
celle de la figure 6.12.
Remarque
Une radiation parfaitement sinusoïdale aurait une raie parfaitement fine (∆λ = 0).
c
Dans le domaine de fréquences, la raie est caractérisée par la fréquence moyenne νm =
λ0m
et la largeur ∆ν . Étant donné que ∆λ ≪ λ0m et ∆ν ≪ νm on peut écrire :
c c∆λ ∆λ
∆ν = ∆ ≃ 2
= νm
λ0 λ0m λ0m
Ainsi :
∆λ ∆ν
≃
λ0m νm
Les valeurs des largeurs de raies sont très variables, les lasers ayant des raies nettement plus
fines que les lampes spectrales. Les ordres de grandeurs habituels sont :
∆λ
• pour une lampe spectrale : ∼ 10−3 ,
λ0m
∆λ
• pour un laser : ∼ 10−7.
λ0m
6.2 Interprétation
199
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
en prenant T ∼ 10−14 s pour la vibration lumineuse. Ce temps τc , bref à notre échelle mais
très grand devant T , est la durée de l’émission lumineuse d’un atome. L’onde limitée dans le
temps émise par un atome est appelée train d’ondes.
Les atomes émettent la lumière par trains d’ondes de durée limitée τc telle que :
1
∆ν ∼ (6.18)
τc
La durée moyenne des trains d’ondes est appelée temps de cohérence.
ℓc = cτc (6.19)
200
T RAINS D ’ONDES
s(M,t) s(M,t)
t zM
τc ℓc
(a) (b)
Figure 6.14 – (a) : extension spatiale d’un train d’ondes ; (b) : extension temporelle
d’un train d’ondes.
Il faut retenir cette relation et savoir l’établir. On remarque que ∆λ tend vers 0 quand la
longueur de cohérence tend vers l’infini : si les trains d’ondes sont infiniment longs, le signal
parfaitement sinusoïdal.
201
CHAPITRE 6 – M ODÈLE SCALAIRE DES ONDES LUMINEUSES
Remarques
s0 est la moyenne de l’amplitude sur un très grand nombre de trains d’ondes.
2π
Le retard de phase en un point M est aussi aléatoire puisque : ϕ (M) = ϕ (S) + (SM).
λ0
Enfin, il faut retenir que la moyenne intervenant dans la définition (6.1) de l’éclairement ou
de intensité vibratoire porte sur une durée de l’ordre du temps de réponse du récepteur qui est
très supérieure à τc .
SYNTHÈSE
SAVOIRS
• la grandeur (vibration) lumineuse est une composante du champ électrique d’une onde
électromagnétique
• les détecteurs optiques sont sensibles à la valeur moyenne du carré de la grandeur lumi-
neuse sur leur temps d’intégration
• le retard de phase se formule en fonction de la différence de chemin optique
• une source est caractérisée par un éclairement spectral
• l’émission des sources lumineuses classiques possède un caractère fortement aléatoire
SAVOIR-FAIRE
• définir une onde plane, une onde sphérique
• décrire la formation des images en termes de rayons lumineux et en termes de surfaces
d’onde
• utiliser l’égalité de chemins optiques sur des rayons reliant deux points conjugués
• exprimer un retard de phase en fonction de la différence de chemin optique.
• écrire la relation entre temps de cohérence et largeur spectrale spectrale
• connaître des exemples de sources lumineuse et les caractériser par leur spectre et leur
longueur de cohérence
MOTS-CLÉS
• vibration lumineuse • chemin optique • trains d’onde
• intensité, éclairement • surface d’onde • détecteur
• approximation scalaire • temps de cohérence • temps de réponse
• onde sphérique • longueur de cohérence • spectre lumineux
202
Interferen
es
de 2 ondes 7
lumineuses
1 Interférences lumineuses
Les interférences lumineuses sont une manifestation expérimentale du caractère ondulatoire
de la lumière, qui trouve une interprétation naturelle dans le cadre du formalisme de l’optique
ondulatoire. De façon générale, le terme interférences lumineuses recouvre en fait toutes les
situations où est réalisée la superposition de deux ou plusieurs ondes lumineuses.
En optique, les interférences ne sont observables que lorsque les ondes sont cohérentes :
nous serons amenés à expliciter cette notion.
Sur un plan historique, la description et l’interprétation du phénomène d’interférences lu-
mineuses doivent beaucoup à Thomas Young (1773-1829) et Augustin Fresnel (1788-1827).
D’un point de vue pratique, les interférences jouent un rôle important en métrologie, mais
aussi dans l’observation astronomique pour déterminer le diamètre des étoiles, méthode uti-
lisée depuis plus d’un siècle et encore d’actualité !
Dans ce chapitre on s’intéresse à la superposition de deux ondes lumineuses. La superposition
de N ondes fait l’objet d’un chapitre ultérieur.
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
M
b
S1
b
S2
Figure 7.1 – Superposition de deux ondes lumineuses quasi-monochromatiques
émises par deux sources ponctuelles.
On suppose que les deux ondes ont a priori des pulsations différentes. Au point M et à l’instant
t elles s’écrivent :
s1 (M,t) = s01 cos ω1t − ϕ1 (M) et s2 (M,t) = s02 cos ω2t − ϕ2 (M) ,
où la valeur moyenne est calculée pendant une durée égale à la durée d’intégration du détec-
teur (c’est la durée que prend le détecteur pour effectuer une mesure).
I(M) = hs21 (M,t)i + hs22 (M,t)i + h2s01 s02 cos ω1t − ϕ1(M) cos ω2t − ϕ2 (M) i .
Les intensités vibratoires I1 (M) et I2 (M) produites en M par S1 ou S2 seule sont respecti-
vement égales à hs21 (M,t)i et hs22 (M,t)i. La relation précédente peut donc être mise sous la
forme suivante :
I(M) = I1 (M) + I2 (M) + h2s01 s02 cos ω1t − ϕ1(M) cos ω2t − ϕ2 (M) i . (7.1)
214
INTENSITÉ VIBRATOIRE RÉSULTANTE
Remarque
On obtient la même expression pour l’éclairement, qui est proportionnel à l’intensité
vibratoire :
E (M) = E1 (M) + E2 (M) + 2Khs01 s02 cos ω1t − ϕ1 (M) cos ω2t − ϕ2 (M) i .
Le calcul de l’intensité vibratoire que l’on vient de mener permet de dégager des conditions
nécessaires de cohérence. En explicitant davantage le calcul, on obtient :
I12 (M) = h2s01 s02 cos ω1t − ϕ1 (M) cos ω2t − ϕ2 (M) i ,
= hs01 s02 cos (ω1 + ω2 )t − ϕ1(M) − ϕ2 (M) i
+hs01 s02 cos (ω1 − ω2 )t − ϕ1 (M) + ϕ2 (M) i .
Le temps de réponse des détecteurs optiques usuels est très largement supérieure à la période
des ondes lumineuses visibles (de l’ordre de 2 × 10−15 s). Dans le processus de mesure,
les termes sinusoïdaux qui figurent dans l’expression de I12 sont moyennés sur un nombre
gigantesque de périodes. Or, la moyenne d’un terme du type cos(ω t − ϕ ) est nulle, à moins
que ω ne soit nul. On en déduit que le terme d’interférences I12 est nul si ω1 6= ω2 .
Pour obtenir des interférences, on doit donc faire en sorte que les deux ondes qui interfèrent
en M aient la même pulsation. Dans toute la suite, on supposera que ω1 = ω2 = ω . Le terme
d’interférences est alors :
I12 (M) = hs01 s02 cos ϕ2 (M) − ϕ1 (M) i ,
ω (7.2)
= s01 s02 cos (S2 M) − (S1 M) + ϕ02 − ϕ01 .
c
215
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
Pour des ondes parfaitement monochromatiques, les termes s01 s02 et ϕ02 − ϕ01 restent inva-
riables. Mais celles-ci n’ont pas de réalité physique en optique. Il faut envisager une situa-
tion plus réelle : celle où les deux sources ponctuelles S1 et S2 rayonnent des ondes quasi-
monochromatiques décrites par le modèle des trains d’ondes vu dans le chapitre précédent.
Dans ce modèle les amplitudes s01 et s02 sont constantes et les phases à l’émission ϕ01 et ϕ02
varient aléatoirement dans le temps. Si ϕ02 − ϕ01 prend de très nombreuses valeurs aléatoires
pendant la durée sur laquelle la moyenne est calculée (durée égale au temps de réponse du
détecteur), la moyenne du cosinus dans (7.2) est nulle et il n’y a pas d’interférences.
On reviendra à la section 5 sur cette condition de cohérence. Dans la suite on suppose que
l’on a deux ondes cohérentes. Le terme d’interférence se met alors sous la forme :
I12 (M) = s01 s02 cos ∆ϕ (M) ,
1
où ∆ϕ (M) = ϕ2 (M) − ϕ1 (M), soit encore, puisque I1 (M) = hs21 (M,t)i = s201 et I2 (M) =
2
1
hs22 (M,t)i = s202 :
2 p
I12 (M) = 2 I1 (M)I2 (M) cos ∆ϕ (M) ,
.
3 Formule de Fresnel
3.1 Énoncé
où ∆ϕ (M) représente le retard de phase au point M d’une onde par rapport à l’autre.
Remarque
En utilisant la notation complexe, on peut retrouver de façon rapide la formule de Fres-
nel pour deux ondes monochromatiques de même pulsation. Écrivons :
s1 (M) = s10 exp i(ω t − ϕ1 (M) et s2 (M) = s20 exp i(ω t − ϕ2 (M) .
216
FORMULE DE FRESNEL
La vibration lumineuse résultante s(M) est égale à s1 (M) + s2 (M) et l’intensité vibra-
toire résultante est :
1
I(M) = s(M) · s∗ (M) ,
2
1 i ω t−ϕ1 (M) i ω t−ϕ2 (M) ω t−ϕ1 (M) −i ω t−ϕ2 (M)
= s10 e + s20e · s10 e −i + s20 e ,
2
1 2 1 2
= s10 + s20 + s10 s20 cos ϕ2 (M) − ϕ1 (M) ,
2 2
p
= I1 (M) + I2 (M) + 2 I1 (M)I2 (M) cos ∆ϕ (M) .
Interférences constructives
: elles sont réalisées en un point où I(M) > I1 (M) + I2 (M),
c’est-à-dire si cos ∆ϕ (M) > 0.
Interférences destructives : elles sont réalisées en un point où I(M) < I1 (M) + I2 (M),
c’est-à-dire si cos ∆ϕ (M) < 0.
La figure 7.2 donne l’intensité vibratoire en fonction de la différence de phase ∆ϕ (M).
I(M)
Imax
Imoy
Imin
∆ϕ (M)
π 2π 3π 4π 5π 6π 7π
Figure 7.2 – Variation de l’intensité vibratoire en fonction de la différence de phase.
Remarques
• la valeur moyenne Imoy est I1 (M) + I2 (M). Ce résultat est conforme à la conservation
de l’énergie. Le phénomène d’interférences ne modifie que la distribution spatiale de
l’énergie mais ne change pas l’énergie totale.
217
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
• l’éclairement est maximal si cos ∆ϕ (M) = 1, c’est-à-dire si :
∆ϕ (M) = 2mπ ,
Dans cette situation, Imin = 0, et l’on observe le comportement paradoxal selon lequel « lu-
mière + lumière = obscurité » 1 .
La différence des chemins optiques (S2 M) − (S1 M) est appelée différence de marche
au point M. On la note δ (M) :
1. Le phénomène d’interférences totalement destructives est aussi obtenu en acoustique. On parle de contrôle
actif du bruit. Ce phénomène permet d’isoler certains écouteurs du bruit environnant et d’apporter à l’utilisateur un
bon confort d’écoute.
218
FIGURE D ’INTERFÉRENCES
2πδ (M)
∆ϕ (M) = . (7.5)
λ0
Remarque
Si l’on en revient à la définition du chemin optique, la différence de marche δ (M) peut
s’écrire en fonction des temps de parcours des deux ondes :
δ (M) = c tS2 M − tS1M ,
∆ϕ (M)
p(M) = . (7.6)
2π
L’ordre d’interférences peut être relié à la différence de marche dans le cas de deux sources
synchrones :
δ (M)
p(M) = . (7.7)
λ0
4 Figure d’interférences
4.1 Champ d’interférences
On appelle champ d’interférences la zone de l’espace éclairée par les deux ondes cohé-
rentes. C’est dans cette zone nécessairement limitée qu’est éventuellement observable le phé-
nomène d’interférences.
219
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
4.3 Contraste
On suppose que les intensités vibratoires I1 (M) et I2 (M) sont pratiquement indépendants du
point M et on les note I1 et I2 . C’est le cas réel des expériences d’optique au laboratoire.
Remarque
On peut bien sûr définir le contraste à partir de l’éclairement. On obtient la même
quantité :
Emax − Emin
C= .
Emax + Emin
Le contraste est une grandeur sans dimension qui, par construction, varie entre 0 et 1. À partir
de la formule de Fresnel (7.3), on obtient :
√ √ 2 √ √ 2 √ √
I1 + I2 − I1 − I2 2 I1 I2
C= √ √ 2 √ √ 2 = I + I .
I1 + I2 + I1 − I2 1 2
C
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
u
10−4 10−3 10−2 10−1 1 10 102 103 104
I1
Figure 7.3 – Évolution du contraste en fonction du rapport u = des intensités
I2
vibratoires. L’axe horizontal est gradué selon une échelle logarithmique.
220
FIGURE D ’INTERFÉRENCES
√
I1 2 u
Posons u = . Alors, on peut écrire le contraste C sous la forme suivante : C = . Sur la
I2 1+u
figure 7.3, on a représenté les variations de C en fonction de u. On observe que le contraste
est maximum pour u = 1.
L’intensité vibratoire varie entre Imin = I0 (1 − C) et Imax = I0 (1 + C). Les figures 7.4 et 7.5
montrent l’influence du contraste sur la figure d’interférences.
I
Imax
Imoy
Imin
∆ϕ
−8π −6π −4π −2π 0 2π 4π 6π 8π
Imax
Imoy
Imin
∆ϕ
−8π −6π −4π −2π 0 2π 4π 6π 8π
221
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
ℓ c = cτ Mb
S1 b
S2 b
Figure 7.6 – Superposition des différents trains d’ondes. Cas où δ (M) < ℓc .
222
R ETOUR SUR LA NOTION DE COHÉRENCE
ℓ c = cτ M b
S1 b
S2 b
Figure 7.7 – Superposition des différents trains d’ondes. Cas où δ (M) > ℓc .
• Dans le cas où δ (M) < ℓc , on constate qu’au point M se superposent un train d’ondes issu
de S1 et sa réplique issue de S2 . Dans ce cas ϕ02 − ϕ01 garde une valeur constante non
affectée par les changements de train d’ondes (pour un dispositif symétrique ϕ01 = ϕ02 ) et
2π
ainsi ∆ϕ (M) = (S2 M) − (S1 M) + ϕ02 − ϕ01 est stable. Les deux sources S1 et S2 sont
λ0
mutuellement cohérentes.
• Dans le cas où δ (M) > ℓc , on constate qu’au point M se superposent un train d’ondes issu
de S1 et un train d’ondes différent issu de S2 . On se retrouve dans la situation de deux
sources distinctes : le terme d’interférences est nul. Les sources ne sont plus mutuellement
cohérentes.
Cette description est très simplifiée mais permet de fixer les idées. Lorsque la différence de
marche est nulle, le recouvrement en M d’un train d’ondes issu de S1 et de sa réplique issue
de S2 est complet. Les interférences sont visibles. Au fur et à mesure que la différence de
marche augmente, ce recouvrement est de plus en plus partiel. Du point de vue théorique, on
montre que la visibilité V des franges d’interférences (qui s’identifie au contraste C) décroît,
au fur et à mesure que δ (M) augmente, à partir d’une valeur maximale Vmax obtenue pour
δ (M) = 0 (voir figure 7.8).
Recouvrement de
moins en moins com-
V plet d’un train d’ondes
et de sa réplique
Vmax
δ (M)
0 ℓc
Figure 7.8 – Évolution de la visibilité V des franges d’interférences en fonction de la
différence de marche δ (M).
223
CHAPITRE 7 – I NTERFÉRENCES DE 2 ONDES LUMINEUSES
Remarques
224
R ETOUR SUR LA NOTION DE COHÉRENCE
SYNTHÈSE
SAVOIRS
• définition du phénomènes d’interférences
• conditions de cohérence mutuelle de deux ondes
• formule de Fresnel des interférences à deux ondes
• définition d’un état d’interférences totalement constructives ou complètement destruc-
tives
SAVOIR-FAIRE
• citer la formule de Fresnel
• justifier la pertinence de son utilisation
• établir la formule de Fresnel
• citer les conditions de cohérence mutuelle de deux ondes
• associer un bon contraste à deux valeurs proches de l’intensité vibratoire
• justifier et utiliser l’additivité des intensités vibratoires pour deux ondes incohérentes
• exprimer une condition d’interférences totalement constructives
• passer de l’expression de la différence de marche, à celle de la différence de phase et à
celle de l’ordre d’interférences, et réciproquement
MOTS-CLÉS
• formule de Fresnel • contraste • figure d’interférence
• cohérence • différence de marche • franges d’interférence
• interférences construc- • différence de phase • contraste ou visibilité
tives • ordre d’interférences • construction de Fresnel
• interférences destructives • champ d’interférences
225
Dispositif interferentiel
8
par division du front
d'onde : les trous d'Young
La difficulté principale pour observer des interférences est d’obtenir deux sources mutuelle-
ment cohérentes, comme on l’a vu dans le chapitre précédent. Dès 1665, Grimaldi tente de
réaliser une expérience d’interférences en illuminant deux trous avec la lumière solaire dans
le but d’obtenir des interférences résultant de la superposition de la lumière diffractée par les
deux trous. Mais, comme on le verra dans ce chapitre, le Soleil constitue une source trop large
pour que les interférences soient visibles. En 1805, Thomas Young réalise à nouveau l’expé-
rience de Grimaldi. Il utilise la lumière émise par le Soleil pour éclairer, dans une chambre
obscure, un premier trou qui joue le rôle de source primaire. Ce trou éclaire à son tour deux
autres trous. La superposition des deux ondes diffractées par les deux trous donnent lieu à un
phénomène d’interférences.
L’objet de ce chapitre est d’étudier le dispositif de Thomas Young et de préciser les conditions
expérimentales qui permettent d’obtenir des interférences visibles.
S x
b
S1
b O
b
M
S2 z
O′ b
Figure 8.1 – Dispositif des trous d’Young éclairé par une source ponctuelle.
Le dispositif des trous d’Young est un dispositif qui offre deux trajets possibles à la lumière :
l’un passe par S1 , l’autre par S2 . On dit qu’il constitue un dispositif interférentiel à deux
voies.
b
M
Dispositif inter-
férentiel à deux
S b
voies
228
LE DISPOSITIF DES TROUS D ’YOUNG
Pour un dispositif interférentiel donné, le fonctionnement par division du front d’onde dépend
du point M d’observation. Tant que ce dernier n’est pas précisé, on ne peut donc pas dire a
priori si le dispositif interférentiel opère ou non par division du front d’onde.
S1 b
M
S b b y
O O′
S2
Figure 8.3 – Représentation schématique des surfaces d’onde et des deux rayons
lumineux qui viennent interférer en M .
Les deux trous d’Young diffractent la lumière incidente. Ils sont éclairés par la même surface
d’onde et peuvent être considérés comme deux sources mutuellement cohérentes, qui vont
émettre la même séquence de trains d’ondes.
On adopte les notations suivantes : la distance entre les deux trous S1 S2 = a et la distance
OO′ = D. Dans la base cartésienne (O, #» u x , #» u z ), le point M admet les coordonnées x,
u y , #»
y = D et z. Le champ d’interférences correspond à tout le volume de l’espace où les ondes
diffractées par les deux trous se recouvrent. Expérimentalement, on constate que les franges
d’interférences sont visibles sur l’écran d’observation quelle que soit sa position au-delà des
deux trous. On dit que les interférences sont non localisées. Cette propriété est propre aux
dispositifs interférentiels fonctionnant par division du front d’onde. On admet sa généralisa-
tion.
229
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
puisque la source S est supposée équidistante des deux trous S1 et S2 . Pour évaluer les dis-
# » # »
tances S1 M et S2 M, on commence par calculer la norme au carré des vecteurs S1 M et S2 M en
faisant intervenir le point O :
# » # »2
kS1 Mk2 = S1 O + OM = kS1Ok2 + kOMk2 + 2S1O · OM .
# » # » # » # » # »
# »
On pose r = kOMk pour alléger les notations :
a2
kS1 Mk2 = + r2 + 2S1O · OM ,
# » # » # »
4
# » # »
2 OM · OS1 a2
= r 1−2 + 2 .
r2 4r
# » # »
OM · OS a
1 a2 a2
Comme r est de l’ordre de D, alors ∼ ≪ 1 et 2 ∼ 2 . On peut effectuer un
r 2 D 4r D
a
développement limité, en se limitant au termes du premier ordre en :
D
# » # » 2
OM · OS1 a
S1 M = r 1 − 2
+O ,
r D2
# »
u · OS1 ,
≃ r − #»
230
LE DISPOSITIF DES TROUS D ’YOUNG
# »
OM
où le vecteur unitaire u est : u =
#» #» . De même, on établit :
r
# »
u · OS2 .
S2 M ≃ r − #»
# »
On en déduit : S2 M − S1 M = #»
u · S2 S1 . On peut alors exprimer la différence de marche δ (M),
l’ordre d’interférences p(M) et la différence de phase ∆ϕ (M).
• Différence de marche :
# »
u · S2 S1 .
δ (M) = n S2 M − S1M = n #» (8.1)
• Différence de phase :
2π #» # »
∆ϕ (M) = n u · S2 S1 . (8.2)
λ0
• Ordre d’interférences :
n #» # »
p(M) = u · S2 S1 . (8.3)
λ0
Remarque
Les termes qui ont été négligés dans le calcul de la différence de marche doivent être
petits devant la longueur d’onde λ0 pour que l’expression (8.1) soit valide. En effet, si
l’un de ces termes était égal à λ0 /2 par exemple, cela induirait une erreur correspondant
à confondre une frange brillante et la frange sombre adjacente.
|x| a3
On peut montrer que le premier terme négligé est de l’ordre de . Si par exemple
D3
|x| a 3 D3 λ 0
a = 1, 0 mm, λ0 = 532 nm et D = 1, 0 m, alors ≪ λ 0 impose |x| ≪ =
D3 a3
2
5, 3 × 10 m, ce qui n’est guère contraignant en pratique !
c) Franges d’interférences
Afin de caractériser complètement la figure d’interférences, on poursuit le calcul de la diffé-
rence de marche δ (M). Il faut exprimer le vecteur unitaire #»
u :
# » # » p
OM = x #» u x + D #» u z =⇒ kOMk = x2 + D2 + z2 ≃ D ,
u y + z #»
si l’on se limite au premier ordre en |x| /D et |z| /D. On obtient alors, à cet ordre d’approxi-
mation :
x z
u ≃ #»
#» u x + #»
u y + #»uz.
D D
# »
Connaissant S S = a #»
2 1 u , on peut alors déterminer la différence de marche, la différence de
x
phase et l’ordre d’interférences en M à partir des relations (8.1) à (8.3), et ensuite l’expression
de l’intensité vibratoire :
231
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
• Différence de marche :
nax
δ (M) ≃ . (8.4)
D
• Différence de phase :
2nπ ax
∆ϕ (M) ≃ . (8.5)
λ0
• Ordre d’interférences :
nax
p(M) ≃ . (8.6)
λ0 D
• Intensité vibratoire :
2π nax
I(M) = 2I0 1 + cos , (8.7)
λ0 D
Remarque
Sur la figure 8.3, on a choisi de représenter un point M d’abscisse x positive. On peut
constater sur cette même figure que le chemin optique (SM)voie 2 est supérieur au che-
min optique (SM)voie 1 . Cela signifie que le retard accumulé le long de la voie 2 est plus
important que le retard accumulé le long de la voie 1, ce qui conduit à une différence
de marche δ (M) positive. C’est bien en accord avec la relation (8.4).
L’intensité vibratoire de ne dépend que de x : on observe donc sur l’écran des franges recti-
lignes, alternativement sombres et brillantes, comme l’illustre la figure 8.4.
x
−2i −i 0 i 2i
L’intensité vibratoire présente une période spatiale i qu’on nomme interfrange dont nn peut
déterminer l’expression en faisant apparaître explicitement dans l’expression de l’intensité
232
LE DISPOSITIF DES TROUS D ’YOUNG
2nπ ax 2π x
I = 2I0 1 + cos = 2I0 1 + cos .
λ0 D i
λ0 D
Par identification, on obtient i = .
na
D’autre part, chaque frange brillante est repérée par une valeur entière de l’ordre d’interfé-
λ0 D
rence. À partir de la relation (8.6), on obtient les positions des franges brillantes : x p = p
na
avec p entier. La distance entre deux franges brillantes consécutives redonne l’interfrange :
λ0 D
i = x p+1 − x p = . On retiendra le résultat suivant :
na
Les franges d’interférences, sur un écran à grande distance parallèle au plan conte-
nant les trous d’Young, apparaissent rectilignes. Leur période spatiale est appelée in-
terfrange, elle est donnée par la relation :
λ0 D
i= . (8.8)
na
Exemple
On réalise l’expérience en utilisant deux trous d’Young. L’écran est placé à une distance
D = 2, 0 m du plan des trous d’Young. Les deux trous sont éclairés par une diode laser :
λ0 = 532 nm. L’interfrange mesuré sur l’écran est : i = 2, 7 mm. Quelle est la distance a
entre les deux trous ?
5, 32 × 10−7 × 2, 0
En considérant que nair ≃ 1, on obtient : a = m, soit a = 0, 4 mm.
2, 7 × 10−3
233
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
I S1
b
M
α α
O′ y
S b b
O F2′
J
H
S2
(L1 ) (L2 )
Figure 8.5 – Représentation schématique des surfaces d’onde et des deux rayons
lumineux qui viennent interférer en M .
Les franges d’interférences sont observées dans le plan focal de la lentille (L2 ).
x
tan α = ≃α,
f′
où f ′ est la distance focale image de la lentille (L2 ) et x = F2′ M. Pour connaître l’état d’in-
234
LE DISPOSITIF DES TROUS D ’YOUNG
La source S est placée au foyer principal objet de la lentille (L1 ). Elle émet une onde sphé-
rique que la lentille transforme en onde plane. Un plan orthogonal aux rayons lumineux qui
émergent de la lentille (L1 ) est un plan d’onde : c’est le cas du plan qui contient I et J, mais
aussi de celui qui contient S1 et S2 . On a donc : (SS1 ) = (SS2).
Pour calculer (S2 M) − (S1 M), imaginons qu’on place une source ponctuelle au point M.
D’après la loi du retour inverse, les rayons issus de M seraient les mêmes, mais parcourus
en sens inverse. Le plan passant par S1 et orthogonal à ces rayons (c’est le plan représenté en
tirets sur la figure et qui contient le point H) serait, d’après le théorème de Malus, un plan
d’onde. Ainsi : (MS1 ) = (MH). Comme le chemin optique est le même quel que soit le sens
de parcours, on obtient : (S1 M) = (HM). Cette égalité signifie qu’il n’y a plus aucune diffé-
rence de marche supplémentaire au delà du plan orthogonal aux rayons lumineux et passant
par S1 et H. Donc, si les ondes arrivent déphasées en M, leur retard relatif s’est produit avant
ce plan. On obtient donc :
(S2 M) − (S1 M) = nS2 H .
Le raisonnement qu’on vient de faire est très souvent utilisé. Il est important de noter que le
plan contenant S1 et H n’est pas un plan d’onde puisque les ondes issues des deux trous S1 et
S2 ne sont pas planes ; seuls les deux rayons provenant en M sont parallèles. On dira que ce
plan est un plan d’onde relatif à M.
M étant un point à l’infini ou dans le plan focal image d’une lentille, on appelle plan
d’onde relatif à M, tout plan perpendiculaire aux rayons, parallèles entre eux, qui
passent par M.
c) Figure d’interférences
À partir de la différence de marche, on peut exprimer la différence de phase ∆ϕ (M), l’ordre
d’interférences p(M) et l’intensité vibratoire I(M) :
235
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
• Différence de phase :
• Ordre d’interférences :
δ (M) nax
p(M) = = . (8.12)
λ0 λ0 f ′
• Intensité vibratoire :
2π nax
I(M) = 2I0 1 + cos . (8.13)
λ0 f ′
λ0 f ′
i= .
na
Exemple
On réalise une expérience avec deux fentes d’Young, séparées d’une distance a = 0, 5 mm,
en utilisant le montage de la figure 8.5. On suppose que λ0 = 532 nm et f ′ = 1, 0 m.
Quelle est la valeur de l’interfrange mesuré sur l’écran ?
λ0 f ′
On suppose que l’indice de l’air est : n ≃ 1, 0. On obtient : i = = 1, 1 mm. L’utili-
na
sation d’une lentille convergente de grande distance focale permet de faciliter la mesure
de l’interfrange.
2 Modifications du dispositif
2.1 Influence du déplacement de la source ponctuelle
a) Variation de l’ordre d’interférences
On considère le montage initial, représenté sur la figure 8.1, où le point source et le point M
#»
sont situés à grande distance des trous d’Young. Mais on considère un déplacement δ s de la
#» # »
source ponctuelle. Elle passe de la position S à S′ : δ s = SS′.
236
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
#» S ′
δs b
x
b
S S1
b O
b
M
S2 z
O′ b
Dans le repère cartésien (O, #» u x , #» u z ), la source S′ est repérée par le vecteur position :
u y , #»
# »′
OS = x0 #»u x − D0 #» u z . On constate, sur la figure 8.6 que la source S′ n’est plus équi-
u y + z0 #»
distante des deux trous. Il en résulte que les chemins optiques de la source S′ aux trous S1 et
S2 ne sont plus égaux : il existe donc une différence de marche supplémentaire associée au
décalage de la source.
Le calcul de cette différence de marche supplémentaire se fait exactement comme celui qui
a conduit à la différence des chemins optiques (S2 M) − (S1 M), le point S′ jouant le rôle du
point M. En adaptant la relation (8.1), on obtient l’expression de cette différence de marche
# » # »
# » OS′ OS′ # » # » #»
supplémentaire : ∆δ (M) = n #» u 0 · S2 S1 , où #»u0 = # » ≃ . En écrivant OS′ = OS + δ s,
kOS′ k D0
on obtient : #» # »
δ s · S2 S1
∆δ (M) = n ,
D0
#» # »
puisque OS · S1 S2 = 0. On peut déduire de cette différence de marche supplémentaire, la va-
riation de l’ordre d’interférences au point d’observation M :
#» # »
δ s · S2 S1
∆p(M) = n . (8.14)
λ 0 D0
237
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
On a justifié dans le premier chapitre que deux sources ponctuelles distinctes étaient incohé-
rentes : les intensités vibratoires qu’elles produisent s’ajoutent. Par conséquent, deux sources
#» # »
ponctuelles placées en S et S′ , telles que δ s · S2 S1 = 0, produiront deux ensembles de franges
d’interférences qui vont coïncider exactement sur l’écran d’observation, puisque l’ordre d’in-
terférences p(M) est le même pour S et S′ . La figure d’interférences est dans ce cas plus
lumineuse.
En prolongeant ce raisonnement, on comprend que, dans le but d’obtenir une figure d’interfé-
rences plus lumineuse, on peut remplacer la source ponctuelle sur l’axe (Oy) par un segment
lumineux allongé dans la direction (Oz). Ce segment est constitué de sources ponctuelles
incohérents. Chacune crée sur l’écran d’observation son propre ensemble de franges d’in-
terférences. Ces systèmes de franges d’interférences coïncident exactement pour former une
figure d’interférences de même contraste qu’avec une source ponctuelle mais plus lumineuse.
On peut remplacer la source ponctuelle par une fente source allongée dans la direction
orthogonale à l’axe des deux trous, sans modifier le contraste de la figure d’interfé-
rences.
nax nab
p(M) = + . (8.15)
λ 0 D λ 0 D0
238
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
S:
x
S′ :
S et S′ :
On constate sur la figure que la superposition des intensités produites par les deux sources se
traduit par une diminution de la visibilité des franges. Comme ∆p(M) est indépendant du
point M, la diminution de la visibilité est uniforme sur l’ensemble de la figure d’interférences.
Comme les deux sources ponctuelles sont incohérentes, on peut ajouter les intensités vibra-
toires qu’elles produisent :
p+q p−q
en utilisant la relation trigonométrique : cos p + cosq = 2 cos cos . On peut
2 2
en déduire la visibilité V (ou contraste) des franges à partir des valeurs maximales et mini-
males de Itotal :
π nab
Itotal max = 4I0 1 + cos
,
λ 0 D0
π nab
Itotal min = 4I0 1 − cos .
λ 0 D0
On en déduit la visibilité V :
Itotal max − Itotal min π nab
V= = cos = cos π ∆p(M) .
Itotal max + Itotal min λ 0 D0
La figure 8.8 montre les variations de la visibilité en fonction de ∆p(M), ainsi que l’apparence
correspondante de l’intensité vibratoire totale.
239
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
∆p
V
1.0 V =1 1.0
0.8 V =0 0.5
0.6 0.0
0.4 −0.5
0.2
∆p −1.0
−1 0 1 x
nab
Figure 8.8 – Variation de la visibilité en fonction de ∆p = .
λ0 D0
La figure 8.8 montre que la visibilité V des franges s’annule pour certaines valeurs particu-
lières de ∆p. On peut deviner que cette situation correspond au cas où une source donne au
point M une frange brillante alors que l’autre source donne au même point M une frange
sombre. Cela se traduit par une différence d’ordre d’interférences égale à un demi-entier. La
1
première occurrence de cette compensation se produit donc pour ∆p(M) = . On peut en
2
déduire un critère semi-quantitatif qui exprime que le décalage des deux systèmes de franges
d’interférence est suffisamment faible pour obtenir une visibilité proche de sa valeur maxi-
male 1 :
Les franges d’interférences sont visibles au point M à condition que :
1
|∆p(M)| ≤ . (8.16)
2
240
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
∆pmax
0.5
0.0
−0.5
Pour ∆pmax (M) faible, l’alternance des franges sombres et brillantes est clairement visible.
Dès que ∆pmax augmente, la visibilité chute et l’on ne distingue plus les franges sombres des
franges brillantes : on dit que la figure d’interférences est brouillée.
Pour traduire de façon plus quantitative, les observations précédentes, on utilise le critère
semi-quantitatif de visibilité des franges (relation (8.16)) en prenant pour ∆p la moitié de la
valeur maximale 1 . La visibilité
des franges
d’interférences reste peu affectée par l’élargisse-
∆pmax (M) 1 na(2b) 1 λ 0 D0
ment de la source tant que ≤ . Cela donne : ≤ , soit a ≤ . La
2 2 2 λ 0 D0 2 2nb
2b
quantité θ = représente l’angle sous lequel est vue la source étendue depuis O, le centre
D0
des deux trous. On peut s’en servir pour exprimer autrement la condition de visibilité des
franges.
Les franges d’interférences sont observables avec une bonne visibilité à condition que :
a ≤ ℓs , (8.17)
λ0
où ℓs = est la longueur de cohérence spatiale de la source. Plus la source est vue
nθ
sous un angle faible, plus sa longueur de cohérence spatiale augmente, et plus il est aisé
d’obtenir des franges d’interférences visibles.
Exemple
Pour illustrer la notion de longueur de cohérence spatiale, reprenons le cas de l’expé-
rience réalisée par Grimaldi en 1665. Est-il possible de former des franges d’interfé-
rences en utilisant deux trous d’Young éclairés directement par la lumière solaire ?
On travaille avec la longueur d’onde moyenne λ0 = 550 nm. Depuis la Terre, le So-
241
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
leil est vu sous un angle θ = 0, 5°, qu’on appelle diamètre apparent. La longueur de
cohérence spatiale est (en considérant n ≃ 1) : ℓs = 6 × 10−5 m. La condition a ≤ ℓs
est particulièrement drastique. On comprend dès lors que Grimaldi ait échoué dans sa
tentative d’observer des interférences.
Remarque
La diminution de la visibilité des franges d’interférences consécutive à l’élargissement
de la source est propre à tous les dispositifs opérant par division du front d’onde.
I1
I2
I = I1 + I2
x
242
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
1 1
• frange sombre associée à λ2 : q + = δ (M)σ2 , où q ∈ Z et avec σ2 = .
2 λ2
Par différence membre à membre, on en déduit, en posant m = q − p (avec m ∈ Z) :
1
1 m+
m + = δ (M) σ2 − σ1
=⇒ δ (M) = 2,
2 ∆σ
nax
avec ∆σ = σ2 − σ1 . On rappelle que δ (M) = . Les abscisses xm où sont réalisées l’annu-
D
lation de la visibilité des franges sont données par la relation suivante :
1
D m+ 2 D
xm = =⇒ ∆x = xm+1 − xm = .
na ∆σ na∆σ
λ1 + λ2
On suppose λ1 et λ2 assez proches : c’est-à-dire |λ1 − λ2 | ≪ λm avec λm = . Alors :
2
1 1 λ 1 − λ 2 ∆λ
∆σ = − = ≃ 2 . Alors :
λ2 λ1 λ2 λ1 λm
λm2 D λm
∆x = =i , (8.18)
na∆λ ∆λ
λm D
où i = est l’interfrange calculé pour la longueur d’onde moyenne. Le nombre de
na
maxima d’intensité vibratoire entre deux brouillages est :
∆x λm
N= = .
i ∆λ
Exemple
On considère : a = 0, 5 mm, D = 1, 0 m, n ≃ 1 et on envisage le cas du doublet du so-
dium : λm = 589, 3 nm et ∆λ = 0, 6 nm. On en déduit ∆x = 1, 2 m. Comme l’interfrange
λm D
est i = = 1, 2 mm, il existe 500 franges de part et d’autre de la frange centrale entre
na
deux brouillages. Il est donc tout à fait illusoire, avec un dispositif de trous d’Young, de
visualiser les anticoïncidences du doublet du sodium. On verra dans le chapitre suivant
un autre dispositif interférentiel, l’interféromètre de Michelson, adapté à cette mesure.
243
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
dI
dλ
dI
∆λ
dλ
λ
λm
Figure 8.11 – Distribution spectrale de l’intensité vibratoire.
244
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
La lumière blanche est constituée des radiations électromagnétiques dont la longueur d’onde
est approximativement comprise entre λ0 min = 400 nm (limite de l’ultraviolet) et
λ0 max = 750 nm (limite de l’infrarouge). Avec ces valeurs, on obtient la longueur d’onde
moyenne : λm = 575 nm et la largeur spectrale : ∆λ = 350 nm. Si on assimile ce spectre à
une raie extrêmement large, on peut définir une longueur de cohérence temporelle :
λm2
ℓc = = 0, 9 µ m .
∆λ
Cette valeur est très faible ; l’ordre d’interférences des franges visibles doit vérifier :
ℓc
p≤ ≃ 2.
λm
Expérimentalement, on constate effectivement qu’un nombre réduit de franges d’interfé-
rences sont observables (de l’ordre d’une dizaine). L’intensité vibratoire est la somme des
intensités vibratoires associées à chaque raie élémentaire quasi-monochromatique :
ˆ +∞
dI 2π x
I(M) = 2 1 + cos dλ ,
0 dλ i(λ )
puisqu’à chaque longueur d’onde, on peut associer un systèmes de franges d’interférences,
avec un interfrange spécifique i(λ ), proportionnel à la longueur d’onde λ . L’interfrange as-
socié au bleu est donc quasiment deux fois plus petit que l’interfrange associé au rouge.
La figure 8.12 représente les intensités vibratoires pour 3 longueurs d’ondes différentes (cor-
respondant au bleu, au vert et au rouge). Au centre de la figure d’interférences (correspondant
à une différence de marche nulle), toutes les longueurs d’onde se superposent en phase et re-
constituent la lumière blanche de la source : on observe une frange blanche au centre.
La figure 8.12 montre qu’en s’éloignant du centre, il n’y a plus de recouvrement exact : la
structure des franges disparaît et laisse place à des irisations, c’est-à-dire à un ensemble de
couleurs qui forme l’échelle des teintes de Newton.
I(M) 1 2 3 4
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5 6
δ (M)
0
Figure 8.12 – Intensités vibratoires associées à 3 longueurs d’ondes différentes. Pour
chacune est indiqué l’ordre d’interférences correspondant aux franges brillantes.
245
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
Comme les ondes lumineuses se propagent à une vitesse plus faible dans la lame que dans
l’air, la présence de la lame sur la voie 2 de l’interféromètre a pour conséquence d’allonger
le chemin optique le long de la voie 2. Considérons la figure 8.13.
x
e
A1 B1
S1 b
M
O′ y
S b b
O F2′
A2 B2
S2
e
(L1 ) (L2 )
Figure 8.13 – Lame à faces parallèles insérée devant un des trous.
La différence de marche δ (M) s’en déduit par différence. Mais le plan orthogonal aux rayons
lumineux passant par A1 et A2 est un plan d’onde relatif à la source placée en S. On en déduit
que : (SA1 ) = (SA2). De plus, de manière évidente (B1 S1 ) = (B2 S2 ). On en déduit que :
δ (M) = (SM)voie 2 − (SM)voie 1 = (A2 B2 ) − (A1 B1 ) + (S2 M) − (S1 M) .
246
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
δ (M) e nax
p(M) = = (N − n) + , (8.20)
λ0 λ0 λ0 f ′
2π 2π e 2π nax
∆ϕ (M) = δ (M) = (N − n) + . (8.21)
λ0 λ0 λ0 f ′
On peut aussi donner l’expression de l’intensité vibratoire :
2π nax 2π e
I(M) = 2I0 1 + cos + (N − n) .
λ0 f ′ λ0
L’intensité vibratoire ne dépend que de l’abscisse x du point M sur l’écran. Elle est périodique,
λ0 f ′
de période i = .
na
sans :
x
avec :
On constate que les franges se décalent. Pour déterminer l’amplitude et interpréter le sens de
ce décalage, on peut exprimer l’abscisse x p de la frange dont l’ordre d’interférences est p,
sans et avec la lame :
λ0 f ′
• Sans la lame : x(sans)
p =p , d’après la relation (8.12).
na
λ0 f ′ ef′ N
(avec)
• Avec la lame : x p =p − − 1 , d’après la relation (8.20).
na a n
L’expression du décalage s’en déduit par différence :
(avec) (sans) ef′ N
∆x = x p − xp =− −1 . (8.22)
a n
La situation usuelle correspond à N > n. On obtient alors ∆x < 0 : les franges se décalent vers
les x < 0, c’est-à-dire vers le côté où la lame a été placée. Cela se comprend intuitivement :
pour compenser l’allongement du chemin optique dû à la traversée de la lame, chaque frange
se déplace du côté de la lame, augmentant ainsi le chemin optique pour le rayon lumineux issu
de S1 . Mais comme on le devine à l’examen de la figure 8.14, en lumière monochromatique,
247
CHAPITRE 8 – D ISPOSITIF INTERFÉRENTIEL PAR DIVISION DU FRONT D ’ ONDE : LES TROUS D ’Y OUNG
T
S1 y
O′
S b b
O M = F2′
T′
S2
ℓ
(L1 ) (L2 )
Figure 8.15 – Interféromètre de Rayleigh.
On peut estimer que le nombre de franges qui défilent est connu à une frange près, ce
λ0
qui correspond à une incertitude sur nair − 1 égale à 2 = 6 × 10−6. D’où :
ℓ
nair − 1 = 0, 00030 ± 0, 00001 .
Cet exemple montre que les phénomènes interférentiels peuvent être utilisés pour réali-
ser des mesures précises.
248
M ODIFICATIONS DU DISPOSITIF
SYNTHÈSE
SAVOIRS
• définir un fonctionnement par division du front d’onde
• non localisation des franges produites par un dispositif interférentiel fonctionnant par
division du front d’onde
• expression de la différence de marche dans le cas des trous d’Young
• expression de l’interfrange dans le cas des trous d’Young
• critère semi-quantitatif |∆p| ≤ 1/2 de bonne visibilité des franges d’interférences
• la visibilité décroît avec l’élargissement de la source pour un dispositif interférentiel par
division du front d’onde
• définition de la longueur de cohérence spatiale d’une source étendue
SAVOIR-FAIRE
• définir, déterminer et utiliser l’ordre d’interférences
• interpréter la forme des franges observées sur un écran éloigné
• utiliser le critère semi-quantitatif de bonne visibilité des franges
• Interpréter qualitativement les observations en lumière blanche.
MOTS-CLÉS
• trous et fentes d’Young • visibilité des franges • cohérence temporelle
• ordre d’interférences • cohérence spatiale
249
L'interferom
etre
de 9
Mi
helson
1 L’interféromètre de Michelson
1.1 Présentation du dispositif
L’interféromètre de Michelson est représenté sur la figure 9.1 :
O
V3 x
V7
V2
264
L’INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
(M2 )
(M1 )
S b
(Sp)
sitif séparateur une lame identique (sans traitement de surface cette fois-ci). Ainsi, chaque
rayon transitant par une des deux voies de l’interféromètre aura traversé quatre fois l’épais-
seur d’une lame (voir figure 9.3). La présence de la lame compensatrice permet de rendre les
deux voies de l’interféromètre équivalentes. Les vis (V6 ) et (V7 ) permettent de régler l’orien-
tation de la lame compensatrice afin d’assurer le meilleur parallélisme possible avec la lame
séparatrice.
(M2 )
(M1 )
(Sp)
S b
(Cp)
Dans toute la suite du cours, on considérera que l’ensemble des lames séparatrice et
compensatrice est équivalent à une lame séparatrice d’épaisseur idéalement nulle, n’in-
troduisant aucune différence de marche résiduelle.
(M2 )
Séparatrice
(M1 )
Figure 9.4 – Schéma de principe de l’interféromètre de Michelson.
Dans ce schéma, l’interféromètre est réduit à l’essentiel : deux miroirs (M1 ) et (M2 ) et une
séparatrice idéale.
Le dispositif séparateur est conçu pour réfléchir 50% de l’intensité vibratoire incidente, quelle
que soit le faisceau incident, et pour transmettre 50% de l’intensité vibratoire. Les flux éner-
gétiques dans l’interféromètre de Michelson sont représentés sur la figure 9.5 (en supposant
les miroirs parfaitement réfléchissants 1 ).
(M2 )
I0 /2 I0 /2
I0 /4 I0 /2
I0
I0 /4 I0 /2
I0 /4 I0 /4
(M1 )
2.1 Définition
On dit que l’interféromètre est configuré en lame d’air lorsque les deux miroirs (M1 )
et (M2 ) sont perpendiculaires aux axes (Ox) et (Oy) respectivement.
1. Dans le domaine optique, le coefficient de réflexion en énergie d’un miroir métallique est voisin de 96%.
266
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
L’expérience montre que dans la configuration de la lame d’air éclairée par une source éten-
due, les interférences sont très peu visibles lorsqu’on place à la sortie de l’interféromètre un
écran à distance finie de l’interféromètre. On observe que la visibilité des franges augmente
au fur et à mesure que l’on éloigne l’écran. Elle est même maximale lorsque l’écran est placé
dans le plan focal image d’une lentille convergente. Cela signifie que la visibilité des franges
est maximale à l’infini. On dit que les franges d’interférences sont localisées à l’infini.
Pour l’interféromètre de Michelson, réglé en lame d’air, et éclairé par une source spa-
tialement étendue, les franges d’interférences sont localisées à l’infini.
b) Schéma du dispositif
L’interféromètre est éclairé par une source étendue : on considère une source ponctuelle S ap-
partenant à cette source. L’onde rayonnée par S est supposée monochromatique, de longueur
d’onde λ0 .
S1 b
S2 b
(M2 )
S1′
S b b
(Sp)
S2′ b
(M1 )
• Voie 1 : un rayon lumineux issu de S est transmis par la lame séparatrice (Sp), réfléchi par
267
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
le miroir (M1 ) et réfléchi par la lame séparatrice. La succession des images de S est :
(M1 ) (Sp)
S −→ S1′ −→ S1 .
• Voie 2 : un rayon lumineux issu de S est réfléchi par la lame séparatrice (Sp), réfléchi par
le miroir (M2 ) et transmis par la lame séparatrice. La succession des images de S est :
(Sp) (M2 )
S −→ S2′ −→ S2 .
Les constructions géométriques correspondantes sont réalisées sur la figure 9.6. Sur cette
même figure apparaît une symétrie du dispositif par rapport à l’axe de la séparatrice : si on
considère le miroir (M1′ ) symétrique de (M1 ) par rapport à la lame séparatrice, on a aussi :
(Sp) 1 (M′ )
S −→ S2′ −→ S1 .
On choisit alors de renommer le point S2′ : il devient S′ . S1 et S2 sont les images de S′ dans
les miroirs (M1′ ) et (M2 ) respectivement. Cette situation est représentée sur la figure 9.7.
S1 b
2e
S2 b
(M1′ )
e
(M2 )
S b
(Sp)
S′ b
On appelle épaisseur de la lame d’air la distance entre (M2 ) et (M1′ ). On la note e. On peut
alors montrer que la distance entre S1 et S2 est : S1 S2 = 2e.
Remarques
• La dénomination lame d’air provient du fait que tout se passe comme si une lame
d’air, d’épaisseur e, était emprisonnée entre les miroirs (M2 ) et (M1′ ) qui sont paral-
lèles.
268
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
• On peut définir le réglage en lame d’air par le fait que les miroirs (M2 ) et (M1′ ) sont
parallèles.
S1 b
i
S2 b b
H
(M1′ ) b
I1′
(M2 ) b
(M1 )
I2
b
K J b
I1
i b
S b
S′ b
i
O b b
Écran
M
Figure 9.8 – Interféromètre de Michelson réglé en lame d’air et éclairé par une source
étendue. Le secteur angulaire grisé sur la figure correspond à un même angle noté i.
c) Ordre d’interférences
Exprimons les chemins optiques de S à M pour les deux voies de l’interféromètre (se réfé-
rer à la figure 9.8 pour la définition des différents points). On suppose que la réflexion sur
les miroirs s’accompagne d’un chemin optique supplémentaire égal à λ0 /2. On choisit, par
269
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
souci de simplicité, de ne pas écrire les chemins optiques supplémentaires introduits par les
réflexions sur la séparatrice idéale, en supposant qu’ils sont identiques sur les deux voies et
qu’ils ne contribuent donc pas à la différence de marche.
λ0 λ0
(SM)voie 1 = (SI1 ) + + (I1 J) + (JM) = nSI1 + + nI1J + (JM) ,
2 2
λ0 λ0
(SM)voie 2 = (SK) + (KI2 ) + + (I2 M) = nSK + nKI2 + + (I2 M) ,
2 2
Or, pour des raisons de symétrie, SI1 = S′ I1′ = S1 I1′ et I1 J = I1′ J d’une part, et SK + KI2 =
S′ K + KI2 = S′ I2 = S2 I2 d’autre part. D’où :
λ0 λ0
(SM)voie 1 = nS1 I1′ + nI1′ J + (JM) + = (S1 M) + ,
2 2
λ0 λ0
(SM)voie 2 = nS2 I2 + (I2 M) + = (S2 M) + .
2 2
Pour calculer cette différence de marche, on a tracé sur la figure 9.8 un plan d’onde relatif à
une source fictive qui serait placée en M et passant par S2 et H (défini sur la figure 9.8). On
en déduit que (S2 M) = (HM), et que, par conséquent :
δ (M) = nS1 H.
L’angle correspondant au secteur angulaire grisé sur la figure 9.8 est i, de sorte que :
δ (M) = 2ne cosi, où l’angle i est défini par la position du point d’observation. Les expressions
de la différence de phase et de l’ordre d’interférences au point M se déduisent de l’expression
de la différence de marche.
Pour un interféromètre de Michelson, configuré en lame d’air, et éclairé par une source
étendue, les franges d’interférences sont localisées à l’infini où la différence de marche,
la différence de phase, l’ordre d’interférences et l’intensité vibratoire sont :
• Différence de marche :
δ (M) = 2ne cosi . (9.1)
• Différence de phase :
4π ne cosi
∆ϕ (M) = . (9.2)
λ0
• Ordre d’interférences :
2ne cosi
p(M) = . (9.3)
λ0
270
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
• Intensité vibratoire :
I0 4π ne cosi
I(M) = 1 + cos , (9.4)
2 λ0
271
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
angle correspond à l’inclinaison des rayons lumineux (voir figure 9.8), on qualifie ces franges
de franges d’égale inclinaison. Afin de voir sur l’écran un nombre important de franges
brillantes, il est nécessaire que l’angle i varie de façon importante. En pratique, cela impose
d’éclairer la lame d’air avec un éclairage le plus convergent possible.
Rayon des anneaux successifs : la relation (9.3) montre que l’ordre d’interférences est
une fonction décroissante de i. La valeur maximale est donc réalisée au centre de la figure
d’interférences, pour i = 0. On note p(i = 0) = p0 + ε , où p0 est la partie entière de p(i = 0) et
0 ≤ ε < 1. On appelle ε l’excédent fractionnaire. Comme p est une fonction décroissante de
i, le premier anneau brillant correspond à la valeur p0 de l’ordre de l’interférence. On appelle
O le centre de la figure d’interférences (voir figure 9.8) et on pose r = OM. L’utilisation de
la lentille dans les conditions de Gauss impose à i de garder des valeurs suffisamment faibles
r
pour que i ≃ tan i = ′ . Le rayon r1 du premier anneau brillant et l’angle i1 correspondant
f
vérifient donc :
2ne 2ne i2 2ne r2
p0 = cos i1 ≃ 1− 1 = 1 − 12 .
λ0 λ0 2 λ0 2f′
s
′ λ0
r1 = f 2 1 − p0 .
2ne
s
′ λ0
rm = f 2 1 − (p0 − m + 1) .
2ne
En pratique, on a tout intérêt à utiliser une lentille convergente de plus grande distance focale
possible, afin d’avoir de grands anneaux sur l’écran.
La figure 9.9 donne une représentation des franges circulaires et de l’intensité vibratoire
correspondante.
Remarque
s
2ne 2(m − 1)
Si p(i = 0) est entier, p0 = p(i = 0) = et la formule devient : rm = f ′ .
λ0 p0
Le premier anneau est alors réduit à un point lumineux (r1 = 0).
272
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
r/ f ′
Évolution des anneaux lorsque l’épaisseur e varie : il est important de connaître l’évo-
lution du rayon des anneaux lorsqu’on fait varier l’épaisseur e de la lame d’air. Considérons
un anneau d’ordre d’interférence p donné et correspondant à l’inclinaison i : p = 2ne cosi.
Comme p est fixé, on voit que i diminue lorsque e diminue.
Lorsqu’on diminue l’épaisseur e de la lame d’air, un anneau donné rétrécit et finit par
disparaître au centre de la figure d’interférences.
273
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
2.3 Applications
a) Mesure de l’écart du doublet du sodium
On a vu au chapitre précédent que les systèmes d’interférences correspondant aux deux lon-
gueurs d’onde d’un doublet se brouillent lorsque la différence de marche δ est de la forme :
1
m+
δ= 2,
∆σ
où m est un entier (voir page 242) et ∆σ la différence des nombres d’onde. Pour les diffé-
rences de marche proches de ces valeurs, les franges sombres de chaque longueur d’onde
coïncident localement aux franges brillantes de l’autre.
La lumière d’une lampe au sodium comporte deux raies jaunes très proches. Le phénomène
de brouillage est inobservable avec un dispositif de trous de Young parce qu’on accède pas
à des différences de marche suffisamment grandes, mais il est observé facilement avec l’in-
terféromètre de Michelson ce qui permet de mesurer le très faible écart entre les longueurs
d’onde du doublet.
Expérience
On règle un interféromètre de Michelson dans la configuration de la lame d’air puis
on remplace la source par une lampe au sodium. Si les anneaux n’apparaissent pas,
c’est peut être parce qu’on est précisément dans une zone de brouillage. On déplace
le miroir mobile en « chariotant » pour voir des anneaux de plus en plus grands et
se rapprocher du contact optique. On constate que le contraste des anneaux évolue et
que les anneaux sont parfois brouillés.
Les simulations montrées sur la figure 9.10 donnent l’aspect de l’écran pour des épais-
seurs croissantes de la lame d’air : (a) : on est proche du contact optique, on voit un
anneau sombre de grande taille et bien contrasté ; (b) et (c) : l’épaisseur de la lame
d’air est un peu plus grande, il y a de plus en plus d’anneaux et le contraste diminue ;
(d) : les anneaux ne sont plus visibles, il y a brouillage ; (e) : pour une épaisseur plus
grande les anneaux réapparaissent et il y en a de plus en plus.
On se place au contact optique (l’écran est uniformément éclairé et si chariote légè-
rement un anneau sombre de grand diamètre doit apparaître) et on note la position
xC.O. du chariot. Partant de cette position on chariote dans le sens où x augmente et
on note les positions xm du chariot pour lesquelles il y a brouillage des anneaux :
xC.O. < x1 < x2 ... ; on revient au contact optique et on recommence dans l’autre sens
pour trouver des positions pour lesquelles il y a brouillage : xC.O. > x−1 > x−2 ....
Toutes ces positions sont lues sur la vis micrométrique avec une précision typique
∆x = 5 µ m. Il faut tourner la vis très lentement car le déplacement des anneaux est
rapide.
274
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
(a) (b)
1 1
k− k−
2(xk − xC.O. ) = 2(xC.O. − x−k ) = 2 d’où ∆σ = 2 .
∆σ xk − x−k
∆λ = 5,95.10−3 µ m ± 7.10−2 µ m,
275
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
Expérience
On règle un interféromètre de Michelson dans la configuration de la lame d’air et on
repère la position xC.O. du chariot correspondant au contact optique. On place comme
source une lampe au mercure munie d’un filtre interférentiel isolant le doublet jaune.
Au centre des anneaux on place un récepteur de lumière relié à une carte d’acquisition
d’ordinateur. On utilise le moteur pour déplacer le miroir (M1 ) en translation à la
vitesse V , d’une position xi < x−1 à une position x f > x1 où x−1 et x1 sont les deux
positions les plus proches du contact optique donnant un brouillage.
L’enregistrement du signal du capteur en fonction du temps a l’allure montrée sur la
figure 9.11 : le signal a des oscillations très rapides dont l’amplitude est variable. À
chaque maximum, un anneau apparaît (ou disparaît) au centre de la figure. On repère
aisément le passage par les points de brouillage pour lesquels l’amplitude d’oscilla-
tion s’annule ; on peut ainsi mesurer la durée T1 entre les passages par les positions
x−1 et x1 . On mesure aussi en dilatant l’échelle de temps la courbe la durée T2 corres-
pondant à 20 oscillations.
D’après les calculs précédents on a :
x1 − x−1 1 λm2
T1 = = ≃ .
V 2∆σ V 2∆λ V
Par ailleurs, l’intensité est maximale chaque fois que la différence de marche δ (i = 0)
est un multiple de λm ; étant donné que δ (i = 0) = 2e = 2|x − xC.O. |, le chariot se
déplace de λm /2 entre deux maxima. Ainsi :
λm
T2 = 20 × .
2V
λm 20T1
Sans connaître la vitesse V on peut calculer : = = 275 ± 5, résultat à com-
∆λ T2
276
C ONFIGURATION DE LA LAME D ’ AIR ÉCLAIRÉE PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
T1 = 66,0 ±0,5 s
zoom ×10
T2 = 4,80 ±0,05 s
Il faut noter qu’on a supposé la vitesse V constante ce qui n’est pas forcément vrai.
277
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
3.1 Définition
On dit que l’interféromètre est configuré en coin d’air lorsque les deux miroirs (M1′ ),
symétrique du miroir (M1 ) par rapport à la séparatrice, et (M2 ) ne sont pas parallèles.
L’angle α entre les deux miroirs est, dans la pratique, très petit, de l’ordre de 10−3 rad. Les
deux miroirs (M2 ) et (M1′ ) emprisonnent un coin d’air (voir figure 9.12), ce qui justifie la
dénomination de cette configuration.
Pour l’interféromètre de Michelson, réglé en coin d’air, et éclairé par une source mo-
dérément étendue à l’infini, on a des franges d’interférences localisées au voisinage
des miroirs.
278
C ONFIGURATION DU COIN D ’ AIR ÉCLAIRÉ PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
ils sont en réalité très faibles de sorte que tous les rayons lumineux sont quasiment perpen-
diculaires aux deux miroirs, soit quasiment parallèles à #» u y . La différence de marche est :
′ ′
#′ » # » #′ »
δ (M) = n(J1 J2 + J2 M − J1 M) ≃ n u y · (J1 J2 − J2 M + J1 M), en négligeant des termes d’ordre
#»
# »
supérieur ou égal à deux en i ou α (par exemple : #» u y · J1′ J2 = J1′ J2 cos i ≃ J1′ J2 ). On trouve
# » # » # » # » # » # » # »
ensuite : δ (M) = n #» u y · (J1′ J2 − J2 K − KM + J1′ M) = n #» u y · (J1′ J2 − J2 K + J1′ K) ; or au premier
# » # » # »
u y · J1′ J2 ≃ − #»
ordre : #» u y · J2 K ≃ e(M) et #» u y · J1′ K ≃ 0. Finalement : δ (M) ≃ 2ne(M).
(M1′ ) (M1′ )
α α
J2 J2
e(M) O (M2 ) e(M) J1′ K O (M2 )
M uy
#» M uy
#»
ux
#» ux
#»
i
Pour un interféromètre de Michelson réglé en coin d’air et éclairé par une source mo-
dérément étendue à l’infini, les interférences sont localisées sur une surface voisine
des deux miroirs. En un point M de cette surface, où l’épaisseur locale entre les deux
miroirs est e(M), la différence de marche δ (M) et l’ordre d’interférences p(M) sont :
2ne(M)
δ (M) = 2ne(M) et p(M) = .
λ0
Les interférences sont localisées au voisinage des miroirs. En pratique, pour les projeter sur
un écran, on utilise une lentille de projection qui conjugue le plan des miroirs avec l’écran
d’observation. Lorsque l’image des miroirs est nette sur l’écran, on voit les franges d’interfé-
rences.
La figure 9.14 donne le schéma de principe complet de l’expérience. La source étendue est
placée dans le plan focal d’une lentille convergente (L1 ). Son diamètre est petit devant la
distance focale de (L1 ) de sorte que l’interféromètre est éclairé par un faisceau quasiment
parallèle. La lentille (L ) forme l’image des miroirs (M2 ) et (M1′ ) (quasiment confondus) sur
l’écran.
279
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
y
(M1′ )
α
(M2 )
O x
M
(Sp)
F1
x
S
source (M1 )
(L )
(L1 )
O′ M′ écran x
2ne(M)
Considérons une frange d’ordre d’interférences p donné : p = . Cette frange est donc
λ0
associée à une épaisseur e fixée. Elle passe par tous les points où l’épaisseur reste la même.
On dit qu’il s’agit d’une frange d’égale épaisseur.
Dans le cas de deux miroirs plans, comme c’est le cas pour l’interféromètre de Michelson,
l’épaisseur dépend de la distance à l’intersection des deux miroirs. Sur la figure 9.14 :
e(M) ≃ |α x| ,
280
C ONFIGURATION DU COIN D ’ AIR ÉCLAIRÉ PAR UNE SOURCE ÉTENDUE
L’intensité vibratoire ne dépend que de x : on obtient donc des franges d’égale épaisseur
rectilignes parallèles à l’intersection des deux miroirs. L’interfrange i correspond à la période
spatiale de l’intensité vibratoire :
λ0
i= .
2nα
Remarque
La lentille (L ) introduit un grandissement γ . L’interfrange observable sur l’écran est
λ0
donc γ .
2nα
Avec α ≃ 10−3 rad, λ ≃ 0, 5 µ m et γ ≃ 10 cet interfrange est d’environ 2,5 mm.
Expérience
On règle un interféromètre de Michelson pour observer les franges d’égale épaisseur
du coin d’air en lumière de la lampe au sodium, considérée comme monochromatique
de longueur d’onde λ0 = 0,590 µ m. On introduit devant le miroir (M1 ) une lame de
verre à faces parallèles d’épaisseur e′ et d’indice n′ que l’on place parallèlement au
miroir. On peut ainsi détecter les défauts de la lame qui n’a pas forcément un indice
n′ parfaitement homogène ou une épaisseur e′ parfaitement égale en tout point. La
figure 9.15 montre une simulation de la déformation des franges due à une « bosse »
sur une lame d’indice n′ = 1, 5 parfaitement homogène.
Figure 9.15 – Frange du coin d’air déformées par un défaut d’une lame de
verre.
281
CHAPITRE 9 – L’ INTERFÉROMÈTRE DE M ICHELSON
Le sommet de la bosse est au centre de la figure, sur la frange la plus déformée qui
se décale vers la gauche (perpendiculairement aux franges) d’environ 4 interfranges.
C’est le signe que la lumière qui traverse la lame à cet endroit a un supplément de
marche optique égal à environ 4λ0 dû à la bosse. Or ce supplément de marche optique
est 2(n′ − 1)∆e′ où ∆e′ est la hauteur de la bosse (le facteur 2 tient compte de l’aller et
4λ0
retour de la lumière à travers la lame). On en déduit que : ∆e′ ≃ ≃ 2,4 µ m.
2(n′ − 1)
Cette méthode est utilisée pour contrôler des éléments d’optique haute précision. On peut
déceler facilement un déplacement d’un dixième d’interfrange donc déceler une bosse de
λ0
hauteur de l’ordre de . Pour le contrôle des lentilles on remplace le miroir (M1 ) par un
10
miroir sphérique.
SYNTHÈSE
SAVOIRS
• configuration de la lame d’air
• configuration du coin d’air
• franges localisées à l’infini pour un interféromètre de Michelson réglé en lame d’air et
éclairé par une source spatialement étendue
• franges localisées au voisinage des miroirs pour un interféromètre de Michelson réglé
en coin d’air et éclairé par une source spatialement étendue
• définition des franges d’égale inclinaison
• définition des franges d’égale épaisseur
• expression de l’ordre d’interférences pour la lame d’air
• expression de la différence de marche pour le coin d’air
SAVOIR-FAIRE
• décrire, mettre en œuvre et justifier les conditions d’éclairage d’un interféromètre de
Michelson réglé en lame d’air et en coin d’air
• établir et utiliser l’expression de l’ordre d’interférences dans le cas de la lame d’air
• interpréter la différence de marche dans le cas du coin d’air
• utiliser l’expression de la différence de marche pour retrouver l’ordre d’interférences
dans le cas du coin d’air
• retrouver l’expression de l’interfrange pour le coin d’air formé par deux miroirs plans
MOTS-CLÉS
• lame d’air • localisation des franges • franges d’égale épaisseur
• coin d’air • franges d’égale inclinai-
• division d’amplitude son
282
Interferen
es
de N ondes 10
oherentes
Remarque
Conformément à un usage répandu, on note ce déphasage ϕ plutôt que ∆ϕ ce qui allège
les écritures.
L’équation (10.1) étant vraie quel que soit l’indice m on peut écrire :
sm (M,t) = sm−1 (M,t) exp(−iϕ ) = sm−2 (M,t) exp(−2iϕ ) = . . . = s1 (M,t) exp(−i(m − 1)ϕ ).
Cette somme peut être explicitée car il s’agit de la somme d’une progression géométrique.
On obtient :
1 − exp −iN ϕ
s(M,t) = s1 (M,t)
1 − exp(−iϕ )
Nϕ
sin
(N − 1)ϕ 2
= s1 (M,t) exp −i ϕ .
2 sin
2
ϕ
−4π −2π 0 2π 4π
296
SUPERPOSITION DE N ONDES LUMINEUSES
I/Imax
ϕ
−4π −2π 0 2π 4π
I/Imax
ϕ
−4π −2π 0 2π 4π
La représentation de l’intensité vibratoire (voir figures 10.1 à 10.3) pour différentes valeurs
de N appelle les commentaires suivants :
• la représentation de I fait apparaître une série de pics, au centre desquels I prend sa valeur
maximale ;
• chacun de ces pics correspond à une frange brillante correspond à des interférences totale-
ment constructives (ϕ = 2kπ , avec k entier) ;
• on voit aussi apparaître des annulations de l’intensité vibratoire : ce sont les franges sombres
qui correspondent aux interférences totalement destructives ;
• on voit aussi apparaître des franges secondaires, moins brillantes, correspondant à des in-
terférences partiellement constructives. Mais ces franges secondaires deviennent de moins
en moins visibles au fur et à mesure que N augmente ;
• on constate que la finesse des franges les plus brillantes augmente avec N.
297
CHAPITRE 10 – I NTERFÉRENCES DE N ONDES COHÉRENTES
Remarque
Imax est proportionnelle à N 2 , ce qui n’apparaît pas sur les figures précédentes, puis-
qu’on a représenté I/Imax .
ϕ = 2kπ où k ∈ Z. (10.2)
Lorsque N est grand l’intensité est quasiment nulle en dehors de pics centrés autour de
ces valeurs.
ϕ
−2π 0 2π
(m = −1) (m = 0) (m = 1)
−8π −6π −4π −2π 2π 4π 6π 8π
ϕ=
N N N N N N N N
298
SUPERPOSITION DE N ONDES LUMINEUSES
On définit la largeur δ ϕ d’un pic principal comme étant la variation de ϕ entre les deux
annulations de l’intensité vibratoire qui bordent ce pic. Sur la figure 10.4, on lit directement :
4π
δ ϕN = . (10.3)
N
Cette largeur est d’autant plus faible que N est élevée. Cela confirme l’observation qualitative
faite sur les figures 10.1 à 10.3.
La finesse FN d’un pic est définie comme étant le rapport :
2π N
FN = = . (10.4)
δ ϕN 2
On obtient que la finesse des pics croît avec N. Cette propriété importante est mise à profit
pour faire de la spectroscopie, c’est-à-dire pour mesurer des longueurs d’onde comme nous
le verrons ultérieurement.
On choisit de représenter cette grandeur complexe par un vecteur #» s dans le plan (Oxy) défini
par :
s = Re (s) #»
#» u x + Im(s) #» u x − is0 sin θ #»
u y = s0 cos θ #» uy.
Ce vecteur est appelé vecteur de Fresnel. Comme le montre la figure 10.5, ce vecteur fait un
angle −θ = arg(s) avec le vecteur #»
u x.
y
O
x
θ
s
#»
299
CHAPITRE 10 – I NTERFÉRENCES DE N ONDES COHÉRENTES
O O
x x
s
#»
s
#»
N = 8 ; ϕ = 3° N = 8 : ϕ = 20°.
Figure 10.6 – Construction de Fresnel de la vibration lumineuse résultante pour
N = 8.
1
10 x
O
300
R ÉSEAUX DE DIFFRACTION
2 Réseaux de diffraction
2.1 Définition
Un réseau de diffraction est un objet plan présentant une structure périodique selon un
axe (Ox) avec une période spatiale a de l’ordre de grandeur des longueurs d’onde de la
lumière visible qui est appelée pas du réseau.
Dans la pratique, un réseau est constitué d’une suite de N motifs identiques. Ces motifs sont
appelés traits du réseau. En appelant (Oxy) le plan du réseau, les traits sont invariants par
translation le long de l’axe (Oy) et décalés chaque fois de a suivant (Ox).
L’ordre de grandeur du pas a est de 1 à 10 µ m. Le nombre N de motifs varie entre quelques
centaines et quelques milliers : il est toujours très grand.
Dans la suite, on parlera uniquement de réseaux par transmission : la lumière subit un
phénomène de diffraction en traversant le réseau. Il existe aussi des réseaux par réflexion
fonctionnant de la même manière mis à part que la lumière diffractée est réfléchie (voir exer-
cices).
Expérience
On éclaire un réseau par un faisceau laser approximativement orthogonal à son plan,
l’observation se faisant sur un écran situé loin du réseau.
écran
réseau
laser
301
CHAPITRE 10 – I NTERFÉRENCES DE N ONDES COHÉRENTES
figure observée ne change pas. Si on remplace le réseau par un réseau de pas a plus
grand, les taches sont plus resserrées, si on le remplace par un réseau de pas plus petit,
elles sont plus espacées.
Il est intéressant d’évaluer le nombre N de traits du réseau éclairés dans cette expérience. Le
diamètre du faisceau laser est typiquement d = 2 mm et le pas du réseau a = 5 µ m, ainsi :
d
N ≃ = 400.
a
On interprète l’expérience précédente par les interférences entre les N ondes diffractées par
les N motifs du réseau qui sont éclairés : les directions dans lesquels on trouve de la lumière
diffractée sont celles pour lesquelles ces interférences sont constructives.
Pour les calculs on choisit un repère (Oxyz) est tel que (Oz) est la direction normale au plan
du réseau et (Oy) est parallèle aux traits. Le réseau est éclairé par une onde plane monochro-
matique, de longueur d’onde λ0 , se propageant dans une direction perpendiculaire aux traits,
c’est-à-dire parallèle au plan (Ozx) et faisant l’angle θ0 avec la normale au réseau (Oz). Cette
onde provient d’une source à l’infini S. La lumière diffractée par le réseau se propage a priori
dans toutes les directions du plan (Ozx) ; on repère une direction quelconque de ce plan par
l’angle θ qu’elle fait avec (Oz) et on appelle M le point à l’infini dans cette direction (voir
figure 10.9).
x +
θ
z
a
θ0
réseau
Sur la figure 10.9 on a représenté les rayons arrivant en un point M à l’infini particulier ; ces
N rayons sont parallèles mais l’onde diffractée par le réseau n’est pas plane.
302
R ÉSEAUX DE DIFFRACTION
M
Tm
H
a θ0
θ θ
K
Tm+1
θ0 u#»x
réseau +
S u#»z
Soient T1 , T2 ,... , TN les centres des traits éclairés. On veut calculer la différence de marche
en M entre les ondes diffractées par deux traits consécutifs de numéros m et m + 1. Pour cela
on fait apparaître les projections orthogonales H et K de Tm+1 et Tm respectivement, sur les
rayons STm et Tm+1 M respectivement. En utilisant le théorème de Malus, on peut dire que :
• Tm+1 et H sont sur un même plan d’onde de l’onde plane arrivant sur le réseau, donc
(STm+1 ) = (SH) ;
• de manière analogue (Tm M) = (KM). Cette égalité proviendrait de l’argument précédent
si l’onde était issue de M et les rayons parcourus en sens inverse ; on dit que Tm et K sont
sur un même plan d’onde relatif au point M.
Il ne faut pas dire que le plan contenant Tm et K est un plan d’onde pour l’onde qui émerge
du réseau car cette onde n’ est pas plane !
Il vient :
δm+1/m (M) = (STm+1 M) − (STm M) = (STm+1 ) − (STm ) + (Tm+1 M) − (Tm M) ,
= − (HTm ) + (Tm+1 K) .
D’après la figure 10.10 : (HTm ) = na sin θ0 et (Tm+1 K) = na sin θ . La différence de marche est
indépendante de m : on décide de ne plus mentionner cet indice. On obtient les expressions de
la différence de marche δ (M), de la différence de phase ∆ϕ (M) et de l’ordre d’interférences
p(M) suivantes :
303
CHAPITRE 10 – I NTERFÉRENCES DE N ONDES COHÉRENTES
2π na
∆ϕ (M) = sin θ − sin θ0 . (10.6)
λ0
• Ordre d’interférences :
na
p(M) = sin θ − sin θ0 . (10.7)
λ0
Un réseau de pas a diffracte la lumière uniquement dans les directions θk données par
la relation fondamentale des réseaux :
λ0
sin θk − sin θ0 = k , (10.8)
na
où k est un entier relatif appelé ordre de diffraction.
304
R ÉSEAUX DE DIFFRACTION
−2
−1
0
1
2 z
r
v r
fente v
source
réseau vr x
v
r
(L1 ) (L2 )
écran
Figure 10.11 – Expérience illustrant le principe du spectromètre à réseau.
La lumière diffractée dans une direction θ est recueillie sur l’écran au foyer image
☞ secondaire correspondant, dont la position x est reliée à θ par la relation :
x = f2′ tan θ ,
f2′ étant la distance focale image de (L2 ). Dans les conditions de Gauss cette rela-
tion devient : x ≃ f2′ θ .
Remarques
1. La disposition des couleurs dans le spectre est conforme à la formules des réseaux
puisque θk croît avec la longueur d’onde et que la lumière rouge a une longueur
d’onde plus grande que la lumière violette.
2. À partir de l’ordre k = 2 les spectres donnés par un réseau se recouvrent partielle-
ment. En effet, la radiation rouge de plus grande longueur d’onde (λr = 0, 75 µ m)
2λr
correspond, dans le spectre d’ordre 2, à un angle donné par sin θr2 = sin θ0 +
a
et la radiation violette de plus petite longueur d’onde (λv = 0, 40 µ m) corres-
3λv
pond, dans le spectre d’ordre 3, à un angle donné par sin θv3 = sin θ0 + . Or
a
2λr = 1, 50 µ m et 3λv = 1, 20 µ m. On constate que θr2 < θv3 , c’est-à-dire que
la raie violette du spectre d’ordre 3 est plus près du centre que la raie rouge du
spectre d’ordre 2.
305
CHAPITRE 10 – I NTERFÉRENCES DE N ONDES COHÉRENTES
SYNTHÈSE
SAVOIRS
• largeur d’un pic d’interférences constructives à N ondes
• formule fondamentale des réseaux de diffraction
SAVOIR-FAIRE
• établir la largeur des pics principaux dans le cas d’interférences à N ondes
• établir la relation fondamentale des réseaux
MOTS-CLÉS
• construction de Fresnel • réseau de diffraction
• finesse d’un pic • pas du réseau
306