Faire La Ville
Faire La Ville
Faire La Ville
Contributeurs
Faire la ville
Lecture croisée des méthodes et outils de l’urbanisme en France et au Viêt-Nam
Capitalisation des expériences de la coopération décentralisée
Région Île-de-France/Hanoi
Région Rhône-Alpes/Grand Lyon/Hô Chi Minh-Ville
Édition française
Relectures
Patrice Berger/Agence d’urbanisme de l’agglomération lyonnaise ; Jean-Charles
Castel/CERTU ; Gilles Antier/IAU-IdF ; Jean-Claude Gaillot/Région Île-de-France ;
Pierre Peillon/Union Sociale pour l’Habitat ; Yann Maublanc/IMV ; Patrick Brenner/
Région Île-de-France ; Nguyen Trong Hoa/Directeur de l’Institut de Recherche et
de Développement de HCMV ; Vo Kim Cuong/Ex-directeur adjoint du Département
de la Planification Urbaine et de l’Architecture de HCMV ; Nguyen Thi Cam Van/
Département des Ressources Naturelles et de l’Environnement de HCMV ; Truong
Trung Kien/Responsable du bureau de planification du centre-ville au Département
de la Planification Urbaine et de l’Architecture de HCMV ; Nguyen Thi Xuan Ha/
Département de la Planification Urbaine et de l’Architecture de HCMV ; Ly Khanh
Tam Thao/ Département de la Planification Urbaine et de l’Architecture de HCMV ;
Do Nguyen Phong/Institut d’urbanisme de HCMV
Traduction
Huynh Hong Duc
Édition
Iconographie
Laura Petibon, PADDI-IMV
Relecture typographique
Catherine Weyl
Agathe Ramsamy
Responsable de la publication
Nguyen Hoang Cam
Imprimé à 1000 exemplaires, au format 18x24, par la société TNHH MTV ITAXA
Numéro d’enregistrement : 336-2014/04-23/LĐXH
Décision de publication n° : 65/QĐ-NXBLĐXH. ISBN : 978-604-65-1615-7
Achevé d’imprimer et depôt légal au 3ème trimestre 2014
2|
Sommaire
INTRODUCTION
06
CHAPITRE 1
LA PLANIFICATION URBAINE
17
CHAPITRE 2
LE FONCIER URBAIN
41
CHAPITRE 3
LES TRANSPORTS COLLECTIFS URBAINS
63
CHAPITRE 4
LE LOGEMENT
83
CHAPITRE 5
LE PATRIMOINE
103
Faire la ville |3
Preface
4|
Avant-propos
e livre est né de notre souhait de répondre, par un ouvrage synthétique et volontaire-
C ment orienté vers l’action, aux questions que nous adressent régulièrement nos col-
lègues urbanistes vietnamiens et français sur l’histoire, l’organisation administrative,
les méthodes et les outils de planification ou encore les mécanismes socio-économiques
des grandes aires urbaines dont nous animons le partenariat : Hanoi, Hô Chi Minh-Ville, la
Laurent Pandolfi et
Fanny Quertamp
1
L’Institut des Métiers
de la Ville (IMV) et le
Centre de prospective
région Île-de-France, la région Rhône-Alpes et le Grand Lyon1. Le lecteur trouvera ainsi de et d’études urbaines
nombreuses informations sur l’organisation de ces métropoles et les moyens techniques et (PADDI) ont été créés
juridiques dont disposent leurs urbanistes pour en améliorer le fonctionnement et le déve- respectivement en
loppement. 2001 et 2006 dans
le cadre des accords
Nous souhaitions également pouvoir rendre compte de la richesse des échanges entre profes- de coopération
décentralisée entre la
sionnels des deux pays, que ce soit à l’occasion d’ateliers de formation ou de missions d’exper-
région Île-de-France
tise, et les faire partager au plus grand nombre au-delà des livrets et des rapports auxquels et le Comité populaire
ils donnent habituellement lieu. On retrouvera la teneur de ces échanges et débats dans le de Hanoi et entre la
regard qui est porté sur le mouvement d’urbanisation en cours au Viêt-Nam, mais aussi dans région Rhône-Alpes et
la recherche commune de solutions qui ne soient pas la simple réplication d’un modèle mais le Comité populaire de
plutôt une démarche qui place l’intérêt public et les biens communs au cœur de la construc- Hô Chi Minh-Ville. Les
ateliers, contextualisés
tion de la ville et de ses réseaux. Cet ouvrage vise ainsi à capitaliser les échanges menés dans
à partir de cas
le cadre de la coopération décentralisée à Hô Chi Minh-Ville et à Hanoi. d’études vietnamiens,
sont animés par des
La sélection des thèmes a été guidée par leur forte récurrence dans les besoins de forma- experts de la région
tion et d’expertise exprimés par les partenaires vietnamiens. Ainsi, la planification urbaine et Île-de-France et de la
régionale, la thématique foncière et celle de la mobilité et des transports ont naturellement région Rhône-Alpes
émergé. Les autorités publiques de Hanoi et Hô Chi Minh-Ville doivent faire face à d’impor- et débouchent sur
la formulation de
tants défis liés à l’urbanisation accélérée. Les réponses à apporter necessitent de s’appuyer recommandations
sur des méthodes et outils éprouvés en matière de planification et de gestion urbaine. Le ou de pistes de
logement et le patrimoine correspondent à des préoccupations plus récentes. Ils illustrent réflexion (techniques,
en creux les lacunes d’un mode de construction de la ville déséquilibré au profit d’opérateurs juridiques, etc.) qui
fonciers et immobiliers peu soucieux de proposer des logements à la population la moins sont restituées sous
aisée et encore moins de préserver le patrimoine architectural et urbain des centres anciens. forme de livrets dans
le cas du PADDI. Par
ailleurs, l’IMV et le
Chaque chapitre suit la même structure et débute par une présentation de la situation et des PADDI soutiennent
grands enjeux actuels de la thématique au Viêt-Nam. Une deuxième partie est consacrée aux des projets
concepts, aux outils et aux méthodes utilisés en France pour répondre à des problématiques d’assistance technique
similaires. Enfin, la dernière partie revient sur les débats qui ont animé les ateliers de forma- (études de faisabilité,
tion et sur les études et travaux réalisés souvent à titre expérimental et pilote. De nombreuses expertise, etc.) et,
pour l’IMV, des projets
illustrations permettent aux lecteurs des deux pays de mieux cerner la réalité urbaine et les
pilotes de réalisation
techniques utilisées. Une rubrique « pour aller plus loin » présente tout au long de l’ouvrage d’infrastructures.
des références bibliographiques sur les différents sujets abordés.
Bien qu’il se concentre sur Hanoi et Hô Chi Minh-Ville, cet ouvrage propose des outils et des
méthodes à tous les praticiens des villes vietnamiennes pour guider leurs actions et améliorer
leurs compétences dans les études et la gestion urbaine, tout comme il permet aux observa-
teurs étrangers de mieux cerner les enjeux de l’urbanisme contemporain au Viêt-Nam.
Faire la ville |5
Introduction
Introduction
n 1986, le Viêt-Nam initie le Doi Moi, une politique d’ouverture économique progressive
E afin de moderniser le pays via le passage d’une économie centralisée à une « économie
de marché à orientation socialiste». Depuis, le pays s’est considérablement développé :
durant deux décennies, et malgré un ralentissement à 6,7% en 2011, le taux de croissance de
son PIB a atteint 7,5% par an. La croissance urbaine se concentre majoritairement sur les deux
métropoles de Hanoi et de Hô Chi Minh-ville (HCMV) et, dans une moindre mesure, sur les
villes de taille moyenne. Cette dynamique entraîne de profondes recompositions territoriales
à l’échelle nationale et locale, qui se traduisent par la densification des centres historiques,
l’extension des villes sur les espaces périurbains et la construction massive d’infrastructures
et d’équipements publics.
HCMV et Hanoi ont ainsi changé d’échelle en moins de dix ans. Moteurs de la croissance éco-
nomique du pays avec 27% des IDE et 33% du PIB national, ces deux villes constituent des ter-
ritoires privilégiés pour expérimenter de nouvelles politiques publiques et mesurer les effets
de la politique de transition. Le Plan de développement socio-économique pour 2011-2020,
document stratégique qui oriente la politique nationale sur les dix années à venir, réaffirme
le rôle indispensable de l’urbanisation dans la modernisation et l’industrialisation du pays. La
diffusion des différents modèles de développement des villes asiatiques et la diversification
des bailleurs de fonds désormais internationaux jouent un rôle important dans le processus
de métropolisation des deux villes, de plus en plus intégrées dans la compétition économique
mondiale.
6|
de clarifier les rôles de chacun et de coordonner leurs plans et leurs actions, qui s’inscrivent encore largement dans
une logique sectorielle. De plus, le pays, considéré comme l’un des plus vulnérables au changement climatique,
s’industrialise et voit les inégalités sociales augmenter, malgré une réduction globale de la pauvreté, ce qui rend la
question de la durabilité écologique, économique et sociale des politiques urbaines de plus en plus pressante.
L’urbanisme vietnamien, en pleine effervescence, est en quête de méthodes et d’outils nouveaux. Malgré les réformes
législatives majeures de ces dernières années - loi sur la planification urbaine en 2009 et révision de la Constitution et
de la loi foncière en 2013 - le cadre règlementaire et opérationnel de la planification et de la gestion urbaine est en
décalage avec les réalités du terrain - notamment avec la demande foncière et immobilière - et devient rapidement
obsolète.
Au Viêt-Nam, la planification urbaine constitue l’une des étapes stratégiques dans le processus de développement
urbain. Sous la direction du Comité central du Parti elle vise à définir le périmètre, la nature, les fonctions et les orien-
tations de développement urbain. Aujourd’hui, les autorités locales cherchent à rendre la planification urbaine plus
efficace. Plus stratégique et plus flexible, celle-ci aurait pour enjeux de fixer de grandes priorités, de coordonner les
actions entre les différents départements ou encore de renforcer la maîtrise d’ouvrage publique. Le foncier constitue
une autre variable stratégique de l’action des pouvoirs publics : il s’agit de constituer des réserves foncières, de garan-
tir les droits fonciers et de financer les équipements et les infrastructures. La construction et l’intégration des futurs
réseaux de transports urbains collectifs des deux métropoles (métro, lignes de BRT, etc.), réponses au défi de la mobi-
lité dans les villes vietnamiennes, joueront également un rôle structurant majeur dans le développement urbain de
ces dix prochaines années. Par ailleurs, pour suivre le rythme de la croissance urbaine, les autorités sont confrontées
à la nécessité de diversifier l’offre de logements, notamment le parc de logements abordables. L’urbanisation insuffi-
sament maîtrisée constitue également un facteur de destruction des espaces culturels et historiques. Les experts et
gestionnaires doivent répondre aux enjeux de conservation et de restauration du patrimoine architectural et urbain,
notamment dans les villes riches en identités culturelles, sans pour autant freiner leur développement.
Face à l’urbanisation des grandes métropoles au Viêt-Nam depuis le Doi Moi, en se basant sur les expériences, les mé-
thodes et les outils de développement urbain de la région Île-de-France, de la région Rhône-Alpes et du Grand Lyon,
plusieurs solutions et recommandations sont formulées par les experts nationaux et internationaux. La démarche de
cet ouvrage est donc de proposer des outils opérationnels et des pistes de réflexions à travers une vision transversale
des enjeux de l’urbanisme dans les domaines de la planification urbaine, du foncier, des transports collectifs, du
logement et du patrimoine.
Faire la ville |7
Introduction
Démographie Démographie
Taux de croissance annuel (2000-2013) : 1,2% (1) Taux de croissance annuel (1999-2010) : 0,7% (2)
Structure par âge : 25% de 0-14 ans / 68,4% de Structure par âge : 22% de 0-17 ans / 61% de 18-64
15-64 ans / 6,6% de plus de 65 ans (4) ans / 17% de 65 ans et plus (2)
Âge médian : 27,4 ans (4) Âge médian : 38,8 (2)
Espérance de vie : 75,4 (2) Espérance de vie : 83 ans (5)
Taux de fécondité : 2,1 enfants par femme (1) Taux de fécondité : 2,01 enfants par femme (6)
Économie Économie
PIB (en milliards de dollars) : 156 (2) PIB (en milliards de dollars) : 2 611 (8)
PIB par habitant en dollars : 1 755 (2) PIB par habitant en dollars : 39 746 (8)
Taux de croissance du PIB 2012-2013 : 4,2% (1) Taux de croissance du PIB : +0,3% en 2012 (7)
Taux de chômage au sens du BIT : 2,9% (1) Taux de chômage au sens du BIT : 10,1% (9)
Taux de pauvreté (% de population en dessous du Taux de pauvreté (% de population en dessous du
seuil de pauvreté national) : 9,9 % (1) seuil de pauvreté national, seuil à 50% du revenu
Inflation (en % annuel) : 9% en 2012 (1) médian) : 7,9% (10)
Emploi selon les secteurs de l’économie : Inflation (en % annuel) : 1,5 % (11)
primaire : 46,9% / secondaire : 21,1% / tertiaire : Emploi selon les secteurs de l’économie :
32% (1) primaire : 3% / secondaire : 21% / tertiaire : 74,2% (11)
8|
L’organisation administrative du Viêt-
Pour aller plus loin :
• AFD, Agence
Française de
Niveau du district Districts urbains - Districts ruraux - Capitales provinciales et villes - Districts ruraux - Huyen
Quan Huyen Thanh Pho
Niveau communal Quartiers urbains - Communes rurales Quartiers urbains et communes Communes rurales et
Phuong et bourgs - Xa rurales - Phuong et Xa bourgs - Xa
Faire la ville |9
Introduction
10 |
Le renforcement des 27 Régions
structures intercommunales
Les communes françaises, au nombre de 36 682, 1
peuvent se regrouper en Établissement Public
de Coopération Intercommunale (EPCI) afin
de mutualiser leurs moyens et d’améliorer
la cohérence de leurs stratégies territoriales.
En effet, les limites administratives tradition- 2
nelles de la commune, du département et de
la région peuvent difficilement intégrer les
logiques et les dynamiques d’une agglomé-
ration urbaine. Les communes peuvent donc,
selon leur poids démographique, coopérer 1. Région Île-de-France
2. Région Rhône-Alpes
au sein de trois types de communautés, cha-
cune étant dotée d’un régime fiscal et de
compétences obligatoires et facultatives spé-
cifiques. 95 Départements
Faire la ville | 11
Introduction
Ville de Hanoi
Population : 6,7 M d’habitants soit 6,9% de
la population du pays, 43% d’urbains, crois-
sance démographique de 1,7% par an
Superficie : 3 329 km², 28 districts dont 18
ruraux
Contribution au PIB national : 12%
Un changement d’échelle
radical
Depuis le début des années 1990, parallèle-
ment à la politique d’ouverture économique
(Doi Moi) et en partie grâce à elle, la métro-
pole sud-vietnamienne a changé d’échelle.
Elle est désormais en quête de nouveaux
modèles urbains, qu’elle puise essentielle-
ment en Asie. HCMV ambitionne ainsi de de-
venir l’une des principales métropoles d’Asie
du Sud-Est. Sa très forte croissance urbaine
(3,2% par an), sa vitalité économique, ses
grands projets en cours et son urbanisme le projet de nouvel aéroport international et
opérationnel très actif s’accompagnent de vers le sud-ouest, le long du boulevard Vo Van
nombreux défis à relever. Il s’agit notamment Kiet). L’urbanisation de 90 000 à 100 000 hec-
d’améliorer les réseaux urbains, d’étendre tares de terre est prévue, dont 49 000 hectares
le parc de logements, d’appliquer l’urba- situés dans le centre de l’agglomération. De
nisme règlementaire ou encore de protéger grands projets urbains, dans le centre-ville, à
l’environnement. Les politiques de dévelop- Thu Thiêm (657 hectares), Cu Chi ou sur les
pement urbain doivent également s’adapter berges de la rivière Saigon, devraient attirer
pour tenter de réduire l’impact du chan- les investisseurs et structurer le développe-
gement climatique dans une ville qui subit ment urbain, ainsi que les pôles scientifiques
des inondations périodiques et dont 65% du et technologiques projetés dans le district 9
territoire est situé à une altitude inférieure à et à Thu Duc. Ces nouvelles centralités ur-
1,50 mètre au-dessus du niveau de la mer. baines seront reliées grâce à la création d’un
réseau de huit lignes de métro, dont une est
actuellement en chantier, et à la construction
Les principales orientations de quatre périphériques autoroutiers ainsi
du schéma directeur que de voies radiales et de voies rapides suré-
levées. Dans le domaine des grandes infras-
Le schéma directeur à l’horizon 2025, ap- tructures, le port de HCMV sera transferé à
prouvé en 2010, projette une population Hiep Phuoc et à Cat Lai, et un nouvel aéroport
de 10 millions d’habitants sur un périmètre international devrait voir le jour.
élargi intégrant les provinces limitrophes de
HCMV. Ce schéma, plus stratégique que les Par ailleurs, les espaces verts feront l’objet
précédents, propose un modèle de ville po- d’une attention particulière avec la création
lycentrique dans un rayon de 15 km autour de ceintures et de trames vertes le long des
du centre (centre historique et future ville rivières Saigon, Nha Be et Dong Nai ou en-
nouvelle de Thu Thiêm). Les quatre pôles de core avec la préservation des mangroves de
L’extension urbaine de
développement se répartiront selon deux Can Gio. La gestion des inondations constitue l’agglomération saigonnaise
axes principaux (vers la route de Hanoi à l’est un enjeu d’aménagement majeur pour un en 1900, 1965, 2000 et
et vers le sud) et deux axes secondaires (vers territoire plus résilient. 2007
Faire la ville | 13
Introduction
Région Île-de-France
Population : 11,6 M d’habitants soit 19% de
la population française
Superficie : 12 000 km2
Contribution au PIB national : 29%
14 |
Région Rhône-Alpes et Grand Lyon
Région Rhône-Alpes
Population : 6,3 M d’habitants soit 9,8% de la
population française (INSEE, 2012)
Superficie : 43 698 km2
Contribution au PIB national : 9,8% (INSEE,
2012)
IMV, Institut des métiers de la transports, la planification urbaine, les services Pour aller plus loin :
16 |
LA PLANIFICATION URBAINE
A
u Viêt-Nam, les villes sont devenues le moteur de la croissance économique, contribuant
pour une part majeure au revenu national. Le développement du secteur industriel et
des services, des activités scientifiques et techniques a attiré de nombreux migrants.
Cependant, la croissance démographique a conduit à la création de quartiers informels et sous-
équipés entraînant un étalement urbain qui pose de nombreux problèmes de gestion urbaine.
De plus, la croissance économique a stimulé les marchés fonciers et immobiliers, et a entraîné
la mutation des espaces centraux et périurbains. Les autorités publiques, avec des moyens
humains et financiers limités, doivent ainsi relever de nouveaux défis pour répondre aux besoins
croissants en matière de logement, d’emploi, de services urbains, etc. Leurs schémas directeurs
proposent de nombreux projets de rénovation urbaine, de villes nouvelles, d’infrastructures ou
de réseaux de transports en commun. Cependant, leur difficile mise en oeuvre réinterroge les
espaces, les échelles et les modes de planification tout en questionnant les rôles des différents
acteurs. Par conséquent, pour mieux s’adapter aux réalités socio-économiques et parer à
l’urbanisation spontanée, dans un contexte où les effets du changement climatique sont de plus
en plus significatifs, Hanoi et Hô Chi Minh-ville cherchent à rendre leur mode de planification plus
stratégique, plus flexible et efficient.
Le schéma directeur de
HCMV à horizon 2025
Chapitre 1 : La planification urbaine
A
Pour aller plus loin :
tion plus stratégique, les autorités « Principales dates de la planification urbaine
de HCMV : • Banque asiatique de
publiques sont amenées à coor- développement, 2010,
- 1993 : Décision 20/1993/QĐ-TTg du Premier « Hô Chi Minh City
donner les politiques sectorielles et à coo- Ministre approuvant le Schéma directeur de Adaptation to Climate
pérer avec les provinces environnantes. HCMV. Change », 36 p.
http://www.adb.org/
Les défis à relever concernent l’amélio- - 1998 : Décision 123/1998/QĐ-TTg du Premier publications/ho-chi-
ration des infrastructures lourdes (voirie, Ministre approuvant la révision du Schéma minh-city-adaptation-
directeur de HCMV à l’horizon de 2020. climate-change-
drainage, égouts, digues), des services summary-report
urbains et des équipements sociaux, ainsi - 2010 : Décision 24/2010/QĐ-TTg du Premier
• PADDI, 2012,
Ministre approuvant la révision du Schéma
que leur développement en périphérie : Livret « Approche
directeur de HCMV à l’horizon de 2025.
raccorder la population aux réseaux d’ap- intégrée des risques
provisionnement en eau ; construire des d’inondation : vers
une planification
systèmes de traitement des eaux usées ; pour constituer des réserves foncières, d’éléments
organiser celui des déchets ou encore ont entraîné un important mitage urbain systémiques »,
accroître l’offre en écoles, hôpitaux et et la formation de conurbations autour http://www.paddi.vn/
espaces verts. des deux villes. • Projet de
recherche Megacity,
L’amélioration des réseaux de transports Dans cette perspective, des politiques de Brandenburg
collectifs et leur articulation avec le déve- résorption de l’habitat insalubre et de University of
loppement urbain constituent un autre construction de logements abordables Technology, Cottbus
enjeu majeur de la planification pour les sont nécessaires pour limiter l’urbani- http://www.megacity-
hcmc.org/
deux métropoles. La motorisation crois- sation spontanée. Par ailleurs, la préser-
sante des ménages, un urbanisme opéra- vation du patrimoine exceptionnel du
tionnel très actif combiné aux difficultés centre-ville de Hanoi, la protection de
rencontrées par les autorités publiques l’environnement, notamment des zones
18 |
de mangroves à HCMV, passent par leur La transition vers une planification plus
intégration dans la planification urbaine. stratégique
Enfin, la vulnérabilité aux inondations des
La planification a suivi jusqu’à présent une approche très normative
deux métropoles impose également une
et arithmétique (ratios) : ses objectifs techniques, fixés au niveau poli-
planification urbaine plus intégrée, se
tique, étaient peu réalisables et hiérarchisés, ils ne tenaient pas assez
traduisant par des mesures strictes de compte des besoins et des réalités socio-économiques. Ces ratios,
protection des terres inondables, en par- applicables sur l’ensemble du pays, ne sont pas compatibles avec les
ticulier des berges des cours d’eau. particularités des collectivités locales, en particulier à Hanoi et HCMV.
Pourtant, depuis une dizaine d’années, les schémas directeurs pro-
posent une vision plus stratégique du territoire, dans la mesure où
leur méthode d’élaboration et la conception même de la planification
ont évolué au contact des acteurs internationaux (bailleurs de fonds,
entreprises, coopération décentralisée, consultants).
Structuration
territoriale de
HCMV par Nikken
Sekkei
Faire la ville | 19
Chapitre 1 : La planification urbaine
Faire la ville | 23
Chapitre 1 : La planification urbaine
24 |
plutôt qu’à inciter. Les règlements et les outils actions à mettre en oeuvre pour la réaliser. Pour aller plus loin :
de protection concernent entre autres l’envi- Aujourd’hui, les politiques publiques tentent • Éco-quartier de la
ronnement, le patrimoine et la séparation des généralement de favoriser la construction de caserne de Bonne à
activités industrielles lourdes du tissu urbain nouveaux quartiers plus denses, d’urbaniser Grenoble, premier
normal. Les mécanismes d’incitation, eux, les terrains vacants en zone dense et de struc- éco-quartier français,
sont essentiellement fiscaux ; ils dépendent turer l’urbanisation autour des axes et des http://www.debonne-
grenoble.fr/
en grande partie des marchés et sont plus stations de transport en commun afin de di-
difficiles à mettre en oeuvre, ce qui explique minuer la part des déplacements individuels
qu’ils soient moins efficaces que les précé- motorisés. La préservation des espaces verts
dents. L’État peut parfois intervenir par le et agricoles des agglomérations, la valorisa-
biais de structures opérationnelles telles que tion des cours d’eau (la trame verte et bleue)
les Établissements Publics d’Aménagement et l’aménagement d’espaces publics sont au-
(EPA) pour des projets considérés comme tant d’objectifs qui sont largement partagés
stratégiques. par les services d’urbanisme des collectivités Des appels à projets publics
françaises. La planification se veut elle aussi incitent les collectivités à
Concertation et ajustement durable, tant dans le processus, via la mise en construire des quartiers
place d’une concertation avec les différents plus écologiques et
permanent, des pratiques en durables
acteurs et la participation des habitants, que
développement dans le contenu. Un diagnostic environne-
mental est intégré au PLU et à chaque projet
Dans l’approche « bottom up » de la planifica- urbain. Les plans sectoriels comme le Plan de
tion, la ville est conçue comme la somme des Déplacement Urbain (PDU) et le Programme
actions collectives. Cette approche engage Local de l’Habitat (PLH) visent par exemple à
les élus et les techniciens des collectivités réduire la pollution atmosphérique en préfé-
locales à prendre en compte les réalités du rant le fret au transport routier de marchan-
terrain et les demandes des habitants. Elle se dises ou en créant des mesures favorables à
développe peu à peu en France, mais coexiste la mixité sociale.
avec l’approche classique dominante dite «
top-down » ou descendante, qui privilégie le
poids de l’action publique et de la planifica- Les différents plans/acteurs :
tion dans la construction de la ville.
à la recherche d’une échelle
En Europe, les ratios servent d’indicateurs, métropolitaine à Lyon et à Paris
d’outils d’aide à la décision, et non d’objectifs
à atteindre, et la planification est ajustée en Le ministère de l’Écologie, du Développement
permanence. En France, la mise en œuvre des durable et de l’Énergie comprend les direc-
tions de l’aménagement du territoire et de
Schémas de Cohérence Territoriale (SCoT)
l’urbanisme. Celles-ci produisent des études,
fait désormais l’objet d’un suivi continu et
lancent des appels à projet (éco-quar-
d’une évaluation six ans après l’élaboration
tier, grand territoire, aménagement numé-
du document, qui peut mener à sa révision.
rique). Sur le terrain, seuls les grands projets
Les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) sont
des Directives Territoriales d’Aménagement,
modifiés environ tous les six mois et révisés
des Opérations d’Intérêt National ou des
tous les cinq ans. Ces plans sont fermes sur
Établissements Publics d’Aménagement sont
les interdits, mais plus souples sur les préco-
pilotés par l’État. Les plans d’aménagement
nisations de développement.
Faire la ville | 25
Chapitre 1 : La planification urbaine
aux différentes échelles sont liés par le prin- elle est forcée de se soumettre à la volonté
cipe de compatibilité. Les directions régio- de l’État, dans la mesure où c’est le gou-
nales et départementales de l’aménagement, vernement qui fixe, en général, les grandes
les services techniques de l’urbanisme des orientations en matière d’aménagement
intercommunalités et des communes, et les du territoire (Pôles de compétitivité écono-
agences d’urbanisme sont chargés d’élaborer mique, Lignes à Grande Vitesse, etc.). Dans
les documents d’orientation et de planification. ce cadre, la Société du Grand Paris, créée par
la loi du 3 juin 2010, a pour mission principale
Les collectivités peuvent par ailleurs faire ap- de concevoir et de réaliser de grandes infras-
pel à des bureaux d’études privés pour réali- tructures de transport, en particulier le ré-
ser ces documents. seau de métro automatique du « Grand Paris
Express », long de 130 km, qui reliera notam-
ment les aéroports de Roissy CDG, d’Orly et
La planification à l’échelle du Bourget, en passant par la Défense, le pla-
régionale et le défi de la teau de Saclay, la grande banlieue Est et le
Quelques unes des centre de Paris.
gouvernance métropolitaine en structures qui composent
Île-de-France le millefeuille de la
gouvernance francilienne Enfin, un syndicat mixte d’études, nommé
« Paris Métropole », a été créé en 2009 pour
Le schéma directeur de la région Île-de-
favoriser les échanges et les études com-
France (SDRIF) est un document d’urbanisme
munes entre les collectivités franciliennes. Il
à l’échelle de la région qui vise à contrôler la
repose sur une coopération volontaire entre
croissance urbaine et l’utilisation du terri-
plus d’une centaine de collectivités d’Île-de-
toire, tout en garantissant la préservation des
France de différents échelons (communes,
espaces ruraux et naturels.
intercommunalités, départements, région).
Paris Métropole associe à ses travaux, au sein
Dans la hiérarchie des normes d’urbanisme,
d’un Comité des partenaires, les grands syn-
il se situe à un niveau intermédiaire, entre les
dicats techniques, les chambres consulaires,
lois qui s’imposent à lui (Loi du Grand Paris)
les représentants des milieux socio-écono-
et les documents locaux d’urbanisme tels
miques et universitaires, les dix équipes de
les SCoT ou les PLU. L’Île-de-France, région
la consultation internationale sur le « Grand
capitale, est aussi la seule région française à
Pari de l’agglomération parisienne » et des
disposer d’un « quasi pouvoir règlementaire ».
acteurs de la société civile.
Elle élabore, en association avec l’État, les
orientations règlementaires du SDRIF. Mais
Des démarches de planification
et de gouvernance innovantes
dans la métropole lyonnaise
La généralisation de
l’intercommunalité Pionnière, l’agglomération de Lyon s’engage
est un enjeu majeur
pour l’Île-de-France.
dans un nouveau type de planification au
De nombreux projets cours des années 1980, peu après les grandes
d’extension et de création lois de décentralisation. Auparavant descen-
d’intercommunalités dante, rigide et essentiellement spatiale, cette
sont en cours (en orange
les communautés de planification nouvelle prend en compte désor-
communes existantes, en mais la dimension métropolitaine de l’agglo-
rose les communautés mération de Lyon et propose une vision plus
d’agglomération et
en vert les Syndicats partenariale et prospective, fondée sur de
d’agglomération nouvelle) grands projets d’agglomération et sur l’inté-
26 |
gration, entre autres, des enjeux de déve-
loppement économique et universitaire. Le
schéma directeur « Lyon 2010 » est approuvé
en 1992 à la suite d’un processus novateur de
concertation entre les acteurs publics, privés
et la société civile, au moyen de nombreuses
auditions et groupes de travail. Ce schéma se
distingue par sa souplesse et sa déclinaison
en secteurs, échelons territoriaux informels
qui détaillent ses orientations stratégiques.
Ce document a donc eu une grande influence
sur la création d’une « culture d’aggloméra-
tion », et sa vision prospective de la métro-
pole a été considérée comme une référence
par les acteurs aussi bien publics que privés.
La combinaison de la
planification, de la « stratégie »
et des grands projets
Afin de rendre sa mise en œuvre plus aisée,
la planification règlementaire peut s’articuler
avec le développement de grands projets et
des stratégies globales et sectorielles (éco-
nomie, foncier, logement, transport, envi-
ronnement...). Pour renforcer les liens entre
l’urbanisme règlementaire et les pratiques
opérationnelles réelles (urbanisation diffuse,
incohérence des fonctionnalités, rigidité du
zonage), l’« urbanisme de projet » a été inscrit
Faire la ville | 27
Chapitre 1 : La planification urbaine
interdits, puisque les collectivités y exposent tion d’actions en fonction de leur faisabilité,
désormais au préalable des orientations et sur un partenariat entre l’autorité publique
d’aménagement et de programmation. Les et les autres acteurs clés de l’agglomération
grands projets ne dérogent pas aux règles et (développeurs, promoteurs, entreprises du
peuvent les alimenter : le PLU peut être mo- bâtiment et des travaux publics, grandes entre-
difié lors du développement d’un projet de prises, associations importantes, etc.). Ce sché-
Zone d’Aménagement Concerté (ZAC). ma dessine le « squelette » de la ville future. Ce
squelette environnemental (protection de la
trame verte, zones naturelles non construc-
« Développer des outils opérationnels en com-
plémentarité des plans d’urbanisme
tibles) et structurel (centres, centres secon-
daires reliés par la charpente de transports
Si les orientations majeures sont du ressort du en commun) définit les orientations de déve-
schéma directeur, et la gestion quotidienne de loppement pour le long terme. Dans le reste
l’urbanisme du ressort des documents locaux du tissu urbain, le SCot privilégie en général
(plans détaillés), il est intéressant de dévelop-
une mixité de fonctions, sauf dans les zones
per une batterie d’outils adaptés à des pro-
blématiques spécifiques. En France, les AVAP d’activités industrielles et de logistique.
(Aires de mise en Valeur de l’Architecture et
du Patrimoine) et les « secteurs sauvegardés »
permettent une politique de protection et de Une planification règlementaire
valorisation du patrimoine bâti urbain. Les
OPAH (Opérations Publiques d’Amélioration claire
de l’Habitat) permettent de réhabiliter les
logements dégradés, les PLH (Programmes
Le PLU précise les grandes orientations défi-
Locaux de l’Habitat) de fonder une poli- nies dans le schéma directeur. Il fait l’objet
tique territoriale de logement social, les PDU d’une concertation entre les acteurs clés,
(Plans de Déplacements Urbains) et les PLD publics et privés, du territoire ainsi que d’une
(Plans Locaux de Déplacements) d’organiser enquête publique. Le document final est
les déplacements, les PNR (Parcs Naturels rendu public, consultable en mairie et sou-
Régionaux) ou les zones « Natura 2000 » de vent publié sur internet. Le droit des sols, qui
protéger des zones naturelles.
peut être connu de tous, est accepté et les
interdits sont largement respectés. Le docu- Des catégories de zonage
simples et claires : zone
ment est composé de quatre volets : le dia- agricole, à urbaniser,
La définition de la stratégie gnostic, le projet de la collectivité (PADD), le naturelle et urbanisée
règlement et enfin les documents graphiques
Les orientations stratégiques définies par la (zonage). Ce zonage définit les catégories
collectivité s’expriment par des plans secto- d’usage du sol : zones naturelles (N), agri-
riels et par le SCoT, qui constitue une syn- coles (A), urbanisées (U) et à urbaniser (AU).
thèse territoriale de ces objectifs. Celui-ci Combiné avec le règlement du PLU, il définit
repose sur une vision générale, sur une sélec- l’attribution des permis de construire. Ces
plans détaillés se limitent à l’essentiel : indi-
cation et réservation des emprises de projet
Un exemple de vision stratégique : la charpente du réseau
de transport en commun à HCMV urbain, voirie, transports, réseaux et équipe-
ments ; prescriptions relatives aux construc-
tions, aménagements et activités écono-
miques (localisation, implantation) ; terrains
à protéger (trame verte et bleue, risques na-
turels ou industriels).
Faire la ville | 29
Chapitre 1 : La planification urbaine
pour définir le projet et son bilan financier. et supervise la construction des équipements Pour aller plus loin :
La maîtrise d’ouvrage est confiée à un amé- publics. Les autres terrains sont cédés par • CERTU, Guide « Outil
nageur qui peut être un établissement pu- vente, location ou concession d’usage. Des de l’aménagement »,
blic (10% des cas), une Société d’Économie orientations architecturales et paysagères http://www.
Mixte (80%) ou une compagnie privée (10%). précises sont imposées aux constructeurs. outil2amenagement.
L’aménageur et l’initiateur public définissent certu.developpement-
durable.gouv.fr/
leur participation financière au potentiel dé-
ficit de l’opération. L’aménageur acquiert une La mise en œuvre de la • FNAU, Fédération
partie ou la totalité du foncier du périmètre Nationale des Agences
par des acquisitions à l’amiable, par droit de planification stratégique d’urbanisme, 2010,
« La planification
préemption et parfois par expropriation. Il
Les objectifs du schéma directeur doivent stratégique au service
réorganise le parcellaire, viabilise les terrains du développement
être clairs et faciles à lire par tous les acteurs
durable ; l’expérience
publics et par les partenaires privés. Le long
des agences françaises
processus de dialogue métropolitain, de l’éla- d’urbanisme »,
1 boration en concertation à la mise en œuvre http://www.fnau.org/
(projet partagé, ajustements), est aussi im- index.asp
portant que le document du schéma direc-
teur en lui-même. Ses objectifs doivent faire
l’objet d’une campagne de communication
auprès de ceux qui vont l’appliquer.
30 |
Les principales caractéristiques des systèmes de planification vietnamien
et français
Type de relation Hiérarchique, conformité avec le document supérieur Indépendance mais obligation de compatibilité avec le
entre les documents document supérieur
Repose sur des objectifs des collectivités locales, des orienta- La loi donne les grands principes généraux à respecter.
tions des plans de l’échelon supérieur, des ratios et normes Certaines contraintes peuvent être imposées par l’État, à
techniques (taille de population, etc). Les objectifs chiffrés à propos des ouvrages nationaux notamment (passage d’une
atteindre ont un caractère impératif. autoroute par exemple). Les prévisions démographiques ont un
caractère indicatif.
Schémas régionaux : orientation de développement socio-éco-
nomique, liens régionaux, mise en cohérence des infrastruc- SRADT au niveau régional : prospective à moyen terme, charte
tures (transports, réseaux, éducation, etc.), valorisation des d'aménagement et de développement durable. Non prescriptif.
Contenu de la potentialités économiques de chaque territoire dans la région.
SCoT : mise en cohérence des politiques publiques en matière
planification d’urbanisme, d’habitat, de développement économique et de
Schéma directeur (Master plan) : concrétisation des orienta-
tions du schéma régional, zoning fonctionnel, définition de la déplacements. Contient un rapport de présentation (diagnostic,
surface à urbaniser. notamment environnemental), un projet d'aménagement et de
développement durable (PADD), des documents graphiques.
Plans de secteur : concrétisation du schéma directeur et Evaluation tous les six ans et possibilité de révision avant-terme
définition des droits des sols pour chaque «unité d’habitation». (normalement entre dix et quinze ans).
Plans détaillés : définition des constructions urbaines, des PLU : contient un rapport de présentation et un PADD, un
travaux d’infrastructures techniques à réaliser et des normes de règlement et des documents graphiques qui fixent les droits des
construction, ainsi que du droit des sols pour chaque parcelle. sols et les droits à construire de chaque parcelle, zone par zone.
C’est sur cette base que sont délivrés les permis de construire.
Pas de plan détaillé, sauf dans les projets publics pilotés par la
collectivité (par ex. les ZAC). Pour le reste, ce sont les investis-
seurs qui font des propositions de plans d’aménagement.
Principales Urbanisation rapide engendrant de nombreux problèmes Forte croissance des prix fonciers et immobiliers, production de
difficultés sociaux, de logement et environnementaux. Rigidité d’une logements sociaux ou abordables, mouvement NIMBY (« Not in
planification trop normative, nombreux règlements à appliquer, my backyard », soit le refus de logements sociaux ou
gestion foncière à améliorer, compétences des autorités locales d’infrastructures à proximité de chez soi ou dans sa commune),
à renforcer. difficile maîtrise de l’étalement.
Planification intégrée et transversale, coordination des Tentative de mise en cohérence des politiques sectorielles
Principales nouvelles planifications hiérarchisées, prise en compte de la composition dans les SCoT, concertation (conseil de développement), démocra-
orientations urbaine et des problèmes environnementaux. tie participative, « gouvernance », simplification du code de
l’urbanisme, urbanisme de projet, gouvernance métropolitaine,
pôle métropolitain.
Faire la ville | 31
Chapitre 1 : La planification urbaine
Le schéma directeur d’HCMV approuvé en Or, la loi sur la planification urbaine de 2009
janvier 2010 propose une vision pour 2025. et le décret d’application (n°37/2010/
Ses grandes orientations consistent en l’élar- NĐ-CP) ne précisent pas si les
gissement du centre-ville qui sera alors com- secteurs sont définis selon
posé du centre-ville actuel et du nouveau des critères géogra-
quartier de Thu Thiêm, projet urbain phare phiques, fonc-
sur l’autre berge de la rivière Saigon ; le déve- tionnels,
loppement de polarités secondaires (Saigon
South, Cu Chi) ; le renforcement du réseau de ou
transports collectifs (sept lignes de métros, les deux,
Bus Rapid Transit, amélioration des lignes de ni quelle est l’éten-
bus existantes) ou encore la protection des due de leur périmètre.
zones naturelles telles que les mangroves de Ils sont définis comme
« des territoires qui peuvent com-
Can Gio.
porter plusieurs districts mitoyens qui ont
les mêmes problèmes et orientations de
La vision stratégique, qui devrait se décliner
développement ». Les plans de secteur sont
dans les schémas de district approuvés en
élaborés à l’échelle 1/2 000eou 1/5 000e. Les
décembre 2012, s’y retrouve pourtant diffi- périmètres peuvent également être définis
cilement. Ceux-ci forment à HCMV un « pat- en fonction des axes de transport ou selon les 3
Ateliers du PADDI sur
chwork » qui se traduit par des différences caractéristiques principales de la zone (à voca- la planification urbaine
dans la qualité du rendu, dans les règlements tion écologique, industrielle, etc.). Le plan de de juin 2010 et 2011,
animés par Patrice
ou par la compétition entre les districts pour secteur se compose des unités d’habitation Berger, Gauthier Rouhet
attirer les investissements. Les projets (im- urbaine et des zones fonctionnelles. et Xavier Laurent
mobiliers, zones industrielles) se multiplient Les ratios pour chaque unité d’habitation
au détriment des orientations du schéma di- sont définis par les normes techniques au ni-
recteur. Les récentes dispositions de la loi sur veau national et comprennent : des ratios sur
l’urbanisme de 2009 imposent l’élaboration l’usage des sols (terrain résidentiel, terrain
de plans par secteurs afin de concrétiser les
orientations du schéma directeur. Ceux-ci ne
correspondent pas forcément aux limites ad-
ministratives du district, ce qui invite à repen-
« La loi sur la planification urbaine de 2009 et les secteurs (article 29. Plans
de secteurs)
ser les relations des districts entre eux, mais 1. Les plans de secteurs doivent définir l’usage attribué à chaque zone
aussi avec la ville et les quartiers, échelons de terrain, le principe d’organisation de l’espace, de l’architecture et du
administratifs inférieurs. Ainsi les plans de paysage urbains de la zone à planifier ; les normes de population, de droits
des sols, d’infrastructures techniques pour chaque îlot. Ces plans doivent
secteurs pourraient faciliter la mise en œuvre aussi disposer les ouvrages d’infrastructures sociales de façon adéquate par
du schéma directeur, à condition de définir pré- rapport à leur usage ; orienter le réseau d’infrastructures techniques vers
cisement la notion de secteur. les axes principaux, en synchronisation avec les étapes du développement
urbain ; inclure une évaluation stratégique de l’environnement.
2. Les plans de secteurs sont réalisés à l’échelle 1/5 000e ou 1/2 000e.
3. La visée d’une planification par secteurs dépend de celle du schéma
directeur dont elle relève, ainsi que des exigences de la gestion et du
développement urbains.
4. Les plans de secteurs, une fois approuvés, servent de base à l’élaboration
du projet d’investissement ainsi qu’aux planifications détaillées.
32 |
pour les équipements publics, terrain pour Une déclinaison plus efficace Pour aller plus loin :
les espaces verts) et des ratios sur les infras- • PADDI, 2010, Livret
tructures techniques (cote remblai, évacua-
des orientations de la
« Mise en œuvre de la
tion des eaux, électricité). De plus, le design planification stratégique planification urbaine à
urbain et les orientations stratégiques en HCMC »
matière environnementale sont aussi deux La planification par secteur peut être l’oc- • PADDI, 2011,
éléments importants du plan de secteur. Le casion de décliner le schéma directeur de Livret « Planification
règlement de gestion fait partie intégrante du manière plus précise et de développer la urbaine, urbanisme
plan approuvé selon la loi de 2009. cohérence interdistrict, ainsi que le travail règlementaire et
partenarial entre le système central et les opérationnel, enjeux
districts. fonciers et intégration
de l’économie dans la
planification urbaine »
Les schémas des districts sont actuellement
Les limites de la planification à établis selon leur effectif démographique qui
l’echelle des districts définit les ratios en termes d’équipement ou
de voirie. Il serait possible de partager ces
Afin de répondre aux objectifs économiques équipements entre districts proches : par
fixés par les autorités provinciales, chaque exemple les habitants du district 3 pourraient
district cherche à favoriser le développe- profiter des espaces verts du district 1 qui
ment économique de son territoire et tente est limitrophe. Les bénéfices de la présence
d’attirer davantage de population (le budget d’une zone industrielle ou commerciale
attribué par le Comité Populaire étant fonc- pourraient également faire l’objet d’une pé- 4
Consultants
tion des effectifs démographiques). Cela peut réquation. La répartition des équipements, internationaux sur ces
conduire à des inégalités entre les districts de la population ou des activités serait ainsi plans : Nikken Seikkei et
Sasaki
qui bénéficient d’une forte attractivité et do- mutualisée. Les schémas de districts ne se
tés d’un potentiel de développement et ceux concurrenceraient plus ni entre eux, ni avec
qui doivent conjuguer développement terri- le schéma directeur, dont les orientations
torial et protection de leur milieu naturel. se déclineraient plus facilement sur chaque
grand secteur.
Suite à la répartition des projets à l’échelle de
l’agglomération, des conflits pourraient voir
le jour entre la ville et les districts. En effet, La planification par secteur au Grand Lyon
ces derniers sont aujourd’hui compétents
pour développer des projets sur leur terri- Les communes sont regroupées par aire géographique : tous les
toire. Dans cette optique, réaliser une plani- maires d’un secteur se réunissent en appui à l’élaboration du schéma
fication par secteur pourrait porter atteinte directeur et discutent ensemble au sein de « conférences de maires
à leurs prérogatives et à leur budget, mais », sans autorité ni budget. Cette démarche permet une mise en
aussi les conduire à modifier leurs habitudes commun des compétences, une optimisation des moyens et des res-
pour travailler davantage entre eux et avec le sources, et évite le gaspillage : il n’est pas nécessaire par exemple que
comité populaire de HCMV. chaque commune possède sa piscine ou son parc.
Faire la ville | 33
Chapitre 1 : La planification urbaine
Faire la ville | 35
Chapitre 1 : La planification urbaine
36 |
les espaces ouverts sont appelés à devenir, à une structure de gouvernance pour sa mise
terme, des « parcs urbains » destinés aux loi- en oeuvre et son suivi. Donnée nouvelle, le
sirs des citadins et des touristes. La mise en périmètre d’étude devrait inclure les pro-
œuvre de ce concept de corridor vert appelle vinces de Quang Ninh et de Hai Phong.
pourtant certaines interrogations. L’absence
de règlementation particulière à cette zone Certaines problématiques mériteraient d’être
rend difficile la préservation des espaces na- particulièrement prises en compte lors du
turels et risque de ne pas limiter l’étalement futur exercice de planification régionale.
urbain. Il est également probable que cet L’effort de planification, reporté vers l’ouest
environnement privilégié fasse l’objet d’une de l’agglomération, a entraîné l’oubli du lien
forte pression foncière (habitations pour avec la façade maritime située à l’est (port de
classes aisées ou résidences secondaires). Hai Phong, Ha Long). Cette région deltaïque
requiert l’intégration des risques liés au
Un plan spécifique pour ce territoire, à inté- changement climatique et le renforcement
grer au schéma directeur, pourrait clairement des aménagements hydrauliques pour gérer
différencier les zones urbanisables de celles le risque d’inondation. Les constructions en
strictement interdites à toute construction. zones hautes seraient à privilégier.
En effet, le risque est de voir se développer
de nombreux pôles urbains (villes satellites, L’amélioration de la liaison par transport
cluster, etc.) et des voies routières au sein du ferré, routier et fluvial entre Hanoi, le litto-
corridor qui favoriseraient l’émergence d’un ral et ses ports, mérite également des études
continuum urbain. Une solution serait de limi- approfondies. Les routes entre Hanoi, Ha
ter, dans la zone du corridor vert, les intersec- Long et Hai Phong sont saturées, sujettes à
tions entres les voies rapides, les routes locales d’importants encombrements (flux locaux et
et les arrêts des lignes de transport en com- de transits mélangés, passage par les agglo-
mun, afin de prévenir la construction autour mérations, desserte de nombreuses zones
de ces nœuds. Un autre type d’outil, le « Parc industrielles, diversité des modes de trans-
Naturel Régional », permettrait de protéger et port présents sur la voirie). Le chemin de fer,
de valoriser des espaces naturels fragiles, sans sous-utilisé dans ce corridor, serait alors à
pour autant geler tout développement. valoriser, notamment pour le fret.
Faire la ville | 37
Chapitre 1 : La planification urbaine
38 |
L’Observatoire Partenarial Lyonnais en
Économie (OPALE) fédère l’ensemble des
« Les critères d’attractivité d’une ville
L’observatoire économique du Grand Lyon se fonde sur un sondage réa-
producteurs de données socio-économiques lisé à l’échelle internationale concernant les critères d’attractivité des villes
(Institut de la statistique, Chambres de com- auprès des entreprises (classement non officiel) :
merce, représentants d’université, agence - Facilité d’accès du marché au client ;
pour l’emploi, etc.). Son rôle est d’observer - Qualité de main d’œuvre ;
les problématiques socio-économiques sur - Accessibilité externe en transport (aéroport, grande gare) ;
l’agglomération afin de contribuer à la plani- - Qualité des transports en commun ;
- Coût de la main d’œuvre ;
fication et au développement de projets.
- Environnement des affaires ;
- Coût de l’immobilier ;
L’équipe « économie » au sein de l’Agence - Pratique des langues étrangères ;
d’urbanisme du Grand Lyon assure des acti- - Accessibilité des locaux ;
vités de diagnostic et de veille : diagnostics - Accessibilité interne en transport (desserte, réseau de transport en com-
économiques sectoriels ou territoriaux sur mun) ;
les volets économiques, veille économique - Qualité de vie ;
- Critère environnemental.
conjoncturelle, études sur l’emploi, obser-
vation des zones d’activités, benchmarks
(positionner l’attractivité de l’agglomération Le logo « ONLYLYON »
représente le territoire pour
lyonnaise à l’échelle européenne et interna- attirer habitants, touristes
tionale). Elle organise aussi des rencontres et investisseurs
avec les partenaires économiques.
Site économique
métropolitain existant
Cartographie des
Site économique
métropolitain projeté entreprises selon leur
activité et leur effectif dans
Espace métropolitain le quartier d’affaires de la
d’interface
Part Dieu à Lyon , réalisée
Polarité urbaine par l’observatoire OPALE
Les stratégies économiques
dans l’espace
Différentes stratégies spatiales peuvent per-
mettre la valorisation des activités écono-
miques. Les pépinières d’entreprises mettent
Les services d’urbanisme de la ville proposent des orientations à disposition leurs locaux pour de jeunes
sur les sites de développement économique métropolitains,
Grand Lyon structures innovantes. La politique des pôles
de compétitivité ou « clusters » vise à inten-
sifier, grâce à une proximité physique et un
Le marketing territorial soutien financier public, les relations entre
universités, laboratoires de recherche et Secteur d’activités
L’objectif de l’agglomération lyonnaise est de entreprises. Les différents pôles du Grand
Industrie, énergie,
se situer parmi les métropoles européennes Lyon sont spécialisés en recherche et deve- environnement
les plus attractives. Les études de « bench- loppement en chimie/pharmacie, systèmes BTP
marking » participent à l’élaboration d’une de transport, loisirs numériques, image et
Commerce de gros et de
stratégie de différenciation par la qualité du multimédia, ou encore textiles nouvelle détail
service, afin d’attirer durablement les entre- génération. Les autorités locales peuvent y Transports - logistique
prises. Une offre globale d’accueil est propo- encourager certaines activités ou en interdire Services aux entreprises,
sée : sites d’implantation, amélioration de la d’autres. Dans certains quartiers en difficulté finance, immobilier
desserte par les transports en commun, gui- sociale et économique, des « Zones Franches Autres services
chet unique. L’OPALE intervient dans l’iden- Urbaines » offrent aux entreprises qui s’y im-
tification des grandes sociétés par une veille plantent une fiscalité favorable à la condition Effectif salarié
active, en prospectant les investisseurs et en qu’elles recrutent de la main d’oeuvre locale. 0 salarié ou inconnu
suivant les stratégies d’entreprises - notam- De 1 à 9 salariés
De 10 à 99 salariés
ment par la presse et par les remontées Dans les villes européennes, la tendance De 100 à 249 salariés
d’informations fournies émanant des déve- actuelle est de mélanger, à l’échelle de l’ag-
250 salariés ou plus
loppeurs territoriaux du Grand Lyon. glomération, les zones résidentielles et les
Faire la ville | 39
Chapitre 1 : La planification urbaine
activités économiques, à l’exception de celles des PLU. La priorité est donnée à l’exploita- Pour aller plus loin :
qui, présentant des nuisances, ont des sites tion de l’existant, à la densification des zones • PADDI, 2011,
propres. Ainsi, le SCoT 2030 de l’aggloméra- d’activité et à leur desserte par les transports Livret « Planification
tion lyonnaise établit des orientations spéci- en commun ; urbaine, urbanisme
fiques par secteurs d’activités, en privilégiant - la localisation des pôles de développement règlementaire et
celles de dimension internationale sur neuf préférentiel ; opérationnel, enjeux
sites, les activités de dimension métropoli- - un raisonnement par bassin de vie afin de fonciers et intégration
de l’économie dans la
taine sur vingt-et-un sites et l’offre de proxi- tendre vers un équilibre habitat/emploi à planification urbaine »
mité sur tout le reste du territoire. Pour l’échelle de la métropole ;
autant, les orientations développées par la - des schémas sectoriels d’aide à la décision, • OPALE, Observatoire
partenarial de
collectivité ne demeurent que des incitations sans valeur juridique, dans les domaines du l’agglomération
pour les investisseurs. C’est le marché qui commerce, du tourisme ou de l’hôtellerie. Le lyonnaise en
oriente l’implantation des entreprises sur les PLU localise les différentes aires d’activité et économie,
différents sites. différencie les commerces que l’on souhaite http://www.opale-
ou non accueillir. lyon.com/site/
• Antier G., Les
Ces documents sont flexibles et résultent d’un stratégies des
compromis entre les attentes de la collectivi- grandes métropoles.
té et le marché. Les documents d’urbanisme Enjeux, pouvoirs et
peuvent être révisés si un grand projet est aménagement, Paris,
Armand Colin, 2005,
développé, en suivant une procédure d’en- 253 p.
quête publique. Ces modifications sont assez
rapides pour un projet de taille modeste. • Maurice Goze
(coord) Schéma
et règlement
d’urbanisme de
Les pôles de compétitivité constituent à la fois une politique Hanoi et HCMV, futures la ville de Sapa,
Lao Cai VIETNAM,
industrielle et d’aménagement du territoire, Grand Lyon
métropoles à l’échelle de Coopération
l’Asie du Sud-Est ? décentralisée
L’intégration des probléma- IATU -Province de
Les plans de développement socio-écono- Lao Cai-Région
tiques économiques dans les miques pourraient être rendus plus opéra- Aquitaine, 02/2011,
documents de planification tionnels si le dialogue avec les représentants 5 tomes : 1- Projet
d’aménagement et
des acteurs économiques et les chambres de de développement
Les stratégies économiques ont un impact commerce et d’industrie était renforcé. Un durable, 2- Règles
sur l’organisation du territoire. Elles doivent observatoire partenarial, comprenant des générales, règles
donc être en cohérence avec la planification services de l’État, des services des villes de particulières par
urbaine et ses différents documents, à la fois Hanoi et de HCMV (économie, urbanisme), zones, 3- Charte de
en termes de réservation d’espaces pour l’Institut des statistiques, des représentants qualité architecturale
des infrastructures ou des zones d’activité, et paysagère, 4- Plan
des chambres de commerce et d’autres ins-
d’embellissement et
d’insertion d’activités dans les tissus urbains titutions à caractère économique pourrait de sauvegarde du
résidentiels ou dans les campus universi- être créé dans chacune des villes. Un accom- centre-ville, 5-Schéma
taires, comme de prévention des nuisances pagnement de la planification par l’étude de directeur des réseaux.
et de gestion des risques technologiques. Le marché permettrait de programmer l’immo- Versions française et
réseau de transport en commun doit égale- bilier d’entreprise afin d’être plus en phase vietnamienne.
ment intégrer la desserte des pôles d’emplois avec les investisseurs qui souhaitent s’ins-
majeurs. taller sur le territoire. Le suivi des filières
économiques d’excellence (ou à enjeu) dans
Le schéma directeur du Grand Lyon com- l’élaboration des plans de développement so-
prend notamment : cio-économiques, avec des documents secto-
- une évaluation pour 2025 de la capacité de riels sans valeur juridique, alimenterait par la
l’agglomération lyonnaise à accueillir de nou- suite les documents officiels de planification.
velles activités. Ce programme d’immobilier La poursuite du « benchmarking » dégagerait
d’entreprise est élaboré grâce à l’évaluation la spécificité des territoires de Hanoi et de
des besoins des entreprises (surface à urba- HCMV par rapport aux autres métropoles du
niser) et à partir des données et prévisions Sud-Est asiatique.
40 |
LE FONCIER URBAIN
L
’ État vietnamien, depuis la Constitution de 1959, est propriétaire de l’ensemble
des terres au nom du peuple. À la fin des années 1970, les faibles rendements
des coopératives agricoles et l’insécurité foncière ont engendré une crise du
monde rural. L’État s’est alors engagé dans une réforme foncière rurale, puis urbaine,
constituant l’un des piliers de la politique de transition du Viêt-Nam, où le foncier
est considéré comme un outil de développement économique et urbain majeur.
Cependant, les grands projets d’aménagement et d’infrastructures s’inscrivent dans un
système complexe : planification cloisonnée du foncier et des constructions ; double
système de prix ; lourdes procédures de récupération des terrains, d’indemnisation
et de relogement des populations. Dans ce contexte, comment constituer les réserves
foncières nécessaires aux grands projets ? Comment garantir les droits fonciers et une
utilisation efficace des terrains ? Comment mettre également cette dernière au service
du financement des infrastructures et de l’aménagement urbain ?
Le quartier de An Phu à
HCMV, 2012
Faire la ville | 41
Chapitre 2 : Le foncier urbain
Le quartier de My Dinh
à Hanoi, vu de la tour
Keangnam, 2012
42 |
La forte pression foncière et Foncier et construction, deux Pour aller plus loin :
• PANDOLFI, L., Une
l’étalement urbain planifications différentes terre sans prix, thèse
Les villes de Hanoi et de HCMV présentent Les planifications foncière et urbaine sont de doctorat, Paris :
Université de Paris
des densités urbaines parmi les plus fortes dissociées à la fois dans l’exercice et dans 8, Institut Français
au monde, qui atteignent 840 hab./ha dans le temps. Le plan foncier élaboré par le dé- d’Urbanisme, 2001,
le vieux quartier de Hanoi et 500 hab./ha partement des Ressources Naturelles et de 567 p.
dans le quartier de Cholon à HCMV. Depuis l’Environnement (DoNRE) établit l’usage des
le milieu des années 1990, la ville de Hanoi, sols pour dix ans et doit être compatible avec
longtemps contenue dans des limites admi- le schéma directeur des constructions établi
nistratives, connaît une forte extension ur- par d’autres organismes. Il est ensuite décli-
baine. De son côté, l’agglomération de HCMV né en plans de détail par les districts. Or la
se caractérise par un important étalement mobilisation des ressources foncières par la
urbain, qui s’étend sur les provinces voisines puissance publique pour la réalisation d’équi-
du Dong Nai et de Long An, et par un déve- pements ou d’infrastructures suit des procé-
loppement sur des territoires marécageux au dures complexes qui allongent la durée des
sud. opérations et augmentent leur coût. Par ail-
leurs, les outils et le budget manquent pour
Ces densités urbaines élevées et cette crois- conduire les grands projets prévus (infras-
sance s’inscrivent dans un environnement ru- tructures, zones industrielles, etc.). Ces diffé-
ral également densément peuplé : les densités rents obstacles créent un décalage temporel
des deltas du Fleuve rouge peuvent atteindre entre les planifications foncière et urbaine,
jusqu’à 1 120 hab./km² et celles du delta du sans compter que, dans l’attente de l’aboutis-
Mékong 1 000 hab./km². Pourtant, entre 2001 sement de ce long processus de planification,
et 2010, près d’un million d’hectares de les transactions se déroulent à leur propre Carte foncière de la province
terres agricoles (4% de celles-ci en 2000) ont rythme, suivant les opportunités et les cycles de HCMV, 2005
été convertis pour un usage résidentiel ou immobiliers.
commercial. La pression sur ces terres et le
mitage urbain sont si étendus qu’en 2008 le
gouvernement a décidé de geler plus d’un
million d’hectares de rizières et de limiter
la superficie des terrains agricoles attribués
gratuitement. Si la superficie des terrains
dépasse le seuil fixé, l’acquéreur doit alors le
louer à l’Etat pour éviter la spéculation.
Faire la ville | 43
Chapitre 2 : Le foncier urbain
44 |
fonciers et immobiliers élevés qui entravent
l’accès au logement des classes moyennes et
populaires.
Faire la ville | 45
Chapitre 2 : Le foncier urbain
46 |
LE FONCIER EN FRANCE
Des dispositifs règlementaires, opérationnels et
fiscaux au service de l’action foncière publique
n France, le droit de propriété est C’est pourquoi les autorités publiques pro-
Données générales
Adresse parcelle 24 Rue Emile Appartenance 0
Decorps à PDL
Surface parcelle 2187 m2 Préfixe de la parcelle
Préfixe de section de référence
Lettre de série rôle A Section de la parcelle
de référence
Date de l’acte 23/07/2003 Numéro de plan de
la référence
Caractère urbain Numéro de parcelle 0128
de la parcelle primitive
Indicateur A Code du CDIF 4121
d’arpentage
Parcelle non figurée 1 Code du CDIF 4121
au plan
Propriétaire principal
Nom Sa Centre Europeen Cinématographique Rhône-Alpes
Adresse 24 rue Emile Decorps
69100 Villeurbanne
Faire la ville | 47
Chapitre 2 : Le foncier urbain
Les différents marchés fonciers sont consti-
tués par :
1. l’espace naturel comme bien de production ;
2. l’espace naturel comme bien de consom-
mation (résidences secondaires, loisirs…) ;
3. l’espace naturel comme matière première ;
4. le marché des terrains neufs (à bâtir en
périphérie) ;
5. le marché des terrains d’occasion (renou-
vellement urbain) ;
6. le marché des droits à bâtir (marché urbain
classique), qui varie selon le marquage social
(50 % de l’explication du prix), l’accessibilité
en transport et les aménités urbaines.
Il n’existe pas de méthode scientifique ni de Secteur prioritaire pour le développement ur- Réseau de transports collectifs :
démarche absolue pour estimer la valeur bain et la réalisation d’équipements (polarités)
d’un bien foncier ou immobilier. Différentes Secteur prioritaire bien desservi (gares du ré- réseau express de l’aire mé-
seau express, corridors urbains ) tropolitaine
méthodes peuvent être croisées.
Secteur prioritaire pour la réalisation de réseau d’agglomération
grandes opérations d’aménagement mixte
La méthode de comparaison directe avec le (sites de projet)
gare de niveau euro-régional
marché détermine le prix de vente selon les autre gare
possibilités règlementaires de construction
et les caractéristiques physiques du sol. La La méthode par le revenu est essentiellement
valeur des biens est estimée par référence au applicable aux exploitations agricoles. Elle Les secteurs d’intervention
foncière et d’urbanisation
marché et par comparaison avec les prix pra- conduit à une évaluation en valeur « occupée » préférentielle dans
tiqués pour des biens similaires. Les termes et permet de recouper une valeur obtenue par l’agglomération de Lyon se
de comparaison sont collectés (prix global, d’autres méthodes d’estimation. Le revenu brut situent à proximité des axes
de transport en commun
surface, descriptif, règles d’urbanisme, proxi- du bien est retenu et un taux de capitalisation
mité des équipements et des infrastructures y est appliqué. La capitalisation est un calcul
de transport). Le prix obtenu par m² est appli- qui permet notamment de connaître la valeur
qué au terrain à évaluer. future d’une somme placée à un taux d’intérêt
connu dès le départ.
« Les principaux dispositifs de l’action publique
dans le domaine foncier La méthode dite du compte à rebours est
Dispositifs règlementaires : utilisée par les professionnels de l’immobi-
- Plan Local d’Urbanisme (PLU), document lier. Elle permet d’évaluer les terrains à bâtir
contraignant qui identifie les zones agricoles, en milieu urbain. Elle établit à partir du prix
naturelles, urbanisées et à urbaniser ; potentiel de commercialisation d’un bien
- Lois sur des espaces particuliers : loi Mon- immobilier neuf le bilan économique de
tagne, loi Littoral, loi sur les Installations à risque. l’opération de construction projetée. Toutes
Dispositifs opérationnels :
les dépenses relatives à cette construction
- La Déclaration d’Utilité Publique (DUP) et la doivent être prises en compte. Elle suppose
préemption facilitent les acquisitions foncières de connaître :
des collectivités ; - la constructibilité du terrain en fonction des
- Zone d’Aménagement Concerté (ZAC) et Zone règlements d’urbanisme ;
d’Aménagement Différé (ZAD) constituent des - les contraintes liées à la qualité du sol et du
périmètres d’intervention ; sous-sol ;
- Établissements Publics Fonciers (Locaux) (EPF
ou EPFL) et Sociétés d’Aménagement Foncier et
- l’état de la demande (logements de luxe, ac-
d’Établissement Rural (Safer), conduisent sur cession sociale, bureaux, locaux d’activité) et de
le terrain les politiques d’acquisition foncière la solvabilité de la clientèle potentielle (réalités
pour le compte de leurs collectivités locales. économiques, possibilités de financement).
Dispositifs financiers et fiscaux : taxes fon- Les évaluations par comparaison et par le
cières, sur la plus-value, mécanismes de finan-
revenu peuvent être appliquées aux biens
cement des équipements, etc.
immobiliers.
48 |
Mener des politiques « L’acte de vente et le notariat
volontaristes : quels sont L’acte de vente est un document obligatoire pour devenir propriétaire d’un
bien foncier ou immobilier. Il peut comporter quelques dizaines de pages et
les outils opérationnels à doit être rédigé par un notaire. Quant à l’administration, elle peut, si elle le
la disposition des autorités souhaite, rédiger des actes administratifs pour acheter ou vendre ses biens.
Une collectivité vendeuse d’un terrain et désireuse que la construction res-
publiques? pecte certaines règles les inscrit dans l’acte. Des sanctions peuvent être
appliquées en cas de non-respect de ces règles.
L’achat à l’amiable est la procédure majori-
Le notariat est une profession libérale privée avec un rôle de service public.
tairement privilégiée et employée par la col- Le notaire est agrémenté par l’État, son rôle est de sécuriser la transaction,
lectivité pour acquérir des terrains. Dans le notamment en s’assurant que le vendeur est en droit de vendre. L’acte de
Grand Lyon, cette procédure représente 75% vente est rédigé par le notaire, qui engage sa responsabilité, puis signé par le
des transactions réalisées. vendeur et l’acquéreur. Chacun peut être représenté par son propre notaire.
L’acte signé est envoyé à la conservation des hypothèques pour publication,
puis au cadastre et enfin au centre des impôts fonciers de chaque partie pour
s’assurer qu’elles n’ont pas de dettes vis-à-vis de l’État en matière de fiscalité.
Le droit de préemption urbain
Le droit de préemption urbain est une procé-
dure qui permet à une organisation publique proposition du détenteur du droit ou par fixa-
d’acquérir en priorité, dans certaines zones tion judiciaire par le juge de l’expropriation.
définies par les documents d’urbanisme, des Le vendeur qui refuse la contre-proposition
biens fonciers ou immobiliers afin de réaliser peut renoncer à vendre (le bien reste soumis
une opération d’aménagement. L’autorité com- au droit de préemption en cas de nouvelle
pétente en urbanisme (commune, inter- aliénation) ou demander la fixation judiciaire
communalité, institution étatique) définit un du prix. Si le bien préempté n’est pas utilisé
périmètre, dans les zones urbanisées ou à ur- dans le cadre de l’opération ayant motivé sa
baniser, sur lequel elle est titulaire du droit de préemption, le vendeur ou l’acquéreur évincé
préemption. Ce droit peut être délégué à un peuvent user de leur droit de rétrocession.
établissement public ou à une Société d’Éco-
nomie Mixte (SEM). Toute la commune d’Évry
(Île-de-France) est couverte
Lorsqu’un propriétaire souhaite vendre un par un droit de « préemption
simple » (en vert), qui
bien immobilier situé dans un périmètre où concerne tous les types de
s’exerce un droit de préemption, il doit noti- biens (logements, terrains,
fier au titulaire de ce droit son intention de locaux professionnels…) à
l’exception des immeubles
vendre ainsi que le prix de son bien par une de moins de dix ans et
« déclaration d’intention d’aliéner ». Celle-ci des immeubles isolés
doit être rédigée par un notaire et l’acte de en copropriété. Le droit
vente ne peut être signé avant que la décla- de préemption renforcé
touche les secteurs que les
ration ne soit déposée à la mairie et que le autorités locales souhaitent
titulaire du droit de préemption ait renoncé requalifier, il concerne
à exercer ce droit. tous les types de biens
(périmètre jaune). Un droit
de préemption sur les
Le titulaire peut donc acquérir prioritaire- fonds et baux commerciaux
ment des biens immobiliers et fonciers lors (périmètre rouge) a pour
objectif de favoriser la
de leur mise en vente, à condition de faire présence et la diversité des
connaître son intention de préempter dans commerces.
un délai de deux mois. La collectivité n’a pas
l’obligation de communiquer ses intentions
lors de transactions amiables, mais les projets
Le droit de préemption en
d’opérations ou de réserves foncières doivent Zone d’Aménagement Différé
répondre aux critères d’intérêt général. Le
titulaire du droit motive formellement sa dé- Dans les Zones d’Aménagement Différé, l’au-
cision de préemption sous peine de recours torité publique dispose d’un droit de pré-
en justice. L’achat peut être règlé au prix emption sur toutes les ventes et cessions à
déclaré par le vendeur, au prix de la contre- titre onéreux de biens immobiliers ou fon-
ciers. Celui-ci s’exerce durant quatorze ans.
Faire la ville | 49
Chapitre 2 : Le foncier urbain
Sa création relève de la compétence de l’État marché, parce qu’inconstructible, ne peut Pour aller plus loin :
et nécessite l’accord de la commune ou de être revendu très cher et devenir construc- • ADEF, Association
l’intercommunalité. tible sans qu’au préalable les travaux de via- Des Études Foncières,
bilisation nécessaires n’aient été réalisés. Les http://www.adef.org/
expropriés peuvent attaquer la décision en site/
L’expropriation demandant un recours auprès de l’organisme • CERTU, Actions
décideur. foncières et projets
Cette procédure est rare (moins de 5% des d’aménagement,
http://www.certu.
transactions réalisées par le Grand Lyon), fr/fr/Urbanisme_et_
relativement violente, mais se révèle parfois Des leviers fiscaux qui freinent habitat-n24/Action_
utile. Elle nécessite beaucoup de rigueur et fonci%C3%A8re_et_
de volonté politique. Si le droit de propriété
la spéculation amenagement-n36-s_
thematique.html
est considéré comme sacré en France, la pro- Les taxes foncières sur la propriété bâtie et
cédure d’expropriation indique que l’on peut • CERF, Centre
sur la propriété non bâtie sont prélevées une d’Échanges et de
être contraint de céder son bien « pour cause fois par an sur les propriétaires. La somme Ressources Foncières
d’utilité publique, et moyennant une juste et récoltée est partagée entre les communes, Rhône-Alpes,
préalable indemnité ». Les projets d’infras- Fiches techniques sur
les intercommunalités, les départements et les Établissements
tructures, d’espaces publics ou encore de les régions. La fiscalité des mutations com- Publics Fonciers,
Zone d’Aménagement Concerté (ZAC) sont en porte les droits d’enregistrement, les frais de la méthode du
général considérés comme d’utilité publique. notaire et la taxation de la plus-value. Celle-
compte à rebours de
l’aménagement et
ci concerne les résidences secondaires et les de l’immobilier, et
Les organismes habilités à exproprier sont investissements locatifs et non les résidences sur le levier foncier
l’État, les collectivités, les établissements principales. En 2012, son montant était de dans les Plans Locaux
de coopération intercommunale tels que le d’Urbanisme,
32,5% de la plus-value pour une période de http://www.cerfra.
Grand Lyon, les concessionnaires de ZAC et détention du bien de moins de six ans. Une org/
les concessionnaires d’opération d’aména- décote de 2% est appliquée à partir de la http://www.paddi.vn/
gement. Tous les actes sont pris au nom de sixième jusqu’à la dix-septième année, puis
(en vietnamien)
l’État, seule autorité habilitée à déclarer un de 6%, pour atteindre 8% entre la vingt-
projet d’utilité publique. cinquième et la trentième année. Ce n’est
qu’après trente ans de détention du bien que
La phase administrative comprend deux en- les propriétaires sont finalement exonérés de Sur le périmètre déclaré
quêtes. Dans un premier temps, l’enquête l’acquittement de cette taxe. Certaines taxes d’utilité publique (DUP)
publique s’appuie sur une étude d’impact permettent de financer la construction et
pour ce projet urbain à
et recueille l’avis de toutes les personnes Annemasse (Rhône-Alpes),
l’entretien d’équipements publics lors d’opé- il reste encore des parcelles
concernées par le projet. Un commissaire rations d’aménagement. à acquérir par les autorités
enquêteur examine les avis et formule des locales
conclusions favorables ou non au projet.
Lorsque l’avis est favorable, les autorités
prononcent par décret ou arrêté ministériel
(ou préfectoral si le projet est moins impor-
tant), la Déclaration d’Utilité Publique (DUP)
qui permet de procéder aux expropriations.
Par la suite, l’enquête parcellaire permet
d’identifier les biens et les propriétaires à
exproprier. Elle débouche, après avis du com-
missaire enquêteur, sur l’arrêté de cessibilité
pris par le préfet.
50 |
Les outils fonciers vietnamien et français à disposition des collectivités
locales (HCMV et Grand Lyon)
Grand Lyon HCMV
Statut de propriété Droit de propriété du foncier et de l’immobilier, Propriété du sol au peuple, geson par l’État. Droit d’usage du terrain cessible
définif et transmissible. à tre onéreux, gratuit ou sous forme d’hypothèque.
Cession définive pour le terrain résidenel ou avec délai (maximum 50 ans)
pour le terrain d’acvités.
Ac on foncière Favoriser le développement de l’aggloméraon Générer des recees pour le budget public.
objecf principal (économie, habitat) dans le respect du droit et des règles Geson des terrains conformément à la planificaon.
d’urbanisme.
Élaboraon du Programmaon budgétaire présentée aux élus qui Par le Centre de Développement Foncier, pour des terrains qui ne sont pas encore
programme l’approuvent ou demandent des ajustements, votent aribués aux projets d’invesssement. Le Comité populaire de la ville prend les
d'acquisions le budget nécessaire pour la réalisaon du programme décisions de récupéraon de terrains, en foncon de ses capacités financières.
foncières d'invesssement dans le cadre du budget du Grand
Lyon.
Phasage Les sites stratégiques sont acquis en priorité. Les acquisions et les ventes se font par phasage. Les sites à récupérer sont
idenfiés par le Comité populaire de la ville.
Mise à disposion Terrains desnés aux projets d’intérêt général. La Terrains mis en vente aux enchères conformément au plan d’urbanisme ou desnés
des terrains acquis collecvité peut mere en vente ces terrains pour des aux projets d’ulité publique.
projets non-conformes à l’intérêt général à l’issue
d'un délai de cinq ans. Si la vente intervient pendant
ce délai, les anciens propriétaires peuvent demander
la rétrocession.
Modes d'acquisi on Acquisions amiables pour tous les projets. Acquisions amiables pour les projets purement économiques.
du foncier par la
puissance publique
Droit de préempon Dans les zones urbanisées et à urbaniser pour les projets Pas de droit de préempon.
d’intérêt général.
Expropriaon / Pour les projets d’intérêt général déclarés d’ulité Récupéraon du terrain avec indemnité pour les projets d’intérêt général.
Récupéraon publique.
Indemnités Fixées par le juge au prix du marché au moment de Fixées soit par le district, soit par le Comité populaire de la ville sur la base des
l’acquision évaluaons des valeurs immobilières effectuées par des consultants avec examen
des services techniques (dont le montant est souvent inférieur aux prix du marché).
Modes de De gré à gré : priorité aux occupants puis aux À l’acquéreur désigné au cas où il n’y ait pas de candidat à l’adjudicaon, dans le
cession des propriétaires voisins. cadre d’un échange contre des équipements, ou dans celui du programme de
terrains publics déplacement des usines polluantes.
Concurrence Par mise en concurrence. La concurrence s’exerce sur le prix des droits d’usage mais pas encore sur le
programme.
Bail / Adjudicaon Par bail à construcon. Par bail sur le long terme.
Ges on PLU révisé tous les 6 ans (mandat d’un maire) ou modifié Modificaon tous les 5 ans, élaboraon de nouveaux plans tous les 10 ans.
fréquence des pour apporter des retouches ne portant pas aeinte à
révisions l’esprit du document.
Informaons Fichier des hypothèques mis à jour dès qu’il y a un Le cadastre et les informaons cadastrales ne sont pas à jour de manière complète.
cadastrales et transfert de propriété. Les documents graphiques du
conservaon cadastre peuvent être consultés sur internet.
des hypothèques
Enregistrement Par le service fiscal de l’État. Par le bureau d’enregistrement du droit d’usage du terrain du DoNRE des provinces
des actes de (grands projets) ou par le bureau des Ressources Naturelles et de l’Environnement
vente et mise des districts (parculiers).
à jour des fiches
hypothèques
Instuon La direcon Foncier et Immobilier assure les acquisions Le DoNRE assure la geson administrave : formalités administraves pour les
responsable de du foncier par négociaon amiable, expropriaon ou opéraons d’aribuon, récupéraon, mise en locaon, changement d’affectaon
la geson du préempon. Le foncier acquis constue le patrimoine du terrain et délivrance des cerficats d’usage pour les professionnels. Les districts
foncier privé du Grand Lyon en aente de l’affectaon à un réalisent ces tâches pour les parculiers.
projet d’intérêt général. Les opéraons se clôturent avec
l’acte de vente chez le notaire.
Observatoires Missions : veille et étude des prix du marché (foncier et Pas d’observatoire des transacons foncières et immobilières.
immobiliers immobilier) mais aussi connaissance des volumes de
transacons par catégorie de biens.
Bases de données Les citoyens peuvent s’adresser aux notaires ou à des Pas de bases de données fiables, d’où l’émergence de spécialistes de l'immobilier.
experts immobiliers pour connaître la valeur de leur
patrimoine.
Avantages du Ouls mis en œuvre bien définis, clairs et stables. L’État est le propriétaire du terrain, ce principe facilite sa récupéraon. Le calcul des
système Transparence. Plusieurs modes d’acquision, les indemnités ne ent pas compte de la planificaon dans le futur.
propriétaires sont peu nombreux à se plaindre en jusce.
Réserves foncières prêtes à être mises à disposion pour
les projets d’intérêt général.
Inconvénients La propriété privée du terrain peut rendre les Les ouls efficaces et les plannings à long terme font défaut. Les formalités ne sont
du système négociaons plus longues. Le prix d’achat dépend des pas encore transparentes. Les indemnités sont plus basses que le prix du marché, les
règles d’urbanisme et du marché. détenteurs de droits sont nombreux à se plaindre en jusce. Il n’y a pas suffisam-
ment de réserve foncière pour des projets d’ulité publique.
Faire la ville | 51
Chapitre 2 : Le foncier urbain
L’Observatoire de l’Immobilier
d’Entreprise
Le Grand Lyon travaille en partenariat avec
le Cecim, une association créée à l’initiative
de professionnels de l’immobilier désireux de
connaître de manière fiable le marché et ses
acteurs.
Faire la ville | 53
Chapitre 2 : Le foncier urbain
54 |
La ville de HCMV met actuellement en place Pour aller plus loin :
une base de données foncière numérique « Exemple des champs à renseigner pour un
référentiel foncier en France • PADDI, 2010, Livret
dont les objectifs principaux sont d’établir la « Observatoires
légalité de chaque parcelle et du titulaire du Date : année, mois ; fonciers et
Vendeur et acquéreur : typologie – non nomi- immobiliers »,
droit d’usage, ainsi que d’unifier les données natif (promoteur, particulier, investisseur, mar-
cadastrales à l’échelle de la ville, en adéqua- http://www.paddi.
chand de biens, collectivité territoriale, État), vn/fr/centre-de-
tion avec le système national. Celle-ci devrait origine (lieu de résidence, nationalité), année de ressources/livrets-
devenir la référence en matière de gestion et naissance ou date de la création de la société ; des-ateliers-de-
de politique foncières. Depuis 1975 en effet, Commune et cadastre : code de la commune formation
plusieurs fonds cadastraux différents ont (code postal), section du cadastre, numéro de
la parcelle ; • Fnaim,
servi de base à la délivrance des certificats à http://www.fnaim.fr/
Caractéristiques du bien vendu :
HCMV (cartes de titres de propriété, cartes - nature : terrain nu ou encombré ; • Cecim,
de bandes et parcelles 299/ TTg, cartes ca- - usage : terrain à bâtir, terrain urbain remis à http://www.cecimobs.
dastrales 02/CT-UB, plans de fonds, etc.). neuf, etc. ; net/
- surface en m² ;
• ORF, Observatoire
De cette cohabitation résulte aujourd’hui - destination (prévue par l’acquéreur) : à bâtir,
à urbaniser ; régional du foncier en
une certaine confusion : ainsi, les adresses Île-de-France,
inscrites sur les certificats délivrés ne corres- - projet : logement, industrie, commerce ;
- capacité Surface hors-œuvre nette (SHON) en m² http://www.orf.asso.
pondent plus toujours aux cartes cadastrales (surface sans les murs, les combles, etc.) ; fr/
officielles numérisées, qui ont été récem- - code du zonage d’urbanisme du PLU ;
ment dressées et mises à la disposition des - occupation du terrain : libre, occupé avec titre,
services fonciers. Ces dernières ne sont pas occupé sans titre ;
encore systématiquement utilisées : certains Logement : nombre d’étages, de logements,
districts ont encore recours à des bases de confort, capacité de m² SDPHO (Surface
Développée Pondérée Hors Œuvre, indice où
données papier et les données cadastrales
les surfaces des différentes pièces sont pondé-
qui y sont attachées sont très dispersées. rées selon leur usage, par exemple le salon et
une terrasse n’auront pas le même coefficient),
De la même manière, les logiciels de traite- surface plancher.
ment des données ne sont pas encore unifor- Montant de la vente : fiscalité (TVA, droits de
misés. Le délai de délivrance des certificats mutation), prix toutes taxes comprises, prix
étant long, les changements de droit d’usage, hors taxe, prix du m² de terrain (toutes taxes
comprises), prix/m² SHON (toutes taxes com-
de propriétaire ou de division des parcelles
prises), prix/m² SDPHO s’il s’agit d’un logement.
ne sont pas intégrés en temps réel dans la
base. Les cartes cadastrales sont rapidement
obsolètes, particulièrement dans les districts
périurbains, et ne permettent pas de repré- Les structures spécifiques
senter les nouvelles zones résidentielles pla- de gestion : les Centres de
nifiées.
développement foncier (CDF)
Une base de données pilote a été réalisée et les Établissements Publics
dans le district 6 de HCMV en 2009 : fonds Fonciers Locaux (EPFL)
et dossiers cartographiques ont été fusion-
nés et 256 champs sont à renseigner. Dans ce
français 2 2
Atelier du PADDI sur
les « Outils et dispositifs
cadre, le logiciel Vilis est utilisé pour vérifier fonciers et immobi-
La volonté politique doit être extrêmement liers », animé par Robert
les relevés de terrain, actualiser les chan-
forte pour mener une action foncière ayant Wacheux, mars 2009
gements fonciers et obtenir des références
un impact sur le développement urbain. En
directes aux textes légaux.
France, les collectivités peuvent acquérir
directement des terrains en se finançant par
l’impôt ou par des emprunts. Cette solution
est efficace, bien qu’elle soit coûteuse pour la
collectivité et que la gestion foncière repré-
sente un risque financier. Les services fonciers
et immobiliers des collectivités territoriales
peuvent alors s’appuyer sur de puissants
Faire la ville | 55
Chapitre 2 : Le foncier urbain
organismes opérationnels : les Établissements des terrains et de constituer des réserves fon-
Publics Fonciers Locaux (EPFL). cières pour le compte des autorités publiques
ou d’investisseurs privés. L’objectif de ces
Un outil semblable, le Centre de Développe- centres est d’offrir un « guichet unique » pour
ment Foncier, émerge actuellement au Viêt- les démarches d’obtention de terrain et d’au-
Nam. Si les deux institutions sont chargées torisation d’investissement, qui concernaient
d’acquérir des terrains, la finalité peut diffé- auparavant les départements des Ressources
rer. En France, les terrains acquis ne peuvent Naturelles et de l’Environnement (DoNRE), de
être utilisés que dans le cadre de projets la Construction (DoC) et du Plan et de l’Inves-
d’« intérêt général ». Au Viêt-Nam, ils sont tissement (DPI). Ils ont été créés par la loi fon-
destinés aussi bien à la réalisation d’infras- cière de 2003 et assurent un service d’intérêt
tructures et d’équipements publics qu’à la public. Le statut d’établissement public facilite
revente à des investisseurs privés après leur les relations avec les différents organismes pu-
viabilisation. blics, tandis que le statut d’entreprise publique
offre d’avantage d’autonomie de financement
Les EPFL français sont des établissements et de fonctionnement. Les CDF sont placés
publics à caractère industriel et commer- sous la tutelle des DoNRE et peuvent être ad-
cial créés par des collectivités territoriales ministrés à l’échelle des districts ou de la ville.
(régions, départements, intercommunalités).
Leurs salariés sont des experts en finance, Des plans annuels et quinquennaux sont éta-
prospective, acquisition et gestion foncière. blis par les CDF, à la fois pour les terrains à
Ils sont financés par diverses taxes sur les acquérir et pour les terrains à revendre par
constructions et les équipements, par des adjudication. Au CDF de HCMC, qui dépend du
contributions émanant de l’État et des col- DoNRE, ces derniers sont choisis de deux ma-
lectivités membres, par des emprunts et par nières différentes. Dans le premier cas, l’initia- Des terres agricoles ou
les produits de leur activité. Une structure tive revient au Centre qui définit un périmètre des terrains de quartiers
étatique avec des missions similaires, l’Éta- de récupération en fonction du plan d’usage d’habitat insalubre sont
récupérés pour accueillir le
blissement Public Foncier, peut être créée des sols et le soumet pour approbation au développement de quartiers
pour travailler en contractualisation avec DoNRE puis au Comité populaire. Le budget de résidentiels modernes ou
les collectivités locales (au nombre de treize l’achat provient du fond général de HCMV et de grandes infrastructures,
HCMV
en 2010). Les EPLF - 15 en 2010 - se substi- les transactions dépassant un certain montant
tuent aux collectivités en se voyant déléguer nécessitent la validation du ministère du Plan
la négociation ou les droits de préemption. et de l’Investissement. Afin de fixer le
Ce ne sont ni des aménageurs ni des promo- montant de la mise en vente d’un
teurs : leur rôle est de développer la maîtrise terrain par adjudication,
foncière en fonction des objectifs prédéfinis des consultants im-
par les collectivités, en matière d’habitat, de mobiliers privés
transport et d’environnement. Les EPFL ac- évaluent sa
quièrent des terrains ou des immeubles pour valeur au prix du Les aires violettes signalent
les terrains industriels
constituer des réserves foncières et des opé- marché, en-
vacants qui présentent un
rations d’aménagement. Ils gèrent ensuite les suite le service potentiel de mutation sur
biens acquis sur une durée prédéterminée des finances donne son le boulevard Vo Van Kiet,
avant de les rétrocéder aux collectivités. Les accord, puis la ville valide cette HCMV
différents membres de l’EPFL doivent donc valeur plancher. Le Centre de
réussir à ordonner leurs projets urbains selon Développement Foncier élabore les proposi-
leur degré de priorité et à les coordonner. tions d’indemnisation des habitants et assure
la maîtrise d’ouvrage des projets de reloge-
ment. Ces indemnisations suivent en théorie
Les Centres de les prix du marché mais la lourdeur des pro-
Développement Foncier (CDF) cédures administratives les rendent souvent
caduques au moment du règlement.
vietnamiens
Les CDF sont des établissements publics à ca- Dans le second cas, la récupération d’un ter-
ractère industriel et commercial ou des entre- rain peut faire suite à la proposition d’un
prises publiques. Leur mission est de récupérer investisseur privé, vietnamien ou étranger.
Cette seconde situation est la plus courante
56 |
en raison du faible budget des collectivités tion de la situation sociale et de l’état du bâti. Pour aller plus loin :
pour l’achat, comme c’est le cas à HCMV. Le Comité populaire récupére sur proposition • PADDI, 2006, Livret
du DoNRE, des terrains attribués à des inves- « Planification et
tisseurs si les travaux n’ont pas commencé ou gestion des ressources
Un cadre d’intervention limité sont suspendus. foncières »,
http://www.paddi.
La lourdeur des procédures administratives vn/fr/centre-de-
ressources/livrets-
et son budget limité entravent la réactivité du
CDF de HCMV pour mener les acquisitions et Diversifier les outils des-ateliers-de-
formation
les reventes de terrain, alors que celui-ci évo- opérationnels et encadrer les
lue dans un contexte d’économie de marché. • PADDI, 2009,
projets d’aménagement Livret « Outils et
Les délais entre l’achat du terrain, sa viabilisa- dispositifs d’une
tion et sa commercialisation sont longs et les La faible maîtrise publique du foncier fragilise politique foncière et
retours sur investissement sont donc tardifs. la mise en œuvre des orientations urbaines immobilière »
définies dans les schémas directeurs. La récu- • EPF Île-de-France
La dispersion des compétences de planifica- pération de terrains apparaît comme le seul http://www.epfif.fr/
tion et la superposition des plans émanant levier des collectivités locales pour mener • Agence d’urbanisme
du DoC, du DoNRE et du DUPA rendent éga- des actions foncières, et celles-ci semblent y de la région
lement difficile la gestion foncière de la ville. voir davantage une source de recettes qu’un grenobloise,
Ainsi, le CDF peine à rassembler des informa- outil au service du développement urbain de exemple de statut
tions concernant la planification urbaine, gé- l’agglomération. C’est pourquoi le DoNRE de d’un EPLF,
rée par le DUPA. L’ensemble du territoire n’est HCMV conduit actuellement une réflexion http://www.aurg.org/
pas couvert par un plan d’aménagement, et ressource/activites/
sur l’opportunité de mettre en œuvre des
une même zone peut l’être en revanche par foncanex.pdf
outils semblables au droit de préemption
des plans fonciers et des constructions dont français, en les adaptant au contexte règle-
les orientations ne sont pas similaires. Le CDF mentaire vietnamien.
doit alors éclaircir quels sont les droits qui
s’appliquent sur cette zone avec les différents
services et le Comité populaire afin de pou- Le « circuit court » des
voir réaliser le projet.
opérations d’aménagement
Une fois les projets arrêtés, les procédures Si l’État vietnamien a conservé depuis le Doi
manquent de souplesse pour faire face à Moi ses prérogatives en matière de fixation
d’éventuels imprévus. Dans le cas où les des droits d’usage du sol, il ne parvient plus
investisseurs se retirent de la procédure de aujourd’hui à financer les différents projets
récupération de terrains, la ville refuse de re- d’infrastructures et d’aménagement. Ainsi,
découper le parcellaire en de plus petits lots ce sont des emprunts souscrits auprès des
qui pourraient trouver des acheteurs plus bailleurs de fonds internationaux qui per-
facilement. Les terrains sont alors gelés dans mettent notamment de financer la construc-
l’attente d’autres investisseurs. Un règlement tion de routes et des réseaux de métro de
récent permet aux habitants des périmètres Hanoi et de HCMV.
bloqués de continuer à construire ou amélio-
rer leur logement, évitant ainsi une dégrada- Par ailleurs, l’aménagement de nouvelles aires
urbaines se fait en général selon un « circuit
court », par désignation des investisseurs. La
collectivité cède par grands lots des terrains
urbanisables aux investisseurs (entreprises
publiques, investisseurs privés et étrangers)
qui vont ensuite diviser les lots et les aména-
ger ou céder certains lots viabilisés à d’autres
promoteurs immobiliers.
Faire la ville | 57
Chapitre 2 : Le foncier urbain
dans le système dit « terre contre infrastruc-
ture », les droits d’usage du sol sont cédés
à des investisseurs privés en échange de la
construction d’équipements et d’infrastruc-
tures publiques, qui sont rétrocédés aux col-
lectivités. Ce système permet aux autorités
publiques d’aménager et de développer leur
territoire en n’apportant que très peu de ca-
pital. Les négociations se font au cas par cas
entre les investisseurs et les autorités dans
un cadre légal qui reste encore flou, malgré
la promulgation en 2010 de la décision du
Premier ministre 71/2010/QD-TTG relative à
la clarification de l’organisation des partena-
riats public-privé au Viêt-Nam.
58 |
sur le financement par ces derniers d’une Pour aller plus loin :
partie des équipements publics nécessaires • Banque mondiale
aux futurs habitants et usagers de l’opéra- - PPIAF, Peterson G.
tion. Les équipements sont alors réalisés par E., 2009, « Unlocking
les autorités publiques. land values / Exploiter
la valeur du foncier
pour financer les
Dans la procédure de ZAC, les équipements infrastructures
sont réalisés par l’aménageur et leur coût est urbaines », 139 p.
répercuté lors de la vente des bâtiments. http://www.
worldbank.org/en/
Il existe d’autres manières de financer la country/vietnam
réalisation des équipements, par exemple
• IAU-IdF, 2009,
en taxant la plus-value réalisée lors de la re- « Valorisation foncière
vente d’un bien immobilier. Plus spécifique- et financement des
ment, les riverains d’un nouvel équipement infrastructures de
peuvent être mis à contribution en fonction transport », Note
du coût des travaux. Cela engendre toutefois rapide Mobilité,
des problèmes d’équité, dans la mesure où n° 477, 4 p.
de reconstruction ou d’agrandissement de http://www.iau-idf.
d’autres habitants peuvent également profi-
bâtiments qui font l’objet d’une autorisation fr/detail/etude/
ter de ces équipements. valorisation-fonciere-
d’urbanisme. Elle finance les dépenses pour
les équipements liés à l’urbanisation. et-financement-des-
Pour la Banque mondiale, les systèmes de infrastructures-de-
financement des infrastructures par le fon- transport.html
Par ailleurs, les différentes procédures de di-
cier constituent des pistes intéressantes et • PADDI, 2012,
vision et d’aménagement foncier impliquent
actuellement privilégiées par de nombreuses Livret « Les mesures
plus ou moins les collectivités publiques dans
collectivités dans le monde, à la fois dans les d’acquisitions
le financement des équipements et ne re- et de réserves
pays en développement (Inde, Colombie) et
quièrent pas toujours de faire appel à la puis- foncières dans le
dans les pays développés (États-Unis, etc.).
sance publique pour obtenir des terrains, ce cadre de projets de
qui permet de limiter les coûts. réaménagement
La part de l’investissement privé pour la réalisation des urbain à composante
La simple division d’un terrain sans réalisa- équipements varie selon les différentes procédures transport »
d’aménagement (lotissement en haut et ZAC en bas), Île-
tion d’équipements est une procédure de de-France • PADDI, 2012,
droit commun qui ne nécessite pas de de- Livret « Montage
mande d’autorisation, une simple déclaration d’une opération
d’aménagement »
suffisant.
• PADDI, 2012, Livret
La division d’un terrain avec aménagement « Les Partenariats
public-privé »
(routes et réseaux, même s’ils sont privés)
est appelée lotissement. Les terrains ont été
acquis à l’amiable ou par succession et les
équipements sont à la charge de l’aména-
geur. Cette procédure nécessite une autori-
sation, la collectivité impose alors un cahier
des charges de normes techniques pour la
réalisation des équipements, car même s’ils
peuvent être privés dans un premier temps,
il est fréquent que la collectivité les reprenne
à sa charge. Cette procédure peut être réa-
lisée aussi bien par une organisation privée
que publique, pour des terrains destinés au
logement ou à des activités économiques.
Faire la ville | 59
Chapitre 2 : Le foncier urbain
Ces montages public-privé se font essentiel- Lors de « cessions par bail à construction », le
lement selon trois formes de partenariat : bail à long terme (de 18 à 99 ans) comporte
- Le don de terrains publics au promoteur pri- l’obligation de construire et d’entretenir un
vé en contrepartie d’investissements dans les immeuble dont les caractéristiques sont
infrastructures publiques se rapproche du mon- connues à la date de signature du bail. La du-
tage « terre contre infrastructure » vietnamien. rée du bail est calculée en fonction du temps
- Dans la vente de terrains publics à des pro- nécessaire à un retour sur investissement.
moteurs privés, la recette est affectée au Au terme du bail, la collectivité récupère son
financement d’infrastructures publiques. terrain et devient propriétaire des construc-
- Enfin, le partage des plus-values foncières tions, sans reverser d’indemnités au preneur
engendrées par les investissements en infras- du bail. Cette dernière procédure est utilisée
tructures publiques (par exemple la valorisa- dans l’agglomération lyonnaise où le foncier
tion immobilière due à la construction d’une est cher et parfois difficile d’accès pour les
nouvelle station de métro) se fait par le biais organismes de logement social. Le Grand Lyon
de taxations, comme vu plus haut. peut céder un terrain « par bail à construction »
à un investisseur, qui se consacre à la construc-
La Banque mondiale souligne cependant que tion du bâtiment sans être freiné par le prix
ces montages engendrent des recettes consi- du foncier et peut par la suite pratiquer des
dérables, favorisant les risques de corruption loyers plus accessibles pour les ménages.
et d’abus de pouvoir. Ces recettes sont donc
à affecter de manière privilégiée à un budget
d’investissement pour les équipements et
non au budget général des collectivités.
Les SIG offrent des
domaines d’utilisation très
variés, de la planification
à la gestion des permis de
construire, du foncier et de
l’immobilier, en passant par
l’assainissement
Faire la ville | 61
Chapitre 2 : Le foncier urbain
62 |
LES TRANSPORTS
COLLECTIFS URBAINS
L
a croissance urbaine de HCMV et de Hanoi s’est accompagnée d’une augmentation
des déplacements par des moyens de transports individuels. Ainsi, plus de 80% des
déplacements s’y effectuent à moto, ce qui a longtemps permis une bonne fluidité
du trafic. Pourtant, les très fortes densités urbaines, la faiblesse de l’offre en transport
en commun et un usage croissant de la voiture (plus 400% de véhicules enregistrés à
Hanoi entre 2005 et 2010) entraînent aujourd’hui une congestion problématique pour
la mobilité urbaine et la qualité de l’environnement.
Les autorités publiques ont donc initié des plans ambitieux de développement des
transports collectifs. Des réseaux de métro complétés par des lignes de bus à haut
niveau de service (BRT) et des lignes de tramways devraient d’ici une décennie desservir
les deux métropoles. Plusieurs projets sont d’ores et déjà en phase de construction et
les premières lignes devraient ouvrir en 2017-2018.
L’intégration physique (création de pôles d’échanges) et technique (notamment
billettique) de ces futurs réseaux sera une condition nécessaire à leur efficacité
et donc à leur succès. La mise en place de réseaux de transport collectifs unifiés et
complémentaires devra passer par une réorganisation institutionnelle du secteur avec
pour objectif la création d’autorités organisatrices. L’articulation urbanisme-transport
sera également indispensable pour assurer une fréquentation optimum des transports Le pôle d’échanges de bus
en commun. de Long Bien à Hanoi
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
64 |
Le renouveau du transport en Des politiques de transport en
commun à Hanoi et son essor commun ambitieuses
à HCMV Le plan directeur des transports de Hanoi
Au milieu des années 1990, la société des prévoit que 50% des déplacements s’effec-
transports publics de Hanoi, Transerco, a été tueront par les transports collectifs en 2030.
créée à partir des cinq anciennes régies de Huit lignes de métro, dont quatre actuelle-
transport de la ville, y compris celle du tram- ment financées, sont inscrites dans les plans
way datant de l’époque coloniale. Le service des transports et le schéma directeur. L’aide
chargé de la gestion des réseaux de bus, le publique au développement japonaise (JICA)
« Transport Management and Operation finance par prêts concessionnels la ligne n°1
Center » (Tramoc), a été créé en 1998. À par- (Yen Vien/Ngoc Hoi) pour 1,5 milliard de dol-
tir du milieu des années 2000, de nouvelles lars et la ligne n°2 (Nam Thang Long/Tran
lignes ont été octroyées à d’autres exploi- Hung Dao/Thuong Dinh) à hauteur de 1,9 mil-
tants, publics ou privés, afin d’introduire liard de dollars. De leur côté, l’aide publique
de la concurrence dans l’attribution des au développement française, la Banque
contrats d’exploitation. Durant cette période, Européenne d´Investissement, la Banque
le transport public à Hanoi s’est modernisé, Asiatique de Développement et le gouver-
notamment grâce aux projets de coopéra- nement vietnamien financent la ligne n°3
tion qui comprenaient la création de pôles (Nhon/Gare de Hanoi/Hoang Mai) pour un
d’échanges, d’un dépôt de maintenance, l’ex- coût estimé à environ 1,1 milliard d’euros. La
tension du réseau (70 lignes de bus en 2012) Chine finance via un prêt à taux préférentiel
ou encore la formation d’experts en trans- de 500 millions de dollars la construction de
port en commun. Ainsi le nombre de voya- la ligne n°2a (Cat Linh/Ha Dong). Une étude
geurs est passé de 10 millions en 2001 à 413 pour un financement en partenariat public-
en 2009, pour une population de six millions privé de la ligne n°5 est en cours. Seules les
d’habitants. lignes n°4, 6, 7 et 8 ne sont pas financées. La
Banque mondiale soutient un projet de ligne
À HCMV, depuis l’amélioration de l’offre de BRT (Bus Rapid Transit) et l’IMV travaille
(nombre de lignes, régularité, accessibilité), également sur deux projets de lignes de bus
les bus connaissent aussi une fréquentation en site propre.
accrue, passant de 36,2 millions en 2002 à Le bus est un moyen de
342 en 2008, soit un taux de croissance de À HCMV, l’objectif fixé par le schéma direc- transport très utilisé par les
800% en six ans, pour une population de sept teur des transports modifié en 2013 est d’at- lycéens et les étudiants qui
millions d’habitants. Cette progression peut teindre entre 20% et 25% de déplacements n’ont pas encore de permis
moto ni de budget suffisant,
s’expliquer par l’extension de la couverture à en transport public en 2020. Il propose la HCMV
l’ensemble du territoire de la ville (146 lignes
de bus en 2012) ainsi que par un service de
meilleure qualité : prolongation des plages
horaires de fonctionnement, hausse de la
fréquence, politique tarifaire abordable ou
encore climatisation. Malgré ces progrès ma-
nifestes, la multitude des petits opérateurs
rend la gestion difficile en matière de qualité
des véhicules ou de formation du personnel.
Par ailleurs le manque de réserves foncières
freine encore la construction ou la moder-
nisation des pôles d’échanges et des voies
réservées aux bus. Ainsi, améliorer la qualité
du service et l’accessibilité constitue un défi
à relever.
Faire la ville | 65
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
création de six lignes de métro, dont trois
sont actuellement financées par des bailleurs
de fonds. La ligne n°1 (Ben Tanh/Suôi Tiên),
d’un coût attendu de 2,5 milliards de dollars,
est financée par la JICA et HCMV (11%). Le
tronçon aérien de cette ligne, long de 17 km,
a été mis en chantier en août 2012. La ligne
devrait être achevée en 2017. La ligne n°2 À Bangkok, la construction
(Thu Thiêm/Tây Ninh), d’un coût de 1,38 mil- de voies rapides surélevées
n’a pas réussi à réduire
liard de dollars, est financée par des prêts de significativement les
la Banque Asiatique de Développement, de la embouteillages
Banque Européenne d’Investissement, de la
Banque allemande de développement et de
reconstruction (GTZ) et par des fonds muni- les transports collectifs pour désengorger les
cipaux. Les travaux du tronçon Ben Thanh/ villes. Les mesures incitant à leur usage au
Tham Luong devraient commencer courant détriment du transport individuel sont très
2014. Le financement de la ligne n°5, pont de variées et peuvent passer par la création de
Saigon/Can Giuôc, demeure incertain (500 péages urbains, de zones à vitesse réduite,
millions d’euros d’aide publique au dévelop- par le rééquilibrage de l’usage de l’espace
pement espagnole, 166 millions d’euros de public ou par des campagnes de communi-
financement municipal et des fonds supplé- cation visant à donner une image positive du
mentaires sont prévus). La Banque mondiale transport collectif. On peut également créer
porte un projet de ligne de BRT sur le boule- des couloirs réservés pour les bus offrant aux
vard Vo Van Kiet. Deux projets plus légers de usagers des trajets plus rapides que ceux des
monorails sont développés en parallèle par utilisateurs de véhicules particuliers. Enfin,
des groupes privés malaisiens. rendre le stationnement moins accessible et
plus cher pour ceux qui viennent travailler en
véhicule individuel constitue un bon moyen
de favoriser le recours au transport public. Le
parc relais, site sur lequel on gare son véhi-
cule personnel avant d’emprunter un moyen
de transport en commun, est alors une bonne
solution alternative.
66 |
futures lignes de métro et de BRT. C’est pour- nets d’études extérieurs. Elles sont respon-
quoi il paraît indispensable de créer une sables de la maîtrise d’ouvrage des projets de
Autorité Organisatrice des Transports (AOT) construction et de la maintenance des infras-
pilotant dans le même temps les réseaux de tructures consacrées aux bus (arrêts de bus,
bus existants et les nouveaux réseaux de BRT signalisation…).
et de métro.
Une multitude d’opérateurs
Une compétence à HCMV, un réseau unifié à
essentiellement provinciale Hanoi
Le ministère des Transports élabore le plan Les opérateurs de transport peuvent être
national des transports et peut être maître publics, privés, mixtes ou organisés en coo-
d’ouvrage pour des projets de grandes infras- pératives. HCMV est, contrairement à Hanoi,
tructures urbaines. Les départements des propriétaire des infrastructures (hangars,
Transports (DoT) de Hanoi et de HCMV sont terminus) qu’elle met à disposition des opé-
quant à eux responsables de l’investissement rateurs. Les compagnies sont quant à elles
et de la gestion des transports urbains, de la propriétaires du matériel roulant et la ville
maintenance et des investissements pour le leur propose des bonifications de taux d’inté-
réseau routier, en dehors des réseaux de des- rêt pour le renouvellement de leur flotte. Le
serte locale, sous administration des Comités nombre important d’opérateurs et de coopé-
populaires de districts. Celui de HCMV gère ratives, même s’il est passé de plus de trente
également les infrastructures techniques ur- en 2007 à quinze en 2010, engendre des pro-
baines (eau potable, espaces verts, éclairage, blèmes d’organisation du réseau, en termes
stationnement). de hiérarchisation, de qualité du matériel et L’encombrement des
du service. trottoirs rend la circulation
piétonne difficile à Hanoi
Faire la ville | 67
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
mètre parcouru est défini par Tramoc à Hanoi sieurs milliards de dollars pour les lignes les Pour aller plus loin :
ou par les départements des Transports, des plus onéreuses. Les solutions de financement • IMV, 2008,
Finances, du Plan et de l’Investissement à proposées par les bailleurs de fonds, multi- « Les défis pour le
HCMV, puis validé par le Comité populaire. latéraux ou bilatéraux, et les constructeurs développement des
Ces montants peuvent être réactualisés en varient fortement : consortium privé, parte- transports à Hanoi »
cours de contrat selon l’évolution des para- nariats public-privé et financement public. (document en anglais,
titre original « The
mètres (prix de l’essence notamment), après Nine Challenges for
validation par les directions concernées et the Development of
par le Comité populaire, et incluent l’amor- Transport in the Fast
tissement du matériel roulant. Ce mode de En attendant le bus à HCMV Growing Capital of
fonctionnement est actuellement probléma- Viêt-Nam : Hanoi »),
tique en raison de l’augmentation importante 11 p.
du nombre de passagers et de la décision des http://imv-hanoi.
com/Uploaded/
Comités populaires des deux villes, pour des Documents/TC%20
raisons politiques, de n’accroître ni le mon- Challenges%20of%20
tant des subventions ni le prix du billet. À Transport%20in%20
HCMV, ce système, qui repose sur les subven- Hanoi%20-%20
tions et la courte durée des contrats d’exploi- Molt%202008.pdf
tation (de une à quatre années), décourage • AFD, « Qui paie
les investissements et n’est que faiblement quoi en matière de
attractif pour les entreprises. transports urbains ?
Guide de bonnes
Quant aux projets de métro, ils requièrent pratiques ; Étude de
cas sur HCMV »,
des investissements très lourds, jusqu’à plu- http://www.
afd.fr/webdav/
site/afd/shared/
PUBLICATIONS/
THEMATIQUES/
autres-publications/
Bonnes-pratiques-
financement-
transports-urbains.pdf
• IMV, 2005,
« Schéma directeur
de la région de
Hanoi : stratégie de
développement des
transports », 24 p.
http://imv-hanoi.
com/fr-FR/Home/
hargeables-142/1790/
Documents-produits-
par-lIMV.aspx
68 |
LES TRANSPORTS COLLECTIFS URBAINS
EN FRANCE
L’enjeu de l’intégration du transport et de
l’urbanisme à toutes les échelles
es politiques en faveur d’une mobili-
Du tout automobile à la
promotion des transports en
commun
Lors de la période de forte croissance écono-
mique et démographique de l’après Seconde
Guerre mondiale, la motorisation des mé-
nages a fortement progressé. L’accélération S’adapter aux nouvelles
de la vitesse des déplacements a permis pratiques de mobilité
d’implanter de plus en plus loin logements
et activités. L’attention des pouvoirs publics Outre l’augmentation massive des déplace-
s’est alors portée sur l’adaptation des centres ments, les systèmes de transport sont mis
anciens à la voiture et sur la construction au défi de s’adapter au desserrement de la
de voies rapides pour relier les nouveaux population et des activités dans la périphérie
quartiers périphériques et les aires périur- des agglomérations. En Île-de-France, les dis-
baines. Il a fallu attendre les années 1970 et tances parcourues et l’usage de l’automobile
un contexte de crise pétrolière pour que les sont bien plus importants en grande banlieue
transports en commun connaissent un regain qu’en proche banlieue et à Paris, qui béné-
d’intérêt, né de la volonté de désengorger les ficient d’un réseau de transport en commun
villes et de mieux desservir leur population. Il très dense. 13% des trajets sont effectués en
s’agissait plus alors d’offrir une alternative à transport en commun en grande banlieue,
la voiture individuelle que de décourager son contre 23% pour la proche banlieue et 34%
utilisation. La construction du métro de Lyon pour Paris intra-muros. À titre d’exemple, on
et du Réseau Express Régional francilien (RER) constate que la marche à pied représente
a débuté à cette époque. Les villes françaises 47% des déplacements internes parisiens.
Faire la ville | 69
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
70 |
Articuler transport et 1 Une architecture
urbanisme institutionnelle au service de
La morphologie urbaine étalée et peu dense l’intégration des réseaux
de la « ville de l’automobile » n’est pas adap-
Cette intégration doit être à la fois physique,
tée aux axes linéaires et aux pôles d’échanges
par le biais de pôles d’échanges et de par-
qui caractérisent les réseaux de transport en
2 kings relais, et organisationnelle avec une
commun. Le développement de quartiers
billettique commune et des plans unifiés.
denses, en fonction des corridors de des-
Au niveau institutionnel, une même organi-
serte, permettrait de limiter l’urbanisation et
sation, l’Autorité Organisatrice de Transports
d’accroître dans le même temps l’efficacité
(AOT), est chargée de coordonner les poli-
des transports. Ce système a par exemple été
tiques sur un périmètre défini. Cette AOT
déployé en Amérique latine et particulière-
a pour vocation d’inciter à l’utilisation de
ment à Curitiba (Brésil), où la ville s’est déve-
3 modes alternatifs à la voiture individuelle et
loppée le long des cinq corridors majeurs de
de développer un réseau performant.
circulation des BRT.
L’organisation se décline en plusieurs niveaux
En France, les documents de planification de
de compétence. L’État est responsable de
l’Île-de-France et du Grand Lyon privilégient
la réalisation des voies de chemin de fer à
l’urbanisation des zones aux alentours des
grande vitesse ainsi que des autoroutes et
axes et des stations de transport en commun. Pour l’urbaniste D.Mangin,
des transports d’intérêt national. Les régions,
Cette politique se heurte pourtant à l’envie l’urbanisme du réel (1)
est marqué par la voiture, les départements, les syndicats mixtes, les
de la majorité des Français de posséder une l’étalement urbain et groupements de communes, les communes
maison individuelle. C’est ce qui pousse des territoires enclavés.
ou les Établissements Publics d’Aménage-
actuellement les urbanistes à réfléchir à de L’urbanisme du fantasme (2)
est écologique et favorise ment sont des AOT responsables de l’élabo-
nouvelles formes urbaines, à la fois denses une urbanisation linéaire en ration de la politique de transport sur leur
et répondant aux attentes des habitants. De fonction des transports en
territoire. Ainsi, les régions gèrent les Trains
grands projets sont actuellement lancés dans commun et des corridors
verts, mais il est difficilement Express Régionaux et quelques lignes rou-
ce sens en Île-de-France, afin de structurer
réalisable. L’urbanisme du tières, les départements sont en charge des
une urbanisation de faible densité en péri- possible (3) consisterait en
transports interurbains en autocar et les
phérie et de répondre au déficit d’accessibi- des formes urbaines moins
dépendantes de la voiture et communes ou intercommunalités gèrent les
lité en transports en commun de la deuxième
fondées sur la diversité des transports urbains.
couronne ainsi qu’à la saturation des réseaux. usages
Un métro en rocade (le Grand Paris Express),
à une distance moyenne de dix kilomètres du
périphérique de Paris, connecté aux lignes
radiales du RER et aux lignes de tramway
existantes, devrait desservir l’agglomération
en 2025. Le concept de densification préfé-
rentielle autour des gares est inscrit dans le
Schéma Directeur de l’Île-de-France (SDRIF).
Ce document impose des planchers de den-
sité supérieurs à ceux qui existaient aupara-
vant dans un rayon de mille mètres autour À Curitiba, au Brésil, la densité urbaine est maximale le long
des voies et des stations du BRT et décroît progressivement
d’une station de métro ou d’une gare ferro- avec l’éloignement du réseau de transport
viaire et de cinq cent mètres autour d’une
station de transport collectif en site propre.
Les AOT urbaines (AOTU) sont en général des
communes (20% des cas), des intercommu-
nalités (60%) ou des syndicats (20%). Elles
élaborent et pilotent la mise en œuvre d’un
Plan de Déplacement Urbain (PDU) pour les
agglomérations de plus de 100 000 habitants.
Les secteurs de densification préférentielle, majoritairement
situés près des gares et des lignes de transport en commun Ce PDU définit les principes de l’organisation
(en rose), sont représentés par des pastilles rouges dans le des transports de personnes et de marchan-
SDRIF, Île-de-France dises, de la circulation et du stationnement
Faire la ville | 71
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
72 |
sur le territoire et il s’intègre dans une lo- La « délégation de service public » est la forme
gique de planification plus globale. C’est ainsi de gestion la plus courante en France (92%
que les Plans Locaux d’Urbanisme doivent des réseaux). Dans ce cas de figure, le service
être compatibles avec les PDU, qui doivent est délégué à un exploitant suivant des condi-
eux-mêmes être compatibles avec les SCoT. tions indiquées par un cahier des charges. Ce
dernier assume alors une part plus ou moins
En France, l’AOT est responsable du dévelop- importante du risque d’exploitation selon que
pement et de la gestion de l’offre de services. le service soit délégué en affermage ou en
C’est elle qui détermine les itinéraires et concession. La rémunération est assurée en
la fréquence des lignes, le type de matériel partie par le résultat d’exploitation du service.
roulant (modèles de bus...) et l’implantation
des arrêts. Elle programme également les Avec l’affermage, la collectivité publique
nouvelles infrastructures, le partage de la finance les investissements et l’opérateur
voirie, le renforcement de l’offre de trans-
port sur les lignes existantes ou la création Les passagers peuvent
être informés des temps
de nouvelles dessertes. L’AOT œuvre pour d’attente réels aux arrêts
l’intégration des modes de transport collectif de transport en commun,
et la qualité du service (développement de sur internet ou sur leur
pôles d’échanges, aménagements facilitant téléphone portable et des
temps de parcours à bord
l’accès des transports publics aux piétons et des véhicules, ici dans le
aux personnes à mobilité réduite). Elle définit métro parisien
les indicateurs et les modalités de contrôle
de la qualité du service, tels que la régula-
rité, la propreté et la disponibilité des équi-
pements. Elle facilite également l’utilisation exploite le réseau. L’opérateur reverse à la
du réseau en élaborant les outils de commu- collectivité une redevance pour contribuer à
nication à destination des voyageurs (plans, l’amortissement des investissements réalisés
informations en temps réel) et en menant et une « surtaxe » en contrepartie du droit
des campagnes d’information destinées aux d’utilisation des infrastructures.
habitants, aux employeurs et aux pouvoirs
publics pour promouvoir l’usage des trans- Dans la concession, l’opérateur prend en
ports en commun. charge les investissements, les frais d’exploi-
tation et ceux liés à l’entretien courant. La
Deux modes de gestion du service peuvent durée du contrat, qui peut aller jusqu’à dix
être choisis par l’AOT : la régie directe et la ans, est plus longue que dans le cas de l’affer-
délégation (en affermage ou concession). mage. L’opérateur peut-être une entreprise
En « régie directe », la collectivité prend en publique, privée ou une Société d’Économie
charge au sein de ses services la gestion du Mixte.
réseau de transport en commun.
La billettique et l’intégration
tarifaire pour faciliter la
lecture et l’usage du réseau
La mise en place d’une tarification et d’une
billettique unifiées est un élément majeur
de l’intégration du système de transport. Le
réseau semble plus facile d’accès à l’usager L’AOT du STIF (Syndicat des
lorsque les billets et les abonnements sont Transports d’Île-de-France)
identiques quel que soit le mode de transport coordonne les différents
services et réseaux dans la
et la ligne empruntés. Ce système simplifie région : métro, RER, bus,
les correspondances entre lignes de même bus de nuit, pass Navigo,
etc.
Les AOT coordonnent la réalisation des pôles d’échanges,
ici le pôle de Gare du Nord à Paris qui connecte trains
internationaux, nationaux, RER, métro et bus
Faire la ville | 73
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
mode ou de modes différents. Un gestion- Des sources de financement Pour aller plus loin :
naire unique, l’AOT, pilote l’ensemble du sys-
tème, de la définition des niveaux tarifaires,
diversifiées • Agence d’urbanisme
de l’agglomération
l’impression et la distribution des titres de Les recettes d’exploitation, le Versement lyonnaise,
transport à la répartition des recettes entre « Corridor design
Transport et les subventions constituent les
les multiples exploitants. La gamme de titres in town planning -
trois sources principales de financement des sustainable planning
de transport doit donc s’appuyer sur une transports publics collectifs. Les recettes d’ex- for large cities in
technologie commune à tous les modes. Les ploitation des lignes représentent 33% du finan- developed coun-
billets papier sont en général remplacés par cement du transport public en Île-de-France et tries ; Challenges
des supports technologiques avancés comme 31% au Grand Lyon. Le Versement Transport of implementation
les cartes à puce ou magnétiques, et il est consiste en une taxe sur les salaires qui concerne in booming cities
parfois possible d’acheter ou de recharger sa in emerging and
les entreprises de plus de neuf salariés, dont le
carte d’abonnement par internet ou via son developing cities - »
taux est voté par le conseil de l’AOTU. Les taux (CODATU XIII), 30 p.
téléphone. maximum imposables sont de 1% pour les http://www.urbalyon.
agglomérations avec un réseau classique de org/Document/_
lignes d’autobus et d’1,8 % pour un réseau de Lurbanisme_de_
tramway ou de métro. Le Versement Transport corridors__quelles_
représente 37% des recettes en Île-de-France difficultes_de_mise_
en_oeuvre_dans_
et 43% au Grand Lyon. Le reste des recettes
les_metropoles_des_
provient de la participation des collectivités pays_en_voie_de_
Le pass Navigo, une carte à
locales à hauteur de 20% en Île-de-France et developpement_-1721
puce sans contact, se recharge
à la semaine, au mois ou à de 26% pour le Grand Lyon et d’autres sources
• SYTRAL, Syndicat
l’année. La validation du pass de revenus, comme les subventions étatiques Mixte des Transports
aux portillons du métro et à et les amendes (environ 10% des recettes). La
l’entrée des bus permet de pour le Rhône et
connaître la fréquentation capacité d’investissement des AOTU en France l’Agglomération
des lignes est limitée et la formule la plus courante est de Lyonnaise,
recourir à des emprunts sur une vingtaine d’an- http://www.sytral.fr/
Ces titres de transport unifiés présentent nées ou à des partenariats public-privé. • STIF, Syndicat des
en général des systèmes d’abonnement transports de la
avantageux afin de fidéliser les usagers. En région Île-de-France,
Île-de-France, le « pass Navigo » donne accès Le SYTRAL au Grand Lyon, http://www.stif.info/
aux réseaux métropolitain et francilien ex-
ploités par la RATP et la SNCF, ainsi qu’aux l’AOTU d’un réseau en • GART, Groupement
des Autorités
bus des compagnies privées réunies dans extension Responsables de
un réseau dénommé « Optile ». De la même Transport,
manière, dans l’agglomération lyonnaise, les L’AOTU du Grand Lyon est le Syndicat Mixte http://www.gart.org/
abonnements représentent 75% des titres des Transports pour le Rhône et l’Aggloméra-
• IAU-IdF, Dossier
de transport. Par ailleurs, dans les deux ag- tion Lyonnaise (SYTRAL). Son conseil d’admi- Transports et
glomérations, des réductions de tarifs sont nistration comprend seize élus du Grand Lyon mobilités,
consenties à certaines catégories de per- et dix élus du département du Rhône. Ce syn- http://www.iau-idf.fr/
sonnes telles que les étudiants, les seniors, dicat coordonne le réseau « TCL » (Transports nos-etudes/theme/
transport-et-mobilite.
les chômeurs et les familles nombreuses. html
On distingue les tarifs uniques et la tarifica- La ligne B du métro a été prolongée par le SYTRAL de 2 km,
tion à la distance ou zonale. En France, la tari- dont 300 m sous le Rhône, afin de desservir la commune
fication zonale concentrique ou « alvéolaire » d’Oullins et le sud-ouest de l’agglomération lyonnaise
est peu pratiquée pour les transports urbains,
excepté en Île-de-France. La tarification
unique peut s’effectuer au temps, en don-
nant par exemple accès à tout le réseau, avec
la possibilité de faire des correspondances,
pendant une heure. D’un point de vue pra-
tique, les billets vendus à bord des bus sont
plus chers que ceux délivrés aux guichets de
vente, afin de décourager l’achat à bord pour
améliorer la vitesse d’embarquement des pas-
sagers (gain de temps de parcours).
74 |
en Commun Lyonnais) et le réseau « Optibus »,
qui transporte à leur demande des personnes
handicapées ou âgées. La durée du contrat
de l’exploitant, sans mission de commercia-
lisation, est de six ans.
Faire la ville | 77
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
de métro n°1. En effet, l’avancement des pro- Le renforcement des Pour aller plus loin :
jets de métro soulève la question de l’inté- • Les présentations
gration technique et physique des systèmes. compétences des intervenants
La première porte sur le choix des équipe- de la conférence
L’amélioration de la gestion passe également CODATU XIII sont
ments en matière de billettique et de normes téléchargeables en
techniques, ainsi que sur les choix tarifaires. par le renforcement des compétences et des anglais et en français
La seconde concerne la maîtrise d’ouvrage capacités d’expertise des équipes par des sur le site,
pour l’acquisition du foncier et les pôles formations et des recrutements. À Hanoi, http://www.codatu.
le Tramoc peut recourir à des expertises org
d’échanges. Toutes deux paraissent de plus
en plus indissociables de l’intégration des dif- externes, notamment de la région Île-de- • PADDI, 2008, Livret
France, les capitaliser afin de développer des « La gestion d’une
férents acteurs institutionnels et techniques. ligne de bus »,
outils de diagnostic et de développement de http://www.paddi.
Pour les deux métropoles, les relations avec projet. Le Sytral et d’autres établissements vn/fr/centre-de-
de la région Rhône-Alpes accueillent chaque ressources/livrets-
les opérateurs seraient clarifiées par la géné- des-ateliers-de-
ralisation progressive du régime des appels année quatre à cinq stagiaires de la MAUR et formation
d’offres pour l’attribution des lignes de trans- du DoT de HCMV. Le PADDI a joué à cet égard
un rôle important dans l’organisation de la • PADDI, 2012, Livret
port. L’IMV propose pour Hanoi la constitu- « Sécurité routière :
tion d’un comité de coordination des projets Conférence internationale sur le développe- enjeux et solutions »
en cours (harmonisation de l’accessibilité ment durable des transports urbains dans
et des systèmes intégrés, billettique, infor-
Quelques-uns des
mation voyageurs) qui faciliterait la synergie points noirs en termes
des projets. Concernant les conditions de cir- d’accidents de la circulation
culation des autobus, un renforcement des saigonnaise. En 2012, à
l’occasion de l’année de la
relations avec les partenaires institutionnels sécurité routière, le PADDI
chargés de la gestion de la voirie pourrait faci- a organisé avec le DoT
liter l’aménagement de couloirs réservés et un atelier et une mission
l’adoption de la priorité aux autobus sur les d’assistance technique pour
accompagner le travail de
axes principaux. sensibilisation à la sécurité
routière
78 |
Pour aller plus loin :
L’élargissement des sources
• PADDI-IMV, 2009,
de financement Livret « Les autorités
organisatrices
Les ressources financières dédiées à l’AOT de transports et
pourraient être élargies (amendes de cir- modèles de gestion
culation, stationnement, etc.) afin de per- des compagnies
mettre le financement direct d’opérations d’exploitation »
d’intégration et de qualité de service. Cela lui • IMV, Maublanc Y.,
assurerait un budget de fonctionnement in- 2005,
dépendant et à la hauteur de ses obligations « Fonctionnement
contractuelles vis-à-vis des opérateurs et de des autorités
ses besoins propres. organisatrices des
transports de la
région Île-de-France
Les réflexions sur la création d’une AOT sont au regard du contexte
avancées dans les deux villes, grâce à de hanoien », 21 p.
Une formation IMV-PADDI a permis le partage des
expériences hanoiennes, saïgonnaises et françaises sur les
nombreux séminaires et à la production de http://imv-hanoi.
AOT et de lancer des pistes de réflexion propositions d’architectures institutionnelles com/Uploaded/
par les différents services vietnamiens (DoT, Documents/
centres de gestion, HIDS) et par des consul- TC%20Rapport%20
les pays en développement, CODATU XIII, qui tants internationaux. La création d’une AOT
Fonctionnement%20
a eu lieu en novembre 2008 à HCMV. Cette du%20STIF%20-%20
nécessite maintenant une impulsion poli- Maublanc%202005.
conférence s’est penchée sur les enjeux de tique pour se réaliser. pdf
la planification urbaine, du financement des
transports, de l’intermodalité et de la mobili- • Tramoc,
té propre, ainsi que sur les outils mobilisables http://www.tramoc.
Le défi de l’intégration com.vn/
à cette fin.
technique • MAUR,
http://hcmc-maur.
L’intégration tarifaire du réseau Un autre enjeu majeur pour Hanoi et HCMV vn/en/
sera d’articuler physiquement les réseaux fer- • Centre de gestion
de bus et du métro rés lourds, les BRT, les bus urbains et les bus des Bus,
Le réseau bénéficie à Hanoi d’une gamme régionaux. Ces réseaux, hiérarchisés, consti- http://www.
tueront la charpente urbaine de chaque buyttphcm.com.vn/
tarifaire associant des titres à l’unité et des
titres d’abonnement vendus sous le contrôle métropole. Ainsi une intégration réussie
de Tramoc, qui encaisse les recettes et as- impliquerait d’une part un programme
sure leur répartition entre les opérateurs. de modernisation et de mise à niveau du
Les cartes d’abonnement peuvent couvrir mode existant, c’est-à-dire du réseau de bus
l’ensemble du réseau ou une ligne en parti- conventionnel, et d’autre part la mise en
culier et l’achat mensuel d’un timbre permet synergie en amont de l’ensemble des projets
de valider le titre de transport. Les billets et
les abonnements sont vendus par les opéra-
teurs aux principales gares d’autobus et aux
pôles d’échanges. Le contrôle est effectué par
un receveur à bord du bus. Les tarifs prati-
qués sont peu élevés et cette gamme de prix
pour l’offre « autobus » constitue un premier
niveau d’intégration tarifaire. Les tarifs sont
adaptés en fonction des distances : de 5 000 à
10 000 VND à HCMV et de 5 000 à 9 000 VND
par trajet à Hanoi. À cette offre s’ajoutent des
bus rapides qui comprennent moins d’arrêts
mais coûtent plus chers. La mise en service
des lignes de métro impliquera pour les AOT
le passage du système tarifaire monomodal
à un système tarifaire multimodal, avec une
billettique intégrée. Le pôle d’échanges de bus de Cholon, dictrict 5, HCMV
Faire la ville | 79
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
(métro, BRT). Par ailleurs, l’extension du ter- dessertes de type RER et des dessertes
ritoire administratif de la capitale a modifié fines locales. L’ensemble serait articulé via
le référentiel territorial de développement des pôles d’échanges intégrant les parcs de
et d’exploitation du système de transport de stationnement et les taxis. Ce nouveau dé-
Hanoi. Pour s’y adapter, la desserte du nou- coupage territorial implique également de
veau territoire devrait s’appuyer sur d’éven- réfléchir aux liaisons à assurer entre Hanoi et
tuelles extensions des projets en cours, des les provinces environnantes.
80 |
Organiser un pôle d’échanges, définir les lieux d’échanges « de fait » du
réseau.
les projets du Pont Long Bien
et de Câu Giây à Hanoi 3 La localisation du pôle doit répondre à des
critères techniques et stratégiques. Ce site
Les pôles d’échanges sont des lieux articulant devrait être un lieu d’échanges existant ou
les différents modes de transports – collec- potentiel entre de nombreuses lignes de bus.
tifs ou individuels. Ils doivent permettre de Dans un premier temps, le site de Câu Giây,
réduire l’impact négatif des « ruptures de peu exposé, a été choisi afin de convaincre
charge » ou correspondances et favoriser une plus facilement les autorités de cette réali-
plus grande accessibilité. Le pôle d’échanges sation nouvelle. Le pôle d’échanges de Long
permet l’interconnexion entre des lignes à Bien, plus central, a pu être aménagé une fois
forte capacité, qui desservent les centres le premier dispositif testé avec succès.
villes, et des lignes de rabattement ou des
rocades qui desservent la périphérie. Les Le dimensionnement du pôle consiste à esti-
pôles d’échanges structurent l’espace urbain mer le nombre de points d’arrêt, la largeur des
en offrant des services, des commerces mais quais, le nombre de points de taxis/motos-taxis
aussi des espaces publics. Ils assurent donc (voire de parkings) nécessaire en fonction du
un rôle d’interface entre la ville et son ré- nombre de bus et de passagers attendus sur
seau de transport. L’aménagement d’un pôle le site. Le design du pôle d’échanges peut for-
d’échanges est souvent l’occasion de rénover tement varier selon la morphologie du site : un
un quartier, d’en améliorer l’accessibilité, ou quai central (Câu Giây), deux quais latéraux
encore de renforcer des centralités urbaines (Long Bien) ou des dispositifs à redents. Le ca-
secondaires. ractère intermodal est assuré par la présence
de places de stationnement avec un espace
réservé pour les taxis et motos-taxis. Des
La méthode d’élaboration traversées piétonnes et des espaces publics
assurent la liaison avec le tissu urbain local.
La création d’un pôle d’échanges se fait
Les mouvements piétons entre les différents
de façon concertée entre les différents
modes de déplacement sont analysés et anti-
acteurs : l’AOT et les autres acteurs institu-
cipés afin de définir les cheminements liés à
tionnels, les exploitants de chaque mode
la localisation des fonctions, à la distribution
et le service d’urbanisme de la ville. Ils
des titres de transport et aux commerces.
valident ensemble un programme qui dé-
Ces déplacements doivent être minimisés
finit les connexions offertes, le détail des
et simplifiés au maximum. Les informations
besoins de chaque mode, l’implantation
pour les passagers sont placées aux endroits
et l’insertion dans le tissu urbain. À Hanoi,
où les flux se révèlent être les plus denses, ce
l’analyse croisée de données fournies par
qui permet au voyageur de prendre rapide-
Tramoc (quantité, fréquence de bus) et
ment connaissance des modalités d’accès à
d’une enquête de comptage du nombre de
son moyen de transport dès son entrée dans
passagers réalisée par l’IMV a permis de
le pôle. Cette information est répétée et pré-
cisée sur le mode de transport en commun
3
ciblé, par exemple sur le quai. Un architecte Projets menés par l’IMV
entre 2005 et 2009 dans
peut superviser le choix des matériaux, les le cadre des programmes
finitions et le dessin des espaces publics afin Asia Trans et Ecotrans
de donner une identité forte et une visibilité
au pôle au sein de l’espace urbain.
S’il n’a pas été possible de réaliser les Ouest », le Comité populaire de HCMV a lan-
constructions et les espaces publics sui- cé une réflexion ainsi que des études pour y
vant un design innovant et de qualité, avec réaliser une ligne de BRT.
le concours d’un architecte, des espaces
ouverts et plantés signalent néanmoins le
Le périmètre du projet inclut des quartiers centraux, les
pôle et offrent un environnement d’attente quartiers le long du canal et des entrées de ville, HCMV
préservé aux usagers. Le chantier a essentiel-
lement été suivi par Tramoc avec l’appui des
experts de la région Île-de-France.
Articuler urbanisme et
transport, le projet de BRT
du boulevard Vo Van Kiet à
HCMV4
Ce projet s’inscrit dans une série d’études et
de séminaires impliquant le Comité populaire
de HCMV, le DoT, la Banque mondiale et le
PADDI. En 2005, la Banque mondiale a pro-
posé un projet de réseau de BRT et le PADDI
la réalisation d’une ligne pilote, de Cholon à
Binh Thanh. Suite à l’abandon du projet de
tramway sur le boulevard Vo Van Kiet, dit « Est-
Faire la ville | 83
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
84 |
tionnement central est le plus avantageux, en Pour aller plus loin :
termes de coûts de construction, de facilité • Agence d’urbanisme
d’accès aux stations pour les riverains et d’es- de l’agglomération
paces publics dégagés le long du canal et sur lyonnaise, PADDI,
2011, « Hô Chi Minh
les trottoirs. Cette configuration, avec le ren- City, East-West
forcement du nombre de passages piétons boulevard BRT and
protégés, transformerait cet axe desservant Greenway concept
workshop »,73 p.
les quartiers historiques de la ville en « bou- http://www.urbalyon.
levard urbain » et faciliterait son intégration. org/Document/
En revanche, des voies le long du canal, avec Ho_Chi_Minh_City_-
des stations accessibles au moyen de passe- Vietnam-_-_East_
West_BRT_and_
relles piétonnes, permettraient une gestion Greenway__Concept_
plus aisée du trafic, mais renforceraient dans Workshop_-_4_th_
le même temps le caractère autoroutier de to_8_july_2011-3230
l’axe. Cette question fera l’objet d’une étude • PADDI, 2010, Livret
de faisabilité. « Réaménagement
urbain autour de
vers le transport collectif serait à promouvoir, nouveaux axes à
Les espaces publics autour des futures stations de BRT HCMV »,
avec des parkings relais et des espaces pié- http://www.paddi.
devront faciliter les accès piétons, HCMV
tons sécurisés. Des espaces publics attractifs vn/fr/centre-de-
(terrains de sport, de jeux, espaces verts) ressources/livrets-
des-ateliers-de-
et des équipements publics pourraient être formation
aménagés à proximité des stations de BRT et
• Triangle Génération
former ainsi un réseau d’équipements reliés Humanitaire, PADDI,
par la ligne de bus. 2012, « Étude sur la
pauvreté urbaine ;
La nature future de l’axe, boulevard urbain ou réflexion sur les
politiques publiques
voie rapide, qui n’est pas encore déterminée, de réduction de la
est liée au positionnement des voies du BRT. pauvreté à partir du
Trois possibilités se présentent : des voies le cas d’étude du District
8, HCMV », 164 p.,
long des bâtiments, centrales ou bien le long http://www.paddi.
du canal. Pour les experts français, le posi- vn/fr
Faire la ville | 85
Chapitre 3 : Les transports collectifs urbains
86 |
LE LOGEMENT
u cours de la décennie 1999-2009, la population de Hanoi et de HCMV s’est
LE LOGEMENT AU VIÊT-NAM
Loger les ménages à bas revenus et reloger les
habitants touchés par des récupérations foncières
usque dans les années 1980, la
Le logement est un sujet majeur ayant un - 2003 : Loi foncière qui favorise l’investissement privé et le développement
impact direct sur la vie des populations. Si d’opérations de promotion immobilière.
- 2005 : Loi sur le logement (56/2005/QH11) qui reconnaît la propriété du
l’offre ne répond pas encore aux besoins logement et les droits de cession, encadre les programmes de construction,
considérables des habitants, le logement offre la possibilité de créer un Fonds du logement social et définit les critères
constitue un axe de politique publique essen- d’éligibilité à l’achat (au moins 20% d’apport initial de la part des ménages).
tiel. Disposant d’un département de gestion - 2009 : Décret 69/2009/ND-CP sur la planification foncière, le prix du terrain
du logement et du marché immobilier, le et sa récupération, qui améliore l’encadrement des procédures d’indemnisa-
Ministère de la construction a élaboré et fait tion et de relogement.
approuver en 2011 la Stratégie nationale en - 2009 : Arrêté 90/2009 ND-CP sur le logement social.
- 2011 : Stratégie nationale de développement du logement pour 2020 à
faveur du développement du logement pour horizon 2030, décision 2127/QD-TTg.
2020 à horizon 2030. Ce plan met l’accent sur - 2013: Décret 188/2013/NĐ-CP du 20/11/2013 du Gouvernement sur
les programmes d’habitation destinés aux le developpement et la gestion du logement social; Décret 11/NĐ-CP du
ouvriers et aux étudiants et sur la construc- 14/11/2013 du Gouvernement sur la gestion du developpement urbain.
tion de logements locatifs pour les ménages - 2014: Circulaire 08/2014/TT-BXD du MoC guidant l’application du Décret
urbains à bas revenus, avec le soutien de 188/2013/NĐ-CP.
88 |
jusqu’à 2,2 m² dans le vieux quartier de Hanoi. Le parc de relogement, destiné aux habi- Pour aller plus loin :
Environ 25% du parc de logement est consi- tants touchés par une procédure de récu- • ONU Habitat ;
déré par le gouvernement comme inférieur pération de leur terrain, est considéré conférences,
aux standards de confort ou pouvant seu- comme privé. En effet, ils deviennent pro- publications,
lement intégrer la catégorie des logements priétaires de leur résidence, que celle-ci actualités sur le Viêt-
temporaires. Cette précarité de l’habitat est soit directement financée par les autorités Nam,
http://www.fukuoka.
liée à l’auto-construction mais aussi à des ré- publiques ou par des investisseurs privés unhabitat.org/
gimes d’occupation fragiles (migrants illégaux qui construisent puis revendent les loge- projects/voices/
à HCMV, absence de certificats de propriété ments à la collectivité. vietnam/index_
foncière et/ou immobilière) ou encore au en.html
manque d’infrastructures urbaines de base Le parc de logement « social », qui sera appe- • PADDI, 2009, Livret
(assainissement, etc.). Malgré la volonté poli- lé ici public, est réservé aux fonctionnaires, « Développement
tique de répondre à la demande croissante aux policiers et aux militaires. Les loyers y du logement social à
des classes moyennes et des plus défavorisés sont faibles, ils sont calculés en fonction des HCMV »,
en octroyant des conditions favorables aux revenus du ménage selon un barème du http://www.paddi.vn/
investisseurs privés, l’offre de logement reste Ministère de la construction. Les logements IMG/pdf/finale.pdf
aujourd’hui très inférieure aux besoins réels. purement locatifs ne représentent qu’envi- PADDI, 2007, Livret
ron 10% de ce parc, le reste étant destiné à « Le logement social »,
Le parc de logement est essentiellement pri- l’accession à la propriété suivant un système http://www.paddi.vn/
IMG/pdf/qlclxh.pdf
vé et se caractérise notamment par une part où les ménages versent des loyers pendant
importante de constructions individuelles dix ans puis se portent acquéreurs à condi- • Parenteau R. (dir),
(plus de 80% de la construction avant la loi tion de posséder au moins 20% d’apport Habitat et
Environnement urbain
foncière de 2003). Le compartiment ou « mai- personnel au moment de l’achat. Dans les
au Viêt-Nam, 1997,
son tube », maison individuelle d’un à quatre appartements en « location-accession », les 335 p. Khartala,
étages en moyenne, abritant une famille élar- loyers sont plus importants que dans une lo- http://books.google.
gie et souvent un commerce au rez-de-chaus- cation standard du parc de logement public. com.vn/books?id=QE8
sée, domine le paysage urbain. lzVMep9kC&printsec=
Cette configuration du logement public ne frontcover&hl=fr&sou
En 2012, les immeubles collectifs forment permet pas d’atteindre les ménages les plus rce=gbs_ge_summary
_r&cad=0#v=onepage
16,6% du parc de logement à Hanoi et 6% modestes. En effet, selon la règlementa-
&q&f=false
à HCMV. Le secteur locatif, majoritairement tion en vigueur, les appartements doivent
privé, n’en représente que 11% à Hanoi et être compris entre 30 et 70 m², surfaces • Cerise E., thèse de
doctorat, Fabrication
16% à HCMV. La part des opérations de loge- qui excèdent les capacités de financement
de la ville de Hanoi,
ments collectifs (condominiums ou tours plus des ménages pauvres. Ainsi, la superficie entre planification et
modestes) est toutefois en augmentation minimale des logements publics récemment pratiques habitantes
régulière. construits à Hanoi était de 60 m², ce qui rend - Conception,
leur acquisition trop onéreuse (630 M de VND production et
réception des formes
bâties, 2009.
Faire la ville | 89
Chapitre 4 : Le logement
en moyenne) pour les ménages modestes. Tarif de Loyer à payer chaque mois Revenus du foyer
location, (VND/foyer/mois)
Une réorientation de la production vers des location- ayant droit à la location/
accession à la location-accession
logements plus petits serait donc néces-
Min. Max.
saire. Par ailleurs, de nouveaux programmes VND/m2/
mois
30 m2 45 m2 60 m2
publics ont été lancés en 2009 à destination Loyer 15 000 15 000 675 000 900 000 1 800 000 4 500 000
min.
des ouvriers et des étudiants, qui jusque là Location
Loyer 28 000 28 000 1 260 000 1 680 000 3 360 000 8 400 000
avaient recours au parc privé, faute de places max.
suffisantes dans les résidences universitaires Loyer 18 000 18 000 81 000 1 080 000 2 160 000 5 400 000
min.
ou dans les logements fournis par les em- Location-
accession Loyer 30 000 30 000 1 350 000 1 800 000 3 600 000 9 000 000
ployeurs. L’enjeu serait d’ouvrir la location max.
de ces logements ou leur accession à la pro- Source : Ministère de la Construction
priété à d’autres catégories de populations,
notamment des populations modestes et Le barème des loyers des
construire un immeuble de logement social
pauvres, dans le souci de préserver la cohé- appartements en location sur un autre site. De même, un investisseur
sion sociale, d’éradiquer l’habitat insalubre et ou location-accession, 2010 qui achète un terrain peut bénéficier de
de fluidifier le marché du logement. conditions fiscales favorables s’il développe
des logements revendus à des prix enca-
drés par les autorités publiques. Les inves-
La recherche de terrains tisseurs qui réalisent des opérations sur de
disponibles et les mécanismes très grandes parcelles peuvent également
être contraints à construire un immeuble de
de financement pour leur logement social sur leur terrain. Enfin, des
acquisition droits à construire, comme des étages sup-
plémentaires, peuvent n’être accordés qu’à la
Le développement du logement social doit condition qu’une part de ces logements soit
respecter les orientations fixées dans les réservée aux autorités publiques.
documents d’urbanisme. Pourtant, actuelle-
ment, trouver des terrains pour la construc- Du fait de ces procédures, les sites de reloge-
tion de logements publics et mobiliser les ment ou de logement public se situent sou-
financements nécessaires à leur acquisition vent en périphérie, sont faiblement équipés
constituent deux difficultés majeures pour et mal desservis en transport en commun.
les autorités publiques. Une série de mon- Une partie de ces immeubles qui com-
Les habitants des KTT ont
tages permet pourtant de mettre à contribu- largement transformé prennent à la fois des habitations vendues
tion les investisseurs privés. Ainsi, les projets leurs logements (ajout de au prix du marché et d’autres gérées par des
immobiliers commerciaux et les nouveaux terrasses, de magasins au
sociétés publiques connaît des problèmes
rez-de-chaussée) afin de les
quartiers urbains (des villes de catégorie 3 adapter à leurs modes de de copropriété en raison des statuts mixtes
et plus) doivent céder 20% des terrains pour vie, ici les KTT de Giang Vo d’occupation.
le logement social et les viabiliser. La ville à Hanoi
peut également réserver un terrain pour un Le financement du logement public est éga-
promoteur qui, en contrepartie, s’engage à lement assuré par les banques privées et le
« Fond de développement des logements » qui
investit dans plusieurs secteurs et accorde
sur ses bénéfices des crédits aux fonction-
naires à bas revenus. Ces sources de finan-
cement se révèlent pourtant insuffisantes car
les investissements dans le logement public,
et particulièrement dans le locatif, sont jugés
peu attractifs par les entreprises en raison de
la faible solvabilité des ménages, de l’insuffi-
sance des crédits immobiliers aux particuliers
et de la longueur du retour sur investisse-
ment. Les crédits disponibles de la Banque
de développement du Viêt-Nam, qui pra-
tique des taux préférentiels pour le logement
public, sont modestes au regard du nombre
de projets, tandis que les taux d’intérêt des
90 |
banques commerciales restent élevés pour lesquels les autorités prennent en charge la
ce type de construction. création et la rénovation des infrastructures
Enfin, les collectivités locales elles-mêmes et les habitants financent l’amélioration de
peuvent être réticentes à encourager des leur logement.
projets de logement public dans la mesure
où les produits des cessions de terrains et Des projets d’amélioration de l’habitat pré-
des taxes récoltées à l’occasion d’opérations caire sont également soutenus par des bail-
immobilières, qui représentent une part leurs de fonds internationaux. Le programme
importante de leurs ressources financières, « Viêt-Nam Urban Upgrading » de la Banque
sont moindres pour ce type de projet que mondiale, lancé en 2004, prévoit par exemple
pour des immeubles haut de gamme ou de l’implantation dans les quartiers d’habitat
bureaux. insalubre d’équipements publics (écoles, dis-
pensaires), d’infrastructures urbaines de base
(eau, assainissement, etc.), l’octroi de prêts
pour améliorer les logements ou encore un
soutien aux ménages dans leurs démarches 1
Atelier PADDI sur
d’obtention des certificats d’usage des sols. « L’indemnisation et
La rénovation des logements le relogement des
populations lors de
et des quartiers dégradés Les récupérations de terrains : réaménagements
urbains », intervention de
La rénovation urbaine est devenue ces der- indemniser et reloger 1 C. Musil, mars 2010
Construction et commercialisation
des terrains lotis (25 m de large)
km²). La mise en œuvre du plan du Comité très complexes et ne facilitent pas le calcul
populaire a débuté en décembre 2009 et des indemnités. Une même maison peut par
des sites ont déjà été récupérés. Toutefois, exemple être partagée entre cinq familles
l’administration peine à négocier avec les ha- propriétaires ; à l’inverse, plusieurs petites
bitants en raison de la grande valeur - notam- maisons appartenant à des familles diffé-
ment commerciale - des terrains, du retard rentes peuvent être implantées sur une par-
pris dans la construction des sites de reloge- celle dont le droit d’usage est détenu par une
ment et de leur distance par rapport au lieu seule personne.
de résidence d’origine. Cette opération est
freinée par un manque de diagnostic initial à Face aux récupérations, les habitants concer-
l’échelle du vieux quartier (recensement des nés élaborent des stratégies diverses. Lors
habitants, de la propriété immobilière et des des projets d’élargissement d’axes, certains
droits d’usage fonciers) et elle souffre d’un achètent et vendent des terrains suivant
vide juridique en matière de dédensification. une logique spéculative afin de se placer sur
Elle est également difficile à justifier car elle le tracé du projet. D’autres construisent un
n’est pas considérée comme une opération étage supplémentaire pour obtenir une meil-
de renouvellement urbain dans la législation leure indemnisation ou déménagent, tout
vietnamienne. en conservant leur terrain pour le mettre en
location. Ceux-ci, ainsi que les occupants des
Le décret 69/2009/ND-CP et la décision parcelles donnant sur la rue, qui tirent leur
108/2009/QD-UBND encadrent les procé- revenu d’une activité commerciale, sont en
dures d’indemnisation et de relogement. général responsables de retards importants
Les indemnisations peuvent cependant être dans les procédures de libération des terrains
modulées en fonction du type de projet (pu- et donc dans la réalisation des infrastructures.
92 |
La diffusion de l’information Le relogement
Pour aller plus loin :
• Musil C., thèse de
La diffusion de l’information concernant les Des aides pour le déménagement, le reloge- doctorat en cours,
projets d’aménagement et la récupération ment et la reconversion professionnelle sont Aide Publique au
des terrains constitue un autre problème. mobilisées suite à une enquête sociale et Développement et
Coopération Urbaine
Officiellement, les autorités doivent faire juridique menée par les districts sur le statut
à Hanoi : un appui
connaître le titre du projet, les taux de com- d’occupation du logement des ménages. à la fabrication du
pensation, les prix de vente des apparte- réseau de transport
ments ou des parcelles de relogement et la Les habitants souhaitent en général être métropolitain.
date butoir à laquelle les terrains doivent être relogés à proximité de leur ancien quartier,
libérés. Dans les faits, les critères d’éligibilité or les sites prévus à cet effet sont majori-
à d’éventuelles compensations ne sont pas tairement situés dans les périphéries de
clairement énoncés. Les informations sont Hanoi et de HCMV. On estime que le démé-
transmises par le biais de réunions publiques, nagement engendre souvent une perte de
de haut-parleurs, de notes affichées dans les repères pour les ménages avec la rupture
Comités populaires, de distributions de do- de liens familiaux, de relations de voisinage
cuments et de visites officielles de membres et des pratiques traditionnelles liées au culte
des organisations de masse locales foyer par des ancêtres. Les habitants déplacés perdent
foyer. D’autres vecteurs, comme les discus- également l’accès aux biens et aux services
sions de voisinage ou les relations person- communautaires (écoles, dispensaires...) et
nelles, permettent de diffuser l’information. parfois leurs sources de revenus. Inadaptées
Pourtant, le manque de transparence sur les aux modes de vie de la population, de nom-
projets et les modalités d’indemnisation et breuses habitations restent donc vacantes
de relogement entraînent fréquemment la dans les zones de relogement. La hausse des
propagation de rumeurs. charges locatives et des coûts de transport
entraîne fréquemment un phénomène d’ap-
pauvrissement et la revente du logement. Les compartiments du
Des indemnités variables Ces appartements subventionnés concédés vieux quartier de Hanoi, rue
Hang Dao
Le montant des indemnités est fixé selon des
dates-repères, notamment celle du premier
recensement des occupants en phase préli-
minaire de projet ou la date de son annonce
officielle. La législation qui s’applique pour
l’indemnisation est celle correspondant à
l’année de validation du projet. Or, la libéra-
tion des terres s’effectuant plusieurs années
après la validation, les biens connaissent
entre temps une augmentation de leur valeur
due à l’inflation. Les habitants réclament sou-
vent l’application des lois les plus récentes,
comme le « décret 69 » de 2009, impliquant
des méthodes supplémentaires d’évaluation
et de compensation, en général plus favo-
rables aux habitants.
Le montant des indemnisations pour les pro- par les autorités tendent à être rapidement
jets publics est calculé sur la base du prix revendus par les bénéficiaires à une popu-
officiel des terrains, compris entre 40 et 70% lation plus aisée, bien que le propriétaire
du prix du marché. La compensation totale relogé ne soit légalement autorisé à revendre
prend également en compte le prix des biens son bien qu’après dix ans d’occupation. Un
immobiliers, les subventions et l’aide au relo- marché de sous-location informel peut par-
gement. Il existe donc une certaine flexibilité fois voir le jour dans ces quartiers.
dans le calcul du montant des indemnisations
car les négociations portent souvent sur ces
deux derniers éléments.
Faire la ville | 93
Chapitre 4 : Le logement
LE LOGEMENT EN FRANCE
Des politiques publiques de régulation à la fois du
parc privé et du parc social
l’aide publique au logement est complé- taire. 56% des résidences principales sont construites dans les années
1960. La Duchère, Lyon,
tée par d’autres institutions, ainsi que des logements collectifs. 2010
par des circuits de financement adaptés.
Cette diversité des modalités d’aides et
des sources de financement est une spé-
cificité française et constitue, pour l’aide
publique au logement, un gage de perma-
nence, quelles que soient les conjonctures
économiques et politiques.
96 |
Depuis plusieurs années, l’État tend à dimi-
nuer ses aides directes, son intervention se
limitant de plus en plus aux avantages fiscaux
consentis. A l’inverse, les collectivités locales
assurent une part croissante des finance-
ments à mesure que le rythme des construc-
tions sociales se redresse. Elles peuvent aussi
vendre aux bailleurs sociaux leurs terrains à
un prix inférieur à celui du marché.
Faire la ville | 97
Chapitre 4 : Le logement
l’accessibilité du quartier (voirie, desserte en Le programme de
reconstruction dans le
transport en commun), des équipements (pu- quartier de la Duchère
blics, implantation de commerces et de ser- à Lyon comprend des
vices) et du paysage urbain (alignement sur logements sociaux, des
résidences étudiantes,
la rue, immeubles de taille moyenne, espaces de l’accession sociale à la
publics, etc.). Les logements sociaux démolis propriété mais aussi des
logements en accession,
doivent être remplacés par un nombre iden- comme cette résidence, afin
tique de logements neufs, construits sur de diversifier l’habitat et la
place ou à l’extérieur du quartier. Près de cinq population dans ce quartier
qui comprenait 80% de
cent quartiers où vivent plus de 3,8 millions logements sociaux avant
d’habitants sont concernés par cet ambitieux le projet
programme national.
et de nombreux efforts sont visibles pour ce Pour aller plus loin :
Parce qu’il englobe tous les aspects de la qui est de la qualité et de l’innovation archi- • PADDI, 2011, Livret
vie sociale et urbaine, ce dernier nécessite tecturale. La maîtrise d’ouvrage s’est investie « Architecture verte :
une étroite coordination entre les différents d’une responsabilité majeure en dévelop- concepts et
pant une politique incitative en matière de pratiques »
acteurs. L’Agence Nationale de Rénovation
Urbaine (ANRU), un Établissement public, a construction durable. Globalement, le taux • PADDI, 2011,
été créée à cet effet en 2003. Elle concentre de satisfaction des habitants paraît assez Livret « Appui à la
élevé. Le nombre de logements reconstruits maîtrise d’ouvrage
les financements et assure la mise en œuvre
n’atteint pourtant pas celui des logements publique dans le
du PNRU. L’initiative des programmes locaux cadre de bâtiments
revient aux collectivités territoriales. Des détruits, dans un contexte où la construction verts/constructions
conventions d’une durée de cinq ans sont locative sociale est difficile. En Île-de-France, durables face
signées entre l’ANRU, l’État, les collectivités beaucoup sont reconstruits dans le même au changement
concernées, les bailleurs sociaux et d’autres quartier, ce qui en réduit l’effet en terme de climatique »
investisseurs éventuels. Le budget de l’AN- mixité sociale. Les relogements permettent • PUCA, Plan/
RU - près de 12,5 milliards d’euros - devrait souvent aux catégories les mieux intégrées Urbanisme/
générer 50 à 55 milliards d’euros de travaux. de quitter le quartier tandis que les popula- Construction/
Le PNRU est financé à 27% par l’ANRU (essen- tions les plus marginalisées, peu autonomes Architecture,
et pour lesquelles les solidarités locales sont http://rp.urbanisme.
tiellement sur le fond de l’Action logement) à
essentielles, restent sur place. La réalisation equipement.gouv.fr/
43% par les bailleurs sociaux et à 23% par les puca/
collectivités locales. des programmes de diversification de l’offre
de logement connaissant des retards, l’ob- • Programme
jectif initial, faire venir des ménages qui ne CQFD, permettant
Les résultats de cette politique sont encore d’accélérer le
difficiles à évaluer. Le grand nombre de pro- soient pas en situation d’exclusion, est plus
processus de
jets et leur contenu attestent de la volonté des long à atteindre que prévu. La dimension construction de
autorités publiques d’améliorer l’intégration temporelle est donc essentielle dans ces opé- logements et de
de ces quartiers dans la ville. Les transforma- rations d’aménagement. promouvoir un
tions physiques sont parfois spectaculaires, habitat diversifié,
Parallèlement aux moyens mis en œuvre soucieux de la qualité
les ambiances urbaines se sont améliorées
pour améliorer la qualité du logement so- architecturale,
urbaine et
cial, l’État a créé des institutions permet- environnementale,
Le dynamitage de la barre 220 en mai 2010 dans le quartier
de la Duchère, Lyon tant de promouvoir la qualité architecturale http://www.chantier.
et la construction durable. Ces institutions, net
telles que l’ANAH (1971) ou le PUCA (1998),
• ANAH, Agence
financent des recherches incitatives, des Nationale de l’Habitat,
actions d’expérimentation et apportent un http://www.anah.fr/
soutien à l’innovation et à la valorisation
• VGBC, Vietnam
scientifique et technique dans le domaine de Green Building
l’aménagement des territoires, de l’habitat, Council,
de la construction et de la conception archi- www.vgbc.org.vn/
tecturale et urbaine. Une mission d’évalua-
tion et de médiatisation des réalisations de
nouveaux logements est également soute-
nue via des programmes spécifiques comme
celui de CQFD.
98 |
PROJETS ET RÉFLEXIONS DE LA Pour aller plus loin :
• Wust S. et al.,
3
Atelier PADDI sur
« L’indemnisation et
Les récupérations et les le relogement des
indemnisations de terrains à populations lors de
Thu Thiêm (HCMV) réaménagements
urbains »,
animé par Pascale
Bonnard, mars 2010
Faire la ville | 99
Chapitre 4 : Le logement
Vers des indemnisations plus À ce titre, les investisseurs peuvent être mis
à contribution via l’obligation d’intégrer le
justes
programme de relogement dans leur projet
Pour proposer des indemnisations plus proches ou via un prix d’achat des terrains plus élevé,
de la valeur réelle du marché avant l’implan- ce qui permet à la collectivité de financer le
tation du projet, les autorités locales peuvent relogement. D’un point de vue règlemen-
évaluer la valeur des biens immobiliers à taire, l’instauration d’un droit de préemption
l’aide d’un observatoire du marché immobi- rend beaucoup plus facile la constitution
lier et des transactions. de réserves foncières et par conséquent la
création d’un parc destiné au relogement (à
On peut aussi essayer de simplifier les règles vendre, à louer ou en location/accession).
et les démarches administratives afin de Enfin, diversifier les sources de financement
prendre en compte l’étalement dans le temps des logements en mobilisant par exemple
des procédures et de rendre possible l’aug- les produits d’épargne et la participation des
mentation de l’indemnisation si elle devient entreprises peut constituer une perspective
trop éloignée des prix du marché. intéressante pour les autorités publiques et
les investisseurs. Un habitant a créé une
petite épicerie dans
Dans la même optique, les procédures, ba- son appartement de
rèmes et critères d’indemnisation peuvent relogement, HCMV
être homogénéisés, quel que soit le maître La recherche de la
d’ouvrage. Rendre public le montant des transparence
compensations fixées en fonction d’un
relevé socio-économique des ménages et Une fois le montage financier terminé, il peut
prendre en compte les foyers installés de être utile d’informer clairement les habitants
manière illégale assurent dans une certaine de la nature du projet d’ensemble, en parti-
mesure la transparence et l’équité entre les culier du coût des opérations et de l’utilisa-
ménages concernés. Les autorités publiques tion prévue des plus-values de la vente des
peuvent également s’interroger sur les li- terrains acquis. Les habitants sont encore
mites de l’intervention quand elle rencontre peu sollicités dans les démarches publiques.
trop d’obstacles, tels la surenchère dans les Pourtant, introduire la consultation du public
indemnisations ou le refus catégorique des et la concertation au cours de l’étude de pré-
habitants d’être relogés. Il peut en ce cas faisabilité du projet permet en général de
paraître opportun de mettre en veille une mieux appréhender les opérations urbaines
opération ou de ne pas l’engager. et de relogement. Au Viêt-Nam, un règlement
encadrant les possibilités de participation, de
consultation et de concertation des habitants
Un montage opérationnel et
pourrait être mis en place, ainsi que d’autres
financier à effectuer en amont formes de médiation, en faisant par exemple Un immeuble de
appel à des consultants indépendants. relogement dans la
Il est primordial que la question de la libéra- périphérie de HCMV
tion des terrains et du relogement émerge en
amont du projet. En effet, une vision claire
des coûts de l’aménagement et des investis-
sements en début de projet permet d’aboutir
à un équilibre financier entre l’indemnisation
de relogement et le montant des bénéfices
établis par l’investisseur. Afin de financer les
relogements, il semble pertinent de faire ap-
pel aux ressources du projet en lui-même : les
bénéfices réalisés par la ville devraient être
réinjectés au sein du projet et non intégrer le
budget général. Une gestion plus flexible du
parc de relogement permettrait de mutuali-
ser les appartements neufs disponibles, d’en
constituer un stock tout en assurant un prix
identique entre les différents projets.
100 |
Un parc de logement adapté particulièrement les commerçants, les artisans Pour aller plus loin :
aux besoins et les agriculteurs qui ont perdu leur source de • PADDI, 2010, Livret
revenus suite à leur déménagement. « La copropriété et la
Mener au préalable une enquête sociale et propriété privée dans
le logement »,
économique approfondie aide à proposer un La copropriété 4 : un cadre http://www.paddi.
logement adapté au mode de vie des relo-
gés. De même, accorder un soin particulier
de gestion insuffisant pour vn/IMG/pdf/2010-
07_Copropriete_et_
au choix du site éviterait qu’il soit considéré l’habitat collectif vertical propriete_privee_
dès le début comme un lieu de relégation. dans_le_logement_a_
En outre, y introduire de petites activités On compte à HCMV 570 immeubles de taille HCMV.pdf
permettrait de maintenir le petit commerce moyenne (5-6 étages) construits avant 1975
et les services de proximité. Dans l’idéal, il et 432 immeubles plus hauts postérieurs à
serait préférable que le type de logement cette date. En 2009, 55 projets de tours ont Les règlements des
proposé soit en adéquation avec le profil été approuvés pour un total de 19 500 loge- immeubles et le statut
du ménage : une parcelle individuelle pour ments. Les parties communes des immeubles des espaces communs
collectifs sont parfois dégradées et occupées sont souvent flous dans
un agriculteur ou un logement qui donne les copropriétés, ce qui
sur la rue pour un commerçant. En effet, la illégalement. Historiquement gérées par les entraîne des litiges
tour d’habitation ne constitue pas un modèle autorités publiques, elles relèvent, depuis
unique pour les quartiers de relogement et la loi sur le logement de 2005, de la respon-
d’autres formes urbaines de densité égale sabilité des copropriétaires et sont adminis-
existent. Il est important d’adapter les loge- trées par un comité de gestion et le maître
ments aux bas revenus de certains ménages, d’ouvrage. Les copropriétaires se sentent
en offrant par exemple des surfaces et des pourtant peu concernés par la gestion et la
charges limitées (bâtiments bas sans ascen- maintenance de ces parties communes. La
seur) pour éviter les phénomènes d’appau- définition des parties communes et priva-
vrissement, de revente, de spéculation et tives est souvent floue et peut faire l’objet
l’apparition de nouvelles poches de pau- de contradictions à la fois au sein des règle-
vreté. Des outils d’évaluation du relogement ments (entre la circulaire de 2009 et la loi sur
peuvent être développés à l’échelle de la ville le logement de 2005) et entre l’acte de vente
afin d’étudier et de prévenir la formation de et le règlement de la copropriété. Le statut
ces dernières. des places de stationnement et des maga-
sins, comme partie commune ou comme
C’est par une coordination étroite entre la propriété du maître d’ouvrage, fait souvent
commission de relogement initiale, les ser- l’objet de conflits entre ce dernier et les
vices sociaux et les comités de quartier des copropriétaires. Selon la circulaire 16/2010,
districts d’accueil qu’un bon suivi de ces fa- la surface de l’appartement comprenait
milles contraintes de changer radicalement les locaux techniques, les murs porteurs
de mode de vie peut être assuré. À cette fin, et les colonnes. Cette méthode de calcul a
des partenariats peuvent être instaurés avec entraîné de nombreuses difficultés pour les
les entreprises locales et les bénéficiaires du acquéreurs. Depuis, la circulaire 03/2014/
projet, pour recruter les populations relogées, TT-BXD a permis de résoudre ce problème,
tout comme les conflits entre promoteurs et
« Le cadre règlementaire de la copropriété
ͳ 2008 : Décision 08/2008/QĐ-BXD du minis-
coproprietaires concernant les parking et les
commerce via « l’Acte de vente » qui indique
tère de la Construction sur la promulgation du la surface de la propriété privée et celle des
Règlement de gestion des immeubles collectifs. parties communes.
ͳ 2009 : Circulaire 01/2009/TT-BXD sur la déli-
vrance du certificat de propriété de logement et Pour couvrir les frais de gestion et de main-
le contrat type pour les transactions des appar- tenance sur une durée indéfinie, un montant
tements.
de 2% du prix de l’appartement est provision-
ͳ 2009 : Circulaire 37/2009/TT-BXD du minis- 4
Atelier PADDI sur la
tère de la Construction (MoC) sur la méthode né au moment de la vente. Ces modalités de
« La copropriété et la
d’évaluation et de gestion des charges dans les financement ne sont donc absolument pas propriété privée dans le
immeubles collectifs. liées aux coûts réels et ne permettent pas logement », animé par
ͳ 2009 : Texte 144/BXD-QLN du ministère de la la mobilisation des habitants en cas de gros Jean-Charles Castel, 2010
Construction sur la définition des parties com- travaux. Le Comité populaire doit encore sou-
munes et parties privatives dans les immeubles. vent intervenir pour financer les travaux de
102 |
LE PATRIMOINE URBAIN
epuis une trentaine d’années, les villes vietnamiennes se sont moderni-
LE PATRIMOINE AU VIÊT-NAM
Des villes en mouvement, des identités à valoriser
a conservation et la valorisation de du coton, du sucre, etc.). Il se caractérise
La richesse du patrimoine
« La notion de patrimoine pour l’UNESCO et pour les Vietnamiens
L’UNESCO définit le patrimoine comme l’héritage du passé dont nous pro-
fitons aujourd’hui et que nous transmettons aux générations à venir. Le
hanoïen patrimoine urbain, composé des rues, des bâtiments, de monuments et de
Hanoi est une des rares villes du sud-est paysages particuliers, peut être considéré, par son originalité, son caractère
asiatique à posséder un patrimoine histo- symbolique ou son histoire, comme un héritage du passé qui est à préserver
rique, culturel et urbain vieux de plus de dans l’intérêt des contemporains et des générations futures. En ce sens, le
patrimoine relève du bien commun et de l’intérêt général.
mille ans. Les alentours de Hanoi comptent La conception vietnamienne du patrimoine - et celle du monde sinisé en
plus de cinq cents villages de métiers spé- général - attachée au respect des valeurs spirituelles, à des représentations
cialisés dans la fabrication d’objets d’art, de et à une culture immatérielles, diffère de celle du monde occidental, plus
textiles ou encore de vanneries, typiques de attaché aux traces matérielles (objet, bâtiment, tracé des rues). Dans le
la culture du delta du Fleuve rouge. La ville monde sinisé, les valeurs patrimoniales tiennent aux lieux plus qu’aux bâti-
comprend quant à elle trois ensembles patri- ments, aux savoir-faire et aux pratiques plus qu’aux matériaux. Cependant,
moniaux majeurs : le quartier des trente-six la période de la colonisation française semble avoir influencé la conception
vietnamienne du patrimoine.
rues et corporations ou vieux quartier (Pho La communauté scientifique vietnamienne des architectes et des univer-
co), l’ancien quartier colonial français et sitaires est très active sur ce sujet et mène de nombreuses réflexions. Les
l’ensemble de la citadelle. Le tissu urbain du préoccupations des gestionnaires de la ville se portent quant à elles sur les
vieux quartier reflète l’ancienne organisation outils opérationnels, les actions prioritaires à mener et l’adaptation des rè-
en hameaux de corporations (rue de la soie, glements au contexte actuel de forte spéculation.
104 |
et de villas (de style régionaliste, néo-clas-
sique, art-déco ou moderniste).
quartier français de Hanoi et des districts 1 des loyers versés ne leur permet pas d’inves- Pour aller plus loin :
et 3 de HCMV, « quartiers d’or du foncier », tir dans la rénovation de ces bâtiments et la • Banque Asiatique
offrent d’excellentes opportunités pour le situation locative précaire des habitants ne de Développement,
développement de tours grâce à leur localisa- les incite pas à assurer les travaux de main- Steinberg F., 2008,
tion centrale, leurs larges emprises foncières tenance. Les villas sont parfois détenues par « Revitalization of
(500 à 1 000 m²) et leur bonne accessibi- plusieurs propriétaires, ce qui engendre des inner-city areas in
Asia, The potential
lité. Dans le vieux quartier de Hanoi, la forte subdivisions physiques de la parcelle et du for Urban renewal in
hausse des valeurs foncières a conduit à une bâtiment ainsi que de grandes difficultés dans Hanoi, Jakarta and
densification du bâti par ajout d’étages et par la gestion et lors des transactions. Manila », 220 p.
la construction d’édifices beaucoup plus éle- • Actions et
vés que les maisons traditionnelles. Cependant, certaines villas, transformées en documentation de la
locaux administratifs ou commerciaux, ont coopération Toulouse-
bénéficié de restaurations plus ou moins bien Hanoi,
Des bâtiments et des encadrées. À Hanoi, les mieux conservées et http://www.toulouse-
entretenues sont celles attribuées aux repré- hanoi.org
conditions de vie dégradés
sentations diplomatiques étrangères. Des • Urban solutions,
La volonté de préserver et de valoriser le extensions, de nouvelles constructions sur la 2010, Urban heritage
parcelle ou de grandes devantures commer- management
patrimoine urbain vietnamien se trouve aussi in Viêt-Nam; an
confrontée à la dégradation du bâti, à la pau- ciales masquent fréquemment les façades
introduction manual
périsation et à la surpopulation dans les villas des villas et des compartiments. for planners, Institute
et les compartiments anciens. Les compar- of conservation for
timents traditionnels du vieux quartier et de monuments, 83 p.
Cholon peuvent héberger plusieurs familles : Une règlementation plus http://www.urban-
solutions.nl/en/
des parcelles de 240 m² peuvent parfois protectrice à l’échelle du home/
accueillir jusqu’à une centaine d’habitants à quartier
Hanoi 1 . • DCU, 2011, étude
« Conservation and
Les projets concernant le patrimoine culturel development, Cholon,
Cette situation de surpopulation et de dégra- de niveau « national et extraordinaire » sont Hô Chi Minh City »,
dation touche également les villas qui appar- soumis à l’approbation du bureau du Premier 223 p.
tiennent aux autorités publiques et ont été ministre. Les actions de protection et de ges- www.lopezmarzo.
attribuées à certaines familles. La faiblesse tion des monuments historiques sont placées com/proyectos/
hdmc_final.pdf
sous la tutelle du ministère de la Culture, des
Sports et du Tourisme. Le ministère de la • Fanchette S.,
Les quartiers de compartiments se densifient par
Construction est responsable du classement Stedman N., À la
surélévation, ici dans le quartier français de Hanoi
découverte des
et de la gestion des villas.
villages de métier
au Viêt-Nam ; Dix
Les bâtiments historiques et culturels font itinéraires autour
l’objet d’une politique de rénovation enca- de Hanoi, IRD, 2009,
drée par le décret du 31 mars 1984 sur la « con- 322 p.
servation des vestiges historiques et culturels • Tùng Nguyên et
des beaux sites ». Ce décret a permis d’iden- Krowolski Nelly,
tifier des sites d’intérêt national, comme la « Hôi An, de l’éveil
vieille ville de Hoi An, classée en 1985. Les à la résurrection
premières rénovations de pagodes, temples du patrimoine »,
Autrepart, n° 33,
et maisons communales eurent lieu dans les
2005/1, p. 141-
années 1990. De nombreux édifices furent 155. DOI : 10.3917/
par la suite classés par le ministère de la autr.033.0141
Culture, des Sports et du Tourisme.
106 |
historiques et identifie notamment ceux qui
sont en danger ou nécessitent des restaura- « Le cadre règlementaire pour la valorisation du patrimoine
tions. Cette loi crée des outils de protection ͳ 1984 : Décret du 31 mars 1984 sur la « conservation des vestiges histo-
riques et culturels des beaux sites ».
des alentours des sites protégés. La loi sur
ͳ 2001 : Loi sur le patrimoine culturel (art 54 à 56) du 29 juin 2001, indique
l’urbanisme de 2009 prévoit l’inscription des que les secteurs sauvegardés doivent être inscrits dans les documents
sites historiques dans les documents d’urba- d’urbanisme en cours de réalisation (décret d’application 92/2002/ND-CP
nisme. Le patrimoine végétal fait par ailleurs novembre 2002).
l’objet d’un inventaire et de mesures de pré- ͳ 2003 : Décision 05/2003/QD-BVHTT (février 2003) du ministère de la
servation à HCMV au sein du service espaces Culture sur la préservation et la restauration du patrimoine culturel, bâti
verts du département des Transports. et paysager.
ͳ 2010 : Loi sur l’urbanisme, inscription des sites historiques dans les docu-
ments d’urbanisme.
Les villes vietnamiennes se sont saisies de
ces évolutions législatives et ont commencé
à étudier des périmètres de protection à
l’échelle urbaine dès les années 1990. Les
villes de Hoi An et de Hué, classées site d’in-
térêt national, ont mis en œuvre des règle-
ments de protection et de mise en valeur
de leurs quartiers historiques. L’ensemble
des monuments de Hué et la vieille ville de
Hoi An ont ensuite été classés au patrimoine
mondial de l’UNESCO en 1993 et 1999, puis
soumis à une nouvelle règlementation. Il est
ainsi interdit de construire des bâtiments
modernes au centre de Hoi An et les autres
constructions dans un périmètre proche né-
cessitent l’autorisation du Comité de gestion
du patrimoine.
quartier français se fondent sur le règlement patrimoine ordinaire, mais l’attention portée
encore non officiel proposé par l’étude IMV- à ces questions, encore faible, commence
Interscène, et le DUPA est en train d’étudier à prendre forme, notamment pour le patri-
une extension de ce périmètre. moine végétal, industriel et pour les espaces
publics. Ainsi, les bâtiments de l’ancien port
de Ba son, dans le district 1, ont fait l’objet
Une notion du patrimoine de débats quant à leur conservation, dans un
élargie aux espaces publics à contexte de forte pression foncière, de spé-
culation immobilière et de projets de valo-
HCMV risation des berges. Par ailleurs, des projets
de réhabilitation des canaux prévoient leur
Réalisé en 1996 à l’échelle de la ville à partir
dragage, le nettoiement des berges et l’amé-
des travaux de la coopération décentralisée
nagement de nouveaux espaces publics de
avec la Communauté urbaine de Lyon2, un
promenade.
inventaire du patrimoine (circulaire 46/TB UB
QLDT) a permis d’établir la liste des ouvrages
Le tissu des compartiments et des pagodes du quartier très
(dont les villas) nécessitant une étude en vue animé de Cholon à HCMV est confronté à des destructions et
de leur conservation, ainsi que de déterminer des reconstructions peu respectueuses de l’environnement
la responsabilité de chaque organisme dans urbain. Un projet de réhabilitation du bâti et des espaces
publics pourrait voir le jour
cette dernière. Depuis, HCMV réfléchit à un
plan de valorisation. Une circulaire de 2009
(38-2009-TT-BXD) classe les villas en trois ca-
tégories de niveau de protection impliquant
une gestion plus ou moins contraignante.
Par ailleurs, toute démolition est soumise à
l’approbation du Comité populaire de la Ville.
Il n’existe pas pour l’instant de règlementa-
tion globale et précise quant à la gestion du
2
L’inventaire se fonde sur
les études réalisées par
la Communauté urbaine
de Lyon en collaboration
avec le département de
la Construction de HCMV,
notamment les deux
études d’H. Desbenoit :
« Patrimoine architectural
de HCMV, éléments de
repérage, les bâtiments
publics », 83 p. et
« Patrimoine architectural
de HCMV, éléments de
repérage, les bâtiments
résidentiels », 173 p.
108 |
LE PATRIMOINE EN FRANCE Pour aller plus loin :
• DRAC Île-de-France,
http://www.ile-de-
Connaître, protéger, valoriser et développer le france.culture.gouv.fr/
page-les-monuments.
territoire 3 htm
• Ministère de la
culture,
n France, la notion de protection ou de grands axes routiers. Le Vieux Lyon,
E
http://www.culture.
du patrimoine apparaît pendant datant du Moyen-âge, dont le bâti était gouv.fr/culture/
organisation/dapa/
la Révolution française, à la fin du en mauvais état, se trouvait ainsi sous la
publications.html
18ème siècle. À cette époque, de nom- menace de projets autoroutiers. Il devint
breux édifices, alors considérés comme en 1964 le premier secteur sauvegardé • Association
nationale des
des symboles de la royauté, furent dé- de France, notamment grâce à la mobili- Architectes des
truits ou vendus à des particuliers. Trente sation des associations d’habitants. Dans Bâtiments de France,
ans plus tard, l’État organisa un inven- les années 1990, des bâtiments appréciés http://anabf.archi.fr/
taire du patrimoine architectural du pays pour leur valeur symbolique ou imma- • Quartier du Vieux
et de son état de destruction, puis une térielle, témoins d’une certaine époque Lyon,
première liste des bâtiments à proté- (bâtiments industriels, résidences de per- www.vieux-lyon.org/
ger fut dressée en 1840. Les monuments sonnages historiques...) furent également
publics (1887) et privés (1920-1930) clas- reconnus comme patrimoniaux.
sés ou inscrits à l’inventaire général du
patrimoine deviennent officiellement des
monuments historiques. Toute trans-
formation extérieure, intérieure ou des
abords immédiats du bâtiment est sou-
mise à approbation sur la base d’un règle-
ment particulier. Le niveau de protection
s’élargit en 1962 avec la loi Malraux sur les
« secteurs sauvegardés », qui permettait
de prendre en compte un quartier dans
son ensemble. Il s’agissait à cette époque
d’éviter la destruction systématique des Le Vieux Lyon, considéré comme un quartier insalubre avant
quartiers anciens, alors vétustes, pour son classement en secteur sauvegardé en 1964, a fait depuis
l’objet d’une vaste politique de rénovation
reconstruire des quartiers plus modernes
3
Le centre-ville de Lyon a été classé patrimoine mondial L’intérêt et les enjeux de la Atelier PADDI, « La
protection du patrimoine
de l’UNESCO en 1998 en raison de son site exceptionnel,
son mode de vie particulier et un patrimoine urbain bien valorisation du patrimoine architectural et urbain
et les perspectives de
préservé, témoin de l’évolution de la ville. Une zone
« tampon » (en rouge) a été établie afin de mieux valoriser
urbain gestion du patrimoine
sur le centre historique
les abords du site protégé et son interaction avec le reste du
territoire. Ce type de patrimoine fait partie de l’identité de HCMV », animé par
Brunos Delas, janvier
culturelle des habitants. Sa rénovation, plu- 2010
tôt que sa destruction, améliore leur qualité
de vie et permet à la ville de conserver une
dimension humaine. De plus, les travaux de
restauration et de valorisation culturelle,
touristique ou pour d’autres usages contem-
porains, dynamisent la création d’emplois et
l’économie locale.
L’Opération de Restauration
Immobilière du passage
Thiaffait à Lyon dans les
années 1990 a permis de
rénover les logements
(sociaux et privés) et
les rez-de-chaussée
(installation d’une pépinière
d’entreprises). Le passage
a fait l’objet d’illuminations
lors de la Fête des Lumières
112 |
LES PROJETS ET RÉFLEXIONS DE LA
COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE
Quelques éléments tissent à un arbitrage politique. Celui-ci
pourra être à l’origine d’une règlementation
stratégiques pour une mise en détaillée. L’étude des pratiques urbaines peut
œuvre efficace de la protection conduire à des aménagements spécifiques :
du patrimoine 6 des cheminements piétons facilités dans cer-
taines zones, une meilleure gestion des flux
La problématique du patrimoine pourrait touristiques grâce à des places de stationne-
être intégrée à l’échelle de la planification ment pour les autocars ou une signalétique
et des schémas directeurs. En effet, appré- particulière afin de faciliter la découverte de
hender les enjeux patrimoniaux à la même
échelle que celle du schéma directeur per-
met de se poser des questions pertinentes en
termes de déplacements (décongestionner
les axes centraux), de densité du centre ou de
développement du territoire. L’élaboration
du schéma directeur pour le centre-ville de
HCMV et la perspective du développement
de la ville moderne de Thu Thiêm constituent
un moment opportun pour concevoir le pro-
jet patrimonial du site historique au regard
du développement de l’ensemble de la ville.
114 |
L’étude pour la protection et « La citadelle, patrimoine mondial de l’UNESCO
le développement de l’ancien La citadelle de Hanoi, édifiée au 11ème siècle sous la dynastie des Ly a été le
quartier français de Hanoi 7 siège du pouvoir impérial jusqu’au 19ème siècle. Aujourd’hui demeurent le
plan de l’ancienne cité impériale, des vestiges archéologiques qui font l’objet
En raison d’un grand nombre d’opérations de fouilles, et des édifices, modifiés et restaurés au cours du temps (portes
monumentales Doan Mon et Bac Mon, palais Hau Lau, etc.). Cet ensemble
immobilières d’envergure réalisées ou proje-
a été classé patrimoine mondial par l’UNESCO en 2010 car il témoigne de la
tées, ce quartier central, situé au sud du lac culture originale de la basse vallée du Fleuve Rouge et est associé à des évé-
Hoan Kiêm, connaît d’importantes transfor- nements culturels et historiques importants. Le site est géré par le Centre de
mations. Certaines anciennes villas coloniales préservation et de gestion des citadelles de Thang Long et Co Loa. Un plan
ont été détruites ou sont très délabrées, tan- de préservation et de gestion particulier est en cours d’élaboration.
dis que des immeubles destinés à accueillir L’IMV et la région Île-de-France ont apporté leur soutien dans la constitution
de nouvelles fonctions tertiaires supérieures du dossier de candidature au classement. Le Comité Régional du Tourisme
d’Île-de-France a participé en 2008 à la rédaction du plan de gestion général
- sièges de sociétés, banques, commerces de et touristique du dossier Unesco avec le Centre de préservation de la cita-
luxe… - sont érigés sans tenir compte du patri- delle Thang Long. Une étude complémentaire a été réalisée afin de proposer
moine environnant et des caractéristiques du un plan de rénovation et d’aménagement des espaces publics de la citadelle
quartier. C’est pourquoi le Comité populaire lors de sa future ouverture aux touristes. Ses propositions concernent éga-
de Hanoi a demandé à l’IMV de réaliser une lement la « zone tampon » de ce quartier caractérisé par de larges avenues
étude de protection sur ce quartier. Débutée arborées, l’ensemble du mausolée de Hô Chi Minh et de nombreuses villas
en 2007, elle a été copilotée par l’IMV et le coloniales en bon état, occupées par des administrations.
DUPA de Hanoi, et réalisée par l’agence fran-
çaise d’urbanisme-paysagisme Interscène.
Sur la base du diagnostic territorial et de l’in- (monument, bâtiment civil ou culturel remar-
ventaire du patrimoine réalisés, l’étude pro- quable, bâtiment religieux, commerce, rési-
pose un règlement d’urbanisme. Les objectifs dence), son style architectural (style colonial
sont notamment de trouver un équilibre classique, régionaliste, art-déco, moderniste,
entre la protection du patrimoine et un déve- etc.). D’autres éléments patrimoniaux qui
loppement urbain maîtrisé. La préservation participent à la valeur de ce quartier peuvent
de l’identité du quartier par la mise en valeur être recensés tels les clôtures, les espaces
des ensembles urbains remarquables, du pa- ouverts ou le patrimoine végétal.
trimoine végétal et des espaces publics pour-
rait s’effectuer tout en maintenant la diversité Quatre critères principaux de sélection ont été
des fonctions (logement, commerce…) et en retenus pour classer les bâtiments. L’« exempla-
autorisant les changements d’usage des villas. rité » correspond au caractère remarquable
de l’élément patrimonial étudié, essentielle-
ment à ses qualités architecturales. La « cohé-
L’inventaire du patrimoine rence au regard d’un ensemble patrimonial » 7
Étude IMV-Interscène,
correspond à la valeur supplémentaire « Étude pour le
lorsqu’il s’inscrit dans une série par exemple développement et la
Un inventaire systématique du patrimoine protection de l’ancien
colonial (bâtiments publics et privés) et viet- des constructions accompagnant un monu- quartier français de
namien, notamment des édifices religieux, a ment, plusieurs villas qui se succèdent ou qui Hanoi », 2007-2010
permis de classer plus de quatre cents bâti- marquent les angles d’un carrefour. La « cohé-
ments. Les éléments patrimoniaux visibles rence au regard d’un ensemble urbain » dé-
depuis l’espace public sont classés en trois signe la valeur supplémentaire d’un élément
catégories, outre les édifices monumentaux : patrimonial lorsqu’il entre dans une compo-
les éléments « exceptionnels », au nombre de sition urbaine, c’est-à-dire qu’il occupe une
71, les éléments « remarquables » (252) et les position clé dans un espace ouvert (front
éléments « secondaires » (112). Chacun de ces de lac, carrefour, place, square..) et/ou qu’il
éléments a fait l’objet d’une fiche qui pré- s’inscrit dans une perspective, un ensemble
sente les « généralités », l’évaluation menée urbain particulier. Ce dernier peut être com-
par les experts vietnamiens et français et le posé d’éléments qui, en soi, ne présentent
classement de l’élément. pas de caractère remarquable, mais qui par-
ticipent à une entité urbaine remarquable.
Les données générales indiquent l’architecte,
la date de construction, la taille de la par- Enfin, la « valeur culturelle » correspond à la
celle, le propriétaire, la fonction du bâtiment valeur symbolique attribuée à un lieu ou à un
Le diagnostic patrimonial
et urbain effectué sur
le quartier français de
Hanoi offre une vision des
ensembles patrimoniaux à
valoriser
116 |
Le périmètre de protection stricte compren- Le règlement propose un classement du patrimoine à
valoriser et des zones où les nouvelles constructions seraient
drait les quartiers de l’Opéra, de la cathé- plus ou moins en retrait de la rue en fonction de sa largeur
drale, du lac Thiên Quang et le quartier (Hanoi)
politique de Ba Dinh. En effet, un enjeu patri-
monial majeur est d’appréhender et de gérer
de manière coordonnée les trois quartiers bué à mettre en évidence le patrimoine bâti
historiques de la citadelle, du vieux quartier de cette ancienne province, notamment les
et du quartier français. villages anciens, les pagodes et les temples.
Mieux protéger et valoriser le patrimoine de
la culture Doai, spécifique des villages situés
Un projet de règlement à l’ouest du fleuve Rouge, est donc devenu
d’urbanisme spécifique à ce une des priorités des autorités locales. Ainsi
le village de Duong Lâm a été classé vestige
quartier
historique national en 2005 en raison du
Le règlement qui accompagne le plan pour- cachet de son architecture faite de maisons
rait permettre aux services techniques muni- traditionnelles préservées - la plus vieille
cipaux et aux districts de Hoan Kiêm et de maison du village a quatre cents ans - et de la
Ba Dinh de mettre en œuvre aisément les présence de hauts lieux culturels. Une ruelle du village de
mesures proposées. Ce plan, quoique non Duong Lâm (Hanoi)
encore officiellement approuvé par les auto- Ce village affiche une activité touristique
rités en 2012, constitue désormais pour le croissante (plus de 70 000 visiteurs en 2010,
DUPA une référence pour la délivrance des 150 000 prévus en 2015) et souhaite l’inté-
permis de construire et la gestion de l’urba- grer à son développement économique. C’est
nisme. Six cents villas sont donc protégées pourquoi son centre de gestion du patri-
dans les faits. moine a sollicité l’appui de la Région Île-de-
France pour une mise en valeur touristique
respectueuse du site. Le projet pilote de pa- 8
Étude IMV en cours.
Protection et valorisation trimonialisation propose d’intervenir sur le
touristique du patrimoine tronçon de voie reliant la porte du village à la
place principale, afin de valoriser sa Maison
dans l’ancien village de communale et son atmosphère, dénaturée
Duong Lâm 8 par des transformations récentes.
L’extension du territoire de Hanoi à l’an-
cienne province de Ha Tây en 2008 a contri-
Lexique
NB : Compte tenu de l’utilisation plus étendue de certains sigles en anglais, nous avons conservé
l’appellation anglophone. Ainsi, le département de la Planification Urbaine et de l’Architecture
est le DUPA et le département des Transports et des Communications, le DoT.
118 |
Remerciements
Nous souhaitons remercier tout particulièrement Laura Petibon qui a eu la lourde tâche de
synthétiser la somme considérable d’informations contenues dans les documents de travail
de l’IMV et du PADDI.
Cet ouvrage étant réalisé à partir des résultats des études et des ateliers menés par le PADDI
et l’IMV, il n’aurait pu voir le jour sans le soutien permanent de nos partenaires vietnamiens.
Le PADDI tient donc à remercier les directeurs ainsi que les équipes des départements tech-
niques de HCMV : le département de la Planification Urbaine et de l’Architecture, l’Institut
de Recherche et de Développement de HCMV (HIDS), le département des Transports et des
Communications et le Centre de gestion des bus, le département des Ressources Naturelles et
de l’Environnement, le département de la Construction, le Centre de conservation de l’énergie,
le Comité de gestion des transports ferrés, le Comité de gestion du projet de Thu Thiem et le
Centre de lutte contre les inondations. La qualité des échanges menés avec eux, la pertinence
de leurs questionnements et leur volonté d’appropriation d’outils témoignent d’un partenariat
actif. Les remerciements du PADDI vont également aux experts du Grand Lyon, de l’Agence
d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise, du Syndicat mixte des trans-
ports pour le Rhône et l’agglomération lyonnaise (SYTRAL), du CERTU et des autres collectivi-
tés, notamment de Saint-Étienne et de Grenoble pour leur expertise de grande qualité et leur
implication. Enfin, le PADDI remercie Madame Nguyen Hong Van, sa co-directrice, Jean-Charles
Castel, son conseiller scientifique, Huynh Hong Duc son traducteur ainsi que l’équipe du PADDI.
L’IMV remercie son co-directeur, M. Ha Van Quê, directeur du service des affaires extérieures
du comité populaire de Hanoi, pour le soutien qu’il apporte à la coopération en urbanisme
avec la région Île-de-France depuis son origine. Les remerciements de l’IMV s’adressent égale-
ment aux services du comité populaire de Hanoi (département des Transports, département
d’Architecture et d’Urbanisme, l’Institut de planification urbaine de Hanoi, département de la
Culture, des Sports et du Tourisme, Service des relations internationales, TRAMOC, Centre de
la citadelle, Bureau de gestion de l’ancien village de Duong Lâm), ainsi qu’au Ministère de la
Construction et à l’Institut de recherche en architecture et de planification rurale et urbaine
du Viêt-Nam pour la qualité du partenariat noué dans la réalisation des études et projets de
l’IMV. Les interventions de l’IMV n’auraient pas été possibles sans l’appui précieux des experts
de la région Île-de-France, notamment de l’Unité aménagement durable, du Comité Régional
du Tourisme, de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la région Île-de-France, de
l’agence régionale des espaces verts, du service de l’inventaire général du patrimoine culturel,
de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) et du Syndicat des Transports d’Île-de-
France (STIF). Qu’ils en soient remerciés.
Crédits photographiques
Couverture : Sandrine Llouquet, www.tumtumtree.asia
Introduction : HCMV © DUPA HCMV — Expansion urbaine HCMV © PADDI — Région Rhône-Alpes - Grand
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Expansion urbaine Hanoi © IMV d’après le Bureau de gestion du vieux quartier de Hanoi — Région Île-de-France
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— Périphérie de HCMV © PADDI — Schéma directeur du centre ville © Nikken Sekkei — Schéma directeur du
centre ville © Nikken Sekkei — Planification par ratios © PADDI d’après DUPA HCMV — Projet de Thu Thiêm
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2030 © Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise (AUAL)— Label éco-quar-
tier © Ministère du développement durable — Concertation © PADDI — Logo Île-de-France © Région Île-de-
France — Logo Paris métropole © Paris métropole — Logo Société du Grand Paris © Société du Grand Paris
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Village © IMV
120 |
FAIRE LA VILLE
Comment rendre la planification urbaine plus effective au Viêt-
Nam ? Comment développer l’offre de logements, de services
urbains, d’infrastructures, dans un pays où l’on prévoit que la
part de la population urbaine (un tiers aujourd’hui) dépassera
celle de la population rurale en 2040 et qui connaît le rythme
d'urbanisation le plus élevé de l'Asie du Sud-Est ? Cette crois-
sance urbaine, concentrée sur les deux métropoles de Hanoi et
de Hô Chi Minh-ville, entraîne de profondes recompositions
territoriales aux échelles nationale et locale.