Ali Shariati - Les Qualités de Muhammad

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 24

Ali Shariati

Les qualités de Muhammad


1
Les propos de l’imam Khamenei au sujet de Shariati

Traduit de l’arabe par Smail Bennadja


en collaboration avec Geneviève Rossignol

Je voudrais vous parler ici de quelque chose qui s’est passé en 1347/1969, c’est-à-
dire au cours de la dernière année de la vie de Jalal Al Ahmad 2, quand ce dernier
est venu à Machhad3. Nous nous sommes alors réunis en présence d'Ali Shariati et
d’un certain nombre d’amis. Lorsque la conversation en est venue aux oulémas4, le
regretté Al Ahmad s’est tourné vers Ali Shariati et lui a demandé pourquoi il
critiquait les Hawza5 avec force plutôt que de s’attaquer aux intellectuels. La
réponse de Shariati nous donne une indication sur la manière dont il distinguait les
« gens de spiritualité » en tant qu’ils incarnent une certaine position et une certaine
situation, et les « gens de spiritualité » en tant qu’oulémas. Il dit : « La raison pour
laquelle je critique les hawza avec insistance est que nous attendons beaucoup
d’elles, alors que nous n’attendons pas grand-chose de notre élite intellectuelle qui
a grandi dans le giron de la culture occidentale. La hawza est le roc solide dont
nous espérons voir sortir beaucoup de choses. Ce n’est que lorsqu’elle ne remplit
pas sa fonction que nous la critiquons ».
Je peux dire sans hésiter que Shariati incarne une certaine étape, mais dans un sens
bien précis : il a réussi à diffuser de nouvelles idées au sein de la société par
l’intermédiaire d’un langage clair et de l’autorité qu’il avait sur la culture et la
jeunesse de son époque. Cela veut dire que Shariati n’avait pas un don en
particulier mais qu’il en avait beaucoup quand il s’agissait d’aborder des questions
contemporaines, et c’est cela que je veux signifier quand je dis que Shariati
représente une étape importante. Le second aspect qu’il faut aborder, quand on
parle de Shariati, concerne les questions qu’il a posées à partir de sa conception de
la culture islamique et qu’il faut replacer dans le cadre des fondements
philosophiques et cos-mologiques de l’Islam. L’oeuvre de reconstruction en
question doit donner naissance à une nouvelle étape, qui sera bénéfique pour notre
génération. En d’autres termes, ce dont nous avons besoin aujourd’hui c’est de lire
Shariati en même temps que Motahari 6. Ce qui émerge de ce recoupement entre la
beauté des idées de Shariati et la maîtrise de la pensée islamique par Motahari,
c’est précisément ce dont notre génération actuelle a besoin.

Ce qui fait de Shariati un précurseur, c’est sa capacité extraordinaire à reformuler


l’Islam dans un langage moderne qui s’accorde avec la génération de son temps. Si
plusieurs l’ont précédé dans cette voie, aucun n’a connu le succès qui a été le
sien7.

2
LES QUALITÉS DE MUHAMMAD

Figures de l’Histoire :

César
César, tel que nous le relate l'Histoire, est un personnage redoutable, au regard dur,
au physique imposant et à l’allure effrayante. L’image que l’on retient de lui est
celle d’un homme tenant une épée ensanglantée.
En marge, d’autres aspects du personnage sont connus de tous comme celui du
bourreau, du géomancien, du poète, du compagnon de plaisir, du majordome, du
serviteur…Vie de guerre et de plaisirs, tel était son capital… et rien d’autre. Le
Sage La figure du sage est la représentation intemporelle de la clairvoyance au
sein de la société. Présent à la cour de César, il s'agenouille parfois aux côtés du
bourreau, du compagnon de table et du serviteur. D’autres fois, il s’isole et laisse
ses pensées s’échapper au-delà des cieux, du temps et de l’espace." Le cheval a
succombé à l’épuisement de la veille Et la magie demeure inefficace, impuissante.
"8 Les vérités existentielles l’ont totalement plongé dans des idées profondes et
d'étranges états d’esprit. Reclus parmi les illuminés et les savants des élites
sociales, il se détache progressivement des bassesses de ce monde, des sujets
dérisoires et des piètres espoirs qui hantent le peuple et le poussent à se comporter
comme du bétail. Socrate est sans doute le philosophe le plus brillant de l’histoire
de l’humanité. Sa philosophie, accessible au plus grand nombre, a alimenté la
pensée pendant 25 siècles. Incarnant la méditation, Socrate est le seul philosophe à
avoir reconnu son ignorance en déclarant : « je ne sais rien ». Sa philosophie s’est
d'abord transmise par les écrits de Platon, d'Aristote, de Saint Antoine 9 d'Eugène
Sue10, d'Al Kindi11, d'Ibn Sina12 et d'Ibn Rochd13. Quel en était le message ? Seuls
les sages et les esprits épris de logique peuvent y répondre et en mesurer
l’importance. En revanche, le peuple d'Athènes, comme tous les peuples et à
toutes les époques, en ignore l'importance. Quelle incidence aurait eu l’absence de
Socrate et de ses disciples dans l’histoire de l’humanité 14. L’enseignement et le
savoir auraient certainement subi une perte inestimable. Cependant cette perte
serait passée inaperçue aux yeux du plus grand nombre. Sous le joug des élites
aristocratique d’Athènes, le peuple n’avait de droit que celui de se taire, d’être
exploité et affamé. Ainsi, la démocratie athénienne fut condamnée, le pouvoir du
peuple fut considéré comme une calamité et le règne des nobles fut instauré. De
nos jours, le peuple est parvenu à maîtriser la crise du pouvoir et s’est débarrassé,
pour la première fois de son existence, de la légende du règne naturel et éternel des
nobles. Ont-ils réellement conscience de la profondeur et de la beauté des propos

3
de Socrate ? Si le peuple d'Athènes n'était pas convaincu de la perfection du savoir
de Socrate, j’aurais déclaré « je ne sais rien». Un ignorant comme Spartacus 15 est
plus utile à l'Occident qu'un comité de savants académiques tels que Socrate,
Platon ou Aristote. De même qu'un arabe bédouin comme Abou Dhar al-Ghifari 16
est plus utile à l'Orient que des savants tels que Ibn Sina (Avicennes), Ibn Rochd
(Averroes), ou Molla Sadra17 .

Le Prophète :
L’autre figure historique est le Prophète Muhammad . Il est la représentation des
philosophes quiont éclairé l’obscurité de l’Histoire. Leurs avis divergent en théorie
et en pratique cependant ils partagent beaucoup de points communs. Leurs faits et
gestes débordent majestueusement de sin-cérité, d’honnêteté et d’amour. Leurs
visages rayonnants tel l’éclat de l’aurore, attirent la sympathie, fascinent les âmes,
captivent les regards et brisent le mystère de l’Inconnu. Le commun des mortels
peut facilement les percevoir contrairement aux esprits complexes des génies qui
n’y accèdent que par l’effort. Les esprits, conscients de cette beauté délicate,
perçoivent l’intensité de son rayonnement et lasplendeur de son mystère comme de
l’amour, de l’espoir et de la beauté. Ils ont conscience de leurs qualités
envoûtantes, de leurs regards mystérieux, du timbre de leurs voix, de la valeur de
leurs idées, de leurs faits et gestes et de leurs modes de vie. Ce courant spirituel,
plein d’illumination remplit l’existence, telle une source abondante, et suscite
l’émerveillement. A travers l’Histoire, l’homme a toujours recherché ces visages
simples et complexes à la fois. Cette contemplation pourrait atteindre
l’émerveillement. Ces visages proviennent d’un feu invisible et ne demandent que
la béatitude. les prophètes sont les guides des coeurs purs. Ils se sont emparés du
fantôme de l'Histoire collective, en ont pris les rênes et ont mené l'humanité
entière vers l'avant. L’Histoire relate que quelque soit le chemin emprunté il mène
à la complexité de l’invisible. Tels des chevaliers redoutables, ils incitent leurs
peuples à explorer des chemins inconnus 18. La connaissance de l'histoire implique
la reconnaissance de son caractère religieux et de ses liens étroits avec les
religions. Il y a deux grandes familles de prophètes :
Les prophètes non sémites (l'Iran, la Chine, l'Inde ou les Aryens et les Asiatiques)
et les Prophètessémites dont le prophète de l’Islam .19 La recherche dans ce
domaine très vaste exige davantage de temps. Cependant, nous ne pouvons éviter
de mentionner les origines sociales de ces deux familles. Du point de vue
sociologique, l'analyse d’une école idéologique, ou d’un penseur, s’établit selon
un archétype scientifique exemplaire que tout chercheur se doit d’appliquer afin de
déboucher à la conclusion voulue. Tel est l’unique moyen logique de toute étude
scientifique, plus particulièrement en sociologie. Ceci ne peut se faire que lorsque
le chercheur se dégage de tout sectarisme et de tous les préjugés qui pourraient
entraver sa recherche scientifique, d'autant plus, lorsque le sujet concerne la
religion. Cette méthode permettra de dévoiler des vérités cachées et des visages
méconnus. Elle permettra également d'effectuer l'étude sociologique d'une école
ou d'une personne. Les résultats seront ainsi plus conformes à la réalité.

4
Les plus grands prophètes20 des races aryenne et asiatique sont Zarathoustra 21,
Bouddha22, Lao Tse23 et Confucius24. Il ne fait aucun doute que Confucius est
différent de Lao Tse, et que l’idéologie de Zarathoustra s’oppose à celle de
Bouddha. La réflexion de Confucius porte sur la société, alors que celle de Lao Tse
ne considère que l’individu. Le premier base sa réflexion sur les aspects extérieurs
alors que le second s'appuie davantage sur les aspects intérieurs. Zarathoustra
marque un intérêt pour la vie d’ici-bas, alors que, Bouddha ne la considère pas. Le
premier considère ce monde d’un point de vue clairvoyant et optimiste, l’autre le
considère d'un point de vue obscur et pessimiste. Zarathoustra est le prophète du
feu ardent, Bouddha est le prophète du feu intérieur (nirvana 25). Aucun sociologue
ne se soucie de ces oppositions. Le sociologue se préoccupe d'une part de la nature
des souffrances et des besoins, de la manière d'y remédier. D'autre part, il accorde
une importance particulière à la réflexion et au cadre social et humain des
religions. L'étude de ces religions et des biographies de ces prophètes impose au
sociologue une vérité précise vers laquelle il tendra pendant toute la durée de ses
recherches. Tous ces prophètes sont sans exception issus de la classe noble ou de
l'élite de leurs sociétés. Confucius est issu de cette classe, Zarathoustra est le fils
d’un prêtre bien connu, Bouddha est le fils souverain du royaume de Kapilavastu.
A la lumière de ces informations, l'avenir devient prévisible. La sociologie attribue
à chaque classe sociale un langage, des sentiments, des caractéristiques
psychologiques et spirituelles, des désirs, des espoirs et une vision particulière du
monde. Par conséquent, chaque classe sociale a ses propres souffrances, ses
propres besoins et ses propres épreuves 27. Dans ce contexte comment la religion se
libère-t-elle de ces circonstances et de ces oppositions ?
Non seulement, c’est impossible, mais ce n’est pas sa volonté et il ne faut pas que
cela le devienne ! Prenons le cas d’un poète bourgeois ? De quoi souffre-t-il ?
Pourquoi gémit-il ? Quelles sont ses douleurs et ses souffrances ? Comment
conçoit-il la vie et le monde ? Le déshérité ne comprend pas ses propos. Dans un
même pays, un terme n’a pas la même signification pour deux individus issus de
différentes classes sociales. Quand bien même ces derniers adoptent la même
définition d’un terme, celui-ci ne portera certainement pas la même connotation ni
la même valeur. Un paysan qui supporte la chaleur ardente et le froid matinal afin
de gagner sa maigre subsistance, ne partage pas la même signification du mot pain
avec une personne aisée. Cette dernière se nourrit sur une musique douce, dans
une ambiance colorée, entouré de ses enfants, de serveurs souriants et d’une belle
danseuse. Les boissons passent alors de mains en mains, les cuisses de poulets
défilent également et comblent l’appétit des convives.
Un démuni ne peut pas partager une même signification avec un riche ivre. Des
individus issus de classes sociales différentes ne parlent pas le même langage. Des
expériences psychologiques ont prouvé que la compréhension d’un mot n’est pas
la même selon l’individu. L’un donnera un sens qui s’opposera à l’autre, tant au
niveau du signifiant qu’au niveau du signifié28.
Il ne s’agit pas de comparer les religions aryennes avec les religions asiatiques ou
d’étudier la psychologie de la classe sociale aisée. Le pessimisme philosophique

5
de Bouddha ou de LaoTse n’est qu’une sorte de repli sur soi et une aversion pour
ce monde. Les esprits sensibles et les grandes idéologies qui apparaissent au sein
des classes aisées se caractérisent par la souffrance de l’esprit et de l’âme, le
besoin affectif, l’espoir et l’illusion. Même le renoncement à cette existence peut
également s’expliquer par un rejet psychologique naturel de la classe aisée, saturée
par l’excès. La vie monacale, l’ascète extrême, l’exagération dans l’amour et
l’affection sont des besoins et des souffrances irréalistes. Ils sont purement
psychologiques, imaginaires et illusoires. Ils touchent les personnes qui n'espèrent
plus rien de leurs vies. La faim, la soif, la maladie, la dispersion, la disparition, le
manque de médicament, la frustration, l’oppression, le chômage, l’exploitation, la
captivité, l’asservissement, l’ignorance, la faiblesse et des centaines d’autres
souffrances physiques et mentales anéantissent l’homme qui les subit. Bien qu’il
constate l’abondance de grâces dans cette vie, sur cette terre et sous ce ciel, il est
conscient d’en être privé. Ainsi, il lui est impossible de concevoir le monde
comme un espace vide qui n’offre rien. A peine vêtu dans un froid glacial, le
démuni se cache dans un coin de sa demeure désuète. Il enveloppe ses enfants
amaigris, tremblant de froid et déverse des larmes de misères et d’épuisement sur
leurs joues fanées. Contrairement à Bouddha, le prince du royaume du
Kapilavastu, qui partit en quête du feu intérieur, le démuni ne supportera pas de
quitter sa maison, son épouse et ses enfants. Cet homme -affamé et totalement
démuni- cherchera un feu flamboyant, ardent et incandescent. Il cherchera à mettre
fin à ses souffrances physiques, à améliorer ses conditions de vie. Les petits soucis
des poètes sont imaginaires et le fruit de divagations 29. Les prophètes s’adressaient
volontairement aux rois afin d’assurer leur mission et la diffusion de leur message.
Le roi représente, pour ces derniers, le meilleur moyen pour faciliter la conversion.
Lorsque Zarathoustra est arrivé en Azerbaïdjan, il s’est tout de suite rendu à Balkh
et a appelé le roi Gashtasabà se convertir. Ainsi il passa le restant de sa vie auprès
du roi. Confucius a passé sa vie à chanter la gloire de Zhuangzi auprès des anciens
rois de Chine. Déambulant de villes en ville, il s’installa finalement dans la cour
d’un roi. Confucius s’empara du pouvoir à l’aide de ce roi et appliqua les
préceptes de son école à la société. La persévérance des recherches permettent
d’atteindre l’objectif fixé. D’autre part, une chaîne de prophètes musulmans nous
relate un récit différent. Issus des classes lesplus défavorisées, ils exercent des
métiers tels que berger, ou artisan30. Enfants de la pauvreté et du désert, ils étaient
tous issus d’anciennes sociétés bédouines, des communautés dépourvues de
prestige31. Par conséquent, ce sont les déshérités et les esclaves qui sont les
premiers à s’intéresser à leur message. En revanche, ils sont confrontés à
l’agressivité des dignitaires et des hommes de pouvoir que le Saint Coran qualifie
d’« opulents ». Lorsque ces prophètes sont apparus, ils n’ont pas imploré l’appui
du roi ou du pouvoir en place. Au contraire, ils leur ont déclaré une guerre sans
merci. La Mission d'Ibrahim  a commencé par la destruction de la plus grande
statue. Ce fut le point de départ de son message et de son histoire, un histoire faite
de supplices, de feu et de brûlure. Moussa , vêtu d’une simple tenue de berger, a
traversé le désert, berceau de tous les prophètes sémites, pour atteindre la capitale.

6
Ensuite, il s’est dirigé vers le palais de Pharaon et lui a déclaré la guerre. Ainsi
commença l’histoire de Moussa , l’histoire de la lutte contre Pharaon, Quaroun32
et Balaam33. Après avoir délivré le peuple juif de l’esclavage et de la soumission, il
a affronté l’armée de Pharaon. Après l’exode, il a créé une société libre sur une
terre indépendante.
Issa [Jésus] , fils unique, subvient à ses besoins en pêchant aux bords de la mer
Rouge. Il s’est dressé contre l’empire sanguinaire de César. Son histoire relate la
douleur, la crucifixion et les massacres. Muhammad  était un jeune orphelin. En
tant que berger, Muhammad  avait l'habitude de garder les moutons aux environs
des collines entourant la Mecque. Il prit l'habitude de se retirer dans une grotte
appelée « Hira » pour purifier son coeur et prier. Un jour, il quitta cette grotte pour
déclarer la guerre aux commerçants de Quoraïch, aux marchands d’esclaves, à la
classe vaniteuse, à Chosroes le perse et à César le romain. Les déshérités, les
opprimés et les esclaves de son milieu lui accordèrent immédiatement leur soutien.
Puis son histoire commença, une histoire faite de peines, d’exil, de dispersion et
d’un jihâd34 perpétuel. Il n’est pas difficile pour un sociologue de déterminer la
religion des prophètes qui sont apparus dans les grandes villes. Ces prophètes qui
ont quitté leurs tours d’ivoire pour rejoindre les palais, qui ont gravi les marches
du pouvoir pour appeler à leur religion. Nul besoin d'être éloquent ou de maîtriser
l’exégèse pour mener à bien ces prophéties. Leur partie, leur monde et leur
connaissance de la vie et de l’univers suffisent à elles-mêmes 35. Les prophètes de
la religion des déshérités abandonnent leur métier de berger, quittent leurs grottes
et sortent du désert ardent (La Mésopotamie, la péninsule arabique, la Palestine, la
Syrie et l’Egypte). Ils guident leurs peuples chassés et mènent une guerre sans
merci contre les agresseurs de leurs communautés 36. Il est important de considérer
Muhammad , sceau des prophètes, sous un autre angle. Ses qualités doivent faire
l’objet d’analyses psychologique, sociale et historique afin de mieux connaître sa
personnalité. Muhammad  doit être considéré comme un personnage
extraordinairement remarquable, un empereur, un sage, un prophète. Il en va de
même pour les prophètes d’Orient dont il fait partie. Il faut découvrir Muhammad
 avec un nouveau regard tel un miracle indescriptible, un rêve inoubliable, un
homme irremplaçable. Muhammad , comme ses prédécesseurs, était un berger
anonyme. Il était le pionnier dans l’histoire des bergers, ces générations qui ont
édifié les grandes civilisations de ce monde. Il est nécessaire de concevoir
Muhammad  comme une partie ces civilisations. Pour une meilleure
connaissance de l’image générale d’une religion, il faut connaître son « Dieu »,
son livre, son prophète et ceux qui ont contribué à propager son message. Dans le
cadre d’une étude théologique, cette méthode paraît être la plus simple, la plus
sûre et la plus facile. Yahvé, dieu du peuple juif est un personnage hors du
commun, au visage sévère et orgueilleux. Sa grandeur et son sérieux vont au-delà
de tout amour ou adoration humaine. Yahvé, n’admet que sa propre justice. Il ne
tolère jamais la moindre transgression et ne montre aucune flexibilité. Son rôle,
selon la religion, est de libérer son peuple de l’esclavage. Ils devaient se révolter et
faire face au pouvoir des pharaons. Ils devaient quitter leur pays, traverser ce long

7
et pénible chemin vers la liberté et trouver une terre pour y construire une nation
libre et indépendante. Les principes théologico-philosophiques de la Torah
s'appuient sur la logique et l’organisation de la pensée. Ces principes forment une
base solide aux concepts de l’existence et de la vérité. La création de l’homme, de
la vie et surtout de la philosophie du message divin est liée à l’histoire et à l’unité
du peuple juif à travers le monde. Ceci est également valable en ce qui concerne
les dogmes, les limites et les droits sociaux. Moussa  accompagna Al-khidr  afin
que ce dernier lui enseigne son savoir 37. Moussa  est le prophète de cette religion
édifiante, politique et sociale, prônant les droits civiques universelles. Nonnos 38
représenta Issa  en une personnalité amicale, sincère, d’une grande humilité. Issa
 fut si proche de l’homme qu’il descendit des cieux pour le rejoindre. Il s’est
détaché de son orgueil et de sa majesté et a pris une apparence humaine pour se
mélanger aux hommes au point de devenir le père de l’humanité. A l’instar de
Théos39, Issa  s’est manifesté sous une apparence humaine. Il avait un visage
d’ange, un sourire comparable à la magie d’un crépuscule et un discours serein qui
atteint l’âme et l’apaise. Issa  était le prophète du calme, de l’amour et la
miséricorde. Son message nourrit et réconforte les coeurs accablés. Il appela les
bourreaux romains et l’armée sanguinaire de César à soigner leurs coeurs, à aimer
leurs prochains et à cesser leurs crimes. La brutalité avait conduit ses auteurs à la
folie. Chaque épée était à l’origine d’une effusion de sang et le sang attirait le
sang. Vengeance sur vengeance 40, un cercle vicieux meurtrier s’est formé.
Comment étancher la soif des épées et comment mettre fin à cette folie
meurtrière ? Comment briser ce cercle vicieux de la vengeance ? L’amour est le
seul moyen d’y parvenir. L’Evangile rapporte : « Si quelqu'un te frappe sur la joue
droite, présente-lui l'autre aussi. Ne frappe pas pour qu’on ne te frappe pas. » C’est
ainsi que le conflit prendra fin et que l’amitié remplacera l’animosité. Après avoir
étudié les grandes religions, ce principe m'a semblé important en ce qui concerne
l’étude de la sociologie historique. Il ne s’agit pas de l'étude des problèmes
religieux mais de l’étude de la religion en elle-même, sans dévier du droit chemin
et ainsi désorienter la société. La présence de certains facteurs et conditions peut
faire évoluer une société d’une situation A vers une situation B. Une société peut,
par exemple, s’orienter exclusivement vers l’idéalisme et l’ascétisme. Celle-ci peut
également s’orienter vers une situation C, déviant ainsi vers le matérialisme, la
corruption et les plaisirs éphémères. Dans ce contexte très précis, le rôle des
grandes religions est très important. En effet, une religion peut exercer une
influence sur l’orientation de la société. Dans le premier cas, la religion
communique autour de ses valeurs afin que la société adopte ses principes et
s’éloigne de toute déviance. Ceci représente l’essentiel du contenu des messages
de Moussa , de Confucius et de Zarathoustra. Il s’agit du passage de la situation
B à la situation C. Dans le second cas, la situation C évolue vers la situation B. Il
s’agit dans ce cas des messages de Lao Tse, du totémisme, des religions
sacrificielles et du Christianisme41. Lorsqu’une société emprunte une voie
particulière, un prophète apparait pour établir l’équilibre. Il s’inspire des principes
de sa religion pour s’opposer aux dérives de la société. La propagation et la

8
diffusion de la religion favorisent son développement et son influence. Par
conséquent, après un certain temps, la société retrouve son équilibre et revient vers
la situation A. Logiquement, le rôle de la religion s’achève. Cependant aucun
fidèle n’en a annoncé la fin. Telle est la vocation de la religion, elle investit ses
forces et ses compétences au service de la société. Telle est la vocation de la
religion, elle investit ses forces et ses compétences au service de la société. Face à
ces religions, de nouvelles religions aux énergies négatives apparaissent,
perturbant la société et provoquent son déséquilibre. C’est alors que les religions
opposées à celles-ci s’organisent pour affronter les dérives de la société. Ce cycle
se répète éternellement influençant le devenir des sociétés et ce, à travers l’histoire
des sociétés et les grandes religions. Lorsque la religion Taoïste apparut, la société
chinoise recherchait les plaisirs des sens de manière effrénée. En effet, cette
société était plongée dans le divertissement, la futilité, le plaisir, l’injustice, la
convoitise, l’avidité et le matérialisme. Face à ces atrocités, le Taoïsme appela les
chinois à se détacher du monde d’ici-bas, à renoncer aux plaisirs de la vie et à
abandonner toute forme de système social. En revanche, cette religion les invita
vivement à se soumettre à la nature et à y vivre en harmonie (Tao 42). Les sociétés
asiatiques ont été apparentées à la vie monastique, à la purification de l’âme, à
l’ascétisme et au détournement de la vie ici-bas vers le Tao. Le Taoïsme incita les
chinois à adopter les préceptes de la vie monastique et ascétique, à purifier leurs
âmes, à se détourner de la société, de la vie ici-bas et à adopter ses préceptes. La
religion de Confucius va à l’encontre de celle de Lao Tse 43. Il incite les esprits à se
soumettre au système social, à ses coutumes et traditions et au modèle social de Li
44
. La subtilité des goûts en Inde, la fertilité de ses terres, le système social des
Raja45, la fainéantise, la pauvreté, la négligence dans lesquelles les indiens sont
plongés ont conduit la société à la vénération du luxe, du désir, du matérialisme,
du divertissement et de la perversion. De nouvelles religions sacrificielles ont
transformé la terre des Raja en une terre de gnostiques, de moines et de sportifs.
Elles ont proposé un modèle de renoncement à la vie ici-bas : le soufisme, le sport
intensif et la souffrance du corps et de l’âme. De même, Bouddha utilisa les arts
martiaux afin de lutter contre le désarroi de sa société. Cependant, ses tentatives se
sont avérées infructueuses. Son peuple, connu pour son génie, ses compétences,
son volontariat, sa grande civilisation, sa gnose, sa spiritualité et ses apports aux
mathématiques, s’est plongé dans ses illusions et dans les différentes stations
soufies. Pendant des siècles, il fut instrumentalisé par les turcs, les ghaznévides,
les moghols, les afghans, les perses, et les colons anglais. La société romaine était
puissante et riche. Issa  investit tous ses efforts dans la voie opposée à la
déviation qui régnait à Rome. Il exhorta la société romaine à instaurer la paix et la
dévotion, à renoncer à l’avidité, au pouvoir et à la domination militaire infligée
aux autres peuples. Il l’incita également à adopter une éthique et à nourrir des
sentiments nobles et spirituels. Nous avons pu mesurer l’ampleur de sa victoire. La
terre des gladiateurs et autre Néron ne renfermait que des cris de prisonniers jetés
aux fauves. Cette société, qui avait emprunté la voie du matérialisme et de la
guerre, voulut maîtriser ses ambitions pour la domination politique et ses envies

9
effrénées pour le divertissement en adoptant la morale et la spiritualité. La terre de
Gladiateur et de Néron, qui renfermait les hurlements des prisonniers attaqués par
des bêtes féroces, les cris effrayants des commandants et le mugissement des bons
vivants et des sanguinaires, redevint la terre de Saint Paul 46, de Saint Gaud47, de
Saint Acace48 et de Saint Augustin49, une terre propice à l’éducation de l’âme et à sa
purification. Les assemblées romaines, les palais et les prisons symboles d’un
pouvoir despotique laissèrent place aux saintes églises et à leurs lumières
spirituelles, à leurs chants, à leurs prières et à leurs musiques adressés au Maître de
l’univers. Pendant les premiers siècles, le Christianisme appela la société militaire
de Rome à renoncer à la jouissance des plaisirs de la vie, principales causes de sa
défaite et de son isolement. C’est ainsi que Alaeddin Keykubad 50, le turc
seldjoukide51, et Salah Ad-Din Al-Ayyubi52, le kurde de Syrie, rempotèrent la
victoire et que les armées romaines se retirèrent au centre de l’Europe malgré la
division du monde musulman et l’éclatement de ses états qui tombèrent alors sous
la tutelle d’un prince ou d’un émir. Le pouvoir du Christianisme orientale fut
renversé. Constantine, le centre mondial de l’empire chrétien fut remplacé par
Astana (Athènes) et les chrétiens furent renvoyé à l’autre rive de la méditerranée.
Les sociétés occidentales auparavant puissantes et prospères se sont alors
enfoncées dans un isolement pénible. Elles furent envahies par un courant opposé
à celui de Issa  qui les a conduites vers les bassesses de la vie d’ici-bas, vers la
guerre et vers les plaisirs. Aujourd’hui, l’Europe a changé de voie et est devenue
l’Europe de Néron, de Jules César et des Gladiateurs. L’Europe éprouve une soif
de chrétienté. Qu’en est-il de l’Islam, de Muhammad  et du Saint Coran ? Sans
faire preuve de sectarisme religieux ou d’athéisme extrême, il est question
d’aborder le fanatisme de manière claire et précise ou comme le dit Bakin « d’un
point de vue purement scientifique ». L’Islam est une religion extraordinaire,
unique au monde et dépourvue de fanatisme, sauf dans les mythes et les légendes.
L’Islam, en une phrase, est la seule religion aux multiples dimensions universelles.
Le but de cette religion n’est pas d’orienter la société vers une voie précise ni vers
des voies qui s’opposent entre elles. Toutefois, elle oeuvre pour orienter l’individu
et la société vers les perceptions et les idées, vers différentes voies parfois
contradictoires. Par conséquent l’Islam permet à la société d’emprunter la voie de
l’équilibre. Une fois cet équilibre rétabli, les risques de déviation, de démesure et
de soulèvement seront diminués. Ainsi, la société ne penchera plus ni d'un côté ni
de l'autre. Mais où trouvons-nous un tel principe dans l’Islam ? Quel principe
l’Islam propose-t-il ? La connaissance de Dieu, du Saint Coran, de Muhammad ,
de ses compagnons et de sa société éclaircira cette vérité. Muhammad  est le seul
Prophète au monde qui ait mis en oeuvre les principes de sa société. L’étude
scientifique et logique de ces cinq aspects et leur comparaison démontrera cette
vérité. Dans la mythologie romaine, Janus 53 est un dieu à une tête mais deux
visages opposés Yahvé et Théos. Ces deux visages représentent deux qualités
opposées : l'impitoyable et le clément. Yahvé est « vengeur », « arrogant », «
hautain », et « féroce ». D’un orgueil incomparable, il s’est refugié dans les
galeries royales, au-dessus des cieux et au-dessus des hommes. Théos, le «

10
clément », le « miséricordieux », le « bienveillant » descendit sur terre, créa
l’homme à son image et le désigna comme son héritier. Il est si proche de
l’homme, plus près que de la veine jugulaire54.
Le Saint Coran renferme l’Evangile et la Torah. Philosophie et sagesse, éthique et
morale, il régit, par ses différents principes, toutes les sphères de la vie sociale,
économie, politique et militaire. De la doctrine divine aux règles d’hygiène et de
vie sociale, de l’éducation de l’âme et sa purification aux principes de guerre et de
jihâd, il fixe les droits et devoirs de l’individu au sein de la société et ceux de la
société envers l’individu. Il offre des principes visant à stabiliser la société, la
politique et l’économie. Ainsi, l’individu dispose de conditions de vie favorables
et jouit pleinement de la culture, de la science et de la liberté. Le Saint Coran
appelle les individus à l’adoration, à la soumission et à la dévotion à Dieu. Cette
mobilisation générale permet aux individus et à la société de gagner en pouvoir.
Avec un style magnifique qui lui est propre, il réunit différentes idéologies
sensitives, matérielles, morales individuelles et collectives.
La personnalité de Muhammad  est un mélange des traits de caractère de Issa  et
de Moussa . Il mena ses compagnons sur le champ de la bataille, désireux de
combattre et de mourir en martyr. Montés sur leurs chevaux bien trop chargés, ils
ne pouvaient échapper à leurs ennemis. Muhammad attaqua en jetant une poignée
de terre de sa grotte sur les visages de ses ennemis et cria : «Allez-vous-en ! » Les
épées commencèrent alors à s’entrechoquer et la bataille fit rage. Lorsqu’ils étaient
sur le point de remporter la bataille, ses joues devinrent rouges de joie et il dit,
sourire de satisfaction aux lèvres, d’une voix imprégnée de victoire : « Voilà…
Nous sommes au coeur de la bataille ! ». Pendant vingt ans, Muhammad  et ses
compagnons subirent l’oppression des habitants de la Mecque avant d’en être
chassés. A l’apogée de sa puissance et au sommet de sa gloire, alors que ses
armées entrèrent à la Mecque, Muhammad se tint près de la Kaaba avec la
puissance de César et les qualités de Issa , plein de bonté et de compassion. Des
milliers d’épées se levèrent autour de lui se préparant à le venger des Quraychites
(Abou Sofiane, Hind qui mangea le foie de Hamza, Makrama ibn abi Djahl 55,
Safwan56 et d'autres). « Qu’attendez-vous de moi ? » leur demanda-t-il. Ceux qui
voyaient en lui les qualités de Issa  et la colère de Moussa  répondirent : « Un
frère et un proche ! ». D’une voix pleine de miséricorde, il leur annonça : «
Partez… vous êtes libres ! ». Qui peut imaginer que l’homme qui a passé sa vie en
retraite spirituelle à contempler l’Eternel, quitte sa maison et sa ville, en pleine
nuit, et erre dans le cimetière de Baqi. Cet homme aux idées gnostiques et
spirituelles, se lève pour parler aux tombes muettes sous la lune du Sahara qui lui
révéla les secrets de la vie. « O Muhammad, je possède les plus belles femmes,
choisis celle que tu veux en échange de ta femme Aïcha. » Il répondit d’un ton
plus calme et plus clément que celui de Issa  : « Mon frère, Allah n’accepte pas
ceci.» Etrange ! Qui peut croire que l’homme qui mena 65 combats et dirigea des
armées pendant dix ans puisse avoir l’esprit de Bouddha, la clémence
d'Upanishads57, la sagesse de Socrate et la gentillesse du chinois Lou 58 ? « S’il ne
m’avait pas été ordonné de me mêler au peuple et de vivre parmi les gens, j’aurai

11
passé mon existence à contempler les cieux et ce, jusqu’au moment où Allah aurait
pris mon âme »59. Les qualités de Ali  et Abou Dhar proviennent du prophète
Muhammad , qui les éduqua depuis leur jeune âge. Jundob ibn Janada était un
redoutable bédouin du désert mais l’Islam l’a transformé en un nouvel homme,
Abou Dhar. Quant à Ali  qui entra dans la maison du Prophète Muhammad  à
l’âge de 8 ans, il est devenu l’imam Ali . Abou Dhar était également un homme
au grand l’esprit et aux deux visages : un guerrier et un homme pieux, un solitaire
et un être sociable, un religieux et un homme politique, un fin défenseur de la
liberté et de la justice et un érudit à la recherche de la science, de la vérité et de la
meilleure compréhension du Saint Coran.
Qui est capable de décrire les qualités de Ali  ? Un esprit extraordinaire aux
multiples dimensions dont les qualités sont largement supérieures à celles des
dieux de la mythologie grécoromaine. Ali  est le symbole de l’héroïsme dans
l’histoire de l’humanité. Il incarne le génie de la guerre, de la rhétorique, de la
sagesse, de la loyauté, du sacrifice, de la piété, de la vérité et de la justice. Ali 
était un guerrier redoutable qui mena des combats sanglants pendant plusieurs
jours. Sa fameuse épée coupait les têtes de ses agresseurs tels des épis de blé.
Néanmoins, il était également un homme solitaire à l’esprit de contemplation.
Dans l’obscurité de la ville, il quittait son repos pour arroser les dattiers de Banu
Najar, dans les banlieues de la Médine, d’un puits tourmenté et attristé, prisonnier
de cette terre. Les qualités de Muhammad , tel que nous les connaissons depuis
14 siècles, ne doivent pas être limitées, à sa personne, mais doivent être combinées
à celles d’Al-lah, du Saint Coran et à celles d’Abou Dhar et de bien d’autres
figures qu'il a façonnées. Parmi ces figures, les gens de la demeure prophétique
ont également marqué l’histoire de l’humanité : Ali  le père, Fatima al-zahra la
mère, Hassan et Hussein leurs fils, et Zaynab leur fille .
La société de Muhammad  fut une société aux multiples dimensions. Une étude
approfondie de Médine démontrera que cette ville comprenait des dimensions
comparables à celles d’Athènes, de Spartes, d’Alexandrie, de Rome, Héliopolis et
de Bénarès. Athènes, Héliopolis, Spartes et Alexandrie ont donné naissance à des
personnalités qui ont marqué l’Histoire de l’humanité par l’importance de leurs
idées et la profondeur de leur spiritualité. Socrate,
Platon, Aristote, Plotin et Bouddha furent les génies de la sagesse, de la culture et
de la connaissance. Yathreb60, la ville du Prophète Muhammad , comporte deux
portes ouvertes sur le monde. La première porte est comparable à la porte de
Rome. En effet, le régiment bleu, des hommes qui ne pensaient qu’à la guerre et
qui ne dormaient que sur un lit de sang, sortaient de cette porte. Leurs épées
assoiffées de sang s'acharnaient, tuaient et assiégeaient tout un peuple. De l’autre
porte, sortaient des visages doux, cléments et sympathiques, reflétant la lumière
divine et l’amour des autres. Des âmes, débordantes de foi et de certitude, pures
dans leurs actions, pleines de considérations, qui détournaient leurs regards de la
vie d’ici-bas et aspiraient vers l’au-delà. Tels les apôtres de Issa , ils se dirigent, à
pieds ou à cheval, vers le désert ardent portant le message de l’Islam, de la pureté
et de l’amour envers Dieu aux tribus non civilisées. Ils perçaient ainsi les ténèbres

12
de la Jahiliyya par la piété, la lumière, la clairvoyance et la fraternité. Il suffit de
comparer la Mosquée du Prophète , à l’assemblée romaine, à l’académie
d’Athènes ou au temple de Zarathoustra.
Les soldats qui ont marqué l’Histoire de l’humanité et qui ont renversé les plus
grands empires militaires de l’Histoire ne peuvent être reconnus sur le champ de
bataille. Leurs qualités sont semblables à celles des moines hindous et des
disciples de Issa . Ces hommes ont renoncé à la vie d’ici-bas et se sont consacrés
à l’amour de l’Eternel. Plongés jour et nuit dans l’extase de l’adoration, leurs âmes
brûlent telles les âmes des gnostiques en retraite spirituelle. Epris par l’amour de
Dieu et préoccupés par la recherche et la méditation, ils ressemblent aux disciples
de Platon ou aux étudiants de l’école de sagesse d’Athènes. Toujours prêts à
dégainer leurs épées, ils ne connaissent aucun repos ni la chaleur du foyer et ce
depuis dix ans. Avides de combats, leurs épées contemplent le jihâd et écoutent les
ordres de Muhammad  tels les soldats d’un empereur. Ces qualités sont celles
d’une religion qui porte un message guidant l’Homme jusqu’à l’éternité. C’est la
raison pour laquelle, cette religion est le sceau de toutes les religions et le dernier
message divin adressé à l’Humanité. Cette religion a appelé à l’adoration d’un
Dieu qui se caractérise aussi bien par les qualités de Yahvé que celle de Théos. Son
livre contient la sagesse de la Torah et les exhortations de l’Evangile. Son
messager possède la raison de Moussa  et le coeur de Issa  et de ses disciples.
Ces hommes qui conçoivent la vie comme un combat pour la liberté, comme une
foi et un jihâd. Leurs qualités sont semblables à celles de Socrate et celles de
Bouddha. Muhammad  les a représentés en quelques mots simples et clairs : «
Adorateurs la nuit et soldats le jour ». Des soldats qui ne connaissent point la peur,
avides de combats et de retraite spirituelle. Seul Muhammad  et son message
présentent des dimensions diverses. Ces deux orientations sont aptes à réaliser
l’espoir de l’Homme à notre époque. L’avenir des civilisations historiques connaît
une étape critique. Elles subissent une oscillation perpétuelle entre la vie d’ici-bas
et l’au-delà, le spirituel et le matériel, les préoccupations individuelles et les
préoccupations collectives, le corps et l’esprit, la noblesse des vertus et le pouvoir
de la vie, la richesse de la culture et la perfection de la civilisation, la rationalité
entre religion et science, la passion et la vigueur, la beauté et le bien, la réalité et la
vérité et enfin la représentation et l’authenticité. Ces sujets ont nuit à l’évolution
intellectuelle et spirituelle de l’Homme à tel point que la terre lui est devenue
étroite. Bien que la volonté et les perspectives d’avenir existent, ces sujets
continuent d’attrister l’Homme et le rendent pessimiste. Le désespoir
philosophique et le pessimisme touchent également les générations futures, les
jeunes sont réduits à la stupidité et au vide intellectuel. Rendant son avenir terrible,
inquiétant et désolant, l’homme tend à les fuir comme il fuit la ville, la culture et la
civilisation. L’homme, qui a su tirer des conclusions de cette expérience, est
conscient du malaise de la civilisation contemporaine et de ses défauts. Il espère
élever son esprit avec la sagesse et les sens, penser avec la sagesse de Socrate,
aimer avec le coeur de Issa , acquérir le savoir de Ibn Sina et la vision d’Abi
Said. Il espère bâtir une société dont le corps est la civilisation et l’esprit est la

13
religion, alliant la richesse des grandes civilisations européennes aux sagesses
hindoues. Le message de l’éveil intellectuel contemporain est d’instaurer la
civilisation européenne en Inde, de diffuser la spiritualité hindoue au sein de
l’Europe et de transmettre la culture orientale à l’Occident et l’objectivité de
l’Occident en Orient. Il s’agit d’établir Chams de Tabriz 61 dans l’esprit d’Aristote,
de faire jaillir des larmes des yeux asséchés de Bacon 62, de désarmer les troupes
des empereurs par la main d'Issa  et de faire jaillir l’angoisse d’Al Hallaj 63 et son
amour mystique dans le coeur de Socrate. Il s’agit de permettre à Athènes d’ouvrir
une des portes de Rome, de transformer les assemblées romaines, l’académie de
Rome et les temples de Issa  en mosquées. Et comme l’invoque Saint-Charles, «
Afin qu’ils prennent conscience de la beauté du monde et de Dieu et qu’ils
écoutent les dits de Pascal64 comme ceux de Descartes65. » L’avenir de l’homme,
extrait de la boue et du souffle divin, est un être aux deux dimensions. Son espoir
est d’obtenir des ailes et comme le dit Frantz Fanon66 :
« Allons, camarades, décidons de ne pas imiter l'Europe, l’imitation qui nous
trouble et nous ramène sans cesse à l’asservissement. Nous ne voulons pas
transformer l'Afrique et l’Asie en une nouvelle Europe. Il ne faut pas renouveler
l’expérience de l’Amérique. Pour l'Europe, pour nous-mêmes et pour l'humanité,
camarades, il faut faire peau neuve, développer une pensée neuve, tenter de mettre
sur pied un homme neuf67. L’homme qui a connu l’épreuve de Rome et pris
conscience de l’expérience de l’Inde, l’homme qui possède deux ailes et dont la
société comprend deux dimensions. Comment imaginer cet homme ? Dévot la
nuit, soldat le jour. Et sa religion ? La religion du livre, de la justice et du fer.

Les propos de l’imam Khamenei1 au sujet de Shariati


1 - Sayyid Ali Khamenei (né en 1939 à Machhad), ayatollah et actuel Guide Suprême
de l’Iran, il occupe le poste le plus élevé de la République islamique, au-dessus de la
charge officielle de Président de la République, qu’il occupa lui-même de 1981 à 1989.
Son turban noir indique qu’il est un sayyid, un des nombreux descendants du prophète
de l’Islam Muhammad . (NdT)
2 - Jalal Al Ahmad est né en 1923 à Téhéran. Il grandit dans un milieu religieux dont on
pourra percevoir le reflet dans certaines de ses oeuvres, telles qu’Echange de visites
(Dîd o Bâzdîd) et Setâr. En 1947, il devient professeur de lycée à Téhéran et en 1950, il
épouse la future romancière Simin Daneshvar. Il traduit en persan Retour d’URSS de
Gide et Les Mains sales de Sartre, des livres qui reflètent bien sa pensée de l’époque.
Influencé par les idées tiers-mondistes et anti-colonialistes, il publie l'Occidentalité
(1962). C'est le récit de son pèlerinage à la Mecque qui marque un retour vers l'Islam. Il
est le maitre à penser d'une génération d'intellectuels qui soutiendra la révolution
islamique de 1979. En voyage à Machhad, il fait connaissance avec Ali Shariati, le plus
important intellectuel des années 70.

14
Un lien de courte durée s’établit puisque les menaces de la Savak l’obligent à s’exiler
dans la région du Guilân, à Assâlem, au nord del’Iran (NdT). La Savak est fondée en
1957 avec l'assistance de la CIA et du Mossad avec pour mission de protéger le Shah,
Mohammad Reza Pahlavi et de contrôler l'opposition, en particulier politique. La Savak
avait des pouvoirs illimités d'arrestation et de détention et a commis un nombre
considérable d’assassinats dans les rangs de l’opposition, entre autres celui du Ali
Shariati. Elle fut démantelée lors de la révolution islamique en 1979 par l’imam
Khomeyni. (NdT)
3 - Machhad : ou Mechhed, grande ville du nord iranien, fut érigée autour du mausolée
de l’Imam al Rida , et est considérée actuellement comme la capitale culturelle de
l’Iran. (NdT)
4 - Mot arabe qui signifie les savants d’une manière générale, alors qu’il sera utilisé
dans ce texte pour désigner en particulier les savants religieux ayant acquis la
connaissance matérielle du Coran et des traditions prophétiques. (NdT)
5 - Une Hawza désigne l’université dispensant l'enseignement religieux supérieur. Ses
sièges sont ceux de Qom en Iran et à Najaf et Karbala en Irak. La première hawza a été
fondée à Nadjaf en 1056. Elle est formée par plusieurs enseignants ayant atteint le titre
d'ayatollah ou marja-e taqlid. Les étudiants d'une hawza suivent des cours de sciences
religieuses, de philosophie et de littérature. Le plus haut diplôme est l'ijtihad (et le
diplômé est un mujtahid). Il signifie que l'étudiant est devenu autonome dans sa
compréhension des textes de l'Islam et peut émettre des décisions théologico-
juridiques. (NdT)
6 - Mortada Motahari est un des plus éminents penseurs, philosophes et théoriciens de
la révolution islamique. Né en 1920, il suit des études à Machhad puis à Qom où il est
l’élève de l’imam Khomeyni. Plus tard, lors de son passage à Neauflechâteau pour
rendre visite à l’imam Khomeyni, il est nommé par ce dernier à la tête du Conseil de la
Révolution. Face à la tentative de laïcisation, la politique colonialiste et le régime
dictatorial du Shah, il fallait puiser dans la pensée et la civilisation musulmane des
idées qui puissent mettre en éveil le peuple opprimé et soumis. Motahari joue un rôle
prépondérant dans ce sens. De par sa parfaite connaissance de la philosophie
occidentale d’une part, et son savoir approfondi sur la théologie et la philosophie
musulmane d’autre part, il sait à merveille faire resurgir des réponses islamiques aux
questions de sociétés actuelles. Il est assassiné en 1980 à Téhéran par un membre du
groupe extrémiste Forghan, quelques mois après la révolution. Il nous paraît important
de préciser ici, contrairement à ce qu’on peut lire dans la plupart des ouvrages parus en
France sur la révolution islamique, que Mortada Motahari et Ali Shariati, malgré
quelques divergences (d’ordre secondaire) s’entendaient parfaitement sur les priorités
de la révolution. Après avoir acquis une certaine connaissance des écrits de chacun,
nous pouvons affirmer que bien qu’ils aient eu des différends, les deux penseurs se
complétaient sur le plan idéologique, et travaillaient dans la même voie, celle de l’éveil
d’une société assommée par l’occidentalisation et l’ignorance de sa propre religion. Ils
fondèrent ensemble en 1969 Husseiniyat-al-irshâd. Ali Shariati n’était pas religieux et
a su réconcilier la jeunesse avec la religion car son discours divergeait des discours
habituels (hallal / haram). Quant à Motahari, en partie grâce à l’enseignement de
l’imam Khomeyni, il a su démontrer l’importance de la position des religieux sur le
plan social et politique, autrement dit on ne peut être un savant religieux sans s’investir

15
dans la vie politique de sa propre société, il se détache donc de l’idée qui consiste à
séparer le politique et le religieux. Certains des écrits de Mortada Motahari sont traduits
en français : La Justice Divine, les droits de la femme en Islam, la question du Hijab,
Concevoir le monde, éditions Albouraq.
7 - Journal Al-Wihdat, n°126, p. 36/37 Rajab 1994. (note de l‘édition originale)

LES QUALIT ÉS DE MUHAMMAD


8 - Il existe un poème en arabe dont le sens ressemble au poème suivant :« Sarjoub, la
jument, a succombé aux efforts de la veille A la levée du jour, elle était morte ».
9 - Ferdinand de Bulhoes dit Antoine de Padoue (1195 - 1231) est un saint catho-lique
romain, docteur de l'Église, surnommé aussi « le Thaumaturge ». Il critique la pseudo-
justice mondaine et hypocrite, qui est purement extérieure et individualiste, et ne
touche pas le plus profond du coeur ni ne transforme les sentiments de malveillance
envers son prochain. Selon Antoine, l'observance hypocrite d'une multiplicité de lois et
de prescriptions ne suffit pas à amener l'homme à la "vraie justice des pénitents", qui
consiste dans l'humilité du coeur, l'ouverture envers ses frères, la douceur de la
contemplation. (NdT)
10 - Eugène Sue (1804 - 1857), est un écrivain français. Il est principalement connu
pour deux de ses romans-feuilletons à caractère social : Les mystères de Paris (1842-
1843) et Le juif errant (1844-1845). Il fut député républicain et socialiste de la Seine.
Lorsque Louis-Napoléon Bonaparte effectua son coup d’État, il dut s’enfuir en 1851 et
s’exiler. (NdT)
11 - Al-Kindi (801- 873) fut un grand philosophe arabe. Il était également un
mathématicien, physicien, astronome, médecin, géographe et même un expert en
musique. L’influence d’Al-Kindi sur le développement de la science et de la
philosophie fut significative : elle redonna l’élan aux sciences d’alors. Au Moyen-âge,
Cardano le considéra comme l’un des douze plus grands esprits de l’humanité. Ses
oeuvres permirent, pendant des siècles, de pousser le développement de différents
domaines d’étude, notamment en physique, en mathématiques, en médecine et en
musique. (NdT)
12 - Ibn Sina (980 – 1037) connu sous le nom d'Avicenne, était un philosophe, un
médecin et un scientifique musulman d'origine persane. Il s'intéressa à de nombreuses
sciences, notamment l'astronomie, l'alchimie, la chimie et la psychologie. L'oeuvre
d'Ibn Sina est nombreuse et variée. Sa doctrine philosophique, en particulier sa
métaphysique, se base sur celle d'Aristote et sur les travaux d'Al-Farabi. Ses autres
oeuvres sont marquées par la recherche d'une philosophie orientale et d'une mystique
personnelle.(NdT)
13 - Ibn Rochd (1126 -1198) connu, en occident, sous le nom d'Averroes fut à la fois un
philosophe, un théologien, un juriste, un mathématicien et un médecin musulman
andalou du XIIe siècle. Ibn Rochd fut découvert par les Latins comme philosophe,
commentateur d’Aristote et est devenu célèbre notamment au travers de sa conception
des vérités métaphysiques. Pour lui, elles pouvaient en effet s’exprimer de deux
manières différentes et pas forcément contradictoires : par la philosophie (Aristote,
néoplatoniciens) et par la religion.(NdT)
14 - Laurent Schwartz (1915 - 2002), un des grands mathématiciens et sociologue
français du XXe siècle affirme : « Pendant des siècles, Athènes fut le berceau de la

16
philosophie et des arts. Cependant il n’existe aucune trace de l'invention d'une seule
roue. Ce sont les nombreux esclaves qui portaient les lourdes charges. Les philosophes
et autres penseurs, étrangers à cette classe, ne se souciaient guère de trouver une
solution à cela. » (NdT)
15 - Spartacus est un esclave et un gladiateur thrace. Il dirigea la Troisième Guerre
servile en Italie du Sud entre 73 et 71. Av.J.-C. Ce fut la dernière d’une série de
rébellions d’esclaves contre la République Romaine. Spartacus et son mouvement sont
considérés par certains modernes comme le plus ancien évènement de l'histoire du
mouvement social.
16 - Selon les chroniques de Tabari, Abou Dhar fut un homme véridique, droit, et un
des proches compagnons du Prophète . Suite à une discorde avec Mu‘âwiya dans la
province de Syrie, il fut renvoyé à Médine auprès d’ ‘Uthmân. Il ne supporta pas sa
gestion du pouvoir et préféra se retirer, conformément aux prédictions du Prophète  : «
Abou Dhar vivra seul, mourra seul, et ressuscitera seul ». (NdT)
17 - Muhammad Sadr al din al Shirazi (1571-72 / 1640-1641) surnommé Molla Sadra,
ou encore Sadr al muta'allihin s'imposa par son oeuvre majestueuse, très tôt reconnue.
Il naquit à Shiraz, et fut le disciple de maîtres éminents. Nommé à Shiraz pour occuper
un poste de professeur, il fut et demeure indéniablement un grand philosophe. Influencé
par la pensée d'Ibn Arabi, qui s'articule esentiellement autour de l'unité de l'existence, il
la développera à merveille. Le regard de l'homme, qui a toujours eu le souci d'autrui et
de ce qu’il y a autour de lui, se tourne alors vers son intérieur. Lui permettant d'ouvrir
les yeux sur lui-même et de se contempler. Par ce changement, il prend conscience de
son « moi » réel à travers ses sentiments, ses perceptions et ses expériences les plus
profondes, les plus élevées et les plus sincères. C'est ainsi qu'il réalise une sorte de prise
de conscience directe, sans intermédiaire, où s'unissent la science, le savant et l’objet de
la connaissance. (NdT)
18 - Autrement dit, le Prophète  était le guide, l'éclaireur des hommes. (NdT)
19 - Pourquoi les grandes religions sont-elles toutes apparues en Orient ? Très
régulièrement cette question revient à l'ordre du jour. Tel n’est pas le cas. Les indiens
d’Amérique du Nord et les tribus d’Australie avaient leurs propres croyances. Les
anthropologues de la fin du XIXe et du début du XXe siècles tels que Spencer, Muller,
Mosse, Lévy-Bruhl, Durkheim ou Max Weber ayant étudié les peuples primitifs et leurs
croyances l’ont confirmé. Cependant, les grands prophètes sont et se devaient
effectivement d’apparaître en Orient. Ensuite, les religions et le civisme de l’Orient se
sont transmis en Occident. La civilisation et le civisme occidentaux disparaissent-ils
actuellement en emportant les dogmes des grandes écoles philosophiques ? La radio, le
petit écran (la télévision), l’avion, la voiture, le train, le goudron de route, l’architecture
des bâtiments ne nous ont-ils pas transmis les modes de vie et le savoir-vivre de Sartre,
de Camus, de Russel et de Marx ? Pourquoi les philosophes et les fondateurs des
doctrines sociales, politiques et intellectuelles sont-ils apparus tous en Occident ?!
(Note de l'auteur)
20 - Dans ce texte, le terme "prophète" devra être compris dans son sens premier.
Autrement dit, il s'agit de personnes ayant un message à transmettre. L'auteur n'astreint
pas ce terme aux seules personnes (prophètes) ayant reçu une révélation divine, mais
plutôt à tous ceux qui transmirent un enseignement. (NdT)
21 - Zarathoustra est le nom du fondateur de l'ancienne foi Zoroastrienne. Le

17
zoroastrisme, est une religion monothéiste, dont Ahura Mazdâ (pehlevi Ohrmazd) est le
dieu, seul responsable de la mise en ordre du chaos initial, le créateur du ciel et de la
Terre. Zoroastre, son prophète, fut un personnage religieux important qui aurait vécu
entre l'an -1000 et l'an -400 selon la mythologie Perse. (NdT)
22 - Le bouddhisme est issu des enseignements de Siddhārtha Gautama (l'« éveillé »),
considéré comme le Bouddha historique. Le bouddhisme est une voie individuelle dont
le but est l'éveil, par l'extinction du désir, de la haine et de l'illusion. (NdT)
23 - Lao Tse est un sage chinois dont la tradition en fait un contemporain de Confucius
(milieu du VIe siècle av. J.-C. – milieu du Ve siècle av. J.-C., considéré a postériori
comme l’ancêtre du taoïsme. Le taoïsme est à la fois une philosophie et une religion
chinoise. (NdT)
24 - Confucius est le personnage historique ayant le plus marqué la civilisation
chinoise. Considéré comme le premier « éducateur » de la Chine, son enseignement a
donné naissance au confucianisme, une doctrine politique et sociale qui a été érigée en
« religion d'État » dès la dynastie Han et qui ne fut officiellement bannie qu'au début du
XXe siècle. (NdT)
25 - Nirvana est un terme qui signifie « extinction » d'une flamme ou d'une fièvre.
26 - Premièrement : Après un certain temps, ces religions perdent leurs principales
caractéristiques sociales. Elles peuvent même en adopter d’autres opposées.
Deuxièmement : Du point de vue de la psychologie sociale, les malaises et les besoins
psychologiques, moraux et intellectuels apparaissent d’abord dans une classe sociale
puis se propagent rapidement au sein de la société pour en affecter toutes ses classes.
Les penchants pour l’art, la beauté, la réflexion, la philosophie et la mondialisation ne
sont plus propres à la bourgeoisie européenne. Ils sont également visibles au sein des
classes moyennes et démunies d’Asie et d’Afrique.
27 - Autrement dit, leurs souffrances, leurs besoins et leurs épreuves sont les
caractéristiques de leur classe sociale. (NdT)
28 - Prenez une planche en bois et faites des trous correspondant à différentes pièces de
monnaie. Proposez ensuite cette planche à deux enfants issus deux classes sociales
distinctes. L’enfant issu de la classe sociale la plus défavorisée tentera d’introduire la
pièce de valeur supérieure dans le trou prévu pour la pièce de valeur inférieure.
L’enfant issu d’un milieu aisé fera le contraire. (Note de l'auteur)
29 - Les courants littéraires et les mouvements de révolte des jeunes des pays
capitalistes (le Beatles-isme, et le Teenager-isme) traduisent des malaises profondément
ancrés au sein de la société occidentale (Europe et Etats-Unis). Dans ces sociétés où
règnent l’existentialisme de Sartre, l’absurdité de l’existence d’Albert camus, le
pessimisme de Sadegh Hedayat et le divertissement des discothèques parisiennes, le
taux de suicide parmi les jeunes est extrêmement important. Tous ces malaises émanent
de l’excès du bienêtre et du divertissement. Celui qui ressent la faim et la nécessité ne
conçoit pas l’absurdité l’existence. Le démuni ne conçoit pas la vie comme un sommeil
agité, une affliction ou un rêve d’ivresse. (Note de l'auteur)
30 - Nouh  était menuisier, Daoud  était forgeron et fabricant de boucliers. Ibrahim 
était également issu d’une famille modeste. D’après l’imam Ali , Daoud  achetait du
pain en vendant ses confections de paille. Le Prophète Muhammad  dit : « Nul n’est
prophète sans être berger, j'ai gardé les moutons de Quoraïch dans les champs de
tamarinier. » (Note de l'auteur)

18
31 - A l’instar des sociétés bédouines et des sociétés civilisées, il existe les sociétés
historiques telles que la société romaine, la société musulmane, l’Inde ou notre société
actuelle. (Note de l'auteur)
32 - Le récit de Quaroun est narré dans la Sourate 28 Al Qasas Verset 76 « Quaroun
[Coré] appartenait au peuple de Moïse, mais il était empli de violence envers lui.
Nous lui avions donné des trésors dont les seules clés étaient lourdes à une troupe
d'hommes robustes. » Verset 78 : Quaroun [Coré] dit : « Je ne dois ce qui m'a été
donné qu'à la science que je possède. » Ne
savait-il pas que Dieu avait fait périr avant lui des générations plus redoutables
que lui par la force et plus importantes en nombre ? Les coupables ne seront pas
interrogés sur leurs péchés. » (Trad. Denise Masson). (NdT)
33 - Célèbre devin envoyé par Balak, roi de Moab, pour maudire les Israélites qui,
après avoir traversé le désert, traversaient ses territoires vers le pays de Canaan. Il
accepta de parler avec les chefs de Moab qui voulaient maudire Banu Israël, moyennant
de l’argent. Cela fait de lui un mercenaire. Plus tard, Balaam sera exécuté avec les rois
de Madian. Il était devenu un traître. (NdT)
34 - Souvent traduit, à tort, par guerre sainte le « jihâd » signifie littéralement « faire un
effort intense », « s’appliquer », « lutter » dans la voie de la justice et de la vérité. Il est
inhérent à l’Islam. « C’est l’appel (du’â’ ) de la religion véritable (dîn haqq) ».
Définition d’Al Jurjani, tirée de son oeuvre « Le livre des définitions », éditions
Albouraq. Au retour d’une de ses expéditions, le Prophète r dit à ses compagnons : «
Nous voici revenus du jihâd mineur pour nous livrer au jihâd majeur » ; à ceux qui lui
demandèrent ce qu’est le jihâd majeur, il répondit : « la lutte de l’homme contre ses
passions ». (NdT)
35 - Mes affirmations ne sont pas de l’ordre du racisme ou de l’ignorance, j’ai passé de
longues années à étudier les religions. Je me suis spécialisé dans la « Sociologie de la
religion ». Mon âme (non pas ma foi) a souffert des religions indiennes. Je suis
enthousiaste face aux étranges et belles idées bouddhistes et chinoises. Cependant,
j’aurais espéré du fond du coeur que leurs textes détiennent la vérité mais
malheureusement ce n’est pas le cas. (Note de l'auteur)
36 - Nous faisons référence à l’histoire de Qaroun et Moussa  et surtout au verset du
Coran « Ils n’entreront pas au Paradis aussi longtemps qu’un chameau ne
pénétrera pas dans le trou de l’aiguille » (Sourate 7 Al-A’râf, Verset 40). L’entrée
des riches au Paradis sera révoquée aussi longtemps que les ancres des navires
pénètreront dans les terres. Le Coran nous rapporte les propos de Chouaib  aux
hommes de l'opulence : « Vous laissera-t-on toujours jouir en sécurité de ce que
vous possédez ici ? » Sourate 26 Al Chou'ara', verset 146. La lutte des classes est
mise en évidence dans ces religions. (NdT)
37 - Le Saint Coran, Sourate Al-Kahf (La Caverne, versets 61 à 82). Voir aussi "les
Récits du Glorieux Coran", Muhammad Diakho, éditions Albouraq. (NdT)
38 - Nonnos est un poète grec né à Panopolis, en Égypte Ve siècle de l'ère chrétienne. Il
fait partie d'une vague d'auteurs égyptiens amateurs de poésie grecque, Il est l'auteur
des Dionysiaques un recueil épique en deux groupes de 24 chants sur les légendes liées
à Dionysos. Il se convertit au christianisme et rédige ensuite une paraphrase de
l'Évangile selon Jean en hexamètres dactyliques.
39 - Agnostos Theos (« le dieu inconnu ») était une divinité adorée par les grecs

19
anciens, en supplément des douze dieux principaux et d'innombrables divinités
mineures. (NdT)
40 - Il ne fait aucun doute que le châtiment, comme le Coran le mentionne, est une
question de survie. Comment peut-on assurer la survie de la société sans châtiment ?
En revanche, le Coran privilégie le pardon, un moyen d’éviter l’effusion de sang. (Note
de l'auteur)
41 - Le totémisme est une organisation clanique ou tribale fondée sur le principe du
totem. Le totem est une espèce naturelle (un animal ou un végétal, parfois un
phénomène naturel), présenté comme un ancêtre mythique ou un parent lointain de son
groupe social. En religion : le totem est présenté comme le fondement des institutions,
un modèle de comportement, une exigence d'organisation.
42 - Le Tao est un terme de philosophie chinoise signifiant : « la voie », « le chemin ».
Le tao est la notion maîtresse de l'oeuvre dans le taoïsme, philosophie et voie spirituelle
chinoise. Cette notion représente la force fondamentale qui coule en toutes choses dans
l’univers, vivantes ou inertes. Il est représenté par le tàijítú, symbole représentant
l’unité au-delà du dualisme yin-yang soit respectivement l'entropie positive et négative.
(NdT)
43 - « Maître Lao » ou « Vieux Maître » est un sage chinois dont la tradition fait un
contemporain de Confucius, considéré a postériori comme l’ancêtre du taoïsme.
44 - Le concept de Li occupe une place importante dans la philosophie confucianiste et
post-confucianiste. Le confucianisme est l'une des plus grandes écoles philosophiques,
morales, politiques et dans une moindre mesure religieuses de Chine.
45 - Raja est le titre porté par les chefs hindous qui règnent sur un territoire. (NdT)
46 - Paul de Tarse ou Saint Paul est l'une des figures principales du christianisme pour
les catholiques, par le rôle qu'il a joué dans son expansion initiale et par son
interprétation de l'enseignement de Jésus. (NdT)
47 - Gaud d'Évreux ou Saint Gaud aurait été évêque d'Évreux de 440 à 480. Il est
vénéré comme thaumaturge. (NdT)
48 - Saint Acace d'Antioche, évêque d'Antioche, il fut arrêté pendant la persécution de
l'empereur Dèce. (NdT)
49 - Augustin d’Hippone ou saint Augustin, était un philosophe et théologien chrétien
de l’Antiquité tardive, évêque d’Hippone, et un écrivain berbère. (NdT)
50 - Alaeddin Keykubad ou Kay Qubadh Ier est un sultan seldjoukide de Rum. (NdT)
51 - Les Seldjoukides sont les membres d'une tribu turque qui a émigré du Turkestan
vers le Proche-Orient avant de régner sur les actuels Iran et Irak ainsi que sur l'Asie
Mineure entre le milieu du XIe siècle et la fin du XIIIe siècle. (NdT)
52 - Salah Ad-Din Al-Ayyubi est le premier dirigeant de la dynastie ayyoubide, qui a
régné en Égypte de 1169 à1250 et en Syrie de 1174 à 1260. Il est connu pour avoir été
le principal adversaire des Francs installés durant le dernier tiers du XIIe siècle et
l’artisan de la reconquête de Jérusalem par les musulmans en 1187. (NdT)
53 - Dans la mythologie romaine, Janus est un dieu à une tête mais deux visages
opposés (Le futur et le passé). (NdT)
54 - Les versets 22 à 24 de la Sourate 59 al-Hashr du Saint Coran exposent les noms et
attributs divins « C'est Lui Dieu en dehors de qui il n'y a point de divinité ; Il est le
Connaisseur du monde visible et du monde invisible ; Il est le Clément, le
Miséricordieux. Il est Dieu en dehors de qui il n' y a point de divinité; Il est le

20
Souverain, le Saint, le Pacifique, le Protecteur, l'Arbitre Suprême, le Puissant,
l'Irrésistible, le Superbe. Gloire à Lui Dieu! Il est bien au dessus de tout ce qu'on
peut Lui associer ! C'est Lui Dieu le Créateur, le Novateur, le Formateur. A lui
appartiennent les attributs les plus beaux. Tout ce qui est dans les Cieux et sur la
Terre célèbre Sa gloire. Il est le Tout-Puissant, le Sage. » Traduction Mohammed
Chiadmi,
55 - Fils de Abou Jahl qui fut le principal partisan du polythéisme et un grand tyran. Il
défendit l’autorité de son père en s’opposant au Messager de Dieu . Le caractère
autoritaire de Makram, son animosité envers le Prophète  et sa violence à l’égard des
premiers musulmans, lui firent gagner davantage l’admiration de son père. (NdT)
56 - Safwan ibn Oumaya, un des leaders de la Mecque, était un grand ennemi de
Muhammad  et de l’Islam.
57 - Les Upanishads (littéralement « venir s'asseoir respectueusement au pied du maître
pour écouter son enseignement ») sont une partie des textes liés à la Shurti. Ils
consistent en des spéculations philosophiques qui éclairent le texte auquel elles se
réfèrent, chacune se réclamant d'une partie du Veda (connaissance révélée) transmise
oralement de brahmane à brahmane au sein du védisme, du brahmanisme, et de
l'hindouisme jusqu'à nos jours. Cette connaissance, aujourd'hui rassemblée en un
ensemble de textes, aurait été révélée (par l'audition, Shruti) aux sages indiens nommés
Rishi. Les hindous pensent que le Véda est éternel et singulier.
58 - Napoléon est l’une des personnalités militaires qui ont fortement marqué l’histoire
universelle. Connu pour sa gentillesse et son élégance, il était également un militaire
redoutable. La lettre qu'il adresse du front à sa bien-aimée Joséphine est un témoignage
de ses plus beaux écrits. « Ecris-moi tu ne m’aimes plus comme avant, j’abandonnerai
ainsi cette guerre qui me préoccupe tant et je laisserai l’armée française divisée et
vaincue. » (NdT)
59 - Dits du Prophète Muhammad . (NdT)
60 - Yathreb fut appelée Médine lorsque le Prophète s'y installa. (NdT)
61 - L’auteur fait référence à Chamseddine Tabrizi, un mystique iranien né à Tabriz en
Azerbaïdjan iranien. Il entreprit l'initiation de Jalal Eddine Rumi qui l’a immortalisé
par le recueil de poèmes intitulé Diwan Shams Tabrizi ("Les travaux de Shams de
Tabriz"). (NdT)
62 - Francis Bacon (1561-1626), homme d'État et philosophe anglais est un des
pionniers de la pensée scientifique moderne. (NdT)
63 - Abu Abd Allah al-Husayn Mansour al-Hallaj était un poète et philosophe perse.
Hallaj est sans doute l'un des plus célèbres mystiques de tous les temps pour le monde
islamique. (NdT)
64 - Blaise Pascal (1623 - 1662) est un mathématicien, physicien, philosophe, moraliste
et théologien français. (NdT)
65 - Adorateurs la nuit et soldats le jour. (NdT)
66 - Frantz Fanon (1925 – 1961) est l'un des fondateurs du courant de pensée tiers-
mondiste. Penseur très engagé, il a cherché à analyser les conséquences psychologiques
de la colonisation à la fois sur le colon et le sur le colonisé. (NdT)
67 - Frantz Fanon, « Les damnés de la terre », (NdT)

21
Jugurtha Bibliothèque en ligne

Ce site internet permet la diffusion gratuite de livres traitants de divers sujets comme
l'histoire, la politique, les sciences, les religions, etc… Cette bibliothèque propose de
rendre accessible à tou-te-s, un certain nombre de références bibliographiques
souvent peu connues du grand public et/ou simplement difficiles d'accès en France.
Nous ne partageons pas forcément les idées de tous les auteurs publiés, mais ces
ouvrages peuvent servir à alimenter nos réflexions et ainsi, réfléchir sur les différents
mécanismes de domination. Cette liste n'a pas la prétention d'être exhaustive, mais
elle s'intéresse à l'histoire des différentes luttes menées par les opprimé.es à travers le
monde et notamment au processus de décolonisation avec ses différents courants de
pensée, celles et ceux qui l'ont incarné.es, encouragé.es, diffusé.es… Ce site permet
également de faire connaitre ou redécouvrir des auteurs, des poètes, des philosophes
ou même des idées, qui ont traversé notre histoire, mais qui se sont souvent arrêtés
aux portes de l'occident et de son universalisme blanc. Si vous êtes à la recherche
d'un ouvrage, nous pouvons tenté de le trouver et de le mettre a votre disposition au
format numérique. Ce site est participatif et tout le monde peut aider à diffuser ce
savoir.

jugurtha.noblogs.org

22
Il est important de considérer
Muhammad, sceau des prophètes, sous un
autre angle. Ses qualités doivent faire
l'objet d'analyses psychologique, sociale et
historique afin de mieux connaître sa
personnalité. Muhammad doit être
considéré comme un personnage
extraordinairement remarquable, un
empereur, un sage, un prophète. Il en va
de même pour les prophètes d'Orient dont
il fait partie. Il faut découvrir Muhammad
avec un nouveau regard tel un miracle
indescriptible, un rêve inoubliable, un
homme irremplaçable.

Prix libre !

23

Vous aimerez peut-être aussi