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2007 Chapitre 9
co-fondateurs
Aplasie fébrile
L
a chimiothérapie reste le traitement de référence dans de nombreux types de
cancer, avec un bénéfice certain sur la survie sans récidive et la survie glo-
bale. La survenue d’une neutropénie représente la toxicité la plus fréquente
rencontrée chez les patients traités pour cancer. L’apparition d’une fièvre chez un
patient neutropénique à la suite d’une chimiothérapie signe le risque de complica-
tions infectieuses potentiellement léthales. Elle a pour conséquences des réhospi-
talisations pour administration de traitements anti-infectieux et altère la qualité de
vie des patients. Des travaux récents permettent de proposer une stratification du
niveau de risque pour mettre en place des prises en charge différenciées (1). Nous
traiterons dans cet exposé des principes du traitement et de la conduite à tenir
dans le cadre des neutropénies de courte durée qui représentent la population de
patients pris en charge sur un mode ambulatoire et susceptibles de se présenter
aux urgences. Les neutropénies de longue durée en hématologie lourde et les
greffes de moelle osseuse ne seront pas envisagées, car ces patients restent hospi-
talisés durant toute leur période de neutropénie dans des secteurs spécialisés.
1. Généralités
1.1. Neutropénie
La neutropénie est définie par un nombre absolu de polynucléaires neutrophiles
(PNN) circulants < 1,5 giga/l. L’OMS a défini cinq grades, de 0 à 4, pour évaluer la
1. Département anesthésie-réanimation.
2. Unité de pathologies infectieuses et d’infectiovigilance, Institut Paoli-Calmettes, 232, boulevard de
Sainte-Marguerite, 13273 Marseille cedex 09, France.
Correspondance : Tél. : 04 91 22 35 21. Fax : 04 91 22 35 56. E-mail : blachejl@marseille.fnclcc.fr
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Tableau 1 – Critères d’évaluation OMS des toxicités
Évaluation de la neutropénie
Évaluation de la mucite
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Tableau 2 – Score MASCC
Patient ambulatoire 3
• aucun ou modérés 5 ou 3
• pas d’hypotension (PAS > 90 mmHg 5
• pas de déshydratation 3
Comorbidité
• pas de BPCO 4
• tumeur solide ou hémopathie sans antécédent d’infection fongique 4
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Cette information est le rationnel sur lequel l’administration d’antibiotiques à
large spectre, dès l’apparition de la fièvre, a été développé. Toutefois, la composi-
tion spécifique de ce traitement empirique reste toujours controversée. Les recom-
mandations les plus récentes prennent en compte la séparation des patients à
risque faible des autres, pour différencier deux niveaux de traitement (6).
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traitement per os avaient une plus grande incidence d’effets secondaires intesti-
naux, tandis que les autres avaient des problèmes liés à l’utilisation de leur cathé-
ter. L’immense majorité des traitements per os comporte une association de
quinolones, associée à une β-lactamine, le plus souvent Amoxicilline-acide clavu-
lanique (11). Le deuxième aspect de la prise en charge est la possibilité d’admi-
nistrer cette antibiothérapie en ambulatoire à domicile, avec plusieurs avantages
potentiels : diminuer le risque d’infection nosocomiale, améliorer la qualité de
vie. Seuls les patients cliniquement stables peuvent faire l’objet d’une telle prise
en charge. En fait, la possibilité d’administrer le traitement antibiotique à domi-
cile est lié non seulement à des facteurs médicaux, mais surtout à des facteurs
d’environnement social, de la compliance du patient et de sa parfaite compré-
hension de la prise en charge, de la collaboration étroite avec le médecin géné-
raliste et de l’absence de l’éloignement de son domicile par rapport à l’hôpital
(10). On retrouve, dans ces contraintes, la plupart de celles rencontrées pour
l’anesthésie en chirurgie ambulatoire.
3.1.2. Fièvre
La fièvre chez le patient neutropénique est définie par une seule détermination
supérieure à 38,3 oC (en pratique 38,5 oC) ou deux déterminations au moins
supérieures ou égales à 38 oC dans un intervalle de 4 heures. La prise de tem-
pérature rectale doit être proscrite en raison du risque local, à la fois infectieux
et hémorragique du fait de la thrombopénie souvent associée. Deux méthodes
de prise de température sont recommandées : température buccale, température
axillaire corrigée (ajout de 0,5 oC) (2, 6).
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Ainsi, à l’issue de cet examen, le patient sera classé en deux catégories, risque
faible ou pas, en utilisant le score MASCC et les autres signes de gravité.
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Tableau 3 – Algorithme pour l’antibiothérapie des neutropénies fébriles de courte durée,
d’après (6)
Oui Non
GRAM – GRAM +
Cipro • Carbapenem
+ ou
Amoxi/Clav • C3 G Monothérapie Monothérapie
ou + +
• Ureido-Peni Aminosides Glycopeptides
+ Inhibiteur
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envisagée dans le cas de figure où l’équipe d’oncologie qui a pris en charge le
patient fait partie des services de l’hôpital du secteur d’urgence où il a été admis,
et cette décision sera prise de façon conjointe.
4. Conclusion
La prise en charge de l’aplasie fébrile après chimiothérapie est en constante
évolution.
Ces dernières années ont été marquées par la validation d’un score prédictif
permettant d’identifier un groupe de patients à faible risque de complications.
Des réponses sont attendues concernant la population des patients ambulatoires
à risque faible : résultats de l’utilisation à large échelle du score prédictif de
complications, efficacité et sécurité des traitements strictement ambulatoires et
développement de l’utilisation de nouvelles molécules par voie orale.
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