Comptabilité ABC
Comptabilité ABC
Comptabilité ABC
Le subventionnement croisé entre objets de coût, généré par la méthode des coûts
complets se manifeste par (i) une surestimation du coût de revient complet de certains
objet de coût, (ii) une sous-estimation du coût de revient complet d'autres objets de
coût, qui compense la surestimation. Trois situations sont susceptibles d'expliquer le
subventionnement : l'hétérogénéité des activités dans un centre d'analyse,
l'hétérogénéité des coûts des activités et l'hétérogénéité du portefeuille de produits.
Ici on veut démontrer que la perte d'homogénéité dans le regroupement des charges a
des répercutions sur les coûts des produits. L'exemple ci-dessous illustre cette
situation.
Soit un centre de fabrication qui usine trois produits A, B et C dans les conditions
suivantes :
A B C
Volume de produits 1200 1200 1200
Temps unitaire (HMOD) 0,20 h 0,80 h 0,50h
Sachant que le coût total du centre est de 72 000 f, l'unité d'œuvre est l'heure de main
d'œuvre HMOD et qu'il est prévu une activité de 1 800h, quel est le coût unitaire de
chacun des produits ?
A B C
Volume de produits 1200 1200 1200
Temps unitaire (HMOD) 0,20 h 0,80 h 0,50h
Coût unitaire des produits 8 32 20
40 x 0,20 40 x 0,80 40 x 0,50
coût de l'unité d'œuvre 72 000/ 1800 = 40 f
Une étude plus précise des tâches de ce centre conduit à mettre en évidence deux
activités distinctes : une activité d'usinage à proprement parler et une activité de
mesure préalable à la précédente.
Les conditions de temps sont les suivantes pour l'activité "mesure"
A B C
Temps unitaire 0,25h 0,15h 0,10h
Temps total (HMOD) 300 h 180 h 120 h
Le tableau de répartition des charges entre les centres d'analyse se présente comme
suit :
Mesure usinage
Montant total 18 000 54 000
Nature de l'unité d'œuvre HMOD HMDO
Nombre d'unités d'œuvre 600 1 800
Coût de l'unité d'œuvre 30 f 30 f
On a décidé d'obtenir des coûts unitaires identiques pour les deux activités afin de
mettre en évidence l'influence unique des conditions différentes d'usinage et de
mesure.
Les nouvelles imputations des charges sur les coûts des produits deviennent
A B C
Activité mesure 7,5 f 4,5 f 3,0 f
(30 x 0,25)
Activité usinage 6,0 f 24,0 15,0
(30 x 0,20)
Coût unitaire 13,5 28,5 18,0
L'hétérogénéité des coûts des activités suppose que les coûts des unités d'œuvre ne
sont plus les mêmes dans les ateliers. Ce qui veut dire que certaines activités sont plus
coûteuses que les autres. Reprenons l'exemple ci-dessus et considérons un autre
partage du coût des deux activités.
Mesure usinage
Montant total 25 200 46 800
Nature de l'unité d'œuvre HMOD HMDO
Nombre d'unités d'œuvre 600 1800
Coût de l'unité d'œuvre 42 f 26 f
Les nouvelles imputations des charges sur les coûts des produits deviennent les
suivantes :
A B C
Activité "mesure" 10,5 6,3 4,2
42 x 0,25
Activité usinage 5,2 20,8 13,0
26 x 0,20
Coût unitaire 15,7 27,1 17,2
Les coûts imputés sur les produits sont fortement influencés par la taille des lots et du
nombre d'articles produits. Pour le démontrer comparons le coût de revient complet
d'un produit standard fabriqué en grande série dans deux entreprises A et B.
L'entreprise A est spécialisée dans la production industrielle de masse de produits
standardisés et l'entreprise B combine la production standardisée de masse avec la
fabrication de produits personnalisés en petite série pour accéder à la demande d'un
certain nombre de clients. L'une et l'autre ont le même volume total de production, un
processus de fabrication indentique composé de deux étapes réalisées dans deux
ateliers séparés (atelier 1 et 2). A et B utilisent les coûts complets et les charges
indirectes allouées aux deux centres principaux qui correspondent aux deux ateliers.
L'unité d'œuvre utilisée pour allouer les coûts des ateliers de production aux
produits est l'heure de travail de production. Chaque produit requiert exactement le
même temps de production, soit 1/100 d'heure dans l'atelier 1 et 1/50 d'heure dans
l'atelier 2. Le tableau ci-dessous montre une analyse comparative de l'offre de produits
et de la structure de coûts de deux entreprises.
A B
Produits fabriqués 10 000 000 10 000 000
Nbre de variétés 20 en 500 000 500 en séries
unités de 500 à 500
000 unités
Nbre de centres d'analyse 2 2
Atelier 1 Atelier2 Atelier 1 Atelier 2
Unit d'œuvre Heure de Heure de Heure de Heure de
travail de travail de travail de travail de
production production production production
Coût total de l'atelier 2 000 000 5 000 000 3 000 000 7 600 000
Nbre total d'unités d'œuvre 100 000 ha 200 000 h b 100 000 h c 200 000h d
Coût unitaire de l'unité 20,00 25,00 30,00 38,00
d'oeuvre
a) 10 000 000 produits x 1/100 d'heure = 100 000 heures
b)10 000 000 produits x 1/50 d'heure = 200 000 heures
c) 10 000 000 produits x 1/100 d'heure = 100 000 heures
d) 10 000 000 produits x 1/50 d'heure = 200 000 heures
L'analyse du tableau fait apparaître un total de charges indirectes plus important dans
les ateliers de production de B et, en conséquence un coût unitaire de l'heure de travail
de chaque atelier plus élevé dans B que dans A. cet accroissement du coût total des
ateliers de production de B s'explique essentiellement par la gestion de la complexité
engendrée par un portefeuille de produits beaucoup plus diversifié. La croissance de la
diversification entraîne d'une part, une augmentation des besoins de coordination de la
production et, d'autre part la nécessité de procéder plus fréquemment à un certain
nombre d'opérations par exemple la préparation et le réglage de la ligne de production
afin de l'adapter aux caractéristques du produit, les mouvements de matière, la gestion
de stock.
Pour illustrer cette assertion, le tableau ci-dessous compare le coût de revient
complet de production d'un produit standardisé fabriqué en 500 000 exemplaires dans
les deux usines A et B. Le coût de la matière première est le même pour A et B. la
technologie est identique et les structures de rémunération des travailleurs sont
équivalentes.
A B
Volume de production 500 000 500 000
Coût matière première par produit 0,5 0,5
Quantité d'heures de l'atelier1a 5 000 5 000
Quantité d'heure de l'atelier 2b 10 000 10 000
Coût unitaire unité d'œuvre at.1 20,0 30,0
Coût unitaire uunité d'œuvre at.2 25,0 38,0
Coût complet totalc 600 000 780 000
Coût complet unitaire 1,2 1,56
a) chaque produit nécessite 1/100 d'heure de l'atelier 1 dans les deux entreprises. 500 000 x
1/100 = 5000 heures
b) chaque produit nécessite 1/50 d'heure de l'atelier 2 dans les deux entreprises. 500 000 x
1/50 = 10 000 heures
c) on obtient le coût total en additionnant le coût de matières premières et le coût des deux
ateliers de production. Dans A par exemple ( 500 000 x 0,5) + (5 000 x 20) + (10 000 x 25).
Tout un programme de recherche sur la méthode ABC a vu le jour aux USA en 1986.
Il est appelé CMS (cost management system). La recherche part de la constation que
ce ne sont pas les produits qui consomment les ressources de l'entreprise mais plutôt
les activités. Et les diverses activités de l'entreprise sont utilisées par les produits.
Il semble alors plus logique de découper l'entreprise par activité et non par
fonction et par produits. Dans ce cas, les unités d'œuvre sont remplacées par les
inducteurs d'activités qui servent à mesurer le volume d'activité et sont donc explicatifs
des coûts.
On comprend donc que c'est sur la notion de valeur que se fonde la comptabilité
par activités en partant de l'articulation activités-produits. On doit alors répondre à la
question suivante : quelles activités sont nécessaires pour donner la valeur aux produits
et que coûte chaque activité ? pour répondre au premier volet de cette question, la
méthode s'inspire du concept de chaîne de valeur mis en évidence par Porter. Selon ce
concept, on distingue dans l'entreprise les activités de soutien et les activités
prioritaires qui constituent la chaîne de valeur.
Les activités de soutien sont : les infrastructures de l'entreprise, la gestion des
ressources humaines et le développement de la technologie. Les activités prioritaires
quant à elles sont notamment : la logistique interne, les opérations de production, la
logistique externe, le marketing et vente et les services.
L'entreprise cherche à augmenter la valeur de son produit. Pour ce faire,
chacune de ses fonctions doit améliorer la valeur apportée par son activité. La
comptabilité analytique ignore les activités de soutien, pourtant créatrice de valeur et
regroupe l'ensemble de leurs charges sous la rubrique fraix généraux.
En définitive, le principe de la méthode ABC consiste à découper l'activité
générale de l'entreprise autrement qu'en centres de responsabilité. La ventilation des
coûts se fait sur la base des activités élémentaires et pour chacune d'elles, on détermine
une unité de consommation des ressources.
L'activité constitue la maille d'analyse élémentaire de la méthode ABC parce que les
charges indirectes aux objets de coût sont regroupées par activité. A cet effet,
l'application de la méthode exige de collecter pour chaque activité un ensemble
d'informations financières et non financières :
-l'output principal et les outputs secondaires éventuels tant de nature physique
qu'informationnelle
-les inputs physiques et informationnels nécessaires à la réalisation de l'activité
-le mode opératoire de l'activité c'est-à-dire la manière dont l'activité est réalisée
-le client de l'activité qui bénéficie des outputs de celle-ci. Le client peut être interne
tel que l'activité suivante du processus ou externe
-l'unité de mesure de l'activité qui servira de base d'allocation pour répartir les coûts de
l'activité entre les objets de coûts qui l'ont utilisée.
-la capacité installée de l'activité donnée par le nombre d'unités de mesure de l'activité
-l'inducteur d'activité qui est le facteur de causalité qui déclenche la réalisation de
l'activité
-les critères de mesure de performance financière et non financière de l'activité tels
ques le coût, la qualité ou le delai.
Sur le plan concepruel, l'activité est le plus souvent une composante d'un processus.
Selon le programme CMS le processus est un ensemble, une série d'activités liées pour
réaliser un objectif spécifique. Par exemple, l'assemblage d'un poste de télévision ou le
paiement d'une facture nécessite plusieurs activités liées. Selon Hammer et Champy
(1993) il s'agit d'une suite d'activités qui, à partir d'une ou plusieurs entrées (inputs)
produit un résultat (output) représentant une valeur pour un client. Pour Lorino (2003)
en revanche, le processus est un ensemble d'activités :
-reliées entre elles par des flux d'informations ou de manière significative
-et qui se combinent pour fournir un produit matériel ou immatériel important et bien
défini
En synthèse à ces différentes définitions, nous trouvons qu'un processus peut être
transversal à l'organisation fonctionnelle classique et peut alors regrouper des activités
appartenant à des fonctions différentes (production, vente, approvisionnement). Les
activités de règlement des clients dans un centre postal ci-dessus peuvent être
regroupées en trois processus : processus de paiement en espèces, processus de
paiement par carte débit crédit et processus de règlement par chèque
Dans la comptabilité à base d'activité, l'objet de coût retenu peut être le produit ou le
service. Il existe au moins trois sources de variabilité du coût des activités à l'égard des
services ou des produits :
- Certaines activités sont effectuées pour chaque unité de produit ou de service. Elles
ont un comportement de coût conforme au coût variable classique
- certaines activités sont effectuées chaque fois qu'un lot de produits est mis en
fabrication, quelle que soit sa taille. La source de variabilité du coût de ces activités est
le nombre de lots fabriqués ou le temps de réalisation des lots
-certaines activités sont accomplies chaque fois qu'un nouveau produit ou service est
développé par l'entreprise. Le coût de ces activités ne varie pas avec le volume
d'activité ni avec le nombre de lots. La source de variabilité ici est le nombre de
nouveaux produits développés par l'entreprise
Nous savons déjà que l'activité décrit ce que les différents services font. Nous allons
présenter dans l'exemple ci-dessous un ensemble d'activités regroupées dans les
processus ou centres d'analyses et qui montre que la méthode ABC dépasse le cadre
des découpages fonctionnels pour exprimer une vision transversale de l'entreprise.
Tableau : activités dans un centre de fabrication
L'objectif recherché dans cette phase est de faire disparaître l'arbitraire existant dans
l'imputation des ressources mise en place dans la méthode des coûts complets. En
effet, si de nombreuses consommations sont indirectes par rapport aux produits, elles
sont directes par rapport aux activités. On n'a donc plus besoin des clés de répartition
pour affecter certaines charges indirectes par rapport aux produits. C'est pourquoi le
postulat de la méthode ABC est que : les activités consomment les ressources et les
produits consomment les activités. Un exemple de présentation des ressources
consommées par les activités se trouve ci-dessus.
Tableau : ventilation des resosurces consommées par les activités
Une fois que les inducteurs possibles ont été recensés, il s'agit ici de déterminer les
inducteurs à retenir. Cette analyse se présente sous forme de matrice et permet
d'obtenir des centres de regroupement pour lesquels l'inducteur et le même.
A1 A2 A3 A4 A5 A6 A7 A8 A9 A10 A11
Temps d'usinage x
Nombre de lignes de productions x x x
Nombre de lots expédiés x x
Nombre de receptions x x
Nombre de clients desservis x
Nombre de produits x x
Nombre de références x x x x x
Nombre de fournisseurs x
Nombre de lots d'usinage x x
Pour déterminer le volume des inducteurs, on fait appel aux informations techniques
sur les conditions de fabrication. Ces données sont réunies dans le tableau ci-dessous.
Produits P1 P2 P3
Quantité produite 1000 2000 5000
Composant 1 (120 f la pièce) 1 1 1
Composant 2 (180 f la pièce) 1 1
Composant 3 (260 f la pièce) 1 1
Composant 4 (270 f la pièce) 1
Main-d'œuvre directe (360 f/h) 0,20h 0,80h 0,50h
Ligne de production L1 L2 L1
Nombre de lots expédiés 10 5 25
Nombre de lots d'usinage 2 4 50
Il s'agit le plus souvent d'obtenir le coût de revient des produits mais la richesse de la
méthode permet de calculer les coûts de production d'autres éléments tels que les
lignes de produits, les processus. Quelque soit le cas, l'affectation se fonde sur
l'architecture suivante :
Objets
Charges
Charges incorporables
de coût
directes
Charges Activité1
Indirectes
Activité2
Activité3
Pour trouver le coût unitaire de production des produits, il faut au préalable dans un
tableau spécifique calculer le coût global des activités consommées par chaque
produit. Cette étape nécessite d'intégrer la notion de volume de production. La logique
de ces calculs consiste à répartir le coût unitaire de l'inducteur dans le coût unitaire du
produit en tenant compte du nombre de produits fabriqués.
Pour l'exemple de ce chapitre, nous obtenons le tableau suivant qui traite les charges
indirectes
(9) explications relatives au calcul des coûts unitaires quand l'inducteur est un lot. Par rapport aux lots, la notion
de volume n'est pas à retenir. Chaque lot de production consomme le coût de l'inducteur concerné mais la part
attribuable au coût unitaire du produit dépend du nombre de produits par lot. Ainsi, toutes les productions
consomment le coût de l'inducteur "lots expédiés" soit 8 200 mais ce coût concerne 100 produits P1 c'est-à-dire
8200/100= 82 f par P1, alors qu'il concerne 400 produits P2 c'est-à-dire 8200/400=20,5 par unité P2. On constate
que la prise en compte au niveau du coût de production unitaire des produits est quatre fois plus faible pour P2
que pour P1
4-ETUDE DE CAS
Questions :
1) quel est le coût du conditionnement de chaque produit dans le système de
comptabilité analytique
2) compte tenu des informations fournies par le responsable d'atelier, calculer le
nouveau coût du conditionnement. Analyser les écarts obtenus avec la méthode
traditionnelle à la lumière de la notion du subventionnement. Retrouver et justifier ces
écarts.
3) calculer le montant des frais de conditionnement à imputer aux produits en prenant
pour base les données de l'étude du responsable logistique. Qu'en pensez-vous ?
4) en quoi les chiffres obtenus à la question 3 sont-ils plus pertinents que les
précédents ?