Cours de GPPC L2S4 2023
Cours de GPPC L2S4 2023
Cours de GPPC L2S4 2023
Le présent cours vise à initier les étudiants à l’analyse d’enjeux politiques faisant l’objet de
politiques publiques instituées. Ainsi, il permet de comprendre les analyses médiatiques des
problèmes contemporains, d’avoir une meilleure connaissance du champ politique et les enjeux
politiques actuels.
Au terme du cours, l'étudiant sera capable d’identifier, analyser et tirer profit grands problèmes
politiques contemporains. La finalité est qu’il puisse un jour y faire face et surtout tirer profit
des opportunités présentes.
Méthode d’enseignement : CM
Références bibliographiques
1
droit, Paris, CNRS Éditions, 2010, recensé par Perrine Simon--‐Nahum sur
http://www.laviedesidees.fr/Le-terrorisme-de Robespierre-a-Al.html
- Gilles Ferragu, Histoire du terrorisme, Paris, Perrin, 2014. Résumé de son projet dans
http://www.histoire.presse.fr/actualite/infos/terrorisme-definitions-09-01-2015-1
- Patrice Gueniffey, « Généalogie du terrorisme contemporain », Le Débat, 2003/4
(n°126), p. 157-173, réflexion actualisée dans « Le terrorisme est efficace en
proportion de la peur qu’il provoque » Le Figaro, 10-11 janvier 2015.
Documents :
- Gérard-François Dumont « Les migrations internationales et l’Afrique : des logiques
Sud-Nord ou Sud-Sud ? », les analyses de Populations et avenir, mar 2019
téléchargeable sur https://www.population-et-avenir.com/les-analyses-de-population-
avenir/
- Office of the Coordinator for Counterterrorism, Patterns of Global Terrorism 2002, US
Department of State Publication 11038, Washington DC, Avril 2003, page 13.
Consultable en ligne à : http://www.state.gov
- TerrorismAct 2000. Consultable en ligne à : http://www.homeoffice.gov.uk
- Code pénal du 10 septembre 1995, le titre II. Consultable en ligne à :
http://www.legifrance.gouv.fr
- CRETTIEZ Xavier (dir.), Le Terrorisme : violence et politique, no : 859, Paris, La
Documentation française, 2001, p.3.
- LAQUER Walter, The Terrorism Reader: A HistoricalAnthology, New York, Meridian,
1978, p.262.
- Union Européenne (2016) recueil des normes internationales pour les élections,
document élaboré dans le cadre des missions d’observations électorales.
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INTRODUCTION :
Grand : il s’agit d’une certaine ampleur des problèmes : les petits problèmes peuvent devenir
grands. Le problème majeur d’aujourd’hui peut ne pas l’être demain. Cependant, certains sujets
ou thématiques de recherche conservent leur pertinence et deviennent ce que l’on qualifie de
grands problèmes politiques contemporains.
D’après le dictionnaire Larousse, un problème est le point sur lequel on s’interroge. La question
qui prête à discussion. Dans le domaine des sciences sociales en général, le problème serait un
fait suscitant des interrogations auxquelles l’on apporte des réponses scientifiquement
élaborées. Un problème politique est défini à partir de quatre (4) critères cumulatifs qui sont la
magnitude et la visibilité (critère quantitatif), la reconnaissance publique, la politisation (critère
qualitatif) et la contemporanéité.
La magnitude et la visibilité (un critère quantitatif) suppose l’implication d’un grand nombre
d’individus surtout d’acteurs incontournables. Ce qui peut conduire à des dégâts énormes
perceptibles à une grande échelle. A tire d’exemple nous pouvons citer le trafic d’êtres humains
le terrorisme.
Le critère qualitatif concerne la qualité, la nature des choses et non la quantité, l’aspect non
mesurable. Il suffit de connaitre les limites des conditions des phénomènes et le sens dans lequel
ils peuvent varier. Pouvons-nous transformer le temps psychologique qui est qualitatif en un
temps quantitatif.
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La contemporanéité est le caractère de ce qui est contemporain. Elle fait référence à l’état actuel
du problème au moment du contexte. Le problème existe à la même époque où l’on le traite.
Les acteurs des relations internationales font face à plusieurs problèmes. Pour des raisons
académiques, nous n’abordons que les plus importants dans le cadre de ce cours.
Deux concepts méritent d’être élucidés : la notion d’armes nucléaire (A) et la notion de menace
nucléaire (B).
Une arme nucléaire est une arme non conventionnelle qui utilise l'énergie dégagée par la fission
de noyaux atomiques lourds (uranium, plutonium dans le cas des bombes A), ou par une
combinaison de ce phénomène avec celui de la fusion de noyaux atomiques légers (hydrogène
dans le cas des bombes H). L'énergie libérée par l'explosion s'exprime par son équivalent en
TNT. Elle est l’arme la plus puissante jamais inventée par l’homme. Les deux seules bombes
atomiques utilisées dans l’histoire de l’humanité représentent 14 000 à 20 000 tonnes de TNT
soit 14 et 20 kilotonnes.
B- la menace nucléaire ?
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La maîtrise de l’arme atomique par les États-Unis en 1945, puis par l’URSS en 1949, place le
monde sous la menace permanente d’un conflit destructeur. Chacun des deux pays possède la
capacité d’anéantir son adversaire, de le rayer de la carte mondiale. La période de la guerre
froide est marquée par une féroce course aux armements.
La tension nucléaire atteint son point culminant en octobre 1962, lors de la crise des missiles
de Cuba.
• L'équilibre de la terreur
Les cinq (5) membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU (États-Unis, URSS,
Royaume-Uni, France, Chine) et quatre (4) autres États détiennent des armes nucléaires. En
1967, les États-Unis disposaient de quelques 32 000 têtes nucléaires. Un seul B-52 peut
emporter une bombe de 25 mégatonnes soit douze fois la puissance des deux bombes lancées
lors de la seconde guerre mondiale. Le tableau ci-dessous donne un aperçu assez clair de la
détention d’armes nucléaires dans le monde.
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Les 9 États détenteurs de l’armes nucléaires :
Russie 11 000
France 300
Chine 200
Israël 100
Inde 100
Pakistan 100
Corée du Nord 7
------------------------------------- ------------------------
Total 20 500
Nous remarquons non seulement que les premiers détenteurs continuent de renforcer leur
capacité d’influence mais aussi l’apparition d’autres puissances nucléaires. En plus, d’autres
États (Iran, Afrique du sud) affichent la volonté d’en posséder. Il faut donc relativiser les
résultats du TNP. Par ailleurs le refus des puissances nucléaires d’adhérer au traité symbolique
d’interdiction d’armes nucléaire en dit long.
Il faut dès lors comprendre les préoccupations américaines et israéliennes lorsqu’ils tentent par
tous les moyens à empêcher l’Iran d’en posséder.
L’on assiste ainsi à une course à la modernisation des armes nucléaires visant à les adapter au
contexte de lutte anti-terroriste ou de développement des nouvelles technologies. Les menaces
ont changé et les stratégies de défense doivent s’adapter. Par exemple, pour les américains, l’un
des enjeux de cette modernisation consiste à frapper les terroristes enfouis dans les montagnes.
Les principaux détenteurs d’armes n’ont cessé d’augmenter leur arsenal nucléaire pour atteindre
des milliers depuis 1945.
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B- Les risques liés à l’accès / détention et à l’utilisation
Avec la multi polarisation du monde, l’on assiste à une dégradation des équilibres
géostratégiques. Ce qui conduit :
• au risque d’escalade aboutissant à une frappe nucléaire coréenne ciblant des intérêts
américains, dont les bases américaines en Asie.
Pour éviter que tout le monde n’ait accès aux armes nucléaires, les États ont signé en 1968 le
traité de non-prolifération. Il est entré vigueur en 1970. Le traité de non-prolifération nucléaire
(TNP) repose sur la distinction entre les États dits dotés de l’arme nucléaire, ayant effectué un
essai nucléaire avant le 1er janvier 1967, et les autres États, dits non dotés : les puissances
nucléaires s’engagent à ne pas aider un autre pays à acquérir des armes nucléaires ; tandis que
les États ne possédant pas d’armes nucléaires s’engagent à ne pas développer d’armes
nucléaires.
Malgré le TNP, quatre États se sont dotés officieusement de l’arme nucléaire (le Pakistan,
l’Inde, Israël, non-signataires du traité, et la Corée du Nord, retirée du TNP en 2003). Ces
puissances continuent de produire des bombes en mégatonnes c’est-à-dire l’équivalent d’un
million de tonne TNT. Une bombe de ce genre qui tomberait dans une ville détruirait tous les
immeubles se trouvent dans un rayon de 5 kilomètre. Une ville comme Paris serait rayée de la
carte. Par extension, toutes les villes du monde peuvent être détruites par quelques Bombes
selon Bernard Brodie et qu’il n’existe aucun moyen de défense efficace
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3-Les conséquences de l’utilisation de l’arme nucléaire
Avec les modernisations en cours, l’on est en droit de se demander s’il existe un seul pays au
monde capable de se protéger. Il est difficile d’imaginer son utilisation mais au cas cela se
produirait, les effets à court, moyen et long termes sont incalculables. Attlele en écrivant au
président Truman à la sortie de la 2ème guerre mondiale disait « Si l’humanité continue de
fabriquer des bombes atomiques sans modifier la nature des relations politiques entre États, ces
bombes seront utilisées pour une commune destruction ». Il est difficile d’imaginer une guerre
nucléaire entre puissances occidentales. Le risque est aujourd’hui lié à leur utilisation par
certains États ou groupes terroristes. Pierre SANARCMENS souligne qu’une guerre atomique
annihilerait de vaste pans de civilisation, et qu’elle aurait des conséquences humaines et
écologiques effroyables.
Qu’est-ce-que le terrorisme ?
C’est ainsi que, chaque Etat a élaboré une définition du terrorisme pour pouvoir le combattre
par la loi.
Dans cette perspective, la loi américaine définit le terrorisme comme « la violence préméditée,
à motivations politiques, exercée contre des cibles non combattantes par des groupes
subnationaux ou des agents clandestins, dont le but est généralement d’influencer une
opinion »
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Dans la loi britannique, la menace signifie « la pratique ou la menace d’une action qui a
pour but d’influencer le gouvernement ou d’intimider le public ou une partie de celui-ci,
afin de promouvoir une cause idéologique, religieuse ou politique ».
Quant à la loi française, elle le définit comme « des actes intentionnellement en relation avec
une entreprise, ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou
la terreur, les atteintes volontaires à la vie, à l’intégrité de la personne, l’enlèvement ou la
séquestration ainsi que le détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de
transport ».
Pourquoi le terrorisme est-il si difficile à définir ? Parce que le terrorisme est d’abord « un
phénomène contemporain et le fruit de la modernité technologique et médiatique pour les uns,
arme de faibles pour les autres ».
Le terme de « terrorisme » peut prêter à confusion car le « isme » semble indiquer qu’il s’agit
d’une doctrine ou d’une idéologie. Or, pour Bauer, « le terrorisme n’est pas une doctrine mais
une méthode fondée sur l’usage de la terreur ». Si les Etats constituant l’ONU n’arrivent pas à
le définir, c’est essentiellement parce que :
Les Etats ont pu avoir recours aux méthodes terroristes dans leurs affrontements directement
ou en soutenant des mouvements terroristes. On peut citer par exemple pour le cas, les USA
au Japon, l’Allemagne en Europe, la France en Algérie, l’Arménie en Azerbaïdjan, la Turquie
en Arménie et pour le second cas, Les USA en Syrie, l’Arabie Saoudite et l’Iran en Syrie, la
Turquie en Syrie et en Lybie, la France Au Mali, etc.
Certains gouvernements sont issus de mouvements qui ont pratiqué le terrorisme. Par exemple,
le Liban, le Yémen, la Lybie, etc.
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Etats peuvent lutter contre le terrorisme parce qu’ils s’interdisent d’y recourir. C’est ainsi que
la société des Nations a proposé en 1937 une « une convention pour la prévention et la
répression du terrorisme ».
La mise en avant du fait que le terrorisme est une méthode et non une idéologie permet une
approche la plus neutre possible du phénomène, et permet de remonter dans l’histoire du
terrorisme : attentats contre des personnes, enlèvement, sabotage des bâtiments publics ou des
infrastructures (auquel il faut ajouter depuis le début du XXIe siècle le «cyberterrorisme»).
Le mot « terrorisme » est d’abord apparu en français pour être traduit dans d’autres langues. Il
est attesté en 1794, alors que le mot « terreur » dans son sens politique est apparu dès 1789 sous
la plume de Marat. Pour les révolutionnaires les plus radicaux, la « terreur » inspirée par les
émeutes populaires ou par la répression doit frapper les ennemis de la révolution, puis les
révolutionnaires plus modérés qu’eux-mêmes. Les premiers à être qualifiés de « terroristes »
sont les partisans de la Terreur révolutionnaire.
La peur est désormais au cœur d’une stratégie politique. L’historien Patrice Gueniffey propose
ainsi une définition générale du terrorisme : comme « une stratégie mettant en œuvre une
quantité de violence à l’intensité variable, dans le but de provoquer le degré de terreur jugé
nécessaire à l’accomplissement d’objectifs dont le terroriste estime qu’il ne peut les atteindre
par d’autres moyens ».
Tuer le dirigeant d’un pays est une pratique ancienne. Le « tyrannicide » est pratiqué dans
l’Europe moderne déchirée par les guerres de religion. Napoléon, Louis-Philippe, Napoléon III
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sont la cible d’attentats. Cet enracinement de la violence politique a conduit le géostratège
Gérard Chaliand et le politologue Arnaud Blin à diriger une histoire du terrorisme qui va de
l’Antiquité à Al Qaïda (Histoire du Terrorisme, de l’Antiquité à Al Qaïda, Paris,). Mais ces auteurs eux-mêmes
reconnaissent une rupture qui aboutit à la mise en place d’un « terrorisme moderne » aux
XIXe et XXe siècles.
Pour Gilles Ferragu, c’est dans la Russie des années 1870 que surgissent des groupes organisés,
munis d’un discours politique cohérent, et pour qui l’attentat est le moyen d’amener par la
révolution un changement politique global. L’abolition du servage par Alexandre II, en 1861,
n’a pas réglé les problèmes de la paysannerie, et le mouvement populiste développe le projet
d’une révolution qui s’appuierait sur les masses rurales. De leur échec et de l’influence de
l’anarchisme, naissent des groupes qui donnent la priorité à la destruction de l’Etat russe,
puisque les campagnes restent inertes. Après les tentatives de 1866 et 1879, Alexandre II est
assassiné le 1er mars 1881.
Le mot « terrorisme » a dépassé ses origines françaises pour trouver en Russie un sens nouveau,
désignant les attentats politiques accomplis par des groupes organisés. L’invention de la
dynamite, en 1867, donne à ces derniers une efficacité redoutable. Cette conception de l’attentat
susceptible de déclencher une révolution à la fois politique et sociale gagne toute l’Europe, et
prend dans la mouvance anarchiste le nom de « propagande par le fait » (Jean-Noël Jeanneney «
Le terrorisme révolutionnaire lié à l’idée d’une révolution sociale a connu une longue postérité,
avec un renouveau dans les années 1970 et jusqu’aux années 1980 en République Fédérale
d’Allemagne, en Italie, et dans une moindre mesure en France avec Action Directe.
Mais on peut certainement classer le terrorisme islamiste dans cette rubrique du terrorisme
révolutionnaire. La fondation des Frères musulmans par Al-Banna dans le monde
sunnite, la révolution iranienne de l’Ayatollah Khomeiny (1979) dans le monde chiite ont été
des moments décisifs de la formulation d’un projet politique présentant le retour à une
organisation purement islamique de la société comme le remède au déclin de régions
dominées par l’Occident. Ce projet politique radical peut employer différentes stratégies
(présentation aux élections, implantation dans la société…) mais une aile peut choisir d’utiliser
la stratégie terroriste. La traduction et l’étude de la Charte du Hezbollah libanais par
Dominique Avon et Anaïs-Trissa Khatchadourian montre à quel point l’héritage anti-
impérialiste et révolutionnaire est fort dans l’idéologie de ce mouvement. Gilles Kepel affirme
dans son ouvrage consacré à Al-Qaida que Le réseau terroriste Al-Qaida, célèbre depuis le 11
11
septembre 200, (Al-Qaida dans le texte, Paris, PUF-Quadrige, 2008, recension de la première édition de 2005) développe lui
aussi une doctrine révolutionnaire et anti-impérialiste.
Il surgit très tôt. L’assassinat du journaliste Kotzebue par le jeune étudiant bavarois Karl Sand,
le 23 mars 1819, en relève : c’est parce que ce publiciste défendait l’influence russe qu’il
apparaît aux yeux du jeune étudiant favorable à l’union de l’Allemagne qu’il doit payer. Les
nationalistes italiens s’organisent en sociétés secrètes, comme la Giovine Italia (« Jeune Italie
») de Mazzini qui fomentent des insurrections, et l’attentat d’Orsini contre Napoléon III, le 14
janvier 1858, répond bien à cette logique. Partout où des sentiments nationaux ne sont pas
reconnus, le terrorisme peut apparaître à certains comme une solution.
Vichy et l’occupant ne désigneront jamais les résistants autrement que comme des « terroristes
». Par la suite, la Résistance devient un modèle invoqué par tous les mouvements nationalistes
ayant une stratégie terroriste. Et ce en particulier dans le cas des luttes anticoloniales. La guerre
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d’Algérie, par exemple, commence par la célèbre vague d’attentats de la Toussaint Rouge. Le
terrorisme lié à la question palestinienne peut bien sûr être rattaché à ce terrorisme lié à des
questions nationales. L’écheveau est d’autant plus complexe à démêler qu’il y a eu un
terrorisme sioniste se tournant vers l’Angleterre, qui joua un rôle non pas exclusif, mais
important dans la naissance de l’Etat d’Israël (Charles Enderlin, Par le feu et par le sang : le combat clandestin pour
La terreur est bien sûr au cœur des régimes totalitaires. Ceux-ci répondent à la définition des
régimes despotiques donnée par Montesquieu, dont le « principe » est la crainte qu’ils inspirent.
Cela permet de resituer la montée du terrorisme au XXe siècle dans une montée générale de la
violence politique, mais aussi de rendre compte de certains terrorismes spécifiques, par exemple
le terrorisme de l’opération Némésis (du nom de la déesse grecque de la juste colère et de
rétribution) qui vise, à partir de 1919 et au début des années 1920, à exécuter les responsables
turcs du génocide arménien de 1915-1916. La situation de guerre ou d’occupation accroît bien
sûr cette pression. La terreur accrue trouve alors une légitimation dans le terrorisme de
résistance, comme dans le cas de la France occupée lors de la Seconde Guerre mondiale. Mais
selon Gilles Ferragu, certains Etats démocratiques ont parfois décidé de fermer les yeux sur un
terrorisme d’extrême droite pour lutter contre un terrorisme d’extrême gauche : c’est le cas du
gouvernement italien au début des années 1970 (Gilles Ferragu, p.102). Différents mouvements
terroristes peuvent aussi être financés ou aidés par des Etats pour en déstabiliser d’autres. Les
services secrets serbes sont compromis dans l’attentat de Sarajevo, quand bien même il ne
semble pas que le gouvernement ait commandité l’opération ; mais la Stasi est-allemande est
soupçonnée d’avoir financé la Fraction Armée Rouge (dit « bande à Baader ») qui opère en
RFA au début des années 1970.
4. La lutte antiterroriste
Le terrorisme vise à déstabiliser des Etats qui oscillent entre plusieurs types de réponse. La
Russie tsariste a vu se mettre en place le cycle attentat-répression qui est intégré à la stratégie
du terrorisme. Les Etats qui s’appuient sur la terreur utilisent les attentats pour justifier
l’aggravation de celle-ci. En URSS, l’exécution de Sergueï Kirov, membre du Politburo, le 1er
décembre 1934, par Leonid Vassilievitch Nikolaev, permet à Staline de se débarrasser de ses
rivaux Zinoviev et Kamenev, et de lancer tous les procès qui frappent les vieux bolcheviks à
partir de 1936. Pour les Etats démocratiques, l’affaire est plus complexe. Jusqu’où peut-on
adapter la législation pour combattre le terrorisme ? Quels sont les contours de la « guerre contre
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le terrorisme » ? Mais la lutte contre le terrorisme n’est pas qu’une affaire de répression, c’est
aussi une affaire de renseignement. On pourra suivre grâce au texte ci-joint l’exemple de l’évolution du renseignement
français face à ce nouveau défi : (renvoi au texte deTristan Lecoq qui sera dans la rubrique « défense », texte joint)
- la primauté du droit ; les règles régissant les conflits armés et la protection des civils ;
Le terrorisme a un impact direct sur l’exercice d’un certain nombre de droits de l’homme, en
particulier du droit à la vie, à la liberté et à l’intégrité physique. Les actes terroristes peuvent
déstabiliser les gouvernements, affaiblir la société civile, compromettre la paix et la sécurité,
menacer le développement social et économique, et avoir un effet particulièrement
préjudiciable pour certains groupes, toutes choses qui influent directement sur l’exercice des
droits fondamentaux de l’homme. Les effets destructeurs du terrorisme pour les droits de
l’homme et la sécurité ont été reconnus au plus haut niveau de l’Organisation des Nations-
Unies, notamment par le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, l’ex-Commission des droits
de l’homme et le nouveau Conseil des droits de l’homme.
• Menace la dignité et la sécurité des êtres humains partout, met en danger ou prend des vies
innocentes, crée un climat qui empêche les populations d’être libérées de la peur, compromet
les libertés fondamentales et vise à la destruction des droits de l’homme ;
• A un effet négatif sur l’instauration de l’état de droit, affaiblit la société civile pluraliste, vise
à détruire les bases démocratiques de la société, et déstabilise des gouvernements légitimement
constitués ;
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et biologiques et est aussi lié à des crimes graves tels qu’assassinats, chantages, enlèvements,
agressions, prises d’otages et vols, commis en conséquence ;
• A des conséquences négatives pour le développement économique et social des États, met à
mal les relations amicales entre les États, et a un effet pernicieux sur les liens de coopération
entre les États, y compris la coopération pour le développement ;
• et Menace l’intégrité territoriale et la sécurité des États, constitue une grave violation du but
et des principes des Nations Unies, est une menace pour la paix et la sécurité internationales, et
doit être éliminé comme une condition essentielle du maintien de la paix et de la sécurité
internationales.
AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique) est un avatar de la guerre civile algérienne des années
quatre-vingt-dix. Après l’interruption du processus électoral en 1992, les éléments les plus
radicaux du FIS (Front islamique du Salut) ont fondé les GIA (Groupes islamiques armés) qui
ont multiplié les attentats contre les forces armées algériennes et les civils, puis ont organisé
des massacres de civils de grande ampleur. Devant cette dérive mortifère qu’ils n’approuvaient
pas, des membres des GIA se sont regroupés pour lutter prioritairement contre le pouvoir
qualifié de taghût (tyran) et ont créé en 1998, sous la direction d’Hassan Hattab, le GSPC.
GSPC (Groupe salafiste pour la Prédication et le Combat), créé en 1998, sous la direction
d’Hassan Hattab. Le rapprochement avec Al-Qaïda se fit progressivement ; en 2004,
Abdelmalek Droukdel (juin 2020) remplaça Hassan Hattab et développa les liens avec Al-Qaïda
: en janvier 2007, le GSPC devint AQMI.
15
importantes (100 à 200 millions d’Euros) issues des rançons payées par certains pays pour la
libération de leurs otages et des divers trafics auxquels participe AQMI (drogue, cigarettes,
migrants...). Certaines estimations – non vérifiées – attribuent actuellement à AQMI de 3 à 4
000 membres organisés en six katîba(s). Mais un désaccord entre A. Droukdel et M. Belmokhtar
aurait abouti à la création, en novembre 2012, d’un nouveau mouvement, « les Signataires
avec du Sang ».
Boko Haram (ce qui signifie « l’éducation occidentale est un péché ») a été fondé par
Mohamed Yusuf en 2002. Il a pour but l’instauration de la sharîa dans tout le Nigéria. Se
réclamant du salafisme et des talibans afghan, Boko Haram est une secte faisant à l’occasion
appel à la magie. De 2004 à 2009, des heurts de plus en plus violents opposent les membres de
la secte aux forces de sécurité, principalement dans le Nord du Nigéria ; en juillet 2009, une
attaque particulièrement violente de Boko Haram, réprimée par la police et l’armée, entraine la
mort de plus d’un millier de personnes. Mohamed Yusuf, capturé par l’armée est exécuté par la
police. Sanni Umaru lui succède à la tête de la secte. En 2010/2011, Boko Haram multiplie les
attaques contre les chrétiens et les édifices gouvernementaux. En 2012, il aurait pris contact
avec AQMI et aurait envoyé une centaine de combattants au Nord-Mali.
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Le MNLA (Mouvement national de Libération de l’Azawad), formé par la réunion, en
octobre 2011, de deux mouvements touaregs, est une organisation politique et militaire laïque
qui revendique l’indépendance de l’Azawad (Nord-Mali). Conforté par l’arrivée de Touaregs
formés dans l’armée ou les milices libyennes et d’armes venant de Libye, suite à la chute de
Kadhafi, le MNLA se lance à la conquête du Nord-Mali en janvier 2012, mais il est rapidement
débordé par les mouvements islamistes qui l’expulsent des villes (Gao, Tombouctou, Kidal...)
en juin/juillet.
Enfin, il ne faut pas oublier que le terrorisme est, selon le mot de Patrice Gueniffey, une «
stratégie de la communication ».
La mobilisation de l’opinion n’est donc pas neutre : les grands rassemblements républicains
du11 janvier 2015 en France gardent toute leur importance, écho très amplifié des marches
espagnoles contre le terrorisme basque de l’ETA.
Bibliographie
1. Jean-David Gayraud, David Sénat, Le terrorisme, Paris, PUF, « Que sais-je », 2002.
2. Alain Bauer, Jean-Louis Bruguière, Les 100 mots du terrorisme, Paris, PUF, « Que sais-je », 2010.
Mireille Delmas-Marty et Henry Laurens (dir.), Terrorismes. Histoire et droit, Paris, CNRS Éditions,
2010, recensé par Perrine Simon-Nahum sur http://www.laviedesidees.fr/Le-terrorisme-de
Robespierre-a-Al.html
3. Gilles Ferragu, Histoire du terrorisme, Paris, Perrin, 2014. Résumé de son projet dans
http://www.histoire.presse.fr/actualite/infos/terrorisme-definitions-09-01-2015-128346
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4. Patrice Gueniffey, « Généalogie du terrorisme contemporain », Le Débat, 2003/4 (n°126), p.
157-173, réflexion actualisée dans « Le terrorisme est efficace en proportion de la peur qu’il
provoque » Le Figaro, 10-11 janvier 2015.
5. Tristan Lecoq « Les formes et la pratique du renseignement en France depuis les années
1990 : Structures, acteurs, enjeux » (références de la mise en ligne)
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