INTRODUCTION
À l’épreuve de la participation
Frédéric CLAISSE
Chargé de cours adjoint au Département de Science politique,
Université de Liège
« L’évaluation du travail à l’épreuve du réel », « L’école à l’épreuve
de la performance », « Les jurys d’assise à l’épreuve de la justice »,
« Agricultures à l’épreuve de la modernisation », « La dualité des sexes
à l’épreuve de la science » : à en juger par ces quelques titres, choisis
presque au hasard, d’ouvrages récents comprenant l’expression « à
l’épreuve », on pourrait penser que les sciences humaines et sociales
prennent un savant plaisir à maltraiter leurs objets. S’agissant, en
l’occurrence, de « participation à l’épreuve », quel mauvais traitements
le lecteur de cet ouvrage doitil redouter ? Dans les titres que nous
venons de citer, un élément plus fort ou plus solide (le « réel », la « per
formance », la « modernisation », la « science ») semble servir de limite
à laquelle l’objet investigué vient se heurter ou se mesurer : sans avoir lu
ces ouvrages, on se doute que ni l’école, ni l’évaluation du travail, ni les
jurys d’assise, ni la dualité des sexes ne sortiront indemnes de la con
frontation.
Or, le recours à la participation dans des processus d’information ou
de décision politique est encore bien fragile et les critiques à son en
contre restent nombreuses. Comparé à la longue histoire de la démocra
tie représentative, l’appel à la participation de citoyens « ordinaires », au
nom même de leur expertise profane, à des débats publics parfois très
techniques sur des questions controversées ou des enjeux de gouver
nance, relève encore largement de l’expérimentation. C’est d’autant plus
le cas quand les débats portent sur la science, la technologie et leurs
effets sur la société : la participation suscite alors souvent le même
mélange d’espoirs et de craintes que les thèmes abordés – qu’il s’agisse
d’organismes génétiquement modifiés, de nanotechnologies ou, pour
prendre des exemples traités dans cet ouvrage, de champs électromagné
tiques, de neurosciences et de traitement des déchets radioactifs.
9
La participation à l’épreuve
Pour ses détracteurs, la participation entraîne un courtcircuitage des
institutions représentatives légitimes, une confiscation du processus
délibératif traditionnel au profit d’arènes au statut incertain. Ses parti
sans, à l’opposé, y voient une revitalisation nécessaire de la démocratie,
dans un contexte de perte de crédibilité du politique et de fracture
croissante entre citoyens et mandataires publics. Certains blâmeront
l’incompétence des participants et l’impossibilité de les informer sérieu
sement dans le cadre restreint d’un dispositif participatif, quand d’autres
souligneront, au contraire, le sérieux et le sens de la responsabilité des
citoyens engagés dans de tels processus. Quant aux résultats proprement
dits de ces expériences, comment, diront les uns, ne pas craindre leur
instrumentalisation la plus cynique par le commanditaire ? Certes, mais,
rétorqueront les autres, aton attendu le « tournant participatif » pour
biaiser la signification d’un scrutin ou transformer un sondage d’opinion
en plébiscite ? La participation offretelle de quoi résister à de telles
épreuves – celles de la critique, de la démocratie, des décideurs, voire
des citoyens euxmêmes ?
Les chercheurs qui ont contribué à cet ouvrage n’ont pas de réponse
à ces questions. Leur perspective est différente, car le problème auquel
ils ont le plus souvent été confrontés était luimême différent : comment
concevoir des dispositifs participatifs qui « tiennent » ? Dans la plupart
des recherches qui seront commentées ici, il ne s’agissait pas, en effet,
de défendre les vertus de la participation ou de prouver ses mérites, mais
de répondre à des défis méthodologiques particuliers. Dès le moment où
la participation représente un impératif de recherche qui (quelles qu’en
soient les raisons) n’est pas remis en question, comment concevoir un
dispositif qui réussisse à associer à un même processus (de connaissance
ou de décision) des parties prenantes dotées de statuts asymétriques et
d’intérêts différents ? Selon quels critères évaluer le succès ou l’échec
de ce dispositif ?
La perspective sur la participation adoptée dans cet ouvrage n’est
donc pas tant celle de l’apport éventuel de la participation au processus
démocratique au sens large, que celle des chercheurs engagés dans la
conception et la mise en !uvre de dispositifs participatifs particuliers
répondant à des finalités précises. À l’exception du premier chapitre de
portée plus générale, les textes réunis ici se présentent comme des
retours d’expérience sur des recherches dans lesquelles la participation a
constitué un élément essentiel. Aucun chapitre ne propose donc de
« recette » pour faire participer tel ou tel public – si tant est que cela soit
d’ailleurs possible. Pour les auteurs, la participation n’est jamais consi
dérée comme une fin en soi, mais comme un moyen pour associer telle
population à un processus décisionnel ou pour faire émerger des repré
10
Introduction : à l’épreuve de la participation
sentations nécessaires à l’évaluation d’une politique donnée1. Dans deux
cas au moins (les recherches SCoPE au chapitre 3 et Synerwal au cha
pitre 7), il s’agissait même de réaliser les deux simultanément : prendre
en compte, dans un paysage institutionnel en reconfiguration, des exper
tises locales jusqu’alors considérées comme non pertinentes. Le texte
sur l’évaluation du dialogue participatif organisé par l’ONDRAF pour la
gestion des déchets radioactifs (chapitre 10), postule par ailleurs que
l’ouverture du processus décisionnel contribue à en améliorer la qualité
substantive autant que l’acceptabilité sociale. Si la question de la démo
cratie participative ou délibérative reste posée dans cet ouvrage, c’est de
manière oblique, à travers ce prisme méthodologique.
Un souci de réflexivité
La participation ne se « décrète » pas. Sa mise en !uvre repose
néanmoins sur des procédures, des méthodes et des principes théori
quement fondés. Les méthodes participatives requièrent une expertise
particulière, la maîtrise de procédures qu’il convient de réadapter aux
contraintes et aux finalités de chaque expérience. Il s’agit de créer les
conditions d’émergence de processus délibératifs pluralistes sur une
scène assurant les conditions nécessaires en termes de transparence et de
neutralité pour garantir une dynamique de groupe. De ce point de vue, le
chercheur fait figure de professionnel de l’intermédiation : il dispose de
méthodologies adéquates pour intégrer des populations hétérogènes à un
processus dont il a la charge. Pour la science politique en particulier, ces
expériences participatives représentent un nouveau corps de techniques
et de métiers où peut s’illustrer un savoirfaire spécifique.
Cependant, son rôle ne se limite pas à celui de technicien dans un
processus dont les tenants et aboutissants lui échappent. La participation
constitue aussi un nouveau champ d’investigation qui oblige le polito
logue à repenser des questions plus traditionnelles de sa discipline,
comme celle des liens complexes entre science et société, expertise et
décision, démocratie et délibération, représentation politique et moderni
té2. Ce réengagement de ses concepts et outils d’analyse implique déjà
pour le politologue un premier niveau de réflexivité.
Mais la réflexivité intervient aussi, de manière plus décisive encore,
à un second niveau, proprement méthodologique cette fois, que cet
1
2
Pour une approche centrée sur la présentation et l’organisation concrète de dispositifs
participatifs, on consultera toujours avec profit le guide de l’utilisateur réalisé par la
Fondation Roi Baudouin et l’Instituut voor Wetenschappelijk en Technologisch
Aspectenonderzoek (viWTA) (Elliott et al., 2006).
Pour un état des savoirs sur la question, du point de vue des sciences sociales, voir le
premier numéro de la revue Participations, et particulièrement Blondiaux et Fourniau
(2011).
11
La participation à l’épreuve
ouvrage se propose d’illustrer. En mettant en !uvre des méthodes
participatives, le politologue ne peut pas faire l’économie d’une ré
flexion sur le rôle qu’il a à jouer dans les processus où il intervient. La
mise en !uvre de ces méthodes exige en effet un effort permanent de
retour sur soi, qui accompagne chaque étape du développement d’un
dispositif participatif. C’est cet effort réflexif qui permet d’évaluer la
qualité même du processus dans son ensemble et des résultats auxquels
il a mené.
Dès la conception du dispositif, le politologue sait qu’il s’expose à
voir sa recherche influer sur le processus de décision – quand ce n’est
pas là un des attendus mêmes de la démarche participative. Même s’ils
échappent au chercheur, ces « débordements » (Callon, 1999) doivent
être pris en compte et être en quelque sorte « rétrojetés » dans l’analyse.
On peut considérer les chapitres de cet ouvrage comme autant
d’occasions de clarifier la position du chercheur en science politique par
rapport à ces différents niveaux souvent confondus dans les dispositifs
participatifs : celui de la construction des données et du matériau ; celui
de la finalité des résultats ; celui, enfin, de l’agenda politique.
D’une part, il est en effet difficile de soutenir que les méthodes parti
cipatives ne font que s’ajouter aux méthodes existantes de collecte de
données : mieux que simplement « récoltées », cellesci sont co
construites avec les participants. De ce fait, toute démarche participative
a, par définition, un impact sur le processus politique – c’est même la
raison principale pour laquelle on y a recours. Cette influence inévitable
ne devient embarrassante que si le chercheur refuse de la prendre en
considération, c’estàdire de la prendre pour objet tout au long du
processus (de la conception du dispositif à l’analyse des données). Il y a,
de ce point de vue, deux écueils à éviter : le chercheur peut avoir la
tentation, soit de s’abriter derrière une pseudoneutralité technique (« Je
n’interviens qu’à titre de spécialiste au service d’un processus qui ne
m’appartient pas »), soit de prétendre s’affranchir en assumant pleine
ment sa normativité (« Je ne peux réduire la participation à un ensemble
de méthodes, c’est une valeur en soi et un mode légitime d’influence sur
la décision »). Il serait tout aussi insatisfaisant d’arbitrer entre ces deux
positions, qui correspondent à deux figures opposées d’un même mode
d’ingénierie politique et sociale.
Pour le dire autrement, la question de l’irrésistible influence du poli
tologue sur la construction de son matériau doit être découplée de celle
de la finalité des résultats. À défaut, il risque de transformer la co
construction de données en pure instrumentalisation pour le commandi
taire – que ce soit par aveuglement volontaire ou, au contraire, par
adhésion délibérée à un agenda politique. Au fond, on pourrait se dire
que ces problèmes ne sont pas très différents de ceux qui se posent dans
12
Introduction : à l’épreuve de la participation
le cadre de toute rechercheaction. À ceci près que le coût parfois prohi
bitif de certaines expériences participatives a pour effet de subordonner
d’entrée de jeu la finalité scientifique à une volonté affichée de trans
formation de la réalité politique et sociale. D’un autre côté, l’intégration
à un cadre institutionnel est encore la meilleure garantie, pour les parti
cipants, que leur effort sera récompensé et que l’exercice auquel ils se
livrent ne sera pas qu’une « expérience » de plus, déconnectée de tout
processus de décision.
Reste ainsi au politologue à observer un processus dont il sait qu’il
est partie prenante. À lui de faire de cet « embarquement »3 un moteur
de connaissance. C’est ici que se révèle un second sens du titre de cet
ouvrage : en mettant à l’épreuve des méthodes et des techniques partici
patives dans des contextes de recherche très différents, les chercheurs
qui y ont contribué se sont en quelque sorte mis euxmêmes « à
l’épreuve de la participation ». Notion centrale de la sociologie pragma
tique, l’épreuve est définie comme « la possibilité d’un changement
d’état » (Chateauraynaud, 1991 : 165). Or, un processus participatif doit
impliquer une telle possibilité pour toutes les parties engagées – y
compris pour ces professionnels de la participation qui conçoivent les
dispositifs et font en sorte que les participants participent effectivement.
Un témoignage collectif
L’ouvrage fonctionne aussi comme une sorte de « biographie intel
lectuelle » d’un centre de recherche particulier, le SPIRAL, intégré au
Département de Science politique de l’Université de Liège. À
l’exception des contributions respectives de Min Reuchamps et de
Geoffrey Grandjean, tous les chapitres ont en effet été écrits par des
chercheurs et enseignants faisant partie ou ayant croisé l’histoire du
SPIRAL.
Le SPIRAL a été fondé il y a près de vingt ans, en 1995, par Cathe
rine Zwetkoff, alors chargée de cours à l’Université de Liège. Durant ses
premières années, le centre a développé un champ d’expertise en ma
tière de gestion des risques et d’évaluation des politiques publiques,
domaines qui constituent le noyau « historique » de ses activités. En
parallèle, la recherche menée au SPIRAL a été soustendue par une
réflexion globale sur les processus de décision publique, particulière
ment dans des contextes d’incertitude scientifique et technologique.
Au cours de cette première phase de développement, le SPIRAL
s’est ainsi fortement identifié à la notion de risque, qui lui a permis de se
3
Pour cette notion d’embarquement, voir la thèse de François Thoreau (2013) ainsi
que les contributions au colloque sur les « Sciences sociales embarquées/Social
Sciences Enrolled » qui s’est tenu les 13 et 14 janvier 2012 à Mines ParisTech.
13
La participation à l’épreuve
déployer dans des domaines comme l’évaluation de risques technolo
giques majeurs (OGM, traitement des déchets radioactifs, sécurité de la
chaîne alimentaire), la gestion de risques environnementaux (change
ment climatique, radon), la planification d’urgence et la gestion de crise,
mais aussi la gestion et la résolution de conflits (« siting conflicts » :
aéroports, antennes de téléphonie mobile, sites d’enfouissement de
déchets), ainsi que l’évaluation des choix technologiques (Technology
Assessment). Comme on le verra, cet héritage est toujours bien vivant et
lisible dans l’ouvrage.
Cependant, l’évolution même des problématiques et des disciplines
autour desquelles le SPIRAL avait été fondé a fini par requérir un degré
de spécialisation sans cesse croissant. En quinze ans, l’analyse des
politiques publiques, la gestion des risques, la sociologie des sciences et
des techniques, mais aussi les méthodes participatives et les courants de
recherche autour de la démocratie délibérative avaient connu un déve
loppement tel qu’il était devenu impossible, pour un politologue,
d’adopter un profil aussi complet et polymorphe qu’au moment où ces
champs de recherche étaient apparus.
La nouvelle génération s’est donc davantage spécialisée, tout en
s’efforçant de conserver et de prolonger le questionnement qui avait
donné au SPIRAL son impulsion initiale : l’étude des rapports com
plexes entre science, société et politique, assortie d’une réflexion plus
générale sur les dispositifs institutionnels d’expertise (en particulier la
production de connaissances expertes et leur réappropriation par un
public profane), l’innovation technologique, l’amélioration des pratiques
de collaboration interdisciplinaire, la sensibilisation et l’information du
public en matière scientifique – en somme, un questionnement global
sur les fondements de la démocratie et sur les nouvelles formes de
gouvernance délibérative.
Audelà des approches en termes de risques ou de courants dits STS
(Science, Technologie et Société), c’est ce questionnement qui constitue
le véritable socle de la mission scientifique de l’entité, ainsi que la
raison de son ancrage dans la science politique, envisagée comme une
discipline intégrative. C’est aussi pour cette raison que les méthodes ont
toujours été un élément transversal des réflexions menées au SPIRAL.
En s’adaptant toujours aux contraintes de ses objets d’investigation, le
SPIRAL a constamment cherché à mobiliser et à développer des outils
méthodologiques pour la gestion de politiques publiques et
l’amélioration des processus de décision.
L’ouvrage a donc aussi valeur de témoignage collectif sur la manière
dont un centre de recherche en science politique s’est confronté à la
participation en tant que pratique et méthode de recherche. De là, le
souci constant d’expérimentation que le lecteur retrouvera en filigrane
14
Introduction : à l’épreuve de la participation
dans chacun des chapitres : selon la formule consacrée, c’est une re
cherche « en train de se faire » qui s’y donne à voir, avec ses tâtonne
ments, ses frustrations, ses bonnes et ses mauvaises surprises. De là,
également, le « décalage » voulu par les coordinateurs quant à certains
choix de problématiques développées par les auteurs : ainsi, au lieu de
commenter des résultats d’enquête jugés peu pertinents, le chapitre de
Stéphane Rieppi se centre sur la difficile relation avec un commanditaire
et des partenaires de recherche ne partageant pas la culture de la partici
pation ; le chapitre de Pierre Delvenne et Martin Erpicum illustre quant
à lui la manière dont des chercheurs, captifs d’un procès d’intention,
tentent de justifier leur position face à l’idéologie « participationniste »
dont on les accuse. Si la tonalité critique domine, c’est que, nous l’avons
dit, la réflexivité est au c!ur des exigences méthodologiques de la
participation tel que le SPIRAL la conçoit.
Bien qu’il donne une coloration particulière à l’ouvrage, ce thème
des « malentendus de la participation » n’est pas, loin s’en faut, traité
par tous les auteurs de l’ouvrage. Hormis le premier chapitre (Min
Reuchamps), chaque contribution se présente aussi, de manière plus
classique, comme une monographie présentant une recherche qui mobi
lise une méthode ou un dispositif participatif. Chaque expérience est
cadrée et remise en contexte, de manière à fournir au lecteur tous les
éléments nécessaires à la compréhension des enjeux méthodologiques et
des difficultés concrètes de mise en !uvre d’une démarche participative
dans une situation particulière.
La focalisation sur les travaux d’un centre de recherche ne doit pas
être interprétée comme une volonté de démonstration de force ou un
quelconque exercice de narcissisme collectif. Au contraire, pour les
coordinateurs de l’ouvrage, il s’agit de montrer la vie d’un laboratoire
qui s’est trouvé exposé à la participation, sans masquer les frictions
auxquelles elle peut donner lieu. Sans adhérer à la participation en tant
que principe normatif, les chercheurs du SPIRAL restent toutefois
convaincus que les méthodes participatives constituent un excellent
moyen pour intégrer des publics et faire émerger des représentations
essentielles à la compréhension de phénomènes politiques et à
l’information de processus de décision. C’est à une meilleure appréhen
sion de cette aventure participative, sous l’angle de chercheurs parta
geant une expérience et une culture méthodologique commune,
qu’invite cet ouvrage.
Plan de l’ouvrage
L’ouvrage est divisé en quatre parties d’inégale longueur, avec deux
parties centrales constituées de monographies synthétiques, encadrées de
15
La participation à l’épreuve
deux parties plus courtes à vocation plus théorique (pour la première) ou
pédagogique (pour la dernière).
La première partie, « Types et Concepts », comprend deux textes
fournissant des clés générales de compréhension de la participation ainsi
que des distinctions utiles pour le reste de l’ouvrage. Le chapitre
d’ouverture de Min Reuchamps affiche, comme son titre l’indique, une
ambition typologique. Lorsqu’on évoque la participation du public,
assez rapidement est associée à cette idée celle de la délibération. Pour
tant, toute forme de participation n’est pas délibérative et corollairement
toute délibération n’est pas nécessairement participative. Cette contribu
tion revient sur cette distinction en définissant la participation comme la
possibilité donnée au public de prendre part, d’une manière ou d’une
autre, à la gestion de la chose publique tandis que la délibération est un
processus d’échanges d’arguments entre différents acteurs. L’objet du
chapitre consiste à explorer les expériences participatives qui emportent
une volonté délibérative afin de dresser une typologie des pratiques, en
posant cinq questions : Pourquoi ? Qui ? Quoi ? Comment ? Quand ? Ce
faisant, il vise à poser un cadre analytique à la mise à l’épreuve de la
participation proposée par l’ouvrage.
À sa suite, le chapitre de Pierre Delvenne et Martin Erpicum, intitulé
Critiquer les méthodes participatives ou succomber au chant des Hespé
rides ?, a pour objectif de démontrer que des courants antagoniques
existent et s’affrontent à l’intérieur même de la science politique, con
cernant l’utilité, l’objectivité et la signification de la participation pu
blique. Cette contribution est d’abord rédigée sur base d’un carnet de
notes prises à l’occasion d’un Congrès mondial de science politique à
Santiago de Chile, en 2009, auquel les auteurs ont présenté leurs tra
vaux. Décortiquer ce microévénement leur permet de discuter plus
largement des critiques, des avantages, de la neutralité et des limites de
la participation publique et des techniques qui y sont associées. Tout en
prenant parti en faveur des processus de participation publique, les
auteurs n’en ouvrent pas moins à la discussion certains présupposés
normatifs des participationnistes. Ce faisant, ils plaident pour une vision
plus réflexive et radicale de la participation publique, misant davantage
sur le caractère constructif du dissensus et prenant en compte les enjeux
de pouvoir à l’intérieur et à l’extérieur des exercices participatifs.
Après cette première partie typologique et analytique, les deux par
ties centrales qui constituent le c!ur de l’ouvrage comprennent des
comptesrendus critiques de recherches réparties en deux grandes caté
gories selon la finalité pour le chercheur en science politique : d’une
part, l’exploration de controverses (deuxième partie, chapitres 3 à 6) et,
d’autre part, la participation comme méthodologie pour l’action pu
16
Introduction : à l’épreuve de la participation
blique et l’évaluation de politiques publiques (troisième partie, cha
pitres 7 à 10).
L’ouvrage permet ainsi d’explorer une diversité de méthodes partici
patives : atelier scénario (chapitre 4), méthode Delphi (chapitres 5, 7, 8
et 9), conférence de citoyens (chapitre 6), dialogue participatif (cha
pitre 10), focus groups (chapitres 11 et 12) – auxquelles on peut encore
ajouter une méthode « maison », l’Open Process Workshop, combinai
son de focus group et d’atelier scénario (chapitre 3). En plus de corres
pondre à des pôles de recherche et d’activités inscrits dans le fonction
nement du SPIRAL, la présentation par finalités de recherche a paru
préférable à une exposition centrée sur les méthodes – l’ouvrage ne se
voulant pas un guide ou un vademecum pour la mise en !uvre pratique
de méthodes participatives.
Nous souhaitions également éviter d’induire l’idée que certaines
techniques seraient plus appropriées à certains thèmes de recherche
plutôt qu’à d’autres. Le choix d’une méthode en particulier ne repré
sente qu’un facteur parmi d’autres à prendre en considération (type de
public, accessibilité, cadre institutionnel, environnement de recherche,
lien avec le processus décisionnel, coût, temps disponible, etc.). En
revanche, la finalité de la recherche détermine bien le statut accordé à la
participation au cours du processus.
Quatre contributions s’attachent d’abord à montrer l’intérêt heuris
tique de méthodes participatives pour explorer des controverses et des
processus marqués par une incertitude scientifique ou politique. Dans Le
projet SCoPE : la construction de l’action publique en univers incer
tain, Geoffrey Joris et Frédéric Claisse reviennent sur une recherche
dont l’objectif était de fournir au décideur (gouvernements régionaux et
fédéral belge) une sorte « d’outil d’interface » entre science et politique,
dans un contexte de gestion des risques marqué par la précaution. Le
projet SCoPE s’inscrivait dans le cadre d’une démarche évaluative
intégrée prenant en compte les aspects écologiques, économiques et
sociaux en vue d’un développement durable. Dans un premier temps, le
chapitre expose les grands apprentissages des études de terrain, portant
sur les ondes électromagnétiques en Région wallonne et sur les poli
tiques de décontamination des sols aux métaux lourds. Les auteurs
montrent comment ces études de cas ont permis de dresser une série
d’éléments à prendre en considération dans le cadre de processus déci
sionnels dans lesquels le principe de précaution est mobilisé. Le chapitre
expose également une méthode participative originale mise au point
spécifiquement pour la conduite de l’étude, l’Open Processus Workshop
(OPW). Afin de mettre en évidence la pertinence de cet outil en tant
qu’instrument d’investigation sociale, le chapitre montre comment la
technique de l’OPW, suivant une approche bottomup, permet
17
La participation à l’épreuve
d’enclencher un « bout de théorie » en partenariat avec les acteurs
mobilisés par l’étude de cas.
Les domaines des risques industriels et de l’innovation socio
technique ne sont pas les seuls à produire de l’incertitude et à générer de
la controverse. L’avenir institutionnel de la Belgique fournit à Jérémy
Dodeigne l’occasion d’un chapitre, intitulé La circonscription électorale
fédérale en Belgique : une approche délibérative, où il présente les
résultats d’une expérience d’atelier scénario avec des citoyens chargés, à
petite échelle, de discuter de l’idée d’une circonscription électorale
fédérale (CEF). Ce projet de réforme électorale, à l’initiative du groupe
PAVIA, avait connu un intérêt tout particulier au cours de la période
préélectorale du 10 juin 2007. Durant la campagne, les hommes et les
femmes politiques s’étaient positionnés, tandis que les éditorialistes du
Nord et du Sud du pays s’étaient exprimés plus ou moins favorablement
à l’idée. Dans ce chapitre, ce n’est pas tant l’analyse de ces processus
qui a nourri la curiosité du chercheur que le regard citoyen sur la ques
tion. Aussi atil opté pour un protocole délibératif et prospectif afin de
mieux connaître – et comprendre – ces opinions citoyennes. Mobilisant
douze personnes de l’arrondissement liégeois, deux experts universi
taires, ainsi que les résultats d’une enquête auprès de mandataires
politiques, ces ateliers scénario eurent lieu à l’automne 2009, avant la
crise politique majeure de 20102011. Les ateliers ont permis de faire
émerger trois profils d’électeurscitoyens, en combinant leur attitude par
rapport à la CEF et leur comportement de vote.
C’est à une autre incertitude, touchant cette fois à des enjeux de sé
curité nationale, qu’invitent Sébastien Brunet et Stéphanie Vanhaeren
dans le chapitre suivant, Une application de la méthode Delphi : la
recherche « Food Terrorism » pour CCMS/OTAN. Si d’autres chapitres
de cet ouvrage utilisent les résultats de recherches menées grâce à la
méthode Delphi, celuici est en revanche celui qui se rapproche le plus
de l’esprit initial de cette méthode, développée durant la guerre froide
aux ÉtatsUnis par la RAND Corporation dans le but de recueillir
l’opinion anonyme d’experts sur les futures capacités technologiques
mobilisables lors d’un conflit armé. Dans un contexte encore marqué par
le 11septembre, le CCMS (Commitee on the Challenges on Modern
Society – Comité sur les Défis de la Société Moderne) de l’OTAN avait
commandité une étudepilote afin d’identifier les agents biochimiques
susceptibles d’être utilisés dans le cadre d’une attaque terroriste qui
viserait la chaîne alimentaire. L’enquête Delphi devait permettre de
passer en revue différents scénarios (en termes de « cahier des charges »
pour le terroriste : coût d’approvisionnement, compétences techniques,
impacts sur la santé, etc.) ainsi que d’inventorier les moyens de mitiga
tion existants et, le cas échéant, de formuler des recommandations et
18
Introduction : à l’épreuve de la participation
proposer des pistes de solution. Le chapitre met en évidence le caractère
contingent qui fait pourtant la force d’une telle méthode prospective,
toujours liée à un questionnement situé dans le temps et dans l’espace.
Changement d’échelle avec le chapitre Meeting of Minds : tempête
de cerveaux dans un verre d’eau ?, dans lequel Sébastien Brunet et
Frédéric Claisse proposent un retour critique sur cette expérience hors
du commun de conférence de citoyens sur les neurosciences, qui aura
conjugué les efforts de 126 citoyens européens et l’expérience d’une
dizaine d’instituts d’évaluation technologique, réunis à l’initiative de la
Fondation Roi Baudouin et avec le soutien de la Commission euro
péenne. Processus complexe et multidimensionnel, Meeting of Minds
s’est finalement moins heurté aux difficultés pratiques et logistiques de
la participation à échelle internationale (dans l’ensemble bien antici
pées), qu’à ses propres ambivalences et contradictions. En revenant sur
un épisode particulièrement emblématique de la deuxième convention
européenne qui marquait le point culminant du processus, les auteurs
mettent en évidence les tensions qui résultaient, d’une part, de
l’ambivalence de l’expertise accordée aux citoyens et, d’autre part, de la
focalisation excessive sur une méthodologie participative devenue par
moments à ellemême sa propre fin. Le chapitre illustre ainsi les im
passes de ce que les auteurs appellent une conception « performative »
de la participation, caractérisée par l’indifférence à la production con
crète des participants, dont la principale qualité est en réalité d’avoir été
performée par le dispositif. Au lieu de servir d’outil d’exploration de
controverse et de source d’enrichissement du processus de décision
(dont Meeting of Minds était d’ailleurs déconnecté), la conférence de
citoyens a paradoxalement fini par faire passer les neurosciences à
l’arrièreplan pour ne plus « fabriquer » que du dispositif et de la parti
cipation.
La seconde série d’expériences participatives, décrites dans la troi
sième partie de l’ouvrage, étaient quant à elles ancrées dans des proces
sus institutionnels spécifiques et subordonnées à des objectifs concrets
de gouvernance et d’évaluation de l’action publique.
Dans le chapitre 7, Interpréter et retraduire une question commandi
tée : normalisation des publics cibles et dispositifs d’aides publiques,
Clémence Massart montre comment les questions des commanditaires
peuvent être porteuses de jugements implicites et ainsi compliquer le
travail de recherche. En l’occurrence, une partie conséquente du projet
aura consisté à retraduire la demande initiale (l’évaluation, auprès des
intéressés, de l’adéquation d’outils institutionnels aux besoins des
petites entreprises du secteur agroalimentaire wallon), qui avait perdu
toute pertinence suite à une série d’obstacles méthodologiques. D’un
public plus large initialement prévu par le commanditaire – les PME –
19
La participation à l’épreuve
l’échantillon a en effet finalement été réduit aux microentreprises qui
accèdent très difficilement aux aides proposées par le gouvernement
wallon. La question qui se posait alors était celle des raisons expliquant
les difficultés éprouvées par cette catégorie d’entreprises à accéder aux
aides publiques. Deux facteurs majeurs semblent ici en cause. Tout
d’abord, en raison de la profusion et de la complexité de leurs méca
nismes institutionnels, les aides manquent de lisibilité pour des entre
prises très petites qui ne peuvent se permettre de mobiliser un employé
dédié à leur inventaire. Ensuite, les microentreprises manquent de
visibilité pour la puissance publique, qui se fait de la pérennisation et de
la croissance d’une PME une idée très « normalisante » et n’axe donc
pas son action sur ce segment. Les aides ne parviennent donc pas forcé
ment aux microentreprises, ni ne sont adaptées à leurs besoins. L’étude
se conclut par une série de propositions destinées à améliorer la conver
gence entre initiatives gouvernementales et besoins locaux des micro
entreprises.
La relation au commanditaire est également au c!ur du chapitre de
Stéphane Rieppi, Petit exercice de maîtrise des facteurs extérieurs :
enquête sur l’academic detailing pour le KCE. Le projet portait sur
l’évaluation de la pratique de « visite académique », c’estàdire de
sensibilisation de médecins généralistes par des formateurs de terrain –
initiative menée par une association soutenue par les pouvoirs publics en
contrepoint de la démarche de délégués médicaux commerciaux. Basé
sur un nombre important d’entretiens semidirectifs ainsi que sur une
enquête Delphi en deux tours, le projet avait aussi mis en évidence des
tensions entre partenaires dues à des querelles méthodologiques, épisté
mologiques, organisationnelles et stratégiques. C’est là un élément
souvent négligé lors de la mise en place d’un projet de recherche, sur
lequel se penche l’auteur : les aspects relationnels non seulement entre
équipes de recherche issues de domaines et de cultures scientifiques
hétérogènes, mais aussi entre ces équipes et leurs commanditaires. Le
chapitre propose un retour d’expérience sur cette enquête sous tension,
confiée à des chercheurs du centre de recherche SPIRAL, analysée sous
l’angle des difficultés afférentes à une recherche commanditée et tout
particulièrement à la maîtrise de facteurs extérieurs : qualité de
l’échantillon fourni, rapports avec le commanditaire, divergences mé
thodologiques. Plus qu’un document à vocation méthodologique, ce
texte se présente aussi comme une sorte de guide montrant l’art de la
négociation et du compromis que doit mobiliser tout chercheur.
Dans La qualité de l’air comme politique transversale : une analyse
participative de l’espace de gestion publique, Catherine Fallon, Kim
Hendrickx et Stéphanie Vanhaeren s’appuient sur une étude menée
auprès des instances fédérales et régionales chargées de la gestion de la
20
Introduction : à l’épreuve de la participation
qualité de l’air en Belgique. Grâce à des entretiens préliminaires suivis
d’une application informatisée de la méthode Delphi (logiciel Mesydel,
développé au centre de recherche SPIRAL), les auteurs ont pu détermi
ner que la traduction du cadre européen demanderait le déploiement
d’une approche transversale environnementsanté associant tous les
niveaux de pouvoir. Les répondants dénoncent toutefois l’absence
d’intégration de ces politiques aux niveaux régional et fédéral : chaque
niveau de pouvoir développe une dynamique propre pour réinterpréter la
politique et les instruments définis au niveau européen. L’enquête
Delphi a permis de mettre en évidence l’adéquation de l’outil au secteur
administratif, dont les membres semblent plus prompts à répondre que
les scientifiques.
En clôture de cette troisième partie, le chapitre de Catherine
Zwetkoff et Céline Parotte traite d’une question posée jusquelà en
pointillés à travers l’ouvrage : comment évaluer ces dispositifs participa
tifs ? Qu’apportentils au processus de décision ? En quoi sontils des
facteurs de changement institutionnel ? Leur étude de cas a pour objet
une évaluation partielle et procédurale du fonctionnement du pro
gramme participatif mis en place par l’ONDRAF (organisme fédéral en
charge de la gestion des déchets radioactifs en Belgique) pour
l’élaboration du Plan Déchets (déchets nucléaires de catégories B et C)
et la préparation de l’évaluation environnementale stratégique qui
l’accompagne. Les données empiriques collectées (principalement des
données d’observation non participante du fonctionnement des dia
logues et de la conférence interdisciplinaire) confortentelles un lien
entre la qualité procédurale du programme participatif et son utilité ?
Cette question renvoie à celle portant sur la validité des fondements de
l’ouverture du processus décisionnel aux « profanes ». La qualité procé
durale du programme maximisetelle, in fine, et sous quelles condi
tions, l’acceptation de la décision par les participants, les acteurs con
cernés, voire le public (appropriation), indépendamment de son impact
potentiel sur la légitimité substantive de la décision (qualité « informa
tionnelle » liée à l’hybridation des savoirs) ?
Après ces deux parties centrales consacrées à l’analyse d’expériences
participatives dans le cadre de controverses ou de gouvernance institu
tionnelle, la quatrième et dernière partie, « Transmission », ouvre
l’ouvrage à d’autres horizons. Elle comporte deux textes réunis par le
même souci d’intégrer une méthode participative, celle du focus group,
dans un contexte d’enseignement.
La formation des étudiants à cette méthode est au c!ur des préoccu
pations de Sébastien Brunet, Céline Parotte et Stéphanie Vanhaeren
dans leur chapitre intitulé L’enseignement des focus groups en science
politique. Au cours du cursus de science politique à l’Université de
21
La participation à l’épreuve
Liège, les étudiants de deuxième année de baccalauréat en science
politique sont invités à réaliser l’exercice de conduite de focus groups
dans le cadre du cours de méthodologie qualitative. Cette contribution
permet de comprendre la dimension formatrice, parfois ludique, et les
apports liés à l’apprentissage d’entretiens de groupe. Les auteurs présen
tent les retours d’expériences d’étudiants à travers huit étapes chronolo
giques qui mènent au focus group (définition des thèmes ; élaboration
du protocole ; définition de la populationcible et composition du
groupe ; élaboration du guide d’entretien ; groupe test ; recrutement des
participants ; animation proprement dite ; analyse). Le chapitre se base
sur une documentation abondante recueillie au fil de plusieurs années
d’enseignement, notamment sur les rapports d’analyse des étudiants
cités à titre d’illustration.
À la différence de ces étudiants, futurs professionnels formés à la
méthode des focus groups, ceux qu’étudie Geoffrey Grandjean dans le
dernier chapitre en sont les sujets, dans le cadre d’une recherche sur la
mémoire et la transmission de faits génocidaires. Dans ce chapitre,
intitulé Parler de(s) génocide(s) avec des jeunes : appréhender un sujet
difficile par des focus groups longitudinaux, l’auteur s’intéresse aux
discussions de jeunes Belges francophones sur un thème difficilement
appréhendable, le génocide des Juifs, dans une perspective de socialisa
tion politique. Le but est d’interroger l’adéquation entre ce thème et la
possibilité de le traiter à travers des focus groups longitudinaux. Pour ce
faire, les modalités concrètes de mise en place d’une telle méthodologie
sont explicitées afin d’en envisager leur pertinence. La contribution met
en avant l’importance de facteurs comme le recrutement, le lieu où se
déroulent les discussions, l’impact d’une mortalité du panel, le rôle de
l’animateur ou encore la validité des données récoltées. L’ensemble de
ces points est mis en perspective avec la dynamique sociale qui caracté
rise cette méthodologie, soulignant ainsi son potentiel pour les études
sur la socialisation politique.
Dans la conclusion générale de l’ouvrage, Sébastien Brunet revient
sur la tension entre la nécessaire « consolidation méthodologique » des
dispositifs participatifs et leur caractère toujours imprévisible – rien ne
pouvant garantir le résultat final. À travers la notion de « forum hy
bride », il insiste également sur l’importance de l’intégration des ci
toyens et autres experts d’usage, non seulement pour pallier les mul
tiples réductions qu’imposent les mécanismes de la démocratie
représentative, mais aussi pour enrichir la démarche scientifique pro
prement dite : la participation fournit des instruments précieux dans une
démarche de production de connaissance.
Les contributions réunies dans cet ouvrage témoignent ainsi d’un ef
fort collectif non pas tant pour « mettre à l’épreuve » la participation que
22
Introduction : à l’épreuve de la participation
pour essayer de s’élever à ses exigences et ses implications tant poli
tiques que scientifiques. Il s’agissait de présenter un état forcément
provisoire des recherches et des réflexions menées par un centre de
recherche qui a fait de la participation un de ses instruments de travail.
L’ouvrage aura rempli son ambition s’il réussit à faire partager au
lecteur le goût de la participation et la conviction que celleci se trouve,
pour reprendre le mot de Charles S. Peirce, sur le « chemin de
l’enquête ».4
Bibliographie
Blondiaux, L. et Fourniau, JM., « Un bilan des recherches sur la participation
du public en démocratie : beaucoup de bruit pour rien ? », Participations, n°1,
p. 835.
Callon, M., « La sociologie peutelle enrichir l’analyse économique des externa
lités ? Essai sur la notion de cadragedébordement », in Foray, D. et Mairesse,
J. (dir.), Innovation et performances : approches interdisciplinaires, Paris, Éd.
de l’EHESS, 1999, p. 399431.
Chateauraynaud, F., La Faute professionnelle, Paris, Métailié, 1999.
Claisse, F., Laviolette, C., Reuchamps, M. et Ruyters, C. (dir.), La participation
en action, Bruxelles, Peter Lang, coll. « Méthodes participatives appliquées »,
2013.
Slocum, N., Elliott, J., Heesterbeek, S. et Lukensmeyer, C. J. (dir.), Méthodes
participatives. Un guide pour l’utilisateur., Duvieusart, B., Lisoir, H., Rauws,
G. et Van Campenhout, A. (coord.), Bruxelles, Fondation Roi
Baudouin/Vlaams Instituut voor Wetenschappelijk en Technologisch
Aspectenonderzoek (viWTA), 2006.
Thoreau, F., « Embarquement immédiat pour les nanotechnologies respon
sables : Comment poser et reposer la question de la réflexivité ? », Thèse de
sciences politiques et sociales soutenue à l’Université de Liège le 12 avril
2013.
4
Les coordinateurs remercient particulièrement et chaleureusement Min Reuchamps
pour ses commentaires lors de la finalisation de l’ouvrage, ainsi que Charlyne Audin
pour sa relecture de l’ensemble du manuscrit.
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