بحث دكتور محمد عبد الباقي2

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

L'insécurité linguistique dans les pratiques langagières


de quelques francophones en Haute Egypte

Mohamed Abdelbaki Ahmed


Professeur adjoint au département de la langue française
Faculté des Lettres- Université du Sud de la Vallée

Résumé

Le concept de l'insécurité linguistique trouve son origine dans les


travaux des sociolinguistes qui s'intéressent à l'étude de la question de
la variation linguistique dans la communauté sociale. Les pratiques
langagières des locuteurs francophones en Haute Egypte attestent des
difficultés phonétiques, morphosyntaxiques et sémantiques dans
l'expression orale et écrite. Ces locuteurs francophones ont l'intention
de parler bien le français, mais quand ils s'expriment en français, nous
remarquons un décalage entre ce qu'ils veulent dire et entre ce qu'ils
pratiquent effectivement. D'ici leurs pratiques sont imprégnés de la
peur, de la hypercorrection, et du blocage linguistique.

Cette étude se base sur l'analyse sociolinguistique de l'insécurité


linguistique dans les pratiques francophones, et elle s'appuie
également sur l'observation ainsi que sur un questionnaire appliqué
auprès des étudiants pour essayer de collecter les données et
d'examiner les facteurs de cette insécurité linguistique et ses
conséquences sur le niveau des étudiants. Nous nous intéressons à
expliquer la notion de l'insécurité linguistique, et à discuter ses causes
et ses conséquences sur les locuteurs francophones de la Haute
Egypte. De plus, nous tentons de mettre des solutions possibles pour
remédier à ce sentiment de l'insécurité linguistique qui touche les
pratiques des locuteurs francophones en Haute Egypte.

Mots- clés
Insécurité linguistique, Pratiques francophones, Hypercorrection,
Interférence linguistique.

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Introduction
L'insécurité linguistique représente un phénomène
sociolinguistique qui se manifeste dans le malaise ressenti par le
locuteur à l'égard d'une langue ou d'un parler. Les francophones
de la Haute Egypte subissent quelques difficultés phonétiques,
syntaxiques et sémantiques dans l'expression orale et écrite en
français. Ces francophones en Haute Egypte souffrent d'un
sentiment intérieur de peur, de l'hypercorrection, et de
l'hésitation quand ils veulent discuter des sujets de la vie
quotidienne ou écrire des articles en français. Cette langue, est
considérée, pour eux, comme une langue moderne, élégante et
importante, mais quand ils prononcent ou écrivent en français,
nous remarquons un décalage entre ce qu'ils veulent dire, et entre
ce qu'ils prononcent effectivement. D’où nous discutons
l'insécurité linguistique qui domine les échanges
conversationnels des étudiants aux départements de français à la
faculté des Lettres de Qena, à l'université du Sud de la Vallée, et
à la faculté des Lettres à l'Université d'Assouan. La langue
française écrite et parlée par ces étudiants nous invite à étudier
les causes de cette détérioration linguistique notamment sur le
niveau grammatical et lexical et de discuter les signes de
l'insécurité linguistique qui se remarquent dans l'expression orale
et écrite de ces étudiants. Cette étude se base sur l'observation
ainsi que sur un questionnaire appliqué auprès des étudiants pour
essayer de collecter les données et d'examiner les facteurs de
cette insécurité linguistique ainsi que ses conséquences sur le
niveau des étudiants. Nous tentons également de mettre des
solutions possibles pour remédier à cette insécurité linguistique
qui pénètre énormément l'oral et l'écrit des étudiants
francophones en Haute Egypte.

1- L'insécurité linguistique
L'insécurité linguistique se définit comme l'inconfort que la
personne ressent au cours d'un échange verbal ou plutôt dans une
situation de communication formelle où chacun est appelé à
surveiller sa manière de parler. En effet, l'insécurité linguistique
touche le public qui est constitué de locuteurs non-natifs de la

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langue. Cette insécurité linguistique s'observe beaucoup chez les


migrants, les apprenants des langues étrangères mais aussi chez
des locuteurs natifs comme les professionnels, les animateurs des
programmes télévisés, les opérateurs dans des centres d'appels,
les journalistes, les traducteurs qui tentent de se conformer à la
norme de langue standard et qui tombent dans l'erreur à cause de
ce sentiment intérieur de l'insécurité linguistique qui s'attache
dans la plupart des cas à un autre sentiment d'appartenance à une
couche sociale qui ne jouit pas d'une grande reconnaissance sur
l'échelle sociale ou économique; c’est-à-dire une catégorie qui ne
perfectionne pas les moyens du prestige social. Selon Jean
Pruvost, les dictionnaires usuels de langue française n'intègrent
pas la formule de l'insécurité linguistique dans l'ordre
lexicographique des mots et ce terme est figuré seulement dans
l'ouvrage collectif de Marie- Louis Moreau en 1997 qui consacre
quelques pages à cette notion, encore traitée par Michel Francard
dans la même année1.
Selon Julie Boissonneault, la notion de la sécurité linguistique se
remarque quand une personne ne met pas en doute sa manière
d'expression, se sent à l'aise à communiquer dans une langue et
ne trouve pas d'obstacles langagiers avec les interlocuteurs. Mais
l'insécurité linguistique se traduit chez le locuteur par le
sentiment de ne pas être compétent, de ne pas être à la hauteur de
son interlocuteur, ou encore par le fait de la peur de commettre
des fautes. Ce sentiment qui domine le locuteur indique qu'il y a
un écart entre la langue de l'autre et sa propre langue2.
D'autre part, les manifestations de l'insécurité linguistique sont
nombreuses et peuvent avoir différentes formes comme l'excuse
devant les autres de son incompétence linguistique, le locuteur
peut recourir aussi à l'emploi d'une autre langue qu'il maîtrise
pour ne pas être critiqué ou jugé négativement de la part des
autres3. La prise de conscience de la différence de la part des
locuteurs peut mener à l'insécurité linguistique mais aussi à la
sécurité linguistique. L'école joue un bon rôle dans la sécurité et
l'insécurité linguistiques, puisqu'elle peut valoriser ou dévaloriser
telle ou telle forme langagière, en expliquant ou pas la nature des
différenciations linguistiques entre locuteurs. La seule façon de

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surmonter l'insécurité linguistique et de promouvoir la sécurité


linguistique, c'est en comprenant la dynamique de la langue et
des langues en contact4.
D'ailleurs, nous pouvons dire que le concept de l'insécurité
linguistique apparaît pour la première fois chez le sociolinguiste
américain William Labov qui a consacré ses travaux à la
stratification sociale de la langue, et qui a tracé le chemin pour
les futurs sociolinguistes pour la question de la variation
linguistique. Labov a étudié le changement linguistique dans la
communauté new-yorkaise vis-à-vis de la réalisation phonétique
du phonème r et il a remarqué qu'il y avait un décalage entre ce
que certains locuteurs prétendent prononcer et ce qu'il
prononcent effectivement. Labov a conclu que la petite
bourgeoisie présente un exemple typique de l'insécurité
linguistique à cause de l'écart entre la performance phonétique
des locuteurs et l'auto-dévalorisation de leur propre parler. Les
travaux de Labov montrent que l'origine de l'insécurité
linguistique réside dans le fait que la petite bourgeoisie essaye de
se rapprocher de la classe prestigieuse par l'adoption et
l'imitation de ses pratiques langagières.
Donc, nous comprenons que l'insécurité linguistique s'explique
comme une difficulté ou un obstacle qui se développe de la prise
de conscience d'un décalage entre la production linguistique de
certains locuteurs et les jugements de valeur de la communauté
sociale où ils vivent comme le souligne Calvet:
"il a y a l'insécurité linguistique lorsque les locuteurs
considèrent leur façon de parler comme peu valorisante et ont en
tête un autre modèle plus prestigieux, mais qu'ils ne pratiquent
pas5."
Par ailleurs, dans les travaux francophones, les recherches sont
nombreuses: parmi les premiers à avoir mentionné cette notion,
nous pouvons citer Jean Darbelnet, Nicole Guenier, Emile
Genouvrier et Abdelhamid Khomsi qui ont étudié la production
linguistique et les attitudes face à la norme dans les milieux
urbains différents en France. Dans l'ouvrage intitulé les français
devant la norme, Guenier remarque que dans les régions où

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coexistent le français et une langue régionale, l'insécurité


linguistique se pratique énormément6.
De plus, Trudjill en 1974 souligne que les locuteurs féminins de
la Norwich essayent de surévaluer le nombre des variantes
phonétiques prestigieuses dans leurs pratiques langagières et
elles aspirent à s'approprier les formes légitimes et valeureuses.
D'un autre côté, Bourdieu propose une analyse qui démontre le
lien étroit entre le sentiment de l'insécurité linguistique chez les
locuteurs du sexe féminin et celui de la petite bourgeoisie déjà
mise en évidence par W. Labov.
En effet, Michel Francard, en 1989, est le premier linguiste qui a
tenté de définir le terme de l'insécurité linguistique et de
conceptualiser cette notion. Ses travaux mettent l'accent sur la
relation entre l'insécurité linguistique et la scolarisation. Selon
lui, l'institution scolaire, dans les pays francophones, augmente
l'insécurité linguistique et cela à travers la dépréciation des
variétés régionales en faveur d'un modèle inaccessible et
toujours assimilé au français parisien.
Nous pouvons résumer les hypothèses qui viennent d'être
établies comme suivant:
- Selon William Labov et Bourdieu la langue reconnue et
légitime est celle qui concerne la classe dominante
- Selon Guenier, la langue légitime et normée est celle de la
communauté linguistique où le français domine au
détriment des variétés locales décrites comme dominées
- Selon Francard, la langue légitime est celle des locuteurs
fictifs qui détiennent la norme linguistique grâce au rôle
pratiqué par l'institution scolaire.
D'autre part, Gurdun Ledgen et Philippe Blanchet soulignent que
l'insécurité linguistique représente la prise de la conscience par
les locuteurs d'une distance entre leur idiolecte et une langue
qu'ils reconnaissent comme légitime socialement. Cette langue
aspirée et légitime concerne la classe dominante et bien prônée
de la part de l'institution scolaire qui dévalorise toutes les
variantes de la norme.
D'ici nous déduisons que le sentiment de l'insécurité linguistique
s'attache beaucoup à la non maitrise de la norme linguistique.

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Celle- ci impose au locuteur les règles du bon usage et du bien


parler. La norme est généralement défendue et détenue par la
classe dominante et dirigeante et elle est transmise par
l'institution scolaire. Plus le locuteur est loin de l'application de
la norme, plus il se sent dominé par le sentiment de l'insécurité
linguistique, et plus il la respecte, plus il devient à l'abri de ce
sentiment de malaise et de la perturbation linguistique.
Rappelons que Moreau divise la norme en quatre modèles:
- Norme objectives
Ces normes désignent les habitudes linguistiques de la
communauté sociale et elles représentent la base essentielle
partagée pour les comportements linguistiques.
- Normes descriptives
Elles décrivent les normes objectives d'une manière détaillée
et elles hiérarchisent les normes objectives concurrentes.
- Normes évaluatives
Ces normes s'intéressent aux attitudes et aux représentations
linguistiques. elles concernent les formes des valeurs morales
ou esthétiques affectives.
- Normes fantasmées
Ces normes peuvent renvoyer à la théorie de l'imaginaire
linguistique de Houdebine en 1993. Elles comportent les
conceptions des membres de la communauté linguistique sur
la langue et son fonctionnement social7.
Nous pouvons remarquer que la norme est une réalité plurielle
régie par les forces de la communauté sociale. La communauté
linguistique peut attribuer des valeurs extralinguistiques à la
variation linguistique, et elle peut aussi sanctionner l'emploi de
certaines formes langagières. D'ici, la non maitrise de la norme
imposée par la communauté linguistique dominante peut
engendrer le sentiment de l'insécurité linguistique. En un mot,
l'insécurité linguistique s'explique par la manifestation d'une
quête de légitimité linguistique vécue par un groupe social
défavorisé qui a une perception dévalorisante de son parler et qui
cherche, par tous les moyens possibles, à acquérir et à adopter,
dans son propre parler, de nouvelles normes linguistiques des

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classes socialement décrites comme hautes par le prestige et la


promotion sociale.

2- Types de l'insécurité linguistique


Moreau affirme qu'il y a deux types de l'insécurité linguistique:
l'insécurité linguistique dite et l'insécurité linguistique agie. Le
premier type se rencontre dans les discours épi-linguistiques;
c’est-à-dire à travers les discours et les représentations des
locuteurs et l'insécurité linguistique agie qui se remarque dans
les comportements langagiers des locuteurs. De plus J. Louis
Calvet8 distingue trois formes de l'insécurité linguistique:
2.1. Insécurité statutaire
Ce type d'insécurité linguistique s'observe chez le locuteur qui ne
croit pas à la légitimité de son parler local vis-à-vis de la norme
dominante. Nous remarquons l'insécurité statutaire ou formelle
dans des situations de plurilinguisme où les variétés en présence
offrent des rapports diglossiques inégalitaires comme le cas des
locuteurs d'une langue régionale comme le provençal ou le
breton. Ces locuteurs sont conscients que leur langue représente
un patois contre le français et sont donc dans une situation
d'insécurité formelle et statutaire.
2.2. Insécurité identitaire
Cette insécurité est liée aux situations dans lesquelles le locuteur
pense que sa variété linguistique n'est pas celle de la
communauté réelle, ou à vrai dire la communauté imaginaire où
il espère adhérer. Ce sentiment d'insécurité identitaire se
remarque chez les immigrés qui souhaitent parler comme les
locuteurs autochtones de la langue comme le cas des
francophones égyptiens, tunisiens, algériens, et libanais en
France.
2.3. Insécurité formelle
Le locuteur dans cette insécurité formelle considère que son
parler est formellement non légitime. C'est le cas des locuteurs
d'une langue nationale qui pensent que dans un tel ou tel autre
lieu on parle d'une manière parfaite comme le cas des Québécois
et des Belges qui sont statutairement confiants de leur langue,
mais ne sont pas formellement certains de la façon dont ils la
parlent ou la prononcent.

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3- Causes de l'insécurité linguistique


Selon Marie Louise Moreau, l'école est la génératrice de
l'insécurité linguistique et elle propose un travail basé sur la
nécessite de la formation des maitres pour sensibiliser les élèves
à la pluralité des normes linguistiques. Donc, la variation
diatopique, qui concerne la différenciation linguistique d'après la
position géographique, peut produire le sentiment d'un malaise et
d'une infériorité linguistique chez les locuteurs qui reconnaissent
que leurs variétés linguistiques sont basses et ne jouissent pas
d'un prestige social9. D’où, on devrait faire comprendre aux
enseignants la nécessité de la reconnaissance des normes
plurielles et de fortifier, chez les apprenants le sentiment de
l'identité culturelle pour atténuer inconsciemment, chez eux, le
sentiment de l'insécurité linguistique.
De plus, parmi les causes essentielles de l'insécurité linguistique;
c'est l'image négative que le locuteur se construit de sa langue
par rapport à la langue de l'autre ou à sa manière de parler.
Calvet indique que les représentations sont les façons produites
par les locuteurs en évaluant leurs pratiques langagières par
rapport aux autres locuteurs. Il indique que les représentations
linguistiques touchent à trois facteurs: celui des formes des
langues (comment il faut parler), celui du statut des langues (ce
qu'il faut dire), et celui de leur fonction identitaire (la façon selon
laquelle la communauté linguistique d'appartenance parle. Le
linguiste peut accéder à ces représentations à travers deux
moyens: les évaluations et les observations. Les évaluations
concernent les pratiques des locuteurs (ce qu'ils disent), leurs
jugements sur les pratiques (comment ils pensent parler), et sur
les situations (valeurs accordées aux langues, ainsi que les
rapports entre pratique de telles ou telles langues au statut
social). Les observations permettent de vérifier la véracité des
évaluations.
D'ailleurs, nous pouvons dire qu'il faut tenir compte du milieu
d'apprentissage, et le milieu familial et social comme des causes
principales de l'insécurité linguistique. La famille, le niveau
éducatif des parents peuvent influencer d'une manière directe et

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indirecte le niveau des apprenants francophones égyptiens. Nous


pouvons ceci expliquer de la manière suivante:
- L'arabe est la langue officielle de l'Egypte et l'anglais est la
première langue étrangère, le français se pratique dans quelques
écoles des langues de la maternelle jusqu’à l'étape secondaire
mais dans la plupart des cas on l'enseigne dans l'étape secondaire
dans des écoles gouvernementales pour deux ou trois ans.
- La difficulté de la pratique du français hors de l'université et
toute l'activité au sein de la faculté est centrée sur le français
classique et même les devoirs exigés ne sont pas satisfaisants
pour remplir la lacune linguistique des apprenants ou de
développer des compétences de l'oral ou de l'écrit chez eux
puisque les programmes universitaires s'intéressent au côté
littéraire aux dépends des compétences linguistiques de
l'expression et de la production comme l'indique Madiha Doss:
"Malgré les transformations radicales qui se sont produites dans
la communauté des locuteurs du français en Egypte entre la
première et la deuxième moitié du XXe siècle, les programmes
n'ont pas été modifiés en fonction des mutations survenues. Et
l'enseignement universitaire continue de privilégier
10
l'apprentissage de la littérature ."
Nous pouvons dire que ce décalage observé entre la compétence
linguistique des étudiants et les nécessités du cursus universitaire
traduit le niveau de langue et donc les productions.11
- Le niveau familial des apprenants: pour la plupart des
apprenants en Haute Egypte, le français est considéré comme
deuxième langue étrangère et ils ne le pratiquent que rarement
avec la famille. La langue pratiquée ou appropriée chez les
parents joue un bon rôle dans la maitrise de la langue de
l'enseignement; puisque cette langue peut se transmettre d'une
génération à une autre comme le souligne F.Abecassis:
"A la différence des langues rares (…), l'apprentissage de
l'anglais et du français est un processus cumulatif qui ne
demande qu'une génération pour atteindre son maximum. Cela
suggère,(…), que lorsqu'une de ces deux langues entre dans une
famille, elle n'en sort que difficilement et elle a tendance à se
transmettre de génération en génération12".

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- le milieu social et environnemental des apprenants peut


influencer fortement le niveau des étudiants, et peut produire
chez eux les signes de l'insécurité linguistique; les étudiants qui
n'avaient pas de contact avec le français ne peuvent pas le
maitriser ou le pratiquer comme les personnes qui l'ont déjà
pratiqué avec les touristes par exemple.
- Le facteur des stéréotypes et des représentations négatives: les
stéréotypes se définissent comme les images figées attribuées à
un groupe humain. En Haute Egypte, le français est décrit
comme langue fine, délicate et prestigieuse, d’où on avait
l'impression que le français est une langue pour les filles ou pour
les femmes et l'anglais est un langue pour le travail comme le
note F. Abecassis:
"le français progresse chez les filles de génération en
génération, et atteint un taux de connaissance très voisin de
celui de l'anglais pour une pratique bien plus usuelle. Il régresse
en revanche chez les garçons, au profit (…) de l'anglais, qui,
(…), devient davantage une langue utilisée dans un contexte
professionnel13."
- le niveau éducatif et culturel de l'enseignant peut développer
ou diminuer les compétences langagières des apprenants;
puisque plus l'enseignant perfectionne la langue et la culture de
l'autre, plus le niveau des étudiants s'améliore.
- La manque des supports didactiques et des méthodes de
l'apprentissage de la langue peut engendrer chez l'apprenant un
blocage et une incapacité de communication avec ses collègues
et ses professeurs comme c'est le cas de la Haute Egypte par
rapport au Caire et à Alexandrie, où on voit de grandes
bibliothèques et des centres spécialisés pour la pratique de la
langue: Institut français, Alliance française, bibliothèque
d'Alexandrie, CAF…

4- Le français en Egypte
Le français n'est ni la langue maternelle, ni la première langue
étrangère chez la plupart des Egyptiens, mais l'arabe standard
représente la langue officielle de l'état et la langue parlée est
l'arabe égyptien qui ressemble à l'arabe classique mais avec

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quelques différences phonétiques, morphologiques, et


sémantiques qui changent selon les provinces et les villes. Le
Siwi est parlé par quelques habitants de Siwa à l'ouest de
l'Egypte. Le copte s'emploie comme une langue liturgique et
religieuse à l'église, et le nubien est une langue parlée par
quelques habitants de la communauté nubienne qui vit en Haute
Egypte et en particulier à Assouan. Ces habitants ont appris
l'arabe qui est devenu, plus tard, leur langue maternelle. Le Béja
est une langue qui se parle dans le sud de l'Egypte aux frontières
soudanaises et les habitants de ces régions sont bilingues Béja-
arabe. Le dorami est une langue parlée par deux communautés:
le Ghagar en Basse Egypte et le Halabi en Haute Egypte.
En Egypte, le français est une langue qui a une histoire enracinée
dans la mentalité des francophones égyptiens. Cette langue
occupait la place de choix dans la société égyptienne depuis le
début du XIXe siècle jusqu’à la fin de la première moitié du XXe
siècle. Nous pouvons dire qu'il y a des facteurs pour cette
floraison du français en Egypte comme l'Expédition de Napoléon
Bonaparte, la presse française en Egypte, le système des
missions scientifiques adopté par Mohamed Ali, et les écoles
religieuses et laïques d'expression française. Depuis le début du
XIXe siècle et jusqu’à la première moitié du XXe siècle, le
français était la langue des associations scientifiques, du
commerce, des salons et des soirées mondaines; de plus c’était la
langue couramment utilisée par les étrangers. Selon Madiha
Doss, dans cette période, la langue française était la langue de
l'administration, de la Cour, des affaires ainsi que des sociétés
scientifiques qui employaient le français comme langue de
communication et le Caire était qualifié au début du XXe siècle,
selon Irène Fenoglio, comme le petit Paris:
"La vie publique et citadine repose sur l'usage du français (…).
Le français est utilisé pour les consignes quotidiennes: noms de
rues, de boutiques, cinémas. Le Caire se nommait le petit
Paris14".
Bien plus, malgré l'hégémonie du français dans la période qui
date de 1882 jusqu'à 1936, cette langue s'est trouvée dans une
situation de compétition et de conflit avec l'arabe et l'anglais 15.

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L'arabe s'employait par les tenants du mouvement national et


l'anglais était la langue de l'occupation qui voulait s'imposer
culturellement et militairement.
D'ailleurs, le statut du français a changé après la Révolution de
1952 à cause de la politique des leaders de la Révolution qui
consiste à réduire l'enseignement des langues étrangères en
faveur de la langue arabe. Le français n'est plus devenu la langue
maternelle pour beaucoup de locuteurs francophones, mais une
langue étrangère qui s'apprend à l'école ou à l'université dans le
but de l'ouverture générale sur les autres cultures ou pour des
objectifs spécifiques16.
Selon J. J. Luthi, sur l'échelle culturelle, aucun groupement
nouveau ne s'est fondé depuis 1952, pas un hebdomadaire de
langue française à grand tirage n'a été publié depuis la
disparition d'Images en 1968. Les deux seuls quotidiens restent
Le journal d'Egypte et Le progrès Egyptien, mais le nombre du
tirage reste le même17.
Dans la période contemporaine, les écoles, où le français est
enseigné comme première langue, sont dans un statut de
compétition avec les écoles à enseignement anglais ou allemand.
D'autre part, le français est employé comme langue
d'enseignement dans des écoles dites des établissements privés
ou des établissements d'investissement. Ils sont construits depuis
1970 et ils jouissent d'une plus grande liberté par rapport aux
écoles traditionnelles. Ainsi le nombre d'écoles où l'on enseigne
le français augmente mais très peu relativement aux
établissements de langue anglaise18.
Dans la période contemporaine, les écoles gouvernementales
adoptent l'anglais comme la première langue étrangère et le
français est considéré comme la deuxième langue qui devient
comme option et en concurrence avec l'italien, l'allemand et
l'espagnol… Dans le milieu universitaire, l'enseignement du
français est intégré comme section au sein des Facultés des
Lettres, des Langues (Al-Alsun), de Pédagogie. L'admission de
l'étudiant au sein du département du français exige une bonne
note en français dans l'étape secondaire et l'exige dans quelques
départements des facultés des Lettres et des Langues de

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l'Université du Caire, d'Alexandrie, d'Ain Chams, de Helwan


dont le niveau linguistique des étudiants et des professeurs est
avancé par rapport aux autres départements de français en
Egypte.

5- Les indices de l'insécurité linguistique chez les


francophones de la Haute Egypte

5.1. L'hypercorrection
Selon Jean Dubois: "l'hypercorrection est la faute ou l'écart
phonétique, morphologique, lexical ou syntaxique, né de
l'application d'une norme ou d'une règle là où il n'y a pas lieu,
par le jeu de l'analogie des paradigmes19…". Le locuteur qui est
touché par l'insécurité linguistique tente, tout le temps,
d'exagérer dans l'application des règles phonétiques ou
grammaticales en pensant que ces manières indiquent sa maitrise
linguistique de la langue. Parfois, cette hypercorrection se
manifeste dans la mise erronée des accents sur des mots qui ne
nécessitent pas des accents ou dans la prononciation des voyelles
d'une manière ouverte au lieu d'être fermée. Cette
hypercorrection est considérée comme une déviance consciente
par rapport à la norme et son application, et elle se croise
beaucoup dans la volonté de quelques locuteurs d'imiter la forme
dominante ou favorisée de la langue à travers l'adoption des
stratégies différentes pour faire croire aux interlocuteurs qu'ils
dominent et perfectionnent la langue légitime20.
Rappelons que l'hypercorrection est présente aussi bien dans le
parler arabe que dans le parler français des locuteurs de la Haute
Egypte, puisque nous pouvons la rencontrer dans les échanges
conversationnels des locuteurs villageois qui immigrent vers le
Caire et qui essayent de parler à la manière des cairotes dont le
dialecte est décrit comme prestigieux et moderne. Les locuteurs
villageois qui ont peur d'être classé dans une situation
d'infériorité, à cause de leur parler local, vont recourir à imiter le
parler dominant d'une façon exagérée et vont tomber dans le
piège de l'hypercorrection. Cette tentative d'imiter le parler décrit
comme prestigieux atteste un sentiment profond d'insécurité

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linguistique. Les locuteurs francophones en Haute Egypte


tombent dans l'hypercorrection mais ils commettent des fautes
graves. Le locuteur francophone égyptien peut croire qu'il est
nécessaire de substituer un mot à un autre en pensant que le mot
choisi est considéré plus valorisant et plus correct que les autres
mots. Dans les exemples suivants, le locuteur francophone de la
Haute Egypte cherche à susciter un jugement de valeur plus
favorable de la part de l'allocutaire:
-gens au lieu de personnes
-parce que au lieu de car
-en revanche au lieu de par contre
-les dérivés de verbes dire au présent, au lieu de dire vous
contredisez il dit vous contrdites, ainsi de même pour le
verbe médire
Il nous parait que l'hypercorrection est une conséquence de
l'insécurité linguistique qui s'explique par le décalage entre la
façon de parler ou d'écrire et un langage que le locuteur perçoit
comme prestigieux mais en vérité il ne le perfectionne pas. Cette
hypercorrection21représente une tentative ratée d'imiter la norme
linguistique et ces pratiques langagières s'observent dans les
contextes surveillés; c’est-à-dire dans les cours de français où
l'enseignant attend la réponse normée de ses élèves.
Il nous semble que le locuteur francophone égyptien peut
recourir à l'invention linguistique pour essayer de remplir les
cases vides de son bagage linguistique. Il se met à former par
dérivation erronée des verbes ou des mots nouveaux calqués sur
la structure des mots anglais ou arabes.
Selon N. Bagawy, l'hypercorrection peut être considérée comme
dévalorisante et ridicule pour ceux qui dominent la forme
légitime et qui vont juger d'une manière cynique les locuteurs
qui imitent la prononciation valorisée22.
Selon la question posée aux étudiants: avez-vous peur de la
critique de vos professeurs ou de vos camarades quand vous
vous exprimez en français? Nous avons trouvé que 80% des
étudiants répondent par oui alors que 20% répondent par non
comme l'illustre le graphe suivant:

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Avez-vous peur de la critique de vos professeurs ou de vos


camarades quand vous exprimez en français?

20%

Oui
Non

80%

Il nous parait que l'hypercorrection est une conséquence logique


de l'insécurité linguistique à cause de la peur, de la part des
étudiants, de commettre des fautes en français devant les
professeurs ou devant les camarades qui maitrisent le français.
Cette réponse nous indique également que quelques professeurs
ou camarades d'un niveau avancé en français n'encouragent pas
les étudiants à améliorer leur niveau linguistique, mais ils jugent
négativement leurs pratiques langagières. Cette hypercorrection
résulte d'un sentiment intérieur d'infériorité envers les
professeurs qui maitrisent cette langue. Aussi comprenons-nous
que les locuteurs qui n'ont pas peur du jugement des professeurs
étaient depuis l'enfance dans des écoles privées où l'on enseigne
le français comme une première langue étrangère, et d'ici on
remarque cette variation dans la pratique de la langue des
apprenants.

5.2. L'interférence linguistique


Selon María Ballarín Rosell, le locuteur peut commettre des
fautes linguistiques et produire des écarts par rapport à la norme
lorsqu'il commence à pratiquer une langue étrangère. Ces écarts
sont la conséquence de l’influence de sa langue maternelle et ils
se nomment des interférences, celles-ci continuent dans le
discours du locuteur bilingue même après la bonne maitrise de la

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

deuxième langue. Ces interférences peuvent toutefois être d'une


nature bidirectionnelle puisque non seulement la langue première
peut interférer dans la production de la langue deuxième, mais
aussi inversement comme le dit Mackey que l'interférence est un
"écart de la norme locale dû à l’insertion dans le message
d’éléments provenant d’un autre code23". De plus, Grosjean
affirme que les interférences sont imprégnées de l'aspect
bidirectionnel, mais il y ajoute la qualité involontaire, afin de
différencier l’interférence d’autres phénomènes conscients et
contrôlés, de la part du locuteur, comme l’emprunt ou
l'alternance codique24.
Rappelons que les interférences étaient depuis longtemps
décrites comme indices de manque d’intelligence et d’étroitesse
d’esprit, mais dans la deuxième moitié du XXe siècle ces idées
deviennent contestées par plusieurs auteurs, comme Weinreich
qui souligne que l’interférence est considérée comme une
particularité relative à l'acquisition et à la pratique d’une
langue25. Notons qu'il y a neuf types d’interférences
linguistiques: phonologiques, lexicales, syntaxiques,
sémantiques, orthographiques, morphologiques, discursives,
pragmatiques et sociolinguistiques. Nous pouvons dire que
l’arabe et le français appartiennent à deux familles langagières
différentes : l’arabe descend de la famille chamito-sémitique
alors que le français appartient à la famille Indo-européenne.
Cela produit des interférences sur le niveau phonétique,
morphologique, syntaxique, et sémantique. Dans la suite, nous
nous intéressons à analyser les interférences phonologiques,
morphosyntaxiques, et lexico-sémantiques, entre l’arabe et le
français dans le discours des apprenants qui souffrent de
l'insécurité linguistique.

5.2.1 L'interférence phonétique


D’après Weinreich, la différence entre deux systèmes
phonologiques peut produire sûrement une interférence et, pour
les arabophones, l’apprentissage de la langue française nécessite
la perfection d’un système phonétique et phonologique tout à fait
différent de celui de leur langue maternelle.

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

En effet, un bon nombre de phonèmes du français ne sont pas


présents dans le système phonologique de l'arabe, notamment en
ce qui concerne les voyelles. Dans le système phonétique de
l'arabe, les voyelles se distinguent par deux traits : leur durée
puisqu'elles peuvent être longues, mi- longues ou brèves) et leur
timbre ; il existe principalement trois timbres (/a/, /u/ et /i/). Le
locuteur arabophone doit donc passer d’un système relativement
simple au système vocalique français qui se compose de quinze
phonèmes dont la durée n'exige pas un trait distinctif. Cela peut
causer de nombreuses erreurs dont la plupart peuvent être
considérées comme des interférences, car le phonème produit
concerne le système arabe. Concernant les consonnes, de
nombreux phonèmes de l’arabe ne se trouvent pas dans la langue
française, notamment les points d’articulation vélaire, uvulaire,
pharyngale, ainsi que des variantes emphatiques de plusieurs
phonèmes partagés par les deux langues. Voici des exemples de
cette interférence linguistique que nous avons rencontrés dans le
parler des locuteurs francophones égyptiens qui subissent
l'insécurité linguistique:
- Sur le niveau vocalique
D'une manière générale, le francophone égyptien devient victime
de la variété des voyelles françaises qu'il ne maitrise pas, et il fait
tout le possible pour prononcer les sons introuvables dans sa
langue maternelle. Il tend à avoir recours à des sons similaires
qui existent en arabe, d’où les confusions et les erreurs suivantes:
- La voyelle u est souvent prononcé comme /i/. voici des
exemples:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
Utile /ytil/
Nul /nil
Musical /misikal/
Universel /iniversel/
Sur /sir/
- Le son /u/ se prononce comme /o/ dans toutes les
positions:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
pour /por/

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

lourd /lor/ et parfois /lord/


tout /to/
De plus, nous remarquons que quelques mots ayant un accent
grave sur la voyelle e en position finale se prononcent à la
manière des mots qui ont un accent aigu, c’est-à-dire la voyelle e
devient fermée au lieu d'être ouverte:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
problème /problem/
système /sistem/
phoneme /fonem/
- La voyelle e en position initiale se remplace par la voyelle
i
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
école /ikol/
étudiant /itidiã/
établir /itablir/
- Le e muet se prononce comme e fermé comme dans les
exemples:
Le mot français Transcription de l'apprenant égyptien
je /je/
me /me/
de /de/
- Les son [ø] et /œr/ se prononcent comme /o /, /u/ ou / [ɛ]
dans beaucoup de mots:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
veux /vo/, /vu/
heure [ɛr]
feu /fo/
soeur /sɛr/
- Sur le niveau des consonnes
Nous avons relevé une interférence consonantique entre l'emploi
de quelques consonnes en particulier le p, le v qui représentent
une difficulté pour le francophone égyptien en Haute Egypte
comme nous le remarquons dans les mots suivants:
Le mot français La prononciation de
l'apprenant égyptien
Visa /fiza/

533
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Télévision /telifezyon/
Ville /fil/
Verna (marque d'une /ferna/
voiture)
Paris /bari/, /baris/
Papa /baba/
Paix /be/
Pas /ba/
En ce qui concerne le h aspiré, les francophones en statut
d'insécurité linguistique appliquent les règles phonétiques de la
liaison et l'élision pour ce h aspiré à l'exemple du h muet:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
Les héros /lezero/
Les haricots /lezariko/
La hauteur /loter/
D'ailleurs, nous avons remarqué que les francophones de la
Haute Egypte dénasalisent les voyelles nasales du français
comme dans les mots suivants:
Le mot français Prononciation de l'apprenant égyptien
Enfant /enfan/ ou /anfan/
Salon /salon/
Main /man/
Entre /enter/
Content /kontan/
D'après les exemples montrés ci-dessus, nous pouvons constater
que l'interférence phonétique, consonantique et vocalique, peut
avoir des causes différentes:
- l'absence de certaines voyelles et de certaines consonnes
dans le système phonologique arabe
- l'hésitation et la timidité de l'apprenant, en statut
d'insécurité linguistique, le poussent parfois à prononcer
rapidement sans réfléchir au système phonologique
correspondant.
- la modeste pratique de la part de quelques professeurs qui
n'essayent pas de remédier aux fautes commises par les
étudiants et les encouragent à améliorer leurs
compétences phonétiques.

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

5.2.2. L'interférence lexicale


Dans cette interférence lexicale, nous rencontrons les faux amis,
les traductions littérales et les créations lexicales dans la langue
cible sur le modèle de la langue maternelle26. Quand les langues
ne partagent pas la même origine, il est fréquent d'utiliser des
termes existant dans la langue cible, mais avec un sens qui
indique l’influence sémantique de l’autre langue, comme nous le
constatons dans les calques sémantiques27. Le locuteur
francophone ne peut pas distinguer entre l'emploi lexical correct
de quelques adjectifs qualificatifs et celui de quelques verbes ou
des adverbes:
L'adjectif exprimé par le francophone le sens en français
égyptien
Long De grande taille
Petit Jeune
Grand Agé
Visiter une personne Rendre visite à une
personne
Où Puisque
Brave Fort
Sympathique Mince
Ces fautes lexicales traduisent la naïveté du locuteur
francophone qui ne déploie pas d'efforts pour améliorer ses
compétences linguistiques. La peur et l'hésitation du locuteur,
envers son professeur, le poussent à faire la mesure lexicale dans
le système linguistique de sa langue source tout en négligeant la
spécificité lexicale et sémantique de la langue cible qu'il espère
maitriser.

5.2.3. L'interférence sémantique


Vu la différence sémantique entre l'arabe et le français, le
locuteur francophone égyptien d'un niveau faible peut commettre
quelques fautes concernant l'emploi aléatoire de quelques
nuances sémantiques des mots qui ont à peu près le même sens.
Le locuteur reste influencé par le système sémantique arabe
puisque nous remarquons, dans les exemples suivants, deux mots
français qui ont un seul équivalent arabe, puisqu'il utilise le mot

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

français d'une manière aléatoire sans respecter la spécificité


sémantique de quelques verbes qui ont des nuances sémantiques
en français. Voici des exemples:
Deux verbes français Un seul équivalent arabe
Rendre visite- visiter yazour
Apporter- porter yahmel
Entendre- écouter Yasma'
Dormir- s'endormir yanaam
D'un autre côté, nous avons relevé que le locuteur francophone
égyptien ne peut pas donner l'équivalent français exact pour
quelques verbes français, et il les traduit littéralement sans aucun
respect de la particularité sémantique du français:
Les verbes Interférence de l'arabe Equivalent français
Couper Couper les tickets du Acheter les tickets du
match match
Demander Demander une question Poser une question
Donner Donner une bonne note Avoir une bonne note
Etre Etre peureux, être affamé, Avoir peur, avoir faim,
être assoiffe. avoir soif
Manger Manger le petit déjeuner Prendre le petit
déjeuner
Prendre Prendre un cadeau à son Apporter un cadeau à
ami son ami
Il nous parait que les fautes ci-dessus indiquent que le locuteur
francophone qui subit l'insécurité linguistique ne respecte pas le
système linguistique de la langue d'acquisition, et il espère tout
le temps trouver l'équivalent sémantique sans tenir compte des
nuances propres des verbes ou des mots français. Nous pouvons
dire également que le locuteur francophone débutant se trouve
pressé de donner l'équivalent français pour le mot ou pour le
verbe pour se débarrasser du sentiment de l'insécurité
linguistique qui le pénètre, et il répète rapidement, le verbe ou le
mot demandé, pour éviter tout jugement négatif de la part de
l'interlocuteur d'un niveau avancé en français.

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

5.2.4. L'interférence grammaticale


Nous pouvons dire que quelques francophones égyptiens
commettent des erreurs dues à l'interférence grammaticale entre
le français et l'arabe en particulier dans l'emploi du genre
grammatical des noms. Le genre des substantifs de la langue
maternelle des apprenants égyptiens peut influer sur le choix du
genre en français, ce qui crée une interférence grammaticale
comme dans les exemples suivants:

Le substantif Le genre Le genre


grammatical en grammatical en
arabe français
Lune masculin féminin
Soleil féminin masculin
Chaise masculin féminin
Groupe féminin masculin
Avion féminin masculin
Vocabulaire féminin masculin
Lien féminin masculin
Cette interférence grammaticale concernant le genre des mots
n'est pas fortuite mais elle revient au système morphologique et
syntaxique différent entre l'arabe et le français puisque le
système linguistique arabe rattache le phonème a à la fin des
mots pour indiquer le genre féminin, d’où l'apprenant applique la
même règle de la morphologie arabe pour des mots français
comme dans les mots: groupe, avion, nuage….
De plus, nous avons constaté que beaucoup de francophones
égyptiens en Haute Egypte choisissent les prépositions, dans la
structure des phrases, d'après le répertoire morphosyntaxique
arabe sans respecter les particularités linguistiques du français:
- le locuteur francophone égyptien donne la préposition à
pour des verbes qui ne nécessitent pas cette préposition
comme dans les verbes comme prier, applaudir, venir.
- Il recourt à utiliser la préposition dans au lieu de à
comme dans les verbes participer, inviter, réussir.
- Il utilise la préposition de au lieu de à dans des verbes
comme demander, emprunter, préférer...

535
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

- Beaucoup de francophones égyptiens utilisent la


préposition pour au lieu de la préposition à comme on dit
ces fleurs sont pour toi au lieu de dire ces fleurs sont à toi.
- Quelques francophones utilisent la préposition sur au
lieu de la préposition de comme quand on dit parler sur le
feuilleton au lieu de dire parler du feuilleton.
De plus, nous avons relevé que ces francophones qui subissent
l'insécurité linguistique ne font pas attention aux verbes transitifs
indirects en français et ils les utilisent comme des verbes
transitifs directs comme dans les verbes: appartenir, pardonner,
téléphoner, plaire, et ressembler. D'ici nous pouvons dire que les
apprenants s'appuient sur le système linguistique de la langue
maternelle (arabe) et ils l'utilisent inconsciemment dans leur
pratique du français.
Concernant l'emploi des adjectifs possessifs, le locuteur
francophone égyptien utilise des adjectifs possessifs en
redondance, c’est-à-dire il n'évite pas la spécificité de la langue
d'apprentissage comme dans les exemples suivants: "il relève sa
main" au lieu de dire "il relève la main", "il tombe sur sa tête" au
lieu de dire "il tombe sur la tête".
Sur le niveau des adjectifs indéfinis, les francophones égyptiens
ne mettent pas l'accord avec tout utilisé comme déterminant:
Ex: tout les filles sont sérieuses
Ex: tout les fils sont courageux.
Cette erreur vient d'une interférence avec l'arabe qui ne distingue
pas entre l'emploi de l'adjectif indéfini féminin ou masculin.
D'ailleurs, l'adjectif indéfini peut être élidé dans la production
écrite de quelques francophones égyptiens: le locuteur peut dire
sans doute au lieu de dire sans aucun doute, ce qui indique qu'il
applique les mêmes expressions arabes pour les expressions
françaises.

5.2.5. L' interférence morphologique


L'interférence morphologique, qui a été repérée chez les
francophones égyptiens, relève des difficultés qui touchent le
choix du temps verbal et la forme pronominale des verbes. En
arabe, le verbe se présente sous deux aspects : l’accompli et

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

l’inaccompli. Cette structuration bien différente de l’expression


verbale française peut causer une forte confusion de la part des
francophones égyptiens comme nous le trouvons dans les
exemples suivants:
- Je veux que les professeurs sont très gentils avec nous
- J'aime que notre pays est le plus beau
- Mon père va peut-être partir pour l'Arabie Saoudite en
été prochain
- Il a fait chaud hier.
Dans quatre exemples nous remarquons que les apprenants ont
des confusions et des problèmes concernant l'emploi du
subjonctif dans le premier et le deuxième exemple et pour le
conditionnel et l'imparfait dans le troisième et le quatrième
exemple. Le francophone enquêté se contente d'employer
l'aspect accompli du verbe pour indiquer le passé et l'aspect
inaccompli pour exprimer le futur ou le présent.
D'un autre côté, la forme pronominale n’existe pas dans le
système verbal arabe, qui utilise d'autres moyens pour exprimer
les actions réflexives et réciproques, c’est pourquoi cette forme
peut engendrer des difficultés pour les arabophones. Voici deux
exemples que nous avons trouvés dans la production écrite des
apprenants:
- La vie se change vite
- J'ai dit à moi-même
- Ils s'échangent des cartes
Enfin, nous avons remarqué des interférences dans l'emploi de la
forme infinitive du verbe. L’arabe possède une forme infinitive
(le masdar) qui ressemble à l’infinitif français, mais, même si
celle-ci procède d’une forme verbale, elle appartient au système
nominal qui a le statut d’un substantif:
- Je suis venu au test pour évaluation de mon niveau
- Je vous invite à la sortie ensemble.
Nous remarquons dans les deux exemples ci-dessus qu’il y a une
difficulté à employer l’infinitif de la langue cible puisque le
locuteur francophone égyptien remplace l’infinitif par la forme
nominale dérivée du verbe comme dans le mot évaluation et le
mot sortie au lieu d'employer l'infinitif: évaluer et sortir.

535
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Somme toute, cette interférence linguistique dans les pratiques


langagières des francophones égyptiens traduit le cas de
l'insécurité linguistique qui domine leur production écrite et
orale. La non maitrise de la langue est la cause principale de ce
sentiment de l'insécurité linguistique. Donc, nous pouvons
déduire qu'il y a une réciprocité entre l'insécurité linguistique et
les formes différentes de l'interférence.
En un mot, nous pouvons souligner que le recours du locuteur
francophone à des mots ou à des structures de la langue
maternelle pourrait constituer une stratégie inconsciente pour
surmonter le problème de l'insécurité linguistique de son
discours. Le francophone égyptien enquêté a introduit des
éléments linguistiques connus de sa langue maternelle pour
garantir la fluidité linguistique de sa production orale ou écrite.
Ce recours à des éléments de sa langue source représente un
terrain sûr et fiable dans le discours d'une langue qui lui est
étrange et un peu difficile à apprendre.

5.3. Le blocage linguistique


Le blocage linguistique se définit comme l'incapacité partielle ou
totale de la prise de parole dans une situation de communication.
Ce blocage peut être évident dans l'échange conversationnel ou
dans la production écrite des locuteurs francophones sur le
niveau du mot, de la phrase, ou de l'emploi des temps verbaux ou
déictiques temporels ou spatiaux. Le locuteur francophone
égyptien ne peut pas prendre facilement la parole et trouve des
difficultés pour exprimer tout ce qu'il veut dire par crainte des
rires de ses camardes, des jugements négatifs de ses professeurs,
des moqueries de ses collègues lors de la prise de la parole. Pour
cela, il évite de prendre la parole pour ne pas risquer d'être
critiqué des autres. Cette difficulté de la prise de parole influence
le niveau de l'apprenant et indique le faible niveau de la langue
de l'apprenant, puisque la parole de l'apprenant est considérée
comme un baromètre: plus les apprenants demandent de prendre
la parole, plus le cours devient utile et intéressant.

545
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Nous avons remarqué qu'il y a plusieurs raisons de ce blocage


linguistique chez quelques francophones égyptiens de la Haute
Egypte:
- Raisons didactiques
L'enseignant représente l'élément essentiel pour la prise de la
parole. Un bon enseignant essaye d'encourager les apprenants à
participer oralement au cours. Il peut adopter de nouvelles
stratégies pédagogiques pour motiver les apprenants à prendre la
parole sans hésitation. Aussi, les moyens et les outils de
l'apprentissage doivent être différents à l'intérieur du cours,
puisque les apprenants n'ont pas tous le même niveau
linguistique. Un bon enseignant doit créer de nouvelles méthodes
et les mettre en œuvre en classe avec l'esprit du travail en équipe
avec tous les apprenants pour mettre fin à la timidité et au silence
linguistique.
- Raisons psychologiques
Nous avons observé que le francophone égyptien a peur de
prendre la parole pendant le cours de français mais avec ses amis
hors du cours il se sent à l'aise et parle librement sans peur.
En effet, les craintes de la prise de parole, pour le francophone
sont nombreuses: par exemple, la peur du jugement négatif de la
part du professeur et des commentaires ironiques de ses
camarades les rendent timide et silencieux. Le locuteur
francophone a peur de perdre la confiance quand il commet des
fautes. Bref, ce sont la peur et la timidité qui poussent le
locuteur à choisir le silence et à éviter la participation au cours.
D'après la question posée aux étudiants de la faculté des Lettres
de Qena: avez-vous peur quand vous parlez à votre professeur en
français? nous avons trouvé que 80% des étudiants ont choisi la
réponse oui contre 15 % qui ont dit non, ce qui indique que la
difficulté de la pratique de la langue a des raisons
psychologiques qui augmenteront plus tard le sentiment de
l'insécurité linguistique comme le représente le schéma suivant:

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Avez-vous peur quand vous parlez à votre


professeur en français?

%15
Oui
Non
%85

- Raisons culturelles et scientifiques


L'apprenant en Haute Egypte ne peut pas pratiquer le français
hors l'université sauf pour quelques étudiants sérieux qui
achètent des journaux hebdomadaires francophones comme Al
Ahram hebdo et le Pogrès égyptien et d'autres qui suivent des
chaînes sur Youtube pour la bonne pratique et la bonne
prononciation du français. Très peu d'étudiants ont des proches
ou des parents qui travaillent à Louxor et à Assouan qui les
emmènent dans leurs voyages touristiques.
Bien plus, beaucoup de francophones en Haute Egypte souffrent
de la mauvaise prononciation, de la non-maitrise de la
grammaire et du manque du vocabulaire. Tout cela pousse le
locuteur à être convaincu de son incompétence linguistique, et
par conséquent il reste la plupart du temps passif et timide. Nous
avons trouvé que les programmes d'étude de la langue française
dans les facultés des Lettres à Qena et à Assouan n'encouragent
pas l'étudiant à participer ou à développer ses compétences
linguistiques puisque l'étudiant reçoit des cours en littérature et
en civilisation française dès la première année et la langue
utilisée dans ces matières est le français standard et parfois
l'ancien français qui ne conviennent pas aux qualités modestes
des étudiants comme l'illustre le schéma suivant d'une réponse à
une question sur les causes du blocage linguistique:

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Je ne pratique pas le francais parce


80
70
60
50
40
30
20
10
0
Toutes les les matières je n'ai pas un l'enseignant j'ai peur de la
réponses sont très bon niveau en ne critique de
précedentes difficiles français m'encourage mon
pas professeur

Nous avons déduit que 80% des étudiants ont choisi la dernière
réponse, ce qui dénote que le blocage linguistique n'a pas un seul
facteur mais des facteurs différents qui s'attachent à des causes
didactiques, psychologiques et linguistiques de la part du
professeur et de l'étudiant aussi.
Ce qui a attiré notre attention en examinant le problème de
l'insécurité linguistique, c'est la présence de l'esprit de la
motivation de la part de quelques professeurs dans les activités
relatives à la matière enseignée. Cette présence de la motivation
chez les professeurs peut encourager les étudiants à développer
leurs talents linguistiques comme le montre le graphique suivant:

Votre professeur vous motive par:


60
50
40
30
20
10
0
Les deux réponses Présentations des Attribution d'un
précedentes félicitations et point
applaudissements supplementaire

543
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

Il semble que 50% des professeurs adoptent la stratégie


consistant à présenter les félicitations et les applaudissements,
tandis que le pourcentage des professeurs qui préfèrent
l'attribution des points supplémentaires pour les étudiants ne
dépasse pas 30%, et celui des autres professeurs qui appliquent
les deux stratégies pour l'encouragement des étudiants est à peu
près de 20%. Nous remarquons que les deux stratégies adoptées
pour la motivation de l'étudiant sont un bon moyen didactique de
la part du professeur qui croit que la motivation peut augmenter
l'esprit de la concurrence au sein du cours, et par conséquent il
peut inciter les étudiants à développer leurs talents linguistiques
en oral et en écrit comme l'illustre le schéma suivant qui
concerne la réponse des étudiants sur la question: Aimez- vous la
motivation de votre professeur pendant le cours?

Aimez- vous la motivation de votre


professeur?

5%

Oui
Non
95%

Cette réponse des étudiants indique également que le blocage


linguistique est une responsabilité réciproque entre l'étudiant et
le professeur, et ce blocage peut revêtir des formes différentes
comme:
5.4. Le silence et la peur de prendre la parole
Nous pouvons dire que les étudiants enquêtés se sentent
inférieurs devant le niveau avancé de leurs professeurs, et cela
s'explique par le fait qu'ils ont peur de la réaction de leur
professeur en cas de l'erreur. Quand leurs professeurs corrigent

544
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

leurs réponses ou les critiquent négativement devant leurs


collègues, en particulier quand le professeur critique la langue
d'un jeune homme devant une jeune fille, beaucoup d'entre eux
ressentent une humiliation comme l'indique la réponse ci-dessus
à la question "avez-vous peur quand vous parlez à votre
professeur en français?" La réponse des étudiants confirme que
la peur de se tromper et d'enfreindre les règles phonologiques et
grammaticales va engendrer un sentiment de malaise linguistique
chez le locuteur francophone. Pour les autres étudiants qui ont
indiqué qu'ils n'ont pas peur de la critique des professeurs devant
leurs collègues, cela explique que ces étudiants comprennent
bien que les remarques ou la critique de leur professeur sont en
faveur de leur apprentissage du français et visent au
développement de leurs compétences langagières et culturelles.

5.5. L'hésitation et le bégaiement


Le blocage linguistique de quelques étudiants se manifeste aussi
dans les comportements et dans les phénomènes de l'hésitation et
du bégaiement linguistique. Ces phénomènes s'attachent à des
facteurs psychologiques qui varient d'un locuteur à un autre. Le
parler français de ces étudiants est marqué par l'incertitude, le
doute et la perplexité. Cette hésitation se remarque dans le
recours constant à des interjections, à des pauses plus ou moins
longues mais aussi à la répétition des mots ou des phrases. Aussi
remarquons-nous le bégaiement qui représente une perturbation
de la fluence verbale qui se distingue par des répétitions ou des
prolongations involontaires audibles ou inaudibles28. Le
bégaiement se pratique dans quelques éléments courts de
l'énoncé comme dans les sons, les syllabes ou les mots
monosyllabiques. Donc, le bégaiement et l'hésitation du locuteur
francophone en Egypte sont une conséquence de l'insécurité
linguistique, puisque le locuteur sait exactement ce qu'il veut
dire mais reste souvent bloqué en raison d'une répétition
involontaire ou d'une prolongation ou de l'arrêt d'un son29. Le
parler des francophones égyptiens est marqué par des pauses
plus ou moins longues qui précèdent la réponse, et le plus
souvent des interjections accompagnées de sourires timides, et le

545
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

bégaiement qui s'observe dans la prononciation de quelques


mots. Nous pouvons dire que la non- maitrise de la norme
linguistique et la peur du jugement du professeur sont les causes
principales de ces phénomènes de bégaiement et d'hésitation
linguistique. De plus, nous remarquons que le bégaiement se
pratique dans le discours oral des apprenants qui sont toujours
timides pendant le cours et qui n'essayent pas de participer aux
activités linguistiques proposées par le professeur. Plus les
apprenants participent aux activités, plus les phénomènes de
l'hésitation et du bégaiement disparaissent. D'ici nous pouvons
déduire un autre résultat: l'âge et le progrès linguistique jouent
un bon rôle dans la disparition des formes de la perturbation
linguistique comme l'indique le graphique suivant:

Voyez -vous que l'âge et le progres linguistique de


l'apprenant peuvent reduire le sentiment du
blocage linguistique?

30%

70% Non Oui

D'après le graphique ci-dessus, nous remarquons que le nombre


des étudiants qui ont affirmé que l'âge et le progrès linguistique
scientifique peuvent souvent faire disparaitre l'hésitation et le
bégaiement dépasse 70%, ce qui souligne que les apprenants ont
conscience de leurs fautes et la question de la perturbation
linguistique s'attache à d'autres facteurs comme l'âge et la non-
maitrise de la langue.
D'ailleurs, nous pouvons dire que la timidité linguistique de la
part de quelques apprenants les pousse à la métathèse
phonologique. Cette métathèse est considérée comme une

546
Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

modification phonétique qui implique un échange plus ou moins


entre deux phonèmes en contact30. La timidité linguistique de
quelques francophones égyptiens les oblige parfois à prononcer
le mots spectacle par pestacle et l'adjectif spécial par sepecial.
Nous trouvons l'emploi de cette métathèse dans les pratiques de
quelques francophones égyptiens, dans les mots longs et qui ont
plus d'une syllabe comme dans les mots particularités qui
devient parkitualirité et le mot carburant qui devient kaburant,
le mot prolétaire qui se prononce ploretaire. Cette inversion de
deux phonèmes ou deux syllabes à l'intérieur d'un mot ou d'un
groupe de mots exprime la peur qui domine le locuteur
francophone lorsqu'il prend la parole en général et lorsqu'il
prononce les mots de longues syllabes en particulier. Cette
permutation phonétique indique également la non-maitrise de la
langue parlée puisque si l'apprenant perfectionne la langue, il fait
attention à ses fautes grammaticales et phonétiques. En un mot la
métathèse s'ajoute aux conséquences de l'insécurité linguistique
ressentie par le locuteur francophone égyptien qui l'empêche
d'un échange conversationnel parfait et sécure.

5.6. L'emprunt linguistique et l'alternance codique


Selon Dubois, l'emprunt représente le phénomène
sociolinguistique le plus important dans tous les contacts des
langues31. Nous pouvons dire qu'il y a emprunt linguistique
quand un parler A emploie et finit par intégrer une unité ou un
trait linguistique qui existait précédemment dans un parler B et
que A ne possédait pas. L'unité ou le trait emprunté sont eux-
mêmes qualifiés d'emprunts. La question de l'emprunt
linguistique s'attache au prestige dont jouit une langue ou le
peuple qui la parle32 mais aussi le locuteur peut avoir recours à
l'emprunt lexical pour remplir les cases vides de son répertoire
linguistique. Nous avons remarqué que quelques francophones
de la Haute Egypte empruntent beaucoup de mots à la langue
arabe dans leurs productions orales ou écrites comme
l'expression inchaallah (Si Allah le veut) et Salam Alykoum (Que
la paix soit sur vous). Aussi, nous observons un bon nombre de

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mots empruntés à la langue anglaise dans le discours des


francophones égyptiens. En voici des exemples:
Le mot emprunté L'équivalent français
Off-Side Hors-jeu
Star vedette
Computer Ordinateur
Share partager
Describe décrire
Mountain montagne
Common commun
Against contre
Workshop atelier
Shopping Faire la course
Challenge défi
Ok D'accord
E-mail Courrier électronique
Nous pouvons dire que l'intégration de ces mots anglais ou des
expressions arabes au sein de l'expression écrite ou orale des
apprenants francophones est une marque de leur déficit
linguistique et leur faiblesse en français. Les locuteurs peuvent
recourir à de tels mots pour éviter le blocage linguistique et pour
que leur parole reste décrite comme fluide et efficace. Ces
apprenants savent bien que leur français n'est pas parfait mais
pour éviter tout jugement négatif de la part du professeur ils
remplissent les cases vides du lexique par des mots étrangers
pour se sauver de la critique ou de l'humiliation devant les
collègues. Bref, ces emprunts ne sont pas employés pour des
raisons liées au prestige ou au snobisme, mais pour des raisons
langagières qui s'attachent à la pauvreté lexicale et sémantique
de ces locuteurs.
D'autre part, Les francophones en Haute Egypte recourent à
l'alternance codique dans leurs échanges conversationnels
comme le remarque Madiha Doss:
" Un premier aspect commun aux usagers du français d'Egypte,
et particulièrement dans les situations scolaires, est celui de
l'alternance codique33".

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Cette alternance codique se manifeste dans la juxtaposition à


l'intérieur de la même communication verbale des énoncés à
deux systèmes linguistiques différents. Il y a deux types
d'alternance codique: alternance de compétence et alternance
d'incompétence comme le souligne J. Dubois:
"Par l'alternance de compétence, le bilingue se met en
représentation comme apte à utiliser les deux codes.
L'alternance d'incompétence au contraire est un expédient
destiné à compenser une carence".
Nous pouvons dire que quelques francophones égyptiens
adoptent le deuxième type d'alternance codique selon la
classification de J. Dubois, puisqu' ils utilisent des expressions
qui peuvent remplir le manque lexical en langue française et ils
utilisent cette alternance comme une stratégie pour éviter le
blocage linguistique dû à leur faiblesse linguistique en français,
d’où nous trouvons la présence abondante des pauses et des
hésitations qui traduisent la difficulté de trouver le mot
nécessaire pour la production orale comme le note Madiha Doss:
"L'énonciateur ne ressent pas la nécessité de situer ce terme
dans le contexte d'une construction syntaxique adéquate, mais
seulement de procurer l'élément clé de la réponse dans l'idiome
ressenti comme la langue-cible. Cette façon de procéder est très
commune ; on la rencontre de manière très fréquente dans les
interactions des apprenants des départements de français comme
une présence de l'écrit scolaire dans l'interaction orale34."
Nous avons relevé l'intégration inconsciente de l'alternance
codique dans les échanges conversationnels des apprenants du
français en Haute Egypte comme l'indique cet exemple où les
étudiants jouent le rôle d'un étudiant et un bibliothécaire:
-Bonjour Monsieur, je voudrais emprunter le roman de
Mme Bovary de Flaubert law Samaht!
- At your service monsieur mais voulez-vous d'autres
romans?
- Thanks mais je peux l'emprunter pour combien de jour?
- Trois jours mesh aktar min kedah.
- Merci monsieur, au revoir.
-Merci, ma'alsalama.

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Dans cette conversation, nous remarquons que les étudiants font


recours à l'alternance codique pour combler les lacunes lexicales
en langue française. Ils font appel à l'anglais ou à l'arabe quand
ils oublient ou ignorent les mots en français. Donc cette
alternance codique "peut aussi constituer une habitude ou un
choix de parole de locuteurs qui ont une assez bonne maîtrise du
français35." De plus, dans cet échange conversationnel, nous
constatons que les interlocuteurs utilisent l'arabe ou l'anglais
pour des mots dont l'équivalent en français est simple et
disponible comme law Samaht(s'il vous plait), thanks a lot
(merci beaucoup)…, ce qui indique que le locuteur peut utiliser
parfois les codes alternés pour "établir d'une proximité, une
complicité au désir contraire de se distancier ou d'affirmer une
distinction36."

6- Comment remédier à l'insécurité linguistique en


Egypte
Selon Sue Duguay, la question de l'insécurité linguistique
domine les échanges conversationnels des francophones en
contexte minoritaire, et peut créer une hiérarchie linguistique.
Elle propose une stratégie qui consiste à cibler quatre domaines
pour surmonter les conséquences de l'insécurité linguistique:
l'éducation, le marché du travail, la culture, les médias et les
politiques publiques37. Dans l'échantillon étudié, nous avons
remarqué que les symptômes et les lacunes dont souffrent les
francophones égyptiens sont issus de la non maitrise de la norme
linguistique. Cette maitrise de la norme linguistique est une
responsabilité partagée entre le professeur et l'étudiant, puisque
l'acquisition des compétences orales ou écrites en français peut
apporter aux étudiants une sécurité linguistique indispensable
pour la production orale et écrite. Le professeur peut faire
acquérir de la confiance aux apprenants à travers quelques points
sensibles:
- Aider les apprenants à prononcer plusieurs fois les mots
difficiles de façon à les encourager à les répéter sans
pression psychologique.

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- Encourager les apprenants à rédiger en français des sujets


qui s'attachent à la vie quotidienne pour enrichir leur
lexique et les stimuler également à présenter ces sujets
devant leurs collègues en vue de développer les
compétences de la prononciation et de la communication
avec les autres.
- Rassurer les étudiants et les mettre en confiance à travers
le fait d'éviter la critique sévère en cas des fautes et
essayer de les encourager à prendre la parole et à
participer positivement aux activités du cours.

Concernant les responsabilités de l'étudiant:


- Développer son niveau linguistique à travers la lecture ou
l'écoute de la musique française ou les vidéos éducatives
accompagnées des paroles.
- Respecter la critique du professeur au sein du cours et
comprendre que les remarques du professeur sont pour le
profit général.
- Pratiquer la langue avec ses collègues à l' université ou à
la cité universitaire pour éviter la timidité et le blocage
linguistique dans les activités du français pendant le
cours.
- Acheter régulièrement les journaux d'expression française
comme Al Ahram Hébdo et le Progrès égyptien pour
développer le champ lexical.
- S'inscrire à des stages pour l'apprentissage du français et
suivre régulièrement des sites authentiques sur les réseaux
sociaux pour le développement des compétences orales du
français.
- Consulter les membres du corps enseignant en cas de
difficultés phonétiques et grammaticales pour éviter
toutes les formes de l'insécurité linguistique.

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Conclusion
De tout ce qui précède, nous pouvons conclure que l'insécurité
linguistique est présente dans les pratiques langagières des
francophones Egyptiens et elle se traduit dans le fait du manque
de la confiance, de la peur de la prise de la parole, de
l'interférence linguistique et du bégaiement devant les
professeurs ou devant les collègues d'un niveau avancé en
français. La plupart des francophones égyptiens en Haute Egypte
ont une image négative de leurs compétences linguistique et ils
estiment leur incapacité à bien parler français. Les locuteurs du
français à la faculté des Lettres de Qéna et à Assouan en Egypte
sont très insatisfaits de leur façon de parler le français et par
conséquent ils essayent, la plupart du temps, de faire semblant de
la maitrise formelle du français à travers le recours à
l'hypercorrection, à l'interférence linguistique, à l'emprunt et à
l'alternance codique. Le français avait une belle image dans la
mentalité des locuteurs Egyptiens, et cela est contradictoire avec
leur niveau modeste et dont les souhaits ne leur permettent pas
de développer les compétences de l'expression orale et écrite.
Nous avons découvert que le sentiment de l'insécurité
linguistique est tout à fait lié à la non maitrise de la norme
linguistique puisque plus le locuteur est loin de la norme
linguistique, plus il a le sentiment de l'insécurité, et plus il la
perfectionne, plus il est à l'abri de ce danger linguistique de
l'insécurité. Cette étude nous confirme que le courage de la prise
de la parole de la part du locuteur francophone dépend de son
degré de la maitrise de la norme, et de la nécessité de la pratique
des efforts psychologiques de la part du professeur, pour
développer les compétences communicatives chez le
francophone en Haute Egypte.

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Notes

1
PRUVOST, Jean, Avant- Propos: Insécurité linguistique, l'oubliée de nos
dictionnaires, Etudes de linguistique appliquée, 2014/3, no 175, p.261:262.
2
BOISSONNEAULT, Julie, La sécurité et l'insécurité linguistique: miroir des
langues en dynamique sociale, Revue Liaison, N0 162, Acadie, Ontario, p.360.
3
Ibid., p.361
4
Ibid.
5
CALVET, J.L, La Sociolinguistique, P.U.F, Paris, 1993, p.50.
6
Cf., MESSAOUDI, Leila, Insécurité linguistique. Publictionnaire. Dictionnaire
encyclopédique et critique des publics:
http://publictionnaire.humanum.fr/notice/insecurite-linguistique/,
cf., BEGWAY, Nabila, l'insécurité linguistique et son influence sur
l'apprentissage et l'acquisition du Français en Algérie, Revue de la faculté des
lettres et les sciences humaines et sociales, janvier 2010..
7
MOREAU, J.Louis, Les types de Normes, in sociolinguistique, concepts de base,
Liège, Mardaga, 1997, p. 170
8
CALVET, J. L, Pour une écologie des langues du monde, Plon, Paris, 1999,
PP:168, 169..
9
Cf., MOREAU, M-L, Nous avons la langue trop épaisse ou comment être un
Francophone sénégalais, Revue linguistique de Louvain, in BEACCO, Claude,
L'insécurité linguistique des professeurs des langues étrangères non natifs: Le
cas des professeurs grecs de la langue française, thèse de doctorat, Université
Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2009, p. 22, 23
10
DOSS, Madiha, Le français en Egypte. Histoire et présence actuelle.
In: Cahiers de l'Association internationale des études françaises, 2004, n°56. P. p.87
11
Ibid.
12
ABECASSIS, Fréderic, et al, Histoires de famille: Processus d'appropriation
des langues étrangères en Egypte au XXe siècle, Histoires de familles,
Egypte/monde arabe, première série, 29,1997, en ligne http://
journals.openeditions.org/ema/236
13
Ibid
14
FENOGLIO, Irene, Entre Nil et sable : écrivains d’Egypte d’expression
française (1920-1960), Centre national de Documentation pédagogique, Paris,
1999, , P.8
15
GÉRARD, Delphine, Le choix culturel de la langue en Égypte , Égypte/Monde
arabe , Première série n° 27-28, Les langues en Égypte , URL :
http://ema.revues.org/index1942.htmlp.236.
16
FARID, Hana, Réflexions sur l’enseignement de la langue française en Egypte
Français langue étrangère. Français sur objectifs spécifiques : https
//gerflint.fr/Base/Mondearabe2/Hanaf.pdf
17
LUTHI, J.J, L'Egypte Qu'as-tu fait de ton français?, Sociétés Ouvertures et
Recherches, Paris, 1987, P. 153.
18
Cf., DOSS, Madiha, Op, Cit., pp. 75-98
19
DUBOIS, Jean et al, Dictionnaire de linguistique, Larousse, Paris, 2002, p.236

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20
W. Labov cite l'exemple des locuteurs migrants de la première génération qui ne
prononcent pas les voyelles de certains mots anglais mais leurs enfants vont faire
tout le possible pour ne pas paraitre d'un niveau langagier modeste, ils recourent par
l'hypercorrection en adoptant des formes exagérées dans la prononciation dans le but
d'imiter les formes prestigieuses et décrites comme hautes. Cf., LABOV,
Sociolinguistique, Minuits, Paris, 1976.
21
Il ne faut pas confondre entre l'hypercorrection et l'hypocorrection. Ce dernier
concept s'observe dans l'emploi conscient des formules incorrectes , des hésitations,
du vocabulaire qui appartient au registre familier, dans le but de l'interaction avec les
interlocuteurs. Cf., ROUAN, Claire Maury, Le flou des marques discursives est-il
un inconvénient ?, Marges Linguistiques, M.L.M.S, 2005.
22
BEGWAY, Nabila, Op. Cit., P.11
23
MACKEY, William Francis, Bilinguisme et contact des langues, Éditions
Klincksieck, Paris, 1976, p. 414
24
Cf. GROSJEAN, François, Life with two languages. An introduction to
bilingualism, Harvard University Press, Harvard 1982.
25
Cf. JARVIS, Scott et PAVELENKO, Aneta, Crosslinguistic Influence in
Language and Cognition, Routledge, New York 2007,
26
Cf., CALVET, J.L, La Sociolinguistique, Op.Cit., P. 25.
27
Cf. JARVIS, Scott et PAVELENKO, Aneta, Op. Cit., 75-77
28
Cf., DIDIRKOVA, Ivana, Parole, langues et dis fluences: une étude
linguistique et phonétique du bégaiement, thèse de doctorat, Université Paul-
Valery Montpellier3, 2018, pp:38:39.
29
Ibid., P.40.
30
DUBOIS, Jean et al, Op. Cit., p. 302
31
Ibid., p. 177
32
Cf., Ibid.
33
DOSS, Madiha, Op. Cit.,P.87.
34
Cf., Ibid., p.89.
35
Ibid., p.91
36
Ibid, p.91
37
Cf., un remède contre l'insécurité linguistique: https://onfr.tfo.org/un-remede-
contre-linsecurite-linguistique/

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Bibliographie consultée

- ABECASSIS, Fréderic, et al, Histoires de famille: Processus


d'appropriation des langues étrangères en Egypte au XXe siècle,
Histoires de familles, Egypte/monde arabe, première série, 29,1997, en
ligne http:// journals.openeditions.org/ema/236
- BEACCO, Claude, L'insécurité linguistique des professeurs des langues
étrangères non natifs: Le cas des professeurs grecs de la langue
française, thèse de doctorat, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2009.
- BEGWAY, Nabila, l'insécurité linguistique et son influence sur
l'apprentissage et l'acquisition du Français en Algérie, Revue de la
faculté des lettres et les sciences humaines et sociales, janvier 2010.
- BOISSONNEAULT, Julie, La sécurité et l'insécurité linguistique:
miroir des langues en dynamique sociale, Revue Liaison, N0 162,
Acadie, Ontario
- CALVET, J.L, La Sociolinguistique, P.U.F, Paris, 1993.
- CALVET, J. L, Pour une écologie des langues du monde, Plon, Paris,
1999.
- DIDIRKOVA, Ivana, Parole, langues et disfluences: une étude
linguistique et phonétique du bégaiement, thèse de doctorat, Université
Paul-Valery Montpellier3, 2018
- DOSS, Madiha, Le français en Egypte. Histoire et présence actuelle.
In: Cahiers de l'Association internationale des études françaises, 2004,
n°56.
- DUBOIS, Jean et al, Dictionnaire de linguistique, Larousse, Paris, 2002.
- FARID, Hana, Réflexions sur l’enseignement de la langue française en
Egypte Français langue étrangère. Français sur objectifs spécifiques :
https //gerflint.fr/Base/Mondearabe2/Hanaf.pdf
- FENOGLIO, Irène, Entre Nil et sable : écrivains d’Egypte d’expression
française (1920-1960), Centre national de Documentation pédagogique,
Paris, 1999

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Mohamed Abdelbaki Ahmed ‫م‬8282 ‫) يناير‬82( ‫العدد‬

- GÉRARD, Delphine, Le choix culturel de la langue en Égypte ,


Égypte/Monde arabe , Première série n° 27-28, Les langues en Égypte,
URL : http://ema.revues.org/index1942.htmlp.236
- GROSJEAN, François, Life with two languages. An introduction to
bilingualism, Harvard University Press, Harvard 1982.
- JARVIS, Scott et PAVELENKO, Aneta, Crosslinguistic Influence in
Language and Cognition, Routledge, New York 2007.
- LABOV, Sociolinguistique, Minuits, Paris, 1976.
- LUTHI, J.J, L'Egypte Qu'as-tu fait de ton français?, Sociétés Ouvertures
et Recherches, Paris, 1987.
- MACKEY, William Francis, Bilinguisme et contact des langues, Éditions
Klincksieck, Paris, 1976.
- MESSAOUDI, Leila, Insécurité linguistique. Publictionnaire.
Dictionnaire encyclopédique et critique des publics:
http://publictionnaire.humanum.fr/notice/insecurite-linguistique/,
- MOREAU, Marie-Louise, Les types de Normes, in sociolinguistique,
concepts de base, Liège, Mardaga, 1997.
- MOREAU Marie-Louise, «Nous avons la langue trop épaisse» ou
Comment être un francophone sénégalais, In FRANCARD Michel
(éd.), L'insécurité linguistique dans les communautés francophones
périphériques. Cahiers de l'Institut de linguistique de Louvain, 1994.
- PRUVOST, Jean, Avant- Propos: Insécurité linguistique, l'oubliée de
nos dictionnaires, Etudes de linguistique appliquée, 2014/3, no 175
- ROUAN, Claire Maury, Le flou des marques discursives est-il un
inconvénient ?, Marges Linguistiques, M.L.M.S, 2005.
- SEGUIN, Boris, Les Céfrans parlent aux Français, Carlmann-Levy,
Paris, 1996.
- un remède contre l'insécurité linguistique: https://onfr.tfo.org/un-
remede-contre-linsecurite-linguistique/

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‫‪Mohamed Abdelbaki Ahmed‬‬ ‫العدد (‪ )82‬يناير ‪8282‬م‬

‫انعدام األمن اللغوي في الممارساث اللغويت لبعض ناطقي الفرنسيت في صعيد مصر‬

‫د‪ .‬يحًذ عبذ انباق‪ ٙ‬أحًذ‬


‫أستار يساعذ بقسى انهغت انفشَس‪ٛ‬ت‬
‫كه‪ٛ‬ت ا‪ٜ‬داب بقُا‪ -‬جايعت جُٕب انٕاد٘‬
‫ملخص البحث‬

‫تشجع أصٕل يفٕٓو اَعذاو األيٍ انهغٕ٘ إنٗ دساساث عهًاء انهغت االجتًاع‪ٙ‬‬
‫انًٓتً‪ ٍٛ‬بقع‪ٛ‬ت انتبا‪ ٍٚ‬انهغٕ٘ داخم انًجتًع‪ٔ .‬تشٓذ انًًاسساث انهغٕ‪ٚ‬ت نهُاغق‪ٍٛ‬‬
‫بانفشَس‪ٛ‬ت ف‪ ٙ‬صع‪ٛ‬ذ يصش بعط انصعٕباث انصٕت‪ٛ‬ت ٔانصشف‪ٛ‬ت ٔانذالن‪ٛ‬ت ف‪ ٙ‬انتعب‪ٛ‬ش‬
‫انشفٓ‪ٔ ٙ‬انكتاب‪.ٙ‬‬

‫ٔنٕحظ يٍ خالل يشاقبت انًتحذث‪ ٍٛ‬بانفشَس‪ٛ‬ت –ع‪ُٛ‬ت انذساست‪ -‬سغبتٓى ف‪ ٙ‬انتحذث‬


‫بهغت فشَس‪ٛ‬ت سه‪ًٛ‬ت ال تشٕبٓا أخطاء‪ٔ ،‬نكٍ عُذ انتحذث أٔ انكتابت ُٔجذ تبا‪ ٍٚ‬ب‪ ٍٛ‬يا‬
‫‪ٚ‬ش‪ٚ‬ذٌٔ قٕنّ‪ٔ ،‬يا ‪ًٚ‬اسسَّٕ عهٗ أسض انٕاقع‪ٔ .‬عهٗ ْزا فإٌ يًاسساتٓى انهغٕ‪ٚ‬ت‬
‫بانفشَس‪ٛ‬ت ‪ٚ‬شٕبٓا انتشابك انهغٕ٘ ب‪ ٍٛ‬انهغت األو (انعشب‪ٛ‬ت) ٔنغت انذساست (انفشَس‪ٛ‬ت)‪،‬‬
‫يع انتشدد‪ٔ ،‬انخٕف انًفشغ يٍ انتعب‪ٛ‬ش بطالقت‪... ،‬‬

‫تقٕو ْزِ انذساست عهٗ انتحه‪ٛ‬م انهغٕ٘ االجتًاع‪ ٙ‬نظاْشة اَعذاو األيٍ انهغٕ٘ ف‪ٙ‬‬
‫انًًاسساث انهغٕ‪ٚ‬ت نبعط َاغق‪ ٙ‬انفشَس‪ٛ‬ت ف‪ ٙ‬صع‪ٛ‬ذ يصش‪ٔ ،‬اعتًذث انذساست عهٗ‬
‫انًالحظت ٔتٕص‪ٚ‬ع استًاسة استباَت يطبقت عهٗ ع‪ُٛ‬ت يٍ انطالب‪ ،‬كًحأنت نجًع‬
‫انب‪ٛ‬اَاث ٔانٕقٕف عهٗ يظاْش ٔأسباب اَعذاو األيٍ انهغٕ٘‪َٔ ،‬تائجّ عهٗ يستٕٖ‬
‫انتعب‪ٛ‬ش انشفٓ‪ٔ ٙ‬انكتاب‪ ٙ‬بانهغت انفشَس‪ٛ‬ت‪ ،‬يٍ يُظٕس عهى انهغت االجتًاع‪ٔ .ٙ‬أخ‪ٛ‬شً ا‬
‫تصم ْزِ انذساست إنٗ ٔظع انحهٕل انًقتشحت انت‪ ٙ‬تساعذ ف‪ ٙ‬حم يشكهت انشعٕس‬
‫باَعذاو االيٍ انهغٕ٘ عُذ يًاسس‪ ٙ‬انفشَس‪ٛ‬ت ف‪ ٙ‬صع‪ٛ‬ذ يصش بٕجّ عاو‪.‬‬

‫كلمات مفتاحية‬
‫انعدام األمن اللغوي – ممارساث ناطقي الفرنسيت ‪ -‬تداخل لغوي – مغاالة في‬
‫التصحيح لغوى‬

‫‪555‬‬

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