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MERTEUIL

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PARCOURS : INDIVIDU, MORALE ET SOCIETE OE : le roman et le récit du Moyen Âge au XXIème siècle

Lecture linéaire 1 du parcours: extrait de la lettre 81, Les Liaisons dangereuses,


Choderlos de Laclos, 1782

Introduction

Présentation :
Contexte (les Lumières : importance accordée à l’éducation, à la science, réflexion sur la place des femmes
dans la société, affirmation de l’individu) à Auteur (présenter brièvement Laclos) àOeuvre
(résumer le roman) à Texte.
Contexte de l’extrait : cette longue lettre située au centre du roman livre certaines clés de la
personnalité de la marquise de Merteuil. Elle revient sur son passé.
Résumé de l’extrait : dans cette analepse (retour en arrière), la marquise dresse son autoportrait et raconte
son apprentissage. Ce passage souligne la complexité du personnage : la marquise est une héroïne
qui pervertit les valeurs positives du XVIIIème en les détournant à seul profit.

Problématique : En quoi le personnage de la marquise de Merteuil s’affirme-t-il en dehors des


règles morales et sociales ?

Structure de l’extrait : on peut distinguer 2 mouvements.


1. Le regard critique et méprisant que porte Merteuil sur les autres femmes. (l.1 à 9)
2. Le récit de son éducation autodidacte à des fins de dissimulation. (l.10 à 25)

1- Premier mouvement : le regard critique et méprisant de Merteuil sur les autres


femmes.
 L’affirmation de sa différence
« Mais moi » Connecteur d’opposition Merteuil construit son portrait en opposition
aux autres par la mise en valeur initiale de sa
différence.
« moi » , « je »/ « ces Antithèse Elle affirme sa différence radicale et refuse tout
femmes », « autres sentiment d’appartenance ou d’identification
femmes » avec les autres femmes de la société.
« ces femmes Déterminant démonstratif à La marquise porte un jugement méprisant sur
inconsidérées » valeur péjorative ; les femmes de son époque qu’elle juge sans
Qualificatif dépréciatif intelligence.
« donnés au hasard, Rythme ternaire Elle accuse leur absence de sens critique et leur
reçus sans examen et passivité d’esprit Elle ne perçoit pas ces
suivis par hasard » femmes comme des êtres pensants. De même,
la société néglige l’éducation des femmes, les
principes d’éducation sont « donnés au hasard »
 L’affirmation de son émancipation face aux règles sociales de
l’éducation réservée aux filles
« vouée par état au Expression d’une forme de La marquise met en accusation la condition des
silence et à l’inaction » fatalité sociale femmes dans la société. Elle a voulu échapper
au destin que la société lui impose. Elle a
désiré très tôt s’émanciper de cette fatalité
sociale. Les femmes sont en état d’infériorité :
elles sont soumises, donc privées d’autonomie
et de parole, d’action. La marquise a cherché à
dépasser sa condition comme le soulignent le
verbe de parole « je dis » (≠ « silence ») et
d’action « je les ai créés » (≠ « inaction »)
« on me croyait étourdie Pronom indéfini Ce pronom a valeur générale. Cette
ou distraite » impersonnalité désigne le regard social porté
sur les filles. Les jeunes filles sont considérées
inférieures intellectuellement. La marquise,
très jeune, a développé son intelligence
critique : « j’ai su », « je recueillais avec soin »
« les discours qu’on Antithèse Merteuil a , très jeune, perçu l’hypocrisie
s’empressait de me morale de la société qui enseigne aux jeunes
tenir », « ceux qu’on filles des vertus qui ne sont pas respectées
cherchait à me cacher »
 L’affirmation orgueilleuse de soi
« je », « moi », « mes Omniprésence de la 1ère Révèle l'hypertrophie du moi. Presque toutes
principes », « mes personne les phrases sont centrées sur la 1 ère pers qui
profondes réflexions » s’affirme avec force en signe d’égocentrisme.
Merteuil affirme une individualité unique et
souveraine qui témoigne d’une véritable
émancipation par rapport à la condition de la
femme qui était sous tutelle. Ici la marquise
revendique son indépendance d’esprit dans le
culte du moi. Merteuil dirige sa pensée.
« je suis mon ouvrage » Définition de soi Auto-enfantement. Mme de Merteuil s’est
formée, s’est créée. Elle n’a plus d’autre maître
qu’elle-même.

Le XVIIIème prône l’individu mais Mme de Merteuil le pervertit par son orgueil. Elle remet aussi en
cause les lois sociales qui rabaissent les femmes. Son discours est vindicatif. L’éducation qu’elle s’est
donnée relève de la revanche par rapport à une société qui l’aurait cantonnée à un rôle subalterne en
tant que femme.

2- Deuxième mouvement : le récit d’une éducation autodidacte.


 Une éducation personnelle
« m’instruire », Champ lexical de l’éducation Mme de Merteuil est son propre maître, sa
« m’apprit », « je accompagné des marques de propre élève, son propre objet d’étude. Elle
m’étudiais ». la 1ère personne. fonctionne en autonomie dans une éducation
très exigeante
« je me suis Lexique de la souffrance Le terme « travail »renvoie à la torture. Elle se
travaillée avec le même forme aussi dans la souffrance. Le lexique
soin et plus de peine» montre son assiduité, le sérieux et la rigueur
du travail qu'elle s'est assignée au prix de la
douleur.
« utile curiosité » La marquise va d’abord se livrer à une
observation intelligente de son milieu. Elle
applique certains principes des philosophes
des Lumières : observation puis déduction.
Ceci lui permet de découvrir ce qu'on veut lui
cacher.
« j’essayai », « je Lexique de l’apprentissage Puis vient le temps de la mise en pratique, de
tâchai », « j’ai porté le l’entraînement en société. Cet apprentissage
zèle » passe par différentes tentatives, des exercices,
des efforts. Les étapes de cet apprentissage
sont progressives : elle apprend à contrôler son
regard puis son visage, puis ses discours et ses
gestes comme le souligne la progression du
passage.
« j’ai su prendre », Lexique de la réussite Cet apprentissage débouche enfin sur la
« j’obtins », « j’ai su réussite dans la maîtrise de soi et sur un savoir.
prendre », « 1er succès » Elle est désormais capable de masquer.
 La dissimulation
« dissimuler », Lexique de la dissimulation Merteuil vise à contrôler, à dissimuler et à
« cacher », « réprimer » simuler ses sentiments .Il s’agit de cacher ses
véritables émotions. En ayant observé
l’hypocrisie de la société, elle a appris elle-
même à dissimuler à son tour.
« chagrin »/ « sérénité », Réseau d’antithèses Elle montre le contraire de ce qu'elle ressent,
« joie »
vise à contrôler ses sentiments, ses émotions et
« douleur »/ « plaisir »
à en simuler d’autres.
« je ne montrai plus que Tournure restrictive Elle compose alors un art du paraître : elle se
celle qu’il m’était utile de crée un masque. Merteuil est hypocrite au
laisser voir » sens étymologique d’acteur. Son être profond
devient impénétrable au regard d’autrui.
 La revanche personnelle et sociale
« utile » Reprise de l’adjectif Elle s’est créé une éducation libertine : elle a
construit ses propres règles de conduite dans
le but de dominer. Tout est calculé en fonction
de son profit.
« fantaisies », « je Lexique du divertissement Plaisir de la domination du jeu, de la duplicité
m’amusais » et du pouvoir sur les autres. elle retire du
plaisir des résultats de son éducation qui lui
offrent une « puissance » et une autonomie.
« munie de ses premières Métaphore guerrière Elle perçoit la société comme une ennemie.
armes » L’idée d’une revanche la motive : elle cherche à
dépasser sa condition.
« je n’avais à moi que ma Merteuil recherche une autonomie, la liberté
pensée et je m’indignais de sa pensée (Au XVIII° siècle, les Lumières
qu’on pût me la ravir », prônent que chaque individu est libre de
penser.). Elle ne veut se laisser surprendre par
« ma façon de penser fut rien, ni personne, rester en toute situation
pour moi seule » maîtresse d'elle-même. « je m'indignais »
exprime son fort ressentiment à l’idée qu’on
puisse mettre en danger son indépendance.

Conclusion :
Cet extrait livre le portrait d’un personnage complexe. On est très loin de la représentation du libertin qui
s’adonne au plaisir par futilité.
La marquise de Merteuil est un personnage amoral et condamnable. Mais le libertinage de la marquise de
Merteuil est né de son désir de revanche sociale : elle a refusé très jeune la place subalterne que lui
imposait la société, en tant que femme.
Mais pour gagner cette autonomie, elle a perverti les valeurs des Lumières. Si elle remet en cause avec
raison la condition des femmes dans la société, elle utilise des moyens condamnables (la manipulation, la
dissimulation, la domination, le libertinage de moeurs). Elle recherche la vengeance : « née pour venger mon
sexe et maîtriser le vôtre ».
Ceci la conduit à une affirmation orgueilleuse et démesurée d’elle-même.

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