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CONTRETEMPS

REVUE DE CRITIQUE COMMUNISTE

Social-chauvinisme : de l’injure au concept

Félix Boggio Éwanjé-Épée et Stella Magliani-Belkacem 6


janvier 2014 Conjoncture, Théorie

Lire hors-ligne :

Une première version de cet article a été


présentée à l’occasion de la 10e édition du
colloque Historical Materialism (Londres) et a été
ensuite publiée en anglais sur le site Lenin’s
Tomb.

Nous aimerions en premier lieu remercier Lars


Lih, Paul Le Blanc et John Riddel pour leurs
précieux conseils et leurs références très utiles.
Toutefois, les propos et conclusions politiques
portés par cet article n’engagent que les
auteur•e•s.

Pour le meilleur comme pour le pire, aucun


agenda politique ne peut aujourd’hui faire
l’impasse sur la question raciale. L’essor de
l’extrême droite et de ses satellites suscite une
inquiétude légitime et nécessaire d’autant plus
que la droite classique – divisée et devancée par le
PS pour ce qui est de l’application de son
programme – lui a cédé une large place. Au sein
du gouvernement socialiste, les récentes
interventions militaires en Afrique et la marge de
manœuvre offerte à Manuel Valls ainsi qu’à l’objet
de sa politique ne laissent pas de doute sur la
« contre-révolution coloniale » qu’entend
perpétuer le bloc au pouvoir.1

À gauche de cette gauche, la question raciale joue


elle aussi un rôle certain. Si l’on se concentre
seulement sur les dix dernières années, 2014
marquera une décennie de « débats sur le voile ».
On sait aujourd’hui combien la LCR puis le NPA
ont eu maille à partir avec cette question et, plus
généralement, avec la place des descendant-e-s de
l’immigration et de leurs préoccupations.
Aujourd’hui encore, la coalition que constitue le
Front de gauche est au mieux embarrassée par ces
thématiques, au pire en vient à rompre avec
certaines traditions internationalistes et anti-
impérialistes.

Cette conjoncture nécessite peut-être d’examiner


cette centralité de la question raciale et ces
difficultés de la gauche radicale sans se borner à
dénoncer des contenus idéologiques définis
comme le « républicanisme », l’« universalisme »,
etc. Cette approche ne suffit pas en cela qu’elle
prend la conséquence (le républicanisme ou
l’universalisme problématique des gauches
radicales) pour la cause, ou n’envisage en tout cas
pas d’en faire la généalogie. Parler de
l’« universalisme » comme d’un état de fait
empêche d’approcher les incapacités de la gauche
radicale comme un produit de l’histoire : la
gauche marxiste, révolutionnaire, communiste,
n’a pas toujours été si embarrassée par le
colonialisme et le racisme. D’autre part, il reste
encore à démontrer qu’« universaliste » (ou
d’autres termes qui renvoient davantage à des
partis-pris philosophiques) est bien le qualificatif
adéquat pour identifier cette gauche et ses
« principes ».

C’est avec cette préoccupation en tête que nous


avons été interpellé-e-s par le terme récurrent
chez Lénine de « social-chauvinisme ». Cette
désignation nous permettait a priori de saisir des
traits de la gauche radicale française (déjà
évoqués et sur lesquels nous reviendrons). Il a
fallu se demander en quoi ce terme traçait des
continuités au sein du mouvement ouvrier et en
quoi il permettait d’indiquer où ces continuités
avaient pu s’interrompre – pour peut-être y puiser
de quoi nous sortir de l’embarras actuel.

I.

Comme nous le disions, « social-chauvinisme » est


un terme employé de façon récurrente par Lénine,
et ce dans plusieurs œuvres qui s’étalent du début
du ralliement des socialistes à la Grande guerre
jusqu’aux débuts de la IIIe Internationale 2.

« Social-chauvinisme » n’est pas une catégorie


politique à proprement parler dans le vocabulaire
du révolutionnaire russe. Malgré sa récurrence,
c’est un terme aux contours flous, presque rien de
plus qu’une injure. Si le terme « social-
chauvinisme » se référait largement au soutien
« géopolitique » accordé par le mouvement
ouvrier d’un pays donné à son propre État
impérialiste, on pourrait aujourd’hui le mobiliser
sur des questions plus directement nationales. En
essayant d’adapter le terme de « social-
chauvinisme », il faut rappeler que nous n’avons
pas la prétention de fournir un tableau exhaustif
des orientations possibles au sein de la gauche
française, et le « social-chauvinisme » n’est pas
non plus un critère de condamnation en bloc de
cette gauche. Ce concept a d’abord pour nous le
sens de décrire puis de comprendre les
orientations hégémoniques des appareils de la
gauche sociale et politique ; c’est un cadre
d’analyse pour expliquer l’histoire de pratiques et
d’idées véhiculées par les cadres, les intellectuels,
les porte-parole ou les candidats de forces sociales
et politiques qui, sans être consensuelles auprès
de l’ensemble des militants, ne sont pas non plus
des motifs de rupture de ces militants avec les
forces en question.

Pour nous, le social-chauvinisme se manifeste


d’abord par une attitude consistant à minimiser,
relativiser ou même accorder son soutien à
différentes expressions du racisme, au nom d’une
argumentation « à gauche de la gauche » : qu’il
s’agisse de la stigmatisation des foulards
islamiques3, de la minimisation de
« l’islamophobie4 », du rejet des émeutiers des
quartiers populaires d’Amiens5, voire même de la
guerre contre la drogue élevée à l’échelle locale au
rang d’argument électoral6, ces différents
positionnements reflètent des appréhensions
problématiques de la question raciale en France.
Ces positionnements sont pour nous, à titre
d’hypothèse de travail, le corrélat d’un rapport
particulier de cette gauche française à l’État.
Le terme « social-chauvinisme » est en effet là
pour évoquer la subordination de tout un pan des
programmes et des mouvements à gauche de la
gauche à une certaine « Idée » de la France et de
ses institutions. Le social-chauvinisme est une
configuration organisationnelle qui fait primer
une (et une seule) tradition française du
mouvement ouvrier avec ses priorités
hégémoniques, un imaginaire politique restreint à
l’activisme des couches blanches du prolétariat
français et souvent hostile à l’expression politique
des non-Blancs – en dehors d’un rapport muséifié
à la mémoire « anticoloniale » quand elle existe.

On doit en outre mentionner que le social-


chauvinisme est aussi marqué par un anti-
impérialisme relativement lacunaire : davantage
anti-OTAN qu’anti-impérialiste, la plupart des
composantes du Front de gauche est vacillante à
propos des interventions impérialistes de l’État
français. Au sujet du Mali, une grande partie de
ses députés a voté pour l’intervention française7,
tandis que le Parti de gauche soutient
l’intervention militaire en Centrafrique au motif
que celle-ci bénéficie d’un soutien des Nations
unies. Le rédacteur du communiqué rappelle
d’ailleurs que « tant que le nucléaire restera la
première source de production d’électricité dans
notre pays, la France devra contrôler des
gouvernements qui détiennent la clé des mines
africaines8 » – autrement dit, la fin de la
Françafrique est, pour le Parti de gauche,
subordonnée à la transition énergétique en France
et non à la souveraineté et l’auto-détermination
des peuples africains.

Ainsi, le social-chauvinisme est le nom d’une


articulation politique hégémonique du
réformisme radical en France. Pour les marxistes
révolutionnaires, cette évolution ne peut manquer
d’être inquiétante et demande une analyse de
long terme attentive à la généalogie, mais aussi
aux fissures et aux contradictions de cette
« tradition » du mouvement ouvrier.

Pour expliciter encore le sens du qualificatif


« social-chauvin », on peut dire qu’il se réfère,
selon nous, à une conception très étroite et
franco-centrée des mouvements sociaux. Il s’agit
d’une caractéristique que l’on peut appeler
« internationalisme sur la forme, chauvinisme sur
le fond ». Aujourd’hui comme hier, les appels
oratoires aux « travailleurs du monde entier » se
confondent avec une fidélité à l’État français et
son prétendu « héritage ». L’appel de nombre de
courants de gauche radicale à la « République » est
indissociable d’une idée de l’État-nation comme
d’un appareil neutre, pouvant être manipulé à
volonté dans l’intérêt d’une classe ou d’une
autre9. La nation française comme « communauté
imaginée » (pour reprendre les termes de Benedict
Anderson) est dans ces discours associée à une
histoire populaire de la France « progressiste » qui
contraste avec une histoire de la France
réactionnaire (pétainiste, revancharde, belliciste
et cléricale). Cette dichotomie entre la « bonne
France » et la « mauvaise France » est au cœur de
la réappropriation de l’hymne national dans la
campagne de Jean-Luc Mélenchon et les marches
couronnées de succès qui visaient, pendant la
campagne présidentielle, à rejouer la prise de la
Bastille.

II.

L’analyse du social-chauvinisme nécessite dès lors


de prendre en compte des caractéristiques de long
terme de la social-démocratie et de la formation
politique des classes populaires françaises. Pour
poser les jalons d’une problématique autour du
« social-chauvinisme », il nous faut envisager la
Première guerre mondiale comme un point de
bascule de la structure sociale et raciale française.
Il s’agit d’un moment où la métropole recrute
plusieurs centaines de milliers de travailleurs et
de soldats chinois et coloniaux. Comme l’explique
Laurent Dornel, « la guerre fut l’occasion d’une
immigration massive réactivant une partie des
anciens flux mais en inaugurant d’autres. Surtout,
elle fut marquée par la mise en place de structures
administratives nouvelles qui
institutionnalisèrent et consacrèrent l’existence
de deux types de main-d’œuvre désormais
considérées comme radicalement distincts : d’un
côté la main-d’œuvre européenne ou « blanche »,
de l’autre les coloniaux auxquels étaient d’ailleurs
assimilés les Chinois10. » Ce changement dans la
structure sociale marque un tournant dans la prise
en compte par le mouvement ouvrier de la
métropole de l’agitation anticoloniale : il
s’agissait désormais d’une problématique
incontournable non seulement aux colonies, mais
aussi en métropole, aux côtés des travailleurs
immigrés. Cet élément implique aussi que la
chronologie de l’Union sacrée, du ralliement de la
social-démocratie à la Grande guerre, précède de
peu la racialisation de la force de travail
métropolitaine. On peut en inférer que les
coordonnées du débat sur le social-chauvinisme
est contemporain de – et fortement corrélé à – la
prise en compte des colonies par le mouvement
ouvrier en métropole comme au sein de l’Empire.

Quels sont les termes de la polémique qui


président à la dénonciation léninienne du social-
chauvinisme ? D’après Lars Lih, « la vision
politique et la stratégie de Lénine à partir de 1914
ont pour origine une définition de la situation
empruntée telle quelle aux écrits de Kautsky11 »
avant que celui-ci n’entame un tournant droitier.
Quelles étaient les hypothèses stratégiques de
Kautsky avant sa fameuse « renégation » ? Pour
Lars Lih, l’analyse de Kautsky dans les premières
années du xxe siècle s’appuyait sur l’hypothèse
d’une dialectique révolutionnaire mondiale : une
interdépendance entre l’agenda socialiste
révolutionnaire en Europe et les révolutions
politiques et anticoloniales dans les pays dits
« arriérés » ou dans les nations dominées. Cette
dialectique mondiale était rendue inévitable par
les rivalités impérialistes, les mouvements de
capitaux du Nord vers le Sud et l’aiguisement des
tensions qui allaient donner lieu à la Grande
guerre.

Le point de vue de Lénine était donc d’envisager


la crise de la social-démocratie comme le corrélât
de l’incapacité de cette dernière à réagir
correctement aux défis du scénario s’esquissant
dans les écrits de Kautsky d’avant 1914. Pour
Lénine, cette incapacité était explicable, elle était
le fruit d’une déviation réformiste (ou
« opportuniste ») du mouvement ouvrier
européen. Et cette déviation était la conséquence
d’une transformation sociologique que Lénine
analysait dans les termes suivants :

C’est cette mince couche supérieure


d’ouvriers corrompus par la
bourgeoisie que nous, les bolchéviks,
avons qualifiés […] d’« agents de la
bourgeoisie au sein du mouvement
ouvrier », et que les meilleurs parmi
les socialistes d’Amérique ont
baptisés d’une épithète excellente par
sa force d’expression et sa profonde
vérité : « labour lieutenants of the
capitalist class ». C’est le type
« moderne » de la trahison socialiste,
car dans tous les pays civilisés,
avancés, la bourgeoisie pille, – en
exerçant l’oppression coloniale ou en
soutirant des « avantages » financiers
aux peuples faibles, formellement
indépendants, – une population
infiniment plus nombreuse que la
population de « son propre » pays.
D’où la possibilité économique, pour
la bourgeoisie impérialiste, de tirer
des « surprofits » et d’employer une
part de ces surprofits pour corrompre
une certaine couche supérieure du
prolétariat, pour la transformer en
une petite bourgeoisie réformiste,
opportuniste, craignant la
révolution12.

Cette sociologie du mouvement ouvrier européen


est bien entendu très controversée. La théorie de
l’« aristocratie ouvrière » a eu son lot de critiques
plutôt convaincantes13. Si l’on examine les
chiffres des profits rapatriés des pays du Sud, on
constate qu’ils ne permettent de financer qu’une
très faible partie des salaires du Nord. Autrement
dit, on ne peut pas vraiment dire que les
« surprofits » tirés de la surexploitation du Sud
servent directement à payer les salariés privilégiés
des pays du Nord. Néanmoins, citons l’un des plus
fameux opposants à la théorie de l’aristocratie
ouvrière, Tony Cliff :

L’expansion du capitalisme à travers


l’impérialisme permet aux syndicats
et aux partis ouvriers d’arracher au
capitalisme des concessions en faveur
des travailleurs, sans le renverser.
Ceci donne naissance à une
importante bureaucratie réformiste,
qui à son tour, devient un frein pour
le développement révolutionnaire de
la classe ouvrière. La fonction
principale de cette bureaucratie est
de servir de médiateur entre les
travailleurs et les patrons, de
négocier des accords avec eux et de
«maintenir la paix sociale » entre les
classes. Cette bureaucratie aspire à
un capitalisme prospère, non au
renversement de ce dernier. Elle veut
que les organisations ouvrières ne
soient pas une force révolutionnaire,
mais des groupes de pression
réformistes. Cette bureaucratie est un
important agent de discipline de la
classe ouvrière dans l’intérêt du
capitalisme. Elle est une force
conservatrice majeure dans le
capitalisme moderne. Mais les
bureaucraties syndicale et du Parti
Travailliste ne sont efficaces pour
discipliner à long terme la classe, que
dans la mesure où la situation
économique des travailleurs eux-
mêmes est tolérable. En dernière
analyse, le fondement du réformisme
repose sur la prospérité capitaliste14.

Résumons : l’impérialisme permet aux économies


du Nord de maintenir une certaine prospérité
grâce au pillage et à l’échange inégal avec les pays
du Sud ; le mouvement ouvrier européen et
étatsunien en période de prospérité tente de tirer
« le meilleur » du capitalisme plutôt qu’à le
renverser ; le réformisme se développe sur la base
de cette dernière stratégie de compromis et est
fortement fragilisé par les crises économiques ; le
réformisme est donc un des produits de
l’impérialisme. Par ailleurs, Cliff ajoute que « [s]i
le réformisme trouve ses racines dans
l’impérialisme, il devient aussi pour celui-ci un
écran de protection important, car il soutient son
« propre » impérialisme national contre ses
concurrents impérialistes et contre les
mouvements coloniaux montants. » Ainsi, le
réformisme tend à défendre et mystifier
l’impérialisme pour préserver les acquis dont il
facilite l’obtention.
Il est certes problématique d’assimiler
mécaniquement, comme le fait Cliff, réformisme
et « prospérité économique ». C’est un
raisonnement qui mène à l’idée dangereuse que le
réformisme est voué à disparaître en période de
crise économique. Ce qu’il est intéressant de noter
dans son argumentation, c’est que le rejet de la
notion d’aristocratie ouvrière n’implique pas
nécessairement d’abandonner l’idée que
l’impérialisme influence matériellement la
conscience de classe et les organisations sociales
et politiques du prolétariat. Il y a bien un lien
entre le réformisme, le social-chauvinisme (la
défense, critique ou non, de l’impérialisme par
une fraction du mouvement ouvrier) et l’économie
de l’impérialisme.

Il y a donc aussi un lien direct entre le


développement du réformisme en Europe à la
veille de la Grande guerre et les enjeux coloniaux
pour lesquels rivalisent les nations européennes
depuis la fin du xixe siècle. La littérature des
social-chauvins historiques peut nous le montrer.
Dans leurs écrits, qu’il s’agisse des auteurs
« révisionnistes » comme Bernstein ou des social-
chauvins qui ont été à la gauche de la social-
démocratie européenne, on retrouve la
colonisation comme idéal utopique, comme
modalité possible d’un socialisme d’État. Paul
Lensch, l’un des fervents opposants au
révisionnisme au sein du Parti social-démocrate
allemand (SPD), a écrit un ouvrage en pleine
guerre mondiale pour défendre l’Allemagne dans
le conflit. Dans ce plaidoyer en faveur de
l’impérialisme allemand, Lensch écrit :

À l’issue de la guerre, la politique


coloniale prendra la forme d’une
politique sociale, car ce n’est que
dans la mesure où les représentants
coloniaux du gouvernement seront
conscients de leur responsabilité
comme gardiens des intérêts de la
colonie qu’il sera possible d’espérer
faire des colonies ce que, dans les
intérêts de notre culture toute
entière et de notre civilisation
matérielle, elles doivent être de façon
essentielle : les piliers d’une division
du travail internationale, ou plutôt
intercontinentale, par laquelle les
zones tempérées sont fournies en
matériaux bruts indispensables et de
combustibles, sans lesquels le
maintien de notre développement
industriel et agricole est impossible.
En d’autres termes, la révolution dans
le monde capitaliste que la guerre
porte avec elle signifie aussi une
nouvelle ère pour le monde
colonisé15.

Lensch, dans sa défense social-chauvine du


colonialisme germanique, envisage un socialisme
d’État où les colonies seraient intégrées à une
division globale du travail. On peut déduire de ce
texte un trait exemplaire du social-chauvinisme.
Le social-chauvinisme constitue une
appropriation par le mouvement ouvrier de la
position des États impérialistes dans la division
internationale du travail. Autrement dit, le social-
chauvinisme est une forme d’intégration des
revendications, de la stratégie, de l’analyse de la
social-démocratie (dans la terminologie de
l’époque) aux principaux intérêts en jeu dans la
division du travail à l’échelle mondiale – et à ses
conséquences métropolitaines, à travers la
racialisation de la force de travail issue des
colonies ou des anciennes colonies.

Nous essayons de montrer par ces


développements que le terme de Lénine, son
anathème (« social-chauvin »), ne peut être séparé
de la relation spécifique des formations politiques
et sociales de la classe ouvrière avec le
colonialisme et les colonies. Cette relation est
tissée et formée par le lien apparent entre une
expansion du capitalisme national d’une part, et
d’autre part de meilleures opportunités d’emploi
et de salaire.

Les travailleurs sont séparés des moyens de


production, ils ne possèdent aucun outil de
coordination économique pour associer leur bien-
être à des décisions qu’ils prennent – tout comme
il n’existe pas, au sein du mode de production
capitaliste, d’organisme de coordination
économique centralisé. Dans ce contexte, la
performance économique nationale, et en
particulier celle des économies capitalistes, prend
nécessairement l’apparence d’une force
autonome, à laquelle on peut et l’on doit
contribuer en tant que « citoyen » (« l’effort
national », « l’intérêt général »). Or, comme on le
sait depuis Marx, l’accumulation du capital a
davantage tendance à tirer les salaires vers le bas
et à générer du chômage, une armée de réserve
industrielle, des « populations excédentaires ». Il y
a donc, dans le social-chauvinisme, une illusion
fétichiste16, une apparence nécessaire et
objective », dans laquelle laquelle l’État-nation et
la collectivité nationale indivisible sont partie
prenante d’un même destin économique et social.
Dès lors, les formes prises par l’accumulation
impérialiste – on pourrait ajouter aussi à une
échelle plus réduite, l’avantage relatif des
travailleurs blancs sur le marché du travail –
provoquent une forme d’attachement du
mouvement ouvrier à un « communauté »
nationale imaginaire. Cette forme d’attachement,
profondément influencée par la division
internationale du travail, porte avec elle des
représentations, des pratiques sociales et
culturelles, qui mettent en œuvre et « fabriquent »
la race au quotidien, dans une multitude
d’interactions sociales. C’est à travers ces
processus que le mouvement ouvrier et les partis
ouvriers, le plus souvent réformistes mais pas
seulement, sont parties prenantes de la
stratification raciale et de l’idéologie raciste d’une
société donnée.

III.

Nous voudrions soutenir ici, en guise de


contrepoint, que les politiques mises en place par
l’Internationale communiste à la suite de la
guerre et de la révolution russe, offrent une
alternative et des perspectives politiques pour
combattre le social-chauvinisme. Pour parler de la
France, il est intéressant de décrire brièvement
comment ces politiques ont été mises en œuvre.
Au tout début des années 1920, le Parti
communiste français a fondé une Union
intercoloniale17, formée de militants issus des
colonies françaises, qui se battait pour la fin de
l’indigénat, la fin des mesures racistes en
métropole et l’indépendance nationale des
colonies. Il n’est pas possible de faire une histoire
complète, ni même d’espérer faire un tableau, de
la politique anticoloniale du Parti communiste en
France dans ces années-là. On peut néanmoins
rassembler plusieurs remarques sur ce qui a
effectivement eu lieu :

La politique anticoloniale du PC était


relativement incohérente et difficilement
lisible. D’importantes campagnes ont été
menées, comme le soutien aux insurgés du Rif
marocain. Mais ce travail politique a été réalisé
de façon erratique.

Ces développements erratiques ont donné lieu à


des tendances « autonomistes » au sein du
mouvement noir communiste, qui s’est séparé
en une organisation « nègre » indépendante, le
Comité de défense de la race nègre.

Cette dernière organisation, le CDRN, a une


histoire très compliquée. Le PC est même
parvenu à en gagner l’hégémonie dans le début
des années 1930. Ce qui est important, c’est la
manière dont le PC a été amené par
pragmatisme (soutenir les luttes de tous les
opprimés face à l’impérialisme), souvent contre
sa volonté immédiate, à collaborer de façon
tortueuse et sinueuse avec des tendances
nationalistes noires, à construire des syndicats
noirs parmi les travailleurs des chantiers navals
marseillais, à soutenir des courants plus
enthousiasmés par la fierté culturelle que par la
lutte syndicale, comme les militants
garveyistes18.

Pour continuer sur cet exemple de l’organisation


des Noirs en France par et autour du Parti
communiste, on peut faire un bilan sommaire de
la politique du PC. Le PC s’est débarrassé de
nombreux militants en leur reprochant d’être trop
« autonomistes » ; il a sacrifié un grand nombre
d’expériences importantes pour suivre la ligne
sectaire dictée par Moscou à la fin des années
1920. La ligne « classe contre classe » qui
prédominait alors empêchait naturellement de
mener ce qu’on aurait pu appeler une « politique
de front unique » avec des organisations noires
réformistes ou nationalistes. Mais nous voudrions
souligner qu’à travers ces expériences et la
politique menées par l’Internationale
communiste, les militants du PC ont esquissé,
bien malgré eux, une politique panafricaine.
Indirectement, ils se sont approprié l’idée d’un
Atlantique noir, un espace politique et culturel
traçant une continuité entre esclavage
transatlantique, ségrégation aux États-Unis,
colonialisme européen en Afrique et travail forcé,
notamment dans les zones portuaires, en
métropole. Ce travail politique a contribué à une
culture très riche de fierté raciale parmi les
travailleurs d’origine coloniale et a représenté une
approche profondément novatrice et complexe de
l’interaction entre identité raciale et conscience
de classe.

Si c’est presque uniquement par pragmatisme que


le Komintern ou le PC français ont donné du
crédit à un autonomisme noir, ce pragmatisme est
porteur d’enseignements pratiques et théoriques.
Dans la pratique, cela signifie que la racialisation
de la classe ouvrière métropolitaine, qui a lieu
pendant et après la Grande guerre, est lourde
d’implications du point de vue du travail politique
des militants communistes. En effet, dans la
mesure où – selon le diagnostic de Lénine lui-
même – le social-chauvinisme représente et
renforce un obstacle pour la conscience de classe
révolutionnaire, briser le « point aveugle19 » des
travailleurs blancs, inclure une pluralité de formes
d’organisation non blanches au cœur d’une classe
ouvrière majoritairement blanche, permet de
combattre l’illusion d’une stabilité et d’une
réformabilité de l’impérialisme.

Pour dire encore un mot sur les expériences


historiques et le potentiel subversif d’intégrer à
une stratégie de gauche les organisations
autonomes des colonisés, on peut s’attarder sur
les politiques de la gauche révolutionnaire au
cours du Front populaire. Pendant cette période,
Daniel Guérin et ses camarades de la gauche de la
SFIO se sont appropriés l’héritage antiraciste et
anti-impérialiste incarné et défendu par le PC
quelques années à peine auparavant. À partir de
1937, le PC a mis de côté plusieurs de ses principes
– comme par exemple l’indépendance sans
condition de l’Algérie – afin de ne pas perturber
son alliance avec les autres forces de gauche et les
radicaux au parlement. En d’autres termes, ces
années ont marqué un tournant social-chauvin,
selon notre terminologie, du Parti communiste
français : le PC a même approuvé la dissolution de
l’Étoile nord africaine, un groupe nationaliste
révolutionnaire algérien implanté aussi bien en
métropole parmi les immigrés qu’en colonie.

Guérin et la gauche révolutionnaire du Parti


socialiste se sont opposés en maintes occasions à
la politique coloniale du Front populaire. Cette
contestation faisait partie d’une stratégie plus
vaste visant à combattre les dimensions contre-
révolutionnaires de ce gouvernement. Vers la fin
des années 1930 et pour préparer le
déclenchement de la Seconde guerre mondiale, les
militants de la gauche révolutionnaire ont établi
des liens avec le réseau d’organisations
nationalistes, autonomes, noires, garveyistes, afin
de construire un Centre anti-impérialiste. Au
cours de séjours outre-manche à la rencontre des
militants du Bureau de Londres, Guérin fait même
la connaissance du réseau de militants
panafricains britanniques comme George
Padmore et Jomo Kenyatta20.

Si la gauche révolutionnaire était numériquement


faible, il n’en reste pas moins que cette expérience
mériterait d’être relue par les camarades
antistaliniens d’aujourd’hui, et notamment la
manière dont le travail politique en lien étroit
avec des groupements immigrés non blancs
autonomes peut être une dimension de la lutte
contre le social-chauvinisme, c’est-à-dire contre
le réformisme.

IV.

À partir de ces éléments, il est possible de revenir


à la situation contemporaine en posant les
questions suivantes, à titre de pistes de travail,
chantiers, hypothèses :
1) Comment les courants sociaux-chauvins ont-ils
pris racine dans la situation française et sont-ils
devenus hégémoniques électoralement, écrasant
tout un engagement anti-impérialiste conséquent
de l’extrême gauche ? Pour répondre à la question,
il faut à notre avis nécessairement prendre en
compte la manière dont cette extrême gauche n’a
pas su convertir son anti-impérialisme en une
approche cohérente et claire de la race d’un point
de vue marxiste. Cette incapacité à avoir une
lecture théorique propre du racisme a signifié une
perte d’autonomie de la gauche révolutionnaire
contemporaine vis-à-vis des théories du racisme
et des discriminations dominantes. Cette faiblesse
tient donc aussi à l’incapacité de cette gauche à
s’approprier son propre héritage, celui du PC des
années 1920-1930 ou de la gauche révolutionnaire
de la deuxième moitié des années 1930.

2) Comment le social-chauvinisme a-t-il évolué au


fil des années et survécu à l’explosion sociale de
1968 ? La réponse se situe dans la manière dont la
gauche et les syndicats ont réagi à l’offensive et la
restructuration capitaliste qui débute dans les
années 1970. Par exemple, les grandes vagues de
licenciement dans les secteurs traditionnels et
déqualifiés de la classe ouvrière sont allées de pair
avec une valorisation du travail manuel pour les
Français blancs21. À l’inverse, les travailleurs issus
des anciennes colonies étaient invités à regagner
« leurs » pays. La réaction des gauches et des
syndicats a souvent été d’accompagner le
processus de rapatriement. Les franges syndicales
(CFDT) et politiques dissidentes n’étaient pas
armées théoriquement pour saisir le fait que le
pouvoir construisait un privilège blanc au sein du
marché du travail en France (à travers les lois
Bonnet-Stoléru notamment), et que les luttes
autonomes des immigrés et enfants d’immigrés
étaient des réponses à cette racialisation de la
crise économique.

3) Comment conceptualiser ici et maintenant la


race en France et combattre le social-
chauvinisme ? On peut dire sans trop s’avancer
que les Indigènes de la république et leur
théoricien Sadri Khiari ont produit une analyse
pionnière et indispensable pour envisager la race
dans un contexte français. On peut à titre
d’exemple retenir une distinction très
intéressante conceptuellement, entre différents
courants d’une même classe ouvrière, en termes
de différents « espaces-temps »22. Cette notion est
à rapprocher d’une approche pionnière en histoire
globale du travail : intégrer la géographie, la
démographie et les études de mobilité au sein
d’une sociologie historique des classes, afin de
saisir différentes temporalités et spatialités des
identités et formations de classe. Ces apports nous
permettent de comprendre comment différentes
fractions de la classe ouvrière constituent des
identités, des mouvements, des communautés et
même des partis racialement différenciés et
comment opérer une articulation réellement
internationaliste de leurs revendications.

V.

De la part des marxistes révolutionnaires, cela


implique d’être créatifs. D’imaginer le sujet
révolutionnaire comme un processus d’auto-
constitution et d’auto-réforme, fait de tensions et
de conflits entre partis, syndicats et mouvements,
entre Blancs et non-Blancs (à un autre niveau,
entre différentes ethnicités parmi les non-Blancs).
Cela implique d’imaginer le « prince moderne »
comme un sujet en expansion, capable de se
coordonner et de trouver une ligne de conduite à
partir de rectifications mutuelles des forces en
présence. Le parti révolutionnaire de demain ne
sera probablement pas un seul parti de la classe
prolétarienne, mais une pluralité de partis,
mouvements, associations, d’intellectuels
organiques, d’appareils d’hégémonie qui, à travers
de vives polémiques internes et des conflits aigus,
parviendront à dépasser le réformisme et le
social-chauvinisme (il aurait été possible de
mentionner le sexisme ici, bien que ce ne soit pas
au cœur de ce papier et qu’il faudrait délimiter les
enjeux propres de cette oppression).

Pour conclure, et pour trouver un appui


« orthodoxe » à ces dernières remarques, nous
voudrions terminer cette contribution par la
condamnation du Parti unique en Union
soviétique dans l’un des écrits tardifs de Léon
Trotsky, La Révolution trahie :

Autant de mots, autant d’erreurs et


parfois davantage ! Comme si les
classes étaient homogènes ! Comme
si leurs frontières étaient nettement
délimitées une fois pour toutes !
Comme si la conscience d’une classe
correspondait exactement à sa place
dans la société! La pensée marxiste
n’est plus ici qu’une parodie. Le
dynamisme de la conscience sociale
est exclu de l’histoire dans l’intérêt
de l’ordre administratif. A la vérité,
les classes sont hétérogènes,
déchirées par des antagonismes
intérieurs, et n’arrivent à leurs fins
communes que par la lutte des
tendances, des groupements et des
partis. On peut reconnaître avec
quelques restrictions qu’un parti est
une « fraction de classe ». Mais
comme une classe est faite de
nombre de fractions – les unes
regardant en avant et les autres en
arrière –, la même classe peut former
plusieurs partis. Pour la même raison,
un parti peut s’appuyer sur des
fractions de plusieurs classes. On ne
trouvera pas dans toute l’histoire
politique un seul parti représentant
une classe unique si, bien entendu,
on ne consent pas à prendre une
fiction policière pour la réalité23.

Lire hors-ligne :
références
⇧1 Voir Sadri Khiari, La Contre-révolution coloniale. De de Gaulle
à Sarkozy, Paris, La fabrique, 2008. » qu’entend perpétuer le
bloc au pouvoir.

⇧2 Voir par exemple « L’opportunisme et la faillite de la Deuxième


internationale » (1916).

⇧3 Voir très récemment cette analyse de Mélenchon à la suite des


manifestations des bonnets rouge à Quimper : « Il y a bien sûr
ceux pour qui la seule injonction régionaliste est un label de
qualité suffisant. Ceux-là voient dans cette nouvelle ligne
d’horizon une garantie permanente de bonne fin. C’est ce qu’a
fait le NPA. Je le regrette beaucoup. L’absurdité de la situation
ne le retient pas davantage que l’affaire de sa candidate voilée
ne l’avait retenu. Même cause, même effet : l’exaltation en
faveur de la place publique des particularismes culturels
conduit tout droit à l’indifférence sur les contenus qu’ils
portent. »

⇧4 Voir ce communiqué du Parti de gauche.

⇧5 Voir la tribune parue sur Rue 89, « Jean-Luc Mélenchon, vous


avez tort sur les émeutes d’Amiens-Nord », co-signée par Cédric
Durand, Razmig Keucheyan, Flavia Verri et Julien Rivoire.
⇧6 Voir par exemple ce tract distribué par le Front de gauche dans
le cadre de sa campagne dans la ville de Sevran.

⇧7 À ce propos, voir l’intervention du député Asensi, favorable à


l’intervention.

⇧8 Voir le communiqué du Parti de gauche.

⇧9 Denis Berger annonçait dès 1996 ce retour problématique du


républicanisme, à gauche comme à droite, dans le numéro 38
de la revue Futur Antérieur. Il définissait ainsi le recours au
républicanisme : « la République est un compromis consenti
autour d’un ensemble de valeurs normatives dont l’universalité
est proclamée sans être nécessairement fondée et démontrée.
Pour obtenir le consentement, pour le maintenir en vie en
l’adaptant aux évolutions, une force est nécessaire qui ait aussi
l’apparence de l’universalité. Elle ne peut être trouvée à
l’intérieur de la société, profondément divisée. Il est donc
nécessaire de chercher le garant et l’exécutant du compromis
dans le champ d’une externité relative par rapport au quotidien
social. L’État est présent pour cela : il remplit des fonctions
d’intérêt collectif qui contribuent à lui conférer l’apparence de
l’indépendance ; son monopole dans de nombreux domaines
est directement dépendant du droit qui légitime ses normes ; sa
structure hiérarchique, à l’image de celle de la société, lui
confère une autorité qui peut passer pour naturelle. Pour toutes
ces raisons, l’État apparaît comme le gérant idéal du
compromis républicain. Ce qui revient à dire que la définition
la plus générale que l’on puisse donner de la République est
celle d’une délégation de pouvoir à l’État. Ce qui, soit dit en
passant, permet de comprendre la facilité avec laquelle, dans
certaines circonstances, s’effectue le passage de la République à
un régime totalitaire. » disponible sur : http://multitudes.samiz
dat.net/Impasse-de-la-Republique

⇧10 Laurent Dornel, « Xénophobie et « blanchité » dans la France de


1880-1914, in Thierry Leclère et Sylvie Laurent (dir.), De quelle
couleur sont les Blancs ?, Paris, Éditions La Découverte, 2013.

⇧11 Voir son texte : « Lenin, Kautsky, and the new era of
revolutions ».

⇧12 Lénine, Lettre aux ouvriers d’Europe et d’Amérique (1919).

⇧13 Voir Charlie Post, « Le Mythe de l’aristocratie ouvrière », La


Brèche, Juin 2008, p. 44-58.

⇧14 Voir : « Les racines économiques du réformisme ».

⇧15 Paul Lensch, Three Years of World Revolution, London,


Constable and Company Ltd, 1918, pp. 200-201.

⇧16 Pour une excellente introduction à la théorie marxienne du


fétichisme de la marchandise, voir Isaak Roubine, Essais sur la
théorie de la valeur de Marx, Paris, Syllepse, 2009.

⇧17 Lire à ce propos, Ian Birchall, « « Le Paria ». Le Parti


communiste français, les travailleurs immigrés, et l’anti-
impérialisme (1920-1924) ».

⇧18 Pour une histoire détaillée, lire Philippe Dewitte, Les


mouvements nègres en France, 1915-1939, L’Harmattan, Paris,
1986. Sur les politiques de l’Internationale communiste vis-à-vis
de la « question noire », voir aussi Hakim Adi, Pan-Africanism
and Communism, London, Africa World Press, 2013.

⇧19 Selon une expression empruntée à Noël Ignatiev et Theodore


Allen, deux membres ou proche de la Sojourner Truth
Organization – un groupe d’extrême gauche antiraciste qui s’est
développé aux États-Unis dans les années 1970-1980 – et
désormais références incontournables des études de blanchité.
Voir par exemple : « White blindspot ».

⇧20 Toutes ces activités et cette chronologie sont rapportées par


Daniel Guérin dans Front populaire, une révolution manquée,
Paris, Agone, 2013.

⇧21 Voir Sylvain Laurens, Une politisation feutrée. Les hauts


fonctionnaires de l’immigration en en France (1962-1981),
Paris, Belin, 2009.

⇧22 Voir Houria Bouteldja et Sadri Khiari, Nous sommes les


indigenes de la république, Paris, Éditions Amsterdam, 2012 ;
Sadri Khiari, La contre-révolution coloniale en France, La
fabrique, Paris, 2009.

⇧23 Voir : L. Trotsky, La révolution trahie.

 colonialisme, gauche radicale, Lénine, race, racisme,


réformisme, social-chauvinisme

« « Renouer avec le sens du


public dans l’Enseignement
Supérieur ». Entretien avec
René Ramirez, ministre
équatorien de l’Enseignement
supérieur
À lire : un extrait de « De
quelle couleur sont les Blancs
?»»

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