Dissertation - Modernité Poétique

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DISSERTATION
Modernité poétique

Un poète, pour être moderne, doit -il renoncer à toutes les contraintes de la tradition ?

Plan type “certes...mais”

Partie I : Certes, la modernité poétique témoigne de nouveautés contraires à la tradition

La modernité poétique est souvent associée à de grands changements, une nouvelle


forme d’écriture littéraire, mais surtout, l’annonce d’un nouveau temps où les écrivains du XX e
siècle vont chercher à réinventer la littérature française et ses thèmes. Cette modernité
poétique est retrouvée dans Alcools, de Guillaume Apollinaire, publié en 1913, celui-ci situe son
ouvrage à mi-chemin entre tradition et modernité. Premièrement, il fait l’usage de thèmes
contemporains, il fait référence à la réalité du monde industriel, qui commence à se transformer
et à renouveler son image. Il puise dans de nouveaux thèmes, dans Zone, notamment, il fait
l’éloge de la “rue industrielle”, en outre, il évoque la Tour Eiffel et sa magnificence, la ville
devient un espace poétique. L’industrialisation est placée au centre du recueil, synonyme
du nouveau monde, considérant qu’Apollinaire étant un grand fan intemporel de la modernité,
il paraît évident et plus que primordial de placer cet élément au sens d’une modernité flagrante
dans Alcools. Contrairement à l’opinion publique, cette modernité est grandement appréciée par
Apollinaire, ces nouveautés s’associent et forment de nouveaux horizons industriels, certes,
mais des horizons littéraires également. Certains thèmes sont ajustés, nottament quand il s’agit
de mythologie ou de légendes, Loreley inspiré de H.Heine, Merlin et la vieille femme .
Cette poésie a inspiré différentes figures littéraires tel qu’Émile Verhaeren, un poète
belge d’expression française, qui consacre un recueil au paysage industriel,
particulièrement dans Les usines, dans le recueil Les villes tentaculaires.
L’industrialisation est un des thèmes, comblé avec, la beauté du monde moderne,
l’alcool, qui sont nouveaux et qui permettent à Apollinaire, ainsi que d’autres écrivains
de se lancer dans une nouvelle conquête de l’écriture contemporaine.

De plus, la modernité poétique est aussi représentative de nouveaux codes d’écriture qui
bouleversent la tradition poétique. Apollinaire déstabilise ses vers en supprimant toute
forme de ponctuation possible et inimaginable, les vers deviennent libres, c’est une forme de
liberté totale, le rythme étant déséquilibré, les rimes mélangées, des ambiguïtés de lecture
apparaissent. On traduit alors l’abandon de la rime, la dislocation de la strophe par Apollinaire,
comme une envie de se débarrasser d’un héritage poétique considéré comme dépassé, n’étant
plus pertinent, pas suffisamment adapté à son style d’écriture. Les Colchiques est un poème
assez représentatif de cette envie de liberté qui met en avant une reconstruction totale
de la forme d’écriture d’Alcools ; celui-ci met fin au lyrisme traditionnel, toujours sans
ponctuation, on voit disparaître les rimes du sonnet traditionnel, la métrique étant
recomposée, les vers demeurent irréguliers. De même que le “je” lyrique disparaît, les
images sont discontinues, c’est une vraie réorganisation littéraire qui représente, tout à
fait, cette nouvelle conception de la poésie. On observe le “tu” qui fait son apparition dans
Cortège montre qu'Apollinaire peut se parler à lui-même, c’est une rupture avec les poètes
traditionnels. Dans La Chanson du Mal-Aimé, les rimes sont remplacées par des
assonances. Cette nouvelle organisation va inspirer Léopold Senghor, un ancien
président de la République du Sénégal d’expression française, qui choisit quant à lui, un vers
très long qui s’apparente au verset et l’absence de rimes.

De surcroît, on comprend alors la naissance d’un nouveau lyrisme, témoin d’un nouvel esprit, il
est visuel et fondé sur un nouvel élan. En effet, la volonté d'Apollinaire de fonder, par le
cubisme, une nouvelle esthétique et une redéfinition de l’esprit nouveau. Selon Apollinaire,
“La surprise est le grand ressort nouveau” (L’Esprit nouveau et les poètes) 1917), c’est cette
surprise et sa place importante que tous les nouveaux mouvements littéraires et artistiques
naissent, dans Alcools, il n’existe pas de fil conducteur, les poèmes ont été réorganisés.. c’est
une référence à l'esthétique cubiste. Cette surprise naquît, chez Apollinaire dans Chantre, un
monostiche portant une lourde intrigue, quant à sa position dans le recueil, mais plus
précisément, sur son sens véritable. Celui-ci annonce l’arrivée du calligramme et de l’univers
nouveau constitué d’un souffle poétique réinventé par le poète. Apollinaire joue avec les mots et
le sens des phrases, (“Le cuisinier plume les oies / Ah tombe neige / Tombe et que n’ai-je / Ma
bien-aimée entre les bras » (La blanche neige) ; ces images insolites annoncent le surréalisme.
Ce lyrisme est également visuel, pour Apollinaire ces “artifices” font naître un “lyrisme visuel”,
on y retrouve la synthèse des arts, de la musique, de la peinture et de la littérature, ce ne sont
que des choses nouvellement imaginées. Inspiré d’Apollinaire, Cendrars introduit des données
numériques dans sa poésie, 35° 57’ latitude nord 15° 16’ longitude ouest, mais pas que, il fait
aussi usage du cubisme dans Le Panama ou les aventures de mes sept oncles, également une
idée nouvelle apparue d'Apollinaire. Mais ce lyrisme fonde une recherche personnelle et
intrigue sur la spiritualité, les objets du quotidien sont décrits à nouveau, on prend possession et
signification des choses paraissant insignifiantes. Le "je" lyrique disparaît et à est à voie de
reconstruction, Apollinaire use Cortège pour en témoigner par ce vers : “Je me disais
Guillaume il est temps que tu viennes”. Alcools est aussi témoin d’une religion, dite
intemporelle et immortelle, son amour lui est décrit “La religion seule est restée toute neuve la
religion”. Cette idée, encore une fois, va inspirer d’autres poètes tel que Max Jacob où Reverdy,
qui aspirent, ce même amour pour la religion et sa pratique.

Partie II : Mais, cette modernité poétique est aussi marquée par la tradition et ses
principes, témoignant d’un retour aux sources.

Cependant, derrière les traces de cette modernité poétique évidente, on trouve aussi
une poésie répondant en la forme de la tradition par ses différents codes. Apollinaire va
construire un réel pont entre cette tradition et cette modernité, conduisant à une
reconstruction de sa poésie. Le premier indice évoquant la tradition dans l’écriture sont les
thèmes utilisés grandement dans Alcools, rappelant toujours l’intemporalité des textes. Ces
thèmes sont parfois adaptés pour répondre aux critères de la modernité, mais parfois, ils
agissent simplement pour rappeler la tradition dans ce recueil. Apollinaire choisi pour Le Pont
Mirabeau la fuite du temps, il fait l’éloge de l’automne dans Les Colchiques, mais aussi, il choisit
le thème de l’amour malheureux, plus précisément celui du coup de foudre, dans A une
passante... La nature est envisagée comme miroir de l’âme, dans Crépuscule par exemple…
Pour Apollinaire, il est plus que primordial d’utiliser des thèmes rappelant la tradition,
des thèmes qui mettent en avant le temps ancien de ses dires, quitte à parfois, les
revisiter afin de les instaurer dans une bulle de modernité. Par ce fait, on retrouve
l’influence du romantisme (automne), du symbolisme (signes à décoder), mais aussi des
influences littéraires, Baudelaire Alcools, ivresse de l’inspiration poétique, mais aussi,
Verlaine.. La Muse, figure essentielle de l'inspiration poétique liée aux femmes et à
l’amour, est toujours très prônée par les poètes romantiques dont Baudelaire, Verlaine et
évidemment Apollinaire. Le choix de ces quelques thèmes va permettre à Apollinaire de se
dire “traditionnel” et de s’insérer aux côtés de poètes répondant, à son époque, aux codes d’une
poésie complètement traditionnelle. Pierre Reverdy, poète français associé au cubisme dont
Apollinaire prend goût, aura une importante influence sur la littérature française, il s’inspire
d’Apollinaire et lui aussi, use ces thèmes et va même nommer ces poèmes par ces derniers, on
y retrouve alors La Fuite du temps mais aussi Jour monotone.

De plus, Apollinaire va construire une réforme sur sa poésie basée sur une nouvelle
composition et organisation poétique, répondant aux codes traditionnels de la poésie au sens
de ses rimes, strophes.. En effet, la majorité des poèmes d’Alcools sont présentés sous
une forme plutôt régulière, Apollinaire utilise pour nombreux de ses poèmes, alexandrins,
octosyllabes, décasyllabes et heptasyllabes. Des quatrains (Saltimbanques), pentasyllabes
(Rosemonde) sont retrouvés… Le Brasier, premier poème de Guillaume Apollinaire est le plus
classique dans sa structure, il se compose de cinq quintiles d'octosyllabes. Parfois, des vers
sont rassemblés formant la tradition dans la lecture, mais à d’autres moments, ils sont séparés,
il n’existe pas de fil conducteur expliquant cette dislocation. Témoignant de la traditionalité dans
une bulle de modernité déjà assez flagrante dans divers codes relevés ci-dessus, les strophes
sont majoritairement régulières. La versification est revisitée, les mots sont parfois présentés
d’une nouvelle façon, Calligrammes d’Apollinaire. Alcools, organisé en différents thèmes
reprend aussi un des principes de la littérature traditionnelle qui met en avant la séparation des
poèmes, bien qu’il n’existe pas de fil conducteur, ces compositions sont parfaitement
identifiables et permettent de l'associer à une littérature traditionnelle. Cette organisation va être
inspirée de certains poètes et ne va cesser d’en inspirer d’autres tout au long de l’histoire de la
littérature française, on peut prendre l’exemple de Cendrars, qui va utiliser un alexandrin et le
glisser dans la conception d’un vers libre : La Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de
France.

De surcroît, Apollinaire marque l’intemporalité de la religion, de la mythologie germanique et


hindoue, du temps médiéval, marquant le paysage de la tradition qui reste, très utilisé, encore
de nos jours. Il exclut totalement la possibilité de supprimer la religion de son
ouvrage, pour lui, elle prend une place très importante au sein de sa vie littéraire.
Hormis la religion et les références bibliques, Apollinaire choisit de puiser et d’insérer des
références aux temps ancien, aux croyances, légendes, mythologie qu'elles soient
germaniques, hindoues ou quelconque. On peut prendre l’exemple du Brasier, ou Apollinaire
fait référence à la mythologie grecque, mais aussi Salomé, entièrement dédié à la bible et
à la religion, pour ensuite marquer avec l’insertion du paysage médiéval, rappellant une
figure importante du Moyen-Âge par Merlin et la vielle femme. Enfin, dans La Chanson du
Mal Aimé, Apollinaire mélange les références à Ulysse, la Bible, ainsi que la mythologie
hindoue... Cette envie d’instaurer la religion est dûe à l’éducation en bon chrétien
d'Apollinaire, à Rome, par sa mère, bien qu’il ne se considère plus chrétien au moment de
l’écriture de son ouvrage, il conserve sa mission de poète et dans le caractère sacré de la
parole poétique. Apollinaire décide de faire venir à notre rencontre des personnages bibliques,
comme Salomé, dans le poème qui porte son nom, mais aussi de grandes figures de l'Antiquité
où Ulysse. Cette trace de tradition marque son ouvrage. Le cycle “Rhénane” fait allusion au
voyage d'Apollinaire en Ardenne et en Allemagne présentant ensuite les légendes germaniques,
mélancoliques, La Loreley montre H. Heine, figure importante de cette partie de l’ouvrage, un
écrivain allemand, Nuit Rhénane. Apollinaire choisit d’intégrer à sa poésie des croyances,
héritages du passé et donc, de la littérature traditionnelle mettant en scène des
personnages cultes qui rappellent à ses lecteurs que la modernité poétique se combine
très bien avec une poésie - dite - traditionnelle.

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