L'ordonnance de 1825 Et Ses Conséquences

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L'ordonnance de 1825 et ses conséquences

A)La reconnaissance de l'indépendance

Autant en Haïti les esprits étaient tendus vers la reconnaissance de l'indépendance


nationale, autant la France ne pouvait se consoler de la perte de sa plus riche colonie. Dans
ce contexte, plus d'une dizaine d'émissaires français ont défilé dans le pays dans le but de
négocier l'argent à verser pour le dédommagement des anciens propriétaires d'esclaves à
Saint-Domingue. Finalement, le roi Charles X signa le 17 Avril 1825 une ordonnance qu'il
confia au baron de Mackau d'imposer aux Haïtiens par la force militaire, si c'était nécessaire.
Le succès de la mission de Mackau semblait garanti, compte tenu de l'imposante flotte de
guerre de 14 bateaux dont il disposait.
Regardons de près la teneur de cette fameuse ordonnance :

1)Ouverture de tous les ports de la partie française de Saint-Domingue au commerce avec


toutes les nations ;

2)Droits de douane égaux pour tous à l'exception de la France qui bénéficiera du demi-tarif
douanier.

3)150 millions de francs en dédommagement des colons dépossédés, valeur qui sera
versée en cinq annuités consécutives.

B) Ses conséquences

b1) Sur le plan interne

-Du point de vue politique

L'acceptation de l'ordonnance anéantissait le prestige d'Haïti dans le monde, il avait


dévalorisé les sublimes sacrifices consentis par les titans de 1804. Aussi, humiliés, indignés,
les premiers à se rebeller sont les anciens généraux officiers et soldats de l'indépendance.
Ne pardonnant pas à Boyer cet affront, ce fut alors une succession de révoltés dans l'armée
réprimée dans le sang. Dans le Nord, une deuxième vague de conspirateurs prenaient la
relève avec Prophète Daniel Toussaint, Saint Fleur et Nord-Alexis. La garde montait un
complot avec Jean François, Similen, Soulouque et Jean-Louis Bellegarde. Les fissures
appronfondissaient mais le gouvernement tenait bon avec les mêmes principes et la même
direction.

-Du point de vue économique et financier

Pour répondre à la réalité de l'heure, Boyer imposait des mesures d'austérité économique
qui consistaient, entre autres, à limiter les dépenses publiques et à réduire le nombre de
fonctionnaires. La circulation monétaire était presque nulle. Pour juguler cette crise, Boyer
augmenta les impôts, recouru à des émissions de papier-monnaie sans réserve d'or. Les
faux-monnayeurs, les concussionnaires en profitaient alors largement. Aussi, la production
des denrées exportables avait continué à baisser ,surtout en raison de la dégradation des
termes de l'échange qui avait atteint son paroxysme vers sa chute.
-Du point de vue commercial

Réduisant à 50% les droits de douane en faveur du pavillon français, lésés, L'Angleterre, les
États-Unis rompirent leurs relations commerciales avec Haïti. En 1821, le nombre de faillites
des maisons de commerce était considérable. C'est à partir de Boyer que commença le
transfert de l'une des branches les plus importantes de la fortune publique des mains des
nationaux à celles des étrangers.

-Du point de vue social

Résultant de l'éveil nationaliste des Haïtiens devant la liquidation de l'indépendance


nationale.Cependant, ils avaient dans leur mémoire , l'action patriotique et nationaliste de
Christophe qui faisait fusiller sur la place publique, l'émissaire français Franco De Médina,
pour ne pas compromettre l'indépendance. Aussi, la pauvreté, la paresse et l'ignorance
étaient devenues des moyens de gouvernement dans les mains de cette administration
sacrilège. La jeunesse du pays est élevée dans la plus complète ignorance. Les écoles ont
été presque toutes fermées et sont transformées en baraques militaires.

b2) Sur le plan externe

L'acceptation de l'ordonnance fait perdre le prestige de la jeune nation à l'échelle


internationale. Tous les gouvernements haïtiens depuis 1804, par leur nationalisme
intransigeant et farouche ont contribué à la renommée d'Haïti. Le gouvernement de Boyer a
abandonné la voie tracée par ses devanciers. Pour les États-Unis, l'acte posé par Boyer est
un échec à la doctrine de Monroe "L'Amérique aux Américains". On a pris prétexte pour
écarter Haïti au congrès de Panama en 1826 par Bolivar pour tenter de fédérer l'Amérique
latine.

b3)Les mesures adoptées par le gouvernement pour faire face à la dette

-La double dette

Pour payer la première tranche, le gouvernement a dû s'adresser à une banque française


(Gandolphe & Cie) qui lui consentit un prêt de 30 millions de francs. Évidemment, Haïti n'en
reçut que 24 millions à cause des commissions et divers autres frais à en soustraire. Les
dernières réserves de la caisse publique furent vidées intégralement pour compléter le
versement de la première annuité : Un million de piastres qui équivalait à 5.300.000 francs.
Cette double dette constituée par l'indemnité et l'emprunt contracté pour le premier
versement à tant fait de mal à Haïti qu'on a pu y voir la source de tous nos malheurs jusqu'à
l'occupation américaine.

-Le code rural de 1826

La lourde indemnité de l'ordonnance de 1825 allait peser sur l'économie nationale. Le


gouvernement prenait des mesures pour régulariser la vie dans les campagnes haïtiennes
en vue d'obtenir le plus de rendement possible de la production agricole. Les paysans sont
fixés à la terre. Ainsi, le paysan est défini comme étant " une propriété de l'État qui l'utilise
pour la prospérité de l'État". Travailleur non-libre, il ne peut circuler librement, faire partie de
l'armée, s'adonner au commerce, choisir son lieu d'habitation, choisir des cases loin des
bourgades, s'associer à d'autres pour acheter une terre, s'organiser collectivement. Ces
dispositions rappellent encore les mauvais moments du système esclavagiste dans la
colonie.

En définitive, le code rural de 1826 achève de marquer pour toujours le destin du régime de
Boyer. L'opposition contre lui se fortifie, l'opposition parlementaire, le mouvement de Praslin,
première étape de la crise de 1843, et finit par occasionner sa chute.

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