Christologie Et Soteriologie Selon Karl
Christologie Et Soteriologie Selon Karl
Christologie Et Soteriologie Selon Karl
1 1993-1994
l
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l
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CHRISTOLOGIE ET SOTERIOLOGIE
\
1
J
1
J MEMOIRE PRESENTE PAR JEAN-MARIE HYACINTHE QUENUM
-. -
J
l
1
CHRTSTOLOGIE-ET SOTERI L G~
DE KARL RAHNER
INTRODUCTION
J
C'est ce mystère le plus grand de la destinée
humaine qu'a eu le courage intellectuel d'aborder le très
respecté théologien catholique Karl RAHNER dans le TRAITE
FONDAMENTAL DE LA FOI
J universel
d'une
sera
sotériologie
le lieu et
dans
l' enj eu d' une
la sixième
christologie et
étape du TRAITE
FONDAMENTAL DE LA FOI .
1
..J
Nous essaierons de rendre compte de la manière
dont le théologien tente de réconcilier la doctrine de
l'incarnation avec une interprétation particulière et
l 'historique de l' ori-gine de -l' -univers l de la vie et de
l'humanité.
l
5 s
Il écarte toute interprétation du dogme
fondamental du christianisme comme parole d'autorité ayant
la force de la chose jugée.
J s'appréhende comme
s'accepter, qui d'emblée est donné à
celui qui est de fait,
lui-même,
qui
et qui par
doit
J
7
Cette orientation de l'homme vers un parfait
accomplissement se heurte à la loi de la corruption de
l'univers matériel. Mais l'homme dans son invincible
espérance aspYr'e à un àvenîr au-delà de l'uni vers mat·ériël.
Cet avenir est inconcevable à partir de la vie empirique de
l' homme. Cependant l' homme comme phénomène spirituel est
ouvert au-delà de sa mort biologique à une vie en
plénitude. Cette vie en plénitude ne peut être qu'un don de
la source de vie. Cette source de vie qui se manifeste
l concrètement et historiquement dans le monde matériel dont
l'homme émerge est le fondement de l'espérance invincible
de l'homme.
J irréversible sous
individuelle dl un homme.
la forme concrète,
Cet homme par excellence partage
historique et
l
unique et personnel à cette source de vie devant laquelle
il assume dans une conscience adorante et obéissante le
rôle unique et insurpassable du révélateur par excellence.
1
Ce révélateur par excellence de la source
mystérieuse et ineffable de vie est reconnu par la foi
chrétienne comme la présence absolue de Dieu dans la
singularité concrète d'un homme. Il est l'aboutissement
anticipé du processus évolutif de la matière en quête de
son fondement en l' homme. Il est la clef de l 1 évolution
finale de llhistoire du monde. En lui l'histoire reçoit son
principe puisqu'il est le développement final de la
communication que Dieu fait de lui-même au monde. En ce
sens, le révélateur par excellence du Dieu mystérieux et
ineffable peut être appelé homme-Dieu. Il est la
manifestation historique du Dieu qui se rend présent de
manière incomparable à la créature spirituelle. L' homme-
Dieu est le médiateur absolu entre le monde et Dieu; il est
la plénitude historique de la matière parvenue à la vie
dont émerge une conscience humaine orientée vers la
communion avec la source de vie.
J
10
Dans cette vision ontologique et anthropologique
l' homme est la perfection d' un esprit doué du pouvoir de
nomination de la matière.
l
En tant qu'esprit fini, l'homme dans la totalité
de son être prend conscience de lui-même dans le
conditionnement de la matière qui le situe dans un rapport
l d'altérité où il se sait saisi et enveloppé dans un mystère
infini et incompréhensible. Ce mystère le renvoie à lui-
même et le place dans un rapport de réceptivité et
d' accuei l qui rend possible une intercommuni cation avec
d'autres sujets spirituels dans l'espace et le temps.
J
J
transcendance, un dépassement de soi. L' autotranscendance 1\
active est un événement dû à la plénitude d'être absolu,
intrinsèque à l'étant qui se meut vers son propre
accomplissement.
1
J
J évolutive du monde d'entendre un message sur l'Homme-Dieu. t2
La Christologie Transcendantale aura à préciser le statut
du sujet humain, auditeur possible d'une révélation dans la
condition réelle du monde où il a une parenté réelle avec
l' h o m e ~ D i e u dans son unicité in_comparable et radicale.
1
historique qui ne peuvent rendre compte adéquatement de la
réalité de la résurrection de Jésus
J
lb if,
La cause qui était inséparable de sa personne est
l'attente prochaine du Royaume de Dieu dont sa prédication
réformatrice livre les conditions d'accès: appel au
retournement intérl:eur, "engagement à se décider
incondi tionnellement pour le Royaume à venir, urgence de
s'ajuster au temps de grâce qui est offert pour entrer dans
le Royaume.
)
salut dont Dieu dispose d'une manière incompréhensible et
ft
que l'on peut seulement espérer" (TTF, p.300)
j
tentatives de représentations réalistes. Elle ne peut être {g
qu'un signe compréhensible dans la foi qui engage le
destinataire du message. Elle est l'attitude de l'homme par
rapport à Jésus en fonction de qui il doit se décider pour
son salut; elle est un fait unique dans l' histoire de
Y'humanité. L'uni~ té d~ la résurrection de Jésus illustre
une expérience sans précédent dont on ne note aucune
répétition postérieure. Dépendant exclusivement des
témoignages des disciples prédestinés, la foi en la
résurrection est une oeuvre divine de révélation et de
salut où la décision humaine a sa place comme acceptation
de l'initiative gracieuse de Dieu.
J
I~r -- -
Il
Il Tout homme, de par une nécessi té
transcendantale, accomplit soit sous le mode de l'accueil
libre soit sous celui du libre refus, l'acte d'espérance
-qui concerne sa propre résUrrection. Car tout homme veut
s'affirmer lui-même dans un état définitif, il éprouve
cette prétention dans l'action de sa liberté responsable,
que cette implication de son accomplissement de liberté
soit pour lui thématisée ou non, qu'il l'accueille dans la
foi ou la rejette dans le desespoir." (TTF, p.302)
-',
1
catégoriale réelle d'une telle résurrection. C'est dans ce
lb
cercle que ces deux aspects se portent l'un l'autre et
qu'ils témoignent pour nous de leur véracité." (TTF,p.309)
l
Ainsi une aspiration à -un état défini"tif-de salut
indépendante de l'expérience historique de l'homme
lorsqu'elle vient à être confrontée à la tradition
apostolique de la proclamation de la résurrection de Jésus
sous l'effet de la grâce peut susciter la foi en la
résurrection dans l' Espri t. "Car même si, et si
précisément, nous acceptons qu'existe une espérance
transcendantale de résurrection, et que celle-ci soit
touj ours en recherche de sa visibilité et de son
attestation catégoriales (acceptation proposée à qui croit
à la possibilité chrétienne d'un salut pour tous, quand
bien même la plupart d'entre eux n'ont pas entendu le
message évangélique explicite), cette espérance
transcendentale de résurrection ne peut justement attribuer
à son fondement et objet son nom catégorial qu'au moyen du
témoignage apostolique concernant Jésus le ressuscité."
(TTF, p.310)
C. LA RESURRECTION:FONDEMENT DE LA CHRISTOLOGIE
ET DE LA SOTERIOLOGIE
,. ...: , -:"i.: 1
)
situation qui existe maintenant et fait place ensuite à une
autre; de ce prophète qui doit éprouver et annoncer
essentiellement sa parole comme une promesse qui s'étend au
large et ne saurait se clore. Jésus est donc un prophète
qui justement, par la prétention de sa parole,. supprime ce
qui fait l'essence du prophète. En quoi- il faut- considérer
que sa parole en tant que parole ultime de Dieu ne saurait
être pensée comme définitive pour la raison que Dieu,
maintenant justement cesse arbitrairement de parler, bien
qu'il soit en mésure de continuer de le faire (il "clôt" la
révélation, bien qu'il puisse la pousser plus avant, si
J seulement il le voulait); c'est la dernière parole de Dieu
qui est là en Jésus, parce que outre cela il n'est rien de
plus à dire, parce que Dieu s'est dit lui-même en toute
rigueur en Jésus Christ" (TTF,p.314)
.,
Dieu en Jésus a suscité dans l' histoire humaine
un homme qui est son ultime parole aux hommes. Cette parole
de Dieu incarnée en cet homme Jésus s'est manifestée dans
la vie une et totale du Messie qui en traversant la mort
est accueilli en son lieu d' origine pour être la source
d'une relation personnelle à Dieu. Cette relation découlant
du mystère pascal ne se comprend que dans le dynamisme du
mystère de l'incarnation.
J
J
J
~(
l
Parole de Dieu.
l
Pour Karl RAHNER, l'homme est un sujet ouvert sur
lui-même, sur le monde et sur Dieu qui est son horizon
d' intelligibili té existentielle. Le dynamisme interne de
l'homme comme sujet ayant la capacité de connaître et
d'aimer le prédispose comme partenaire de Dieu à rechercher
dans son histoire sa présence.
J
--- - - - ---
connaissance n'est ni dans le temps ni dans l'espace.
Pourtant dans son "inaccessibilité il promeut et conserve
Il
l
Ainsi entendu, le mystère serait confondu avec ce qui n'est
pas su ou découvert. Mystère est bien plutôt ce qui
précisément est comme ce qui ne peut être pénétré, comme ce
1 qui est donné, ce qui n'exige absolument pas d'être
produit; ce n'est pas un terme second, qui n'échapperait à
1 la maîtrise que de façon provisoire, mais l'horizon
./
dominant de toute compréhension sans pouvoir lui-même être
dominé, l'horizon qui permet de comprendre autre chose dans
la mesure où il se tait lui-même comme l'incompréhensible
l
qui est là. Le mystère n'est donc pas le provisoire dont on
peut venir à bout, ou qui en soi pourrait exister
autrement, mais la caractéristique qui, toujours et
nécessairement, marque Dieu (et, à partir de lui, nous
aussi) » (TTF p.246)
J
Le suj et humain étant marqué par le mystère, il
est la réalité spirituelle inachevée et ouverte dans sa
totali té à la plénitude de 11 horizon infini vers lequel
elle asI;fi,rè. « Le dev n"ir ~ '= hom e de Dieu, -de ce point de
vue, est le cas unique et suprême de l'accomplissement
essentiel de la réalité humaine, lequel tient en ce que
l'homme existe en se perdant dans le secret absolu que nous
nommons Dieu » (TTF p.247)
1
j
B. LA CHRISTOLOGIE TRANSCENDANTALE:
UN TEMOIGNAGE ANONYME DE DIEU SUR LUI-MEME
DANS SA CONDUITE LIBRE ET SALUTAIRE A L'EGARD DU
MONDE
37
formel. Pour elle, le sujet humain est perçu comme un être
libre ne se possédant comme un tout qu'à travers le mystère
qui l'habite et vers lequel il est orienté dans son
dynamisme transcendantal. Du coup, la philosophie critique
devient la condition de possibilité de la Christologie
Transcendantale. La théorie de la connaissance- -que Karl
RAHNER élabore devient le cadre où se déploie la
transcendance de l'homme comme une ouverture du sujet
humain à l'Etre absolu de Dieu.
J
unie à ce qui est non-homme, non-monde, Dieu, le mystère
absolu, l'horizon d'intelligibilité existentielle. La
confession de foi reconnaît que l'expression de
l'autocommunication de Dieu au monde est un homme unique et
l
1
irremplaçable, Jésus de Nazareth, le Christ. Dans la
perspective- de la -Christologie Transcendantale, cet homme
ne produit pas le salut de façon mythique. Il assume en lui
la condition humaine qui est sauvée en vertu du mouvement
l
libre et gracieux de Dieu comme réponse à la question
qu 1 est le suj et humain dans le monde. Tous les suj ets
humains sont sauvés comme questions en participant à la
réponse de Dieu qu'est l'homme-Dieu. La Christologie
Transcendantale montre comment l'homme-Dieu peut entrer
dans le champ de la possibilité transcendantale qu'a
l'homme d'entendre un message sur lui.
4:0
"
.. -
YT
j
Comme tous les Evangélistes, Karl RAHNER dans son
l projet christologique et sotériologique s'est intéressé
d'une manière originale à la pré-histoire de Jésus Christ.
J
pensée du Nouveau Testament et du dogme christologique de
Chalcédoine.
l
des faits de révélation évènementielle et prophétique.
Jésus Christ, Parole définitive de Dieu, est prophète par
excellence. Il est le prophète qui doit venir dans le monde
J (Jean 6,14). Il est le dernier prophète. En lui Dieu
deviendra un esprit -incarné, fini et ouvert -sur l'absolu.
S4
ressuscité. C'est ce Christ ressuscité qui divinise et
transforme la réalité historique grâce à la collaboration
des honunes qui participent à 11 accueil de leur salut en
suivant le chemin salutaire frayé par le prophète de
Galilée, le Crucifié de Jérusalem, le Ressuscité dans la
fot des disciples- en qui tout homme -anticipe son avenir
transcendantal. C'est en raison de la vérité salutaire de
la résurrection que Karl RAHNER propose celle-ci comme le
fondement originaire de toute christologie. En effet, le
but de la création est l'incarnation de Dieu dans le monde
pour le diviniser. La résurrection de Jésus est le point
dl arrivée qui permet de comprendre le point de départ de
l'intention créatrice de Dieu. En créant, Dieu n'a qu r un
but: faire participer la créature spirituelle à sa propre
vie, cette vie qui est communion d'intelligence, de liberté
et d'amour. Dieu est Amour. Il est celui qui sort de lui-
même, et tout en restant lui-même se donne sans
s'appauvrir. Il est source de vie, plénitude de vie, et la
créature spirituelle se réfère à lui comme source d'être et
de plénitude.
V. TROIS THEOLOGIENS CATHOLIQUES A L'ECOUTE
DES RICHES INTUITIONS DE KARL RAHNER
l
1. KASPER Walter, Jésus Le Christ, Cogitatio fidei 88,
Cerf, Paris 1980
sl
J
1. KASPER Walter, Op.Çit. p.72-73
l'homme pose à la réalité. Cette question part de la
situation historique du sujet. C'est à travers le recours à
l'expérience historique concrète du sujet que la
connaissanèe de Dieu dans son mystère sr annon-ce au sein
d'une question que le sujet pose à la réalité vécue. Dieu
dans son mystère est l'origine de toute intelligibilité du
sujet. Pour Karl RAHNER, le sujet humain dans son rapport à
lui-même et à son monde, vit dans une constante extension
de lui-même vers l'absolu. En vertu de la causalité
efficiente de l'oeuvre de la création, le suj et humain a
une ouverture innée vers l'infini. Suscité dans son
altérité par Dieu lui-même, le sujet est constitué dès
l'origine dans l'ordre surnaturel. " La promotion de
l' homme au surnaturel est l'accomplissement absolu, bien
que gratuit - d'un être qui ne peut être "défini", c'est à
dire "délimité" à la manière des êtres "non-humains" parce
qu'il est esprit et transcendance vers l'Etre absolu" (1)
J
(1) H.U.VON BALTHASAR ET LA REVELAT.LON BIBLIQUE
70
Il
signification normative pour toutes les autres révélations
qui se déroulent dans le temps et dans l'espace. Vue sous
cet angle, la révélation manifeste Dieu comme mystère
insondable et comme avenir absolu de tout homme -qui accepte
avec confiance son histoire propre avec tout ce qu r elle
comporte d'incompréhensible. Dieu en se révélant dans la
Bible se donne comme le mystère permanent que l'homme doit
accueillir avec confiance. La connaissance que l'homme a de
Dieu à travers la révélation biblique doit être constamment
confrontée à l'expérience personnelle de tout homme. La
révélation catégoriale de l'Ancien et du Nouveau Testaments
a des limites spatio-temporelles mais elle est normative
pour saisir l'événement de grâce dans l'existence de
l'homme interpellé par sa signification. La révélation
biblique enveloppe l'homme dans le mystère du Dieu qui est
plus grand que le coeur de 11 homme. Au contact de la
révélation biblique, l'homme ne fait pas l'économie du
risque de l'espérance. Comme le salut est de l'ordre de
l'existence, tout homme doit l'accueillir dans 11 anonymat
concret de son histoire. L'existence historique est le lieu
par excellence de la révélation de Dieu et il n'existe
point d'histoire profane. L'immédiateté de Dieu étant
inscrite dans l'intime de la subjectivité humaine, elle est
ouverte au mystère du Dieu qui se révèle. Ainsi
l'expérience humaine informée par la grâce et
philosophiquement réfléchie est le lieu de la proximité de
Dieu. Ce qui est signifié par Dieu est à comprendre à
partir de l'expérience humaine. Le passé de l'Ecriture
sainte ne révèle pas le présent de la foi; c'est le présent
qui, dans son offre de grâce, ouvre à la réalité qu'entend
communiquer l'Ecriture. L'Ecriture est, pour ainsi dire, le
témoin de l'affirmation de foi qui jaillit au coeur de
l'existence humaine. Une figure humaine concrète peut
ouvrir au Christ de l'Evangile, et l' Ecriture est
l'expression de grâce originelle qui permet à la foi
d' advenir dans le suj et qui se trouve interpellé par son
contenu dans l'enracinement de sa vie historique.
Quand H.U.VON BALTHASAR critique la manière dont
Karl RAHNER si tue la fonction de l' Ecri ture sainte l il
prend une position qui est en contradiction avec les
présupposés de la pensée - rahnérienne - sur la révélation.
Aussi n'est-il pas étonnant de voir que selon BALTHA8AH li
'7-L
Karl RAHNER prend ses distances par rapport aux
interprétations taràives àe llévénement du salut. Ces
interprétations sont colorées par la vision du monde de
ceux qui ont donné une forme définitive à la révélation
biblique. Leur conditionnement culturel aujourd'hui
accessible à la cri tique historique permet de rej oindre
l'événement originel pour dégager sa signification
sotériologique pour l'homme d'aujourd'hui. Pour l'homme
d'aujourd'hui, l'idée d'une substitution de Jésus à la
place des pécheurs est impensable. Nul ne peut être sauvé
par procuration. Le salut concerne le sujet humain qui se
si tue face à Dieu en être responsable, et l'idée qu un1
77
inconditionnel, soit du pain gracieuse~8 L 0rfel~ et
par i...a:gé. Si les contemporains de J'ésus ont été sauvés avant
leur mort' de situations de détresse qui rendaient pénibles
leurs conditions humaines, ils restaient marqués par
l'angoisse et la crainte de la mort. Bénéficiaires des
signes de salut, les contemporains de Jésus restaient
solidaires de l'humanité aspirant à un salut plus radical
qui opérerait sur la mort, l'antique ennemi de l'homme, une
victoire définitive et permanente. Vues sous cet angle, les
expériences individuelles de salut procurées par le
ministère public de Jésus sont des signes du Royaume de
Dieu présent en lui (Actes 10,37-38). Jésus le Messie par
ses paroles et ses actes salvifiques invite ses
contemporains à construire avec Dieu un avenir qui est au
delà du monde présent marqué par la fragilité, la faute, le
péché et la mort. Par un appel vigoureux à la conversion et
à la foi Jésus le Messie prépare son peuple et l'humanité à
recevoir le don de l'Esprit Saint la force de Dieu à
l'oeuvre dans sa vie. Jésus annonce le Royaume présent et
futur et espère la conversion de ses auditeurs. Mais le
refus d'un certain nombre entraîna un conflit dramatique.
Aussi fut-il jugé et condamné. Il resta fidèle à sa mission
et mourut. En réponse à sa fidélité, il fut délivré de la
mort et ressuscite dans la foi de ses disciples. Il est
promu à une condition de vie entièrement nouvelle. Il
devient le chef de l'humanité sauvée et le monde qui
s'enferme dans la violence et le péché se trouve réconcilié
avec celui qui l'a envoyé dans le monde, celui qu'il
appelle son Père. Il donne l' Espr i t du Père qui est le
sien. L'Esprit Saint montre que la passion du Messie et sa
mort, loin de mettre un terme à l'expérience du salut
inaugurée par son ministère public, suscite un nouveau
peuple, les communautés d'Eglise pour témoigner de la
victoire du Messie sur la mort et annoncer à tous les âges
le salùt définitif qu'il apporte. Ceux qui sont rassemblés
par 1: Espri t Saint en communautés d' Eglise sont ceux qui
sont sauvés par la croix du Messie. Le bois maudit devient
bois de vie, symbole de régénération, de transformation, de
guérison et de salut grâce â l' Espri t du Messie répandu
abondamment sur la communauté de ceux qui adhèrent dans la
foi à lui par le baptême. La croix du Messie est le symbole
71
de sa victoire sur le mal. Elle est le triomplu:: Ù;E: 1. ' C1i~(ta:L'
l
questions fondamentales. L'un des gestes les plus délicats
de Dieu envers l' homme est d'ouvrir un avenir absolu à
celui-ci. La mort qui est pour un sujet humain l'événement
1 le plus bouleversant de son existence se trouve investie
d'une nouvelle signification. Elle reste l'achèvement du
devenir personnel du sujet humain, mais elle acquiert une
signification salvifique. Mourir qui est humain comme terme
intrinsèque d'un sujet personnel vivant devient le moment
de la rencontre du fondement absolu du sujet. La primauté
ontologique de Jésus comme premier ressuscité offre à toute
vie humaine parvenue à son achèvement une ultime mutation
en Dieu. L'homme devient dans son univers réconcilié avec
Dieu citoyen du milieu divin par sa participation
sacramentelle à la mort du Christ. L'intensité dramatique
du péché est couverte par la bienveillance et la bonté de
Dieu qui se manifestent dans la compassion prépascale et
postpascale du Christ" pour l es pécheurs. L'envergure du
mystère pascal amorce la glorification et la divinisation
du monde. C'est à partir de ce point d'arrivée que nous
pouvons avoir une nouvelle compréhension du salut. Le salut
s'offre dans la geste de Dieu et la dramatique divine ouvre
l'espérance d'un monde qui est le commencement d'une
nouvelle création.
---av- - -
81J
1
Nous nous proposons dans cette de.i:ù.,;..::: . . t: t:Lcl1Jt: ù~
l
christologique et sotériologique ne s'éloigne-t-il pas du
point de départ de la christologie et de la sotériologie
magistérielles. En effet, Karl RAHNER, à travers ses thèse8
l dans la sixième étape du TRAITE FONDAMENTAL Db; LA t'UT
propose une nouveLle hermèneutique àu dogme de Chalcédoine
à la lumière àes progrès rea,usés à notre époque dans le
domaine des techniques d'investigation historique,
philosophique et théologique. Il commente de manière
originale les affirmations conciliaires de Nicée (325)
d' Ephèse (431) de Constantinople II (553) et de
Constantinople III (680-681). Pour lui, la divinisation de
l' honune est réalisée car en Jésus s'exprime de manière
défini ti ve et absolue la nouvelle proximité de Dieu. Il
défend avec le Concile dl Ephèse l'uni té hurnano-divine du
Christ en réinterprétant l'union hypostatique avec les
catégories de la dialectique du même et de l'autre. Selon
cette dialectique l ' Absolu par pur don de soi se communique
au fini créant par libre initiative la possibilité de
devenir l'autre qu'il assume sans s'appauvrir et sans
J
priver le fini de son autonomie par rapiJ-:'~ ~ .::.. 1..;( ...-é-ëü.i:i:.:à
82
mystère absolu de l'être qui a nom Dieu, Espl. i L: cn:f"'8Tt- à
l'accomplissement de soi par l'autocommunication imméûidte
de Dieu (T'TF po. 205.:....221). La- eigol tsirhc~' transcendantale Il
aurait ainsï pour fonction de présenter le Christ comme
"celui qui apporte absolument le salut ll
, cl-est à dir.e,_qui.
à la fois accueille, en tant qu 1 homme, -et apporte, en tant
que Dieu l'autocommunication à l'homme de façon absolue et
défini tive (TTF p. 221-240), et de présenter le "devenir-
homme de Dieu ll
comme Ille cas unique et suprême de
11 accomplissement essentiel de la réalité humaine, lequel
tient en ce que l'homme existe en se perdant dans le secret
absolu que nous nommons Dieu." (TTF p.247). Une telle
conception de l'incarnation oblige à prendre au sérieux non
moins la réalité humaine de Jésus que le devenir-homm8 du
Logos, la première étant créée par l'extériorisation du
Logos dans une autre chose qu'il assume comme son bien
propre (TTF P.251-252): Il cet homme, précisément comme
homme, est llautodiction de Dieu dans son auto-
extériorisation, parce que Dieu se dit justement quand il
s'extériorise, lorsqu'il se fait connaître lui_même comme
l'amour" (TTF P.253), et l'humanité du Christ est ilIa plus
autonome" qui soit, linon pas bien qu'elle soit, mais parce
qulelle est l'humanité assumée, posée comme autodiction ùe
Dieu" (TTF p.ZS6j'. Cette vision transcendantale amène donc
à penser ensemble et à articuler 1: une à l'autre création
et incarnation Il comme deux moments et deux phases d'un
processus d'auto-extériorisation et d'auto-expression de
Dïeu un seul processus, bien qu'intérieurement
différencié " (TTF p. 225 et p251-252). Le bien-fondé des
formules dogmatiques est d'affirmer la singularité
historique de l'événement et de l' homme en qui Dieu a
accueilli Ilhumanité mais leur signification pour l homme, 1
9f
J
. - - ~- ç-
unique de la matièTe à' la' vie qui aboutit à" l' espri t
inséparable du monde. Aussi l'homme est""il dans le monde
une totalité organique inachevée, biodégradaLle , dont - la'
tâ"cfre . est. d.: entreT dans: une v.is'iorr sp:éci.f.i.que. dU' ,monde' pour
déployer ses possibilités d'autotranscendance. Dans cette
perspective anthropologique, l 'horrune dans l'expérience
transcendantale et dans l'activité catégoriale est une
autotranscendance de la matière vivante qui devient
l' histoire libre dl une subj ectivi té spirituelle dotée de
l'infini té radicale de son fondement unique qui est son
point d'identité. ce point d'identité se communique dans :id.
Léa:iité intime de l'homme en devenir sans faire nombre avec
le mouvement de l'être fini qui est constitutif à l' "étant
dans lequel la tendance fondamentale de la matière à se
trouver elle-même parvient par autotranscendance à sa
percée définitive" (TTF,p208).
(01
CULLMAN o. Christ and Time, Westminster, Philadelphia,
1975, 5th ed.
A. La Résurrection: Un Témoignage...................... 14
Difficulté 37
IV. KARL RAHNER: UN THEOLOGIEN CATHOLIQUE PROFONDEMENT
TRIBUTAIRE DE LA CHRISTOLOGIE ET DE LA SOTERIOLOGIE
NEO- TESTAMENTAIRES ET MAGISTERIELLES 41
CONCLUSION 89
BIBLIOGRAPHIE .... _. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99