Cinq Traditions a La Recherche Du Public

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CINQ TRADITIONS À LA RECHERCHE DU PUBLIC

Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren, Éric Macé, Daniel Dayan

C.N.R.S. Editions | « Hermès, La Revue »

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1993/1 n° 11-12 | pages 281 à 310
ISSN 0767-9513
ISBN 2271050138
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https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-1993-1-page-281.htm
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Pour citer cet article :


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Klaus Bruhn Jensen et al., « Cinq traditions à la recherche du public », Hermès, La
Revue 1993/1 (n° 11-12), p. 281-310.
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Klaus Bruhn Jensen

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Universite de Copenhague,
Karl Erik Rosengren
Universite de Lund
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CINQ TRADITIONS
A. LA RECHERCHE DU PUBLIC
Traduit de I'anglais par Eric Mace,
et Daniel Dayan

Au commencement, le verbe etait directement transmis, meme aux masses.


Les praticiens et les theoriciens de la rhetorique et de la poetique ont peu a peu accumule
un vaste ensemble de connaissances raisonnees concernant les caracteristiques de messages
verbaux (oraux ou ecrits, informatifs ou fictionnels) censes influencer l'auditeur. Ce savoir a ete
codifie dans les ecrits classiques, en particulier ceux d' Aristote, de Ciceron et de Quintilien.
Enseigne dans les ecoles et les academies, il a traverse le Moyen-Age eta ete reactualise apartir
de la Renaissance (Arnold et Frandsen, 1984).
En depit du caractere indirect, mediatise des communications de masse modernes, une
part de ce savoir issu de la rhetorique antique s' est diffuse au sein des recherches modernes sur
le public.
Retracer cette influence en detail n'est cependant pas notre objet. Notre tache, plus large,
concerne de fa!i;on plus specifique le champ de la recherche en communication tel qu'il se
presente actuellement : il s'agit de presenter de fa!i;on critique les grandes traditions de
recherches qui etudient !'articulation entre les mass-medias et leurs publics.
Les nombreuses approches en la matiere sont issues de differentes disciplines au sein des
etudes litteraires et des sciences sociales. Malgre des similitudes evidentes entre ces differentes
traditions, leurs representants respectifs n'ont pas toujours semble avoir connaissance de
1'existence de travaux paralleles. Recemment cependant, dans ce domaine comme dans d' autres
domaines du champ des recherches en communication, on voit apparat"tre de nombreux signes

HERMEs 11-12, 1992 281


Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

de rapprochement entre les differentes traditions (Blumler et al., 1985; Dervin et al., 1989;

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Jensen, 1987a; Rosengren, 1985; Schroder, 1987).
Cet article 1 vise a expliquer, en partant des principales caracteristiques des differentes
approches, les convergences qui sont recemment apparues dans les recherches sur la reception,
les usages, les effets des mass-medias; il vise aussi a identifier les controverses apparues entre
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des orientations theoriques et politiques distinctes. Issus de deux traditions differentes, ses
auteurs suggerent que ce processus de dialogue et de detente peut conduire a une coexistence
dynamique plutot qu'a une unification finale.
Pour les besoins de 1'analyse, no us avons defini cinq grandes traditions de recherche sur le
sujet: 1) la recherche sur les effets, 2) la recherche sur les usages et les gratifications (U & G),
3) I' analyse litteraire (Literary Criticism), 4) I' approche culturaliste (Cultural Studies), 5) les
analyses de reception.
Nous evoquerons d' abord de fac;on concise les origines historiques de chacune des cinq
traditions, et leurs conceptions distinctes de la nature et des buts de la connaissance scientifique.
Apres ce survol historique, nous analyserons de fac;on plus methodique chacune des cinq
traditions. Notre analyse portera sur :a) leur conception des trois composantes du processus de
communication de masse que sont le message, 1' audience et les aspects micro et macro du
systeme social dans lequel le proces d'ensemble est inscrit; b) leurs methodes et modes
d'analyse.
Notre conclusion degagera certaines consequences pratiques des recherches presentees et
de nos propres analyses : elles concement les politiques de recherche sur 1' audience en general,
la pertinence sociale et les applications des etudes sur 1'audienc~ ; les enjeux des recherches a
venir.

Historique
La recherche sur les effets

L'histoire des communications de masse est celle d'une succession de nouveaux medias:
livres, joumaux, cinema, radio, television. De nos jours, les developpements de la television
structurent la scene intemationale des medias, en de multiples combinaisons faisant appel au
cable, aux satellites et a la technologie video.
L' arrivee de chaque nouveau medium est generalement marquee par une panique ; ses
effets pourraient etre catastrophiques, specialement pour des esprits pretendument « faibles »
{enfants, femmes, populations peu instruites). Des « paniques morales » de ce type ont
accompagne 1'apparition du cinema, de la bande dessinee, de la television et de la video.
Directement ou indirectement, de telles paniques ont declenche de nombreuses recherches sur

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les effets de tel ou tel medium (Cohen, 1980; Roeh, 1985; cf. DeFleur et Ball-Rokeach, 1989).
Les recherches en communication de masse ont souvent eu pour fonction de repondre a des
frayeurs confuses et parfois exagerees (McQuail, 1987).
Au cours des ans, les recherches en communication de masse ont procede a un va et vient
entre des options diverses concernant !'importance des effets des mass-medias. ll est maintenant
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communement admis que ces options ont varie de fac;on cyclique, allant de l'idee d'effets
puissants a celle d'effets faibles, et vice versa. Ceci dit, les caracteristiques de ces effets ont
change de fac;on substantielle : on est passe globalement d' effets specifiques, directs et a court
terme, a des effets diffus, indirects eta long terme (Mahle, 1986; Rosengren, 1988). Dans le
meme temps, l'image du recepteur a change. D'un recepteur, passivement soumis a I' influence
des messages, on est passe a un usager actif et selectif vis a vis des contenus (Klapper, 1960;
Levy et Windahl, 1985).
Completant ces variations dans le temps, des variations sont apparues entre differents types
de recherches. Les recherches experimentales ont probablement ete plus enclines que les
recherches quantitatives a chercher et a trouver des effets directs, puissants et immediats, subis
par des recepteurs passifs. Ces recherches experimentales sur les effets ont recemment procede
a une remise a jour de leurs methodes. Elles ont fait appel a des theories et des modeles
classiques en psychologie, en psychosociologie et en sociologie (Bradac, 1989 ; Bryant et
Zillmann, 1986; Schenk, 1987). De plus !'emergence de sous-disciplines au sein de la recherche
sur les effets, allant de la fonction d' agenda des medias (McCombs et Shaw, 1972 ; McCombs et
Weaver, 1985), a l'etude des inegalites de savoir entre categories sociales (Tichenor et al., 1970;
Gaziano, 1983), a permis de diversifier considerablement ce domaine d'etudes (Rosengren,
1988).
Un mouvement, presque parallele, de diversification a eu lieu dans 1' autre grande tradition
de recherche en sciences sociales sur I' audience, la tradition des «usages et gratifications».

Les recherches sur les usages et les gratifications (U & G)

«Que font les medias a l'individu? »; « Qu'est-ce que l'individu fait des medias?». Ces
deux questions symetriques resument la difference entre deux grandes traditions de recherche
qui pendant longtemps ont domine les travaux sur 1' articulation entre medias et individus. La
premiere question fait, bien evidemment, reference a la recherche sur les effets, la seconde a
celle des usages et gratifications. Cependant, la formule a perdu sa justesse originale. De recents
developpements ont en effet brouille les frontieres entre les deux traditions distinctes.
Les recherches sur les effets telles que nous les connaissons maintenant plangent une part
de leurs racines dans les recherches americaines des annees 20 sur le cinema (Lowery et
DeFleur, 1988). La naissance des U & G peut etre localisee a peu pres vingt ans plus tard, au
debut des annees 40. Dans le cadre de l'ambitieux programme de recherche sur la communica-

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tion de masse initie par Paul F. Lazarsfeld, Herta Herzog entreprit de reveler quelles
gratifications les auditeurs de radios pouvaient tirer des feuilletons, des emissions de jeux, etc
(Herzog, 1942, 1944). Depuis lors, on peut dire que les U & G ont connu quatre phases:
d' abord celle des descriptions impressionnistes, puis celle des typologies fondees sur le
caractere methodiquement operatoire de variables centrales, puis celle des efforts d'inter-
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pretation et enfin celle de Ia construction methodique d'une theorie (Palmgreen et al., 1985).
Dans leurs tentatives de construire une theorie formelle, les U & G ont fait appel ade recents
developpements en psychosociologie, en particulier avec 1' approche dite des « expectancy-
values» (Palmgreen et Rayburn, 1985; Babrow, 1989). Cette etape n'est pas sans evoquer un
developpement similaire au sein de la recherche sur les effets.
En fait, 1'evolution recente de Ia recherche sur les effets et des U & G pourrait bien
conduire aune convergence finale entre ces deux traditions. Une telle convergence est en cours
depuis un certain temps, elle a ete notee par de nombreux chercheurs qui parlent de « recherche
sur les usages et les e/fets » (Belson, 1972; Klapper, 1960; Rosengren et Windahl, 1972;
Trenaman, 1967; Windahl, 1981).
Ce courant dynamique de recherche est confronte aux courants heterogenes des
recherches issues de Ia tradition litteraire qui investissent maintenant le domaine des etudes sur
Ia communication.

L'analyse litteraire (literary Criticism)

Depuis au moins 2500 ans, le developpement des arts et des sciences en Occident a ete
intimement lie a I'emergence de l'ecrit (Havelock, 1963; Ong, 1982). Une grande importance
est traditionnellement donnee a 1' exegese de textes porteurs d' experiences cognitives ou
esthetiques. Les regles de leur interpretation ont generalement modele vie sociale et pratiques
culturelles, meme dans des cultures ou le domaine religieux est tenu separe des autres domaines
culturels et sociaux. Comme on le sait pour Ia tradition chretienne, !'interpretation de Ia bible et
des autres textes canoniques a produit des controverses qui ont pu faire ou defaire le sort des
individus ou des societes.
Avec le developpement de I'organisation sociale modeme, Ia litterature se voit redefinie ·
comme une forme de communication destinee a des lecteurs d' abord COn<;US comme des
personnes privees inscrites dans la sphere des loisirs (Watt, 1957). Ceci entraine un processus
complexe de redefinition de l'objet de !'analyse litteraire (Williams, 1977; Eagleton, 1983),
aboutissant notamment a soutenir que la litterature pratiquee par des auteurs classiques
particuliers, peut conduire ades experiences esthetiques affranchies des contraintes de temps et
d' espace. D' ou une approche normative de 1'education des lecteurs. Apprenant ainterpreter les
textes en accord avec Ia tradition litteraire, les lecteurs s' exposent, avec Ia communication
litteraire, a des effets qu'ils ont en quelque sorte « appris ». Cependant, I'etude empirique de

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tels effets n' a jamais ete la tache principale de 1' analyse litteraire. Grosso modo, ces effets ont

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toujours ete consideres comme acquis. Neanmoins, uncertain nombre d'etudes empiriques et
parfois experimentales portant sur ce type d'effets apparaissent des le debut du siecle. Un
nouvel elan est donne a un tel travail par I. A. Richards et par ses successeurs americains et
europeens (Richards, 1929; Hansson, 1959, 1985; Purves, 1971; Segers, 1978; Svensson,
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1985).
Dans les etudes litteraires actuelles, on peut distinguer trois conceptions de 1' audience.
D' abord, en elargissant le cadre historique de 1' analyse du role du lecteur, 1' esthetique de la
reception - en particulier celle de 1'ecole allemande - a etudie les transferts et les
transformations historiques de themes litteraires, mais aussi les conditions de comprehension de
la litterature (lser, 1970; Jauss, 1970; Holub, 1984). Ensuite, un interet similaire pour I'aspect
«micro» de !'interaction entre le texte et le lecteur s'est manifeste dans une variete d'autres
approches rassemblees sous la denomination de «reader-response theory» (Fish, 1980 ; Sulei-
man et Crosman, 1980; Tompkins, 1980). Enfin, depuis les dernieres decennies, les etudes
empiriques sur la reception de la litterature se sont multipliees dans une orientation sociolo-
gique ou psychologique en Europe et aux Etats-Unis. En temoignent des revues comme Poetics
et SPIEL (Siegener Periodicum zur Internationalen Empirischen Literaturwissenscha/t ; voir en
particulier Poetics, 14, 1-2, 1985; SPIEL, 7, 2, 1988).
Cependant, en paraphrasant la formule que nous avons deja citee, il est probablement juste
de dire que, pour 1' essentiel, 1'analyse litteraire porte sur ce que la structure des textes litteraires
fait aux lecteurs, plutot que ce que les lecteurs font de la litterature.

L'approche culturaliste (Cultural Studies)

L'articulation des recherches sociologiques et des recherches sur le texte s'est construite au
sein de 1' approche culturaliste. Combinant des hypotheses structuralistes sur la nature des
societes capitalistes industrielles avec des hypotheses sur la relative autonomie des formes
culturelles et leur role en termes de changement social (Hall, 1980), cette tradition analyse le
proces des communications de masse comme un aspect des « pratiques » quotidiennes. On peut
brievement definir les « pratiques » comme des activites sociales signifiantes (Williams, 1977).
Le concept permet de privilegier une perspective globale de la vie sociale, en reconnaissant a la
fois la possibilite d'intervention des individus et le role joue par la production du sens dans
1'orientation de 1'action sociale. Pour 1'approche culturaliste, 1'objet des recherches sur les
communications de masse se situe en dehors des medias : ces derniers renvoient, tout comme
leurs publics, a des pratiques sociales et culturelles plus larges.
Les sources des recherches culturalistes actuelles sont multiples, comprenant de nombreux
classiques du siecle dernier (Durkheim, Marx, Weber), tout comme de modernes pionniers
europeens et americains tels qu'Adorno et Horkheimer (1977), Hoggatt (1957), Williams

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(1977), Carey (1989) et Gans (1974). TI est convenu de reconnaitre qu'un changement qualitatif

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s'est produit, vis a vis de ces classiques et de ces pionniers grace a la constitution d'un axe
Birmingham-Paris, qui plus tard a ete re-exporte vets le marche intellectuel americain. En
d' autres termes, 1' approche culturaliste britannique est largement caracterisee par la volonte
d'integrer les theories sociales et psychanalytiques fran<;aises a l'etude critique des enjeux
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sociaux contemporains (Hall et al., 1980).


Ceci permet de redefinir la culture non comme un ensemble d' reuvres canoniques, mais
comme un processus de production de sens. Ceci amene aussi a reevaluer la culture populaire.
Ainsi la television estelle constituee en figure bardique moderne (Fiske et Hartley, 1978). Bien
que les approches culturalistes britanniques aient domine la scene, des idees similaires ont ete
developpees plus ou moins independamment dans d'autres pays europeens (Mancini et Wolf,
Pietila et al.).
L' approche culturaliste souleve des questions ala fois theoriques et politiques sur le public.
Avec Morley (1980), dont le travail marque un tournant, de nombreux travaux recents ont porte
sur la question de savoir si certains des publics qui font appel a des schemas d'interpretation
refractaires a 1' ordre social dominant, peuvent resister aux constructions de la realite faites par
les mass-medias (Ang, 1985; Morley, 1986; Radway, 1984; Fiske, 1987). L'enjeu theorique est
ici d' evaluer le pouvoir relatif des differentes pratiques culturelles dans la production sociale du
sens. Politiquement, il s' agit de savoir si cette resistance semiotique est effectivement suscep-
tible, a terme, de mener a des changements sociaux, ce qui impliquerait de nouvelles strategies
politiques.

Les etudes de reception (Reception analysis)

Les approches culturalistes sont presentes dans les etudes de reception sous plusieurs
aspects, ainsi que l'illustrent de recents travaux comme ceux de Ang (1985), Morley (1986) ou
Radway (1984). Les analyses de reception, dans ce contexte, sont considerees comme
I' approche la plus synthetique. Elles regroupent de nombreuses formes de recherches qualita-
tives d'audience, dans le souci, plus ou moins marque, d'integrer les perspectives sociologiques
et litteraires (Jensen, 1986).
En termes theoriques, cette tradition s' est construite a partir de differents cadres
conceptuels allant de l'interactionnisme symbolique ala psychanalyse. Plus specifiquement, elle
se rattache d'une part a 1'esthetique de la reception et a la theorie du « Reader Response»
mentionnees plus haut, d' autre part aux U & G que certains des analystes actuels de la reception
ont contribue a fonder (Katz et Liebes, 1984). En termes geographiques, les analyses de la
reception s'inscrivent dans le contexte culture! de l'Europe et des Etats-Unis. Mais elles ne s'y
limitent pas (Liebes et Katz, 1986; Lindlof, 1987; Lull, 1988).
Ainsi con<_;ues, les analyses de la reception constituent peut-etre le developpement le plus

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recent des etudes d'audience. Grosso modo, elles sont parties des lacunes manifestees tant par
les recherches« litteraires » que par les recherches« sociologiques ». Tout d'abord, elles ont
conteste la pertinence des analyses de contenu faites par les litteraires lorsqu'il s' agit de
comprendre les usages et les effets du contenu des mass-medias. Cette critique est generalement
tenue pour fondee, parfois meme par ceux qu'elle vise directement. Pourtant, comme les
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traditionnalistes peuvent nous le rappeler, les etudes qualitatives empiriques oublient parfois
bien des acquis theoriques et politiques portant sur le statut epistemologique et les qualites
esthetiques des differents textes mediatiques (Gripsrud, 1989).
D'un autre cote, les analyses de reception ont remis en question les methodes de recherche
empirique en sciences sociales. Bien qu'elle ait rencontre un accueil moderement enthousiaste,
leur critique a contribue aun debat sur la nature et les buts de l' etude des medias (Rosengren,
1989).
Ainsi, les analyses de reception developpent-elles ce qui peut etre considere comme une
a
etude des publics et des contenus (une analyse des contenus par le public) partir de donnees a
la fois qualitatives et empiriques. Tout en produisant des donnees empiriques sur le public, par
des observations intensives et des entretiens, elles font appel a des methodes qualitatives
lorsqu'il s'agit de comparer celles des donnees qui portent sur les publics et celles qui portent
sur les contenus. Leur objectif immediat est d' apprehender le processus de reception lui-meme,
avant de voir en quoi il affecte les usages et les effets des contenus mediatiques.

Theories et methodes
Theories
Une theorie du public des medias est presente dans chacune des cinq traditions presentees
ici. Pour simplifier, on peut repartir celles-ci en fonction de leurs affinites avec les etudes
litteraires ou avec les sciences sociales.
Les theories de type « sciences sociales » sont principalement representees par la recherche
sur les effets et par la tradition des U & G. Elles se referent souvent a des approches
psychologiques, socio-psychologiques et sociologiques plus generales. Elles font appel, habi-
tuellement, ades modeles graphiques et statistiques des processus d'influence dont les elements
et les relations peuvent etre testes par des procedures formelles.
Les theories de type litteraire, sont principalement representees par diverses traditions
d' analyse textuelle et par l' approche culturaliste. Elles proposent des descriptions methodiques
mais generalement non formalisables, de la maniere dont les structures du contenu - les
discours des medias - acquierent des significations specifiques pour des recepteurs places dans
un contexte social particulier. Dans les analyses de reception, des tentatives sont faites pour
combiner les deux types de theories.

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En substance, toutes ces theories tentent d' apprehender le processus de communication de
masse atravers 1' articulation du message et du public. Trois composantes de ce processus ont
une pertinence particuliere pour les etudes d'audience: le message, le public et le systeme
social ; ou encore, dans le vocabulaire de 1' analyse litteraire : le texte, le recepteur et le contexte.
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La recherche sur les effets

La tradition de Ia recherche sur les effets tend aconcevoir les messages des medias comme
des stimuli symboliques ayant des caracteristiques physiques mesurables. S'interessant au
depart a des stimuli isoles et indifferencies - par exemple, un acte de violence ou un
programme classe comme « violent » - cette tradition en vient progressivement areconna1tre
!'importance du role joue par les configurations et les differenciations de ces stimuli conforme-
ment a une exigence theorique : celle de Ia prise en compte du contexte. Par exemple, Ia
violence peut etre efficace, ou futile; elle peut etre le fait d'un individu provoque ou non; ses
victimes peuvent etre puissantes ou faibles. En resume, des configurations de stimuli differen-
cies ont remplace les stimuli isoles et indifferencies. La definition de ce passage conceptuel et
celle des types de differenciation ont ete theoriquement formalisees (Bradac, 1989; Bryant et
Zillmann, 1986; Schenk, 1987).
Du cote de 1'audience, une differenciation similaire a eu lieu. Les theories des effets
actuellement en vogue - comme par exemple Ia « cultivation theory »3 de Gerbner (Signorielli
et Morgan, 1989), ou celle de Ia « spirale du silence» de Noelle-Neuman (1983) - ont predit et
confirme la presence d' effets tres differents en fonction des caracteristiques sociales et!ou
individuelles differentes, des membres du public.
Le contexte social (macro, micro et meso) environnant le proces de communication a
egalement ete l'objet d'une attention croissante. Par exemple, Ia spirale du silence n'est
operatoire que sous certaines conditions societales et communicationnelles (Noelle-Neumann,
1983, 1988). De meme, les effets dits de« cultivation» peuvent varier selon les environnements
sociaux et les systemes de medias (Melischeck et al., 1984; Signorielli et Morgan, 1989). Pour
prendre un exemple significatif : on a pu montrer que les effets de Ia television sur les
interactions sociales des enfants et des adolescents avec leurs pairs et les membres de leur famille
sont radicalement differents pour les Etats-Unis des annees 50, et pour Ia Suede des annees 80
(Rosengren et Windahl, 1989).

Les usages et gratifications

Des qu' elle se constitue, Ia tradition des U & G insiste sur la variete des besoins, des
orientations et des activites interpretatives reperables chez des membres du public qui different
par leurs caracteristiques sociales ou individuelles (Blumler et Katz, 1974 ; Rosengren et al.,

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Cinq traditions a la recherche du public

1985). S'agissant des contenus, nn desaccord apparatl: cependant entre deux tendances. D'nn

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cote, on theorise les contenus des medias en termes de besoins subjectifs et de perceptions du
public. De l'autre, on etudie empiriquement l'usage du contenu des medias en terme de
«donnees objectives» issues de I'analyse de contenu traditionnelle (Rosengren, 1974, p. 277).
L' adoption de la theorie de « l'expectancy-value » par 1'ecole des U & G offre nne solution a ce
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probleme (Palmgreen et Rayburn, 1985).


Theoriquement, et pratiquemment, la principale lacnne des U & G porte sur 1'examen des
grandes structures sociales et mediatiques qui servent de contexte a l'usage individuel des
medias. Longtemps denoncee, parfois, au sein meme de la tradition, cette lacune est en passe
d'etre comblee (Weibull, 1985).
La convergence naissante entre la recherche sur les effets et les U & G peut renforcer cette
volonte de reconnaitre la diversite des messages, des publics et des systemes sociaux. De
recentes recherches a long terme, du style « usages et effets » ont ainsi reussi a montrer en detail
que l'usage d'nn type particulier de contenu, par des categories particulieres d'individus, dans
des conditions particulieres, provoque nn type particulier d'effets puissants, qui, en retour
appellent nn type particulier d'usage des medias, et ainsi de suite, le tout formant nne longue,
peut etre nne interminable « spirale des usages et des effets » (Rosengren et Windahl, 1989 ;
Sonesson, 1989).

L 'analyse litteraire

Au sein de 1'analyse litteraire, la plupart des etudes portent sur les structures des messages
litteraires, c'est a dire sur les reuvres. Traditionnellement, l'reuvre litteraire est consideree
comme nne configuration de structures linguistiques et rhetoriques dotee de regles propres, et
que 1'on peut rattacher a des « genres » a 1' aide de criteres hermeneutiques ou esthetiques (Frye,
1957; Eagleton, 1983).
n est interessant de noter que - pour 1'analyse litteraire comme pour la recherche sur les
effets - le sens est considere comme immanent aux structures du contenu. Bien que textes et
genres specifiques puissent donner lieu a differentes interpretations, on peut dire de 1' analyse
litteraire qu'elle consiste, soit a definir vis a vis du texte nne reponse qui soit conforme ala
tradition litteraire, soit a suggerer des lectures plus originales, souvent du point de vue d'nn
lecteur implicite. De ce fait, le lecteur est le plus souvent nne construction critique que l'on peut
deduire d'nne tradition ou d'nn discours litteraires. Lorsque des lecteurs empiriques sont
etudies, 1'accent est mis sur leurs interpretations individuelles, ou sur des aspects generaux
(psychologiques ou sociologiques) du sens litteraire, mais ces recepteurs ne sont generalement
pas situes en termes demographiques ou historiques. Le systeme social dans lequella litterature
est produite, reste le plus souvent nn cadre abstrait pour les analyses, nne toile de fond
historique esquissee en introduction.

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Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

L'approche culturaliste

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Les travaux de 1' approche culturaliste privilegient aussi le niveau du message, celui des
« discours » offerts a la communication. Cette approche partage avec 1'analyse litteraire un vif
interet pour les questions de genre, pour les positions implicites que ces genres assignent aleurs
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lecteurs, et pour les usages sociaux qui en decoulent. Cependant, a la difference de 1' analyse
litteraire, 1' approche culturaliste ne porte pas exclusivempent sur la culture d' elite mais
egalement sur la culture populaire. Ainsi les messages des medias sont-ils COn(_;US comme des
discours generiquement structures dont la pertinence pour leurs publics depend des diverses
pratiques sociales et culturelles de ceux-ci. A !'exception de certains travaux recents (Morley,
1980; Radway, 1984), !'approche culturaliste ne repose pas sur une observation empirique des
publics. Ceux-ci sont plutot traites comme des constructions analytiques deductibles du
discours des medias.
Les analyses culturalistes sont neanmoins riches en references au contexte social et
historique. Ce contexte est presente comme un systeme social de pratiques diverses dotees d'un
role de mediation vis avis de la circulation de la communication, et des interpretations qu' elle
re~oit. De telles pratiques sont, elles-memes, liees a !'existence de sous-cultures renvoyant au
sexe, a la classe ou a 1'ethnie. Enfin, ce systeme social permet 1'emergence de strategies
interpretatives que l'on suppose ici partagees par des individus appartenant a des groupes
specifiques, a des publics que l'on decrit en termes de communautes d'interpretation (Fish,
1980; Lindlof, 1988; Jensen, 1990). L'approche culturaliste tente ainsi de combiner une
perspective centree sur les textes avec une conception social-systemique de la reception.

Les analyses de reception

Pour constituer leur cadre theorique, les analyses de reception font appel aux traditions
litteraires et aux sciences sociales. Elles partagent avec 1' approche culturaliste une certaine
vision des messages et des publics. Les messages des medias sont des discours renvoyant a des
codes generiques et culturels. Les publics sont des agents de production du sens. Comme les
U & G, les analyses de reception con~oivent les recepteurs comme des individus actifs, capables
de soumettre les medias a diverses formes de consommation, de decodage et d'usages sociaux.
Les analyses de reception se caracterisent avant tout par l'imperatif qu'elles se donnent de
proceder ades comparaisons empiriques entre le discours tenu par les medias et celui tenu par
le public, entre la structure des contenus, et celle de la reponse du public a ces contenus.
Les resultats de ces comparaisons sont alors interpretes en reference au systeme socio-
culturel environnant, systeme ici aussi con~_;U comme une configuration historique de pratiques
sociales, de contextes d'usage et de communautes d'interpretation. n est courant, pour les
analyses de reception, d' avancer que les pratiques culturelles, tout comme les actes individuels

290
Cinq traditions a la recherche du public

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d'interpretation disposent d'une relative autonomie, vis a vis, par exemple, des structures
economiques et politiques. A l'interieur de ce cadre theorique complexe, les analyses de
reception posent, en termes empiriques, une question qui releve de la semiologie sociale : en
quoi des publics specifiques different-Us dans la production sociale du sens?
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Notre tentative de resumer la situation theorique des cinq traditions de recherche


presentees ici appelle quelques remarques. Tout d'abord, chacune des cinq souligne l'activite et
la selectivite manifestees par les membres du public dans leurs usages et leurs interpretations des
messages des mass-medias. En termes metaphoriques, on pourrait dire que le public ne se
contente plus de« dechiffrer » les messages vehicules par les mass-medias. n les « produit »,au
contraire, par la diversite des significations qu'il degage des textes. En termes plus classiques, on
pourrait dire que l'activite du public se definit desormais en termes d' eisegesis plutot qu'en
termes d' exegesis. Simultanement, I'importance reconnue au contexte social ne cesse de croitre,
qu'il s'agisse de la formation des publics, de celle des genres et des institutions mediatiques, ou
de !'interaction entre les medias et leurs recepteurs.
En depit de cette evolution reperable dans chacune des traditions, il n' en reste pas moins
que chacun des deux grands courants theoriques auxquels elles se rattachent (etudes litteraires,
sciences sociales), se revele bien limite quand il est juge ala lumiere de l'autre. En effet, les
differences entre les cinq traditions considerees ici, ne sont pas seulement des differences
d'accent liees a !'importance relative des trois composantes fondamentales du proces de
communication (message, public, contexte social). Ce sont aussi des differences d'approche.
Ducote des sciences sociales, les recherches sur le public ont permis de differencier, a des
degres divers, le systeme macro-social, 1'environnement mediatique institutionnel, et le public
comme entite relevant de la psychologie sociale. C' est sur de telles bases que 1' on a reussi a
proposer des etudes reproductibles aupres d' echantillons representatifs de publics bien definis.
Du cote de 1'analyse litteraire, on trouve, par contre, des theories elaborees du sens et des
representations. En rendant compte de la signification que les publics attribuent aux contenus
des medias, celles-ci pourraient permettre d'expliquer les effets cognitifs et comportementaux
de l'usage des medias.
Cette situation souleve bien des questions quant a la compatibilite de ces traditions de
recherche dans le cadre (encore hypothetique) d'une theorie unifiee de la reception et de
I'impact des medias. Une analyse des similitudes et des differences dans les methodologies mises
en reuvre pour 1'etude des publics peut servir a clarifier le debat.

Methodologies et modes d' analyses


De la meme fa'Oon qu' on peut distinguer deux types de theories dans le domaine des
recherches d'audience, on peut distinguer deux types de methodes, deux modes d'analyse.
Ducote des sciences sociales, on s'evertue a etablir des categories d'analyse explicitement

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Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

operatoires. On insiste sur le principe d'une separation nette entre differentes etapes : theorie et

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formation des hypotheses, observation, analyse, interpretation, presentation des resultats. On
tente, de plus, de limiter au maximum le role joue par le chercheur dans la collecte et dans
1' analyse des donnees.
La tradition litteraire, a!'inverse, affirme qu'en principe aucune distinction ne peut etre
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faite entre la collecte, I'analyse et !'interpretation des« donnees». L'activite du chercheur reste
determinante, bien que, dans le meilleur des cas, elle fasse !'objet d'un commentaire reflexif
portant sur le processus de recherche, son contexte, ses objectifs et les roles des participants
(Lindlof et Anderson, 1988). Les analyses d'inspiration litteraire ont cependant en commun
avec d'autres formes d'activite scientifique, d'avoir arespecter des procedures systematiques, a
degager et a hierarchiser des questions suffisamment explicites pour permettre le debat.
Ces deux grands courants de methodologie generale sont souvent ramenes ala distinction
entre le « quantitatif » et le « qualitatif ». Cette distinction a souvent obscurci plutot qu'eclaire
les similitudes, differences, et les liens entre les deux approches. Nous l'emploierons a
!'occasion, faute d'une meilleure terminologie.
Les recherches sur les effets et les U & G - en accord avec leurs orientations theoriques -
emploient principalement des methodologies de type« sciences sociales ». L'analyse litteraire et
1' approche culturaliste emploient principalement des methodologies de type litteraire. L' analyse
de reception peut combiner les deux.

Ls recherche sur les e££ets, les U & G

Une methodologie generale propre aux sciences sociales, caracterise ala fois les recherches
sur les effets et les U & G. De nombreuses methodes et techniques y sont utilisees: experiences
en laboratoire ; experiences sur le terrain ; enquetes plus quantitatives au moyen de question-
naires et d'entretiens standardises; observations participantes; entretiens en profondeur... , etc.
La grande difference entre les deux traditions est probablement que les recherches sur les effets
ont prefere, en regle generale, des techniques tres structurees et standardisees, tandis que les
U & G semblent relativement plus ouvertes a des techniques moins structurees, plus « natu-
relles » comme les entretiens en profondeur et 1'observation participante.
En general, et independamment des methodes specifiques appliquees, on remarque
aujourd'hui que les deux traditions tendent aadopter une perspective globale, asituer les usages
et les effets des medias au sein d'un cadre psychologique, socio-psychologique et sociologique
aussi large que possible. Methodologiquement, cette tendance se marque dans au moins deux
directions.
Tout d'abord, les chercheurs tentent de croiser plusieurs techniques dans le cadre d'une
meme recherche. Tis combinent, par exemple, des questionnaires tres structures et standardises
avec des conversations et des entretiens en profondeur plus ou moins ouverts (Jarlbro, 1986;

292
Cinq traditions a la recherche du public

Rosengren, 1989). Ensuite, ils manifestent une claire tendance a suivre !'evolution des

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phenomenes etudies - parfois sur des periodes considerables (Milawski et al., 1982; Singer et
al., 1984; Sonesson, 1989; Rosengren, 1990). Ceci se verifie a la fois au niveau individuel
(panels) et au niveau collectif (etudes de cohortes). Parfois, des etudes transversales et
longitudinales sont menees de front. A 1'occasion, de telles etudes comparatives dans le temps
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sont combinees avec des comparaisons en simultane, generant des projets de recherche bien
plus complexes (Huesman et Eron, 1986; Rosengren et Windahl, 1989). On peut esperer de
cette maniere qu'il sera possible de distinguer, concernant les usages et les effets des medias,
entre des determinations en finalite et en causalite d'une part, individuelles et structurales
d' autre part.
De tels travaux ont beneficie du grand progres realise par les analyses « multivariees »,
lorsque 1'on a reussi a combiner 1' analyse factorielle utilisee en psychologie avec la «path
analysis » utilisee en genetique, en economie et en sociologie, pour aboutir a une theorie
statistique unifiee, ingenieusement mise en ceuvre dans le cadre d'un puissant programme
informatique baptise USREL (Joreskog et Sorbom, 1989).
n faut dire que 1a combinaison de differentes methodologies de recherche au sein d'une
meme etude existe depuis longtemps dans les recherches en sciences sociales, du moins, en
principe. La plupart des manuels de methodologie en sciences sociales rappellent, parfois
comme une condition sine qua non, que toute experience ou etude quantitative agrande echelle
doit etre precedee de petites etudes permettant au chercheur d' acquerir une connaissance de
premiere main du phenomene etudie. n importe alors de savoir comment ces procedures
typiques en sciences sociales peuvent etre appliquees aux recherches actuelles sur 1' audience, et,
particulierement, a celles qu'inspire un modele litteraire. Celles-ci sont certainement per-
tinentes, voires indispensables comme inspiratrices d'hypotheses. Mais, pour les representants
des traditions de recherche de type litteraire, les etudes qualitatives ne se contentent pas de
proposer des hypotheses. Elles sont susceptibles d'expliquer de fa~on independante, la
reception et les usages des medias.

L 'analyse litteraire

Une difference majeure entre les recherches de type « sciences sociales » et celles de type
litteraire conceme leurs conceptions de !'analyse et de !'interpretation. A !'exception de
certaines tentatives mentionnees plus haut, l'approche litteraire ne fait habituellement pas de
distinction methodologique entre 1' analyse des « donnees » et leur interpretation. Elle tend
plutot aproduire, apartir de diverses methodes de critique des textes venues de la linguistique,
de la theorie litteraire et de la rhetorique, ce qu' on pourrait appeler une analyse interpretative
(analysis-cum-interpretation), visant aetablir une ou plusieurs lectures possibles et plausibles.
Les instruments de la recherche sont les capacites interpretatives du chercheur, et les

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Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

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categories d'analyse sont principalement deduites des reuvres litteraires examinees. Le sens de
chaque element constitutif est etabli en reference au contexte de 1' reuvre considere comme un
tout. L'interpretation peut s'elargir pour tenir compte du contexte social, de facteurs histo-
riques et psychanalytiques, qui aident a comprendre tel auteur particulier, tel lectorat ou
l'origine de tel theme litteraire. Le role du lecteur empirique, cependant, a rarement ete
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operationalise ou pose comme un enjeu methodologique explicite dans les etudes litteraires,
excepte dans de recents travaux generalement influences par la sociologie, la psychologie ou la
psychologie sociale (Schmidt, 1980-2; Svensson, 1985; Groeben et Vorderer, 1988).

L'approche culturaliste

Bien qu'issue de !'analyse litteraire, !'approche culturaliste conduit ses analyses inter-
pretatives (analysis-cum-interpretation) atravers des methodes qui se referent explicitement aun
cadre d'explication extra-textuel. Les discours etudies (litterature, medias) sont consideres
comme inscrits dans des pratiques sociales et culturelles plus larges. Les categories d'analyse,
par consequent, sont fondees non seulement sur 1' analyse litteraire, mais egalement sur des
theories de la structure sociale et de la subjectivite - ce qui revient aadmettre que le principal
instrument de recherche reste toujours le chercheur et son pouvoir d'interpretation.
De fa~on plus specifique, .I' approche culturaliste s'interesse a diverses formes culturelles
qui vont de la tradition orale jusqu' aux graffitti en passant par certains types de conversation
quotidienne. Ces formes culturelles peuvent s'interpreter comme relevant d'une expression
populaire ; elles servent au maintien d'identites sociales et culturelles liees ades communautes
d'interpretation. Quant a ces communautes, elles se constituent au cours du processus de
socialisation (a l'ethnie, a l'identite sexuelle, au milieu subculture!) fortement permeable au
contenu des medias. Quoique les membres du public soient ainsi consideres comme participant
activement ala production sociale du sens, et comme frequemment susceptibles de remettre en
question la construction de la realite proposee par les medias, les culturalistes ont souvent fait
porter leurs analyses sur les grands discours culturels, au detriment d'etudes empiriques sur les
producteurs et les recepteurs locaux de ces discours.

Les etudes de reception

Tirant patti de la methode d'analyse interpretative (analysis-cum-interpretation) issue de la


tradition litteraire, et traitant, a la maniere des culturalistes, la communication et les proces
culturels comme des discours situes socialement, les etudes de reception partent d'une lecture
comparative des discours des medias et des discours du public. L' acces au discours du public est
rendu possible par des recherches empiriques apetite echelle ; en particulier des entretiens en

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Cinq traditions a la recherche du public

profondeur et des observations participantes. Comparant ce discours avec la structure des

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contenus diffuses, les etudes de reception montrent comment des genres et des themes
particuliers peuvent etre assimiles par des publics specifiques. De plus, en tenant compte du
contexte social (variables concernant la nature du public) et du role joue par des institutions
politiques et culturelles, les etudes de reception montrent comment les publics participent a une
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production sociale de sens et de formes culturelles, generalement, a travers leur appartenance a


des communautes interpretatives socialement definies. Reste a savoir - mais ceci devrait faire
1'objet d' etudes plus globales - en quoi les significations proposees par les medias sont
susceptibles d' orienter l' action et les savoirs sociaux.
Dans leur forme actuelle, les etudes de reception se heurtent a un probleme methodolo-
gique. Si elles offrent une analyse empirique theoriquement fondee du proces de communica-
tion, elles aboutissent par contre a des resultats qui ne sont pas aisement reproductibles. En fait,
et des que l'on sort des petits groupes d'individus etudies, ces resultats ne peuvent que rarement
etre generalises. Tel est egalement le probleme des recherches culturalistes et des etudes
litteraires (malgre quelques exc~ptions deja mentionnees). Le critere d'une generalisation
possible des resultats est evidemment crucial pour la recherche sur les effets et pour la tradition
des U & G, qui proposent l'une et l' autre des etudes reproductibles, sur des echantillons
representatifs de populations bien definies.
Cette difference fondamentale entre les recherches sur les effets et les U & G, d'une part, et
celles que menent, d' autre part, les culturalistes, les litteraires ou les analystes de 1a reception,
souligne un enjeu general pour 1a recherche sur le public, enjeu que nous avons deja evoque ici.
Certes, chaque tradition offre une perspective dotee de pertinence et de valeur explicative. La
question est neanmoins de savoir si I'ensemble du champ pourrait se preter a une cooperation
dont beneficieraient les recherches a venir et, peut-etre, le public.
En essayant de resumer les ressemblances et les differences methodologiques entre les dnq
traditions de recherche, on est frappe par le parallele entre, d'un cote, !'importance des
recherches experimentales dans les etudes sur les effets et les U & G, et del' autre cote, celle des
approches empirico-qualitatives dans les etudes litteraires, culturalistes et de reception.
Dans les deux cas, a travers une observation intensive et attentive d'un petit nombre de cas
selectionnes sur des criteres precis, de nouvelles connaissances sont produites. Ces connais-
sances portent sur les significations attribuees par les publics a des contenus donnes ; ces
significations, a leur tour, peuvent affecter et informer les savoirs et les comportements de
membres particuliers du public. De telles formes d'impact peuvent etre etablies, par exemple,
de fa~on experimentale ou par des observations participantes sur des groupes familiaux. Notons
cependant, qu'en utilisant des echantillons representatifs au sein d'une population strictement
definie, les recherches quantitatives sont capables d'evaluer avec precision la probabilite des
phenomenes observes. En effet, la methodologie quantitative est con~e dans le but de recreer,
le mieux possible, un ensemble de conditions specifiques et uniformes permettant de degager
des conclusions valides et theoriquement fondees, sur les types de reponses du public etudie. La

295
Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

reponse verbale par laquelle un interviewe revele un aspect du media et les attributs qui lui sont

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lies est ainsi l'element fondamental d'une telle methodologie. Les correlations entre de telles
reponses en termes de procedures statistiques permettent d' etablir les differentes formes
d'impact.
En fin de compte, les recherches statistiques et les experiences en laboratoire, mais aussi les
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etudes empiriques qualitatives sont interdependantes. Elles representent tout d' abord des
formes complementaires de demonstration, ce qui renvoie a la distinction classique entre
recherches in vitro et in vivo. Mais elles permettent egalement d'instaurer un systeme de
verification reciproque : la valeur explicative de chaque mode d' analyse - independamment et
en combinaison avec d' autres modes d' analyse - peut alors etre examinee. Ces developpements
methodologiques et theoriques sont, sans aucun doute, cruciaux pour les recherches futures sur
le public.
Les principaux resultats de notre examen des caracteristiques theoriques et methodolo-
giques des cinq traditions en question sont resumes dans le tableau presente ci-contre...
Avant de proposer quelques suggestions de recherche, pour le futur, abordons quelques-
uns des grands problemes sociaux et politiques que les etudes d' audience ont deja souleves et
qu' elles vont sans doute etre amenees a soulever a nouveau.

Applications

Les politiques de recherche sur ]'audience

Les savoirs sont toujours lies a des « interets de connaissance ». De tels interets peuvent
etre definis, par exemple, par la dichotomie celebre de Lazarsfeld entre recherches administra-
tives et critiques, ou par la trichotomie encore plus connue d'Habermas entre les interets
techniques, contemplatifs et emancipatoires, respectivement representes par les sciences
naturelles, le savoir historico-hermeneutique et les sciences sociales (Lazarsfeld, 1941; Habet-
mas, 1971).
De nombreux chercheurs d' orientation litteraire ou sociologique soutiennent que les
activites de recherche de chaque chercheur et de chaque tradition mettent en jeu des « interets
de connaissance »lies aux applications sociales que l'on peut faire de leur travail Uensen, 1986).
D' autres gratifient le chercheur d'une plus grande liberte : la force des theories et des
methodologies lui permettrait d'echapper a des « interets de connaissance » imposes de
1' exterieur. Enfin, il teste toujours une option classique : produire de nouvelles connaissances,
sans s'inquieter du fait qu'elles soient utilisees ou pas (Rosengren, 1989).

296
Cinq traditions a la recherche du public

Tableau

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Principales caracteristiques des cinq traditions de recherche sur le public

Tradition de Analyse Recherche U&G Analyse Approche


recherche de sur les litteraire culturaliste
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reception effets

Type de theorie verbale semi- semi- verbale verbale


formalisee formalisee

Dimension le message central secondaire secondaire central central


theoriquement
privilegiee le public central central central marginal secondaire

le systeme secondaire secondaire central secondaire secondaire


social
Type de surtout sciences sciences litteraire litteraire
methodologie litteraire sociales sociales
Approches experimentales presque souvent rarement rarement presque
jamais jamais

quantitatives rarement souvent toujours rarement rarement

entretiens en
profondeur toujours par/ois par/ois rarement souvent

analyses de
contenu toujours rarement rarement toujours toujours

Techniques d'analyse statistique rarement toujours toujours rarement rarement

interpretative toujours rarement par/ois toujours toujours


Mode de tableaux parfois toujours toujours presque rarement
presentation chi/Ires jamais

presentation toujours toujours toujours par/ois souvent


verbale
analytique

presentation toujours par/ois par/ois toujours toujours


verbale
narrative

297
Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

Au dela de ces considerations tres generales, il est difficile de nier que le cadre

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institutionnel au sein duquelles recherches sont menees, affecte la nature des connaissances
produites. Parmi les travaux effectues sur le public, certaines des recherches les plus influentes
echappent au monde universitaire et a la purete de ses categories analytiques. Emanant des
services de marketing des grands medias, ces recherches mettent a contribution plusieurs des
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traditions dont nous avons parle, faisant appel a diverses techniques en fonction des objectifs du
moment. D'importants aspects de ces recherches restent inaccessibles au public, comme aux
universitaires, sinon avec des delais considerables.
n peut etre alors pertinent d'examiner les manieres dont les etudes d'audience ont pu
s'inscrire dans divers contextes sociaux. Les implications des recherches sur !'audience -
passees, presentes et a venit - suggerent un cadre historique et social plus large dans lequel nos
traditions de recherche doivent etre examinees et discutees.

Nous avons deja note que 1' apparition des recherches sur les effets est en partie liee au souci
de repondre aux preoccupations tres concretes qu'expriment les representants elus ou auto-
designes de divers groupes sociaux (parents, enseignants, autorites politiques, etc.), face a des
vagues recurrentes de paniques sociales et morales concernant les p.ouveaux mass-medias.
Comme toujours, dans de tels cas, ceux dont les interets sont en cause et dont les nouveaux
medias assurent la fortune ou le gagne-pain se mobilisent pour repondre aux accusations.
Comme toujours, dans ce type de conflit d'interets, on finit par remettre le probleme entre les
mains des experts, en clamant - sincerement ou non - leur scientifique impartialite.
Du fait des interets en jeu, les situations de ce type appellent des reponses rapides. Par
definition, les missions des experts sont done courtes. Pourtant, une fois qu'ils ont ainsi herite d'un
probleme, les experts semblent ne plus le quitter. Originellement liees aux interets d'un groupe
particulier, certaines questions en viennent peu a peu a acquerir une vie propre. Ceci explique sans
doute en partie l'itineraire de la recherche sur les effets. Ceci explique aussi, mutadis mutandis, que
les communications de masse se soient constituees en champ de recherche et en discipline. Bien
entendu, ceci ne veut pas dire que toutes les traditions de recherche partagent le meme itineraire.
Prenons l'exemple des U & G, bien moins combles (ou bien moins accables) de missions
commanditees visant a constater les effets (positifs ou negatifs) de tel ou tel medium. Trois
circonstances semblent expliquer l'absence des commandites.
Tout d'abord, les U & G s'interessent ace qui cause l'usage des mass-medias, autant ou
plus qu'a leurs effets. En temoigne !'interet depuis longtemps porte aux motivations indivi-
duelles de I'usage des medias (Babrow, 1988 ; Herzog, 1942, 1944 ; McQuail et al.,1972 ; Rubin,
1981; Rosengren et Windahl, 1989).
La seconde raison est que les recherches sur les U & G sont toujours parties de l'usager
(agissant, volontaire) des mass-medias. Pour les U & G, la causalite a souvent ete interpretee en
termes de finalite.

298
Cinq traditions a la recherche du public

Troisiemement, !'interet des U & G pour les origines plutot que pour les effets, pour la

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finalite plutot que pour la causalite, laissait peu de place aux indignations morales et politiques
qui ont suscite tant de recherches sur les effets. Les chercheurs sur les U & G ont suspendu les
jugements moraux (Katz et al., 1974). Certes, cela les a exposes a de nombreuses critiques
(Elliott, 1974). Mais, cela leur a aussi permis de constituer un pont entre les recherches
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existantes et celles que devaient ulterieurement mener les culturalistes et les analystes de la
reception. Les uns comme les autres insistent, en effet, sur I' usage autonome et individualise du
contenu des medias que font les membres de sous-cultures organises en communautes
interpretatives plus ou moins opposees a l'ideologie dominante (Blumler et al., 1985).
Mais il ne s' agit pas seulement du refus de verser dans !'indignation morale quant aux
usages individuels des mass-medias. Utilisees tant par la tradition des effets que par celle des U
& G, les statistiques menent a un constat gla<;ant. Force est de reconnaitre, apres tous les
controles imaginables, qu'il n'est en fait possible d'expliquer que 10 a 20% des variations
concernant les usages et les effets des medias. Certes, dans le domaine des sciences sociales, ces
modestes resultats sont plutot la regle que 1'exception. Tis devraient neanmoins faire reflechir
ceux qui ramenent !'usage des medias a des choix conscients faits par des sujets informes et
volontaires, mais egalement leurs adversaires soucieux de prouver 1'effet produit par les medias
sur des sujets nalfs et passifs. A la longue, les commanditaires des recherches en communication
pourraient s'etonner de la modestie des resultats proposes, et en tirer les le<;ons.
Pour le meilleur ou pour le pire, les traditions de recherche d'inspiration litteraire (etudes
culturalistes, analyse de la reception) ne se soucient pas de ce type de considerations, ou
commencent a peine a le faire. Ceci vient en partie de leur nature et de leurs origines. Ceci vient
aussi du desinteret jusqu'ici manifeste par les bailleurs de fonds pour les questions que posent
ces recherches, et pour les reponses qu'elles offrent.

Depuis ses origines, !'analyse litteraire herite d'un role social majeur. Creer, preserver,
diffuser, grace a !'institution scolaire, une interpretation autorisee de la litterature, entre autres
traditions culturelles. Au dela de la gestion de cet heritage, les etudes litteraires ont developpe
des moyens d'interpretation des cultures et de leurs changements, non seulement dans le
systeme educatif, mais aussi a travers les publications d'interet general et les mass-medias
eux-memes (Rosengren, 1987). Alors que certains ont considere I'etude de la litterature (et des
autres formes de grande culture) comme des antidotes aux mass-medias et a la culture
populaire, d'autres ont montre par des etudes historiques et comparatives, que les formes
litteraires evoluent pour s'adapter aux nouvelles circonstances sociales (Hauser, 1951; Hoggatt,
1957). De plus, la recherche sur la litterature consideree comme une institution sociale
repondant aux besoins de lectorats specifiques a joue un role dans la definition des politiques
culturelles, et dans une certaine mesure, influence l'industrie de !'edition. Malgre tout, on peut

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Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

avancer sans risque que le premier objectif de 1' analyse litteraire est lie a 1' examen et a la

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comprehension des textes eux-memes, plutot qu'a la remise en cause concrete de leur contexte
social.
Les strategies de !'approche culturaliste pour influencer la vie sociale, ont d'un certain point
de vue, ete comparables a celles de 1' analyse litteraire. Les deux traditions font appel a des
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strategies interpretatives dont les implications mettent en cause le systeme educatif. Citons, a
titre d' exemple concret, 1' apparition de la problematique culturaliste au sein de certains
programmes d'etudes de !'Open University de Grande Bretagne (Gurevitch et al., 1982). Mais la
tradition culturaliste repose pour beaucoup sur un imperatif critique. n s' agit de remettre en
question les traditions culturelles, d'une part, et les allegeances de l'industrie culturelle, de
!'autre. Si les etudes litteraires manifestent une grande part d'elitisme, les etudes culturalistes
sombrent parfois dans un populisme qui consiste a celebrer les facultes creatrices et les
pratiques oppositionnelles suscitees par la culture populaire. Neanmoins, en faisant de la
definition meme de la culture, l'enjeu majeur des recherches sur la communication, les etudes
culturalistes ont su rappeler que les communications de masse et l' accueil qu' elles re«yoivent,
n' echappent ni au domaine de la politique ni a celui de l'economie.
Les analyses de reception, dont le developpement est assez recent, peuvent difficilement se
reclamer d'un role social specifique. Comme !'approche culturaliste et !'analyse litteraire, elles
ont pour ambition (pedagogique, politique) de renforcer le pouvoir du public. Elles proposent
alors des programmes d'initiation au langage des medias, et suggerent aux instances regulatrices
de reamenager les institutions consacrees a la communication et a la culture, en tenant compte
de (ce qu'elles voient comme) !'interet des publics. En outre, les resultats des etudes de
reception en matiere de decodage, et de styles culturels, se sont revelees utiles aux planificateurs
des institutions mediatiques, et aux auteurs de campagnes publicitaires (Hojberg, 1989). Enfin,
comme les autres traditions presentees ici, les etudes de reception ont le merite d' avoir ouvert le
debat sur ce qu'il faut - ou ce qu'il faudrait - entendre lorqu'a propos des mass-medias, on
parle de « recepteur ».

L'avenir des recherches


nest irrealiste d'escompter une reconciliation totale entre des traditions de recherche aux
heritages aussi divers. Telle n'est pas notre ambition. Nous soutenons neanmoins que des
possibilites de convergence existent, et ceci a plusieurs niveaux, notamment a celui d'une
theorie des developpements interdisciplinaires. Pour que de telles possibilites se realisent, il est
necessaire de reconnaitre clairement les differences theoriques qui separent les traditions
d'inspiration litteraire et celles qui viennent des sciences sociales.
L'apport des traditions de type litteraire est lie ala formulation langagiere d'un immense

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Cinq traditions ala recherche du public

heritage. Accumulees pendant des decencies, les etudes portent d' abord sur les textes, mais

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aussi sur leurs impacts supposes sur des publics. Dans les dernieres decencies, ces traditions
sont representees par la semiotique, et par la theorie du discours et des representations, dont les
methodes d'analyse textuelle ont ete appliquees aux mass-medias (Van Dijk, 1983; Jensen,
1987 b).
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Quant aux theories du public venues des sciences sociales, leurs merites tiennent a leurs
resultats effectifs, mais egalement, a leurs caracteristiques formelles. Leurs (relativement) fortes
exigences de clarte, de coherence et de systematisation, exigences qui sont, par tradition, celles
des sciences sociales et comportementales, leur permettent de se constituer en puissants
instruments de recherche, mais aussi en moyens efficaces de formuler et de structurer les savoirs
acquis. Elles sont ainsi capables d'exprimer aussi bien leurs propres resultats, que ceux des
recherches de tendance de tendance litteraire.
L' analyse que nous avons proposee permet, en pratique, les suggestions suivantes. Pour ne
pas presenter de lacunes theoriques, toute recherche sur le public doit faire appel a un minimum
de trois composantes : 1) Une theorie des structures sociales situerait les medias et leurs publics.
2) Une theorie du discours (ou de la communication) rendrait compte de la nature des
representations offertes par les medias (visuellement, auditivement, par l'imprime). 3) Une
theorie des dispositions socio-culturelles et sociopsychologiques qui regissent 1'acces des
individus aux contenus des medias decrirait leur interaction avec ceux-ci. Chacune de ces trois
composantes doit, bien evidemment, etre definie et precisee.
Ainsi, une theorie de la structure sociale devrait comprendre des niveaux macro (societal),
moyen (institutionnel), et micro (individuel). Or, il n'existe pas de telle theorie actuellement.
Mutatis mutandis, ceci est vrai des deux autres composantes. Pourtant, de fa~on dispersee, des
fragments de theorie existent ici et la. Une fois reunis, de tels fragments pourraient, a defaut de
mieux, servir de points de depart.
Tres generalement, il semble que les traditions issues des sciences sociales offrent des
modeles specifiques et remarquablement precis du contexte social des medias. Par ailleurs, et
grace aux recherches textuelles d'inspiration litteraire, nous disposons de theories des represen-
tations capables de rendre compte de la nature specifique du medium, et de ses modes d'adresse
vis a vis du public. Reste la troisieme composante : le statut du public comme ensemble d'agents
psycho-sociaux. Elle a donne lieu a une serie de formulations (psychologie sociale, psychana-
lyse) qui en soulignent soit les aspects materiels, biologiques et sociaux, soit les aspects cognitifs
et culturels (McQuail et Windahl, 1981).
Mais pour passer de ces fragments a une theorie veritable des communications de masse, il
reste a &borer un appareil conceptuel et terminologique capable d'embrasser leurs aspects
psychologiques, culturels et sociaux.
En termes de methodologie ceci implique que 1'on procede simultanement a des analyses de
contenu eta des etudes de public. Trop souvent, les etudes d'inspiration litteraire ont neglige
d' appliquer les criteres de base de la demographie a la population etudiee. De meme, bien des

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Klaus Bruhn Jensen, Karl Erik Rosengren

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recherches du type « sciences sociales » s'en sont tenues a une definition technique des
contenus, ceux-ci etant con'Ous comme des unites discretes d'information, plutot que comme les
vecteurs de significations culturellement codees. Pour aboutir a une methodologie veritable-
ment interdisciplinaire, il est temps de depasser ces clivages et de ne plus ressasser les
distinctions entre quantitatif I qualitatif, ou administratif I critique. Jusqu'ici, seules quelques
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etudes (integratives, a long terme) y ont reussi (Hannson, 1959; Segers, 1978; Schmidt,
1980-82; Svensson, 1985).
Trouver des criteres suffisamment generaux pour s'appliquer a des combinaisons empi-
riques de methodologies aussi diverses pose un probleme epineux. A long terme, cependant, ce
probleme n'est pas insoluble.
Tout comme les sciences sociales, les etudes litteraires partent d'une exigence fonda-
mentale de validite intersubjective. En sciences sociales, cette exigence se traduit par 1'existence
de criteres techniques : fiabilite, validite, possibilite de generalisation. De tels criteres sont en
voie d'&:re acceptes par les etudes litteraires, tandis que simultanement, les sciences sociales
apprennent - ou reapprennent - les techniques litteraires : analyse et interpretation des
textes ; critique des sources, etc. Des analyses systematiques sont ainsi menees par les
representants de plusieurs sous-disciplines (Hoijer, 1989 et 1990 ; Jensen, 1989 ; Kirk et Miller,
1986).
Le probleme des modeles specifiques d' analyse a mettre en reuvre dans le cadre d' enquetes
concretes reste pose. n est generalement acquis que le comment d'une recherche se definit en
fonction de son objet et de son objecti/(Lang K. et Lang G., 1985). Si, par exemple, il s'agit de
recueillir chez des informateurs des details subtils sur leur reception d'une fiction televisee, il ne
sert evidemment a rien de reunir un echantillon representatif de la population nationale. Ce type
d'objectif requiert une etude en profondeur, a petite echelle, pour des conclusions dont on
saura reconna!tre les limites. Si elles doivent par contre etre testees sur un echantillon
representatif d'une population nationale, de telles conclusions devront subir une transformation
methodologique, afin d'offrir des instruments d'observation utilisables dans le cadre d'une
recherche quantitative.
C' est la une tache fort exigeante, un defi que « litteraires » et « sociologues » ont interet a
relever. La somme des resultats obtenus par les etudes de reception au cours de la derniere
decennie, permet deja nombre de possibilites de cooperation. Cette cooperation requiert que
l'on definisse de fa'Oon explicite ce que sont les criteres d'une recherche scientifiquement
acceptable. Les recherches « litteraires » ont besoin d'une terminologie qui leur permette de
soulever des questions de fiabilite, de validite, de generalisation (Hoijer, 1989 et 1990). La
recherche en sciences sociales doit, de son cote, reconna!tre que des procedures non quantita-
tives - celles que proposent par exemple la linguistique et la semiotique du :xx<' siecle -
disposent d'un pouvoir explicatif autonome (Van Dijk, 1988).
Seul un effort interdisciplinaire a long terme permettra de creer une meta-theorie de la
recherche en communication favorisant notamment 1'exploration des fa'>ons dont divers types

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Cinq traditions a la recherche du public

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d'enquetes peuvent se completer. Si deux etudes menees dans differentes disciplines par-
viennent a des conclusions contradictoires a propos du meme objet, laquelle choisir ? Et, si elles
semblent se confirmer, comment savoir s'il s'agit reellement des memes conclusions? (Rosen-
gren, 1989).
De telles questions devraient se poser concretement dans les etudes empiriques combinant
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plusieurs methodologies. Le champ etant interdisciplinaire, mais les chercheurs ne l'etant pas, la
solution la plus simple consiste a multiplier des groupes de recherche comprenant plusieurs
sortes d'experts. Les difficultes pratiques et les longues discussions theoriques ne manqueront
pas. Pourtant, de tels groupes ont reussi a se constituer (Thunberg et al., 1982), pour le plus
grand bien des participants et de 1' ensemble du champ. Plusieurs types de projets empiriques
pourraient se preter a des etudes interdisciplinaires. Contentons-nous d'en mentionner trois.
Le premier semble assez aise a definir. ll s'agirait de combiner une recherche experi-
mentale avec une analyse de reception portant sur les «interpretations du public» (audience-
cum- content). ll existe en effet des recherches mettant en jeu des variations systematiques du
contenu des medias face a des variations egalement systematiques portant sur les categories de
recepteurs. Ces recherches ont prouve leur utilite dans de nombreuses etudes commerciales
(dont les resultats sont generalement inaccessibles aux chercheurs universitaires). nest temps
pour cette combinaison prometteuse d'etre utilisee pour des problemes theoriquement plus
importants que ceux du marketing.
n s'agit done d'ouvrir la « boite noire» des procedes psychologiques et sociaux dont
I'ensemble conditionne et sous-tend la reception. Certaines tentatives dele faire existent deja,
regroupant notamment des chercheurs d'orientation psychologique et litteraire (Hawkins et al.,
1988; Hoijer, 1989; Sypher et Higgins, 1989). De leurs conclusions theoriques et de leurs
resultats empiriques, on peut se demander s'ils sont susceptibles de variations spatiales et
temporelles (Rosengren, 1989). Cette question debouche sur notre second exemple d'inter-
disciplinarite.
Les etudes comparatives entre cultures se pretent, selon nous, fort bien a1' elaboration de
recherches empiriques combinant plusieurs methodes. Comme le montrent les etudes eth-
nographiques menees par des anthropologues, mais aussi, recemment, par des chercheurs sur
les medias (Lull, 1988), il peut etre necessaire, si l'on veut delimiter et preciser le contexte de
recueil des donnees, d'utiliser diverses formes d'observation en profondeur (description
« naturaliste », interaction avec les membres du public etudie... , etc.). Simultanement, des
techniques quantitatives permettraient de repondre aux problemes specifiques rencontres en
cours d' etude, voire de redefinir les objectifs de depart, menant a des observations ou des
entretiens ulterieurs. Ainsi, pourrait-on comparer deux series de resultats concernant le meme
objet.
Developpant un aspect neglige, malgre son importance, des recherches intemationales sur
les communications, de telles etudes confirmeraient 1' essor actuel du comparatisme. Elles
permettraient, en outre, de savoir si, et jusqu'a quel point, des methodologies de recherche qui

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incament en general une forme specifiquement occidentale de rationalite, restent pertinentes
lorsqu'elles portent sur la reception et sur !'impact des medias dans des cultures differentes
(Liebes et Katz, 1986; Lull, 1988).
Troisiemement, les recherches sur le public pourraient repeter une strategie apparue tres
tot dans l'histoire du champ: celle des etudes de communaute. Un tel retour aux sources
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permettrait d'evaluer le pouvoir explicatif de differentes traditions (Lynd R S. et Lynd H. M.,


1929; Caplow et Bahr, 1983). De plus, les etudes de cas portant sur les pratiques communica-
tives et culturelles de communautes specifiques permettraient 1'examen detaille des types de
contexte (micro, macro) ou s'inscrit generalement !'utilisation des medias. Enfin, elles se
preteraient remarquablement ala combinaison de plusieurs modes d' analyse empirique. Elles
offriraient ainsi d'excellentes occasions de depasser les limites inherentes achaque tradition de
recherche prise isolement.
A terme, bien sfu, il faudra agencer aleur tour les combinaisons de methodes evoquees ici.
En fin de compte, il reviendra peut-etre aux etudes comparatives combinant plusieurs
methodologies de trouver enfin le public.

Klaus Bruhn JENSEN et Karl Erik ROSENGREN

NOTES

1. La version originale de cet article est parue dans European Journal of Communication, SAGE, London, Vol. 5, 1990.
2. Dans le domaine de la communication en France, le tetme «audience» renvoie a une notion de comptabilite (une
part d'audience). En anglais, il peut recouvrir deux significations: soit la designation d'un concept, celui de la
relation entre les medias et le public ; soit la designation d'un acteur social, le public lui-meme. Nous avons traduit
«audience» par «audience» ou par «public» en fonction du contexte. (NdT)
3. Le tetme est difficile a traduire. Denotativement, il renvoie a un processus d'induction des representations par la
television. Connotativement, il renvoie ala dimension agricole du verbe « cultiver ». On « cultivait » ainsi certaines
representations, ce qui petmettrait de parler d'une << Theorie du (la)bourrage de crane». (NdT)

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