7 Dernieres Paroles HAYDN
7 Dernieres Paroles HAYDN
7 Dernieres Paroles HAYDN
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Préface et première page de la première édition (1801) des Sept Dernières Paroles
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Les Sept Dernières Paroles du Christ en Croix
Drama Per Musica
Introduction générale
A la troisième heure du Jour, soit neuf heures du matin, Jésus fut mis
en croix. Il expira durant la neuvième heure, soit à trois heures de
l’après-midi. Durant ces six heures de souffrance et d’agonie, le
Christ, selon le récit que nous en rapportent les Evangiles,
parla sept fois. Nous ne reviendrons pas ici – nul n’est notre propos –
sur le sens des heures susmentionnées. Ayons simplement à l’esprit –
qu’à l’image de la Bible in extenso, ils sont Symboles. Mutatis
mutandis les dernières paroles terrestres du Fils ont donc été choisies
avec un soin immense et la force de leur message est de facto
considérable. Le Verbe, en s’exprimant une dernière fois, nous livre un
fantastique concentré de toute la doctrine chrétienne qui n’est autre
que le testament spirituel du Sauveur.
1. Précision importante, nulle indication de tempo n’est écrite pour la composition de
terremoto final exprimant autant le regard humain porté sur le passage
de la mort que la toute-puissance divine.
2. Ré mineur étant la tonalité des Requiem par excellence.
3. En prenant en compte le nombre de notes différentes.
Un dernier point est remarquable quant à ces deux premières
mesures. De quatre temps, elles donnent l’illusion de n’en faire que
trois, le quatrième étant dévolu au silence4.
Autrement dit, notre oreille ne saurait déceler parfaitement s’il s’agit
d’un Tempus Imperfectum ou Perfectum5. Nous est évoqué ici l’union
du Ternaire au Binaire ou plutôt – et de façon saisissante – la
quadrature du Cercle6.
Plan du mouvement
A1 – A2 – A3 – A4 + Pont + A’1 – A’3 – A’4 + Coda
7. Si la dimension aquatique est ressentie par le biais de l’ostinato de croches, ce
premier thème est l’image du Christ et des chrétiens dont le Poisson est le symbole.
8. Citons, pour exemple, les kyrie des Missa Sancti Nicolai ou Sancti Joanni de Deo.
Les kyrie des Messes « en temps de guerre » sont traités, quant à eux, de manière
plus tragique, eu égard à la thématique même des œuvres (Missa in Angustiis ou
Missa in Tempore Belli).
A4 [le feu] : Complémentaire de la seconde idée, la
quatrième partie évoque les tourments de l’Âme et la
Force du destin. Débutant par une marche funèbre
chromatique, le Père éclatant apparaît soudain, en
majesté, dans la tonalité, rare, de Ré b Majeur.
Plan du mouvement
A (Do mineur)
B1 – B2 (Mi b Majeur)
A’ (Fa mineur modulant)
B’1 – B’2 (Do Majeur)
9. Haydn choisit d’employer, une nouvelle fois, une écriture musicale en trois strates,
trois couches sonores superposées, référence au ternaire. La basse, lourde en
ostinato [le Père / la Terre] s’oppose à la mélodie claire [le Fils / l’eau], la voix (et la
voie) intermédiaire [l’Esprit-Saint / l’air] étant le lien.
10. Ce motif, que nous pourrions qualifier du « Saint-Esprit », est clairement visible aux
mesures 40 à 47 et 98 à 102.
de double-croches nouent – en réalité – les deux thèmes
ensemble, suggérant l’union des deux natures du larron.
Cette union étant amorcée, la conversion du larron peut avoir lieu. Elle
nous est symboliquement figurée aux mesures 48, 49 et 50 :
comprenant chacune, dans un ternaire parfait, trois accords plaqués.
L’enchaînement harmonique y est surprenant :
Rappelons que la Vierge Marie est, en réalité, bien plus que la mère du
Christ, elle est la mère de l’Eglise et de toute l’humanité. Au jour de
l’Annonciation, Marie ne devint pas seulement la mère du Fils unique
de Dieu, mais -par le fait même- la mère de tous les enfants adoptifs
de Dieu. Jean, quant à lui, représente l’ensemble des chrétiens, les
Pères de l’Eglise ayant vu en lui l’Eglise toute entière. Nous pouvons
en tirer un double enseignement : la nécessité et même l’évidence de
la dévotion mariale, ainsi que l’assurance que tous les hommes
peuvent rejoindre, dans leur cœur, l’Eglise.
La tendresse du cœur du Seigneur se manifeste à cet instant précis,
sur la croix, avec une plénitude de douceur ineffable, Jésus confiant
Marie à son disciple Jean. L’onctuosité du thème principal et la
délicate caresse des notes pourraient tout aussi bien s’appliquer à
Marie qu’à la juvénilité́ de Jean ; une certaine grâce mozartienne et un
flot d’amour émanant de cette sublime page musicale.
Celle-ci se situe donc sur un tout autre plan que les numéros
précédents. Pour commencer, la tonalité, première en dièse depuis le
début de l’œuvre, le Mi Majeur de l’Amour répandant ici ses effusions,
dans une dimension qui n’est plus de l’ordre de la transcendance.
Haydn crée, ou entre-ouvre, une véritable et sincère brèche
d’Humanité, avec une haute conscience, car il s’agit bien du dernier
instant où cela est encore possible, avant que « tout ne soit
consommé ». S’ajoutent les jeux d’écho et de clair-obscur musicaux
qui nous évoquent presque un marivaudage, sorti tout droit des
Noces de Figaro, une dernière touche de fraîcheur, en quelque sorte.
Cet éloignement du Ternaire – et de facto de la dimension verticale –
se ressent jusque dans la structure même de ce mouvement, qui n’est
plus de forme sonate. Bien au contraire, les deux thèmes principaux
s’égrainent et s’épanchent paisiblement, entrecoupés de délicieux
commentaires et divertissements.
Plan du mouvement
11. Nous pouvons justement nous interroger sur l’existence de ces deux mesures.
Plaquer trois accords de Mi Majeur au début d’un mouvement n’a – rationnellement –
aucune raison d’être musicale, aucun intérêt, si ce n’est d’affirmer la tonalité. Or,
aucune contingence ne nécessite – à cet endroit – cette affirmation. Si Haydn, à la
manière de Mozart, décide donc de noter ces trois accords, c’est qu’ils recèlent un
message d’importance. Ne symboliseraient-ils pas, tout simplement, les trois êtres qui
comptèrent le plus pour le Christ, à savoir : la Vierge, Marie-Madeleine et Jean ?
Le matériel thématique de ce mouvement est intrinsèquement original.
A la différence des autres numéros, nous observons – ici – comme
une désagrégation mélodique, ou du moins une nonchalance peu
coutumière. Le premier thème résonne ainsi – avec sa désinence
prononcée sur le deuxième temps et ses silences – comme un appel
mélancolique du Christ. Le second thème, fort de ses rythmes pointés
et de ses chromatismes lui répond, certes avec rondeur et moelleux
mais complété d’un sentiment de déchirement inéluctable.
Une sensation trouble nous envahit alors, à l’écoute de ce
mouvement, comme si Haydn avait peint à la perfection l’Amour du
Christ mêlé, déjà, des quelques gouttes du sang et de l’eau de sa
future crucifixion.
Les trois premières paroles de Jésus ont manifesté la clarté infinie qui
brille au cœur de sa souffrance : il s'élève au-dessus de ses tortures, il
semble les oublier, il n'est soucieux que d'implorer le pardon pour qui
le brutalise, de promettre le paradis au brigand, de donner sa Mère au
disciple. A contrario, les deux paroles qui suivent sont de véritables
cris, des plaintes qui montent vers le Ciel et expriment la profonde
intensité de sa douleur.
Plan du mouvement
[A] – [A’]
Division de la partie
1 – 36 – 63 – 93 // 15 – 51 – 79 – 112
Plan du mouvement
[A] – [A’]
chaque partie se divisant en 6 phrases, séparées d’un pont (6 / 1 / 6)
12. Dans un mouvement chromatique douloureux.
premier thème. La suite ne sera que lutte entre vie et mort, joie et
tristesse, image du dualisme, de la dichotomie même de ce moment
précis où tout bascule.
13. Pessah : le passage
sur la croix. Ceci rend Dieu accessible, car il est le chemin, la Vérité et
la Vie. L'œuvre de grâce est faite : tout est accompli.
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