Aux Sources de Histoire Du Pays Soninké
Aux Sources de Histoire Du Pays Soninké
Aux Sources de Histoire Du Pays Soninké
Abstract
M. Chastanet — At the Sources of the History of the Soninke Country: The Case of Kingi (Mali).
In La graine de la parole, the subject of this article, Mamadou Diawara discusses the various types (whether from families or
specialists) of historical oral traditions in the Kingi state from the fifteenth till the mid-nineteenth century. He relates these
traditions' social and political functions to social changes, and analyzes the more or less formal ways in which they have been
transmitted. Emphasis is laid on the roles of women and slaves.
Chastanet Monique. Aux sources de l'histoire du pays soninké : le cas du Mali. In: Cahiers d'études africaines, vol. 30, n°118,
1990. pp. 199-203;
doi : https://doi.org/10.3406/cea.1990.1621
https://www.persee.fr/doc/cea_0008-0055_1990_num_30_118_1621
Monique Chastanet
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Cette complexité des structures sociales se traduit notamment par une grande diver
sité des traditions historiques dont analyse fait objet des seconde et troisième par
ties côté des mémorialistes officiels que sont les clients auteur attire notre atten
tion sur des domaines moins connus ou moins exploités les traditions familiales
leur caractère spécifique en milieu maraboutique et le rôle des femmes dans les diffé
rentes couches sociales Aristocrates gens du commun et certaines catégories serviles
produisent des récits historiques familiaux travers lesquels chaque clan lignage
ou segment de lignage affirme son identité et ses droits En fonction du caractère
plus ou moins secret des informations ce savoir est hiérarchisé en plusieurs niveaux
et peut être diffusé un auditoire plus ou moins large de parents ou alliés Dans
chaque famille des érudits en sont la fois les dépositaires et les créateurs Ils trans
mettent ces traditions leurs disciples dans le cadre un enseignement informel au
gré des circonstances est travers ces récits que les familles libres dominées les
soninké au sens politique du terme rappellent leur passé prestigieux avant la prise
du pouvoir par les Jawara Les clients évoquent leur propre histoire dans ces tradi
tions familiales usage interne qui sont bien distinctes de leur production offi
cielle Celle-ci constitue depuis longtemps une source privilégiée de histoire afri
caine étude de Diawara présente néanmoins intérêt de la resituer dans une
production historique plus large et en faire une analyse précise
On distingue quatre groupes de traditionnistes au Kingi qui jouent également
le rôle de conseillers et intermédiaires auprès de leurs patrons aristocrates et gens
du commun pour la plupart est au cours de cérémonies ou sur leur propre initia
tive ils interviennent Ils composent leurs uvres partir informations obtenues
auprès de leurs protecteurs mais aussi de différents informateurs La multiplicité des
sources de leur savoir leur permet de connaître le passé dans ses aspects positifs
et négatifs et alimenter alternance éloge et de satire qui caractérise leurs
prises de parole De là vient leur pouvoir et la crainte ils suscitent malgré leur
statut de dépendants auteur donne un aper de la variété de leur répertoire cons
titué de textes formalisés qui peuvent être dits ou chantés avec ou sans instruments
selon le groupe social et le sexe du traditionniste
la différence des traditions familiales et pour les hommes du moins ce réper
toire fait objet un enseignement très formalisé Il existe des écoles et des cursus
particuliers chaque groupe On retrouve cependant des traits communs dans orga
nisation des études Les élèves passent leur enfance et leur adolescence dans la famille
de leur maître où ils participent certaines tâches matérielles enseignement est
quotidien les contrôles réguliers La première étape qui repose surtout sur la mémo
risation achève au moment de la circoncision avec une première prestation publi
que La seconde fait davantage appel initiative des élèves et peut prendre des
formes plus personnalisées Elle aboutit une cérémonie de consécration publique
Après une période transitoire où le jeune traditionniste cherche acquérir une plus
grande maîtrise et mériter les bénédictions de son maître il commence composer
et travailler pour son compte Mais son apprentissage ne cesse jamais il
est un enquêteur vie pour reprendre une formule de auteur
La troisième partie intitulée les traditions orales au féminin est consacrée
aux femmes libres et esclaves ainsi aux marabouts qui sont des personnes-
femmes selon une expression soninké Cette conception renvoie leur non partici
pation la guerre et au soutien magique ils apportent aux femmes dans leurs
entreprises de séduction Là arrête leur part féminine avec la raison être de ce
regroupement puisque le chapitre qui les concerne porte sur influence de islam
et sur le rôle de écrit dans le domaine des traditions historiques auteur évoque
la négation par les marabouts de leur ascendance soninké au profit une prétendue
origine arabo-musulmane ainsi que usage de alphabet arabe pour transcrire leur
généalogie Cet usage limité aux marabouts dans le cadre du Kingi était plus large
au Gajaaga puisque selon Bathily 1989 18 des traditionnistes de école de Sebeku
AUX SOURCES DE HISTOIRE DU PAYS SONINKE 201
avaient recours Mais islam exer ait peut-être une influence plus profonde dans
cette région que dans le royaume de Jäära Toutefois au-delà des différences indiscu
tables entre marabouts et traditionnistes aurait-il pas des rapprochements faire
au niveau du renforcement des liens propédeutiques par des alliances matrimoniales
ou du déroulement des études organisation familiale de enseignement recherche
de la baraka du maître comme du marabout cadeau marquant la fin des études
etc. Après une analyse de influence de écrit sur oral on égare dans une con
clusion qui pas grand-chose voir avec le milieu maraboutique Quant aux tradi
tions féminines auteur note emblée les limites de son approche il pouvait diffici
lement accéder ces sources en tant homme Ce problème est surtout sensible
dans la partie consacrée aux femmes de statut libre On retrouve une approche plus
fine dans analyse du savoir féminin des gens de la bouche intérieur des
différents groupes de traditionnistes une division sexuelle du travail opère selon
on chante déclame ou fredonne ou selon que on se sert ou non un instru
ment La formation des femmes est beaucoup moins systématique que celle des hom
mes et relève surtout de entourage Des études sont obligatoires pour les femmes
un seul des quatre groupes Elles se déroulent abord dans le cadre familial puis
sont complétées chez erudite du village mais sans emploi du temps régulier ni for
malités particulières Des femmes cependant sont restées célèbres pour leur grand
talent et pour autorité dont elles ont fait preuve dans certains domaines
étude la plus originale de cette troisième partie est celle consacrée aux traditions
des femmes esclaves auteur aborde le problème de la parenté en milieu servile
question qui aurait mérité être évoquée plus haut dès la présentation de leurs tradi
tions familiales Deux situations assez différentes se présentent les serviteurs de la
cour constituent des familles part entière comme les hommes libres et selon le même
mode de filiation patrilineaire Les autres esclaves en revanche sont exclus des struc
tures de parenté soninké homme ayant aucun droit sur sa descendance et les enfants
appartenant au propriétaire de leur mère Il existe cependant une conscience familiale
et des récits généalogiques chez les esclaves de vieille souche Mais pour ensemble
des catégories serviles les femmes jouent un rôle prépondérant dans le rappel du
passé Ce sont elles qui composent et chantent les deux types de traditions analysées
ici histoire des serviteurs de la couronne ou tanbasire et les chants des esclaves
de vieille souche ou worson suugu Le tanbasire apparu au Kingi fin xv -début
xvne siècle célèbre la geste de ce groupe esclaves alliés au pouvoir ses héros mas
culins en particulier2 Les femmes de cette catégorie sociale héritent de ce patrimoine
ainsi que les femmes une lignée Jawara dont ancêtre épousé une femme de ce
statut Mais seules les premières ont le droit de le chanter apprentissage rappelle
par son caractère informel celui des femmes traditionnistes Là aussi entourage
familial et des spécialistes réputées pour leur savoir jouent un rôle complémentaire
Quant aux worson suugu ils sont exécutés par les femmes esclaves de vieille souche
lors des cérémonies marquant la vie de leur groupe social ou pour animer les fêtes
organisées par leurs maîtres La mélodie et la danse en sont des composantes tout
aussi importantes que les paroles apprentissage est occasionnel et encore plus infor
mel que pour le tanbasire
Ces deux types de chants font beaucoup intervenir la louange et la satire qui
dans la bouche des esclaves peut aller très loin auteur déjà évoqué ce procédé
chez les traditionnistes Mais les hommes libres ont également recours notamment
dans certains chants qui accompagnent les travaux agricoles et domestiques alter
nance éloge et de médisance permet de conforter la norme tout en laissant libre
cours certaines tensions Cette structuration de la littérature orale constitue un
Le tanbasire existe sous cette appellation au Xanyaanga voisin dans un contexte politique
sensiblement différent ignore si des esclaves de même statut en détiennent des formes
équivalentes dans autres régions soninké
202 MONIQUE CHASTANET
Cf TAUZIN 1989
AUX SOURCES DE HISTOIRE DU PAYS SONINKE 203
une réflexion sur sa position de chercheur autochtone ses avantages et ses inconvé
nients Il met accent sur ces derniers plus rarement évoqués Certains de ces
problèmes toutefois ne sont pas inconnus des chercheurs étrangers comme le choix
un hôte et un intermédiaire ou le respect dû aux aînés même si les contraintes
sont moins lourdes on est pas du pays Particulièrement intéressante est la
mise en perspective du statut du savoir et des règles de sa recherche dans la société
soninké et dans le cadre universitaire deux logiques souvent incompatibles et dont
la conciliation exige une grande persévérance auteur souligne enfin la complémen
tarité des chercheurs autochtones et étrangers et remet en cause idée que la proxi
mité ou la distance des uns et des autres serait la source une plus grande
autorité ajouterai pour ma part une distanciation est toujours nécessaire on
appartienne ou non la société étudiée et elle est abord intérieure
Pour en venir des remarques générales sur ensemble de ouvrage je voudrais
souligner certaines qualités comme le souci constant de auteur de distinguer la norme
de la réalité la multiplicité des exemples concrets ou le recours fréquent des mises
en scène très parlantes On déplore outre certaines maladresses expression que le
plan ne soit pas toujours cohérent et que cela rende la lecture parfois laborieuse
La traduction des citations est très précise et accompagne une analyse étymologi
que tout fait utile Quant la terminologie socio-politique le refus des traductions
faciles qui appauvrissent la réalité peut se justifier un tage étant pas un forge
ron par exemple mais un forgeron était-il que cela dans le monde rural fran
ais inconvénient de ce parti-pris est il rend les comparaisons avec autres
sociétés un peu difficiles et il demande au lecteur un effort de mémorisation digne
un apprenti traditionniste Malgré ces réserves ce travail constitue un apport incon
testable la connaissance du pays soninké et une belle le on de critique historique
BIBLIOGRAPHIE
BATHILY
1989 Les portes de or Le royaume de Galam Sénégal de ère musulmane au
temps des négriers vià-xvnà siècles) Paris Harmattan
DIAWARA
1990 La graine de la parole Dimension sociale et politique des traditions orales
du royaume de Jäära Mali du xve au milieu du xixe siècles Stuttgart Stei
ner Verlag Stuttgart
TAUZIN
1989 Le gigot et encrier Maîtres et esclaves en Mauritanie travers la littéra
ture orale Revue études du Monde musulman et méditerranéen 51
74-90