Them 1999 Restauration

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Archives cantonales vaudoises

Rapport d'activité 1999 : dossier thématique

Conservation préventive et restauration


aux Archives cantonales vaudoises :
une chaîne de solidarités
Introduction
La notion d’archives est indissociable de la notion de la conservation. Mieux, elle ne
peut pas être séparée des conditions de l’acquisition, de la consultation, de l’exposition et de
la pérennisation des documents. Il n’y a pas d’accès à l’information si la conservation ne
peut pas être garantie. Permettre l’exploitation des archives, c’est d’abord assurer que les
archives peuvent nous parvenir depuis leur création, puis veiller à leur bon état, enfin les
préserver de la destruction, de l’altération et du vol pour les générations futures. Il est
judicieux de rappeler que les Archives cantonales vaudoises ne prennent en compte dans
leur estimation que les documents voués à une conservation définitive et dont l’importance
sera sanctionnée à terme par leur venue dans le dépôt cantonal d’archives. Savoir conserver,
c’est faire des choix, imposer des contraintes et concilier les contradictions qui parsèment la
réflexion. Parler de conservation préventive, c’est mettre en place de nouveaux partenariats,
créer des passerelles entre les restaurateurs et les archivistes.
Nous nous risquons à livrer diverses expériences entreprises par notre institution, sans
toutes les commenter ni les expliciter. Elles s’expliquent largement par le contexte dans
lequel elles s’effectuent, et par l’histoire des Archives cantonales vaudoises. Il est
indispensable de garder à l’esprit que l’évolution des approches a été considérable dans le
domaine de la conservation et que ce qui était affirmé comme suffisant, juste et approprié
par la commission de construction des Archives cantonales vaudoises, il y a une vingtaine
d’années, ne l’est plus nécessairement aujourd’hui ; de nombreux aspects sont venus
s’ajouter aux considérations de départ1. Nos commentaires ne sont pas une atteinte à ce qui a
été fait, mais un réexamen critique de ce que nous avons reçu à la lumière des progrès des
exigences des politiques conservatoires et de préservation. Nous sommes heureux de
constater que les personnes qui ont participé à la construction du bâtiment, en particulier les
architectes (l’Atelier Cube, Lausanne) et le Service des bâtiments, ont accepté et favorisé la
prise en compte de nouvelles exigences.
1
La conservation préventive est aujourd’hui au cœur des préoccupations des spécialistes du patrimoine, sa justification
et sa normalisation sont de date récente - à preuve, elle n’est pas encore formulée comme telle dans l’ouvrage de
référence de Andrea Giovannini, De tutela librorum. La conservation des livres et des documents d’archives. Die
Erhaltung von Büchern und Archivalien, 2e éd. revue et augmentée. Traduction allemande Marie Besson, Genève,
Editions IES, 1999, 526 p. (“ Les cours de l’ies ”, No 3). Parmi les titres parus sur le sujet, citons Dalley, Jane, Guide
d’évaluation des conditions de préservation dans les services d’archives, Ottawa, Conseil canadien des archives, 1995,
93 p. ; Marrelli, Nancy, La gestion de la préservation . Un manuel pratique pour les services d’archives, Montréal,
Réseau des archives du Québec, 1996, 111 p. (comprend une bibliographie sélective commentée) - ouvrage traduit de
l’anglais Implementing preservation management : a How-to-manual for archives, Montréal, Réseau des archives du
Québec, 1996 ; La préservation et l’intervention en cas de sinistre dans les Archives et les Bibliothèques. Actes des
Premières Journées sur la conservation préventive, Arles, 15 et 16 mai 1995, Arles, Centre de Conservation du Livre,
1999, 130 p. (Les actes renvoient à une bibliographie importante) ; Biodétérioration et désinfection des collections
d’archives et des bibliothèques, Actes des Deuxièmes Journées sur la conservation préventive, Arles, 18 et 19 novembre
1996, Arles, Centre de conservation du livre, 1999, 161 p. Une mention spéciale va aux fiches élaborées par l’Office
régional de la culture- centre interrégional de conservation du livre. Conservation préventive du patrimoine
documentaire. Archives. Livres. Photographies. Arts graphiques, Marseille et Arles, 1995, 10 fiches.

Rapport d'activité ACV 1999 - 1


De quelques convictions

Un certain nombre de convictions forgent notre politique aux Archives cantonales


vaudoises. Elles sont empruntées à notre pratique quotidienne et à l’évolution de la
profession d’archiviste.
“ Il faut le reconnaître d’emblée, ce sont les restaurateurs qui ont permis aux
responsables des institutions de la mémoire de prendre conscience de l’ampleur des défis de
la conservation et de la restauration ; ce sont les restaurateurs qui ont préparé le terrain de la
sensibilisation à ces problèmes et qui ont donné les premiers éléments de réponse.
Le phénomène de prise de conscience générale a démarré véritablement, il y a un peu plus
d’une douzaine d’années, quand les bibliothèques, les dépôts d’archives, les musées et les
écoles professionnelles ont commencé à intégrer dans leurs préoccupations celles liées à la
conservation et à la restauration. (...). Aujourd’hui, tout le monde est d’accord pour constater
qu’une prise de conscience des défis de la conservation dépasse largement les cercles
professionnels ; tout le monde est unanime à reconnaître l’extension considérable des
domaines de la restauration, leurs spécificités et leurs contraintes déontologiques. Mais,
au-delà de ces acquis et des convergences d’opinions, il faut bien convenir que la mise en
œuvre des moyens et des politiques en matière de conservation et des restauration
incombent, plus qu’aux restaurateurs, aux responsables des institutions, qui doivent les
initier, les justifier, les défendre et les consolider. (...) Les responsables des institutions de la
conservation sont confrontés moins à la compréhension des enjeux de la restauration ou des
solutions techniques qu’aux exigences de la mise en œuvre des politiques en matière de
restauration. Les masses financières que commandent les masses documentaires à restaurer
et les budgets spécifiques qu’impliquent les équipements particuliers et les procédures en
matière de restauration sont des défis bien plus considérables que les savoirs en matière de
restauration2”.
Le développement de la gestion de la préservation a débouché sur un partenariat
renouvelé entre les archivistes et les restaurateurs ; les premiers ont intégré la préservation
dans leurs tâches, ils en ont pris la responsabilité ; les seconds se sont ouverts à d’autres
aspects que ceux de l’expertise technique et du travail d’intervention, ils ont affiné leurs
outils d’évaluation et ont fait valoir leurs exigences déontologiques et leurs besoins de
dialogue et d’échange d’informations. De notre point de vue, les archivistes ne sont pas
devenus des conservateurs professionnels, mais bien plutôt des gestionnaires de la
préservation, en partage avec les restaurateurs.
La restauration est une étape de la conservation ; elle n’est pas une étape isolée ou
exclusive, mais s’inscrit dans une succession complexe et ramifiée d’intérêts qui va de la
collecte au classement, de la mise à disposition à la mise en valeur. Il ne s’agit plus
seulement d’un acte technique, d’un geste chirurgical sur le document, mais aussi d’un signe
abouti ou réfléchi du processus intellectuel de la maîtrise des archives. En ce sens,
la conservation, plus généralement la conservation préventive, inclut nécessairement la
restauration, la restauration est l’étape matérielle de la démarche intellectuelle3.
2
Nous reprenons ici les termes de notre introduction à la Journée d’information organisée par SIGEGS le 21 novembre
1996, à Lausanne, “ Conserver, restaurer, oui, mais à quel prix ?”, dans Arbido 2/97, p. 3. Plusieurs parties de notre
dossier sont nourries de ce texte.
3
Pour la clarté de la présentation, nous donnons ici diverses définitions liées à notre sujet, tirées du Bulletin de
l'Association canadienne pour la conservation et la restauration des biens culturels, juin 1999, p. 34 ; il est judicieux
de faire remarquer que les termes ne sont pas apparus tous en même temps. Dans les années 1980, on a passé du vocable

2 - Rapport d'activité ACV 1999


La restauration doit être appréhendée dans une approche générale et globale de la
conservation pour lui donner son poids naturel et l’estimer à sa juste place. La gestion de la
préservation doit être intégrée dans les tâches de l’institution. Autrement dit, l’atelier de
restauration dont les Archives cantonales vaudoises disposent depuis leur installation dans
leur bâtiment, sur la commune de Chavannes-près-Renens, n’est pas en marge de
l’institution ou à sa périphérie ; il est au centre de tout le dispositif de la politique de la
conservation. Dans le même ordre d’idée, la restauratrice des Archives cantonales ne se situe
pas au bout de la mission de la conservation préventive, mais au début, au centre et à la fin.
La restauration représente, selon les situations, une étape possible de la préservation du
document. Des propositions alternatives peuvent être retenues en lieu et place de la
restauration : la reproduction photographique, la copie sur de nouveaux supports,
le microfilmage, la numérisation ou la digitalisation des documents ou des imprimés peuvent
s’imposer comme des mesures de ménagement ou de protection de l’original ; leur défaut,
selon les buts à atteindre, c’est qu’elles ne constituent point des interventions directes sur
l’original. La restauration doit pouvoir s’allier ou se combiner avec les autres fonctions de la
conservation.
Les Archives cantonales vaudoises ont la chance de pouvoir disposer d’un photographe
à demeure qui gère un équipement pour le microfilmage, la photographie et la numérisation.
Elles peuvent opter pour des politiques différenciées et complémentaires.
Pour être légitimée et correctement située, la restauration doit découler à la fois d’une
politique d’évaluation complète et approfondie des conditions d’accueil des documents et
des imprimés, et d’un bilan de conservation des objets, des documents et des imprimés. A ce
titre, la restauration s’insère non seulement dans un environnement de la conservation, c’est
une banalité de l’écrire, mais aussi dans un environnement économique, financier et de
gestion générale d’institution. Les exigences sanitaires et techniques ne sont pas toujours

“ restauration ” à celui de “ conservation ”. Le mot “ préservation ” s’est imposé au début des années 1990. Il est
désormais le terme le plus générique qui inclut toutes les activités entreprises pour garantir que les documents de valeur
archivistique permanente continuent d’être accessibles pour les générations futures.
Bien culturel : “ Objet d’un intérêt particulier pour des raisons d’ordre historique, artistique, social ou scientifique.
Les biens culturels peuvent se répartir en deux catégories principales :
1. Biens meubles, tel que les oeuvres d’art, les objets de fabrication humaine, les livres, les documents d’archives et
autres objets d’origine naturelle, historique ou archéologique.
2. Biens immeubles, tels que les monuments, les oeuvres architecturales et les sites archéologiques.
Conservation : “ Toute action visant à sauvegarder un bien culturel dans une perspective à long terme. Le but de la
conservation est d’étudier, de documenter, de préserver et de restaurer les caractéristiques culturelles essentielles d’un
bien culturel présentes dans sa structure physique et chimique, en limitant le plus possible l’intervention.
La conservation comprend l’examen, la documentation, la conservation préventive, la préservation, le traitement,
la restauration et la reconstruction. ”
Conservation préventive : “ L’atténuation de la détérioration et des dommages pouvant survenir à un bien culturel
grâce à la rédaction et l’établissement de politiques et de procédures appropriées en ce qui concerne les conditions
ambiantes : la manipulation, la mise en réserve, l’exposition, l’emballage, le transport ; l’utilisation ; la gestion et le
suivi du contrôle des insectes ; et la préparation et la mise en œuvre de plans de mesures d’urgence. ”
Préservation : “ Toutes les mesures destinées à retarder la détérioration ou à prévenir les dommages pouvant
survenir à un bien culturel, ce qui comprend la gestion de l’environnement et des conditions d’utilisation, et peut même
inclure les traitements destinés à maintenir un bien culturel dans un état aussi stable que possible. En ce qui concerne les
objets possédant un contenu informationnel, la préservation peut inclure le transfert à un autre medium. ”
Restauration : “ Toutes les mesures prises pour modifier la structure et les matériaux constitutifs d’un bien culturel,
dans le but de représenter un état antérieur connu. La restauration possède comme objectif de révéler les caractéristiques
culturelles essentielles d’un bien culturel ; elle se fonde sur le respect des matériaux d’origine et s’appuie sur des
renseignements précis au sujet de l’état antérieur .”

Rapport d'activité ACV 1999 - 3


conciliables avec les réalités financières. Il n’empêche qu’elles doivent toujours être un
préalable dans les réflexions et que les embarras financiers ne doivent pas constituer des
alibis pour ne rien entreprendre. Des demi-mesures constituent souvent des mesures
catastrophiques sur le long terme, économiser sur la restauration, c’est gangrener
nécessairement la conservation.
Dans le prolongement de ces constats, il nous paraît impératif d’inscrire la politique
institutionnelle de la restauration dans des stratégies plus larges. Si les bilans sanitaires ou
les états cliniques des fonds d’archives ou des collections d’imprimés relèvent
fondamentalement des responsables des institutions, par contre l’ampleur des problèmes à
résoudre, la variété des situation à affronter, les difficultés techniques à surmonter les
obligent inévitablement à inscrire leurs démarches dans des approches reconnues par
plusieurs institutions et à s’appuyer sur des savoirs ou des moyens techniques extérieurs à
leur institution. Il faut plaider pour des politiques concertées, des rapprochements et des
mises en commun ; il faut exploiter les expériences délivrées par les sites spécialisées
Internet, et partager des banques de données. Dans le domaine de la conservation, comme
dans d’autres, il est indispensable que des politiques nationale, cantonale ou régionale de
conservation s’affirment, servent d’appui aux institutions qui doivent développer un
discours ou s’affirmer au travers de résolutions. Un des meilleurs et plus récents exemples
de telles politiques est la réalisation du projet de désacidification de masse du papier, autour
de l’usine de NITROCHEMIE WIMMIS AG 4.
Enfin, avec la généralisation des techniques informatiques, on pratique de plus en plus la
migration ou le transfert de données sur de nouveaux supports. La restauration nous
enseigne le respect de la source originale, la permanence des informations. Pour que les
archives se livrent, il faut les analyser, sauvegarder leur support, restituer leur contenu et
respecter leur origine. Quelle attitude faut-il adopter face à cette frénésie obligée ou
délibérée de tout faire passer sur de nouveaux supports, et de faire disparaître les anciens ?
Quelle éthique doit prévaloir aujourd’hui où l’informatique impose et permet toutes sortes
de manipulations, d’interprétations, de moutures, au risque de ne plus savoir ce que l’on
définit par le mot original ? Ne va-t-on pas assister par glissement sémantique irréversible à
l’émergence de la restauration de données enfermées dans des supports ou dans les systèmes
informatiques aux dépens de la restauration des supports traditionnels ? Les nouvelles
technologies démultiplient les sources d’informations, en même temps qu’elles les
fragilisent, elles les rendent volatiles et fugitives, alors que l’on attendrait d’elles qu’elles
demeurent et traversent les générations. Il faut veiller à ce que les archivistes n’alimentent
pas ce transfert de fonctions et continuent à distinguer correctement les missions. Il y a une
éthique des interventions, des règles et des approches à suivre et à privilégier. Ce que l’on
n’accepte pas avec les objets, les documents écrits et les imprimés, l’acceptera-t-on avec les
documents informatiques ? Il faudra voir dans quelle mesure la banalisation des supports ne
bouleverse pas les règles du jeu, ne débouche pas sur une recomposition des approches et
n’accrédite pas des discours centrés uniquement sur les données, faisant fi du contexte et du
medium.

4
Voir à ce sujet, Arbido 3/2000, pp. 20-25 et Arbido 4/2000, pp. 5-9. Nous pouvons rappeler une réalisation plus
ancienne et qui avait suscité de nombreux échos, celle de la création d’un marché commun du papier et du carton non
acides en Suisse romande, auquel les Archives cantonales vaudoises avaient été associées, voir ARBIDO-R 7 (1992), 1,
pp. 11-13 et ARBIDO-R 7 (1992), 4, pp. 108-109.

4 - Rapport d'activité ACV 1999


Réalisations
Sous forme d’un tableau chronologique, nous présentons les diverses étapes du
développement de la politique de la conservation aux Archives cantonales vaudoises.
1955 “ L’année 1955 marquera une date dans l’histoire des archives cantonales. Les travaux de
transformation de l’immeuble de la rue du Maupas 47, rondement menés par les Frères
Lerch, à Lausanne, étaient terminés au début d’octobre. Les anciens bureaux de la place de la
Cathédrale 4 étaient fermés le samedi ler octobre, les nouveaux locaux étaient prêts pour
recevoir les lecteurs le lundi 17 octobre. Le déménagement des fonds, commencé immédia-
tement après, était terminé en mars 1956. Dès maintenant on peut dire que l’installation dans
les nouveaux locaux, fruit de l’étude minutieuse des possibilités offertes par le nouveau
bâtiment et des besoins des Archives, donne toute satisfaction du point commodité et
sécurité ” (Rapport sur l’exercice 1955 des Archives cantonales vaudoises, p. 1).
1965 Dès cette année, on trouve sous le chapitre Entretien et restauration le nombre de cartons
qui ont servi au reconditionnement des documents (“ Cet effort devra être poursuivi et
accentué pour assurer une meilleure conservation et pour faciliter la consultation ”, Rapport
sur l’exercice 1965 des Archives cantonales vaudoises, p.1), ainsi que les travaux de
restauration et de reliure de registres et de livres.
1971 “ Faute d’artisan spécialisé, aucune restauration de documents n’a pu être exécutée cette
année ” (Rapport sur l’exercice 1971 des Archives cantonales vaudoises, p. 1).
Dès 1971, le recours au microfilmage est mentionné pour la sécurité des documents et leur
diffusion (en 1971, 432 bobines sont exécutées pour le fonds des notaires anciens).
1980 Travaux de régénération de reliures anciennes, poursuivis les années suivantes.
1985 Mise en service du nouveau bâtiment des ACV (réalisation Atelier Cube), rue de la Mouline
32, 1022 Chavannes-près-Renens : il réunit les exigences de sécurité contre le feu et l’effrac-
tion, et de conditionnement, les cellules d’archives sont ventilées et protégées de la lumière.
Deux locaux sont réservés à l’atelier de restauration - seul l’équipement est livré.
1989 Dès juin : engagement d’une restauratrice à plein temps.
1991 Pour la première fois, on parle d’acquisition d’enveloppes en papier non acide, avec réserve
alcaline, et de la fabrication de boîtes en carton non acide.
Création d’un marché commun du papier et du carton non acides en Suisse romande,
à l’égide des Archives de la Ville de Lausanne, des Archives cantonales vaudoises et de la
Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne.
1996 Reconsidération des mesures d’intervention des pompiers et de la signalisation du bâtiment.
Etude rétrospective des mesures climatiques.
Relevé partiellement automatisé des données climatiques.
“ L’atelier de restauration a fait l’objet d’une nouvelle définition de ses missions.
Il faut constater à cet égard que l’importance croissante des tâches de conservation
restreint régulièrement le temps qui peut être consacré à la restauration ” (Rapport
d’activité des Archives cantonales vaudoises, 1996, p. 17).
1997 Création de matériel d'information pour les lecteurs, concernant la manipulation des
documents ; mise à disposition de matériel de protection dans la salle de lecture.

Rapport d'activité ACV 1999 - 5


Mise en service du programme informatique Hamster pour le stockage et l’interprétation des
données climatiques.
Construction d’un local de dépoussiérage et mise en service d’une machine à flux laminaire.
Remise du Rapport sur les conditions de conservation et sur l’état des fonds des Archives
cantonales vaudoises, par Andrea Giovannini, Bellinzona, 1997, 58 p.
1998 Achat d’un appareil à étalonner, et mise en place de nouveaux filtres sur la ventilation des
cellules.
Evaluation sanitaire de différents fonds, en particulier celui des registres de plans cadastraux.
Commande d’une gamme complète de nouveaux cartons d’archives alliant des critères
conservatoires et de résistance. Etude similaire pour les cartables, étiquettes et sangles.
Réaménagement sur trois ans d’un des deux locaux de protection de biens culturels, pour la
conservation des registres de plans cadastraux et des terriers.
Début de l’étude “ La cartographie vaudoise : un chef d’œuvre en péril. ”
Remise du rapport “ Climatisation et ventilation intelligentes. ”
Etude sur les poussières de béton et la pollution extérieure.
1999 Rapport sur les structures de rayonnages denses.
Analyse de l’état sanitaire des registres de plans cadastraux : rapport de synthèse.
Rapport sur le matériel de conditionnement des plans et des documents graphiques.
Mise en œuvre du réaménagement des cellules de dépôt des plans et des documents
graphiques des fonds d’archives officielles, para administratives et privées.
Développement de deux tables informatiques ETAT SANITAIRE et DOMMAGE pour
traiter les aspects liés aux constats sanitaires des fonds et des documents individuels.
Remise du rapport Concept d’archivage intermédiaire.
Achat d’un appareil à souder le polyester de conservation.
Parution du Guide pratique de gestion des Archives communales du canton de Vaud par les
Archives cantonales vaudoises et l’Association des archivistes vaudois : les aspects de la
préservation et de la restauration sont abordés.
“ Au feu les pompiers ! ”, journée d’étude de l’Association vaudoise des archivistes
consacrée au plan d’intervention dans les dépôts d’archives et aux divers acteurs de ce plan.
Changement systématique des luminaires de la zone des cellules d’archives pour ménager
les documents (la modification est achevée en janvier 2000).
2000 Appel d’offres et rendu du concours pour une ventilation intelligente des cellules de dépôt,
et la climatisation de la salle de lecture et de la salle de tri.
Mise à plat des cartes et plans, et disposition sur un système d’accrochage des grands
formats.
Fin de la densification de la première cellule de protection des biens culturels, pour le
rangement des registres de plans cadastraux et des terriers.
Remise de l’étude “ La cartographie vaudoise : un chef-d’œuvre en péril. ”

6 - Rapport d'activité ACV 1999


Certaines des étapes mentionnées méritent d’être mises en évidence et commentées5.

En commandant en 1997 un rapport sur les conditions de conservation et sur l’état des
fonds des Archives cantonales vaudoises, à un spécialiste unanimement reconnu, M. Andrea
Giovannini, l’institution entendait à la fois établir un bilan objectif de tous les fonds
accumulés depuis l’origine et planifier les interventions pour remédier aux situations
insatisfaisantes ou créer de nouvelles pratiques. Les conclusions du rapport furent
relativement sévères et obligèrent à formuler rapidement devant les autorités des demandes
de compléments d’information : un rapport sur les possibilités d’amélioration du climat
intérieur des cellules d’archives a été établi par l’Institut de technique du bâtiment,
Laboratoire d’énergie solaire et de physiques du bâtiment, de l’Ecole polytechnique de
Lausanne (Claude-Alain Roulet et Flavio Foradini), un autre par le bureau Expert-Conseil
pour la Conservation du patrimoine bâti, à Ecublens-Lausanne, sur la présence de poussière
dans le bâtiment, en particulier en relation avec la nature des matériaux constituant l’enve-
loppe interne des dépôts. Le relevé systématique et informatisé des mesures climatiques
dans l’ensemble du bâtiment a fourni des informations décisives et convergentes. A la
faveur d’un appel d’offres pour une meilleure ventilation du bâtiment, les experts ont conclu
en mars 2000 qu’il fallait modifier le concept général de la ventilation des cellules
d’archives et installer la climatisation dans la salle de lecture et dans la salle de tri.
Les chocs thermiques entre les divers espaces ont été en effet jugés comme alarmants ; pour
les atténuer, à défaut de les résorber, des mesures drastiques sont désormais envisagées et
seront effectuées encore entre la fin de l’année 2000 et l’année 2001.
Les conclusions des divers rapports ont de plus exigé que le nettoyage des cellules soit
valorisé et effectué selon des cadences régulières. A terme, la pose de peinture sur les voies
de circulation sera exécutée pour garantir un meilleur contrôle des nettoyages et fixer les
poussières.
Dès 1996, le comptage systématique des documents empruntés et des usagers avec leur
profil et leur motivation, a permis tout à la fois de vérifier le mouvement des documents,
d’apprécier les urgences de restauration et la mise en œuvre de mesures de substitution aux
documents originaux. A cet égard, l’étude la plus achevée a été menée sur les sous-sections
des registres de plans cadastraux et des cartes. La base de données qui contient l’ensemble
des informations sur l’état sanitaire des documents et des reliures à partir d’un
échantillonnage représentatif a livré un verdict sans appel : 44 ans de travail pour la
restauratrice sont nécessaires pour restaurer les 2 500 volumes de plans cadastraux. Devant
l’impossibilité de répondre à un tel défi, la direction des Archives cantonales vaudoises a
lancé une étude sur la réalisation de la numérisation des registres des plans cadastraux et des
plans - si cette solution est retenue, il faudra néanmoins 53 semaines de restauration pour
permettre aux documents d’être scannés. Des mesures immédiates ont été prises en attendant
un support de substitution : modification du système de rangement des documents :
rayonnages mobiles, rangement horizontal, traitement particulier des grands formats et
recours à du matériel non acide6.
Des efforts importants ont été portés sur le matériel de conditionnement, le cartonnage a
été complètement réinterprété à l’examen des expériences accumulées et des possibilités

5
Pour le détail, nous renvoyons au Rapport d’activité des Archives cantonales vaudoises, en particulier dès 1996,
au chapitre Conservation et restauration. Voir également les chapitres Informatique et Utilisation.
6
Voir pour le détail Gilbert Coutaz, avec la collaboration d’Olivier Conne, “ Un enjeu informatique aux Archives
cantonales vaudoises : la numérisation de la cartographie ”, dans Informatique et Histoire 10/1999 (à paraître).

Rapport d'activité ACV 1999 - 7


budgétaires, le matériel d’emballage et de protection directe du document est dorénavant
composé de papier ou de carton non acide.
Dans le cadre de l’architecture informatique des Archives cantonales vaudoises, deux
tables ETAT SANITAIRE et DOMMAGE ont été ouvertes pour couvrir les aspects de la
conservation préventive et la restauration : elles permettent de dresser des bilans sanitaires
sur des ensembles ou séquences documentaires (fonds, collections et séries) et d’opérer
selon les natures de dommages des achats groupés de matériels et des travaux similaires de
restauration. La réception des fonds d’archives obéit désormais à des examens précis de
l’état sanitaire (des urgences de restauration sont protocolées sous forme de codes dans les
tables), qui permettent de répartir les documents différemment selon leur santé physique.
Tous les fonds non classés sont séparés des fonds classés et mis dans des cellules distinctes,
certains fonds étant mis en quarantaine le temps de leur traitement.
Il est apparu très vite que le seul critère de l’état sanitaire ne suffisait pas à fonder une
politique sérieuse et rigoureuse de la conservation préventive. Il faut lui ajouter un critère,
celui de la valeur historique, pour permettre une appréciation complète des fonds d’archives.
Ce critère figure dans les champs de deux tables citées ci-dessus. Si les fonds ne font pas
immédiatement l’objet d’un répertoire ou d’un inventaire, l’expertise est inévitablement
partielle, car elle se fait sur la base d’observations et de constats généraux. En effet, de notre
point de vue, seule la rédaction d’un répertoire ou d’un inventaire permet d’approfondir le
jugement, de confronter les opinions et de prendre les décisions qui s’imposent. Faute de
temps et de ressources humaines, elle vient souvent plus tard, ... très tard.
A l’expérience, nous devons constater que face à la diversité des générations de
supports, à la présence de très grandes et volumineuses masses de documents graphiques, et
au foisonnement des versements, la seule restauratrice ne peut pas toujours trouver sur-le-
champ des réponses circonstanciées et appropriées. Celles-ci doivent nécessairement être le
fait d’une équipe de collaborateurs et collaboratrices, parmi laquelle les archivistes,
les employés de salle et le photographe occupent des places de choix.
A la faveur de la mise en place d’un contrat d’archivage avec l’ensemble des secteurs de
l’administration et de l’Ordre judiciaire, il est prévu de diffuser des directives sur les
archives ; le cœur du dispositif est fourni par la mise en place partout où cela sera possible
d’un calendrier de conservation. Cet élément devra aider à renforcer la politique de la
conservation préventive, en faisant participer activement les organismes producteurs
d’archives. Dans la mesure où les natures d’archives à conserver de manière permanente
seront définies, il sera plus aisé de faire valoir des exigences conservatoires en amont de la
venue des documents aux Archives cantonales vaudoises. Cette pratique devra s’appliquer
aussi bien aux sources traditionnelles qu’aux documents informatiques.
C’est pourquoi, il nous paraît de plus en plus nécessaire de contrôler les diverses étapes
de la constitution des archives, et d’impliquer les partenaires dans une politique large et
précoce de la prévention. Pour des raisons de distance entre les intervenants et de
déficiences d’information sur les enjeux, les dépôts d’archives ont reçu et continuent à
recevoir des masses documentaires pour lesquelles ils doivent assurer une conservation
définitive, alors que celles-ci n’ont pas été conservées dans les conditions idoines, utilisent
des supports de piètre qualité et sont mêlées à des ensembles de valeur inégale et à la
destinée différente. Il est inconséquent d’accueillir des documents déjà menacés de
disparaître dès leur origine, et de mettre à disposition des conditions optimales de
conservation pour des documents déjà malades avant leur entrée ou leur versement aux

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Archives cantonales vaudoises. Le constat, fût-il sévère, ne doit pas engendrer une attitude
fataliste et d’abandon des droits et des devoirs de chaque partenaire de la conservation.

En guise de conclusion

Il faut être clair. Les masses à gérer et à vérifier nécessitent des évaluations d’ensemble
plus que des interventions au scalpel sur quelques sources, des approches à plusieurs
niveaux avant l’arrivée des archives dans les locaux des Archives cantonales vaudoises, et
une fois celles-ci réceptionnées. La restauratrice s’est muée en gestionnaire des états
sanitaires et de la rédaction des listes de dommages, en partage avec les employés de salle et
les archivistes. Elle doit être présente régulièrement dans les cellules, au moment de
l’arrivée des fonds d’archives, pour faire prendre les mesures préventives qui s’imposent et
inculquer de nouvelles pratiques. Elle doit pouvoir développer des politiques et des
procédures d’acquisition, pour les expositions, la formation du personnel, la manipulation
des documents ; elle doit pouvoir participer à des campagnes de promotion interne et externe
à l’institution sur les mesures conservatoires, par la rédaction de feuillets d’information,
le montage d’exposition et la mise à disposition de matériel de consultation7. Du dialogue
permanent de la restauratrice et des archivistes, il ressortira des politiques et des stratégies
de préservation, des mesures pour lutter contre les dégâts et arrêter des planifications
d’urgence. Une politique de la préservation présuppose une solidarité des compétences dans
l’institution et à l’extérieur de celle-ci ; elle légitime une chaîne de responsabilités entre les
producteurs d’archives et les Archives cantonales vaudoises ; elle commande une évolution
permanente des politiques et des procédures, des réajustements des objectifs et des
pratiques. Si une sensibilisation aux exigences de la conservation en amont de la réception
des archives est concevable au sein d’une administration (elle postule alors une culture de
l’archivage dans celle-ci), elle n’est pas généralement possible avec tous les producteurs
d’archives para-administratives ou privées, dont la volonté de remettre des archives ne
s’affirme le plus souvent qu’au moment de la préparation du déménagement des documents.
C’est sans doute dans cette disparité d’approches ou cette fracture entre le producteur du
document et celui qui le réceptionne et lui garantit la conservation, qu’il y a le plus grand
défi à surmonter. L’atelier de restauration des Archives cantonales vaudoises aura rempli ses
missions le jour où son rôle sera reconnu comme essentiel dans la gestion de la préservation,
et non plus seulement considéré comme un espace de soins à donner aux documents
malades.

Gilbert Coutaz, avec la collaboration d'Anne Bellanger, restauratrice

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Le cahier des charges de l’atelier de restauration a été défini dans l’Instruction interne des Archives cantonales
vaudoises du 2 décembre 1996 (ACV 25).

Rapport d'activité ACV 1999 - 9

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