Mwanzo Droit Civil Pers 2018-1
Mwanzo Droit Civil Pers 2018-1
Mwanzo Droit Civil Pers 2018-1
// 1
8ème édition
2016-2017
Droit civil :
INTRODUCTION
Aujourd'hui en République démocratique du Congo, comme dans les autres pays
de tradition codificatrice, le droit civil n'est plus, comme en droit romain, tout le
droit applicable au pays. Il trouve sa place parmi les grandes catégories du droit.
Les manifestations du droit sont innombrables. Qu’il s’agisse, par exemple, de la
circulation routière, des rapports entre un vendeur et un acheteur, entre un
employeur et son salarié, du paiement des impôts, de la situation des gens
mariés, des relations entre les parents et leurs enfants, de l’organisation des
élections, de la répression du vol ou du meurtre, de la délimitation des fonctions
des députés et du président de la République, etc., il est toujours question de
droit.
En effet, le droit a pour objet de fixer des règles de conduite organisant la vie en
société. Aucun corps social ne peut subsister sans une certaine discipline de ses
membres. Le droit détermine ce que chacun peut et doit faire pour que la vie
sociale soit possible. Le droit régit la vie des hommes. Les règles de droit sont
destinées à régir les rapports humains. Aussi, le droit surgit dans tous les
rapports humains. Il n’est pas étranger aux rapports d’affection : le droit régit les
rapports entre époux, y compris pour des questions aussi intimes que la fidélité
ou l’assistance pendant la maladie mais aussi les rapports entre les parents et les
enfants, déterminant les règles de filiation, les rapports d’autorité, les devoirs
réciproques… Le droit régit naturellement les rapports économiques, les rapports
des individus avec l’Etat, les rapports des Etat entre eux. Partout, il y a du droit….
Parce que le droit est consubstantiel à l’existence d’une société. Dès qu’il y a une
société, il y a du droit.
En somme, à partir du moment où plusieurs personnes vivent ensemble, naît
aussitôt un besoin d'ordonner leurs conduites. Ces règles de conduites, éparses
et diverses, composent un ensemble : le Droit. Le droit est un phénomène vivant.
Les règles naissent, vivent, meurent, évoluent dans leur contenu, parce que la
société et les hommes qui la composent, évoluent. Parce que les rapports
humains sont complexes, le droit est complexe. Mais ce droit qui désigne
plusieurs phénomènes a plusieurs sens qu’il ne faut pas confondre. Ces sens ne
doivent pas être confondus mais mis en relation.
Dans cette partie introductive du cours, il sera d’abord question tour à tour de
cerner les différents sens du mot droit (I), de suivre ensuite l’évolution du droit
congolais de la famille (II) et enfin de situer le droit civil dans les branches du
droit privé (III).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 3
1
V. art. 6 du décret du 4 mai 1895 portant Code civil congolais, Recueil usuel de la législation, par A.
LYCOPS, et G. TOUCHARD, T. II, Bruxelles, M. Weissenbruch, Imprimeur du Roi, 1903, p. 387.
2 er
Rapport du Conseil colonial sur le projet de décret modifiant les dispositions du Code civil livre 1 sur
l’immatriculation des Congolais, B.O., p.1174.
3
A. SOHIER, ‘‘Le statut des Congolais évolués’’, in ZAIRE, vol. VI, 8 octobre 1950, p. 815.
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trouve le décret du 4 mai 1895 portant code civil livre 1 er4, pris par le roi léopold
II, alors que le congo était sa propriété privée. Ce décret sera complété plus tard
par des textes pris dans ce domaine après que le congo fut devenu une colonie
belge. en effet, avec l’annexion du congo en 1908, la charte coloniale avait, dans
le domaine de la famille et du mariage, conféré au gouverneur général le soin de
‘‘favoriser l’expansion de la liberté individuelle, de l’abandon progressif de la
polygamie et le développement de la propriété’’5.
Mais, il a fallu au Gouverneur Général quarante ans pour prendre des mesures
législatives ayant trait à la protection du mariage. La première mesure a été
l’ordonnance-loi n° 37-AIMO sur la ‘‘Prohibition des pratiques de polyandrie’’ du
31 janvier 1947. Par ce texte, le Gouverneur général s’attaqua à la polyandrie,
considérée comme la forme de mariage polygamique la moins compatible avec
l’ordre public colonial. Ainsi que le précisait l’exposé des motifs de cette
ordonnance : ‘‘Parmi les formes de la polygamie dont la Charte coloniale fait au
Gouverneur général un devoir de favoriser l’abandon progressif, la moins
compatible avec notre notion de l’ordre public et des bonnes mœurs, la plus
désastreuse aussi pour les populations qui s’y adonnent, est incontestablement
la polyandrie’’. Cette ordonnance avait mis en branle d’autres mesures
législatives favorisant le mariage monogamique : ce fut d’abord le décret du 25
juin 1948 sur la ‘‘Répression de l’adultère et de la bigamie en cas de mariage de
droit civil ou assimilé.’’ D’une manière positive, note KALAMBAY6 , ce décret
protégeait tout mariage monogamique qu’il soit de droit civil ou de droit
coutumier.
Dix jours plus tard, un autre décret s’ajouta aux autres mesures sur la protection
de la cellule familiale. Il s’agit du décret du 5 juillet 1948 sur ‘‘la Répression de
l’adultère et de la bigamie et la protection du mariage monogamique.’’ Ce décret
s’appliquait aux mariages monogamiques conclus entre les indigènes suivant leur
coutume ou leur religion. Il instituait la séparation de corps, institution inconnue
dans le mariage coutumier. Il introduisait aussi dans le mariage monogamique
coutumier de nouvelles conceptions telles que les droits et les devoirs respectifs
des époux, pour consolider la famille nucléaire en donnant à l’union de deux
personnes un cachet particulier inconnu alors par la coutume. Si le Congolais
était libre d’adhérer au mariage monogamique institué par le décret du 5 juillet
1948, ou de contracter encore, à cette date, un mariage polygamique, le décret
du 4 avril 1950 sur la polygamie rendit obligatoire le mariage monogamique. Ce
décret entra en vigueur le 1er août 1951, date de l’enterrement officiel de la
4
V. Recueil usuel de la législation de l’Etat Indépendant du Congo, par A. LYCOPS & G. TOUCHARD,
Bruxelles, éd. Weissenbruch, imprimeur du Roi, Bruxelles, 1903, pp. 387-405.
5
G. KALAMBAY, ‘‘La situation actuelle de droits civils congolais : droit civil et droit coutumier et perspectives
d’avenir’’, in Problèmes sociaux congolais, Bulletin trimestriel du CEPSI, n° 78, 1967, p. 105.
6
G. KALAMBAY, op. cit., p. 105.
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polygamie au Congo.
B. Depuis l’indépendance. Le Congo devenu indépendant, hérite, dans le
domaine du mariage et de la famille, d’un Code civil incomplet. En effet, ce Code
ne contenait pas des dispositions sur les successions, pas plus que sur les régimes
matrimoniaux. En outre, le domaine du mariage et de la famille était régi par des
textes éparpillés susévoqués qui rendaient par ce fait difficiles leurs connaissance
et assimilation par la population à laquelle ils étaient censés s’appliquer. Aussi, ‘‘
dans le but d’unifier et d’adapter les règles qui touchent aux droits de la
personne et de la famille à la mentalité congolaise’’7, les différentes mesures
législatives prises à l’époque coloniale et qui ont coexisté avec le Code civil livre
1er, seront-elles, avec ce dernier, abrogées8 par la loi n° 87-010 du 1er août 1987
portant Code de la famille, entrée en vigueur le 1er août 1988.
Cependant, avec le temps, cette loi de 1987 est devenue, dans certaines de ses
dispositions, inadaptée à l’évolution de la société. En effet, comme l’indique
l’exposé des motifs de la loi n° 16/008 du 15 juillet 2016, ‘‘la loi n° 87-010 du 1er
août 1987 portant Code de la famille a été, près de trente ans après sa
promulgation, un monument juridique ayant traité de toutes les questions
relatives aux droits de la personne, dans ses rapports avec la famille. Elle est le
produit de l’unification et de l’adaptation aux valeurs authentiques congolaises
des anciennes règles héritées de la colonisation.
La réforme alors opérée avait le mérite de concilier les éléments du droit moderne
et ceux du droit traditionnel pour mieux refléter les aspirations légitimes d’un
peuple en pleine mutation, notamment dans le domaine du droit de la famille, du
droit des successions et du droit des libéralités.
Plus de deux décennies après son application, le Code de la famille a
révélé cependant plusieurs faiblesses, notamment sur la question spécifique du
statut de la femme mariée et de l’enfant.
Sur la capacité juridique de la femme mariée, le code l’a limitée d’une manière
excessive et discriminatoire en soumettant tout acte juridique posé par elle à
l’autorisation maritale.
En ce qui concerne la situation juridique de l’enfant, le Code a fait, de manière
non objective, une distinction entre le garçon et la fille quant à leur âge nubile et
autorisé leur émancipation automatique par le mariage sans tenir compte de
leurs intérêts.
Il a paru nécessaire d’adapter le Code aux innovations apportées par la
Constitution du 18 février 2006 et à l’évolution de la législation nationale,
7 er
Exposé des motifs de la loi n° 87-010 du 1 août 1987 portant Code de la famille, p. 7.
8
Art. 919 CF.
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9
Loi n° 10/002 du 11 février 2010 autorisant l’adhésion de la République Démocratique du Congo au traité
ème
du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, JORDC, 51 année, 3 mars
2010.
10
Acte adopté le 15 décembre 2010 à Lomé (Togo) et publié dans le Journal Officiel Ohada n° 23 du 15
février 2011.
11 er
Acte adopté le 17 avril 1997 et paru au JO Ohada n° 2 du 1 octobre 1997.
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conventions collectives. La sécurité sociale, elle, est par contre, régie par le Droit
– loi organique du 29 juin 1961.
A l’origine le droit du travail et le droit de la sécurité sociale formaient une seule
branche du droit. Ils ont été séparés par la suite dans le but de garantir mieux les
salariés contre les risques sociaux.
1ÈRE PARTIE
LES PERSONNES
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12 ème
G. CORNU, Vocabulaire juridique, 7 éd. Revue et augmentée, PUF, 2005, p. 667.
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TITRE I
LA PERSONNALITE DES ETRES HUMAINS
CHAPITRE I
DE L’EXISTENCE DE LA PERSONNALITE DES ETRES
HUMAINS : ACQUISITION ET PERTE DE LA
PERSONNALITE
Depuis l’abolition de l’esclavagisme, tous les êtres humains sont dotés de la
personnalité juridique. Les seules questions qui se posent quant à la personnalité
des êtres humains sont dès lors celles d’une part, de la détermination précise des
dates extrêmes (début et fin) de la vie et d’autre part, des conséquences de
l’incertitude dans laquelle l’on peut se trouver quant à la survie d’une personne.
Tour à tour nous dirons un mot sur l’acquisition (section 1) et la perte de la
personnalité des êtres humains (section 2).
Section 1. Acquisition de la personnalité des êtres humains
La personnalité commence à la naissance (§1) mais la loi remonte parfois cette
personnalité dès la conception lorsqu’il y a lieu de protéger les droits civils de
l’enfant simplement conçu (§2).
§1. La naissance et viabilité
La personnalité civile débute à la naissance. En principe, tout homme acquiert la
personnalité juridique par le seul fait de sa naissance. La naissance est donc
juridiquement distinguée de la procréation, laquelle ne fait pas apparaître la
personne, au sens juridique du terme, en serait-ce que parce que l’embryon, le
fœtus, l’enfant à naître ne sont pas distingués du corps de la mère.
Mais le seul fait de la naissance ne suffit pas à conférer à l’enfant la qualité de
personne, du moins selon un enseignement traditionnel : la personnalité n’est
octroyée qu’à l’enfant né vivant et viable. La condition de viabilité s’ajoute à celle
de la naissance bien qu’elle concerne un état post-natal.13 Un enfant naît vivant
lorsqu'à sa naissance il respire complètement. La viabilité est la capacité
naturelle de vivre. Le pouvoir d'appréciation de ces qualités est laissé au
médecin.
La condition de viabilité prête toutefois le flanc à la critique14. En effet, définie
comme une ‘‘capacité physiologique à survivre’’15, la viabilité relève, comme
13
Le meurtre d’un enfant né vivant mais non viable est qualifié d’infanticide (Code pénal). Cela confirme la
dualité des notions de personnalité civile et pénale.
14
C. PHILIPPE, ‘‘La viabilité de l’enfant nouveau-né’’, D. 1996, chron., p. 31- 32.
15
Pour une définition : Dictionnaire de médecine (S. KERNBAUM éd.), Paris, Flammarion, 1998. N’est pas
viable, d’une part, l’enfant qui ne dispose pas de la maturité physiologique suffisante (critère quantitatif : un
organe indispensable à la vie fait défaut, des organes sont insuffisamment développés) et, d’autre part,
l’enfant qu’une cause physiologique empêche absolument d’exister (critère qualificatif : imperfection dans la
constitution physiologique rigoureusement incompatible avec la vie). Les médecins estiment certaine la non
viabilité pour un enfant hydrocéphale (présence d'une trop grande quantité de liquide céphalo-rachidien
dans le cerveau). Le pouvoir ainsi conféré à la médecine est redoutable.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 15
16
Les rédacteurs du Code napoléon avaient envisagé de déclarer viable tout enfant ayant survécu 10 jours à
sa naissance, ce qui était restrictif du point de vue de l’acquisition de la personnalité.
17
Le délai le plus court de grossesse (la présomption légale de durée minimale de gestation) prévu dans le
Code de la famille est de 180 jours (art. 594 al. 1 CF).
18
Après l’accouchement le médecin établit le certificat de naissance qui indique le nom de la femme qui a
accouché, éventuellement le nom du père de l’enfant, le lieu d’accouchement (nom de l’hôpital et sa
situation géographique), éventuellement l’heure à laquelle l’accouchement est intervenu, le sexe du
nouveau-né et son poids. Il ne faut pas confondre le certificat de naissance avec l’acte de naissance (art 118
CF) qui est établi par l’officier de l’état civil dans les 90 jours après l’accouchement (art. 16 de la loi n°
09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant) et avec l’attestation de naissance qui est établie
par le bourgmestre, dans lequel ce dernier atteste de la naissance de quelqu’un sur la base de documents
que ce dernier présente et dont la valeur juridique est contestable. Selon la déontologie des médecins, un
enfant simplement conçu de moins de un kilo, appelé, avorton, ne peut être déclaré. D’ailleurs le corps n’est
pas remis aux parents ; l’hôpital se charge de son inhumation. On ne déclare pas l’avorton. A partir d’un kilo,
on parle alors du fœtus. A l’enfant qui nait mort-vivant avec un kilo ou plus, le médecin établit un certificat
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que lorsqu’il est déclaré un enfant mort-né, la déclaration est inscrite à sa date
sur le registre des décès et non sur celui des naissances. Elle mentionne
seulement qu’il a été déclaré un enfant mort-né, sans qu’il en résulte aucun
préjudice sur la question de savoir si l’enfant a eu vie ou non. Sont en outre
énoncés, le sexe de l’enfant, les nom, âge, profession et domicile des père et
mère ainsi que les jour, mois, année et lieu de l’accouchement.
§2. La conception
A. Principe
Fiction infans conceptus. Selon cette fiction lorsque l’enfant est simplement
conçu, ’il est susceptible de recueillir des droits, on peut le considérer comme
ayant acquis la personnalité civile dès sa conception. Ainsi par exemple, un mari
qui décède pendant la grossesse de son épouse possède un héritier
(supplémentaire) de la première catégorie.
Cette fiction s’enracine dans le droit romain (infans conceptus pro nato habetur
quoties de commodies jus agitur19). Elle est consacrée dans l’article 211 du Code
de la famille.
L’ancienne formulation de cet article prévoyait que ‘‘Sauf les exceptions établies
par la loi, toute personne jouit des droits civils depuis sa conception, à condition
qu’elle naisse vivante’’.
Cet article a été modifié par la loi n° 16/008 du 15 juillet 2016. Cet article se
comme suit : ‘‘Sauf les exceptions établies par la loi, toute personne jouit des
droits civils depuis sa conception’’. Comme on peut le remarquer, le législateur a
supprimé, in fine, le bout de phrase ‘‘à condition qu’elle naisse vivante’’ parce
que toute personne jouit des droits civils dès sa conception ; c’est leur exercice
qui exige la naissance préalable. En outre, tel qu’il était libellé, l’ancien article
paraissait contradictoire tant dans la Constitution, qu’avec la loi portant
protection de l’enfant et le Code pénal qui répriment l’avortement20.
B. Autres applications de la fiction
La fiction infans conceptus s’induit également des articles 615 et 904 du Code de
la famille.
Les dispositions légales précitées illustrent l’intérêt pratique de la règle : l’article
615 du Code de la famille permet la reconnaissance (affiliation) prénatale de
l’enfant ; l’article 904 rend l’enfant conçu apte à recevoir une libéralité
(institution contractuelle). D’autres applications sont concevables, la fiction
de décès. Le corps de cet enfant mort-né de un kilo ou plus est remis aux parents (cf. interview réalisée
auprès du médecin Romain Lushima) qui sollicite alors un acte de décès auprès de l’officier de l’état civil.
19
Un enfant simplement conçu est réputé vivant chaque fois qu’il y va de son intérêt.
20 er
Rapport relatif à l’examen et à l’adoption du projet e loi modifiant et complétant la loi n° 87-010 du 1
août 1987 portant Code de la famille.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 17
21
Situées dans la matière de la filiation, mais de portée générale. On qualifie de présomptions les
conséquences que la loi ou le magistrat tirent d’un fait connu (par ex. la date de naissance) à un fait
inconnu (par exemple : la paternité) (art. 225 CCCL III).
22
Voy. B. PORTNOL, ‘‘A propos de la définition légale de la mort’’, Gaz. Parl., 1998, doctrn.,p. 300 ;B.
PORTNOL, ‘‘Quoi de neuf du coté des morts ?’’, Gaz. Parl., 1997, doctrn.,p. 892.
23
Voy. L.M. RAYMONDIS, ‘‘Problèmes juridiques d’une définition de la mort’’, Rev. trim. dr. civ., 1969, p. 29.
24
Voy. N. MASSAGER, ‘‘critère de l’absence de conscience’’, in Précis de droit de la famille, Bruxelles,
Bruylant, 2004, p. 169.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 18
volonté exprimée par la personne de son vivant26, elle peut encore produire
certains effets ultérieurs. C’est notamment le cas de certains droits de la
personnalité27. Ainsi le droit d’auteur survit pendant un certain temps, au profit
de ses héritiers, au décès de l’auteur, tandis que le droit moral de l’auteur est
imprescriptible. De même certains droits demeurent (ou naissent) comme le
droit au respect du corps de la personne humaine.
sa dépouille mortelle (toute personne a le droit, de son vivant, de prendre des dispositions relatives à ses
funérailles et à sa sépulture) d’autre part.
26
Le testament ne produit ses effets qu’au décès de son rédacteur, mais il véhicule une volonté exprimée
par une personne vivante.
27
La personne même est protégée par le droit, aussi bien au point de vue physique qu’au point de vue
moral. Il existe donc des droits qui portent sur soi-même ; ce sont les droits de la personnalité (à ne pas
confondre avec les droits personnels : les droits qui permettent à son titulaire d’exiger d’une personne
déterminée qu’elle fasse ou ne fasse pas quelque chose a pour objet une activité de cette personne ; un tel
droit est appelé droit personnel ou droit de créance. Le titulaire de ce droit est le créancier ; la personne
dont l’activité est l’objet du droit est le débiteur. Vu du côté du débiteur, le droit de créance est appelé dette
ou obligation. Les droits personnels dont des droits patrimoniaux). Leur détermination manque de précision
car on n’en prend conscience que lorsqu’ils sont violés. Ainsi, il a fallu que se multiplient les indiscrétions
des journaux pour que se dégage l’existence d’un droit de la personne sur son propre image, permettant
d’interdire qu’on reproduise sa photographie sans son consentement. Les droits de la personnalité sont
intransmissibles, mais les proches des défunts exercent des droits propres visant à protéger la personnalité
(honneur, image, vie privée) de leur disparu.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 20
CHAPITRE II
LES DROITS DE LA PERSONNALITE AU SENS PSYCHO-
JURIDIQUE
Ce chapitre comprend trois sections traitant d’abord de la notion et des
différentes sortes des droits de la personnalité (section 1), ensuite des caractères
des droits de la personnalité (section 2) et enfin des sanctions des atteintes aux
droits de la personnalité (section 3).
Section 1. Notion et différentes sortes des droits de la personnalité
§1. Notion.
On appelle droits de la personnalité, l’ensemble des droits reconnus par la
Constitution ou par la loi à toute personne, en ce qu’ils sont des attributs
inséparables de sa personnalité. Il s’agit donc d’un ensemble des droits inhérents
à la personne humaine qui appartiennent de droit à toute personne physique
(innés et inaliénables) pour la protection de ses intérêts primordiaux.
§2. Les différents droits de la personnalité
Les droits de la personnalité protègent les attributs constitutifs de l’individualité
de la personne contre les empiètements de tiers ou de l’autorité. Ce sont des
droits subjectifs accordés à toute personne, du seul fait de cette qualité en vue
d’assurer l’intégrité des composantes physiques, psychiques et morales de sa
personnalité : sa vie, son corps, sa vie privée, son image et sa réputation. Ils
occupent une place importante et croissante dans de multiples domaines à cause
des atteintes qui leur sont portées dans les médias (protection de la vie privée,
de l’image, de l’honneur), et grâce à la prise de conscience des progrès éthiques
et sociaux engendrés par l’amplification de l’autodétermination (droit à
l’intégrité physique, droit à la vie).
A. Le droit à la vie
Lorsque l’article 16 de la Constitution affirme que toute personne a droit à la vie,
il amène tout naturellement à s’interroger sur ce qui est une ‘‘personne’’ et sur
ce qui est la ‘‘la vie’’.
Certains auteurs ont cherché à donner à ce dernier une portée extrêmement
vaste28. D’autres ont, au contraire, souligné que le droit à la vie devrait être
entendu strictement29. Il s’agirait avant tout du ‘‘droit de n’être pas mort’’.
28
B.G. RAMCHARAN, The Right to Life in International Law, Nijhoff-Dorddrecht, p. 302; Voy. Aussi
‘‘Observation générale du Comité des droits de l’homme des Nations Unies en vertu de l’article 40,
paragraphe 4, du Pacte sur l’article 6 du même Pacte’’, Doc. ONU A/39/644 (1984) (Annexe).
29
Voir par exemple J. FAWCETT , The Application of the European Convention on Human Rights, Clarendon
Press, Oxford, 1987, p. 30 et 31; Y. DINSTEIN, ‘‘ The right to life, physical integrity and liberty’’, in L HENKIN,
The international Bill of Human Rights, 1980, p. 115
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 21
30
Paris 30 avril 1963, Sem. Jur. 1963. II. 13205 bis
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31
Voy. C.E.D.H., Odièvre c. France, arrêt du 13 févier 2003, CEDH 2003-II, p.1, D., 2003, I.R., p. 739.
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§2. Extrapatrimonialité
Les droits de la personnalité sont de nature extrapatrimoniale et indisponible, en
tant que tels, ils ne sont pas inclus dans le patrimoine de la personne 32 ni
évaluables en argent. Cela n’empêche pas que certaines prérogatives liées aux
droits de la personnalité, résultant de l’autonomie accrue de l’individu par
rapport à ceux-ci (exemple : image, potentialités physiques, etc.) puissent
représenter une valeur économique et faire l’objet d’une transaction ou d’une
renonciation33, moyennant certains aménagements au droit commun des
obligations34.
§3. Intransmissibilité
Lié à la personne, le droit de la personnalité ne peut être exercé par ou transmis
comme tel à une autre personne, pas même à ses ayants droit en cas de décès.
Néanmoins, une nécessité sociale exige de protéger certains attributs d’une
personnalité éteinte, tels l’image ou l’honneur du défunt. La jurisprudence
admet toutefois que les proches de la personne décédée puissent exercer en son
nom propre des prérogatives similaires aux droits éteints (exemple : droit des
proches à protéger la mémoire du défunt).
§4. Imprescriptibilité
Les droits de la personnalité sont imprescriptibles et ne se perdent pas par son
non usage. Mais à l’instar des actions d’état, leur mise en œuvre peut être
limitée dans le temps35.
Section 4. Sanctions des atteintes aux droits de la personnalité
Il est deux sortes de sanctions, pénales et civiles. Sur le plan pénal, de très
graves sanctions frappent les personnes coupables de meurtre ou de coups et
blessures. Même les atteintes involontaires, lorsqu’elles résultent d’imprudence,
de maladresse ou d’inobservation des règlements, sont frappées de peines
d’emprisonnement et d’amende.
En droit civil, la sanction est une condamnation à des dommages-intérêts
prononcée contre la personne qui par sa faute a causé une atteinte à l’intégrité
physique d’une autre personne. C’est l’application de l’article 258 du décret du
32
Cette thèse est controversée ; voyons notamment F. RIGAUX, La protection de la vie privée et des autres
biens de la personnalité, p. 732 et758. Aussi, H. & J. MAZEAUD qui affirment que les droits de la personnalité
constituent une partie de l’actif du patrimoine, mais qui ne répondent pas du passif : Leçons de droit civil, t.
1., Introduction à l’étude du droit. Droits. Preuves. Personnes. Famille. Incapacités, Editions Montchrestien,
p. 635
33
Voy. KAPETA NZOVU ILUNGA et Eddy MWANZO idin’ AMINYE, ‘‘La renonciation au droit à la vie ou la
problématique de l’euthanasie en droit comparé’’, Cahiers Africains des droits de l’homme et de la
ème
Démocratie, 15 année, n° 32, vol. I, juillet-septembre 2011, Unikin, Kinshasa, p. 31-70.
34
Exemple : révocabilité de l’accord d’exploitation de l’image
35
Exemple : la réglementation relative au droit de réponse.
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CHAPITRE III
LES INCERTITUDES QUANT A L’EXISTENCE DE LA
PERSONNE : DE L’ABSENCE ET DE LA DISPARITION
Le droit ne doit pas seulement s’occuper de la situation de ceux qui sont
matériellement ou physiquement présents ; il doit aussi s’intéresser aux cas des
personnes dont on est demeuré longtemps sans nouvelles, soit par suite de leur
absence, soit parce qu’il y a certitude sur leur mort. En effet, l’éloignement
prolongé d’une personne ne devrait pas trop longtemps laisser planer
l’incertitude car vivant dans les rapports de famille ou autres avec d’autres
membres de la communauté, ceux-ci pourraient être empêchés d’exercer des
droits dont la mise en œuvre dépendrait précisément, et selon le cas, de la
condition de vie ou de décès de telles personnes.
Le droit en tant que science qui régit les rapports des personnes vivant dans la
communauté donnée, doit, en cas d’absence (section 1) ou de disparition
(section 2), intervenir en tant qu’élément régulateur afin d’éviter de tenir
longtemps en suspens certains droits individuels ou collectifs36.
Section 1. De l’absence
§1. Notion
Le mot absence a, en droit, une signification différente du sens qu’on lui donne
vulgairement ; en effet, dans le langage courant, l’absence désigne l’individu qui
n’est pas présent dans le lieu, à un moment donné. Par contre, juridiquement,
l’absent est une personne dont l’existence est incertaine, parce qu’elle a quitté
son domicile ou sa résidence et n’a plus donné de nouvelles pendant un certain
temps.
En droit congolais, l’absence est la situation d’une personne disparue de son
domicile ou de sa résidence, sans donner de ses nouvelles et sans avoir constitué
un mandataire général (art. 173 al. 1 CF).Dans la définition qui est ainsi proposée
par le législateur, deux conditions doivent nécessairement être réunies pour qu’il
y ait absence au sens juridique :
disparition d’une personne de son domicile ou de sa résidence pendant un
certain laps de temps ;
absence de ses nouvelles pendant ce temps.
La situation doit être distinguée selon qu’une personne a disparu de son domicile
ou de sa résidence après avoir ou non désigné un mandataire. S’il n’a pas
constitué un mandataire, l’intéressé est présumé se trouver en vie pendant un
an à partir des dernières nouvelles.
S’il y a eu constitution d’un mandataire général, la présomption de vie lui est
36
Exposés généraux et commentaires analytiques des articles du Code de la famille, p. 61 (inédit).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 28
37
Est héritier présomptif, la personne qui, du vivant d’une autre, a vocation à la succession de celle-ci. Voy.
ème
G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 7 éd. Éd. Revue et augmentée avec locutions latines, juin 2005, p.
447.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 30
173 in fine CF). L’administrateur désigné, tout comme le mandataire choisi par
l’absent, ne gère pas les biens du présumé absent d’une façon discrétionnaire.
Les droits et devoirs de l’administrateur se limitent à l’administration des biens.
Le Code de la famille impose également à l’administrateur, lorsque le juge
l’estime nécessaire, des obligations dont il garantit la bonne exécution par une
caution ou des suretés au moment de son entrée en fonction (art. 182 CF).
Mais alors quel est le contenu des fonctions de l’administrateur ? En principe, le
tribunal qui l’a désigné détermine en même temps les pouvoirs de
l’administrateur. Selon le Code de la famille, il représente l’absent dans les
inventaires, comptes, partages et liquidations où celui-ci serait intéressé. Il ne
peut intenter une action, ni y défendre, sans autorisation de justice (art. 178 CF).
S’il y a nécessité ou avantage évident à aliéner ou à hypothéquer les immeubles
de l’absent, l’administrateur peut y procéder avec autorisation de justice (art.
181 CF).
Comme tout mandataire, l’administrateur doit gérer les biens du présumé absent
en bon père de famille et rendre compte de sa gestion. Ainsi, la loi oblige
l’administrateur de rendre compte chaque année au tribunal un compte
sommaire, le compte définitif étant fait à l’absent en cas de son réapparition (art.
182 CF in fine).
b. La cessation des fonctions de l’administrateur
Contrairement aux autres législations africaines38 , le Code de la famille
n’organise pas les règles de cessation des fonctions de l’administrateur des biens
de l’absent. Cependant, l’administrateur étant par définition un mandataire, ses
fonctions prennent fin conformément aux règles prévues aux articles 544 à 551
du décret du 30 juillet 1888 relatif aux contrats ou obligations conventionnelles.
Le mandat finit, en droit congolais, par la révocation du mandataire; par la
renonciation de celui-ci au mandat ou enfin par la mort ou la déconfiture, soit du
mandant, soit du mandataire.
L’administrateur étant désigné pour gérer le patrimoine du présumé absent
pendant un certain temps, il devient inutile dès lors que réapparait l’absent, et il
est normal que ses fonctions prennent fin à ce moment.
Lorsqu’après la période de présomption d’absence on n’a toujours aucune
nouvelle de l’absent, il est de plus en plus sûr qu’il soit mort. Le tribunal va
d’abord constater l’absence puis le décès. Ces deux situations mettent fin aux
fonctions de l’administrateur, spécialement quand les biens font l’objet de
l’envoi en possession provisoire ou définitive.
Dans tous les cas où l’administrateur cesse ses fonctions, il est tenu de produire
38
Notamment sénégalaise : art. 20, al. 2 du Code de la famille et togolaise : art. 24, al. 3.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 31
Le tribunal déclare l’absence dès lors qu’un certain temps s’est écoulé à compter
du jugement de présomption d’absence. La déclaration d’absence intervient en
principe lorsque la présomption de vie n’existe plus.
Selon l’article 173 alinéas 2 et 3 du Code de la famille, l’absent est réputé vivant
(présomption de vie) pendant un an à partir des dernières nouvelles positives
que l’on a eues de son existence. Cette présomption de vie est prorogée jusqu’à
trois ans s’il avait constitué un mandataire général. La présomption de vie prévue
dans ces deux hypothèses est toutefois détruite lorsqu’une personne a disparu
dans des circonstances telles que sa mort est certaine bien que son corps n’ait
pas été retrouvé (art. 174 CF).
La demande de déclaration d’absence est introduite par le ministère public ou
par toute personne intéressée (art. 184 CF). Il s’agit particulièrement des
personnes dont les droits sont subordonnés au décès de l’absent (les héritiers
présomptifs et légataires de l’absent auxquels les biens de l’absent sont envoyés
en possession provisoire – le conjoint de l’absent auquel la déclaration d’absence
permet de demander la dissolution provisoire du régime matrimonial : art. 190
al. 1 & 2) ; il s’agit aussi des personnes qui ont des obligations subordonnées à la
vie de l’absent.
Le tribunal saisi ne statue pas immédiatement sur la requête ; il s’informe sur le
sort de l’absent en ordonnant une enquête sur l’effectivité et la durée de
l’absence. C’est ce qui ressort des dispositions de l’article 184 CF qui dispose que
‘‘le tribunal, en statuant sur la requête en déclaration d’absence..., a égard aux
motifs de l’absence et aux causes qui ont pu empêcher d’avoir des nouvelles de
la personne présumée absente’’.
La requête en déclaration d’absence est publiée dans la presse locale et dans le
territoire et la commune du domicile et de la résidence si ceux-ci sont distincts
l’un de l’autre (art. 185 CF modifié). Remarquons qu’aucun délai n’est prévu en
vue d’assurer cette publicité, ni le mode selon lequel celle-ci sera réalisée. Il
appartiendra au juge d’indiquer comment rendre publics la requête et le
jugement d’absence. Il s’agit de mesures d’information tendant, pour ce qui est
de l’enquête, d’une part à provoquer des renseignements de quiconque aurait
des nouvelles sur l’intéressé (sa vie ou son décès) et d’autre part, à rendre le
jugement déclaratif d’absence opposable erga omnes.
Toutefois, le jugement déclaratif d’absence ne peut intervenir qu’après six mois
depuis la requête introductive (art. 186 CF). En réalité, ce délai pourrait être
allongé du fait qu’il est prévu que le juge peut ordonner une enquête. Il s’agit
donc là des délais (six mois) minima pour éviter que le juge ne prononce trop
hâtivement sa décision du fait que, par exemple, le jugement déclaratif
d’absence produit des effets importants sur la personne du conjoint survivant,
les enfants mineurs ainsi que par le sort des droits patrimoniaux de l’absent.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 33
Une fois prononcé, le jugement déclaratif d’absence est transcrit dans le mois
par les soins du ministère public, en marge des actes de l’état civil de la
commune, du secteur ou de la chefferie dans laquelle l’intéressé avait son
dernier domicile ou sa dernière résidence, ou à la commune pour la ville de
Kinshasa (art. 205 CF modifié).
Enfin, contrairement au mode de publicité prévoyant que pour l’enquête
introductive et le jugement ordonnant l’enquête, il appartenait au ministère de
déterminer les modes de publicité (art. 185 al 2 CF , par exemple, insertion dans
la presse locale un peu à l’instar des enquêtes en investiture, affichage devant les
édifices et lieux publics, églises, maisons communales, marchés…), le législateur
a estimé préférable de publier le jugement déclaratif d’absence au journal
officiel à l’initiative du ministère public (art. 186 CF).
B. Effets de la déclaration d’absence
Ces effets concernent tant le patrimoine de l’absent (1) que son conjoint (2).
1. Effets sur le patrimoine de l’absent
Selon l’article 187 du Code de la famille, ‘‘les héritiers présomptifs de l’absent, au
jour de son départ ou de ses dernières nouvelles, peuvent, en vertu du jugement
qui a déclaré l’absence, obtenir l’envoi en possession provisoire des biens qui lui
appartenaient au jour de son départ ou de ses dernières nouvelles à charge de
donner caution ou cautionnement éventuel pour la sûreté de leur
administration’’.
Le terme ‘‘éventuel’’ employé à l’article 187 CF précité signifie d’abord que le
juge dispose à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation ; ainsi il ne sera pas
absolument nécessaire d’exiger caution ou cautionnement s’il s’agit de petits
héritages.
De même, lorsque l’absence a été déclarée, le testament, s’il en existe un, est
ouvert et il est procédé à un partage provisoire des biens de l’absent auxquels
participent, à la charge de donner caution ou cautionnement préalable, les
donataires, les légataires et tous ceux qui ont sur les biens de l’absent des droits
subordonnés à la condition de son décès (art. 188 CF).
(Suite) L’envoi en possession provisoire est une décision judiciaire (ici du
tribunal de paix : article 189 modifié) autorisant une personne à se mettre de
façon provisoire en possession de certains biens ou d’une universalité. L’envoi en
possession provisoire ne confère donc pas de pouvoirs considérables sur le
patrimoine de l’absent : en effet, les héritiers, les légataires ou le conjoint qui
opte pour la continuation du régime matrimonial ne sont que des dépositaires
des biens envoyés en possession provisoire (art. 189 CF modifié) ; ils ont aussi le
droit de les administrer sans les aliéner ou en disposer. Ils doivent fournir une
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 34
sureté pour les choses susceptibles de restitution, et jouir de ces biens en bon
père de famille. A ce sujet, le législateur a estimé nécessaire d’ajouter à la
garantie réelle du cautionnement39, la garantie personnelle de la caution40. La
garantie réelle est en effet plus stable et partant plus sure que la garantie
personnelle. Toutefois, le tribunal pourra toujours ordonner qu’une caution sera
désignée au lieu d’un cautionnement et inversement.
L’article 202 du Code de la famille tend, pour sa part, à éviter de tenir trop
longtemps en suspens les droits et intérêts des personnes en cas d’absence de
leur auteur. Ainsi, s’il s’ouvre une succession à laquelle est appelée une personne
dont au moins la présomption d’absence a judiciairement été constatée, elle est
dévolue sans tenir compte de cette personne. La preuve du fait de l’absence ou
de la présomption de décès devra évidemment être établie. Les biens recueillis
doivent être éventuellement garantis par le dépôt d’une caution ou d’un
cautionnement.
Cependant, afin d’éviter une certaine main-morte sur les biens offerts en
garantie de l’administration du patrimoine de l’absent, ce même article prévoit
que les suretés précitées prennent fin après huit ans, quelle que soient.
Selon l’article 203 du Code de la famille, ‘‘tant que l’absent ne réapparaît pas ou
que les actions ne sont point exercées de son chef, ceux qui ont recueilli sa
succession gagnent les fruits par eux perçus de bonne foi’’. Cet article est à
prendre en considération avec ce que stipule l’article 195. Celui-ci dispose, en
effet, que si l’absent réapparait après le jugement déclaratif de décès, le soi-
disant héritier qui, par le fait dudit mariage, avait recueilli ses biens, doit les lui
restituer uniquement en capital. Il s’ensuit que ceux qui ont recueilli la
succession de l’intéressé qui réapparait, gardent les fruits perçus de bonne foi
(art. 203 CF).
2. Effets quant à la personne du conjoint de l’absent
Le conjoint de l’absent n’a pas besoin de l’accord de l’autre pendant la période
de l’absence lorsque celle-ci s’est prolongée pendant douze mois (art. 451-3 CF
modifié). De même, le conjoint de l’absent peut accomplir seul les actes pour
lesquels le concours de l’autre aurait été nécessaire et représenter l’absent dans
les pouvoirs qu’il tenait du mariage. Parfois l’autorisation du juge de paix est
nécessaire, notamment lorsqu’un conjoint de l’absent doit représenter celui-ci
dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial. A défaut
39
Le cautionnement désigne 1° : Le contrat par lequel la caution s’engage envers le créancier (sureté réelle).
2° Le dépôt, à titre de nantissement, d’argent ou de valeurs, destiné à servir de garantie pour des créances
éventuelles (exemple : loyer d’avance remis au bailleur pour garantir les sommes qui seraient dues en fin de
bail).
40
Personne qui s’engage envers le créancier, à titre de garantie, à remplir l’obligation du débiteur principal,
pour le cas où celui-ci n’y aurait pas lui-même satisfait à ses obligations. La caution est dite légale ou
judiciaire, lorsqu’elle est fournie en exécution d’une exigence de la loi ou d’une décision de justice.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 35
d’autorisation judiciaire, les actes faits par le conjoint de l’absent ont effet à son
égard, suivant les règles de gestion d’affaires (art. 498 CF). Par ailleurs, selon
l’article 197 CF, l’absent dont le conjoint a contracté une nouvelle union avant le
jugement déclaratif de décès41 est seul habilité à attaquer ce mariage.
On remarquera que le ministère public ne dispose pas ici d’un même pouvoir en
la matière nonobstant le fait que l’ordre public pourrait, en pareil cas, être
également intéressé. Les intérêts privés étant en effet plus prépondérants que le
souci de sauvegarder l’ordre public, il importe que les époux eux-mêmes se
prononcent sur l’opportunité de reprendre la vie commune ; car si le conjoint a
pu contracter un second mariage sans attendre la dissolution du précédent
(laquelle devrait précisément résulter du jugement déclaratif de décès de l’époux
absent), il y a lieu de croire qu’il s’est produit quelque chose d’anormal. Mais le
ministère public est mal venu d’intervenir en pareil cas et il appartient à l’époux
lésé de faire lui-même valoir ses droits s’il l’estime nécessaire. Ainsi, si par
exemple, il accepte de reprendre la vie commune, cette attitude vaudra pardon à
l’égard de l’époux coupable. En cas de refus, le second mariage considéré
comme putatif, pourra rétroactivement produire ses effets42.
Cet article soulève toutefois de questions de droit notamment celle de sa
compatibilité d’une part avec l’article 539 CF qui ne retient que le nouveau
mariage du conjoint de l’absent après jugement déclaratif de décès de l’absent
parmi les causes de dissolution du mariage et d’autre part avec l’article 354 CF
qui dispose que nul ne peut contracter un nouveau mariage avant la dissolution
ou l’annulation du précédent. En même temps l’article 197 soulève la question
de savoir s’il autorise l’officier de l’état civil à célébrer le mariage d’un conjoint
de l’absent avant le jugement déclaratif d’absence.
Sur le plan de la légistique formelle, il n’est pas normal d’affirmer une chose et
son contraire à la fois. Il sied de lege ferenda d’abroger cette disposition légale
(art. 197 CF) qui peut être à la base d’une insécurité juridique et sociale.
§4. La déclaration de décès : jugement déclaratif de décès (art. 191 à 196 CF)
Le Code de la famille prévoit expressément la phase de déclaration de décès.
Aussi en organise-t-il la procédure (A) et les effets (B).
A. Procédure de déclaration de décès de l’absent
41
En effet, selon l’article 552 du Code de la famille, l’absence qui s’est prolongée pendant deux ans ainsi que
la déclaration d’absence intervenue conformément à la loi constituent une présomption irréfragable de la
destruction irrémédiable de l’union conjugale. Un époux peut dès lors se fonder sur cette absence de plus
de deux ans ou la déclaration d’absence intervenue selon la loi, et solliciter le divorce, cela avant même que
la justice ne prononce le jugement déclaratif de décès.
42
Exposés généraux et commentaires analytiques des articles du Code de la famille, p. 70 (inédit).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 36
Le disparu est celui dont on a perdu la trace dans des circonstances telles que sa
mort est certaine, bien qu’on n’en ait pas la preuve, faute d’avoir retrouvé ou
identifié sa dépouille mortelle (exemple : passager d’un avion écrasé dont on ne
retrouve pas de restes corporels identifiables).45 En des termes simples, la
disparition, c'est une situation dans laquelle une personne a disparu dans des
circonstances telles que la mort est quasi-certaine. Il faut bien avoir à l'esprit
qu'ici il faut vraiment qu'il s'agisse d'un cas où la personne si elle survit cela tient
du miracle. Dans l'absence on faisait un “pari sur la vie”, dans la disparition on
fait un “pari sur la mort”.
La difficulté soulevée par la disparition résulte de l’organisation juridique de
l’état civil qui commande à l’officier de l’état civil de ne dresser des actes qu’à
propos de faits constatés et dans des délais de rigueur. Dès lors, si la preuve du
décès de la personne disparue est rapportée longtemps après celui-ci, la
possibilité d’adapter en ce sens les registres de l’état civil est de requérir un
jugement déclarant le décès.
§2. Evolution des textes en droit congolais
Le Code civil livre 1er n’ignorait pas la disparition. Il était fait allusion à cette
institution dans ca code aux articles 63,64, 68, 91 à 95.
A côté de ce code civil, il y a lieu de citer aussi les différentes circulaires
suivantes :
44
Y-H. LELEU, Droit des personnes et des familles, Larcier, 2005, p. 36.
45
Ibidem, p. 37. L’identification par l’ADN des restes corporels permet le constat du décès comme en
présence de la dépouille mortelle.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 38
46
Voy. supra, les actes de l’état civil.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 39
héritiers ou légataires ainsi que tous ceux qui ont cautionné les engagements,
s’ils ont contrevenu à leurs obligations ou s’ils ont commis une fraude.
Le jugement déclarant le décès est transcrit dans le mois par les soins du
ministère public, en marge des actes de l’état civil.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 41
CHAPITRE IV
LES MOYENS JURIDIQUES D’IDENTIFICATION OU
D’INDIVIDUALISATION DES PERSONNES PHYSIQUES
Nécessité de l’identification des personnes physiques.- La reconnaissance de la
personnalité juridique assure l’insertion de l’être humain dans la société globale,
sa connaissance et sa reconnaissance par celle-ci. Ce discernement est
nécessaire pour la société, disons, plus juridiquement, pour l’Etat, les
administrations, les collectives locales, qui ont besoin de connaitre les citoyens,
les électeurs, les contribuables, et toutes sortes des groupes dont le
dénombrement est nécessaire à la politique économique et sociale de la Nation.
Le problème de l’identification des personnes concerne en réalité celle de leur
individualisation dans la société.
Plan du chapitre.- L’identification des personnes physiques s’opère
principalement de quatre manières, auxquelles correspondent quatre sortes de
règles47 : tout d’abord, l’insertion de la personne physique dans la société globale
s’opère par sa nationalité (section 1). Le rattachement de la personne physique
s’opère aussi par sa désignation, c’est-à-dire par son nom lequel peut être
considéré, dans une certaine mesure, comme une institution de police civile
(section 2). On observera que la tenue des registres d’état civil, dans lesquels
sont inscrites, transcrites ou mentionnées les principales données constitutives
d’état d’une personne, présente de multiples utilités pour l’Etat comme pour les
personnes physiques, lesquelles sont appelées fréquemment à rapporter la
preuve de leur état civil (section 3). Un quatrième mode d’identification est
d’ordre spatial. Il a trait à la localisation de la personne, qui résulte en principe
de son domicile. La société globale n’est pas non plus indifférente à cette donnée
qui permet de situer les personnes physiques quant à leur vie professionnelle,
familiale, professionnelle, publique (section 4). Enfin, un cinquième mode
d’identification est né de l’évolution de la médecine. Il consiste à l’identification
de la personne par la reconnaissance des caractéristiques physiques, c’est-à-dire
par la biométrie (section 5).
Section 1. La nationalité : premier élément d’identification des personnes
physiques
Il sera question d’abord question de situer la matière de la nationalité dans
l’arsenal juridique congolais (§1), avant d’analyser ensuite, tour à tour, en cinq
paragraphes la notion du nom (§2), la question de l’attribution et de l’acquisition
de la nationalité congolaise (§3), de la perte de cette nationalité (§4) et enfin de
son recouvrement (§5).
47
François Terré, Introduction générale au droit, Précis Dalloz, 1991, p. 266.
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48 ème
J. DERRUPPE, Droit international privé, Mementos, Dalloz, 8 éd., 1988, p. 10.
49
Y. LOUSSOUARN & P. BOUREL, n° 218, p. 790.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 43
50
Art. 17 de la loi sur la nationalité
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 45
De façon générale, le nom est un concept par lequel une personne est désignée.
Juridiquement, le nom est une forme obligatoire de la désignation d’une
personne52. C’est donc une appellation qui sert à individualiser, à identifier une
personne dans la vie sociale, privée ou publique’’53. Le nom n’est pas qu’une
symbolique d’identification de la personne. Les Latins ne disent-ils pas que
‘‘Nomen est omnem’’ ? Le nom est tout à la fois, désignation, appartenance
sociale ou clanique, identification sociale ou civile mais surtout un déterminant
juridique dans les rapports d’identifié avec les autres membres de la société.
B. Nature juridique du nom
51
Dans ce sens, l’article 6 des dispositions transitoires sur le nom au Togo : ‘‘Toute personne conserve le
nom et les prénoms sous lesquels elle est actuellement connue’’ ; art. 58 à 72 de la loi n° 42/ portant titre
er
préliminaire et code civil livre 1 du Code civil rwandais (J.O. 1098, p.9).
52 ème
H. DE PAGE, Traité élémentaire du droit civil belge, 4 éd., Tome II, Bruylant, Bruxelles, 1990, p. 398 et s.
53
MULUMBA KATCHY, Le droit au nom en droit zaïrois et en droit comparé, PUZ, Kinshasa, 1979, p. 8.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 47
La nature juridique du nom est depuis une centaine d'années l'objet d'une
controverse. Plusieurs thèses se sont succédées :
1ère thèse : nom, simple droit de propriété. – On a d'abord vu dans le
droit qu'a une personne sur son nom un simple droit de propriété. ¨Par
conséquent, le titulaire du nom pourrait l’utiliser comme il l’entend,
pourrait le protéger contre toute usurpation, exactement comme s’il
s’agissait d’une chose.
Cette analyse n'est pas satisfaisante au regard de l'indisponibilité du nom
(il est immuable, il est imprescriptible, il est incessible).
2ème thèse : nom, une institution de police civile. – D'autres ont vu dans
le nom une institution de police civile assurant l'immatriculation des
personnes. L'analyse se ne concilie pas avec le rôle reconnu à la volonté
individuelle dans l'acquisition du nom.
3ème thèse : nom, un droit de la personnalité. – La doctrine, aujourd'hui,
tend à voir dans le droit au nom un droit de la personnalité. On rapporte,
par exemple, que le Professeur Léon Mazeaud, résistant et déporté à
Buchenwald, définit après 1945 cette thèse en constatant, à la vue du
tatouage portant son numéro de déporté sur son bras gauche, que, non,
vraiment, le nom ne pouvait pas être une simple institution de police
mais que, face à l’entreprise de déshumanisation dont il venait de faire la
terrible expérience, son nom était une partie de lui-même, une partie de
sa personnalité54.
Mais là encore l'analyse suscite quelques réserves : elle ne tient pas du
tout compte de l'intérêt que l'Etat prête au nom. En fait, on peut se
demander si la vérité ne réside pas dans la synthèse de ces opinions : le
nom serait un concept juridique protéiforme, c'est-à-dire qui prendrait les
aspects les plus divers selon l'éclairage qui lui est projeté.
§2. Les caractères du nom
Elément de l’état civil et droit de la personnalité, le nom emprunte à ces deux
institutions certaines caractéristiques :
Universalité et unicité : toute personne a un nom et un seul.
Indisponibilité : la modification du nom mentionné dans l’acte de
naissance est soustraite à l’autonomie de la volonté ; incessible et hors
commerce, le nom est transmis en vertu de la loi. Ces règles n’empêchent
pas la modification ou le changement du nom par décision judiciaire (art.
64 à 66 CF) ni une certaine contractualisation des droits sur le nom dans
les relations commerciales (art. 68CF in fine).
54
Voy. H. J. et L. Mazeaud, Visages dans la tourmente, 1939- 1945, Albin Michel, 1946.
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55
Les ethnologues et les historiens parlent de plus ou moins 250 tribus. CF. NDAYWEL è NZIEM,I. , Histoire
du Congo. De l’héritage ancien à l’âge contemporain, Duculot-Afrique, Editions Louvain-la-Neuve, Paris,
1997 ; NGALASSO MWATA, ‘‘L’Etat des langues et langues d’Etat au Zaïre’’, Politique Africaine, n° 23, 1986,
p. 28.
56
Journal Officiel du Zaïre, n° 5, 1973, p. 239,p. 329 et n° 22, 1975, p. 1405-1406.
57 er
Loi du 1 aout 1987, art. 57 à 71.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 49
58
Voy. BAYONA BA-MEYA, ‘‘L’authenticité et Droit’’, in Authenticité et Développement, Colloque, 14-21
septembre 1981, U.Z.Za, Kinshasa, Présence Africaine, 1981, p. 115 et suiv.
59
V. KANGULUMBA MBAMBI, ‘‘Quelques considérations théoriques et pratiques sur le nom des personnes
physiques en Afrique subsaharienne : le danger et le piège de l’uniformité’’, in Rév. de Dr. Afrc., num. 8/98,
p. 426 à 434.
60 er
Projet de loi modifiant et complétant la loi n° 87-010 du 1 aout 1987 portant code de la famille,
Kinshasa, Palais du peuple, octobre 2014, p. 5.
61
Commission socio-culturelle du Sénat, Rapport relatif à l’examen et à adoption du projet de loi modifiant
er
et complétant la loi n° 87-010 du 1 aout 1987 portant code de la famille, Kinshasa, Palais du peuple,
octobre 2014, p. 4.
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62
Art. 60 CF.
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arrêté63 qui précisait en son article 2 que ‘‘les éléments du nom comprennent le
nom, le post-nom et le prénom’’. Cet arrêté a été critiqué par la doctrine au motif
qu’il viole le principe de parallélisme de forme et de compétence, car jugé illégal
au motif qu’un arrêté ne peut modifier une loi.
Pour mettre définitivement fin à cette controverse, la réforme de 2016 a
introduit un nouvel alinéa entre les anciens articles 1 er et deuxième. Il s’agit du
nouvel alinéa deuxième. L’ancien alinéa deuxième devient ainsi alinéa 3. Le
nouvel alinéa 2 de l’article 56 est ainsi présenté ‘‘Le prénom, le nom et postnom
constituent les éléments du nom’’.
2. Les accessoires exceptionnels (non obligatoires) du nom
Ces accessoires n'existent pas toujours et sont donc facultatifs. Ce sont le
surnom, le sobriquet et le pseudonyme d'une part (a), ainsi que la particule
d'autre part (b).
a. Le surnom, le sobriquet et le pseudonyme
Le surnom est une appellation que l'entourage donne à une personne de
manière constante et publique. Il n'est pas choisi mais imposé par son milieu. Il
est parfois retenu comme élément d'identification de la personne dans les
pièces administratives, et notamment dans les documents de police (ex. :
Matondo, colonel bradock ; Jack l'éventreur ; Jo le Trembleur).
Le sobriquet est une forme particulière de surnom que l’on donne à quelqu’un
soit par déraison, soit autrement, et qui est fondé sur quelque particularité de
son corps ou de son esprit ou sur quelque singularité : sobriquet offensant,
injurieux, ridicule, plaisant… (exemple : Nzuzi le mauvais).64
Le pseudonyme est un nom volontairement choisi par une personne pour
exercer, sous un masque, une activité professionnelle, généralement littéraire ou
artistique. Normalement, le choix du pseudonyme est libre. L'intérêt public
interdit cependant l'exercice de certaines professions sous un pseudonyme (c'est
le cas de la médecine).
Par ailleurs, le pseudonyme ne doit pas présenter un caractère général. Il ne doit
pas servir à détourner une prohibition légale (non de sa mère ou nom d’un ex
conjoint) et ne peut être utilisée à l’occasion d’un acte administratif quelconque.
Notons enfin qu'à la différence du nom, le pseudonyme ne se transmet pas aux
héritiers de l'auteur ou de l'artiste. On est donc propriétaire de son pseudonyme.
b. La particule
63
Arrêté ministériel n° 221/CAB/MIN/J&DH du 16 juin 2011 portant détermination des éléments du nom.
64
Parfois pour indiquer le surnom ou sobriquet d’une personne on utilise l’adverbe latin ‘‘alias’’ pour
signifier "autrement dit", "autrement nommé".
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La particule, c'est le ‘‘d’’’ ‘‘de’’ ‘‘de la’’ ou le ‘‘du’’ qui précède le nom de famille
ou le nom donné à un individu. Elle signifie souvent ‘‘fils de’’ ; ‘‘fille de’’. Elle
varie selon les tribus et est généralement désigné par : mwan’ (Chez les Bayansi
de Bandundu), wa (Chez les Luba du Kasai), monga (chez les Budja de
l’Equateur)… Ex. : Mpaka mwan’Ta Pierre, Tshisekedi Wa Mulumba, Aseli monga
Mangala.
En réalité, la particule est souvent d'origine rurale et indique l'origine territoriale
ou familiale de la personne. Dans tous les cas, la particule est un élément du nom
et est transmise comme ce dernier.
C. Principe de l’immutabilité du nom
Le législateur congolais pose le principe de l’immutabilité du nom. Ce principe
signifie que le nom d’un individu ne peut varier de sa naissance à sa mort (art.
64-1 CF.). Il est impératif de respecter l’ordre et la fixité (1). Cependant, le
principe connait des dérogations (2). Il en est ainsi, par exemple, lorsque le nom
porte atteinte aux bonnes mœurs et à l’ordre public.
1. Enoncé du principe : Ordre et fixité du nom
Il est évident, pour des raisons d’ordre public, de sécurité et de police, que le
nom des personnes physiques ne puisse indéfiniment changer. Cela porterait
gravement atteinte à la sécurité publique et à l’ordre public. Du reste, la notion
d’identité n’évoque-t-elle pas en elle-même une certaine constance, une
certaine permanence, une certaine égalité ?65 L’article 56, alinéa 2 du Code de la
famille prévoit ainsi que ‘‘l’ordre de déclaration des éléments du nom et leur
orthographe sont immuables’’. En effet, le principe de l’immutabilité du nom
joue en faveur de la sureté de la personne telle qu’identifiée dans les actes de
l’état civil.
Cependant, il convient de noter que le principe de fixité du nom semble inconnu
du droit coutumier. Comment fixer le nom de quelqu’un, en fait sa personnalité
alors que sa vie continue à se dérouler restant bien entendu que certains noms
sont circonstanciels?66 Dans pareilles situations, les règles de droit coutumier
paraissent assez souples à la différence de la rigidité de droit écrit67.
En réalité, même en droit écrit d’origine occidentale, le nom n’est pas si
immuable que peuvent le laisser supposer les libellés de certains articles du Code
de la famille. En effet, pour certaines raisons, le nom d’une personne peut être
modifié. Mais il existe une procédure à suivre.
65
V. KANGULUMBA MBAMBI, op.cit., p. 436.
66
Voy. J. PAUWELS et W. PINTENS, La législation zaïroise relative au nom. Droit et authenticité africaine,
ARSOM, Bruxelles, 1983, p. 34.
67
C. DURAND, ‘‘Les noms des personnes au Tchad’’, Penant, 1974, 1974, p. 429 et suiv.
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68
Art. 67 al . 2 CF.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 54
Cet article 63 est repris parmi les articles modifiés par la loi n° 16/008. Cette
modification a essentiellement touché la forme et s’explique sur le plan de la
légistique formelle. En effet, dans son ancienne version, cet article était libellé
comme suit ‘‘L’adopté peut prendre le nom de l’adoptant.
L’adoptant peut également changer le nom de l’adopté, mais avec son accord si
ce dernier est âgé de quinze ans au moins. Cette modification se fera
conformément aux dispositions des articles 64 et 66’’.
Cet article a connu trois amendements qui consistent :
- en la suppression, à l’alinéa 2, de l’adverbe ‘‘mais’’ pour raison de
légistique ;
- au remplacement, au même alinéa, 3ème ligne, du temps futur ‘‘fera’’ par
75
V. KANGULUMBA MBAMBI, op. cit., p. 437.
76
Ibidem.
77
V. KANGULUMBA MBAMBI, op. cit., p. 437.
78
Tels les noms évoquant les circonstances des ébats amoureux qui ont produit la grossesse. Voy. ann. Parl.,
5 mai 1972, n° 34, p. 111.
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Cas où un parent transmet son nom à son enfant. Il s’agit ici du cas où un
parent – le père ou la mère- transmet les mêmes éléments de son nom à
son enfant. Pour éviter toute confusion, la loi l’oblige d’adjoindre un
élément au nom donné à l’enfant pour éviter toute confusion. C’est ce
que dit l’article 61 du Code de la famille qui dispose qu’en ce cas le parent
est tenu d’adjoindre au nom de l’enfant, au moins, un élément
complémentaire différent du sien.
Nom de la femme mariée. L'usage social, certaines convenances, veulent
que la femme mariée remplace son nom par celui de mari. En réalité,
l’épouse ne perd pas son nom originaire, elle dispose simplement, par le
mariage, de l'usage du nom du mari. L'unité du nom traduit l'unité du
foyer et une certaine forme de maintien des droits du pater familias. Le
fait de porter le nom de son mari est à la fois pour elle un droit personnel
qu’elle ne peut céder.
Aux termes de l’article 62 du Code de la famille, la femme mariée
conserve son nom. Toutefois, pendant la durée du mariage, elle acquiert
le droit à l’usage du nom de son mari. Dans ce cas elle adjoint le nom de
son mari au sien.
Cette disposition consacre l’usage universel et permet aux tiers de
connaitre la condition de femme mariée. Ce droit se prolonge pour la
veuve comme une faveur. Elle le perdra en cas de remariage puisqu’alors
elle acquerra le droit à l’usage du nom de son deuxième époux. En cas de
divorce, le dissentiment qui est à la base de la dissolution justifie la
suppression de ce droit à l’usage du nom.
3ème exception au principe d’immutabilité du nom : La radiation du nom
La radiation du nom consiste à l’effacement du nom inscrit dans les registres de
l’état civil par l’officier de l’état civil et à son remplacement par un autre. Le
tribunal compétent pour autoriser la radiation est le tribunal de paix ou le
tribunal pour enfants.
En effet, selon l’article 65 du code de la famille, le ministère public ou toute
personne qui justifie d’un intérêt peut demander au tribunal de paix ou du
tribunal pour enfants (modification introduite par la loi de 2016. Avant cette
date, cette question était de la seule compétence du tribunal de paix) du ressort
du demandeur d’ordonner la radiation en tout ou en partie du nom inscrit en
violation de l’article 58 du code de la famille et le remplacement de celui-ci.
Rappelons que cet article impose que le nom soit puisé dans le patrimoine
culturel congolais et d’autre part qu’il n’ait rien de contraire aux bonnes meurs ni
revêtir un caractère injurieux, humiliant ou provocateur.
D. Nom de l’étranger ayant acquis la nationalité congolaise
La loi n°04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise n’a pas
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repris le libellé de l’article 53 de la loi n° 81-002 du juin 1981 qui obligeait tout
Congolais qui acquiert la nationalité congolaise de porter le nom congolais ou, à
tout le moins, puisé dans le patrimoine culturel congolais. On peut toutefois
admettre que l’étranger qui acquiert la nationalité congolaise doit, comme
d’ailleurs tout congolais même d’origine, et ce en vertu de l’article 58, puiser son
nom dans le patrimoine culturel congolais.
F. Droits et obligations attachés au nom.
Nous examinerons d’abord les droits (1.) et ensuite les obligations (2.) attachés
au nom.
1. Les droits attachés au nom
Il semble largement admis aujourd’hui que le droit au nom est la prérogative
reconnue à son titulaire du nom d’en user légitimement et d’utiliser toutes les
voies de droit y compris l’action en justice pour obliger les tiers à le respecter et
à ne pas en user irrégulièrement (art 67 CF).
Trois prérogatives principales se dégagent du droit au nom ; le droit de porter le
nom, le droit d’en user et le droit de le protéger. Il faut au préalable noter que le
droit au nom est imprescriptible et incessible.
a. Le droit de porter le nom
Dans le système patronymique, le droit au nom du géniteur est reconnu à tous
ses enfants.
Dans le système de choix libre, le nom n’est pas strictement parlant une
propriété privée. Si on a le droit de le porter, on n’en a pas le droit de s’opposer
à ce qu’une autre personne le porte.
b. Le droit d’user du nom
Le titulaire du nom a un droit d’usage le plus étendu. Il a le droit d’en faire usage
non seulement dans les actes juridiques mais encore dans tous les actes de la vie
sociale, dans les relations mondaines ou professionnelles. Toutefois, dispose
l’alinéa 2 de l’article 67 du Code de la famille, l’usage de son nom dans l’exercice
de ses activités professionnelles ne doit pas avoir pour but et pour effet de
porter atteinte, à l’aide d’une confusion dommageable, au crédit et à la
réputation d’un tiers.
c. Le droit de protéger le nom
Diverses actions civiles et pénales peuvent être mises en œuvre pour assurer la
protection du nom. Les situations dans lesquelles la protection du nom est
demandée en justice restituent cette diversité. Deux hypothèses peuvent être
distinguées :
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 59
80
Ord. Législative n° 41/63 du 24/02/1950 sur la concurrence déloyale
81
KUMBU KI NGIMBI, Droits des sociétés, Notes de cours, Université Bell Campus, 2010, p. 12.
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veut bénéficier d’un parent défunt, la preuve légale utile pour prétendre à
l’héritage des biens, à la jouissance de l’assurance-vie contractée par le défunt, à
la garde des enfants mineurs.
C. Caractéristiques de l'état des personnes
Les règles déterminant l'état des personnes ont essentiellement un caractère
impératif à chacune de personne sans distinction en ce sens qu'elles s'imposent à
toutes les personnes et de la même manière. Il en résulte que l'état des
personnes est opposable à tous sans exception et impérativement attaché à la
personne. Cela entraine les conséquences ci-après :
L'état des personnes est indisponible. L’indisponibilité de l'état des
personnes signifie que la volonté de l'individu est généralement sans
effet sur les éléments de son état. Toute convention entre vifs ou pour
cause de mort, cession, transaction, renonciation contraire à l'état
légalement imposé, sera nulle et de nullité absolue. Pour ce faire,
personne ne peut vendre, transmettre par donation ou par testament,
louer ou même modifier de lui-même son état ou même un de ses
éléments. En effet, pour modifier son état, le législateur congolais a mis
en place une série de procédures légales de changement d'état.
L'état des personnes est imprescriptible. L'état ne peut ni s'acquérir ni se
perdre par l'écoulement du temps. C'est à ce titre que le concubinage
prolongé ne peut pas faire acquérir l'état civil de marié ou d'époux et
l'écoulement du temps ne fait pas perdre le droit d'user de son nom de
famille. Remarquons que l'imprescriptibilité ne vise ici que l'état au sens
strict, non les actions d'état, nécessairement assorties de délai de
prescription.
L'état civil est indivisible. Une personne ne peut avoir simultanément
deux états civils, et ne saurait se réclamer de certains attributs de son
état pour en répudier d'autres.
L'état civil est enfin insaisissable. Les créanciers d'un individu ne peuvent
saisir l'état de leur débiteur. Bien qu'il soit généralement constaté par les
actes écrits, l’état des personnes est hors commerce.
D. Les Bureaux de l'état civil
Le bureau de l'état civil est un endroit où est établi un service de l'état civil en
vue de l'établissement et la publicité des actes de l'état civil et ce, sous la
surveillance de la justice. Le code de la famille distingue trois sortes des bureaux
de l’état civil à savoir le bureau central, le bureau principal et les bureaux
secondaires de l’état civil :
Le bureau central des actes de l’état civil. Dans le souci d'unifier l'état civil
des personnes, le législateur a prévu, à l'article 87 du code de la famille, la
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création d'un bureau central des actes de l'état civil près le Ministère de
la justice auquel il assigne la mission de grouper toutes les copies des
actes de l'état civil pour faciliter la centralisation et la statistique
démographique (art. 87 al. 3 CF ; voy. aussi art. 5 de l’ordonnance n° 88-
089 relative à la tenue des registres des actes de l’état civil, JOZ, n° 14, 15
juillet 1988, p. 15).
Le bureau principal de l'état civil est celui créé soit au siège administratif
de la commune, du secteur ou de la chefferie (art. 73 CF modifié).
Les bureaux secondaires de l’état civil sont ceux créés, soit par le
gouverneur de province, soit par le gouverneur de la ville de Kinshasa,
selon le cas, sur proposition du bourgmestre de la commune, du chef du
secteur ou du chef de la chefferie suivant les nécessités locales (art. 75 CF
modifié).
§2. Les actes et registres de l’état civil
La notion des actes de l’état civil sera d’abord précisé (A) avant de dire un mot
sur le délai pour déclarer les actes de l’état civil (B), les actions d’état (C) et les
registres d’état civil (D).
A. Les actes d’état civil
Les actes de l’étai civil sont des actes authentiques destinés à fournir une preuve
certaine de l’état d’une personne en constatant les faits de nature à influencer
celui-ci82. Dressés par des fonctionnaires publics et inscrits dans les registres
publics, ils constituent-sauf exception légale- la preuve exclusive de l’état des
personnes.
L’état des personnes est l’ensemble des qualités, dotées d’effets juridiques,
déterminant la situation d’une personne sur trois plans : individuel, familial et
citoyen. Les qualités personnelles aidant notamment à identifier (nom, sexe,
domicile) ou à déterminer la capacité juridique de l’individu (âge, état mental) ;
les qualités relationnelles situent celui-ci dans son entourage (état d’époux, de
parent, d’allié) ; enfin, les qualités citoyennes déterminent ses droits et devoirs
envers la communauté (domicile, nationalité).
B. Délai pour déclarer les actes de l’état civil
Selon l’article 98 CF, les actes de l’état civil sont déclarés dans le trente jours du
fait ou de l’acte juridique qu’ils constatent. Il est ainsi du par exemple des actes
de décès.
Cet article a été modifié. Et ces modifications ont consisté :
82 ème
H. DE PAGE et J.P. MASSON, Traité élémentaire de droit civil belge, t.II, Les personnes, 4 éd., Bruxelles,
Bruylant, 1990, p. 258-259, n° 257.
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83
Art. 98 al. 2 CF.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 65
Toutes ces actions s’imposent à tous dans le sens que les jugements d'état ont
une autorité de la chose jugée non pas relative, comme en droit commun de la
procédure civile, mais absolue.
D. Les registres de l’état civil
On appelle registre de l’état civil, le registre tenu par l’officier de l’état civil et sur
lequel sont rédigés les actes de l’état civil.
1. Les principaux registres : registres de naissance, de mariage et de décès.
Toutes les naissances, tous les mariages, tous les décès sont inscrits sous forme
d’actes dans un registre de l’état civil distinct, qualifié registre de naissance, de
mariage, de décès84. Il existe donc trois principaux registres de l’état civil (de
naissance, de mariage et de décès). A côté, il existe d’autres types de registres à
savoir le registre supplétoire et certains régimes spéciaux.
2. Le registre supplétoire
Il s’agit du registre des autres faits et actes concernant l’état des personnes :
affiliation, adoption, tutelle...
3. Les registres spéciaux
En droit congolais, on peut classer dans cette catégorie le registre spécial des
naissances, le registre spécial des décès et le registre spécial des testaments.
Le registre spécial des naissances sont prévus à l’article 119 du code de la famille
qui prévoit la tenue dans les hôpitaux, maternités ou formations médicales
publics ou privés, des registres spéciaux sur lesquels sont immédiatement
inscrites, par ordre de date, les naissances qui y surviennent.
Le registre spécial des décès est prévu à l’article 136 du code de la famille qui
prévoit la tenue dans les hôpitaux, maternités et autres formations médicales
publics ou privés, un registre spécial sur lequel sont immédiatement inscrits, par
ordre de date, les décès qui y surviennent. La présentation dudit registre peut
être exigée à tout moment par l’officier de l’état civil du lieu où est situé
l’établissement ainsi que par les autorités administratives et judiciaires. Enfin, le
registre spécial des testaments qui est à l’article 767 al. 2 du code de la famille et
réglementé par l’ordonnance n° 88-090 du 7 juillet 198885. Il s’agit d’un registre
spécial tenu à chaque bureau de l’état civil et destiné à contenir les noms, le
domicile ou la résidence du testateur, ainsi que la date à laquelle un testament a
été établi.
En effet, selon l’article précité, si un testament authentique est établi devant
l’officier de l’état civil, celui-ci garde dans ses archives un des deux originaux et
84
Art. 82 CF.
85
J.O.Z., n° 14, 15 juillet 1988, p. 17.
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inscrit en outre dans un registre spécial des testaments, la date à laquelle celui-
ci a été établi ainsi que les noms et le domicile ou la résidence du de cujus. Ce
registre peut être consulté après le décès du testateur par toute personne qui le
demande et qui pourra prendre connaissance sur place de l’original.
§3. L’es fonctions d’officier de l’état civil
Il s’agit dans ce paragraphe de répondre à la question de savoir qui est officier de
l’état civil (A), qui exerce les fonctions d’officier de l’état civil en République
démocratique du Congo (B), comment prend fin la fonction d’officier de l’état
civil et dans quels cas un officier de l’état civil peut engager sa responsabilité tant
civile que pénale (D).
A. Qui est officier de l’état civil ?
Le code de la famille ne définit pas l’officier de l’état civil. Il se limite à dire à
l’article 76, modifié, du code de la famille que ‘‘sont compétents pour exercer les
fonctions (sic ! d’officier) de l’état civil…’’. Selon la doctrine, l’officier de l’état est
la ‘‘personne chargée par la loi pour tenir les registres officiels de l’état civil, d’y
dresser et signer les actes ainsi que d’en délivrer des copies et extraits’’86.
L’article 78 du code de la famille abonde dans ce sens lorsqu’il dispose que les
officiers de l’état civil sont seuls compétents pour recevoir les déclarations et
dresser les actes de l’état civil auxquels ils confèrent un caractère authentique. Il
s'agit ici d'une compétence territoriale et non personnelle limitée au seul ressort
administratif reconnu à chacun des officiers qui n'est rien d'autre que le
territoire, la commune, le secteur...
86
G. CORNU, op. cit., p. 621.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 68
87 ème
J.O., 49 année, 10 octobre 2008
88
Le droit international public admet que les agents diplomatiques et consulaires exercent des fonctions
d’officier d’état civil ; ils ne le font cependant que dans la mesure où les conventions et les lois locales le
permettent (Art. 5 de la Convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 69
2. le bourgmestre de la commune ;
3. le chef du secteur ou le chef de la chefferie ;
4. le chef de mission diplomatique ou consulaire.
Sous sa direction et sa responsabilité, l’officier de l’état civil peut déléguer ses
fonctions à un agent subalterne de son ressort.
Exerce également les fonctions d’officier de l’état civil, un agent de l’Etat, chargé
exclusivement de ses fonctions, nommé par le Gouverneur de province ou le
Gouverneur de la ville de Kinshasa conformément à l’article 77’’.
C. Fin des fonctions de l’officier de l’état civil
L’ancien article 80 du code de la famille disposait que les fonctions d’officier de
l’état civil cessent par le décès ou par le retrait de l’acte de nomination.
Le nouvel article 80 a élargi les causes de cessation des fonctions d’officier de
l’état civil. Il retient neuf causes de cessation plutôt que deux initialement
prévues dans l’ancienne version de cet article. Selon donc l’article 80 modifié
‘‘La fonction d’officier de l’état civil cesse par :
1. la retraite ;
2. le décès ;
3. la démission ;
4. la révocation ;
5. la déchéance ;
6. la nomination à une fonction incompatible ;
7. la fin du mandat ;
8. l’incapacité permanente ou mentale dûment constatée par un médecin ;
9. la condamnation à une peine irrévocable’’.
D. Responsabilité civile et pénale de l’officier de l’état civil
Dans l’accomplissement de ses fonctions, l’officier de l’état civil peut engager sa
responsabilité pénale ou civile (2).
1. La responsabilité pénale
Les officiers de l’état civil sont punis des peines prévues à l’article 150 F du Code
89
Le droit international public admet que les agents diplomatiques et consulaires exercent des fonctions
d’officier d’état civil ; ils ne le font cependant que dans la mesure où les conventions et les lois locales le
permettent (Art. 5 de la Convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires).
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actes normalement constitués (A) et les actes constitués par voie exceptionnelle
(B).
A. Les actes normalement constitués
Le législateur a énuméré les différents actes et faits juridiques qui doivent être
déclarés à l’officier d’état civil. Il y a d’une part l’obligation de déclarer les actes
principaux de l’état civil à savoir la naissance, le décès et le mariage (1) et d’autre
part celle de déclarer les autres faits et actes concernant l’état des personnes
(2.).
1. S’agissant des actes principaux de l’état civil
Les actes principaux de l’état civil, nous l’avions dit, sont la naissance, le décès et
le mariage. Ils sont inscrits sous forme d’actes dans un registre de l’état civil
distinct, qualifié registre de naissance, de mariage, de décès (art. 82 CF).
a. Déclaration des naissances
a.1. Principe
Toute naissance survenue sur le territoire de la République démocratique du
Congo doit être déclarée à l’officier de l’état civil. Cette obligation concerne aussi
bien les Congolais que les étrangers qui séjournent sur le territoire de la
République, en situation régulière ou irrégulière.
L’enregistrement des naissances consiste à faire enregistrer par les autorités
administratives la naissance des enfants. Il s’agit d’une preuve permanente et
officielle de l’existence d’un enfant, condition essentielle à la réalisation de ses
droits et besoins pratiques.
L’article 116 du Code de la famille qui disposait que: ‘‘Toute naissance survenue
sur le territoire de la République doit être déclarée à l’officier de l’état civil de la
résidence du père ou de la mère dans les 30 jours qui suivent la naissance’’, a été
déjà abrogé par l’article 16 de la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l’enfant. Depuis le 10 janvier 2009 la déclaration de naissance
survenue sur le territoire de la République démocratique du Congo doit avoir lieu
dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la naissance de l’enfant. Cette
déclaration est faite à l’officier de l’état civil de la résidence du père ou de la
mère par le père ou la mère de l’enfant, à défaut, par les ascendants et les
proches parents de l’enfant ou par les personnes présentes à l’accouchement.
est tenu d’envoyer pour transcription sur les registres de naissance deux
copies des actes de naissance dressés à bord: l’une au bureau de
l’inscription maritime, fluviale ou lacustre; l’autre à l’officier de l’état civil
de la dernière résidence du père de l’enfant ou de la mère. Si la dernière
résidence ne peut être trouvée ou si elle est hors de la République, la
transcription est faite au bureau de l’état civil le plus proche du lieu de
naissance qui le transmet au bureau central de l’état civil (et non plus à la
commune de la Gombe comme avant la modification de 2016).
En cas de naissance à bord d’un aéronef battant pavillon congolais,
l’officier instrumentaire est tenu d’envoyer pour transcription sur les
registres de naissance, deux copies des actes de naissance dressés à bord,
l’une à l’officier de l’état civil de la commune, du secteur ou de la
chefferie de l’aéroport d’arrivée (et non plus uniquement à la commune
de la Gombe comme avant la modification de 2016) et l’autre à l’officier
de l’état civil de la dernière résidence du père ou de la mère (et non plus
principalement à l’officier de l’état civil de la dernière résidence du père,
et à défaut de celle-ci, de la mère comme sous l’ancien article 125 CF).
L’enfant né hors mariage. La déclaration d’affiliation c’est-à-dire la
reconnaissance de paternité hors mariage ou la déclaration de maternité
d’un enfant né hors mariage a lieu devant l’officier de l’état civil ; elle est
inscrite dans l’acte de naissance de l’enfant ou dans un acte séparé92.
L’énonciation du nom de la mère dans l’acte de naissance d’un enfant né
hors mariage vaut acte de maternité. Lorsque le père fait, soit par lui-
même, soit par mandataire ayant procuration authentique, la déclaration
de naissance d’un enfant né hors mariage, cette déclaration vaut acte
d’affiliation bilatérale, et pour le père et pour la mère93. Par ailleurs,
lorsque la déclaration d’affiliation ou de maternité a été faite séparément
de la déclaration de naissance, soit par le père seul, soit par la mère, soit
par les deux, elle est inscrite en marge de l’acte de naissance de
l’enfant94.
a.3. Sanction en cas de non déclaration de naissance
L’ancien article 114 punissait de sept jours de servitude pénale et d’une amende
ou de l’une de ces peines seulement, les personnes qui, obligées de faire des
déclarations de naissance ne le feraient pas dans le délai légal.
La loi de 2016 a modifié cet article, d’abord en supprimant la peine de servitude
pénale jugée désuète en la matière, ensuite en actualisant le montant de la
peine d’amende et enfin, sur le plan formel, en remplaçant le futur du verbe
92
Art. 126 CF.
93
Art. 127 CF.
94
Art. 128 CF.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 75
terrain (art. 144 et 145 CF). Dans cette hypothèse, les décès survenus
feront l’objet d’un jugement collectif. Les tribunaux compétents sont
ceux de grande instance dans le ressort desquels l’événement s’est
produit.
Toutefois, dans le cas de disparition d’un navire, d’un bateau ou d’un
aéronef battant pavillon congolais, les tribunaux compétents sont ceux du
port d’attache du navire ou du bateau et le tribunal de grande instance de
la Gombe à Kinshasa pour l’aéronef. Les extraits individuels du jugement
collectif peuvent être obtenus par les intéressés. Ils tiennent lieu d’acte
de décès.
Cas d’un mort-né (art. 123 CF). Lorsqu’il est déclaré mort-né, la
déclaration est inscrite à sa date sur le registre des décès et non sur le
registre des naissances. Ceci est d’une grande importance car l’inscription
par erreur de la déclaration d’un enfant mort-né au registre des
naissances peut être source des problèmes s’agissant de la jouissance de
certains droits civils, notamment les droits à la succession éventuelle95.
Outre la mention ‘‘enfant mort-né’’, doivent être énoncés dans le registre
de décès, le sexe de l’enfant, les nom, âge, profession, nationalité
(innovation introduite par la réforme de 2016) et domicile des pères et
mère ainsi que les jour, mois, an et lieu de l’accouchement. L’article 124
CF oblige les formations médicales de respecter les mêmes énonciations
dans les registres qu’elles tiennent. En effet, les hôpitaux, maternités et
autres formations médicales publics ou privés, tiennent un registre
spécial sur lequel sont immédiatement inscrits par ordre de date, les
décès qui y surviennent96.
b.3. Sanction en cas de non déclaration de décès
L’article 114 CF nouveau punit d’une amende de 10.000 à 50.000 francs
congolais les personnes qui, obligées de faire des déclarations de naissance ou
de décès, ne l’auront pas fait dans le délai légal et celles qui, convoquées par
l’officier de l’état civil pour faire une déclaration de décès, refusent de
comparaître ou de témoigner.
c. Déclaration du mariage
c.1. Principe
La validité du mariage est soumise à sa célébration devant un officier d’état civil
ou à sa constatation par celui-ci. C’est à ce dernier que revient la charge de
constater la volonté des futurs époux de contracter mariage et pour ce faire,
95
Voyons ce que dit l’art. 211 CF.
96
Art. 136 CF. Ces institutions tiennent aussi des registres spéciaux des naissances qui y surviennent (art.
119 CF).
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ceux-ci doivent faire devant lui une déclaration de leur volonté de se prendre
mutuellement pour conjoint.
Elle doit être concomitante de la célébration du mariage ou postérieure à celui-ci
lorsque le mariage a été préalablement célébré en famille.
Lorsqu’il est célébré en famille, le délai pour le déclaré a été porté de un mois à
trois mois. C’est ce qui ressort de l’article 370 CF modifié (réforme de 2016) qui
dispose : ‘‘Dans les trois mois qui suivent la célébration du mariage en famille, les
époux et, éventuellement, leurs mandataires se présentent devant l’officier de
l’état civil du lieu de la célébration en vue de faire constater le mariage et
d’assurer sa publicité et son enregistrement. Chacun des époux est accompagné
d’un témoin’’.
c.2. Sanction en cas de non déclaration de mariage célébré en famille
L’exigence de la déclaration est une obligation qu’il s’agisse de la naissance ou
qu’il s’agisse du décès ou du mariage. Son inexécution est rarement assortie de
sanction. Mais en dépit de l’inexistence de sanctions du défaut de déclaration
dans les délais impartis, la formalité de déclaration des différents faits et actes
juridiques qui font l’objet d’actes d’état civil est importante. Elle est une
formalité préliminaire, car elle prépare et permet la rédaction de ces actes en
même temps qu’elle les facilite.
L’article 432 modifié (réforme de 2016) punit de peine d’amende de 60.000 à
205.000 francs congolais les époux qui n’ont pas fait enregistrer leur mariage
célébré en famille dans le délai légal.
2. S’agissant des autres faits et actes concernant l’état des personnes
Le législateur impose à l’officier de l’état civil d’inscrire dans leurs registres
certains faits et actes intéressant l’état civil des personnes. Il s’agit notamment
des actes de notoriété des actes de l’état civil intervenus avant l’entrée en
vigueur du code de la famille (art. 154 CF), de l’adoption, de la tutelle ou de la
paternité juridique
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 79
de 2016)101 du lieu où l’acte a été établi, qui le rend ainsi assimilable à l’acte de
l’état civil qu’il supplée. L’acte de notoriété établi par l’officier de l’état civil et
homologué par le juge est inscrit dans le registre supplétoire102. Toutefois, avant
l’homologation, l’acte de notoriété n’a de valeur que celle d’un simple
renseignement103.
L’article 153 qui réglemente l’établissement des actes de notoriété pour les
évènements survenus avant l’entrée en vigueur du Code de la famille a été
amendé par la réforme de 2016 avec l’introduction de deuxième alinéa qui
prévoit que ‘‘Toutefois, le défaut d’acte de notoriété peut être suppléé par
jugement rendu dans les huit jours à dater de la saisine, par le Tribunal de
paix sur simple requête présentée par toute personne intéressée ou par le
Ministère public au tribunal du lieu où l’acte aurait dû être dressé’’.
b.2. Actes de notoriété pour faits postérieurs au Code de la famille
Selon les termes des nouveaux articles 157 et 158 alinéa 1 du code de la famille,
‘‘ A défaut d’acte de l’état civil constatant la naissance, le décès ou le mariage
postérieur à la présente loi, toute personne étant dans l’impossibilité de se
procurer l’acte de l’état civil peut demander, par requête motivée, au président
du tribunal de paix ou celui du tribunal pour enfants (et non plus au président du
tribunal de grande instance comme ce fut la règle avant la réforme de 2016),
selon le cas, du ressort de l’état civil où l’acte aurait dû être dressé,
l’établissement d’un acte de notoriété supplétif en précisant à quelles fins celui-
ci est destiné. Le président du tribunal de paix ou celui du tribunal pour enfants
(et non plus par le président du tribunal de grande instance comme ce fut la
règle avant la réforme de 2016), selon le cas, s’il n’estime pas la procédure par
voie de jugement supplétif nécessaire, reçoit la déclaration du requérant
corroborée par celle de deux témoins, parents ou non du requérant…’’.
Le législateur vise ici la suppléance de la carence d’un acte de l’état civil
postérieurement à la mise en vigueur du Code de la famille, dans les cas
expressément autorisés par ce code. Le législateur présume ici un non-respect
des dispositions du code en la matière, aussi rend-t-il la procédure en la matière
rigoureuse, donc judiciaire et avec effet limité. En effet, d’une part, le juge doit
préciser à quelles fins l’acte est destiné104. Cet acte permet aux intéressés de
faire la preuve de leur état en suppléant pendant un temps et suivant des actes
pour lesquels il a été dressé, à l’acte civil qui fait défaut. D’autre part, cet acte ne
peut être transcrit au registre supplétoire du lieu où l’acte doit être établi105.
101
Art. 155 CF.
102
Art. 154 CF in fine.
103
Art. 155 al.1 CF in fine.
104
Art. 157 CF in fine.
105
Art. 158 al. 2 CF.
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Par ailleurs, cet acte est susceptible d’être annulé ou rectifié par le tribunal de
paix ou le tribunal pour enfants (et non plus par le tribunal de grande instance
comme ce fut la règle avant la réforme de 2016)106 sur requête du ministère
public ou de toute personne justifiant d’un intérêt107.
2. Les actes rectifiés
Certaines irrégularités peuvent être commises dans la tenue des actes de l’état
civil ; notamment lors de la rédaction de l’acte, l’officier de l’état civil peut, soit
omettre une mention importante pour l’identification de l’individu, soit
commettre une erreur en inscrivant une mention exigée par la loi, une mauvaise
orthographe par exemple. Il peut arriver aussi qu’il oublie de signer l’acte ou qu’il
inscrive dans celui-ci une mention non exigée par la loi. Les hypothèses sont donc
nombreuses où un acte d’état civil peut être entaché d’une irrégularité. Mais
l’acte irrégulier, lorsque l’irrégularité n’est pas trop grave pour justifier une
annulation, est susceptible d’être corrigé par la voie de la rectification.
La rectification est alors la régularisation de l’acte par l’élimination d’une erreur
ou d’une omission qui l’entache. Il s’agit de faire concorder l’acte matériellement
avec ce qui est réputé la vérité juridique. En droit congolais, en cas d’omissions
ou d’erreurs matérielles commises dans la rédaction des actes dressés dans leur
ressort, dit l’article 105 du Code de la famille, il appartient au président du
tribunal de paix ou à son délégué de faire procéder d’office à leur rectification. A
cet effet, ils donnent directement les instructions utiles aux officiers de l’état civil
ou aux dépositaires des registres selon le cas.
Section 4. Du domicile et de la résidence : quatrième élément d’identification
des personnes
En trois paragraphes il s’agira d’abord des considérations générales sur le
domicile et la résidence (§1), ensuite des caractères du domicile (§2) et enfin des
sortes de domicile (§3).
§1. Considérations générales sur le domicile et la résidence
Si le domicile entre dans le champ du droit parmi les critères d’identification des
personnes, c’est parce qu’il est un élément de fixation de leur activité juridique
dans l’espace108. Les personnes doivent non seulement être identifiées mais
aussi pouvoir être localisées sous peine d’insécurité juridique et de préjudice des
droits des tiers. Le système doit toutefois préserver le droit de chacun de se
mouvoir à sa guise. D’où le compromis qui consiste à attacher juridiquement la
personne à son domicile et à accepter qu’elle se fixe en une ou plusieurs
106
Art. 155 CF.
107
Art. 158 al. 4 CF.
108 ème
H. DE PAGE et J-P. MASSON, Traité élémentaire de droit civil belge, t. II , Les personnes, 4 éd. ,
Bruxelles, Bruylant, 1990,p. 163.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 83
résidences.
Les institutions du domicile et de résidence sont examinées dans leur sens civil.
Ces notions sont également utilisées, et surtout autrement définies, dans de
nombreuses autres branches du droit109 , ce qui atteste que la localisation des
personnes n’est pas liée à l’état des personnes au sens strict.
Il s’agira dans ce paragraphe d’bord de définir le domicile (A) et ensuite de
souligner son importance (B).
A. Notion de domicile en droit civil
Le mot ‘‘domicile’’ vient du mot latin ‘‘domus’’. En latin, le mot ‘‘domus’’ signifie
maison, lieu où habite une personne mais aussi point fixe où les intérêts d’une
personne la ramène régulièrement. Il équivaut à une localisation géographique
stable et permanente des sujets de droit.
Au sens du droit civil et d’après l’article 161 du Code de la famille, le domicile
d’une personne se trouve ‘‘au lieu où elle a son principal établissement’’. Ce
texte a du domicile une conception abstraite, dans la mesure où, quelle que soit
la durée d’absence d’un individu du lieu du principal établissement, le domicile
est à cet endroit. Une telle définition permet d’éviter l’inconvénient pour les tiers
de rechercher la personne dans tous les lieux où elle est susceptible de se
trouver.
Le domicile est choisi librement et résulte de la conjonction d’un élément
matériel (résidence effective, concentration d’intérêts effectifs et/ou
professionnels, etc.) et d’un élément intentionnel (volonté de s’établir en cet
endroit), avec une prééminence du premier sur le second110. La présence de la
personne est insuffisante. Il n’y a pas transfert de domicile quand une personne
réside de façon prolongée dans un endroit non librement choisi (hôpital, prison,
etc.) ou sans intention d’y établir son domicile (séjour professionnel ou d’études
à l’étranger). Bref, le domicile est l’endroit où la personne concentre
volontairement l’essentiel de ses intérêts.
Le domicile, principal établissement, se distingue de la résidence et de
l’habitation. La résidence est le lieu où la personne a sa demeure habituelle (art.
169 CF) et l’habitation désigne le ‘‘lieu d’un séjour particulièrement bref, par
exemple l’hôtel où quelqu’un est descendu pour quelques jours’’111. Selon
l’article 169 du CF, hormis mis le cas de la résidence des commerçants qui est
censée être au lieu où ils exercent leurs activités quelle que soit la durée
d’activités, une résidence n’est acquise en principe que lorsque le séjour doit
durer plus d’un mois. La résidence et l’habitation sont des notions plus
109
Domicile judiciaire, domicile pénal, domicile fiscal, domicile électoral...
110
Voy. D’HUART, ‘‘Le domicile. Une notion plurielle’’, Rép. not.,t.I., l. VII, Bruxelles, Larcier, 1987.
111 er
G. MARTY et P. RAYNAUD, Droit civil, t. 1, mise à jour au 1 janvier 1961, n° 969, p. 1190.
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concrètes, plus réelles, et le domicile constitue une fiction juridique. Mais il peut
arriver que la résidence et le domicile se confondent, notamment lorsque le
principal établissement se trouve au lieu où la personne réside. Le domicile ainsi
défini a une importance pratique et présente certains caractères.
B. Importance du domicile
Le domicile entendu comme le principal établissement présente de nombreux
intérêts en droit public et en droit privé. Le domicile est un élément
d’identification du citoyen lorsque l’Administration veut le contraindre à
exécuter ses obligations fiscales, politiques, sociales et militaires. Le domicile est
aussi important que le nom, ce qui explique qu’on le mentionne souvent sur les
documents publics au même titre que le nom.
Sur le plan du droit privé, le domicile présente un intérêt procédural : il
détermine la compétence territoriale en matière personnelle ; d’après l’article 3
alinéa 2 du Code de procédure civile, le défendeur doit être assigné112 devant le
tribunal de son domicile. C’est dire que les tiers ont intérêt à connaitre le
domicile du défendeur. En outre, les tiers ne sont pas tenus de signifier les actes
à la personne même, ils le font valablement lorsqu’ils les adressent, par le biais
du huissier de justice, au domicile du destinataire.
Par ailleurs, la publicité de certains actes doit se faire au domicile de l’intéressé :
c’est ainsi que le dispositif du jugement définitif déclarant le décès doit être
transcrit sur les registres de l’état civil du dernier domicile de l’absent (art. 205
CF).
Certaines opérations sur le patrimoine se font au domicile de l’intéressé : la
signification du commerçant failli est faite au domicile du curateur (art. 8 du
Code de procédure civile), la succession s’ouvre au domicile du défunt (art. 755
du Code de la famille).
§2. Caractères du domicile
Les caractères du domicile découlent de la définition que le législateur en donne,
puisqu’il est le principal établissement, il est nécessaire, fixe et chacun n’en a
qu’un seul.
A. La nécessité du domicile
Le domicile est, tout d’abord, nécessaire dans l’intérêt des tiers et de la personne
intéressée. Il en résulte que lorsque l’on ne peut pas déterminer le nouveau
domicile, on présume que l’individu a conservé son domicile d’origine. Lorsque le
domicile est incertain, la résidence en tient lieu (art. 161 al. 2 CF).
112
L’assignation est un acte d’huissier de justice par lequel le demandeur fait inviter son adversaire, le
défendeur, à comparaitre devant la juridiction appelée à trancher le litige qui les oppose.
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B. La fixité du domicile
Le domicile est fixe sans être immuable. C’est dire que l’on peut en changer
(changement de domicile) à sa guise pourvu que l’on concrétise son intention
(art.162 CF).
C. L’unité du domicile
Le domicile est unique en ce sens que l’on ne peut pas avoir simultanément, sauf
en cas de domicile élu, plus d’un domicile (art. 164 CF).
Lorsqu’une personne a plusieurs établissements, seul le principal mérite d’être
considéré comme le domicile ; c’est dire que chacun n’a qu’un domicile, les
autres intérêts constituant la résidence. Une personne peut avoir plusieurs
résidences (art. 171 CF). Cependant, dans la pratique, les tiers ne peuvent pas
toujours déterminer aussi facilement le principal établissement, et il arrive que la
personne n’en ait aucun. Cela justifie d’importantes dérogations apportées au
principe de l’unité du domicile par le Code de la famille. En effet, à côté du
domicile principal existent des domiciles spéciaux : le domicile professionnel, le
domicile élu...
§3. Détermination du domicile ou sortes de domicile en droit civil
Tantôt c’est l’individu qui fixe volontairement son domicile, tantôt c’est le
législateur qui lui en impose un. Cependant un individu peut aussi faire élection
de son domicile.
A. Le domicile volontaire, principal établissement
Le domicile se trouve au lieu où la personne a décidé de fixer son principal
établissement. Il suffit de connaitre le principal établissement pour savoir où est
le domicile. Dès lors se pose le problème de la définition du principal
établissement.
Le principal établissement est ‘‘le centre des affaires, des activités, des intérêts
de la personne’’ 113(art. 161 CF).
Le domicile étant le principal établissement, le changement du lieu de l’activité
principal devrait entrainer celui du domicile. Pour cela, le Code de la famille exige
qu’il y ait un transfert d’une habitation habituelle et effective dans un autre lieu,
joint à l’intention de changer le principal établissement. Il faut donc prouver les
deux éléments si l’on veut établir le changement de domicile (art. 162 CF).
B. Le domicile légal
Le domicile légal est le domicile désigné par la loi. En effet, le législateur fixe lui-
même le domicile de certaines personnes où elles sont censées avoir le principal
113
Mazeaud, op. cit., n° 573, p. 578.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 86
sens analogue, élire domicile, faire élection de domicile en tel endroit, etc. ; et on
appelle par opposition domicile réel, le lieu où la personne habite réellement.
Selon l’article 168 du CF, l’élection doit être expresse et ne peut se faire que par
écrit. Toutes significations, demandes et poursuites pour l’exécution d’un acte
pour lequel domicile a été élu, peuvent être valablement faites à ce domicile et
devant le juge dudit domicile.
Section 5. Identification par la biométrie : cas des empreintes digitales :
cinquième élément d’identification des personnes
La notion de la biométrie sera d’abord cernée (§1) avant de dire un mot sur
l’utilisation des empreintes digitales comme moyen d’identification des individus
(§2).
§1. Notion
La biométrie peut être définie comme l’analyse mathématique des
caractéristiques biologiques d'une personne, destinée à déterminer son identité
de manière irréfutable.
La biométrie repose donc sur le principe de la reconnaissance de caractéristiques
physiques. Les empreintes digitales et la gamme d'indices généralement visés
par la biométrie, notamment l'iris, la rétine, la main et les empreintes vocales,
offrent une preuve irréfutable de l'identité d'une personne puisqu'elles
constituent des caractéristiques biologiques uniques qui distinguent une
personne d'une autre et ne peuvent être associées qu'à une seule personne.
L’identification des individus par la biométrie n’est pas encore bien développée
en République démocratique du Congo. Cependant, la police judiciaire et le
Ministère des Affaires étrangères recourent à ce mode d’identification
respectivement pour la délivrance des extraits de casier judiciaire ou des
passeports biométriques.
§2. L’utilisation des empreintes digitales comme moyen d’identification d’une
personne
Aujourd’hui, les empreintes digitales sont recueillies sur une scène de crime et
sont ensuite comparées à celles contenues dans un serveur central. Des modèles
permettent d’évaluer la probabilité d’une certaine configuration et de fixer un
seuil à partir duquel on peut assurer qu’il y a identification de l’individu dont on a
relevé une trace.
Une empreinte digitale est une marque laissée par les crêtes des doigts, des
mains, des orteils ou des pieds lorsqu'elles touchent un objet. En d’autres
termes, une empreinte digitale est le dessin formé par les lignes de la peau des
doigts, des paumes des mains, des orteils ou de la plante des pieds.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 88
Il en existe deux types : l'empreinte directe (qui laisse une marque visible) et
l'empreinte latente (saleté, sueur ou autre résidu déposé sur un objet).
Les empreintes digitales sont regroupées en trois catégories principales : l'arche,
le tourbillon et la boucle. À l'intérieur de chacune de ces catégories, il y a un très
grand nombre d'éléments qui nous différencient les uns des autres. En plus des
cicatrices, il y a les fourches, les îlots et les espaces qui donnent un caractère
unique aux empreintes latentes.
L’étude des empreintes digitales s’appelle la dactyloscopie. Il existe trois
prémices fondamentales à la dactyloscopie:
La pérennité du dessin papillaire de la naissance à la mort,
L’inaltérabilité du dessin,
L’individualité du dessin d’un individu à l’autre.
Ces empreintes digitales existent déjà à notre naissance, on peut donc
s’interroger en premier lieu sur la genèse de cette formation. Les avis divergent,
on lit selon les auteurs qu’elles se forment à partir de la onzième semaine de
gestation ou au début du troisième mois. Les lignes adoptent leur morphologie
finale chez le fœtus. Beaucoup de recherches restent encore à faire dans ce
domaine.
Nos empreintes sont individuelles, cependant, elles ne sont en fait pas si
différentes les unes des autres, elles affichent des constantes, nous verrons
qu’on retrouve toujours les mêmes formes. Le dessin général ne suffit pas à
individualiser une empreinte.
L’individualité du dessin est due à des ‘‘irrégularités’’ appelées minuties dans les
lignes. On lit que Galton, anthropologue cousin de Darwin a démontré ‘‘qu’il y a
une chance sur 64 milliards d’avoir la même empreinte qu’un autre individu’’.
Les recherches mathématiques sur les empreintes sont utilisées comme outil de
preuve pour la police et la justice.
L’empreinte digitale est unique pour chaque individu et garde la même forme
tout au long de la vie. Elle subit des transformations homothétiques ou des
distorsions modélisables par des similitudes dues à la croissance. Lorsque
l’épiderme est altéré, celui-ci se régénère de façon identique.
Cette unicité est donc une opportunité pour identifier un individu.
TITRE II
LES PERSONNES MORALES
Plan du titre.- Ce titre comprend deux chapitres traitant successivement de
l’existence des personnes morales et de la spécificité de leur régime.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 89
CHAPITRE I
EXISTENCE DES PERSONNES MORALES
La notion et le débat autour de l’existence des personnes morales seront d’abord
circonscrits (section 1) avant l’étude de la classification de ces personnes (section
2).
Section 1. Notion et controverse autour de l’existence des personnes morales
Il s’agit dans cette section de cerner la notion des personnes morales (§1) avant
de rappeler le débat doctrinal autour de l’existence des personnes morales (§2)
§1. Notion de la personnalité morale (ou civile)
La personnalité juridique étant l’aptitude à être titulaire actif et passif de droits,
on pourrait être tenté, surtout dans une vision purement individualiste du droit,
de considérer que seuls les individus peuvent être dotés de la personnalité
juridique, qu’il n’y a donc que des personnes physiques. Cette coïncidence est
contredite par le droit positif. Les systèmes juridiques reconnaissent, de diverses
manières, à des entités l’aptitude à participer en tant que telles à la vie juridique.
La personne morale est donc ce groupement doté, sous certaines conditions,
d’une personnalité juridique.
§2. Controverse doctrinale
Au cours du XIXème siècle quand on s’est posé la question de savoir si l’on
reconnaitrait dans un pays donné la personnalité morale créée à l’étranger, une
discussion s’est ouverte autour du concept juridique de la personnalité juridique.
Tout le problème a été centré sur cette question.
Dès lors, deux systèmes se sont opposés dans la construction juridique. La
véritable controverse a opposé les partisans de la théorie de la fiction aux
partisans de la théorie de la réalité des personnes morales.
Les partisans de la première théorie ont soutenu que la personnalité morale
accordée à des groupements est le résultat d’un artifice, les personnes morales
étant des créations de pure technique. La personnalité juridique est une fiction
juridique. Seule la loi peut, soutient-on, user de ce procédé, seule elle peut, par
une disposition expresse, accorder, à son gré d’ailleurs, la personnalité morale à
ce groupement. A l’encontre de cette théorie, une autre théorie a vu le jour,
celle de la réalité des personnes morales, certaines entités étant suffisamment
réelles pour être considérées comme des sujets de droit.
Section 2. Classification des personnes morales
L’on distingue entre les personnes morales internationales, les personnes
morales nationales de droit public et les personnes morales de droit privé.
On peut globalement présenter les personnes morales de la manière suivante :
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 90
CHAPITRE II
SPECIALITE ET REGIME JURIDIQUE DES PERSONNES
MORALES
Ce chapitre analyse en deux sections la question de la spécialité des personnes
morales d’une part (section 1) et d’autre part le régime juridique des personnes
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114
Art. 843 CF.
115
Voy. supra : le domicile des personnes morales en droit congolais.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 93
2ÈME PARTIE
DE LA FAMILLE OU DES RELATIONS FAMILIALES
Le droit de la famille est l’ensemble des règles qui déterminent les conditions et
les effets de la parenté et de l’alliance116.
116 ème
B. HESS-FALLON & A-M. SIMON, Droit de la famille, 5 éd., éd ; Dalloz, 2004, p. 1.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. // 94
Pour l’Africain, la famille comprend tous les membres vivants reliés à l’ancêtre
commun ou reconnu comme tel par un membre considéré comme chef de
famille. Entre ces membres existe un lien de solidarité comprenant le devoir
d’entretien, d’aide et d’assistance. La famille constitue ainsi un tout humain,
social et économique pour l’Africain et il est inconcevable qu’il soit en dehors
d’elle.
117
G. CORNU, op. cit., p. 395.
118
E. MWANZO idin’AMINYE, L’égalité des époux en droit congolais de la famille, thèse de doctorat,
Université Catholique de Louvain, 2009, p. 18 à 20.
119
A. SOHIER, Traité élémentaire de droit civil du Congo belge, Maison Larcier, 1949, pp. 39-52.
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120
G. KALAMBAY, ‘‘La situation actuelle des droits civils congolais : droit civil et coutumier et perspectives
d’avenir’’, in Problèmes Sociaux Congolais, Bulletin trimestriel, CEPSI, n° 78, 1967, p. 103.
121
Art. 701 CF.
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traditionnelle africaine, d’autre part, que la famille-ménage est à son tour plus
étendue que la famille conjugale, dite aussi famille nucléaire ou famille
restreinte, d’inspiration européenne. Il s’agit, à bien voir, d’une conception
dualiste de la famille composée des époux et de leurs enfants sans considération
de leur âge et de la grande famille regroupant les autres parents par le sang ou
par alliance.
Nature juridique de la famille. Le groupement que constitue la famille ne
bénéficie pas, dans notre droit, de la personnalité morale. On est en face d’un
simple groupement de fait. Ce groupement ne peut donc pas vivre la vie
juridique, être propriétaire122, passer des contrats, intenter des actions en
justice, etc ; c’est pourquoi, il n’y a pas, à proprement parler, de ‘‘ patrimoine
familial’’ ; tout au plus peut-on souligner par cette expression la destination de
certains biens à la famille, envisagés individuellement, chacun titulaire d’un
patrimoine distinct, des droits et des obligations distincts.
Aujourd’hui où la famille prend place dans le droit, il serait logique de consacrer
cette évolution, en faisant de la famille un groupement doté de la personnalité.
Mais jusqu’à ce jour cette évolution n’est pas consacrée par le législateur.
Plan de la partie.- La famille résulte de la constitution d’un couple par le mariage
qui demeure l’élément le plus important, mais aussi parfois, par le simple fait de
l’union libre (titre I). D’autres sources de rapports familiaux sont la filiation (titre
II) et l’adoption (titre III). De là dérivent certains effets de la parenté et (mais
seulement en cas de mariage) de l’alliance (titre IV).
TITRE PREMIER
DU MARIAGE ET DE L’UNION LIBRE
Ce titre est divisé en deux sous-titres. Le premier examine l’institution du
mariage (sous-titre I) et le deuxième s’attèle à analyser l’union libre (sous-titre
II).
122
On parle pourtant du patrimoine familial. Plusieurs théories ont ainsi été développées par la doctrine
pour expliquer l’existence des biens appartenant à la famille. On peut les synthétiser autour de trois
catégories de théories : celle classique d’Aubry et Rau, celles plus modernes, des patrimoines d’affectation
et les théories contemporaines du patrimoine. Aujourd’hui, c’est l’idée de communauté d’intérêts,
l’existence d’un intérêt collectif qui justifie en matière d’affectation la cohésion patrimoniale des biens qui
en font l’objet et notamment la corrélation entre l’actif et le passif (notion de l’intérêt collectif de la famille).
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SOUS-TITRE 1ER
DU MARIAGE
Ce sous-titre consacré au mariage comprend cinq chapitres se rapportant aux
considérations générales sur le mariage (chapitre I), aux conditions de formation
du mariage (chapitre II), aux sanctions en cas de violation de ces conditions
(chapitre III), aux effets du mariage (chapitre IV) et à la dissolution du mariage
(chapitre V).
CHAPITRE I.
CONSIDERATIONS GENERALES SUR LE MARIAGE
Comme de nombreuses institutions du droit des personnes et des familles, le
mariage répond à un besoin individuel. Il rencontre l’aspiration de la plupart des
individus à développer une vie sentimentale et sexuelle, à rompre leur solitude
et s’unir à d’autres qui ont choisi le même mode de vie en couple. Il n’est guère
étonnant de le retrouver dans la majorité des sociétés et à la plupart des
époques123.
Sans être une étape obligatoire, dans certains cas, et c’est généralement le cas,
le mariage est précédé d’une étape préliminaire : les fiançailles qu’il convient
d’examiner d’abord avant d’analyser la question du mariage.
Ce chapitre analyse ainsi en quatre sections les fiançailles (section 1), la
définition et les caractères du mariage (section 2), sa nature juridique (section 3),
la question de la liberté de se marier et enfin celle du but du mariage (section 4).
Section 1. Des fiançailles en droit congolais
Il convient dès lors de définir ce qu’on attend par fiançailles et de dire quelles
sont ses différentes formes et formalités en droit congolais (§1), de déterminer
sa nature juridique (§2), de préciser ses effets (§3), de dire un mot sur ses modes
de preuve (§4) et enfin de préciser les conditions de sa cessation (§5).
§1. Notion, formes et formalités des fiançailles
La notion (A), les formes (B) et les formalités (C) des fiançailles seront examinées
tour à tour.
123
Y-H. LELEU, Droit des personnes et des familles, Larcier, 2005, p. 268.
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124
AUBRY & RAU, Droit civil français, l’état et la capacité des personnes, t.1, Colin et capitant, cours de droit
civil français, 4è éd.. 1923, t., p. 28 et s.
125
MARTHY et RAYNAUD, op. cit. p. 87.
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100
cadeaux n’aient pas été offerts sous condition que le mariage ait lieu.
Les actions en réparation et en restitution doivent être intentées dans un délai
précis : un an à compter de la rupture d’après l’article 348 CF.
Section 2. Définition et caractères du mariage
La définition du mariage sera donnée (§1) avant de voir ses caractères (§2).
§1. Notion du mariage
Le mariage, dit le nouvel article 330 du Code de la famille, est l’acte civil, public
et solennel par lequel un homme et une femme, qui ne sont engagés ni l’un ni
l’autre dans les liens d’un précédent mariage enregistré, établissent entre eux
une union légale et durable dont les conditions de formation, les effets et la
dissolution sont déterminés par la loi (la modification de cet article a consisté en
la ponctuation c’est-à-dire à l’ajout d’une virgule après le mot ‘‘femme’’).
§2. Des caractères du mariage
Il ressort de la définition du mariage donné à l’article 330 du Code de la famille
que le mariage présente quatre caractères : il est un acte personnel, public, civil
et solennel.
A. Le mariage est un acte personnel
L’article 351 exige le consentement personnel de chaque candidat au mariage.
Cet article a été modifié par la réforme de 2016. Le législateur a confirmé
l’interdiction faite depuis 2009 (depuis l’entrée en vigueur de la loi portant
protection de l’enfant) de recueillir le consentement de mineurs pour leur
mariage désormais interdit.
Le législateur institue le contrôle de l’Etat sur l’effectivité du consentement des
futurs époux en les obligeant de se présenter personnellement devant l’officier
de l’état civil pour la célébration ou l’enregistrement du mariage (art. 370 CF). Le
législateur a voulu, en effet, que les parties soient libres de donner leur
consentement jusqu’au dernier moment ou de le refuser. Or à partir du moment
où c’est un tiers qui consent au mariage pour l’une des parties, il peut très bien
arriver qu’à ce moment-là la partie représentée n’ait plus du tout envie de se
marier.
Cependant, en raison des circonstances graves, la représentation par mandataire
peut être autorisée par le juge de paix126. Un consentement qui serait donc
donné à un mariage par un tiers sans avoir été autorisé par le tribunal équivaut à
une absence totale de consentement et le dit mariage est nul.
126
Art. 351 al. 2. CF
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102
127
Afrique du Sud
128
Pays bas, Belgique, Espagne
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105
CHAPITRE II
LES CONDITIONS DE LA FORMATION DU MARIAGE
La loi distingue entre les conditions de fond (section 1) et les conditions de forme
de formation du mariage (section 2).
Section 1. Les conditions de fond du mariage
On appelle conditions de fond du mariage, celles auxquelles les parties n’ont, en
principe, aucune excuse, aucune dispense ni dérogation pour contracter
mariage, elles doivent absolument être respectées.
Deux séries des conditions de fond sont exigées : les unes sont dites positives
(§1), les sont dites négatives (§2).
§1. Exigence des conditions positives
Les conditions positives sont relatives aux conditions d’aptitude physique (A), aux
conditions psychologiques (B) et à la dot (C).
A. Les conditions d’aptitude physique
Les règles sur l’aptitude physique visent d’une part l’âge matrimonial (1) et
d’autre part le sexe des futurs époux (2).
1. L’âge matrimonial
Le législateur congolais avait décidé de relever à dix-huit ans l’âge du mariage de
la femme. C’est ce qui découle de l’article 48 de la loi du 10 janvier 2009 sur la
protection de l’enfant qui dispose que le mariage d’enfants, c’est-à-dire des
personnes âgées de moins de dix-huit ans est interdit.
Dans cet alinéa, l’alinéa 1erde l’article 352 du Code de la famille qui disposait que
‘‘l’homme avant dix-huit ans révolus, la femme avant quinze ans révolus, ne
peuvent contracter mariage’’ a été modifié en 2016 et se lit désormais de la
manière suivante: ‘‘L’homme et la femme avant dix-huit ans révolus ne peuvent
contracter mariage’’.
2. Le sexe différent
L’exigence d’une différence des sexes des futurs époux peut paraitre absurde
mais mérite cependant d’être soulignée. En effet, le problème se pose
actuellement en raison de certaines idées nouvelles qui préconisent le mariage
d’homosexuels et des progrès de la science médicale qui permettent à certains
individus de faire changer leur sexe ; à cet égard, il convient de citer l’affaire
Corbet contre Corbet dont les faits étaient les suivants : après avoir fait changer
son sexe (masculin à la naissance) par une intervention chirurgicale, un individu
contracta mariage. Après quatorze jours de mariage, son conjoint demanda la
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107
130
G. CORNU, op. cit., p. 320.
131
Inst. Cout. I..2.89.
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110
qui scelle l’alliance entre les deux familles, celle des deux futurs époux.
1. Définition.- Le terme dot en droit congolais n’est pas l’équivalent de la dot en
Occident où elle désigne les biens qu’une femme apporte en se mariant ou en
entrant en religion ou encore les donations faites en faveur du mariage ou en
vue du mariage aux deux époux ou à l’un d’eux (Mazeaud).
Dans la tradition africaine, la dot désigne les biens que le père (ou l’oncle
maternel) reçoit de son futur gendre et de sa famille. Le bénéficiaire n’en fait pas
une propriété privée, il l’utilise pour procurer des femmes aux garçons de la
famille.
2. La réglementation de la dot de lege lata
a. L’importance de la dot.- L’institution de la dot occupe une place de choix dans
le Code de la famille. Les articles 361 à 367 lui sont consacrés. L’article 361, al. 2
énonce que ‘‘le mariage ne peut être célébré que si la dot a été effectivement
versée au moins en partie’’. Cette disposition fait donc de la dot une condition de
fond du mariage et ce, en référence aux pratiques coutumières congolaises.
b. Obligation de payer la dot.- Le mariage ne peut être célébré qui si la dot a été
effectivement versée au moins en partie, dit l’alinéa 2 de l’article 361. (Donc, pas
de mariage sans versement de la dot). Mais la dot peut être symbolique.
c. Qui payent la dot ? Le futur époux et sa famille (art. 361 CF).
d. A qui est versée la dot ? Aux parents de la future épouse. Le terme parents
doit être pris ici au sens général. Il ne s’agit pas seulement des parents
biologiques de la future épouse mais de tous les créanciers dotaux déterminés
par la loi au sens de l’article 362 CF. La loi dit que le futur époux et sa famille
doivent se convenir avec les parents de la future épouse.
e. Que comprend la dot : A ce sujet, l’ancien article 361 du Code de la famille
prévoyait que la dot comprend les biens ou l’argent. Le nouvel article 361 précise
que celle-ci comprend les biens et/ou l’argent.
Il sied de préciser que l’argent comme composante de la dot n’est apparue
qu’avec la colonisation. A l’origine, la dot était constituée par les prestations
(cadeaux, services) faits par le futur époux et ses parents aux parents de la future
épouse.
f. Débiteurs et créanciers dotaux.- La coutume applicable au mariage fixe les
débiteurs et les créanciers de la dot, sa consistance et son montant pour autant
que cela soit conforme à l’ordre public et à la loi (art. 362 CF).
g. Majoration et réévaluation de la dot interdites.- La dot ne peut être majorée
ou réévaluée au cours du mariage ou lors de la dissolution du mariage (art. 364
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112
134
Procédure par laquelle le débiteur d’une somme d’argent offre au créancier, par l’intermédiaire d’un
officier public, le paiement de sa dette ; en cas de refus du créancier de recevoir ce paiement, le débiteur
procédera à la consignation ce qui aura pour effet de le libérer valablement
135
La consignation se définit comme le dépôt d’espèces, de valeurs ou d’objet entre les mains d’une tierce
personne à charge pour elle de les remettre à qui de droit.
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113
paternité juridique et de l’adoption (art. 695 CF) tandis que l’alliance nait, elle,
du mariage (art. 704).
En ligne directe, le mariage est prohibé entre ascendants et descendants, en
ligne collatérale, entre frères et sœurs. Il l’est également entre alliés et parents
collatéraux. Le législateur interdit également le mariage entre l’adoptant et
l’adopté (art. 353 CF).
Cependant, le Code de la famille prévoit certaines dispenses : ainsi le mariage
entre alliés et parents collatéraux peuvent être tolérées si la coutume ne
l’interdit pas.
B. De la dissolution ou de l’annulation de la précédente union
Nul ne peut contracter un nouveau mariage avant la dissolution et l’annulation
du précédent (art. 353 al. 1 CF). De même, le remariage d’une personne dont le
mariage a été dissous ou annulée ou encore d’une personne dont le conjoint est
prédécédé ne peut être célébré que lorsque la mention de cette dissolution ou
de cette annulation a été faite en marge de l’acte du précédent mariage, ou
lorsque la preuve du décès de l’autre époux a été faite devant l’officier de l’état
civil (art. 354 al. 2).
S’agissant particulièrement de la dissolution du mariage par le divorce, cette
exigence de l’article 354 est une conséquence des effets du jugement de divorce
prévus à l’article 577 CF.
C. Le respect du délai de viduité (délai d’attente)
Le délai de viduité est un délai d’attente (de 300 jours sauf abrégement
judiciaire) destinée à éviter la confusion de paternité que la veuve, par extension
la femme divorcée, doit laisser s’écouler avant de contracter un nouveau
mariage.
En droit congolais, la réglementation de ce délai est prévue à l’article 355 CF. Le
respect du délai de viduité est donc une condition spéciale pour la femme qui,
dans ce cas, doit attendre l’expiration d’un certain temps. Ce délai court à
compter du divorce, du décès du mari ou de l’annulation du mariage précédent.
Il prend fin au moment de l’accouchement de la femme ; mais il peut être
abrégé, à la requête de la femme, par décision prise sous forme d’ordonnance138
du président du tribunal de paix dans le ressort duquel le mariage doit être
célébré. Ainsi, lorsque la femme prouve que son ancien mari s’est trouvé d’une
138
On appelle ‘‘ordonnances’’ (du juge), certaines décisions émanant d’un juge unique (président de
juridiction) qui peuvent revêtir soit les caractères contentieux ou gracieux, soit le caractère d’une décision
d’administration judiciaire et dont l’objet peut être divers : ordonnance accordant la dispense de
comparution en matière de divorce (art. 561 CF), ordonnance sur la résidence séparée des époux en cas de
divorce (art. 560 CF)...
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115
manière continue dans l’impossibilité de cohabiter avec elle, le juge peut décider
de supprimer ce délai si cette impossibilité de cohabiter a duré au moins 100
jours ou si la femme peut établir médicalement qu’elle n’est pas enceinte.
D. L’absence d’opposition
L’opposition est l’acte par lequel une personne qualifiée fait connaitre à l’officier
de l’état civil qu’il existe une cause de nullité ou un empêchement prohibitif
concernant l’union projetée, et lui défend en conséquence de célébrer cette
union139. Le droit d’opposition est donc le droit de faire défense à l’officier de
l’état civil de célébrer un mariage.
L’opposition ne vise que la violation des conditions de fond du mariage. C’est ce
qui ressort de la lecture des articles 371 et 385 CF.
Section 2. Les conditions de forme du mariage
Parler des conditions de forme du mariage, c’est s’attarder sur le problème de sa
célébration ; autrement dit, c’est chercher à savoir quels sont les rites qui, une
fois accomplis, permettent d’affirmer qu’un homme et une femme sont
valablement unis par les liens du mariage.
La lecture des textes du Code de la famille applicables à la célébration du
mariage, fait de l’Officier de l’état civil la pierre angulaire de tout mariage (§1),
mariage dont il faut prouver l’existence par la suite (§2).
§1. Le rôle essentiel de l’officier de l’état civil
Pour être valablement marié, pour être opposable à tous, il faut nécessairement
passer par l’officier de l’état civil (A). Mais la loi tolère sous certaines conditions
aussi le mariage célébré en famille (B).
A. Le triomphe du mariage civil célébré par l’officier de l’état civil
Réglementé et accepté par tous, le mariage civil n’en connait pas moins des
règles strictes, tant en ce qui concerne la personne habilitée à le célébrer,
l’officier de l’état civil (1), qu’en ce qui concerne les formalités antérieures au
mariage (2) et la cérémonie du mariage elle-même (3).
1. L’officier de l’état civil
a. Qui est l’officier de l’état civil ?
Nous l’avions déjà dit supra, l’officier de l’état est la ‘‘personne chargée par la loi
pour tenir les registres officiels de l’état civil, d’y dresser et signer les actes ainsi
que d’en délivrer des copies et extraits’’140.
139
J. CARBONNIER, Droit civil, t. 1, 2è vol., 8è éd., 1969, p. 39.
140
G. CORNU, op. cit.,p. 621. Sur les personnes investies des fonctions d’officier de l’état civil, cf. Infra.
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116
(b.1.2).
b.1.1 Publication de bans en cas de mariage célébré en famille
Dans les quinze jours qui suivent la demande d’enregistrement d’un mariage
célébré en famille, l’officier de l’état civil porte à la connaissance du public par
voie de proclamation faite au moins deux fois et/ou par affichage apposé à la
porte du bureau de l’état civil, l’acte constatant la célébration du mariage (art.
370 al. 4 CF modifié).
Cet article 370 a été modifié en 2016. Les principales modifications ont consisté
en :
- La prolongation du délai pour déclarer un mariage célébré en famille qui
passe de 1 mois à trois mois ;
- la fusion des anciens alinéas 1 et 2 parce qu’ils expriment la même idée ;
- la suppression du groupe de mots ‘‘doivent se présenter’’ par l’indicatif
présent ‘‘se présentent’’plus approprié ;
- la suppression des mineurs émancipés parmi les témoins au mariage ;
époux et des autres personnes dont les textes rendent la présence nécessaire (a)
et se termine par la délivrance aux nouveaux mariés de leur acte de mariage (b).
a) Les personnes présentes et leurs rôles respectifs
1. Les futurs époux
La présence des futurs époux se justifie par le caractère éminemment personnel
de l’institution du mariage. D’autre part, les futurs époux doivent accomplir
certains rites qui entourent la célébration du mariage et qui consistent
essentiellement à :
remettre à l’officier de l’état civil des pièces parmi lesquelles : une copie
d’acte de naissance (ou un acte de notoriété ou un jugement supplétif en
tenant lieu) ; l’acte de décès du premier conjoint ou un extrait du
jugement de divorce (art. 388 al. 1 CF).
tenir informé l’officier de l’état civil du régime matrimonial choisi, lorsque
les futurs conjoints ont pris soin de le faire (art. 388 al. 3 CF);
tenir informé l’officier de l’état civil de la valeur et de la composition de la
dot ainsi que les modalités de son règlement (art. 388 al. 2 CF) ;
entendre la lecture des textes relatifs aux devoirs des époux (art. 390 al. 4
CF) ;
à dire individuellement s’ils consentent à se prendre pour mari et femme
(art. 390 al. 4 CF). La réponse affirmative de l’un et l’autre conduit
l’officier de l’état civil à les déclarer unis par le mariage.
Devant le caractère personnel des engagements pris par les futurs conjoints se
pose le problème de savoir si un individu pouvait être représenté à la célébration
de son mariage, soit pour cause d’éloignement, mariage par procuration (1.1.),
soit à cause de son décès, mariage à titre posthume (1.2.).
1.1. Mariage par procuration
Nous l’avons dit supra, l’article 351 insiste sur le caractère individuel c’est-à-dire
personnel du consentement. Toutefois pour les raisons bien spécifiées par la loi,
le mariage par représentation est autorisé.
1.2. Mariage à titre posthume
Le mariage à titre posthume (appelé aussi mariage posthume) est celui qui est
célébré après la mort de l’un de deux candidats au mariage.
Ce type de mariage soulève toutefois de problèmes qu’il faut résoudre. Ne
serait-il pas injuste lorsque, par exemple, la fiancée est enceinte des œuvres de
son fiancé et que l’enfant à naitre est privé du bénéfice de la filiation dans le
mariage par des circonstances telles que la mort de son père ? Nulle part
cependant, il n’est envisagé dans le code de la famille le cas de mariage à titre
posthume. La réticence du législateur pour ce type de mariage s’explique sans
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
120
doute par la crainte que ce soient bien souvent des biens du de cujus qui soient
visés.
Le mariage devant être donné personnellement par les époux, le mariage à titre
posthume n’est donc pas de mise en droit congolais.
2. Les autres personnes que les époux : les témoins
Les personnes dont la présence est exigée lors de la célébration du mariage de
deux individus sont, en dehors des futurs époux eux-mêmes, les témoins. Le
mariage des mineurs étant désormais interdit au Congo, il n’y a plus lieu de
concevoir la présence des personnes investies de l’autorité parentale sur le
mineur.
Contrairement au mariage célébré en famille où les époux doivent se présenter
chacun avec un témoin pour l’enregistrement de leur mariage (art. 370 al. 2),
dans le cas de mariage célébré devant l’officier de l’état civil, la présence d’un
témoin au moins pour les deux époux suffit (art. 390 al. 1 CF). Celui-ci peut être
parent ou non des futurs conjoints, pourvu qu’il soit majeur141 et sain d’esprit.
Son rôle consiste à confirmer l’identité et certaines déclarations des parties au
mariage.
Une fois que les parties dont la présence est indispensable sont réunies devant
l’officier de l’état civil, qu’elles ont répondu aux différentes questions à elles
posées et que les époux ont consenti au mariage, l’officier de l’état civil déclare
ces derniers unis par les liens du mariage.
Il s’est posé la question de savoir si c’est le ‘‘oui’’ des parties au mariage qui
scellait l’union ou si c’est l’officier d’état civil qui, par la formule ‘‘je vous déclare
unis par les liens du mariage’’ le faisait. Le problème, à notre avis, ne trouve sa
solution que dans le fait que les parties au mariage, d’une part, et l’officier d’état
civil d’autre part, sont complémentaires. En l’absence des futurs conjoints et de
leur consentement, il ne peut y avoir mariage. Tout comme en l’absence de
l’officier, l’union ne peut être constituée.
Une fois ce cérémonial rempli, l’officier d’état civil et les parties en présence
signent au bas de l’acte de mariage (art. 390 al. 6 modifié). Si l’un des
comparants ne sait ou ne peut signer, la signature peut être remplacée par
l’apposition de l’empreinte digitale et mention en est faite à l’acte (art. 390 al. 6
modifié).
b) L’acte de mariage
A la suite de la cérémonie de célébration du mariage, l’officier d’état civil délivre
aux époux le volet 1 de l’acte de mariage et le livret de ménage (avant la réforme
141
Art. 94 CF.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
121
Il faut signaler que le nouvel alinéa 2 l’article 370 du code de la famille donne la
possibilité aux époux de se faire représenter par un mandataire porteur d’une
procuration à l’enregistrement du mariage ; celui-ci sera un proche parent, sauf
empêchement valable dûment constaté par l’officier de l’état civil. L’explication
de cette disposition doit se trouver dans le fait que ce n’est pas à l’officier de
l’état civil que le consentement est donné, mais bien devant les autorités
coutumières. L’officier de l’état civil n’est là que pour constater que ce
consentement a effectivement été donné, que le mariage a été célébré selon les
formes coutumières entre les deux individus (art. 374 CF) qui, par ailleurs
remplissent les conditions de fond du mariage (art. 375 al. 1 CF).
Comme pour le mariage qu’il célèbre directement, après l’enregistrement du
mariage célébré en famille, l’officier de l’état civil est tenu également de signaler,
contre accusé de réception, le mariage enregistré à l’officier de l’état civil du lieu
de naissance de chacun des époux, aux fins de mention en marge de chaque acte
de mariage. Lorsque l’avis de mention faite n’est pas revenu dans les trois mois
de l’envoi de notification, l’officier de l’état civil en rend compte sans délai au
Procureur près le tribunal de grande instance du ressort dans lequel il se trouve.
(art. 393 CF modifié).
Section 3. De la preuve du mariage
Le fait que l’officier de l’état civil soit la pierre angulaire de tout mariage a des
effets certains sur la preuve de ce dernier. L’intervention de ce dernier dans les
différents modes de célébration du mariage aménage en effet une preuve du
mariage des parties car cette intervention se solde toujours par la délivrance
d’un acte de mariage à celles-ci. L’acte de mariage devient ainsi la preuve par
excellence du mariage (§1). Les autres modes de preuves notamment la
possession d’état d’époux sont relégués au second plan (§2).
§1. L’acte de mariage, preuve par excellence du mariage
En principe, le mariage est prouvé par les époux et par le tiers au moyen d’acte
de mariage ou du livret de ménage dressé lors de son enregistrement ou lors de
sa célébration (art. 436 CF). L’acte de mariage demeure donc le mode de preuve
authentique.
§2. Les autres preuves du mariage
A. La possession d’état d’époux
À défaut d’acte de l’état civil, le mariage est prouvé par la possession d’état
d’époux (art. 438 CF).Deux personnes ont la possession d’état d’époux
lorsqu’elles se considèrent et se traitent mutuellement comme époux, et qu’elles
sont considérées et traitées comme tels par leur famille et la société. La
possession d’état d’époux est prouvée en présentant plus d’un témoin, parents
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
123
CHAPITRE III
DES SANCTIONS DE LA VIOLATION DES REGLES
RELATIVES A LA FORMATION DU MARIAGE
Les règles relatives à la formation du mariage, qu’elles visent les conditions de
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
124
B. Procédure
L’opposition est adressée à l’officier de l’état civil. Les articles 371 et 385 CF
modifiés distinguent selon que l’opposition concerne l’enregistrement d’un cas
mariage célébré en famille ou la célébration d’un mariage par l’officier de l’état
civil.
1. Opposition à l’enregistrement d’un mariage célébré en famille
Selon l’article 371 du Code de la famille qui organise la nullité en cas de mariage
célébré en famille, une fois saisi des faits à la base de l’opposition, l’officier de
l’état civil doit surseoir à l’enregistrement du mariage et aviser directement le
président du tribunal de paix compétent dans les quarante-huit heures. Dans les
huit jours, celui-ci ordonne à l’officier de l’état civil soit de passer outre, soit de
surseoir à la célébration ou à l’enregistrement du mariage.
Lorsque le président du tribunal décide la surséance du mariage, il prend une
ordonnance d’opposition qui est notifiée par les soins du greffier aux époux et à
l’officier ; en même temps le greffier cite les époux ainsi que leurs témoins à
comparaitre dans les quinze jours devant le tribunal pour plaider sur les mérites
de l’opposition. Le jugement est prononcé dans les huit jours sauf s’il y a lieu à
enquêter. La procédure est gratuite.
Cet article 371 a été modifié mais cette modification n’a touché que la forme et
non le fond. Les principaux amendements apportés par le législateur en 2016
sont suivants :
- remplacement, à l’alinéa 1er, du pronom personnel ‘‘il’’ par le pronom
démonstratif ‘‘celui-ci’’, plus approprié ;
- remplacement, à l’alinéa 2, du pronom démonstratif ‘‘celui-ci’’ par le
groupe de mots ‘‘le président du tribunal de paix’’ mieux indiqué ;
- introduction, à l’alinéa 3, d’une virgule entre le groupe de mots ‘‘huit
jours’’ et le groupe de mots ‘‘sauf s’il y a lieu’’ ;
- remplacement au dernier alinéa, du verbe au futur ‘‘sera’’ et ‘‘assurera’’,
par le présent ‘‘est’’ et ‘‘assure’’ parce que l’indicatif oblige.
Par ailleurs, l’article 372 du Code de la famille prévoit la possibilité d’appel
devant le tribunal de grande instance contre le jugement rendu par le tribunal de
paix. L’ancien article 372 prévoyait à cet effet que ‘‘. L’appel est formé par
déclaration au greffe du tribunal de paix qui a statué dans le délai de huit jours
francs à compter du prononcé du jugement. Les pièces de la procédure sont
transmises dans les quarante-huit heures au greffe du tribunal de grande
instance. La cause est inscrite au rôle de la première audience utile et le
jugement, prononcé à l’audience suivante, est toujours réputé contradictoire. Le
jugement d’appel est notifié par le Ministère public aux époux et à l’officier de
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126
L’opposition rejetée ne peut être renouvelée pour les mêmes causes par une
autre personne. L’opposition régulière est un obstacle définitif ou provisoire à la
célébration ou à l’enregistrement du mariage.
§2. L’inopposabilité des effets du mariage célébré en famille
L’alinéa 1er de l’article 370 du Code de la famille oblige les époux qui ont célébré
leur mariage en famille, et éventuellement leurs mandataires, de se présenter
devant l’officier de l’état civil du lieu de la célébration, dans le mois qui suit la
célébration du mariage en famille, en vue de faire constater le mariage et
d’assurer sa publicité et son enregistrement.
Et selon l’article 380 du même Code, avant l’enregistrement, le mariage célébré
en famille n’est opposable qu’aux époux et à ceux qui ont participé à cette
célébration conformément à la coutume.
Il s’ensuit que le mariage célébré en famille mais non enregistré est inopposable
à ceux qui n’y ont pas participé.
L’inopposabilité se dit d'un acte juridique dont la validité n'est pas affectée mais
dont les tiers peuvent écarter les effets.
Par ailleurs, tant que le mariage célébré en famille n’a pas été enregistré et que
l’un des époux en invoque les effets en justice, le tribunal suspend la procédure
jusqu’à l’enregistrement142.
§3. La nullité, sanction répressive de la violation des règles relatives à la
formation du mariage
Nous rappellerons d’abord la théorie générale des nullités (A) avant de voir les
causes de nullité prévues en matière de mariage en droit congolais (B).
A. Théorie générale des nullités
1. Définition de la nullité
La nullité est une sanction atteignant un acte qui n’est pas conforme aux
conditions de validité (de forme ou de fond) imposées par la règle de droit.
L’acte, parce que contraire à la loi, est considéré comme n’ayant jamais eu
d’existence, et le parties sont remises, dans toute la mesure du possible, en état
antérieur à cet acte.
La nullité est la sanction de la violation des conditions de validité d’un acte
juridique, non de l’inobservation des formalités de publicité. Une formalité de
publicité a pour but de faire connaitre un acte juridique aux tiers ; la sanction
sera donc l’inopposabilité de l’acte aux tiers, mais l’acte demeure valable entre
les parties.
142
Art. 380 CF in fine.
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128
2. Portée de la nullité
La nullité est susceptible d’atteindre tous les actes juridiques : contrats ou actes
unilatéraux (testaments).
Elle est encourue, non seulement quand la loi a expressément prévu la sanction
– nullités textuelles- mais aussi lorsque, ayant déterminé les conditions de
validité, le législateur a omis d’indiquer la sanction de leur inobservation –
nullités virtuelles. En effet, les conditions imposées par le législateur seraient
lettre morte si les particuliers pouvaient les écarter impunément ; il faut donc
considérer que la volonté résulte de la volonté tacite du législateur.
Cependant, la jurisprudence, dans le but de sécurité, se refuse à prononcer la
nullité de certains actes dont elle considère le maintien comme particulièrement
important, quand cette nullité n’est pas expressément édictée. Il en est ainsi en
matière de mariage, afin d’assurer la stabilité de la famille dont les intérêts
risqueraient d’être compromis par l’admission de cas de nullité trop nombreux.
3. Fondement des nullités : nullités absolues et nullités relatives
Les nullités sont fondées tantôt sur des considérations d’ordre public, tantôt sur
des considérations d’ordre privé.
D’une part, le législateur veut protéger la société toute entière contre un acte
dont le maintien serait susceptible de lui nuire ; ainsi un contrat immoral, tel que
la location d’une maison de prostitution, est contraire à l’ordre public.
D’autre part, le législateur vient au secours des personnes dont les intérêts lui
paraissent particulièrement dignes de protection, et qu’il protégera contre elles-
mêmes. L’acte passé par un mineur est nul, non pas dans un intérêt social, mais
afin d’assurer la protection de l’incapable contre son inexpérience. Sur ce
fondement, sont frappés de nullité des actes accomplis par les incapables et ceux
dans lesquels la volonté de l’une des parties a été atteinte par l’un des vices du
consentement ; également les actes dans lesquels la volonté de l’une des parties
fait défaut.
C’est sur ces deux fondements que repose la distinction traditionnelle entre les
nullités absolues et les nullités relatives. En principe, les nullités absolues
sanctionnent la violation d’une règle d’ordre public, les nullités relatives la
violation des règles édictées pour la protection d’intérêts privés.
Mais il faut souligner que ce critère de distinction n’est qu’approximatif et qu’il
ne peut être qu’approximatif, car la même règle protège bien souvent à la fois
l’intérêt général et des intérêts particuliers. Aussi, le tri entre les nullités
absolues et les nullités relatives, est-il, dans bien des cas, difficile à réaliser.
D’autant plus que le législateur soumet certaines nullités à un régime mixte, leur
appliquant telle règle des nullités absolues et telle autre des nullités relatives.
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129
143
Cf. infra.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
130
confirmation.
7. Effets des nullités
La nullité absolue et la nullité relative ne diffèrent en rien dans leurs effets.
Toute nullité doit être prononcée par le juge. Tant que le juge ne l’a prononcé,
l’acte doit être présumé valable et efficace.
Lorsqu’un jugement a annulé l’acte, la nullité opère rétroactivement : elle efface
dans le passé l’acte et toutes ses conséquences ; tout se passe comme si l’acte
n’avait jamais existé.
8. Conséquences accessoires de la nullité
Très souvent le demandeur en nullité réclame, non seulement la nullité de l’acte,
mais des restitutions et des dommages-intérêts.
Restitutions. La nullité prononcée a pour effet d’effacer rétroactivement les
transferts de droits réels qu’aurait dû effectuer le contrat.
L’action en restitution est cependant écartée dans des contrats immoraux par
application de l’adage : ‘‘Nemo auditur propriam turpitudinem allegans’’. Celui
qui se prévaut de sa propre turpitude ne sera pas entendu en justice.
Dommages-intérêts. Lorsque la cause de la nullité résulte d’une faute de l’un des
contractants, son cocontractant sera en droit de lui réclamer des dommages- en
réparation du préjudice qu’il souffre du fait de la nullité du contrat.
B. Les causes de nullité du mariage
Le législateur du code de la famille a repris la distinction classique entre les
causes de nullité absolue (1.) et les causes de nullité relative (2.).
1. Causes de nullité absolue
On parle de nullité absolue lorsque la cause peut être invoquée par tout
intéressé. Cette formule inclut habituellement les époux eux-mêmes, d’abord,
puis ‘‘...toute personne qui y a intérêt’’. Généralement, il s’agit de violation des
conditions de fond et de forme du mariage qui portent atteinte à l’ordre public,
ou à la rigueur, aux deux époux à la fois. C’est pourquoi le ministère public est
aussi admis à invoquer lui-aussi ces causes de nullité.
Le législateur du code de la famille a retenu les causes de nullité absolues
suivantes en matière du mariage :
absence de consentement de l’un des époux.- c’est l’hypothèse où le
consentement a été donné par un individu qui n’était pas en possession
de toutes les facultés mentales. Le consentement, en effet, pour être
valable doit émaner d’un être sain d’esprit. L’absence de consentement,
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145
A contrario, art. 112 de l’ancien code civil livre premier.
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134
Dans tous les cas, le mariage entaché de vice de consentement ne peut être
attaque si deux années se sont écoulées depuis sa célébration (art. 403 et 405 CF
in fine).
C. Les effets de la nullité du mariage
Le mariage annulé est censé n’avoir jamais existé (1) quoique sous certaines
conditions le mariage déclaré nul peut être confirmé (2). Par ailleurs la théorie du
mariage putatif permet de sauver les unions illégitimes (3).
1. Principe : la nullité du mariage est prononcée pour l’avenir
Par définition, un mariage annulé ne produit aucun effet dans le passé et dans
l’avenir. Le caractère rétroactif de la nullité la distingue de la dissolution qui
n’agit que pour l’avenir.
Le législateur du code de la famille pose cependant comme principe que le
mariage nul ne produit ses effets que pour l’avenir. Ce n’est
qu’exceptionnellement que le juge peut prononcer l’annulation rétroactive du
mariage particulièrement lorsque la loi l’impose ou lorsque la gravité des
circonstances l’exige. Le juge prendra en considération en particulier la bonne ou
la mauvaise foi des époux, le fait que le mariage a été ou non consommé,
l’intérêt des enfants éventuellement nés de l’union déclarée nulle et l’intérêt des
tiers de bonne foi (art. 400 CF).
2. La confirmation du mariage nul
Un mariage entaché de nullité peut devenir valide par le fait de la ratification ou
de confirmation.
Ainsi, selon l’article 397 du code de la famille, le mariage susceptible
d’annulation ne peut plus être attaqué lorsque la cause de la nullité a disparu ou
lorsque, dans le cas où le consentement des époux ou des autres personnes qui
doivent consentir au mariage a fait défaut ou a été vicié, il y a eu ratification
expresse ou tacite.
3. Le mariage putatif
L’annulation du mariage produit des effets très désastreux pour les époux, voire
pour leurs enfants et les tiers. Mais, par cette fiction juridique qu’est le mariage
putatif, le législateur permet à ‘‘des époux n’ayant pas satisfait pleinement aux
exigences du mariage de bénéficier quand même de ses effets’’146.
En effet, la valeur des intérêts humains en jeu a conduit le législateur à distinguer
selon que les époux étaient de mauvaise foi (a), ou de bonne foi (b).
a) Les effets de l’annulation lorsque les époux étaient de mauvaise foi
146
DECOTTIGNIES, ‘‘Requiem pour la famille africaine’’, in Annales africaines, 1965, p. 777.
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135
On dit des deux conjoints qu’ils étaient de mauvaise foi lorsqu’ils savaient, au
moment de la célébration de leur mariage, que celle-ci était entachée d’un vice,
autrement dit qu’ils violaient l’une des règles relatives à la formation du mariage.
La bonne foi, c’est-à-dire l’ignorance au moment de la célébration du mariage du
vice qui l’entache étant toujours présumée, c’est à celui qui allègue la mauvaise
foi de la prouver.
Lorsqu’il est donc prouvé que les deux époux étaient de mauvaise foi au moment
de la célébration de leur union, on peut considérer que l’annulation de leur
mariage conduit à le considérer comme n’ayant jamais existé. C’est
l’interprétation qu’il y a à faire de l’article 440 du code de la famille.
Cette règle a un impact quant aux rapports entre époux (a.1.), aux rapports entre
époux et leurs enfants (a.2.), et aux rapports avec les tiers (a.3.).
a.1. Dans les rapports entre époux
L’annulation du mariage de deux époux de mauvaise foi a un effet rétroactif :
cette annulation prononcée des mois et parfois des années après la célébration
du mariage. Les époux sont réputés alors n’avoir jamais été mariés.
Cette circonstance a des conséquences à l’égard des enfants issus de l’union.
a.2. Dans les rapports entre les époux et les enfants issus du mariage
L’alinéa 2 de l’article 400 du code de la famille décide que les enfants issus du
mariage déclaré nul, conservent vis-à-vis de leurs père et mère la filiation qui leur
avait été conférée par le mariage, même si celui-ci est déclaré nul avec effet
rétroactif. L’objectif visé ici est celui de ne pas faire pâtir les enfants d’une
situation qu’ils n’ont pas contribué à créer.
a.3. Dans les rapports entre les époux et les tiers.
Le législateur ne prend position clairement s’agissant des tiers de mauvaise foi. Il
se limite à dire que le tribunal règle selon l’équité les conséquences de la nullité
(al. 2 de l’article 400 CF).
On peut néanmoins valablement penser que les tiers qui ont, de bonne foi,
contracté avec l’un des époux ne doivent pas souffrir de cette situation. Un
recours à la théorie de l’apparence devrait permettre de régler équitablement le
problème. Pour ceux qui ont passé des contrats avec l’un des conjoints en
connaissance de cause, il n’y a aucune raison de les protéger.
b) Les effets de l’annulation lorsque les époux étaient de bonne foi : la théorie
du mariage putatif
On parle de mariage putatif lorsque l’un des époux au moins a cru valablement
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136
se marier et ignorait que son union était entachée d’un vice. Le cas le plus
courant est celui d’un individu qui contracte un second mariage avant la
dissolution du premier, lorsque la seconde épouse ignore, au moment de la
célébration de cette union, ce fait.
On peut également considérer le cas du mariage contracté par le conjoint de
l’absent avec un tiers avant (art. 197 CF) ou après le jugement déclaratif de décès
(art. 196 CF) lorsque ces deux ignoraient tout de l’existence de l’absent.
Lorsque l’un des époux au moins était de bonne foi, les effets de l’annulation du
mariage ne sont pas rétroactifs. Ceci signifie qu’il est considéré comme valable
pour toute la période antérieure à son annulation. Il n’est annulé que pour la
période postérieure au jugement d’annulation.
Plusieurs conséquences en découlent. Elles concernent aussi bien les rapports
entre époux (b. 1.), que la situation des enfants issus du mariage (b.2.).
b.1. Dans les rapports entre époux
Il faut distinguer, lorsqu’on a affaire à un mariage putatif, selon que les deux
époux étaient de bonne foi ou qu’un seul d’entre eux l’était.
Lorsque les époux étaient de bonne foi.- les droits acquis par eux sont
entièrement conservés. Concrètement, cela signifie que si l’un des conjoints est
décédé avant l’annulation, l’autre peut prétendre à la succession, si elle n’a pas
encore été partagée, ou conserver ce qu’il a reçu dans cette succession dans le
cas où le partage a déjà eu lieu. Par contre, si l’un des conjoints meurt après que
le jugement prononçant la nullité a acquis autorité de la chose jugée, l’autre n’a
droit à rien, le mariage ayant été annulé.
Pour ce qui est du régime matrimonial adopté, le code de la famille ne fait pas de
distinction selon que l’un ou les deux des époux a ou ont été de bonne ou de
mauvaise foi. En d’autres termes le législateur ne distingue pas selon que l’on est
en présence d’un mariage putatif ou non. L’article 489 in fine dispose que ‘‘...si le
mariage est annulé, le régime matrimonial choisi sera considéré comme
inexistant et celui de la communauté réduite aux acquêts leur sera applicable’’.
Ce dire que si le mariage est annulé, le partage des biens se fera de la manière
suivante : chacun récupérera d’abord ses propres, ensuite les acquêts seront
partagés à part égale entre les deux conjoints.
Lorsqu’un seul des époux était de bonne foi.- l’idée générale est que le conjoint
de bonne foi peut se prévaloir des effets du mariage tandis que l’autre ne le peut
pas.
Si donc les époux se sont fait des donations dans le cadre du mariage, celui de
bonne foi en conserve le bénéfice, l’autre en est privé.
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137
procédé à la célébration du mariage (§1), soit les époux et parfois les tiers (§2).
§1. Des hypothèses où la responsabilité pénale de l’officier de l’état civil peut
être engagée
L’officier de l’état civil étant l’autorité compétente pour célébrer les mariages, ce
simple fait ne peut lui être reproché ; ce qui lui est reproché et se trouve
sanctionné, c’est d’avoir rempli sa mission dans des conditions irrégulières. Cela
peut arriver :
lorsque l’officier de l’état civil a célébré un mariage sachant qu’il existait
un empêchement de nature à entrainer la nullité ;
lorsque l’officier de l’état civil effectue une fausse déclaration de
mariage ;
lorsque l’officier de l’état civil dresse des actes de l’état civil (actes de
mariage, notamment) le concernant ;
lorsque l’officier de l’état civil inscrit des actes de mariage ailleurs que sur
le registre prévu à cet effet.
§2. Des hypothèses où la responsabilité pénale des époux et/ou tiers peut être
engagée
Toute personne autre que l’officier de l’état civil qui aura, soit facilité, soit
contribué d’une manière quelconque à la violation des conditions du mariage,
peut être sanctionné pénalement. Il peut s’agir des époux, des parents des
époux, des témoins.... Ainsi seront punies des peines prévues par la loi :
les personnes qui par violence, ont contraint une personne à contracter
un mariage ainsi que les témoins d’un tel mariage (art. 404 CF modifié :
remplacement du futur ‘‘seront’’ par l’indicatif présent ‘‘sont’’ ;
remplacement du mot ‘‘sanctions’’ par ‘‘peines’’ et ajout du groupe de
mots ‘‘par la présente loi’’ après ‘‘l’article 336’’) ;
l’époux ou l’épouse qui, sachant qu’ils sont âgés de moins de dix-huit ans,
ont consenti au mariage ainsi que les personnes qui étaient témoins de ce
mariage (art. 407 CF modifié : au 1er alinéa : remplacement du futur
‘‘sera’’ par l’indicatif présent ‘‘est’’ ; remplacement du mot ‘‘sanctions’’
par ‘‘peines’’ ; remplacement du groupe de mots ‘‘ le mariage d’un
homme âgé de moins de dix-huit ans ou d’une femme âgée de moins de
quinze ans’’ par le groupe de mots ‘‘le mariage d’un homme et d’une
femme âgés de moins de dix-huit ans’’. Au deuxième alinéa :
remplacement du futur ‘‘seront’’ par l’indicatif présent ‘‘sont’’);
les personnes qui, étant engagées dans les liens d’un précédent mariage
enregistré ou célébré devant l’officier de l’état civil, en auront fait
enregistrer ou célébrer un autre avant la dissolution ou l’annulation du
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139
CHAPITRE IV
DES EFFETS DU MARIAGE
Principe et portée. Tous les mariages produisent les mêmes effets, qu’ils aient
été enregistrés ou célébrés, dit l’article 441 du code de la famille. Cet article ne
doit pas être compris comme mettant sur le même pied, s’agissant des effets, les
mariages célébrés en famille et les mariages célébrés devant l’officier de l’état
civil. La signification exacte de cette disposition légale est que pour que le
mariage célébré en famille produise les mêmes effets que le mariage célébré
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141
147
Voir supra : Le choix du domicile conjugal en droit coutumier ; voy. aussi G. HULSTAERT : ‘‘ par le mariage
la femme n’entre pas dans la famille de son mari. Elle continue à appartenir à son propre clan et reste
soumise aux prescriptions particulières de sa famille (bokumo), op.cit., pp. 283-284.
148
Art. 453 al. 1 CF.
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142
2ème limite : Résidence séparée des époux décidée par le juge lors de la procédure
de divorce
Le juge peut, au cours d’une procédure en divorce et en cas d’urgence, prendre
les mesures provisoires nécessaires, relatives à la résidence séparée des époux.
Ces mesures sont prises par voie d’ordonnance susceptible d’appel.152
3ème limite : Séparation conventionnelle
149
Art. 455 CF ancien.
150
Art. 454 CF
151
Art. 455 CF
152
Art. 560 CF.
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143
Le Code de la famille prévoit que les époux peuvent convenir de vivre séparés
pendant une période déterminée ou indéterminée.153 Il s’agit de la séparation de
fait qui n’exige pas le recours devant le juge comme ce fut le cas de la séparation
de corps dans l’ancien Code civil livre 1er, évincée désormais de la législation
congolaise de la famille. Le législateur congolais justifie son choix pour la
séparation de fait en lieu et place de la séparation de corps de la sorte : ‘‘Dans le
cadre des incidents qui peuvent affecter la stabilité de la famille, il a été institué
la séparation de fait. Celle-ci doit être une séparation conventionnelle, décidée
dans l’intérêt supérieur du ménage et ce, pendant une période déterminée ou
indéterminée. La séparation conventionnelle trouve sa source dans nos coutumes
qui veulent que, lorsque le foyer est menacé par un grave conflit, l’époux envoie
son épouse soit chez ses parents soit chez ses beaux-parents, en attendant que le
temps joue son rôle stabilisateur. La séparation conventionnelle remplace ainsi la
séparation de corps, trop étrangère à notre mentalité. En réalité, cette procédure
trop traumatisante car judiciaire, constituait en fait l’antichambre du divorce’’.154
En effet, la coutume, un peu partout en Afrique, admet la possibilité pour la
femme de quitter le foyer conjugal et de se réfugier dans sa famille d’origine
lorsque le mari ne s’acquitte pas de ses devoirs à son endroit ou envers les
enfants.
B. Sanctions du devoir de cohabitation
1. Sanction pénale du devoir de cohabitation
Le refus de cohabitation est aussi appelé abandon de foyer155. Elle se matérialise
par la désertion du toit conjugal et aussi par le refus d’accomplir ce que l’on
qualifie de devoir conjugal, c’est-à-dire le refus de partager le lit, le refus des
relations sexuelles. Elle consiste donc ‘‘ pour une femme légitime de se
soustraire aux devoirs de cohabitation, pour un homme de refuser de recevoir
son épouse sous le toit conjugal. A vrai dire, il y a deux infractions distinctes :
l’abandon par la femme du domicile conjugal contre la volonté de son mari, et le
refus par le mari de recevoir sa femme au domicile conjugal ’’156.
Le refus de cohabitation est prévu et réprimé en droit congolais sur pied de
l’article 464 du Code de la famille lequel renvoie le juge aux dispositions des
articles 461 et 462 qui prévoient respectivement que , ‘‘lorsque la coutume le
153
Art. 456 al. 1 CF.
154 er
Exposé des motifs de la loi n° 87-010 du 1 août 1987 portant Code de la famille, p. 17.
155
Il sied de ne pas confondre abandon de foyer avec abandon de famille. L’infraction d’abandon de foyer
consiste pour une femme légitime de se soustraire aux devoirs de cohabitation et pour un homme de
refuser de recevoir son épouse sous le toit conjugal alors que l’abandon de famille est le fait, pour une
personne donnée, de rester pendant plus de deux mois sans payer, soit à son conjoint ; soit à ses enfants,
soit à ses parents ; la pension alimentaire à laquelle le tribunal l’a condamnée.
156
BONY CIZUNGU NYANGEZI, Les infractions de A à Z, Kinshasa et Ngakwa, ed. Laurent Nyangezi, 2011, p.
36.
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144
prévoit, le tribunal de paix peut, en cas de violation de leurs devoirs par les époux,
le condamner à une réparation en faveur de l’autre époux. Dans la mesure du
possible, le tribunal évitera d’accorder le dédommagement en argent et
ordonnera la réparation en nature sous forme d’objets désignés particulièrement
par la coutume à cet effet’’.157‘‘ Lorsque la coutume le prévoit, le tribunal de paix
peut, en cas de violation par l’un des époux de ses devoirs, ordonner à celui-ci
l’accomplissement de rites coutumiers susceptibles de réparer la faute commise
ou de resserrer les liens conjugaux ou d’alliance, pourvu que ces rites soient
conformes à l’ordre public et à la loi.’’158
Les mots ‘‘Lorsque la coutume le prévoit’’ sont très éloquents, car il existe des
coutumes qui interdisent la réparation de certains délits et imposent la
séparation définitive des époux. C’est le cas notamment de la coutume luba du
Kassaï lorsque la femme a commis l’adultère.
A première vue, les dispositions précitées du Code ne visent que la réparation du
préjudice résultant de la violation du devoir de cohabitation par les époux et ne
concernent sans doute que les époux régis par la coutume, en l’occurrence ceux
engagés dans les liens du mariage célébré en famille159, la loi préférant au
dédommagement en argent, le dédommagement en nature sous forme d’objets
particulièrement désignés à cet effet par la coutume des parties, à savoir les
poules, chèvres, moutons, cochons, vaches, vin ancestral, flèche, etc.160 En effet,
dans les coutumes traditionnelles africaines, ces objets ont une double
nature161 : ils sont employés non seulement en matière civile, comme
indemnisation, mais aussi, en matière pénale, comme amende en nature. La
distinction à cet égard dépend de la qualité des bénéficiaires de la condamnation
prononcée par le juge qui, pour une amende en nature, sera l’ancien ou
l’ensemble des aînés de la famille siégeant en tant que représentant de cette
dernière, et pour les indemnités en nature, le membre victime au sens du droit
pénal moderne.
157
Art. 461, al.1 & 2 CF.
158
Art. 462 CF.
159
Au plan des modalités du mariage et compte tenu de la politique du recours à ‘‘l’authenticité’’, le
législateur congolais a consacré, à côté du système de mariage devant l’officier de l’état civil, le type de
mariage que traditionnellement nos ancêtres ont toujours pratiqué , à savoir, le mariage célébré en famille
(Art. 368, al.1 CF.). Il s’est soucié seulement d’exiger que ce mariage, une fois célébré selon les rites
coutumiers, soit enregistré pour pouvoir être opposable aux tiers (Art. 370 CF.). C’est ce qu’on appelle, en
droit congolais, mariage-constatation. Quant au mariage célébré devant l’officier de l’état civil, il a été
appelé mariage-célébration (art. 368, al. 3). Ces deux types de mariage restent soumis aux mêmes
conditions de fond (Art. 351 à 367).
160 er
Exposé des motifs de la loi n° 87- 010 du 1 août 1987 portant CF. , p. 15.
161
A. SITA MUILA AKELE, ‘‘Le droit pénal et la famille. Essai d’analyse systématique et axiologique’’, Thèse,
Faculté de Droit et de Science Politique d’Aix-Marseille, 2001, p. 239.
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145
alors a le devoir de lui donner les soins que nécessite son état. Celui-ci doit
présenter une certaine gravité eu égard à son état, à son âge ou à sa santé. En
pratique, si le mal est bénin, le conjoint malade doit se soigner lui-même. D’une
façon générale, le devoir d’assistance vise la solidarité entre époux devant les
vicissitudes de la vie. Si les époux vivent séparés, l’assistance ne revêt qu’une
forme pécuniaire : elle consiste en la prise en charge des frais de traitement du
conjoint malade ; le devoir d’assistance se confond alors avec le devoir de
secours.
Ce dernier est une application particulière entre époux de l’obligation
alimentaire existant d’une manière générale entre parents et alliés. Par rapport
au devoir d’assistance, le devoir de secours est de nature pécuniaire : c’est
l’obligation réciproque pour les conjoints de se fournir les ressources nécessaires
à la vie.165 La mesure de l’obligation dépend des besoins du créancier et des
moyens du débiteur. Mais l’obligation s’exécute de façon différente selon que les
époux vivent ensemble ou non.
B. Sanctions des devoirs d’assistance et de secours
Les sanctions au manquement des devoirs de secours sont à la fois civiles (a) et
pénales (b) et frappent indistinctement l’époux ou l’épouse.
1. Sanctions civiles
Le manquement aux devoirs de secours et d’assistance peut motiver, dans le
chef de l’un ou l’autre époux, une condamnation à des dommages-intérêts s’il a
entraîné un préjudice. Il peut aussi constituer une cause de divorce, susceptible
d’être invoquée tant par l’époux que par l’épouse en instance de divorce.
Il faut observer aussitôt que le défaut d’entretien (de la femme) par le mari
constitue la base d’une jurisprudence abondante des justices de paix. La
constatation a été faite que celles-ci accueillent très favorablement les
demandes qui sont présentées par les femmes166, allant même jusqu’à opérer le
renversement de la charge de la preuve du défaut d’entretien de la femme par le
mari.167 Très souvent, en effet, la femme se contente d’affirmer qu’elle n’est pas
entretenue par son mari, se gardant d’administrer la preuve du fait allégué qui, il
faut le considérer, est difficile à faire dans la majeure partie des cas.
2. Sanctions pénales
L’existence des sanctions pénales ne vise autre chose qu’à dissuader le conjoint
qui veut se soustraire à ses obligations de secours.
165
Ibidem.
166
Voy. notammentTripaix de Kinshasa Lemba, RC 1245/D du 08 août 2004, Tripaix de Kinshasa Kinkole, RC
1243/d/2 du 3 mars 2006 (inédits).
167
Tripaix de Kinshasa Gombe, RD 536/VI du 14 janvier 2004, inédit.
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148
Le Code de la famille prévoit, en ses articles 926 et 927, des sanctions pénales à
l’encontre de l’épouse ou de l’époux qui manque à ces devoirs. Est ainsi puni de
sept à deux mois de servitude pénale et d’une amende de 250.000 à 1.250.000
francs congolais (montant actualisé par la modification de l’article 926 du Code
de la famille) ou de l’une de ces peines seulement, quiconque ayant été
condamné, par décision judiciaire, désormais sans recours en opposition ou
appel, à fournir une pension alimentaire à son conjoint, à ses descendants ou à
ses ascendants sera volontairement demeuré plus de deux mois sans en
acquitter les termes.
§4. Obligations de respect, de considération et d’affection
A. Objet des devoirs d’affection et de respect
Quoique le législateur congolais ait jugé bon de jumeler les obligations de
respect, considération et d’affection. Ces trois devoirs masquent des réalités qui
ne sont pas équivalentes même s’ils se partagent des mêmes démembrements.
Les obligations de sincérité et de communion spirituelle habituellement
incorporées dans l’obligation d’assistance, peuvent prendre place au sein du
devoir d’affection. La communion spirituelle entre époux postule une certaine
connivence dans la vision des choses ainsi qu’une communauté de valeurs
partagées. Elle présume l’échange des gratifications et des témoignages de
tendresse, sans lesquels la vie du couple serait d’un ennui mortel. Quant au
devoir de sincérité conjugale, il proscrit certains comportements entre époux tels
les dols, les réticences, les dissimulations et les tromperies.
S’agissant de l’obligation de considération (nouveauté de la réforme de 2016) et
de respect, remarquons d’entrée de jeu que toutes les relations et interrelations
sociales s’y élaborent et s’y construisent ; c’est la valeur cultivée et partagée
dans les familles. Sur le plan matrimonial, l’obligation de respect développe ses
exigences aussi bien à l’intérieur du couple que vis-à-vis des tiers.
B. Sanctions
La violation des devoirs de respect, de considération et d’affection ne demeure
pas moins une faute que la loi sanctionne. Comme les autres obligations
découlant du mariage, le manquement aux devoirs d’affection, de considération
et de respect peut motiver une condamnation à des dommages-intérêts s’il a
entraîné un préjudice ou encore constituer une cause de divorce, susceptible
d’être invoquée tant par l’époux que par l’épouse dans la procédure de divorce.
Section 3. Des effets patrimoniaux du mariage
L’association conjugale est essentiellement et avant tout une association des
personnes dont l’objet est d’unir pour la vie les destinées d’un homme et d’une
femme. Mais, comme aucune association ne peut vivre sans ressources, elle
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149
implique nécessairement entre époux, outre des rapports des personnes, des
rapports quant aux biens. Cette catégorie des rapports patrimoniaux des époux
forme ce qu’on qualifie de régime matrimonial des époux.
§1. Régime matrimonial général
L’expression régime matrimonial général a été adoptée avec commodité par le
législateur du Code de la famille, bien que son exactitude soit contestée. En
effet, il ne s’agit pas d’un véritable régime matrimonial, mais seulement des
solutions ponctuelles, des règles impératives qui se superposent au régime choisi
ou imposé et le complètent ou le corrigent sur quelques points. On appelle
également régime matrimonial primaire, ‘‘régime global’’, ‘‘régime primaire’’,
‘‘statut de base’’ ou encore ‘‘statut patrimonial de base des époux’’.
Selon l’article 474 du Code de la famille, le régime matrimonial général désigne
l’ensemble des règles fondamentales communes qui régissent les effets
patrimoniaux du mariage.
Le regroupement de ces dispositions varie selon les législations. On peut en
distinguer quatre en droit congolais : celles relatives à la contribution aux
charges du ménage (A), aux pouvoirs ménagers des époux (B), à la solidarité des
époux (C) et à l’obligation alimentaire entre époux (D).
A. Effet pécuniaire général du mariage : contribution aux charges du ménage
Aux termes des articles 473 à 486, le Code de la famille impose aux époux une
série d’obligations dans l’intérêt du ménage. Au premier plan de ces obligations
se trouve l’obligation de participer aux charges du ménage qui n’est autre que la
conséquence de la ‘‘ direction morale et matérielle’’ de celui-ci, prévue à l’article
445 nouveau. L’obligation de participer aux charges du ménage qui suppose, en
droit congolais, l’existence du ménage.
Selon l’alinéa 1er de l’article 476, les charges du ménage sont ‘‘ celles nécessaires
à l’entretien quotidien du ménage ainsi qu’à l’éducation des enfants, en
proportion de la situation respective et des possibilités financières et
professionnelles de chacun des époux.’’
Les articles 447 et 475 énoncent quant à eux l’obligation de contribuer aux
charges du ménage dans sa portée la plus générale en précisant que : ‘‘ les époux
contribuent aux charges du ménage selon leurs facultés et leur état.’’ Par
l’expression ‘‘selon leur faculté et leur état ’’, il faut entendre que la contribution
se fera en fonction du salaire ou d’autres sources de revenus de chaque époux. A
la contribution pécuniaire prévue à l’article 475, il faut adjoindre la contribution
en nature qui consisterait notamment dans l’accomplissement des tâches
ménagères.
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150
à l’actualisation des différents montants prévus par la loi), quels que soient le
régime matrimonial et les modalités de gestion de ce régime, l’accord des deux
époux est nécessaire pour :
transférer une concession foncière commune ou propre, ordinaire ou
perpétuelle ou la grever d’un droit d’emphytéose, de superficie, d’usufruit,
d’usage, d’habitation, d’hypothèque ou d’une servitude ;
aliéner un immeuble commun ou propre ou le grever d’un droit
d’emphytéose, de superficie, d’usufruit, d’usage, d’habitation,
d’hypothèque ou d’une servitude et d’un bail de plus de neuf ans ;
aliéner un immeuble commun dont la valeur est supérieure à 650.000
francs congolais ou des titres inscrits de cette valeur au nom du mari ou
de la femme ;
contracter un emprunt de plus de 150.000 francs congolais sur les biens
communs ou propres de l’autre époux ;
faire une donation de plus de 650.000 francs congolais ou cautionner la
dette d’un tiers pour un montant supérieur à 5.000 zaïres, sur les biens
communs ou propres de l’autre époux.
Par ailleurs, aux termes de l’article 500 du CF modifié, ‘‘ L’accord des deux
conjoints est présumé donné si, dans les six mois après que les actes aient été
passés, il n’y a pas eu manifestation écrite du désaccord notifié d’un conjoint à la
partie tierce contractante’’.
Dans une espèce assez typique, il a été judicieusement décidé que n’est pas
valable la vente d’un immeuble commun d’une très grande valeur consentie par
un époux sans l’accord de l’autre époux, en violation des articles 499 et 500 du
Code de la famille.169
C. Solidarité des époux
La solidarité vient du latin in solidum, c’est-à-dire solidairement. La solidarité des
époux trouve son expression dans le règlement des dettes contractées dans
l’intérêt du ménage par l’un ou l’autre époux.170
Selon l’ancien article 477 du Code de la famille, seul le mari disposait du pouvoir
de contracter ces dettes du ménage ; la femme pouvait toutefois, en application
de la théorie du mandat domestique tacite171, contracter aussi ces dettes.
169
Kin, Gombe, RCA 87 17 092, 19 mai 1998, RAJC, 2000, p. 33.
170
Art. 477, al. 1.
171
Le mandat est un acte par lequel une personne (appelé mandant, mandante) donne à une autre
(mandataire) le pouvoir de faire quelque chose pour elle et en son nom. On parle par exemple de mandat
ad litem qui est un mandat de représentation en justice. Autrement dit, c’est un mandat par lequel un
plaideur confère à une personne habilitée par la loi (ex. avocat, défenseur judiciaire…) mission de le
représenter en justice et qui emporte pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant les actes de la
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153
L’alinéa 1er de cet article a été jugé discriminatoire vis-à-vis de la femme. Aussi a-
t-il été modifié comme suit : ‘‘Sans préjudice de l’application de la théorie du
mandat domestique tacite, chaque conjoint, en concertation avec l’autre,
dispose du pouvoir de conclure des contrats relatifs aux charges du ménage’’.
Mais la solidarité ainsi proclamée est écartée dans deux hypothèses, d’une part,
elle ne joue pas pour les dépenses ainsi réalisées par un conjoint présentent un
caractère manifestement exagéré par rapport au train de vie du ménage ou
lorsqu’elles été contractées avec un tiers de mauvaise foi (alinéa 2 l’article 477
CF modifié). La possibilité autrefois reconnue au mari de retirer à la femme le
pouvoir de conclure les contrats relatifs aux charges du ménage, a été supprimée
par la réforme de 2016.
D. Obligation alimentaire réciproque
Ayant posé le principe selon lequel ‘‘les époux contribuent aux charges du
ménage selon leurs facultés et leur état’’, le législateur pose un autre principe
d’après lequel les époux sont tenus l’un envers l’autre d’une obligation
alimentaire172 c’est-à-dire d’une obligation légale de verser des aliments à
l’autre.
En droit, les aliments désignent les choses nécessaires à la vie, qu’en vertu d’un
devoir de solidarité familiale, celui qui le peut doit fournir à son parent (ou allié)
dans le besoin compte tenu des besoins et des ressources du créancier et du
débiteur173. L’institution de l’obligation alimentaire est organisée dans notre
droit de la famille par les dispositions des articles 716 à 754 du Code de la
famille174.
§2. Régime matrimonial spécialement choisi par les époux
Le régime matrimonial est l’ensemble des dispositions concernant les rapports
pécuniaires des époux : contribution aux charges communes, administration,
jouissance, aliénation des biens du mari ou de la femme, sort des économies et
des gains faits pendant le mariage, droit de gage de leurs créanciers, etc.175.
Le Code de la famille traite des régimes matrimoniaux à la section IV du livre sur
les effets du mariage, après les effets extra-patrimoniaux du mariage. C’est aux
articles 487 à 533 du Code de la famille que le législateur précise et organise les
régimes matrimoniaux qu’il limite à trois : la séparation des biens, la
procédure.
172
Art. 479 CF.
173
En ce sens, art. 716 al. 1 CF. Voy. aussi G. CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, 7ème éd., 2005, p. 48-49.
Les aliments ne doivent pas être confondus avec la nourriture (outre laquelle les aliments comprennent
logement, habillement, frais médicaux...) et les gains de survie que bénéficie le conjoint survivant même si il
n’est pas dans le besoin.
174
Pour les commentaires, voy. infra, point sur l’obligation alimentaire.
175 ème
L. JULLIOT DE LA MORANDIERE, Précis de Droit civil, Tome troisième, 7 éd., Dalloz, 1947, p. 1.
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154
communauté des biens réduite aux acquêts qui, en cas d’absence d’option de la
part des époux, sera le régime matrimonial qui les régira et le régime de
communauté universelle.
C’est au moment de l’acte du mariage, soit à l’occasion de son enregistrement
s’il s’agit d’un mariage célébré en famille, soit à l’occasion de sa célébration, s’il
s’agit d’un mariage devant l’officier de l’état civil, que les époux optent pour l’un
ou l’autre régime. Pour chacun de ce régime, nous examinerons son contenu
ainsi que les règles qui gouvernent sa dissolution.
A. Liberté et immutabilité des conventions matrimoniales
Après avoir dit un mot sur la liberté (1), il sera question de la règle d’immutabilité
des conventions matrimoniales (2).
Selon l’art. 493 du Code de la famille ‘‘Les conventions entre époux sont
valables’’. Des restrictions sont cependant apportées à cette liberté. Les
conventions établies entre les futurs époux ne peuvent pas nuire aux droits et
intérêts des personnes faisant partie de la famille, aux intérêts pécuniaires des
époux, ainsi qu’à l’ordre légal des successions’’ (art. 493).
176
L. Baudoin, ‘‘Immutabilité ou mutabilité des conventions matrimoniales’’, in MCGill Law Journal, 1952,
p. 2.
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156
177
De même, si le mariage est annulé, le régime matrimonial choisi sera considéré comme inexistant et celui
de la communauté réduite aux acquêts leur sera applicable (art. 489).
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157
180
L’article 494 du CF dispose : ‘‘A la demande des époux et une fois durant le mariage, le régime
matrimonial peut être modifié.’
181
Art. 516 CF.
182
Art. 523, al. 2 CF.
183
Art. 523, al. 2 CF.
184
Art. 490 al.2 CF modifié.
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159
185
On peut inclure ici les instruments de travail, mais là encore, il faut que ce soit en raison d’un intérêt
moral supérieur.
186
Il s’agit du capital d’une assurance-vie qui est acquis par un époux comme bien héréditaire personnel et
non de communauté.
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160
187
B.O. 1922, p. 432.
188
Art. 3 du décret.
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161
CHAPITRE V
DE LA DISSOLUTION DU MARIAGE
En deux sections, nous traiterons d’abord des considérations générales (section
1) avant d’examiner l’institution de divorce dans le code de la famille (section 2).
Section 1. Considérations générales
La dissolution du mariage consiste, à proprement parler, en une rupture de tous
les liens juridiques résultant de la qualité d’époux. Elle lève notamment
l’obstacle que pourrait éventuellement opposer l’existence du mariage en cause
à la conclusion d’une nouvelle union légitime
Selon l’article 539 du Code de la famille, le mariage se dissout en droit congolais
par :
la mort de l’un des époux ;
le divorce ;
le nouveau remariage du conjoint de l’absent, contracté après le
jugement déclarant le décès de l’absent.
L’institution d’absence ayant déjà fait l’objet d’une étude précédemment et les
conséquences du décès devant faire l’objet d’étude dans la partie sur les
successions, nous nous limiterons ici à l’étude du divorce.
Section 2. Du divorce
Dans trois paragraphes différents, il sera question successivement des
généralités sur le divorce (§1), du divorce sous le code civil livre 1 er (§2) et du
divorce dans le code de la famille (§3).
§1. Généralités sur le divorce
Après avoir cerné la notion de divorce (A), il sera question de le distinguer des
autres notions qui lui sont proches (B) avant de dire un mot sur les différentes
conceptions de divorce retenues par les législateurs à travers le monde(C).
A. Notion de divorce
Etymologiquement, le mot divorce vient du mot latin divortium, de divertere, se
séparer. Le code de la famille ne définit pas le mot divorce mais se contente à
l’article 546 de dire que le divorce résulte d’une décision judiciaire prononçant la
dissolution du mariage à la demande de l’un des époux. Ceci pour marquer que
la dissolution du mariage par les autorités autre que judiciaires, notamment les
autorités coutumières ou familiales, est sans effet (art. 547 CF).
L’on peut dès lors définir le divorce comme la rupture d'un mariage, prononcée
par l'autorité judiciaire sur la demande de l'un des époux et pour les causes que
la loi détermine.
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162
Il s’agit en d’autres termes d’une rupture judiciaire entre deux personnes qui
étaient préalablement unies par les liens du mariage. Le divorce rend donc
officielle la rupture et rend disponibles les deux personnes séparées pour un
autre mariage éventuel. Un divorce fait suite à la demande des époux de divorcer
et un jugement s'en suit pour l'officialiser.
Ainsi défini, le divorce se distingue des autres notions qui lui sont proches.
B. Divorce et notions voisines
La divorce n'est pas à confondre avec quelques notions voisines telles que la
nullité du mariage, la séparation de corps, la séparation de fait ou encore la
séparation conventionnelle.
1. Divorce et nullité du mariage
Le divorce se distingue de la nullité du mariage par le fait que, pour le divorce, le
mariage a été valable dès son origine, mais il est dissout pour des causes
déterminées par la loi. Ici, les anciens époux reprennent chacun leur vie de
célibataire et les enfants gardent toujours leur qualité d'enfants, nés dans le
mariage. Tandis que l'annulation du mariage efface le mariage qui est censé
n'avoir jamais existé, tous les droits qui auraient dus en découler sont anéantis,
en principe, rétroactivement. Qu'elle soit absolue ou relative, la nullité du
mariage produit les mêmes effets.
2. Divorce et séparation de corps
La séparation de corps est définie comme le simple relâchement du lien conjugal,
consistant essentiellement dans la dispense du devoir de cohabitation. Elle est
prononcée par un jugement et résulte des mêmes causes que le divorce189
Il s’agit donc d’une période de transition, de réflexion qui peut s’achever soit par
la réconciliation soit par la dissolution des liens conjugaux.
3. Divorce et séparation de fait
Il y a séparation de fait lorsque chacun vit de son côté sans avoir demandé le
divorce. La séparation doit être née soit d’un consentement mutuel des époux,
soit, au moins, de la volonté de l’un d’eux. La séparation de fait se différencie
ainsi du divorce et de la séparation de corps qui nécessitent une procédure
devant le juge.
4. Divorce et répudiation
La répudiation est l'acte par lequel l'un des époux, le plus souvent le mari, décide
unilatéralement de rompre le mariage qui les lie (Attention, en droit, le mot
répudiation signifie aussi renonciation : ex. répudiation d’un legs, d’une
189
R. Guillien et J. VINCENT, Lexiques des termes juridiques, 14eme éd., Paris, Dalloz, 2003, p. 529.
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163
succession).
5. Divorce et séparation conventionnelle
L’institution de séparation conventionnelle est une innovation du droit écrit
congolais qui trouve cependant ses racines dans les coutumes africaines. Il s’agit
d’une séparation de fait, mais avec cette particularité que cette séparation a
pour base la convention intervenue entre les deux époux. Contrairement au
divorce, avec la séparation conventionnelle, le mariage n’est pas dissous. Les
époux conviennent de se séparer pendant une période déterminée ou
indéterminée notamment lorsqu’un conflit ménage la stabilité du mariage.
Dans la pratique cependant, la séparation conventionnelle n’a pas seulement lieu
lorsqu’un conflit menace la stabilité de la famille, elle peut aussi concerner des
cas de non-conflictualité entre époux190.
Les époux n’ont pas ici besoin d’une autorisation du juge. C’est ce qui différencie
la séparation conventionnelle de la séparation de corps.
C. Différentes conceptions de divorce
La doctrine distingue principalement deux conceptions du divorce que sont le
divorce-constat et le divorce-remède.
1. Le divorce sanction (appelé aussi divorce pour faute)
Selon cette conception, le divorce n’est prononcé qu’à titre de sanction des
fautes commises par un époux. Le divorce est celui demandé par l'un des époux
lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et
obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le
maintien de la vie commune.
Comme on peut le remarquer le divorce-sanction conduit à retenir comme cause
de divorce, les fautes commises par l’un des époux ou par les deux alors que le
divorce remède constate la désunion et y apporte remède par le divorce. La
faute est ici définie comme la violation des devoirs et obligations du mariage.
2. Le divorce-constat (appelé aussi divorce-faillite, divorce-remède ou
divorce, constat objectif)
Selon cette conception, le divorce ne se conçoit que lorsque ‘‘la communauté de
vie des époux n’existe plus’’ (exemple, en Allemagne), ou que les époux vivent
officiellement séparés une certaine durée (exemple : depuis trois ans en Italie et
en RDC) ou encore que la poursuite d’une cohabitation soit devenue
‘‘irrémédiablement insupportable’’ (exemple : au Pays-Bas et en RDC).
190
E. MWANZO idin’AMINYE, L’égalité des époux en droit congolais de la famille, Thèse de doctorat,
Université catholique de Louvain, 2009, p.88
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164
191
Art. 546 CF.
192
Art. 547, al. 1.
193
Art. 550 CF.
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165
encore démarqué d’avec le législateur du Code civil livre 1er en éliminant toute
possibilité d’une dissolution du mariage par consentement mutuel.
2. Les présomptions de destruction du ménage
Comme il est toujours difficile de déterminer si, oui ou non, il y destruction
irrémédiable de l’union conjugale, le législateur a prévu les présomptions de
destruction irrémédiable du lien conjugal. Il a prévu en réalité deux
présomptions : la présomption simple de l’article 551 et la présomption
irréfragable de l’article 552 du code de la famille.
a. La présomption simple de destruction du lien conjugal
La séparation unilatérale de plus de trois ans constitue une présomption de la
destruction irrémédiable de l’union conjugale, dit l’article 551 CF.
Il s’agit ici d’une présomption simple car si le législateur avait voulu le contraire il
l’aurait précisé comme il l’a fait à l’article 552 du même code s’agissant de
l’absence. Ceci découle du libellé même de l’article 551 qui consacre cette
présomption. Le juge n’est donc pas tenu de prononcer le divorce malgré
l’écoulement de ce délai étant donné qu’un époux peut rapporter une preuve
contraire malgré la séparation unilatérale de plus de trois ans.
b. La présomption irréfragable de destruction du lien conjugal
Selon l’article 552 du Code de la famille, l’absence, telle que définie à l’article
176, qui s’est prolongée pendant plus de deux ans ainsi que la déclaration
d’absence intervenue conformément à la loi, constituent une présomption
irréfragable de la destruction irrémédiable de l’union conjugale.
Il s’agit d’une présomption irréfragable, dit l’article 552 précité. Il en découle
qu’aucune preuve contraire n’est admise. Il n'est donc pas permis de démontrer
l'inexistence de la conséquence déduite par le législateur du fait connu. Le juge
ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation. Le bénéficiaire d'une présomption
irréfragable est donc dispensé de faire la preuve de la circonstance dont il se
prévaut pour bénéficier d'un droit. Ainsi, lorsque ces conditions sont réunies, le
juge doit prononcer le divorce, dès lors que conjoint de l’absent le sollicite.
§3. Procédure de divorce en droit positif congolais
La procédure de divorce commence de manière unilatérale par une requête
adressée au juge par l’époux qui demande le divorce (B). Il convient donc
initialement de déterminer quel est le tribunal compétent (A).
A. Tribunal compétent
Aux termes de l’article 110, al. 1er de la loi organique n° 13/011-B portant
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
166
194
Sur la renonciation aux droits, voy. P. FRUMER, La renonciation aux droits et libertés. La Convention
européenne à l’épreuve de la volonté individuelle, E. Bruylant, 2001.
195
V. KANGULUMBA MBAMBI, ‘‘Portée exacte de l’article 110 du Code de l’organisation et de la
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
167
B. Procédure de divorce
L’article 554 du Code de la famille énonce un principe fondamental : la
procédure de divorce n’appartient qu’aux époux et ce, sur le pied d’égalité. De ce
caractère personnel et égalitaire de l’action en divorce, il découle que celle-ci ne
peut être exercée ni par les créanciers d’un époux, ni par ses héritiers. Ce
caractère personnel de l’action en divorce tranche évidemment avec le droit
coutumier ; il a dès lors paru nécessaire, pour le législateur, de l’inscrire
explicitement dans la loi.
Quid alors lorsque le demandeur réside à l’étranger ? Le requérant qui réside à
l’étranger lors du dépôt de la requête, peut la faire remettre au président du
tribunal de paix de la résidence de l’autre époux ou de la dernière résidence
conjugale par un mandataire spécial. Le président du tribunal de paix, après avoir
convoqué l’autre époux peut, par ordonnance motivée, accorder la dispense de
la comparution du requérant en précisant les circonstances justifiant réellement
celle-ci. Il acte (l’ancien article 561 avait utilisé ici l’indicatif futur ‘‘il actera’’) les
observations de l’autre époux, et peut (‘‘pourra’’ disait l’ancienne formulation),
dans le but de resserrer les liens conjugaux, convoquer les personnes qu’il estime
susceptibles d’y aboutir pour recueillir leurs avis. Il envoie (‘‘enverra’’ disait
l’ancienne formulation), à l’époux requérant, les observations de l’autre époux
et les avis des personnes éventuellement entendues. Dans les six mois à dater de
la réception des documents envoyés par lettre recommandée à l’adresse du
requérant, celui-ci devra déclarer qu’il persévère ou non dans sa requête en
divorce. À défaut de donner réponse dans ce délai, le requérant est présumé se
désister de sa requête, sauf cas de force majeure196.
La procédure de divorce est tout entière dominée par le souci d’éviter, chaque
fois qu’il est possible, le prononcé du divorce; en tout cas, de déjouer les
manœuvres des époux qui auraient été tentés de dissimuler un divorce par
consentement mutuel. Ce souci explique certaines particularités de la procédure,
en droit congolais, qui la font déroger au droit commun procédural. Ainsi, la
procédure du jugement de divorce (art. 563 à 577) est précédée d’une phase
préalable, une phase gracieuse (art. 556 à 562) se déroulant devant le président
du tribunal de paix. Ce n’est qu’en cas d’échec de la phase de conciliation que
s’ouvre une phase contentieuse (art. 563 à 577) au cours de laquelle le tribunal a
à statuer sur le divorce et ses effets.
1. Phase gracieuse (instance de conciliation)
La première phase, qualifiée d’ ‘‘instance de conciliation’’, se divise elle-même
compétence judiciaires’’, Note sous Tribunal de grande instance de Butembo (Nord-Kivu), RC 001/NGA/III,
27.07.2000, in Rev. du Dr. Afr., pp.103-106.
196
Art. 561 CF nouveau.
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168
procès soit engagé. Elles sont, en principe, générales en ce qu’elles jouent quelle
que soit la cause de divorce invoquée ; elles sont d’ordre public, et, par
conséquent, doivent être relevées d’office par le juge.
On peut, à l’état actuel de notre législation retenir six fins de non-recevoir en
matière de divorce à savoir :
Le décès d’un époux : L’action est rigoureusement personnelle ; elle
s’éteint par le décès de l’un des époux, même dans le cas où le décès de
l’époux demandeur ou défendeur survint en cours de procédure avant
que le jugement ne soit devenu définitif. Il ressort, en effet, de l’article
539 du code de la famille que la mort met fin automatiquement au
mariage ;
La réconciliation des époux.- L’action en divorce est éteinte par la
réconciliation des époux survenue en cours d’instance de conciliation ou
au cours de la procédure de divorce (art. 573 CF modifié)
Le désistement de l’époux demandeur.- Le désistement est la
renonciation d’une partie à poursuivre une procédure engagée.
Le législateur prévoit que sauf cas de force majeure, si le demandeur ne
comparait pas, ni personne en son nom, à la date d’introduction de la
cause, il est présumé s’être désisté de sa requête (nouvel art. 558 al. 1
CF).
Le défaut d’enregistrement du mariage célébré en famille- tant que le
mariage célébré en famille n’est pas enregistré et que l’un des époux en
invoque les effets en justice, le tribunal suspend la procédure jusqu’à
l’enregistrement (art. 380 al. 2 CF). Dans la pratique, le juge rend un
jugement d’avant dire droit pour constater l’inexistence de
l’enregistrement et enjoint à l’occasion aux époux et même, au besoin, à
l’officier de l’état civil de procéder aux formalités requises à cet effet.
L’interdiction de demander le divorce pendant un certain délai.- le
législateur pose un principe à l’article 574 du code de la famille selon
lequel sauf circonstances exceptionnelles et lorsque le président ou le
tribunal est convaincu que la conciliation est exclue, le divorce ne peut
être prononcé dans les deux années qui suivent la célébration du
mariage.
La chose jugée.- Il n’est pas possible de fonder une demande nouvelle sur
des faits qui ont été écartés lors d’une première instance. Cependant, les
faits écartés par un premier jugement parce qu’ils ne présentaient pas
une gravité suffisante, peuvent être repris dans une nouvelle instance
fondée principalement sur des faits nouveaux ou sur des faits encore
inconnus lors de la première instance.
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170
époux sont présents, soit par notification, en cas de défaut du défendeur. Dans
cette phase contentieuse, les parties au procès sont alors qualifiées de
demandeur et de défendeur, alors que dans la première période, la loi les
désigne par les termes ‘‘requérant’’ et ‘‘autre, époux’’, marquant ainsi le passage
définitif à la procédure contentieuse.200 Toutefois, Si le requérant réside à
l’étranger et qu’il a obtenu la dispense de comparaître, le président fixe la date
d’audience dès qu’il a reçu la décision du requérant de continuer la poursuite de
la cause. Il lui fait notifier par le greffier la date de l’introduction de l’action en
divorce201.
La troisième tentative de conciliation. Une dernière tentative de conciliation –
une troisième - peut toujours être décidée par le tribunal qui a, dans cette
occurrence, les plus larges possibilités pour en fixer l’organisation.202 Il est
évident qu’à ce stade de la procédure où les essais de rapprocher les deux époux
auront échoué, la décision de tenter encore une conciliation des époux devra
être bien pesée, parce qu’il ne faut pas non plus persévérer au risque de freiner
l’action déjà complètement engagée et qui doit connaître une solution. Mais, si
les chances de réconciliation sont sérieuses et si les griefs articulés sont
nettement dérisoires et qu’il y a des raisons de croire qu’une dernière tentative
pourrait vaincre une obstination déraisonnable, il apparaît que cette possibilité
accordée au tribunal revêt une très grande utilité.
Par ailleurs, la loi prévoit que, malgré la réalité des faits invoqués par le mari au
cours de la procédure de divorce, le tribunal devra refuser d’examiner la
demande en divorce, s’il apparaît que la femme est en grossesse, et si celle-ci
sollicite la surséance de l’action en divorce pendant cette période qui pourra être
prolongée pendant la première année de l’enfant né-vivant.203
Ce texte trouve son fondement dans la coutume. D’abord, cette dernière refuse
généralement pendant cette période, l’introduction d’une action en divorce,
parce que la charge de la responsabilité de la grossesse et des premiers temps de
la naissance incombe au mari. Ensuite, certaines coutumes, sans doute
discutables dans leur rigueur peu rationnelle, présument une faute dans le chef
de l’époux en cas de fausse couche, d’enfants mort-nés ou d’enfants morts dans
le temps voisins de la naissance. Enfin, l’autre motif retenu par les coutumes est
que la femme est, en cette période, en état réel d’infériorité pour pouvoir se
défendre. Cette fin de non-recevoir temporaire, ou mieux cette fin de non
procéder, puisé à la source des coutumes et qui appartient exclusivement à la
200
Art. 563 CF.
201
Art. 563 al. 4 et 5 CF.
202
Art. 567 CF modifié : cette modification n’a concerné que la forme : au premier alinéa, remplacement du
ème
futur ‘‘pourra’’ par l’indicatif ‘‘peut’’ et au 4 alinéa, du groupe de mots ‘‘doit le faire’’ par ‘‘le fait’’ jugé
plus indiqué..
203
Art. 564 CF.
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172
femme, peut être opportune pour sauver le ménage. Dans le cas contraire, le
divorce devra être prononcé, produisant de ce fait ses effets tant à l’égard des
époux que dans leurs rapports avec leur progéniture.
§4. Effets du divorce dans le Code de la famille
Le divorce ne peut se résumer en une dissolution, complète, instantanée et
définitive du mariage. Il organise en fait, avec plus ou moins de souplesse, le
passage du lien du mariage à celui de non-mariage. Malgré le prononcé du
divorce, subsistent encore des questions qu’il faut régler.204
A. Point de départ des effets du divorce
L’article 577 du code de la famille détermine de manière précise à partir de quel
moment le jugement de divorce produit ses effets :
A l’égard des époux c’est-à-dire s’agissant des effets personnels des
époux, le jugement de divorce produit ses effets du jour où il n’est plus
susceptible de voies de recours c’est-à-dire lorsque le jugement est coulé
en force de la chose jugée.
S’agissant des rapports matrimoniaux entre époux, le jugement produit
ses effets au jour de la requête en divorce. En effet, le législateur a voulu
éviter que, durant l’instance de divorce un époux dissipe impunément les
biens communs ou propres.
A l’égard des tiers, le jugement de divorce produit ses effets lorsqu’il est
transcrit en marge de l’acte de naissance des époux.
B. Les effets du divorce sur la personne des époux, de leurs enfants et quant à
leurs biens
Les effets du divorce concernent tant les rapports entre époux divorcés (1), les
rapports des époux divorcés avec leurs enfants (2) que les conséquences
pécuniaires de la dissolution de l’union conjugale (3).
1. Effets du divorce dans les rapports personnels entre les ex-époux
Les effets du divorce dans les rapports personnels des époux sont dominés en
droit congolais par une double idée : d’une part, le divorce fait disparaître le
mariage et ses conséquences, ce que nous qualifions de la conséquence normale
du divorce (a) ; d’autre part, l’on observe, malgré le prononcé du divorce, il
subsiste certaines obligations nées du mariage dissous (b), étant bien entendu
que le divorce produit ses effets, en principe, à partir du jour où son jugement
n’est plus susceptible de voies de recours.
204 ème
P. WAYER & H. VINCENT, Droit international privé, 7 éd., éd. Montchrestien, 2001, p. 397.
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173
l’autre époux. Il s’agit, selon les termes de la loi, d’une possibilité et non d’une
obligation que le juge peut ne pas retenir. Il s’agit de ce que l’on qualifie de la
prestation compensatoire.
Cette mesure consiste en une indemnité payée par l'époux le plus favorisé
financièrement au profit de l'autre. Cette prestation est destinée à compenser,
autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du lien conjugal crée dans les
conditions de vie respectives des époux.
Cette technique héritée et connue de la coutume sous la dénomination d’ ‘‘
indemnité de réadaptation’’ - mais qui s’en distingue en ce que l’époux
désavantagé peut être aussi bien l’homme que la femme - vise à permettre de
rétablir l’équilibre rompu par le mariage, d’éliminer les situations qui risquent
d’être inéquitables et de donner à l’époux désavantageux par le divorce la
possibilité de s’adapter à son nouvel état de personne seule. Cette technique
vise ainsi plusieurs objectifs : compenser le partage en cas de régime de
séparation des biens, aider la femme divorcée à refaire sa vie ; récompenser les
efforts faits par la femme durant la vie commune, etc.
La deuxième exception à l’effet naturel du divorce est prévue à l’article 582
modifié du Code de la famille. Aux termes de cet article : ‘‘La femme divorcée
conserve le droit de recevoir secours de l’homme pendant la grossesse et pendant
l’année qui suit la naissance de l’enfant si la grossesse a commencé avant le
divorce’’. Il s’agit en d’autres termes du prolongement de l’obligation de secours
en période de grossesse. En effet, le législateur du Code de la famille, ayant
rejeté le principe d’octroi d’une pension alimentaire après le divorce, admet
néanmoins que l’ancien époux vienne au secours de son ancienne épouse dans
cette circonstance particulière de divorce. Cette mesure, conforme à l’esprit de
la coutume, se justifie en raison de l’état de faiblesse dans lequel pareille femme
se trouve. Cette pension n’est pas à confondre avec celle versée par l’ancien mari
pour l’entretien de l’enfant. Ce droit de secours durant la grossesse cesse dans
deux cas : si la non-paternité est établie judiciairement208 ou si la femme a reçu,
en application de l’article 581 précité, une quotité des biens sur les fonds propres
de son ancien mari.209
La troisième exception concerne l’usage provisoire de l’ancienne maison
conjugale. En effet, le divorce une fois prononcé, il peut arriver que d’autres
questions qui se greffent sur la demande de divorce – notamment la pension
alimentaire, la garde des enfants – ne puissent être réglées en même temps que
le jugement prononçant le divorce. Dans ce cas, l’article 572 prévoit qu’une
décision complémentaire réglant les questions restées en suspens doit intervenir
208
Art. 582 al 2 du CF.
209
Art. 582 al 3 du CF.
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175
dans les six mois qui suivent la décision du divorce. En attendant et à la demande
de l’un des époux, le tribunal peut disposer qu’il occupera en tout ou en partie la
maison appartenant à l’autre époux. C’est ce qui résulte de l’article 582 du Code
de la famille.
2. Effets du divorce dans les rapports des ex-époux avec leurs enfants
Le Code congolais de la famille institue deux principes nouveaux qui guident les
rapports des ex-époux avec leurs enfants : d’une part, les époux restent tenus de
leurs obligations parentales et d’autre part, ils continuent à exercer l’autorité
parentale après le divorce.210 Aussi, quelle que soit la personne à laquelle les
enfants sont confiés, les père et mère conservent respectivement le droit de
surveiller l’entretien et l’éducation de leurs enfants en même temps qu’ils sont
obligés d’y contribuer.
S’agissant de la garde des enfants, le seul critère retenu désormais par le
législateur est l’intérêt des enfants. Le Code de la famille ne définit pas ce qu’il
faut entendre par intérêt de l’enfant.
Il faut alors se référer à l’article 6 de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l’enfant. Aux termes de cet article, l’intérêt supérieur de l'enfant
doit être une préoccupation primordiale dans toutes les décisions et mesures
prises à son égard. Par intérêt supérieur de l’enfant, il faut entendre le souci de
sauvegarder et de privilégier à tout prix ses droits.
Sont pris en considération, avec les besoins moraux, affectifs et physiques de
l'enfant, son âge, son état de santé, son milieu familial et les différents aspects
relatifs à sa situation.
3. Effets quant aux biens des ex-époux : la glose de l’article 572 du Code de la
famille
Les questions relatives aux effets pécuniaires du divorce ne seront plus abordées
à ce niveau car déjà traités à l’occasion de l’étude sur la dissolution des régimes
matrimoniaux des époux.
Rappelons toutefois qu’à la dissolution du mariage, le juge devra dissoudre
également le régime matrimonial en se référant au régime initialement choisi par
les époux ou encore au régime imposé aux époux par la loi - le régime de la
communauté réduite aux acquêts - s’ils n’avaient pas choisi de régime
matrimonial lors de la célébration ou de l’enregistrement du mariage.
Mais en prononçant le divorce, le juge n’a pas l’obligation de statuer
immédiatement sur le sort du régime matrimonial. En effet, selon l’article 572 du
Code de la famille, le juge peut prononcer le divorce et réserver pour une
210
Lecture combinée des articles 504, 584 et 586 du CF.
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176
SOUS-TITRE II
L’UNION LIBRE
L'union libre, autrement dit le concubinage, peut être définie comme une union
de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et
de continuité, entre deux personnes, de sexe différent, qui vivent en couple. Il
s’agit en d’autres termes de la situation résultant de la communauté de vie
stable et continue entre deux personnes liées affectivement. Il s’agit des termes
simples d’une union hors mariage, présentant une certaine stabilité.
Essentiellement, le concubinage ou l’union libre est conditionnée par la
communauté de vie stable et continue, qui peut être prouvée par tout moyen. Il
s’agit d’un mode de vie qui ne nécessite pas de formalités particulières.
Cependant, elle a des conséquences importantes qu’il convient de ne pas sous-
estimer.
Il y a trois caractéristiques de ce type d'union: l’union libre en dépit de l'évolution
des mœurs, a la mauvaise presse. Le mariage est toujours considéré comme la
norme, c'est une institution tandis que le terme d’union libre est jugé comme
inadéquat. De plus l’union libre se définit toujours par rapport au mariage, dans
la plupart des études sur l’union libre, on parle plus de mariage que d’union libre.
Enfin, c'est une situation de fait qui a pour conséquences de se présenter sous
diverses formes.
Après avoir rappelé l’évolution de l’institution de concubinage en droit congolais
(chapitre 1), il sera question de dire un mot sur son régime juridique (chapitre 2).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
178
CHAPITRE I
EVOLUTION DE L’INSTITUTION DU CONCUBINAGE EN
DROIT CONGOLAIS
Le Code civil livre 1er avait entendu fonder le droit de la famille sur le mariage. La
famille légitime est protégée. Tout est organisé pour défendre le statut des
enfants nés dans le mariage, appelés ailleurs enfants légitimes. Cette conception,
qui domine tout le XIXème siècle et les deux premiers tiers du XXème siècle, a pour
conséquence de faire considérer comme immorale l’union en dehors du
mariage : le concubinage. L'union libre ou la communauté hors mariage est en
développement constant en République démocratique du Congo ; le nombre de
couples vivant aujourd'hui en concubinage ne cesse d’augmenter. Et pourtant
aucune disposition légale ni constitutionnelle ne vient réglementer ce
phénomène de société. Ceci est dû avant tout à la volonté des partenaires eux-
mêmes de se dégager de toutes les contraintes morales et juridiques qui
entourent l'institution du mariage. Il est dû aussi à l’ignorance des règles
juridiques organisant le mariage.
En ce qui concerne la politique du législateur, il y a deux phases à considérer :
sous le Code civil libre premier, le législateur a combattu l’union libre, des
sanctions sévères étaient prévues et appliqués aux concubins qui refusaient de
se séparer : "les concubins se passent de la loi, la loi se désintéresse d'eux". Le
professeur H. Bekaert pouvait encore écrire en 1973 : ‘‘Nul ne peut se prévaloir
de sa propre turpitude’’ : tous actes, toutes conventions, toutes actions en
justice qui ont pour cause ou qui sont fondées sur un comportement illicite ou
légalement interdit, ne peuvent produire aucun effet juridique. Exemple : une
revendication trouvant son origine dans le concubinage’’.211
Actuellement, les effets du concubinage sont de plus en plus nombreux. En effet,
l’évolution législative et jurisprudentielle récente dénote une plus grande
tolérance à l’égard d’une situation qui provoquait naguère une attitude hostile.
Cette solution évolution semble s’étendre des concubins à leurs enfants.
La question majeure qui se pose en pratique est celle de savoir si l'on doit
appliquer à ces unions libres les mêmes solutions que celles qui existent pour les
personnes mariées et comment combler ces lacunes. Pendant longtemps, toute
action intentée en justice par des concubins était systématiquement rejetée, sur
le simple fondement de l'immoralité des relations.
Deux sections composent ce chapitre. La première aborde la place de l’union
libre dans notre Constitution (section 1) alors que la deuxième examine la
position de l’Etat en la matière (section 2).
211
H. BEKAERT, Introduction à l’étude de droit, Bruxelles, 1973, p. 178.
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179
CHAPITRE II
LE REGIME JURIDIQUE DE L’UNION LIBRE
Il s’agit ici d’examiner les règles légales qui régissent les rapports des concubins
vis-à-vis des tiers (section 1), vis-à-vis de leurs enfants (section 2) et entre
concubins eux-mêmes (section 3).
Section 1. Rapports des concubins avec les tiers
La question que l’on peut se poser est la suivante : les tiers peuvent-ils ou
doivent-ils agir à l'égard des concubins comme s'ils étaient des personnes
mariées ou au moins des personnes de la même famille ? Ici encore une simple
réponse affirmative ou positive n'est guère envisageable ; bien plus, le sens et le
but de chaque réglementation doivent être examinés ainsi que la situation
concrète des partenaires.
Si le tiers de bonne foi a valablement pu croire que les concubins étaient en fait
mariés et qu'il a effectué une opération réduisant l'état de son patrimoine, il ne
fait aucun doute que l’article 477 du Code de la famille (le créancier d'un époux
peut se retourner contre le conjoint) s'applique même en l'absence de contrat de
mariage, dans la mesure où il en va de l'intérêt du tiers. En revanche, l’alinéa 1er
de l’article 477 précité selon lequel les actes juridiques faits par un conjoint dans
le domaine de ses activités domestiques donnent des droits et engagent l’autre,
ne s'applique pas aux concubins car il est fondé sur une relation de confiance
propre au mariage et que l'on ne peut pas transposer dans le cas d'une union
libre.
Section 2. Rapports des concubins avec les enfants communs
Les rapports des concubins avec les enfants seront examinés d’une part pendant
la durée du mariage (§1) et d’autre part à la fin du concubinage (§2).
§1. Pendant la durée du concubinage
L'ancien Code civil livre 1er, dans le but de protéger la famille légitime,
manifestait de la rigueur envers les enfants naturels. Il ne leur reconnaissait
aucun droit successoral et ne leur accordait que des aliments. Ce code avait ainsi
institué à nouveau la hiérarchie des filiations. L'enfant naturel est alors distingué
de l'enfant légitime ; et entre les enfants naturels, l'enfant naturel simple a une
situation meilleure que les enfants adultérins et incestueux. L'enfant naturel
simple est l'enfant dont les parents n'étaient engagés dans aucun lien de mariage
avant sa conception. L'enfant naturel simple allait toujours à la succession de ses
père et mère. Il ne pouvait exercer son droit de succession que lorsque sa
filiation est légalement établie, par reconnaissance volontaire ou par déclaration
judiciaire. L'enfant né d'une infidélité conjugale de l'un au moins de ses parents
est adultérin. Est incestueux, l'enfant dont les auteurs ne pouvaient contracter
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
181
mariage l'un avec l'autre en raison d'un lien de parenté ou d'alliance, constituant
un empêchement à un degré prohibé. L'ancien code civil faisait une condition
défavorable aux enfants adultérins et incestueux. D'une part, l'établissement de
leur filiation est interdit, que ce soit par reconnaissance volontaire ou par
déclaration judiciaire. D'autre part, tout droit successoral leur est refusé, ils n'ont
droit qu'à des aliments. En réalité, le Code civil livre 1er de 1895 n'était que la
reproduction presque parfaite de celui du Code Napoléon de 1804. Or le courant
idéologique en ce temps était de réintroduire l'impératif public d'organisation de
la société : la famille redevenait une cellule de base qui doit être rigoureusement
organisée, ce qui suppose que le mariage et la filiation légitime fondée sur lui,
retrouve leur monopole ; la filiation hors mariage n'est pas ou est mal
considérée.
Avec l’entrée en vigueur du Code de la famille, le 1er aout 1988, toute
discrimination entre Congolais, basée sur les circonstances dans lesquelles leur
filiation a été établie, est interdite (Art. 593 CF modifié, en son alinéa 2). La
reconnaissance d’un enfant né hors mariage est rendue obligatoire et passible
d’une peine au cas où elle faite hors délai (art. 614 CF). Par ailleurs, l’article 758
reconnait les droits successoraux à l’enfant né hors mariage. Les enfants dont les
parents ne sont pas mariés sont des enfants nés hors mariage. La présomption
de paternité de l’article 602 du Code de la famille s'applique pour le concubin s'il
a cohabité avec la mère pendant la durée légale de la conception et si l'enfant ne
peut pas être celui d'un autre homme.
La loi du 1er aout 1987 a de cette façon accordé à l'enfant naturel les mêmes
droits qu'à l'enfant né hors mariage, en admettant la successibilité des enfants
nés hors mariage. Cette loi a consacré l'égalité des enfants légitimes et naturels,
et l'abolition des différentes catégories d'enfants naturels. Dans cette logique, le
nouveau code de la famille a opéré une réforme salutaire. En effet, cette loi a
profondément bouleversé l'ordre des successions au Congo. Le principe d'égalité
entre les filiations en matière successorale est aujourd'hui totalement consacré.
Tous les articles relatifs au statut restrictif de l'enfant naturel sont abrogés.
§2. Après la fin du concubinage
La rupture de l'union libre n'a aucune conséquence du point de vue des règles
légales relatives à l'autorité parentale : celui qui en avait l'exercice le garde et
l'autre partenaire n'a qu'un droit de visite.
Section 3. Rapports des concubins entre eux
Aucune obligation juridique ou morale ne contraint des personnes vivant
ensemble à conclure un contrat de mariage.
Certaines questions restent sensibles dans les relations entre concubins et
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182
accueillie, car elle n’a pas une cause illicite ou contraire aux bonnes mœurs, mais
elle résulte de la dissolution de la société de fait issue du commerce que les eux
parties avaient administrés ensemble212.
Tant à l‘égard de son partenaire que des tiers, chacun des partenaires peut
prouver par tout moyen qu’il a la propriété exclusive d’un bien. Les biens sur
lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d’une propriété exclusive sont
réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié.
212
CSJ, RC 285, 6 fév. 1985; CSJ, RPP (prise à partie) 045, 21 nov. 1966, in Kalongo Mbikayi, Code civil ; CSJ,
RC 544, 12 nov. 1986, RJZ , 1989, p. 38.
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185
TITRE II
LA FILIATION
Du latin filius, c’est-à-dire fils, la filiation s’entend être la descendance en ligne
directe. Le code de la famille reconnait de manière formelle l’existence des liens
juridiques entre un enfant et ses géniteurs. Ces liens qui traditionnellement sont
à la base du sang, font de l’enfant un membre de la famille par le biais du
mécanisme de filiation.
Mais il n’y a pas que le sang qui engendre le lien entre un enfant et ses géniteurs,
ce lien peut aussi naitre de la volonté des individus, de manière donc artificielle.
On parle alors de la filiation adoptive.
Ce titre comprend deux chapitres se rapportant tour à tour à l’évolution du droit
congolais de la filiation (chapitre 1) et au régime juridique de la filiation depuis
l’entrée en vigueur du code de la famille (section 2).
CHAPITRE I
EVOLUTION DU DROIT CONGOLAIS DE LA FILIATION
Pour mieux comprendre la matière de filiation telle qu’organisée par l’actuel
code de la famille (section 2), il sied de suivre son évolution depuis le code civil
livre premier (section 1).
Section 1. La filiation dans le code civil livre 1er
Les sortes de filiation sous le code de la famille seront examinées (§1) avant
l’étude des droits reconnus aux enfants jadis selon leur filiation (§2).
§1. Sortes de filiation sous le code civil livre 1er
L’ancien code civil livre 1er distinguait trois sortes de filiation, à savoir la filiation
légitime, la filiation naturelle et la filiation adoptive qu’il convient d’examiner
dans trois points suivants.
A. La filiation légitime
La filiation légitime est celle qui établit le lien entre un enfant et ses parents, tous
deux mariés. Un enfant légitime était donc, sous le code civil livre premier, un
enfant dont les père et la mère sont unis l’un à l’autre par le mariage.
B. La filiation naturelle
La filiation naturelle est celle qui établit le lien entre un enfant et ses parents non
mariés. Un enfant naturel était donc celui dont les père et mère ne sont pas unis
l’un à l’autre par le mariage. En raison de l’absence de mariage entre les parents,
l’établissement juridique de la filiation naturelle se faisait distinctement à l’égard
du père et à l’égard de la mère ; filiation paternelle et filiation maternelle
étaient, en principe, indépendantes l’une de l’autre.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
186
Le législateur pose donc comme principe l’égalité de tous les enfants dans leurs
rapports avec leurs père et mère et ce, quel que soit leur mode de filiation.
On peut lire à l’exposé des motifs de la loi portant code de la famille ce qui suit :
‘‘en matière de filiation, la loi a tenu à traduire l’option politique fondamentale
selon laquelle tout enfant doit avoir un père et qu’au Congo, le vocable ‘‘enfant
naturel’’ n’a plus droit de cité. Dans le même ordre d’idées, l’article 593 modifié
du Code de la famille, en son alinéa 2, dispose que ‘‘Toute discrimination entre
Congolais, basée sur les circonstances dans lesquelles leur filiation a été établie,
est interdite’’ et l’article 591 modifié ajoute que : ‘‘Tout enfant congolais a un
père (l’ancienne formulation disait : ‘‘Tout enfant doit avoir un père). Nul n’a le
droit d’ignorer son enfant, qu’il soit né dans le mariage ou hors mariage’’.
Lorsque les père et mère sont unis l’un à l’autre par le mariage, la filiation est
dite dans le mariage ; elle est dite hors mariage dans le cas contraire. Enfin, il y a
l’adoption qui crée un lien de filiation purement juridique, indépendant des liens
de sang.
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188
CHAPITRE II
LE REGIME JURIDIQUE DE LA FILIATION SOUS LE
CODE DE LA FAMILLE
Le code de la famille distingue entre la filiation maternelle et la filiation
paternelle (section 1) dont les modes d’établissement et les modes de preuve
diffèrent. A côté, il y a la filiation adoptive (section 2).
Section 1. De la filiation maternelle et de la filiation paternelle dans le code de
la famille
Cette section comprend quatre paragraphes traitant respectivement de la
filiation maternelle (§1), de la filiation paternelle (§2), du statut juridique de
l’enfant dont la filiation paternelle n’a pu être établie (§3) et des effets de la
filiation paternelle et maternelle (§4).
§1. De la filiation maternelle dans le code de la famille
Les modes d’établissement de la filiation maternelle seront examinés (A) avant
l’administration de sa preuve (B) et sa contestation (C).
A. Les modes d’établissement de la filiation maternelle
Selon l’article 596 du code de la famille, la filiation maternelle s’établit par l’acte
de naissance (1), soit par une déclaration volontaire de maternité (2), soit par
une action en action de recherche de maternité (3).
1. Etablissement de la filiation maternelle par l’acte de naissance
La filiation maternelle s’établit normalement par l’acte de naissance. Comme le
dit la loi, l’indication de la mère sur l’acte de naissance suffit à établir la filiation
maternelle213. Et l’énonciation du nom de la mère dans l’acte de naissance né
hors mariage vaut acte de maternité214. Il s’agit dans toutes ces hypothèses de
l’application de la règle ‘‘mater semper certa est’’.
2. Etablissement par la déclaration volontaire de maternité
Lorsque le nom de la mère n’est pas indiqué dans l’acte de naissance de son
enfant, dit l’article 597 du code de la famille, la mère peut faire une déclaration
de maternité.
La filiation dérive dans ce cas de la déclaration de maternité, c’est-à-dire de la
volonté de son auteur. Et cette volonté peut être émise en tout lieu. Tout officier
de l’état civil est compétent pour recevoir la déclaration de maternité dès
l’instant où il est territorialement compétent. Le lieu de naissance de l’enfant
n’exerce, à ce sujet, aucune influence. C’est l’interprétation de l’alinéa 2 de cet
213
Art. 596 al.1 CF.
214
Art. 127 CF.
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189
article qui dispose la déclaration ‘‘est faite devant l’officier de l’état civil, qui
l’inscrit dans l’acte de naissance ou en dresse un acte séparé’’ sans préciser qu’il
s’agisse nécessairement de l’officier de l’état civil du lieu de naissance de
l’enfant. Et selon l’article 128 du code de la famille, lorsque la déclaration a été
faite séparément de la déclaration de naissance, elle est inscrite en marge de
l’acte de naissance de l’enfant.
Par ailleurs, du caractère essentiellement personnel de la déclaration, il découle
des exceptions aux règles relatives à la capacité juridique. Ainsi, la déclaration de
maternité peut être faite même si la mère est incapable. La loi ne vise pas
nécessairement ici le cas de la minorité de la mère, il faut considérer également
les hypothèses de mère majeure incapable. Même incapable, la mère agit seule.
Comme tout aveu, la déclaration de maternité lie celui dont elle émane : c’est le
caractère irrévocable de la déclaration (art. 598 CF). Cependant, cette
déclaration peut être attaquée par le mode normal établi par la loi pour la faire
tomber à savoir l’action en recherche de maternité (voy. infra).
Enfin, il y a lieu de noter qu’un enfant peut faire l’objet de déclaration de
maternité, même après son décès (art. 599 CF). La loi ne se préoccupe pas du
mobile qui inspire l’auteur de cette déclaration posthume, quand bien même il y
a reconnaitre que dans certaines hypothèses les déclarations de maternité après
décès peuvent s’inspirer uniquement d’un sentiment de cupidité de leur auteur :
échapper aux charges de maternité et profiter cependant de la succession de
l’enfant.
3. Etablissement de la filiation maternelle par la recherche de maternité
(action en recherche de maternité)
Le plus souvent, la filiation est établie sans intervention judiciaire : l’intéressé est
à mesure de convaincre directement celui à qui il s’adresse, par exemple en
produisant une copie de son acte de naissance. Mais quelquefois la
démonstration de la filiation doit se faire en justice. Il en est ainsi dans le cas de
l’action en recherche de maternité, qui est en réalité une action en réclamation
d’état. Lorsque la filiation maternelle n’est pas établie par les deux modes
examinés précédemment, un enfant peut intenter une action en recherche de
maternité (art. 600 CF modifié). L’enfant sera dans ce cas tenu de prouver la
maternité en établissant qu’il est celui dont la mère prétendue a accouché en
recourant aux modes de preuve prévus par la loi et dont l’étude s’impose
désormais.
B. L’administration de la preuve de la filiation maternelle
La filiation maternelle peut être prouvée soit par l’acte de naissance, soit par la
possession d’état d’enfant, soit enfin par témoins, précise l’article 600 du Code
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190
215
Art. 596 al. 2 CF.
216
Quant à la définition de ce concept. Cf. Infra. Possession d’état d’enfant par rapport à la mère.
217
Art. 633 al. 2 CF
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191
218
Exposé des motifs du code de la famille.
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193
e. Types d’affiliation
On peut distinguer grosso modo deux types d’affiliation. Il y d’une part
l’affiliation devant l’officier de l’état civil et c’est le principe. A côté, il y a
l’affiliation judiciaire.
219
Quant à la définition de ce concept. Cf. Infra. Possession d’état d’enfant par rapport à la mère.
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196
220
Exposés généraux et commentaires analytiques des articles du Code de la famille, p. 268, inédit.
221
Selon cet article, on entend par commencement de preuve par écrit, tout acte par écrit qui est émané de
celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu’il représente, et qui rend vraisemblable le fait
allégué.
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197
père de l’enfant (art. 607 CF). Enfin, la contestation de paternité n’est pas
recevable s’il est établi que l’enfant a été conçu par voie d’insémination
artificielle, a avec le consentement écrit du mari (art. 609 CF).
6. Tribunal compétent
Le tribunal compétent est celle du lieu de résidence de l’enfant (art. 613 CF). Ce
tribunal est également compétent pour connaitre de l’action en recherche de
paternité.
§3. Du statut juridique de l’enfant dont la filiation paternelle n’a pu être établie
Lorsque la filiation paternelle d’un enfant né hors mariage n’a pu être établie, le
tribunal, à la demande de l’enfant, de sa mère ou du ministère public, désigne le
père juridique parmi les membres de la famille de la mère de l’enfant ou à défaut
de ceux-ci, une personne proposée par la mère de l’enfant (art. 649 al. 1 CF).
De même, lorsque la déclaration unilatérale d’affiliation faite par le père seul est
contestée par la mère de l’enfant ou les membres de la famille maternelle de
l’enfant devant le tribunal et que le tribunal fait droit à la demande des parties
impliquées qui contestent cette paternité, il (le tribunal) désigne le père
juridique de l’enfant parmi les membres de la famille de la mère (art. 624 al. 2 ).
Dans ce cas, le père juridique exerce vis-à-vis de l’enfant toutes les prérogatives
résultant de la filiation et en assume les devoirs.
§4. Effets de la filiation maternelle et/ou paternelle
Tous les enfants, dispose l’article 645 du code de la famille, ont les mêmes droits
et devoirs dans leurs rapports avec leurs père et mère. Aussi, ces derniers ont-ils
l’obligation de les nourrir, entretenir et les élever (art. 648 CF). Quel que soit son
mode d’établissement, la filiation produit ses effets dès la conception de
l’enfant. Cependant, l’enfant d’un seul conjoint dont la filiation a été établie
pendant le mariage ou dont la filiation, établie avant le mariage n’a pas été
révélée à l’autre conjoint, ne peut être introduit dans la maison conjugale
qu’avec le consentement de ce dernier.
Section 2. De la filiation adoptive dans le code de la famille
Après avoir suivi à travers l’histoire l’évolution de la filiation adoptive (§1), il sera
question tour à tour de définir cette institution (§2), de donner sa nature et sa
finalité en droit congolais (§3), de dire un mot sur le type d’adoption organisé en
droit congolais (§4), de donner ses conditions de fond (§5), de dire un mot sur sa
procédure (§6) et enfin d’analyser ses effets (§7) ainsi que la question de sa
nullité ou de sa révocabilité (§8)
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199
222
Le Petit Larousse illustré, Larousse, 1991, p. 171.
223
M. VERSTRAETE, Droit civil du Congo Belge. Les personnes et la famille, Maison Ferdinand Larcier,
Bruxelles, 1956, p. 64.
224
P. ARMIJON, Traité de droit comparé, Monscrhétien, Paris, 1995, p. 65.
225
M. VERSTRAETE, op. cit., p. 465.
226
Exposé des motifs du Code de la famille.
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
200
230
Obligation alimentaire vis-à-vis de le ses ascendants de la famille d’origine prévue à l’article 689 al. 2 CF.
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202
2016, l’adoption internationale d’un enfant congolais ne peut être autorisée qu’à
destination de l’Etat avec lequel la République démocratique du Congo est liée
par une Convention internationale en matière d’adoption au moment de la
décision judiciaire.
B. La phase administrative
L’adoption est un acte de l’état civil. Aussi l’article 675 du code de la famille
prévoit-il que dans le délai d’un mois à compter du jour où la décision n’est plus
susceptible de voie de recours, le ministère public près la juridiction qui l’a
prononcée ou le greffier du tribunal de paix doit faire injonction à l’officier de
l’état civil du domicile de l’adopté, en vue de transcrire le dispositif du jugement
sur les registres. Il est dès lors porté mention en marge de l’acte de naissance de
l’adopté et une copie de l’acte d’adoption est délivrée aux adoptants et à
l’adopté. Et ce n’est que lorsque la décision de l’adoption est ainsi transcrite
qu’elle produit ses effets vis-à-vis des tiers (art 676 al 2 CF).
§7. Effets de l’adoption
On peut distinguer entre les effets quant aux personnes et les effets quant aux
biens. Mais avant tout, il convient de savoir à partir de quand courent les effets
de l’adoption.
A. Point de départ des effets
Selon 676 du code de la famille, l’adoption produit ses effets à compter du
dépôt de la requête. En effet, l’adoption n’opère pas ex tunc : elle n’a d’effets
que pour l’avenir. Etant donné que la procédure peut se prolonger dans le temps
sans que cela soit dû à la faute des intéressés, le législateur a jugé opportun de
remonter les effets de l’adoption au jour du dépôt de la requête. La réalisation
de l’adoption ne dépend pas par conséquent de son enregistrement. Mais la
transcription de la décision aux registres de l’état civil s’impose comme mesure
de publication. Ainsi, il a été jugé que l’adoption ne sera opposable aux tiers qu’à
partir de la transcription.
B. Les effets quant aux personnes
Création de la filiation artificielle.- A tous égards, l’adopté est considéré comme
l’enfant de l’adoptant, ou l’enfant commun des adoptants en cas d’adoption par
les époux. Il entre dans la famille de l’adoptant (al. 2 de l’art. 677 CF).
Ce principe ne s’applique pas seulement aux rapports personnels entre
l’adoptant et l’adopté, mais aussi à ceux entre l’adopté et la famille de
l’adoptant. C’est ici que réside la grande difficulté par rapport à l’adoption simple
du code civil livre
L’expression ‘‘entrer dans la famille’’ se réfère à une situation juridique plutôt
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
209
qu’à une situation de fait. Elle signifie qu’en vertu de l’adoption, des liens de
parenté se créent entre d’une part l’adopté, d’autre part l’adoptant et les
parents de l’adoptant. Elle ne signifie pas nécessairement que l’adopté doit vivre,
résider auprès des membres de la famille de l’adoptant.
Le nom.- L’adopté peut prendre le nom de l’adoptant. L’adoptant peut
également changer le nom de l’adopté, mais avec son accord si ce dernier est
âgé de quinze ans au moins (art. 63 CF). Ce changement ne peut se faire que
selon les prescrits de la loi, c’est-à-dire par voie judiciaire et dans des conditions
autorisées par la loi.
Le transfert de l’autorité parentale. Puisque le législateur a permis l’adoption
des mineurs, il devait trancher la question de savoir à qui appartiendrait la
charge et le devoir de l’éducation avec les pouvoirs corrélatifs. Le législateur
comprit que l’adoptant ne serait porté à accomplir sa mission sur l’adopté
mineur que s’il n’avait pas à craindre un partage d’influences et des conflits
d’autorités. Aussi, l’article 688 du code de la famille prévoit-il que l’adoptant est
investi de l’autorité parentale à l’égard de l’adopté. Toutefois, les père et mère
de l’adopté peuvent demander conjointement au tribunal que l’enfant soit
replacé sous leur autorité. La demande seule si l’autre est décédé, interdit ou
déclaré absent ou s’il est légalement inconnu (al. 3 de l’art. 688 CF).
Il nous semble toutefois que le droit de garde des parents adoptifs n’exclut pas le
droit de visite des parents véritables. Ce dernier droit ne saurait être refusé ou
limité strictement que si les circonstances de l’adoption, comme la conduite
habituelle des parents originels, révélaient soit une absence d’affection, soit une
insuffisance de moralité, permettant de craindre que des rapprochements
fréquents n’aient pour les enfants de fâcheuses conséquences.
Les empêchements au mariage. Le mariage est interdit entre l’adopté, son
conjoint et ses descendants d’une part, et leurs parents et alliés tant originels
qu’adoptifs d’autre part (art. 687 CF). Il l’est aussi particulièrement entre
l’adoptant et l’adopté (art. 353 al. 4 CF). Cette interdiction est absolue en ce sens
que la loi n’admet pas les dispenses comme c’est le cas dans certaines
législations. Cette interdiction se justifie par des motifs de convenance par suite
du respect et des égards que doivent témoigner l’adopté et ses descendants à
l’adoptant, à ses descendants ainsi qu’à son conjoint.
Absence de liens entre l’adoptant et la famille de l’adopté.- L’adoption signifie
un accroissement de liens familiaux pour l’adopté. Pour l’adoptant elle se traduit
exclusivement par l’accession au statut de père ou de mère par rapport à
l’adopté. Le risque est voir, surtout, eu égard à la mentalité congolaise de
concevoir l’adoption comme une véritable alliance entre deux familles, ce qu’elle
n’est pas en réalité. Voilà pourquoi à l’article 680 du code de la famille, le
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
210
législateur a prévu que l’adoption n’entraine aucun rapport civil entre l’adoptant
et la famille d’origine de l’adopté.
Obligation alimentaire (art. 689 CF).-L’adopté, son conjoint et leurs descendants
peuvent demander des aliments à la famille d’origine de l’adopté lorsque la
famille adoptive est hors d’état de les fournir. De même, l’adopté et sa famille ne
doivent des aliments à la famille d’origine de l’adopté que si les membres de la
famille d’origine sont incapables d’aider leur parent ou allié indigent.
La nationalité.- La matière de la nationalité nous l’avons vu232, est actuellement
régie par la loi n° 04/024 du 12 novembre 2004. Selon l’article 17 de cette loi,
l’enfant mineur (étranger) légalement adopté par un congolais acquiert de plein
droit la nationalité congolaise. Ceci est une conséquence de l’article 25 de la loi
de 2004 précitée qui dispose que : ‘‘l’enfant âgé de moins de dix-huit ans dont
l’un des parents acquiert la nationalité congolaise devient Congolais de plein
droit’’. L’article 17 prévoit en réalité trois hypothèses d’acquisition de la
nationalité congolaise par adoption. Peut acquérir la nationalité par l'effet de
l'adoption: l’enfant mineur légalement adopté par un congolais, l'enfant mineur
dont le parent adoptif est devenu congolais ou encore l'enfant mineur dont le
parent adoptif a recouvré volontairement la nationalité congolaise.
C. Effets quant aux biens
Vocation successorale de l’adopté. Le cumul des liens familiaux est appliqué sans
réserve quant aux droits héréditaires de l’adopté : il hérite tant dans sa famille
d’origine que dans sa famille adoptive (art. 690 al 1 CF). Cela est conforme aux
dispositions relatives aux successions, particulièrement à l’article 758 du code de
la famille qui mettent les enfants adoptifs sur un même pied que les autres
enfants du de cujus.
Vocation successorale de la famille d’origine de l’adopté sur ses biens.- En ce
qui concerne l’héritage laissé par l’adopté lui-même, le problème est délicat.
Le législateur semble n’avoir pas pris position que s’agissant du cas où lors de
son décès l’adopté n’a pas laissé d’héritier et n’a pas été marié. En effet, selon
l’alinéa 2 de l’article 690 CF, à défaut des dispositions entre vifs ou
testamentaires, la succession de l’adopté, dans la mesure où elle ne revient ni à
ses descendants ni à son conjoint, se divise en deux parts égales entre la famille
d’origine et la famille adoptive.
Le législateur semble n’avoir pas pris clairement position lorsque l’adopté, en
mourant, a laissé les héritiers des différentes catégories dans les deux familles:
sa famille d’adoption et sa famille d’origine. On peut dans cette hypothèse se
poser la question de savoir : qui sont les parents de l’adopté qui forment le
232
Cf. supra, la nationalité.
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211
TITRE III
DE LA PARENTE, DE L’ALLIANCE, DE L’AUTORITE
DOMESTIQUE ET DE L’OBLIGATION ALIMENTAIRE
En trois chapitres nous examinerons la parenté et l’alliance (chapitre I), l’autorité
domestique (chapitre II) et l’obligation alimentaire (chapitre III).
CHAPITRE I
DE LA PARENTE ET DE L’ALLIANCE
La parenté fera l’objet de la première section et l’alliance sera étudiée dans la
deuxième section. Ces deux notions consacrent une nouvelle conception de la
famille congolaise qui n’est ni la famille nucléaire qui repose sur l’individualisme
et l’égoïsme, ni la famille traditionnelle qui favorise le parasitisme.
Le législateur est arrivé ainsi à dégager diverses catégories de parenté. Le
premier type de parenté résulte de la parenté d’origine à laquelle s’ajoute la
filiation purement civile (paternité juridique et adoption).
Section 1. La parenté
La notion de la parenté sera examinée (§1) avant la question de sa preuve (§2) et
de ses effets (§3).
§1. Notion
Le mot parenté signifie qui se rapporte à des parents. Et le mot parent vient du
verbe latin parere, produire, engendrer et spécialement du mot latin parens,
parentem : qui a mis au monde. Dans l’origine, le mot parent ne comprenait que
le père, la mère et les ascendants ; mais depuis, ce mot a reçu un sens plus
étendu : on désigne aujourd’hui sous le nom de parents, tous les individus qui
sont unis à la famille.
La parenté désigne ainsi un lien de sang existant entre personnes descendant les
unes des autres (parenté directe, exemple : père et fils) ou d’un auteur commun
(parenté collatérale, exemple : frère et sœur). En droit congolais, la parenté
résulte de la filiation d’origine mais également de la paternité juridique et de la
filiation adoptive. Les filiations successives forment une parenté.
Sont ainsi parents en ligne directe les personnes qui descendent les unes des
autres. La descendance s’établit en suivant le cours des générations,
l’ascendance, en le remontant. Les ascendants du côté du père forment la ligne
paternelle et ceux du côté de la mère la ligne maternelle. Sont parents en ligne
collatérale les personnes qui descendent d’un auteur commun, sans descendre
les unes des autres ; les collatéraux par le père sont dits consanguins, par la
mère, utérins. Sont germains, les collatéraux qui ont une double parenté par le
père et par la mère.
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214
La ligne patrilinéaire est constituée par tous ceux qui descendent d’un ancêtre
commun exclusivement en ligne masculine ; la ligne maternelle est constituée
par tous ceux qui descendent d’une aïeule commune exclusivement en ligne
féminine.
La parenté est bilatérale lorsqu’aucune distinction n’est faite entre lignes
matrilinéaire et matrilinéaire.
La proximité de la parenté se calcule en degré ; chaque degré correspond à une
intervalle entre deux générations dans la ligne de parenté (art. 698 al. 1 CF).
§2. Preuve de la parenté.
La preuve de la parenté se fait conformément aux dispositions relatives à l’état
civil. Toutefois, lorsque l’état des personnes n’est pas en cause, une parenté
ancienne, qui ne peut être établie par des preuves régulières impossibles à
réunir, peut se prouver par tous moyens (art. 702 CF). Cette preuve peut être
exigée notamment pour hériter du de cujus en qualité d’héritier de la quatrième
catégorie (art. 762 CF).
En des termes simples, la preuve de la parenté est faite par les actes de l’état
civil. Puis que la parenté coïncide avec la filiation, ou bien est formée par
l’addition de plusieurs liens de filiation, il est normal qu’elle soit prouvée de la
même façon que la filiation, c’est-à-dire à l’aide des actes de l’état civil. Mais
comme il peut être difficile à réunir les actes de l’état civil nécessaires pour
prouver une parenté qui peut être assez éloignée, le législateur a admis la preuve
de la parenté par tous les moyens uniquement lorsque l’état des personnes n’est
pas en cause.
§3. Limitation des effets de la parenté
L’article 703 du code de la famille limite les effets quelque peu excessifs de la
parenté et facilite la vie juridique en écartant du groupe familial les parents trop
éloignés. Cet article limite en principe les effets jusqu’au sixième degré inclus en
ligne collatérale.
Notons cependant par exemple, dans le cas des dispositions relatives aux
successions, la quatrième catégorie des héritiers est constituée à défaut
d’héritiers des trois catégories précédentes de toute personne qui a un lien de
parenté avec le de cujus et dont le lien a été reconnu par le tribunal de paix (art.
762 CF).
Section 2. De l’alliance
La notion de l’alliance sera examinée (§1) avant la question de son établissement
(§2), de la double alliance (§3), de sa preuve et de ses effets (§4) ainsi que celle
de la fin de l’alliance (§5).
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215
§1.Notion
La notion d'alliance n'est pas expressément définie dans le code de la famille. En
droit de la famille, l'alliance peut être entendue comme un lien sacré entre deux
familles ou entre deux groupes ethniques, qui est fondé sur un ou plusieurs
mariages et qui fait entrer des personnes et leur descendance dans la parenté
réelle ou fictive d'une autre famille233.
§2. Etablissement de l’alliance
L’article 704 du code de la famille dit que l’alliance nait du mariage. Cela signifie
que par exemple le concubinage ne peut créer l’alliance.
§3. Double alliance.
Selon l’article 706 du code de la famille, les liens d’alliance sont définis de façon
large qu’en droit occidental. Sont considérés comme alliés au point de vue
juridique, non seulement les parents du conjoint et les conjoints des parents des
alliés. Une pareille définition large de l’alliance est conforme aux conceptions
africaines en la matière. Cela signifie que les devoirs de l’alliance devront être
observés envers un groupe très considérable des personnes.
§4. Preuve et effets de l’alliance
A. Preuve
La preuve de l’alliance est fournie à l’aide des registres de l’état civil.
B. Limitation des effets de l’alliance
Les considérations émises plus haut en ce qui concerne la limitation des effets de
la parenté à un certain nombre de degrés, valent tout autant pour l’alliance (art.
710 CF), puisque les dispositions aux successions accordent aux alliés des droits à
l’héritage.
§5. Fin de l’alliance
Si le lien d’alliance nait du mariage, le sort de l’alliance n’est pas lié à celui-ci. Le
législateur a, en effet, décidé que l’alliance subsiste en ligne directe et en ligne
collatérale malgré la dissolution du mariage (art. 711 CF). Cette solution s’inspire
du droit traditionnel où ni le divorce ou ni le décès de l’époux qui crée l’alliance
ne mettent fin à l’alliance.
233
Dans le langage courant, on appelle aussi alliance le nom de la bague ou de l’anneau que se donnent les
époux lors de la cérémonie de mariage; elle se porte à l'annulaire gauche.
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216
CHAPITRE II
DE L’AUTORITE DOMESTIQUE
Deux sections composent ce chapitre qui traite respectivement de la justification
de l’autorité parentale (section 1) et du régime de cette autorité (section 2).
Section 1. Justification de l’autorité domestique
Il s’agit sur ce point de répondre à la question suivante : pourquoi organiser
l’autorité domestique à côté de l’autorité parentale qui existe déjà ?
La justification de cette institution est donnée dans l’exposé des motifs du code
de la famille : ‘‘La réalité de tous les jours nous apprend que certains membres
influents et ayant une vie plus ou moins aisée, se trouvent en fait à la tête d’une
partie de leur famille, sans que la coutume leur reconnaisse des pouvoirs sur ceux
qui dépendent en réalité d’eux, vivent dans leur entourage et comptent
spécialement sur eux pour résoudre leurs problèmes quotidiens. Aussi, le
législateur a-t-il cru indiqué d’introduire dans le nouveau code civil la notion de
l’autorité domestique. En effet, il est normal que celui qui en fait joue le rôle de
dirigeant d’un groupe ait, en vertu de la loi, une autorité à l’égard des membres
de celui-ci’’.
Section 2. Le régime de l’autorité domestique
Il s’agit de déterminer le titulaire et les sujets de l’autorité domestique (§1) avant
de dire un mot sur le contenu de cette autorité (§2).
§1. Les sujets de l’autorité domestique
A. Les sujets de l’autorité domestique
Le législateur prescrit les conditions pour être sujet de l’autorité domestique :
vivre en ménage commun et être membre du ménage (art. 712 CF).
Le terme ménage est défini à l’article 700 du code de la famille désigne les
époux, leurs enfants non mariés à charge ainsi que tous ceux envers qui les
époux sont tenus à une obligation alimentaire, pourvu que ces derniers
demeurent régulièrement dans la maison conjugale et soient inscrits au livret de
ménage.
B. Le titulaire de l’autorité domestique
La titularité de l’autorité domestique appartient à celui qui est le chef du ménage
en vertu de la loi c’est-à-dire le mari investi de certains pouvoirs dans le cadre de
la petite famille ou ménage.
Le chef de famille n’est pas nécessairement le plus âgé du groupe familial. Il peut
aussitôt être même le plus jeune. Il peut ainsi avoir sous son autorité des
personnes plus âgées que lui. En somme, l’autorité domestique appartient à celui
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
218
234
La responsabilité aquilienne trouve ses origines dans la lex Aquilia, qui sanctionnait à Rome le damnum
injuria datum : le dommage causé injustement. Elle est aussi appelée responsabilité délictuelle, quasi-
délictuelle ou extra-contractuelle. Elle repose sur le principe suivant: toute personne qui, par sa faute, cause
un dommage à autrui est tenue de le réparer. Ainsi, quiconque subit un dommage et désire obtenir
réparation auprès de la personne responsable devra nécessairement apporter la preuve de trois éléments:
l'existence d'une faute imputable à cette personne, l'existence d'un dommage, l'existence d'un lien de
causalité entre la faute et le dommage. Le principe qui régit la responsabilité extra-contractuelle est donc la
faute. La responsabilité aquilienne est, avec la responsabilité contractuelle, une des deux parties de la
responsabilité civile.
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CHAPITRE III
DE L’OBLIGATION ALIMENTAIRE
Trois sections composent ce chapitre et traitent d’abord de la définition de
l’obligation alimentaire (section 1), ensuite de l’obligation alimentaire légale
(section 2) et enfin de l’obligation alimentaire conventionnelle (section 3).
Section 1. Notion de l’obligation alimentaire
On appelle ‘‘obligation alimentaire’’ l’obligation réciproque que la loi établit
entre certaines personnes, en vertu de laquelle celle de ces personnes qui tombe
dans le besoin peut réclamer à l’autre des aliments, c’est-à-dire tout ce qui est
nécessaire pour une personne dans le besoin.
L’obligation alimentaire est donc cette obligation que la loi (elle peut également
l’être par convention) impose de venir en aide, sur le plan matériel, à autrui dans
un état de nécessité. Elle est l’expression de la solidarité familiale.
Nous avons déjà rencontré plusieurs institutions qui reflétaient cette idée. On
observe, en réalité, que la même institution se développe sous une terminologie
souvent variée. Il en est ainsi du devoir de secours ou de la contribution aux
charges du ménage entre les époux, du devoir d’entretien des enfants à l’égard
de leurs enfants. Mais le code de la famille, en dehors des hypothèses précises
qui viennent d’être rappelées et qui ont été étudiées à propos de chacune des
institutions auxquelles elles se rapportent, a établi une sorte de droit commun
de l’obligation alimentaire. C’est ce droit commun qui constitue l’objet de ce
point.
La loi distingue entre l’obligation alimentaire légale et conventionnelle (art. 721
al. 2 CF).
Section 2. Obligation alimentaire légale
Seront examinés tour à tour dans cette section les conditions d’existence de
l’obligation alimentaire (§1), la façon dont elle est exécutée (§2), la question de
sa fixation (§3), les techniques de son recouvrement (§3), le contenue de la règle
‘‘les aliments n’arréragent pas ‘’(§5), les caractères de l’obligation alimentaire
(§6) et enfin la question de la prescription des actions en matière des pensions
alimentaires (§7).
§1. Conditions d’existence de l’obligation alimentaire
Deux conditions président à l’existence de l’obligation alimentaire légale : d’une
part le lien de famille (A) et d’autre part l’état de ressources des personnes
impliquées (B).
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220
3ÈME PARTIE
DE LA CAPACITE
Toute personne, physique ou morale, ayant la personnalité juridique, est, en
principe, pleinement capable, tant sur le plan de la capacité de jouissance que
sur le plan de la capacité d’exercice. ‘‘La capacité est la règle, l’incapacité est
l’exception’’. Cet adage impose une interprétation stricte des textes visant les
incapacités.
Mais ce principe de la capacité comporte des exceptions, peu nombreuses dans
le domaine de l’acquisition des droits (incapacités de jouissance), beaucoup plus
importantes dans celui de leur exercice (incapacités d’exercice). Ces exceptions
concernent, comme nous le verrons plus loin, le mineur, les majeurs aliénés
interdits, les majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblis par l’âge ou infirmes
placés sous curatelle ainsi que la femme mariée.
Notion de la capacité. Toutes les personnes humaines sont, en principe, égales
en droit. Elles ont en effet toutes l’aptitude à posséder les divers droits privés et
à les exercer. On peut définir la capacité comme une aptitude définie par la loi
de conclure un acte juridique valable ayant pour conséquence d’engager la
responsabilité de celui qui le souscrit dans le cas où il n’exécuterait pas les
obligations mises à sa charge par le contrat et, en conséquence, engage son
patrimoine.
L’article 23 du Code civil livre III pose le principe selon lequel : ‘‘toute personne
peut contracter si elle n’est pas déclarée incapable par la loi’’. Dès lors, pour
déclarer une personne incapable, il faut un texte formel et de stricte
interprétation. La capacité constitue donc la règle. Exceptionnellement
néanmoins, des individus peuvent se trouver privés de certains droits ou de leur
exercice. On dit alors qu’ils sont incapables ou frappés d’incapacité.
La capacité juridique d'une personne physique étant l'aptitude de cette personne
à exercer ses droits et obligations, elle englobe d'une part la capacité d'exercice,
et d'une autre part la capacité de jouissance.
Classification des capacités. Classification principale. On distingue généralement
entre la capacité de jouissance et la capacité d’exercice.
(suite) La capacité de jouissance. La capacité de jouissance est l'aptitude à être
titulaire d'un ou plusieurs droits. L'attribution de la personnalité juridique pose la
question de savoir si la personne est elle-même capable d'exercer ses droits. On
doit justement admettre pour les personnes physiques, que l'acquisition de la
personnalité juridique ne conduit pas dans un premier temps, à reconnaître la
capacité de jouissance.
Ainsi, les mineurs sont bien sujets de droit, et ce, depuis leur naissance, mais on
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228
les dit incapables parce qu'ils n'ont pas durant le temps de leur minorité,
l'aptitude juridique à exercer eux-mêmes les droits qu'ils détiennent.
(suite) La capacité d'exercice. La capacité d’exercice est l'aptitude à exercer soi-
même un droit que l'on détient, sans avoir besoin d'être représenté ni assisté par
un tiers. Cette capacité d'exercice suppose d'avoir la personnalité juridique.
L'inverse n'est pas vrai. La reconnaissance de la personnalité juridique ne conduit
pas à reconnaître automatiquement la capacité d'exercer soi-même des droits
qu'on est apte à détenir. Il se peut qu'une personne dotée de la capacité
d'exercice se la voie retirer, sans qu'elle perde pour autant la personnalité
juridique.
(Suite) Autres classifications. La doctrine a voulu distinguer plusieurs sortes
d’incapacités parmi lesquelles on peut citer : l’incapacité de jouissance et
l’incapacité d’exercice que nous avons examiné précédemment, l’incapacité de
protection et l’incapacité de suspicion ; l’incapacité générale et l’incapacité
spéciale.
L’incapacité de jouissance est l’inaptitude à être sujet de droit et d’obligation, à
acquérir un droit et en jouir tandis que l’incapacité d’exercice est simplement, un
droit étant supposé acquis par le sujet, l’inaptitude à le faire valoir par soi-même
dans la vie juridique. L’incapacité de jouissance contient donc l’incapacité
d’exercice correspondante, mais la réciproque n’est pas vraie et il est courant
que l’on ait la jouissance d’un droit sans pouvoir l’exercer.
Mais lorsque l’on parle d’une incapacité de protection pour l’opposer à une
incapacité de suspicion, c’est le fondement de l’incapacité qui est visé. Dans le
premier cas, on institue une incapacité pour protéger un individu aussi bien
contre lui-même que contre les tiers, dans le second la défiance que la société
éprouve à l’égard d’une personne conduit à la frapper d’une incapacité.
L’incapacité qui affecte une catégorie de personnes (par exemple : les mineurs,
les aliénés, etc.) est dite générale car, à quelques exceptions près, elle vise tous
les actes que pourraient effectuer ces personnes. En revanche, à partir du
moment où une incapacité s’analyser en incapacité d’effectuer uniquement tel
ou tel acte précis, on se trouve en présence d’une incapacité spéciale.
Les techniques de protection des incapables. La protection des incapables est
assurée en plaçant à côté d’eux une personne ayant pour mission de veiller à
leurs intérêts. Le régime d’intervention de cette personne capable varie selon
l’étendue de l’incapacité du protégé. Aussi, le législateur a prévu trois procédés
de protection à savoir : la représentation, l’assistance et l’autorisation.
(Suite) La représentation.- La représentation est une technique par laquelle une
personne appelée représentant passe un acte juridique au nom et pour le
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229
compte d’une autre personne de telle sorte que tous les effets de l’acte accompli
se produisent directement et uniquement sur la tête du représenté. En tant que
telle, elle consiste à dessaisir l’incapable de l’exercice de ses droits pour le
confier à un tiers qui agit pour son compte. L’incapable disparait en quelque
sorte de la scène juridique.
(Suite) L’assistance- L’assistance consiste à faire intervenir une personne
capable dans la passation d’un acte juridique. L’incapable reste apte à passer
pour son compte les actes juridiques. Mais il ne peut les accomplir valablement
qu’avec l’assistance d’une autre personne ayant pour mission de le surveiller.
C’est l’incapable qui agit mais avec la présence à ses côtés d’un assistant appelé
curateur dont le rôle ne se limite qu’à assister l’incapable, à lui prêter son
concours en donnant ou en refusant son consentement aux actes que ce dernier
veut passer. En cela, l’assistance se distingue de l’autorisation.
(suite) L’autorisation.- L’autorisation consiste dans l’assentiment que l’incapable
reçoit d’avance et une seule fois, de la part de son protecteur, pour un acte ou
pour toute une opération. L’incapable agit seul et peut aussi être seul au
moment où il passe l’acte. Cependant, il doit au préalable obtenir l’approbation
de son protecteur.
Plan de la partie. La loi distingue deux sortes des incapables. Il y a d’une part les
incapables mineurs (titre I) et d’autre part les incapables majeurs (Titre II).
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230
TITRE I
LES INCAPABLES MINEURS
Transiger, vendre, céder, acheter, donner, louer, aliéner, emprunter, renoncer à
un droit…sont des activités juridiques importantes dont l’accomplissement
présente parfois des dangers sur le patrimoine de celui qui les accomplit.
Raison pour laquelle le législateur a décidé d’en réserver l’accès uniquement
aux personnes qui sont en mesure de comprendre raisonnablement la portée
des actes qu’elles posent. Durant sa minorité, l’enfant reste donc sous l'autorité
de ses parents jusqu'à sa majorité. C’est ce qu’on appelle l’autorité parentale
(Chapitre 1).
Le législateur soumet de ce fait le mineur non émancipé à une condition
juridique particulière (Chapitre 2).
CHAPITRE 1ER
DE L’AUTORITE PARENTALE
A défaut de justifier d’une maturité avérée, l’enfant est soumis à un régime de
protection (section 1), sous l’autorité de ses parents dont les règles sont
organisées par la loi (section 2), assorti d’une incapacité d’exercice qui
l’empêche de mettre en œuvre seul des droits dont il est pourtant titulaire.
Parfois, cette autorité est exercée par voie de représentation par les mécanismes
de tutelle ou de délégation de l’autorité parentale (section 3).
Section 1. La protection, fondement de l’incapacité des mineurs
Avant de donner la justification de la protection des mineurs (§2), il sied d’abord
de circonscrire la notion de minorité en droit congolais (§1).
§1. De la minorité
Le concept minorité sera d’abord défini (A) avant de dire un mot sur la preuve de
la minorité (B).
A. Définition du concept mineur
Le mineur est défini comme l’individu de l’un ou de l’autre sexe qui n’a pas
encore atteint l’âge de dix-huit ans accomplis235.
L’on ne peut parler du concept mineur sans faire allusion à celui d’enfant, et sans
voir s’ils sont différents ou non. Le mot enfant possède en effet un double sens ;
le Vocabulaire juridique Capitant en donne une première définition, dans son
sens large, en définissant l’enfant comme un descendant au premier degré, fils
ou fille, sans considération d’âge.
235
Articles 219 du code de la famille et 388 du C. Civil Français.
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231
L’enfant est alors caractérisé par le lien de filiation qui le relie à une autre
personne d’une autre génération, indépendamment de son âge236. Vu sous cet
angle, l’enfant est défini uniquement par rapport à la place qu’il occupe au sein
du groupe familial. C’est cette même définition que le législateur congolais a
consacré à l’article 699 de la loi n° 10-87 du 1er août 1987 portant code de la
famille, qui définit l’enfant comme toute personne liée par le lien de filiation au
père et à la mère. Dans cette conception on est enfant, non pas en raison de son
âge, mais plutôt par le seul fait de sa filiation à l’égard de ses géniteurs.
Comme tout être humain, le mineur est doté dès sa naissance des droits dont il
jouit. Mais à cause de son état de faiblesse il ne peut assumer ses devoirs et
responsabilités de la vie sociale et juridique, et il est de ce fait frappé d’une
incapacité d’exercice. Il ne peut exercer seul les droits dont il est titulaire.
L’article 215 du Code de la famille à son al. 1er énumère le mineur au premier
rang des personnes déclarées incapable, à côté des majeurs aliénés interdits, des
majeurs faibles d’esprit, des majeurs prodiges, des majeurs affaiblis par l’âge ou
infirmes placés sous curatelle. Les mineurs émancipés ont de leur côté une
incapacité d’exercice limitée, dépendante du type d’acte juridique qui doit être
posé. Pour d’autres actes juridiques, ils sont traités de la même façon que les
mineurs non émancipés.
B. Preuve de la minorité
La preuve de la minorité, en droit congolais, est faite par l’acte de naissance de la
personne dite mineur. Cet acte est établi par un officier de l’état civil sur
demande des parents à la naissance de leur enfant. Cet acte constitue la preuve
par excellence de la minorité d’un individu car les registres, copies et extraits de
l’état civil sont dotés d’une force probante particulières puisqu’ils font foi jusqu’à
inscription en faux237. Il faut cependant préciser qu’il y a certains éléments qui
constituent un début de preuve en droit lorsque l’on ne peut établir l’acte de
naissance de l’enfant dit mineur ou qu’il n’y a pas un autre moyen de preuve.
C’est au juge de décider si les éléments présentés devant lui constitue un début
de preuve ou s’ils peuvent avoir force probante devant une juridiction. Une fois
la minorité établie, l’acte de naissance a force probante jusqu’à son inscription
en faux par la partie qui en invoque la fausseté.
§2. Justification de la protection des mineurs en droit congolais
L'article 219 du Code de la famille fixe la majorité à 18 ans et dès lors donne la
capacité pour tous les actes de la vie civile. Est donc mineur toute personne âgée
de moins de 18 ans révolus. L'article 317-1 du Code de la famille dispose que les
236
Ph. BONFILS et A. GOUTTENOIRE, Droit des mineurs, Dalloz, 2008, p. 493.
237
Fr. TERRE et D. FENOUILLET, Droit civil. Les personnes, la famille, les incapacités, collection ‘‘Précis’’,
e
Dalloz, 7 éd, 2005, n° 228, p. 217.
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232
243
L. GAREIL, op.cit, 131.
244 er
Art. 244 CC L 1 .
245
Léo 13 novembre 1956, RJCB. , 1957, p. 21 ; Léo, 10 septembre 1957, RJCB., 1957, p. 57.
246 ème
TSHIMANGA MUKEBA, ‘‘Droits et devoirs des parents envers les enfants’’, RJZ, 1980, n° spécial, 50
anniversaire du Président-Fondateur, président de la République, p. 89.
247
P. PIRON & J. DEVOS, op. cit., p. 49.
248 er.
Art. 240 et 248 CCL 1 .
249
Art. 260 al. 2 du décret du 30 juillet 1888 relatif aux contrats ou obligations conventionnelles (Code civil
livre III) : ‘‘Le père et la mère après le décès du mari, sont responsables du dommage causé par leurs enfants
habitant avec eux’’.
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234
250
Dans ce sens, l’art. 317 CF modifié.
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235
251 er
Art. 240 CCL 1 .
252
Perd l’exercice de l’autorité parentale ou en est provisoirement privé celui des père et mère qui se trouve
dans l’un des cas suivants:
1. si un jugement de déchéance ou de retrait a été prononcé contre lui, pour ceux de ses droits qui lui ont
été retirés;
2. s’il est hors d’état de manifester sa volonté en raison de son incapacité, de son absence, de sa disparition,
de son éloignement ou de toute autre cause.
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236
a. L’administration légale
Notion. L’administration légale, il faut bien le souligner tout de suite, ne
concerne que les biens du mineur. Il n’y aurait donc lieu à l’administration légale
que lorsque le mineur sera propriétaire de biens. L’administration des biens du
mineur est qualifiée de ‘‘légale’’ non seulement parce qu’elle est prévue par les
textes, mais encore parce qu’elle prend place sans intervention du juge. De
nombreux cas peuvent être imaginés: un jeune acteur, ou musicien prodige,
reçoit d’importants cachets ; un patrimoine immobilier est reçu par héritage, etc.
Toutefois, la dévolution de l’administration légale, le rôle de l’administrateur
légal et la fin de cette situation obéissent à des règles sur lesquelles il convient
de s’attarder.
La dévolution de l’administration légale. Qui est administrateur légal des biens
d’un mineur ? Telle est la question que l’on se pose ici.
Le but visé étant la protection du mineur, le législateur a pensé que les auteurs
de l’enfant étaient mieux à même de remplir cette fonction. A ce sujet, l’ancien
alinéa 1er de l’article 327 disposait que ‘‘les père et mère ont l’administration et
la jouissance des biens de leur enfant jusqu’à sa majorité ou jusqu’à son
émancipation’’.
Pour prendre en compte l’émancipation judiciaire de l’enfant, le législateur de
2016 a modifié l’article 327 comme suit : ‘‘Sous réserve des dispositions de
l’article 289255 de la présente loi, les père et mère ont l’administration et la
jouissance des biens de leur enfant jusqu’à sa majorité’’.
Le rôle de l’administrateur légal. L’administrateur légal représentera le mineur
dans les actes civils, sauf les cas dans lesquels la loi autorise les mineurs d’agir.
Fin de l’administration légale. L’administration légale est, par définition même,
une situation temporaire dans la mesure où la minorité elle-même l’est. La
majorité constitue ainsi une hypothèse conduisant à la fin de l’administration
légale. L’émancipation de l’enfant qui constituait également une cause de fin de
l’administration légale a été supprimée depuis la réforme de 2016 (nouvel art.
327 al. 2 CF).
255
Le nouvel article 289 CF dispose Le mineur ayant atteint l’âge de quinze ans accomplis peut, dans son
intérêt supérieur, être émancipé par le Tribunal pour enfants, sur requête présentée par ses père et mère
ou, à leur défaut, par le tuteur. Dans cette dernière hypothèse, le conseil de famille est entendu.
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240
b. La jouissance légale
Notion. L’administration légale comprend un corolaire : la jouissance légale par
l’administrateur légal des biens dont il a l’administration jusqu’à ce que le mineur
ait atteint l’âge de dix-huit ans et à son émancipation. C’est là une façon de
récompenser l’administrateur légal des différentes charges qu’il assume. La
jouissance légale s’entend dès lors comme une espèce particulière d’usufruit
conféré par la loi aux père et mère sur les biens personnels de leur enfant
mineur. L’usufruit est un droit réel, par essence temporaire, dans la majorité des
cas viager, c’est-à-dire qui a vocation à durer autant que la vie d’une personne,
qui confère à son titulaire l’usage et la jouissance de toutes sortes de biens
appartenant à autrui, mais à charge d’en conserver la substance.
Tout comme l’administration légale, la jouissance légale est prévue à l’article 327
du code de la famille.
Contrôle de la jouissance légale. En droit congolais, aucune disposition ne
permet au juge un droit de contrôle de la jouissance légale reconnue aux
parents. Les père et mère sont de leur vivant le seul juge des intérêts du mineur
et bénéficient d’une présomption irréfragable d’être les meilleurs protecteurs
des dits intérêts. Ni le juge ni toute autre personne étrangère au couple parental
n’a le droit d’intervenir de son propre gré dans l’administration légale.
L’intervention du juge dans le ménage n’est admis lorsqu’il est saisi, que pour
arbitrer le conflit conjugal et non pour juger les parents ni contrôler la manière
dont ils éduquent et administrent la fortune de leur enfant. Le juge ou le
ministère public ne disposent pas, comme par exemple en droit français, d’une
mission de surveillance générale sur les administrations légales de leur ressort.
Lors même ils sont informés d’une dilapidation de la fortune de l’enfant par les
parents, ou d’une mégestion du patrimoine pupillaire à l’occasion de
l’administration légale, aucune disposition de la loi ne leur reconnait. L’intérêt de
l’enfant ne conduit-il pas à envisager la transposition en droit congolais d’une
disposition similaire à celle du droit français qui reconnaîtrait expressément au
juge et au ministère public un droit de surveillance générale sur les
administrations légales ?
Fin de la jouissance légale. Selon l’article 329 CF modifié, la jouissance légale
prend fin pour l’une de trois causes suivantes : dès que l’enfant à dix-huit ans
accomplis256 par les clauses qui mettent fin à l’autorité parentale ou même plus
spécialement par celles qui mettent fin à l’administration légale et par les causes
qui comportent l’extinction de tout usufruit.
256
L’hypothèse de la cessation plus tôt pour cause du mariage du mineur a été supprimée par la réforme de
2016, du fait de l’interdiction du mariage des mineurs, voy. art. 329 modifié, spécialement le point 1.
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241
257 ème
A WEIL et F. TERRE, Droit civil des personnes, la famille, les incapacités, 5 éd., Dalloz, Paris, 1983, p.
692.
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242
de donner une vie à un enfant. En effet, ces parents en acceptant de faire venir
au monde un autre être, doivent assumer la responsabilité de l’éduquer, de
l’instruire et de conserver ses biens jusqu’au jour de sa majorité. Ainsi, tout
parent qui s’y méconduirait peut écoper des sanctions, comme par exemple la
déchéance de l’autorité parentale.
causés par leurs enfants habitants avec eux’’ ne trouve plus d’application ? La
question est controversée en doctrine. Un jugement du tribunal de première
instance d’Elisabethville260 , estimant que la présomption de faute dans la garde
ne peut être retenue en cas d’émancipation volontaire, mettait le père hors
cause. Nous estimons qu’il y a lieu de faire la part des choses et distinguer selon
que l’enfant émancipé vit ou non avec ses parents. En effet, l’article 260, alinéa
2, du Code civil livre III, est rédigé de façon plus étendue en se limitant à exiger,
pour que la responsabilité des parents soit engagée, que les enfants doivent
habiter avec leurs parents, sans requérir l’état de minorité, sans requérir l’état
de minorité. Cet article met donc l’accent sur cette cohabitation. Dès lors, cette
condition unique de cohabitation étant réalisée, il n’y a plus lieu de tenir compte
de l’état de minorité avec ou sans émancipation. L’article 260, alinéa 2 ne
distingue pas, donc doit s’étendre aux actes accomplis par l’enfant, du moment
qu’il reste, en fait, par la cohabitation sous la dépendance des parents. Par
ailleurs, la doctrine reconnait que si les parents avaient recouru à l’émancipation
dans le seul but de s’exonérer de leur responsabilité civile ou avaient agi
intempestivement ou imprudemment en l’accordant, le tiers lésé pourrait
recourir à l’article 258, livre III pour demander réparation261.
Droits ‘‘lato sensu’’. L’article 292 al. 2 CF qui ne faisait aucune distinction entre
les droits stricto sensu et lato sensu a été modifié. Cet article prévoyait en effet
que ‘‘l’émancipation confère au mineur la pleine capacité’’. Il en découlait que
l’enfant émancipé échappait ainsi à l’exercice de l’autorité parentale. L’actuel
alinéa 1er de l’article 292 précise que ‘‘l’émancipation confère au mineur la
capacité juridique limitée aux actes pour lesquels elle a été accordée’’.
Le mineur émancipé par décision judiciaire ne peut donc passer les actes pour
lesquels il est incapable que représenté par ses père et/ou mère, ou à défaut, par
son tuteur’’ (art. 293 CF modifié).
Quant aux droits patrimoniaux du mineur émancipé
Nous l’avons dit, selon l’article 293 CF modifié, le mineur émancipé par décision
judiciaire ne peut donc passer les actes pour lesquels il est incapable que
représenté par ses père et/ou mère, ou à défaut, par son tuteur’’ (art. 293 CF
modifié).
(Suite) Régime de protection. Incapacité partielle et limitée. L’incapacité du
mineur émancipé est partielle et limitée. Il s’agit seul et librement pour tout ce
qui concerne sa personne. En ce qui concerne ses biens, la capacité devient la
règle et exclut la représentation : le mineur accomplit personnellement tous les
actes, mais pas nécessairement seul car certain actes exigent l’assistance de son
260
Inst. Elis., 21 janv. 1939, R.J., p. 211.
261
M. VERSTRAETE, Droit civil du Congo Belge, Larcier, 1956, p. 569.
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246
262
Infra.
263
P. BONFILS et A. GOUTTENOIRE, Droit des mineurs, Dalloz, Paris, 2008, n°467, p. 259.
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247
264
Nouvel article 319 CF alinéa 2.
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248
représente’’.
L’ancien 222 CF a donc été amendé à deux niveaux :
L’un se justifie sur le plan de la légistique formelle et a consisté à
remplacer la conjonction ‘‘ou’’ par la conjonction ‘‘ni’’ ;
Le deuxième a intéressé le fond et a consisté à affirmer que désormais
tout mineur, émancipé ou non, n’ayant ni père ni mère, doit être pourvu
d’un tuteur. L’émancipation n’est plus une cause de fin de la tutelle265.
Le tuteur doit être une personne capable (art. 223 CF).
Extensions au principe. Le législateur admet également deux autres causes
d’ouverture de la tutelle ordinaire. Il s’agit de l’hypothèse où un parent exerce
seul l’autorité parentale ou celle où la garde de l’enfant est confiée à un tiers
(Suite) Cas d’un parent qui exerce seul l’autorité parentale. Selon les
dispositions de l’article 324 du Code de la famille, l’auteur qui seul exerce
l’autorité parentale s’il se considère incapable, peut demander au tribunal de
désigner un tuteur. Deux conditions sont donc exigées ici, d’une part il faut qu’un
seul des parents exerce l’autorité parentale et d’autre part, ce dernier doit
s’estimer incapable à assurer les prérogatives qui découle de l’autorité parentale.
(Suite) Cas de la garde confiée à un tiers. Si les père et mère sont divorcés ou
séparés de fait, l’autorité parentale est exercée par celui d’entre eux à qui le
tribunal compétent (le mot ‘‘compétent’’ a été ajouté par la réforme de 2016) a
confié la garde de l’enfant, sauf le droit de visite et de surveillance de l’autre.
Lorsque la garde a été confiée à un tiers, les autres attributs de l’autorité
parentale continuent d’être exercés par les père et mère. Toutefois (l’ancienne
formulation de cet article utilisait la conjonction ‘‘mais’’) le tribunal, en désignant
un tiers comme gardien, peut décider qu’il devra requérir l’ouverture d’une
tutelle (art. 325 modifié). En effet, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, le
juge de paix qui a décidé de confier la garde à une tierce personne, peut
également exiger l’ouverture de la tutelle au profit du mineur.
b. Organe habilité à solliciter la tutelle
Principe. En droit congolais, l’initiative de requérir l’ouverture de la tutelle relève
par principe du pouvoir du conseil de famille du mineur. C’est l’organe
légalement chargé de requérir l’ouverture de la tutelle lorsque la situation
familiale du mineur ou mieux son intérêt l’exige. Reste cependant à identifier
l’organe du conseil de famille ou mieux la personne habilitée à saisir le tribunal
aux fins de la désignation du tuteur. Plusieurs possibilités sont envisageables, et
plusieurs personnes peuvent entrer en concours pour assurer cette fonction. Il
265
En ce sens voy. art 236 CF modifié.
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250
en est ainsi notamment du préposé tuteur choisi par les membres du conseil de
famille, du représentant du conseil de famille du mineur concerné, du ministère
public, de toutes personnes siégeant comme membre du conseil de famille du
mineur ou d’un représentant dument mandaté ou délégué par le conseil de
famille. Il arrive donc que les membres du conseil de famille initient
différemment des requêtes devant un même tribunal aux fins de la désignation
d’une même personne. Il y a lieu dès lors de se demander au nom de quel
principe le tribunal serait-il en droit de rejeter une requête au nom d’une autre ?
Exception. Le législateur permet exceptionnellement au parent qui seul exerce
l’autorité parentale de requérir l’ouverture de la tutelle, s’il se considère
incapable d’assumer correctement sa fonction parentale266. Cette procédure
semble la plus usitée dans la pratique. Il résulte que par absence des moyens
matériels, le parent préfère confier la prise en charge de leur enfant mineur à un
membre de la famille qui est financièrement en mesure de s’occuper de leur
entretien et de son éducation. L’application de cette disposition soulève dans la
pratique la préoccupation sur la qualité de la personne légalement admise à
requérir la tutelle. En effet, il ressort de l’article 324 du code de la famille que
seul le parent qui exerce l’autorité parentale est admis à requérir l’ouverture de
la tutelle sur fondement de cette disposition. On comprend ainsi à la lecture de
cette disposition, que l’exercice de ce droit relève de l’apanage du seul parent
biologique qui a l’exercice seul de l’autorité parentale.
2. Les caractères de la tutelle
Il ressort de la définition donnée de la tutelle et des prescrits de l’article 225 du
Code de la famille que la tutelle présente un caractère gratuit, obligatoire,
personnel et définitif.
La tutelle est gratuite en ce sens que le tuteur désigné ne peut réclamer aucun
salaire, aucune compensation, la loi ne prévoyant aucune rémunération ou
indemnité en faveur du tuteur.
Le caractère obligatoire est le corollaire de celui de la gratuité. Le législateur du
Code de la famille a rendu la tutelle obligatoire dans le but d’éviter que chacun
trouve des justifications pour s’y échapper. Ainsi, le tuteur désigné est tenu
d’accepter la charge tutélaire, sauf s’il y a motifs graves, reconnus suffisants par
le tribunal. Le tuteur désigné n’est donc pas libre d’accepter ou de refuser les
charges tutélaires, les possibilités de justification sont strictement limitées.
Le caractère définitif signifie que le tuteur est désigné pour rester en fonction
pendant toute la durée de la tutelle, c’est-à-dire jusqu’à la majorité267.
266
Art. 324 CF.
267
Art. 236, al. 1 CF modifié ; l’émancipation du mineur n’est plus une de cause de fin de la tutelle ordinaire.
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251
Le caractère personnel est le fait que la charge tutélaire n’est déférée qu’au
tuteur lui-même. En cas de déchéance ou en cas de décès, ses héritiers ne
peuvent pas succéder dans cette mission.
3. Les organes de la tutelle
a. L’autorité judiciaire
L’autorité judiciaire est très importante dans l’organisation de la tutelle en droit
congolais. C’est sous son auspice que la tutelle s’organise. Elle est la seule à
disposer du pouvoir de décisions sur l’administration du patrimoine de l’enfant à
tutelle. Le tuteur a le pouvoir d’initier, le conseil de famille de proposer et le juge
de décider268. La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant a
transféré la compétence du tribunal de paix en matière de tutelle au tribunal
pour enfant. C’est ce tribunal qui, désormais est le seul organe habilité à
accorder les autorisations au tuteur pour accomplir les actes dont la validité est
subordonnée au respect de cette formalité269.
Par ailleurs, le Code de la famille permet au tribunal de représenter le mineur et
éventuellement de gérer personnellement son patrimoine. Mission qui semble
étrangère à la fonction traditionnelle du juge qui est celle de dire le droit et non
de gérer. En effet, il ressort de l’article 216 du Code de la famille modifié que
dans tous les cas où les intérêts du tuteur ou de ses parents ou alliés en ligne
directe sont en conflit avec les intérêts de l’incapable, le tribunal pour enfants ou
le tribunal de paix (la modification de cet article a consisté à prendre en compte
le tribunal pour enfants : avant, cette question était uniquement de la
compétence du tribunal de paix), selon le cas, désignera un tuteur spécial ou
remplira lui-même cet office.
Il doit en conséquence passer les actes de gestion intéressant le patrimoine de
l’enfant. Il devient dans ce cas, un organe de gestion. Dans cette mission le
tribunal se trouve secondé par le ministère public.
b. Le conseil de famille
Notion. Le conseil de famille est l’organe habilité à requérir la tutelle. L’article
224 modifié du code de la famille prévoit en effet que ‘‘Le tuteur est désigné par
le tribunal pour enfants ou par le tribunal de paix sur proposition du conseil de
famille’’ (la modification de cet article a consisté à prendre en compte le tribunal
pour enfants : avant, cette question était uniquement de la compétence du
tribunal de paix). Celui-ci s’organise en dehors du circuit judiciaire ; le juge ne
prend pas part à cette assemblée des parents qui regroupe uniquement les
268
Exposé généraux et commentaires analytiques des articles du code de la famille, p. 89.
269
Art. 99 de la loi du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.
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252
Choix du tuteur. Le tuteur qui est choisi soit parmi les plus proches parents de
l’enfant, soit parmi toutes autres personnes susceptibles de remplir cette
mission (art. 224 CF al. 2 modifié) doit être une personne capable (223 CF). Par
ailleurs, le tuteur ne peut refuser sa mission que pour des motifs graves reconnus
suffisants par le tribunal (art. 225 CF).
Permanence de la fonction du tuteur. Le tuteur est désigné, sauf en cas de
déchéance (art. 236 CF modifié), pour toute la durée de la tutelle. Dès qu’il est
désigné, il est sensé assumer ses fonctions personnellement jusqu’à la fin de la
tutelle. Il en résulte que les charges tutélaire ne se transmettent ni se
communiquent à ses héritiers et à son conjoint. Son titulaire est tenu de les
exercer personnellement jusqu’à la majorité de l’enfant, à son émancipation ou à
son décès.
Actes interdits au tuteur. Le tuteur ne peut déléguer l’autorité parentale lui
confiée par la tutelle (art. 320 CF). Le tuteur ne peut ni faire voyager le mineur
plus de trois mois hors du territoire national encore moins passer pour ses biens
aucun acte excédant la simple administration, sans l’autorisation du tribunal
pour enfants, le conseil de famille entendu (art. 231 CF modifié : la modification
a consisté en la suppression autrefois faite au tuteur d’émanciper un mineur
sous tutelle d’une part et d’autre part à l’attribution au tribunal pour enfants la
compétence autrefois reconnue au tribunal de paix). Le pouvoir de simple
administration oblige celui qui détient un bien à faire tous les actes nécessaires à
la conservation de ce bien ou au maintien de l’usage auquel il est normalement
destiné. Le tuteur doit alors agir dans le but de conserver et de maintenir la
valeur des biens du mineur. Le tuteur ne peut donc disposer des biens du mineur
sans avoir obtenu l’autorisation prescrite par la loi.
d. Le tuteur adjoint
L’article 323 modifié dispose qu’en cas de décès de l’un des parents exerçant
l’autorité parentale, le tribunal pour enfants peut, à tout moment, à la requête
soit du représentant du conseil de famille du parent prédécédé, soit du parent
survivant, désigner un tuteur adjoint chargé d’assister l’auteur survivant dans
l’éducation, l’entretien et la gestion des biens du mineur (la modification a
principalement consisté à l’attribution au tribunal pour enfants la compétence
autrefois reconnue en la matière au seul tribunal de paix).
4. Fin de la tutelle
La tutelle prend fin à la majorité de l’enfant (art. 236 CF modifié). Avec donc la
modification de cet article introduite par la réforme de 2016, l’émancipation
n’est plus une cause de fin de la tutelle du mineur.
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254
B. La tutelle de l’Etat
Il s’agit de la tutelle exercée par l’Etat sur certaines catégories des mineurs.
1. Les principes fondamentaux
Les mineurs qui n’ont pas des parents connus, les mineurs abandonnés, les
mineurs orphelins sans famille, et le cas échéant, les mineurs dont le ou les
auteurs sont déchus de l’autorité parentale sont placés sous la tutelle de l’Etat.
Ces mineurs ainsi placés sont appelés pupilles de l’Etat (art. 237 CF).
2. De l’organisation de la tutelle de l’Etat
La tutelle des pupilles de l’État est exercée par l’entremise du conseil de tutelle
et du tuteur délégué placé sous son contrôle.
a. Le conseil de tutelle
Selon l’article 262 CF modifié, le conseil de tutelle est un organe de tutelle créé
dans chaque commune, secteur ou chefferie chargée d’exercer toutes les
prérogatives relatives aux fonctions du tuteur sur le mineur, pupille de l’Etat. Le
Gouverneur de province ou de la ville de Kinshasa peut soit créer deux ou
plusieurs conseils de tutelle par territoire ou commune, soit regrouper deux ou
plusieurs communes, secteurs ou chefferies sous un seul conseil de tutelle. Il
détermine alors la composition de ces conseils par voie d’arrêté. Il désigne le
tribunal pour enfants compétent pour connaître des litiges se rapportant à la
tutelle des pupilles (l’ancien article 262 CF a connu trois amendements avec la
réforme de 2016 : d’abord, il a été question de mettre cet article en cohérence
avec la loi sur les entités territoriales décentralisées qui a introduit les nouvelles
appellations des entités décentralisées, ensuite il s’est agi du transfert des
compétences autrefois reconnues en la matière au président de la République au
Gouverneur de province ou de la ville de Kinshasa et enfin au transfert des
compétences autrefois reconnues au tribunal de paix, au tribunal pour enfants).
(Suite) Attributions du Conseil de tutelle. Sauf dérogation expresse de la loi, le
conseil de tutelle exerce, par rapport au pupille de l’État, toutes les compétences
attribuées par les dispositions relatives à la capacité ainsi que par des lois
particulières aux conseils de famille et aux réunions familiales par rapport au
mineur. Le conseil de tutelle dispose de tous les pouvoirs qui lui permettent
d’exercer la tutelle au mieux des intérêts du mineur.
Les biens, revenus ou salaires du mineur qui ne sont pas confiés au tuteur
délégué, sont gérés par le conseil de tutelle.
(Suite) Composition du conseil de tutelle. Elle est composé par l’article 263 CF
modifié. Le conseil de tutelle est composé du bourgmestre, du chef de secteur
ou de chefferie ou de leur représentant, président de droit; d’un officier du
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255
un tuteur spécial qui représente le mineur dans l’acte. Le conseil confie au tuteur
délégué la garde du mineur et le soin de son éducation. Il peut aussi désigner au
tuteur délégué, la personne ou l’établissement officiel ou privé qui sera chargé
de l’éducation de l’enfant. Le mineur ne peut, sans le consentement du conseil
de tutelle, être soustrait à la garde du tuteur délégué. Toute demande de retrait
de la garde est adressée au conseil de tutelle qui décide en s’inspirant
uniquement de l’intérêt de l’enfant.
L’article 255 CF modifié précise que le tuteur délégué veille à ce que les pupilles
de l’État dont l’âge et l’état de santé le permettent, fassent l’objet d’une
adoption sauf lorsque cette mesure ne paraît pas adaptée à la situation de ces
enfants (la modification de cet article a consisté au replacement de l’indicatif
futur ‘‘veillera’’ par l’indicatif présent ‘‘veille’’ parce que l’indicatif oblige’’).
Le conseil détermine les biens, revenus ou salaires du mineur qui sont confiés au
tuteur délégué. Sauf autorisation expresse du conseil, le tuteur délégué ne peut
passer pour ces biens, revenus ou salaires, aucun acte de disposition. Le tuteur
délégué n’est pas tenu envers le pupille de l’obligation alimentaire sur son
patrimoine.
Le tuteur délégué rend annuellement compte de sa mission au conseil de tutelle
qui peut, chaque fois que de besoin, lui réclamer des justifications sur
l’accomplissement de sa mission. Le tuteur délégué en réfère au conseil de
tutelle chaque fois que l’intérêt moral ou matériel du mineur l’exige.
(Suite) Gestion des biens du mineur par le tuteur délégué. Le tuteur délégué est
responsable de sa gestion. Il en est comptable envers le conseil, même durant la
tutelle. Il dresse avec le conseil, en entrant en fonction, l’inventaire des biens du
mineur dont la gestion lui est confiée. Cet inventaire reste déposé au siège du
conseil jusqu’à la fin de la tutelle. Si l’état des biens du mineur confiés au tuteur
délégué vient à se modifier au cours de la tutelle, des inventaires
complémentaires doivent être annexés au premier. Le compte complet de
gestion doit être dressé par le tuteur délégué à sa sortie de fonction ou par ses
héritiers s’il meurt en fonction. Ce compte est approuvé par le conseil. Le tuteur
délégué ou ses héritiers ont trois mois pour dresser le compte. L’approbation qui
est donnée par le conseil ne devient définitive que six mois après la reddition du
compte. L’État est responsable de la gestion tutélaire. Il en est comptable envers
le mineur à la fin de la tutelle ou envers les héritiers de celui-ci. Le conseil de
tutelle dresse le compte dans les neuf mois de la fin de la tutelle. L’approbation
du compte de la tutelle ne devient définitive qu’un an après la reddition de celui-
ci.
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257
CHAPITRE II
CONDITION JURIDIQUE DU MINEUR NON EMANCIPE
Pour exercer ses droits dans la vie juridique, le mineur est déclaré incapable en
raison de son manque de maturité physique et intellectuelle ; il a donc besoin
d’une protection spéciale et des soins spéciaux, notamment d’une protection
juridique appropriée, avant comme après sa naissance271. Le droit organise
plusieurs techniques de protection du mineur afin de pallier à l’incapacité qui
frappe certaines personnes qu’elle considère vulnérable. L’application de ces
techniques de protection diffère en fonction de la profondeur de l’incapacité
ainsi que de la gravité des actes à accomplir. De manière générale ces techniques
sont la représentation, l’assistance et l’autorisation272.
Les actes juridiques posés par le mineur doivent, en principe, être accomplis pour
le mineur par son représentant. Il ne suffit pas qu’il soit autorisé ou même
assisté par son père ou son tuteur. Il ne peut ni vendre, ni acheter, ni louer. Il ne
peut, en principe, agir en justice lui-même. Il doit être représenté. Tel est le
régime juridique s’agissant du mineur non émancipé (section 1). Néanmoins, il y
a des actes qui n’admettent pas la représentation parce que la loi ou les usages
tolèrent que le mineur le passe seul (section 2). Il découle de ce qui précède que
la sanction des actes posés par le mineur non émancipé n’est pas sans soulever
des difficultés en ce que parfois le principe de la capacité absolue du mineur est
remise en cause tantôt par le législateur lui-même, tantôt par l’ambigüité des
textes légaux en la matière (section 3).
Section 1. Le régime d’incapacité
Le mineur non émancipé est frappé d’une incapacité générale. Il est placé sous le
régime de la représentation. Celle-ci est une technique juridique par laquelle une
personne (le représentant) passe une acte juridique, au nom et pour le compte
d’une autre personne (le représenté) de sorte que tous les effets de l’acte
accompli se produisent directement et uniquement sur la tête de cette dernière.
De manière générale, la représentation peut être volontaire ou légale. Elle est
volontaire lorsque le représentant agit en vertu de la volonté du représenté qui
lui a donné pouvoir d’agir pour lui (contrat de mandat). Elle est légale lorsque le
représentant agit en vertu d’un pourvoir d’agir qui lui est conféré par la loi. C’est
le cas du tuteur ou du titulaire de l’autorité parentale pour les mineurs.
271
Préambule de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989.
272
Cf. infra.
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261
Section 2. Les actes que le mineur non émancipé peut passer seul
Les articles 221 et 222 du code de la famille soumettent le mineur à une
incapacité générale et absolue. L’article 221 du code de la famille dispose ‘‘ le
mineur est, pour ce qui concerne le gouvernement de sa personne, placé sous
l’autorité des personnes qui exercent sur lui l’autorité parentale ou tutélaire. Il
est, pour ce qui concerne ses intérêts pécuniaires et l’administration de ses
biens, protégé par les mêmes personnes’’.273 Et l’article 222 modifié du même
texte complète et précise s’agissant de la tutelle que ‘‘Tout mineur (non
émancipé, supprimé par la réforme de 2016) n’ayant ni père ni mère pouvant
exercer sur lui l’autorité parentale est pourvu d’un tuteur qui le représente’’. 274 Il
ressort ainsi des termes mêmes de ces dispositions que théoriquement le droit
congolais ne reconnaît au mineur aucune capacité d’agir. Il ne peut en
conséquence accomplir aucun acte juridique. Son incapacité d’exercice est
générale et absolue, sa représentation sur la scène juridique est générale c'est-à-
dire elle concerne tous les actes de la vie juridique sans exception, puisque le
mineur non émancipé est inapte à poser personnellement un quelconque acte
juridique, il doit être absent de la scène juridique.
Cependant en observant de plus près le Code de la famille congolais l’on décèle
une certaine ambiguïté quant à l’incapacité d’exercice du mineur. En effet, alors
que les articles 215, 221 et 222 du Code de la famille consacrent une incapacité
générale et absolue du mineur l’excluant ainsi de la scène juridique, l’on retrouve
dans ce même Code certains articles accordant au mineur une certaine
autonomie pour poser lui-même quelques actes juridiques sous certaines
conditions. Il peut ainsi passer seul certains actes moyennant une autorisation
préalable. De même dans la vie courante, le mineur pose certains actes sans être
représenté. On peut ainsi relever ici que l’incapacité générale et absolue à
laquelle le législateur congolais soumet le mineur n’est qu’une incapacité de
façade car de manière tacite le législateur reconnaît au mineur une capacité
ponctuelle, il lui reconnaît la possibilité de poser seul certains actes juridiques
sans qu’il n’ait besoin d’être représenté. Ce point de vue se confirme encore plus
avec l’analyse des alinéas 1 et 2 de l’article 295 du Code de la famille qui dispose
‘‘l’action en nullité ne peut être poursuivie que par le mineur ou selon le cas par
ses père et mère, son tuteur, son curateur ou par les héritiers du mineur, au cas
où l’acte aurait causé préjudice au mineur. L’acte peut être confirmé’’.275
L’interprétation de cet article reviendrait à dire que lorsque le mineur pose un
acte irrégulier c'est-à-dire un acte qui ne lui est pas permis, le juge peut
confirmer cet acte si cet acte ne lui cause pas préjudice et si cet acte n’est pas
273
Art. 221 CF.
274
Art. 222 CF.
275
Art. 295 CF.
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262
poursuivi pour nullité par les titulaires de cette action. On peut en déduire que le
juge lui reconnaît en ce moment-là la capacité d’accomplir seul un tel acte sans
que ce dernier ne soit annulé pour irrégularité. En dépit de l’incapacité générale
et absolue qui frappe le mineur, il y a lieu de conclure que le législateur congolais
reconnaît au mineur une sphère d’autonomie, une capacité ponctuelle pour
exercer seul certains actes lui autorisés par la loi (§1) et l’usage (§2).
§1. Les actes autorisés par la loi
Il convient dès lors d’analyser d’abord la capacité d’exercice ponctuelle reconnue
au mineur en droit civil, ensuite la capacité lui reconnue en matière du travail.
De la capacité d’exercice ponctuelle reconnue au mineur en droit civil. Les actes
personnels. Le principe en ce qui concerne le mineur est, comme nous l’avons
vu, que la loi lui dénie la capacité d’exercice. Il est soumis à un régime
d’incapacité. Cependant il peut arriver que la loi lui reconnaisse
exceptionnellement la capacité d’exercice dans certains cas très précis,
notamment lorsqu’il est question d’accomplir des actes à caractère personnel. Il
est question ici des actes qui, par leur nature même, excluent la possibilité de
toute représentation276. Cependant pour quelques-uns d’entre eux le mineur
doit avoir une autorisation préalable pour les exercer personnellement. Parmi
ces actes personnels on peut citer la reconnaissance d’un enfant né hors
mariage, l’action en recherche de paternité, l’exercice de l’autorité parentale et
la disposition par testament.
A. La reconnaissance d’un enfant né hors mariage
C’est un acte à caractère personnel et déclaratif car la reconnaissance implique
un aveu, une admission de sa qualité de parent qui en fait un acte éminemment
personnel et doit relever de la volonté du parent lui-même dès lors qu’il a
conscience de la portée de son acte277. En droit congolais cette capacité
ponctuelle qu’ont les parents pour reconnaître leurs enfants, même étant
mineur, est prévu aux articles 596 al. 1, 597 al. 1 et 3, 616 al. 1 er du Code de la
famille. Ces articles disposent respectivement ce qui suit : 596 alinéa 1
‘‘ l’indication du nom de la mère sur l’acte de naissance de l’enfant suffit à établir
la filiation maternelle’’; 597 al. 1 et 3 ‘‘Lorsque le nom de la mère n’est pas
indiqué dans l’acte de naissance de son enfant, la mère peut faire une
déclaration de maternité. La déclaration de maternité peut être faite même si la
mère est incapable. Dans ce cas, elle agit seule’’ ; article 616 al. 1 ; ‘‘l’affiliation
doit intervenir même si le père est mineur. Dans ce cas, il agit seul’’.278
276 e
P. COURBE, Droit civil, les personnes, la famille, les incapacités, 4 éd, Dalloz, Paris, 2003, p. 204.
277
J. GHESTIN (dir.), J HAUSER et D ; HUET- WEILLER, traité de droit civil, la famille, fondation et vie de
e
famille , Collection traités, LGDJ, 1993, 2 éd, n°731.
278
Art. 596, 597 et 616 CF.
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263
droit du travail, nous nous référerons non seulement aux dispositions du code du
travail mais aussi à celle de la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection
de l’enfant, réglementant le travail des enfants.
Pour une meilleure compréhension, il sied de parler successivement de l’âge
légal d’accès au travail pour un mineur, et des exceptions quant à ce, mais aussi
des conditions d’exécution et de conclusion de ce contrat de travail279.
a. L’âge légal d’accès au travail et les exceptions admises
L’article 6 du code du travail congolais dispose en son article premier ‘‘au sens du
présent Code, la capacité de contracter est fixée à seize ans’’ et l’article 50 de la
loi portant protection de l’enfant que ‘‘l’enfant ne peut être employé avant seize
ans révolus’’.280Il ressort de ces articles que l’âge légal auquel un mineur peut
accéder à l’emploi est celui de seize ans révolus. A cet âge, il peut passer seul un
contrat de travail sans que sa représentation ne soit nécessaire. La
représentation est exclue ici parce que le contrat de travail implique un lien de
subordination. Il faut donc un engagement personnel du mineur, son
consentement personnel pour qu’il soit soumis à ce rapport de subordination.
Cependant même si la représentation est exclue dans ce contrat, il est nécessaire
que le mineur soit conseillé et accompagné par ses parents en raison des
obligations que le contrat de travail met à sa charge. Il s’engage personnellement
mais avec l’autorisation de ses représentants légaux. Cette autorisation, c’est
dans le but de le protéger contre l’exploitation économique et contre les risques
que le travail peut engendrer pour son développement.
Malgré que ces deux textes de loi fixent l’âge d’accès légal du mineur au travail à
seize ans, ils adjoignent une exception quant à cet âge et sous des strictes
conditions. En effet, les suites des articles 6 du code du travail et 50 de la loi
portant protection de l’enfant disposent respectivement : article 6, litera a ‘‘une
personne âgée de quinze ans ne peut être engagée ou maintenue en service que
moyennant dérogation expresse de l’inspecteur du travail et de l’autorité
parentale ou tutélaire’’ et l’alinéa 2 de l’article 50 ‘‘l’enfant âgé de quinze ne
peut être engagé ou maintenue en service, même comme apprenti que
moyennant dérogation expresse du juge pour enfant, après avis psycho médical
d’un expert et de l’inspecteur du travail’’281. Le mineur de quinze ans aussi peut
accéder au monde du travail mais sous des conditions strictes dont la dérogation
expresse de l’inspecteur du travail et de l’autorité parentale ou tutélaire. La loi
portant protection de l’enfant va même plus loin en exigeant outre les
dérogations mentionnées, celles du juge pour enfant et l’avis psycho médical
d’un expert. On peut donc retenir qu’un mineur de seize ans est apte à conclure
279
Pour plus de détails, lire MUKADI BONYI, Droit du travail, CRDS, 2008, p. 161 à 166.
280
Art. 6 du code du travail congolais.
281
Art. 50 de la loi du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.
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265
un contrat de travail, de même que celui de quinze ans sous réserves des
dérogations expresses de l’inspecteur du travail et de l’autorité parentale ou
tutélaires.
b. Les conditions d’admission et de conclusion du contrat de travail
L’article 6 du Code du travail et 50 de la loi portant protection de l’enfant nous
renseignent sur les conditions d’accès du mineur a l’emploi. Ces conditions sont :
avoir une dérogation expresse de l’inspecteur du travail, de l’autorité parentale
ou tutélaire, du tribunal si l’inspecteur du travail et l’autorité parentale ou
tutélaire s’opposent ; il doit s’agir de l’exécution des travaux légers et salubres ; Il
ne doit pas avoir de recrutement de quelque nature que ce soit pour ce travail ; il
ne doit pas travailler pendant plus de quatre heure par jour, ni travailler pendant
la nuit et avoir droit à un congé d’au moins un jour ouvrable par mois entier de
service, concurremment au congé annuel consacré par le code du travail. Le
contrat de travail ne peut être conclu qu’une fois que les règles relatives à
l’admission du mineur au travail ont été respectées. Le contrat est donc conclu
par le mineur seul mais avec une autorisation préalable de ses représentants
légaux car le contrat de travail étant soumis aux règles du droit commun, le
mineur ne peut valablement le conclure seul car il est dépourvu de toute
capacité contractuelle. Le contrat conclu par le mineur doit être constatée par
écrit. Et comme tout salarié, le mineur a droit à une rémunération équitable ou à
une allocation appropriée. S’agissant de sa rémunération, le code du travail
prévoit à son article 102 que l’employeur remette au mineur la rémunération de
son travail sauf opposition de la personne exerçant sur lui l’autorité parentale ou
tutélaire.282
2. Le contrat d’apprentissage
Le code du travail définit à son article 7 le contrat d’apprentissage comme étant
un contrat par lequel une personne physique ou morale, le maître
d’apprentissage, s’oblige à donner ou à faire donner une formation
professionnelle méthodique et complète à une autre personne, l’apprenti, et par
lequel ce dernier s’oblige en retour à se conformer aux instructions qu’il recevra
et à exécuter les ouvrages qui lui seront confiés en vue de son apprentissage.283
Le contrat d’apprentissage est ouvert au mineur au même moment que le
contrat de travail car l’âge légal est le même pour le contrat de travail et
d’apprentissage. Il diffère du contrat de travail en ce qu’il peut s’alterner avec les
périodes de scolarisation. La loi détermine la forme que doit prendre ce contrat
et les conditions dans lesquelles il doit s’appliquer.
282
Art. 102 du code du travail congolais.
283
Art. 7 du code du travail congolais.
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284 e
P. MALAURIE, Les personnes, La protection des mineurs et des majeurs, 5 éd, Defrénois, Paris, 2010, p.
257.
285
J. CARBONNIER, Droit civil / Les personnes, personnalité, incapacité, personne morale, PUF, « Thémis
droit privé », 2000, p. 208.
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267
statut d’incapable de leur auteur. Aucune liste ne peut, a priori, être dressée
s’agissant des actes autorisés par l’usage. Jean Claude MONTANIER dit qu’il peut
s’agir en premier lieu des menus achats que peut effectuer un mineur : achat de
sucrerie, des magasins illustrés, des jouets, des fournitures scolaires, … Tout
comme il peut aussi s’agir des actes conservatoires et d’actes d’administrations
‘‘courants’’ car en eux-mêmes ils ne sont pas dangereux pour le mineur, ils ne
risquent pas de mettre en péril son patrimoine. Ils ne comportent aucun risque
particulier et en cas de lésion ils peuvent être rescindés. C’est au juge de décider
quand est-ce qu’un acte d’administration peut être dit ‘‘acte courant’’ ou ‘‘acte
grave’’ au moment d’appliquer la sanction en cas de lésion286. C’est donc pour les
actes de la vie courante que l’usage autorise le mineur à agir seul. Cette notion
d’acte de la vie courante est fondamentalement évolutive en ce qui concerne le
mineur car les actes que peut poser un mineur de sept ans, neuf ans, ne sont pas
les mêmes que ceux d’un adolescent de quinze ans ou seize ans, et ainsi de suite
jusqu’à la majorité. Par acte autorisé par l’usage il faut donc entendre des actes
de la vie courante que le mineur peut accomplir seul sans courir aucun risque et
sans mettre en péril son patrimoine.
Section 3. Sanction des actes accomplis irrégulièrement par le mineur :
difficultés suscitées par la législation congolaise sur la capacité d’exercice du
mineur non émancipé
Les actes irrégulièrement accomplis par le mineur sont sanctionnés par la nullité.
Une nullité relative car le but recherché est la protection du mineur et de ses
intérêts, mais aussi la protection des intérêts des tiers contractant de bonne foi.
L’acte irrégulier annulé produit un effet rétroactif dans le chef des contractants.
Cette nullité n’est pas de plein droit, le juge ne la prononce que sur demande du
mineur ou de ses représentants légaux lorsque celui-ci se prévaut de son
incapacité parce que l’acte qu’il a posé lui cause préjudice on lui est lésionnaire.
§1. Principe dégagé par les articles 8 et 23 du Code civil congolais livre III sur le
contrat
L’étude de ce principe se fera en deux points. Dans le premier il sera question de
l’analyse des articles 8 et 23 du code des obligations, et dans le second, de
l’application jurisprudentielle du principe dégagé.
l’état ainsi que les rapports de famille des individus. Les incapacités sont prévues
aux articles 211 à 329 du code de la famille, et l’article 215 énumère les
personnes qui sont incapables au terme de la loi. Cet article dispose ‘‘sont
incapables au terme de la loi : les mineurs ; les majeurs aliénés interdits et les
majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblis par l’âge ou infirmes placés sous
curatelles’’.291 Il ressort de ces dispositions que le mineur étant déclaré incapable
par la loi, ne peut, en application de ces dispositions, valablement passer un acte
juridique. A un tel acte, il manquera un élément essentiel de sa validité, à savoir
la capacité. Ainsi tout acte passé par un mineur ne sera pas valide, il sera vicié
car il lui manquera un élément essentiel, la capacité de contracter que le mineur
n’a pas.
2. Conséquences découlant des solutions énoncées par le principe
Comme nous venons de le voir, le principe qui découle des articles 8 et 23 du
CCC LIII est que la capacité des contractants constitue un des éléments essentiels
pour la validité du contrat. La conséquence logique qui découlerait de ce principe
est que tout acte que le mineur réalisera sera vicié car il lui manquera la capacité
de contracter. En tenant compte de ce principe, nous en concluons que le droit
des obligations exclut le mineur de la scène juridique. Ce dernier ne peut passer
aucun acte juridique car il n’a pas la capacité de contracter. Et tous les actes qu’il
conclura seront viciés et sanctionnés par la nullité, et ne pourront de ce fait
produire aucun effet juridique. La nature de cette nullité est déterminée par
l’article 217 du code de la famille qui dispose que les actes accomplis par les
incapables sont nuls, de nullité relative.
On peut donc conclure en disant que le code des obligations dénie au mineur
toute capacité contractuelle. Il ne peut en aucun cas passer un acte juridique car
celui-ci ne sera pas valide, la capacité étant une condition essentielle pour la
validité de toute convention.
Pour que ce principe puisse souffrir d’une exception quelconque, il faut qu’un
texte de la loi puisse expressément relever le mineur de son incapacité
d’exercice afin que celle-ci ne puisse plus vicier les actes juridiques qu’il pose ni
violer le principe dégagé par les articles 8 et 23 du code civil congolais livre III.
B. Application jurisprudentielle du principe
Il s’agira ici de voir comment dans la pratique le principe est appliqué par les
cours et tribunaux. Cependant, eu égard à la rareté des litiges dans ce domaine,
on se limitera ici à analyser le seul arrêt que nous avons pu trouver. Le principe
est que le code civil congolais sanctionne tout acte accompli par un incapable par
la nullité. Il en résulte que seul la personne que la loi veut protéger est admise à
291
Art 215 CF.
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270
s’en prévaloir.
S’agissant du mineur non émancipé cette nullité ne peut être demandée que par
les représentants légaux du mineur ou ses héritiers.
Il y a lieu à ce propos de préciser que la nullité qui frappe un tel acte accompli
par le mineur n’opère pas de plein droit. Cette nullité doit être prononcée par
une décision judiciaire. Dès lors il devient intéressant de s’interroger sur la
légalité de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Kinshasa/Gombe sous le RCA
26245 où était en cause Madame Mbayo Banza contre Monsieur Liwanga
Mumboko Elie, mineur d’âge, et consort.292 Cet arrêt a été rendu le 30 décembre
2009. Dans cet arrêt la cour a décidé de l’annulation d’un contrat conclu par un
mineur d’âge, au seul motif que la participation d’un mineur non émancipé à
l’élaboration d’un acte juridique constitue à elle seule et sans autres
considérations un motif de la nullité.
Dans sa motivation la cour d’appel s’explique comme suit : ‘‘Examinant le moyen
tendant à obtenir l’annulation du contrat de location n° 105.438 du 16 juillet
2004 établi en faveur de Sieur Liwanga Mumboko Elie, la cour relève qu’il est
fondé. Sans qu’il ne soit nécessaire de rencontrer l’argumentation des parties
quant à ce, la cour note qu’au moment de la signature de ce contrat, Sieur
Liwanga Mumboko. Elie, était frappé, au moment de la conclusion du contrat, de
l’incapacité d’exercice c’est à dire de l’inaptitude à exercer le droit de contracter
par lui-même car il était soumis sous le régime de la représentation. L’examen de
son contrat ne renseigne pas cette représentation et ne porte pas la signature du
concerné. C’est à bon droit que l’appelante, Madame Mbayo Banza a saisi la
justice aux fins de constatation judiciaire de cette nullité. De ce qui précède, la
cour constate que ce contrat n’est pas valide et sera déclaré nul et de nul effet’’.
Cet arrêt illustre bien le principe dégagé à l’article 8 du code civil congolais livre
trois qui conditionne la validité de tout acte juridique par la capacité des
contractants, sanctionnant se vice par la nullité relative de l’acte accompli. Le
manque de capacité à l’acte conclu vicie le contrat. La seule façon pour un
mineur de contracter est que celui-ci le fasse par le canal de son représentant
légal. Il doit disparaître complètement de la scène juridique pour ne laisser
paraître que son représentant légal qui conclura l’acte à sa place car le régime de
protection légal auquel est soumis le mineur est la représentation. C’est à cette
seule condition que le mineur peut passer un acte juridique. Et la conséquence
de l’irrégularité d’un acte accompli par un mineur est que cet acte ne produira
aucun effet à l’égard des parties au contrat, il sera donc annulable.
Dans sa motivation le juge laisse croire qu’il n’est pas besoin de vérifier si l’acte a
causé préjudice au mineur, s’il a entamé son patrimoine ou s’il lui a été
292
Arrêt inédit de la Cour d’Appel de Kinshasa/Gombe rendu le 30 décembre 2009.
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271
lésionnaire, pour prononcer la nullité. Le seul fait qu’il ait été conclu par un
mineur suffit à le déclarer nul et de nul effet, ce qui reviendrait à dire qu’en droit
congolais la minorité d’un individu en matière contractuelle supprime la liberté
d’appréciation du juge. Son rôle est réduit, après la constatation de la minorité
de l’enfant contractant, à prononcer la nullité dès lors qu’il constate que l’acte a
été passé par un mineur, sans avoir à apprécier si l’opération était bonne ou
mauvaise en elle-même. Néanmoins si cet arrêt semble confirmer le principe
découlant de l’article 8 du code civil congolais livre trois, un doute persiste quant
à sa légalité. En effet, seule la personne que la loi veut protéger peut se prévaloir
de la nullité dont l’acte accompli est sanctionné. Et qu’en plus, cette nullité ne
s’opère pas de plein droit, elle doit être judiciairement constaté. Cet impératif
est prévu à l’article 295 du code de la famille qui dispose ‘‘l’action en nullité ne
peut être poursuivi que par le mineur ou selon le cas par ses père et mère, son
tuteur, son curateur ou par les héritiers du mineur, au cas où l’acte aurait causé
préjudice au mineur’’.293 La nullité prévue à l’article 294 nouveau du code de la
famille est une nullité relative car le but principal pour lequel elle a été instituée
est la protection du mineur et de ses intérêts. Et puisque c’est une ‘‘nullité de
protection’’, le juge ne peut la prononcer d’office, c’est au mineur, ses
représentants légaux ou ses héritiers, de solliciter du juge la nullité de l’acte qui
lui aurait causé préjudice, c’est au mineur de se prévaloir de son incapacité pour
solliciter la nullité de l’acte qu’il a posé.
Mais de la motivation de cet arrêt, il ressort que la cour a prononcé d’office la
nullité de l’acte au motif que l’un des cocontractants était mineur, sans qu’il n’ait
eu à rencontrer l’argumentation des parties. La cour a estimé que le seul fait que
Sieur Liwanga Elie était mineur au moment de la conclusion de l’acte suffisait
pour en prononcer la nullité. En procédant de la sorte, la Cour est allée à
l’encontre de l’article 295 du Code de la famille qui est une disposition d’ordre
public.
Seuls les représentants légaux et les héritiers de mineur peuvent solliciter la
nullité de l’acte, et ce seulement lorsque cet acte lui cause préjudice. Le juge ne
peut décider de la faire seul.294
§2. Examen des règles édictées par les articles 296 et 295 du Code de la famille
Le code des obligations pose le principe selon lequel la capacité est un élément
essentiel à la réalisation de tout acte juridique sans lequel le contrat passé par un
incapable est sanctionné par la nullité dû au fait de l’invalidité de cet acte. Nous
allons dans cette section voir ce qu’édicte le code de la famille quant à la
capacité contractuelle du mineur car le code des obligations nous renvoie au
293
Art. 294 CF.
294
Art. 295 CF.
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272
295
Art. 296 CF.
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273
décourager296.
La bonne foi dont parle cette disposition vise le fait pour le tiers d’avoir cru traité
avec un mineur investi de la capacité de contracter par le mécanisme de
l’autorisation. Ainsi pour être de bonne foi, le tiers doit réellement et loyalement
avoir cru que le mineur avait l’autorisation de contracter, ce sont ces croyances
qui doivent justifier son erreur dans le droit de conclure avec le mineur. Au vue
de cette croyance le tiers n’a aucune raison de se retenir de contracter avec une
personne qui, à ses yeux, donnait toute l’apparence d’avoir été autorisé, donc
capable de s’engager.
c. Le cocontractant du mineur ne doit pas abuser de l’inexpérience du mineur
Aux termes de l’alinéa 1 de l’article 296 du code de la famille, le contrat fait par
un mineur est valable, si ce dernier a reçu autorisation de le conclure, ou si son
cocontractant a cru de bonne foi qu’il était autorisé à le faire.
A cette condition d’autorisation, l’alinéa 2 de la même disposition ajoute une
autre condition de validité en termes que le cocontractant du mineur ne doit pas
abuser de son inexpérience. Cette dernière condition nous renvoi sans nul doute
à l’étude de la théorie de la lésion. De manière générale en droit des contrats, la
lésion sous-entend une inégalité pécuniairement mesurable entre les prestations
des parties contractantes.
S’agissant d’un mineur, la notion de la lésion se définit de manière large et
subjective. Ainsi ce n’est pas seulement l’inégalité des prestations, mais l’inutilité
d’une dépense, la dépense excessive, la dépense de luxe qui excède les moyens
du mineur : les sottises du mineur297.
L’application cumulative de ces conditions implique que la sanction en cas
d’inobservance est la nullité relative telle que prévue à l’article 296.
B. Glose de l’article 295 du Code de la famille
Comme pour l’article 296, l’examen de l’article 295 se fera en deux points. Dans
le premier on va énoncer le principe, et dans le second nous verrons les
conditions d’applications de ce principe.
1. Enoncé du principe
L’article 295 du Code de la famille dispose ‘‘l’action en nullité ne peut être
poursuivie que par le mineur ou selon le cas par ses père et mère, son tuteur,
son curateur ou par les héritiers du mineur, au cas où l’acte aurait causé
296
DOGO KOUDOU, La protection des biens du mineur et les intérêts des tiers, thèse, université de Nice,
1990, p. 56.
297 ème
J. CARBONNIER, La famille ; les incapacités, 12 éd., 1983, p.323.
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276
préjudice au mineur.298 L’acte peut être confirmé. L’acte en nullité se prescrit par
dix ans à dater de la majorité du mineur’’. Cet article complète l’article 294 du
même texte qui sanctionne d’irrégularité les actes accomplis par le mineur. Si le
code de la famille sanctionne d’irrégularité les actes accomplis par le mineur
c’est pour le protéger, protéger les intérêts du mineur ainsi que son patrimoine.
C’est donc une ‘‘nullité de protection’’ qui sanctionne les actes que le mineur
accomplit irrégulièrement.
C’est en vertu de cette nullité de protection que la loi veut que seule la personne
incapable, dans le présent cas le mineur, puisse solliciter la nullité des actes
irrégulièrement accomplis qui lui causeraient préjudice, en se prévalant de son
incapacité. C’est donc l’article 295 du code de la famille qui cristallise cette
volonté du législateur de faire de l’incapable le titulaire de l’action en nullité des
actes qu’il aurait accompli irrégulièrement. En vertu de ces prescrits, l’action en
nullité ne peut être sollicitée que par : le mineur devenu majeur ; les père et
mère du mineur ; le tuteur du mineur et les héritiers du mineur. Seules ces
personnes sont habilitées à demander au juge la nullité des actes irrégulièrement
accomplis par le mineur, lorsque ceux-ci lui causent préjudice.
2. Conditions d’application du principe
Comme relevé ci-haut, l’article 295 du code de la famille énonce le principe qui
consiste à permettre au juge de valider un contrat irrégulièrement accompli par
un mineur, lorsque ce contrat ne lui cause pas préjudice.
Il faut premièrement que le contrat soit irrégulier c'est-à-dire que le mineur l’ait
conclu seul en dépit de l’incapacité contractuelle que le frappe. Ensuite il faudrait
que cet acte irrégulier ne lui cause pas préjudice c'est-à-dire qu’il n’entache en
rien les intérêts du mineur, son patrimoine. Il faut que cet acte lui soit bénéfique
et avantageux. Et enfin il faut que ni le mineur ni ses représentants légaux ne se
prévalent de l’incapacité contractuelle du mineur devant le juge afin que celui-ci
ne puisse en prononcer la nullité.
298
Art. 295 CF.
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277
TITRE II
DES INCAPABLES MAJEURS
Plan. Le législateur, pour protéger les mineurs, les frappe d’incapacités. Au
contraire, toute personne, à partir de dix-huit ans est, en principe, capable.
Cependant, parmi les majeurs, certains n’ont pas leur raison ; ils ne jouissent pas
de leurs pleines facultés mentales ou corporelles ; le consentement qu’ils
donnent aux actes de la vie juridique est un consentement de seconde zone, ou
n’est qu’une apparence de consentement. D’où la nécessité des institutions de
protection.
En deux chapitres, nous allons dans un premier temps énumérer les différentes
catégories des incapables majeurs (Chapitre I) et dans un deuxième temps, nous
analyserons le statut de la femme mariée depuis la réforme de2016 (chapitre II).
CHAPITRE PREMIER
ENUMERATION ET REGIME DE PROTETION DES
INCAPABLES MAJEURS
L’article 215 modifié par la réforme de 2016 dispose en son alinéa 1er points 2 et
3 que sont incapables aux termes de la loi les majeurs aliénés interdits ; les
majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblis par l’âge ou infirmes placés sous
curatelle.
Par ailleurs, les alinéas 1er et 2ème de l’article 298 précise que lorsque les facultés
mentales d’un majeur ou d’un mineur émancipé conformément à l’article 289 de
la présente loi, sont durablement altérées par une maladie, une infirmité ou un
affaiblissement dû à l’âge, il est pourvu à ses intérêts par l’un des régimes de
protection. Les mêmes régimes de protection sont applicables à l’altération
durable des facultés corporelles, si elle est susceptible d’empêcher l’expression
de la volonté.
De l’analyse de ces deux articles 215 modifié et 298 du code de la famille, il
ressort que l’incapacité des majeurs peut résulter soit de l’altération des facultés
mentales, soit de l’altération durable des facultés corporelles. Il convient
d’examiner en détail ces deux catégories des incapables majeurs (section 1),
avant de voir quelles sont les techniques de protection mises en place par le
législateur en leur faveur (section 2).
Section 1. Les personnes dont les facultés mentales ou corporelles sont altérées
Nous examinerons d’abord le cas des personnes majeures dont les facultés
mentales sont altérées (§1) avant de voir ensuite celui des personnes majeures
dont les facultés corporelles sont altérées (§2).
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278
§1. Les personnes majeures dont les facultés mentales sont altérées
L’article 298 modifié du code de la famille dispose que ‘‘Lorsque les facultés
mentales d’un majeur ou d’un mineur émancipé sont durablement altérées par
une maladie, une infirmité ou à affaiblissement dû à l’âge, il est pourvu à ses
intérêts par un régime de protection prévus par la loi’’ (cet article a été modifié
par l’insertion en son alinéa 1er, du bout de phrase ‘‘conformément à l’article
289’’ entre le mot ‘‘majeur’’ et ‘‘sont’’ pour insister sur la seule forme
d’émancipation désormais consacrée en droit congolais).
Il en découle que tous ceux dont les facultés mentales sont durablement altérées
peuvent être placées sous régime d’incapacité. Comme l’enseigne, en parlant de
l’altération des facultés mentales, le législateur a utilisé une formule
particulièrement large afin de tenir compte de la complexité et de la variété des
maladies mentales reconnues dans la psychiatrie moderne. Il vise dans ce texte
trois causes d’altération des facultés mentales à avoir : la maladie, l’infirmité et
l’affaiblissement dû à l’âge. Cette disposition est par conséquent susceptible
d’une large application299.
On peut ainsi placer dans cette catégorie : les aliénés mentaux, les prodigues, les
faibles d’esprit, les vieillards atteints d’une altération de leurs facultés mentales.
A. Les aliénés mentaux
Il S’agit d’un état caractérisé par le dérèglement cérébral, le désordre des idées,
peu importe que cet état soit inné ou acquis. Sont généralement retenus comme
des aliénés mentaux les fous et les déments.
B. Les prodigues
Le législateur n’a pas défini la prodigalité. Elle peut être considérée comme la
situation de celui qui dissipe son patrimoine par des dépenses exagérées,
excessives, inconsidérées ou folles, sans fruit pour lui-même ni pour les autres.
Il y a donc prodigalité lorsque suite au dérèglement des mœurs ou de l’esprit,
une personne met en péril la consistance de son patrimoine. S’il faut se référer à
la médecine, la prodigalité ne constitue pas une maladie, car le prodigue est
considéré comme étant atteint d’un déséquilibre, voilà pourquoi le législateur a
jugé bon de le protéger.
C. Les faibles d’esprit
Comme pour le prodigue, le législateur n’a pas défini le faible d’esprit. Le faible
d’esprit est une personne qui, sans être frappée d’une aliénation mentale, n’a
pas d’intelligence assez développée ou assez lucide pour diriger seul les affaires.
Ses facultés mentales sont affaiblies sans qu’il ait perte totale ou habituelle de la
299
KIFWABALA TEKILAZAYA, op. cit., p. 170.
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279
raison. Il n’est donc pas complètement privé de l’usage de ses facultés mentales
mais celles-ci se trouvent à un degré inférieur. Ce dernier élément permet de
catégoriser les faibles d’esprit. Sont normalement faibles d’esprit : les imbéciles,
les crétins au sens médical du terme. Sont également classées dans cette
catégorie les victimes d’une infirmité grave telle que la surdité, l’accès fréquent
d’épilepsie, l’ivrognerie, de même ceux dont l’âge ou la maladie a affaiblie
l’intelligence300.
Toutefois, ne peuvent être classées parmi les faibles d’esprit les personnes
atteintes d’une des affections suivantes : affaiblissement de la mémoire si
l’intéressé est encore en état de gérer sa personne et ses biens ; des passions
persistantes pour aventures galantes à moins qu’il n’y ait prodigalité301. Selon
l’article 298 du code de la famille, dans tous les cas, c’est le tribunal qui
appréciera souverainement, après une expertise médicale, si cet état existe ; et
qui choisira, suivant le caractère plus ou moins habituel et la gravité des troubles
mentaux, le régime de protection applicable.
§2. Les personnes majeures dont les facultés corporelles sont durablement
altérées
Le législateur n’a pas défini ce qu’il entend par ‘‘personnes dont les facultés
corporelles sont altérées’’. Néanmoins il différencie l’altération des facultés
mentales de l’altération des facultés corporelles. L’altération des facultés
corporelles doit être entendue comme l’état d’une personne qui, sans être
frappée d’une altération des facultés mentales, n’est pas physiquement apte,
c’est-à-dire un ou plusieurs de ses organes corporels se trouvent atteints d’une
infirmité.
L’altération des facultés corporelles doit présenter un caractère durable pour
que la personne soit placée sous régime de protection. L’on doit donc exclure les
personnes qui ne sont atteintes que des altérations simplement passagères.
Comme pour l’altération des facultés mentales, c’est le tribunal qui appréciera
souverainement, après une expertise médicale, si cet état existe ; et qui choisira,
suivant le caractère plus ou moins habituel et la gravité des troubles mentaux, le
régime de protection applicable.
En effet, les personnes dont les facultés mentales et corporelles sont
durablement altérées sont placées sous le régime de protection qu’il convient
d’examiner au point suivant.
300
A. SOHIER, Droit civil du Congo belge, t.I, Bruxelles, 1958, n° 392.
301
H. DEPAGE, Traité élémentaire de droit civil, t.II, Bruxelles, Bruylant, 1948, n° 392.
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de l’autorité parentale dans les limites et suivant les modalités déterminées par
le tribunal et assure la gestion du patrimoine de l’interdit.
D. Publicité de l’interdiction
L’article 309 du code de la famille assure la publicité de l’interdiction, comme de
la mainlevée d’ailleurs, et ce à la diligence du greffier du tribunal qui statué tant
par cet envoi de la décision à l’état civil où la naissance de l’interdit a été établie,
qu’au journal officiel. Cette double publicité rend dès lors efficace
l’inopposabilité de cette décision modifiant l’état et la capacité.
E. Cessation de l’interdiction : mainlevée de l’interdiction
L’interdiction prend fin par le décès de l’interdit. Egalement, car cette mesure
n’est pas définitive, lorsque l’interdit recouvre la raison ; mais cette condition ne
suffit pas, un jugement doit donner mainlevée de l’interdiction. En d’autres
termes, l’interdit ne reprend l’exercice de ses droits qu’après le jugement de
mainlevée.
La procédure de mainlevée d’interdiction est symétrique à celle de l’interdiction.
Les personnes pouvant demander la mainlevée sont celles qui ont le droit de
demander l’interdiction ; en outre l’interdit a lui-même ce droit (art. 308 al. 2
CF). Le jugement de mainlevée fait l’objet de la même publicité que le jugement
d’interdiction (art. 309 CF).
F. Sanction des actes accomplis par l’interdit
Il est nécessaire de distinguer deux périodes, le législateur traitant de façon
différente les actes passés avant et après le jugement d’interdiction.
1. Actes accomplis avant le jugement d’interdiction
C’est le jugement d’interdiction qui crée l’incapacité de l’aliéné ; il s’agit d’un
jugement constitutif. Il en résulte que l’interdiction ne rétroagit pas : l’aliéné
n’est interdit qu’à dater du jugement. On devrait donc, quand l’aliéné a passé un
acte avant le jugement, exiger du demandeur en nullité la preuve de l’aliénation
mentale au moment où l’acte a été accompli. L’article 306 du code de la famille
dispose à ce sujet : ‘‘Les actes passés par l’aliéné non interdit ou avant son
interdiction sont annulables, pour autant que la démence ou l’imbécilité existât
notoirement au moment où ces actes ont été passés’’. Ainsi ce texte substitue à
la preuve de droit commun (preuve de l’aliénation mentale au moment où l’acte
est passé) celle, beaucoup plus facile, de la notoriété de la démence à l’époque
de la démence à l’époque de l’acte.
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282
Il faut remarquer que l’article 306 vise, sans aucune distinction, tous les actes
antérieurs au jugement, qu’ils aient été accomplis pendant ou avant la
procédure.
Par ailleurs, il y a lieu de noter que la nullité prévue à l’article 306 n’est pas
obligatoire pour le juge. Contrairement à la règle de droit commun selon
laquelle, lorsque la cause de nullité est établie, celle-ci s’impose au tribunal, le
texte laisse, en ce cas, le juge libre de prononcer ou non la nullité : ‘‘les
actes...sont annulables...’’. Même si la preuve de la notoriété de la démence est
apportée, le tribunal a donc la faculté de rejeter l’action. On se retrouve ainsi en
présence d’une nullité facultative.
Cette nullité est relative est se prescrit par dix ans à dater de l’acte.
2. Actes accomplis après le jugement d’interdiction
Le jugement prononçant l’interdiction, nous l’avons dit, est un jugement
constitutif d’état. A compter du jugement de l’interdiction, tous les actes passés
par l’interdit sont frappés de nullité. Cette nullité concerne tous les actes
accomplis par l’interdit et ce, lorsque ces actes sont posés pendant les périodes
d’intervalles lucides (art. 300 CF modifié). L’action en nullité se prescrit par dix
ans à dater de la mainlevée de l’interdiction.
La nullité qui frappe les actes de l’interdit est une nullité relative, qui ne peut
être demandée que par le tuteur ou l’interdit dans le cas où ces actes auraient
causé préjudice à ce dernier. Comme toute nullité relative, cette nullité est
susceptible de confirmation302 à partir de la cessation de l’interdiction.
§2. La mise sous curatelle
La curatelle est cette mesure qui permet de venir au secours du majeur qui a
besoin d’être conseillé ou contrôlé dans les actes de la vie civile. La procédure
pour mettre un majeur sous curatelle est judiciaire. Le tribunal compétent est le
tribunal de paix (art. 310 CF). La mise sous curatelle peut être demandée ou
provoquée par ceux qui ont droit de demander l’interdiction (art. 311 CF). Elle
s’effectue de la même manière que celle dont le but est de mettre sous tutelle.
Elle aboutit à la nomination d’une personne chargée d’assister le majeur
incapable dans les actes de la vie civile : le curateur, appelé sous d’autres cieux le
conseil judiciaire.
A. Personnes placées sous curatelle
Certains majeurs sans avoir perdu leurs facultés intellectuelles méritent
néanmoins d’être protégés car ils sont des comportements qui risquent fort de
302
Sur le concept ‘‘confirmation’’, voir la partie relative à la nullité du mariage
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283
leur porter préjudice. Il s’agit, selon la loi, des prodigues et des faibles d’esprit et
des personnes dont les facultés corporelles sont altérées.
B. Le régime juridique de protection
Le régime juridique de protection des personnes concernées ici est l’assistance
(art. 312 CF modifié : la modification a consisté à remplacer l’indicatif futur
‘’assistera’’ par l’indicatif présent ‘‘assiste’’ parce que le présent oblige).
Le législateur donne une liste des actes que le majeur doit passer avec
l’assistance de son curateur. D’après l’article 313 du code de la famille, la
personne placée sous culturelle ne peut plaider, transiger, emprunter, recevoir
un capital mobilier et en donner décharge, aliéner ou grever leurs biens
d’hypothèque sans l’assistance de son curateur.
Le tribunal ne peut placer une personne sous l’assistance du curateur que pour
les actes ci-haut énumérées. Ce pour dire que pour les autres actes, le majeur
sous curatelle reste capable.
C. Publicité et cessation de la curatelle
La curatelle est soumise aux mêmes conditions de publicité et de cessation que
l’interdiction judiciaire.
D. Sanction des actes accomplis par les personnes placées sous curatelles
Selon l’article 314 du code de la famille, le régime de nullité des actes
irrégulièrement accomplis par la personne placée sous tutelle est le même que
pour l’interdit. Il en découle que tous les actes accomplis par l’incapable
antérieurement à sa mise sous curatelle sont annulables si le demandeur fait
preuve de l’insanité de l’incapable au moment de l’acte. Il montrera ainsi que
l’intéressé atteint de l’altération des facultés mentales ou corporelles était privé
de la volonté consciente et libre nécessaire à la validité de son acte.
La situation n’est cependant pas la même s’agissant des actes postérieurs au
jugement de mise en curatelle. La personne placée sous curatelle n’étant
incapable que partiellement, son incapacité ne s’étend qu’aux actes
limitativement prévus par la loi. Pour les autres actes, il est capable et peut donc
les passer valablement, même après le jugement de mise sous curatelle.
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284
CHAPITRE II
LE STATUT JURIDIQUE DE LA FEMME MARIEE
CONGOLAISE
On ne peut examiner le statut juridique de la femme mariée sans savoir au
préalable qui est considérée comme femme marie en droit congolais.
Ce chapitre comprend donc deux sections. La première s’attelle à cerner la
notion de la femme mariée en droit congolais (section é) et la deuxième
s’évertue à répondre à la question de savoir si la femme mariée congolaise est
capable ou non en droit (section 2).
Section 1. Notion de la femme mariée en droit congolais
Le principe arrêté sera examiné d’abord (§1) avant l’étude des extensions
admises en la matière par le législateur (§2).
§1. Principe
On appelle femme mariée, celle qui est liée dans un lien de mariage légalement
reconnu c’est-à-dire le mariage célébré directement par l’officier de l’état civil ou
le mariage célébré en famille mais enregistré par l’officier de l’état civil
conformément aux prescrits de la loi du 1er août 1987 portant Code de la famille.
§2. Extensions du principe
Par extension au principe, la loi considère comme femme mariée (légalement),
celle qui se trouve dans l’une de trois hypothèses suivantes :
La femme unie dans le lien d’un mariage monogamique contracté
conformément à la coutume antérieurement à la date d’entrée en
vigueur du code de la famille c’est-à-dire avant le 1er août 1988 (art. 924
CF);
La femme unie dans le lien d’un mariage célébré conformément aux
prescrits de l’ancien code civil livre premier, aujourd’hui abrogé (art. 924
CF);
La femme unie dans le lien d’un mariage polygénique (polygamique)
conclu avant le 1er janvier 1951. Ceci découle de l’interprétation logique
qu’il y a à faire de l’article 925 du Code de la famille qui prévoit que Les
mariages polygyniques conclus selon la coutume avant le premier janvier
1951 sont valides ;
Section 2. La femme mariée : capable ou incapable en droit ?
Le statut juridique de la femme mariée a connu une évolution en droit écrit
congolais. Il sied dans les lignes qui suivent de suivre cette évolution depuis le
Code de la famille de 1987 (§1) jusqu’à la réforme de 2016 (§2).
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
285
3. les majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblis par l’âge ou infirmes placés
sous curatelle.
La capacité de la femme mariée trouve certaines limites conformément à la
présente loi’’.
Le nouvel article 215 a été modifié comme suit : ‘‘Sont incapables aux termes de
la loi :
1. les mineurs ;
2. les majeurs aliénés interdits ;
3. les majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblis par l’âge ou infirmes
placés sous curatelle’’.
Cet alinéa 2, sujet à controverses entre doctrinaires, a été supprimé. Aujourd’hui
donc la capacité de la femme mariée ne fait l’objet d’aucun doute.
La modification de cet article 215 a eu comme conséquence la modification des
articles 444, 445, 448, 449, 451 et 452 du code de la famille et l’abrogation de
l’article 450 du même code :
L’article 444 du Code de la famille qui disposait ‘‘ Le mari est le chef du
ménage. Il doit protection à sa femme; la femme doit obéissance à son
mari’’ est modifié comme suit ‘‘Le mari est le chef du ménage. Les époux
se doivent protection mutuelle’’. La femme mariée n’est donc plus
soumise à l’obéissance en contrepartie de la protection du mari. Au
contraire, les deux époux se doivent mutuellement protection. Par
ailleurs, si la notion du chef de ménage du mari a été conservée, c’est en
synergie avec l’article 445 nouveau du Code de la famille qui consacre le
direction, désormais collégiale, du ménage. Le mari n’est plus ce
monarque absolu qui gouverne seul aux destinées de la femme, il doit à
tout moment se concerter avec son épouse.
L’article 445 du code de la famille qui disposait : ‘‘Sous la direction du
mari, les époux concourent, dans l’intérêt du ménage, à assurer la
direction morale et matérielle de celui- ci’’ a été modifié comme suit :
‘‘Les époux concourent, dans l’intérêt du ménage, à assurer la direction
morale et la gestion financière et matérielle de celui-ci’’. La gestion
financière et morale du ménage n’est donc plus sous la direction du mari
mais elle est assurée, dans l’intérêt de celui-ci, par les deux époux.
L’article 448 du code de la famille qui disposait : ‘‘La femme doit obtenir
l’autorisation de son mari pour tous les actes juridiques dans lesquels elle
s’oblige à une prestation qu’elle doit effectuer en personne’’ est modifié
comme suit : ‘‘Les époux doivent s’accorder pour tous les actes juridiques
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288
C. Du mandat domestique
Notion. Certaines législations reconnaissent à la femme le pouvoir de diriger le
ménage : le pouvoir des clés303. D’autres consacrent la théorie de mandat
domestique tacite. L’idée principale de cette théorie est la suivante : le mari
reste le chef de famille et de la communauté conjugale et à ce titre, il peut seul,
contracter (des dettes) pour le compte de la famille ; mais pour des nécessités
pratiques, le mari contracte par l’intermédiaire de la femme qui le représente.
Sont dès lors considérées comme dettes solidaires des époux, celles qui sont
contractées par l’homme principalement, et par la femme, en vertu du mandat
domestique, dans l’intérêt du ménage. D’un côté la femme ne s’engage pas
personnellement puisqu’elle représente le mari. D’un autre côté, elle est
engagée à cause de la solidarité.
Etat de la question en droit congolais après la réforme de 2016. L’ancien l’article
477 du code de la famille consacrait que le mari dispose du pouvoir de conclure
des contrats relatifs aux charges du ménage; la femme, en application de la
théorie du mandat domestique tacite, peut aussi conclure les mêmes contrats.
Les époux répondent dès lors solidairement des dettes ainsi contractées. Cette
solidarité n’a pas lieu lorsque les dépenses ainsi réalisées présentent un
caractère manifestement exagéré par rapport au train de vie du ménage ou
lorsqu’elles ont été contractées avec un tiers de mauvaise foi. L’article 477
retenait donc trois critères à savoir l’utilité de la dépense, son apport avec le
train de vie de la famille, et l’attitude du tiers contractant c’est-à-dire sa bonne
ou sa mauvaise foi.
Ainsi présenté, cet article était jugé discriminatoire envers la femme mariée car il
consacrait une position prépondérante du mari étant donné que les biens
communs du mariage, les biens propres de la femme voire les biens réservés de
cette dernière pouvaient toujours être engagés par des dettes contractées par
l’époux alors que la femme ne pouvait, sans l’intervention du mari, engager les
biens propres de celui-ci ou les biens communs du ménage. Pire, elle ne pouvait
engager ses propres sans le consentement de son époux. La situation de la
femme était encore plus déplorable dans le régime de communauté universelle
en ce qu’elle pouvait être tenue des dettes antérieures au mariage contractées
par son époux.
Face à toutes ces critiques, le législateur du Code de la famille a modifié l’article
477 comme suit : ‘‘Sans préjudice de l’application de la théorie du mandat
domestique tacite, chaque conjoint, en concertation avec l’autre, dispose du
pouvoir de conclure des contrats relatifs aux charges du ménage. Les
303
L’article 186 de l’ancien code civil suisse déclarait que la femme représente l’union conjugale pour les
besoins du ménage.
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BIBLIOGRAPHIE
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conventionnelles, B.O., 1888.
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mesures d’exécution, B.O., 15 août 1948 (abrogé).
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spécial, 27 juillet 2016.
II. TEXTE REGLEMENTAIRE
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détermination des éléments du nom.
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l’organisation et de la compétence judiciaires’’, Note sous Tribunal de
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296
VI. JURISPRUDENCE
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
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INTRODUCTION ............................................................................................................................ 2
I. DES DIFFÉRENTS SENS DU MOT DROIT .......................................................................... 3
II. EVOLUTION DU DROIT CONGOLAIS DE LA FAMILLE A TRAVERS SES
SOURCES ........................................................................................................................................ 4
III. PLACE DE DROIT CIVIL DANS LES BRANCHES DU DROIT PRIVÉ ....................... 8
1 ÈRE PARTIE .............................................................................................................................. 11
LES PERSONNES .................................................................................................................. 11
TITRE I ......................................................................................................................................... 13
LA PERSONNALITE DES ETRES HUMAINS ............................................................. 13
CHAPITRE I ............................................................................................................................... 14
DE L’EXISTENCE DE LA PERSONNALITE DES ETRES HUMAINS :
ACQUISITION ET PERTE DE LA PERSONNALITE ................................................. 14
Section 1. Acquisition de la personnalité ....................................................................... 14
Section 2. Perte (fin) de la personnalité des êtres humains : le décès ......................... 17
CHAPITRE II ............................................................................................................................. 20
LES DROITS DE LA PERSONNALITE AU SENS PSYCHO-JURIDIQUE ......... 20
Section 1. Notion et différentes sortes des droits de la personnalité ............................ 20
Section 3. Caractères des droits de la personnalité ...................................................... 24
Section 4. Sanctions des atteintes aux droits de la personnalité .................................. 25
CHAPITRE III ............................................................................................................................ 27
LES INCERTITUDES QUANT A L’EXISTENCE DE LA PERSONNE : DE
L’ABSENCE ET DE LA DISPARITION ........................................................................... 27
Section 1. De l’absence ................................................................................................. 27
§1. Notion ...................................................................................................................... 27
§2. La période de présomption d’absence (art. 176 à 183 CF) ..................................... 28
§3. La période de déclaration d’absence : jugement déclaratif d’absence (art. 184 à
190 CF) .......................................................................................................................... 31
§4. La déclaration de décès : jugement déclaratif de décès (art. 191 à 196 CF) ........ 35
Section 2. De la disparition ............................................................................................ 37
§1. Notion de disparition ................................................................................................ 37
§2. Evolution des textes en droit congolais ................................................................... 37
§3. Organisation de la disparition en droit congolais ..................................................... 38
CHAPITRE IV ............................................................................................................................ 41
LES MOYENS JURIDIQUES D’IDENTIFICATION OU D’INDIVIDUALISATION
DES PERSONNES PHYSIQUES ....................................................................................... 41
Section 1. La nationalité ................................................................................................ 41
§1. Situation de la matière en droit congolais ............................................................... 42
§2. Notion de la nationalité ............................................................................................ 42
§3. De l’attribution et de l’acquisition de la nationalité congolaise ................................ 42
Cours de Droit civil congolais. Personnes, Famille et Capacité Professeur Dr Eddy MWANZO Idin’ AMINYE. //
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§1. Des hypothèses où la responsabilité pénale de l’officier de l’état civil peut être
engagée ....................................................................................................................... 138
§2. Des hypothèses où la responsabilité pénale des époux et/ou tiers peut être
engagée ....................................................................................................................... 138
CHAPITRE IV .......................................................................................................................... 140
DES EFFETS DU MARIAGE ............................................................................................. 140
Section 1. Des effets extrapatrimoniaux du mariage ................................................... 141
§1. Obligation de cohabitation ..................................................................................... 141
§2. Obligation de fidélité .............................................................................................. 145
§3. Obligations de soins et d’assistance ..................................................................... 146
§4. Obligations de respect, de considération et d’affection ......................................... 148
Section 3. Des effets patrimoniaux du mariage ........................................................... 148
§1. Régime matrimonial général .................................................................................. 149
§2. Régime matrimonial spécialement choisi par les époux ...................................... 153
§3. L’organisation des régimes matrimoniaux dans le Code de la famille .................. 156
§5. Règles légales particulières régissant les régimes matrimoniaux des époux
commerçants ............................................................................................................... 159
CHAPITRE V ........................................................................................................................... 161
DE LA DISSOLUTION DU MARIAGE ........................................................................... 161
Section 1. Considérations générales ........................................................................... 161
Section 2. Du divorce................................................................................................... 161
§1. Généralités sur le divorce ...................................................................................... 161
§2. Le divorce dans le code de la famille .................................................................... 164
§3. Procédure de divorce en droit positif congolais ..................................................... 165
§4. Effets du divorce dans le Code de la famille ......................................................... 172
SOUS-TITRE II ........................................................................................................................ 177
L’UNION LIBRE ..................................................................................................................... 177
CHAPITRE I ............................................................................................................................. 178
EVOLUTION DE L’INSTITUTION DU CONCUBINAGE EN DROIT
CONGOLAIS ........................................................................................................................... 178
Section 1. Le point de vue du droit constitutionnel ...................................................... 179
Section 2. Union libre et Etat ....................................................................................... 179
CHAPITRE II ........................................................................................................................... 180
LE REGIME JURIDIQUE DE L’UNION LIBRE .......................................................... 180
Section 1. Rapports des concubins avec les tiers ....................................................... 180
Section 2. Rapports des concubins avec les enfants communs ................................. 180
§1. Pendant la durée du concubinage ......................................................................... 180
§2. Après la fin du concubinage .................................................................................. 181
Section 3. Rapports des concubins entre eux ............................................................. 181
§1. Obligation d'entretien entre concubins .................................................................. 182
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