Le forum gallo-romain de Feurs (Loire)
Paul Valette, Vincent Guichard
To cite this version:
Paul Valette, Vincent Guichard. Le forum gallo-romain de Feurs (Loire). Gallia - Fouilles et
monuments archéologiques en France métropolitaine, Éditions du CNRS, 1991, 48, pp.109-164.
10.3406/galia.1991.2918. hal-01915155
HAL Id: hal-01915155
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Submitted on 19 Jan 2020
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Le forum gallo-romain de Feurs (Loire)
par Paul VALETTE* et Vincent GUICHARD**
La ville de Feurs — l'antique Forum Segusiavorum, chef-lieu de la cité des Ségusiaves — était la première
étape importante le long de la voie d'Aquitaine, à 50 km à l'ouest de Lyon. La connaissance de l'histoire et de
l'urbanisme de la ville antique a largement progressé à la suite de la politique de prévention archéologique mise
en place depuis la fin des années 1970. On expose ici la documentation rassemblée sur l'un des plus importants
édifices publics de la ville : le forum. Outre l'identification d'un plan tripartite, classique dans les provinces
occidentales de l'Empire, associant en un ensemble cohérent espace sacré (temple entouré d'une galerie à
cryptoportiques), place centrale (bordée de larges portiques abritant des «boutiques») et groupe basilique-curie,
le principal apport des fouilles récentes est la datation précoce du forum (vers 10/30 après J.-C), déterminée par
des arguments stratigraphiques. Alliée à la cohérence du projet architectural, cette datation montre que le
schéma tripartite était déjà bien implanté en Gaule lyonnaise dès les premières décennies de l'Empire.
On évoque aussi brièvement les principaux résultats acquis sur la trame urbaine de la ville antique, dont le
forum peut être considéré comme le pivot.
Feurs, the ancient Forum Segusiavorum, chieftown of the Segusiavi, was the first important stop on the Roman
road leading to Aquitaine, 50 km west of Lyon. Our knowledge of the history and the urbanisation of the Gallo-Roman
town has progressed considerably in recent years, due to systematic archaeological recording since the late 70's. This
paper presents evidence for one of the most important public buildings of the town' the forum. Besides the
identification of a tripartite plan, already well known in the western provinces of the Roman Empire, the main result from
recent excavations is an early dale for the forum (ca. 10/30 A.D.), which is based on slraiigraphical observations. The
perfect coherence of the plan of the monument shows that the scheme of the tripartite forum was already wellestablished in Gallia Lugdunensis in the first decades of the Empire.
The main results obtained about the spatial organization of the Roman town are also discussed, and it appears
that the forum is the central point from which the layout of the city was planned.
Mots clés : forum, urbanisme, gallo-romain, Ier s. après J.-C, Feurs, Loire.
* 6, rue Voltaire, 421 10 Feurs.
** Musée Déchelette, 42300 Roanne.
Gallia, 48, 1991.
110
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Nous présentons ici la synthèse des données
disponibles sur le forum gallo-romain de Feurs,
monument sur lequel nous avons eu l'occasion d'intervenir
à plusieurs reprises depuis 1978 à l'occasion de
fouilles de sauvetage. La ville est depuis longtemps
identifiée au Forum Segusiavorum de Ptolémée et de
la carte de Peutinger. Elle est située au centre de la
plaine du Forez, à 50 km à l'ouest de Lyon, au cœur
du territoire présumé du peuple ségusiave, le long
d'un itinéraire emprunté à l'époque romaine par la
voie du réseau d'Agrippa joignant Lyon à Saintes via
Clermont-Ferrand et Limoges.
Les premières observations archéologiques
précises effectuées sur le site datent d'avant le milieu du
xixe s. Elles ne connurent malheureusement pas de
suite et il faut attendre la fin des années 1970 pour
que des chantiers de sauvetage urbain apportent des
données nouvelles sur le sujet. Après celui consacré à
l'habitat gaulois, dont les vestiges ont été retrouvés
sous le forum (Vaginay, Guichard, 1988), les pages
qui suivent constituent le deuxième dossier que nous
permettent de livrer dix années d'observations
archéologiques sur la ville antique de Feurs.
La documentation disponible sur le forum de
Feurs n'est pas définitive, tant s'en faut, les
observations ayant été conditionnées par le hasard des
opérations d'urbanisme. Néanmoins, le dossier ayant
peu de chance d'évoluer dans les années à venir, il
nous a paru opportun de ne pas différer plus la
publication des données que nous avons rassemblées, qui
permettent déjà une restitution en plan presque
complète du monument.
Cette mise à plat des données archéologiques
justifie sans doute une analyse architecturale plus
développée que celle que nous esquisserons. Cette
analyse a en fait été conduite parallèlement à l'étude
archéologique et a donné lieu à des confrontations
fructueuses1.
1 M. Pierre André, architecte DPLG, a suivi depuis le
début l'évolution du dossier. Nous lui exprimons notre très
sincère reconnaissance pour la patience dont il a fait preuve
pour tenter d'éclairer notre lanterne sur les problèmes
architecturaux posés par les fora. Les résultats de l'étude qu'il a
réalisée, qui débordent largement les ambitions de cet article,
feront l'objet d'une publication ultérieure. Ils ont par ailleurs
donné lieu à la construction d'une maquette de l'élévation, à
l'échelle de 1 cm par mètre, qui est présentée au Musée
municipal de Feurs depuis janvier 1990.
Nous devons également remercier nos collègues et
collaborateurs sans lesquels cette étude n'aurait pu voir le jour, en
premier lieu desquels MM. Michel Vaginay, qui nous a laissé
toute latitude pour étudier les résultats d'une fouille de
sauvetage réalisée par ses soins en 1981 à l'emplacement de l'égout
du forum, et Jean-François Juliaa, qui a participé à toutes les
opérations de terrain depuis 1978.
Fig. 1 — Plan de Feurs intra-muros, levé en 1768 par
P. Brissat (original conservé au musée de Feurs), montrant en
particulier le tracé de l'enceinte de la fin du xive s. ; on a
superposé au plan l'emprise du forum.
À la partie purement documentaire, qui forme
l'essentiel de cet article, nous avons également joint
une étude comparative et des éléments d'analyse de
l'arrière-plan historique de la construction du forum,
qui se justifient par la nouveauté que constitue, pour
ce type de monument, l'existence à Feurs de critères
stratigraphiques précis pour en assurer la datation2.
La redécouverte du forum
«Cette ville [antique] ayant été absolument
détruite, je ne sais de quelle manière, les Comtes de
Forez se bâtirent un château sur les ruines d'un vieil
édifice, et c'est ce qui fit former peu à peu la ville
dans l'état où elle est aujourd'hui». Cette phrase de
l'abbé Duguet écrite au début du xvme s. (Durand,
1880, p. 240-241) résume assez bien, quoique de
façon laconique, l'évolution urbaine de Feurs depuis
l'Antiquité et le rôle qu'a pu jouer l'implantation du
forum dans cette évolution. Ses ruines ont en effet
servi de support à la première fortification médiévale
attestée à Feurs (fig. 1).
Les mentions anciennes des monuments
antiques de Feurs ne sont pas nombreuses et ne
concernent de manière précise que des découvertes
2 La partie documentaire (p. 112-150) a été rédigée par
Vincent Guichard, la partie comparative et historique (p. 151160) par Paul Valette. Les frais occasionnés par cette étude ont
été partiellement pris en charge par une aide à la publication
allouée par le Ministère de la Culture et par des crédits du
Conseil général de la Loire.
FORUM DE FEURS
111
épigraphiques (La Mure, 1674, p. 71-105). C'est
l'abbé Duguet qui mentionne «les vieilles ruines
romaines» sur lesquelles fut édifié le château et les
«couloirs souterrains» que «dans le temps des guerres
civiles on pratiqua [...] dans plusieurs caves pour se
cacher ou aller au puits de chaque place : telles sont
les caves du sieur Jacques Bernard, médecin, à la
porte du Palais [extrémité nord de l'actuelle rue du
Palais]». S'agit-il d'une allusion au conduit
d'assainissement du cryptoportique? Le château, ruiné
depuis longtemps à l'époque où il écrivait ces lignes,
est mentionné pour la première fois dans une charte
de 1246 (« clausuram et castri de Foro»; Chartes du
Forez, V, 619). Des textes postérieurs, datés de 1248
(idem, IX, 573), permettent d'entrevoir un ensemble
castrai modeste, ceint de murailles et de fossés, à
proximité duquel sont édifiées quelques maisons (« in
burgo et iota villa de Fuer»). Se référant à un terrier
de 1473 3, A. Broutin (1867, p. 145-146) localise cet
édifice «à l'emplacement du presbytère actuel»,
l'ancien hôtel de la famille Gaudin au xvme s., au nordest de l'enceinte urbaine du xives.4. Il occupait
donc la moitié environ de la zone centrale du forum.
La fouille de 1978, située plus au sud, n'a mis en
évidence aucune structure pouvant se rapporter à
cet ensemble, si ce n'est, à la limite nord de l'aire
explorée, une zone de forts remblaiements recoupant
les sols antiques et qui peut correspondre à une
partie des fossés, comblés au xive s. L'installation de
nouveaux habitants à l'ouest et au sud de cette
enceinte, dès le milieu du xme s., témoigne de son
exiguïté (Charles du Forez, IV, 573). Cette occupation
est confirmée par des trouvailles monétaires
effectuées lors de la fouille de l'îlot de la Boaterie5 dans
les niveaux qui recouvraient les vestiges du forum.
Mais il devait y avoir fort longtemps que dans ce
secteur le forum n'était plus qu'un champ de ruines,
déjà arasées au niveau où nous les avons
découvertes. Les témoignages de la plus ancienne
occupation médiévale remontent aux vie/ixe s. (Valette,
1983, p. 74-75) 6. Il y avait là une source
d'approvisionnement en matériaux de construction de tout
premier ordre et il ne fait pas de doute que les
maçons médiévaux de Feurs, et certainement aussi
leurs successeurs, y ont abondamment puisé. Les
comptes de construction des murailles élevées en
1388 (Gonon, 1974) ne mentionnent pas de façon
explicite la démolition de murs antiques dans le
secteur du forum1. Pourtant l'examen des lambeaux de
rempart qui subsistent encore montre de nombreux
réemplois de moellons de granite rose d'origine
antique. Les éléments de construction en calcaire et en
marbre ont dû par ailleurs être systématiquement
recherchés, les environs de la ville étant totalement
dépourvus de source naturelle de chaux8. Ces
murailles de la fin du xive s. reprennent en partie,
semble-t-il, des fortifications plus anciennes9 dont
elles auraient réutilisé les matériaux. C'est dans ces
dernières que se serait trouvé inclus l'angle nord-est
de la curie, assurant ainsi sa conservation jusqu'à ces
dernières décennies.
Aussi, ce que l'on peut entrevoir à travers les
textes de l'organisation du bourg médiéval laisse
présumer que son parcellaire devait peu aux puissantes
substructions antiques qu'il recouvrait. La place de
la Sarzillerie (aujourd'hui place du Puits de l'Aune),
située sur une partie de la branche sud du
cryptoportique, est mentionnée dès 1373 dans deux testaments
(Fournial, 1967, p. 56). Les ruelles qui s'y rejoignent,
dont la rue du Château, antérieure au xve s., ne
respectent nullement les orientations qu'aurait pu
suggérer le forum. Ce n'est d'ailleurs que très
ponctuellement que nous avons pu observer, lors des fouilles de
1978, des tronçons de murs appartenant à des
édifices du xve s. prenant appui sur des maçonneries
antiques. En revanche, les structures enterrées du
cryptoportique ont été propices à l'installation de
nombreuses caves au Moyen Age. Son déblaiement
partiel explique les nombreux remplois de calcaire
jaune ou blanc dans les façades de maisons
anciennes, voire du xixe s., situées à son
emplacement. C'est le cas de certains immeubles bordant
l'actuelle rue de Roanne, percée dans les années
1820, qui longe la façade occidentale du
cryptoportique.
3 Terrier de Feurs renouvelé par Gilbert Jurieu, 14731474, Archives départementales de la Loire, B 2030.
4 Localisation reprise par E. Fournial (Fournial, 1967,
p. 56).
5 Des deniers ou oboles d'argent des archevêques de
Vienne et de Lyon, un denier de billon du marquisat de
Provence (Raimond VI ou Raimond VII). Monnaies inédites.
6 Une agrafe à double crochet, deux plaques-boucles en
bronze (vie-vne s.), un denier de Louis le Pieux (814) et un
denier de Salerne (839-849).
7 Ce qui est le cas en au moins un autre point de
l'agglomération, puisqu'un certain Jean Fadot est payé «pour
abatre et disruyr 20 tezes [20 toises, soit environ 25 m] de la
muralle des Sarazins en les Crotes».
8 Un four à chaux est mentionné dans le terrier de
1473. Le texte de 1388 n'en mentionne pas à Feurs, bien que la
construction du rempart ait nécessité près de 300 «charrées» de
chaux !
9 «A payé à Janin compaign de Felibert qui ha abattu
de la muralle du murs qui sont autour de la ville de Fuer»
(Gonon, 1974, art. 322).
112
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Nous concevons alors clairement que ce
monument ait pu rester longtemps oublié, jusqu'à ce que
les explorations «souterraines» et la perspicacité de
l'abbé Roux, curé de Feurs dans les années 1840,
permettent d'en entrevoir l'importance. C'est lui en
effet qui a effectué le premier relevé du réseau de
galeries d'assainissement du cryptoportique et qui y
a reconnu un élément d'un complexe monumental
qu'il identifie immédiatement à un forum (Roux,
1851).
Après la publication de Roux, et pour de
longues décennies, le passé antique de Feurs retombe
largement dans l'oubli par manque d'observateurs
possédant la même clairvoyance que ce pionnier. Il
faut attendre 1955 pour voir le dégagement de la
partie est du monument (curie et basilique) lors de la
création de la place de la Boaterie. La construction
de la nouvelle poste, en 1968, permettra de
compléter le plan de la partie nord de la basilique.
A partir de 1978, la multiplication des
opérations de rénovation dans le centre-ville va provoquer
une série d'interventions de sauvetage, conduites le
plus souvent dans des conditions difficiles.
Néanmoins, ces travaux précisent le tracé du
cryptoportique et de son égout, localisent les cellules et le
portique de la place centrale du forum ainsi que le
podium du temple de Varea sacra, tout en apportant
de substantielles indications stratigraphiques.
Dernièrement, au printemps 1991, des travaux de
réfection de voirie à l'emplacement du forum (place du
Puits de l'Aune et rue du Palais) ont permis de
vérifier et compléter le plan de l'aire sacrée. Ces travaux
n'ayant pu être précédés d'une fouille archéologique
systématique, les observations sommaires effectuées
à cette occasion ont été intégrées en totalité (et en
dernière minute !) au sein de cet article.
Un aperçu des derniers travaux de fouille sur le
forum a été donné récemment, dans lequel on avait
notamment souligné la possibilité de raccorder de
façon cohérente les vestiges monumentaux repérés
depuis plusieurs dizaines d'années dans le centre de
Feurs dans le cadre d'un complexe monumental s'intégrant parfaitement dans le schéma classique des
fora tripartites de l'Occident romain (Vaginay,
Valette, 1982). On ne reviendra donc pas sur
l'identification des différentes parties du complexe
(basilique, curie...), tout en soulignant que les travaux
effectués depuis lors (prospection de caves et
sondages) ont permis de localiser le temple intégré au
forum, dont l'existence avait été alors seulement
supposée. On avait également discuté avec un certain
détail les indices de datation fournis par la
stratigraphie ; en l'absence de données nouvelles, on se
contentera ici de résumer les conclusions auxquelles
avait abouti cette étude. On devra en revanche
reconsidérer méticuleusement le problème de la
restitution du plan d'ensemble du monument10, puisqu'il
s'est avéré que les données planimétriques
disponibles au moment de la parution de cette première
étude étaient nettement trop imprécises pour
assembler correctement les différents relevés partiels. De
plus, les observations récentes permettent de
considérer d'un regard plus critique les renseignements
fournis par Roux sur le plan du cryptoportique et
qui avaient alors été utilisés dans la première
ébauche de restitution.
Les vestiges du forum
Si l'on met de côté les observations de Roux au
siècle dernier, les données archéologiques disponibles
sur l'ensemble monumental du forum proviennent de
travaux étalés sur les trente dernières années, dont la
fiabilité et la précision sont très variables. La
reconstitution du plan d'ensemble du monument
présente donc de réelles difficultés puisqu'il s'agit de
raccorder des relevés effectués à des dates différentes
et toujours entachés d'une certaine marge d'erreur.
Il sera donc nécessaire de discuter les résultats de
chaque campagne de fouille ou de relevés avant
d'entreprendre la restitution de ce plan. On décrira
successivement, en procédant d'est en ouest, les données
disponibles pour l'ensemble basilique-curie, puis la
place centrale et ses portiques latéraux, l'aire du
temple et son cryptoportique, enfin l'égout
d'assainissement du cryptoportique. Certaines des données
relatives à ces différentes parties du monument, qui
se déduiront de la restitution du plan d'ensemble,
n'apparaîtront donc que dans le paragraphe consacré
à cette restitution. Les différentes interventions sont
localisées sur la figure 2.
Deux paragraphes complémentaires seront
également consacrés aux matériaux utilisés pour la
construction et à leur mise en œuvre, ainsi qu'à la
synthèse des indications stratigraphiques de
datation.
La partie orientale du forum :
la basilique et la curie
Historique des travaux
Bien que connus de longue date, puisque inclus
dans les fortifications médiévales de la ville, les ves-
fig-
10 Également publié dans Gallia, 40, 1982, p. 406,
FORUM DE FEURS
113
Fig- 2 — Localisation des interventions sur les vestiges du forum.
1 : curie et partie centrale de la basilique
(fouilles de 1955-56),
2 : façade nord de la basilique (fouilles de 1968),
3 : aile sud du portique de la place centrale
(fouilles de 1978-79),
4 : mur intérieur du cryptoportique
(repérage imprécis lors de travaux en 1967),
5 : idem (vestiges apparents dans une cave),
6 : idem (fouilles de 1980),
7 : idem (vestiges apparents dans une cave),
8 : mur extérieur du cryptoportique
(vestiges apparents dans une cave),
9 : idem? (vestiges de maçonnerie apparents
dans une cave),
10 : exèdre (repérage lors de travaux en 1991),
11 : platée de fondation du temple
(fouilles de 1984),
12 : idem (vestiges apparents dans une cave),
13 : platée de fondation du temple et extrémité
nord-est du cryptoportique
(repérage lors de travaux en 1991),
14 : emmarchement de la place centrale
(vestiges apparents dans une cave).
tiges de la curie n'ont fait l'objet d'observations
précises qu'au cours des dernières décennies, tandis que
les premiers éléments de la basilique commençaient à
être dégagés, sans pourtant être identifiés comme
tels, au cours des années 1950.
Le tracé anguleux du rempart médiéval dans sa
partie nord-est s'explique par l'annexion d'éléments
architectoniques du forum. De ceux-ci, les vestiges
de la curie étaient certainement les mieux conservés,
puisque le rempart forme à son emplacement un
véritable bastion, qui s'explique par l'intégration à
la fortification de ses façades est et nord. Roux les
décrit déjà dans sa monographie (Roux, 1851,
p. 48) : « II existe, à l'est [du crytoportique], dans le
jardin de la cure, deux pans de murs antiques dont
les contreforts furent arrachés au moyen-âge. Ils
sont construits dans le même système que ceux des
égouts [conduits d'assainissement du
cryptoportique], en petit appareil et à bain de mortier : les
revêtements ont été formés par encaissement, avec
des moules mobiles comme ceux du pisé ; ils n'ont
pas de zones de briques, et indiquent l'époque de la
bonne construction. Des travaux exécutés, il y a
quatre ans, dans un jardin appartenant à M. Boissonnet, mirent à découvert un petit bâtiment carré,
dont l'isolement, l'exiguïté et la disposition me font
penser que c'est la cella d'un temple [il s'agit peutêtre d'un des édicules disposés de part et d'autre de
la curie]». Des photographies prises avant 1952 (voir
infra, fig. 10 et 11)11 montrent qu'à cette époque le
mur est s'élève encore de 2 m au-dessus du sol et le
mur nord d'environ 5 m. La surface qui correspond à
la partie intérieure de la curie, abondamment
remblayée, est alors occupée par un jardin situé à près de
2 m en contre-haut des parcelles qui le jouxtent au
nord et à l'est. Ce quartier de la ville moderne a subi
d'importants réaménagements au cours des années
1952-1956, qui ont conduit au nivellement de ce
jardin, au dégagement de la curie (voir infra, fig. 8) et,
malheureusement, à l'arasement partiel de ses
vestiges12 (fig. 2, point 1). Plusieurs personnes se sont
alors efforcées d'enregistrer les découvertes
archéologiques au fur et à mesure de l'avancement des
travaux (notamment MM. J. Gorce et G. Brassart),
sans que puisse véritablement être organisée une
fouille de sauvetage. Il subsiste de ces observations
un plan d'ensemble des structures dégagées (fig. 3),
dû à J. Gorce, une demi-douzaine de photographies
et des indications succinctes sur la stratigraphie et le
mode de construction de l'édifice, dispersées dans
quelques notes publiées (Gorce, 1957; Gallia, 14,
1956, p. 279 et 16, 1958, p. 364) et archives
inédites 13.
11 Archives du Musée municipal de Feurs.
12 Malgré leur inscription à l'inventaire supplémentaire
des Monuments historiques depuis 1929.
13 Archives de la Direction régionale des Antiquités
historiques.
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
114
344 71
345.21
' UIZ ' 151 ' 113 ' 2iZ 'lM 1 W 'l!2 '
m (ui j zjo 4uz t a»
Fig. 3 — Plan des vestiges de la curie levé en 1956 par
J. Gorce (fig. 2, point 1); les cotes d'altitude relatives ont été
restituées selon le nivellement NGF ; les pastilles noires
indiquent l'emplacement de blocs de grand appareil en calcaire
jaune.
d'étroites tranchées orthogonales, très espacées, ce
qui rend très malaisée l'interprétation des vestiges
dégagés (fig. 4). Inconvénients supplémentaires : les
vestiges sont arasés extrêmement bas, puisque leur
sommet apparaît à une cote très nettement
inférieure à celle de la base de l'élévation de la curie (ce
qui s'explique par la localisation à cet emplacement
du fossé de la fortification médiévale), et les seuls
documents disponibles sont des relevés de géomètre
à l'état brut, sur lesquels les orientations des
parements, certainement peu lisibles à partir des
fondations dégagées, ont été manifestement mal
transcrites, et les cassures accidentelles souvent mal
distinguées des lignes de parement. On sera donc
dans l'obligation d'interpréter les observations
consignées sur ce plan, en prêtant beaucoup plus
attention aux points cotés, sûrement positionnés, qu'au
tracé lui-même. Ces sondages ont du moins permis de
trouver la limite nord des deux travées de piles
situées à l'ouest de la curie, ainsi que plusieurs autres
éléments de maçonnerie difficilement interprétables
en tant que tels, mais qui appartiennent
certainement aux fondations de la basilique (cf. infra).
Enfin, en 1988, deux sondages limités ont été
opérés de part et d'autre du mur est de la curie pour
préciser les données de nivellement et de
stratigraphie, points sur lesquels les travaux antérieurs ne
fournissent que des indications très sommaires (voir
infra, fig. 9).
Synthèse de la documentation
Ces travaux ont essentiellement permis de
relever un plan d'ensemble de la curie et de plusieurs
autres vestiges appartenant visiblement à la même
époque de construction. Il s'agit :
. à l'ouest, d'une dizaine de piles de fondation
ordonnées en deux travées parallèles à la façade de la
curie, appartenant en fait à la péristasis de la nef
centrale de la basilique ;
. à 4 m au sud de la curie, d'un bâtiment plus
petit dont le côté ouest s'appuie sur le même mur
que celle-ci.
Deux importants fragments d'une même
mosaïque à décor géométrique noir et blanc ont
également été dégagés à quelques mètres au sud de
l'angle sud-est de la curie (Stern, Blanchard-Lemée,
1975).
Le prolongement de l'ensemble monumental
vers le nord a ensuite été hâtivement exploré par une
campagne de sondages en 1968, au moment de la
construction du bâtiment de la nouvelle poste
(travaux de S. Boucher; Gallia, 24, 1971, p. 411) (fig. 2,
point 2). Cette exploration a été menée à partir
Basilique
Le mur de façade est de la basilique a été dégagé
en même temps que la curie qui y est accolée. Seul
vestige de l'édifice actuellement visible, la partie
médiane de ce mur présente une épaisseur de 1,1 m,
et est construite en petit appareil assez irrégulier.
Elle présente d'autre part deux renforcements de
même module que les piles de la péristasis, distants
de 2,0 m, de part et d'autre de l'axe de la curie
(«g- 4).
Les piles dégagées devant la curie, qui
appartiennent aux grands côtés de la péristasis de la nef,
aujourd'hui arasées et recouvertes, ont une
dimension de 1,81 sur 1,81 (± 0,01) m (fig. 5 et 6). La
distance de l'axe de la première travée au mur de
façade est de la basilique est de 5,5 m, tandis que
l'écartement des deux travées, d'axe à axe, est de
12,3 m. Au sein d'une même travée, l'écartement des
piles est assez irrégulier : il varie de 2,4 m (soit 4,2 m
entre axes) à 2,7 m (4,5 m entre axes). Les trois piles
supplémentaires dégagées en 1968 appartiennent au
petit côté de la péristasis, qui en comportait quatre à
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Fig. 4 — Plan des substructions dégagées lors de la campagne de 1968 (fig. 2, point 2); fouilles de S. Boucher, relevé de
116
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Fig. 5 — Vue depuis l'ouest de la façade ouest de la curie et
des piles de la péristasis de la basilique pendant leur
dégagement, en 1955-1956. On remarque en particulier deux blocs de
soutènement de colonnes en grand appareil subsistant dans
leur position d'origine, l'un sur une pile de fondation de la
péristasis, l'autre sur le mur ouest de la curie.
Fig. 6 — Vue depuis le sud-ouest de la façade ouest de la
curie et des piles de la péristasis de la basilique pendant leur
dégagement, en 1955-1956.
l'origine. Elles indiquent une Largeur de la nef de
12,5 m, cohérente avec les observations antérieures,
et divisée en trois espaces de 4,15 m.
La façade ouest de la basilique n'a jamais été
repérée, ce qui nous empêche de comprendre
l'articulation de l'édifice avec la place centrale du forum
(colonnade ou mur continu percé d'ouvertures plus
espacées). Son emplacement est cependant
restituable précisément par symétrie. La façade nord du
bâtiment a en revanche été partiellement dégagée en
1968, mais les relevés sont d'interprétation difficile.
Ils montrent l'existence d'un massif de maçonnerie
très large dans le prolongement du mur ouest de la
curie, avec un vide intermédiaire que l'on doit
mettre, sans doute possible, au compte de
tions médiévales (fossé de l'enceinte urbaine).
L'extrémité des murs latéraux de la nef serait donc très
élargie (1,8 m contre 1,1 m dans leur partie centrale)
et terminée par un contrefort massif (1,0 X 1,8 m),
caractéristiques qui s'expliquent par le fait que ces
maçonneries jouent le rôle de massifs de culée pour
l'ensemble de l'édifice.
Ce mur se raccorde avec un autre,
perpendiculaire, large de 1,1 m, qui est manifestement le mur
de façade nord, ce que confirme sa distance à la
péristasis (5,5 m), identique à celle relevée sur la façade
est de l'édifice. Une cellule supplémentaire
(dimensions dans œuvre : 3,0 X 11,0 m) vient se greffer sur
la façade extérieure de ce dernier ; ses parois latérales
sont situées dans l'axe des travées de la péristasis.
Deux épaississements irréguliers du mur de façade
nord dans sa partie centrale doivent être considérés
comme les fondations de deux piles engagées,
identiques à celles placées de part et d'autre de l'axe de
la curie dans le mur est. Leur écartement,
légèrement inférieur à celui des piles de la péristasis,
permet d'ailleurs de penser que l'élévation de cet exèdre
pouvait être identique à celle du compartiment
intermédiaire entre la basilique et la curie, dont les
dimensions en plan sont très proches.
Curie et bâtiments annexes
accolés à la façade est de la basilique
La documentation à l'égard de la curie est
nettement plus complète que celle disponible pour la
basilique, ce qui s'explique par son meilleur état de
conservation. L'ensemble du bâtiment est
actuellement visible, mais son remblaiement ne respecte
absolument pas les nivellements d'origine (fig. 7, 8).
Ses dimensions hors œuvre sont de 11,4 sur
20,6 m (contreforts non compris). Ses trois murs est,
nord et sud ont une largeur de 0,9 m, la fondation du
mur est étant plus massive (1,2 m de largeur — cf.
fig. 9). D'après un sondage effectué dans les années
1950, la profondeur des fondations est d'environ
2 m. À chacun de ces murs sont accolés des
contreforts de 0,9 m de largeur également, saillants de
0,6 m, et distants de 2,5 ± 0,2 m. Les façades
latérales en comportent cinq, la façade arrière (est)
quatre ; trois d'entre eux et les deux de l'extrémité
est de la façade nord ont été arasés au Moyen Age,
mais leur empreinte reste bien visible dans le
parement. À l'extrémité ouest des façades latérales, le
contrefort d'angle est engagé dans le mur est de la
basilique ; son écartement du contrefort suivant est
nettement plus large (4,0 m). La face extérieure de
ces trois murs et les contreforts sont montés en petit
appareil très régulier, avec joints en ruban, tandis
■
117
FORUM DE FEURS
Fig. 7 — Plan et
profils est-ouest
de la curie.
h
A-A :
élévations
actuelles et
stratigraphie de la basilique
vues depuis le sud (1 :
niveau d'occupation
protohistorique, scellé
par le «sol primitif»,
qui correspond au
nivellement au
moment de
l'implantation du bâtiment; 2 :
couche de remblai non
décrite par les fouilleurs ; 3 : couche de
remblai
constituée
d'éclats de calcaire
jaune tassés) ;
B-B' : restitution des
niveaux de circulation
dans l'axe
longitudinal du bâtiment;
- 2_3_
C'-C : élévations
actuelles vues depuis le
nord ; la partie grisée
correspond à une
partie de l'élévation
arasée pendant les années
1950 et restituée
d'après photographies.
B
«sol actuel
^ sol primitif
■m
U'
_ «
*
i
C
*
n
y. Lu,,-,
é
Fig. 8 — Vue générale de la curie depuis le sud-est (1988).
\^\ r&*w
que sur la face interne, si le même rythme des assises
est respecté, les moellons utilisés sont plus
grossièrement équarris et le jointoyage plus hâtif. On a pu
également remarquer tous les 0,6 m environ (soit 5
ou 6 assises) l'existence d'un joint plus épais qui
dénote le raccord entre deux «journées de travail»
(fig. 9).
Le mur de la façade ouest de la curie, qui est
également le mur de façade est de la basilique, est
sensiblement plus épais (1,1 m) et présente deux
renforcements régulièrement espacés de part et
d'autre du grand axe de l'édifice, de même module
que les piles de la basilique (1,8 X 1,8 m), et qui,
sur le côté ouest, ne s'élèvent pas plus haut que le
sommet de ces piles. Ce mur est en petit appareil
118
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
irrégulier sur ses deux faces; d'après J. Gorce, un
important bloc de calcaire jaune était inclus dans
son parement, à proximité de l'angle sud-ouest de la
curie (fig. 3). Un dé du même calcaire (module :
0,80 X 0,80 X 0,42 m), présentant un trou de louve
sur sa face supérieure, mieux travaillée, et des traces
de feu, repose encore sur une des piles engagées dans
ce mur, dans une position qui semble d'origine.
L'espace intérieur de la curie est cloisonné par
un mur de refend nord-sud de 0,9 m d'épaisseur qui
Fig. 9 — Stratigraphie du remplissage
interne de la curie, dans l'angle sud-est
(sondage de 1988).
B
34t«
—1
1 : terre végétale ;
2 : couche hétérogène brune, gravillonneuse (remblai moderne) ;
3 : fondation de mur liée avec un mortier
blanc
3'
: tranchée
pulvérulent
de fondation
(médiéval)du; mur 3;
4 : terre gris sombre tassée
(sol de travail lié à la construction de 3) ;
5 : gravier jaune grossier
(remblai antique) ;
6 : gravier gris, fin (remblai antique) ;
7 : gravier jaune, fin (remblai antique);
8 : sable blanc (apport par ruissellement) ;
9 : gravier ocre, fin (remblai antique) ;
10 : gravier ocre, grossier
(remblai antique) ;
11 : terre brun clair, gravillonneuse
(niveau protohistorique remanié) ;
12 : terre brune, gravillonneuse
(niveau protohistorique remanié) ;
13 : terre grise, avec éclats de granite rose
et galets (sol de travail) ;
14 : terre gris sombre tassée
(sol de travail) ;
15 : terre brune, gravillonneuse
(niveau d'occupation protohistorique) ;
16 : terre gris sombre, à inclusions fines;
17 : remblai hétérogène sombre, limoneux
(moderne ou médiéval);
18 : épandage de mortier (médiéval?);
19 : substratum (gravier ocre, fin);
20 : base de la fondation d'un contrefort
arasé du mur de la curie.
FORUM DE FEURS
délimite un premier compartiment très étroit à
l'ouest (3,0 X 9,6 m dans œuvre) et une grande salle
de 14,8 sur 9,6 m. Ce mur est actuellement arasé à la
cote 345,20 m NGF environ, mais une élévation
supplémentaire jusqu'à la cote 346,50 est discernable
sous forme d'un arrachement contre la paroi interne
du mur de façade nord. D'une façon plus générale, le
niveau d'arasement des murs de la curie est partout
situé à une cote comprise entre 345,00 et 346,50, soit
de 1,70 m à 3,15 m au-dessus du niveau du sol
primitif (343,80 à l'est du bâtiment), tel qu'il a été
retrouvé dans les sondages de 1988, ce sol «primitif», qui
scelle des niveaux d'occupation plus anciens,
correspondant à l'état du nivellement au moment de
l'implantation du forum. Les photographies anciennes
(fig. 10, 11) permettent néanmoins de restituer une
élévation supplémentaire de 2,7 m environ pour le
mur de façade nord, soit une élévation totale proche
de 6 m ; ce mur présenterait ainsi deux rangées de
trous de boulin, l'une, encore visible, à 1,9 m audessus du sol primitif, l'autre environ 2,4 m au-delà.
Les sondages de 1988 (fig. 9) montrent que le sommet
des fondations affleure le niveau du sol primitif,
niveau auquel on trouve également des sols de
travail caractérisés (éclats de granite rose et épandages
de mortier) liés à la construction du bâtiment. Le
niveau du sol extérieur correspondant à la période de
fonctionnement du monument ne devait être guère
plus élevé que le sol primitif, puisque l'élévation en
petit appareil commence à son niveau. En revanche,
on a mis en évidence à l'intérieur du bâtiment des
remblais de graviers stériles qui surmontent
directement les sols de travail et sont conservés sur une
épaisseur de 1 m ; ils indiquent que le sol de la curie
était nettement plus élevé que le niveau de
circulation extérieur. Un autre argument en ce sens, tout
aussi probant, est le niveau d'arasement actuel de la
curie, qui exclut l'existence d'un seuil en deçà de la
cote 345,00.
L'édicule sud, aujourd'hui arasé et remblayé,
n'est connu que par les relevés de J. Gorce. Il est
séparé de la curie par un espace de 4,0 m. Ses
dimensions dans œuvre sont de 5,20 sur 7,26 m (proportion
de 1:^/2). Ses murs ont tous une épaisseur de
1,10 m. Deux contreforts saillants de 0,6 m ont été
relevés à son angle nord-est ; il est logique d'en
restituer deux semblables à l'angle sud-est. Les faces
extérieures des murs est, sud et nord sont en petit
appareil régulier. Les relevés indiquent également la
présence d'un important fragment de calcaire dans
l'appareil du mur ouest, tandis que sur certains
seulement, et bien que jamais mentionné dans les
documents de l'époque, un massif de maçonnerie énig-
119
\M
Fig. 10 — Façade est de la curie avant son arasement, en
1955-1956 (la flèche indique le niveau d'arasement actuel).
Fig. 11 — Angle nord-est de la curie avant son arasement, en
1955-1956 (la flèche indique le niveau d'arasement actuel).
matique est figuré à l'intérieur de la construction (en
pointillé sur la fig. 4).
Bien que non indiqué sur le plan de J. Gorce
(fig. 3), un seuil de 2,8 m de large permettait
d'accéder à la basilique de l'extérieur, par l'est, entre la
curie et l'édicule sud : il est clairement attesté par la
prolongation du parement du dernier contrefort de la
partie occidentale de la façade sud de la curie sur
toute l'épaisseur du mur est de la basilique (détail
encore visible à l'heure actuelle). Il devait être situé
à la cote 344,6 environ d'après les photographies de
fouille.
Au nord de la curie, le relevé ancien indique un
départ de mur est-ouest qui paraît appartenir à un
édicule symétrique de celui dégagé au sud du
bâtiment. D'autre part, les sondages de 1968 ont repéré
un massif de maçonnerie très arasé qui correspond à
première vue à une pile de fondation de même
120
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
module que celles de la basilique, mais dont
l'emplacement correspond précisément à celui de l'angle
nord-est de l'édicule supposé : ce massif peut avec
vraisemblance être identifié aux fondations de ce
bâtiment. Enfin, on notera qu'il n'existe pas de seuil
donnant accès à la basilique entre la curie et cet
édicule nord.
Les fouilles de 1968 ont également permis de
dégager un segment de mur est-ouest dans le
prolongement est du mur de façade nord de la basilique,
large de 0,9 m. Sa fonction ne peut évidemment pas
être déterminée. Il témoigne du moins de l'existence
d'aménagements annexes importants à un
emplacement situé au-delà de la limite de l'enceinte du
forum, mais malgré cela inclus dans la même insula
que le monument, et qui devaient enclore la curie et
les deux édicules situés de part et d'autre. On peut
penser à un enclos ceinturé de portiques, encadrant
la curie, comme c'est le cas à Clunia, par exemple
(De Palol, 1987, fig. 5).
Nivellement
La cote du sommet des piles de la basilique
dégagées dans les années 1950 se situe entre 345,52 et
345,59. L'une d'elles servait encore de base à un dé
de calcaire jaune, aujourd'hui déplacé dans
l'intérieur de la curie, et qui était alors sans doute
approximativement dans sa position d'origine (mais
décentré par rapport à la pile). Ses dimensions sont
de 1,2 sur 1,2 sur 0,5 m. Seule sa face supérieure est
correctement travaillée, les faces latérales étant très
grossièrement amaigries et donc non visibles. Les
documents conservés indiquent d'autre part que les
piles maçonnées sont appareillées en petits moellons
assez réguliers sur 0,75 m à partir de leur sommet, et
qu'elles s'enfoncent dans le sol d'au moins 1 m
supplémentaire. Ils notent aussi que les piles ont été
retrouvées «sous une aire composée de pierres
disposées en hérisson entre deux couches d'un agglomérat
de terre ocre» (Gorce, 1957, p. 60), aire qui, selon un
autre document, est décrite de la façon suivante :
«béton jaune», «la pierre de ce béton et celle des dés
sur les piles sont semblables», «60 cm en trois
couches bien organisées ; lui et les piles devaient
avoir une résistance énorme, [...] on aurait pu
instal er un marteau pilon...» (G. Brassart, lettre au
Directeur des Antiquités, 8 juillet 1956). On connaît
la cote du sommet de cette couche par ce dernier
document : le dé en place sur une pile de la basilique
émergeait de 0,13 m au-dessus, et celle posée sur le
mur de la curie de 0,41 m (soit donc une cote
approximative de 344,95) ; il est également indiqué
qu'elle vient buter contre le mur est de la basilique
et que ses limites primitives à l'ouest et au sud ont
disparu. Cette couche, qui est finalement assez bien
décrite, paraît avoir été de nature identique à des
horizons retrouvés à l'emplacement des portiques
latéraux du forum (cf. infra) et interprétés comme
des remblais destinés à exhausser le sol au niveau de
circulation définitif, et dans lesquels l'alternance de
couches tassées de débris de calcaire jaune (déchets
de taille?) et d'épandages de mortier conduit par
endroits à un sol extrêmement compact. Cette
couche a donc tout lieu d'être liée à la construction
du monument. Un autre argument renforce ce point
de vue : on peut en effet noter qu'au niveau d'un
raccord de maçonnerie situé à la cote 345,05 dans le
mur ouest de la curie, on remarque un épandage de
calcaire jaune broyé emprisonné dans l'épaisseur de
ce mur, comme si le remblai en question avait été
mis en place avant l'érection du mur au-dessus de sa
fondation, rendant ainsi possible le dépôt de
salissures de même origine sur une surface d'attente
restée à l'air libre quelque temps. Il est de plus
remarquable que la hauteur de la partie émergeante du dé
en place sur une pile (0,13 m) laisse tout juste la
place pour un dallage, niveau qu'il affleurerait,
comme attendu s'il s'agit effectivement d'une base
de soutènement de colonne.
Le niveau du sol primitif doit logiquement
s'identifier à celui de la base de la partie appareillée
des piles, soit à la cote 343,8, qui correspond
parfaitement à celle relevée plus à l'est en 1988. Il reste
alors à supposer l'existence d'une couche de remblai
supplémentaire d'une épaisseur de 0,6 m entre le sol
primitif et le sol de «béton jaune» et dont la
description a été omise.
Le sol de la basilique était donc situé à environ
1,15 m au-dessus du sol primitif. On ne pouvait
accéder à la curie que par une volée de marches
supplémentaires, dont l'emplacement est en fait facile à
déterminer (fig. 7, coupe BB ). Il est en effet clair
que le seul accès à la curie se faisait par la basilique :
les deux piles engagées dans son mur de façade ouest
fournissent l'emplacement de cette ouverture,
centrée sur le petit axe de la basilique. Le mur de refend
de la curie donne alors naturellement l'extrémité
supérieure de cet escalier par lequel on accédait, par
une nouvelle ouverture, à la salle principale.
L'espacement réduit de ces deux piles engagées par
rapport à celles de la péristasis, additionné à l'existence
d'un dé de calcaire en place sur l'une d'entre elles,
permet de dissimuler exactement les montants de
cette ouverture, d'une largeur de 3,9 m, derrière les
colonnes centrales de la péristasis (fig. 7). Cette
disposition ménageait de plus deux alvéoles latérales de
3,0 sur 3,0 m de part et d'autre de l'escalier.
FORUM DE FEURS
II est plus difficile d'estimer le niveau de
circulation exact de la curie. La longueur de l'escalier
d'accès (4 m) fixe du moins une hauteur maximale
possible à la cote approximative de 346,5 (soit 1,5 m
au-dessus du niveau de la basilique). De fait, sur
certaines photographies de fouille anciennes, on
discerne assez nettement un décrochement du parement
interne du mur nord à la cote 346,50, qui est le
niveau d'arasement actuel de ce mur. On retiendra
donc cette cote comme niveau probable du sol de la
curie, qui serait ainsi situé 2,7 m au-dessus du sol
primitif.
Données stratigraphiques
Les fouilles des années 1950 et de 1968 ne
paraissent avoir livré presque aucun mobilier
archéologique. On mentionne seulement en 1956 la
découverte d'un petit dépôt de marbres près de l'angle
sud-est de la curie, dont deux plaquettes inscrites de
graffiti, l'une conservée au musée de Feurs ;
l'inscription qu'elle porte semble correspondre à une formule
votive {Gallia, 14, 1956, p. 281, fig. 22). De la même
époque date aussi la découverte d'un fragment de
plaque de marbre mouluré portant une partie de la
dernière ligne d'une inscription : [EX] VOTO
(Rémy, 1972). Enfin, le déblaiement des abords de la
curie vers la même époque a livré deux importants
fragments d'une mosaïque à décor géométrique noir
et blanc, qui étaient situés à la cote 344,1 environ, à
quelques mètres de l'angle extérieur sud-est du
bâtiment (fig. 3 ; Stern, Blanchard-Lemée, 1975). Ces
fragments, s'ils étaient en place, démontreraient
l'existence d'une occupation gallo-romaine ancienne
du secteur (compatible avec le type de la mosaïque,
datable de la première moitié du Ier s. de notre ère),
antérieure à l'implantation de cette partie du forum.
En fait, tout porte à croire que ces fragments ne sont
pas à leur emplacement d'origine : des débris
conservés au musée de Feurs (la majeure partie des restes a
été restaurée) montrent que la mosaïque a été
séparée de son radier à une date ancienne ; de plus, le lieu
de découverte de ces fragments correspond trop
exactement au tracé du rempart médiéval pour
qu'on ne pense pas qu'ils y aient été réemployés en
fondation14.
La confirmation définitive de cette impression
nous a été donnée par le sondage ouvert en 1988
14 Le plan de situation publié par H. Stern et M.
Blanchard-Lemée (pi. lib) est localisable, contrairement à leurs
dires, par comparaison avec le relevé de Gorce (notre fig. 3) : le
massif de maçonnerie apparaissant au nord des fragments de
mosaïque correspond à l'angle sud-est de la curie; ces
fragments sont donc alignés selon l'axe du rempart médiéval.
121
dans la curie (fig. 9), qui montre que les sols de
travail contemporains de la construction du bâtiment
reposent immédiatement sur un niveau d'occupation
protohistorique, sans aucune trace d'une occupation
gallo-romaine intermédiaire. Les éléments datables
livrés par cette couche d'occupation sont peu
nombreux. Aucun ne paraît postérieur au début du Ier s.
après J.-G. :
. objets métalliques : un fragment de bracelet
tubulaire en bronze, à décor de cannelures, objet
typique de la phase dite La Tène Dl, qui s'achève
avant le milieu du Ier s. avant J.-G. (Vaginay, Guichard, 1988, p. 152);
. céramique importée : un fragment de paroi de
gobelet à décor moulé («picots») de type Aco, datable
de la première moitié de l'époque augustéenne, ainsi
que 22 fragments d'amphore républicaine ;
• céramique indigène tournée : un fond de vase
peint à piédouche (Vaginay, Guichard, 1988, forme
1512-1614), datable de la période 50/20 avant J.-C.,
un fragment de paroi de bol à cuisson réductriceoxydante et surface extérieure fumigée décorée à la
molette, datable de la seconde moitié du Ier s. avant
J.-C., deux lèvres de jattes à bord rentrant à cuisson
réductrice-oxydante (formes 5111-5113), antérieures
au milieu du Ier s. avant J.-C., trois lèvres de vases
ovoïdes à cuisson réductrice-oxydante, enfin un
fragment de vase ovoïde de cuisson réductrice-oxydante,
à col rainure et micacé, forme confinée à Feurs dans
les horizons augustéens (cf. infra, fig. 16, n° 19);
• céramique indigène modelée : une lèvre
d'écuelle profonde, appartenant à une phase
ancienne du second Age du Fer, deux lèvres de jatte
à bord rentrant, dont une à rebord épaissi, avec décor
incisé (formes 5111 et 4113, antérieures au milieu du
Ier s. avant J.-C.), une lèvre de vase ovoïde.
La place centrale et les portiques
Cette partie du forum était restée inconnue
jusqu'en 1978. Compte tenu des vestiges repérés
antérieurement, autant à l'ouest (cryptoportiques) qu'à
l'est (édifice de plan basilical) du terrain étudié, et de
la simplicité de leur plan, l'identification des
constructions dégagées lors d'une fouille de
sauvetage en 1978-1979 ne pouvait faire de doute. Nous
sommes ici en présence d'un alignement de cellules15
15 Le terme de «cellule» peut paraître vague mais il
nous semble préférable, parce que plus neutre, à celui de
«boutique», couramment utilisé. Même si toute activité
commerciale — évoquée par ce terme — n'est pas exclue sur un forum
du Haut Empire, les fonctions économiques qu'il abritait
de l'aile sud des portiques de la place centrale, en 1978 (fig. 2, point 3); fouilles et relevés de P. Valette
Pig ]2 — Plan des(lesfouilles
niveaux d'arasement des maçonneries sont signalés par les différents types de hachures).
FORUM DE FEURS
123
précédées d'un portique ouvert au nord sur la place
centrale du complexe monumental, selon le schéma
classique des fora tripartites, et se raccordant à
l'ouest avec l'extrémité de l'aile sud du
cryptoportique.
Les vestiges que recelait ce terrain, qui n'ont pu
être que très partiellement étudiés, ont été détruits
en 1981.
Plan des cellules et du portique
Huit cellules contiguës ont été dégagées,
totalement ou en partie (fig. 12) (identifiées d'ouest en est :
I à VIII). Des travaux ultérieurs de voirie nous ont
permis de relever des maçonneries appartenant au
prolongement vers l'est de cet alignement, portant à
dix leur nombre minimum. Toutes s'appuient côté
sud sur un mur de 1,05 m de largeur, conservé au
maximum sur 0,6 m au-dessus de sa fondation, soit
cinq arases, qui sont constituées d'appareil irrégulier
de petit module. Les cellules sont séparées les unes
des autres par des murs de refend nord-sud de
5,65 ± 0,05 m de longueur, terminés vers le nord par
une pile de fondation engagée de 1,7 sur 1,3 m
appareillée sur deux assises à partir de son sommet
(fig. 13). La cote de 1,7 m est celle relevée pour
l'assise supérieure. Pour certaines piles (VI/VII,
VII/VIII), la fondation est plus large de 0,3 m
environ. Les murs ont une largeur de 0,9 m et sont
appareillés de la même façon que le mur arrière.
Cependant on observe sur celui qui est le mieux conservé
(entre les cellules V et VI) un décrochement de
l'appareil à 0,8 m au-dessus du bourrelet de fondation :
au-delà, l'élévation, conservée sur une assise
seulement, n'est large que de 0,6 m et construite en petit
appareil régulier. Si l'on tient compte de ces
décrochements dans les murs latéraux, la largeur dans
l'œuvre des cellules est de 3,9 m (avec des variations
de moins de 5 cm de l'une à l'autre). Leur superficie
serait donc voisine de 22 m2.
L'emplacement de la colonnade du portique
ouvert sur la place est signalé par des piles de 1,3 sur
1,3 m situées dans l'alignement des murs de
séparation des boutiques, et distantes de 6,0 m des piles
engagées qui les précèdent. Comme ces dernières,
elles présentent deux assises appareillées au-dessus
du sommet de leur fondation.
Le mode de construction des maçonneries paraît
dans l'ensemble très homogène : la seule pierre
utilisée est le granite rose, les fondations sont constituées
d'un blocage jeté en tranchée, leur sommet est souétaient en effet essentiellement «officielles» (cf. par exemple :
Le Gall, 1978; Andreau, 1987).
Fig. 13 — Mur de séparation des cellules V et VI de l'aile sud
des portiques de la place centrale, avec, au premier plan, une
pile de fondation engagée, au second plan la fondation
appareillée du mur supportant la base de l'élévation (1978).
ligné par un fort bourrelet de mortier. Toutes sont
puissamment ancrées dans le sol puisque les
fondations sont profondes de 1,8 à 2 m pour les murs des
cellules (piles engagées incluses), et 2,4 m pour les
piles du portique. Le parement de petit appareil
irrégulier est parfaitement identique pour l'ensemble des
murs. Quelques maladresses de construction, qui
contrastent avec la qualité générale des maçonneries,
laissent cependant possible l'existence de reprises :
l'appareillage de l'assise supérieure des piles de la
travée nord du portique est nettement moins soignée
que l'assise inférieure (moellons irréguliers, remploi
de calcaire jaune, jointoyage négligé).
Nivellement
Si le plan d'ensemble des constructions dégagées
ne présente pas de difficultés d'interprétation, il n'en
va pas de même pour la compréhension de la
stratigraphie et la restitution des niveaux de circulation
antiques, ce qui s'explique par les perturbations
provoquées par une occupation intense du sol pendantle
Moyen Age et l'époque moderne. Les conditions
matérielles précaires dans lesquelles se sont déroulées
ces fouilles n'ont fait qu'aggraver cet état de fait,
puisqu'on a dû se résoudre à programmer les
campagnes au coup par coup, ce dont témoigne le
découpage plutôt anarchique des zones fouillées, et à sacri-
124
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
fier les niveaux d'occupation situés au-dessus des
premiers horizons antiques bien constitués.
Le sommet des fondations maçonnées se situe
au niveau du sol primitif ou légèrement plus haut.
Celui-ci accuse une légère pente d'est en ouest : il est
à la cote 343,40 dans la cellule VIII et seulement à
343,04 dans la cellule III. Dans les cellules, il a donc
servi de niveau de travail pour la construction des
murs mais l'absence totale de vestiges gallo-romains
et d'aménagement de sol exclut qu'il ait pu servir de
niveau de circulation durant la période d'utilisation
normale du monument. De fait, il est surmonté par
une couche stérile de gravier, conservée dans le
meilleur des cas jusqu'à la cote 343,7 (dans la cellule III)
(fig. 14, couche 8), qui peut fort bien être considérée
comme un remblai lié à la construction.
La stratigraphie de la zone couverte du portique
est plus complexe. On remarque d'abord que les
cellules et le portique sont séparés par une tranchée peu
profonde de profil en U régulier (largeur : 0,9 m,
profondeur : 0,4 m) creusée à partir du sol primitif et
remplie par un remblai homogène de sable (fig. 14,
couche 7). Sa paroi nord est alignée sur le parement
des piles engagées. Si sa relation avec la construction
du monument est certaine, son profil empêche d'y
voir les vestiges d'un état antérieur du forum comme
une empreinte de fondation de maçonnerie disparue ;
on peut proposer qu'il s'agit d'une tranchée
d'alignement, ouverte lors du creusement des fondations des
cellules et destinée à régler l'axe du portique. Sur
l'ensemble de la surface du portique, le sol primitif
est recouvert par un épandage de mortier blanc, très
diffus par endroits, nettement plus conséquent à
d'autres (au-delà de l'alignement des piliers vers le
nord — cf. infra), situé à la cote 343,40 ± 0,05
(fig. 14, couche 10). Il est recouvert par un remblai
(couche 11) qui a noyé des épandages d'éclats de
granite rose et de galets (couche 11'), vestiges d'aires de
travail liées à la construction. Ce remblai est luimême scellé par une couche tassée constituée de
débris de calcaire jaune, épaisse de quelques
centimètres (couche 12). Son sommet, qui est horizontal
dans le périmètre du portique (cote : 343,60 ± 0,05),
noie la première assise appareillée des piles de la
travée nord (le sommet de ces piles est à la cote 343,70
± 0,05) et domine légèrement le sommet des piles
engagées (situé à la cote 343,48 ± 0,03). Il n'a pas été
possible d'observer de couche archéologique antique
en place au-delà du sommet de ce sol de calcaire
jaune broyé. Il est en fait exclu de pouvoir le
considérer comme un niveau de circulation définitif du
FORUM DE FEURS
125
H
m3
Fig. 14 — Coupes du portique selon G-H et I-J (localisées sur la fig. 12).
Maçonneries : ml : parement du puits gallo-romain antérieur au forum; m2 : pile de fondation du portique; m3 : pile de fondation
engagée dans le mur de séparation des cellules VII et VIII; m4 : massif de fondation parallèle au portique; m4' : bloc de grand
appareil (emplacement) posé sur la fondation m4 ; m5 : massif de maçonnerie grossière parallèle au portique.
Couches de terrain : 1 : sol naturel ; 2 : terre brune gravillonneuse (niveau d'occupation gaulois) ; 2' : fosse s'ouvrant dans la couche 2 ;
3 : terre limoneuse riche en mobilier (comblement primaire du puits) ; 3' : partie détruite ; 4 : terre brune sans vestiges ; 5 : gravier
mêlé de blocs de terre brune, sans vestiges ; 6 : gravier grossier, sans vestiges (4, 5 et 6 sont des remblais de comblement du puits) ; 7 :
sable (remplissage d'une tranchée alignée selon l'axe du portique, antérieure à sa construction) ; 8 : gravier grossier (remblai lié à la
construction des cellules) ; 9 : couche charbonneuse ; 10 : couche de mortier blanc feuilletée (sol de travail lié à la construction du
portique) ; 11 : terre grise sableuse (remblai lié à la construction du portique) ; 11' : amas d'éclats de taille de granite rose à la base de
11 ; 12 : épandage de calcaire jaune concassé (sol de travail).
126
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
portique, à cause de son irrégularité (on remarque en
particulier qu'il remonte en plan incliné à la hauteur
de l'ouverture des cellules sur le portique). On a vu
qu'un sol de même nature, retrouvé dans la
basilique, peut en toute vraisemblance avoir servi de
radier à un dallage. Plusieurs autres indices
convergents permettent ici de restituer le niveau de
circulation des cellules et du portique, que l'on peut
supposer de plain-pied, à un niveau sensiblement plus
élevé. C'est d'abord le décrochement de l'appareil
des murs latéraux des cellules, à la cote 344,0
(conservé sur celui séparant les cellules V et VI), qui
correspond à l'amorce d'une élévation beaucoup plus
soignée que la partie inférieure du mur (on
remarquera d'ailleurs que, dans le cas de la curie, les
parements utilisant des moellons irréguliers, comme ici la
base des murs, étaient destinés à être remblayés). On
doit également supposer que les piles maçonnées
servaient de support à des blocs de grand appareil
affleurant le niveau de circulation, qui recevaient à
leur tour la base des colonnes du portique, comme on
a pu l'observer dans la basilique. En fait, une trace
d'arrachement de bloc de grand appareil est
nettement discernable sur la pile engagée liée au mur de
séparation des cellules V et VI : elle paraît
correspondre à un bloc rectangulaire étroit de 0,8 sur
1,6 m. Si l'on restitue une hauteur de 0,45 à 0,5 m
pour ces blocs, conforme aux dimensions de ceux
conservés (deux dans la basilique, trois dans l'emmarchement au nord du portique — cf. infra), on
atteint une altitude de 343,9 à 344,0 m, cohérente
avec celle estimée auparavant par un autre biais. On
adoptera donc la cote de 344,0 comme estimation du
niveau de circulation du portique et des cellules.
Le niveau de circulation extérieur au forum, audelà du mur d'appui des cellules, n'est pas
restituable précisément puisque les quelques sondages
effectués au sud de ce mur n'ont pas permis de
mettre en évidence de sol antique autre que le sol
primitif.
Liaison du portique et de la place
Au-delà de la travée de piles du portique,
l'épandage de mortier blanc reposant sur le sol
primitif devient plus épais. Sur la longueur dégagée du
portique (une dizaine de mètres), il est recoupé par
une tranchée de contour assez régulier au sud,
beaucoup plus sinueux au nord, qui a servi à installer la
fondation d'un massif de maçonnerie. Ce massif
supporte un alignement de blocs de grand appareil
(fig. 14,. massif m4). Ces blocs de calcaire jaune,
(dimensions : 0,8 X 1,3 X 0,45 m), dont trois ont été
retrouvés en place, sont distants de 2,2 m des piles
du portique ; leur sommet, situé à la cote 343,30
± 0,03, est au niveau du sol de mortier blanc. La
fondation tranche nettement sur les autres
maçonneries par son irrégularité et sa faiblesse : large de
0,9 m, elle n'est profonde que de 0,7 m et son blocage
contient de nombreux éclats de calcaire jaune. Le
comblement de la tranchée, qui semble avoir été
perturbé ultérieurement (sans doute lors de la
récupération des blocs de grand appareil), puisque de la
céramique médiévale y a été trouvée, contenait d'assez
nombreux fragments de ce même calcaire, dont
l'essentiel des éléments d'architecture retrouvés sur la
fouille. Le sol de calcaire jaune concassé retrouvé à
l'emplacement du portique est également
interrompu par la tranchée de fondation ; il disparaît audelà. Un autre massif de maçonnerie de même
orientation occupait l'espace situé entre les piles du
portique et l'alignement de blocs de grand appareil,
reposant directement sur le sol de calcaire jaune
concassé (fig. 14, massif m5). Sa facture est très
grossière : il s'agit d'un blocage non parementé,
irrégulièrement arasé (cote maximale du sommet : 343,75),
large de 1,1 m environ, constitué de matériaux
divers : granite rose, calcaire jaune (dont des
fragments d'architecture), barytine.
L'interprétation de ces aménagements demeure
incertaine. Ils sont situés à un emplacement où l'on
s'attend à trouver un emmarchement permettant
d'accéder de la place centrale du forum au portique ;
d'autre part, leur facture grossière et leur position
stratigraphique incitent à les attribuer à des travaux
postérieurs au programme initial (desquels pourrait
également procéder une réfection du portique, en
relation avec l'exhaussement d'une assise des piles de
fondation). Il n'en reste pas moins que leur
alignement et la nature du mortier qu'ils utilisent les
désignent certainement comme antiques, et
permettent effectivement de considérer leur intégration
à la structure d'un emmarchement comme plausible,
même si celui-ci n'est pas lié au programme primitif.
Le niveau de circulation de la place ne peut
d'ailleurs pas être restitué précisément : il est en tout
cas situé à une cote supérieure à celle de l'épandage
de mortier qui recouvre le sol primitif, mais il est
plausible de restituer un caniveau de drainage à la
base de l'emmarchement, qui dirigerait les eaux de
ruissellement du portique vers le regard dégagé plus
à l'ouest, à l'angle de la galerie à cryptoportique, et
qui se déverse dans le conduit d'assainissement
inclus dans ses murs (cf. infra). En fait, deux
fragments de rigoles monolithes en granite, d'un type
identique à celui en usage le long des portiques de
rues, ainsi qu'il en a été dégagé par exemple en 1984,
FORUM DE FEURS
rue Saint-Antoine, et qui ont été retrouvés dans le
comblement de la tranchée de fondation de
l'alignement de blocs de grand appareil, pourraient attester
leur existence. Avec une épaisseur de 0,3 m environ,
l'utilisation de ces rigoles obligerait à situer le niveau
de la place au-dessus de la cote 343,70. On
conservera donc comme estimation de la hauteur de l'emmarchement entre place et portique la fourchette
comprise entre 0,3 et 0,7 m.
Liaison avec le cryptoportique
La rangée de cellules dégagée vient buter à
l'ouest contre l'extrémité de la branche sud de la
galerie à cryptoportiques qui circonscrit le temple
(cf. infra). La largeur de la première cellule (I),
accolée au cryptoportique, est supérieure à la normale de
0,3 m, soit une largeur dans l'œuvre de 4,0 m,
mesurée à la base de l'élévation. Le long mur est-ouest
auquel sont adossées les cellules se raccorde à un mur
de largeur sensiblement identique intégré à
l'élévation du cryptoportique. Bien que leur mode de
construction semble parfaitement homogène
(mortier notamment), le raccord entre les deux murs se
manifeste par un décrochement du parement de
quelques centimètres sur le côté nord et par le
passage à un appareillage en petit moellons très
réguliers sur le côté sud. Il est donc vraisemblable que le
mur sur lequel s'adossent les cellules a été construit
après l'ensemble du cryptoportique, tout en s'intégrant au même programme architectural. Dans le
prolongement de la travée nord du portique et dans
l'axe de la paroi ouest de la cellule I, on a pu dégager
partiellement un massif de maçonnerie dont le
niveau supérieur coïncide exactement avec celui des
piles. Ce massif, qui était recouvert d'importants
fragments de calcaire jaune délité, vestiges probables
d'un bloc de grand appareil, est limité vers le sud,
dans l'alignement du parement sud des piles, par un
contrefort appuyé contre le mur du cryptoportique,
saillant de 1,95 m; cette pile solidaire de l'angle du
cryptoportique permettait d'arrêter le portique par
une colonne engagée dans ce contrefort (fig. 15). Des
observations ultérieures sur l'aile nord du forum
(printemps 1991) ont montré que cette pile ne se
prolongeait que de 1,10 m au-delà du contrefort en
direction de l'axe du forum. Le sol environnant (sol
de travail) était constitué de trois radiers superposés
contenant un blocage hétérogène (granite rose,
tuiles, éclats de calcaire jaune) lié par un mortier
maigre. Son sommet était, à la cote 343,6, identique
à celle des portiques.
Un regard de 0,2 sur 0,2 m ménagé dans l'angle
nord-est du cryptoportique, dont le sommet est situé
127
24
Fig. 15 — Restitution de la liaison du portique et de la
galerie à cryptoportiques (avec dimensions portées en pieds).
à la cote 342,80, permettait vraisemblablement
d'évacuer les eaux de ruissellement de la place
centrale. Un deuxième regard était ménagé contre la
paroi ouest du contrefort (observations de 1991). Son
entrée était obstruée par un blocage aéré contenant
des pierres de nature diverse, lié par un mortier
maigre.
Données stratigraphiques
Les sols de travail et remblais antiques liés à la
construction du portique n'ont pas livré le moindre
mobilier archéologique. En revanche, les niveaux
d'occupation situés sous ce que l'on a dénommé sol
primitif, et qui correspond à l'état du terrain tel que
l'ont trouvé les constructeurs du monument, ont
livré un abondant mobilier des IIe et Ier s. avant J.-C.
Malheureusement, la phase la plus récente de cette
occupation, durant la seconde moitié du Ier s., est
aussi la plus diffuse, ce que l'on a mis au compte
d'un déplacement de l'habitat gaulois. Les éléments
les plus récents (Vaginay, Guichard, 1988, fig. 10 et
p. 24) sont certainement situables après le début du
principat, sans que l'on puisse vraiment préciser
davantage : quelques infimes fragments de gobelets
ovoïdes à parois fines, de sigillée italique et de bols
peints de type Roanne anciens, un ardillon de fibule
à charnière.
Néanmoins, le mobilier provenant d'un puits
remblayé lors de la construction du portique fournit
des indices de datation d'une certaine précision. Ce
puits a été retrouvé à proximité de la pile de la tra-
128
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
vée nord située dans l'axe de la séparation entre les
cellules VII et VIII. Bien qu'ayant déjà été fourni
dans une publication antérieure (Valette, 1981),
l'inventaire des objets qui ont été recueillis mérite donc
d'être rappelé.
Une tranchée de sondage pratiquée au nord de
la pile en question avait d'abord permis de mettre en
évidence, sous le sol de mortier blanc déjà décrit,
affaissé et fort épais à cet emplacement, une fosse de
3 m de diamètre environ, remplie d'une série de
couches de remblais à peu près stériles, sur une
épaisseur de plus de 2 m, recoupées par la fondation de la
pile (fig. 14, couches 4, 5, 6). La fouille n'avait pu
être menée jusqu'à la base de ce comblement en
raison des dangers d'éboulement ; c'est à l'occasion d'un
sondage géologique pratiqué ensuite au même
emplacement qu'on a pu découvrir l'appareillage du
puits. Sa présence même à cet endroit paraît insolite,
en raison de l'absence totale de vestiges d'habitat
gallo-romain alentour, vérifiée par la fouille
méthodique de plus de 100 m2 des niveaux d'occupation
antérieurs à l'installation du forum ; son mode de
construction : un appareillage en blocs de granite
gris de module moyen suivant un plan carré de 0,8
sur 0,8 m, est une étrangeté supplémentaire qui
permet de douter de son utilisation à des fins purement
domestiques, malgré la banalité du mobilier de son
remplissage, à moins que ce plan ne s'explique par le
prolongement de traditions gauloises, puisque à La
Tène finale les coffrages de puits carrés (mais en bois)
sont la règle générale. Autre constatation, celle-là
essentielle du point de vue de la datation : le
parement du puits avait été démonté sur plus de 2 m
avant son remblayement. Cette opération peut être
mise en rapport avec le nivellement du terrain
préalable à l'installation du portique. On en déduit que le
puits est resté ouvert (pour que son parement puisse
être démonté) jusqu'à la mise en place du portique et
que le mobilier issu de son remplissage doit fournir
un terminus post quern très peu éloigné dans le temps
de la construction de ce dernier. Fort heureusement,
l'échantillonnage d'objets est suffisant pour
permettre de cerner avec une certaine précision la date
de son comblement.
Le remplissage contenait un as d'Auguste
frappé à Rome en 23 avant J.-C. (Cohen 503), et
deux fibules en bronze à ressort protégé (fig. 16, nos 1
et 2), l'une du type dit à arc continu (Feugère, 1985,
type 14b; Guillaumet, 1985, type 12101), bien
datable de l'époque augustéenne (ce que confirme
l'examen des contextes de découverte régionaux,
ainsi la présence d'un exemplaire analogue dans la
tombe 16 de la nécropole gauloise tardive de Feurs,
datable de 25-15 avant J.-C), l'autre du type dit à
disque médian (Feugère, 1985, type 15a ; Guillaumet,
1985, type 11303), qui paraît avoir été introduit en
Gaule dès le milieu du Ier s. avant J.-C, mais ne fut
largement diffusé qu'au cours du règne d'Auguste.
La céramique peut être divisée en deux lots. Le
premier correspond à des types de vases représentés
par des exemplaires peu fragmentés et donc
directement liés à l'utilisation du puits, le second à des
types représentés seulement par de petits tessons et
donc assimilables à du mobilier résiduel.
Le premier lot comprend quatre types de vases :
• des cruches à ouverture large tronconique,
munies d'une anse et présentant un décor sur
plusieurs registres réalisé au lissoir ou au peigne. Cinq
individus au moins sont représentés, dont trois à
cuisson réductrice (B) (fig. 16, nos 3 à 5) et trois à
cuisson réductrice-oxydante (A) (nos 6 à 8). En Forez,
cette forme est typique des horizons gallo-romains
anciens. Elle apparaît à Roanne dans des contextes
datables du milieu du règne d'Auguste (Poncet et
alii, 1979, pi. XI n° 8). A Feurs, elle est présente en
particulier dans une couche scellant la construction
de l'égout du forum (couche VII), datée autour de 20
après J.-C (Vaginay, Valette, 1982, fig. 15 n° 12 et
infra) et dans plusieurs fosses-dépotoirs découvertes
sur le site ; son utilisation ne paraît pas se prolonger
au-delà de la fin du règne de Tibère. Dans la région
lyonnaise, l'apparition du type est également située
avant 10 avant J.-C, mais il se maintiendrait durant
tout le Ier s. après J.-C (Desbat, Mérigoux, 1979,
pi. 4 n° 6) ;
. des flacons globulaires anses à goulot étroit et
pâte calcaire, claire et fine, représentés par trois
exemplaires, l'un presque complet (fig. 16, n° 9), les
deux autres très fragmentés (dont un est à engobe
rouge externe). Cette forme n'est pas datable
précisément : si elle ne devient très fréquente qu'à partir du
règne de Tibère, on trouve à Feurs des exemplaires
importés datables du tout début du règne d'Auguste
(nécropole gauloise tardive) ;
• des vases ovoïdes de volume assez faible,
représentés par cinq individus, dont un complet.
Quatre présentent des caractéristiques identiques :
cuisson réductrice, pied annulaire, décor de bandes
lissées (fig. 16, n08 10 à 13); le cinquième (n° 14) se
distingue par la forme de sa base et surtout par des
parois plus minces et une pâte cuite à réduction très
sonore. Cette forme de récipient apparaît à Feurs
dans des contextes datables du début du règne
d'Auguste (nécropole gauloise) et ne paraît plus utilisée
dès la fin du règne de cet empereur ;
. un gobelet cylindrique (fig. 16, n° 15), repré-
V
4cm
12
15
7
16
17
*._!
18
>
19
J
20
22
21
8cm
Fig. 16 — Mobilier du puits gallo-romain recouvert par les niveaux de
construction du forum (céramique : éch. 1/4, fibules : éch. 1/2); le puits est
situé à proximité de la pile de fondation du portique située dans l'axe du mur
de séparation des cellules VII et VIII (cf. fig. 12).
130
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
sente par un gros fragment, de fabrication
apparemment locale. Ce récipient ne possède pas d'analogue
dans le répertoire régional de la céramique
domestique. En revanche, il est plausible de le considérer
comme une imitation de gobelet cylindrique à parois
minces d'un type datable du milieu de la période
augustéenne.
Le second lot comprend :
. une jatte à rebord en gouttière, de cuisson
réductrice (fig. 16, n° 16), type très fréquent en
Forez et datable dans le dernier tiers du Ier s. avant
J.-C. (par exemple : Poncet el alii, 1979, pi. X
nos 1-2);
• des jattes apodes à décor à la molette,
représentées par un fragment de paroi et un fragment de
fond (nos 17 et 18), datables dans le même intervalle ;
• un fragment de paroi de patère à vernis
orangé, vraisemblablement identifiable à une
production de la région lyonnaise, encore datable dans
le même intervalle ;
• un rebord de vase ovoïde à ouverture large,
col court rentrant et couverte micacée, orné de
rainures à la liaison col-panse (fig. 16, n° 19). A Feurs,
ce type de production paraît caractéristique des
horizons du début de notre ère16;
• un rebord de grand vase de stockage (fig. 16,
n° 20), dont des exemplaires analogues se retrouvent
dans la couche VII, au-dessus de l'égout du forum
(Vaginay, Valette, 1982, fig. 15, nos 13-14). Ce type
apparaît certainement avant la fin du règne
d'Auguste (Poncet et alii, 1979, pi. XI n° 2);
. un manche de poêlon (?) en céramique à
cuisson réductrice-oxydante et couverte micacée (n° 21),
sans comparaison régionale ;
• un rebord de jatte peinte de forme 3221
(fig. 16, n° 22), dont la production ne dépasse pas le
milieu du règne d'Auguste (Vaginay, Guichard, 1988,
fig. 61).
Il faut enfin ajouter à ce lot une cinquantaine
de fragments d'amphores républicaines et une série
de tessons gaulois plus anciens que ceux décrits cidessus.
A l'examen de ce catalogue, il nous semble
aujourd'hui plus juste d'élargir l'intervalle
chronologique qui avait été initialement proposé pour ce
mobilier (le premier quart du Ier s. après J.-C, dans :
Valette, 1981) à la fin du siècle précédent. On
retiendra surtout que le comblement du puits fut
probablement achevé avant la fin du règne d'Auguste.
La galerie à crypto portiques
et l'aire du temple
Les vestiges visibles de la galerie à
cryptoportiques, et tout particulièrement le conduit
d'assainissement inclus dans son mur périphérique, qui est
accessible à partir de plusieurs caves modernes, ont
depuis longtemps excité la curiosité des Foréziens.
Un premier plan d'ensemble fut relevé avant 1850
par Roux (fig. 17), lequel a tout de suite établi un
lien entre ces substructions et le forum de la ville
antique. Il en fait la description suivante (Roux,
1851, p. 43-44) : «Ces souterrains forment un
système d'égouts ou cloaques qui se développent sur
deux lignes, suivant le plan d'un immense
parallélogramme dont ils occupent trois côtés. La façade
principale a quatre-vingts mètres d'étendue; les
deux autres en ont soixante. La superficie qu'elles
circonscrivent est de quatre mille huit cent mètres
carrés. Ces deux rangs laissent entre eux un
intervalle de seize mètres, qui se trouve réduit à douze,
vers l'extrémité des deux côtés, par un retrait
symétrique de quatre mètres dans les parties nord et sud.
L'égout a sous clef un mètre quatre-vingt-cinq
centimètres de hauteur, et soixante centimètres de
largeur. Il est construit en petit appareil allongé, lié par
un ciment grisâtre et très dur. On a établi dans
l'épaisseur des parois, des larmiers [sic ; comprendre :
des regards] placés de distance en distance sur un
plan incliné de haut en bas [...]. Près de l'angle nord,
du côté droit, on remarque une ouverture d'un
mètre, dont le cintre est fait de grandes tuiles à
rebord alternant avec des claveaux de pierre. A
l'angle nord-ouest, la ligne de face ouest et la ligne
latérale nord se réunissent en un seul grand égout qui
traverse la route de Roanne et se dirige vers le jardin
de l'hôpital [...]. Nous sommes forcément conduit à
voir dans ces souterrains, les cloaques qui
assainissaient les promenades d'un forum, tandis que leur
de lace de
réductri
16 forme
sigillée
Forme
italique,
Goudineau
associée
une tasse
par
13 exemple
dans
en céramique
une à fosse
un demi-as
de
fouillée
cuisson
deenNîmes,
1987.
Fig. 17cryptoportiques
— Plan du conduit
d'après d'assainissement
les relevés de Roux
de (1851).
la galerie à
j
FORUM DE FEURS
131
maçonnerie servait de fondation à ses portiques». On
ne sait cependant rien de la méthode qu'il a suivie
pour effectuer ses relevés, ni même la localisation
précise des vestiges qu'il a pu observer. De plus, le
plan qu'il fournit est très sommaire. Une nouvelle
campagne de relevés systématiques des vestiges
s'imposait donc.
Une fouille de sauvetage plus importante a
également permis de dégager l'extrémité est de la
branche sud du cryptoportique en 1978 à l'occasion
de réaménagements urbains (fig. 12). On insistera
donc particulièrement sur les résultats de ce
chantier, avant de fournir les données complémentaires
sur cette partie du monument issues de la
prospection des caves des constructions actuelles du
quartier, d'un sondage limité dans l'angle intérieur sudouest du cryptoportique et des observations
effectuées à l'occasion de travaux de voirie au printemps
1991. On a consigné en annexe l'inventaire des caves
qui ont pu être visitées (cf. infra, p. 161).
Plan
Fig. 18 — Vue de l'intérieur du conduit d'assainissement
situé à la base des murs du cryptoportique
(extrémité de l'aile sud ; 1978).
C'est le tracé du conduit d'assainissement percé
à la base des murs du cryptoportique qui avait
permis à Roux d'identifier le plan de l'ensemble.
Conformément à ses indications, on a pu constater que ce
conduit est un couloir voûté, haut à l'origine de
1,95 m et large de 0,6 m (fig. 18, 19). L'appareil des
parois latérales présente un aspect plus ou moins
régulier tant dans la taille des moellons que dans leur
mise en place. La voûte, épaisse d'une soixantaine de
centimètres, est montée sur un coffrage dont les
planches de couchis, toujours au nombre de 6 et
larges de 0,16 à 0,19 m, ont laissé leur empreinte
dans le mortier. Les pierres de son blocage sont
sommairement agencées à la manière de claveaux.
Le plan de la partie fouillée demeure clairement
lisible malgré les perturbations postérieures (fig. 12).
C'est donc le tracé du conduit qui est l'élément
essentiel pour la compréhension de l'ensemble. Il
affecte la forme d'un U ouvert vers l'ouest, dont
seule la branche nord-sud a été reconnue dans sa
totalité. Une cave avait réoccupé une portion de
l'espace circonscrit par ce conduit, en débordant au-delà
vers le nord. Une partie des murs antiques était donc
conservée sur une hauteur importante, tandis que du
côté nord et à l'emplacement de la descente de la
cave ils étaient arasés à environ 1,0 m au-dessous du
niveau de l'intrados de la voûte du conduit. Le mur
dédoublé pour recevoir le conduit d'assainissement a
une largeur totale de 2,4 m, qui est distribuée entre
deux maçonneries de 0,9 m de part et d'autre du
vide pour le segment dégagé orienté nord-sud, et
entre une maçonnerie de 1,05 m sur le côté interne
du cryptoportique, et une autre de 0,75 m sur le côté
externe pour les parties orientées ouest-est. Dans
l'angle nord-est, ce mur est percé d'un regard
horizontal étroit (0,2 X 0,2 m) au niveau de la base de la
voûte du conduit, qui débouche à l'extérieur de la
galerie.
Ce mur délimite donc un niveau de circulation
semi-enterré de largeur dans œuvre de 9,4 m, qui n'a
été dégagé que sur une longueur de 6 m à cause de la
proximité d'une rue moderne, et dont l'élévation
conservée depuis le sommet des fondations atteint
encore 2,9 m par endroits. La largeur de la galerie
coïncide précisément avec la cote de 12 m fournie
par Roux pour l'écartement entraxes des deux lignes
de conduit aux extrémités des branches latérales. Le
mur périphérique n'était élargi qu'à sa base afin de
ménager l'emplacement du conduit. Son sommet
forme une plate-forme sur laquelle s'appuie
l'élévation proprement dite qui est constituée de murs
nettement plus minces : 0,9 m pour le segment nordsud, d'aplomb avec la façade interne du
cryptoportique, 1,05 m pour les segments orientés est-ouest,
avec, pour celui du sud — le seul qui ait conservé
une partie de cette élévation supérieure — deux
contreforts accolés à l'extérieur de 0,6 sur 0,9 m et
distants de 2,4 m, identiques à ceux de la curie. On a
L'extrémité est de l'aile sud du cryptoportique
|
132
PAUL VALETTE ET VINCENT GUIGHARD
pu dégager ce mur sur une longueur de 2,6 m au-delà
du deuxième contrefort sans en rencontrer à
nouveau, ce qui laisse penser que l'espacement de 2,4 m
ne vaut que pour l'extrémité de la façade. Les
parements intérieur et extérieur de l'élévation supérieure
du mur sud sont en petit appareil régulier, tandis
qu'à la base, seule la face interne des murs est en
petit appareil ; de plus, le mur extérieur présente des
joints en ruban analogues à ceux observés sur la
curie.
L'espace intérieur est refendu par un mur nordsud de 0,9 m de largeur, soigneusement parementé
en petit appareil sur ses deux faces, qui définit un
compartiment allongé de 9,4 sur 2,4 m à l'extrémité
du cryptoportique, et dans lequel est ménagé un
seuil de 2,35 m contre la paroi nord du sous-sol.
Deux trous de boulin espacés de 2,03 m sont encore
visibles à 1,2 m au-dessus du sommet des fondations
de ce mur; ils sont bouchés du côté ouest.
L'exploration vers l'ouest n'a pas été suffisante pour permettre
de localiser une éventuelle ligne de piliers axiaux. Le
mur nord-sud qui ferme le cryptoportique à l'est se
prolonge de 1,95 m au nord de l'angle de la galerie et
se raccorde avec une plate-forme maçonnée qui
correspond à la pile supportant la colonne de
l'extrémité occidentale du portique (cf. la restitution de la
fig. 15).
Nivellement et stratigraphie
Pour l'extérieur de la galerie, les données
recueillies ont déjà été exposées dans le paragraphe
consacré à la description du portique (cf. supra,
p. 123). La plate-forme qui marque le sommet de la
partie basse des murs du cryptoportique, située entre
les cotes 343,15 et 343,30, devait être largement
remblayée si l'on situe le niveau de circulation du por-
Fig. 19 — Coupes transversale A-B et longitudinale G-D-E-F de l'extrémité sud-est de la galerie à cryptoportiques
(localisées sur la fig. 12).
1 : sable grossier (sol naturel) ; 2 : terre brune avec scories et quelques tessons gaulois (remblai lié à la construction de la galerie) ; 3 :
calcaire jaune concassé avec épandage de mortier au sommet (sol de travail); 3' : blocage (granite rose) lié par du mortier
5'pulvérulent
: terre
; 4 etlimoneuse
4' : sablegrise
grossier
(prolongement
mêlé de débris
de de
5?);calcaire
5" : épandage
jaune (remblai)
de charbon
; 5 : terre
de limoneuse
bois; 6 : terre
grise limoneuse
(apport naturel
grise par
(apport
ruissellement?)
naturel par;
ruissellement); 7 : sable fin (remblai); 8 : sable grossier mêlé d'éclats de pierre et de mortier (remblai); 9 : niveaux d'occupation
médiévaux et moderne; 10 : terre grise gravillonneuse (niveau d'occupation gaulois); 11 : gravier grossier (comblement de la
tranchée de fondation du mur périphérique de la galerie et remblai lié à la construction du portique); 12 : calcaire jaune concassé
(remblai et sol de travail lié à la construction du portique); 13 : sol de terre battue (sol de la galerie inférieure); 14 : tuiles, bois
calciné et fragments d'enduit mural (niveau d'incendie); 15 : débris de mortier et d'enduit mural (remblai de destruction); 16 : blocs
de maçonnerie effondrés (remblai de destruction). A : enduit égalisé ; A' : enduit lissé en surface.
A
344
seuil
343
descente de cave
342
341
133
FORUM DE FEURS
tique aux environs de la cote 344,0. A l'appui de
de mortier jusqu'à la cote 343,95 (fig. 19, couche 11).
cette hypothèse, on notera que la surface de cette
Plus au nord, elle est recouverte par un épandage de
plate-forme est irrégulière sur une partie du tracé du
calcaire jaune concassé (fig. 19, couche 12). On
segment nord-sud, et localement (au sud) recouverte
remarque en particulier qu'une pellicule de ce
de remblais de gravier alternant avec des épandages
matériau est intercalée entre la plate-forme et la première
341
F
DE
344
341
13
ri? J^.*'; * •*
B
344
343
-
342
134
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
assise de l'élévation supérieure du mur nord-sud,
dans sa partie septentrionale : on en conclura que cet
épandage, qui recouvre l'ensemble du portique, a été
mis en place avant l'achèvement du bâtiment à
cryptoportique. Voilà donc qui fournit un indice
supplémentaire de la simultanéité de la construction du
portique et du cryptoportique, tout comme
l'encastrement de la dernière pile du portique dans un
massif de maçonnerie manifestement bâti en même
temps que la base du cryptoportique.
Les indications relatives à la stratigraphie de
l'intérieur de la galerie sont beaucoup plus
nombreuses. Dans sa partie nord, le conduit est remblayé
sur environ 1,5 m. Son sol est matérialisé par un
épandage de mortier. Il est recouvert par une couche
de limon peu épaisse (0,05 m) (fig. 19, couche 6), puis
par une couche de sable fin qui a livré de nombreux
ossements humains sans connexions anatomiques,
mais aucun mobilier qui puisse assurer leur datation
(couche 7). Le sommet du comblement est constitué
d'un remblai de gravier et de débris de mortier qui
correspond certainement à la démolition de la voûte
(couche 8).
Un niveau antique assez épais était conservé
sous le sol de la cave dans la partie nord de la pièce
allongée limitée par le mur de refend. La base de
l'élévation des murs en petit appareil est située entre
les cotes 341,05 et 341,15 (soit 0,4 à 0,5 m en dessous
du sol de la cave). Les fondations, plus larges de
0,15 m (sauf pour le mur de refend), sont en
appareil age irrégulier de gros blocs de granite rose et
reposent sur un lit de galets ; elles ont une hauteur de
0,6 m. Le seuil maçonné est situé à la cote 341,18
mais est surmonté de plusieurs horizons antiques qui
laissent supposer que le niveau de circulation était
situé à une cote supérieure. Il est d'abord recouvert,
ainsi que la partie nord de la pièce, par un remblai de
gravier mêlé de débris de calcaire jaune épais de
0,15 m, dont la surface est localement recouverte par
un épandage de mortier (fîg. 19, couche 3) : il s'agit
d'un niveau de travail à partir duquel a été mis en
place un enduit mural sommaire (non lissé et de
couleur grise) encore conservé sur une hauteur de 0,5 m.
Ce sol est recouvert par un nouveau remblai de
gravier et de calcaire jaune broyé, épais de 0,2 m
(couche 4) et scellé par une mince couche limoneuse
tassée (couche 5), également recouverte par endroits
de traces de mortier, et dont le niveau correspond à
la base d'une deuxième couche d'enduit, cette fois
blanche et soigneusement lissée, retrouvée en place
dans l'angle nord-est de la pièce. Aucun autre
horizon antique n'a été observé au-delà, sinon peut-être
une couche lenticulaire très charbonneuse au-dessus
du seuil (couche 5"). On considérera donc que le
sommet de cette couche limoneuse, situé à la cote
341,6, correspond au niveau de circulation antique.
Le comblement primitif de la partie sud de la
même pièce, située en dehors de l'emprise de la cave,
était conservé jusqu'au niveau d'arasement des
murs, soit sur une hauteur de 2 m environ. La
stratigraphie rencontrée est très différente de celle de sa
partie nord, puisque toutes les couches de terrain
rencontrées présentent un pendage très prononcé
vers le nord. Une première couche, dont la base est
au niveau du sommet des fondations, est constituée
d'un blocage de fragments de granite rose de petit
module (dont un amas de moellons d'appareil) noyé
dans un mortier blanc sans cohésion (couche 3'). Le
sommet de cette couche, matérialisé par une surface
de mortier régulière dont le contour, le long des
murs, est souligné par un joint carré de 2 à 3 cm, est
plan mais nettement incliné vers le nord. Elle est
surmontée par un épais remblai de gravier grossier
dont le niveau supérieur, également plan, présente
un pendage encore plus prononcé (couche 4'). Le
sommet de ce remblai correspond à la base d'un
enduit mural peu soigné (le prolongement de celui
qui vient d'être décrit) observé sur les deux murs
latéraux de la pièce et bien conservé sur une hauteur
de 0,2 m (fîg. 20), qui correspond à l'emprise d'un
nouveau remblai de terre grise (couche 5'). Le
comblement supérieur, hétérogène (couche 9), ne
paraît pas antique.
Il convient de proposer tout de suite une
interprétation aux observations qui précèdent. La
présence de ces couches en plan incliné laisse
évidemment penser à une descente permettant l'accès à la
galerie inférieure. Les accès aux cryptoportiques de
forum de plan en U sont en effet presque toujours
situés à l'extrémité des galeries latérales (ainsi à
Conimbriga, Bavay, Reims, Trêves...). Les
dimensions même de la pièce correspondent également aux
normes habituelles des cages d'escalier au Haut
Empire (2,4 sur 6,4 m dans le premier état de Bavay,
2,5 sur 8,0 m à Trêves). Si la présence d'un enduit
mural dont la base inclinée se retrouve sur les deux
parois latérales laisse penser que l'escalier d'accès
n'avait qu'une volée de marches de 2,4 m de largeur
(qui correspond d'ailleurs à la largeur du seuil), il est
peu plausible que la pente des remblais et de cette
limite d'enduit corresponde à la pente d'origine de
l'escalier, puisque la dénivellation est de 2 m, valeur
beaucoup trop faible par rapport à sa longueur de
7 m. Il est plus logique de penser que l'accès à
l'escalier se faisait depuis le portique par une porte percée
dans le mur de façade est du cryptoportique. En res-
FORUM DE FEURS
Fig. 20 — Parement est du mur de refend de l'aile sud du
cryptoportique (1978). Le mur est recouvert d'un enduit dont
la base a un pendage prononcé vers le nord, dénotant
l'existence d'un ancien accès en plan incliné vers la galerie inférieure
du cryptoportique.
tituant à cette porte une largeur identique à celle du
seuil inférieur (2,4 m), on obtient une longueur
effective d'escalier de 4,6 m, pour une dénivelée de 2,5 m
environ (différence de niveau entre le portique et la
galerie inférieure), soit une pente beaucoup plus
normale (divisible par exemple en douze marches de
21 cm de volée et 38 cm de giron). L'accès à la
galerie supérieure pouvait alors s'effectuer par un
escalier parallèle à celui-là, et auquel on accédait par une
deuxième porte percée plus au nord dans le mur est
du cryptoportique, dans le prolongement du
portique (cf. restitution fig. 15).
On n'a pu pratiquer qu'une tranchée de sondage
étroite dans le comblement de la galerie inférieure du
cryptoportique épargné par la cave à l'ouest du mur
de refend nord-sud. Néanmoins, l'observation de
couches de destruction non perturbées apporte des
indications très précieuses sur la nature de
l'élévation de la galerie. Le sol d'origine, en terre battue et
situé à un niveau inférieur à celui du seuil (cote
341,1), est en effet directement recouvert par les
débris de la toiture incendiée (fig. 19, couche 14) :
tuiles mêlées de fragments de poutres calcinées, ce
qui montre indubitablement que la galerie inférieure
n'était pas voûtée. Ce niveau d'incendie était
surmonté par une épaisse couche de gravats (couches 15
et 16), dont la base contenait un grand nombre de
135
fragments d'enduits et le sommet des blocs de
maçonnerie effondrés, parfois très volumineux. Deux
types d'enduits peuvent être distingués. Le premier
n'est constitué que d'une couche homogène de
mortier assez gris à inclusion de sable grossier, épais de
3 cm en moyenne et soigneusement lissé, qui
correspond au revêtement de la galerie inférieure, puisque
d'importants fragments ont été retrouvés en place
sur les parois ; le second est constitué de deux
couches de mortier, la plus profonde identique à celle
qui vient d'être décrite, et la couche superficielle,
plus mince (0,5 cm), constituée de mortier blanc à
nombreuses inclusions de feldspath. Sa surface est
parfaitement lissée et présente des restes de
décoration peinte, qu'il est toutefois impossible de
caractériser précisément compte tenu de l'exiguïté de la
surface fouillée (Allag, 1985) : elle devait du moins
comporter d'importants panneaux rouge sur fond
blanc cernés par une bordure blanche rehaussée de
trois traits surpeints (deux violets encadrant un
vert), dont quelques fragments présentent également
des surpeints verts, mais aussi des panneaux bleus
dont de nombreux fragments ont été retrouvés,
présentant parfois aussi des traces de décor surpeint.
Une dernière particularité à mentionner est la
fréquence des graffiti sur les fragments du second type.
Éléments de datation
Le mobilier retrouvé en position stratigraphique
est très peu abondant. La base de la couche
d'incendie de la galerie, explorée sur seulement 2 m2, a livré
quelques ossements animaux et un petit lot de
tessons de céramique (environ 90), dont les éléments les
plus caractéristiques sont les suivants :
• céramique sigillée : un fond de vase haut,
(fig. 21, n° 1), un petit fragment de paroi de bol
Drag. 37 à décor moulé fruste, un fragment de paroi
de forme basse lisse, le tout de pâte et vernis rouge
soutenu typiques des productions du Centre-Gaule ;
• céramique à couverte micacée : trois
fragments de paroi d'une coupe évasée (fig. 21, n° 2),
trois fragments de paroi d'une cruche à col tronconique large, un fragment de jatte profonde à lèvre
en bandeau (n° 3) ;
• céramique à cuisson réductrice-oxydante : un
fragment de cruche à pied cintré (fig. 21, n° 4), un
fragment de cruche à col tronconique large, un
rebord de vase ovoïde (n° 5), des fragments de deux
écuelles tripodes basses, deux fragments d'une
écuelle à lèvre droite en bandeau (n° 6), une lampe à
suif (n° 7) ;
• céramique à cuisson réductrice : deux
fragments de paroi de vase haut, décorés à la molette
(fig. 21, nos8 et 9).
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
136
i
s
r
0
5cm
i
Fig.dans
21 —les Mobilier
niveaux provenant
d'incendie (fig.
du remplissage
19, couches de
14 laet galerie,
15).
Certains de ces objets ne peuvent pas être datés
avant la fin du IIe s. (en particulier la jatte n° 6, dont
la forme imite celle des mortiers Drag. 45, et les
formes micacées).
Par ailleurs, une couche inférieure de la
descente (couche 3'), contemporaine de la construction
(ou d'une réfection) de l'escalier, a livré, outre des
fragments d'un pichet à engobe rouge, typique des
productions de Lezoux au Ier s., un as de Domitien
(Cohen 583). La présence de moellons de petit
appareil dans la même couche laisse possible l'hypothèse
d'un remblai à mettre en rapport avec un
remaniement de l'édifice primitif.
Autres observations
Environ les deux-tiers des caves de l'îlot qui
recouvre actuellement la galerie à cryptoportiques
ont pu être visités (cf. infra, p. 161). Des vestiges de
constructions antiques ont pu être identifiés dans
cinq d'entre elles.
Ces observations ont pu être complétées par une
petite fouille de sauvetage dans l'angle sud-ouest
interne de la galerie, en 1980, et par le suivi de
travaux de voirie en 1991 (fig. 22).
Nous nous bornerons ici à décrire les vestiges
qui ont été observés. Les problèmes posés par leur
raccordement et la restitution du plan d'ensemble
seront développés ultérieurement.
Mur de façade intérieur
L'aile sud est la mieux connue à cause de la
fouille de son extrémité est. On sait de plus que le
mur de façade nord de cette aile a été dégagé sur
17 m et fortement arasé en 1967, lors de la
reconstruction d'un immeuble (fig. 2, point 4). Le
même mur peut encore être observé dans une cave
située immédiatement plus à l'ouest (fig. 2, point 5 et
fig. 22) : la base élargie du mur antique, réutilisée en
fondation, émerge de 30 cm au-dessus du sol de cette
cave, à la cote 342,7.
L'angle intérieur sud-ouest de la galerie a pu
être dégagé en 1980, lors de la reconstruction d'un
immeuble (fig. 2, point 6) ; les vestiges antiques ont
été cette fois épargnés. Le bâtiment existant
s'appuyait sur les deux murs antiques et sa cave était
exactement insérée dans leur angle. De l'élévation
des murs ne restait conservée que la partie basse
élargie. La façade sud de l'aire circonscrite par la
galerie a été dégagée sur 9 m à partir de l'angle, la
façade ouest sur 8 m. Le sommet des maçonneries
était à la cote 343,25, qui correspond assez
précisément à celle relevée dans l'angle nord-est de l'aile
sud (343,30). Des sondages dans l'aire interne ont
permis de retrouver une stratigraphie tout à fait
comparable à celle observée à l'emplacement du
portique :
. le sol primitif est à la cote 341,8, soit une
dénivelée de 1,2 m depuis l'extrémité ouest du portique.
Ce sol scellait également un niveau d'occupation des
ine-ier s. avant J.-C. Comme pour la fouille de 1978,
on a pu constater que l'occupation est très diffuse
après le milieu du Ier s. avant J.-C. (l'élément
datable le plus récent de ces niveaux est une lèvre
d'amphore Dr. 7/11; cf. Vaginay, Guichard, 1988,
fig. 1 1 n° 32) ;
• ce sol est recouvert par un épais remblai de
gravier qui n'a livré d'autre mobilier que quelques
tessons gaulois déplacés, surmonté par un mince
épandage de calcaire jaune pilé et tassé, dont le
sommet est à la cote 343,3.
Ce remblai s'appuie contre les murs antiques,
tandis que l'aménagement de sol à son sommet est
situé sensiblement au même niveau que l'extrados
du conduit d'assainissement et à 0,2 m en dessous de
la cote minimale restituable pour la place centrale en
avant des portiques. Aucun autre horizon antique
n'a pu être repéré entre ce sol et le sol actuel (à la
cote 344,8).
Le mur de façade interne de la galerie a encore
pu être repéré à partir d'une cave située rue Gambetta (fig. 2, point 7 et fig. 22). La limite sud de cette
FORUM DE FEURS
137
D
0
□
10 m
Fig. 22 — Synthèse des observations sur la partie orientale de l'aire sacrée ; la pastille noire indique l'emplacement d'un bloc de
grand appareil ; en noir, les maçonneries antiques observées.
138
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
parcelle suit le tracé du rempart médiéval
(vraisemblablement encore partiellement conservé en
élévation) qui lui-même s'appuie sur le mur antique, ainsi
que le remarquait déjà Roux (1851, p. 47). L'angle
intérieur nord-ouest de la galerie est nettement
visible : la voûte du conduit d'assainissement a été
arrachée sur une longueur de 9 m à partir de l'angle,
le long du mur nord. Trois arcs de décharge ont
ensuite été construits dans l'encoche ainsi ménagée.
Leur facture n'est certainement pas antique ; ils
paraissent plutôt faire partie de l'élévation du
rempart. Ces arcs permettent du moins d'accéder
facilement au conduit, qui n'est pas totalement comblé.
On a ainsi pu reconnaître, en y cheminant, toute la
longueur de la façade ouest de l'aire interne (le
conduit est obturé par de la terre quelques mètres
avant l'angle sud-ouest), ainsi que sa façade nord sur
22 m (le conduit est également comblé au-delà). La
facture des maçonneries est parfaitement homogène
et identique à celle observée dans l'extrémité de
l'aile sud en 1978.
Enfin, la réfection de la rue du Palais a permis
de dégager superficiellement l'extrémité nord-est du
cryptoportique et de vérifier sa symétrie parfaite
avec l'extrémité sud-est (fig. 22). Ces travaux ont
permis d'observer la pile extrême du portique de la
place centrale (cf. supra, p. 127) ainsi qu'un bloc de
grand appareil en calcaire jaune encastré dans la
maçonnerie du mur pignon de la galerie. Ce bloc
pourrait correspondre à un jambage de l'ouverture
supposée entre le portique et la galerie haute du
cryptoportique (fig. 15).
Mur de façade extérieur
Roux situait le conduit extérieur à 16 m du
conduit intérieur, à l'exception des extrémités des
ailes latérales où il indique que cette largeur est
réduite à 12 m (ainsi que l'ont confirmé nos travaux).
En dehors de la fouille de 1978, le conduit du mur de
façade extérieur a été observé en quatre points, trois
dans l'aile sud (fig. 2, points 8, 9 et 10) et un dans
l'aile nord (fig. 2, point 13). Au point 8, le conduit
d'assainissement a pu être repéré précisément dans
la cave d'un immeuble du xve s., où il est apparent
sur une longueur de 5 m. Il est exactement dans
l'alignement du tronçon dégagé plus à l'est lors de la
fouille de 1978, en contradiction avec la description
de Roux. Dans la cave mitoyenne (point 9),
aménagée au xixe s., une banquette maçonnée et
recouverte d'enduit semble correspondre à son
prolongement. Sur la place du Puits de l'Aune (point 10), la
réfection du réseau de distribution d'eau, en avril
1991, a mis au jour un court segment du mur de
façade. L'exploration du conduit d'assainissement à
partir de ce point a montré qu'il s'agissait de l'angle
sud-est d'une exèdre profonde de 3,60 m, valeur
proche de l'élargissement de 4 m décrit par Roux,
qui explique l'erreur qu'il a commise en restituant le
plan d'ensemble du cryptoportique. La longueur
explorée du conduit montre aussi que l'exèdre est
large d'au moins 7,5 m. Trois regards aménagés à la
base de la voûte, identiques à celui observé dans
l'angle nord-est de la branche sud du cryptoportique
en 1978, s'ouvraient aux angles de l'exèdre, l'un vers
l'extérieur, les deux autres vers l'intérieur. Un
contrefort d'angle en petit appareil, large de 0,90 m
et saillant de 0,60 m, a également été dégagé par ces
travaux. L'examen du parement d'un puits médiéval
plaqué contre le mur antique (celui qui a donné son
nom à la place) a permis de constater que les
fondations s'enfonçaient jusqu'à la cote 341,0. On a aussi
observé un mur antique parallèle au grand axe du
forum et distant de 2,2 m du mur de l'exèdre. Large
de 0,60 m, il repose sur une fondation située au
même niveau que la plate-forme qui surmonte le
conduit d'assainissement. Il est lié avec un mortier
semblable à celui du cryptoportique mais est
constitué de petits moellons beaucoup plus irréguliers,
dont quatre assises étaient conservées. Entre les
deux murs était encore en place une épaisse couche
de démolition antique (0,4 m) qui reposait
directement sur la plate-forme et qui a livré, outre de
nombreux fragments de tegulae et des moellons de petit
appareil, un tesson de sigillée de Gaule du Centre à
décor excisé datable du me s.
Nous avons peu de renseignements sur le mur
extérieur des autres façades : sur le côté nord il serait
situé exactement à l'emplacement du fossé de
l'enceinte médiévale et a donc dû être détruit depuis
longtemps, à l'exception de son extrémité est qui
sert de fondation au rempart médiéval, encore en
partie en élévation, et où Roux localisait une porte
d'accès au conduit. Sur le côté ouest, toutes les
constructions datent du siècle dernier et ont dû
également en faire disparaître les vestiges.
Il est finalement aisé de restituer la disposition
de ce mur extérieur, en corrigeant les erreurs de
Roux. Le cryptoportique a une largeur dans œuvre
de 9,4 m et est pourvu d'exèdres saillantes de 3,6 m.
La restitution de deux exèdres latérales symétriques,
distantes de 19,8 m de l'extrémité orientale du
cryptoportique, et d'une exèdre axiale, selon un modèle
bien attesté en Gaule (à Bavay, à Nyon et à Trêves),
avec diverses variantes, paraît très vraisemblable.
Temple
On n'en connaît que la platée de fondation, dont
le parement sud a pu être relevé dans une cave
FORUM DE FEURS
(fig. 2, point 12), où il est visible, mais
malheureusement enduit, sur une longueur de 10 m et une
hauteur de 1,5 m : il s'agit d'un immeuble moderne dont
la cave projetée a dû être réduite à cause du massif
de maçonnerie antique qui s'était révélé
indestructible au marteau-piqueur.
Il a depuis (en 1984) été possible d'étudier la
facture de ce massif, à l'occasion du creusement de
tranchées de fondation dans la parcelle située
immédiatement plus à l'ouest (fig. 2, point 11 et fig. 22).
C'est une maçonnerie pleine, actuellement
arasée à la cote 344,73 au point le plus haut, que les
tranchées ont permis de reconnaître sur une largeur
de 7 m à partir du parement sud. Le parement n'a
pu être observé qu'en deçà du niveau du sol de
calcaire jaune qui recouvre l'aire circonscrite par la
galerie (le sommet du parement conservé est à la cote
343,46). Il est constitué de petit appareil irrégulier
identique à celui des autres parements des bâtiments
du forum destinés à être remblayés.
L'arasement irrégulier du massif montre
clairement que la construction s'est effectuée en plusieurs
étapes, ainsi qu'on a pu l'observer pour d'autres
éléments du forum : il a d'abord été appareillé jusqu'à
la cote 343,54, à laquelle a ensuite été remblayée
l'aire périphérique, avec aménagement d'un sol
(provisoire?) de calcaire jaune pilé dont on retrouve des
traces à l'interstice entre la base du massif et
l'élévation ultérieure, situé à la même cote que lui, ce qui
témoigne de l'existence d'un délai suffisant entre les
deux phases de construction pour que ces salissures
aient eu le temps de se déposer sur la maçonnerie.
La réfection de la rue du Palais a enfin permis
de repérer l'extrémité est de la platée (fig. 22) et de
préciser son mode de construction : ses fondations,
dégagées par un puits moderne, s'enfoncent jusqu'à
la cote 341,0. Les mêmes travaux ont montré qu'elle
était prolongée du côté est par un massif de facture
139
semblable mais plus étroit (12,1 m contre 14,1 m
pour la platée) et long de 4,6 m, qui correspond
certainement à l'emprise de l'emmarchement du
temple. Un tronçon nord-sud de l'emmarchement
qui délimitait la place centrale a probablement été
repéré dans une cave mitoyenne de la rue du Palais,
à 3,8 m en avant de celui du temple, sous la forme
d'un bloc de calcaire jaune de 0,75 sur 0,45 m de
section reposant sur une fondation massive, engagé
dans la paroi de la cave.
L'ÉGOUT DU FORUM
Déjà reconnu par Roux (1851, p. 46), deux
sections en ont été dégagées en bordure de la rue de
Roanne lors de fouilles de sauvetage précédant la
reconstruction d'un îlot d'habitations (Maison de la
Commune ; fig. 23, point 1), et celle de l'aile sud de
l'hôpital, en 1981 (fig. 23, point 2).
Description
L'égout mis au jour est un massif de maçonnerie
de section rectangulaire, haut de 1,85 m (fondations
exclues) et large de 1,50 m (fig. 24). Il renferme un
couloir voûté haut de 1,40 m et large de 0,60 m. Sa
facture est rigoureusement identique à celle du
conduit d'assainissement de la galerie à
cryptoportiques : la voûte, épaisse de 0,5 m, a été construite
sur un coffrage de six planches de 17-18 cm de
largeur, les parois internes sont constituées de 17 à
18 assises de moellons de petit appareil assez
irréguliers ; la base du conduit est matérialisée par un
mince épandage de mortier mis en place au moment
de la construction. Le remplissage interne, épais de
0,8 m dans le tronçon méridional, est moderne
jusqu'à la base, tandis que le conduit est fortement
arasé dans la plus grande partie du tronçon
septentrional.
Fig. 23 — Plan de situation des vestiges de
l'égout d'assainissement du cryptoportique
(1,2: tronçons fouillés en 1981 ; 3 : tronçon
de conduit maçonné dégagé en 1887 et
localisé d'après Poncins 1887).
10
140
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Fig. 24 — Coupe transversale de l'égout et des couches
archéologiques qui lui sont liées (fouille de 1981 ; désignation
des couches selon : Vaginay, Valette, 1982, fig. 14; I : niveau
d'occupation du Ier s. avant J.-C. ; IV : comblement de la
tranchée de fondation de l'égout; V à IX : couches indurées
correspondant aux niveaux de circulation successifs de la rue).
Le parement externe est appareillé sur toute sa
hauteur en petits moellons irréguliers de granite rose
jointoyés au mortier. Des trous de boulin sont
disposés à espacements réguliers de 1,90 m et à 1,25 m de
la base du parement.
Les deux tronçons repérés permettent de
restituer le tracé rectiligne du conduit, quasiment
parallèle à la rue de Roanne, sur 50 m. A l'extrémité sud,
la fouille a également dégagé un coude qui lui
permettait de rejoindre, en biais, l'angle extérieur nordouest du forum. Ce coude est cohérent avec le plan de
Roux, ce qui n'est pas le cas de la partie rectiligne de
50 m (Roux trace un second coude vers l'ouest à
environ 16 m du premier — cf. fig. 17).
Nivellement
Le niveau supérieur du massif maçonné aux
points extrêmes de la partie dégagée ne présente
qu'une faible pente vers le nord (cote 341,08 au sud,
340, 88 à 35 m plus au nord). La façon dont l'égout
se raccorde avec le conduit d'assainissement du
forum n'est pas connue. Roux affirme avoir parcouru
ce «dégorgeoir» sur une «assez grande longueur»,
mais qu'il l'a trouvé muré «en approchant du point
d'intersection des angles» (angle nord-ouest du
forum), ce que l'on a effectivement pu vérifier.
Néanmoins la similitude des modes de construction et
l'inflexion vers l'est de son axe laissent peu de doutes
quant à sa fonction. Les données de nivellement
imposent d'ailleurs certaines restrictions sur la
nature de ce raccordement. Le fond du conduit
d'assainissement dans l'angle sud-est de la galerie à
cryptoportiques est en effet à la cote 340,7, qui est
quasiment l'altitude du sommet de la voûte de l'égout
(340,6). Même si l'on doit supposer que le sol du
conduit d'assainissement était en légère pente en
direction de l'exutoire, il demeure une forte
dénivelée de près de 1,5 m entre l'égout et le conduit.
L'origine de cette dénivelée s'explique facilement :
l'égout étant situé dans l'axe d'une rue antique qui
longeait le forum (cf. infra, p. 148) et dévalait vers le
nord en direction de la vallée de la Loise, son
sommet devait être situé en dessous du niveau de
circulation, situé aux alentours de la cote 341,5 au
moment de sa construction. Le raccordement devait
se faire au moyen d'un infléchissement du niveau du
sol du conduit d'assainissement dans son angle nordouest, par un puisard ou un plan incliné.
L'égout drainait certainement l'eau jusqu'à la
Loise. Une section supplémentaire en a
vraisemblablement été dégagée en 1887 le long de la même rue,
à 65 m au nord de celle repérée en 1981 (Poncins,
1888 ; fig. 23, point 3). Ce tronçon, long de 30 m, qui
avait alors été considéré comme un aqueduc, est en
effet sensiblement dans l'axe de l'égout si l'on se
réfère aux relevés de l'époque, et «ses deux murs
latéraux, épais de 0,45 m, étaient arasés au même
niveau, sans vestiges d'arrachement pouvant faire
supposer l'existence d'une voûte. La profondeur du
canal était de 0,70 m, sa largeur de 0,55 m. Le radier
était formé de tuiles à rebords de très grande
dimension, 0,53 sur 0,34 m, placées en travers et
juxtaposées, les rebords en dessous. Ces tuiles reposaient
sur un lit de béton hydraulique de 0,08 m, établi luimême sur une couche de 0,10 m de pierres cassées».
Le module du conduit (largeur du canal et des parois
latérales) correspond à celui de l'égout. Le sol
maçonné peut s'expliquer par la plus grande pente
du terrain à cet emplacement, qui nécessitait de
pallier l'érosion due à la circulation de l'eau.
Données stratigraphiques
La fouille de niveaux d'occupation liés à la
construction de l'égout en 1981 a livré un mobilier
datable avec précision qui apporte les éléments les
plus tangibles pour la datation de la mise en chantier
du forum. Ces données stratigraphiques, déjà
décrites en détail (Vaginay, Valette, 1982), seront
seulement résumées ici.
On a en effet pu observer que l'égout avait été
installé dans une large tranchée dont le comblement
était scellé par des couches successives de terrain
induré correspondant à des niveaux de circulation
intense (fig. 24). Bien que leur sommet soit fortement
arasé, il est très probable qu'il faille y voir, à l'image
d'autres structures de voirie mieux conservées
dégagées depuis lors à Feurs, la base des niveaux de cir-
FORUM DE FEURS
culation successifs d'une rue située dans le même axe
que l'égout sous-jacent et bordée, à l'est par le
forum, à l'ouest par un quartier d'habitat qui a pu
être partiellement dégagé. Si cette rue n'a pu être
fouillée que sur une longueur réduite, les indications
de datation sont très précises parce que certains de
ses niveaux ont livré un mobilier abondant. La plus
ancienne couche postérieure à la construction de
l'égout précisément datable par son mobilier (fig. 24,
couche VII) comportait 54 vases identifiables, dont
une part appréciable (36 vases) de céramiques
importées et un as de Tibère frappé en 10-11 (RIG 368). La
datation qui en est proposée, autour de 20, est
confortée par l'analyse des couches immédiatement
sur-jacente (couche VIII, établie au cours de la
troisième décennie de notre ère) et sous-jacente (couche
IIIc, vraisemblablement contemporaine de la
construction de l'égout, établie pendant la première
décennie de notre ère). Comme la couche VII est
précédée de deux autres niveaux de sol bien constitués
également postérieurs à l'égout, la construction de ce
dernier doit être située vers 15 après J.-G. au plus
tard.
Restitution du plan d 'ensemble
Raccordement des relevés; plan régulateur
Les données rassemblées sont suffisantes pour
permettre la restitution du plan au sol du monument
dans sa quasi-totalité (fig. 25). Compte tenu de la
façon dont ont été repérées ses différentes parties :
relevés partiels, étalés sur plus de 30 ans, de vestiges
souvent détruits ou remblayés par la suite, le plan
que nous proposons ne peut cependant prétendre à la
même précision que si le monument avait été dégagé
en une seule fois dans son ensemble. On privilégiera
les données vérifiées récemment (1988) sur les parties
du» monument encore accessibles : curie, mur
périphérique de la galerie à cryptoportiques, en ajustant
au mieux les relevés plus anciens pour les parties qui
ne sont plus visibles. Les dernières observations sur
le terrain (1991) s'ajustent avec précision à la
restitution effectuée antérieurement : la marge
d'incertitude n'a jamais été transgressée pour les nouvelles
parties mises au jour. Elles permettent en particulier
de déterminer exactement la largeur du forum au
niveau du cryptoportique.
Les relevés récents ont été effectués au
télémètre (positionnement des élévations actuelles sur le
plan à ± 0,2 m) et complétés par triangulation
(notamment pour les relevés de caves). Toutes les
mesures ont été reportées sur un plan au l/200e.
Le positionnement précis des deux branches
141
nord et sud du conduit d'assainissement de la galerie
à cryptoportiques permet de tracer l'axe
longitudinal est-ouest du monument jusqu'à la curie (avec une
précision de ± 0,2 gr). Cet axe est exactement superposable à celui de la curie et quasiment parallèle au
mur d'appui des cellules du portique latéral dégagé
en 1978 (la déviation de 0,4 m pour la longueur
dégagée de ce mur de 44 m est imputable à une erreur de
relevé lors de la fouille, puisque cet écart se retrouve
dans le positionnement du parcellaire moderne).
Le relevé de la partie nord de la basilique (1968),
repris à partir des cotes qui y sont indiquées, montre
également un léger décalage de la travée nord de la
colonnade vers l'ouest (0,4 m), et un désaxement du
mur pignon nord (de 0,3 m pour une longueur de
20 m) par rapport à sa situation attendue, valeurs
qui restent dans la marge d'erreur de ces relevés. On
en conclura qu'à la précision des relevés, les
différentes parties de l'ensemble monumental du forum
sont rigoureusement alignées.
La détermination de l'axe longitudinal permet
ensuite de restituer l'ensemble du monument par
symétrie.
L'incertitude avec laquelle sont connues ses
dimensions et la nature des vestiges architecturaux
observés (la plupart appartiennent à des fondations à
l'origine enterrées) s'opposent à la recherche de la
valeur exacte du (des) module(s) de base utilisé(s)
pour sa construction. On peut cependant rechercher
si certaines dimensions exprimées en pieds et les
proportions principales du monument correspondent à
des valeurs simples et donc intentionnelles, afin de
comprendre le mode d'élaboration de son plan
directeur17.
Temple et aire sacrée
La largeur hors tout de la galerie à
cryptoportiques (14,20 ± 0,05 m) correspond clairement à
48 pieds (14,19 m) et sa largeur dans œuvre (9,40 m)
à 32 pieds. Le seuil observé dans la branche sud,
large de 2,35 m, correspond au quart de cette valeur
(8 pieds).
La largeur de la platée de fondation du temple
est de 14,1 m, dimension qui correspond à la largeur
hors tout de la galerie à cryptoportiques et à
l'espacement entre la galerie et le temple (14,6 m). Il
n'est donc pas douteux que la partition de la largeur
du forum en cinq modules égaux, qui correspondent
à 48 pieds chacun, soit à considérer comme un
élément du plan directeur.
17 La valeur de référence retenue pour la mesure du
pied est de 0,296 m.
142
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Fig. 25 — Plan restitué du
forum (en noir : maçonneries
précisément repérées ; en
hachures : maçonneries
observées mais mal repérées).
CI] IZ'i îlj îI3 m il: G l.j C] {.
FORUM DE FEURS
La largeur totale du forum doit donc
correspondre à 5 X 48 = 240 pieds (2 adi), au niveau des
fondations (soit 71,04 m, contre 71,1 ± 0,2 m
mesurés). La longueur hors-tout de la galerie à
cryptoportiques est de 59,8 ± 0,2 m au niveau des fondations,
soit 4 X 48 + 12 pieds. Le plan de cette partie du
forum entre donc approximativement dans une
trame dont l'unité est de 48 pieds, sa largeur
(direction nord-sud) correspondant à cinq modules et sa
longueur à quatre modules ; l'aire du temple
correspond à 3 X 3 modules.
L'aire du temple mesurée à la base de
l'élévation est un carré de 45,2 m de côté. La longueur de
chacun des trois côtés de la façade interne du
cryptoportique permet de restituer une colonnade qui
posséderait huit colonnes libres et deux demi-colonnes
engagées à ses extrémités. Le rythme ainsi créé
(entraxes de 2,85 m, ou 9,5 pieds) est cohérent avec
la position du mur de refend dégagé à l'extrémité de
l'aile sud, situé de cette façon en arrière d'une
colonne de la façade.
La largeur des exèdres accolées au mur
d'enceinte de l'aire sacrée n'est pas connue (cf. infra,
p. 157 pour la restitution de leur plan). Si la
restitution d'une exèdre axiale sur la façade ouest ne fait
pas de doute, on observe que celle dégagée n'est pas
au milieu de la branche latérale.
Le temple lui-même a pour largeur 14,1 m. Sa
façade orientale est en retrait d'environ 5 m de
l'extrémité du cryptoportique. Elle est précédée par un
emmarchement dont l'emprise est de 12,1 X 4,6 m.
La longueur de la platée n'est en revanche pas
connue (mais supérieure à 20 m).
Place centrale et portiques latéraux
Les dimensions du portique lui-même
correspondent toutes à des mesures entières en pieds
(fig. 15) : entraxes des cellules de 15 pieds (valeur
moyenne mesurée : 4,54 m, contre 4,44 attendus),
largeur de 48 pieds, etc. La longueur mesurée du
portique (68,2 ± 0,2 m) correspond assez précisément à
15 intervalles de 4,54 m (68,1 m), ce qui permet de
restituer à chacune de ses extrémités une cellule plus
large, ainsi qu'on a pu le vérifier par la fouille (cf.
fig. 15). La longueur totale «théorique» du portique
doit donc correspondre à 15 modules de 15 pieds,
soit 15 X 15 = 225 pieds. De la largeur du
cryptoportique, on déduit aussi la largeur hors-tout
«théorique» du forum au niveau des boutiques :
240 — 9 = 231 pieds (68,4 m), qui correspond
précisément à la valeur mesurée. L'aire centrale du forum
s'inscrit donc exactement dans un carré de 68,4 m de
côté.
143
La place elle-même a pour dimensions, si la
mesure est prise au ras des piles du portique : 68,2
sur 38,4 m, ou, si l'on suppose l'existence d'un
emmarchement devant la basilique de même largeur
que celui observé devant les portiques et si la mesure
est prise à la base de l'emmarchement : 62,4 sur
32,4 m, soit une proportion approximative de 2:1.
Basilique
Le plan de la basilique a été restitué par
symétrie, en supposant que l'exèdre repérée sur sa façade
septentrionale se répétait sur la façade opposée et
que la largeur des portiques périphériques était
uniforme.
Sa longueur hors œuvre (exèdres et contreforts
non compris) est de 68,4 ± 0,4 m, soit exactement la
largeur hors œuvre restituée du forum au niveau des
portiques latéraux. Le portique se raccorde donc à la
basilique de façon à ce que le mur d'appui des
cellules soit dans le prolongement de sa façade.
La valeur de l'entraxe des piles de fondation de
la basilique relevée sur la travée nord est de 4,1 m
(moyenne de trois mesures), soit 14 pieds, tandis que
le relevé de 1956 indique, pour les sept entraxes
mesurés sur les travées est et ouest, une valeur
moyenne de 4,41 m (avec un écart maximum de
0,17 m) sensiblement plus élevée que pour la travée
nord. D'autre part, la longueur totale restituée de la
nef centrale entre les axes des colonnes d'ante est de
54,8 ± 0,4 m, soit 13 X 4,21 m, une valeur
apparemment incompatible avec celle mesurée de 4,4 m.
L'écart est trop important pour pouvoir être mis au
compte des incertitudes de relevé. On doit
nécessairement supposer que l'écartement des piles des
travées longitudinales n'est pas uniforme, mais plus fort
vers le centre qu'aux extrémités. Il n'en reste pas
moins que la nef de la basilique est limitée par
quatorze colonnes sur ses longs côtés, contre quatre
sur ses petits côtés.
La largeur de la nef centrale au niveau des
fondations est de 14,2 ±0,1 m, soit 48 pieds (somme de
quatre piles de 6 pieds de côté et de trois espaces
inter-piles de 8 pieds), tandis que la longueur de nef
est de 56,6 ± 0,4 m, ce qui correspond à 4 X 48 pieds
(56,8 m), soit quatorze piles de 6 pieds et treize
espaces (théoriques) de 8 pieds : le plan régulateur
s'applique manifestement à l'emprise des fondations
(ici l'utilisation d'un module de 48 pieds et la
proportion de 4:1 de la nef centrale), comme c'était déjà le
cas pour l'aire sacrée.
Qui plus est, la largeur des portiques latéraux
est de 4,7 ±0,1 m, soit 16 pieds et un tiers de la
largeur de la nef centrale. Si nous prenons ces mêmes
144
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
mesures dans l'axe des murs et des piliers, nous
obtenons cette fois un rapport de 1:2, avec 21 pieds pour
les portiques latéraux et 42 pieds pour la nef
centrale.
Les dimensions dans œuvre «théoriques» de la
basilique seraient de (192 + 2 X 16 = 224) X
(48 -f- 2 X 16 = 80) pieds, soit respectivement de
quatorze et cinq modules de 16 pieds, et donc dans la
proportion de 2^/2:1, et ses dimensions hors œuvre
(sans les contreforts et les exèdres) de 231 X 92 pieds.
Les dimensions hors tout des édicules encadrant
la curie sont sans ambiguïté de 28 sur 28 pieds (en ne
considérant que la partie saillante hors du mur de
façade de la basilique et en incluant les contreforts)
tandis que celles de la curie, mesurées de la même
façon, sont de 66 sur 44 pieds, et donc dans le
rapport 3:2. Sa largeur correspond approximativement à
celle des exèdres appuyées sur les petits côtés de la
basilique. La distance qui sépare sa façade orientale
(contreforts compris) du grand axe de la basilique est
de 33,3 m (112 pieds), soit la demi-longueur de cette
dernière (dans œuvre). La basilique et la curie sont
donc nettement liées au sein du plan régulateur.
Les dimensions hors tout de l'ensemble
monumental sont finalement de 173 m par 76 m. L'étude
de son plan montre clairement l'existence de liens
organiques entre ses différentes composantes,
notamment l'utilisation d'un même module de base
de 48 pieds pour l'ensemble des constructions et
l'identité du nombre de colonnes pour les portiques
de la place centrale et la péristasis de la basilique.
Niveaux de circulation
II s'agira essentiellement ici de rassembler les
données énumérées au cours de la description. En
prenant comme référence la cote de 344,0 qui
correspond au niveau de circulation des portiques
latéraux, la place centrale se situait entre 0,3 et 0,7 m en
contrebas, tandis que le sol de la basilique était
environ 1 m plus haut. On accédait de la basilique à la
curie par un escalier permettant de rattraper une
dénivelée supplémentaire de 1,5 m. Du côté ouest
maintenant : le sol des cryptoportiques est situé
entre 2,5 et 3 m en contrebas. Si l'on restitue des
escaliers de même pente pour accéder du portique
aux galeries inférieure et supérieure, on en déduit
que le sol de cette dernière était situé entre 2,5 et
3 m au-dessus de celui du portique.
On ne connaît pas la cote du sommet du
podium, mais il est logique de la restituer au même
niveau que la galerie supérieure des cryptoportiques.
Un niveau de circulation (sol de travail) de l'aire du
temple est attesté à la cote 343,6. Comme il paraît y
avoir continuité des sols des portiques et de l'aire du
temple, il est plausible que les deux étaient au même
niveau (344,0).
Le forum est établi sur un terrain qui présentait
originellement une légère pente vers le nord-ouest :
le sol primitif est à la cote 343,8 au sud-est, à la cote
341,6 au nord-ouest. Les niveaux de circulation
gallo-romains autour du monument paraissent
respecter la pente du sol primitif. Si donc on pouvait
entrer de plain-pied dans le forum dans la partie est
du monument, il est exclu qu'un tel accès ait pu
exister sur la façade ouest, puisqu'il obligerait à couper
le conduit d'assainissement. La seule entrée
identifiée est sur la façade est de la basilique, et encore
doit-elle correspondre à un accès secondaire. Par
analogie avec les autres monuments du même type,
on doit restituer d'autres entrées menant
directement à la place centrale, et qui devaient se situer
aux extrémités des portiques bordant cette place au
nord et au sud (à travers les cellules extrêmes).
Les matériaux
et leur mise en œuvre;
éléments d'architecture
Les constructions en petit appareil
Des observations précises sur le mode de
construction ont pu être effectuées sur les différentes
parties du complexe monumental. Il en ressort une
impression d'extrême homogénéité du mode de
construction, qui se double d'un certain nombre
d'indices précis qui soutiennent l'hypothèse d'une
construction concertée et simultanée de l'ensemble.
L'appareillage et le blocage des murs en
maçonnerie utilisent presque exclusivement (à
l'exception de la fondation maçonnée située en avant du
portique de la place centrale) un granite rose à grain
fin très dur caractéristique de la bordure nord-est de
la plaine du Forez. Les carrières étaient
probablement situées sur la commune de Salt-en-Donzy, sur
la rive droite de la Loise, à 4 km de Feurs. Le
mortier utilisé, blanc et très dur, à inclusions de sable
grossier, paraît partout identique au seul examen
visuel. Les fondations sont toujours constituées de
blocage jeté en tranchées taillées aux dimensions
exactes de la maçonnerie, tandis que les parties en
élévation au-dessus du sol primitif montrent deux
variantes :
. élévations destinées à être remblayées, qui
sont toujours édifiées en petit appareil irrégulier
— parement interne de la curie (fig. 26, a), base de
l'élévation des cellules des portiques, parement
FORUM DE FEURS
145
Fig. 26 — a, détail de l'appareillage interne de la curie (angle sud-est; 1988); b, détail de l'appareillage interne du cryptoportique
(parement est du mur de refend, à l'extrémité de la galerie sud; 1978); c, détail de l'appareillage externe de la curie (façade sud;
1988) ; d, détail de l'appareillage interne du conduit d'assainissement du cryptoportique (extrémité de la galerie sud, parement est du
tronçon nord-sud ; 1978).
externe de la base de la galerie à cryptoportiques,
podium du temple et parements externes de l'égout — ;
• élévations destinées à rester à l'air libre,
toujours édifiées en petit appareil très régulier, même
lorsque la paroi sera ensuite enduite — parement de
la galerie à cryptoportiques (fig. 26, b) — ; à
l'exception de ce dernier cas, les parements présentent des
joints en ruban très soignés — parements extérieurs
de la curie (fig. 26, c), parement extérieur sud de la
branche sud de la galerie à cryptoportiques et
parements internes du conduit d'assainissement du
cryptoportique (fig. 26, d) — .
On a également pu remarquer sur les élévations
les mieux conservées (curie, cryptoportiques) que les
murs appareillés étaient montés en séquences
successives de 0,6 m de hauteur environ, qui correspondent
à cinq ou six rangs de petit appareil. Les trous de
boulin sont toujours situés à la base d'une nouvelle
séquence. C'est une donnée intéressante sur
l'organisation du travail, puisque cette façon de procéder
permettait au moins d'évaluer facilement le travail
effectué par chaque équipe de maçons. Des
différences dans le traitement des joints indiquent
d'ailleurs que les séquences successives ont souvent été
édifiées par des ouvriers différents.
146
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Toutes les parties du forum (cryptoportiques
exceptés) ont été plus ou moins remblayées à partir
du sol primitif. On possède des données précises sur
le mode de constitution de ces remblais et le moment
de leur mise en place dans le déroulement du
chantier. Ils noient toujours la base appareillée des
maçonneries, tandis que le sommet de la plupart
d'entre eux (basilique, portiques, aire du temple) est
constitué d'éclats de taille de calcaire jaune broyés et
tassés, ce qui montre que leur installation s'est
effectuée à une phase intermédiaire de la construction,
avant la mise en place des élévations en grand
appareil qui paraissent faire systématiquement recours à
ce matériau (à l'exclusion du temple — cf. infra,
p. 147). Cette constatation est confirmée par les
épandages de poussière de calcaire jaune retrouvés
en plusieurs points du forum (podium du temple,
cryptoportiques, curie) emprisonnés dans les
maçonneries au niveau des sols de travail : il semble
que la totalité du monument a d'abord été
entièrement édifiée jusqu'au niveau initialement prévu
pour le sommet de ces remblais et que la poursuite
de la construction s'est effectuée après leur mise en
place, tout en laissant un délai suffisant avant la
poursuite du travail pour que des salissures se
déposent sur le sommet des fondations. En outre,
l'analyse de la liaison de la galerie à cryptoportiques
et du portique montre la simultanéité de la
construction des deux ensembles (cf. supra, p. 133).
En résumé, si la durée du chantier ne peut être
évaluée de façon absolue à partir des données
archéologiques, il paraît probable, au vu des
observations précises, mais très partielles, effectuées sur
ses différentes parties, que l'ensemble du complexe a
été construit d'un seul jet, voire que ses différentes
parties sont sorties de terre simultanément. Cette
hypothèse est également confortée par l'analyse du
plan du monument, développée plus haut, qui
montre qu'il a probablement été conçu
intégralement en une fois.
Les seules traces de remaniement observées
— encore sont-elles parfois hypothétiques — sont
la surélévation des piles des portiques, dont le
rang supérieur de l'appareil est très grossier, la
(re)construction de l'emmarchement reliant la place
centrale et les portiques, dont la facture est
anormalement grossière, et enfin la réfection de l'escalier
d'accès à la galerie inférieure des cryptoportiques,
datée par un as de Domitien, puisque cette datation
paraît résolument incompatible avec celle,
cohérente, issue de l'analyse des autres données stratigraphiques (cf. infra, p. 148).
Les constructions en grand appareil,
les éléments ornementaux et de couverture
Les fragments d'éléments en grand appareil
attribuables au forum sont très peu nombreux, sans
doute à cause des récupérations dont ils ont fait
l'objet à toutes les époques. La seule fouille récente de
quelque envergure (1978) n'en a ainsi livré que
quelques dizaines et encore de dimensions très réduites.
Le matériau qui paraît avoir été le plus utilisé est un
calcaire jaune à entroques, exploité dans la vallée du
Sornin, à 60 km au nord de Feurs. En dehors du
forum, ce matériau a dû être utilisé pour la
construction d'un complexe monumental situé à la limite
nord de l'agglomération antique, dont proviennent
plusieurs fragments de fûts cannelés de 80 cm de
diamètre environ, récupérés en 1970 lors de la
construction d'un nouveau gymnase, et occasionnellement
pour des éléments de statuaire, comme le montre une
figuration de cavalier à l'anguipède récemment
découverte sur le site (Valette, 1989). L'utilisation de
ce calcaire est également attestée à Roanne,
emplacement d'un vicus situé nettement plus près des
carrières d'extraction, par quelques éléments
d'architecture et de reliefs funéraires.
Son utilisation sur le forum semble avoir été
massive si l'on en juge par l'épaisseur des épandages
de déchets de taille sur les sols de travail du
monument, et la relative abondance de son remploi dans
des constructions postérieures, depuis l'Antiquité
(par exemple dans l'appareillage d'un puits fouillé à
100 m au nord du forum en février 1988) jusqu'au
xixe s. inclus (notamment dans des façades
d'immeubles situés le long de la rue de Roanne et sur la
place du Puits de l'Aune — voir la liste en annexe,
p. 161).
Parmi les autres matériaux figure du calcaire
blanc originaire de la vallée du Rhône, qui paraît
avoir été utilisé pour la construction du temple
exclusivement. L'emploi de marbre n'est
qu'hypothétique, en raison de la rareté des fragments
retrouvés à l'emplacement même du forum.
Éléments d'architecture
en calcaire jaune à entroques
L'emploi de ce matériau est d'abord attesté
pour les dés supportant les colonnes de la basilique
(cf. supra, p. 120), et pour des blocs de grand
appareil allongé utilisés (ou réutilisés) dans
l'emmarchement séparant la place centrale des portiques.
Plusieurs éléments de colonnes ont également été
retrouvés :
FORUM DE FEURS
. le premier type correspond à des fûts lisses, de
taille souvent irrégulière, de diamètre compris entre
53 et 55 cm ; les faces terminales des cylindres sont
en revanche soigneusement abrasées et présentent
toujours un trou de louve en leur centre. L'absence
de cannelures semble indiquer qu'ils étaient à
l'origine stuqués. Des fragments en ont été retrouvés en
divers emplacements, sur le forum et à sa périphérie :
un fragment dans la fouille de 1978, dans un remblai
ancien au nord du portique, un fragment dans
l'appareillage d'un puits antique fouillé en 1988 à 100 m
au nord du forum (parcelle AD131) et dont le
comblement est postérieur à la fin du IIe s. (monnaie
de Marc-Aurèle), un autre dans le comblement d'un
puits antique situé à 50 m au nord-est du forum,
datable du me s. (Valette, 1989), enfin deux
fragments réutilisés en fondation d'un bâtiment repéré
en 1988 devant la façade ouest de l'église. Les
colonnes peuvent appartenir au portique de la place
centrale ;
. un autre élément de fût de la même fouille est
de module plus important (diamètre estimé entre 75
et 80 cm) et de taille très grossière, à l'exception de
sa face de pose et d'un bandeau d'anathyrose de
1 cm;
• un premier type de base de colonne est
représenté par trois exemplaires dans la fouille de 1978.
Son module (diamètre de 80 ±8 cm) est cohérent
avec les fûts de 54 cm. Tous les fragments ne
présentent qu'un tore et une amorce de scotie ;
• un deuxième type de base est attesté par un
seul bloc, brûlé, qui conserve un tore, l'amorce de la
scotie, l'ensemble étant solidaire d'une plinthe
épaisse de 8 cm montrant sur sa face inférieure,
irrégulière, l'emplacement d'un rivet scellé au plomb. Le
diamètre du tore est de 56 ± 4cm. Ce bloc provient
de l'appareillage du puits de la parcelle AD131 ;
• les chapiteaux ne sont représentés que par un
fragment insignifiant : une feuille d'acanthe
grossièrement taillée (à l'origine stuquée?), retrouvée en
1978;
• on doit enfin ajouter à cette liste une base de
pilastre provenant des travaux de 1991. Son profil
présente une doucine haute de 6 cm séparée par un
congé d'une plinthe haute de 9 cm.
Autres matériaux
Le calcaire blanc est seulement représenté par
quelques fragments non travaillés sur la fouille de
1978, un bloc scié dans un puits fouillé en 1981 au
nord-ouest du forum, une vingtaine de fragments
visibles en remploi sur les façades d'immeubles sis au
147
6 et au 10, rue de Roanne, et deux fragments
travail és réutilisés dans le parement du puits gallo-romain
de la parcelle AD131 :
• un fragment de fût cannelé, de cannelure large
de 11,1 cm entraxes (soit un diamètre restitué de
~ 84 cm), qui appartenait à une colonne engagée,
mais très en saillie de la paroi contre laquelle elle
était placée ;
. un fragment de fût de colonne lisse de taille
assez régulière, de diamètre 66 ± 6 cm.
Il est très probable que le fût cannelé de grand
diamètre appartenant à une colonne engagée soit
attribuable au temple (ce ne pourrait être alors
qu'une colonne adossée à la cella, indiquant ainsi que
le temple est de plan pseudo-périptère, ce que
suggèrent également la largeur de son podium et la
hauteur de colonne que l'on est amené à restituer, qui
sont toutes deux identiques aux valeurs relevées sur
la Maison Carrée de Nîmes). Une tuile provenant
certainement de la couverture du temple (cf. infra,
p. 148) a d'ailleurs été aussi extraite du parement du
puits qui a livré ce fragment d'architecture. On
notera également que les remplois modernes de ce
calcaire blanc n'ont été repérés que dans des façades
d'immeubles situés à proximité immédiate de
l'emplacement du temple. Enfin, la découverte d'un bloc
mouluré restituable à la base ou au couronnement du
podium à proximité immédiate de la platée, dans un
remblai probablement antique, permet d'assurer
définitivement que ce matériau est spécifique du
temple (le bloc ne permet pas de restituer la modénature complète ; n'est conservée que la séquence
suivante, taillée assez grossièrement : filet, quart-derond, filet et amorce de doucine ou de cavet, le tout
se développant sur une hauteur de 27 cm).
De la fouille de 1978 provient un fragment de
placage de colonne en marbre blanc veiné de gris,
avec cannelures larges de 8,9 cm (d'où un diamètre
de « 68 cm). De nombreux éléments de placage de
même nature et de même module, associés à
plusieurs bases aussi destinées à être plaquées sur une
maçonnerie, proviennent d'un complexe
monumental situé au nord de l'agglomération. Il est donc
possible que l'unique fragment retrouvé à
l'emplacement du forum soit un élément déplacé de même
origine. Les éléments d'architecture en marbre sont
aussi représentés sur la fouille de 1978 par un
fragment de base de colonne en marbre blanc et trois
baguettes d'applique moulurées de profils différents.
On doit enfin mentionner pour achever cette
courte liste deux fragments de rigoles en granite
retrouvées à l'emplacement du portique, ainsi qu'un
bloc de même matière avec décor en bas relief au
148
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
trépan représentant une feuille d'acanthe, retrouvé à
l'emplacement du temple (fig. 2, point 4).
Éléments de couverture
La fouille de niveaux de destruction en place
dans le cryptoportique a permis de retrouver des
tuiles appartenant à la couverture de la galerie à
cryptoportiques, dont les dimensions sont de
38 X 57 cm (soit 2x3 modules de 19 cm). De plus,
le parement du puits de la parcelle AD 131 a livré
une tuile de très fortes dimensions (épaisseur : 6 cm,
largeur : 45 cm et longueur [restituée] : 67 cm) qu'il
est possible d'attribuer à la couverture du temple,
puisqu'un petit fragment de tuile de même épaisseur
a été retrouvé dans les remblais surmontant le
podium en 1984.
Synthèse des indices de datation
Les indications stratigraphiques utilisables pour
la datation du forum ont été exposées dans les
paragraphes précédents pour chaque partie du complexe
monumental. Il suffira donc ici d'en faire la
synthèse.
La première est fournie par les éléments les plus
récents des niveaux d'occupation antérieurs au
forum. Comme la dernière phase de cette occupation
est très diffuse à l'emplacement du forum, il est
difficile d'apprécier précisément le moment de son
interruption. Les mobiliers les plus récents sont
certainement postérieurs au début du principat (infimes
fragments de sigillée italique, gobelets à parois fines
de type Aco, fibule à charnière, lèvre d'amphore Dr.
7/11), mais parmi ces objets aucun ne permet de
suggérer que cette occupation s'est prolongée au-delà du
règne d'Auguste. Le seul ensemble clos de mobilier
qui apporte des indications précises pour
l'emplacement du forum proprement dit est le puits fouillé en
1978 sous le portique sud. Son comblement est en
tout état de cause datable de la fin du Ier s. avant
J.-C. ou du début du Ier s. après J.-C. Les niveaux
contemporains de la construction du monument
n'ont livré aucun élément datable à l'exception d'un
as de Domitien pris dans une couche contemporaine
de la (re)construction de l'escalier de descente à la
galerie à cryptoportiques.
Des données précises sont enfin fournies par les
couches retrouvées en relation stratigraphique avec
l'égout du forum et qui permettent sans ambiguïté
possible de dater sa construction aux alentours de 10
après J.-C. Même si la mise en chantier de cet égout
doit logiquement se placer au début des travaux
d'édification du forum, il ne semble pas que l'on
puisse beaucoup différer la date de construction de
l'ensemble du complexe monumental, à cause de
l'homogénéité de son mode de construction et d'un
argument a silentio non négligeable : l'absence de
tout vestige gallo-romain postérieur à la fin du règne
d'Auguste dans les niveaux d'occupation précoces
dégagés à son emplacement, fait qu'il serait difficile
de concevoir si l'emplacement du forum était resté
libre au-delà de cette époque puisqu'il est situé au
cœur de la ville antique et que l'implantation d'un
habitat gallo-romain structuré est attestée à sa
proximité immédiate dès la deuxième décennie de
notre ère (Vaginay, Valette, 1982). On notera
d'ailleurs que des petits fragments du calcaire jaune
importé pour la construction du forum ont été
retrouvés dans les niveaux les plus anciens de ce
quartier d'habitat. La seule «fausse note» dans ce tableau
reste donc la monnaie de Domitien dont la situation
stratigraphique ne peut être expliquée que par une
réfection de l'escalier d'accès au cryptoportique.
L'époque du démantèlement du monument
n'est en revanche pas situable précisément. On sait
que la galerie à cryptoportiques a été définitivement
abandonnée à la suite d'un incendie, dont des traces
de coup de feu sur plusieurs blocs de grand appareil
(blocs en place sur le mur de la curie, blocs en
remploi dans le puits de la parcelle AD131) semblent
également témoigner. Le niveau d'incendie de la
galerie ne recelait que quelques tessons, dont les plus
caractéristiques ne paraissent pas pouvoir être datés
avant la fin du IIe s. Des indications analogues sont
fournies par les deux puits dans lesquels ont été
retrouvés des éléments d'architecture attribuables au
forum : comblement datable du ine s., au moins pour
l'un d'entre eux (Valette, 1989). On doit également
rattacher à cette époque un fragment d'autel (CIL
XIII, 1643) provenant probablement du forum,
autrefois en remploi dans une remise située à son
emplacement. L'inscription, réduite à une ligne, est
restituée : OTACILIA SE[VERA], sans doute Marcia Otacilia Severa, femme de Philippus Senior,
empereur de 244 à 249.
En l'absence d'indice suggérant un
prolongement de l'utilisation du forum au-delà du me s.,
l'hypothèse la plus plausible — mais non prouvée — est
celle d'un démantèlement lié aux invasions du
troisième quart du me s. Cette proposition est également
cohérente avec les observations faites récemment sur
divers quartiers d'habitat de la ville antique.
L'intégration du forum
dans la trame urbaine
Le forum est situé au cœur de l'agglomération
antique. Dans l'état actuel de nos connaissances,
FORUM DE FEURS
l'emprise de la ville a la forme d'une bande allongée
le long du cours de la Loire dont la superficie est
approximativement de 70 ha. Le centre se situerait à
l'emplacement du forum qui occupe une position
privilégiée, au point de rencontre des rebords des
vallées alluviales du fleuve et d'un affluent, la Loise
(fig. 27). Vers le sud, la ville s'étend largement sur le
replat délimité par ces deux vallées, jusqu'à plus de
500 m du forum, tandis que vers le nord elle a
colonisé les deux versants de la Loise. Un complexe
monumental, hâtivement repéré lors de travaux
d'urbanisme, faisait face au forum, sur le rebord
septentrional du vallon. Le théâtre, connu seulement
par son inscription dédicatoire retrouvée en 1887 à
150 m au nord-ouest du forum, était certainement
adossé à l'un des versants du même vallon.
La ville était traversée par deux axes de
circulation principaux : dans la direction est-ouest, par la
voie d'Aquitaine qui, venant de Lyon et se dirigeant
vers Clermont-Ferrand, abordait Feurs en suivant la
rive gauche de la Loise avant de franchir la Loire
(sans que l'on sache où se situait le point de traversée
du fleuve), et dans la direction nord-sud par un axe
secondaire qui longeait la rive droite du fleuve. Si
l'on ignore encore le tracé exact de ces routes aux
abords de la ville, l'organisation de la voirie urbaine,
seulement connue jusqu'à ces dernières années par
quelques observations de Roux reportées sur un plan
très imprécis (Roux, 1851, plan h. -t.), a en revanche
été largement précisée au cours de la dernière
décennie (fig. 28). Une trame orthogonale, cohérente avec
l'orientation du forum, recouvrait la majeure partie
de l'agglomération : les seuls vestiges de
construction dégagés qui ne respectent pas son alignement
sont localisés, soit au-delà de la Loise (point 2), soit à
plus de 600 m au sud-ouest du monument (point 14).
L'absence d'accident topographique contraignant
explique sûrement à lui seul la simplicité de cette
trame, qu'il suffisait de prolonger au gré de
l'extension de la ville sans avoir à fléchir son orientation. A
la précision des relevés, les cinq rues qui ont été
identifiées respectent donc l'alignement du forum, dont
l'axe longitudinal, exactement repéré, nous a servi à
restituer une partie de la trame urbaine.
Tous les vestiges antiques ont été reportés sur
un plan d'ensemble de l'agglomération au l/2000e.
Leur repérage a été effectué à partir de leur
localisation sur le parcellaire actuel, pour lequel on dispose
de relevés géodésiques récents, avec l'intégration au
carroyage Lambert.
Des vestiges de voirie ont été localisés en quatre
emplacements. Ils permettent de tracer trois rues
nord-sud et deux rues est-ouest.
149
Fig. 27 — Topographie du site de Feurs
(équidistance des courbes de niveaux : 1 m).
Les rues nord-sud ont été indexées I, II et IV.
Leurs distances entraxes sont :
. entre I et II : 108 ± 2 m,
. entre II et IV : 214 ± 2 m.
L'écartement des rues I et II est donc très
proche de la valeur attendue pour trois acti (360
pieds, soit 106,5 m). Celui des rues II et IV permet
aussi de restituer exactement une rue intermédiaire
III respectant le même rythme. Des vestiges repérés
dans de mauvaises conditions en 1988 (fig. 28, point
9 : épandage de cailloutis bordé de constructions)
correspondent probablement à une rue
supplémentaire V également distante de la précédente de trois
acti.
Les rues est-ouest repérées ont été indexées A et
D. La distance entre la rue A et le grand axe du
forum est encore de 108 ± 2 m, ce qui laisse supposer
qu'une rue B parallèle à A est située dans cet axe (on
sait par ailleurs, avec la fouille au point 7, qu'aucune
rue ne longe les longs côtés du forum). En supposant
aussi l'existence d'une rue C symétrique de A par
rapport à l'axe du forum (également suggérée par le
plan de Roux, qui figure un tronçon assez
précisément là où il est attendu), l'emprise du monument
apparaît répartie sur quatre îlots. Cette disposition
150
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Fig. 28 — Carte archéologique de Feurs
(état fin 1990), avec une tentative de
restitution partielle de la trame urbaine antique.
1 : complexe monumental non-identifié
(observations anciennes et lors de travaux
d'urbanisme en 1970);
2 : monument non-identifié (péribole de
fanum ? Fouille de J. Gorce, 1960);
3 : murs antiques en élévation (thermes?);
4 : bassin à exèdres (villa suburbaine? Fouille
de 1985);
5 : rue nord-sud bordée d'immeubles à
portiques (fouille de 1985-1986);
6 : rue est-ouest bordée d'immeubles à
portiques, mosaïque (fouille de 1985);
7 : égout du forum, rue nord-sud, habitat
gaulois et gallo-romain (fouille de 1981);
8 : habitat gaulois, forum (fouilles de 1955,
1968, 1978-1980);
9 : rue nord-sud (?) bordée de constructions
(repérage de 1988);
10 : nécropole gauloise, carrefour de rues
bordées d'immeubles à portiques (fouille de
1984);
11 : quartier d'habitation (sondages de 1990) ;
12 : quartier d'habitation (fouille de 1987);
13: monument non-identifié (mausolée?
Indication de Roux) ;
14 : mur à exèdre et bassin (villa suburbaine?
Fouille de 1988).
ménage sur toutes ses faces de larges espaces qui
n'ont pas été explorés. On remarque en particulier
que l'espace libre sur la façade orientale permettrait
de restituer un enclos entourant la curie de
proportions approximatives de 1:2.
La distance entre l'hypothétique rue C et la rue
D est de 284 ± 2 m, soit huit adi, ce qui ne permet
plus de restituer un rythme uniforme de trois adi
dans cette direction. On peut alors envisager un
découpage en trois modules de 320 pieds ou en
quatre modules de 240 pieds. En fait, une campagne
de sondages du printemps 1990 (fig. 28, point 11) a
fourni des résultats qui s'opposent à la dernière
sibilité, en l'occurrence des vestiges d'habitat dans
l'axe d'une rue attendue.
Le forum apparaît donc comme le pivot de la
trame urbaine, ce qui n'est pas sans incidence sur son
histoire et son architecture. Il est d'abord certain
que l'espace qui lui était destiné a été réservé dès la
mise en place de la voirie, soit au plus tard vers la fin
du règne d'Auguste : au cas contraire on aurait en
effet retrouvé des vestiges de rues recouverts par le
forum à l'emplacement de la curie (rue est-ouest B
située dans l'axe longitudinal du forum) et du
portique sud de la place centrale (rue nord-sud III). Du
point de vue architectural, on remarquera que la res-
FORUM DE FEURS
titution d'une rue axiale incite à penser que le centre
des façades correspondantes (façade occidentale du
cryptoportique et façade orientale de la curie)
bénéficiaient d'un traitement particulièrement soigné. Le
cas se rencontre à Trêves (dont la trame urbaine
primitive présente d'ailleurs de fortes analogies avec
celle de Feurs) : la façade occidentale du
cryptoportique est dans cet exemple muni d'une exèdre, qui a
certainement aussi existé à Feurs. Du point de vue
fonctionnel, on peut suggérer que les espaces libres
latéraux étaient des emplacements commerciaux18.
Analyse architecturale
et étude comparative
Nous retiendrons deux faits majeurs : le premier
est que le forum de Feurs vient s'ajouter à la liste des
fora de conception tripartite, associant en un
ensemble cohérent aire sacrée, espace public et
groupe basilique-curie. Le second est que la datation
archéologique de son édification et l'absence de
remaniements majeurs affectant son organisation
laissent supposer que ce schéma était tout à fait fixé
en Gaule dès le début du ier s.
Il n'est pas de notre propos de reprendre ici
l'immense dossier des fora impériaux. Nous
utiliserons les éléments de comparaison dans une
perspective privilégiant la chronologie, afin de confronter la
datation que nous proposons pour Feurs à celles
disponibles dans d'autres cas.
Nous considérerons d'abord le plan dans sa
globalité, en négligeant la spécificité architecturale de
telle ou telle partie. L'étude de la basilique et de
l'aire sacrée, en particulier, sera reprise ensuite.
Un forum tripartite
II convient tout d'abord de préciser les
caractères qui, parmi une documentation abondante,
permettent d'isoler les monuments utilisables comme
références. Pour cela, la notion de forum tripartite,
fréquemment utilisée, doit être rappelée.
Ce terme désigne la traduction architecturale
des fonctions du forum : la fonction
politico-religieuse et la fonction civile (essentiellement
judiciaire), les deux étant d'ailleurs difficilement
dissociables. Les travaux de J.-M. David ont montré
18 Le macellum est souvent situé à proximité
immédiate du forum (exemples à Ordona, Clunia, Belo, Nyon, Pompéi, Ampurias) ; les cellules extérieures accolées au mur de
clôture (comme à Reims, Bavay, Paris et Trêves) peuvent
d'ailleurs correspondre à l'intégration de cette fonction au
projet architectural du forum.
151
comment la basilique va, à partir de l'époque
d'Auguste, acquérir un rôle prééminent par l'adjonction
d'une œdes Augusti, «espace supplémentaire
introduisant la présence d'un autre pouvoir politique qui
s'ajoutait à celui du magistrat, et souvent le
dominait» (David, 1983, p. 228). Aussi la présence d'un
temple du culte impérial n'est-elle pas nécessaire sur
un forum. Il est possible de citer ceux de Ruscino
(Barruol, Nickels, 1980; essai de restitution de
l'élévation par Barruol, Marichal, 1987), peut-être celui
d'Arles dans sa phase augustéenne (Gros, 1987,
p. 347) 19 et aussi, selon la nouvelle lecture qui vient
d'en être faite, celui de Conimbriga, également
augustéen (Roth-Congès, 1987b). Il en est de même à
Doclea, en Yougoslavie (Sticotti, 1913, p. 106-138).
Ce phénomène se retrouve, pour une époque plus
tardive, dans les fora britanniques (Silchester, Cœrwent), au plan plus proche de celui des castra que des
modèles italiques. A Martigny, où les deux états du
forum sont datés de Claude et de Vespasien (Wiblé,
1981), un temple existe, mais à sa périphérie. D'autre
part, des fora de schéma tripartite pourraient être
dépourvus de temple : Bavay, Trêves.
Il est bien évident que la présence d'un temple
revêt une signification idéologique toute particulière.
Au forum d'Arles, où se dressait l'autel au Genius
Augusti et aux Csesares, est adjoint dans le premier
tiers du Ier s. un ensemble monumental imité du
forum d'Auguste (Gros, 1987, p. 357-360).
En revanche, il est difficile de concevoir un
forum sans basilique à l'époque impériale20. Le début
de cette période est caractérisé par un fort
développement de ce type de construction. Pour l'Italie,
H. Jouffroy (Jouffroy, 1986, p. 48-49, 90-91) a
recensé dix-neuf basiliques républicaines, attestées
par l'épigraphie ou l'archéologie. Douze nouvelles
seront édifiées (en particulier dans les villes du Nord)
sous les Julio-Claudiens et quatre seulement sous les
Flaviens. Hors d'Italie, la basilique absente sur le
forum républicain d'Ampurias sera construite à
l'époque augustéenne. Il faut également citer le cas
de Zadar, où la basilique est une addition plus
tardive sur une des branches du portique.
Deux critères principaux permettent de classer
les différentes dispositions possibles de l'espace à
l'intérieur du forum.
19 Le centre de la place pouvait être occupé par «un
autel assorti probablement d'un enclos et peut-être d'un
baldaquin».
20 A ce propos, se reporter aux remarques d'Anne
Roth-Congès au sujet du forum de Conimbriga dans son
troisième et dernier aménagement (Roth-Congès, 1987b, p. 728,
note 65).
152
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
L'un est souligné depuis longtemps : c'est
l'axialité qui peut exister entre l'aire sacrée et la
basilique, ce qui suppose que cette dernière soit
implantée sur le petit côté opposé au temple, l'autre
solution consistant à l'édifier sur l'un des grands
côtés (cf. par exemple : Ward-Perkins, 1970, p. 7 ;
Jimenez-Salvador, 1987a et b). Les exemples du
second type sont nombreux : citons ceux de
Virunum, d'Ampurias (phase augustéenne), Sagonte,
Bilbilis, Luni, Conimbriga. Néanmoins, ce sont ceux
du premier type qui semblent avoir prévalu dans les
provinces occidentales21. Selon Ward-Perkins, la
diffusion s'en serait faite à partir des prototypes augustéens d'Italie : Benevagienna, Velleia, Zuglio ..., euxmêmes redevables d'ensembles plus anciens comme
celui d'Alba Fucens, daté de la première moitié du
Ier s. avant J.-C. Une synthèse plus récente (Gros,
Torelli, 1988, p. 344-345), s'appuyant sur les
résultats des dernières recherches sur les fora augustéens
de Narbonnaise, d'Afrique et de la péninsule
ibérique, remet en cause ce schéma. Elle insiste sur la
durée et la variété des expérimentations, qui
touchent en particulier la structure de la basilique et
de l'aire sacrée et la hiérarchisation des espaces. Sur
le plan chronologique, les deux modèles coexistent
dès le début de l'Empire. Les cas de Doclea et de
Ruscino, où la place entourée de portiques a une
forme proche du carré et où le temple n'existe pas,
sont plus difficilement classables.
L'autre critère est celui de l'affirmation plus ou
moins prononcée de l'aire sacrée à l'intérieur du
schéma d'ensemble. Celle-ci se fait généralement par
la présence d'une porticus triplex, parfois sur
cryptoportiques, encadrant le sanctuaire. Mais on assiste le
plus souvent à une véritable individualisation par
rapport à la place bordée de portiques qui constitue
le forum proprement dit. Entre les deux, il peut
exister un axe de circulation, comme à Augst (LaurBelart, 1966), Benevagienna, Luni (CavalieriManasse et alii, 1982, p. 157-161) ou Minturnes (Coarelli, 1982, p. 372-375), une clôture, comme à Assise,
où la limite de l'aire sacrée est un mur orné de
guirlandes et de rinceaux en bronze (Gros, Theodorescu,
1985), ou les deux à la fois, comme à Nyon (BonnardYersin et alii, 1989, p. 12). L'indépendance des deux
espaces est formulée encore plus explicitement à
Saint-Bertrand-de-Comminges, où le temple tourne
le dos à la place. Les exemples a contrario de Zuglio
21 A l'exclusion de l'Afrique, où le forum tripartite est
très rare. Le seul exemple retenu par G. Hallier (Hallier 1984)
est le premier forum de Rougga, daté de la seconde moitié du
Ier s., encore ne correspond-il pas au modèle «canonique».
et Clunia, où ce phénomène n'existe pas, prouvent
qu'il n'est pas lié obligatoirement au type du forum
tripartite. Il convient donc de ne pas «rigidifîer» ces
schémas et de tenir compte des circonstances dans
lesquelles les ensembles monumentaux ont été mis en
place : contraintes dues à la topographie (Bilbilis,
Manigua, Ordona, Glanum), à l'existence d'édifices
plus anciens, ou au développement de programmes
architecturaux successifs (Conimbriga). Le remploi
d'éléments antérieurs rend parfois extrêmement
complexe la lecture des vestiges et ce n'est pas le
moindre avantage du forum de Feurs de permettre
l'économie de ces difficultés.
En Gaule, le plan tripartite a connu une faveur
certaine. Aux côtés des exemples les plus
fréquemment cités de Paris, Bavay, Saint-Bertrand-deComminges, Alésia et Trêves, il faut ajouter ceux de
Limoges (Loustaud, 1981), Périgueux (Doreau et alii,
1985) et Amiens (Bayard, Massy, 1983). Les vestiges
découverts à Metz (Lefèbvre, Wagner, 1984;
Vigneron, 1986), à Poitiers (Gallia, 33, 1975, p. 382-383 et
35, 1977, p. 383-384), à Aix-en-Provence {Gallia, 44,
1986, p. 380, fig. 5 ; Rivet, 1987) et Avignon (Salviat,
1979; Gallia, 42, 1984, p. 407-411) sont en revanche
encore trop ténus pour pouvoir être pris en compte.
Cette documentation potentielle offre de
nombreuses lacunes que les travaux actuels tentent de
combler, le plus souvent à partir de la reprise de
fouilles anciennes ou seulement d'une nouvelle
lecture de leurs résultats. Ils permettent de préciser
certains plans, comme celui du forum de Paris (Gallia,
33, 1975, p. 319-322; Périn, 1984) ou encore du
forum d'Avenches (Bossert, Fuchs, 1989), d'affiner la
chronologie, par exemple à Alésia (Gallia, 41, 1983,
p. 395; Mangin, Bénard, 1985), à Saint-Bertrand-deComminges (Gallia, 44, 1986, p. 316-318; Sablayrolles, Sillières, 1987) ou à Bavay (Hanoune, Muller,
1988). Ces recherches conduisent parfois à une vision
tout à fait nouvelle des monuments, comme en
témoignent la mise en évidence des deux états
principaux du forum de Glanum (Roth-Congès, 1987a) ou
la nouvelle interprétation des vestiges de Conimbriga
(Roth-Congès, 1987b).
La datation qui a longtemps prévalu pour la
diffusion du forum tripartite en Gaule correspond à la
fin du Ier s. et au ne s. A défaut de données stratigraphiques suffisantes, ce dont rendent compte les
pages déjà anciennes de Grenier (1958), on
s'appuyait sur des arguments épigraphiques (temple
d'Augst), des particularités du mode de construction
(parfois elles-mêmes mal datées) telles l'usage de
cordons de briques (basilique d'Augst). A cela s'ajoutait
la référence à certains monuments de VUrbs, au
FORUM DE FEURS
forum de Trajan en particulier, considérés comme
des modèles obligés de l'architecture provinciale
(Crema, 1959, p. 364; Ward-Perkins, 1970, p. 7). La
datation flavienne proposée plus récemment pour la
seconde phase du forum de Conimbriga renforçait ce
point de vue (Alarçâo, Etienne, 1977).
Les données précises sur les fora de Gaule
interne, en particulier celles relatives à leur datation,
sont effectivement très peu nombreuses22 et l'on
conçoit que les études récentes abordant le sujet goit
préfèrent retenir des datations vers la fin du Ier s. ou
le début du ne s. (Gros, Torelli, 1988, p. 345, 351),
soit se montrent prudentes en matière de chronologie
(Goudineau, 1980, p. 274), soit plus simplement se
bornent à une nomenclature des édifices,
reconnais ant que «toute synthèse serait risquée» (Bedon et
alii, 1988, p. 229).
Dans l'état actuel de la recherche, la
construction du forum de Feurs au début du Ier s.
apparaîtrait donc particulièrement précoce pour la Gaule
interne. Les données extérieures à la Lyonnaise
montrent cependant clairement que le schéma
tripartite s'est développé dès les premières décennies de
l'Empire. C'est le cas, en Italie, des fora de Benevagienna, dont la construction est mise en rapport avec
l'accession de la ville au droit latin en 5/4 avant
J.-C, de Velleia, daté de la période augusto-tibérienne, ou encore de Zuglio, de la première moitié du
Ier s. après J.-C. De même, en Narbonnaise, le forum
de Glanum, édifié vers 20 avant J.-C, exprime déjà
un schéma tripartite (temples avec péribole,
portiques et basilique) adapté à la fois à la topographie
et aux traditions religieuses indigènes (Roth-Congès,
1987a, p. 197). Le forum de Ruscino, déjà en place en
8 après J.-C. d'après les données épigraphiques (Barruol, Nickels, 1980), montre également une
organisation cohérente, intégrant basilique, portiques et sedes
Augusti. A Saint-Bertrand-de-Comminges, une
datation augustéenne du forum, mise en relation avec
l'acquisition du droit latin, est confirmée par la
stratigraphie, du moins pour la zone du temple (Sablayrolles, Sillières, 1987).
Le forum de Nyon, en Germanie supérieure,
dont le plan est très proche de celui de Feurs,
comporte plusieurs états que révèle l'étude de ses
22 Notons la remise en cause prudente de la datation
du forum d'Amiens, en faveur d'une date plus haute : la
datation de la zone orientale (macellum ?), assurée stratigraphiquement (60-80/90), est étendue à la zone occidentale du fait de
l'absence de constructions antérieures dans les insulœ qu'elle
occupe, et que celles-ci ont joué «un rôle privilégié dès la
création du grand quadrillage urbain» (Bayard, Massy, 1983,
p. 83).
153
basiliques (Kaenel, Tuor, 1978). Il se met en place
depuis l'époque tardo-augustéenne (première
basilique, à deux nefs) jusqu'aux époques tibéro-claudienne (cryptoportiques) et néro-flavienne (second
état de la basilique). A Avenches (Bossert, Fuchs,
1989, p. 38), quatre états du forum ont été
déterminés à partir des données de fouilles anciennes. Le
plan tripartite y émerge dans le deuxième état daté
de l'époque claudienne ou néronienne.
Les provinces ibériques ont connu, elles aussi,
une large diffusion du schéma tripartite. J.-L. Jimenez-Salvador (1987a et b) souligne les difficultés à en
établir une synthèse dans la mesure où les études
exhaustives sont récentes (Ampurias, Rilbilis, Belo).
Cependant, sans vouloir multiplier les exemples, il
apparaît nettement que le schéma tripartite se
généralise en Espagne dans la première moitié du Ier s.
Ainsi, le plan du forum de Feurs peut être plus
particulièrement rapproché de celui de Clunia23 et, à un
degré moindre, compte tenu de ses proportions, de
celui de Belo, deux exemples «bien datés». Le
premier présente une grande régularité et une
homogénéité qui peuvent laisser supposer, comme à Feurs,
la réalisation d'un seul programme de construction.
Celle-ci serait de peu postérieure à la fondation tibérienne de la ville. Le second, objet d'une étude
approfondie depuis 1967 24, est l'un des mieux connus
de la péninsule. Établi sur des vestiges antérieurs
encore peu explorés, son réaménagement
monumental remonte à l'époque de Claude ou de Néron.
L 'ensemble basiliq ue-curie
II n'est pas de notre propos, dans cette étude
comparative, d'entrer dans les multiples problèmes
que pose l'édifice basilical dans l'architecture
antique, d'autant plus que l'absence de découvertes de
fragments d'architecture 25 pouvant se rapporter à la
basilique ne permet pas de régler définitivement le
problème de la colonne, rien ne permettant de
déduire ses dimensions de la valeur de l'entraxe. La
dimension des hypobases (1,2 X 1,2 m) fixe
néanmoins la limite supérieure de leur diamètre.
23 Cette parenté a déjà été soulignée par De Palol
(1987).
24 Publication régulière des campagnes de fouilles dans
les Mélanges de la Casa Velasquez depuis cette date.
25 Pour expliquer ce fait, faut-il supposer, comme à
Ruscino (Barruol, Marichal, 1987, p. 5), l'existence de colonnes
en blocage recouvertes d'enduit? La technique du stucage est
attestée archéologiquement sur les colonnes des basiliques de
Pompéi, Sagonte (Aranegui et alii, 1987, p. 89) et Belo.
154
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Nous avons retenu, parmi les nombreux
exemples existants, et pas toujours bien connus,
ceux dont le plan présente une analogie avec celui de
Feurs. Pour chacun d'eux, nous avons rassemblé un
certain nombre de données métriques, ainsi que le
nombre de colonnes de soutènement de la nef
centrale (tabl. I). L'intervalle chronologique est large,
depuis la basilique de Pompéi (fin du 11e s. avant
J.-G.) jusqu'à celle de Trieste (seconde moitié du
11e s. après J.-C. pour le second état).
On constate d'abord l'absence d'évolution
technologique évidente, puisque la largeur de la nef
centrale de la basilique de Feurs, par exemple, n'est pas
plus importante que dans l'exemple de Pompéi. Qui
plus est, une portée nettement plus élevée est
attestée au début de l'époque augustéenne dans l'édifice
Tableau. I — Dimensions comparées de quelques basiliques de forum
(dimensions générales : dans œuvre, en ne prenant en compte que la nef centrale et ses déambulatoires ; largeur de la nef centrale
entre les axes).
Lieu
Pompéi
Fano
Dimensions
Rythme Diamètre
Péristasis nefLargeur
centrale colonnade colonnes
53 X 25 m
4X 12
160 X 100 pieds 4x8
12 m
60 pieds
Datation
Bibliographie
3,8 m
1,1 m
fin ne s. avant
J.-C.
Ohr, 1977, p. 19
20 pieds
5 pieds
40/20 avant J.-C.
Vitruve, V, 1
Corinthe
46 X 22 m
4X 11
12,3 m
dernier quart Ier s. Balty, 1962
avant J.-C.
Ruscino
48 X 19 m
4x8
9,6 m
4,9/3,2 m 0,9 m
époque
augustéenne
Barruol et alii,
1980
Ordona
42 X 27 m
4X8
15,9 m
5m
époque
augustéenne
Mertens, 1973
Tarragone
75 X 28 m
4X 14
14,2 m
4,8 m
Mar, Ruiz de
Arbulo, 1987
Feurs
69 X 24 m
4X 14
12,3 m
4,2 m
époque
augustéenne (?)
début du Ier s.
après J.-C.
Périgueux
85 X 25 m
4X 12
13 m
époque julioclaudienne?
Doreau et alii,
1985
Glanum (2e état) . .
46 X 22 m
4X 10
11,8 m
époque julioclaudienne
Gros, Varène,
1984
Trieste (1er état) . .
60 X 23 m
4X 12
12 m
époque julioclaudienne
Zaccaria, 1988
Clunia
81 X 26 m
4 X 14
12,7 m
époque claudienne De Palol, 1987
Belo
37 X 20 m
4x8
9,1 m
époque néronienne Mémoires de la
Casa Vélasquez,
IX, 1973
Nyon (2e état)
53 X 22 m
stylobate 12,0 m
Trêves
Augst (1er état)
(74 X 22 m)
49 X 22 m
4x 10
12 m
Ier s. après J.-C.
Laur-Belart, 1966,
p. 43-44
Augst (2e état)
65 X 29 m
4x 10
18 m
2e moitié ne s.
après J.-C.
Laur-Belart, 1966,
p. 43-44
3,9 m
0,9 m
époque néronienne Kaenel,
Tuor, 1978
Cûppers, 1979
FORUM DE FEURS
vitruvien de Fano, dont la nef centrale est large de
60 pieds26. On constate que la basilique de Feurs
s'inscrit dans une série de monuments dont la largeur
est proche de 24 m (avec Pompéi, Corinthe, le
premier état d'Augst, Clunia, Glanum, Périgueux, Tarragonne et Trieste). Cette analogie se répète dans la
division de l'espace interne : dans chacun des
exemples nommés, la largeur de la nef centrale
(proche de 12 m) correspond à environ deux fois celle
des portiques latéraux.
La basilique de Feurs s'intègre aussi à la liste,
bien fournie, des édifices allongés (longueur
supérieure à deux fois la largeur) à nef centrale dont les
petits côtés présentent quatre colonnes. Les quatorze
colonnes de la longueur donnent à la nef la
proportion de 4:1 que l'on retrouve dans deux autres
basiliques julio-claudiennes, Tarragonne et Clunia. Dans
la mesure de la longueur, nous avons exclu les deux
exèdres axiaux (chalcidiques) dont la largeur est
équivalente à celle de la nef centrale, ce qui est
fréquemment le cas. Ces pièces se retrouvent dans de
nombreuses basiliques (Pompéi, Corinthe, Doclea,
Clunia) et sont interprétées comme des tribunaux,
des aedes Augusti ou des portiques d'entrée. A Feurs,
elles ne sont pas intégrées, comme dans les exemples
ci-dessus, à la masse rectangulaire de la basilique
mais occupent une position d'absides accolées. Il
serait possible d'y voir des accès à l'étage, comme
c'est le cas à Augst, mais cette fonction semble
davantage revenir aux deux petits édicules situés de
part et d'autre de la curie, qui sont la principale
originalité de la basilique de Feurs. Le massif de
maçonnerie repéré dans l'un d'eux pourrait d'ailleurs
fort bien être interprété comme un soubassement
d'escalier.
La façade occidentale de la basilique n'a pas été
dégagée, aussi nous ne pouvons avancer qu'une série
d'hypothèses quant à son architecture : ouvertures
reprenant le rythme de la colonnade de la nef sur la
totalité de la façade, comme à Brescia, ou portes
moins nombreuses cantonnées de part et d'autre du
centre de la façade, comme à Glanum.
Les entraxes des colonnades de la basilique et
des portiques latéraux sont très proches, comme on
l'observe également à Ruscino, ce qui renforce
l'hypothèse d'un rythme des ouvertures reprenant celui
26 Cette portée se retrouve dans le dernier état de la
basilique d'Augst (18 m) et se rapproche des deux plus grands
espaces couverts en charpente, sans relais intermédiaire, de
l'architecture impériale, que sont la basilique de Trajan
(23,7 m) et la basilique de Carthage (21,9 m) (cf. Gros, 1982,
p. 637-641 et note 7).
155
de la nef centrale et se reflétant dans celui des
portiques.
La position axiale, sur l'un des grands côtés de
la basilique, de l'édifice interprété comme la curie,
est fréquente sur les fora du Haut Empire (par
exemple à Fano, Clunia, Augst, Tarragonne...),
même si sa désignation comme lieu de réunion de
Vordo n'est pas toujours clairement affirmée par
l'architecture. Cette position l'identifie également à
V aedes Augusti de Vitruve, dont J.-M. David a
montré l'intégration, sous des formes diverses, à la
basilique (David, 1983).
A Feurs, cet édifice est nettement individualisé
par rapport à cette dernière par sa forme, proche de
celle d'un temple, et surtout par sa position, qui n'en
fait pas, comme à Ruscino, un simple prolongement
de la basilique. Les proportions de la curie
demeurent néanmoins totalement dépendantes de
celles de la basilique. Sa largeur est quasiment
identique à celle de la nef centrale, comme à Ruscino (ce
qui renforce dans ce cas la continuité des deux
espaces).
La curie de Feurs s'inscrit dans une série bien
fournie, caractérisée par des dimensions relativement
uniformes, qui comprend, entre autres, celles de
Timgad, Philippes et Sabratha (Balty, 1962, fig. 1519). Tous ces édifices sans grande originalité
architecturale sont formés d'une salle rectangulaire et
d'un vestibule, véritable pronaos, qui assimilent leur
plan à celui d'un temple. A Feurs, ce vestibule jouait
un rôle pratique, celui d'isoler l'assemblée des
décurions des activités qui se tenaient dans la
basilique, et hiérarchique en conformité avec la vision
sacralisée de la vie politique, placée sous l'autorité
impériale symbolisée par la statuaire certainement
présente en ces lieux. La sacralité de la curie était
aussi manifestée par la surélévation de son niveau de
circulation vis-à-vis de celui de la basilique, l'escalier
d'accès à ce «podium» occupant précisément
l'emplacement du vestibule.
La place centrale et ses portiques
Dans un certain nombre de cas, il y a continuité
entre les portiques bordant la place et ceux de la
basilique. A Feurs, il est effectivement possible de
restituer un rythme des ouvertures de la basilique
très proche de celui des portiques. Cet effet peut être
renforcé par une largeur analogue, voire identique
(cas de Ruscino) des portiques de la place et des
déambulatoires de la basilique. A Feurs, ce caractère
est moins marqué, les portiques n'étant pas dans le
prolongement des branches latérales du
déambulatoire et la largeur dans l'œuvre du portique accusant
6 m, celle du déambulatoire seulement 4,7 m.
156
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
Le plan de masse de la place centrale et de ses
portiques est celui d'un carré de 68 m de côté,
construction qui se retrouve à Augst et Trêves (sans
tenir compte des cellules extérieures). Le rapport 2:1
(32,4 X 62,4 m) des dimensions de la place ellemême, mesuré au pied des emmarchements la reliant
aux portiques, se retrouve probablement, mais les
dimensions ne sont pas toutes assurées, à Nyon
(31 X 62 m), Périgueux (45 X 90 m) et Amiens
(59 X 120 m). Dans les cas plus sûrs, les proportions
sont : de 2:3 à Ruscino (22,4 X 33,6 m), proche de 3:5
à Augst (58 X 33 m) et Conimbriga (144 X 84 m dans
l'état augustéen). Dans ce dernier exemple, auquel
on pourrait ajouter ceux de Clunia et de Paris, les
dimensions de la place obéissent aux préceptes vitruviens. Ce n'est donc pas le cas à Feurs, où elle
présente une forme beaucoup plus allongée.
Les cellules et le portique s'inscrivent dans une
série bien fournie (comprenant les fora de
Conimbriga, Ruscino, Reims, Trêves, Saint-Bertrand-deGomminges, Clunia) dont les dimensions varient très
peu : largeur entre les axes des cellules comprise
entre 4,5 et 6 m, profondeur des cellules entre 6 et
9 m, largeur du portique entre 6,5 et 8 m. Il y a
même identité parfaite de toutes les dimensions avec
celles relevées sur le forum de Ruscino.
Malgré l'absence de preuve archéologique, c'est
sans doute dans les cellules élargies des extrémités
des portiques de la place que l'on doit placer
les accès à la zone centrale du forum, comme
c'est fréquent sur les fora tripartites : Augst,
Clunia, Nyon, Benevagienna, Saint-Bertrand-deComminges ...
L'aire sacrée
La fouille a montré la continuité de la
circulation entre l'aire sacrée et les portiques de la place
centrale, cette dernière étant délimitée par un
emmarchement situé à environ 2,5 m en avant des
portiques et 4 m en avant des degrés du temple. Le
temple semble donc dégagé au centre de l'aire sacrée,
la frontière de cet espace étant seulement manifestée
par la transition des portiques de la place centrale
vers le cryptoportique. L'élévation présente en effet
une solution de continuité, tant dans le rythme des
colonnades, dans les niveaux de circulation que dans
l'alignement des façades (la façade du
cryptoportique est en retrait de 2 m par rapport à celle des
portiques, ce qui engendre un effet de perspective
peu satisfaisant, mais que l'on retrouve identique sur
plusieurs autres fora, par exemple à Trêves et à
Conimbriga, dans le dernier état). Cette rupture nous
avait d'ailleurs fait envisager — avant que de
velles observations n'infirment cette hyptohèse —
l'existence d'une clôture de l'espace sacré, comme les
récentes fouilles de Nyon viennent de l'attester.
La mise en évidence de l'emprise d'un
emmarchement devant le temple prouve que sa façade était
tournée vers l'espace central du forum. Elle était
aussi légèrement en retrait de la limite orientale de
l'aire sacrée. En restituant sur sa face arrière le
même espace que sur ses faces latérales, on
parviendrait à une longueur de la platée de 27,3 m (pour une
largeur de 14,1 m). Les proportions seraient alors
précisément celles d'un temple pseudo-périptère (le
rapport 1 -f- L vaut ici 0,56, contre 0,55 pour le
podium de la Maison Carrée de Nîmes). Ce plan était
déjà suggéré par un fragment de colonne (cf. supra,
p. 147). Le plan pseudo-périptère (à six colonnes de
façade) est déjà attesté en Gaule pour plusieurs
temples de forum du début de l'Empire, à SaintBertrand-de-Comminges et Vienne.
Les cryptoportiques du forum de Feurs viennent
s'ajouter à la liste, peu fournie, de ceux déjà
découverts en Gaule. Nous les avons rassemblés dans un
tableau comparatif (tabl. II) en y ajoutant ceux de
Conimbriga (époque flavienne), d'Aoste, d'Ampurias,
d'Urbisaglia (Delplace, 1979 et 1983) et de Zadar.
Pour les cryptoportiques de Feurs, les données
disponibles sont les dimensions en plan des
galeries27, les accès aux extrémités des branches latérales
(vraisemblablement à partir des portiques de la place
centrale) et la couverture en plancher (autres
exemples à Conimbriga, Nyon, Ampurias, Bavay
dans le premier état). Le système de soutènement de
cette dernière (piliers axiaux, pilastres) ainsi que
celui de l'éclairage des galeries ne nous sont pas
connus.
Leur largeur interne s'intègre bien dans la
moyenne des exemples retenus (entre 7 et 12 m).
Plusieurs solutions sont possibles pour la restitution
de la hauteur des planchers. Les rares cas où la voûte
existe encore ne permettent pas de trancher : la
hauteur sous clé correspond à la demi-largeur de la
galerie (prise dans l'axe des piliers médians) à Arles mais
pas à Reims. C'est cependant la solution qui prévaut
dans les restitutions d'élévation. Si on l'applique à
Feurs, la hauteur restituée serait de 4,7 m, assez
proche de celle d'Arles ou de celle restituée à
Conimbriga (Alarçào, Etienne, 1977, pi. VII) et Ampurias
(Aquilué et alii, 1984). Le plafond se situerait donc à
la cote 346,3, et le sol de la porticus triplex
surmontant le cryptoportique à un niveau légèrement
supérieur compte tenu de la poutraison. Le niveau de
27 Leur décor peint a été évoqué par Cl. Allag (1985).
FORUM DE FEURS
157
Tableau II — Dimensions comparées de quelques cryptoportiques de forum
(dimensions : dans œuvre, la première mesure correspondant à la largeur de la base du U).
Lieu
Largeur
Dimensions dans
œuvre
Rythme
travées
Ampurias
39 X 71 m
7,6 m
Aoste
87 X 72 m
7,8 m
Arles
58 X 89 m
8,5 m
Bavay
86 X 140 m
9,6 m
Conimbriga
44 X 40 m
7,0 m
Feurs
71 x 60 m
9,4 m
Lyon
83 X 118 m 12,0 m
Nyon
70 X 85 m
8,0 m
Reims
93 x 52 m
9,5 m
4,3 m
Trêves
82 X 55 m
7,5 m
3,2 m
Urbisaglia
52 X 42 m
7 m
Zadar
62 X 71 m
9,5 m
4,2 m
3m
5,2 m
Hauteur
Couverture
Accès
4,7 m
(restituée)
4,7 m
plancher
4,2 m
voûte
extrémités
galeries?
Amy, 1973
plancher
(1er état)
plancher
milieu galeries
Hanoune, Muller,
1988
plancher
extrémités galeries
voûte
?
plancher
extrémités galeries Bridel, 1982a
5,6 m
voûte
extrémités galeries Lallemand, 1969
3,4 m
voûte
extrémités galeries Cûppers, 1979
4,3 m
(restituée)
6 à 7m
(restituée)
extrémités galeries Aquilué et alii,
1984
voûte
Cavalieri-Manasse
et alii, 1982
extrémités galeries Alarçâo, Etienne,
1977
?
5,5 m
Varea sacra se situait au minimum à la surface
supérieure du remblaiement repéré (343,5), soit à près de
3 m en dessous du niveau de circulation du portique.
Même si cette dénivellation pouvait être réduite par
des remblais que la fouille n'a pas mis en évidence, le
niveau du portique paraît très élevé, sa hauteur
correspondant sans doute approximativement à celle du
podium du temple. C'est le parti pris à Conimbriga
dans le sanctuaire flavien, où la dénivellation est de
3,6 m (Alarçâo, Etienne, 1977, p. 282) et à Reims, où
le niveau supérieur du conduit d'assainissement et
celui des soupiraux permettent d'envisager une
hauteur de de 3,2 à 3,5 m pour la partie extérieure du
cryptoportique (Lallemand, 1969, p. 29-30) 28. A
Aoste (Mollo-Mezzena, 1975-1976, fig. 23), le sol du
cryptoportique se trouve au niveau de la place du
forum, soit 2,6 m au-dessous de celui de Varea sacra.
Sa partie externe devait mesurer environ 3 m. A
Ravay (Will, 1973, fig. 4), Arles (Amy, 1973, fig. 3 et
28 La même volonté se retrouve, mais en l'absence de
cryptoportique, au sanctuaire du Cigognier d'Avenches au
début du iie s. (Bridel, 1982b, p. 148 et pi. 107).
Ribliographie
Lasfargues, Le
Glay, 1980
Delplace, 1979
extrémités galeries Ward-Perkins,
1970
6) et Trêves (Cuppers, 1979, fig. 8), les coupes
publiées révèlent une solution différente : le
cryptoportique émerge peu par rapport à Varea sacra,
l'accès au portique supérieur pouvant se faire au moyen
d'un emmarchement.
Si l'on prend en considération les plans de
fora tripartites relativement bien documentés, la
présence d'exèdres sur les ailes de la porticus
triplex apparaît fréquente (ainsi à Saint-Rertrand-deComminges, Renevagienna, Clunia, Trêves, Nyon,
Ravay, Arles, Conimbriga, exemples auxquels nous
pouvons ajouter les portiques des sanctuaires
d'Avenches et de Vaugrenier) mais non
systématique : ceux d'Aoste, de Zadar et d'Ampurias en sont
dépourvus. Le nombre d'exèdres peut se réduire à
une, placée dans l'alignement du grand axe du
temple, à trois (une sur chaque aile) ou être multiple
(comme à Ravay). La similitude des plans rend tout
à fait légitime la restitution sur le forum de Feurs
d'une exèdre sur la façade ouest, le rattachant ainsi
aux exemples de Trêves et de Conimbriga.
A Feurs, la mesure de la longueur des exèdres
n'est pas connue archéologiquement. Le schéma le
158
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
plus simple est représenté par le forum de Nyon dont
les trois exèdres présentent la même largeur que la
galerie à cryptoportiques, ce qui permet un
raccordement simple des toitures au niveau des faîtages, et
dans une moindre mesure par celui de Bavay, où la
largeur de la galerie se retrouve dans celle des
hémicycles des extrémités des branches latérales et dans
celle du «vestibule» qui donne accès à la grande salle
axiale greffée sur le cryptoportique. Cette solution
n'est cependant pas générale. A Conimbriga, les
exèdres ont pour largeur la moitié de celle de la
galerie, comme à Bavay les petites exèdres et à Bennevagienna les hémicycles des branches latérales. Des
exèdres de largeur intermédiaire sont également
attestées à Trêves et encore à Benevagienna. C'est la
première possibilité qui a été retenue pour la
restitution du forum de Feurs. Cette solution est confortée
par un autre argument : la galerie étant de même
largeur que la curie et quasiment de même largeur
que les exèdres de la basilique, l'aspect extérieur des
exèdres ainsi restituées, avec leurs parois scandées
par des contreforts, comme la curie, répondait à celui
de la basilique, équilibrant ainsi la vision d'ensemble
du monument. Mieux encore, la situation des exèdres
sur les branches latérales du cryptoportique, décalée
par rapport à leur axe, peut s'expliquer par le souci
de trouver une disposition rigoureusement
symétrique à l'ensemble formé par la curie et les deux
exèdres de la basilique.
Synthèse
Le forum de Feurs ne présente pas de solutions
architecturales originales et, à chaque niveau de
comparaison (plan d'ensemble, basilique, aire
sacrée), il s'intègre sans difficulté dans des séries déjà
bien documentées. Son tracé régulateur est d'une
grande simplicité, qui devait probablement se
prolonger par celle du décor. Il correspond à la formule
la moins élaborée — on serait tenté de dire : la plus
rustique — de ce type d'ensemble monumental.
Contrairement à Augst, Nyon ou Avenches, elle ne
fera pas l'objet de restructuration à une époque
ultérieure. La datation que nous avançons pour la
construction du forum de Feurs ne paraît pas
invraisemblable, puisque le programme qui y est
développé était déjà bien connu en Italie dès le début de
l'Empire. Qu'elle puisse sembler précoce tient
surtout, à notre avis, à l'indigence de la documentation
sur les fora de la Gaule interne.
Cette datation permet peut-être de reposer le
problème du rapport entre l'édification du forum
(tout au moins la décision politique qui a prévalu à
sa mise en œuvre) et la mise en place des institutions
politico-religieuses dans la civitas. Les exemples sont
en effet nombreux qui illustrent les liens unissant le
statut juridique, le développement du culte impérial
— les deux souvent intimement liés — et l'activité
édilitaire. Plus concrètement, la construction du
forum implique l'installation d'un culte et d'une
administration susceptibles d'occuper ses murs
(temple et cellules de la place centrale).
La construction du forum de Saint-Bertrand-deComminges semble concorder avec l'octroi du droit
latin à la cité des Convenes, sous Auguste. C'est un
fait semblable que l'on retrouve peut-être à Amiens
sous les Flaviens. Ce phénomène est largement
répandu dans la péninsule ibérique, à Sagonte, Bilbilis, Clunia et Belo. Sagonte, pour ne retenir qu'elle,
est une civilas fœderata de la fin de la République qui
devient un municipe de droit latin sous le règne
d'Auguste. L'épigraphie atteste la contemporanéité
de ce début de la vie municipale (mention d'un
duumvir) et la construction de la basilique du forum
(Aranegui et alii, 1987, p. 77, 92).
Dans les limites administratives des Trois
Gaules à l'époque augustéenne (Goudineau, 1980,
p. 97), les fora mis au jour ou localisés
appartiennent, en majeure partie, à des capitales de civitates. Mais l'exemple d'Alésia, chef-lieu du pagus des
Mandubiens dans la cité des Éduens ou encore les
découvertes de Verdes (Loir-et-Cher) (Gallia, 36,
1978, p. 283-284), d'Annecy (Haute-Savoie) (Broise,
1968) et d'Eysses (Lot-et-Garonne)29, viennent
nuancer cette correspondance et nous rappeler que
l'existence d'un forum n'est pas obligatoirement liée à une
caput civitalis.
Dans le cas de Feurs et de la cité ségusiave, les
textes antiques et les documents épigraphiques
constituent un dossier peu étoffé où les ambiguïtés
sont nombreuses30. Le statut de cité libre, acquis
29 Gallia Informations, 1987-1988, 1, p. 148-149. Eysses
fut un camp d'époque tibérienne qui aurait pu faire partie d'un
quadrillage militaire de la Gaule consécutif à la révolte de 21
(Tassaux, 1984, p. 146-155).
30 Ainsi le texte de Strabon (Géographie IV, 1, 11 et 3,
2) dont une interprétation possible conduirait à faire de Lyon,
au moins pendant un temps, la capitale des Ségusiaves (sur
cette question, consulter les positions contradictoires de
Thollard, 1984 et Goudineau, 1989). De même, l'accession de
Feurs au rang de colonie découlerait de l'unique témoignage de
l'inscription du milliaire de Pommiers (CIL XVII, 346 =
CIL XIII, 8917). Nous devons rappeler que la lecture de ce
document épigraphique est loin d'être assurée.
FORUM DE FEURS
certainement à une date précoce, est attesté à la fois
par Pline31 et par des mentions plus tardives sur des
milliaires (CIL XIII, 8861, 8862, 8864).
Les témoignages épigraphiques de fonctions
administratives ou religieuses se limitent à celles
d'un duumvir sacerdotalis (CIL XIII, 1632) 32, d'un
flamine augustal (CIL XIII, 1629) et d'un sacerdos
augusti (CIL XIII, 1642). La seule inscription
datée33 est la dédicace de Tib. Claudius Gapito, fils
d'Aruca, qui fit reconstruire en pierre le théâtre de
Feurs sous le règne de Claude (CIL XIII, 1642). Ses
tria nomina et le nom de son père attestent un
citoyen de fraîche date. S'il a exercé la fonction de
sacerdos augusti, aucune mention n'est faite d'une
éventuelle carrière municipale34. Doit également être
ajoutée à cette brève liste la dédicace à C. Iulius Iullus, princeps des Ségusiaves (CIL XIII, 1645), dont le
titre est sans doute seulement la transposition de
celui d'une magistrature gauloise. A partir de tels
éléments, nous ne pouvons que laisser ouverte la
question du statut juridique et de l'octroi éventuel
du droit latin aux Ségusiaves35.
Une seconde observation se rapporte au culte
impérial. Celui-ci a pu revêtir jusqu'au me s. un
aspect purement local chez les Ségusiaves36, suivant
31 La date de la liste donnée par Pline, dans laquelle les
Ségusiaves figurent avec ce titre (Historia Naturalis, IV, 18,
107 : « Segusiaui liberi in quorum agro colonia Lugdunum»), se
situerait vers 20 avant J.-C, selon L. Maurin (1978, p. 154). Ce
statut n'est accordé à cette époque qu'aux Arvernes, Bituriges
Cubi, Gabales, Santons, Leuques, Meldes, Nerviens, Silvanèques, Suessiones et Trévires. Par la suite s'y ajoutèrent les
Turones (sous Claude?) et les Vellaves (dans la première moitié
du ne s.) (Maurin, 1978, p. 168-173; Goudineau, 1980, p. 314,
fig. 240).
32 La gravure originale n'indique que la fonction de
duumvir ; le terme sacerdotali a été ajouté après coup par une
main maladroite au bas de l'inscription.
33 Bien qu'Hirschfeld la situe au Ier s., à une époque
antérieure aux Flaviens, on ne possède pas d'argument pour
dater avec précision la dédicace au duumvir Sex. Iulius Lucanus (CIL XIII, 1632).
34 Cf. les tableaux établis par L. Maurin (1978, p. 203).
35 L'existence du duumvirat et du flaminat peut-elle
constituer une marque du laliuml (sur cette question, cf.
Wolff, 1976, p. 48-53; Maurin, 1978, p. 178-183). Le
développement du droit latin dans les Trois Gaules est encore mal
connu et il ne fut sans doute pas aussi rapide que le pensait
Jullian (Jullian, 1929, p. 174).
36 Cf. CIL XIII, 1712. L'inscription, incomplète,
permet deux lectures différentes : soit C. Ulattius a été le premier
Ségusiave à exercer la charge de prêtre au Confluent, soit il a
été le premier de sa cité à qui les Trois Gaules aient élevé une
statue.
159
en cela le sort des Lyonnais qui n'auraient pas été
admis au culte fédéral du confluent (Maurin, 1986).
Une inscription forézienne dédiée au numen
augusti et au dieu Silvain (CIL XIII, 1640) provient
certainement du forum, un des lieux privilégiés pour
les réunions des corporations (Waltzing, I, p. 217).
Sa datation est difficile. Le développement du culte
impérial à Lyon au ne s. sous la forme du numina
auguslorum, souvent associé à des divinités indigènes
(Le Glay, 1978, p. 27-28), et l'essor à la même époque
des collèges professionnels dans cette ville (CraccoRuggini, 1978) feraient pencher en faveur du IIe s.,
mais en se rappelant que des collèges existent dans
les Trois Gaules dès le règne de Tibère (Jullian, 1929,
p. 397-398).
Rien ne prouve jusqu'à présent que le temple
édifié sur le forum fût à son origine consacré au culte
impérial, même si son édification à haute époque ne
peut être considérée comme un obstacle37. D'autres
cultes sont connus en pays ségusiave, dont celui de la
déesse Segeta, peut-être une divinité éponyme du
peuple gaulois. Son nom donnait foi à un poidsétalon en bronze découvert à Feurs même : DEAE.
SEG[etae].F[ori].P[ondo].X (CIL XIII, 1641) 38. Elle
était honorée plus particulièrement au sanctuaire
thermal d'Aquae Segetae (Moingt, près de Montbrison) mentionné par la Table de Peutinger.
L'inscription de Russy-Albieux, à 15 km à l'ouest de Feurs
(CIL XIII, 1646), mentionne encore un temple qui
lui était consacré39.
Quoi qu'il en soit, les découvertes
archéologiques laissent entrevoir une activité urbanistique
intense dans la première moitié du Ier s. : mise en
place de la voirie et installation des premiers îlots
d'habitat «romanisé» selon un plan concerté et
autour d'un ensemble monumental, peut-être encore
inachevé, qui affirme la prééminence politique et
religieuse de la ville en train de naître. Dans le cas
37 C'est sous Tibère que furent édifiés à Lyon le
sanctuaire municipal du clos du Verbe-Incarné et l'amphithéâtre
fédéral des Trois Gaules (Lasfargues, Le Glay, 1980, p. 112113).
38 On sait que ces poids-étalons pouvaient être
conservés dans des lieux publics (forum, macellum), comme l'indique
une inscription (CIL XIV, 376) : «[Pub. Lucilius Gamala] a
aussi donné les poids du marché et les mesures du forum au
vin» (cité par Jacques, 1990, p. 131).
39 La déesse Segeta est encore mentionnée par une
inscription peinte sur céramique datable du me s. découverte à
Roanne (Rodumna), vicus du territoire ségusiave (Poncet,
1981, p. 33).
160
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
précis de Feurs, l'érection de l'ensemble monumental
symbolisait d'autant mieux la naissance de la ville
que celle-ci portait aussi le nom de Forum, terme issu
d'une tradition républicaine dont la Gaule offre très
peu d'exemples40.
Paul Valette et Vincent Guichard
40 Le choix de l'agglomération gauloise de Feurs
comme capitale de cité peut s'expliquer entre autres par sa
position par rapport au réseau routier projeté par Agrippa et
mis en place à une date encore controversée. La construction à
Saintes de l'arc de Germanicus en 18-19 après J.-C. marque en
tout cas l'achèvement d'un axe majeur sur lequel Feurs est
situé. Rien ne s'oppose qu'à cette bourgade, conçue comme un
Forum routier traditionnel (Ruoff-Vâànànen, 1978), soit
attaché, lors de l'organisation administrative de la Gaule, le titre
de capitale de cité. La construction de l'ensemble monumental
sous le règne de Tibère pourrait témoigner de ce nouveau
statut.
50n
Fig. 29 — Localisation des caves explorées.
FORUM DE FEURS
161
ANNEXE
Inventaire des caves prospectées
Figure 29.
Rue de Roanne
4 : immeuble du xixe s., pas de cave?
6 : immeuble du xixe s. ; cave inaccessible ;
nombreux blocs de calcaire jaune à entroques et
blanc en réemploi dans la façade.
8 : immeuble du xixe s. ; pas de cave?
10 : immeuble du xixe s. ; cave du xixe s.
entièrement enduite ; même remarque que pour le n° 6
pour le réemploi en façade
12 : immeuble en partie du xvme s. ; grande cave du
xvme s. (?) entièrement enduite, qui pourrait
s'appuyer contre le mur extérieur du
cryptoportique, et deux petites caves du xixe s. en façade
sur la rue, entièrement enduites.
14 : immeuble du xixe s. ; cave moderne entièrement
enduite (non localisée sur le plan).
Rue Gambetta
12 : immeuble du xxe s. ; cave du xixe s. (en fait une
ancienne écurie semi-enterrée), accolée contre le
rempart du xive s. qui repose à cet
emplacement sur le mur intérieur du cryptoportique (cf.
fig. 2, point 7).
14 : immeuble du xxe s. ; prolongement de la cave
du 12, rue Gambetta, cloisonnée depuis 1981.
16 : immeuble du xxe s.; cave moderne non
inspectée, qui devrait s'appuyer contre le rempart
médiéval reposant à cet emplacement sur le mur
extérieur du cryptoportique.
18 : immeuble du xixe s.; cave ancienne (arc doubleau en plein cintre, en grand appareil),
s'appuyant contre le rempart médiéval, qui suit à
cet emplacement l'alignement du mur
d'enceinte de la place centrale du forum ; cependant,
aucune maçonnerie antique n'est visible.
20 : immeuble du xvme s. ; caves s'appuyant contre
le rempart ; maçonneries antérieures à la
construction des caves, mais rien ne paraît
antique.
Rue Saunerie
1 : immeuble du xixe s. ; pas de cave.
3 : immeuble du xvie s. ; cave enduite.
5 : immeuble du xve s. ; une première cave en
façade sur la rue, accessible à partir du n° 3 ;
une deuxième cave au-delà vers le nord, dont la
paroi occidentale s'appuie sur le mur
extérieur du cryptoportique (voûte du conduit
crevée) (fig. 2, point 8).
Place du Puits de l'Aune
4 : immeuble reconstruit en 1967 ; une cave
ancienne en façade sur la place, entièrement
enduite.
5 : dans l'immeuble des xviie-xvme s. à gauche de
la ruelle d'accès, cave s'appuyant sur le mur
intérieur du cryptoportique (fig. 2, point 5) ; audelà à l'ouest, cave ancienne logée dans l'angle
intérieur du cryptoportique, comblée lors de la
reconstruction d'un immeuble en 1980 (fig. 2,
point 6) ; à droite de la ruelle, autre cave
ancienne, partiellement comblée et
actuellement inaccessible ; les autres immeubles de la
cour intérieure du n° 5 sont tous récents.
7 : immeuble du xixe s. ; cave non voûtée et
enduite ; un massif de maçonnerie plus ancien
visible dans la cave pourrait correspondre
au mur extérieur du cryptoportique (fig. 2,
point 9).
Rue du Palais
cf. n° 4, place du Puits de l'Aune,
immeuble du xixe s. ; pas de cave,
immeuble reconstruit en 1967 ; grande cave
moderne s'appuyant au nord contre le podium
du temple (fig. 2, point 12).
immeuble du xixe s. cave en façade sur la rue ;
emmarchement délimitant la place centrale
visible dans la paroi nord (bloc de grand
appareil en place).
immeuble du xvme s. ; pas de cave,
immeuble du xixe s. ; pas de cave,
immeuble du xixe s. ; pas de cave ; l'immeuble
s'appuie contre le rempart, dont l'élévation est
encore conservée sur au moins 3 m audessus du niveau actuel du sol.
immeuble du xvme s. ; pas de cave en façade sur
la rue.
immeuble
reconstruit en 1985; pas de cave.
10
162
PAUL VALETTE ET VINCENT GUICHARD
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