Analyse structurale Syllabus Samuel

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Faculté des sciences économiques,

sociales, politiques et de
communication
École des sciences politiques et sociales (PSAD)

Syllabus : Introduction à l’analyse


structurale de Jean-Pierre Hiernaux
Cas d’application : étude d’un discours eurosceptique de gauche

LSOC2086 Analyse du discours


STRUYF Samuel

Professeur : Eric Mangez

2022 - 2023
Table des matières
1. Introduction....................................................................................................................................3
2. Présentation de Jean-Pierre Hiernaux et de son approche............................................................3
3. L’analyse structurale :.....................................................................................................................4
3.1 Introduction............................................................................................................................4
3.2 Contenus et contenants.........................................................................................................4
3.3 Isotopie.........................................................................................................................................5
4. Fondements théoriques de l’analyse structurale...........................................................................5
4.1 Conception binaire du réel.....................................................................................................6
4.1.1 Le « binaire » comme principe d’organisation de la perception............................................6
4.1.2 Les « binarités » construite à des fins de conceptualisation dans le cas d’élaborations
théoriques ou problématiques.......................................................................................................7
4.1.3 Les phénomènes plus ou moins « binarisés » ou non dans la vie quotidienne......................7
4.2 Dualité entre individus : « principe de disjonction »...............................................................7
4.3 Dualité entre individus : « principe d’association »................................................................8
5. Analyse des réseaux sociaux au travers d’un cas d’étude..............................................................8
5.1 Contextualisation....................................................................................................................8
5.2 Étude des cas..........................................................................................................................9
Commentaire 1............................................................................................................................10
Commentaire 2............................................................................................................................11
Commentaire 3............................................................................................................................13
Commentaire 4............................................................................................................................15
6. Conclusion....................................................................................................................................16
7. Bibliographie................................................................................................................................16
1. Introduction

Ce Syllabus en sociologie a pour objectif de présenter et d’expliquer l’approche de Jean-


Pierre Hiernaux concernant l’analyse structurale. Le but est, dans un premier temps,
d’apporter les éléments théoriques nécessaires pour comprendre l’analyse structurale des
« contenus ». Pour ce faire, ce syllabus va rendre compte de l’approche de Hiernaux, en
présentant les différents concepts nécessaires à la compréhension ainsi que les fondements
théoriques sur lesquelles se basse cette méthodologie sociologique. Nous présenterons ainsi
les concepts de « contenus/ contenants » de « isotopies » et nous aborderons également
« la conception binaire du réel » ainsi que la sémantique structurelle de Greimas afin de
mieux comprendre les tenants et aboutissants de l’ensemble de cette approche.
Dans un second temps, nous nous servirons de l’étude d’un cas, celui d’un discours sur
l’euroscepticisme à gauche, pour rendre compte et illustrer la méthodologie. Cette seconde
partie, présente ainsi 4 analyses structurales. Au-delà de l’objectif pédagogique et
d’illustration, nous étudions également les représentations et les disjonctions propres aux
contenus de « Lucas » notre étudiant interrogé dans le cadre d’un entretien sur le
« populisme et l’euroscepticisme à gauche ».

2. Présentation de Jean-Pierre Hiernaux et de son


approche.

Jean-Pierre Hiernaux est un professeur émérite en sociologie à l’UCLouvain, reconnu pour


ses travaux dans le domaine de l’analyse structurale.
Il a consacré une grande partie de sa vie à travailler sur une approche structurale lui
permettant d’analyser les discours et les structures sous-jacentes s’inscrivant dans les
différentes relations sociales. Pour ce faire, il a développé une approche spécifique de
l’analyse structurale : Celle de la conception binaire du réel dont nous allons rendre compte
dans la suite de notre travail. Il s’agit, en résumé, d’une vision caractérisée par la dualité
entre les individus et les institutions sociales dans laquelle ils se trouvent. Il fonde également
son approche sur la sémantique structurale de A.J Greimas (1966). Il écrit plusieurs articles
sur ce sujet dans les années 70 et se différencie par la suite de l’approche de ses collègues
Piret, Nizet & Bourgeois (Piret et al., 1996)
Son approche particulière a fait de Jean-Pierre Hiernaux une figure majeure dans la
sociologie belge dans l’analyse structurale des « contenus ».

3. L’analyse structurale :

3.1 Introduction

L’analyse structurale est une approche théorique et une méthodologie en sociologie utilisé
pour étudier les relations et les structures sociales. Pour rendre compte au mieux du
concept, nous allons reprendre une analogie explicitée par Anne Piret, Jean Nizet et Etienne
Bourgeois (1996).
« Pour donner une première idée de ce qu’est la démarche d’analyse structurale, risquons
une analogie : imaginons que l’on cherche à construire un puzzle sans disposer du modèle, de
l’image qu’il représente. On se trouve face à une multitude de pièces éparses. Si l’on regarde
chaque pièce isolément, on ne peut découvrir ce qu’elle signifie, dans quel sens la tenir, ni
quelle est sa place dans l’image entière : telle pièce comporte du bleu, mais ce bleu est-ce le
ciel ou l’eau ? On ne peut le savoir qu’en plaçant la pièce au bon endroit dans le puzzle. C’est
par un travail de comparaison, de confrontation des pièces entre elles que le puzzle se
constitue et que l’image se reforme » (Piret et al., 1996 p. 4)

Cette analogie souligne le fait qu’il est important de reconstruire le puzzle. C’est-à-dire de
partir à la recherche du sens en mettant en relation les différents éléments dans les discours.
(Piret et al., 1996)
Les manières de penser des individus, leurs diverses représentations, se trouvent dans le
discours. Néanmoins, ces dernières sont à l’image d’un puzzle, éparses, « en vrac » et il
convient de les regrouper pour pouvoir au mieux analyser un discours. L’objectif de l’analyse
structurale est ainsi de disposer d’un outil méthodologique lui permettant d’analyser le
discours et de reconstituer les représentations des individus qui se sont exprimés. (Piret et
al., 1996)

3.2 Contenus et contenants

Il est important de distinguer « contenants », « contenus », et « textes et discours » pour


mieux appréhender l’analyse structurale dans sa globalité. Les discours et les textes sont
ainsi les « contenants » ; Et « ce qu’il y a dedans » sont les « contenus ». Là où le
« contenant » est simplement un mode d’expression, de manifestations (Hiernaux, 1995). Le
« contenu » est l’objet de l’analyse structurale.
« C’est essentiellement ce qui peut s’exprimer dans les textes ou dans les discours, à savoir
« du sens » ou, en d’autres termes, des « manières de voir les choses », des types ou des
systèmes de perception » (Hiernaux, 1995, p. 112)
Nous constatons également que dans l’analyse des contenus, les « modèles culturels » ont
un effet prépondérant non seulement sur le cognitif et la perception des sens, mais
également sur l’agir. Prenons l’exemple d’un monsieur X qui tend son bras pour saluer un
autre monsieur Y. Cet acte est rempli d’un sens qui pousse monsieur Y à agir en
conséquence.
« Les systèmes de sens, les modes de perceptions que cherche à repérer l’analyse de
contenus, ne sont pas seulement une question d’entendement, un phénomène cognitif.
Structurant et orientant la perception. Ils tendent aussi à structurer à orienter l’agir. Ils se
saisissent donc comme principes organisateurs à la fois de la perception et du
comportement. » (Hiernaux, 1995, p. 114)

3.3 Isotopie.

L’isotopie est un outil dans l’analyse structurale pour rendre compte des « lieux
structuraux » pertinents pour l’analyse. Il est utilisé lorsque le matériau est volumineux et
que l’analyse ligne par ligne n’est par conséquent pas la plus pertinente. Il s’agit ainsi d’un
outil de condensation descriptive. (Hiernaux, 1995)
« A partir des différents endroits du matériau qui en témoignent, on rassemblera alors les
informations qui se rapportent à ces « lieux » que l’on appelle aussi « isotopies » soit « lieux
(topos) de même niveau (isos) ». Dans une isotopie, on ne peut faire entrer que les
informations qui relèvent du même « lieu » structural. Chaque information devra donc être
renvoyée à son lieu structural propre, même si -dans le matériaux- elle peut se trouver à un
endroit quelconque. » (Hiernaux, 1995, p. 128)

4. Fondements théoriques de l’analyse structurale.

Les fondements théoriques de l’analyse structurale trouvent une origine dans la sémantique
structurale qui « prétend à des concepts et outils descriptifs congruents avec la nature
intrinsèque que l’élaboration scientifique reconnaît aux phénomènes à décrire. À cet égard, si
intellectuellement les phénomènes quantitatifs s’élaborent parfaitement dans l’ordre de la
fréquence et tirent de ce qui régit cet ordre les instruments appropriés à leur traitement, les
phénomènes sémantiques de leur côté, donc les phénomènes de sens, tiennent à l’ordre de la
différence et de la ressemblance dont, à leur manière, ils peuvent recevoir des modalités de
description adéquate ». (Hiernaux, 2010, p. 57)
Jean-Pierre Hiernaux s’inspire en effet de la sémantique structurale de A.J Greimas, et
reprend son concept de relation de disjonction que nous allons voir un peu plus tard. Il entre
ainsi en contradiction avec L’analyse structurale (Piret & al, 1996), sur son ignorance des
spécificités greimasiennes. En effet, selon Hiernaux (1996) A.J Greimas (1966) est à l’origine
« D’une part d’une distinction entre les « deux termes de la relation » ou « termes-objet » qui
appartiennent au « déroulement même du discours » ; Et d’autre part du contenu
sémantique de la relation en question -ce qui constitue son sens- lequel dérive de la mise en
œuvre d’au moins un « axe sémantique » qui dispose les « éléments de signification » investis
dans les termes-objet, en considérant de tels éléments comme des propriétés de ces termes »
(Hiernaux, 1996 p. 6) (Greimas, 1966, p.22)

4.1 Conception binaire du réel

Jean-Pierre Hiernaux distingue trois niveaux de phénomènes à étudier séparément pour


rendre compte au mieux de sa conception binaire du réel. (Hiernaux, 1996) En effet, il
souhaite se séparer des conceptualisations résumant la pensée binaire à un mode de pensée
occidental.
Ces 3 phénomènes sont les suivants : (Hiernaux, 1996, p.1)
1) Le « binaire » comme principe d’organisation de la perception
2) Les « binarité » construite à des fins de conceptualisation dans le cas d’élaborations
théoriques ou problématiques
3) Les phénomènes plus ou moins « binarisés » ou non survenant dans les pratiques ou
les réalités sociales empiriquement observables

4.1.1 Le « binaire » comme principe d’organisation de la perception

Le premier phénomène rend compte du faire que chaque terme semble « prendre sens »
dans sa disjonction. Ainsi, nous pouvons de ce fait établir un principe organisant la
perception. Le concept de « pensée occidental » peut ainsi s’opposer ou se contre définir
avec le concept « d’autres contextes culturels ». Le concept binaire peut aussi s’opposer
sémantiquement et épistémologiquement au concept non-binaire. (Hiernaux, 1996). Ainsi
« Sur base des unités de sens élémentaires construites par ces dichotomisations, s’opèrent
subséquemment des conjonctions ou associations qui développent le propos particulier (…) »
(Hiernaux, 1996, p. 2)
Hiernaux affirme ainsi « le caractère universel de la disjonction binaire comme base et
condition formelle de la constitution du sens » (Hiernaux, p. 2)
Cette base et condition formelle « peut -toutefois- être à l’origine de combinaisons à la fois
complexes et nuancés ». (Hiernaux, p. 4) Ce n’est pas parce que la binarité semble être un
modèle simple et facilement compréhensible que la réalité sociale l’est tout autant.
L’enchevêtrement des bases binaires peut former des structures complexes à saisir dans
notre compréhension. Il existe des rapports, non dichotomiques, qui impliquent des
« intenses asymétries dans la valorisation et les affects, tels l’attraction/répulsion,
Haine/amour, etc. et peut-être plus profondément encore, des états ontiques et des enjeux
hyper-dramatiseurs du choix, tels être/non être, vie/mort, etc. » (Hiernaux, p. 4).

4.1.2 Les « binarités » construite à des fins de conceptualisation dans le


cas d’élaborations théoriques ou problématiques

Le deuxième phénomène illustre le fait que nous retrouvons également des binarités
construites, par soucis de conceptualisation dans le cas d’élaborations théoriques. Jean-
Pierre Hiernaux, pour illustrer cela, prend l’exemple de la dichotomie durkheimienne
sacré/profane. Ces 2 « contenants » présentent des conceptualisations construites par le
sociologue Durkheim. La « binarité » trouve par conséquent ici son origine dans la volonté de
visée universelle qui accompagne la construction du concept. Cette volonté est respectée si
le concept est à la mesure du propos. Il présente ainsi un sens « programmatique »
(Hiernaux, 1996). Ce niveau programmatique permet un niveau de concrétisation assez
important vis-à-vis de la réalité sociale.

4.1.3 Les phénomènes plus ou moins « binarisés » ou non dans la vie


quotidienne

Le troisième phénomène rend compte de ceux apparaissant comme « binarisés » dans la vie
quotidienne. Cela peut être dû aux positionnements politique droite/gauche ou aux
différences dans l’espace habités rural/urbain. Ce phénomène se différencie des 2 autres en
renvoyant à la « simple production de concepts descriptifs » (Hiernaux, 1996, p.10) Ces
derniers doivent par la suite s’adapter aux modalités des matériaux empiriques qu’ils
souhaitent exprimer. (Hiernaux, 1996). La dichotomie dans ce phénomène peut-être
davantage remise en question. Mais cela est dû à une réorganisation ou une
complexification du système de perception. (Hiernaux, 1996)

4.2 Dualité entre individus : « principe de disjonction ».

Le principe de disjonction est le principe central de l’analyse structurale. Pour reprendre


l’analogie du puzzle, aucune pièce distincte ne peut permettre d’avoir une idée de ce qu’est
le puzzle. En ce sens, il en va de même pour le discours. Aucun « contenu » ne peut être
compris isolément, et ne peut trouver de signification en son sein. C’est la mise en relation
de deux éléments d’un discours qui permet d’en faire ressortir un sens. Nous parlons ici de la
relation fondamentale entre 2 éléments de discours, qu’on appelle la relation de disjonction.
(Piret et al., 1996). Cette relation fondamentale, nommée « relation de disjonction », est
toutefois critiquée par Jean-Pierre Hiernaux. Se référant tous les deux à A.J Greimas, Jean-
Pierre Hiernaux postule le fait que cette relation de disjonction ne marque qu’une toute
première approximation chez Greimas. (Hiernaux, 1996, p. 6)
Le postulat théorique et méthodologique de binarité prend ici tout son sens. Les 2 éléments
de discours, mis en relation dans la disjonction « ont quelque chose de comme tout en étant
différent. » (Piret et al., 1996 p. 4). Nous allons rendre compte précisément de ce principe
lors de l’analyse de notre cas d’étude.
Hiernaux (2010) distingue aussi dans le principe de disjonction trois autres grands principes :
Le principe d’homogénéité : A et B se réfèrent tous les deux à un même axe sémantique T
Le principe d’exhaustivité : A et B (ou non-A) épuise l’axe sémantique
Et le principe d’exclusivité : A et B sont mutuellement exclusifs
Nous allons définir l’axe sémantique, ultérieurement, dans notre cas d’étude.

4.3 Dualité entre individus : « principe d’association ».

Ce principe met des « contenus » séparés par la disjonction en relation avec d’autres
« contenus » issus d’autres disjonctions. Ces relations entre différents contenus permettent
de créer des « réseaux » où les attributs de toutes ces choses sont attachés à un sens
particulier. Enlever son chapeau, tout comme s’abaisser devant quelqu’un, sont ainsi
associés à l’infériorité. (Hiernaux, 1995)

5. Analyse des réseaux sociaux au travers d’un cas


d’étude.

5.1 Contextualisation

Pour mieux étudier et comprendre l’analyse structurale, nous allons la mettre en application
au travers d’un cas d’étude. Pour ce faire, nous allons analyser le contenu d’un discours
« eurosceptique » de gauche provenant d’un étudiant en Master en sciences politiques. Cet
entretien a été collecté il y a 3 ans, en mars 2020 dans le cadre d’un cours nommé « analyse
des données qualitatives ». L’étudiant interrogé, Lucas, était un étudiant en Master en
Sciences politiques. Il avait 22 ans au moment de l’interview.
5.2 Étude des cas.

Analyse 1.

Comment est-ce que tu définirais l'euroscepticisme (petite pause) et est-ce que tu te retrouves
dans cette définition ? Lucas (R1) (Rigole)

C'est une bonne question… Comment je définirais l’euroscepticisme ? Bah c'est justement d'être heu,
dans une certaine opposition, on va dire, vis-à-vis de l'Europe, de ses institutions, de ce qu'elles
représentent aussi pour certaines personnes. Mais justement, moi, j'ai l'impression que ce terme-là
euroscepticisme, c'est un terme très vague qui comprend… fin je je n’aime pas beaucoup me
positionner dans ce terme là parce que tu retrouves un peu tout et n'importe qui, quoi. Des gens
heu, y compris une frange de, de l'extrême droite, des gens de gauche plus radicaux, des gens
critiques vis-à-vis des institutions européennes. Et du coup ouais, pour moi, il y a vraiment une très
large définition de cela et moi bon, ouais je peux me définir en tant qu’eurosceptique mais genre je,
ce n’est pas vraiment mon terme préféré. Je le crie pas sur tous les toits… ouais je suis plutôt
critique, bon je pense qu'on en parlera plus tard ouais. Mais non. (PAUSE). Heu, ouais voilà
Commentaire 1

Notre première Isotopie se nomme « Les caractéristiques des personnes opposés aux
institutions européennes ». Il s’agit ici d’une structure parallèle et d’une structure en
éventail. Nous pouvons ici distinguer 3 disjonctions : La position vis-à-vis des institutions
européennes, la préférence d’appellation, ainsi que l’appartenance politique des opposés
aux institutions européennes.
La relation de disjonction est une relation ou A est inverse de B. Dans notre cas d’étude, si on
prend la première disjonction, il ressort le fait que « Opposé » et l’inverse de « Favorable ».
Le terme « Position vis-à-vis des institutions européennes » est le dénominateur commun
aussi appelé « Axe sémantique ».
La structure parallèle est une structure, permettant de rendre compte du fait que deux ou
plusieurs disjonctions présentent des liens entre elles. Elles ne sont pas indépendantes (Piret
et al., 1996). Dans notre cas d’espèce, la préférence d’appellation « être eurosceptique »
présente des liens avec « un peu tout et n’importe qui, gauche radicale et extrême droite ».
Cette isotopie permet ainsi de distinguer les caractéristiques des personnes opposés aux
institutions de l’Union européenne. Il est intéressant de constater que notre personne
interrogée, malgré son opposition aux institutions européennes, se détache rapidement du
concept de « eurosceptique ». Cette analyse structurale nous permet par conséquent de
rapidement rendre compte de la remise en question de ce concept et des caractéristiques
relatifs à l’appartenance politique apportés par Lucas. Nous développerons les autres
caractéristiques de l’analyse structurale au sein de nos prochaines structures.
Analyse 2.

Intervieweur : Pas de soucis, t’inquiète Et du coup, quand j'avais contacté, tu te disais, fin que tu
disais eurosceptique, on peut mettre ce terme entre guillemets si tu veux, mais donc du coup toi
pourquoi tu m'as dit, fin dans quelle... tu es dans une opposition vis-à-vis de l'Union européenne et
ça se traduit entre guillemets, dans quelles oppositions, fin, (Q2) comment est-ce que tu définirais
ou tu mettrais des mots sur ton euroscepticisme à toi ?

Lucas (R2) Heu, ben Mais moi, du coup, c'est vraiment d’un côté heu … Moi je suis quelqu'un de
d'assez ancré à gauche, c'est pour ça que j'aime pas trop le terme eurosceptique, parce que y a des
gens, des gens qui sont juste on va dire pro protectionnisme, antis migrants et tout qui, qui se
retrouve là-dedans. Mais moi c'est plutôt pour ce que l'on va dire l'appareil européen en termes de
de structure néolibérale qui sont ancrées même dans leur dans la Constitution européenne. Ça peut,
enfaite je m’oppose un peu à cette, à cette (cherche le bon mot), à cette construction européenne.

Je ne suis pas contre l'Europe, on va dire en tant que, genre, le projet européen. Heu, il y a plein de
choses qui sont chouettes hein, fin programme Erasmus et tout ça. Je suis le premier en bénéficier
aussi l'année prochaine, ça pose... ça me pose pas de souci, c'est plutôt le, heu, c'est qu'en fait
l'Europe dans son ADN même, dans ces structures, dans ses libertés, ses 4 grandes libertés : liberté
de circulation des travailleurs, liberté d'établissement pour les entreprises, à justement un ADN très
néolibéral qui est très compliqué à remettre en question. Mais cela dérange pas la plupart des gens
de droite pro-union européenne, mais moi euh de mon côté à gauche, c’est quelque chose que que
je conteste complètement. Mmh Oui, il y a beaucoup de de politiciens qui parlaient : (avec une voix
un peu différente) Oui, on peut changer, modifier les traités. Ouais, j'aimerais bien, j'aimerais bien
que ça fasse …

Intervieweur : Ok ?

Lucas (R2) ...Parce que les traités, le, TUE Et le traité de fonctionnement ..., le TFUE là et le traité de
fonctionnement de l'Union européenne et le traité de l'Union européenne, ils sont vraiment
compliqués, il faut vraiment l'unanimité de tous les membres pour pouvoir les modifier. Et dans ces
traités là ou dans la constitution, on va dire un peu, c'est un peu la constitution, pour moi, européen,
on retrouve justement des principes néo libéraux qui sont quasiment, qui sont, ouais, que je conteste
complètement.

Commentaire 2

Cette isotopie se nomme « Les modalités du rapport à l’UE selon l’orientation politique ».
Il s’agit ici d’une structure croisée. Pour distinguer les 2 structures. Hiernaux (1996) affirme
ceci : « -Il y a structure parallèle chaque fois que lorsqu’un terme d’un premier code s’associe
à un terme d’un second, les deux termes restants s’associent aussi entre eux ; Il y a structure
croisée, chaque fois que lorsqu’un terme d’un premier code s’associe à un terme d’un second,
il s’associe aussi à l’autre terme de ce second code, ceci étant vrai pour chacun des termes du
premier code ». . (Hiernaux, 1996, p. 26)
Dans notre cas d’espèce, les termes droite et gauche s’associent à la fois aux termes
« favorable à l’UE », et « opposé à l’UE ».
Notre analyse structurale permet ainsi de faire ressortir 3 profils/ types, situés entre les 2
axes croisés. (Orientation politique et rapport à l’UE). Il est intéressant de constater
l’absence du profil, « personne orienté politique à gauche, favorable à l’UE ». La personne
interrogée ne fait pas mention de ce type-là dans son discours. Le matériau laisse en effet
entrevoir uniquement 3 réalités fécondées et ne permet pas d’identifier une réalité pour ce
cas. Cela nous permet de faire ressortir une typologie des représentations de Lucas et nous
donne des pistes de réflexion sur son approche générale vis-à-vis de ses représentations
dans notre problématique.

Analyse 3.

Intervieweur : Ok, et alors pour rester dans le thème de mon de mon TP, (Q3) comment tu
définirais le populisme, et est-ce que tu trouves que, est-ce que je peux te tutoyer en fait ?

Lucas : Oui, bien sûr, t’inquiète.

Intervieweur (Q3) Est-ce que tu trouves que le PTB se retrouve dans cette définition ?

Lucas (R3) (Un temps). Alors le populisme, moi, je l'identifie un peu comme heu, (prend un temps)
une idéologie politique et stratégie. Et qui consiste justement à (réflechis) à heu, comment dire, c’est
un peu compliqué, hein ? On rigole

Intervieweur : Oui, c’est un peu comme l’euroscepticisme...

Lucas (R3) Ouais, populiste, justement à se servir, on va dire du peuple ou à parler au peuple et à
prendre le peuple comme s'ils avaient comme si le peuple avait du coup cette identité qui est un
intérêt commun, une opposition à, à des élites en opposition à à d'autres personnes. Heu… C'est heu,
moi je, c'est un terme qui des fois, est défini péjorativement. Moi je le, je le vois pas de manière
péjoratif, c'est pour moi du coup, c'est une partie de stratégie politique, une idéologie politique
qu'on retrouve chez des grands partis sociaux-démocrates. Moi, je pense à la France insoumise, je
pense à Podemos. Le PTB pfff (souffle) en partie je dirais, mais pas vraiment, mais du coup en fait moi
je, personnellement, je le différencie assez du côté du PTB qui, ou d'autres partis, c'est le côté.
Marxiste, pour moi du coup c'est 2, c'est 2 choses différentes.

(R3) Ouais 2 choses différentes. La tradition marxiste d'un parti, de genre de tradition marxiste où
communiste ou autre est pour moi, fort différente, justement de heu, de, de des partis comme
Podemos, France insoumise, qui justement, sont plutôt des partis populistes, mais pas dans un sens
péjoratif quoi. Et c'est pour ça que moi je me, je ne m’identifie pas comme populiste et c'est pas un
terme dans lequel je m’inscris... Mais après je comprends que le PTB peut avoir des stratégies qui
peuvent sembler populistes, et voilà. Mais bon, il y a aussi des gens qui ont une vision négative sur le
populisme et qui définissent cela comme étant de la démagogie, mais bon euh ils n'ont aucune
notion en sciences politiques eux
Commentaire 3

Cette troisième isotopie se nomme « Les différentes conceptions du populisme ». Il s’agit à


nouveau d’une structure, d’abord parallèle, ensuite, en éventail. L’isotopie a pour objectif de
rendre compte des différentes conceptions du populisme au travers, d’une part, de 3
structures parallèles, d’autre part, d’une structure en éventail.
Deux univers structurent cette analyse structurale. D’une part, nous retrouvons l’univers de
la conception négatif de la notion du populisme, où l’on retrouve la définition du populisme
comme étant de la démagogie, une vision négative du concept, ainsi qu’une connaissance
nulle en sciences politiques.
D’autre part, l’analyse fait ressortir la conception non négative du populisme, dans laquelle
s’inscris Lucas. En dernière analyse, la structure en éventail permet de faire ressortir les
partis associés à ce concept. Hiernaux (1996) privilégie le terme « structure en éventail »
plutôt que « structure hiérarchisé » utilisé par Nizet (1996), pour ne pas faire ressortir une
idée de subordination ou de prééminence. Nous avons accroché, en éventail, la disjonction
reposant sur l’axe sémantique « Partis associés à ce concept » à l’univers de « la conception
du populisme comme notion non négative ». Toutefois, cette connexion nous semble
discutable et peut être remise en question compte tenu du fait qu’elle ne semble pas si
logique dans le matériau d’origine.
Analyse 4.

Ouais, et justement, est-ce que, fin ça, ça en vient une autre question, (Q9) est-ce que tu trouves
que l'Union Européenne est anti démocratique ou alors plutôt qu'elle est garante de la
démocratie ? Ou les 2 ? Samuel (R9) (Souffle en réfléchissant) Pour moi elle est, elle est garante, si je
veux reprendre le terme du…, d’un modèle néolibéral et du coup d'une démocratie qui s'inscrit dans
ce modèle-là. Je dis pas que c'est pas démocratique et, et que c'est, c'est une certaine vision de la
démocratie, c'est une certaine manière de procéder mais ça s’inscrit toujours sous des, des choses
qui sont pour moi vraiment du coup structurelles à notre société, à notre système capitaliste en
général. Du coup c'est, du coup la liberté d'entreprendre, voilà la liberté de s'installer partout, la libre
concurrence, la loi du marché. Toutes ces choses sont des libertés prépondérantes super importante
pour, pour l'Europe, pour la Belgique aussi. Et c'est ça, c'est soi-disant un décervelant (pas sur du
terme lors de la retranscription) de la démocratie ou de la liberté dans toutes les idéologies qui, qui
accompagnent et moi du coup c'est pas vraiment les, les valeurs qui me sont chères. C'est en fait, je
défends pas du tout une société basée sur, sur le libre marché, sur une libre concurrence, sur
l’exploitation de l’homme par l’homme sur fait de pouvoir du coup se manger les uns les autres, . Par
rapport à ça, du coup c'est pas à la vision de la démocratie que je partage au niveau des institutions
même. Je partage d’autres visions et valeurs, celle de la solidarité entre les travailleurs par exemple.
Bon je suis pas grand spécialiste hein, mais du, tout ce qui est (réflechis), Commission, relations
Commission au Parlement, Conseil de l'Europe, c'est une certaine façon de voir la démocratie, mais je
pense qu'il y a beaucoup d'articles qui remettent en question et beaucoup de gens à raison, cette
manière de procéder puisque, au final, il y a beaucoup de pouvoirs de, la Commission a quand même
un un pouvoir d'initiative assez important. Et ils sont pas forcém…, ils sont pas élus, du coup, les gens
de la Commission c'est les technocrates, et ça, c'est peut-être un peu… Le Parlement au contraire,
justement, le pouvoir le moins important dans la, le processus législatif. Et ouais, c'est pas forcément
le, le meilleur appareil démocratique, après c'est je peux pas c'est pas démocratique hein ! Genre en
opposition à d'autres pays, à la Hongrie et tout où ils font un peu n'importe quoi heu, les pays
autoritaires là où ils ne respectent pas du tout les droits fondamentaux, ouais c'est pas c'est pas
pareil quoi, on peut pas…

Ouais, ouais…

Lucas : … pas comparer…

Intervieweur : Donc si je comprends bien, dis-moi si je me trompe, l'appareil serait pas très
démocratique et l'Union promeut plus un type de démocratie sous une structure néolibérale qui
n'est pas ta vision de démocratie quoi.

Lucas (R9) Pour reprendre des vieux jargons un peu marxistes, c'est une démocratie bourgeoise quoi
… genre qui protège du coup une certaine…(un temps). Mais ouais, du coup une, une classe, une
classe depuis longtemps de la société, ceux qui qui détiennent les moyen de production . Fin, du
coup, c'est toute une superstructure qui se construit par rapport à ça et c'est pour ça que du coup
c'est pas la démocratie que je défends. Je défends plutôt une démocratie populaire, où les
travailleurs, la classe travailleuse pourra décider librement de la production, de la distribution et de
la consommation des ressources.
Commentaire 4.

Notre 4ème isotopie se nomme « Les différentes conceptions de la démocratie ». Il s’agit


d’une structure parallèle longue qui termine à la fin en une structure en éventail pour le
dernier axe sémantique « Modalités de la démocratie néolibérale ». Cette structure longue
permet de faire ressortir 3 différents univers bien distincts et pertinents.
Dans le matériau d’origine, Lucas, rend compte de différentes conceptions de la démocratie.
L’analyse structurale permet de distinguer ainsi l’univers de la « conception marxiste de la
démocratie », et l’univers de « la conception capitaliste (libérale) de la démocratie ». A ces
deux univers se rajoute un troisième, moins marqué : « la conception capitaliste autoritaire
de la démocratie ».
L’analyse permet de faire ressortir 2 visions majeures complètement opposé de la
démocratie.
La première est la vision marxiste. Une démocratie populaire, où les travailleurs seraient
propriétaires des moyens de production, ils ne seraient pas exploités et décideraient
librement de la production. Les valeurs seraient la solidarité entre les travailleurs, et les
membres seraient élus.
La deuxième vision, est une vision capitaliste de la démocratie. Une démocratie garante d’un
modèle néolibéral, qui protège une classe, « la bourgeoise » qui détient les moyens de
production. Les valeurs de cette démocratie sont le libre marché, la libre concurrence, la
liberté d’entreprendre, d’installer son entreprise partout en Europe, etc. Cette démocratie
permet « l’exploitation de l’homme par l’homme » et présente des modalités technocrates
au sein de la commission.
La troisième vision s’inscrit dans la vision capitaliste de la démocratie. Néanmoins ce qui la
différencie de la démocratie néo-libérale, est son absence de respect des droits
fondamentaux. L’auteur cite la Hongrie pour illustrer cette vision capitaliste autoritaire de la
démocratie.

6. Conclusion

Pour conclure, l’analyse structurale de Jean-Pierre Hiernaux présente plusieurs


caractéristiques et conceptions approfondies que nous n’avons pas pu résumer dans un
syllabus d’une quinzaine de pages. L’objectif de notre travail était d’introduire à la pensée de
Hiernaux concernant son approche sur l’analyse structurale. Nous souhaitons en effet
également faire ressortir ces contradictions avec Piret, Nizet et Bourgeois. (Piret et al., 1996).
Pour expliquer la complexité de l’approche de Hiernaux, nous avons dans un premier temps
développé les fondements théoriques ainsi que les différents concepts prépondérants à la
compréhension. Dans un second temps, nous avons analysé une étude de cas pour illustrer
l’analyse structurale des « contenus ». Cette étude d’un « discours eurosceptique de
gauche » permet d’expliquer au mieux les différentes structures existantes dans l’approche
de Hiernaux.
Enfin, nous souhaitons mettre en lumière les limites et les manquements possibles de
certaines de nos analyses structurales. Le matériau étant relativement consistant, et les
propos de Lucas, parfois vagues, ou nébuleux, nous avons parfois fait le choix de ne pas
mettre en exergue certaines potentielles disjonctions peu claires et ambiguës. L’objectif était
de ne pas faire d’interprétations sur les manquements dans le discours.
7. Bibliographie

Albarello, L., Digneffe, F., Hiernaux, J. P., Maroy, C., Ruquoy, D., & Saint-Georges, D. (1995).
Pratiques et méthodes de recherche en sciences sociales.
Greimas, A. J. (1966). Sémantique structurale, Paris, Larousse.
Hiernaux, J. P. (1992). La conception binaire du réel in Colloque « La Conception réel du
binaire », Louvain-la-Neuve, Unité de Sociologie, 12 p.
Hiernaux, J. P. (1994). ‛ Et hic tres unum sunt’. Structures croisées et théorie des réductions.
Louvain-la-Neuve, Université catholique de Louvain, Faculté de sciences politiques et
sociales. Dactylo.
Hiernaux, J. P. (2001). La pensée binaire Aspects sémantiques, théoriques et empiriques.
Recherches sociologiques, 3.
Hiernaux, J. P. (2010). Analyse structurale de contenu et soutiens logiciels : une introduction
au projet Anaconda. Recherches Qualitatives, Les actes, Logiciels pour l’analyse qualitative :
innovations techniques et sociales, 9, 56-82.
Piret, A., Nizet, J. et Bourgeois, É. (1996). L’analyse structurale. Bruxelles : De Boeck
Université.

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