Baccalauréat Général

Session 2024

Épreuve : HLP

Durée de l’épreuve : 4 heures

Coefficient : 16

PROPOSITION DE CORRIGÉ

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PREMIERE PARTIE : Interprétation littéraire

I Le sentiment amoureux entre implicite et explicite

Le sentiment amoureux se manifeste d’abord implicitement par des gestes (« vivement », « lui
prend la main »), des silences, des élans visibles dans les didascalies. RB laisse ses phrases en
suspension car il est ému d’être si proche après la cour secrète qu’il a faite à la Reine (« la fuir
depuis six mois et la voir tout à coup » : double opposition des verbes et des compléments de
temps). Il joue un double jeu d’identité qui lui impose aussi une certaine retenue.

Puis la double énonciation se dévoile par l’aparté que fait RB (« la fuir… ») : il ne peut en effet
pas taire ses émotions, ce qui fait référence pour le spectateur à la cour cachée faite à la Reine
depuis des mois à l’insu de celle-ci, alors que la Reine ignore qui est réellement RB.

II L’amour admiration

Le sentiment amoureux ne se dit pas complètement car la Reine lui donne l’apparence de
l’admiration (questions oratoires, voc mélioratif, superlatifs puis hyperboles et aveu « âme »).
Le cabinet sombre peut être symbolique de l’amour caché. Il reste implicite même déclaré ;
cependant, lorsque la Reine achève sa longue réplique par « si terrible et si grand », comment
ne pas penser que, plus que RB, c’est l’amour qu’elle qualifié ainsi ?

Ruy Blas développe ensuite une opposition dans le même esprit admiratif : celle de l’ombre et
de la lumière (« ver de terre amoureux d’une étoile » et ici « ombre » / « éblouissez », « ange »).
L’admiration est comme un premier dépassement de soi vers un autre que soi. Mais surtout il
n’oublie pas qu’il est un valet et qu’elle est la reine : « je pense à vous comme l’aveugle au
jour ».

III Un amour romantique et tragique

L’amour romantique s’exprime par le champ lexical du « je vous aime » et sa répétition par RB
qui ne craint pas la redondance (« je vous aime d’amour »), preuve de sincérité. Mais aussi par
le dépassement des potentialités : conditionnel du rêve héroïque (« je sauverais le monde »),
contre l’adversité plurielle (« « ils haïssent tous », « ils font crouler »). Ses « rêves » sont « sans
nombre » car le sentiment amoureux hausse au niveau de l’infini. Cette aspiration romantique
se teinte d’une douleur inévitable (« j’ai bien souffert », « je souffrais »).

Et le sentiment amoureux se manifeste aussi par l’expression de l’aspect tragique qu’il

comporte : pour rendre compte de l’état dans lequel il se trouve, RB évoque la potentialité de
sa fin (« je mourrais »). L’aveu de sa déclaration exprime le pouvoir que la Reine a sur lui (« si
vous me disiez : meurs ! »), tout en sachant comme le spectateur que c’est aussi une vérité
politique.

Cette scène représente un moment enchanté de partage du sentiment amoureux, en particulier

avec l’aveu explicite de RB. Mais il contient aussi les prémices de sa fin tragique car il repose

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sur des faux-semblants (l’identité de RB, son double jeu intimé par le roi) qui ne pourront être
dissimulés indéfiniment.

DEUXIEME PARTIE : essai philosophique

QUE GAGNE L'AMOUR A ETRE DECLARE ?

Toute vérité est une question ou des questions inhérentes, encore plus lorsqu'il s'agit de
Sentiment. Elle émerge d'interrogations. Jules Lagneau affirme que la vérité absolue est qu'il
n'y a pas de vérité absolue. Rejoignant ainsi les relativistes. Les empiriques diront « la vérité ou
la sagesse n'existent que dans l'expérience » Mais faut-il tout dire s'interrogea longuement Ruy
Blas ? Il faut donc interroger les événements, l'histoire, la pratique pour dégager des questions
induites donc des Nuances et ne pas tomber dans l'Idée fixe, bloquée et sans écoute mais non
plus dans une équivoque pathologique et impuissante, une fuite du héros de Hugo, un soupçon,
un secret, cette « pensée savonneuse ». Le Débat philosophique ici comme toutes réflexions
devront fournir par ses questions des ouvertures pour le Choix de chacune des âmes. Les
restrictions doivent se conjuguer avec les concessions, les connecteurs « cependant,
néanmoins...-et alternatives contre l'Absolutisme.
Ici la Problématique se concentre sur l'Amour et sa déclaration, sa déclamation même. La
passion, le bonheur recherché en l’âme sœur doit trouver le bon Langage, apporter la bonne
Connaissance pour l'autre. Comment donner ou laisser deviner l'élan, Sa vérité du sentiment ?
Parler, n'est-ce pas ne jamais pouvoir tout dire ? Nous verrons comment l'Amour peut se
montrer sincère, limpide si cela est possible... quand deux êtres se parlent, s'épanchent.
Comment être vrai dans cette recherche de communion pour l'un et l'espère-t-il l'autre ?

Nous devons préciser tout d'abord les termes de l'Amour et de la déclaration. L'intérêt est bien
évidemment de s'unir en cœur et pensée. D'éviter un échec. C'est Roméo et Juliette, Ruy Blas
et la reine, Tristan et Yseult, Cyrano et Roxane, Ulysse et Pénélope. Mais le thème proposé ici
avec ce terme déclaration fait allusion aux obstacles dont les écrivains narrant ces aventures,
ces émois mettent en avant et bloquent l'expression du sentiment et l'atteinte du bonheur
partagé. Classe sociale, conflit de familles, préjugés de tout ordre, mariages et autres différents
corporels chez Quasimodo et Esmeralda ...Que dire alors, que déclarer, et faut-il déclarer
même ? Quel sera la victoire, le fruit de cette vérité énoncé malgré les risques et le cœur
haletant ? Faut-il se préparer à l'échec ? Déclarer, c'est annoncer, faire part, dévoiler, bref
donner sa Vérité de l'âme. Mais avec le but incertain d'être entendu, accepté ! De ne pas partager
les intentions profondes.
L'amour platonique est beau, ses poésies secrètes, ses rêves, voire ses fantasmes, projets, ce
« nuage doux » mais à quoi bon ? Le secret est-il compatible avec l'amour qui est élu et ne
rétention donc souffrance de soi. Le risque n'est-il pas inhérent à l'Amour ? Une interrogation
à affirmer (synonyme de déclarer, exprimer) quoiqu'il en soit. Mais dire c'est déjà un acte
d'Amour Certes le transi souhaite le voir aboutir mais dans son égo , que se passe-t-il sinon une

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ruine ? Un regret ?

La déclaration d'amour est un acte riche de significations et de conséquences, tant pour celui
qui déclare que pour celui qui reçoit la déclaration. Plusieurs perspectives philosophiques
peuvent éclairer les raisons et les avantages de déclarer son amour. Pour le philosophe pré-
existentialiste chrétien, Kierkegaard, l'authenticité est une valeur essentielle de l'existence.
Déclarer son amour est un acte d'authenticité, une affirmation de ses sentiments les plus
profonds. Cela permet à l'individu de vivre en accord, d'être soi-vis-à-vis de l’autre, preque
le Dasein- l'être- là, d'une certaine façon , de Heidegger avec ses émotions et de ne pas
réprimer des aspects fondamentaux de son être. Etre Authentique, n'est-ce pas le but de
l'existence ?
Plus loin dans "Le Deuxième Sexe", Beauvoir parle de la révélation de soi aussi dans les
relations interpersonnelles. Déclarer son amour permet de se dévoiler à l'autre et à soi-même,
favorisant ainsi une meilleure connaissance de soi et une compréhension plus profonde de ses
propres désirs et besoins. Pour Sartre, son compagnon, l'amour authentique implique un
engagement. Déclarer son amour, c'est prendre une responsabilité vis-à-vis de l'autre, accepter
une relation qui pourrait transformer sa vie. Cet engagement peut donner un sens et une
direction à l'existence.
Martin Buber ,dans sa philosophie du dialogue, distingue les relations "Je-Tu" des relations
"Je-Cela". Déclarer son amour transforme potentiellement une relation superficielle en une
relation profonde et authentique, où chacun reconnaît et valorise l'autre en tant qu'individu
unique. La Communication est dans notre sens d'être—dans-le monde. Ces jeunes japonais
qui refusent toute relation ne se perdent-ils pas dans leurs Identité puisque comme dit
Berkeley, « Esse est percipiaut percepere », être c'est être perçu, percevoir. N'est-ce pas, dans
toutes les attitudes, ce qui se passe, que l'on soit solitaire ou sociable ? Evite-t-on cette vérité.
Être n'est pas transm' » être » ?
Emmanuel Levinas va plus loin et met l'accent sur l'éthique de la responsabilité et du Lien
envers l'autre. Déclarer son amour peut être vu comme un acte éthique qui crée un lien de
responsabilité et de soin entre les individus, enrichissant ainsi la dimension humaine de la
relation. N'est ce pas la vocation de chacun ?
Paul Tillich, quant à lui, considère l'amour comme un acte de courage, car il implique le
risque de la vulnérabilité. Déclarer son amour est un acte courageux qui expose l'individu au
rejet, mais qui est aussi une affirmation de sa force et de sa capacité à aimer. Ne devons-nous
pas penser avec lui à l'acceptation de l'erreur, « errare humanum est » mais nous agissons,
l'Amour est acte. Et l'exigence de cet amour caché jusque-là n'est pas comme dans les abus,
forcer l'autre mais le/la prendre en compte ?
Dans une perspective psychologique, Carl Rogers : souligne l'importance de l'expression des
sentiments pour le bien-être personnel. Déclarer son amour peut libérer des émotions
refoulées et apporter un sentiment de soulagement et de satisfaction personnelle.
Tout ne serait-il pas si simple et sans cette question si la Certitude était notre apanage ?

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Mais, à fortiori, puisque nous parlons du rapport à l’autre, nous sommes aussi dans la
thématique humaine de la Morale :
En effet n'est-il pas important de noter que déclarer son amour ne garantit pas
nécessairement le succès de la relation comme nous avons vu auparavant. Il est important
que les paroles soient accompagnées d'actions et d'efforts pour maintenir une relation saine et
épanouissante.
De plus, il est important de respecter les limites et le rythme de l'autre personne. Ne pas se
précipiter et laisser l'amour se développer naturellement peut être tout aussi significatif que de
faire une déclaration grandiose. La brutalité même enthousiaste, ne peut-elle pas être source
de crainte et possession, domination ? La Liberté est intrinsèque à l'aveu ou simplement
l'expression de l'Amour s'il celui-ci veut conjuguer avec vérité de chacun.
En fin de compte, la question de savoir si l'amour déclaré est bénéfique dépend de la situation
individuelle et des personnalités des partenaires. Il n'y a pas de réponse unique et universelle.
Voici quelques points supplémentaires et limites, paradoxalement à cette pulsion, à
considérer:
L'importance du contexte, social, positionnel, peut-être professionnel ou prenant en
compte des Différences. La manière dont l'amour est dévoilé et le contexte dans lequel il est
exprimé peuvent avoir un impact significatif sur son sens et sa valeur. Surprendre n'est pas
imposer ! N'est-ce pas, dure combinaison, soit mais dans l’éthique qui s'en mêle, s'épancher
autant qu'interroger le cœur de l'autre.
Ainsi la déclaration d'Amour ne demande-t-il pas un retour, un risque, un Positionnement et
non une invasion. La conquête dont il est souvent question ne doit-elle pas être mutuelle ?
Harmonieuse et refuser l'absolu dangereux, immoral, faisant de l'autre un Objet quand il
est Sujet. Dans le cas possessif est-ce d'ailleurs de l'Amour moins que de l'envie, une
dissociation des pulsions sexuelles des affects authentiques ?
La sincérité et l’authenticité : Les déclarations d'amour doivent être sincères et authentiques
pour avoir un véritable impact. Des paroles vides de sens risquent d'avoir l'effet inverse de
celui escompté et n'être que mensonge, manipulation Ne serait-ce pas alors une déclaration de
guerre que d'affection ?
Le respect des volontés de l’autre : Il est important de respecter les volontés de l'autre
personne et de ne pas la forcer à déclarer son amour si elle ne se sent pas prête à le faire. Le
temps philosophique, cette opportunité qui demande écoute, « attention de l'âme » comme dit
Bergson n'est-il pas une clé ? Attendre peut-être bénéfique, le Temps que celui de chacun
s'accorde, au sens où ce temps n'est comme disait Platon, Aristote que mesure de l'âme.

Déclarer son amour est un acte philosophique riche qui peut transformer la vie de celui qui
déclare et de celui qui reçoit. Cela permet d'être authentique, de mieux se connaître, de
s'engager, de communiquer profondément, de créer des liens éthiques, de démontrer du
courage et de promouvoir le bien-être personnel. C'est un acte à la fois personnel et
interpersonnel qui enrichit la vie humaine et la rend plus significative.

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Pour l'être adoré comme pour l'enfant à qui l'on dit souvent combien on l'aime comme parent
est une nourriture, de l'eau pour évoluer, s'épanouir. Savoir que l'on est aimé, adulé, aide à
croître, à se sentir dans le monde, à être soi-même sans tomber dans la dépendance. En
étymologie latine et grecque Amour est « aller dans la direction de, « vers », « du côté de »
mais aussi « depuis », « par » et « contre-l'autre », posé sur l'être aimé mais paradoxalement
mais car cet autre doit pouvoir garder sa Liberté. Ainsi il faut accepter en déclarant,
confirmant, répétant durant des années que oui comme non puisse surgir. C'est non pas le pari
de Pacal mais celui de Bérénice et Titus. Il faut s'attendre à Cupidon et Psyché. L'amour n'est-
il donc pas hors raison mais avec ses raisons qui doivent se Confondre, verbe du thème
amoureux. Faut-il accepter ce Passage sans cesse à renouveler et non marquer violemment
dans le marbre, cette trahison où la déclaration devient un ordre, presque une menace et non
un libre-arbitre ? La question n'est-elle pas au fond celle de cette Liberté dont Freud parle, une
fois les oripeaux de l'inconscient pulsionnel ôtés. L'Amour plein du Moi de chacun ne pourra-
t-il ps alors être le Bonheur. Il serait important d'être sûr de sa Vérité dans les mots d'amour
prodigués. Et l'Acceptation du Moi plein de l’autre, sa possible destinée pour un chemin
nouveau. Ainsi ne faudrait-il pas inverser et se demander ce qu'une déclaration fait gagner à
l'amour par authenticité et partage ? C'est la grande question du Bonheur parlant à l'Ethique de
vérité qui se pose alors...

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