Les Élèves en Difficultés Scolaires D'un Point de Vue Systémique
Les Élèves en Difficultés Scolaires D'un Point de Vue Systémique
Les Élèves en Difficultés Scolaires D'un Point de Vue Systémique
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Table des matières
1. Résumé .................................................................................................................................. 3
3. La systémique ....................................................................................................................... 6
3. 1 Définition de la systémique........................................................................................... 7
4. Conclusion........................................................................................................................... 16
5. Bibliographie....................................................................................................................... 18
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1. Résumé
Les difficultés scolaires ainsi que l’échec sont une réalité que l’école est censée assumer
quotidiennement, elle a sa part de responsabilité et doit trouver des solutions afin d’y
remédier. Mais qu’est-ce que les difficultés scolaires et comment y pallier ?
Il n’est d’abord pas évident de définir « l’échec scolaire », car ce terme peut recouvrir de
nombreuse réalité. En effet, la notion de difficulté scolaire est complexe, car elle est au
croisement de plusieurs disciplines (sociologie, psychologie, pédagogie, etc.) et change
souvent de définition selon le point de vue d'où l'on se place. D’après son orientation, on peut
considérer que les problèmes scolaires émanent uniquement des élèves, de l’enseignant ou
encore peuvent être liées aux relations et aux échanges entre les différents composants du
système.
Pour ce travail, j’ai choisi d’avoir un regard d’ensemble, orienté sur les relations, car cela
permet de voir le fonctionnement global de l'objet étudié et peut-être trouver plus de solutions
afin de remédier aux difficultés scolaires. La plus proche théorie liée à ce point de vue est la
systémique, car s’est une pratique qui permet d’interroger l’échec scolaire d’un élève, non pas
uniquement du point de vue de l’étudiant, mais en le plaçant dans l’ensemble des systèmes
dans lesquels il interagit.
Ce mémoire aura comme objectif principal de comprendre les difficultés scolaires des élèves
d’un point de vue systémique.
Pour se faire, il s’agit, dans un premier temps, d’essayer de définir qu’est-ce que les
difficultés scolaires ? Et que signifie l’échec scolaire selon la systémique ?
Dans un deuxième temps, nous observerons qu’est-ce que la systémique, comment cette
approche perçoit la relation pédagogique et la démarche utilisée pour comprendre et aider les
élèves. Un exemple sera également présenté afin d’entrevoir comment la systémique gère un
problème dans une relation pédagogique. Enfin, nous verrons quels sont les apports et les
limites de la systémique.
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2. Les élèves en difficultés scolaires
Les difficultés des élèves sont au centre des préoccupations du domaine scolaire. Ces
obstacles d’apprentissage et les problèmes comportementaux constituent de véritables défis à
surmonter pour les élèves et les enseignants. Elles exigent aussi beaucoup d’énergie de la part
des parents. Les difficultés scolaires touchent un nombre important d’élèves et sont définies
de plusieurs manières selon les auteurs. Ainsi, l’échec scolaire peut englober plusieurs
formes, c’est un concept variable, dont chacun fait usage à sa manière, pour démontrer ce qui
lui importe. Afin de pouvoir remédier à ses difficultés il est d’abord important de se poser la
question : qu’est-ce que les difficultés scolaires, comment définissons-nous ces problèmes?
Nous verrons également les difficultés scolaires d’un point de vue systémique afin de
comprendre ensuite comment cette perspective tente de les gérer.
2. 1 Difficultés d’apprentissage
Dans ce travail, j’ai décidé de considérer les difficultés scolaires comme des difficultés
d’apprentissage. Lorsque l’on parle de difficultés d’apprentissage, il est essentiel de ne pas
confondre ce terme avec « trouble de l’apprentissage » qui se caractérise par « un
dysfonctionnement dans le processus d'acquisition des connaissances » (Pohlmann, 2011,
p.10). Les troubles d’apprentissage évoquent des situations beaucoup plus graves que les
difficultés d’apprentissage, car elles nécessitent des interventions de la part de spécialistes
comme des psychologues, orthophonistes, ou des médecins plutôt que celle des enseignants.
La compréhension de ces troubles demande donc des compétences plus importantes que celles
de l’enseignant. Le maître peut donc le signaler, mais ne peut pas y remédier. « Les troubles
de l’apprentissage sont donc caractérisés par un dysfonctionnement spécifique d’une fonction
cognitive touchée » (Farriaux & Rapoport, 1995, p.8). Il existe des troubles d'apprentissage
liés au langage, à l'attention, mais aussi à des compétences spécifiques comme la lecture,
l'orthographe, l'arithmétique, etc. Cette distinction est importante, car les élèves en échec
scolaire peuvent être touchés par ces dysfonctionnements, mais sans que cela soit un réel
handicap.
Ainsi, de part leur gravité, les troubles de l’apprentissage sont à distinguer des difficultés
d’apprentissage.
Les difficultés scolaires sont souvent désignées comme une détérioration des performances
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scolaires, qui peuvent être inférieures à celles attendues compte tenu de l'âge de l'élève et qui
entraînent un écart considérable entre le rendement scolaire et l’aptitude intellectuelle. « Cette
notion de difficultés scolaires peut également être associée à une déficience de la perception;
une lésion cérébrale; un dysfonctionnement cérébral mineur; la dyslexie et l’aphasie »
(Toupiol, 2004, p.15). En général, les difficultés scolaires sont passagères et peuvent souvent
être gérées par les enseignants.
Des situations très diverses peuvent engendrer des difficultés d'apprentissage : on parle des
difficultés plus importantes des garçons, des difficultés des enfants en milieu défavorisé, sans
qu'il s'agisse d'un trouble. Par conséquent, les difficultés d'apprentissage demandent des
mesures institutionnelles différentes et ne relèvent pas d'un diagnostic psychologique. Les
difficultés scolaires se perçoivent donc comme un niveau d’acquisition minimal à atteindre à
un certain moment. Ce niveau dépend également du contexte, c’est-à-dire qu’il diffère selon
les écoles et les demandes politiques. Dans cette définition, l’école aurait donc pour mission
d’amener chaque élève à un niveau d’acquisition minimal et l’élève aurait comme rôle
d’apprendre et de réussir.
Selon la définition donnée ci-dessus, les difficultés scolaires peuvent être dues autant à
l’échec de l’élève qu’à celle de l’école.
« La pensée systémique fait suite à près de trois siècles de déterminisme mécanique et de
logique cartésienne, pendant lesquels l’effort était porté sur la compréhension en séparant les
variables pour étudier leur effet individuel » (Yatchinovsky, 1999, p.14). On avait donc
tendance à se pencher sur des modèles centrés sur l’approche individuelle de l’élève pour
observer les difficultés des élèves. On analysait son incapacité à suivre en classe, son
incapacité à acquérir ou maîtriser des compétences de base, son comportement qui pouvait
être caractérisé par de graves manques ou déficits, son incapacité ou encore ses graves
difficultés de compréhension, sans vraiment tenir compte des autres causes et facteurs.
Il est nécessaire dans l’approche systémique d’utiliser un changement de perspective car elle
s’appuie sur des principes différents des modes de raisonnement classiques (Yatchinovsky,
1999, p.14).
La systémique offre la possibilité d’analyser globalement le problème. En effet, d’un point de
vue systémique, le problème des difficultés scolaires est mis en évidence par la rencontre
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entre l’école, les enseignants et les élèves. En considérant aussi l’élève à travers son milieu
social, culturel et économique et en prenant compte du contexte dans lequel ces relations
s’inscrivent. Afin de remédier à ces difficultés, il faudrait, selon cette perspective, « se
focaliser sur les rencontres et les interactions qui les caractérisent » (Curonici C., Joliat F. &
McCulloch, 2006, p.25). Ainsi pour résoudre les difficultés scolaires, la systémique propose
de se concentrer sur le rôle de l’enseignant, sur la relation de l’élève et sa famille, sur la classe
et sur la relation institution-école. Le fait d’envisager les difficultés d’apprentissage d’un
point de vue systémique oblige à abandonner l’idée qu’elles relèvent d’un facteur isolé. Il
amène plutôt à considérer l’interaction des différents facteurs et leur influence dans le
développement des difficultés d’apprentissage.
La nécessité d’accompagner les élèves qui présentent des difficultés d’apprentissage met en
évidence l’importance d’agir de façon systémique. Tous les acteurs concernés sont conviés à
travailler à la mise en œuvre d’actions concrètes pour soutenir les élèves qui ont ou qui sont
susceptibles d’avoir des problèmes d’apprentissage. C’est en agissant ensemble qu’ils
pourront établir des zones de convergence et mener des actions mieux ciblées.
Ainsi, la systémique interroge les difficultés scolaires d’un élève, non pas uniquement du
point de vue de celui-ci, mais en le replaçant dans l’ensemble des systèmes dans lesquels il
interagit. Pour se faire, elle prend donc en considération le système élève-école (enseignants,
classe) le système élève-famille (parent et fratrie), et le système école-famille. L’intérêt de
cette démarche est également d’analyser la place et le rôle des protagonistes et leurs
interactions avec ces différents systèmes.
3. La systémique
Une analyse voulant que les difficultés d’apprentissage soient uniquement attribuables aux
caractéristiques individuelles de l’élève a longtemps eu cours et est toujours d’actualité. Mais
cette vision de la problématique varie en prenant une perspective systémique. Les difficultés
d’apprentissage peuvent également être analysées à partir d’une perspective systémique de la
situation de l’élève. Selon Curonici, Joliat & McCulloch (2006, p.123) dans cette démarche,
elles sont considérées comme la résultante de l’influence réciproque des caractéristiques
personnelles de l’élève et de celles de sa famille, de son milieu social ainsi que de l’école.
L’approche systémique a pour objectif de permettre, à tous ceux qui travaillent dans une
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situation complexe, et quels que soient les rôles qu’ils y jouent, d’analyser cette complexité,
de la décrire, de percevoir les dysfonctionnements, de prendre en considération les différents
niveaux de la réalité sociale ou institutionnelle. D’autre part, elle s’efforce de permettre, à
celui qui intervient, de maîtriser autant que possible les transformations en chaîne qu’il
détermine et d’en mesurer les conséquences.
Afin de comprendre ce point de vue, il est nécessaire de savoir qu’est-ce que la systémique.
Comment cette perspective perçoit la relation pédagogique et la démarche utilisée pour
analyser cette relation. De plus, un exemple de dysfonctionnement relationnelle sera illustrée
afin d’entrevoir, plus spécifiquement, comment cette démarche procède et quelles sont les
solutions qu’elle peut générer.
3. 1 Définition de la systémique
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Watzlavick, un des chercheurs principaux de Palo Alto, a proposé cinq axiomes de la
communication :
- on ne peut pas ne pas communiquer, chaque comportement est considéré comme un
message qui répond à des messages et qui provoque des messages.
- on utilise deux modes de communication : un verbal et un non-verbal. Il existe souvent des
erreurs de traduction d'un comportement non-verbal dans le langage.
- toute communication présente deux aspects: le contenu et la relation, tels que le second
englobe le premier. Il y a toujours une hiérarchie dans la communication et les messages sont
organisés à un niveau différent. Tout ce qui est de l'ordre du non-verbal donne des
informations précieuses sur la relation entre les personnes.
- la nature d'une relation dépend de la ponctuation des séquences de communication entre les
partenaires, c'est-à-dire que chacun prendra comme point de départ un point différent de
l'autre et fera porter l'échec de la communication sur le partenaire.
- tout échange de communication est symétrique ou complémentaire selon qu'il se fonde sur
l'égalité ou la différence. Il y a deux types de relations, une relation complémentaire où les
individus ont une position différente (haute/basse), ou une relation symétrique où les
individus ont une position identique.
Dans un deuxième temps, il faut comprendre qu’est-ce qu’un système, qui est également un
concept clé de la systémique. Un système est un ensemble d’éléments en interaction
caractérisé par trois propriétés fondamentales : la totalité, l’autorégulation et l’équifinalité.
La première propriété fondamentale du système est le principe de totalité « qui signifie que
lorsqu’il y a un regroupement d’éléments, la logique de groupe constitué prime sur celle de
chaque élément qui le compose » (Yatchinovsky, 1999, p.14).
La deuxième est l’autorégulation qui est la régulation d'un système par lui-même. C'est ce qui
« constitue principalement l’autonomie du système: ce qui permet qu'il se maintienne et se
transforme en fonction de facteurs externes et de ses propres règles » (Yatchinovsky, 1999,
p.14). L’autorégulation est également directement liée à la notion de complexité : si un
système est autorégulé, il est forcément complexe.
La troisième est la notion d’équifinalité qui stipule qu’on peut obtenir un résultat identique à
partir de conditions initiales différentes et en empruntant des chemins différents
(Yatchinovsky, 1999, p.14).
Un système n’est pas une somme ou un agrégat d’éléments, mais il se comporte comme un
tout cohérent et indivisible. Il suit le principe de la théorie de la gestalt qui énonce que le tout
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est plus que la somme de ses parties. Le comportement de chacun des membres du système
est étroitement lié au comportement de tous les autres et en dépend (Evéquoz, 1987, p.31).
Suivant le comportement du système face à l'énergie et aux informations dont il dispose, on
parlera de système ouvert ou clos. Selon Lerbert (1997), un système fonctionne de façon
ouverte lorsqu'il se trouve en interaction avec l'environnement vers lequel il donne ou prend
de l’énergie. Il fonctionne au contraire de façon close quand il se protège de son
environnement et qu'il ne gère que son énergie potentielle. Par exemple, une famille dont les
enfants n’iraient pas à l’école serait un système clos.
Les boucles de rétroaction, appelés également feedbacks ou causalité circulaire, sont
essentielles en ce qui concerne le devenir du système, dans sa capacité à répondre aux
perturbations. Ces boucles de rétroactions se définissent comme une suite d'actions induites
par le système lui-même après un changement extérieur ou intérieur soit pour en maintenir la
stabilité, soit pour amplifier le changement, pouvant aller jusqu'à l'explosion ou l’implosion
du système. L'équilibre d'un système n'est jamais parfaitement réalisé, mais les boucles de
rétroaction lui permettent d'osciller autour d'un point d'équilibre, dans une reconstruction
structurelle permanente qui peut aussi s'appeler auto-organisation (Yatchinovsky, 1999, p.22).
La capacité d’un système à s'auto-organiser révèle souvent sa complexité. Il est donc essentiel
de comprendre la définition de la systémique afin de saisir comment cette perspective peut
appréhender un problème en le plaçant dans le système. Ainsi à travers cette explication, on
peut saisir que le système est déterminé par l’ensemble des facteurs avec lesquels il a des liens
et qu’il s’agit pour la systémique d’agir sur tous les éléments du système.
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Ainsi, l’approche systémique permet parfois de découvrir le fonctionnement réel d’un
système et ses objectifs réels, sous le fonctionnement apparent et derrière les déclarations
d’intention. A la limite, et malgré son apparence de recherche purement opérationnelle,
l’approche systémique peut être un instrument efficace d’analyse idéologique d’un système
éducatif donné. D’après Berger & Brunswic (1987), elle permet de décomposer parfois très
finement les différents éléments d’une situation complexe, de les situer par rapport à
l’ensemble et, par conséquent, de préparer l’intervention modificatrice et d’évaluer les
conséquences envisageables. Ce qui spécifie une relation pédagogique, c’est que les
interactions qui s’y déploient concernent les savoirs au sens large. C’est parce que des savoirs
sont à travailler, entre l’enseignant et la classe, que les uns et les autres se trouvent réunis.
C’est en se réunissant que des savoirs vont s’échanger, s’élaborer, se construire de façon
singulière dans des interactions qu’ils vont inventer.
Dans la perspective systémique, la relation pédagogique est donc perçue comme un système.
Tout système est défini par ses composants, c’est-à-dire à la fois par ses éléments constitutifs
et par leurs interrelations.
Berger & Brunswic (1987) proposent un certain nombre de composants permanents dans une
situation d’apprentissage. En premier lieu, ils considèrent le produit. Lorsqu’on parle de
produit ou sortie, il s’agit dans une situation pédagogique de ce que l’élève doit apprendre,
par exemple, apprendre à rédiger une dissertation. D’après ces auteurs : « le produit résulte de
l’activité de la classe, c’est-à-dire des interactions entre l’enseignant, les élèves, les ressources
et les contraintes ».
Une autre composante de ce système est l’entrée, par exemple une activité d’apprentissage.
« Entrée et sortie (produit) correspondent à deux rapports importants de la situation éducative
avec son environnement, elles en manifestent à la fois la dépendance et l’influence » (Berger
& Brunswic, 1987, p.11). Mais l’interaction entre un système et son environnement est
permanente et peut mettre en évidence la difficulté que comporte la délimitation d’un
système.
Selon Berger & Brunswic, ce système se compose également des notions de temps et
d’énergie. Le temps et l’énergie que l’enseignant utilise pour préparer son travail et celui des
élèves, ceux que les étudiants dépensent pour apprendre, c’est-à-dire leur travail, les résultats
obtenus, mais aussi leur motivation. Le matériel didactique, l’équipement, les locaux
constituent, quant à eux, des ressources.
Les règlements, le nombre d’élèves par classe et le manque ou l’insuffisance de ressources,
c’est-à-dire les conditions de l’environnement institutionnel, social, culturel, économique,
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etc., constituent des contraintes.
« La manière dont l’enseignant ou les élèves vont accommoder les ressources, utiliser les
contraintes ou y résister, donc en définitive la manière d’organiser les différents composants,
définit la stratégie pédagogique » (Berger & Brunswic, 1987, p.12).
Les réponses que les élèves donnent et celles que l’enseignant reçoit, leurs réactions, celles
des parents ou des autorités hiérarchiques apportent aux différents acteurs des informations
qui leur permettent de savoir ce qu’ils font et de modifier leur stratégie. Dans une relation
pédagogique, on appelle rétroaction ou feedback ce mécanisme de retour de l’information.
L’ensemble de ces informations-retours permet aux acteurs du système de contrôler les
différents moments de leur démarche et de vérifier s’ils ont atteint les résultats qu’ils
souhaitaient atteindre. C’est à cela en particulier que serviront les épreuves et les
interrogations.
L’analyse du système et ses composants permet de mieux comprendre comment une approche
systémique peut être utilement employée dans une situation pédagogique dysfonctionnelle ou
pas.
Selon Curonici (2006), c’est dans les interactions que les élèves expérimentent à l’école qu’il
faut situer la solution aux problèmes d’inadaptation scolaire. Ceci en considérant les
caractéristiques de l’élève, les interactions familiales dans lesquels il a évolué, mais aussi les
caractéristiques propres au contexte scolaire.
En supposant que la relation pédagogique est un système relationnel qui dysfonctionne, on
doit être en mesure de parvenir à analyser ses composantes afin de pouvoir trouver des
solutions pour y remédier. Cela signifie, qu’il faut se focaliser sur le système et ses
composants.
Toute démarche visant à accompagner l’élève qui présente des difficultés d’apprentissage
s’inscrit, en général, dans une perspective de réussite éducative. Elle part du principe «
d’éducabilité », c’est-à-dire qu’elle reconnaît que tout élève peut apprendre si les moyens
appropriés sont mis en place. Elle considère l’élève comme le principal acteur de ses
apprentissages. De plus, elle mise sur des interventions différenciées afin de répondre aux
besoins de chacun.
L’accompagnement de l’élève qui a, ou qui risque, d’avoir des difficultés d’apprentissage est
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d’abord centré sur tout ce qui concerne l’acte d’apprendre. Il vise également les éléments
pouvant nuire à la réalisation des apprentissages, par exemple des problèmes émotionnels des
problèmes de comportement, d’handicaps, etc.
Cet accompagnement peut, au besoin, être encadré par un plan d’intervention. Plus
particulièrement, il y a élaboration d’un plan d’intervention lorsque la situation d’un élève
requiert une grande mobilisation de la part des personnes concernées, lorsqu’elle exige le
recours à des ressources spécialisées ou des adaptations diverses.
Un bon accompagnement de l’élève qui a des difficultés d’apprentissage s’articule autour
d’une évaluation juste de sa situation.
Dans la démarche systémique, l’évaluation est donc au cœur d’une dynamique où évaluer sert
à mieux intervenir et à mieux organiser l’environnement scolaire de façon à soutenir
l’intervention.
Berger & Brunswic (1987) proposent, dans un premier temps, de veiller à explorer le sujet
globalement, en identifiant les multiples aspects et facteurs qui interviennent, puis à mettre en
évidence les différents acteurs en jeu, la diversité de leurs points de vue, de leurs intérêts ou
de leurs besoins. Il faut également rechercher quelles peuvent être les relations entre les
différents aspects, facteurs ou acteurs du système et identifier la nature de ces relations. Dans
cette évaluation, on doit aussi mettre en évidence les flux, les dynamiques et les boucles de
rétroaction. Avoir à l'esprit qu'il n'y a pas toujours de solution à un problème donné. Il s’agit
aussi de structurer, hiérarchiser, modéliser, pour faire apparaître une interprétation du
fonctionnement du système considéré.
L’évaluation consiste aussi à relativiser la pertinence du modèle élaboré et la notion de
progrès, de développement et d'évolution du système. Cette analyse procure de nombreuses
pistes d’intervention afin d’essayer de gérer ce qui ne fonctionne pas, mais il ne s’agit non
plus pas d’appliquer l’approche systémique d’une manière mécanique.
L’enseignant ne dispose souvent pas de toutes les informations sur l’ensemble des éléments
qui caractérisent une situation et n’en maîtrise pas tous ces éléments. Ce qui pousse à faire
cette évaluation est souvent une situation d’échec ou une contradiction entre ses objectifs eux-
mêmes, entre ses objectifs et la réalité, ou entre ses propres objectifs et ceux de l’école. Il
n’existe donc pas de méthode toute faite qui permette d’éclairer tous les problèmes ni de les
résoudre.
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3. 4 Exemple de la complémentarité dysfonctionnelle
Afin d’illustrer la démarche utilisée par la systémique, j’ai décidé de prendre l’exemple de la
complémentarité dysfonctionnelle.
Comme explicité dans l’approche systémique, le processus d’évaluation du système peut
éclairer les différents intervenants de la relation pédagogique sur les dysfonctionnements du
système.
Dans de nombreux cas de problèmes scolaires, l’intervention du professeur permet de faire
évoluer la situation. Mais il se peut également que malgré tous les efforts fournis par
l’enseignant, la problématique ne change pas. D’après Curonici, Joliat & McCulloch (2006,
p.128), « lorsque les processus d’apprentissage restent au statu quo, on observe un type de
scénario interactionnel qui peut se mettre en place : la complémentarité dysfonctionnelle ».
Une bonne relation entre l’enseignant et l’élève est normalement une relation complémentaire
basée sur la différence. Cette complémentarité est en général nécessaire afin que les situations
d’apprentissage soient productives. Mais il se peut aussi que cette relation soit
dysfonctionnelle et crée une complémentarité dysfonctionnelle.
En effet, le rôle de l’enseignant consiste à faire en sorte que les élèves réussissent et en cas
d’échec de les aider au mieux à surpasser leurs difficultés. En général cela passe par le fait
que l’enseignant essaie de passer plus de temps avec les étudiants en difficultés, s’investisse
plus avec ceux-ci et leur donne plus d’explications. Cependant tout cet investissement peut
souvent mener à des interactions dysfonctionnelles. Par exemple, si l’élève n’arrive pas à
atteindre les objectifs d’apprentissage, l’enseignant peut diminuer ces exigences ou trop
s’investir. Cette attention accrue pourrait faire en sorte que l’élève déjà peu confiant, ressente
encore plus cette situation comme une confirmation de son incapacité. Par conséquent,
l’étudiant confirme paradoxalement son échec et reste dans cette problématique. De plus,
comme il reste en échec, l’enseignant continue de l’aider et s’installe alors un cercle vicieux.
Ainsi, plus on aide l’élève, plus il garde et confirme son image de « mauvais » élève. Dans
cette relation, l’étudiant continue donc à être en échec et cela fait perdurer l’impuissance de
l’enseignant. Face à cette relation, l’enseignant est souvent sensible, mais il se pose aussi des
questions face au déficit de son élève, qui peut provenir de plusieurs facteurs (intellectuel,
socioculturel, etc.). Dans ce cercle vicieux du paradoxe de l’aide à l’élève, l’aboutissement est
souvent une déresponsabilisation de l’étudiant face à sa dépendance par rapport à l’enseignant
sur lequel il se décharge totalement.
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Ainsi l’image de l’étudiant en échec et les actions entreprises pour l’aider peuvent créer une
relation dysfonctionnelle et par conséquent amplifie la problématique. L’élève n’arrive pas à
dépasser ses difficultés et l’enseignant se sent impuissant et s’épuise.
Ce type de relation dysfonctionnelle peut mener à plusieurs problèmes.
Premièrement, la polarisation sur les déficiences excluant l’appui sur les compétences de
l’élève qui permettrait normalement la construction d’une dynamique positive (Meirieu cité
par Chauveau, 1995, cité par Curonici, Joliat & McCulloch, 2006). Deuxièmement,
l’étiquetage ou la stigmatisation de l’élève, qui est identifié comme porteur de difficultés,
quelqu’un d’inadapté, ou encore incompétent (Chauveau, 1995, cité par Curonici, Joliat &
McCulloch, 2006). Troisièmement, la sous-stimulation où l’élève reconnu en difficulté et
moins apte que les autres se voit avoir un enseignement moins ambitieux et plus simple.
Quatrièmement, l’exclusion de part le fait qu’il a des appuis en dehors des cours et de la
classe (Mingat, 1991, cité par Curonici, Joliat & McCulloch, 2006).
En conclusion, lorsque ce type de schéma dysfonctionnelle s’installe, il participe et amplifie
l’échec scolaire.
La théorie systémique permet d’analyser les problèmes différemment, d’avoir une autre
compréhension en terme de circularité : « Les difficultés d’apprentissage d’un élève, le
comportement problématique d’un enfant ou d’un groupe sont considérées comme faisant
partie intégrante de l’équilibre particulier construit par toutes les personnes qui composent un
groupe classe donné » (Nanchen, 1991, p.4). Selon cet auteur, un trouble n’est qu’une
manière défectueuse d’utiliser des capacités en raison d’un environnement inadapté, ce qui se
traduit souvent par la résignation, la fuite, la sous-utilisation des possibilités intellectuelles ou
comportementales et, au niveau relationnel, par la rupture de la coopération entre les acteurs
concernés . L’essentiel n’est pas de relever un problème, mais de pousser les différents
intervenants à s’intéresser aux interactions dysfonctionnelles qui contribuent à maintenir cet
équilibre et à ne pas exploiter les ressources de chacun. Afin de résoudre un problème, il faut
donc d’abord que chacun reconnaissent qu’il en fait partie.
Face à une relation dysfonctionnelle comme explicitée au-dessus, les enseignants et les
différents intervenants doivent essayer de trouver des solutions. Une des solutions proposées
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par la systémique pour remédier à la complémentarité dysfonctionnelle, par exemple, est de
donner à l’élève sa part de responsabilité.
Pour ce faire, Curonici & all. proposent, premièrement, de constater et d’expliciter le cercle
vicieux qui peut exister entre l’enseignant et l’élève.
Ce constat doit mettre en évidence que d’une part l’élève a des difficultés et que d’autre part,
l’enseignant a essayé de l’aider en vain. Il est également nécessaire de reconnaître
explicitement la difficulté de l’élève à être en difficulté afin de remettre une dynamique
d’apprentissage. Pour se faire, il faudrait considérer l’élève comme responsable à reconnaître
son échec, comme il le vit et la souffrance que cette situation engendre. Ensuite, Curonici &
all. suggèrent d’identifier et nommer les acquis et les difficultés. Cela se réalise par un bilan
pédagogique dans lequel l’élève est perçu comme capable de « réfléchir sur », de
métacommuniquer à propos de ce qu’il fait et de ce qu’il sait. En effet, l’élève n’a souvent pas
conscience du niveau de ses difficultés. Il sait qu’il a un problème, mais ne sait pas le situer.
L’enseignant doit donc essayer de l’informer sur ce niveau afin qu’il sache sur quoi et
comment réagir, quels sont ses acquis, quels sont les objectifs à atteindre. Ce constat permet
également de voir ce que l’enseignant peut faire pour aider l’élève et ce qui relève d’une autre
aide (logopédiste, psychologue, etc.). Ainsi, souligner ce qui ne va pas, permet de mieux
mettre en évidence le plan d’action pour y remédier.
Une autre intervention propose de diminuer l’aide afin de rendre l’élève plus responsable et
autonome. En effet, tout apprentissage implique une participation active de l’apprenant afin
qu’il puisse découvrir et utiliser tout son potentiel. A cause d’une aide trop accrue l’étudiant
pourrait devenir dépendant et passif face à sa situation d’échec. Il est donc essentiel de faire
en sorte de le rendre le plus autonome possible en ne l’aidant pas trop. Cette diminution de
l’aide doit être explicite sans quoi l’élève pourrait de sentir abandonner. L’enseignant doit
donc prendre position sur ses attentes et exigences, mais sans s’impliquer dans une relation
d’aide trop accrue qui peut être néfaste pour les deux.
Troisièmement, Curonici & all. proposent d’augmenter les attentes et les exigences de
l’enseignant. Ainsi, sur la base d’un bilan de ce que l’élève sait déjà et sur quoi il doit
s’améliorer, l’enseignant essaie de redonner confiance à l’élève. Pour ce faire, l’enseignant et
l’élève doivent préciser des objectifs explicites à court terme avec des évaluations. Ainsi,
l’enseignant peut évaluer la progression ou pas de l’élève et le rendre responsable de son
changement. Quant à l’étudiant, il peut également se rendre compte de sa progression et que
le professeur est là pour l’aider.
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Quatrièmement, il est aussi utile de prévenir les parents, à ce stade, de ce qui se met en place.
En effet, il existe souvent des dysfonctionnements similaires dans un système différent. Les
parents pourraient être pris dans une interaction complémentaire dysfonctionnelle avec leur
enfant et croire que le professeur abandonne leur enfant. Dans ce cas, il est important de créer
un espace de discussion autour de la recherche de solutions dans le but de se partager les
tâches basées sur les compétences de chacun pour résoudre le problème.
L’enseignant doit donc se repositionner dans sa pratique, en redéfinissant son cadre de travail
et les moyens nécessaires pour résoudre les problèmes identifiés. Il doit également réaffirmer
son rôle qui est d’enseigner et celui de l’élève qui est d’apprendre.
Ainsi, cet exemple révèle la nécessité d’accompagner les élèves qui présentent des difficultés
d’apprentissage, met en évidence l’importance d’agir de façon systémique et concertée. Tous
les intervenants sont conviés à travailler à la mise en œuvre d’actions concrètes pour soutenir
les élèves qui ont ou qui sont susceptibles d’avoir des difficultés d’apprentissage. C’est en
agissant de concert qu’ils pourront réussir à établir des zones de convergence et à mener des
actions mieux ciblées.
4. Conclusion
Dans ce travail, les difficultés et l’échec scolaires ne résultent pas uniquement de l’élève, mais
également de l’école, de l’enseignant, de l’environnement ainsi que de celui-ci.
Durant des années, les difficultés d’apprentissage n’ont été attribuées qu’aux élèves. Cette
vision ne permettait pas de considérer d’autres facteurs pouvant influés sur ces différentes
problématiques. Cependant, l’approche systémique, en se focalisant sur les interactions et ses
dynamiques, permet d’avoir d’autres pistes et d’envisager plusieurs solutions. Ainsi, à travers
l’étude des dynamiques des échanges en contexte, elle permet de saisir plus nettement la
problématique des difficultés d’apprentissage et de l’échec scolaire dans des systèmes
complexes.
A travers ce mémoire, j’ai essayé de mettre en évidence comment la systémique fonctionne et
quelle démarche elle utilise pour comprendre et aider les élèves en difficultés. Il a été énoncé
que les pratiques enseignantes sont bien au cœur des solutions à apporter aux difficultés et à
l’échec scolaires. L’essentiel n’est pas de relever un problème, mais de pousser les différents
intervenants à s’intéresser aux interactions dysfonctionnelles qui contribuent à maintenir cet
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équilibre et à mieux exploiter les ressources de chacun. Toutefois, il faut d’abord que chacun
reconnaisse qu’il fait partie intégrante de la problématique afin de la résoudre.
Il importe donc de prêter une attention particulière, d’une part, à la manière dont les
professeurs s’investissent pour appréhender l’élève en grande difficulté dans sa globalité,
ajuster l’enseignement sans baisser le niveau d’exigences, rendre confiance, motiver, établir
un dialogue avec les familles et d’autre part, à ce qu’ils suggèrent pour aménager la classe,
diversifier les apprentissages, évaluer différemment, etc.
L’approche systémique, en portant son regard de façon privilégiée sur les interactions et les
dynamiques d’interactions, permet donc d’approfondir les dynamiques des relations
pédagogiques, en se saisissant peut-être plus nettement de la problématique des difficultés et
de l’échec scolaires. Elle peut être un instrument efficace d’analyse d’une situation
pédagogique problématique et permettre de dégager les différents éléments d’une situation
complexe, de les situer par rapport à l’ensemble et, par conséquent, de préparer une
intervention efficace afin de remédier à des problèmes d’apprentissage et d’échec.
Pour ce mémoire, j’aurai souhaité mettre en relation le point de vue systémique face aux
difficultés scolaires et ma pratique en tant qu’enseignante. Malheureusement, pendant la
courte durée de mon stage, je n’ai pas eu l’opportunité, ni le temps, de pouvoir analyser des
élèves en réelles difficultés d’apprentissage. Cependant, de part la pertinence des points mis
en avant, je suis persuadée que ce travail pourra me permettre d’avoir de bonnes pistes
d’intervention dans ma carrière d’enseignante face aux élèves en difficultés scolaires.
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5. Bibliographie
CURONICI, C., JOLIAT, F. & McCULLOCH, P. (2006). Des difficultés scolaires aux
ressources de l’école : un modèle de consultation systémique pour psychologues et
enseignants. Bruxelles : De Boeck.
EVEQUOZ, G. (1987). Le contexte scolaire et ses otages, vers une approche systémique des
difficultés scolaires. Paris : ESF.
POHLMANN, C. (2011). Aider l'élève en difficulté d'apprentissage : Guide pratique pour les
parents et les enseignants. Montréal : Chenelière Education.
SELVINI, PALAZZOLI, M. & ALL. (1980). Le magicien sans magie ou comment changer la
condition paradoxale du psychologue dans l'école. Paris: ESF.
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TOUPIOL, G. (2004). Comprendre et aider les enfants en difficultés scolaires. Paris : Retz.
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