Blumenthal Delalogique 2006
Blumenthal Delalogique 2006
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Peter Blumenthal
Université de Cologne
Le type de logique dont il sera question n'a (presque) rien à voir avec le
sens le plus courant de ce terme : il ne s'agit pas d'un quelconque rapport
avec l'étude formelle des normes de la vérité. La logique à laquelle nous
pensons désigne quelque chose de moins rigoureux, de plus quotidien et de
plus « naturel » aussi ; en effet, le Vocabulaire de Lalande (sous logique B.)
présente cette idée de la logique sous le terme de logique naturelle et la définit,
en première approximation, par « manière de raisonner, telle qu'elle s'exerce
en fait ». Bien avant qu'un président français ne parle de « logique de
guerre », syntagme souvent repris depuis, le philosophe Auguste Comte
expliqua son concept de « logique des sentiments », très proche du sens
auquel nous voudrions utiliser logique dans l'analyse ci-dessous. Selon
l'auteur du Système de politique positive (1967 : 239), la logique des sentiments
est « l'art de faciliter la combinaison des notions d'après la connexité des
émotions correspondantes ». La combinatoire guidée par les sentiments, puis-
sante mais « primitive », constitue un cas spécial de la « combinaison
mentale » (op. cit. : 240) ; au besoin, cette dernière peut être complétée par la
« logique du langage », qui vient à la rescousse du système primitif (« logique
naturelle ») lorsque celui-ci s'avère trop peu disponible et précis.
Sans nous réclamer des prémisses psychologiques dont part le fondateur
du positivisme (telle l'opposition entre sentiments « naturels » et langage
« artificiel »), nous retiendrons cependant sa conception générale de
« logique » comme une combinatoire réglée sur des systèmes sous-jacents.
Nous allons appliquer cette dernière définition non pas aux « notions »
(terme de Comte), mais aux mots. Car le statut des « notions » ou « concepts »
tel qu'il transparaît dans les discussions du cognitivisme actuel ne semble pas
suffisamment clair pour fonder une réflexion sur la combinatoire des signes
langagiers. Les concepts ont-ils une existence autonome en dehors du langage
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
ШИШ ГШ(ШЕ IH 15
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Collocations, corpus, dictionnaires
2. Notion proche des « schematic systems » de Talmy (2000 : 40, 68, 214) et du « schéma cognitif »
de Le Ny (2005 : 260 sqq ) et des schémas des « théoriciens sémio-cognitivistes » mentionnés par
Dufays (1994 : 99).
3. D'un point de vue méthodologique (primauté donnée aux phénomènes statistiquement perti-
nents), cette contribution est complémentaire à celle de Tutin et al. (ce numéro).
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
2. SURPRISE VS ÉTONNEMENT
Les dictionnaires confirment que ces deux noms constituent des syno-
nymes - même très proches, selon les données fournies par le CRISCO
(Centre de Recherches Inter-langues sur la Signification en COntexte, Univer-
sité de Caen). Le seul dictionnaire à oser une différenciation explicite est celui
de Lafaye (1869 : 977) 4, qui voit d'une part une opposition d'intensité, surprise
étant « plus faible » qu 'étonnement, et de l'autre, une divergence dans l'orien-
tation des mots vers le monde extérieur ou bien vers la vie de l'âme : « La
surprise est toute objective, toute produite par l'événement ; au lieu que Y éton-
nement dépend en partie du sujet. »5. Certes, cette polarisation entre monde
extérieur et monde intérieur est constitutive de l'histoire de la pensée occiden-
tale, mais elle se retrouve aussi, dans un contexte qui thématise la complé-
mentarité de deux logiques (sentiment vs langage), chez Comte (op. cit. : 241),
né en 1798, onze ans avant Lafaye, ce qui nous pousse à penser que ces idées
étaient dans l'air du temps ; elles restent valables aujourd'hui, même si la
perspective diffère légèrement. Pour le montrer, il suffit d'étudier les
diagrammes suivants qui renseignent sur les collocatifs les plus typiques
(noms, verbes, adjectifs, adverbes, prépositions) qu'ont les deux mots en ques-
tion dans Le Monde. Voici d'abord les résultats pour étonnement (415 occur-
rences) dans les années 1999, 2000 et 2002 (environ 79 millions de mots) :
4. Malgré le titre prometteur du livre, Duchesne & Leguay (2005) ne parviennent pas à éclaircir la
question.
5. S'y ajoute probablement l'opposition relatif /absolu, invoquée par Lafaye dans de nombreux
autres articles : Г étonnement est souvent relatif à une attente contraire.
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Collocations, corpus , dictionnaires
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
qu'un exemple : on va de surprise en surprise lorsqu'on fait face aux aléas des
situations imprévues - les « surprises » font bien partie du monde extérieur.
En revanche, le sentiment d'étonnement provient en général de nous-mêmes
et appartient bien plus rarement à la sphère des événements. Ces tropismes
que l'on pourrait qualifier d'« ontologiques » (extérieur vs intérieur) des
deux mots de base expliquent aussi la majorité des autres combinaisons
exclusives ou préférentielles, à commencer par les accompagnateurs les plus
spécifiques, susciter (+ étonnement) et créer (+ surprise). Le verbe susciter
('faire naître un sentiment, une idée' selon le Petit Robert) vise un effet dans
le monde intérieur. Par contre, créer une/la surprise , centré sur le monde des
événements, paraît bien plus objectif ; cf. Le jeune Français a créé une surprise
considérable en s' emparant de la médaille de bronze (Le Monde 2002). Ce qui est
créé peut (mais ne doit pas) rester extérieur à l'homme. Un autre verbe à
usage causal, réserver , n'est pas moins typique de surprise6. Selon le Petit
Robert , il peut signifier avec un sujet inanimé : 'être destiné à procurer, à
donner ; faire que (qqch.) arrive à qqn'. La définition souligne bien le fait
que la cause est dans ce cas inhérente au monde extérieur. Même la réparti-
tion des prépositions en apparence aussi innocentes que sans et avec semble
indirectement liée à l'opposition sémantique discutée ici. Reprenons d'abord
les faits distributionnels : pour surprise , sans arrive au 2e rang, et avec, au 28e.
Dans le cas d'étonnement, c'est l'inverse : avec, au 2e rang et sans, au... 135e
(largement au-dessous du seuil de pertinence). Encore une fois, l'explication
tombe sous le sens dès que l'on observe les exemples : l'absence de surprise
peut jalonner le cours des événements (exemple : Du lycée d'Ajaccio à la rue
d'Ulm, où il entre en 1936, le parcours est sans surprise) ; en revanche, l'idée
d'étonnement se greffe souvent sur un verbe mental, qui exprime donc une
activité « interne » (exemple : J'ai découvert avec étonnement [...] une nouvelle
géographie de Jérusalem, Le Monde 2002).
L'autre critère utilisé par Lafaye, la plus grande intensité d'étonnement, se
dégage avec moins d'évidence de nos diagrammes. Tout au plus pourrait-on
relever que grand figure au 3e rang pour étonnement et au 9e pour surprise.
Les observations qui précèdent constituent une première exemplification
de la démarche proposée ici : l'analyse contrastive des collocations de deux
synonymes mène droit au cœur de leurs différences de sens ; celles-ci corres-
pondent en l'occurrence à des critères fondamentaux qui structurent notre
univers sémantique et cognitif (l'opposition intérieur /extérieur, modalités de la
causalité). Toutefois, on aurait tort de projeter une vision totalement antithé-
tique sur la signification des mots. En réalité, un mot empiète souvent partiel-
lement sur le domaine collocatif et la signification de son synonyme, ne serait-
ce qu'en raison de sa polysémie. Pour s'en convaincre à propos du couple
traité ici, il suffit de considérer les acceptions de surprise distinguées par le
Petit Robert : ce nom exprime soit 1'« état d'une personne surprise » et
1'« émotion provoquée par qqch. d'inattendu », soit « ce qui surprend ; chose
6. Cf. « Cette soirée, où j'avais quinze ans, me réservait des surprises infinies » ( Petit Robert sous
réserver).
HNCUE FRANÇAISE ПО 19
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Collocations , corpus , dictionnaires
3. DÉFINITIONS PROVISOIRES
7. Sens que ne peut pas avoir étonnement, qui ne réfère pas aux phénomènes du monde extérieur ;
en effet, Y œuf-surprise ne saurait être qualifié à'* œuf -étonnement, et l'énoncé c'est une surprise ne
correspond en aucun cas à *c'est un étonnement.
8. À la différence de malheur, toujours « objectif ».
9. « État d'esprit » ou « être, chose qui trouble ou inquiète l'esprit ».
10. « Pensée qui occupe l'esprit » ou « actes par lesquels on soigne ».
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
4.1. Chagrin
Dans le cas de chagrin (106 synonymes dans le Dictionnaire des synonymes du
CRISCO), il suffit de lire les définitions des dictionnaires pour se rendre
compte du conditionnement causal du sentiment en question. Selon le Petit
Robert, un chagrin (à la différence de le chagrin massif ou partitif) signifie 'peine
ou déplaisir causé par un événement précis', la relation causale allant appa-
remment de pair avec l'idée d'une cause particulière. Il n'est pas étonnant que
l'accompagnateur de loin le plus spécifique de chagrin dans Frantext. romans
LINGUE FRANÇAISE IH 21
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Collocations , corpus , dictionnaires
4.2. Tristesse
Cela n'est nullement le cas du mot tristesse (777 occurrences dans Fran-
text.romans), qui figure partout en bonne place comme synonyme de chagrin.
Le profil combinatoire de tristesse présente beaucoup de collocatifs entre
lesquels les écarts de spécificité ne sont pas grands (différence par rapport à
surprise , plus haut) :
(lexèmes) de tristesse dans Frantextromans (empan : 5 mots à gauche et à droite du mot de base)
11. Log likelihood 120 dans une fenêtre de 5 mots des deux côtés, avec limitation aux lexèmes.
Exemple d'un emploi en dehors de cette structure : « l'infini chagrin d'un amour filial trop tôt
rompu ».
12. Cf. Halliday (2004 : 267) sur les relations entre agency , instrumentality et means.
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
13. Cf. Blumenthal 2006, chap. 17.1 ; le diagramme de surprise, supra 2., met en relief le caract
ment stéréotypé du contexte antérieur de ce mot (cf. le rôle prédominant des deux premiers
tifs), alors qu'il n'existe pas de « peloton de tête » nettement identifiable dans le cas de tristess
14. Mot mis en comparaison avec tristesse à cause de sa logique totalement différente,
causale (idée d'une offense personnelle) et finale (désir de vengeance) ; cf. Lafaye (1869
infra 5.3. (logique causale /finale).
LINGUE FRANÇAISE ПО 23
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Collocations, corpus , dictionnaires
verbe emplir , d'un sens semblable, figure au 19e rang des accompagnateurs
lexématiques. Ces deux verbes ne se trouvent pas parmi les collocatifs de
chagrin. Dans le même ordre d'idées, nous pouvons être pleins de joie et (plus
rarement) pleins de tristesse , alors que ce syntagme, qui réfère à une situation
statique, n'est pas attesté pour chagrin dans Frantext. romans. Tristesse contraste
à cet égard avec mélancolie , qui évoque typiquement une autre idée de spatia-
lité : dans tous les corpus consultés, teinté (de mélancolie ) est hautement perti-
nent - métaphore qui fait penser, non au volume, mais à la surface et
caractérise ce sentiment comme (potentiellement) léger et diffus ;
• s'y ajoute une logique « ensembliste », qui concerne la propension de tristesse
à se présenter en combinaison avec d'autres noms de sentiments, désignant
autant d'éléments de l'ensemble que constitue le paradigme de « passions de
l'âme » au sens de Descartes. Saussure parlait de rapports associatifs là où la
linguistique postérieure préférait paradigmatiques. En l'occurrence, le terme
saussurien nous paraît pertinent : la tendance de tristesse à figurer à côté
d'autres éléments de son paradigme dénote la capacité associative de ce mot
qui fait apparemment penser à des sentiments semblables ou opposés.
Cet aspect apparaît parmi d'autres dans les nombreuses citations (tirées de
Frantext. romans) qui expriment le passage d'un état psychologique à l'autre ;
cf. « Le vin aidant, on passait de la tristesse à la gaieté, de l'amitié à la colère,
de la colère aux défis et à l'envie d'incendier toute la ville. » ; « Quelle soirée !
La tristesse et la joie se succédaient à grand rythme. ». De telles présentations
de la succession des sentiments épousent souvent la sagesse populaire qui
veut que « après la pluie, le beau temps », proverbe glosé d'ailleurs dans le
Petit Robert (sous pluie) par « après la tristesse, vient la joie ». Mais divers
sentiments peuvent aussi coexister en même temps, se juxtaposer ou bien se
mêler (12e rang du diagramme ci-dessus), comme dans l'exemple suivant :
« Avec un mélange d'ironie, de tristesse, de satisfaction amère d'avoir
compris avant les autres, Claude murmurait [...]».
15. Nous ne comptabilisons jamais de, dont l'analyse automatique fait problème en l'état actuel de
nos outils informatiques.
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
par d'autres prépositions qu'avec ; cf. plus haut passer de la tristesse à la gaieté et
la citation suivante du Petit Robert (sous étioler) : « Ayant besoin de joie
comme les plantes de soleil, je m'étiolais dans cette tristesse » (France). Statis-
tiquement, dans + tristesse est toutefois moins typique de la combinatoire du
nom que avec + tristesse : dans la fenêtre gauche (5 mots) de tristesse , dans se
trouve respectivement au 110e (Frantext. romans, exemple : Il tombait souvent
dans un état de grande tristesse) et au 618e rang (Le Monde 2002).
Au niveau de notre réflexion sur les schémas sémantico-cognitifs, nous
interprétons ces combinaisons prépositionnelles comme l'indice d'une logique
que nous nommerons « circonstancielle ». Cette notion implique que les noms
concernés s'utilisent spécifiquement pour exprimer des circonstances - soit la
manière (qualité d'un processus), soit la situation (état16 où se trouve le réfè-
rent du sujet).
Ce genre de caractérisation n'a de sens que s'il permet de départager les
mots, et en particulier les synonymes. A la différence de tristesse , typiquement
« circonstanciel », son synonyme chagrin renvoie de façon spécifique à un
actant17, et plus précisément à l'actant dans un enchaînement causal (cf. supra).
La preuve la plus patente, bien que sujette à interprétation, est l'apparition
tardive des prépositions dans la liste des accompagnateurs spécifiques de
chagrin. Dans Frantext. romans, avec et sans ne se présentent qu'aux 21e et
22e rangs (contexte gauche, empan 5), alors qu'elles figurent aux 2e et 9e rangs
devant tristesse. Il est vrai que par est une préposition hautement spécifique de
chagrin (6e rang ; 18e rang devant tristesse), mais comme nous l'avons vu, elle
sert essentiellement à introduire le complément d'agent (miné par le chagrin) et
fonctionne donc à l'intérieur d'une logique actancielle. En résumé, malgré les
nombreuses affinités entre les deux mots, l'une de leurs différences typiques
réside dans le fait que tristesse se rattache plutôt à une logique circonstancielle
(privilégiant en l'occurrence l'expression de la manière) et chagrin à une
logique actancielle (focalisant souvent le lien de causalité).
4.2.3. Deux manières d'être
16. Syntaxiquement souvent en tant qu'arrière-plan ; exemple : « car il savait que, dans la tris-
tesse, la félicité de vos meilleurs amis ne vous réjouit pas nécessairement » (Frantext. romans).
17. Au sens de Tesnière (1959 : 105) : « les personnes ou choses qui participent à un degré quel-
conque au procès ».
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Collocations, corpus, dictionnaires
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
5. COLÈRE VS FUREUR
18. Cf. supra 4.2.2. ; dans Frantext. romans, les deux occurrences d'état de tristesse sont précédées de
dans. Les types de conceptualisation liés à certaines prépositions devant les noms de sentiment
sont discutés par Leeman (1998 : 106-113).
(ДИСКЕ FRANÇAISE IH 27
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Collocations, corpus, dictionnaires
19. Premier collocatif (lexème) dans Frantext. romans. Incidemment, on peut se demander pourquoi
l'emploi pronominal de mettre n'est pas possible avec joie ( mettre en joie, mais *se mettre en joie).
20. Correspondant en général à la fonction lexicale CausFunc0 de Mel'cuk (1984 : 49).
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
nous trouvons donc dans le cadre d'une causalité qu'on pourrait qualifier de
« réactionnelle » quant à l'effet exprimé. La réaction peut se formuler tout en
faisant syntaxiquement abstraction de l'élément causal : il s'est mis en colère ,
alors que cet élément réapparaît dans la construction transitive correspon-
dante ; exemple : « La visite virtuelle du pape à Moscou met en colère le
patriarche Alexis II. »
Le schéma actanciel de colère est donc susceptible, sur la base de colloca-
tions, de plusieurs degrés de complexification. Ceux-ci vont de la simple
action (il se met en colère ), en passant par des degrés intermédiaires de réaction
(x provoque la colère de y ( contre )), jusqu'à une contre-réaction, visant à apaiser
(cf. 12e collocatif) l'enragé21.
En résumé, le référent de colère apparaît dans Le Monde essentiellement
comme un état évolutif, le plus souvent perçu à son stade initial (cf. provoquer).
D'autres collocations peuvent focaliser une phase plus avancée (la colère monte),
la phase centrale (la colère gronde , au 5e rang), ou la phase finale (apaiser).
Colère et fureur se caractérisent par des profils combinatoires semblables
dans nos deux corpus journalistiques. Ainsi, dans Le Monde , les verbes déclen-
cher et provoquer , qui soulignent une vision inchoative, se répartissent égale-
ment parmi les rangs les plus élevés (4e et 5e lexèmes). Cette impression de
similarité se confirme dans les dictionnaires, qui fournissent des définitions
assez proches des deux noms.
21. Cf. le concept cognitif et linguistique de « force dynamics », développé par Talmy (2000 : 409).
I A N С II I FRANÇAISE HO 29
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Collocations , corpus, dictionnaires
6. CONCLUSIONS
22. Le fait que colère soit 6 fois plus fréquent ne compense pas l'énorme écart entre les construc-
tions avec en.
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De la logique des mots à l'analyse de la synonymie
23. Dans le cas de rage, synonyme de fureur, c'est « le débat fait/faisait rage » dans Le Monde et
« la bataille fait/ faisait rage » dans L'Est Républicain.
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