RFE Etat de Mal Épileptique SRLF SFMU
RFE Etat de Mal Épileptique SRLF SFMU
RFE Etat de Mal Épileptique SRLF SFMU
SRLF - SFMU
Société de réanimation de langue française
Société française de médecine d’urgence
Hervé Outin, Papa Gueye, Vincent Alvarez, Stéphane Auvin, Bernard Clair,
Philippe Convers, Arielle Crespel, Sophie Demeret, Sophie Dupont, Jean-Christophe Engels,
Nicolas Engrand, Yonathan Freund, Philippe Gelisse, Marie Girot, Marie-Odile Marcoux,
Vincent Navarro, Andrea Rossetti, Francesco Santoli, Romain Sonneville, William Szurhaj,
Pierre Thomas, Luigi Titomanlio, Frédéric Villega, Hugues Lefort, Vincent Peigne
Organisateurs
SRLF : Vincent Peigne, service de réanimation, CH Métropole-Savoie, Chambéry
SFMU : Hugues Lefort, Structure des Urgences, Hôpital d’instruction des armées
Legouest, Metz
Autres experts :
Vincent Alvarez, Hôpital du Valais, Sion et CH vaudois, Lausanne
Andrea Rossetti, Hôpital du Valais, Sion et CH vaudois, Lausanne
Philippe Convers, CHU de Saint-Etienne
Arielle Crespel, CHU de Montpellier
Philippe Gelisse, CHU de Montpellier
Sophie Dupont, CHU de la Pitié-Salpétrière, Paris
Vincent Navarro, CHU de la Pitié-Salpétrière, Paris
William Szurhaj, CHU de Lille
Pierre Thomas, CHU de Nice
Groupe de Lecture
Comité des référentiels et de l’évaluation (SRLF) : Naïke Bigé, Laetitia Bodet-Contentin,
Rémi Bruyere, Henri Faure, Max Guillot, Sandrine Jean, Erwan L’Her, Eric Mariotte,
Virginie Maxime, Chirine Mossadegh, Vincent Peigne, Fabienne Plouvier, Elie Zogheib
Comité des référentiels (SFMU) : Eric Cesareo, Anthony Chauvin, Pierre-Géraud Claret,
Jean-Philippe Desclefs, Bénédicte Douay, Jonathan Duchenne, Aurélie Gloaguen,
Philippe Le Conte, Hugues Lefort, Mikaël Martinez, Mathieu Oberlin, Djamila Rerbal,
Guillaume Valdenaire, Julien Vaux, Damien Viglino, Caroline Zanker
Conseil d'Administration de la SRLF : Alain Mercat, Eric Maury, Fekri Abroug, Charles-
Edouard Luyt, Alexandre Demoule, Khaldoun Kuteifan, Olfa Hamzaoui, Pierre-
Marie Bertrand, Stéphane Dauger, Philippe Guiot, Christophe Guitton, Bruno Mégarbane,
Nicolas Terzi, Sabine Valera
L’incidence des états de mal épileptiques (EME), difficile à estimer, serait de l’ordre de 6 à
40 nouveaux patients pour 100 000 individus par an. L’EME tonico-clonique généralisé
(EMETCG) en est l’expression la plus connue et la plus spectaculaire. Les EME se
présentent aussi sous des aspects moins inquiétants (EME partiels moteurs, etc.), ou
trompeurs, sans manifestations cliniques convulsives (aphasiques, visuels, etc.). Ils peuvent
encore être méconnus (coma lié à un EME larvé après un EMETCG, aspect confusionnel
des EME non convulsifs, etc.) ou découverts fortuitement sur des tracés EEG effectués chez
des patients comateux. Les recommandations établies en 2008 avaient été élaborées dans
une double perspective scientifique et pragmatique avec le soutien d’autres sociétés
savantes et le concours de praticiens issus d’horizons très divers. Dix ans après, la Société
de réanimation de langue française et la Société française de médecine d’urgence ont
décidé d’élaborer de nouvelles recommandations avec l’ambition de répondre le plus
possible aux nombreuses questions pratiques que soulèvent les EME. Le praticien exerçant
en préhospitalier ou en hospitalier devra se fonder sur une analyse soigneuse des données
cliniques (et parfois EEG) visant à préciser la nature réellement épileptique des
manifestations cliniques, le type de l’EME et son étiologie. Il devra aussi lutter d’emblée
contre les facteurs d’agression cérébrale puis utiliser les différents médicaments
antiépileptiques selon des protocoles gradués, personnalisés, modulés selon le type d’EME,
son étiologie et en tenant compte de sa gravité potentielle.
Les recommandations avec le niveau de preuve le plus fort ne concernent que l’EMETCG :
l’usage des benzodiazépines en première ligne (clonazépam en intraveineux direct ou
midazolam en intramusculaire) est recommandé, répété cinq minutes après la première
injection (à l’exception du midazolam) en cas de persistance clinique. En cas de persistance
cinq minutes après cette seconde injection, il est proposé d’administrer la seconde ligne
thérapeutique : valproate de sodium, (fos-)phénytoïne, phénobarbital ou lévétiracétam. La
persistance avérée de convulsions 30 minutes après le début de l’administration du
traitement de deuxième ligne signe l’EMETCG réfractaire. Il est alors proposé de recourir à
un coma thérapeutique au moyen d’un agent anesthésique intraveineux de type midazolam
ou propofol. Des recommandations spécifiques à l’enfant et aux autres EME sont aussi
énoncées.
L’incidence des états de mal épileptiques (EME), difficile à estimer (diversité des
populations étudiées, définitions variables, type d’EME), serait de l’ordre de 6 à 40 nouveaux
patients pour 100 000 individus par an [1]. L’EME tonico-clonique généralisé (EMETCG) en
est l’expression la plus connue et la plus spectaculaire. Les EME se présentent aussi sous
des aspects moins inquiétants (EME partiels moteurs, etc.), ou peu évocateurs et donc
méconnus, par exemple s’ils ne sont pas accompagnés de manifestations cliniques
convulsives (aphasie, hallucinations visuelles, confusion etc.). Un EME peut encore être
découvert sur un EEG effectué au décours d’un EMETCG qui reste comateux, ou
fortuitement sur un tracé EEG effectué chez un patient présentant un coma non précédé de
manifestations convulsives.
Émaillant volontiers le cours d’une maladie épileptique connue, les EME peuvent aussi être
inauguraux, soit le plus souvent dans le cadre d’une atteinte structurelle ou fonctionnelle
cérébrale aiguë, soit en tant que première manifestation d’une maladie épileptique en
particulier consécutive à des séquelles de lésions anciennes (traumatiques, vasculaires,
etc.).
Le but de l’élaboration de recommandations est d’améliorer le pronostic des malades
atteints d’EME en intervenant sur les facteurs éventuellement maîtrisables qui le
déterminent. Il est très important de souligner d’emblée que le pronostic vital et fonctionnel
du patient (séquelles cognitives et épilepsie notamment) est avant tout déterminé par celui
de l’étiologie de l’EME. Celle-ci peut gêner le contrôle symptomatique de l’EME si elle n’est
pas rapidement et aisément accessible à un traitement et, par ailleurs, toute cause
structurelle aiguë a son génie évolutif propre. Identifier et traiter chaque fois que possible la
ou les causes d’un EME est donc urgent et primordial. On comprend donc que la part de ce
qui, dans le pronostic, est clairement attribuable à l’activité épileptique elle-même est bien
difficile à cerner. De nombreux autres facteurs, dont il est malaisé d’apprécier l’importance
relative, peuvent aussi influer sur le pronostic :
1) Présentation clinique de l’EME avec ou sans trouble de la vigilance ;
2) Durée : l’EME est d’autant plus difficile à contrôler au fur et à mesure que le temps
s’écoule ;
3) Caractère réfractaire ou non de l’EME ;
4) Age, comorbidités ;
5) Non-respect de la prise en charge à ce jour considérée comme optimale : précipitation,
non prise en considération de la graduation de l’introduction des antiépileptiques, de leurs
posologies et de leurs contre-indications, recours inadapté à un coma thérapeutique,
contrôle imprécis des divers facteurs d’agression cérébrale actuellement répertoriés,
Méthode
Ces recommandations sont le résultat du travail d’un groupe d’experts réunis par la SRLF
et la Société française de médecine d’urgence (SFMU) avec la collaboration du Groupe
francophone de réanimation et urgences pédiatriques (GFRUP). Dans un premier temps, le
comité d’organisation a défini, avec les coordonnateurs d’experts, les questions à traiter et a
Les différents aspects de la prise en charge des EME ont été analysés dans quatre
champs distincts : le diagnostic positif, le diagnostic étiologique, la conduite à tenir devant un
EME tonico-clonique généralisé (EMETCG) et la conduite à tenir devant les autres EME.
Après synthèse du travail des experts et application de la méthode GRADE,
R1.4 Les EME focaux (moteurs ou non) avec troubles de conscience sont définis de
façon opérationnelle par une crise qui se prolonge au-delà de 10 minutes ou par des
crises qui se répètent (≥ 2) à des intervalles brefs sans reprise de conscience
intercritique.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Les aspects cliniques de certains EME complexes partiels (EMECP) sont à noter :
EMECP temporaux où les patients apparaissent anxieux, irritables, suspicieux voire agressifs avec
des automatismes simples et les EMECP frontaux où les patients se présentent comme indifférents,
mutiques ou au contraire écholaliques souriants avec des automatismes complexes [10].
R1.5 Les EME focaux (moteurs ou non) sans altération de conscience peuvent être
définis comme une crise qui se prolonge au-delà de 10 à 15 minutes.
(Avis d’experts) Accord FORT
R1.6 Un EME absence se définit de façon opérationnelle par une crise qui se prolonge
au-delà de 10 à 15 minutes.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : L’état d’absence comporte une rupture de contact fluctuante au premier plan pouvant
s’accompagner de quelques myoclonies, d’automatismes ou de brefs épisodes de révulsion oculaire,
caractérisé sur l’EEG par des anomalies généralisées. Il s’agit souvent de patients avec épilepsie
généralisée idiopathique, en particulier épilepsie absence de l’adolescent et épilepsie myoclonique
juvénile. Il peut s’agir de patients présentant une encéphalopathie épileptique (Lennox-Gastaut). Ce
tableau est par contre exceptionnel dans l’épilepsie absence de l’enfant.
Un état d’absence peut aussi s’observer de novo chez des patients âgés non épileptiques, souvent
lors d’un sevrage en benzodiazépines. Cet épisode se termine volontiers par une crise convulsive
généralisée.
R1.8 L’EME réfractaire est défini par la persistance de l’EME clinique ou électrique
malgré deux lignes thérapeutiques différentes et bien conduites de médicaments
antiépileptiques recommandés (posologies optimales et délais d’action).
(Avis d’experts) Accord FORT
R1.9 Dans le cadre de l’EMETCG, la persistance isolée d’un coma ou de crises avec
reprise de conscience après deux lignes de traitement ne suffit pas au diagnostic
d’EME réfractaire.
(Avis d’experts) Accord FORT
R1.11 L’EMETCG super-réfractaire est défini par un EME persistant ou récidivant après
24 heures d’un coma thérapeutique bien conduit.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : L’EME super-réfractaire est défini classiquement par la résistance à trois lignes
différentes et bien conduites des médicaments antiépileptiques recommandés (posologies optimales et
délais d’action). Dans le cadre des EMETCG, il est établi que la troisième ligne de traitement est
l’anesthésie générale d’où la définition proposée par Shorvon et Ferlisi [13] d’EME super-réfractaire
comme la persistance ou la récurrence de l’EME dans les 24 heures ou plus après anesthésie
générale.
R1.12 L’EMETCG larvé, rare, est l’expression clinique très tardive d’un EMETCG non
ou insuffisamment traité. Son diagnostic repose sur l’EEG.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Le tableau réalisé est celui d’un coma persistant accompagné de manifestations
motrices discrètes qui s’atténuent pour disparaître au fil des heures : clonies des extrémités (pouces,
orteils), myoclonies palpébrales, ouverture des yeux sans reprise de conscience avec brefs épisodes
de révulsion oculaire. Filmer ces manifestations est très souhaitable.
R1.13 Un aspect EEG d’EME peut se rencontrer chez un patient dans le coma dans des
contextes cliniques divers dont l’analyse doit être rigoureuse car impliquant des
prises en charge parfois très différentes en particulier en ce qui concerne l’opportunité
et l’intensité du traitement.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : On peut individualiser les quatre circonstances suivantes : 1) Patient comateux sans
manifestations convulsives au décours d’un EMETCG correctement pris en charge, situation la plus
fréquente ; 2) Cadre rare et bien particulier de l’EMETCG larvé, 3) EEG demandé devant un coma
dont l’évolution est émaillée de symptômes principalement moteurs plus ou moins évocateurs de
crises (filmer) : une encéphalopathie métabolique ou toxique devra être éliminée 4) Enfin patient
comateux sans aucune manifestation évocatrice d’épilepsie chez lequel un EEG a été demandé : on
parlera alors, après avoir ici encore écarté toute encéphalopathie, d’aspect EEG d’EME associé à un
coma.
R2.1 La cause de l’EME doit être identifiée et si elle est curable, traitée le plus tôt
possible dans l’espoir de faciliter le contrôle de l’EME et le cas échéant d’améliorer le
pronostic du patient.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : En considérant tous les facteurs pronostiques connus, y compris l’adéquation du
traitement antiépileptique, il a été montré que l’étiologie rend compte de près de 80% de la mortalité
des patients atteints d’EME [14]. Les nombreuses étiologies (Tableau 2) pouvant induire un EME
exposent aux conséquences pronostiques qui leurs sont propres. Il a été par ailleurs montré que 45%
des EME nécessitent un traitement spécifique sur l’étiologie, en plus de l’arrêt des crises et du
traitement symptomatique général [15]. On comprend que tout retard à la mise en œuvre d’un éventuel
traitement est susceptible d’aggraver le pronostic. De plus une identification rapide et précise de la
cause de l’EME permet parfois de cibler le traitement antiépileptique. Au vu de tous ces éléments, Il
apparaît donc primordial d’identifier rapidement l’étiologie de l’EME. Il faut souligner que le bilan
nécessaire doit parfois être très approfondi, notamment dans les EME survenant chez les patients
n’ayant jamais souffert d’épilepsie ou EME « de novo » [16]. De plus, certains arguments suggèrent
que la persistance de l'EME est susceptible d'aggraver les lésions induites par sa cause [17].
R2.3 En cas d’EME survenant chez un patient souffrant d’épilepsie, et en dehors d’une
suspicion de pathologie cérébrale aiguë surajoutée, les étiologies principales à
évoquer systématiquement sont :
1. l’arrêt ou l’inadaptation du traitement de fond
2. un trouble métabolique aigu
3. une infection hors système nerveux central (SNC)
4. un sevrage ou une intoxication énolique ou par psychotropes
5. une intoxication aiguë par des médicaments ou substances épileptogènes
6. une évolution de l’éventuelle pathologie sous-jacente (Tableau 2)
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Chez un patient souffrant d’épilepsie, et en dehors d’une suspicion de pathologie
cérébrale aiguë évidente (accident vasculaire cérébral ou AVC, tumeur cérébrale, traumatisme
crânien, infection du SNC), il est tout d’abord indispensable de se renseigner auprès d’un proche sur la
compliance médicamenteuse, car la non-adhérence thérapeutique reste une des causes les plus
fréquente d’EME [1,15,18,19 (Tableau 2). L’arrêt ou le début d’autres médicaments ou la prise de
toxiques peuvent également faciliter des crises et déclencher un EME [20]. De même, les autres
facteurs pouvant précipiter des crises d’épilepsie dans le cadre d’une épilepsie connue devraient être
recherchés: privation de sommeil, stress intense, alcool, sevrage en benzodiazépine, fièvre, infection
hors du SNC, autres médicaments, prise de toxiques (involontaire ou volontaire), troubles
métaboliques aigus (hypoglycémie, hyponatrémie) [21,22]. Chez les patients suivis pour pathologie
cérébrale chronique (tumeur du SNC par exemple), une évolution de la pathologie sous-jacente doit
aussi être recherchée. Environ 5% des EME restent sans cause identifiée malgré un bilan approfondi.
R2.5 En cas d’EME inaugural ou de novo, avec ou sans atteinte cérébrale préexistante
connue, il faut éliminer une atteinte cérébrale structurelle aiguë évolutive curable
vasculaire, infectieuse, traumatique, tumorale, inflammatoire, sans omettre de
rechercher et traiter une cause métabolique, toxique ou médicamenteuse (Tableau 2).
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Environ la moitié des EME sont inauguraux ou de novo [25]. Dans ce cas, il convient
d’éliminer en urgence une pathologie cérébrale aiguë, à plus forte raison s’il existe d’autres arguments
tels la présence de signes neurologiques focaux, d’anomalies pupillaires ou d’un syndrome méningé
Les pathologies les plus fréquemment en cause sont (Tableau 2) les accidents vasculaires cérébraux
(accident ischémique ou hémorragique, hémorragie sous-arachnoïdienne, thrombophlébite cérébrale),
les traumatismes crâniens, les infections du SNC (méningites bactérienne, encéphalite, abcès
cérébraux) et les tumeurs cérébrales avec ou sans évolution récente (Tableau 2). En l’absence de
pathologie cérébrale structurelle après réalisation d’une imagerie cérébrale et d’une ponction lombaire,
les causes métaboliques, toxiques doivent être systématiquement évoquées.
Certaines étiologies requièrent un traitement spécifique. Au cours des infections du SNC, un EME est
noté dans 10-20% des cas à la phase aiguë : dans les encéphalites aiguës, la prévalence d’un EME à
la phase aiguë est estimée à 20% des cas, et semble particulièrement élevée au cours des
encéphalites virales et dysimmunitaires [26]. La présence d’un EME réfractaire est un facteur
pronostique indépendant de mortalité. Un EME est présent dans 15% des méningites bactériennes à
la phase aiguë [27], associé à une surmortalité hospitalière. La prévalence des EME au cours des
thromboses veineuses cérébrales est d’environ 10% [28]. Au cours du syndrome d’encéphalopathie
postérieure réversible (PRES), un EME est noté dans 5-15% des cas [29]. La prévalence des EME au
cours des traumatismes crâniens et des pathologies cérébrovasculaires ischémiques et
hémorragiques semble beaucoup plus rare, estimée à moins de 1%, mais est associée à une morbi-
mortalité significative. Toutefois, les traumatismes crâniens et les maladies cérébrovasculaires sont
très fréquents. Les EME secondaires à ces pathologies sont donc régulièrement rencontrées en
neuroréanimation [30–32]. Environ 5% des EME restent sans cause identifiée.
R2.6 Chez l’enfant, un EME inaugural peut être observé dans le cas de convulsions
fébriles se prolongeant suffisamment pour évoluer vers un EME.
(Avis d’experts) Accord FORT
R2.10 L’imagerie peut cependant être différée voire jugée non nécessaire si l’état
clinique est strictement revenu à l’état antérieur, si le diagnostic étiologique ne fait
aucun doute (ie. cause métabolique indiscutable et EME d’emblée généralisé), si la
cause déclenchante de l’EME est claire chez un patient souffrant d’épilepsie, si les
données de l’imagerie n’ont aucune incidence thérapeutique.
(Avis d'experts) Accord FORT
R2.11 En cas de forte présomption de méningo-encéphalite ou de méningite
infectieuse un traitement anti-infectieux probabiliste est immédiatement mis en route.
Une PL sera réalisée en urgence, après l’imagerie et en l’absence d’autre contre-
indication, chez tous les patients suspects d’infection du SNC ou immunodéprimés.
(Avis d'experts) Accord FORT
R2.14 Devant la diversité des étiologies des EME, dont un certain nombre doivent être
identifiées et traitées le plus tôt possible, le recours à l’utilisation d’un algorithme
diagnostique peut être préconisé.
(Avis d'experts) Accord FORT
Tableau 3 : Analyses à réaliser dans le sang et le liquide céphalo-rachidien (LCR) en cas d’état de mal
épileptique (EME) réfractaire sans étiologie identifiée après 48 heures de prise en charge chez
l’adulte (se veut le plus exhaustif possible. L’ensemble ne doit pas être systématiquement réalisé).
R3.1.1 Les crises tonico-cloniques généralisées en série n’entrent pas dans le cadre
des EME mais peuvent évoluer vers un EMETCG. La prise en charge de cette menace
d’EMETCG revêt le même degré d’urgence, recourant aux benzodiazépines et si besoin
à un ou plusieurs antiépileptiques de deuxième ligne.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.1.2 Un coma post EMETCG avéré sans manifestations motrices peut être consécutif
à la cause de l’EME, à l’expression d’un EME que l’on ne peut authentifier que sur
l’EEG, au caractère sédatif des médicaments administrés. Cette situation justifie un
EEG en urgence.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.1.8 L’EEG peut montrer des aspects qui peuvent faire porter à tort le diagnostic
d’EME chez un patient cérébrolésé qui se trouve dans un coma non précédé de
convulsions.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.2.1 Dès la phase préhospitalière de prise en charge d’un patient en EMETCG, il est
nécessaire de prévenir et de lutter contre les facteurs d’agression cérébrale :
hypotension artérielle, hypocapnie, hypoxémie, hypoglycémie, hyponatrémie,
hyperthermie, hypocalcémie, hyperoxie, hypercapnie franche, certaines hypertensions
artérielles (HTA comme par exemple dans le cadre d’un PRES), troubles du rythme et
de la conduction, hyperglycémie (Tableau 4).
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.2.2 Dans ce contexte, le soluté de base conseillé chez l’adulte est le sérum salé à
0,9% et chez l’enfant un soluté sucré isotonique avec adjonction d’ions.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.2.3 L’administration de 100 à 500 mg de thiamine s’impose au moindre doute de
carence en vitamine B1 (éthylisme, dénutrition, femme enceinte, etc.) en particulier si
une perfusion de sérum glucosé hypertonique est nécessaire pour la correction d’une
hypoglycémie.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Les répercussions systémiques de l’EME évoluent en deux temps. La phase
d’hyperadrénergie (HTA, tachycardie, arythmie, hyperventilation, hyperthermie, hyperglycémie) permet
de faire face à la demande métabolique cérébrale accrue. Ensuite, la phase d’hypotension voire de
défaillance hémodynamique, avec hypoxémie, est susceptible d’aggraver la souffrance neuronale [2].
Réanimation respiratoire :
Libération des voies aériennes et oxygénation, ± intubation et ventilation mécanique [77], monitorage
de la SpO2 et de l’EtCO2.
Réanimation hydro-électrolytique :
- Perfusion de sérum salé NaCl 0,9%, contrôle de la natrémie, de la calcémie, et du pH sanguin. En
cas d’hyponatrémie aiguë, la survenue de crises comitiales constitue l’une des seules indications de
correction en urgence [78]. Une hyponatrémie aiguë peut être secondaire à l’EME, par syndrome de
perte de sel [79] ou après un traitement par oxcarbazépine [80]. Penser au risque d’hyponatrémie
chronique lorsque le traitement habituel du patient comprend de la carbamazépine.
- Chez l’éthylique connu ou suspecté, l’injection de thiamine (vitamine B1, 100 mg en intraveineuse
(IV) lente) est recommandée.
- L’hypocalcémie est une cause rare d’EME, peut s’associer à une insuffisance cardiaque et doit être
recherchée surtout chez l’enfant et traitée en urgence [81].
- L’acidose est habituelle à la prise en charge d’un EME. Elle peut être respiratoire (augmentation de
la production de CO2 et baisse de la clairance pulmonaire) ou métabolique (acidose lactique par
déplétion des réserves de glycogène) [2]. Elle se corrige généralement avec l’arrêt des crises ou
l’intubation, sans que l’administration de bicarbonates soit nécessaire [2]. Si l’acidose persiste, limiter
les apports en sérum salé NaCl 0,9% (risque d’acidose hyperchlorémique) et rechercher un
syndrome de perfusion du propofol si utilisation, ou une intoxication au propylène glycol en cas
d’utilisation de barbiturique ou d’étomidate [2,82].
Glycémie :
Une hypoglycémie peut être la cause des crises, ou être secondaire à un EME vu tardivement
(effondrement de la réserve hépatique, hyperinsulinémie) [92]. Lorsqu’elle se prolonge, elle peut
-1
aggraver ou induire des lésions neuronales sévères et irréversibles. L’hypoglycémie (< 0,6 g.L ) est
une cause rare d’EME et la mesure de la glycémie ne doit pas retarder l’administration de
BZD [93,94]. L’hyperglycémie est fréquente dans les situations d’EME par libération de
catécholamines et entraînerait sur les modèles expérimentaux une aggravation de l’acidose
cérébrale et des lésions cérébrales consécutives à l’EME [95]. L’hyperglycémie pourrait être
associée à l’absence de contrôle de l’EME, avec un plus mauvais pronostic, chaque augmentation
-1
de 1 g.L de glycémie minorant les chances de contrôle de l’épilepsie de 1% [96] et majorant le
-1 -1
risque de mauvais pronostic de 1,2% [97]. Une glycémie initiale > 7 mmol.L (1,26 g.L ) pourrait
aggraver le pronostic [98]. Aussi, en l’absence d’étude recherchant un objectif glycémique spécifique
-1
à l’EME, un objectif de 1,4 à 1,8 g.L est recommandé par analogie aux situations d’agressions
cérébrales aiguës [82,99,100]. Tous les travaux évaluant l’intérêt d’un contrôle glycémique strict
montrent un risque accru d'hypoglycémies lié à l'insulinothérapie intensive [99,101].
Température :
Expérimentalement, l’hyperthermie aggrave les lésions neuronales secondaires à l’EME [102], voire
favorise le processus épileptogène [2,102,103]. L’hyperthermie est susceptible de majorer une HTIC,
pouvant être liée à la cause de l’EME, via une hypercapnie par hyperproduction de CO 2.
Inversement, l’hypothermie est proposée pour contrôler l’activité épileptique dans l’EME réfractaire
[104]. La détection et le traitement d’une hyperthermie font partie intégrante de la prise en charge de
l’EME [2,82], même s’il n’existe pas d’étude chez l’homme adulte démontrant l’intérêt d’un contrôle
ciblé de la température à visée neuroprotectrice. Sachant que les convulsions fébriles sont définies à
partir de 38°C [105], et par analogie au traumatisme crânien et aux AVC, on peut recommander un
objectif de contrôle de la température entre 36,5 et 38°C [106].
R3.2.4 L’intubation d’un patient en EMETCG n’est indiquée qu’en cas de détresse
respiratoire soutenue (au-delà des quelques minutes de respiration stertoreuse
postcritique) et en cas d’échec (persistance des convulsions) des traitements de
première et de deuxième ligne bien conduits. L’étiologie de l’EME peut imposer en elle-
même une intubation : traumatisme crânien grave, hémorragie sous arachnoïdienne,
HTIC sévère (Tableau 5).
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.2.5 Il ne semble pas justifié d’intuber un patient présentant un coma persistant
après l’arrêt des crises tant que la tolérance respiratoire est bonne et qu’il n’y a pas
d’argument pour une agression cérébrale aiguë (traumatisme crânien grave, etc.).
(Avis d’experts) Accord FORT
En dehors des situations de détresse respiratoire ou d’agression cérébrale aiguë, l’anesthésie avec
intubation est réservée à l’échec des traitements de première et de deuxième lignes (chapitre 3.3), au
coma persistant malgré l’arrêt des convulsions avec mauvaise tolérance respiratoire ou pour faciliter le
transport. Dans une série prospective multicentrique française, 85 % des patients présentant un EME
convulsif avaient été intubés [107], alors que dans un travail ancillaire de l’étude RAMPART [108],
seulement 21 % des patients étaient intubés (le caractère réfractaire de l’EME étant un facteur de
risque d’intubation).
En dehors des situations d’EME réfractaire et d’HTIC, l’interruption de la sédation est conseillée à
l’arrivée du patient en réanimation. Ceci facilite l’évaluation de l’état neurologique et de l’activité
épileptique. Lorsque la sédation et la ventilation restent nécessaires, l’objectif est de maintenir une
normoxie, (PaO2 de 80 à 95 mmHg, SpO2 de 95 à 99 %, Tableau 4). L’hyperoxie est sans doute à
éviter, comme dans les autres situations de déséquilibre énergétique cérébral [111]. L’objectif de
capnie est encore moins bien défini. En cas d’HTIC liée à une agression cérébrale autre que l’EME,
une normocapnie doit être maintenue (35 mmHg PaCO2 40 mmHg), par un mode ventilatoire en
volume contrôlé, avec monitorage continu de l’EtCO 2. En cas d’EME isolé, il est généralement
considéré qu’il n’y a pas d’HTIC. Expérimentalement l’hypercapnie pourrait avoir un rôle
anticonvulsivant [112] ; un certain degré d’hypercapnie pourrait donc être toléré. Dans tous les cas, la
ventilation en hypocapnie est contre-indiquée, y compris en présence d’œdème cérébral, car elle
entraîne une vasoconstriction cérébrale qui diminue le débit sanguin cérébral, alors que l’EME entraîne
un hypermétabolisme cérébral.
Tableau 5 : Indications et non d’indication de l’intubation trachéale lors d’un état de mal épileptique
tonico-clonique généralisé (EMETCG)
Indications d’intubation et de ventilation Quand ne pas recourir à l’intubation et à la
mécanique ventilation mécanique
Crise d’épilepsie TCG avec respiration
Insuffisance respiratoire aiguë
stertoreuse
Contexte d’agression cérébrale aiguë sévère *
Traitements antiépileptiques de première ou de
EMETCG réfractaire au traitement antiépileptique
deuxième ligne incomplets avec bonne tolérance
de deuxième ligne bien conduit
respiratoire
Altération de la vigilance malgré l’arrêt des
Altération profonde et prolongée de la vigilance
convulsions, avec mauvaise tolérance respiratoire
malgré l’arrêt des convulsions, avec bonne
Sécurisation du transport
tolérance respiratoire
* contexte de traumatisme crânien grave, hémorragie sous-arachnoidienne, AVC, et toute cause d’HTIC
ou de bas débit cérébral aigu.
Le midazolam est également intéressant par son faible délai d’action (< 1 min), et par la possibilité de
-1
l’administrer par voie intra-nasale ou buccale (0,3 - 0,5 mg.kg ), avec une efficacité au moins
équivalente à celle du diazépam IR ou IV [117]. Une méta-analyse, regroupant six études (774
patients) a conclu à la supériorité du midazolam sur le diazépam quant à la proportion et à la rapidité
de cessation des crises, quelle que soit la voie (IV ou IR) [118]. Enfin, l’étude RAMPART a montré de
façon randomisée en double aveugle une non infériorité du midazolam IM par rapport au lorazépam IV,
avec une utilisation aussi rapide en pratique [119]. Dans toutes ces études, les complications
respiratoires étaient aussi fréquentes avec les différentes BZD.
Enfin, deux études récentes montrent qu’il n’y a probablement pas de bénéfice à ajouter d’emblée une
deuxième molécule systématique pour contrôler l’EME. Une étude française randomisée en double
aveugle contre placebo a montré qu’il n’y a pas de bénéfice à ajouter du lévétiracétam au clonazépam
en préhospitalier [120] ; une étude indienne n’a pas non plus retrouvé de différence significative
lorsque l’on associait le lorazépam à la phénytoïne, au valproate ou au lévétiracétam [121].
Les BZD constituent la référence pour le traitement de première ligne de l’EME en IV, à défaut en IM,
IR ou intra-nasale). En l’absence de lorazépam en France, les BZD de première ligne à retenir sont le
clonazépam IV et le midazolam IV, IM ou IB. Il est également possible d’utiliser le diazépam en
-1
injection IV de deux à trois minutes (0,15 mg.kg soit 10 mg IV direct pour 70 kg en faisant attention
chez les patients âgés ou dont l’état respiratoire serait altéré).
Il est important de mentionner qu’il n’y aucune évidence soutenant une induction précoce d’un coma
médicamenteux à ce stade.
Une injection de BZD peut également être répétée, même si la première a été faite selon les
recommandations. Cette nouvelle injection peut se faire sans l’environnement de réanimation, et peut
être mise en œuvre précocement par rapport au début de l’état de mal. En l’absence d’équipe
médicale présente, les BZD peuvent être la seule solution thérapeutique. Il est alors indispensable
d‘avoir une solution thérapeutique à proposer en cas de persistance de l’EME, avant l’arrivée du
patient à l’hôpital, ou avant l’arrivée d’une équipe médicalisée sur site. Dans une étude nord-
américaine de prise en charge initiale préhospitalière d’EME convulsifs [113], une deuxième injection
de faibles doses de diazépam et de lorazépam a été faite chez 40 à 48 % des patients, en cas de
persistance de l’EME quatre minutes après la fin de la précédente injection ; les complications
respiratoires étaient plus importantes dans le groupe placebo.
Dans l’étude préhospitalière de Navarro et al. sur la place du lévétiracétam [120], le bras contrôle
comportait une injection de 1 mg de clonazépam associé à un placebo, éventuellement suivie d’une
seconde injection de clonazépam à la même dose, en cas de persistance de l’EME cinq minutes plus
tard. Dans ce bras, l’EME était contrôlé dans 57% des cas après injection d’une dose de clonazépam
et dans 84 % des cas après une deuxième dose. Même si cette étude n’a pas été élaborée pour tester
l’efficacité de plusieurs doses de clonazépam, elle suggère une efficacité dose-dépendante. La
-1
posologie du clonazépam recommandée en France est 0,015 mg.kg . Le seul risque potentiel d’une
réinjection d’une BZD est la dépression respiratoire. En l’absence d’une assistance respiratoire, une
réinjection de BZD devrait donc être très prudente chez un sujet âgé (> 80 ans), ou présentant des
signes de défaillance respiratoire après la première dose.
R3.3.9 Si l’EMETCG est contrôlé, le patient étant réveillé, et si la cause n’est pas
immédiatement réversible, un traitement antiépileptique de relais doit être débuté dès
que possible, initialement associé à une BZD (clonazépam, clobazam).
(Avis d’experts) Accord FORT
Concernant la médication, seulement une étude randomisée contrôlée a été conduite chez les adultes
présentant tout type d’EME réfractaire et a été interrompue au vu d’un recrutement insuffisant : sous
réserve du faible nombre de participants (n=23), le propofol n’était pas plus efficace que les
barbituriques, mais était corrélé à une longueur d’hospitalisation significativement plus courte.
L’adjonction de petites doses de BZD permettrait de réduire la dose de propofol et donc probablement
le risque d’un syndrome de perfusion du propofol (PRIS) [133]. La dose maximale de propofol est de 5
-1 -1
mg.kg .h pour une durée de moins de 48 heures et des contrôles pluriquotidiens du lactate et des
créatine kinases sont conseillés [134].
- Le midazolam seul à plus haut dosage est également fréquemment utilisé [130–132]. Le midazolam
R3.3.13 Lors d’un traitement par agents anesthésiques, il faut probablement chercher à
obtenir sur l’EEG une suppression des crises voire un tracé de « burst-suppression »
pendant au moins 24 heures, puis réduire progressivement les anesthésiques
généraux sur environ 6 heures sous contrôle EEG.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : La cible EEG, la durée du traitement et la vitesse de sevrage optimale sont
essentiellement inconnues.
En pratique, on recommande de viser une suppression des crises ou un « burst-suppression » à l’EEG
[131] pendant au moins 24 heures, suivis par une réduction progressive des anesthésiques généraux
sur six heures, toujours sous contrôle EEG [134].
Pour tenter d’écourter la durée de l’EME, il paraît raisonnable d’essayer d’autres traitements lorsque
deux tentatives d’arrêt de l’anesthésie générale ont échoué. Le thiopental, moins utilisé en première
intention pour les EME réfractaires en raison de ses effets secondaires, trouve là sa place [140]. Un
mode d’action différent des autres anesthésiques (antagoniste NMDA) et une tolérance correcte (à la
condition du maintien d’une sédation avec BZD bas-dosées) font de la kétamine une alternative de
plus en plus employée [141]. L’usage de l’isoflurane est limité par la nécessité d’un équipement adapté
à son mode d’administration en inhalation.
Dès le stade d’EME réfractaire un traitement antiépileptique de fond est à adjoindre, au mieux après
avis neurologique. Il est habituellement conseillé d’associer au moins deux molécules. Les
polythérapies excessives exposent à des interactions médicamenteuses. Les posologies peuvent être
guidées par des dosages plasmatiques. Parmi les antiépileptiques utilisés, certains (topiramate,
lacosamide) ont eu des résultats intéressants [142,143]. On peut mentionner l’intérêt d’un relais par
phénobarbital haut-dosé chez les patients sous thiopental pour éviter la survenue de crises
épileptiques à l’arrêt de l’anesthésie générale.
En dehors des antiépileptiques, les EME super-réfractaires ont fait l’objet de nombreuses autres
tentatives thérapeutiques : régime cétogène actif en quelques jours sans difficulté d’administration ni
complications majeures [144], hypothermie modérée (31-33°C) qui reste controversée en raison de ses
risques (surcroît d’infections, rechute de l’EME au réchauffement), électroconvulsivothérapie, chirurgie
de lésions cérébrales focales.
Les troubles de vigilance peuvent, outre la persistance de l’EME, être en rapport avec :
- les médicaments antiépileptiques et anesthésiques administrés
- un trouble métabolique
- une intoxication ou de nombreuses affections cérébrales aiguës causant l’EME (comme une
encéphalite herpétique)
- il faut toujours se méfier de manifestations psychogènes non épileptiques.
R3.3.20 L’attitude thérapeutique à tenir devant la découverte d’un tracé EEG d’EME
associé au coma n’est pas codifiée. On recourra au mieux à un contrôle EEG continu
et successivement aux traitements de première et seconde ligne. Le recours éventuel à
des agents anesthésiques devra s’appuyer sur les conseils de spécialistes. La
recherche de la cause associée à ce tracé d’EME est primordiale.
(Avis d’experts) Accord FORT
Dans l’EME généralisé non convulsif (EME absence), l’EEG devra être effectué au plus tôt pour
affirmer le diagnostic. En cas d’impossibilité de réalisation rapide, une injection de BZD peut être
effectuée avant l’obtention de l’EEG à la recherche d’une amélioration clinique.
R3.4.3 Chez un patient dans le coma et en EME, l’activité épileptique est définie par la
présence d’activités rythmiques, non réactives aux stimulations, avec souvent une
organisation spatio-temporelle, de façon continue ou se répétant sans retour à
l’activité de fond. Des critères précis récents (dits de Salzburg) peuvent aider à
qualifier ces tracés.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.4.4 L’EEG peut apporter des arguments en faveur de certaines causes d’EME
(encéphalite herpétique, encéphalite à anticorps anti-récepteurs NMDA) et reflète le
niveau de sédation.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.4.5 L’EEG avec enregistrement vidéo et EMG permet de confirmer le caractère
psychogène non épileptique des symptômes notamment s’il est normal en dehors des
manifestations motrices. Pendant celles-ci, les artéfacts rendent l’interprétation du
tracé délicate.
(Avis d’experts) Accord FORT
R3.4.6 La collaboration entre réanimateurs et neurophysiologistes doit être fortement
encouragée, au mieux 24 heures sur 24 heures, compte tenu de la difficulté
d’interprétation correcte de l’EEG en réanimation. Il faut notamment éviter de
diagnostiquer à tort comme EME des tracés EEG d’encéphalopathie.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : L’interprétation de l’EEG est souvent difficile dans le contexte d’une réanimation ou de
situation d’urgence et doit être rigoureuse. Des critères EEG très variés ont été utilisés, rarement
validés. Classiquement, l’activité épileptique est définie par la présence d’anomalies paroxystiques
épileptiques (pointes, pointes-ondes, polypointes, polypointes-ondes, ondes aigues), rythmiques, avec
une évolution spatio-temporelle, de façon continue ou se répétant sans retour au tracé de fond entre
ces figures. Récemment, les critères de Salzburg [148] ont été proposés puis validés [149,150] et sont
en passe d’une utilisation plus large. Nous reprenons ces critères, tout en rappelant, qu’un souci
d’uniformisation induit obligatoirement une absence d’adéquation à toutes les situations rencontrées et
que l’avis d’expert dans une situation particulière prévaut souvent :
Etant donné les difficultés d’interprétation de ces tracés et les nombreux aspects trompeurs, et dans le
but d’éviter des erreurs par excès, exposant à la mise en œuvre et/ou au maintien de traitements
potentiellement délétères, l’interprétation de l’EEG doit être idéalement effectuée par un
neurophysiologiste, sur place ou à distance (télémédecine). En l’absence de neurophysiologistes
disponibles, une formation solide des réanimateurs amenés à prendre en charge ces patients devrait
être assurée.
R3.4.10 L'index bispectral (BIS) ne doit pas être utilisé pour guider le traitement d’un
EME.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : L’index bispectral (BIS) ne permet pas de détecter ni de surveiller une activité
épileptique. Son seul intérêt est de quantifier le taux de suppression [156,157]. L’analyse de la densité
spectrale (DSA) peut-être une aide à la lecture de l’EEG continu pour la détection des crises non
convulsives [155].
R3.5.5 Le recours à des avis spécialisés (ou à défaut la relecture à distance des tracés
EEG) se justifie :
- En cas d’EMETCG super-réfractaire
- En cas de tracé EEG d’EME associé à un coma non précédé de manifestations
épileptiques.
Le transfert dans une autre réanimation équipée d’un monitoring EEG continu sera
discuté au cas par cas.
(Avis d’experts) Accord FORT
Argumentaire : Les états de mal super-réfractaires nécessitent une collaboration étroite entre
réanimateurs, épileptologues et électrophysiologistes pour l’interprétation des tracés EEG, le choix des
R3.5.6 Le transfert en neurologie est à privilégier dans tous les cas, au décours de la
prise en charge. Quand cela est impossible, le patient devra être transféré en
médecine. Une consultation neurologique de suivi sera systématiquement
programmée.
(Avis d’experts) Accord FORT
R4.3.6 Le recours aux agents anesthésiques qui impose une intubation et une
ventilation mécanique n’est envisagé que très rarement car les risques d’une telle
approche sont en règle supérieurs au bénéfice escompté.
(Avis d’experts) Accord FORT
R4.3.7 La très grande diversité des types d’EME impose de connaître certaines
spécificités de leur prise en charge :
1. dans les EME partiels moteurs, l’escalade thérapeutique doit être progressive :
des médicaments antiépileptiques peuvent être administrés par voie
intraveineuse, ou orale dès la 2ème ligne de traitement. En cas de généralisation
secondaire la prise en charge rejoint celle de l’EMETCG. «L’épilepsie partielle
continue» est une forme très particulière d’EME focal, qui ne se généralise pas
et est particulièrement pharmacorésistante ; les délais entre les lignes de
traitement peuvent donc être prolongés et le recours à une anesthésie générale
n’est pas indiqué. Il n’y a pas d’indication à un transfert en réanimation.
2. l’EME absence dans le cadre d’une épilepsie généralisée idiopathique, qui
s’accompagne souvent de quelques myoclonies, survient volontiers à l’arrêt du
traitement ou à la prescription d’un médicament antiépileptique inapproprié (par
exemple, carbamazépine, gabapentine, etc.). Il faut, après la prescription de
BZD, réintroduire le traitement de fond par voie orale, et, si l’EME perdure,
recourir selon les précautions sus-citées et, après avis chez l’enfant, au
valproate de sodium IV.
3. dans l’EME absence de novo, faisant suite à un sevrage brutal d’une BZD chez
un sujet âgé, la réintroduction d’une BZD est souvent suffisante.
4. dans les EME non convulsifs à expression confusionnelle, d’origine frontale ou
temporale, dont il faut tenter de contrôler la cause, il convient de proposer
comme traitement de 2ème ligne un traitement antiépileptique IV comme la
(fos)phénytoïne, le lacosamide ou le lévétiracétam, voire le phénobarbital. Si
une origine mitochondriale est suspectée, il faudra absolument éviter le
valproate de sodium.
5. dans les EME myocloniques sans troubles de conscience perceptibles qui
surviennent dans le cadre d’une épilepsie généralisée idiopathique les BZD sont
très efficaces.
6. dans les EME toniques (rencontrés dans les encéphalopathies type Lennox
Gastaut), la prescription de BZD doit être prudente car leur effet sédatif peut
induire une majoration des crises toniques. Il conviendra de rechercher
attentivement un foyer infectieux, souvent associé à ces EME.
(Avis d’experts) Accord FORT
R4.4.3 Le transfert en neurologie est à privilégier dans tous les cas. Quand cela est
impossible, le patient devra être transféré en médecine. La sortie à domicile ou dans
une autre structure, après avis neurologique, est fonction de la cause de l’épilepsie, de
son degré de contrôle, du terrain, de l’organisation de l’établissement, des éventuelles
affections associées. Une consultation neurologique de suivi sera systématiquement
programmée.
(Avis d’experts) Accord FORT
Hypotension
Chez l’enfant, le cumul d’antiépileptiques et en particulier des anesthésiques entraînent fréquemment
une hypotension artérielle particulièrement délétère. Il faut essayer de l’éviter en respectant les doses
et le timing d’administration des antiépileptiques.
- Surveillance de la glycémie capillaire toutes les 15 minutes pendant 1 heure, puis toutes les heures
pendant 4 heures, puis toutes les 4 heures pendant 24 heures
-1 -1
- Si persistance de l'hypoglycémie relais par perfusion de glucosé en débutant à 6 mg.kg .min sans
oublier de vérifier l’efficacité de la mesure par des dextros réguliers et d’augmenter les apports si les
glycémies restent basses.
Hypernatrémie :
Perfusion intraveineuse selon la valeur de natrémie :
-1
- 145 à 170 mmol.L : B26
-1 -1
- > 170 mmol.L : B26 + NaCl : 1 g.L (150 ml/h)
-1 -1
- Débit : 150 mL.kg .j
-1
- Solution de réhydratation orale autorisé en plus de la perfusion si natrémie < 155 mmol.L ,
réhydratation intraveineuse seule au-delà
-1
- Monitorage de la natrémie : - toutes les 4h si Na+ > 160 mmol.L ;
-1
- toutes les 6 heures si Na+ < 160 mmol.L
Hyponatrémie
-1 -1
B26 = G5% + 1,5 g.L KCl + 4 g.L NaCl
-1 -1 -1
- 125 à 130 mmol.L et non symptomatique : B26 150 mL.kg .j
-1
- < 125 mmol.L et symptomatique (convulsions, troubles de la conscience) :
remonter rapidement la natrémie de 5 à 7 mmol.L
-1
Hypocalcémie :
Une ampoule de 10 mL de Gluconate de calcium Ca 10% en intraveineux direct avec surveillance
continue puis relais par Gluconate de calcium 10% (10 mL = 1 g gluconate = 90 mg Ca = 2,2 mmol
-2 -1 -2 -1
Ca) : 1000 mg Ca .m .j soit 100 mL gluconate .m .j (dilués à 10% dans du glucosé 5%).