Livre Blanc Gazeification Hydrothermale

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L I V R E B L A N C

GAZÉIFICATION HYDROTHERMALE
LIVRE BLANC
Remerciements
De sincères et chaleureux remerciements aux membres du Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale
ayant participé à la révision du présent document, leurs apports furent précieux pour faire de ce livre
blanc un document de référence sur la Gazéification Hydrothermale !

Auteurs Robert Muhlke (GRTgaz)


Jean-Baptiste Castaing (Cerema)
Mathieu Morel (Sia Partners)
Violette Donat (Yélé Consulting)

Contributeurs Leroux&Lotz Technologies


VINCI Environnement
TreaTech
CEA
AFRY
VEOLIA
SUEZ
Mise en page Jean-Baptiste Castaing (Cerema)

Impression REPROGRAPHIE TALLOT


GAZÉIFICATION
HYDROTHERMALE
LIVRE BLANC
Groupe de Travail National Gazéification Hydrothermale

Janvier 2023
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E

Préambule

Ce livre blanc a été élaboré par le Groupe de Travail national Gazéification Hydrothermale dans l’objectif
de présenter
• les principaux caractéristiques et atouts de ce nouveau procédé innovant de traitement et de valo-
risation des déchets organiques,
• un état de l’art des avancées technologiques de la Gazéification Hydrothermale pour son
industrialisation,
• les gisements adressables à la technologie et son potentiel de production de gaz injectable dans le
réseau,
• les enjeux environnementaux et économiques associés.

In fine, ce document a pour vocation d’apporter la base de connaissances nécessaire à l’État français,
aux institutions, porteurs de projets, collectivités territoriales et locales, bureaux d’étude et de conseils
et à l’ensemble des autres parties prenantes impactées par les enjeux d’énergie, de déchets, de décar-
bonation et de développement durable. L’objectif est de réussir à bâtir un cadre de soutien adapté à
l’émergence de cette nouvelle filière en France, à l’image d’autres filières de production de gaz renouve-
lable et bas-carbone existantes.

Contexte d’écriture du Livre Blanc


Face à l’urgence climatique et à l’impérieuse nécessité d’opérer une transition écologique et éner-
gétique dans les territoires, la France doit aujourd’hui renforcer sa souveraineté énergétique tout en
conciliant respect de l’environnement, développement économique et limitation maximale du chan-
gement climatique. Aussi, le pays doit prendre en compte l’ensemble de ses possibilités de production
d’énergies renouvelables pour développer un mix énergétique équilibré et durable tout en limitant
les investissements pour les acteurs économiques. La place des gaz renouvelable et bas-carbone dans
ce mix est encore incertaine alors que ce vecteur énergétique peut être un moyen rapide à mettre en
œuvre, efficace et économique permettant de répondre aux besoins des territoires dans leurs efforts
de transition, tant sur le plan des politiques énergétique, écologique, agroalimentaire que celui d’une
meilleure valorisation des déchets.

Une telle démarche nécessite de disposer de solutions adaptées et rapidement déployables. Les récentes
avancées techniques et scientifiques rendent possibles à court terme de mettre à disposition des terri-
toires et des industriels de nouveaux outils permettant de répondre efficacement aux enjeux nationaux.
Ainsi, la Gazéification Hydrothermale apparait comme étant une des technologies les plus efficaces pour
la valorisation de nombreux déchets organiques et la production de gaz renouvelable et bas-carbone
tout en permettant la destruction des micropolluants, la valorisation de minéraux d’intérêt agricole, de
métaux et la préservation de la ressource eau. Les premières études indiquent également un poten-
tiel important de la Gazéification Hydrothermale en lien avec les nombreuses externalités positives
attendues et son intégration facilitée dans des boucles d’économie circulaire. Par ailleurs, du fait de ses
capacités en matière de dépollution et de maîtrise des flux sortants, la technologie permet de garantir
un maximum de sécurité sur les plans sanitaires et environnementaux.

Posant une première pierre pour structurer et aider le développement de la filière en France, ce premier
livre blanc a été élaboré pour permettre de partager avec les pouvoirs publics, collectivités locales et
territoriales, industriels, agriculteurs et l’ensemble des acteurs des domaines de l’énergie, des déchets
et du traitement d’eau, les connaissances élémentaires nécessaires pour appréhender au mieux la
Gazéification Hydrothermale dans son ensemble.

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Présentation du Groupe de Travail

Le Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale, auteur de ce livre, a été créé en mars 2021. Fin 2022,
il constitue avec une cinquantaine d’acteurs publics et privés la filière française en couvrant toute la
chaîne de valeur de la technologie. Son objectif est de développer, structurer cette filière innovante et
de faciliter son implantation industrielle dans le paysage énergétique français. Dans cette optique, deux
premiers industriels français, Leroux et Lotz Technologies et VINCI Environnement, se sont positionnés
fin 2021 pour porter la technologie de Gazéification Hydrothermale et accompagner son industrialisa-
tion dans les territoires français puis à l’étranger.

Objectifs du Livre Blanc


Les objectifs centraux de ce livre blanc sont :
• d'intégrer la Gazéification Hydrothermale au sein de la Stratégie Française Énergie Climat (SNBC,
PPE), aidant les pouvoirs publics à établir une base réglementaire propice au développement indus-
triel de la Gazéification Hydrothermale en France ;
• d'appuyer la mise en place par les pouvoirs publics d’un environnement économique (mécanismes
de soutien) facilitant l’émergence de la filière et le développement de premiers projets industriels
dès 2026 ;
• de mettre en lumière une technologie de traitement et surtout de valorisation de déchets orga-
niques contenant ou étant mélangeables à de l’eau en :
→ gaz renouvelable et bas-carbone injectables dans le réseau ;
→ nombreux co-produits (minéraux, métaux, azote et eau) qui sont récupérés et ainsi préservés
comme ressources pouvant être amenés à une nouvelle valorisation au sein des territoires ;
• de souligner le rôle de la Gazéification Hydrothermale dans la transition énergétique et écologique
tout en renforçant l’autonomie énergétique et la préservation des ressources dans les territoires ;
• de mettre en exergue les externalités positives de la technologie, notamment environnementales
(dépollution, décarbonation…) ayant le potentiel de générer à terme des effets macro- et micro-éco-
nomiques substantiels ;
• d'acculturer et faire connaître la technologie aux gestionnaires de déchets urbains, agricoles et
industriels, porteurs de projets et scientifiques afin que la Gazéification Hydrothermale soit sys-
tématiquement prise en compte dans leurs choix possibles pour améliorer la valorisation de leurs
déchets.

Qu’est-ce que la Gazéification Hydrothermlale ?

Vidéo pédagogique sur la


Gazéification Hydrothermale
a www.youtube.com
tapez Gazéification hydrothermale (version française)
ou hydrothermal gasification (version anglaise)

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Résumé exécutif

L
e présent document est le résultat d’un travail collectif impulsé par le Groupe de Travail national
« Gazéification Hydrothermale » (GT Gazéification Hydrothermale) visant la mise en place d’une
filière industrielle française pour la technologie à horizon 2025. Il propose des orientations straté-
giques de filière en termes techniques, économique, et environnementaux tout en fédérant un ensemble
de collectivités territoriales, d’industriels et d’agriculteurs français s’y rattachant : gestion et traitement
des déchets organiques et d’eaux usées, filières de production industrielle (agroalimentaire, manufactu-
rière, production d’énergie, production de fertilisants…) et agricole.

Ce groupe de travail national a été officiellement lancé en mars 2021 lors du salon Bio360 à Nantes,
donnant à cette solution technologique un rayonnement important au sein des filières de production de
gaz renouvelable et bas-carbone et des filières du traitement et de la valorisation des déchets. Démarré
à 27 membres, le collectif d’acteurs composant le groupe de travail – réunissant fin 2022 presque 50
membres – cherche à faire émerger et industrialiser la Gazéification Hydrothermale en France. Il couvre
aujourd’hui une majeure partie de la chaîne de valeur et comprend : des développeurs de la technolo-
gies, des producteurs de gaz renouvelable et bas-carbone des sociétés de traitements et de valorisation
de déchets, des utilisateurs, des équipementiers, des associations professionnelles, des industriels, des
bureaux d’études et de conseil, des gestionnaires de réseaux de gaz, des laboratoires de recherche et
des collectivités locales.

Vous trouverez la liste des membres ci-après (décembre 2022) : GRTgaz, GRDF, AFG, AFRY, AMORCE,
Agence de l’Eau Loire-Bretagne, Arol Energy, Artelia Industrie, Bioeconomy For Change, BiogazVallée,
Cerema Ouest, Clever Values, CARENE (Agglomération de Saint-Nazaire), Chambre d’Agriculture Pays
de la Loire, CEA Liten, Engie Lab, DG Skid, Gazfio, IMT Mines Albi, Inéris, Inovertis, Khimod, Leroux&Lotz
Technologies, Naldeo, Naskeo, Nevezus, N01zet, Prodeval, GreenMac, Banzo, GreenConsult, S3D, Saur, Suez,
SIEL (Territoire d’Energie Loire), SETEC, SER, Sofresid, Tereos, Tenerrdis, Top Industrie, TreaTech, Voltigital,
Veolia, VINCI Environnement, Yélé Consulting.

L’objectif de ce collectif d’acteurs est d’accompagner la structuration industrielle de la filière à l’échelle


française d’ici 2025 en la portant également, en collaboration avec des acteurs étrangers, au niveau
européen. Plus largement le Groupe de Travail se mobilise pour contribuer aux objectifs de la transition
énergétique, de la transition écologique et de l’économie circulaire.

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Executive summary

T
his document is the result of a collective work initiated by the National Working Group “Hydrothermal
Gasification” aimed at setting up a French industrial sector by 2025. It puts forward strategic
directions for this sector in regards to economic, technical and environmental aspects by bringing
together a group of local authorities, industries and French agricultural producers. Its activities consist
of waste and wastewater management and treatment companies, industrial production sectors (food
industry, manufacturing, energy production, fertilizer industry, etc.) and the agricultural sector.

It was officially launched in March 2021 during the Bio360 conference in Nantes, giving this techni-
cal solution a significant influence in the domain of renewable and low-carbon gas production, waste
treatment and recovery. From 27 members to over 50 members since 2022, the collective of actors com-
posing the working group supports the emergence and industrialization of Hydrothermal Gasification.
Today, it covers a most of the value chain : developers, producers of renewable and low-carbon gases,
waste treatment and recovery companies, users, equipment manufacturers, associations, industrial
actors, engineering consultancies, gas network managers, research laboratories and local authorities.

The list of members is as follows (updated on september 30, 2022): GRTgaz, GRDF, AFG, AFRY, CEA
Liten, Engie Lab, AMORCE, Agence de l’Eau Loire-Bretagne, Artelia Industrie, Bioeconomy For Change,
Cerema Ouest, Clever Values, Inéris, CARENE (Agglomération de Saint-Nazaire), Chambre d’Agriculture
Pays de la Loire, DG Skid, Gazfio, Leroux&Lotz Technologies, IMT Mines Albi, Inovertis, Khimod, Naldeo,
Naskeo, Nevezus, N01zet, Prodeval, Arol Energy, GreenMac, Banzo, GreenConsult, S3D, Saur, Suez, SIEL
(Territoire d’Energie Loire), SER, Sofresid, Tereos, Tenerrdis, Top Industrie, TreaTech, Voltigital, Veolia, VINCI
Environnement, Yélé Consulting.

The main goal of this working group is to support the organisation of the sector on a national level by
2025, and growing it to a European level with the collaboration of foreign actors. In general, the wor-
king group aims to contribute to the objectives of the energetic transition, the ecological transition and
the circular economy.

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SOMMAIRE

01
GAZÉIFICATION HYDROTHERMALE : GÉNÉRALITÉS ET
CONTEXTE
1.1 Une technologie de traitement et de valorisation de déchets
produisant des gaz renouvelable et bas-carbone 19
1.2 Contexte et enjeux environnementaux et énergétiques 24
1.3 L’état de développement de la technologie en Europe 25
1.4 État de développement de la filière Gazéification
Hydrothermale française 26

02
PRÉSENTATION DE LA GAZÉIFICATION HYDROTHERMALE
2.1 Introduction à la technologie 31
2.2 Le prétraitement des intrants 33
2.3 Mise sous pression de l’intrant et montée en température 33
2.4 Le séparateur de sels 34
2.5 Les deux grandes familles du procédé de Gazéification
Hydrothermale 35
2.6 La séparation des flux gazeux, liquides et de l’azote en aval du
gazéifieur 38
2.7 Les avantages de la Gazéification Hydrothermale 40

03
POTENTIEL DE PRODUCTION DE GAZ RENOUVELABLE ET
BAS-CARBONE
3.1 La Gazéification Hydrothermale, une solution de valorisation
pour certains déchets 45
3.2 Un potentiel de production de gaz renouvelable et
bas-carbone d’au moins 63 TWh en 2050 47

04
MATURITÉ DE LA TECHNOLOGIE ET PANORAMA DES
PROJETS EUROPÉENS
4.1 Les développeurs de la technologie Gazéification
Hydrothermale en Europe 53
4.2 Les développeurs européens (hors France) 53
4.3 Les développeurs privés 58
4.4 Les développeurs français 60
4.5 Les principaux défis spécifiques à relever pour réussir
le passage à l’échelle industrielle 63

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SOMMAIRE

05
UNE TECHNOLOGIE AU CŒUR DE L’ÉCONOMIE
CIRCULAIRE
5.1 Un modèle d’économie circulaire au profit des territoires 69
5.2 Des voies de valorisation intéressantes aux impacts positifs 73

06
MODÈLE D’AFFAIRE
DE LA TECHNOLOGIE ET POTENTIEL ÉCONOMIQUE
6.1 Évaluation des coûts CAPEX et OPEX de la technologie 80
6.2 Un modèle d’affaire évolutif dans le temps 84
6.3 Avec des perspectives de développement dynamiques 88

07
CONCLUSION & PERSPECTIVES

LISTE DES FIGURES P.97

LISTE DES TABLEAUX P.98

RÉFÉRENCES P.99

LISTE DES ABRÉVIATIONS P.101

15
16
01
GAZÉIFICATION
HYDROTHERMALE :
GÉNÉRALITÉS ET CONTEXTE

1.1 Une technologie de traitement et de valorisation de déchets produisant


des gaz renouvelable et bas-carbone 19
1.1.1 Principe général 19
1.1.2 La Gazéification Hydrothermale : traiter et valoriser au mieux les déchets 20
1.1.3 Positionnement de la Gazéification Hydrothermale face aux autres filières de production de gaz 21
1.1.4 Une technologie ancrée dans l’économie circulaire 22

1.2 Contexte et enjeux environnementaux et énergétiques 24


1.2.1 Lutte contre le changement climatique et développement de l’économie circulaire 24
1.2.2 La production de gaz renouvelable et bas-carbone 24

1.3 L’état de développement de la technologie en Europe 25

1.4 État de développement de la filière Gazéification Hydrothermale française 26


1.4.1 La Gazéification Hydrothermale en France 26
1.4.2 Des premières initiatives concrètes de la filière… 27
1.4.3 … à compléter avec un cadre de soutien fort de la part des pouvoirs publics 27

17
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ga z é i f i cat i o n h y d rot h e r m a l e : g é n é r a l i t é s e t c o n t e x t e

1.1 Une technologie de traitement et de


valorisation de déchets produisant des gaz
renouvelable et bas-carbone
1.1.1 Principe général

L
a Gazéification Hydrothermale est un pro- • Nombreux déchets et effluents des industries
cédé de conversion thermochimique à agroalimentaires ;
haute pression (210 à 350 bar) et à haute
• Boues issues de stations d’épuration d’eaux
température (360 à 700 °C) s’adressant tout par-
usées urbaines et industrielles ;
ticulièrement aux déchets organiques contenant
ou étant mélangeables à de l’eau. Cette dernière • Boues de dragage et curage ;
est le réactif indispensable pour créer les condi- • Nombreux déchets organiques et effluents
tions opératoires spécifiques et nécessaires à la urbains issus de déchets ménagers (fraction
technologie. Elles permettent autant, en base, la organique), d’activités tertiaires (restauration…)
production de gaz (méthane et dihydrogène) que et des biodéchets ;
la destruction de polluants et pathogènes (virus,
bactéries, organismes pathogènes, résidus médica- • Les digestats issus d’installations de méthani-
menteux, etc.) tout en préservant la ressource eau sation en cas de contraintes d’épandage.
et les composants minéraux valorisables (métaux, Mais aussi bon nombre de déchets d’origine fos-
phosphore, azote, etc.) contenus dans l’intrant et sile (tels que les plastiques plus ou moins souillés,
en limitant les déchets ultimes (exemple de cer- les solvants, huiles, déchets d’industries chimiques
tains métaux lourds) au strict minimum. et pétrochimiques…) et dont certains peuvent être
solides et secs, souvent issus d’activités indus-
Parmi les déchets organiques visés, la Gazéification trielles, non recyclés ou recyclables en l’état et
Hydrothermale cible tout d’abord ceux d’origine finissant de ce fait dans des installations d’inci-
biogénique (certains pouvant être mélangés ou nération, avec ou sans valorisation d’énergie, voire
pollués à des déchets d’origine fossilea), contenant en enfouissement ou même en décharge avec les
en base de l’eau comme de : risques de pollution (air, sol, eau) associés.

• Nombreux déchets et effluents agricoles dont


les effluents d’élevages ;

a
Exemple : emballages de plastique ou d’autres déchets chimiques d’origine fossile ou d’hydrocarbures

Séparateurs de sels Séparation Épuration ou


Entrée : déchets (minéraux et métaux) gaz / liquide méthanation
organiques ≥ 360 °C
plus ou moins
humides

Pompe haute
pression 210 à 350 bar
Gazéifieur
360 à 700 °C Méthane de synthèse
(avec catalyse ou à
haute température)

210 à 350 bar


Mobilité Injection au Auto-
(station GNV) réseau gaz consommation

Figure 1 : Schéma de procédé simplifié de la Gazéification Hydrothermale (Source : GRTgaz/Cerema).

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1.1.2 La Gazéification Hydrothermale : traiter et valoriser au mieux


les déchets
Dans le respect de la hiérarchie des modes de trai- carbone par la formation de co-produits à des fins
tement et valorisation des déchets, la Gazéification de valorisation énergétique (biométhane, dihy-
Hydrothermale vise les déchets organiques, drogène) et de récupération et revalorisation des
humides voire secs non recyclables, non valori- matières (eau, azote, minéraux, métaux) contenus
sables et/ou pollués orientés aujourd’hui vers une dans l’intrant.
destruction par de l’incinération ou via un institut
de stockage des déchets. La figure suivante présente le positionnement de
la Gazéification Hydrothermale pour le traitement
La Gazéification Hydrothermale permet la conver- des déchets organiques, principalement humides :
sion thermochimique de la quasi-totalité du

Déchets organiques ± humides*


Recyclables Non recyclables Non valorisables

Valorisation matière Alternative à l’élimination si valorisation Incinération


matière impossible Enfouissement
Gazéification Hydrothermale

Valorisation matière locale Valorisation énergétique


(minéraux, eau, etc.) Réseau de gaz, usage local

Figure 2 : Positionnement de la Gazéification Hydrothermale pour le traitement des déchets organiques ± humides (source :
Cerema / GRTgaz). (* Déchets contenant de l’eau ou secs mais permettant un apport d’eau).

a) La Gazéification Hydrothermale évite l’incinération


Malgré leurs taux d’humidité parfois relativement • Des boues industrielles classées comme
élevés, un grand nombre de déchets organiques « dangereuses »,
sont aujourd’hui préalablement séchés, générant
• Des déchets d’animaux (toutes catégories) issus
une consommation d’énergie importante, avant
d’abattoirs dont certains doivent être traités
d’être incinérés. Cette dernière étape se réalisant
thermiquement en amont (production de farines
par des incinérateurs, avec ou sans valorisation
animales), un procédé évitable et facilement
énergétique (UIOM/UVE), ou des fours haute tem-
substituable par la Gazéification Hydrothermale
pérature (cimenteries, production de chaux…) se
tout en augmentant nettement la valorisation
trouvant en France et à l’étranger.
globale de ce groupe d’intrant,
Les bilans énergétiques globaux de ces trai- • La Fraction Fermentescibles des Ordures
tements sont au mieux nuls et sinon négatifs Ménagères (FFOM) issue du Tri Mécano
avec un coût environnemental élevé ! Certains Biologique (TMB) inapte à la valorisation en
finissent même enfouis. Parmi eux, on retrouve par compostage et au-delà en épandage car non
exemple : conforme,
• Des boues de STEU urbaines (26 % incinérée • Les déchets spéciaux provenant de différents
d’après AMORCE [1], soit 286 000 tonnes MSa/ secteurs industriels (solvants, résidus de pro-
an), duction, peinture, huile souillée, etc.) dont un
certain nombre est, au moins en partie, d’origine
fossile,

a
MS = Matière Sèche

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• Tout autre déchet humide qui ne respecte quantités limitées, à l’inverse du gaz renou-
pas les critères d’innocuité agronomique per- velable et bas-carbone qui l’est facilement
mettant un retour au sol (présence élevée dans les réseaux de gaz et ceci pendant toute
d’éléments-traces-métalliques, de micro plas- l’année ;
tiquesa, de pathogènes…).
• La combustion à très haute température
(> 1000 °C) génère des gaz très polluants
Ce recours à l’incinération (combustion) avec et toxiques nécessitant des traitements
ou sans valorisation énergétique est probléma- très onéreux pour minimiser l’impact sur
tique à plusieurs niveaux et peut être évité par la l’environnement ;
Gazéification Hydrothermale car :
• L’incinération détruit la majeure partie des res-
• L’intrant humide doit être déshydraté et séché sources contenues dans l’intrant et rend leur
en amont de sa combustion consommant donc valorisation quasi impossible.
une part non négligeable de l’énergie qu’il
apporte à la combustion [2] ; • Le coût de traitement par incinération est très
élevé, pouvant aller à plusieurs centaines d’eu-
• La valorisation de la chaleur est très variable ros par tonne.
selon la saison et elle n’est stockable qu’en

b) La Gazéification Hydrothermale évite l’enfouissement et la mise en décharge

La Gazéification Hydrothermale a la capacité de technologie pourrait également contribuer à réo-


traiter et valoriser, jusqu’à une certaine limite et rienter certains de leurs déchets et les amener à
en fonction du type de polluants, des déchets une valorisation ultime.
organiques plus ou moins pollués. Cet atout
lui permet de se positionner comme une alter- Parallèlement, ces réorientations pourraient avoir
native vertueuse pour un certain nombre de un impact positif en contribuant à baisser la quan-
déchets ultimesb finissant aujourd'hui enfouis tité de décharges sauvages et ainsi l'impact sur
en Installation de Stockage des Déchets (ISD) l'environnement.
faute de meilleures solutions. Dans le cas des
décharges, bien que condamnées à disparaitre, la

1.1.3 Positionnement de la Gazéification Hydrothermale face aux


autres filières de production de gaz
La Gazéification Hydrothermale se place comme facteur 15 à 20 par rapport à la quantité initiale)
une nouvelle voie de traitement et de valorisa- tout en produisant un gaz brut, appelé gaz de syn-
tion de nombreux déchets organiques humides ou thèse, riche en méthane et hydrogène :
mélangeables à de l’eau, en tant que solution com-
► Gazéification Hydrothermale avec catalyse : 60
plémentaire ou alternative en fonction du type de
à 70 % CH4 + 5 à 10 % H2
déchets, de leur origine biogénique ou fossile et
de leur composition (mélangé ou pas, présence de ► Gazéification Hydrothermale à haute tempéra-
polluants, de pathogènes, de micro-organismes) ture : 30 à 40 % CH4 + 25 à 50 % H2 + jusqu’à
(Tableau 1). 12 % de CxHyc

Elle se présente comme une alternative aux autres La Gazéification Hydrothermale peut également
technologies de conversion en gaz renouvelable et s’intégrer en aval des autres filières, par exemple
bas-carbone en traitant le déchet ou le mélange d’une installation :
de déchets organiques plus ou moins humides.
• de méthanisation : en sortie d’un méthaniseur,
La Gazéification Hydrothermale réduit drastique-
elle est capable de valoriser des digestats
ment la part des déchets ultimes (supérieur d’un
a
La technologie Gazéification Hydrothermale permet de convertir les microplastiques en gaz riche en méthane. Cf partie
gisements.
b
Un déchet ultime – selon la loi du 13/07/92 – est un déchet qui n’est plus susceptible d’être traité dans des conditions
techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère
polluant ou dangereux
c
CxHy = hydrocarbures plus élevés que le méthane (éthane, butane, propane) injectables dans le réseau gaz

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Tableau 1 : Positionnement de la Gazéification Hydrothermale par rapport aux filières gaz renouvelable et bas-carbone
(GRTgaz).

Maturité (2022)
Procédé de conversion/
Filières Intrants valorisés (avec injection
Spécificités
réseau gaz)
Déchets organiques
Méthanisation
fermentescibles Digestion anaérobie
(par voie humide TRL 9
(mélangeables sous condition, Conversion carbone :
ou voie sèche) Industrielle
non pollués et hygiénisés le cas moyenne (40 à 60 %)
échéant)
Conversion thermochimique à TRL 6 à 9
Déchets organiques solides
haute température En fonction du procédé
Pyrogazéification d’origine biogénique ou fossile
(850 à 1500 °C) ; Démonstrateurs industriels :
(différents procédés) (lignocellulosiques, CSR, pneus…)
Conversion carbone : élevée Projet Gaya (F),
± pollués
(> 80 %) Gobigas (S)
TRL 6/9
Électrolyse de l’eau +
Eau + Électricité renouvelable Démonstrateurs industriels :
Power-to-Méthane méthanation
(ou bas-carbone) Jupiter 1000 (F) et
(H2 + CO2 → CH4)
de nombreux projets en Europe.
TRL 5/9*
Plusieurs pilotes, un démonstra-
Déchets organiques d’origine Conversion thermochimique teur et une unité industrielle
Gazéification biogénique ou fossile conte- (210 à 350 bar + 360 à 700 °C) en Europe (voir chapitre 5).
Hydrothermale nant – ou étant mélangeables Conversion carbone : *
La 1ère installation industrielle au
à – de l’eau entre 85 et 99 % monde portée par SCW Systems
sera mise en service d’ici fin
2022.

difficilement ou pas valorisables pour des • de power-to-gaz générant de l’hydrogène :


raisons de limitation d’épandage (zone en excé- dans le gaz de synthèse issu de la gazéifica-
dent d’azote), d’ interdiction d’épandage ou de tion hydrothermale, il se trouve toujours un
compostage liée par exemple au dépassement résidu de dioxyde de carbone. En le combinant
de seuil de polluants (métaux, microplastiques) avec de l’hydrogène issu d’une électrolyse, le
autorisés (voir évolution de la réglementation). débit de méthane en sortie d’une installa-
Elle peut également éviter le besoin d’hygiéni- tion de Gazéification Hydrothermale peut être
sation pour certains déchets appliqué en amont augmenté de manière significative, jusqu’au
de la méthanisation en raison de présence double !
potentielle de pathogènes.

1.1.4 Une technologie ancrée dans l’économie circulaire


La Gazéification Hydrothermale crée de nom- d’engrais industriels conventionnels dont la
breuses synergies, bénéfices et externalités production et l’usage consomment des énergies
positives au niveau territorial dont un nombre fossiles et peuvent représenter des sources de
croissant pourrait devenir monétisable. Elle per- pollution dans les sols agricoles ;
met notamment de :
• Fournir une eau résiduelle du procédé
• Augmenter la résilience et l’autonomie éner-
Gazéification Hydrothermale, de qualité indus-
gétique des territoires via la production de gaz
trielle, contenant selon le type d’intrant traité,
renouvelable et bas-carbone facilement sto
plus ou moins d’azote (ammonium (NH4+)), pou-
ckables dans les réseaux de gaz ;
vant servir soit à :
• Fournir, après séparation et transformation par
> couvrir, sans modification, des besoins d’irri-
des procédés adaptés (certains restent encore
gation en milieu agricole ou urbain ;
à être mis au point), des produits fertilisants
(potassium, azote et phosphore). Ces der-
niers valorisables et dosables en substitution

22
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
ga z é i f i cat i o n h y d rot h e r m a l e : g é n é r a l i t é s e t c o n t e x t e

Figure 3 : Potentiel de valorisation des boues d’épuration par la Gazéification Hydrothermale (Source : GRTgaz/Cerema).

> être portée à un niveau potable, après sépa- Ces externalités ainsi que de nombreuses autres
ration de l’azote et d’éventuels besoins de seront détaillées au chapitre 5 de ce livre blanc.
filtration ultime ;
De ce fait, la Gazéification Hydrothermale apparaît
• Assurer un rôle de dépollution des intrants comme un outil d’économie circulaire de premier
par la destruction de l’ensemble des composés plan au service des territoires. La figure suivante
organiques complexes (résidus médicamenteux (Figure 3) présente un exemple de pistes de valo-
et autres micropolluants) et des microor- risation potentielles lors du traitement des boues
ganismes pathogènes ne résistant pas à la de stations d’épuration par une installation de
combinaison des conditions à haute pression et Gazéification Hydrothermale.
haute température ;
Dans cet exemple :
• Produire un résidu de CO2 de pureté minimale
► Le méthane de synthèse généré est valorisé
supérieure à 98 % pouvant servir à alimenter
par injection dans le réseau de transport ou
de nombreuses valorisations : production de
de distribution de gaz ou localement pour un
biostimulants via la production de microalgues,
usage « mobilité bioGNV décarbonée »,
transformation en carbone solide couvrant des
besoins très diversifiés et de nombreux pro- ► L’eau résiduelle est réutilisée pour l’irrigation
cédés industriels y compris agroalimentaires des champs agricoles ou de parcs au niveau
utilisant du CO2 après purification ultime ; local,
• Récupérer, séparer et revaloriser des métaux ► Les métaux (métaux rares, métaux lourds, etc.)
potentiellement présents dans les déchets trai- sont valorisés dans l’industrie en substitution
tés ayant une valeur économique importante de ressources non durables.
soit par leur quantité récupérée (fer, aluminium, ► Le phosphore, le potassium et l’azote sont
cuivre, etc.) soit par leur rareté. Ce dernier point valorisés en tant que fertilisants dans l’agri-
sera possible sous condition qu’une technologie culture destinée à l’alimentation humaine et
de séparation et de revalorisation économi- animale.
quement viable existe. Dans le cas contraire,
ces résidus pourraient être adressés à la filière
ciment.

23
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
ga z é i f i cat i o n h y d rot h e r m a l e : g é n é r a l i t é s e t c o n t e x t e

1.2 Contexte et enjeux environnementaux et


énergétiques
À la croisée des chemins du traitement, de la valorisation des déchets et de la production d’énergie, la
Gazéification Hydrothermale s’intègre pleinement dans les politiques publiques en matière d’économie
circulaire, de bioéconomie, de transition énergétique et de décarbonation des territoires.

1.2.1 Lutte contre le changement climatique et développement de


l’économie circulaire

E
n 2021, la Commission européenne confirme des consommations finales brutes d’énergie
son ambition d’atteindre la neutralité carbone (sobriété, efficacité énergétique), l’augmentation
avec la publication du paquet climat « Fit for de la part des EnR, la préservation des ressources
55 » qui fixe les objectifs de réduction d’émissions et une meilleure valorisation des déchets.
nettes de GES à 55 % en 2030 par rapport à leur
niveau de 1990 et veut faire de l’Europe le pre- La Gazéification Hydrothermale, dotée de ses très
mier continent climatiquement neutre à horizon nombreux atouts, permet d’apporter à terme une
2050 [3]. contribution non négligeable à ces lois et leurs
objectifs. En plus de ses capacités de produc-
Afin de respecter l’Accord de Paris et les politiques tion d’énergies renouvelables ou bas-carbone, la
européennes, la France dispose elle aussi d’un Gazéification Hydrothermale permet de traiter et
cadre législatif ambitieux avec les Lois « Énergie– dépolluer efficacement des déchets organiques
Climat » (2019) puis « Climat et Résilience » pouvant être mal, peu ou pas valorisés aujourd’hui
(2021) et la Loi de transition Énergétique pour la en offrant une meilleure alternative à l’inciné-
Croissance Verte (LTECV, 2015) dont l’objectif est ration et l’enfouissement, tout en favorisant une
de diminuer de 40 % les émissions de GES d’ici valorisation locale des co-produits qu’elle génère
2030 et de les diviser par quatre à horizon 2050. (eau, azote, minéraux, métaux, gaz renouvelable et
bas-carbone). La Gazéification Hydrothermale per-
Parallèlement, la Loi « AGEC (Anti-gaspillage pour met ainsi de contribuer vertueusement aux efforts
une Économie Circulaire) » de février 2020, est de lutte contre le réchauffement climatique, à la
présentée comme une priorité pour la France pour baisse des émissions de GES et du gaspillage des
permettre une croissance verte et durable, et vient ressources tout en participant activement à la
renforcer les lois précédemment citées. En effet, la transition énergétique et au renforcement de l’au-
décarbonation des territoires nécessite d’agir sur tonomie énergétique française.
l’ensemble des chaînes de valeur : la diminution

1.2.2 La production de gaz renouvelable et bas-carbone


Sur le plan énergétique, le gaz naturel repré- un levier important pour rendre possible la décar-
sente environ 15,5 % (≈ 415 TWh, corrigée des bonation des territoires.
variations climatiques) des consommations pri-
maires annuelles en France en 2021 alors que Dans le cadre de l’élaboration de la nouvelle Loi
les énergies renouvelables dont font partie les de Programmation Energie Climat (LPEC) pré-
gaz renouvelable et bas-carbone (4,3 TWh PCS vue pour 2023 et plus particulièrement de la
injecté en 2021) ne représentent que 13 % de Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) et la
ces consommations [4] . L’avenir du marché du Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE),
gaz, étant impacté de plus en plus par la forte la filière gaz (GRTgaz, GRDF, FGR, ATEE Club
volonté de réduire la dépendance liée aux éner- Biogaz, Pyrogazéification et Power-to-Gas) a émis
gies fossiles et à son impact climatique, repose une note estimant le potentiel réaliste de la capa-
sur sa capacité à parvenir à un marché 100 % gaz cité de production de méthane renouvelable à
renouvelable et bas-carbone en 2050, et devient 320 TWhPCS d’ici 2050, notamment à partir de la
méthanisation et des technologies émergentes

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telles que la pyrogazéification, la méthanationa et a minima 50 TWh par an de production de biogaz


la Gazéification Hydrothermale [5]. La seule filière (soit environ 15 % de la production globale de
Gazéification Hydrothermale permettrait d’assurer méthane renouvelable estimée en 2050).

1.3 L’état de développement de la


technologie en Europe

E
n Europe, les premiers développements de la de production d’énergie en Europe, la nouvelle
technologie ont été menés par le Karlsruhe filière Gazéification Hydrothermale devra s’ins-
Institut of Technology (KIT) en Allemagne crire dans la logique de l’écosystème français
avec un projet pilote inauguré en 2004, deve- actuel dont les orientations évoluent et ont ten-
nant la première installation préindustrielle de ce dance à s’approcher (à travers des mises à jour
type au monde. Il a fallu ensuite attendre 10 ans de directives européennes) à celles déjà en place
pour que des projets de taille équivalente voient chez nos homologues européens. Ainsi de nou-
le jour au Japon et aux États-Unis, complétés par velles contraintes réglementaires, par exemple
d’autres projets européens aux Pays-Bas, en Suisse sur le respect des niveaux de polluants acceptés
avec le Paul-Scherrer-Institut (PSI), en Espagne et pour l’épandage de boues de STEU et de digestats
en France (CEA) depuis 2014. Au niveau scienti- en sortie de méthanisation, vont finir par ouvrir
fique, le KIT et le PSI, suivis de près par le CEA, des gisements potentiels vers la Gazéification
ont permis d’établir les bases scientifiques et Hydrothermale, seule à même de pouvoir les trai-
technologiques de la Gazéification Hydrothermale ter et valoriser à l’avenir.
en Europe devenant ainsi les leaders du dévelop-
pement scientifique de la technologie au niveau Sur la question du retour au sol du carbone
mondial. Depuis 2015, différentes installations prédestinant les résidus de certaines technolo-
pilotes privées ont vu progressivement le jour à gies comme la méthanisation, la Gazéification
travers l’Europe, à un rythme plus soutenu mon- Hydrothermale doit être regardée comme alter-
trant l’intérêt du secteur pour cette technologie de native dans les situations de contraintes sur
traitement et valorisation de déchets, avec notam- l’épandage du digestat. Idem pour la question des
ment l’implication des sociétés SCW Systems voies alternatives de valorisation de matières des
ou TreaTech, représentant chacune les leaders biodéchets organiques. À ce titre, l’émergence de
de leur famille de technologie (SCW Systems : la Gazéification Hydrothermale en Suisse et aux
Gazéification Hydrothermale à haute tempéra- Pays-Bas, dans des contextes différents, mérite
ture ; TreaTech : Gazéification Hydrothermale avec d’être a minima prise en compte afin de bénéficier
catalyse) en Europe et même au niveau mondial. de leurs Retours d’Expériences (REX) nécessaires
au développement d’une filière française et euro-
Le contexte français présentant de nombreuses péenne durable.
spécificités en matière de gestion des déchets et

Le modèle Allemand
L’Allemagne a été le pionnier de la Gazéification d’autres développeurs scientifiques et industriels
Hydrothermale en Europe, avec la mise en œuvre en Europe à se positionner sur la technologie et a
de l’installation pilote VERENA du KIT en 2004. permis de nouer des collaborations scientifiques
Cette usine pilote scientifique préindustrielle fructueuses, notamment avec des acteurs de pre-
traitant jusqu’à 100 kg/h d’intrant, pouvant fonc- mier rang hollandais et suisse (collaboration
tionner à une température maximum de 700 °C avec le PSI pour tester avec succès son premier
avec des rendements gaz élevés (> 90 %), a été séparateur de sel à une taille industrielle, voir
élaborée pour traiter tout un tas de déchets en paragraphe suivant).
démarrant avec des résidus de la production de
bière, des boues de STEU, des déchets industriels,
etc. La réussite de ce premier projet a inspiré

a
Méthanation : autre nom donné par la filière gaz au « Power-to-Gas ».

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Le modèle Suisse
En Suisse, la Gazéification Hydrothermale a été mono-incinération) permet, à ce jour, de traiter
identifiée depuis ses premiers pas au début des les boues et leurs digestats et à terme de récu-
années 2000 comme une technologie promet- pérer également le phosphore contenu dans les
teuse méritant le soutien du Ministère fédérale cendres de boues. La Gazéification Hydrothermale,
de l’Energie qui cherchait une solution alter- grâce à sa capacité à précipiter les sels minéraux
native à l’incinération des boues de STEU. En (phosphore en particulier) en amont du réacteur
effet, depuis 2006, l’épandage des boues ou des (voir partie 4), devient alors une alternative cré-
digestats de boues issues de STEU est interdit, dible, y compris à titre économique (voir partie 6).
obligeant les gestionnaires à sécher et incinérer En effet par comparaison, l’incinération des boues
la totalité de ces résidus. A cette contrainte se est énergétiquement inefficace : pour des intrants
rajoutera, à partir de 2026, l’obligation de récupé- contenant une majorité d’eau a son rendement
rer le phosphore dans les boues et leurs digestats. énergétique global est nul.
Seule l’incinération (et plus particulièrement la

Pays-Bas, leader de la Gazéification Hydrothermale en Europe


Les Pays-Bas sont aujourd’hui incontestablement synthèse injecté dans le réseau : 73 à 75 €/MWhPCS,
le pays où la technologie de la Gazéification garantie sur 12 ans. Ces deux projets font déjà
Hydrothermale est la plus avancée au monde. La partie de la feuille de route « groen gas 2030 » du
société SCW Systems y démarre sa première usine pays dans laquelle la Gazéification Hydrothermale
industrielle Gazéification Hydrothermale (Alkmaar est inscrite comme le mode de production de gaz
1) d’une puissance de 20 MWthb traitant 16 t/h renouvelable privilégié :
d’intrants : le passage à l’échelle commerciale
• sa capacité de production de gaz globale est
est prévu d’ici la fin mars 2023. Pour ses deux
estimée à 11,5 TWh/an ;
premiers projets industriels d’expérimentation
(Alkmaar 1 (20 MW) et 2A (40 MW)), la filière béné- • assurant jusqu’à 57 % de la production de gaz
ficie d’un fort soutien public pour le méthane de renouvelable du pays en 2030.

1.4 État de développement de la filière


Gazéification Hydrothermale française
1.4.1 La Gazéification Hydrothermale en France

L
e développement de la technologie 50 partenaires (académiques, développeurs,
Gazéification Hydrothermale en France a gaziers…) en 2023, a pour vocation de soutenir
commencé au début des années 2010 avec le développement de la technologie. Il appuie la
des premiers travaux et publications scientifiques constitution d’une véritable filière en facilitant
d’un certain nombre d’acteurs académiques, tel la collaboration entre ses acteurs et en alimen-
que les Mines IMT d’Albi, spécialiste des technolo- tant les réflexions des pouvoirs publics visant
gies hydrothermales, l’INP de Grenoble et d’autres la mise en œuvre de mécanismes de soutien et
acteurs académiques comme le CEA Liten qui de réglementations adaptés à la technologie
dispose en 2022 du seul prototype Gazéification Gazéification Hydrothermale. Le nombre croissant
Hydrothermale (10 kg/h) en France. d’acteurs de la demande (industries, collectivités,
etc.) reflète le besoin d’un développement rapide
Le Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale de la technologie en France et sa pertinence pour
lancé officiellement en 2021, fort de presque traiter des problématiques actuelles et futures

a
Le PSI et TreaTech disposent d’une unité pilote d’une capacité de 100 kg/h (voir 4.2.2). Le séparateur de sels minéraux permet
de récupérer la quasi-totalité du phosphore. Celui-ci est ensuite peut être ensuite transformé en acide phosphorique ou fer-
tilisant (par ex. struvite).
b
MWth : Méga watt thermique.

26
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ga z é i f i cat i o n h y d rot h e r m a l e : g é n é r a l i t é s e t c o n t e x t e

(renforcement des contraintes environnementales développée et fournie par la société amé-


et climatiques). Le Groupe de Travail souhaite faire ricaine Genifuel (USA), un des pionniers
rayonner la technologie auprès des acteurs privés mondiaux de la technologie.
et publics afin que la Gazéification Hydrothermale
fasse partie du paysage énergétique, au regard de En France, plusieurs initiatives sont entreprises
ses nombreux atouts favorisant son implantation pour mettre en œuvre d’abord de premiers pro-
au cœur de l’économie circulaire. jets pilotes et démonstrateurs industriels et, à
partir de 2026, les premiers projets industriels.
Une avancée considérable a eu lieu début 2022 Le projet le plus avancé en 2022 est le projet de
avec les annonces de deux premiers industriels démonstration GHAMa à Montoir-de-Bretagne
français voulant se positionner dès à présent dans (44) qui constitue la volonté d’un groupement
le développement et la promotion de la technolo- de partenaires de s’appuyer sur la technologie en
gie Gazéification Hydrothermale : développement par Leroux et Lotz Technologies
pour créer un 1er projet de démonstration sachant
► Leroux & Lotz Technologies : technologie
traiter 2 t/h (2 MWth) de déchets dont notamment
Gazéification Hydrothermale à haute tem-
les boues de STEU de la CARENEa, l’agglomération
pérature s’appuyant sur celle initialement
de Saint-Nazaire. Sa mise en œuvre est prévue fin
développée par le KIT (D),
2024, dépendant toutefois du cadre de soutien
► VINCI Environnement : technologie public (subventions en grande partie) accessible
Gazéification Hydrothermale avec catalyse pour un tel projet dont le budget est relativement
intégrant en amont une liquéfaction hydro- conséquent (> 10 M€).
thermale se basant sur la technologie

1.4.2 Des premières initiatives concrètes de la filière…


Depuis la création du Groupe de Travail national Travail Gazéification Hydrothermale de retenir
Gazéification Hydrothermale, un travail d’identifi- la Gazéification Hydrothermale dans un avenir
cation des freins et difficultés à la mise en place proche (d’ici 2026) comme un outil crédible pour
des premiers démonstrateurs a été réalisé. Il a été répondre aux enjeux énergétiques et environne-
approfondi par un travail prospectif pour identifier mentaux actuels et futures.
les besoins d’appui nécessaires à la sortie de pre-
miers projets industriels d’ici 2026. Sur le plan purement technique, le Groupe de
Travail Gazéification Hydrothermale a permis
Dans cette perspective, le Groupe de Travail d’établir une liste non exhaustive permettant
Gazéification Hydrothermale a déposé un premier d’identifier les acteurs clés présents sur le terri-
cahier d’acteur sur la Gazéification Hydrothermale toire national capables de couvrir l’ensemble des
qui a été publié en février 2022 [6] dans le cadre équipements faisant partie de la chaîne de valeur
de la consultation du public sur la future Stratégie de la filière Gazéification Hydrothermale et de
Française sur l’Énergie et le Climat (SFEC). lever à court terme les verrous technologiques
L’objectif était d’informer les pouvoirs publics de encore existants.
la volonté des acteurs membres du Groupe de

1.4.3 … à compléter avec un cadre de soutien fort de la part des


pouvoirs publics
A l’instar des mesures de soutien déjà existantes pouvoirs publics pour se développer d’abord en
pour développer la filière méthanisation et celles France puis rebondir à l’étranger en s’appuyant sur
en discussion pour la filière Pyrogazéification, la ses premières références :
filière Gazéification Hydrothermale a également
besoin au plus vite d’un cadre de soutien écono- • Mise en place opérationnelle des contrats d’ex-
mique incitatif et réglementaire de la part des périmentation et d’autres mesures incitatives et

a
CARENE : Communauté d’Agglomération de la Région Nazairienne et de l’Estuaire

27
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ga z é i f i cat i o n h y d rot h e r m a l e : g é n é r a l i t é s e t c o n t e x t e

pérennes (injection dans le réseau gaz, garan- du Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale
ties d’origine, fiscalité, dérogation administrative estiment qu’à l’horizon 2030 un objectif d’une
facilitant sa mise en œuvre…) pour lancer et capacité de production annuelle de gaz injectable
sécuriser les premiers projets de taille indus- de 2 TWhPCS/an est tout à fait atteignable avec
trielle pour la production de biométhane ou de des mécanismes de soutien adaptés. La filière
méthane de synthèse bas-carbone utilisant la Gazéification Hydrothermale serait ainsi capable
technologie Gazéification Hydrothermale, de contribuer à l’objectif global de l’ensemble
des filières visant une production annuelle de gaz
• Définition d’un cadre réglementaire propre à la renouvelable et bas-carbone de 60 TWh/an à cet
technologie pour éviter la mise en place d’ac- même horizon. Elle participera ainsi activement à
tions injustifiées au regard du fonctionnement un meilleur traitement local d’un grand nombre
intrinsèque de la technologie (pas de combus- de déchets mal, pas, ou insuffisamment valorisés.
tion, pas d’odeurs, pas d’hygiénisation, pas de Elle contribuera égalmenent à la décarbonation
rejets atmosphériques…) et de préférence par la de nombreux secteurs d’activités, à l’autonomie
création d’une rubrique ICPE propre à la tech- énergétique du pays et de ses territoires 'et enfin à
nologie Gazéification Hydrothermale. un mix de 100 % gaz renouvelable et bas-carbone
dans les réseaux de gaz français et européens tout
Enfin, la capacité de développement des entre- en favorisant le respect d’une approche d’écono-
prises françaises investissant dans cette mie circulaire.
technologie innovante (cœur de procédé et
briques amont et aval) serait nettement améliorée
si un cadre de soutien public adapté existait (par
exemple un élargissement des prêts sans garantie
de Bpifrance). Il serait notamment nécessaire pour
faciliter le passage d’un TRL (Technology Readiness
Level) 5/6 à 8/9, une étape indispensable avant
toute industrialisation d’une nouvelle technologie.
Si des financements européens existent, il serait
pertinent de les décliner au niveau national pour
soutenir les demandes de financement, notam-
ment lors de passage de niveaux de TRL de la
technologie où le besoin de financement est rela-
tivement important (> 5 à 10 M€/entreprise). Créer
des financements déclinés à différentes échelles
(nationale, régionale, locale) faciliterait le déve-
loppement de la technologie et son implantation
au sein des territoires. Les compétiteurs étrangers
les plus avancés comme SCW Systems et TreaTech
ont pu avancer bien plus vite que d’autres dans
le développement de la technologie Gazéification
Hydrothermale. Une des raisons était la présence
des soutiens financiers appropriés venant aussi
bien du secteur public que privé. En Suisse, par
exemple, chaque entreprise peut économiser des
impôts en investissant la somme due dans le capi-
tal de startups ou d’entreprises innovantes avec
l’opportunité d’en tirer potentiellement profit à
terme.

Pour souligner le potentiel de la technologie


à court terme et disposer d’un nombre de pro-
jets Gazéification Hydrothermale suffisants pour
déclencher un 1er marché en France, les membres

28
02
PRÉSENTATION DE
LA GAZÉIFICATION
HYDROTHERMALE

2.1 Introduction à la technologie 31

2.2 Le prétraitement des intrants 33

2.3 Mise sous pression de l’intrant et montée en température 34

2.4 Le séparateur de sels 34

2.5 Les deux grandes familles du procédé de Gazéification Hydrothermale 35


2.5.1 Le procédé de Gazéification Hydrothermale à
« haute température » 35
2.5.2 Le procédé de Gazéification Hydrothermale avec catalyse 35
2.5.3 Synthèse des technologies de Gazéification Hydrothermale 36

2.6 La séparation des flux gazeux, liquides et de l’azote en aval du gazéifieur 38


2.6.1 Le séparateur gaz – liquide 38
2.6.2 Le traitement et la valorisation de la phase liquide et de l’azote 39

2.7 Les avantages de la Gazéification Hydrothermale 40

29
30
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d rot h e r m a l e

2.1 Introduction à la technologie

L
a Gazéification Hydrothermale est une tech-
nologie de conversion thermochimique
de déchets organiques en gaz de synthèse
(mélange principalement constitué de méthane
(CH4), d’hydrogène (H2) et de gaz carbonique (CO2).
Elle fait partie d’une large famille de technolo-
gies dites « hydrothermales » utilisant toutes l’eau
comme milieu réactionnel et fonctionnant sans
oxydant. Ces dernières se distinguent en fonction
du niveau de pression et température en-dessous
ou au-dessus du point critique de l’eau (374 °C,
+ 221 bar). Leur point commun est de permettre
la conversion de la partie organique issue du
déchet en différents produits valorisables. Parmi
ces technologies, la Gazéification Hydrothermale
est considérée comme la plus noble du fait des
nombreuses possibilités qu’elle peut offrir en
matière de valorisation du déchet et de produc-
tion d’énergie. Figure 4 : Diagramme de phases (pression/température) de
l’eau (Source : Cerema / GRTgaz).
Principe de fonctionnement de la
Gazéification Hydrothermale
Le principe de fonctionnement de la Gazéification effluents organiques ne contenant pas d’eau et
Hydrothermale repose sur la présence d’eau dans dont le diamètre des particules ne dépasse pas
des conditions de haute pression et de haute tem- quelques millimètres.
pérature dites « supercritiques ». Dans cet état, à
proximité et au-delà du point critique (Figure 4), La technologie permet ainsi le traitement d’une
l’eau présente une grande réactivité et permet très grande variété de déchets et effluents orga-
en particulier de craquer les molécules carbo- niques, seuls ou en mélange, qu’ils soient d’origine
nées et de précipiter les éléments inorganiques. biogénique (le plus souvent) ou fossile.
Dans la nature, de telles conditions peuvent être
réunies en grande profondeur comme dans la Plusieurs paramètres doivent être respectés pour
croûte terrestre ou dans les océans à proximité qu’un déchet organique puisse être converti par
des dorsales océaniques au niveau des cheminées gazéification hydrothermale. En effet, l’intrant doit
hydrothermales. être pompable (fluidité et granulométrie compa-
tibles avec la pompe) et suffisamment énergétique
Dans le cas de la gazéification hydrothermale, pour permettre sa transformation en gaz renouve-
l’eau est apportée par défaut à travers l’intrant lable et bas-carbone.
ou artificiellement en direct dans le réacteur de
gazéification. C’est le cas pour des déchets ou

Tableau 2 : Les technologies hydrothermales (GRTgaz).


Procédé hydrothermal Niveau de température Eau sous- ou Produit principal
(abréviation anglaise) et de pression supercritique (en sortie)
180 à 250 °C Eau
Carbonisation Hydrothermale (HTC) (Bio) char
10 à 50 bar souscritique
250 à 350 °C ; Eau (Bio) crude
Liquéfaction Hydrothermale (HTL)
40 à 220 bar souscritique (≈ pétrole brut)
360 à 700 °C ; Eau
Gazéification Hydrothermale (HTG) Gaz de synthèse / Méthane de synthèse
210 à 350 bar supercritique

31
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d r ot h e r m a l e

Les principaux paramètres sont : réactions chimiques, en particulier de l’hydro-


gène et du carbone pour en former du méthane.
• la teneur en eau : Ce paramètre est déterminé
par la mesure de la siccitéa, c’est-à-dire du taux
Le temps de séjour dans le gazéifieur (= réacteur
en matière sèche (MS). Cette teneur est très
de gazéification hydrothermale) étant assez court
variable, de 5 à plus de 85 %. Si l’intrant est trop
(quelques secondes tout au plus), la transforma-
pauvre en eau, un ajout peut être nécessaire.
tion du fluide riche en carbone et hydrogène (et
• La teneur en carbone : Mesuré par le taux de accessoirement en azote) en gaz de synthèse n’est
matière organique (MO), ce paramètre est pas complète. La recomposition des éléments
déterminant pour optimiser la production de génère ainsi :
gaz renouvelable et bas-carbone.
• d’un côté un gaz de synthèse à haute pression
(210 à 350 bar), riche en méthane et hydrogène
Ainsi, il est essentiel que la part de matière sèche
complété par du gaz carbonique et parfois des
du déchet ou du mélange de déchets contienne le
alcanes (= hydrocarbures supérieures comme
plus possible de Matière Organique (MO) et donc
l’éthane, butane et propane),
de carbone, ressource essentielle pour la trans-
formation du déchet en gaz de synthèse. Un ratio • et de l’autre côté un résidu liquide (si l’intrant
MO/MS d’au moins 40 à 50 % est généralement initial en contient) composé principalement de
recherché. l’eau riche en azote ammoniacale (NH4+).

Sous l’effet de l’augmentation de la pression Des co-produits gazeux, solides et liquides


et de la température jusqu’au point critique de en sortie
l’eau, les propriétés physico-chimiques de l’eau se
modifient fortement. Ainsi, l’eau supercritique se La composition du gaz varie en fonction des
comporte autant qu’un gaz et qu’un liquide, liant caractéristiques des déchets organiques traités,
les avantages de chacun de ces états avec une des conditions opératoires (température, pression,
forte capacité de solvatation et d’extraction (faible débit, temps de séjour et présence ou non d’un
viscosité, forte diffusivité, fort pourvoir de disso- séparateur de sels) et en particulier de la famille
lution…). De ce fait, l’eau supercritique permet la de technologie de Gazéification Hydrothermale.
dissolution et la réorganisation de très nombreux On distingue ainsi deux familles :
composés organiques et inorganiques. Bien que
• « Avec catalyse » intégré dans le gazéifieur à
très complexe, la réaction peut se résumer par des
son entrée : la présence d’un catalyseur permet
conséquences sur les :
notamment d’abaisser ou de limiter le niveau de
• composés inorganiques ou minéraux (miné- température de réaction à environ 360/400 °C
raux comme le phosphore, le potassium et les et de favoriser la production de méthane pou-
métaux) de l’intrant qui précipitent sous forme vant atteindre une part allant jusqu’à 70 % dans
de sels et se concentrent par gravité en bas du le gaz de synthèse généré [7].
réacteur où ils sont séparés du fluide initial. Le
• « À haute température » : elle fonctionne avec
séparateur de sels a été développé explicite-
des niveaux de température plus élevés se
ment pour assurer cette fonction en amont du
situant entre 550 et 700 °C. Dans ces conditions,
gazéifieur. Il permet ainsi que le gazéifieur, ins-
la composition du syngaz en sortie est nette-
tallé en aval du séparateur, ne reçoive plus que
ment plus riche en hydrogène (30 à 50 %) qui
les composés organiques et de l’eau (pouvant
peut même dépasser la part du méthane (30 à
contenir de l’azote). Les réactions chimiques
40 %) sous certaines conditions.
visés sont alors grandement facilitées.
• composés organiques de l’intrant, une fois Avec un taux de conversion du carbone toujours
séparé des composés inorganiques, se trou- très élevé, se situant entre 85 % pour des déchets
vant sous forme de molécules plus ou moins plus complexes comme les boues et presque
complexes : ils sont « craqués » dans le gazé- 100 % pour des déchets organiques plus simples
ifieur, c’est-à-dire décomposés en éléments de comme du glycérol, cette technologie permet de
plus faibles poids moléculaire (jusqu’au niveau valoriser la quasi-totalité du carbone contenu
élémentaire), pour ensuite permettre une dans l’intrant.
recombinaison de ces éléments par plusieurs

a
Siccité : Taux de Matière Sèche dans la Matière Brute (% MS/MB).

32
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d rot h e r m a l e

La composition du gaz de synthèse, générant le partie inorganique ou minérale contenue dans le


produit avec la valeur économique la plus impor- déchet. Leurs parts dans les flux sortants varient
tante en sortie du réacteur, diffère toutefois en en fonction de la nature de l’intrant générant des
fonction de la famille de la technologie et des dif- valorisations plus ou moins importantes. Ces der-
férents paramètres décrits et contient : nières concernent principalement :
• toujours une part plus ou moins riche de • les minéraux (phosphore, potassium…) et
méthane (CH4) et d’hydrogène (H2) complété de l’azote, présentant un intérêt agronomique car
gaz carbonique (CO2) pouvant être traité en aval pouvant entrer dans la composition de nou-
pour générer un méthane de synthèse injec- veaux produits fertilisants,
table dans le réseau,
• les métaux, en fonction de leur volume ou leur
• parfois aussi une part pouvant aller jusqu’à rareté, pouvant générer un intérêt économique,
12 % d’hydrocarbures de contenu énergétique
• l’eau pouvant être revalorisée en direct ou
plus élevé que le méthane issu de la famille des
après un traitement adapté (production d’eau
alcanes (CxHy) comme l’éthane, le butane ou le
potable) et
propane.
• les autres composants solides éventuels pou-
Comme vu plus haut, outre la production d’un gaz vant être orientés vers la production de ciments.
de synthèse, la Gazéification Hydrothermale per-
met également de récupérer et recycler l’eau et la

2.2 Le prétraitement des intrants


La première étape nécessaire à la Gazéification Il peut être également utile de préchauffer les
Hydrothermale est la préparation des intrants : déchets organiques visés jusqu’à 80 ou 90 °C en
elle dépend fortement du type ou de la compo- amont de la pompe haute pression : pour certains
sition de l’intrant, seul ou en mélange, et vise en intrants tels que les boues de STEU devenant très
priorité une homogénéisation de sa composition compactes à relativement faible concentration
brute pour assurer sa bonne pompabilité. Cette (dès 17 % MS/MB), l’augmentation de la tempé-
première étape permet de faciliter la séparation rature est utile pour améliorer leur pompabilité
des matières inorganiques de l’intrant et ainsi et la montée en pression par la modification de
la réaction thermochimique visée. L’objectif est la viscosité. Il est ainsi possible de concentrer et
d’obtenir une viscosité suffisante en jouant sur enrichir énergétiquement (apport de carbone plus
la siccité, la granulométrie (quelques millimètres important) encore un peu plus les boues (à 20 %
des particules tout au plus), la composition et la ou plus) sans risque de bloquer la pompe haute
température tout en maximisant le contenu éner- pression. Un autre moyen, plus économe, pour
gétique de l’intrant. améliorer la pompabilité est de mélanger certains
déchets organiques dont les propriétés se com-
Pour ce faire, on peut limiter la taille des parti- plètent : combiner par exemple des boues avec
cules de l’intrant (à quelques millimètres) dans le des graisses ou des huiles augmente autant la
système via un tamisage ou un broyage, séparer pompabilité, la siccité que le contenu énergétique
certains éléments indésirables (inertes organiques, moyen de l’ensemble.
composés corrosifs, etc.) et concentrer ou diluer la
matière organique de l’intrant pour optimiser sa
conversion en gaz.

33
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d r ot h e r m a l e

2.3 Mise sous pression de l’intrant et montée en


température
L’intrant ainsi préparé est comprimé via une dans le gazéifieur lui-même. La source thermique
pompe haute pression jusqu’à un niveau de pres- externe peut par exemple être assurée par une
sion se situant entre 210 et 350 bar, variable chaudière gaz ou biomasse ou une résistance
selon les conditions opératoires définies par le électrique et à pour rôle d’assurer le maintien
développeur. Il est ensuite (pré)chauffé jusqu’à de la température nominale du gazéifieur, située
l’atteinte des conditions supercritiques (ou entre 360 et 700 °C selon les besoins de la famille
proches). La chaleur est fournie soit par un apport de Gazéification Hydrothermale (avec catalyse ou
de chaleur externe (lors du démarrage de l’ins- à haute température).
tallation), soit par la chaleur résiduelle récupérée

2.4 Le séparateur de sels


Une bonne partie des déchets organiques pou- aval de la pompe haute pression dans le procédé
vant être convertis dans une installation de principal.
Gazéification Hydrothermale contient des com-
posés inorganiques tels que des minéraux La saumure concentrée restante, riche en miné-
(phosphore, potassium, calcium…) et parfois aussi raux et métaux, doit alors subir un ou plusieurs
des métaux. Ne participant pas aux réactions ther- traitements hors champ de l’installation de
mochimiques visées, ces composés, sous l’effet des Gazéification Hydrothermale pour être valorisée
conditions supercritiques de l’eau (§ 2.1), préci- en produits finis. Ainsi, pour sa faculté de recy-
pitent et se concentrent par gravité à la base du clage des métaux, la Gazéification Hydrothermale
réacteur de gazéification. est également utilisée en laboratoire pour le recy-
clage des cartes électroniques (projet REMETOX,
Afin de faciliter cette séparation des sels, différents CNRS).
développeurs de la technologie (KIT, PSI, TreaTech,
etc.) ont travaillé sur le concept d’un appareil dis- Dans le cas de certains minéraux, leur récupé-
tinct, appelé le séparateur de sels, optimisant la ration dans la saumure peut être réalisée par
séparation des minéraux et métaux en amont du différents procédés tels que la lixiviation acide.
gazéifieur. PSI et TreaTech ont réussi à démontrer Par exemple, le phosphorea peut ainsi être récu-
la plus-value de leurs systèmes ce qui a encou- péré sous forme d’acide phosphorique pour être
ragé d’autres développeurs de la technologie à s’y valorisé en fertilisant. Par ailleurs, plusieurs
intéresser. technologies prometteuses permettant la valori-
sation du phosphore des boues d’épuration sont
Les solides inorganiques ainsi récupérés sont en cours de développement ou en test à l’échelle
évacués du séparateur par un dispositif de type européenneb. Ces avancées techniques pourraient
« chasse d’eau » fonctionnant par dépressurisation venir compléter la Gazéification Hydrothermale
en circuit semi-ouvert. Ce dernier, situé dans la pour optimiser ses capacités de récupération du
partie basse du séparateur, ne permet pas d’éviter phosphore.
qu’une petite partie du flux carboné soit égale-
ment captée. Une « saumure » est ainsi récupérée In fine, en fonction de la composition du résidu
suite à cette séparation. Pour limiter au strict mini- après séparation des minéraux d’intérêt, le
mum ces pertes du flux carbonés, des dispositifs sous-produit résiduel peut trouver des appli-
de recyclage à haute pression sont prévus pour cations dans certaines industries comme les
réinjecter le carbone (piégé dans la saumure) en cimentiers (ex : cru cimentier).

a
La France, comme tous les autres pays européens, dépend des imports de phosphore fossile essentiellement issu de mines
au Maroc ou en Russie. L’agriculture intensive en consomme beaucoup notamment via l’utilisation d’engrais artificiels. La
Gazéification Hydrothermale peut être un moyen très efficace de récupérer la quasi-totalité de ce phosphore qui se retrouve
plus particulièrement dans certains intrants comme les boues de STEU et de dragage qu’elle transforme (voir cas « Suisse »
1.3)
b
www.phosphorusplatform.eu

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2.5 Les deux grandes familles du procédé de


Gazéification Hydrothermale
2.5.1 Le procédé de Gazéification Hydrothermale à
« haute température »
Dans le cas du procédé à haute température, la La conversion du fluide en gaz de synthèse n’étant
réaction hydrothermale a besoin d’atteindre des pas complète, une partie du fluide est préservée
températures de réaction dans le gazéifieur se contenant principalement de l’eau et de l’azote et
situant entre 550 et 700 °C pour pouvoir conver- nécessitant la mise en œuvre d’un séparateur gaz/
tir efficacement le fluide en gaz renouvelable et liquide pour séparer l’eau du gaz de synthèse à
bas-carbone. Historiquement, chez la plupart des haute pression.
développeurs de cette famille de procédé, le fluide
introduit dans le gazéifieur contient encore ses Le gaz de synthèse brut à haute pression ainsi
composants solides (pas de séparateur de sels en séparé peut être soit :
amont) : les conditions supercritiques entraînent
• traité pour maximiser la production d’un
ici d’abord la séparation des sels minéraux par
méthane de synthèse et le rendre conforme
précipitation gravitaire en bas du gazéifieur
aux spécifications d’injection dans le réseau de
d’où ils peuvent être évacués par un dispositif
gaz : il servirait ainsi à alimenter n’importe quel
approprié (voir chapitre précédent). La tendance
consommateur habituel de gaz naturel, sans la
actuelle des développeurs est toutefois la mise
moindre modification sur son installation ;
en œuvre d’un séparateur de sels en amont du
gazéifieur pour que les réactions de conversion • traité par épuration (= séparation des molé-
thermochimique du fluide carboné puissent être cules de gaz entre eux) pour valoriser d’un côté
facilitées au maximum. le méthane et les alcanes dans le réseau de gaz
et de l’autre côté l’hydrogène séparément ;
Le fluide carboné restant dans le gazéifieur, com- • directement autoconsommé sur site car étant
posé essentiellement d’eau, de carbone et d’azote, un gaz combustible sans modification ;
est ensuite converti en un maximum de gaz de syn-
thèse. Sa composition est en première approche L’eau résiduelle contenant principalement de
d’environ 30 % de méthane (CH4), 30 % d’hydro- l’azote pouvant, en fonction de la présence d’autres
gène (H2), 30 % de gaz carbonique (CO2) ainsi que composants résiduels mineurs, soit être valorisée
10 % d’alcanes dont principalement de l’éthane directement pour couvrir des besoins d’irrigation
(C2H6). La répartition entre ces quatre composants soit être épurée jusqu’à un niveau d’eau potable
peut toutefois varier plus ou moins fortement en en séparant l’azote et les impuretés.
fonction du type d’intrant, des conditions opéra-
toires et d’autres paramètres (voir Tableau 2).

2.5.2 Le procédé de Gazéification Hydrothermale avec catalyse


La particularité de cette famille de procédé est permet de réduire de manière importante le
la présence d’un catalyseur installé à l’entrée du besoin thermique pour cette famille de procédé
gazéifieur hydrothermale, aujourd’hui composé et d’augmenter le rendement énergétique glo-
par défaut de ruthénium, un métal rare, générant bal de l’installation jusqu’à 85 % a minima,
plusieurs avantages très intéressants tels que :
• Générer indirectement, en cas de présence d’un
• Assurer un taux de conversion de carbone très séparateur de sels et d’un captage de soufre,
élevé et inégalé de 99 % favorisant la conver- une eau résiduelle claire, de qualité au moins
sion du carbone en méthane, pouvant atteindre industrielle, valorisable directement pour cou-
jusqu’à 70 % dans le gaz de synthèse ! vrir a minima des besoins d’irrigation,
• Abaisser la température de réaction dans le • Simplifier le traitement de gaz : la présence éle-
gazéifieur à environ 360 à 400 °C. Cette baisse vée de méthane, la relativement faible présence

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d’hydrogène (5 à 10 %), le restant étant du • Le catalyseur perdant de son efficacité dans le


dioxyde de carbone, ne nécessite qu’une simple temps, un renouvellement périodique du cap-
épuration. Cette solution est comparable à teur de soufre est nécessaire car consommé en
ce qui se pratique en méthanisation avec la continu. Ces contraintes entraînent un impact
différence que dans le cas de la gazéification relativement important dans le coût de fonc-
hydrothermale, la pression du gaz lors du trai- tionnement du système. Deux points positifs
tement est bien plus élevée (≈ 80 bar versus sont toutefois à citer ici :
≤ 10 bar) améliorant nettement son efficacité.
> Les deux dispositifs diminuent ensemble le
Cet avantage permet de compenser le surcoût
risque de corrosion du gazéifieur et de tous
de la solution et l’injection d’un gaz dans le
les autres équipements exposés aux condi-
réseau haute pression par simple détente (évi-
tions supercritiques en aval du séparateur de
tant ainsi tout besoin de compression).
sels.
Mais apportant aussi quelques contraintes : > Malgré un surcoût supplémentaire au départ
pour sa mise en œuvre, la présence d’un
• Dans le cas d’intrants contenant du soufre (poi- système de captage du catalyseur est forte-
son du catalyseur), il est nécessaire d’équiper ment conseillée pour permettre de récupérer
l’installation d’un séparateur de sels et d’un jusqu’à 75 % du catalyseur et limiter l’achat
système de captage de soufre en aval du réac- de nouvelles recharges et donc les coûts
teur et du catalyseur. Ces dispositifs permettent d’exploitation.
en effet un abattement quasi-totale du soufre
(jusqu’à quelques parties par million).

2.5.3 Synthèse des technologies de Gazéification Hydrothermale


Le Tableau 3 ci-dessous récapitule la plage des Chacune a ses forces et faiblesses :
conditions opératoires et de la composition (en 1ère
approche et à titre indicatif) du syngaz en sortie ► Gazéification Hydrothermale avec catalyse
des gazéifieurs selon leur famille technologique.
• des surcoûts de CAPEX liés à la présence du
catalyseur doté d’un métal rare, d’un sépa-
En résumé, que le procédé Gazéification
rateur de sels et d’un captage de soufre, sont
Hydrothermale soit « à haute température » ou
compensés par des économies potentielles au
« avec catalyse », soit équipé ou non d’un sépa-
niveau des systèmes de traitement de gaz et
rateur de sels, la chaine de valeur globale de la
du système d’apport thermique nettement plus
Gazéification Hydrothermale est sensiblement la
simples qu’avec la famille à haute température,
même et se compose toujours des mêmes étapes
(Figure 5). • un OPEX plus élevé pour couvrir les recharges
de catalyseur et de capteur de soufre peut
Aujourd’hui, avec le faible nombre de projets être compensé, au moins en partie, par des
existants (voir partie 4), les acteurs de la filière besoins thermiques relativement faibles et
Gazéification Hydrothermale ne peuvent prédire d’autres économies potentielles liées au traite-
quelle part de marché chacune des deux familles ment simplifié du syngaz et de l’eau résiduelle
de procédés de Gazéification Hydrothermale va nécessitant pas ou peu de traitement pour être
être capable d’atteindre à l’avenir. valorisable a minima.

Tableau 3 : Synthèse des technologies de Gazéification Hydrothermale (GRTgaz).

Type de technologie Conditions opératoires Composition gaz de synthèse (%vol)


Gazéification
Hydrothermale T (°C) P (bar) CH4 (%vol) H2 (%vol) CO2 (%vol) CxHy (%vol)

Avec catalyse 360–450 210–300 60–70 0–10 20–35 -

A haute température 550–700 250–350 20–40 20–50 20–30 6–12*

CxHy = mélange d’Éthane (C2H6), Propane (C3H8) et/ ou Butane (C4H10) : se retrouve aussi dans le gaz naturel

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GESTION DES VALORISATION DES


INTRANTS PRÉTRAITEMENT
CO - PRODUITS CO - PRODUITS
Préparation des intrants
Boues de STEU • Liquide (eau de procédé Production de
riche en azote) fertilisants (N, P, K)
Effluents agricoles
NH4+ H2O Réutilisation des
métaux
Digestats de 
méthanisation • Solides (sels minéraux et Eau potable ou
GAZÉIFICATION industrielle
métaux)
HYDROTHERMALE
Déchets agroalimen-
taires (IAA) 2 familles de procédés Autres applications
(ex : vinasse, pulpes, industrielles
• Haute température
résidus laitiers, etc.) • Avec catalyse

TRAITEMENT
Déchets industriels VALORISATION DES GAZ
DU SYNGAZ
hors IAA (ex : liqueur
noir, graisses, etc.) • Épuration
Injection au réseau
INTÉGRATION • Méthanation
Déchets urbains ÉNERGÉTIQUE
• Co-injection d’hydrogène
Apport thermique Stations GNV / H2
Biodéchets initial
Maintien en
Plastiques température Autoconsommation
Montée en pression

Figure 5 : Schéma de la chaîne de valeur de la Gazéification Hydrothermale, GT Gazéification Hydrothermale, 2021 (Source :
Cerema / GRTgaz).

► Gazéification Hydrothermale à haute technologie dispose de quelques atouts pour


température s’adapter à l’évolution des marchés du méthane
et de l’hydrogène.
• Un niveau CAPEX en 1ère approche potentielle-
Enfin, d’autres critères peuvent encore impacter
ment moins élevé mais pouvant être révisé à la
la balance, pour un projet précis, de l’une à l’autre
hausse en fonction du choix du système de trai-
technologie : la situation de référence, le contexte
tement de gaz, de la présence ou non de soufre
local, les types d’intrants, seuls ou en mélange,
dans l’intrant et de la qualité d’eau résiduelle
nécessitant ou pas la présence d’un séparateur de
souhaitée en sortie nécessitant la mise en place
sels, etc.
d’un traitement a minima pour être valorisée,
• Un niveau d’OPEX a priori plus élevé lié à son
niveau de température relativement haut néces-
sitant un apport énergétique plus élevé. En
fonction du choix du système de traitement de
gaz retenu, le coût de fonctionnement comme
le besoin énergétique peuvent faire augmenter
comme baisser ce coût.
• Au global les coûts CAPEX et OPEX liés au trai-
tement de gaz sont au moins égaux et souvent
supérieurs à ceux de la famille « avec catalyse ».
• Le syngaz pouvant contenir des quantités d’hy-
drogène relativement importantes (jusqu’à
≈ 50 %) à côté du méthane et des hydrocarbures
de poids moléculaire plus élevé (totalisant
jusqu’à environ 30 à 35 %), cette famille de

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2.6 La séparation des flux gazeux, liquides et de


l’azote en aval du gazéifieur
2.6.1 Le séparateur gaz – liquide

Lié au fait que le temps de séjour du fluide car- • D’un côté, le « gaz de synthèse » à haute pression
boné dans le gazéifieur est relativement court, doté de la quasi-totalité du méthane, hydrogène
sa conversion en gaz de synthèse n’est pas totale et des autres hydrocarbures potentiels (CxHy) et
préservant ainsi en sortie du gazéifieur un reli- d’une fraction du gaz carbonique ;
quat liquide. Il est essentiellement composé
d’eau, d’azote et d’éventuels autres composants • Et de l’autre côté, le « résidu liquide » chargé
devant être séparés du flux gazeux, tous encore principalement en ammonium et d’éventuelles
à l’état supercritique. Afin de pouvoir exploiter le traces d’autres éléments. Cette phase est égale-
gaz de synthèse en aval, il faut le séparer de la ment saturée en gaz carbonique et peut contenir
part liquide à travers un séparateur gaz – liquide, quelques traces d’hydrogène et de méthane.
appelé aussi flash, pour récupérer :

a) Le traitement et la valorisation de la phase gazeuse

Pour pouvoir être rendu conforme à une injection 2. La méthanation : représente la voie par défaut
dans le réseau, le « gaz de synthèse » doit être pour la technologie « à haute température ». Il
traité en aval, à travers différentes voies de trai- s’agit d’une réaction chimique ou biochimique
tement de gaz possibles dont les performances et permettant la synthèse de méthane à partir de
l’adaptabilité varient en fonction de la composi- monoxyde de carbone (CO) et/ou du dioxyde de
tion du gaz de synthèse à traiter. carbone (CO2) avec du dihydrogène (H2). Trois
technologies de méthanation sont aujourd’hui
A la base, il existe deux grandes familles poten- envisageables :
tielles de traitement du gaz de synthèse qui, pour
des raisons d’efficacité énergétique, devraient a. La méthanation catalytique : la réaction
fonctionner à relativement haute pression (80 à recherchée est favorisée à l’aide d’un cata-
120 bar) pour permettre une injection du méthane lyseur, le plus souvent à base de nickel. Ce
de synthèsea, par simple détente dans les réseaux dernier, sensible à la présence de soufre qui
de gaz de moyenne et haute pression (16 à provoque une diminution de son efficience
67,7 bar) : et de sa durée de vie, doit être protégé en
amont par un procédé de désulfuration
1. L’épuration : Cette technique représente la permettant l’abattement de toute pré-
voie par défaut pour la technologie « avec sence éventuelle de sulfure d’hydrogène
catalyse ». Elle s’appuie principalement sur (H 2S). Cette réaction étant exothermique
la séparation membranaire pour isoler le (environ 200 °C), la chaleur produite peut
méthane (CH 4) d’un côté et de l’hydrogène être valorisée dans le procédé afin d’amé-
(H 2) et du gaz carbonique (CO 2) de l’autre. liorer son rendement énergétique global.
Le gaz de synthèse ne contenant en règle
L’épuration peut être également utilisée générale pas assez d’hydrogène pour faire
pour séparer le gaz de synthèse issu d’une réagir tout le CO2 qu’il contient, le CO2 rési-
Gazéification Hydrothermale à « haute tempé- duel doit être séparé (procédé membranaire)
rature » si l’objectif est d’injecter le méthane et du gaz de synthèse avant injection.
les éventuels hydrocarbures plus élevés (CXHY)
dans le réseau gaz naturel tout en valorisant b. La méthanation biologique : cette techno-
séparément l’hydrogène. logie de méthanation fonctionne selon les
mêmes règles chimiques que celle à cata-
lyse avec la différence que les réactions sont
de nature biochimique. Elles sont mises en
œuvre avec l’aide de différentes souches

a
gaz traité conforme à la norme gaz naturel

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P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d rot h e r m a l e

de bactéries méthanogènes se dévelop- • « Gazéification Hydrothermale avec catalyse » :


pant en milieux aqueux dans un réacteur l’hydrogène est amené à pression et tempéra-
dédié alimenté en continu par des éléments ture du fluide puis injecté directement et en
nutritifs. L’éventuelle présence de soufre est parallèle du fluide carboné dans le gazéifieur.
consommée par les bactéries qui en sont Des tests effectués par le Paul-Scherrer-Institut
gourmandes et le surplus de CO2 en sortie en Suisse ont démontré qu’il est possible d’at-
est traité de la même manière que dans le teindre un syngaz avec un taux de méthane
cas de la méthanation catalytique. supérieur à 90 % dans ces conditions.
• « Gazéification Hydrothermale à haute tempéra-
c. Catalytique plasma : il s’agit d’une variante
ture » : l’hydrogène est injecté directement dans
innovante de la méthanation catalytique
l’installation de méthanation (catalytique avec
en cours de développement par la société
ou sans plasma ou biologique) où il réagit avec
française Energo qui nécessite nettement
la totalité du monoxyde et surtout du dioxyde
moins d’énergie (- 40 %) en créant un plasma
de carbone contenus dans le gaz de synthèse.
à travers un champ électrique faisant réagir
L’objectif visé en sortie de la méthanation est
les molécules ciblées. Comme dans les deux
de maximiser la production de méthane et
précédents cas, le CO 2 résiduel doit être
de minimiser les résidus de CO et CO2 dans le
également séparé du méthane de synthèse
méthane de synthèse ainsi produit. La qualité
avant injection. Pour le moment, la tech-
obtenue en méthane de synthèse devrait per-
nologie ne fonctionne qu’à pression quasi
mettre l’injection d’un gaz conforme dans le
atmosphérique.
réseau évitant tout autre traitement du gaz en
amont.
3. Il existe une 3e voie possible, appelée « co-in-
jection d’hydrogènea » qui fonctionne avec un Avec la co-injection d’hydrogène, la production de
apport externe d’hydrogène dont le but est de méthane peut être augmentée jusqu’au double du
maximiser la production de méthane en sor- débit de méthane de synthèse atteignable sans
tie de la Gazéification Hydrothermale. En effet, cet apport d’hydrogène. Avec un coût de l’hydro-
présent en excès, l’hydrogène réagira avec un gène apporté inférieur à environ 4 €/kg, cette voie
maximum de dioxyde de carbone contenu supplémentaire semble pouvoir atteindre le seuil
dans le syngaz. Selon la famille de procédé de rentabilité économique.
Gazéification Hydrothermale, l’apport se fait à
travers deux mécanismes distincts :

2.6.2 Le traitement et la valorisation de la phase liquide et de l’azote


Le résidu liquide en sor tie du séparateur À l’inverse, l’eau résiduelle issue de la technologie
gaz – liquide est composé d’eau contenant du gaz à haute température nécessite la mise ne place
carbonique jusqu’au point de saturation. Si l’in- de systèmes de filtration et de purification spé-
trant initial contient de l’azote, il se retrouvera cifiques. Ainsi, le développeur SCW Systems aux
également dans ce résidu liquide sous forme d’am- Pays-Bas assure avoir installé dans sa 1ère usine
monium (NH4+). Il est généralement incolore mais industrielle de 20 MWth un système lui permet-
peut, pour certains intrants comme des boues et tant de traiter son eau résiduelle jusqu’à la qualité
dans le cas de la Gazéification Hydrothermale à d’eau potable.
haute température, prendre une couleur brunâtre
(les experts parlent de « brown water »), contenant En fonction de la valorisation envisagée pour l’eau
encore quelques traces d’impuretés. résiduelle et de sa teneur en azote, des procédés
spécifiques de séparation ou de concentration
L’eau résiduelle issue de la technologie avec de l’ammoniaque devront être envisagés (strip-
catalyse présente la particularité d’être claire et ping, échangeur ionique, précipitation, absorption
transparente et ne contient pas ou peu d’impure- gaz-liquide, etc.).
tés. Cette eau peut alors être utilisée quasiment
en l’état (après analyse) pour couvrir des besoins
d’irrigations agricoles ou d’espaces verts en milieu
urbain.

a
Uniquement pour la technologie Gazéification Hydrothermale catalytique.

39
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d r ot h e r m a l e

2.7 Les avantages de la Gazéification


Hydrothermale

L
a Gazéification Hydrothermale présente ► Le recyclage des éléments minéraux, de l’azote
un certain nombre d’avantages spécifiques, et des métaux contenus dans le déchet
comme présenté ci-dessous (Figure 6) :
La Gazéification Hydrothermale entre pleinement
Ces atouts font de la Gazéification Hydrothermale dans l’économie circulaire dans le sens où la res-
une alternative pertinente au traitement classique source « eau » est préservée, « lavée » de tout type
et à la gestion actuelle de certains déchets au sein de pathogènes, virus ou encore microplastiques
des territoires, permettant le développement de contenus dans l’intrant. Elle permet également
boucles d’économie circulaire locales. Les avan- le recyclage des minéraux (phosphore, potassium,
tages suivants peuvent être cités : azote…) pouvant potentiellement servir, après
transformation, en tant que fertilisants.
► Aucun besoin de séchage des déchets orga-
niques humides valorisés La récupération et la séparation d’une éventuelle
présence de métaux se trouvant notamment dans
Comme le procédé Gazéification Hydrothermale de nombreux déchets industriels est également un
est capable de valoriser des déchets organiques atout précieux car certains de ces métaux, par leur
de relativement faible concentration en matière quantité ou par leur rareté (cherté), peuvent géné-
sèche (≈ 15 à 20 % a minima), il ne requiert pas rer des économies supplémentaires intéressantes.
de processus de déshydratation pouvant consom-
mer des quantités importantes d’énergie. Ceci ► Un design compact et modulaire
contraste avec des technologies de déshydrata-
tion mécanique ou thermique nécessaires pour La Gazéification Hydrothermale réalise la conver-
rendre un déchet combustible (par exemple pour sion en gaz en quelques minutes dans une
l’incinération). L’apport énergétique nécessaire ne installation très compacte où les échangeurs de
pouvant être compensé par la valeur énergétique chaleur prennent le plus de place. Le choix de
récupérée après la combustion de l’intrant, rend la modularité d’une installation de Gazéification
cette combinaison de technologies particulière- Hydrothermale, définissant la capacité de trai-
ment inefficace et coûteuse. tement maximale par module à un niveau de
4 – 6 t/h est lié à la volonté des développeurs de
De plus, à l’intérieur du procédé Gazéification maîtriser au mieux les coûts de certains de leurs
Hydrothermale, une fois les étapes de séparation sous-équipements. En effet le coût de ces der-
des composants inorganiques et de gazéification niers peut fortement augmenter avec la taille des
effectuées, le fluide gaz – liquide supercritique en pièces devant durablement faire face à la haute
sortie dispose toujours d’un niveau de température pression et température. Un effet de standardisa-
élevé. L’art des développeurs de la technologie tion de ces modules se traduit par une certaine
Gazéification Hydrothermale se situe notamment flexibilité d’adaptation et une maîtrise des coûts
dans le bon dimensionnement des échangeurs de de la conception à la réalisation. De plus, en phase
chaleur permettant de transférer un maximum de d’exploitation, la modularité de la Gazéification
la chaleur contenue dans le fluide vers l’intrant Hydrothermale permet une plus grande adapta-
qui rentre à travers la pompe haute pression dans bilité de l’unité en fonction des fluctuations des
le système Gazéification Hydrothermale. Des ren- tonnages de déchets devant être traités.
dements de transfert de chaleur de plus de 85 %
ont déjà été démontrés par des développeurs.

Ce niveau de performance énergétique est cru-


cial pour pouvoir atteindre des rendements
énergétiques globaux supérieurs à 75 % avec la
technologie Gazéification Hydrothermale.

40
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
P r é s e n tat i o n d e l a Ga z é i f i cat i o n H y d rot h e r m a l e

Atouts de la Gazéification Hydrothermale

Valorisation jusqu’à 100 % de Récupération des minéraux et métaux


l’intrant = jusqu’à 100 % de
suppression du déchet ultime Production de gaz injectable,
stockable et valorisable ou utilisable
Conversion rapide (quelques minutes) au même titre que le gaz naturel
et très élevée du carbone (85 à
100 %) intégrant les microplastiques CH4 Technologie capable de produire
H2 du méthane et de l’hydrogène
Élimination des microorganismes en fonction des besoins
pathogènes et des micropolluants
Récupération d’une eau de qualité
Pas de polluants atmosphériques industrielle pouvant devenir
potable après filtration
Technologie modulable à très
faible empreinte au sol Alternative vertueuse à
l’incinération, l’enfouissement
Absence de nuisances et la mise en décharge
sonores et olfactives

Suppression de traitement
thermique des intrants

Figure 6 : Atouts de la Gazéification Hydrothermale (Source : Cerema / GRTgaz).

41
42
03
POTENTIEL DE PRODUCTION
DE GAZ RENOUVELABLE
ET BAS-CARBONE

3.1 La Gazéification Hydrothermale, une solution de valorisation pour certains


déchets 45
3.1.1 Les limites du retour au sol pour certains déchets biogéniques 45
3.1.2 De nombreuses interrogations pour certains déchets industriels 46

3.2 Un potentiel de production de gaz renouvelable et bas-carbone d’au moins


63 TWh en 2050 47
3.2.1 Les familles d’intrants adressables en première priorité par la Gazéification Hydrothermale 49
3.2.2 Les familles d’intrants adressables en priorité 2 et 3 par la Gazéification Hydrothermale 50

43
44
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

L’
évaluation du potentiel de production de En effet, avec la montée en puissance de la métha-
gaz renouvelable et bas-carbone par la nisation dont les digestats, le résidu ultime, ne
Gazéification Hydrothermale a été réalisée peuvent tous être valorisés localement dans
à travers l’estimation du potentiel de mobilisa- l’agriculture, les quantités citées sont amenées
tion de certains déchets à l’horizon 2050. Il s’agit à encore augmenter dans les années à venir. De
de déchets identifiés comme adressables à la même, parmi les déchets adressables de nature
technologie qui en grande partie sont de nature non biogénique, l’estimation est probablement
organique et d’origine biogénique ou non. La sous-évaluée. Ces derniers étant principalement
liste de ces intrants s’allonge au fur et à mesure issus des activités industrielles et notamment des
du temps et des avancées techniques de la secteurs de la chimie et de la pétrochimie, peu de
technologie. données sont disponibles. De plus, les volumes
concernés sont d’autant plus importants que ces
Au total, une quantité annuelle de déchets orga- industriels génèrent autant leurs propres déchets
niques globale adressable à la gazéification que des produits qui deviennent, une fois utilisés
hydrothermale est estimée à plus de 400 mil- ou consommés, également des déchets (exemple
lions de tonnes dont environ 150 millions de emballage en plastique).
tonnes sont estimées mobilisables. Cependant, ces
masses sont probablement amenées à augmenter.

3.1 La Gazéification Hydrothermale, une solution


de valorisation pour certains déchets
3.1.1 Les limites du retour au sol pour certains déchets biogéniques
Certains pays ont fait le choix d’une approche est corrélée à la diminution significative de leur
radicalement différente de la position française enfouissement durant ces 30 dernières années
en interdisant pour certains types de déchets le ainsi qu’à la montée en puissance de solutions
retour au sol. Ceci est par exemple le cas pour les alternatives.
boues de station de traitement des eaux usées
en Suisse, Danemark, Pays-Bas et bientôt en Le cas Suisse illustre l’étape d’après : en effet la
Allemagne (2029). Un cas intéressant est celui des totalité des boues de STEU, digérées ou pas, partent
Pays-Bas (Figure 9) où la fin de l’utilisation des en incinération malgré les impacts négatifs (voir
boues de STEU dans l’agriculture date de 1995 et chapitre 1) ce qui a poussé au développement de

100 %

80 %

60 %

40 %

20 %

0%
1997

2007
1981

1985

1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996

1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006

2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016

2018

Agriculture Industrie cimentière


Oxydation hydrothermale Centrale électrique
Enfouissement Autres destinations
Incinération
Figure 7 : Évolution de la destination finale des boues de STEU aux Pays-Bas depuis 1981 (source : clo.nl).

45
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

la Gazéification Hydrothermale, soutenu finan-


cièrement par l’État suisse, en tant qu’alternative
pertinente de valorisation énergétique et de pré-
servation de ressources précieuses. Le fait que la
Gazéification Hydrothermale permette l’obtention
de nombreux co-produits valorisables au niveau
agricole et économique comme le phosphore,
l’azote, d’autres minéraux mais aussi un certain
nombre de métaux a également contribué à obte-
nir le soutien du ministère fédéral de l’énergie
Suisse afin de proposer rapidement une alterna-
tive à l’incinération.

En France, il est commun d’observer des phéno-


mènes de pollutions locales dues à une mauvaise
gestion des matières fertilisantes. Par exemple,
certains composts issus des Tri Mécano-Biologique
(TMB) peuvent contenir des traces de microplas-
Figure 8 : Difficulté d’épandages sur les terres agricoles en
tiques qui, au fur et à mesure des épandages France (source : ValorMap).
agricoles, laissent des traces durables dans les
sols [8]. Pour d’autres effluents organiques comme
certains lisiers, boues de stations d’épuration ou Enfin, le projet ValorMap a édité une carte au
encore digestats, il arrive également que des niveau national reprenant les limitations d’épan-
dépassements de seuils limites en azote, phos- dages sur le territoire national selon des critères
phore ou d’Éléments Traces Métalliques (ETM) tels physiques (topographie des sols et rivières), des
que le cuivre, le fer, le zinc, le cadmium… soient critères agronomiques (types de cultures / agri-
constatés. cultures) et la présence des élevages. La Figure 8
montre qu’environ 40 % du territoire national est
Par ailleurs ces gisements de biomasses sont bien déjà limité par des contraintes d’épandages.
souvent répartis inégalement sur le territoire et
une large part de celles-ci peuvent voyager plu- La Gazéification Hydrothermale se présente ainsi
sieurs dizaines voire centaines de kilomètres pour comme une alternative pertinente pour traiter ces
trouver un exutoire. Au-delà des désagréments effluents agricoles d’élevage qui ne peuvent plus
locaux (bruit, odeur, circulation difficile…) cela être retournés au sol à cause de la surproduction
engendre également de fortes émissions de GES ou survalorisation locale de la part des activités
imputables au transport par camion. agricoles et des industries agroalimentaires.

3.1.2 De nombreuses interrogations pour certains déchets


industriels
Outre les déchets organiques biogéniques dont issus de l’industrie et en particulier dans les sec-
la valorisation matière n’est pas possible ou sou- teurs de la chimie et de la pétrochimie.
haitable comme vu précédemment, de nombreux
déchets riches en carbone fossile ou non semblent Également, de nombreux déchets sont riches en
ne pas toujours suivre des voies de valorisation plastiques (emballages et divers produits plas-
vertueuses. En effet, principalement d’origine tiques seuls, souillés ou mélangés à d’autres
industrielle, ces déchets sont peu connus, quan- déchets) mais peu d’informations sur leurs com-
tifiés et/ou cartographiés malgré la forte activité positions, volumes et modes de gestion sont
économique et les fortes productions du secteur accessibles.
industriel Français.
Pour ces catégories de déchets, il est fort probable
Ainsi, plusieurs interrogations demeurent quant que la Gazéification Hydrothermale puisse être
aux quantités, à la composition, aux modes de ges- une solution adaptée afin d’éviter les exportations,
tion et volumes d’exportation de certains déchets l’enfouissement et l’incinération.

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Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

3.2 Un potentiel de production de gaz renouvelable


et bas-carbone d’au moins 63 TWh en 2050
Méthodologie

L’évaluation et l’estimation du potentiel de produc- 5. Estimation du taux de mobilisation des gise-


tion de gaz renouvelable et bas-carbone associé ments identifiés.
à la Gazéification Hydrothermale est fonction de
6. Estimation du potentiel réaliste de gaz renou-
nombreux paramètres tels que la nature et la
velable et bas-carbone pouvant être produit par
composition des gisements, leur disponibilité, leur
la Gazéification Hydrothermale (inspirée de la
répartition sur le territoire et le type de gestion
méthode proposée par Louw et al., 2014 [9]a).
dont ils font l’objet. La méthodologie d’évaluation
a été réalisée en plusieurs phases : Cette nouvelle évaluation, réalisée en 2022,
s’appuie en partie sur les premiers travaux effec-
1. Identification des familles et des typologies de
tués par ENEA Consulting publiés par GRTgaz en
gisements (uniquement d’origine biogénique).
octobre 2019 [10]. Elle tient compte d’un ensemble
2. Identification de leur répartition et des volumes de données issues d’autres publications d’ac-
concernés. teurs de notoriété publique (voir les exemples de
3. Identification des filières mises en place ou non sources plus loin) qui ont été complétées en par-
pour leur gestion. tie par une recherche de données géolocalisées
utilisant des algorithmes pour tenter de combler
4. Évaluation du pouvoir calorifique de chaque les manques d’informations existantes en termes
gisement. de données publiquement accessibles.

Limites de l’exercice
En France, il est très difficile d’obtenir des données gazéification hydrothermale ayant besoin d’un
et une estimation précise des volumes de déchets certain nombre de détails pour son évaluation
organiques publiquement accessibles ainsi que la comme le taux en matière sèche et matière orga-
répartition des différents types de gisements de nique du tonnage brut affiché, il est difficile de
déchets et des matières organiques d’intérêt sur présenter avec précision les véritables volumes
le territoire. Il existe cependant quelques bases existants et adressables pouvant être convertis en
de données publiques et publications disponibles gaz avec la technologie. Par exemple, les volumes
sur lesquelles le Groupe de Travail Gazéification de déchets de l’industrie pétrochimique sont
Hydrothermale s’est appuyé pour identifier les introuvables. Il n’est ainsi pas surprenant qu’il soit
gisements accessibles et mobilisables et ainsi parfois quasiment impossible de connaître la part
calculer le potentiel de production de gaz de la fossile dans certains déchets organiques géné-
filière. Afin de pouvoir présenter les chiffres les rés par un certain nombre d’acteurs du secteur
plus globaux et cohérents possibles, le Groupe de industriel.
Travail Gazéification Hydrothermale s’est concen-
tré sur les 18 gisements de déchets organiques Les principales ressources utilisées lors de cette
d’origine biogénique représentant les plus grands étude sont principalement issues de bases de don-
volumes et étant les mieux renseignés dans des nées « Open data », d’études publiques et de sources
bases de données (Figure 9). privées provenant des filières elles-mêmes :
► Bases de données publiques : assainissement.
Ce sont notamment les déchets organiques
developpement-durable.gouv.fr, Insee, Agreste,
d’origine industrielle qui sont peu documentés
etc.
et qui présentent des imprécisions ne permet-
tant pas leur bonne exploitation statistique. La

a
Pour définir ce potentiel, le Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale s’est appuyé sur les travaux présentés dans l’étude
de Louw et al.,(2014), qui indique que PCSgaz(kWh/kgbiomasse) ≈ 90 % x PCSbiomasse(kWh/kgbiomasse). Par mesure conservatoire et pour
coller plus sincèrement aux premiers tests expérimentaux réalisés sur des pilotes, un taux de conversion de 85 % a finalement
été retenu par le Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale pour effectuer les calculs de conversion.

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Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

Boues urbaines de STEU | priorité 1


1,5 0,4
0,8 0,5
Boues industrielles (secteur IAA) | priorité 1
Boues industrielles | priorité 1
0,5 3,3 (chimie, pharmaceutique, papier)
3,5 3,9 Boues de curage et de dragage | priorité 1
1,2 Digestats* | priorité 1
Biodéchets ménagers | priorité 2

5,5
Co-produits de biodiesel | priorité 2

14,3 63,2 TWhPCS/an Liqueur noire | priorité 2

Pour
Lisiers* | priorité 3
148 Mt mobilisées
Fientes* | priorité 3
Fumiers* | priorité 3

Vinasse betteraves | priorité 1


0,9 Pulpes de betteraves sucrières | priorité 2
1,4 3,1 20,8 Drêches de céréales | priorité 1
Déchets de fruits et légumes | priorité 2

0,4 Carcasses animales issues


1,0 d’équarrissage (farines C1, C2) | priorité 1
Déchets d’abattoirs (C3) | priorité 2

Figure 9 : Estimation de la production de gaz injectable par GH pour les 18 intrants majeurs d’origine biogénique à horizon
2050 (63,2 TWh/an) – *estimation en 2050.

Hauts-de-
France
8,3
Normandie
5,2 Île-de-France Grand Est
2,5 6,8
Bretagne
6,2
10 TWhPCS/an
Pays de la Loire
Centre-Val
7,9 Bourgogne
de Loire
Franche-Comté
3,3
3,4

Nouvelle-Aquitaine
9,6 Auvergne-Rhône-Alpes
5,6
0 TWhPCS/an

Occitanie Provence-Alpes-
Côte d’azur
4,1
1,9

Figure 10 : Estimation de la production par région de gaz injectable par GH en 2050 (63,2 TWh/an).

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Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

► Rapports et publications : Enquête Réséda sur d’évolutions probables de certains volumes pro-
les gisements et la valorisation des co-pro- jetés par certains experts (exemple : données
duits issus de l’agro-industrie [11], évaluation de Solagro prévoyant une baisse notable des
des ressources agricoles et agroalimentaires gisements d’effluents d’élevage à horizon 2050
de l’ONRB [12], études ADEME [13][14], Cerema versus 2018, déjà intégrée dans l’étude d’ENEA
[15] et autres publications scientifiques [16] Consulting).
[17].
Cette première approche souligne donc, dans le
Du fait des impressions parfois existantes liées aux cas du scénario réaliste, un potentiel de produc-
différents types de sources de données utilisées, les tion de gaz d’environ 63 TWh/an d’ici à 2050 via
résultats présentés sont semi-quantitatifs et n’ont la Gazéification Hydrothermale, en comptant la
pas vocation à estimer et présenter de manières mobilisation d’effluents d’élevages et certains
précise et définitive le potentiel de production déchets organiques dont l’origine n’est pas sys-
de gaz par la filière Gazéification Hydrothermale tématiquement d’origine biogénique à 100 %
à horizon 2050. Le travail fourni, résumé dans la (pollués par la présence de déchets d’origine fos-
Figure 9 et la Figure 10, se comprend comme une sile comme des plastiques ou issues de certaines
estimation le plus proche possible s’appuyant activités industrielles spécifiques (chimie)).
sur les meilleures informations disponibles à ce
jour et tenant compte aussi bien que possible

3.2.1 Les familles d’intrants adressables en première priorité par la


Gazéification Hydrothermale
Plusieurs familles d’intrants répondent aux > Potentiel de production de gaz renouvelable
caractéristiques techniques requises par la et bas-carbone 2050 : 8,4 TWh/an
Gazéification Hydrothermale et présentent une • Boues de curage et dragage : la réglementation
valorisation aujourd’hui limitée voire inexistante se renforce et interdira en 2025 le rejet en mer
(boues de dragages) pouvant être sources de ten- des boues polluées. Malgré un faible taux de
sions au niveau local couplé avec un potentiel matière organique (entre 6 et 30 % selon origine
Gazéification Hydrothermale intéressant : (estuaire, fleuve, port)), ces boues sont par leur
• Les boues de STEU urbaines et boues indus- volume (> 50 Mt/an) un intrant potentiellement
trielles (provenant des Industries agricoles et intéressant pour la Gazéification Hydrothermale
alimentaires, de la chimie, des industries phar- sous condition que la séparation des phases
maceutiques ou papier, etc.) : le renforcement organiques et inorganiques (sable) devienne
des contraintes réglementaires autour du retour techniquement et économiquement faisable.
au sol des boues d’ici 2027 et l’objectif d’une > Potentiel de production de gaz renouvelable
diminution du recours à l’incinérationa, peu effi- et bas-carbone 2050 : 5,5 TWh/an
cace pour des intrants contenant au moins 70 %
d’eau, devraient permettre à la Gazéification • Les digestats de méthanisation en cas de
Hydrothermale de capter un maximum de ce contraintes d’épandage : les digestats sont
gisement d’ici à 2050. Pour les boues urbaines, orientés aujourd’hui de préférence vers un
65 % des volumes (agglomérations > 50 000 EHb) retour au sol très encadré en lien avec le
devrait être à terme accessible à la Gazéification contexte local et les contraintes saisonnières
Hydrothermale, même si quelques installa- d’épandage (en fonction des cultures). La
tions de méthanisation subsistent. Les boues Gazéification Hydrothermale pourrait alors
industrielles issu des secteurs « IAA » et chimie, devenir un exutoire permanent pour un volume
pharmaceutique et papier représentent un gise- croissant de digestats face aux contraintes
ment global très conséquent et plus important actuelles dont certaines pourraient se renforcer.
La Gazéification Hydrothermale pourrait ainsi
que les boues urbaines. De plus, elles sont sou-
« débloquer » les contraintes locales d’épandage
vent plus « riches » (en carbone). pour des projets de méthanisation dans un cer-
tain nombre de régions présentant déjà des

a
20 % des boues sont actuellement incinérées en France.
b
Équivalent-Habitant

49
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Pot e n t i e l d e p ro d u ct i o n d e ga z r e n o u v e l a b l e e t b as - ca r b o n e

contraintes telles que les régions Sud, Bretagne, leur valorisation énergétique (hors graisses en
Hauts-de-France, Grand-Est et Île-de-France. biocarburants). La Gazéification Hydrothermale
> Potentiel de production de gaz renouvelable pourrait apporter avec la récupération de rési-
et bas-carbone 2050 : 20,8 TWh/an dus solides (minéraux) et liquide (eau) une
valorisation bien supérieure à l’incinération
• Vinasses et drêches (betteraves, céréales) issues (aujourd’hui le seul traitement autorisé), tout
de distilleries : générées sur une bonne dizaine en supprimant tout risque sanitaire à travers
de sites de production en France, les indus- le couple hautes pression et température. La
triels concernés cherchent à valoriser mieux ces technologie pourrait également être utilisée
intrants qu’à travers l’épandage offrant peu de comme alternative de valorisation pour les
valeur agronomique au sol. sous-produits animaux de catégorie 2 présen-
> Potentiel de production de gaz renouvelable tant un risque moins important pour la santé
et bas-carbone 2050 : 1,3 TWh/an publique et étant autorisés à être valorisés en
vue d’autres utilisations que l’alimentation des
• Sous-produits animaux (carcasses animales animaux (lisier et fumier par exemple).
d’abattoirs) : La réglementation contraignante
sur l’utilisation et la valorisation des sous-pro- > Potentiel de production de gaz renouvelable
duits animaux de catégorie 1a limite aujourd’hui et bas-carbone 2050 : 1,5 TWh/an

3.2.2 Les familles d’intrants adressables en priorité 2 et 3 par la


Gazéification Hydrothermale

Les gisements « priorité 2 & 3 » sont aujourd’hui > Potentiel de production de gaz renouvelable
valorisés à 100 % mais disposent de voies de et bas-carbone 2050 : 5,6 TWh/an
valorisation évolutives, ce qui permettrait d’en-
visager la mobilisation de ces derniers pour la Enfin et comme évoqué dans la partie précédente,
Gazéification Hydrothermale selon le contexte si certains gisements agricoles disposent de voies
local : de valorisation énergétiques aujourd’hui, leur
concentration et l’évolution des réglementations
• Pulpes de betteraves sucrières : aujourd’hui amèneront à les considérer comme potentiel d’in-
valorisées surtout en alimentation animaleb trants pour la Gazéification Hydrothermale :
et méthanisation, les sucriers confrontés à la
baisse des cheptels cherchent des valorisa- • Effluents agricoles d’élevages : aujourd’hui
tions alternatives avec une production de sucre valorisés par épandage direct ou après métha-
devant rester plutôt stable. nisation, la concentration locale des volumesc
se heurte à des difficultés de valorisation et
> Potentiel de production de gaz renouvelable
d’excédents d’azote dans certaines régions
et bas-carbone 2050 : 3,5 TWh/an
(Bretagne, Pays-de-Loire, etc.)
• Autres intrants (marcs de raisins, biodéchets,
> Potentiel de production de gaz renouvelable
déchets de fruits et légumes, co-produits de
et bas-carbone 2050 : 16,6 TWh/an
biodiesel et liqueur noire) : ces types de déchets
souvent générés dans des lieux spécifiques ont
souvent déjà une voie de valorisation existante.
La Gazéification Hydrothermale peut appor-
ter, en fonction du contexte local, une solution
alternative avec une plus-value technico-éco-
nomique globale encore améliorée pour les
parties prenantes.

a
Le règlement européen (CE) n°1069/2009 classe en catégorie 1 les sous-produits animaux présentant un risque important
pour la santé publique : risques d’EST (Encéphalopathies Spongiformes Transmissibles), de MRS (Matériels à Risque Spécifiés),
risques de présence de substance interdite ou d’un contaminant pour l’environnement, risque sanitaire émergent...
b
50 % en pulpes surpressées valorisées pendant la récolte et 50 % en pulpes déshydratées le long de l’année.
c
Le potentiel total tient compte d’une baisse importante du cheptel global d’ici 2050.

50
04
MATURITÉ DE LA
TECHNOLOGIE ET
PANORAMA DES
PROJETS EUROPÉENS

4.1 Les développeurs de la technologie Gazéification Hydrothermale en Europe 53

4.2 Les développeurs européens (hors France) 53


4.2.1 Le Karlsruhe Institut of Technology (KIT) et son pilote VERENA (2004) 53
4.2.2 PSI – TreaTech et l’HydroPilot (110 kg/h) 55

4.3 Les développeurs privés 58


4.3.1 SCW Systems et l’usine industrielle d’Alkmaar (16 t/h) 58
4.3.2 ProBiomass B.V et le projet SUPERSLUDGE 59

4.4 Les développeurs français 60


4.4.1 Le CEA LITEN et le prototype Gaseau 60
4.4.2 Leroux & Lotz Technologies, 1er équipementier français à se lancer dans le développement de la
technologie 61
4.4.3 VINCI Environnement, un intégrateur qui s’investit dans la technologie 62

4.5 Les principaux défis spécifiques à relever pour réussir le passage à l’échelle
industrielle 63
4.5.1 Optimiser la récupération et la gestion de la chaleur dans le procédé 63
4.5.2 Assurer au mieux la séparation de la matière inorganique (sels minéraux et métaux) pour
faciliter la gazéification de la matière organique 65
4.5.3 Optimiser le choix des alliages métalliques en fonction de la localisation des contraintes
mécaniques et des risques de corrosion 65
4.5.4 Optimiser la conversion du carbone : définir les bons paramètres opératoires 66
4.5.5 Optimiser la récupération des sortants : définir les bons paramètres opératoires 66

51
52
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M at u r i t é d e l a t e c h n o lo g i e e t pa n o r a m a d e s p r o j e ts e u r o p é e n s

L
es premières expériences de procédés hydro- ses efforts sur la maîtrise de la liquéfaction hydro-
thermaux ont été menées en 1913 avec la thermale, s’est intéressé au développement d’une
carbonisation hydrothermale de cellulose solution de gazéification hydrothermale intégrant
pour obtenir un matériau similaire au charbon. un catalyseur dans le gazéifieur. Tous ces travaux
Des travaux sur ces procédés ont également sont venus nourrir la réflexion des chercheurs du
été menés dans les années 1970 et 1980 par le Karlsruhe Institute of Technology (KIT) qui ont été
Pittsburgh Energy Research Center (USA), la Royal les premiers au monde à réaliser un projet pilote
Institute of Technology à Stockholm (S) ou encore préindustriel à haute température en 2004. Son
à l’université de Toronto (CA). De manière générale équivalent suisse, le Paul Scherrer Institut, a repris
la recherche dans les procédés hydrothermaux un peu plus tard les travaux du PNNL sur la gazéi-
s’est accélérée depuis le milieu des années 2000. fication hydrothermale avec catalyse intégrée puis
a amélioré le procédé pour prendre finalement
Concernant la Gazéification Hydrothermale, c’est le leadership de cette famille de technologie. Au
au MIT (Massachusetts Institute of Technology), Japon, plusieurs acteurs comme les Universités de
institut de recherche et université très réputée Tokyo, Hiroshima et Osaka ont également travaillé
des États-Unis, qu’on rapporte la première expé- en parallèle sur le développement de la gazéifi-
rience avec cette technologie convertissant de cation hydrothermale avec catalyse. Aujourd’hui,
la biomasse [18] . À la suite de cette première il existe plus d’une dizaine de développeurs de
approche, le PNNL (Pacific Northwest National la technologie issus du monde académique et, de
Laboratory – Californie) et l’université de Hawaï se plus en plus, du secteur industriel dont en particu-
sont penchés sur la question, testant notamment la lier en Europe.
conversion à hautes températures. Le PNNL, suite à

4.1 Les développeurs de la technologie


Gazéification Hydrothermale en Europe
Comme on peut le voir sur la Figure 11 ci-après, Fonctionnant tous « en continu », ces unités de
en Europe, l’essentiel des développeurs de la tech- Gazéification Hydrothermales se concentrent dans
nologie Gazéification Hydrothermale ont réalisé cinq pays : Allemagne, France, Espagne, Pays-Bas
des installations de : et Suisse.
• Prototype (TRL ≤ 4) : 1 à 10 kg/h,
• Pilote préindustriel (TRL 4 – 6) : 40 à 150 kg/h,
• Démonstrateur industriel (TRL 7 – 9) : 500 kg à
2 t/h,

4.2 Les développeurs européens (hors France)


4.2.1 Le Karlsruhe Institut of Technology (KIT) et son pilote
VERENA (2004)
Le KIT est autant un pôle de recherche d’excel- accompli la réalisation de la première unité pilote
lence et la plus ancienne des grandes écoles préindustrielle de la technologie au monde. Début
d’ingénieurs de renommée en Allemagne. Dès 2021, dans l’objectif de soutenir l’émergence d’une
les années 90, ses chercheurs se sont intéressés filière dédiée à la Gazéification Hydrothermale, Dr.
à la technologie de Gazéification Hydrothermale Boukis, le responsable de l’activité Gazéification
à haute température. Ils ont développé ses bases Hydrothermale du KIT, publie un article scienti-
en Europe et déposé de nombreux brevets dans fique dans la revue « Processes » présentant un
la suite. Avec le projet VERENA en 2004, ils ont retour d’expérience étoffé du pilote VERENA [19]

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LA GAZÉIFICATION HYDROTHERMALE EN EUROPE ET DANS LE MONDE

PAYS - BAS SUISSE JAPON


SCW Systems Paul Scherrer Institut Hiroshima University
• Première installation / Trea Tech • Prototype
industrielle au monde • 2 prototypes (1 chacun) • Liquéfaction & Gazéifi-
(4 modules de 4t/h) • 1 pilote commun cation Hydrothermale en
• 1 pilote mobile (TreaTech) série
Bright Circular
d’ici fin 2023
• 2 pilotes
USA
ProBiomass ESPAGNE
• 1 pilote (2018) Genifuel
Cade • 2 prototypes dont 1
• 1 pilote mobile
• Plusieurs pilotes et dé-
ALLEMAGNE monstrateurs
• Liquéfaction et gazéifi-
Karlsruhe Institut of Tech- cation hydrothermales
nology (KIT) en série
• Un pilote (2004)

LA GAZÉIFICATION HYDROTHERMALE EN FRANCE

Leroux & Lotz Technologies


• Coopération avec KIT
• 1 projet de démonstrateur
(GHAMa) d’ici fin 2024 (en
cours de développement)

VINCI Environnement
• Coopération avec Genifuel Montoir-de-Bretagne (44)
• 1 projet pilote ou démons- Projet de démonstrateur GHAMa
trateur d’ici 2025 en France
(Transfert de technologie)

Grenoble (38)
CEA Liten Prototype du
CEA Liten
• 1 Prototype
• Développement d’un pilote
d’ici 2025.

Figure 11 : Carte des développeurs actuels en Europe et dans le monde (situation à mi-2022) (Source Cerema & GRTgaz).

depuis sa création en 2004 (détails du pilote pré- haute pression (300 bar ici). L’énergie thermique
sentés Tableau 4). nécessaire au préchauffage de l’intrant jusqu’à
l’atteinte des conditions supercritiques (au moins
Dans le pilote VERENA, nous retrouvons déjà réa- 360 °C) est captée au moyen d’un échangeur de
lisé le principe de fonctionnement de base qui chaleur qui récupère lui-même son énergie du
est toujours valable dans n’importe quelle autre flux sortant du gazéifieur en le refroidissant. Après
évolution de la technologie jusqu’à aujourd’hui : un passage dans un séparateur de sel (cyclone),
l’intrant prétraité si besoin (ex. : broyage) est l’intrant allégé de sa charge minérale est gazéifié
comprimé lors de son injection dans le système à une température d’environ 600 °C. Le préchauf-
passant ainsi de la pression atmosphérique à la feur et le réacteur de gazéification sont alimentés

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en chaleur par des gaz chauds issus d’une chau- Tableau 4 : Carte d’identité du pilote Verena via données
dière. Dans le gazéifieur se forme principalement publiques.
du méthane, de l’hydrogène et du dioxyde de Nom du projet VERENA
carbone. Porteur du projet / Karlsruhe Institute of tech-
partenaires nology (KIT)
Le succès du pilote VERENA a permis plusieurs Localisation Karlsruhe, Allemagne
collaborations académiques et industrielles du
Année de MES 2004
KIT avec différents partenaires. Parmi les princi-
pales collaborations sont à citer celle avec le PSI Capacité maximale 100 kg/h, 20 %MS
(Paul Scherrer Institut en Suisse) pour tester son TRL 5
1er séparateur de sel vertical à taille industrielle Haute température avec
et surtout celles avec deux des trois principaux Type de technologie séparateur de sel par sépa-
développeurs aux Pays-Bas, Pro Biomass B.V et ration cyclone intégré
Bright-Circular, ce dernier à travers l’université Conditions opératoires 600–700 °C, 250–300 bar
de Delft. Le 3 ème développeur hollandais, SCW
Boues STEU, ensilage de
Systems, le plus avancé aujourd’hui, a réalisé maïs, méthanol, glycérol…
ses différentes étapes de développement de la Intrants
plus d’une dizaine d’intrants
technologie (prototype (10 kg/h), démonstra- différents
teur (2 t/h et maintenant installation industrielle Valorisation du gaz Bouteilles hautes pression
(16 t/h)) sans le moindre appui académique. À ce Non (élimination sur une
jour, chacune des trois entreprises néerlandaises Valorisation des co-produits
STEU)
citées ainsi que le PSI ont tous au moins déve-
Coûts de réalisation 2 M€*
loppé et réalisé une installation pilote (entre 50
et 110 kg/h) ou un démonstrateur (2 t/h). *Valeur 2004 - Webinaire : NEW R&D ADVANCES IN
HYDROTHERMAL GASIFICATION FOR BIOFUEL PRODUCTION
2021 (https://vimeo.com/510267625).

4.2.2 PSI – TreaTech et l’HydroPilot (110 kg/h)


En Suisse, c’est le Paul Scherrer Institut (PSI), pôle aujourd’hui intégré dans l’installation pilote pré-
de recherche dédié à l’énergie, qui est à l’origine industrielle (voir figure 12) du PSI et de TreaTech.
du développement de la technologie Gazéification
Hydrothermale en Suisse (début des années 2000). Tandis qu’une saumure plus ou moins riche en
A l’inverse des autres développeurs, le PSI s’in- nutriments (P, K, Ca, S…) et en métaux est récu-
vestit dans le développement de la Gazéification pérée en sortie du séparateur de sels, l’effluent
Hydrothermale « avec catalyse intégrée », large- aqueux en sortie du procédé catalytique contient
ment inspiré au départ par les travaux réalisés la quasi-totalité de l’azote et un très faible taux
par le Pacific Northwest National Laboratory, (PNNL), de carbone organique. Jusqu’à 99 % du carbone de
appartenant à l’US Department of Energy. l’intrant initial est converti en syngaz démontrant
les excellentes performances de conversion du
Fort des connaissances acquises, une première réacteur catalytique.
unité « prototype » (KONTI-C, 1–2 kg/h) a d’abord
été construite en 2014 dans le cadre du projet Deux pionniers suisses – Frédéric Juillard et Gaël
SunCHem. Cela a permis de tester et d’éprouver Peng – s’intéressant à l’industrialisation de la
à la fois un 1er concept d’un séparateur de sels et technologie développée par le PSI, créent en 2015
d’un catalyseur. Les premiers essais ont été réali- la start-up TreaTech. Les deux entités ont collaboré
sés avec la catalyse. Des tests sur des microalgues sur la conception et réalisation de leur première
et du glycérol ont été réalisés dans un premier installation pilote quasi industrielle sachant trai-
temps avant d’ouvrir la voie à des intrants plus ter jusqu’à 110 kg/h d’intrants (voir Tableau 1
complexes comme des boues de STEU. En paral- ci-dessous). TreaTech dispose par ailleurs de son
lèle, la conception du séparateur de sels a été propre prototype équipé d’un séparateur de sels
améliorée et un équipement à taille industrielle optimisé pour le traitement de boues de STEU,
réalisé puis testé avec le support du KIT à travers une conception brevetée bien différente de celle
son pilote VERENA : ce séparateur se retrouve développée par le PSI.

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Les travaux de développement scientifique du Tableau 5 : Carte d’identité du projet HydroPilot.


PSI sur la Gazéification Hydrothermale avec
Nom du projet Hydropilot
catalyse et la réalisation de son pilote commun
Porteur du projet / TreaTech / PSI, KASAG,
avec TreaTech ont été très fortement soutenus
partenaires Exergo, Afry
par l’Office Fédéral de l’Énergie Suisse. Sa princi-
Paul Scherrer Institut (Suisse,
pale motivation était dès le départ d’appuyer le Localisation
Villigen)
développement d’une solution alternative à l’inci-
Année de MES 2020
nération des boues et digestats de boues de STEU.
Il faut savoir que depuis l’interdiction de l’épan- Capacité maximale 110 kg/h, 20 % MS
dage des boues sur les terres agricoles en 2006, TRL 6
l’incinération est la seule solution de traitement
autorisée en Suisse. Catalytique avec séparateur
Type de technologie
de sel intégré

Ce projet pilote est censé également apporter Conditions opératoires 400–450 °C, 250–280 bar
une réponse à la nouvelle réglementation natio-
nale applicable à partir de 2026 en Suisse qui Boues et digestats de boues
imposera la récupération maximale du phosphore Intrants
de STEU
des boues de STEU à tous leurs exploitants. À ce
titre, PSI et TreaTech travaillent avec des parte- Valorisation du gaz Non, torchère
naires pour identifier et rendre industrialisable Des recherches sont en
un procédé technico-économique valable de Valorisation des co-produits cours pour valoriser le
récupération, transformation et revalorisation du phosphore
phosphore en un produit commercialisable. Coûts de réalisation CAPEX : 2 M€

La société TreaTech se concentre prioritaire-


ment sur le développement d’unités industrielles 2023. Sa conception tient compte du retour d’ex-
opérationnelles dès 2025 visant le marché du périence réalisée sur le pilote commun avec le PSI.
traitement des boues issues de STEU et des Le déploiement d’un 1er projet de démonstration
déchets organiques industriels. Elle a lancé la à taille industrielle est envisagé à partir de 2025
mise en place de sa 1ère installation pilote qui sera avec une capacité de traitement entre 2 et 4 t/h
mobilisable sur un site client et disponible dès fin d’intrants.

Figure 12 : Photo du PSI de l’installation « Hydropilot » installée en 2020 à Villigen (CH) en collaboration avec TreaTech
(source : M. Fischer, Paul Scherrer Institute, 2020).

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La technologie développée autant par PSI Tableau 6 : Exemple de flux massiques pour une unité
que TreaTech se base sur la Gazéification commerciale de Gazéification Hydrothermale catalytique de
6 t/h (Source : TreaTech).
Hydrothermale avec catalyse intégrée dont la par-
ticularité est d’abaisser la température de réaction Intrants Produits, coproduits et effluents
dans le réacteur à environ 400 °C et de générer
un syngaz particulièrement riche en méthane Gaz renouvelable 17 %m
(jusqu’à 70 % sans ajout artificiel d’hydrogène).
Phosphore 0,4 %m
Matière sèche
Le déchet introduit dans le pilote est tout d’abord 20 %m Ammonium ≈ 20 g/l
comprimé à 280 bar et ensuite préchauffé à tra- Matière organique recyclé dans
vers un échangeur de chaleur à environ 360 °C 1 %m
le procédé
permettant de valoriser au mieux la chaleur
Déchets ultimes 7 %m
résiduelle du réacteur de gazéification et de limi-
ter les pertes du système au strict minimum. Le Eau recyclée dans le procédé 11 %m
Eau 80 %m
séparateur de sels est chauffé à environ 450 °C Eau de procédé 62 %m
et accueille en premier l’intrant pour séparer les
composants solides (minéraux, métaux) du flux
carboné visé pour la Gazéification Hydrothermale. taux de récupération de phosphore et d’ammo-
Après un passage dans un capteur de soufre lui nium supérieur à 80 %.
retirant définitivement toute trace de soufre nui-
sible pour le fonctionnement du catalyseur, le flux Le tableau ci-dessous (Tableau 6) montre un
carboné rentre dans le réacteur de gazéification exemple de répartition des sous-produits issus de
catalytique pour être transformé en un mélange la Gazéification Hydrothermale catalytique d’une
de syngaz et d’eau résiduelle contenant prin- unité commerciale de 6 t/h traitant des boues
cipalement de l’azote (ammonium). Après une digérées.
séparation des deux phases gazeuse et liquide
en sortie, on obtient un syngaz toujours à haute
pression contenant principalement du méthane
(CH4 ≤ 70 %), de l’hydrogène (H2 : 0 à 10 %) et du
gaz carbonique (CO2 : 30 à 35 %). Le rendement
de conversion du carbone atteint entre 85 et
99 % selon la complexité du type d’intrant ou de
mélange d’intrant valorisé. Par ailleurs, plus de
98 % du carbone organique total (COT) contenu
dans les boues d’épuration est dégradé avec un

Figure 13 : schéma de principe du pilote de Gazéification Hydrothermale (source : TreaTech).

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4.3 Les développeurs privés


4.3.1 SCW Systems et l’usine industrielle d’Alkmaar (16 t/h)

S
CW Systems est à ce jour la société au monde Tableau 7 : Carte d’identité du projet SCW Systems.
la plus avancée de la technologie avec la
Nom du projet Usine d’Alkmaar 1
mise en service courant 2021 de sa première
installation industrielle. Elle sait traiter en continu Porteur du projet Société projet commun entre SCW
(≈ 7 500 à 8 000 h/an) jusqu’à 16 t/h d’intrants et / partenaires Systems et Gasunie New Energy
totalise une puissance installée d’environ 20 MW Localisation Alkmaar, Pays Bas
thermique (dépendant du type d’intrant / mélange
Année de MES Avant fin 2022
d’intrants et de sa concentration). La photo ci-après
illustre les installations actuelles (Figure 14) et le Capacité
16 t/h (4 modules de 4 t/h), 20 MWth
Tableau 7 leurs détails. maximale

• L’activité de SCW Systems a commencé en 2014 TRL 8


par le développement d’un 1er pilote de 100 L/h Type de
Haute température (sans catalyse)
fonctionnant à 10 % de glycérol construit à technologie
Alkmaar. Il était alimenté par un réchauffeur Enchaînement en série d’une désulfu-
électrique pour assurer la montée en tempéra- Traitement de gaz ration, une méthanation catalytique et
ture. Un obstacle majeur du procédé à l’époque d’une séparation membranaire du CO2
était l’évacuation des inorganiques de l’installa- Eau résiduelle : préparé en qualité
tion, dû notamment à des dépôts de sels et de potable
carbone. SCW Sytems a déposé plusieurs bre- Valorisation des
CO2 : minéralisation (poussière
co-produits
vets avec des solutions ayant levé cet obstacle (liquide, gazeux,
carbonée)
(non encore rendus publics). Métaux : volonté de récupération des
solide)
métaux économiquement les plus inté-
• Ce prototype, une fois largement testé et ressants (volume et/ou valeur)
amélioré, SCW Systems a lancé en 2016 Conditions
Supérieur à 374 °C, 250–300 bar
le développement montage d’un projet de opératoires
démonstration industrielle avec une capacité de
Boues STEU, déchets agricoles, déchets
traitement de 2 t/h (≈ 2 MWth) qui a été réalisé agroalimentaires, déchets ménagers,
en 2018. Pour appuyer le projet, une collabora- Intrants
biodéchets, effluents industriels,
tion avec Gasunie New Energy a été signée avec plastiques.
un apport financier de 15 M€ assurant l’essen- CAPEX du projet démonstrateur :
tiel du financement lié au développement et la Coûts de réalisa-
tion (estimation) ≈ 15 M€
réalisation du projet de démonstration (passage Projet Alkmaar 1 : entre 45 à 55 M€

Figure 14 : Vue aérienne du site d’Alkmaar de SCW Systems (source : invest-nl.nl).

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d’un TRL 6 à 8). Fin 2018, les premiers tests de Enfin SCW Systems ne s’arrête pas là dans ses
démarrage ont été mis en œuvre. En décembre ambitions et sa feuille de route pour les pro-
2019, le projet de SCW Systems est devenu le chaines années est dense :
premier projet Gazéification Hydrothermale
au monde ayant réussi une injection d’un gaz • D’ici 2024/2025, mise en œuvre de deux autres
conforme dans le réseau de Gasunie, l’équiva- projets Gazéification Hydrothermale de 40 MWth
lent de GRTgaz au Pays-Bas. Durant la phase de chacun totalisant une puissance de 100 MWth
test et d’optimisation le démonstrateur a vécu avec une capacité de production de gaz d’en-
plusieurs phases d’amélioration testant autant viron 0,5 TWh/an. Le projet Alkmaar2A a déjà
la conversion de différents intrants avec l’injec- été approuvé par l’État hollandais en 2020 et
tion d’un gaz conforme dans le réseau que la devrait être réalisé pour 2024 au plus tard.
résistance des matériaux mis en œuvre. Sur une
partie du démonstrateur le choix des alliages a En parallèle, SCW Systems a déjà lancé le dévelop-
été repris et remplacé par des matériaux plus pement d’autres sites en plus de celui d’Alkmaar
résistants ayant finalement donné satisfaction qui cumulera une puissance installée de 100 MWth
après une nouvelle phase de tests approfondis. d’ici 2025 : l’entreprise vise en particulier des sites
industriels proches des grands ports néerlan-
• Dès 2018, SCW Systems a déposé un 1er pro-
dais intéressés par une meilleure valorisation de
jet Gazéification Hydrothermale à vocation
leurs déchets. D’ici 2030, elle veut ainsi dévelop-
industrielle (Alkmaar 1, capacité de traitement :
per une puissance thermique globale installée de
16 t/h (20 MWth), voir tableau 7) dans le cadre
650 MWth dans les grands ports de Rotterdam et
de l’appel à projet annuel de l’État néerlandais
d’Eemshaven (proche de la frontière allemande).
finançant des projets d’expérimentation de pro-
Ensemble, avec les installations sur le site d’Alk-
duction d’énergies renouvelables. SCW Systems
maar, SCW Systems projette à cet même horizon
a ainsi obtenu pour son projet une rémuné-
d’atteindre un parc d’installations industrielles
ration garantie sur 12 ans découpée à travers
totalisant en base une capacité globale de pro-
l’obtention d’une subvention de 55 €/MWhPCS
duction de gaz injectable d’au moins 10 TWh/an
et d’un prix de vente du gaz injecté de 20 €/
aux Pays-Bas et d’environ 40 TWh/ an dans toute
MWhPCS. Devant fonctionner en continu, le projet
l’Europe. Pour précision, le gouvernement néer-
Alkmaar 1 de SCW Systems peut ainsi espérer
landais table sur une production nationale de gaz
atteindre une rémunération globale d’environ
renouvelable et bas-carbone minimale à partir de
112 M€ sur la durée du contrat.
Gazéification Hydrothermale de 11,2 TWh en 2030
Jouant sur la massification des installations avec assurant ainsi 57 % de la production globale de
le souhait de développer des projets de plusieurs gaz renouvelable et bas-carbone visée en 2030b.
dizaines voire centaines de mégawatt par site,
SCW Systems mise également sur la minéralisa- À noter que SCW Systems ayant rendu public que
tion du CO2 en excès : elle a développé et breveté très peu de détails, l’essentiel des informations
un procédé spécifique le transformant dans une ci-dessus est issu du rapport « BTG openbaar ein-
poudre de carbonea. Sa valorisation intéresse des drapport vergassing 11 maart 2021 » [20] complétées
industriels des secteurs du ciment, du papier… par des informations oralement communiquées
aussi pour son éligibilité à l’obtention de crédit par le directeur du développement commercial de
carbone. SCW Systems.

4.3.2 ProBiomass B.V et le projet SUPERSLUDGE


S’appuyant sur une technologie du KIT, ProBiomass subventionné par les agences de l’eau du Pays-Bas
a pu concevoir un premier prototype (capacité (les agences de De Dommel et d’Aa en Maas sont
d’environ 0,2 L/h) dès 2011 et construit dans le impliquées dans le projet).
cadre du consortium SUPERSLUDGE (Tableau
8). L’objectif principal était de mieux connaitre Complétées par deux essais à l’échelle pilote
les effets d’une conversion des boues de station (capacité 50 L/h) avec des boues d’épuration
d’épuration par Gazéification Hydrothermale. C’est sur l’installation VERENA du KIT, une première
pour cette raison que le projet a été fortement conception préliminaire pour la mise en œuvre

a
Projet COCOMINE-2 (https://www.kansenvoorwest2.nl/en/projecten/cocomine-2).
b
Kamerbrief Routekaart Groen Gas (archive parlement néerlandais, consulté le 12/01/2022)

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finale d’un démonstrateur sachant traiter 1 t/h de Tableau 8 : Carte d’identité du projet SUPERSLUDGE.
boues a été développée jusqu’en 2016.
Nom du projet SUPERSLUDGE
ProBiomass / Agences de l’eau « Aa en
Pour des raisons économiques, il a été décidé de Porteur du projet
Maas » et « Dommel », Entreprises SNB
construire d’abord une installation pilote pré- / partenaires
et Glaesum
industrielle de 150 kg/h à petit budget (0,7 M€),
Localisation Pays Bas
chose faite dès début 2018 avec le lancement
d’une phase de prise en main du pilote. Cette Année de MES 2018
phase fut suivie de deux années de tests d’exploi- Capacité
150 kg/h, ≥ 17 % MS
tation destinés à optimiser le procédé. L’objectif maximale
était de statuer sur une base de conception TRL 6
finale permettant de lancer la réalisation du pro- Type de
Non catalytique
jet démonstrateur 1 t/h comme ultime étape de technologie
développement de leur procédé. Conditions
650 °C, 350 bar
opératoires
Concernant la séparation des sels, le consortium a Intrants Boues de STEU
utilisé un séparateur cyclone dont la gestion a été Non (torchère) +
modifiée pour optimiser la séparation des sels et Collaboration R&D avec la société
limiter ainsi la perte de matière organique dans Valorisation du MicrobEnergy (All) rachetée depuis par
le flux destiné à être transformé en gaz dans le gaz HZ-Innova (Suisse) sur un concept de
gazéifieur [20]. traitement du syngaz par méthanation
biologique.

Concernant la brique de traitement du syngaz, Valorisation des


N.C
co-produits
ProBiomass a fait appel à l’équipementier alle-
mand MicrobEnergy, spécialiste de la méthanation Coûts de
0,7 M€
réalisation
biologique [21], lui apportant à travers une étude
de faisabilité la preuve (Proof of concept) que son
procédé de méthanation est capable de s’adap-
ter pour rendre conforme à l’injection le syngaz De même, ProBiomass a fait varier certains para-
issu du procédé Gazéification Hydrothermale de mètres pour connaître leur impact sur le CAPEX
ProBiomass. et la rentabilité de potentiels projets traitant des
boues de STEU :
En 2020, ProBiomass évaluait le coût d’investis-
• Une durée de fonctionnement de 8 000 h/an
sement (CAPEXa) global moyen d’un futur projet
associée à un rendement thermique de 88 %,
industriel avec sa technologie, en fonction de sa
un taux de conversion de 95 %, un PCS de
taille (intégration d’effets déchelle), à :
21,6 MJ/kg MS et une siccité d’au moins 17 %
• 5,5 M€ pour une Gazéification Hydrothermale de l’intrant donnaient les meilleurs résultats.
de 1 t/h
• 7,3 M€ pour une Gazéification Hydrothermale
de 1,5 t/h
• 17,9 M€ pour une Gazéification Hydrothermale
de 5 t/h

4.4 Les développeurs français


4.4.1 Le CEA LITEN et le prototype Gaseau

En France, le CEA LITEN à Grenoble s’intéresse température avec un développement propre ayant
depuis le début des années 2010 à la tech- abouti à la mise en œuvre en 2016 d’un 1er pro-
nologie Gazéification Hydrothermale à haute totype sachant traiter en continu jusqu’à 10 kg/h

a
Présentation de la société Pro-Biomass envoyée à GRTgaz, données publiques mais présentation confidentielle ne pouvant
être jointe à cette étude.

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d’intrants. En 2019, la conception d’une installa- Tableau 9 : Carte d’identité du prototype Gaseau.
tion pilote traitant environ 100 kg/h a été initiée
Nom du projet GASEAU
dans le cadre du projet Cométha en collaboration
avec VINCI Environnementa. Depuis, le prototype Porteur du projet
CEA LITEN
/ partenaires
a été remplacé par un nouveau, de taille iden-
tique, bénéficiant des travaux d’amélioration dans Localisation Grenoble, France
la conception du procédé. Au printemps 2022, le Année de MES 2016/ 2021
CEA et GRDF se sont associés pour dynamiser et Capacité 10 kg/h, 10 %
finaliser les travaux de développement du pro- maximale (prototype en continu)
cédé Gazéification Hydrothermale dans le but de TRL 4
réaliser au plus tôt, avec un industriel intéressé, le Type de
projet pilote préindustriel visé. Haute température
technologie
Conditions
Le prototype GASEAU est un réacteur d’étude avec opératoires
600 à 700 °C, 250 à 300 bar
fonctionnement en continu, sur des plages de
Boues et digestats de boues de STEU,
débits allant de 1 à 10 kg/h maximum. L’énergie Intrants
liqueur noire, micro-algues…
thermique nécessaire au procédé est apportée par Valorisation du
l’extérieur avec un chauffage électrique sans récu- Non (torché)
gaz
pération de chaleur.
Valorisation des
Non
co-produits
La séparation des inorganiques se fait par effet
Coûts de
gravitaire en bas à l’intérieur du gazéifieur, via la réalisation
N.C
présence d’une zone froide pour piéger ces der-
niers. Le CEA a testé plus d’une dizaine d’intrants,
comme des liqueurs noires, algues, digestats, ou sans séparateur de sels dédié), la corrosion et
boues et digestats de boues, vinasses… la tenue mécanique des équipements, la bonne
conversion du carbone contenu dans la matière
Selon le CEA les principaux verrous technolo- organique et enfin la valorisation des sortants
giques à lever pour développer la Gazéification (eau riche en ammonium et des solides comme
Hydrothermale sont la gestion de l’énergie (et la des minéraux et métaux).
récupération de chaleur), la gestion des sels (avec

4.4.2 Leroux & Lotz Technologies, 1er équipementier français à se


lancer dans le développement de la technologie

Dernier spécialiste français de la conversion de


« Biomass and Waste to Energy », Leroux & Lotz
Technologies est une société nantaise de 90 colla-
borateurs faisant partie du groupe Altawest. Fort
de son expérience de plus de 35 ans, Leroux & Lotz
Technologies réalise la conception, la réalisation
et la mise en service d’installations de conver-
sion (combustion par chaudière, pyrogazéification,
oxydation hydrothermale) et de valorisation de
différents types de combustibles renouvelables
et/ou fossiles (biomasses, CSR, déchets urbains et
industriels…) en énergie (thermique, électrique et
gaz).

Venant initialement des chaudières biomasse,


Leroux & Lotz Technologies a développé ces Figure 15 : Démonstrateur d’oxydation hydrothermale réali-
sée par Leroux & Lotz Technologies dans le cadre du projet
dernières années avec la pyrogazéification et Leanships H2020.

a
Cométha Matinée Technique – 21 spet. 2018 (https://www.syctom-paris.fr/fileadmin/mediatheque/documentation/cometha/
Cometha_Dossier-information.pdf)

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l’oxydation hydrothermale (OHT) deux nouvelles L’ambition de Leroux & Lotz Technologies est de
technologies innovantes pour différents types déployer cette technologie avec une première
de marchés aussi bien en France qu’à l’étran- commercialisation à partir de 2025/2026 grâce
ger. Dans sa stratégie d’innovation, le pas n’était au retour d’expérience acquis dans le cadre du
pas loin pour que l’entreprise s’intéresse à la projet de démonstration GHAMa. Au même titre
Gazéification Hydrothermale ce qui a été fait en que pour les autres technologies, Leroux & Lotz
s’associant dès 2019 au 1 er projet de démons- Technologies se positionne avec la Gazéification
tration GHAMa (2 t/h, ≈ 2 MWth) à Saint-Nazaire Hydrothermale comme fournisseur d’équipement
d’abord en tant qu’intégrateur de la technologie de la brique « cœur du procédé » clé en main
Gazéification Hydrothermale. Fin 2021, Leroux visant en particulier des tailles d’installations trai-
& Lotz Technologies a décidé d’aller encore plus tant entre 4 et 8 t/h de déchets organiques issus
loin en lançant le développement de sa propre d’activités gérées par des collectivités territoriales
technologie (Gazéification Hydrothermale haute (STEU, déchets ménagers, biodéchets), industriels
température) en signant un partenariat avec le KIT et agriculteurs.
en Allemagne, le 1er développeur scientifique de la
technologie en Europe (voir chapitre 4.2.1).

4.4.3 VINCI Environnement, un intégrateur qui s’investit dans la


technologie
VINCI Environnement, filiale de VINCI Construction la Gazéification Hydrothermale en France et en
Grands Projets, est un acteur historique français Europe.
pour la réalisation de projets industriels de trai-
tement et valorisation de déchets. La centaine Afin de répondre à ses ambitions, elle a signé un
de ses collaborateurs s’appuie sur les fonctions accord de partenariat avec la société GENIFUEL
supports pluridisciplinaires du Groupe VINCI pour CORPORATION, développeur historique reconnu
mener à bien ses projets, en particulier dans sa de la technologie Gazéification Hydrothermale
division hydraulique (conception/construction de aux USA, dont le niveau de maturité technolo-
station d’épuration des eaux et traitement des gique est suffisamment élevé pour intégrer à
boues) mais aussi depuis plusieurs années dans le terme cette « brique procédé » dans une installa-
domaine des installations de méthanisation dans tion clef en main.
lequel VINCI Environnement s’est positionné avec
son propre procédé (à voie sèche). La technologie développée est un procédé cataly-
tique en deux étapes qui aligne une liquéfaction
Compte-tenu des enjeux et des opportunités à venir avec une Gazéification Hydrothermale et dont
dans le domaine des gaz renouvelable et bas-car- plusieurs installations de démonstration (capacité
bone incluant l’hydrogène, VINCI Environnement de traitement : ≈ 0,5 t/h) sont en fonctionnement.
souhaite élargir son offre en prenant toute sa place Elles ont d’ailleurs fourni ces dernières années
dans le futur développement et le déploiement de l’opportunité de tester un grand nombre d’intrants

Figure 16 : Installation mobile de GENIFUEL.

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différents : la première installation fonctionne et STEU en Floride). Les installations sont mon-
depuis 2017 sur des algues ; parmi celles en cours tées en container ce qui les rend facilement
de développement, GENIFUEL travaille aussi transportables d’un site à l’autre permettant de
sur d’autres intrants comme différents types de démultiplier les expériences avec différents pros-
boues de station d’épuration (STEU de Vancouver pects et intrants (Figure 16).

4.5 Les principaux défis spécifiques à relever pour


réussir le passage à l’échelle industrielle

T
ous les développeurs de la technologie • Maîtriser au mieux la séparation des solides
doivent faire face aux conditions opéra- (sels minéraux, métaux…) ;
toires très spécifiques (supercritiques) de la
• Optimiser le taux de conversion du carbone
Gazéification Hydrothermale. Plusieurs défis tech-
pour chaque type ou mélange d’intrants ;
nologiques sont ainsi à relever par chacun afin de
développer et industrialiser la technologie : • Optimiser la récupération des sortants (gazeux,
liquides et solides).
• Optimiser les apports et la gestion de l’énergie
thermique dans le procédé ;
• Maîtriser au mieux la corrosion et la tenue
mécanique des matériaux ;

4.5.1 Optimiser la récupération et la gestion de la chaleur dans


le procédé
Il existe deux critères pour évaluer l’efficacité énergétique du procédé Gazéification Hydrothermale :

Energie des gaz récupérés


Rendement de conversion énergétique =
Energie contenue dans l’ intrant

Energie des gaz récupérés - Consommation énergétique


Rendement énergétique global =
Energie contenue dans l’ intrant

Pour la consommation énergétique du système et 2. La phase de fonctionnement en continu : outre


le calcul du rendement énergétique global il faut les besoins inchangés en énergie électrique,
distinguer deux cas de figure : l’essentiel des consommations thermiques est
lié à la compensation des pertes thermiques de
1. La phase de démarrage ou mise en chauffe de l’équipement ayant le plus haut besoin de tem-
l’installation : c’est la phase qui génère la plus pérature du système, soit le séparateur de sels
grande consommation énergétique essen- (Gazéification Hydrothermale avec catalyse)
tiellement thermique servant à préchauffer soit le gazéifieur (Gazéification Hydrothermale
l’installation de la température ambiante à la haute température). D’autres pertes thermiques
température de consigne permettant le pas- faibles sont liées aux résidus solides et liquides
sage au fonctionnement en continu. Le besoin générés en sortie du séparateur de sels et du
en énergie électrique est très limité et concerne séparateur de phase.
essentiellement le fonctionnement de la pompe
haute pression (plus quelques consommateurs Un rendement élevé des échangeurs de chaleur
annexes : vannes, sondes…) comprimant l’in- (> 85 % !) est essentiel pour atteindre des rende-
trant en phase liquide ce qui ne nécessite par ments énergétiques globaux élevés ciblés pour les
nature que très peu d’énergie. installations industrielles (> 70 à 75 % a minima) !

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Le procédé à haute température, s’opérant à Gazéification Hydrothermale. En conséquence,


des températures se situant entre 550 à 700 °C, plus un intrant est énergétiquement riche, plus
nécessite par nature un apport énergétique plus sa production de syngaz et le rendement énergé-
conséquent que le procédé avec catalyse, fonc- tique global du procédé augmentent.
tionnant entre 360 et 400 °C. La conception et le
• En augmentant le taux de matière sèche d’un
rendement des échangeurs de chaleur et le choix
mélange ou d’un déchet organique, son contenu
des moyens de production thermique les mieux
en carbone augmente et proportionnellement
adaptés sont ainsi au centre de la conception des
le pouvoir calorifique brut de l’intrant et indi-
différents développeurs de la technologie.
rectement celui du gaz de synthèse. À noter : le
taux de conversion énergétique est générale-
Dans le pilote Hydropilot de PSI/TreaTech, le ren-
ment compris entre 85 et 99 % selon la teneur
dement des échangeurs de chaleur installé a été
en cendre / minéraux de l’intrant
mesuré à 88 % rendant ainsi caduque l’équipement
de refroidissement (installé par précaution) du • Le rendement thermique des échangeurs a
flux principal en sortie du gazéifieur Gazéification atteint plus de 85 % avec les pilotes actuels
Hydrothermale.
Le taux de Matières Sèches (dont son taux de
Dans le cas de la Gazéification Hydrothermale MO et de carbone) dans l’intrant et son pouvoir
avec catalyse, c’est le séparateur de sels qui est calorifique associé sont donc deux éléments
chauffé et maintenu à la plus haute température clefs pour l’efficacité énergétique de la technolo-
du système (environ 450 °C chez TreaTech), tous gie. Cependant, son augmentation peut avoir des
les autres équipements du procédé (gazéifieur, conséquences :
préchauffage de l’intrant) sont alimentés par le
► Produits plus difficilement manipulables :
seul échangeur de chaleur. La fourniture ther-
certaines ressources visées se comportent
mique peut être assurée, autant pour la phase de
« comme de l’eau » jusqu’à un taux de matières
démarrage que pour la phase de fonctionnement
sèches de l’ordre de 20 % mais d’autres
en continu, par un seul équipement de production
deviennent beaucoup plus difficiles à manipu-
de chaleur dont le choix de l’énergie primaire est
ler et à injecter dans un réacteur. La rhéologie
complètement libre (gaz, bois, électrique, solaire…).
de ces produits peut rendre problématique la
pressurisation de la ressource. Des pompes
Dans le cas de la Gazéification Hydrothermale
de pressurisation à fort débit et à haute pres-
haute température, c’est le gazéifieur qui dis-
sion n’existent pas sur le marché. Cependant
pose du plus haut niveau de température et c’est
il existe de nombreux intrants avec des sic-
le séparateur de sels et les autres équipements
cités bien supérieures à 20 % qui peuvent
qui sont alimentés par un ou plusieurs (en cas-
être convertis et pour lesquels une offre de
cade) échangeurs de chaleur. Pour la fourniture
pompes adaptées existe. À noter qu’il est pos-
thermique, il peut être judicieux d’opérer une dis-
sible d’améliorer la viscosité en préchauffant
tinction entre un moyen de production dédié à
l’intrant avant son entrée dans la pompe ou
atteindre les conditions supercritiques (≈ 374 °C)
d’injecter certains intrants en parallèle de
et un autre, bénéficiant d’un mode de chauffe plus
l’eau dans le gazéifieur ou le séparateur de
fin (résistance électrique par exemple) qui ajuste
sel selon le type de technologie Gazéification
le niveau de température dans le gazéifieur.
Hydrothermale.
Le contenu énergétique du gaz de synthèse Le taux de MS est généralement limité à ≈ 20 %
généré est directement lié au taux de conversion pour les biomasses d’origines biogéniques (taux
du procédé Gazéification Hydrothermale mis en au-delà duquel d’une part la ressource peut
œuvre (pression, température, temps de séjour) et devenir difficile à injecter et d’autre part la
au contenu énergétique de l’intrant qui dépend réactivité de l’eau supercritique devient moins
de son contenu en matière organique, notamment efficace).
celui en carbone.
Toutefois, après échanges avec au moins un
développeur, ce taux peut monter à 35 % dans
À tonnage d’intrant traité constant, plus l’intrant
le cas d’un mélange glycérol, boues de STEU et
est riche en énergie plus le débit de gaz et son
plastiques et jusqu’à 80 % à l’échelle laboratoire
contenu énergétique sera élevé, à consomma-
si des intrants non biogéniques sont utilisés
tion énergétique quasi constante dans le système

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(plastiques, monomères, polymères…) dilués ► Nature du catalyseur


dans de l’eau et solvants.
► Régénération du catalyseur et captage du
Les leviers d’optimisation pour fiabiliser le soufre en amont : le soufre en trop grande
procédé Gazéification Hydrothermale sont les concentration vient raccourcir fortement la
suivants : durée de vie et l’efficience du catalyseur. Il doit
être éliminé ou séparé en amont du gazéifieur
> Le rendement des échangeurs de chaleur
catalytique. Des taux élevés de séparation
> L’efficacité des apports énergétiques (moyens minérale et de captage (> 90 %) du soufre sont
de production thermiques en fonction du indispensables pour garantir un fonctionne-
niveau de température cible) ment dans la durée.
> Le taux de récupération thermique de la cha-
Le captage du soufre en amont du catalyseur
leur se trouvant dans les sortants liquides et
comme le recyclage et remplacement du cataly-
solides
seur génèrent des coûts induits pesant dans les
Le procédé Gazéification Hydrothermale avec budgets d’OPEX. Un taux de recyclage du cata-
catalyse permet de travailler à des tempéra- lyseur > 75 % permet de limiter sensiblement la
tures plus faibles (360 à 450 °C) avec des enjeux dépense récurrente lors du renouvellement du
énergétiques certes moins importants mais res- catalyseur.
tant primordiaux. Plusieurs paramètres sont à
prendre en compte pour assurer l’efficience de la
technologie :

4.5.2 Assurer au mieux la séparation de la matière inorganique


(sels minéraux et métaux) pour faciliter la gazéification de la
matière organique

Un certain nombre d’intrants de la Gazéification parois. Ces sels posent des problèmes de bou-
Hydrothermale dont les boues de station d’épu- chage/agglomération dans les réacteurs.
ration en sont un parfait exemple, contenant une
fraction importante de matière minérale dissoute Trois solutions permettent de remédier aux pro-
ou non dans l’eau. En conditions supercritiques, la blèmes de bouchage et d’agglomération dans les
solubilité de ces minéraux diminue drastiquement réacteurs :
et ces derniers précipitent dans l’eau. D’après la
1. Éliminer les sels en amont du réacteur par
littérature, on distingue deux types de sels :
exemple par un traitement chimique.
• Les sels de type 1 caractérisés par l’existence
2. Gérer les sels par la mise en œuvre d’un sépara-
d’une phase liquide dense au-delà du point cri-
teur de sels en amont du réacteur (technologie
tique de l’eau. Ces sels ne posent, en principe,
TreaTech)
aucun problème.
3. Gérer les sels par la mise en œuvre d’une
• Les sels de type 2 caractérisés par leur précipi- séparation par cyclone en amont du réacteur
tation quand on s’approche du point critique de (technologie KIT).
l’eau. Ils forment une phase « collante » sur les

4.5.3 Optimiser le choix des alliages métalliques en fonction de


la localisation des contraintes mécaniques et des risques
de corrosion

La tenue mécanique des réacteurs sous les condi- corrosion due à l’agressivité de l’eau supercritique
tions supercritiques (température supérieure à et des minéraux contenus dans l’intrant.
500 degrés) est impactée par le phénomène de

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À noter qu’il est intéressant de passer par une (par exemple au travers d’une paroi), la partie
phase de test longue durée de ces échantillons externe du réacteur sera plus chaude que la res-
d’alliage afin de trouver ceux qui seront adaptés source à l’intérieur de celui-ci. Cette différence de
pour la conception de réacteurs dotés d’une capa- température va créer des contraintes mécaniques
cité de traitement supérieure. importantes pouvant limiter la durée de vie du
réacteur. D’autre part, si le chauffage s’opère à
Pour établir la réaction le procédé Gazéification l’intérieur du réacteur par oxydation d’une partie
Hydrothermale, il faut apporter de l’énergie à la de l’intrant, le rendement énergétique peut être
ressource. En chauffant par l’extérieur la ressource affecté.

4.5.4 Optimiser la conversion du carbone : définir les bons


paramètres opératoires
Le taux de conversion du carbone en méthane décomposition des éléments constituant le bio-
de synthèse est l’un des critères de performances char est un paramètre clef de dimensionnement
du procédé Gazéification Hydrothermale dès lors des réacteurs. Certaines molécules carbonées
qu’on recherche à produire des gaz de synthèse sont très facilement converties (exemple : étha-
le plus riche possible en CH4, H2 et potentielle- nol, glucose), d’autres le sont plus difficilement
ment aussi en d’autres hydrocarbures (CxHy). La (exemple : la lignine).

4.5.5 Optimiser la récupération des sortants : définir les bons


paramètres opératoires
Les sor tants générés par la Gazéification leur valeur économique relativement élevée
Hydrothermale se déclinent par type de phases, (unitaire ou en volume absolu) un intérêt spé-
chacune avec ses challenges et contraintes : cifique pour être récupéré et réutilisé comme
nouvelle ressource plus ou moins précieuse
• Sortants en phase gazeuse : ce sont les molé-
cules à haute valeur énergétique qui intéressent
Dans ces exemples, le taux de récupération
le plus car elles apportent le plus de valeur éco-
et séparation global de ces molécules est un
nomique. Toute autre molécule (CO, CO2, H2S…)
élément important pour l’appréciation de la
doit être soit séparée (CO2, H2S) soit convertie
viabilité technico-économique de la chaîne de
(CO).
procédés à mettre en œuvre pour leur valorisation
• Sortants en phases liquide et solide : outre le commerciale.
résidu liquide du procédé contenant principale-
ment de l’ammonium ce sont les résidus solides En résumé, en base, chaque développeur de la
inorganiques (minéraux et métaux) qui peuvent technologie a globalement les mêmes types de
porter des molécules d’intérêt qui méritent défis à relever pour optimiser le fonctionnement
d’être valorisées en aval et pour lesquels le et la rentabilité économique et énergétique de
statut déchet ne devrait pas/plus s’appliquer leur procédé de Gazéification Hydrothermale.
après transformation dans un produit commer- Leur réussite passe autant à travers de travaux de
cialisable. Il est ainsi d’intérêt de mettre en recherche, d’études et de développements spéci-
œuvre des procédés permettant de revaloriser fiques, souvent très innovantes que de partenariats
au mieux le résidu liquide ainsi que de sépa- pertinents avec des spécialistes issus d’autres sec-
rer et récupérer un très haut taux de solide du teurs adaptant des solutions ayant déjà fait leurs
flux introduit dans le système. Cela permettra preuves face à des contraintes similaires.
de valoriser au mieux :
> Les molécules de phosphate, de potassium
et/ou d’ammonium pour la production de
fertilisants.
> Les métaux (fer, aluminium, métaux rares…)
portant par leur rareté (ressource) et/ou

66
05
UNE TECHNOLOGIE AU
CŒUR DE L’ÉCONOMIE
CIRCULAIRE

5.1 Un modèle d’économie circulaire au profit des territoires 69


5.1.1 Typologies de co-produits 69
5.1.2 Co-produits énergétiques 69
5.1.3 Co-produits matières 71

5.2 Des voies de valorisation intéressantes aux impacts positifs 73


5.2.1 Des co-produits à haute valeur ajoutée pour le territoire 73
5.2.2 Un écosystème local d’acteurs à créer ou amplifier pour maximiser la recherche de plus-values 73
5.2.3 Générateur d’externalités positives 74

67
68
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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

5.1 Un modèle d’économie circulaire au profit des


territoires

L
a filière Gazéification Hydrothermale pro- augmentant encore la valorisation globale d’un
pose un modèle industriel basé sur la intrant donné.
transformation thermochimique d’un large
panel d’intrants en différents co-produits qui sont En s’appuyant sur ces atouts, elle cherche à s’inté-
autant que possible à valoriser à l’échelle du ter- grer dans une bio-économie locale qui, renforcée
ritoire. Produisant en base un gaz renouvelable par le déploiement d’unités compactes et modu-
ou bas-carbone plus ou moins riche en méthane laires, peut faire émerger de nombreuses autres
et hydrogène, la technologie permet en plus la externalités positives.
récupération des résidus solides et liquides qui,
après transformation, deviennent des co-produits

5.1.1 Typologies de co-produits


L’ADEME définit le « co-produit » comme une Ces derniers se fondant en règle générale sur
matière qui est créée au cours d’un processus de une référence fossile souvent très bon marché,
fabrication d’un produit, de manière intentionnelle les co-produits d’origine biogénique ont souvent
ou non. La Gazéification Hydrothermale fait ainsi besoin d’un soutien financier et réglementaire
émerger deux types de co-produits en fonction de des pouvoirs publics pour exister et permettre
leur usage final : l'émergence des technologies nécessaires à leur
génération.
• Les co-produits énergétiques : gaz renouvelable
et bas-carbone.
Pour s’affranchir de cet obstacle supplémentaire
• Les co-produits matières (solides et liquide) en phase d’émergence, les premiers modèles d’af-
générés après transformation des matières faire de la filière Gazéification Hydrothermale
solides et liquides résiduelles récupérées en s’appuient essentiellement sur la valorisation de
aval du procédé. sa production énergétique (co-produit gaz rendu
injectable dans le réseau) afin de pouvoir atteindre
Chaque co-produit à une valeur économique défi- une rentabilité minimale pour les premiers projets
nie normalement dans des marchés spécifiques. industriels.

5.1.2 Co-produits énergétiques

a) Production de méthane de synthèse (> 95 % de CH4)


Comme souvent rappelé au sein de ce livre blanc, Dans un contexte où l’autonomie énergétique
la Gazéification Hydrothermale permet de pro- aussi bien gazière qu’électrique est devenue un
duire, en fonction du type d’intrant, un gaz de enjeu majeur pour les territoires, le développe-
synthèse qui est soit du gaz renouvelable soit ment de capacités locales de production de gaz
du gaz bas-carbone en fonction de la composi- renouvelable et bas-carbone avec la même qua-
tion de la part biogénique et fossile de l’intrant lité et composition que le gaz naturel est un atout
initial. Après avoir passé différents procédés de stratégique de la Gazéification Hydrothermale,
traitement (séparation gaz-liquide, épuration ou aussi bien au niveau territorial que national.
méthanation), le gaz de synthèse est transformé
et mis aux normes a en méthane de synthèse
injectable dans le réseau de gaz. Il est alors
essentiellement composé de méthane (> 95 %).

a
Norme : la composition du gaz injecté doit être conforme à la norme gaz naturel du réseau de gaz.

69
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

b) Production de dioxyde de carbone (CO2)

La Gazéification Hydrothermale génère un gaz de du débit normal) la production de méthane mais


synthèse avec un taux de conversion très élevé du aussi de quasiment parvenir à une composition du
carbone (entre 85 % et jusqu’à 99 %). Il contient méthane de synthèse conforme à l’injection.
toujours du gaz carbonique (aussi bien avec la
Gazéification Hydrothermale avec catalyse qu’avec Comme présenté dans les chapitres précédents,
celle à haute température). Sa quote-part dépend quelle que soit la famille de techniques, le CO2 est
des intrants, des paramètres de conversion de un co-produit ayant une part significative (entre
l’installation et du fonctionnement opérationnel. 20–35 % en termes de quantité) parmi les sor-
tants. La valorisation du CO 2 est nécessaire car
À la suite de la séparation des phases gazeuse et elle pourrait faire émerger des boucles d’écono-
liquide, plusieurs dizaines de pourcents du gaz mie circulaire en réduisant les émissions globales
carbonique contenus dans le gaz de synthèse se du procédé, tout en s’alignant sur les objectifs cli-
retrouvent captées et stockées jusqu’à saturation matiques fixés aux niveaux national et européen.
dans le résidu liquide. La part restante en phase
gazeuse du gaz carbonique est traitée en aval Le CO2 est valorisable selon trois voies poten-
avec les autres molécules gazeuses (méthane, tielles et avec des exigences au niveau des taux
hydrogène…). de pureté à respecter qui peuvent varier :
1. Valorisation sans transformation : récupération
Le syngaz, ainsi allégé en gaz carbonique, est
assistée des hydrocarbures, géothermie pro-
ensuite traité par épuration ou méthanation et
fonde, secteur alimentaire ou pharmaceutiques,
enfin séparé de son contenu résiduel en gaz de
etc.
carbonique pour devenir un gaz conforme à l’in-
jection, le méthane de synthèse. Le gaz carbonique 2. Valorisation avec transformation chimique :
résiduel peut être dirigé vers différentes voies de synthèse organique, la minéralisation, la métha-
valorisation plus ou moins directes en fonction nation, etc.
de sa pureté (utilisation en serres agricoles, puits 3. Valorisation avec transformation biologique
de carbone synthétique soit par minéralisation pour l’usage énergétique : par exemple la
ou soit par séquestration dans les sols, projets de culture des microalgues.
Power-to-gas…).
Certaines voies de valorisation ont été iden-
Il existe toutefois une variante permettant d’évi- tifiées comme prometteuses (Tableau 10), par
ter le traitement du syngaz décrit ci-dessus : dans exemple l’usage dans la géothermie profonde, la
le cas d’un apport volontaires d’hydrogène dans méthanation et la production de méthanol, car
le procédé, soit directement dans le gazéifieur elles envisagent soit le stockage du CO2 à long
(procédé avec catalyse), soit dans l’équipement terme, soit l’utilisation directe du produit final,
de méthanation (procédé à haute température), qui réduisent les impacts environnementaux du
la part gaz carbonique est « consommée » par procédé. Il est à noter que ces impacts peuvent
l’hydrogène injecté. Cet apport permet non seule- être considérablement atténués dans le cas où la
ment d’augmenter sensiblement (jusqu’au double consommation énergétique liée à ces procédés

Tableau 10 : Synthèse des procédés de valorisation du CO2 en fonction des puretés minimales requises, de la maturité des
technologies de valorisation et de la quantité de produits issues de l'utilisation d'une tonne de CO2 (source GRTgaz).

Quantité produite pour une Maturité


Procédé Pureté minimale requise
tonne de CO2 valorisée (TRL)

Géothermie profonde ≥ 95 % 1 MWh d’électricité 6–8

Production des polycarbonates ≥ 20 % 10 t de carbonate 9


Méthanation ≥ 10 % 0,36 t de méthane 6–9
Hydrogénation (méthanol) ≥ 70 % 0,73 t de méthanol 7
2,64 t de minéraux
Minéralisation ex situ ≥ 20 % 7–9
carbonatés
Culture de microalgues ≥ 20 % 0,20 t d’algocarburant 7–9

70
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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

est assurée par le gaz de synthèse produit directe- carbonique avec de l’olivine, un minéral commun,
ment par la Gazéification Hydrothermale. pour permettre sa conversion en carbone solide.
En le baptisant « Clean-up », SCW Systems est en
En Europe, les deux développeurs de la techno- train d’en faire un produit et une marque commer-
logie de gazéification hydrothermale, TreaTech et ciale : une 1ère réalisation à taille industrielle a été
SCW Systems, se sont penchés sur la question de lancée en 2022 sur le site d’Alkmaar pour capter
la valorisation du gaz carbonique résiduel avec au moins 10 000 tonnes de CO2/an. Cet exemple
des résultats intéressants. SCW Systems a déve- témoigne de l’effet d’accélérateur que le soutien
loppé, dans le cadre du projet CoCoMine a, un européen peut apporter à ces filières et aux tech-
procédé de minéralisation faisant réagir le gaz nologies de valorisation associées

c) Production d’hydrogène (H2)

La production d’hydrogène décarboné est forte- Après avoir séparé la production d’hydrogène du
ment soutenue et attendue en Europe ainsi qu’en flux gazeux initial, elle peut être valorisée plus ou
France pour soutenir la transition énergétique et moins directement en fonction de sa pureté et de
répondre aux objectifs de neutralité carbone. La la tolérance de l’équipement d’usage choisi.
Gazéification Hydrothermale permet de produire
un gaz de synthèse plus ou moins riche en hydro- Cette capacité versatile de la Gazéification
gène (pourcentage volumique de 0 à 50 %) en Hydrothermale permet d’orienter sa production
fonction de la famille de procédé et d’un certain gazeuse vers un taux plus ou moins riche en
nombre de paramètres de la technologie choisie. méthane ou en hydrogène. De ce fait, les futurs
porteurs de projet pourront adapter leur produc-
tion selon les besoins du marché.

5.1.3 Co-produits matières

a) Les minéraux dont en particulier le phosphore (P) et le potassium (K)


Les conditions supercritiques de l’eau dans le permet, au même titre que l’azote (N) récupéré
procédé provoquent la précipitation des miné- à travers l’eau de procédé en aval (voir chapitre
raux sous forme de sels dans la partie basse du suivant), de produire, après une transformation
réacteur ce qui permet leur séparation du fluide adaptée, des fertilisants pouvant servir d'engrais
carboné. Afin d’éviter que ce phénomène se réalise dans l’agriculture. La récupération et la valorisa-
dans le gazéifieur lui même et perturbe potentiel- tion du phosphore sous une forme assimilable
lement son fonctionnement, de plus en plus de par les plantes n’étant pas directe, sa valorisation
développeurs de la technologie prévoient l’ins- potentielle sur le marché est soumise encore à
tallation d’un séparateur de sels spécifique en la levée de contraintes réglementaires (autorisa-
amont du gazéifieur pour effectuer cette tâche. tion) et économiques (rentabilité de sa production
Visés en particulier pour leur qualité essentielle et présence d’un véritable marché dédié) comme
pour la croissance des plantes, la récupération expliqué dans la suite du document (Chapitre 6,
des éléments phosphore (P) et potassium (K) modèle d’affaire).

b) Les métaux

En fonction de la composition des déchets orga- (métaux rares) ou au contraire par leur volume
niques traités, il est possible de trouver parmi les relativement importante (fer, aluminium…).
minéraux un certain nombre de métaux. Certains
déchets notamment issus d’activités industrielles Une publication conjointe Inrae, INSA, Deep,
peuvent contenir des métaux précieux ou d’une Agence de l’eau Rhône méditerranée et Reseed [22]
valeur économique importante par leur rareté a présenté le potentiel économique des différents

a
Minéralisation continue du CO2 pour émissions négatives.

71
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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

Tableau 11 : Métaux intéressants pour la récupération pour chaque matrice (concentration) (Varennes E. et al., 2020).

Eau usée brute Eau traitée Boues Cendres


Fer
Bore Manganèse
Cuivre, Titane, Baryum Rubidium Cuivre Aluminium
Lithium Zinc
Phosphore*
*phosphore : ajout par le GT Gazéification Hydrothermale

Tableau 12 : Classement des métaux par potentiel financier sur une base d’un million d’EH (Varennes E. et al., 2020).

>106 €/an >105 €/an >104 €/an >103 €/an <103 €/an
soit 1 €/EH.an soit 1 €/EH.an soit 1 €/EH.an soit 1 €/EH.an soit 1 €/EH.an

Baryum Aluminium Cuivre Bore Antimoine

Calcium Hafnium Gallium Chrome Argent


Césium Or Germanium Étain Arsenic
Magnésium Palladium Lithium Fer Bismuth
Rubidium Platine Manganèse Molybdène Cadmium
Potassium Niobium Nickel Cobalt
Silicium Rhodium Tungstène Indium
Sodium Titane Vanadium Mercure

Zinc Phosphore Plomb

métaux que l’on peut retrouver couramment dans métaux rapportés à la taille (Équivalent-Habitant –
les eaux usées domestiques (Tableau 11). EH) de l’installation.

La Gazéification Hydrothermale serait ainsi en Les valeurs marchandes « brutes » affichées ne


mesure de récupérer les métaux contenus non permettent toutefois pas de conclure sur la viabi-
seulement dans les boues de STEU urbaines et lité économique de la récupération de chacun de
industrielles mais aussi dans un certain nombre ces métaux. Certains ont besoin d’une ou de plu-
de déchets organiques industriels spécifiques. Le sieurs étapes de transformation successives, plus
Tableau 12 montre la valeur économique de ces ou moins coûteuses, pour devenir valorisables.

c) L’eau (H2O) et l’azote (N)

L’azote est dilué sous forme d’ammonium (NH4+) d’investigation depuis la publication du décret du
dans l’eau de procédé récupéré à basse pression 10 mars 2022 relatif aux usages et conditions de
(≈ 5 à 10 bar) en sortie du séparateur gaz-liquide. réutilisation des eaux usées traitées.
Selon le type d’intrant valorisé, les deux résidus
peuvent représenter ensemble jusqu’à 75 à 80 % L’azote, et encore plus sous forme d’ammonium,
de la masse sortante résiduelle du procédé. est un élément essentiel de la croissance de tous
les végétaux et fait partie de la composition de
L’azote, une fois séparé de l’eau par une tech- nombreux engrais. Les coûts de fertilisation et des
nologie adaptée (stripping membranaire par engrais azotés ayant augmentés conjoncturelle-
exemple) permet l’obtention d’une eau purifiée. ment, disposer d’une capacité d’approvisionnement
Cette dernière peut même être valorisée sans locale d’azote d’origine biogénique sera un atout
épuration de l’azote dans la filière microalgues pour tous les acteurs de la chaîne de valeur.
ou en irriguant des sols agricoles. Des projets de
REUT (Réutilisation des Eaux Usées Traitées) sont
également possibles et pourraient faire l’objet

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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

d) Conclusion

Au final, la Gazéification Hydrothermale apporte, complémentaires. La technologie propose ainsi


outre sa capacité de valorisation d’un déchet une solution alternative très complète et écono-
organique en production de gaz, également la miquement intéressante pour la valorisation d’un
possibilité de récupérer tous ses résidus solides et déchet organique capable de concurrencer avec
liquides en les valorisant en tant que co-produits succès les technologies existantes.

5.2 Des voies de valorisation intéressantes aux


impacts positifs
Avec la parution de la loi AGEC (loi Anti-Gaspillage neutralité carbone des territoires. Le développe-
pour une Économie Circulaire) en 2022, la ment de la Gazéification Hydrothermale s’inscrit
réutilisation des matériaux devient une pra- dans cette trajectoire en développant des pistes
tique nécessaire pour atteindre les objectifs de de valorisation pour ses co-produits.

5.2.1 Des co-produits à haute valeur ajoutée pour le territoire


Comme décrit dans le paragraphe précédent, des à l’usage d’engrais chimiques moins vertueux
co-produits énergétiques et matières résultent du pour les sols.
procédé de Gazéification Hydrothermale. La situa-
tion climatique et la conjoncture des marchés de • Les métaux : l’extraction des métaux génère
ressources fossiles font notamment peser une très souvent, et malgré les progrès technolo-
pression particulière sur les co-produits suivants : giques, un impact environnemental important.
Son coût économique spécifique varie, pour
• Les sels minéraux et l'azote : les effets liés au chaque métal, en fonction des gisements qui
changement climatique et le contexte géopo- se déplètent à vitesse variable, des besoins des
litique qui soulève en permanence la question marchés respectifs et du contrôle exercé par
de l’accès aux ressources fossiles impactent for- certains pays clés dominant l’exploitation de
tement le secteur agricole générant ainsi des certaines ressources fossiles. Les métaux étant
enjeux économiques et environnementaux forts. des matériaux pour lesquels le recyclage (cir-
La récupération de l’azote, du phosphore et du cuit court) s’impose autant que possible par
potassium par la Gazéification Hydrothermale l’effet volume ou coût (rareté), les perspectives
permet de répondre en partie à ces enjeux. de revalorisation sont multiples. Elles sont par
Elle propose, après transformation, des engrais ailleurs capables de répondre aux exigences
issus d’un circuit court aux territoires tout en économiques et réglementaires qui pèsent sur
sécurisant a minima la production agricole. Un eux. Ainsi, La récupération locale des métaux
agriculteur peut ainsi tirer une double plus-va- en sortie d’une installation de Gazéification
lue directe de la technologie : valoriser ses Hydrothermale traitant des intrants qui en
déchets et récupérer des minéraux, de l’azote contiennent augmente l’autonomie des indus-
et de l’eau à un coût maitrisé durablement. Ces triels d’un territoire qui en consomment.
engrais seraient une alternative économique

5.2.2 Un écosystème local d’acteurs à créer ou amplifier pour


maximiser la recherche de plus-values
La valorisation de ces co-produits ne peut se faire en garantissant un équilibre économique pour les
qu’avec l’investissement et la mise en commun futurs consommateurs (industrie, agriculture, etc.).
d’acteurs locaux pour créer ou amplifier les filières
de recyclage territoriales de ces matériaux tout

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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

La valorisation des co-produits ne pourra se faire La Gazéification Hydrothermale se positionne


sans un investissement de la part du territoire sur comme un catalyseur de cette dynamique de
de nouveaux procédés (chimiques, biologiques) de recyclage et d’économie circulaire mais doit être
recyclage de ces co-produits pour atteindre cet accompagnée par l’ensemble des acteurs territo-
optimum économique qui permettra leur valorisa- riaux de la chaîne de valeur des co-produits pour
tion locale. concrétiser les différentes voies de valorisation.
Un soutien public sera enfin un facteur clé de la
mobilisation des écosystèmes.

5.2.3 Générateur d’externalités positives


La mise en place de ces nouveaux écosystèmes • Environnement : très forte réduction des émis-
circulaires sera bénéfique pour le territoire à sions de GES, empreinte au sol réduite vis-à-vis
plusieurs niveaux et notamment par la création des solutions conventionnelles ;
d’emplois durables, directs et indirects, non délo- • Contribution à la mise en place des territoires
calisables de tous niveaux de qualification : à énergie positive et à une mobilité propre à
• Pour l’approvisionnement des déchets orga- l’échelle locale ;
niques et ressources ; • Balance commerciale : réduction des importa-
• Pour les études, la construction et l’exploitation tions de gaz naturel.
du site accueillant la technologie ; La Gazéification Hydrothermale offre également
• Pour la génération et/ou la valorisation locale des opportunités de développement voire de lea-
ou régionale des co-produits gazeux, solides et dership aux TPE et PME françaises, en pointe sur
liquide. les briques innovantes de la chaîne de valeur,
et qui se mobilisent dès aujourd’hui à travers le
L’estimation précise des emplois pouvant être Groupe de Travail national.
générés par la filière reste à réaliser, le Groupe
de Travail Gazéification Hydrothermale y prendra En synthèse, la figure ci-joint (Figure 17) présente
toute sa part. les externalités positives et les bénéfices liées
à la technologie Gazéification Hydrothermale.
Outre les emplois, d’autres externalités positives Non exhaustive, cette représentation illustre les
ayant une valeur intrinsèque réelle pour la col- premiers résultats obtenus lors des travaux d’un
lectivité, tant au niveau national que territorial sous-groupe du Groupe de Travail national. Comme
pourront émerger. évoqué plus haut, il est encore difficile de quanti-
fier ces externalités sur le plan monétaire. Elles
Néanmoins, ces dernières restent à quantifier et à devront faire l'objet d'études spécifiques menées
monétiser à ce stade : à cet effet. L’intégration croissante d’une part plus
respectueuse des objectifs du développement
• Santé publique : diminution des quantités de durable dans les marchés devrait augmenter leurs
NOX émises dans l’atmosphère lors de la com- valeurs micro- comme macroéconomiques dans la
bustion des boues de stations d’épurations et durée.
des épandages non maîtrisés ;

74
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U n e t e c h n o lo g i e au c œ u r d e l ’ é c o n o m i e c i r c u l a i r e

Environnement Énergie
• Captage et recyclage des • Renforcer l’indépendance énergé-
minéraux et de l’azote (éviter tique en produisant une énergie
l’importation et boucler les locale, pilotable et stockable
cycles biogéochimiques) • Production continue d’un
• Pour les stations de
• Pas d'émission de polluants traitement des eaux gaz renouvelable et bas-car-
atmosphériques issus du procédé usées (STEU), la GH bone (méthane + H2)
• Capacité de traitement et de peut devenir une brique • Production d’énergie supprimant
réduction des déchets ultimes d’optimisation globale toutes les contraintes biolo-
• Production d’engrais permettant • Conversion des giques, sanitaires et climatiques
la limitation des risques d’eutro- microparticules • Rendement énergétique
phisation des eaux, d’acidification plastiques en gaz élevé : de 75 à 85 %
des sols et la pollution d’air • Gaz facilement stockable
• Destruction des micropolluants et transportable dans le
organiques et des pathogènes réseau gaz existant
• Récupération des eaux (irrigation) • Temps de conversion très
• Faible besoin de surface au sol rapide (1 à 10 min)
• Isolement des métaux lourds • Améliorer l’efficacité éner-
pour limiter leur impact gétique en utilisant la haute
environnemental et faci- pression du gaz produit pour
liter leur récupération l’injection dans le réseau

La GH participe à la réduction des


besoins en énergies fossiles

• Décarbonation des territoires Conversion élevée du carbone • Coût compétitif du gaz renouve-
(réduction des GES) (> 90 %) lable et bas-carbone produit
• Solution alternative à l’inciné- Unité GH mutualisable entre • Amélioration du bilan
ration ou à l’enfouissement divers producteurs de déchets énergétique locale
permettant le traitement d’une
• Réduction des impacts environne- grande diversité d’intrants • Production potentielle d’H2
mentaux « hors GES » (bruit, odeur, en plus du méthane : usages
logistique...) par le traitement local industriels et mobilité
des déchets et résidus organiques
• Potentiel de récupération
• Boucler les cycles biogéo- de Chaleur fatale
chimiques des territoires Économie
• Valorisation maîtrisée des • Diminution nette des coûts
co-produits dans la filière « bio- des traitements des dé-
fertilisant / amendement »
chets (dont les ultimes)
• Valorisation couplée du CO2 à • Génération de bénéfices
travers d’autres procédés bio- socio-économiques complé-
logiques et thermochimiques tant la chaîne de valeur locale
(minéralisation, électrolyse...)
(emploi durable, nouveaux
• Valorisation des résidus carbonés savoir-faire et activités)
issus d'autres technologies (mé- » Création d’emplois durables
thanisation, pyrogazéification...) » Création de savoir-faire local
• Valorisation possible de » Création d’activités nouvelles
friches industrielles (production locale de co-pro-
duits valorisables dans l’indus-
• Solution modulaire, trie, l’agriculture et le tertiaire)
flexible et compacte » Amélioration de la balance
commerciale (flux d’énergie,
de matière, de déchets... )
• Amélioration de la traçabi-
lité (économie circulaire)

Figure 17 : Exemple d'externalités positives et de bénéfices liées à une installation de Gazéification Hydrothermale (GH) à
l'interface des enjeux environnementaux, d'énergie et d'économie (source : GT GH).

75
76
06
MODÈLE D’AFFAIRE
DE LA TECHNOLOGIE ET
POTENTIEL ÉCONOMIQUE

6.1 Évaluation des coûts CAPEX et OPEX de la technologie 80


6.1.1 CAPEX 81
6.1.2 Évaluation des coûts d’exploitation « OPEX » 82

6.2 Un modèle d’affaire évolutif dans le temps 84


6.2.1 Valorisation économique du gaz produit 84
6.2.2 Valorisation économique du traitement de déchets 86

6.3 Avec des perspectives de développement dynamiques 87

77
78
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
M o d è l e d ’ a f fa i r e d e l a t e c h n o lo g i e e t pot e n t i e l é c o n o m i q u e

B
ien que le principe scientifique de la l’appartenance à l’une ou l’autre des deux familles
« gazéification en eau supercritique ou de la technologie Gazéification Hydrothermale
hydrothermale » ne soit pas nouveau a, il (avec catalyse et à haute température).
fallait attendre jusqu’en 2004 pour que la techno-
logie passe le premier pas vers un fonctionnement De même, au-delà de l’analyse des coûts complets
en continu et une future industrialisation : la mise de la technologie (projet global), le calcul des
en service de la 1ère installation pilote au monde, revenus potentiels générés par un projet a dû se
le projet VERENA (100 kg/h) du Karlsruhe Institut limiter, pour le moment, à la seule rémunération
of Technology (KIT) en Allemagne ! du gaz injecté.

Depuis 2010, de nombreux autres pilotes pré- Une valeur économique supplémentaire pourrait
industriels et, encore plus tard, de premiers être générée, selon le type de déchets valorisés,
démonstrateurs quasi industriels (Osaka Gas par exemple à travers le service rendu lié au trai-
(J), SCW Systems (NL), Genifuel (USA)…) ont été tement des déchets et/ou la possibilité de pouvoir
réalisés et ont fait beaucoup avancer le dévelop- revaloriser les résidus liquides et solides récupé-
pement de la technologie, avec catalyse comme à rés. Ces exemples de revenus peuvent être plus ou
haute température. moins importants et, souvent, sont peu communs
aux autres technologies de production de gaz
Enfin, plus récemment, tirés par les développeurs renouvelable et bas-carbone. Il n’est pas aisé de
privés s’intéressant activement à la technologie les évaluer dans leur globalité, une approche au
depuis une dizaine d’années, le sujet est en train cas par cas est préférable tout en tenant compte
de franchir le cap du niveau industriel : avec la de la situation de référence qui peut générer un
mise en service commerciale prévue début 2023 impact plus ou moins important sur la rentabilité
du 1er projet industriel au monde, appelé « Alkmaar d’un projet donné.
1 » (20 MWth), le développeur SCW Systems (NL)
crée la preuve. Pour la société, il s’agit du début
d’une série de trois projets consécutifs (avec
« Alkmaar 2A et 2B », chacun de 40 MWth) prévus
d’être installés sur le même site d’ici fin 2025. Les
premiers éléments disponibles indiquent qu’à
partir d’une rémunération du gaz injecté d’envi-
ron 75 € / MWhPCS (tient compte des niveaux de
prix fixés entre 2018 et 2020), les deux premiers
des trois projets visés devraient être capables
de couvrir leurs coûts (CAPEX et OPEX) sur une
durée globale d’exploitation de 12 ans. À ce jour,
il est encore trop tôt pour disposer d’un REX glo-
bal suffisant pour construire un véritable modèle
d’affaire et estimer un potentiel économique pré-
cis de la technologie. Toutefois, il est possible d’en
définir une 1ère base et les grandes lignes de l’évo-
lution potentielle du futur marché Gazéification
Hydrothermale en France.

En effet, en-dehors d’informations confidentielles


partagées par certains développeurs privés, seule
une poignée de publications scientifiques [23] se
risquent à les estimer. De plus, les périmètres des
chiffres avancés par certains acteurs ne sont pas
toujours identiques ce qui a obligé le Groupe de
Travail à compléter certains paramètres (exemple :
technologie de traitement de gaz, financement du
CAPEX…) et de tenir compte des spécificités liées à

a
Premières publications de recherche au MIT dans les années 1970, https://bit.ly/3OR897r.

79
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
M o d è l e d ’ a f fa i r e d e l a t e c h n o lo g i e e t pot e n t i e l é c o n o m i q u e

6.1 Évaluation des coûts CAPEX et OPEX de la


technologie
Diverses tailles d’installations existent au niveau conditions supercritiques) à ne pas dépas-
mondial et/ou sont actuellement en construction ser si on veut maîtriser les coûts à un niveau
en Europe : compétitif.
• Pilotes et démonstrateurs de quelques cen- > la taille maximale d’un module devrait ainsi
taines de kg/h : se situer entre 4 t/h (choix de SCW Systems)
et 6 t/h ; tout projet dépassant ces capaci-
> KIT (D), TreaTech (CH) + ProBiomass (NL) : 100
tés de traitement d’intrant sera équipé d’au
à 150 kg/h,
moins 2 modules de taille identique.
> Osaka Gas (J): 350 kg/h et Genifuel (USA) : D’autres éléments impactent également les coûts
500 kg/h et la rentabilité potentielle d’une installation qui
est toujours dimensionnée pour un débit (= ton-
• Démonstrateur et installations industrielles t/h
nage horaire) brut de déchets maximal donné : le
(SCW Systems = 1 er industriel Gazéification
débit de gaz de synthèse en sortie du gazéifieur
Hydrothermale au monde) :
dépendant directement du contenu en carbone de
> Démonstrateur industriel (2 MWth) : 1 module l’intrant, plus ce dernier est concentré et riche en
de 2 t/h optimisé entre 2018 et 2020, contenu énergétique (= carbone), plus le débit du
> 1 er projet industriel au monde (Alkmaar 1 gaz de synthèse en sortie va être important.
(20 MWth)) : 4 modules de 4 t/h,
→ Fonctionnement commercial du projet Quant à la consommation énergétique du pro-
annoncé au plus tard pour fin 2022 ! cédé de gazéification hydrothermale, elle dépend
quasi entièrement du débit brut de déchets pour
> Projets Alkmaar 2A et 2B (40 MWth chacun) : 8
lequel l’installation a été dimensionnée : en 1ère
modules de 4 t/h,
approche, elle peut ainsi être considérée comme
→ Fonctionnement commercial prévus d’ici constante : un intrant plus concentré et riche en
fin 2024 et 2025. carbone génère ainsi aucun surcoût énergétique à
débit brut égal de l’intrant traité !
Cette diversité d’installations rend l’analyse, la
comparaison et la définition d’un modèle d’affaire L’exemple hollandais de SCW Systems s’oriente
plus difficile mais tend à montrer la taille mini- volontairement vers des projets uniques de
male à partir de laquelle une viabilité économique grande puissance (au moins 20 à 40 MWh) sur des
semble atteignable. sites de production pouvant cumuler des puis-
sances thermiques globales installées dépassant
Un projet Gazéification Hydrothermale doit faire largement les 100 MWth par site. Nécessitant une
face à des contraintes de coûts qui sont directe- alimentation abondante de déchets organiques
ment liées à la capacité de traitement du module toute l’année, SCW Systems cible tout d’abord des
qui : sites à proximité immédiate de grands ports mari-
times ou de grands sites industriels (Rotterdam,
• Dimensionné trop petit, se voit confronté à un
Alkmaar, Delfzijl…) à proximité de voies de
plafonnement des coûts indépendamment de
transport maritimes ou fluviaux permettant le
sa taille.
transport à moindre coût des déchets vers les
> En-dessous d’une taille de 1 à 2 t/h (selon usines Gazéification Hydrothermale de traitement
le type d’intrant traité), pour plusieurs et de valorisation.
sous-équipements les coûts de fabrication ne
peuvent plus être diminués avec la taille. En France, confronté à une géographie bien diffé-
rente et une localisation des grands volumes de
• Dimensionné trop grand, se voit confronté à déchets plus diversifiée, les acteurs de la filière
une évolution exponentielle des coûts pour cer- Gazéification Hydrothermale pensent que l’es-
tains sous-équipements (robinets et vannes par sentiel des projets se situera dans une gamme de
exemple) dont la hausse des diamètres atteint capacité de traitement située entre 4 et 8 t/h de
vite des limites physiques (pour faire face aux déchets. Par la taille importante de certains sites

80
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
M o d è l e d ’ a f fa i r e d e l a t e c h n o lo g i e e t pot e n t i e l é c o n o m i q u e

(stations d’épuration des plus grandes aggloméra- y avoir aussi en France un certain nombre de très
tions telles que Paris, Marseille, Lyon… et grands grands projets de Gazéification Hydrothermale
sites industriels) et à la présence de très grandes pouvant atteindre une puissance installée de 40
quantités de déchets (> 25 000 tMS/an), il pourrait MWth et plus par projet et site.

6.1.1 CAPEX
Les chiffrages de CAPEX récupérés entendent bien 14
souvent des périmètres un peu différents rendant 12

CAPEX (en M€/ t/h)


la comparaison à périmètre égal plus difficile, ceci 10
vaut à la fois pour ceux dans la littérature scienti- 8
fique que pour ceux communiqués de la part des 6
4
développeurs privés de la technologie. De plus, la
2
Gazéification Hydrothermale débutant sa phase
0
d’industrialisation, il est prévisible que les chiffres
puissent encore bouger à la baisse, soit par l’effet 0 2 4 6 8 1 0 12 14
de la concurrence entre les acteurs soit par des Capacité de traitement d’une installation de
Gazéification Hydrothermale (en t/h)
effets de série et de standardisation de la fabri-
cation industrielle des modules et du montage Le tonnage affiché du déchet organique traité se réfère à
une siccité maximale de 20 % MS et un pouvoir calorifique
des installations Gazéification Hydrothermale moyen d’environ 20 MJ/kg MS
globales. Les développeurs aujourd’hui les plus
Figure 18 : Évolution du coût d’investissement (M€/ t/h)
avancés pensent pouvoir atteindre des économies d’un projet Gazéification Hydrothermale en fonction de sa
d’échelle pouvant aller jusqu’à -30 % sous cinq ans capacité de traitement de déchets.
après leur lancement commercial.
de 2 t/h correspond aujourd’hui au seuil « taille
Il est entendu que les chiffres affichés et ras- haute » d’un projet de démonstration industrielle
semblés ci-après par les auteurs ne peuvent être permettant à un développeur d’optimiser et de
qu’une photo à un moment donné (juin 2022) et faire passer sa technologie d’un TRL 6–7 à 8–9.
n’intègrent aucun effet financier lié à l’inflation ou Cette taille est en même temps bien représenta-
aux perturbations des marchés d’approvisionne- tive pour la commercialisation d’un futur produit
ment en matériaux et ressources spécifiques ! (module de 3 à 6 t/h).

Malgré l’incertitude sur laquelle se place les Dans le sens inverse, en augmentant la capa-
acteurs de la filière Gazéification Hydrothermale, cité de traitement d’une installation, on constate
il est néanmoins possible de tracer une première d’abord une baisse moins sensible des coûts d’en-
courbe des coûts d’investissements (CAPEX) en viron 5,5 à 4 M€/t/h traité en passant de 2 à 4 t/h
fonction de la capacité de traitement de l’ins- et ensuite une évolution de manière linéaire des
tallation visée, intégrant les deux familles de coûts se rapprochant d’un seuil bas tangentiel de
technologie (avec catalyse ou à haute température) 2 M€ par t/h traité jusqu’à des capacités de traite-
et s’appuyant sur les sources disponibles (données ment très élevées (> 14 t/h).
bibliographiques, publication scientifiques, etc.),
des premiers estimatifs de projets industriels de En variant les types de déchets traités, il a été
certains développeurs et des chiffres récupérés constaté que le seuil de rentabilité potentielle
sur les tous premiers projets industriels en phase d’une installation ne dépend pas que de sa taille
de réalisation ou de démarrage. mais aussi, pour une partie non négligeable,
du type de déchet ou de mélange de déchets
On remarque ainsi qu’unitairement, en partant converti. Ainsi, plus le déchet organique est doté
dans la figure 19 ci-dessus à gauche du seuil d’une siccité élevée (≥ 20 % MS), d’un contenu en
« 2 t/h » (symbolisé par la ligne rouge pointillée), carbone élevé dans la matière sèche et ainsi d’un
les coûts CAPEX montent de manière exponen- pouvoir calorifique important (>> 20 MJ/kg MS),
tielle (allant d’environ 5,5 à 13 M€ par t/h traité) avec une consommation énergétique du système
pour des tailles d’installations avec des capaci- qui reste constante à débit brut inchangé, plus le
tés de traitement de déchets inférieures à 2 t/h. débit de gaz généré en sortie sera important. En
Une installation Gazéification Hydrothermale conséquence, plus le contenu énergétique d’un

81
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intrant et ainsi sa production de gaz donné sont Pour les très grands projets traitant des déchets
élevés, plus bas est situé le seuil de rentabilité les plus riches énergétiquement, il semble à terme
d’une installation de gazéification hydrothermale. possible de s’approcher d’un ratio de CAPEX d‘en-
Par exemple, une usine traitant 4 t/h de boues de viron 1 M€ par t/h.
STEU urbaines de relativement faible contenu
énergétique peut être moins rentable qu’une Le rapport néerlandais « BTG – État de l’art et pers-
usine traitant un déchet riche énergétiquement pectives sur la gazéification aux Pays-Bas, Mars
d’une usine de 2 t/h. 2021 » [20] semble confirmer les estimations réali-
sées en France affichant un ratio de coûts (CAPEX)
En partant d’une rémunération du gaz injecté par MW gaz injecté d’environ ≈ 1,5 M€/MWCH pour 4

comparable à celle appliquée au lancement de la les installations néerlandaises de grandes puis-


filière méthanisation, les simulations réalisées par sances gaz légèrement inférieures à 50 MWCH . 4

les membres du Groupe de Travail Gazéification


Hydrothermale ont démontré que le seuil de Cependant, comme le montre le chapitre suivant,
rentabilité des premiers projets Gazéification le facteur décisif est la comparaison des dépenses
Hydrothermale en France devrait pouvoir être opérationnelles (OPEX), y compris les coûts de
atteint à partir d’une capacité de traitement maintenance et d’amortissement, qui donnent une
de 4 t/h et d’un ratio CAPEX de 4 M€ par t/h de image réelle des coûts effectifs de l’élimination
déchet traité. des boues en tenant compte des recettes géné-
rées (vente de gaz, d’éléments minéraux, etc.).

Cas d’étude Suisse (CAPEX)


Les coûts d’investissement pour différentes filières de traitement des boues ont été analysés dans une étude
réalisée par AFRY Suisse SA en 2018. L’étude a considéré les scénarios suivants et se base sur une capacité
d’une STEU de 200 000 Équivalent habitant.
Le cas de référence en Suisse (scénario 1a) pour le traitement des boues de STEU est :
• Une digestion anaérobie des boues sur site dont les digestats sont épaissies à 20–30 % de MS pour être
ensuite transportés et incinérés (en Suisse, les boues ou digestats de boues doivent être incinérées obli-
gatoirement et n’ont pas le droit d’être valorisés autrement).
En comparant les coûts d’investissements CAPEX de cette référence avec d’autres scénarios, l’étude démontre
que :
• Le couplage d’une solution « Gazéification Hydrothermale en aval d’une méthanisation » est 40 % plus
onéreux (scénario 2a).
• À l’inverse, si on remplace complètement le procédé de traitement de méthanisation des boues par le
procédé de Gazéification Hydrothermale traitant directement les boues (scénario 2b), alors cette solution
serait au moins 20 % moins chère à l’investissement que le cas de référence.
→ Cet avantage en faveur de la Gazéification Hydrothermale peut augmenter jusqu’à 40 voire 50 % (cas
des boues de STEU) en tenant compte de la suppression du prétraitement thermique supplémentaire
(exemple de l'hydrolyse thermique : 10 bar, 200 °C) nécessaire pour rendre les boues méthanisables
(~ 80 % des boues en France), du besoin de séchage additionnel pour atteindre une siccité suffisante
(~ 29 %) des digestats permettant leur combustion dans un incinérateur spécifique, de la réduction
voire suppression des besoins de transport (liés à la baisse sensible des quantités de résidus finaux à
transporter).

6.1.2 Évaluation des coûts d’exploitation « OPEX »


Les données disponibles concernant les coûts composé principalement (hors coût éventuel de
d’exploitations (OPEX) de la technologie sont l’intrant) de :
peu nombreuses, néanmoins, il est possible d’en
• La main d’œuvre (emplois qualifiés nécessitant
distinguer les postes centraux. L’OPEX est ainsi
une surveillance a minima à distance et une
équipe territoriale d’intervention rapide gérant

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plusieurs projets. Hormis dans les tous premiers • La maintenance des équipements, en particu-
projets, il n’est pas prévu d’avoir du personnel lier ceux soumis à la haute pression et relative
spécifique à la technologie sur le site). haute température.
• Des consommables, comme par exemple, pour
• L’énergie à apporter au procédé (principalement la Gazéification Hydrothermale avec catalyse,
de la chaleur pour la montée en température au le remplacement de la charge du catalyseur
démarrage et, au-delà, pour assurer la tempéra- (sachant que 75 % du catalyseur est récupéré).
ture de consigne dans le gazéifieur, le pompage
de l’intrant contenant de l’eau est par contre • Des coûts administratifs.
peu énergivore). • Les coûts de financement du CAPEX du projet.

Cas d’étude Suisse (OPEX)


L’étude exécutée par AFRY Suisse SA en 2018 montre que pour les coûts d’exploitation, les solutions de
Gazéification Hydrothermale tirent leur épingle du jeu comparativement aux coûts élevés d’élimination des
boues en mono-incinération. Ainsi, même dans le cas où la Gazéification Hydrothermale vient en complé-
ment d’une installation de méthanisation des boues (scénario 2a), les OPEX sont légèrement inférieur au cas
de référence bien que l’amortissement des actifs soit supérieur (voir Figure 19).
Dans le cas d’un traitement direct des effluents par la Gazéification Hydrothermale, les OPEX sont presque
divisés par deux !
Vous trouverez ci-dessous une brève description de chaque scénario :
• Scénario 1a : Digestion et incinération externe en tenant compte des coûts supplémentaires pour le
transport des boues. L’énergie dérivée de l’incinération des boues ne peut pas être utilisée sur place.
• Scénario 1b : Digestion et incinération sur site, qui présente des avantages en termes de transport et
d’intégration énergétique sur site.
• Scénario 2a : Digestion et SCWG, la fraction organique restante des boues après le processus de digestion
anaérobie est gazéifiée par hydrothermie. Les deux digesteurs anaérobies et l’installation Gazéification
Hydrothermale doivent être construits.
• Scénario 2b : Seulement Gazéification Hydrothermale, cela présente l’avantage d’éviter les investisse-
ments coûteux pour l’ensemble de l’infrastructure de digestion anaérobie.
• Scénario 3 : Processus d’hydrolyse thermique (THP) suivi de digestions anaérobies et d’une incinération.

Administration

Chaleur (seulement STEU)

Dépréciation

Entretien
OPEX [-]

Produits chimiques

Electricité (seulement STEU)

Élimination des boues

Scénario 1a Scénario 1b Scénario 2a Scénario 2b Scénario 3

Figure 19 : OPEX pour les différents scénarios. La vente de chaleur et d’électricité grâce au biogaz généré par la Gazéification
Hydrothermale à travers une cogénération (scénario 2a) permet de diminuer sensiblement les OPEX.

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6.2 Un modèle d’affaire évolutif dans le temps

P
ar sa capacité à traiter et valoriser complè- et des solutions technologiques implique qu’il n’y
tement le déchet organique, la Gazéification ait pas un modèle d’affaires mais plusieurs selon
Hydrothermale permet d’éviter des coûts des critères multiples, dont les besoins spéci-
de traitement ultérieurs comme l’incinération ou fiques des acteurs de la demande. Par ailleurs la
l’enfouissement, de produire un gaz renouvelable Gazéification Hydrothermale s’intégrant égale-
et bas-carbone injectable et de récupérer une ment dans de nombreuses thématiques connexes
grande quantité d’eau, d’azote, sels minéraux et (décarbonation, autonomie énergétique, etc.), les
même métaux. variables qui viennent impacter son modèle d’af-
faire sont multiples et évolutives.
S’appuyant sur ces atouts, la Gazéification
Hydrothermale peut adresser différents secteurs, Ces modèles d’affaires aux multiples inducteurs
des industries agroalimentaires aux collectivi- peuvent s’appuyer sur plusieurs leviers de rému-
tés, afin de proposer une solution pertinente et nération, tels que la vente du gaz renouvelable et
économique pour leurs déchets et la production bas-carbone ou la valorisation des co-produits.
d’énergie renouvelable. La diversité des intrants

6.2.1 Valorisation économique du gaz produit


La rémunération du gaz renouvelable et bas-car- refléter les risques pris par les développeurs de
bone est un point central pour permettre la la technologie ainsi que le contexte économique
réalisation des premiers projets de la filière et (prix de marché).
donner une impulsion. Cette rémunération devrait

a) Contexte réglementaire général sur la commercialisation du gaz produit


• Cas du biométhane issu d’installation de métha- > La publication des modalités des appels
nisation : d’offres « biométhane » par le ministère de
la transition écologique le 28/04/2022. Ils
Deux mécanismes financiers soutiennent
se dérouleront en trois tranches, pour une
aujourd’hui le développement de l’injection de
capacité totale de 1,6 TWh/an. La première
biométhane.
tranche met aux enchères une capacité de
> Des subventions à l’investissement pour faci- 500 GWh/an et les offres sont recevables
liter le financement du projet. Le principal jusqu’à décembre 2022. Ces appels d’offres
guichet au niveau national est l’ADEME, mais sont notamment nécessaires aux grandes
les régions ont certains syndicats d’énergies installations ne pouvant plus faire appel au
au niveau local qui peuvent apporter une tarif de rachat (> 25 GWh/an)
subvention, n’excédant généralement pas 15
> La publication d’un décretb ouvrant la voie à
à 20 % des CAPEX.
la mise en place des certificats de production
> Un tarif d’obligation d’achat qui garantit au de biogaz (CPB), mécanisme extrabudgétaire
producteur la vente de son biométhane à un donnant la responsabilité aux fournisseurs
tarif fixé pour une durée de 15 ans. Ce tarif de gaz naturel de s’acquitter de certificats
est compris entre 64 et 139 €/MWha. Il com- de production auprès des producteurs pour
prend le tarif de référence ainsi que la prime attester de la bonne tenue du taux d’incor-
aux intrants qui peut varier de 5 € à 39 € poration de biométhane dans leur bouquet
du MWh en fonction du type d’intrants et du énergétique.
débit de l’installation.
• Cas des installations de méthane de syn-
Toutefois ces mécanismes sont en cours d’évo-
thèse telles que la pyrogazéification ou la
lution avec notamment :
Gazéification Hydrothermale :

a
Fourchette de valeurs théoriques car ce tarif est amené à diminuer chaque année de 2 % mais l’inflation étant importante au
S1 2022, cela pourrait réévaluer les coûts à la hausse.
b
Décret n° 2022-640 du 25 avril 2022

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L’injection de méthane de synthèse bénéficie du mécanisme introduit dans la loi climat rési-
même système de garantie d’origine que le bio- lience « les contrats d’expérimentations ».
méthane en vertu du décret 2021–1273 du 30 Ces contrats ont été introduits par le décret
septembre 2021 mais sans le système de tarif 2021–1280 du 1er octobre 2021 et des appels
de rachat associé. à projets devraient être mis en place dans les
mois à venir. La mise en œuvre rapide de ces
Pour obtenir un complément de rémunération
contrats permettrait de donner de la visibilité
au gaz produit, les porteurs de projet de ces
aux porteurs de projets et faciliterait le déve-
nouvelles filières pourront utilisés un nouveau
loppement de la filière.

b) Première piste d’évaluation du soutien attendu

L’estimation de la rémunération du gaz produit par positionnant à 110 € du MWhPCS grâce à l’effet
une installation de Gazéification Hydrothermale d’apprentissage, des gains d’échelle, de standardi-
est complexe car elle implique de nombreux sation et de progrès technologiques.
facteurs.
À titre d’exemple les premiers projets de
Dans le cas de la Gazéification Hydrothermale, le Gazéification Hydrothermale aux Pays-Bas sont
niveau de soutien public attendu pour la rému- d’ores et déjà compétitifs avec un niveau de rému-
nération du gaz se situera dans la fourchette de nération du gaz à hauteur de 75 €/MWh.
prix de la méthanisation. Cela dépendra de la
taille et du type d’intrant traité. Une fois les pre- La compétitivité des projets hollandais par rap-
miers projets sortis de terre, la filière Gazéification port au biométhane injecté en France est illustrée
Hydrothermale pourrait envisager à moyen dans le tableau page suivante (Tableau 13).
terme une baisse des coûts de production en se

Tableau 13 : Compétitivité des projets hollandais rapport au biométhane injecté en France.


Subvention
Année d’approbation Puissance (nombre (complément de Vente du gaz
Projet Total
de la subvention de modules) rémunération) (€/MWh)
(€/MWh)

18,6 MWth
2018 Alkmaar 1 55 €/MWh 20 €/MWh 75 €/MWh
(4 modules de 4 t/h)

2020 Alkmaar 2.A 40 MWth 56 €/MWh 16 €/MWh 72 €/MWh

c) Valorisation des sels minéraux et de l’azote

i) Récupération du phosphore
La récupération du phosphore est un enjeu majeur environ 5 € [24]. La valeur marchande du produit
pour l'Europe qui dépend quasi totalement de phosphoré primaire peut être utilisée comme une
l'importation de phosphore fossile a nécessaire autre valeur comparative. Pour l’acide phospho-
à assurer sa sécurité alimentaire. De ce fait, la rique, elle est de l’ordre de 2 à 3 €/kg P.
récupération de cette ressource critique mais
abondante dans beaucoup de nos déchets est Toutefois, comme on l’a vu plus haut, les prix
aujourd'hui une nécessité. actuels de récupération du phosphore sont plus
élevés que le prix actuel du marché. Néanmoins,
Dans le cadre de cette étude, une première piste il faut tenir compte de la durabilité du phosphore
de valorisation du phosphore s’appuie sur une recyclé par rapport au phosphore conventionnel
étude de marché exhaustive réalisée par le can- issu de l’exploitation minière.
ton de Zürich en Suisse. Celle-ci a montré que
chaque kilogramme de phosphore récupéré à
partir des cendres de boues d’épuration coûte

a
En Europe, l'unique mine de phosphates en activité est exploitée par Yara, en Finlande. Les principaux producteurs sont la
Chine, le Maroc, les USA et la Russie.

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ii) Récupération de l’azote


L’aspect économique de la récupération de l’azote sulfate d’ammonium, mais les coûts de production
n’en est encore qu’à ses débuts. Contrairement sont supérieurs aux prix du marché. Actuellement,
à l’incinération des boues, la Gazéification seules les STEU d’Yverdon-les-Bains et d’Altenrein
Hydrothermale permet de récupérer l’azote de l’ef- exploitent des unités de récupération de l’azote.
fluent liquide. Plus de 95 % de l’azote se trouve
dans l’effluent liquide sous forme de NH4+ [25]. Comme l’effluent final de la Gazéification
Dans le cas de l’incinération des boues [26], l’azote Hydrothermale est en grande partie exempt de
contenu dans la biomasse est perdu sous forme toute matière organique et que la concentration
de NOX ou de N 2. Le N2O est un gaz à effet de en azote est beaucoup plus élevée que l’effluent
serre puissant, 300 fois plus puissant que le CO2. liquide issu de la déshydratation des boues, on
Typiquement, pour chaque Équivalent-Habitant peut s’attendre à une diminution des coûts de
(EH), 0,025 kg de CO2/EH/jour sont émis par l’in- récupération. Dans l’optique d’une future économie
cinération des boues. À titre illustratif, en Suisse circulaire, il s’agit toutefois d’une occasion supplé-
les stations de traitement des eaux usées ont mentaire de fermer les cycles des nutriments.
obtenu des prix compris entre 20 et 45 €/t de

d) Valorisation du CO2

Comme indiqué précédemment, l’un des résultats appelé « Power-to-Gas », est aujourd’hui déjà dispo-
les plus prometteurs est l’utilisation du flux de CO2 nible au niveau commercial, le principal obstacle
concentré en combinaison avec de l’hydrogène étant la disponibilité de flux de CO2 concentrés et
renouvelable, ce qui fait de ce procédé une solu- d’hydrogène renouvelable rentables. Une installa-
tion de stockage d’énergie pour l’énergie solaire et tion commerciale est en service dans une station
éolienne renouvelable. Ce procédé, communément d’épuration des eaux usées en Suissea.

6.2.2 Valorisation économique du traitement de déchets


Même si tous les déchets organiques adressables Hydrothermale intervient en bas de la hiérarchie
à la technologie ne sont pas nécessairement des du traitement des déchets mais avec l’avantage de
déchets avec une redevance à la clé et que le pouvoir recycler un grand nombre d’éléments.
développement des autres filières gaz renouve-
lable et bas-carbone amène une certaine tension
► Étude de cas : le coût de la gestion des boues
sur ces ressources, la Gazéification Hydrothermale
de STEU en France (données AMORCE)
est la seule technologie permettant leur valorisa-
tion complète pour produire du gaz renouvelable L’association AMORCE, a publié en 2019 un rap-
et bas-carbone. port mentionnant les coûts de l’élimination ou
valorisation des boues de STEU (généralement
Ainsi, tout déchet qui ne pourrait pas être valorisé concentrées entre 25 et 30 % de MS/MB) selon
in-situ via du recyclage ou du réemploi est voué à qu’elles soient incinérées, compostées ou épan-
être traité par une filière dédiée. Comme indiqué dues [27].
dans la Figure 2 de ce livre blanc, la Gazéification

Tableau 14 : Coût d’élimination des boues d’épuration selon la filière de traitement (AMORCE).
Filière Coût (tMB)* Répartition

Épandage (enquête AMORCE) 23 € (7–45 €)


70 – 80 % dont 16 % d’épandage de compost
Compostage (enquête AMORCE) 53 € (40–81 €)

Incinération (valeurs usuelles) 90–150 €


18 % (donnée de 2010)
Co-incinération avec ordures ménagères (valeurs usuelles) 70–120 €

*Matière Brute (MB) contenant entre 25 et 30 % de Matière Sèche (MS).

a
https://www.cng-mobility.ch/fr/article/la-technologie-power-to-gas-remporte-le-watt-dor-2020/

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Le Tableau 14 indique qu’à la tonne, le cout d’éli- être compétitive par rapport aux filières les moins
mination des boues se situe entre 23 € pour de onéreuses comme le compostage, toujours dans
l’épandage (35 % des volumes) et jusqu’à 150 € le respect des besoins du sol en amendement de
pour de l’incinération (≈ 26 % des volumes) [27]. La matières organiques.
Gazéification Hydrothermale pourra donc capter
une large part des volumes dont les coûts suppor- De plus, comme indiqué dans le cas Suisse pré-
tés par les collectivités sont aujourd’hui les plus senté ci-dessus, la Gazéification Hydrothermale
élevés. pourra à l’avenir devenir le mode de traitement
privilégié des effluents arrivants directement sur
La valeur économique du traitement de déchet le site de traitement, moyennant un pré-traitement
par la Gazéification Hydrothermale est donc le largement limité par rapport aux nombreuses
coût évité pour les collectivités d’une dépense étapes des installations actuelles (bassins de
largement réduite dans les filières de valori- clarification, épaississement à l’aide d’adjuvants
sation actuelle. À terme, la filière Gazéification chimiques, centrifugation…) fortement consom-
Hydrothermale devra démontrer sa capacité à matrice d’énergie et de consommables.

6.3 Avec des perspectives de développement


dynamiques

L
a filière gaz représentée par GRTgaz, GRDF, 4. À la fin de la prochaine période de la PPE, en
France Gaz Renouvelables, le Groupe de 2033, la filière devrait avoir réussi la mise en
Travail Gazéification Hydrothermale et les œuvre opérationnelle d’environ 140 projets
clubs Biogaz, Pyrogazéification et Power-to-Gas injectant au moins 6,8 TWhPCS/an de gaz dans
de l’ATEE a publié dans le cadre des discussions le réseau.
sur la SFECa un document d’analyse soulignant
un potentiel de production estimée à 320 TWh/ Cette ambition nécessite que des mécanismes de
an de gaz renouvelable et bas-carbone en 2050 soutien sous forme de contrats d’expérimentation
pour contribuer à la trajectoire de décarbonation tenant compte des spécificités de la filière et de
française. Dans ce potentiel au moins 50 TWh/an la technologie de gazéification hydrothermale
proviennent de la Gazéification Hydrothermale, viennent appuyer le démarrage des premiers pro-
chiffre qui pourrait même monter bien au-delà si jets industriels en 2026.
on oriente bien davantage de quantités de gise-
ments de déchets organiques vers la Gazéification Ces premières orientations soulignent par ail-
Hydrothermale (à l’exemple des effluents d’éle- leurs l’importance du foisonnement de projets de
vage non épandables localement). tailles variables démarrant avec des puissances
thermiques moyennes situés à 4,5 MWth par pro-
Afin d’arriver à cet objectif ambitieux, le Groupe jet et visant en priorité le traitement de déchets
de Travail Gazéification Hydrothermale a émis un industriels et urbains dont les coûts de traitement
premier scénario définissant la trajectoire d’évolu- de référence sont jugés trop élevés. Puis, avec la
tion annuelle pour les futurs projets industriels de diminution des coûts liés à l’amélioration de la
Gazéification Hydrothermale en France injectant technologie et de la production des modules en
leur production dans le réseau de gaz : série, la mise en œuvre de projets plus consé-
quents traitant une diversité de déchets plus
1. Un démarrage commercial des tous premiers importante peut être envisagée. La puissance
projets dès 2026. thermique moyenne des nouveaux projets pour-
rait augmenter ainsi à 6 MWth par projet à partir
2. Une bonne vingtaine de projets lancés d’ici fin de 2030. Ils seront complétés par un ou plusieurs
2028 cumulant une capacité potentielle de pro- très grands projets par an pouvant atteindre des
duction annuelle de 1 TWh/an de gaz injectable. puissances thermiques unitaires allant jusqu’à 40
MWth et plus par projet.
3. En 2030, une bonne soixantaine de projets
seraient en route injectant au moins 2 TWh/an
dans le réseau.

a
Stratégie Française pour l’Énergie et le Climat

87
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M o d è l e d ’ a f fa i r e d e l a t e c h n o lo g i e e t pot e n t i e l é c o n o m i q u e

Ces objectifs ambitieux ne peuvent se réaliser


sans :
• la collaboration accrue de l’ensemble des
acteurs de la filière de gazéification hydrother-
male dont au cœur les développeurs français de
la technologie capables de rivaliser avec leurs
concurrents étrangers qui sont également les
bienvenus.
• Un soutien adapté des pouvoirs publics per-
mettant une rémunération juste du gaz
renouvelable et bas-carbone injecté couvrant
les risques des investisseurs et acteurs de la
filière, en particulier au lancement de la filière
en France.
• L’évolution du prix du marché de gaz (PEGa) en
France qui va certes être la référence pour la
profession.
• Outre l’effet lié aux crises géopolitiques et
énergétiques vécues en 2022 à une ampleur
inédite, l’évolution des prix du méthane et du
CO2 devraient être telle que les acteurs de la
filière soient confiants de pouvoir proposer
à terme des coûts de revient couvert par une
rémunération du prix de gaz compatible avec
les attentes des acteurs économiques présents
sur le marché français.

a
PEG : Point d'Échange de gaz

88
07
CONCLUSION &
PERSPECTIVES

89
90
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
C o n c lu s i o n & p e r s p e ct i v e s

É
laboré à partir de l’ensemble des retours 4. une bien meilleure capacité d’adaptation aux
d’expériences et des données aujourd’hui futures contraintes environnementales dont les
disponibles, ce livre blanc synthétise les prin- exigences montent sans cesse.
cipales caractéristiques techniques, atouts et le
potentiel attendu à 2050 pour la technologie de En effet, capable de traiter des déchets orga-
Gazéification Hydrothermale. niques complexes, seuls ou mélangés à d’autres,
la Gazéification Hydrothermale pourrait devenir
Positionnement assez rapidement un outil de valorisation des
déchets puissant, compact, relativement écono-
En premier lieu, elle se positionne comme une mique et rapide à mettre en œuvre servant les
alternative vertueuse à l’incinération et à l’enfouis- intérêts aussi bien d’acteurs économiques publics
sement pour de nombreux déchets organiques et privés générant ou gérant des déchets et cher-
aujourd’hui peu, pas ou mal valorisés. En effet, la chant une alternative performante aux solutions
capacité de la technologie à produire très effi- existantes.
cacement des gaz renouvelables et bas-carbone
tout en permettant la récupération et revalorisa- État des lieux et atouts
tion potentielle des co-produits eau, minéraux et
métaux, place la Gazéification Hydrothermale au En termes de développement, la forte dynamique
centre des enjeux des territoires en matière d’in- européenne et plus particulièrement Néerlandaise
dépendance énergétique, d’économie circulaire et et Suisse, a permis l’émergence des premiers
de limitation du changement climatique. démonstrateurs industriels et une structuration de
cette nouvelle filière. En France, deux industriels
Elle s’adresse aujourd’hui non seulement au se sont positionnés sur la technologie (Leroux &
traitement et la valorisation de très nombreux Lotz Technologies et VINCI Environnement) et de
déchets organiques d’origine urbain ou agricole nombreux acteurs académiques, institutionnels
mais, de plus en plus, aussi à des déchets issus et privés travaillent aujourd’hui ensemble pour
de nombreux secteurs industriels qui sont, pour accompagner au mieux la filière française.
partie, pas seulement d’origine biogénique. La
Gazéification Hydrothermale est depuis 2022 très Sur le plan technologique, la Gazéification
recherchée par un nombre croissant d’industriels Hydrothermale se distingue des autres procédés
issus notamment des secteurs de la chimie et de traitement des déchets par son principe de
pétrochimie : ils voient dans la technologie une fonctionnement reposant sur le pouvoir de l’eau
alternative intéressante apportant des effets posi- supercritique (374 °C et 221 bar). En effet, ces
tifs cumulés dont : conditions physico-chimiques particulières vont
permettre, avec des prétraitements de l’intrant
1. Une capacité de traitement améliorée de leurs réduits au strict minimum, une valorisation opti-
déchets organiques pouvant être contaminés, au misée de toute la matière organique contenue
moins en partie, par différents composés orga- dans le déchet afin de permettre :
niques (hydrocarbures, plastiques, etc.) générant
• la production de gaz renouvelable et bas-car-
des coûts élevés dans les filières de traitement
bone injectables ou utilisables localement
existantes,
(mobilité et autoconsommation) profitant d’un
taux de conversion particulièrement élevé
2. une simplification des procédures administra-
(entre 85 et 99%) du carbone en gaz,
tives actuelles jugées complexes ou laborieuses
liées à l’obligation de traitement de leurs Tout en récupérant et préservant
déchets dans des incinérateurs nationaux voire
• de l’azote et des minéraux essentiels (phosphore
étrangers en cas d’absence de moyens de traite-
et potassium) pour la fabrication potentielle de
ment adaptés en France,
fertilisants (N, P, K) et
3. une piste de décarbonation intéressante dans • des métaux en quantité et/ou en valeur écono-
le cadre de leurs activités et la possibilité de mique plus ou moins importante.
transformer leurs déchets en ressources abais-
sant globalement leur coût de traitement à De plus, la quasi-totalité des polluants organiques
travers leur valorisation bien plus complète. (pesticides, détergents, résidus médicamenteux,
microorganismes pathogènes, etc.) et l’éventuelle

91
L I V R E B L A N C GA Z É I F I CAT I O N H Y D ROT H E R M A L E
C o n c lu s i o n & p e r s p e ct i v e s

présence de microplastiques sont détruits et/ou contribuer à la mise au point d’unités industrielles
convertis en gaz. Egalement, de nombreuses autres opérationnelles et performantes dès 2026. Ces
externalités positives en lien avec l’ensemble de premiers démonstrateurs auront pour objectif de
la chaîne de valeur sont à attendre générant des construire des Analyses de Cycle de Vie (ACV), des
impacts positifs et durables sur l’emploi, l’émer- modèles économiques viables et de valider les
gence de nouvelles filières de valorisation des nombreuses optimisations techniques en cours de
co-produits, de synergies industrielles, etc. développement.

Enfin, la technologie présente de nombreux Dans l’objectif commun de viser et de rendre pos-
autres atouts lui permettant une intégration faci- sible à 2050 l’atteinte des objectifs nationaux
litée dans de nombreuses configurations : temps en matière de décarbonation, de souveraineté
de conversion globale ne durant que quelques énergétique et de développement de l’écono-
minutes, installation très compacte (besoin de mie circulaire, le Groupe de Travail Gazéification
surface au sol très faible), technologie modulaire, Hydrothermale confirme pouvoir atteindre
absence de pollutions atmosphériques et très un potentiel de production de gaz renouve-
faibles nuisances sonore et olfactive pour ne citer lable et bas-carbone issu de la Gazéification
que les plus importants. Hydrothermale estimé à au moins 50 TWh/ an à
cet horizon. Cette capacité couvrirait environ 15 %
Potentiel de production de gaz de la production globale de gaz renouvelable et
renouvelable et bas-carbone bas-carbone (320 TWh/an) estimée par la filière
gazière.
Une première projection limitée à une vingtaine
de familles d’intrants biogéniques disponibles Pour atteindre cet objectif, plusieurs jalons à court
en quantité importante révèle un potentiel de et moyen terme ont été définis :
production, avec des hypothèses de mobilisation
• D’ici 2026 : le montage, la réalisation et la mise
prudentes, estimé à au moins 63 TWh/an d’ici
en fonctionnement commercial des premiers
2050 (uniquement 50 TWh/ an ont été retenus).
projets industriels.
Néanmoins, sachant que certains déchets indus- • D’ici 2030 : la production et l’injection d’au
triels étant au moins pour partie d’origine fossile moins 2 TWh/an de gaz renouvelable et bas
n’ont pas été comptabilisés et que les évolu- carbone dans le réseau de gaz avec environ
tions réglementaires concernant le retour au 60 projets de gazéification hydrothermale en
sol de certains déchets pourraient évoluer dans fonctionnement.
un futur proche, de nouveaux gisements pour la • D’ici 2033 : la production et l’injection d‘au
Gazéification Hydrothermale pourraient rapi- moins 6,8 TWh/an de gaz renouvelable et bas
dement devenir mobilisables en France pour carbone dans le réseau de gaz avec environ
augmenter encore l’estimation de son potentiel de 140 projets de gazéification hydrothermale en
production de gaz injectable. fonctionnement.

Perspectives de développement L’avancement technologique déjà atteint par les


développeurs les plus avancés, pour la plupart
Dans une perspective d’industrialisation, la gazéi- des étrangers, confirme certes la pertinence de
fication hydrothermale voit s’esquisser un modèle la technologie pour la valorisation de nombreux
d’affaire intéressant. Cependant son évalua- déchets organiques et la production de gaz renou-
tion exacte est délicate au regard de la diversité velable et bas-carbone sur le territoire français.
d’intrants et de co-produits, de l’évolution de la Toutefois l’émergence d’une véritable filière indus-
technologie et du potentiel lié à l’augmentation trielle de gazéification hydrothermale en France
de l’échelle de production. Ainsi, l’approche est ne sera possible qu’à travers l’implication de tous
plutôt évolutive en fonction des différents cas les acteurs concernés par la transition écologique
d’étude. et énergétique : un rôle décisif revient aux pou-
voirs publics devant apporter un coup de pouce
Bénéficiant de l’avance de certains autres pays décisif minimal aux développeurs français de la
en Europe, la filière française est aujourd’hui technologie impliqués et aux investisseurs pion-
en mesure d’assurer un déploiement rapide de niers pour soutenir le démarrage des premiers
démonstrateurs sur le territoire français afin de

92
projets industriels permettant de limiter au mieux Enfin, parmi les objectifs de travail visés par le
leurs risques. Groupe de Travail Gazéification Hydrothermale
représentant les acteurs de la filière en France, ses
Le soutien public devrait être complété par la membres prévoient que leurs demandes de sou-
mise en œuvre d’autres dispositifs, dont l’absence tien précédemment citées fassent l’objet d’études
a déjà été identifiée par la filière comme freinant spécifiques. Celles-ci auront notamment pour but
voire empêchant le développement potentiel de de mettre à disposition au plus tôt des pouvoirs
la technologie et l'implication des acteurs enga- publics les éléments nécessaires permettant de :
gés dans son émergence en France, comme :
• lever ces verrous et d’accompagner au mieux le
• un financement public adapté au montage lancement des premiers projets industriels et
financier de démonstrateurs industriels permet-
• de prendre en compte la Gazéification
tant aux deux ou trois développeurs français de
Hydrothermale dans les prochains textes légaux
la technologie de réaliser l’étape indispensable
(SFEC, PPE…) afin que son potentiel soit pleine-
d’optimisation de leur technologie en amont de
ment pris en compte dans la future feuille de
leur commercialisation finale ;
route énergétique française et lui permettre de
• une diversité de mécanismes de soutien pour la contribuer à l’atteinte de la neutralité carbone à
rémunération des gaz renouvelables et bas-car- horizon 2050.
bone injectables (ex : Biogas Purchase agreement,
certificats d’origine pour la production de gaz
renouvelable ou bas-carbone, contrats d’expé-
rimentation méthane de synthèse adaptés à la
filière, etc.) ;
• un cadre administratif réglementaire ICPE
(Installations Classée pour la Protection de
l’Environnement) adapté à la typologie du pro-
cédé et facilitant la mise en œuvre des projets
industriels ;
• des dispositifs financiers spécifiques permet-
tant d’accompagner les efforts de recherche et
développement des industriels investis dans la
technologie de gazéification hydrothermale et
leur permettre d’égaliser avec leurs homologues
étrangers. Ces soutiens peuvent être également
nécessaires pour le développement de briques
technologiques situées en amont (exemple :
prétraitements) ou en aval (traitements du
syngas de synthèse pour le rendre conforme
à l’injection, procédés de transformation des
résidus solides et liquides en produits commer-
cialisables, procédé de valorisation durable du
CO2 ou de décarbonation…).

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LISTE DES FIGURES,
TABLEAUX, RÉFÉRENCES
ET ABRÉVIATIONS

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Liste des figures


Figure 1 : Schéma de procédé simplifié de la Gazéification Hydrothermale (Source : GRTgaz/Cerema)............. 19

Figure 2 : Positionnement de la Gazéification Hydrothermale pour le traitement des déchets organiques ±


humides (source : Cerema / GRTgaz). (* Déchets contenant de l’eau ou secs mais permettant
un apport d’eau)............................................................................................ 20

Figure 3 : Potentiel de valorisation des boues d’épuration par la Gazéification Hydrothermale


(Source : GRTgaz/Cerema)... ................................................................................ 23

Figure 4 : Diagramme de phases (pression/température) de l’eau (Source : Cerema / GRTgaz)...................... 31

Figure 5 : Schéma de la chaîne de valeur de la Gazéification Hydrothermale, GT Gazéification Hydrothermale,


2021 (Source : Cerema / GRTgaz)........................................................................... 37

Figure 6 : Atouts de la Gazéification Hydrothermale (Source : Cerema / GRTgaz).................................... 41

Figure 7 : Évolution de la destination finale des boues de STEU aux Pays-Bas depuis 1981 (source : clo.nl)...... 45

Figure 8 : Difficulté d’épandages sur les terres agricoles en France (source : ValorMap)............................ 46

Figure 9 : Estimation de la production de gaz injectable par GH pour les 18 intrants majeurs d’origine
biogénique à horizon 2050 (63,2 TWh/an) – *estimation en 2050. ....................................... 48

Figure 10 : Estimation de la production par région de gaz injectable par GH en 2050 (63,2 TWh/an)............. 48

Figure 11 : Carte des développeurs actuels en Europe et dans le monde (situation à mi-2022)
(Source Cerema & GRTgaz)................................................................................. 54

Figure 12 : Photo du PSI de l’installation « Hydropilot » installée en 2020 à Villigen (CH) en collaboration
avec TreaTech (source : M. Fischer, Paul Scherrer Institute, 2020)......................................... 56

Figure 13 : schéma de principe du pilote de Gazéification Hydrothermale (source : TreaTech)..................... 57

Figure 14 : Vue aérienne du site d’Alkmaar de SCW Systems (source : invest-nl.nl).................................. 58

Figure 15 : Démonstrateur d’oxydation hydrothermale réalisée par Leroux & Lotz Technologies
dans le cadre du projet Leanships H2020................................................................. 61

Figure 16 : Installation mobile de GENIFUEL......................................................................... 62

Figure 17 : Exemple d'externalités positives et de bénéfices liées à une installation de Gazéification


Hydrothermale (GH) à l'interface des enjeux environnementaux, d'énergie et d'économie
(source : GT GH).. . .......................................................................................... 75

Figure 18 : Évolution du coût d’investissement (M€/ t/h) d’un projet Gazéification Hydrothermale en fonction de
sa capacité de traitement de déchets.. . ................................................................... 81

Figure 19 : OPEX pour les différents scénarios. La vente de chaleur et d’électricité grâce au biogaz généré par la
Gazéification Hydrothermale à travers une cogénération (scénario 2a) permet de diminuer sensible-
ment les OPEX.. . ........................................................................................... 83

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Liste des tableaux


Tableau 1 : Positionnement de la Gazéification Hydrothermale par rapport aux filières gaz renouvelable et
bas-carbone (GRTgaz).................................................................................... 22

Tableau 2 : Les technologies hydrothermales (GRTgaz)............................................................... 31

Tableau 3 : Synthèse des technologies de Gazéification Hydrothermale (GRTgaz).................................. 36

Tableau 4 : Carte d’identité du pilote Verena via données publiques................................................ 55

Tableau 5 : Carte d’identité du projet HydroPilot..................................................................... 56

Tableau 6 : Exemple de flux massiques pour une unité commerciale de Gazéification Hydrothermale
catalytique de 6 t/h (Source : TreaTech).................................................................. 57

Tableau 7 : Carte d’identité du projet SCW Systems.................................................................. 58

Tableau 8 : Carte d’identité du projet SUPERSLUDGE................................................................ 60

Tableau 9 : Carte d’identité du prototype Gaseau..................................................................... 61

Tableau 10 : Synthèse des procédés de valorisation du CO2 en fonction des puretés minimales requises, de la
maturité des technologies de valorisation et de la quantité de produits issues de l'utilisation d'une
tonne de CO2 (source GRTgaz)............................................................................ 70

Tableau 11 : Métaux intéressants pour la récupération pour chaque matrice (concentration)


(Varennes E. et al., 2020)................................................................................. 72

Tableau 12 : Classement des métaux par potentiel financier sur une base d’un million d’EH
(Varennes E. et al., 2020)................................................................................. 72

Tableau 13 : Compétitivité des projets hollandais rapport au biométhane injecté en France...................... 85

Tableau 14 : Coût d’élimination des boues d’épuration selon la filière de traitement (AMORCE)................... 86

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Références
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limentaires disponibles en France – édition 2020 [Internet]. 2020 p. 93.
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[14] ADEME, GRTgaz, GRDF. Un mix de gaz 100 % renouvelable en 2050 ? [Internet]. 2018 p. 283. Report No.: Référence :
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[15] Cerema. Enquête dragage 2017 - Enquête nationale sur les dragages des ports maritimes - Cerema, 2020. Collection :
Données. ISBN : 978-2-37180-483-8 [Internet]. 2020 p. 33. (Données). Report No.: Numéro ISBN : 978-2-37180-483-8.
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from the Operation Experience of the First Dedicated Pilot Plant. Processes [Internet]. 2021;9(3).
[20] RVO. BTG openbaar eindrapport vergassing 11 maart 2021 - Rijksdienst voor Ondernemend Nederland. [Internet]. 2021
p. 83. Report No.: TSE2200012.
[21] Koppejan J, Zeevalkink JA, Böhm R, Waterbeheer STO. Toepassing van biologische methanisering op rioolwaterzuiverin-
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récupération des métaux contenus dans les eaux usées domestiques [Internet]. INRAE ; INSA Lyon ; Agence de l’eau
Rhône-Méditerranée-Corse ; 2020 sept. Report No.: 70.

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Références

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EAT05 a.

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Liste des abréviations

AGEC Loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire


CAPEX Dépenses d’investissement (de l’anglais CApital EXpenditure)
CEA Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives
CSR Combustible Solide de Récupération
EH Équivalent-Habitant
ETM Élément Trace Métallique
FFOM Fraction Fermentescible des Ordures Ménagères
GH Gazéification Hydrothermale
GNV Gaz Naturel pour Véhicules
IAA Industrie Agro-Alimentaire
ICPE Installation Classée pour la Protection de l'Environnement
ISD Installation de Stockage des Déchets
KIT Karlsruhe Institut of Technology
LPEC Loi de Programmation Energie Climat
MB Matière Brute
MO Matière Organique
MS Matière Sèche
MWth Méga watt thermique
OPEX Dépenses d’exploitation (de l’anglais OPerational EXpenditure)
PCI Pouvoir Calorique Inférieur
PCS Pouvoir Calorique Supérieur
PEG Point d'Échange de Gaz
PPE Programmation Pluriannuelle de l'Énergie
PSI Paul-Scherrer-Institut
REUT Réutilisation des Eaux Usées Traitées
REX Retour d’expérience
SFEC Stratégie Française sur l'Énergie et le Climat
SNBC Stratégie Nationale Bas Carbone
STEU Station de Traitement des Eaux Usées
TRL Technology Readiness Level : indice de maturité technologique
UIOM Usine d'Incinération d'Ordures Ménagères
UVE Unité de Valorisation Énergétique

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