MIGRATION CIRCULAIRE :
CAS DE L’ALGÉRIE
Nacer-Eddine Hammouda
CARIM notes d’analyse et de synthèse 2008/41
Série sur la migration circulaire
module démographique et économique
Projet de coopération sur les questions liées
à l’intégration sociale des immigrés, à la migration
et à la circulation des personnes
Co-inancé par l’ Institut universitaire européen et
l’Union européenne (Programme AENEAS)
CARIM
Consortium euro-méditerranéen pour
la recherche appliquée sur les migrations internationales
Notes d’analyse et de synthèse – Série sur la migration circulaire
module démographique et économique
CARIM-AS 2008/41
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Nacer-Eddine Hammouda
CREAD, Algérie
Cette publication fait partie d’une série de communications sur le thème de la migration
circulaire préparées dans le cadre du projet CARIM et présentées lors de deux rencontres
organisées par le CARIM à Florence : Le rôle de la migration circulaire dans la région EuroMéditerranéenne (17 - 19 octobre 2007) et La migration circulaire à partir des Pays du Sud et de
l’Est de la Méditerranée: Expériences, Opportunités et Contraintes (28 - 29 janvier 2008).
L’ensemble des papiers sur la migration circulaire est disponible à l’adresse suivante :
www.carim.org/migrationcirculaire
© 2008, Institut universitaire européen
Robert Schuman Centre for Advanced Studies
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CARIM
Le Consortium Euro-Méditerranéen pour la Recherche Appliquée sur les Migrations Internationales
(CARIM) a été créé en février 2004 et est financé par la Commission Européenne. Jusqu’en janvier
2007, il répondait au volet C − «coopération sur les questions liées à l’intégration sociale des
immigrés, à la migration et à la circulation des personnes» − du programme MEDA, principal
instrument financier de l’Union Européenne pour établir le partenariat Euro Méditerranéen. Depuis
février 2007, le CARIM est financé par le programme AENEAS d'assistance technique et financière
en faveur de pays tiers dans le domaine des migrations et de l'asile. Ce dernier établit un lien entre les
objectifs externes de la politique migratoire de l’Union Européenne et sa politique de développement.
AENEAS a pour objet de mettre à la disposition des pays tiers une assistance appropriée pour leur
permettre d’assurer, à divers niveaux, une meilleure gestion des flux migratoires.
Dans ce cadre, le CARIM a pour objectif, dans une perspective académique, l’observation, l’analyse et
la prévision des migrations dans la région d’Afrique du Nord et de la Méditerranée Orientale (signifiée
par « la région » dans le texte ci-dessous)
CARIM est composé d’une cellule de coordination établie au Robert Schuman Centre for Advanced
Studies (RSCAS) de l’Institut Universitaire Européen (IUE, Florence) et d’un réseau de
correspondants scientifiques établis dans les 12 pays d’observation : Algérie, Egypte, Israël, Jordanie,
Liban, Maroc, Palestine, Syrie, Tunisie, Turquie et, depuis février 2007, la Libye et la Mauritanie.
Tous sont étudiés aussi bien comme pays d’origine, de transit que d’immigration. Des experts externes
provenant des pays de l’UE et des pays de la région contribuent également à ses activités.
Le CARIM conduit les activités suivantes :
- Base de données sur les migrations méditerranéennes ;
- Recherches et publications ;
- Réunions entre académiques ;
- Réunions entre expert et décideurs politiques ;
- Système de veille en matière migratoire.
Les activités du CARIM couvrent trois dimensions majeures des migrations internationales dans la
région : économique et démographique, juridique et sociopolitique.
Les résultats des activités ci-dessus sont mis à la disposition du public par le site web du projet :
www.carim.org
Pour plus d’information
Euro-Mediterranean Consortium for Applied Research on International Migration
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Résumé
La migration circulaire semble de plus en plus une réalité incontournable, à laquelle s’intéressent les
chercheurs de différentes disciplines. Toutefois, l’étude du phénomène fait face à quelques difficultés
liées aux méthodes et mesures. C’est pourquoi nous tentons d’en cerner les contours à travers plusieurs
sources de données existantes, même si celles-ci n’ont pas été produites pour mesurer ce phénomène.
Il s’avère à posteriori que ces données apportent bien des éclairages sur la migration circulaire.
La fréquence des visites et la durée d’installation de part et d’autre du circuit migratoire, les raisons
d’une éventuelle ou réelle re-émigration et l’intensité des contacts avec les deux pays d’accueil et de
départ ont été conduits ici pour approcher cette mobilité.
Un essai d’identification des déterminants de la migration circulaire, à travers des données sur le
retour au pays d’origine, a été opéré tenant compte de l’âge, l’état matrimonial et la situation
professionnelle du migrant.
Une brève analyse coût/bénéfice a été esquissée d’un point de vue théorique suivi une description
des institutions algériennes en charge de la régulation de cette mobilité sans toutefois mettre en œuvre
le bilan de leurs activités.
Abstract
Circular migration is becoming increasingly a more realistic mobility pattern. It attracts, more then
before, the attention of researchers but it is still facing some measurement and methodological
difficulties. This is the reason why this paper tried to capture some of its dimensions through existing
empirical data, not collected initially for such a phenomenon. However this data allowed us to shed
lights on various aspects linked to circular migration by revisiting data on return migration surveys.
The frequency of visits and the duration of stay of/in both receiving and sending countries, the reemigration reasons, and the intensity of contacts with both extremities of mobility are examples of
indicators that are given brought here. Determinants of circular migration are approached by drawing
the profile by age and marital and professional status of the migrant depending upon the willingness to
re-emigrate.
Some cost/benefits of circular migration have been approached before describing briefly the
Algerian institutions in charge of regulating this mobility.
Introduction
Même si le concept de la migration circulaire est nouveau, le phénomène remonte, nous semble-t-il,
loin dans l’histoire de l’humanité. La statistique nationale ne s’est pas assez préoccupée de mesurer la
migration internationale, surtout dans sa dimension circulaire. Empiriquement on peut dire que ce
mode de mobilité existe pour certaines catégories sociales, telles que les sportifs de haut niveau et les
artistes. On l’observe aussi dans le monde scientifique et académique ou le commerce « ethnique ».
Cette dernière forme d’activité se développe dans les pays d’accueil, dans les régions de forte présence
de migrants, en réponse à une demande sociale de produits provenant des pays d’origine, non
disponibles dans les commerces classiques. La migration circulaire touche aussi bien la population
algérienne migrante dans le reste du monde que les populations d’Afrique subsaharienne et les
Européens immigrants en Algérie. C’est ainsi que les mouvements pour la coopération technique
peuvent être considérés comme des faits de migration circulaire. Il en est de même pour les migrations
alternantes provenant des pays frontaliers au sud de l’Algérie (Mali et Niger). Pour ces derniers, le
commerce de troc est légalisé et réglementé.
Il est nécessaire, de prime abord, de s’entendre sur ce qui peut être considéré comme migration
circulaire. A notre sens, la circularité renvoie au moins à deux faits :
•
•
le retour d’une personne à son point de départ : ainsi, il est clair que la migration de retour rentre
dans ce cadre ;
les mouvements plus complexes impliquant d’autres formes possibles de mobilité : ils
impliquent, pour une personne donnée, plusieurs pays de migration et/ou plusieurs séjours dans
un même pays ou non avec des retours temporaires au pays d’origine. Dans ce cadre, on pourrait
inclure les mouvements des générations issues des migrations.
Dans cet article, nous mobiliserons plusieurs sources d’information qui n’ont pas été conçues
initialement pour mesurer la migration circulaire. Nous en faisons donc un traitement secondaire,
adapté à cette forme de migration et essayons de répondre aux questionnements du CARIM.
Il s’agit de :
•
•
•
1
2
3
l’enquête sur les migrations de retour durant les dix dernières années que nous avons réalisée en
2006 dans le cadre du projet MIREM/EUI (Migration de Retour au Maghreb, Institut
Universitaire Européen), avec un financement de l’UE. Même si cette étude ne s’est pas
focalisée sur la migration circulaire et n’a touché qu’un faible échantillon (332), elle permet
d’apprécier le phénomène à travers des questions diverses (voir annexe) ;
l’enquête réalisée en 2006 par la Société Algérienne de Recherche en Psychologie (SARP) et
financée par (CISP)1 sur les migrants irréguliers subsahariens et qui a touché un échantillon de
2500 personnes. Elle renferme des questions sur les trajectoires migratoires passées et
envisagées ;
l’enquête réalisée en 2005 par le CREAD dans le cadre d’un projet piloté par le (ROSES)2 et
financé par le (FEMISE)3 sur les entreprises du secteur concurrentiel, à travers une question sur
l’expérience migratoire du chef d’entreprise. Cette enquête a touché 200 entreprises et 2000
salariés, dans chacun des trois pays du Maghreb central. Pour des raisons significatives, nous
avons préféré travailler sur l’ensemble de l’échantillon maghrébin regroupant 600 chefs
d’entreprises ;
Comitato Internazionale per lo Sviluppo dei Populi.
Research Centre on Transition and Development Economics
Forum Euro-Méditerranéen des Institutions Économiques.
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Nacer-Eddine Hammouda
•
les statistiques de la direction des français à l’étranger (DFAE) qui distinguent entre les
binationaux et les autres.
La migration circulaire via le retour, quels enseignements ?
A travers une enquête auprès des migrants de retour, nous allons essayer d’apprécier la circularité telle
qu’elle transparaît d’après les intentions et/ou les actes des migrants. On commence par examiner
l’intention des migrants en ce qui concerne la durée de séjour espérée au moment du départ à
l’étranger.
Tableau 1. Répartition des migrants de retour, selon leur intention de rester dans le pays
d’accueil, avant l’émigration
Durée du séjour envisagée dans le pays d’accueil Effectif Pourcentage
Permanente
105
31,6
Provisoire
116
34,9
Ne sait pas
110
33,1
Non déclaré
1
0,3
Total
332
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Plus du tiers des migrants de retour avaient dès le départ un projet de migration temporaire. En fait,
le mythe du retour a toujours été présent dans l’émigration algérienne du siècle dernier. Ceci renvoie à
des considérations socioculturelles qui font que l’émigration dans un pays appartenant à une sphère
culturelle différente, voire antagonique, ne pouvait se concevoir comme réponse à une nécessité
qu’elle soit économique ou autre. Un tiers n’avait pas de projet bien défini. L’autre tiers avait un projet
d’émigration permanente. La question est de savoir alors, pourquoi ces migrants sont revenus au pays
d’origine. Est-ce à dire que la migration permanente n’englobe que la période de vie active ? La
circularité peut être aussi appréciée à travers le nombre de départs réellement effectués du pays
d’origine.
Tableau 2. Répartition des migrants de retour, selon le nombre départs du pays d’origine pour
vivre à l’étranger
Nombre de départs
1
2
3 et plus
Total
Effectif
280
32
20
332
Pourcentage
84,3
9,6
6,1
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
On voit que plus de 15% des migrants de retour ont réalisé plus d’un projet migratoire. La question
qui se pose alors, est de savoir s’il s’agit de migrants qui s’inscrivent dès le départ dans un processus
de migration circulaire, ou bien si ce sont des conditions particulières qui poussent le migrant à
adopter cette stratégie. Ces conditions peuvent aussi bien concerner les pays d’accueil ou d’origine.
Un retour contraint en est l’un des motifs.
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CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Tableau 3. Répartition des migrants de retour, selon leur intention de rester dans le pays
d’origine, après leur retour
Intention de rester
Permanente
Provisoire
Ne sait pas
Total
Effectif
200
45
87
332
Pourcentage
60,2
13,6
26,2
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Le retour définitif n’est envisagé que par 60% des migrants de retour. Confrontés aux réalités du
pays d’origine, cette première intention va évoluer avec le temps. Le reste des migrants, soit 40%, est
réparti entre ceux qui aspirent à rester provisoirement dans le pays d’origine (13,6%) et ceux qui ne se
sont pas prononcés (26%).
Tableau 4. Répartition des migrants de retour, selon leur intention de repartir à l'étranger
Repartir à l'étranger
Très certainement
Probablement
Pas pour le moment
Ne jamais plus
Ne sait pas
Total
Effectif
55
60
44
84
89
332
Pourcentage
16,6
18,1
13,3
25,3
26,8
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Seul le quart des migrants de retour a l’intention certaine de ne plus repartir à l’étranger. Plus du
tiers ont l’intention de repartir à l’étranger. Ces constatations nous poussent à penser que la migration
de retour s’inscrit beaucoup plus dans la circularité. C’est du moins ce que montrent les intentions des
migrants et rien n’est encore sûr quant au passage à l’acte.
Tableau 5. Intention de re-émigration dans l’ancien pays d’accueil parmi ceux qui vont
certainement ou probablement re-émigrer
Intention de re-émigration
Effectif Pourcentage
Cas non éligibles
217
65,4
Repartir vers le dernier pays de séjour
70
21,1
Partir vers un autre pays
24
7,2
Ne sait pas
21
6,3
Total
332
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Plus de 20% ont l’intention de revenir dans le dernier pays de séjour, ce qui confirme donc qu’on
est bien dans le cas d’une migration circulaire.
Pour le traitement et les analyses de données, nous avons utilisé plusieurs techniques statistiques
(méthodes descriptives et méthodes explicatives), afin de répondre aux questions soulevées.
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
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Nacer-Eddine Hammouda
1. Cycle de vie professionnelle et familiale
A quel moment du cycle de vie, tant familial que professionnel, intervient la migration circulaire ?
Pour répondre à cette question, nous faisons appel à quelques observations empiriques, tant en Algérie
que dans quelques pays d’accueil. Ces observations empiriques mériteraient d’être étayées par des
investigations plus systématiques.
Par le passé, la migration circulaire touchait beaucoup plus les personnes envoyées en formation
dans un cadre organisé touts niveaux confondus et toutes structures confondues. Il s’agissait
généralement de jeunes célibataires qui partaient en formation avant même leur première fonction. Au
cours des vingt ans de post-indépendance, la migration circulaire touchait aussi bien les nationaux que
les étrangers qui venaient en Algérie dans le cadre de la coopération technique, comme par exemple
les VSNA (Volontaires pour le Service National en Algérie).
a) Les premières promotions envoyées à l’étranger pour une formation rentraient en Algérie
directement après l’obtention de leur diplôme, car elles étaient assurées d’accéder à un emploi
décent et à un logement. Il s’agissait de jeunes hommes célibataires, mais plus la durée de la
formation s’allongeait, plus augmentait la probabilité de contracter un mariage avec des femmes
du pays d’accueil.
b) L’évolution que vont connaître l’économie et la société algériennes va faire en sorte que de
plus en plus d’étudiants vont prolonger leur séjour pour pouvoir exercer une fonction ou un
travail. Un temps suffisant pour dégager une épargne susceptible de leur permettre
d’effectuer un ‘déménagement’ pour pouvoir démarrer une vie active et familiale et donc
avant le mariage.
c) Certaines professions (enseignants du cycle supérieur, médecins, avocats) intervenant
ponctuellement en tant qu’associés.
d) Les sportifs de haut niveau, du fait de la durée limitée de leur carrière et de
l’internationalisation de leur marché du travail, ne pouvaient que s’inscrire dans la circularité.
e) Les artistes, du fait de l’organisation particulière de leur métier évoluent dans des espaces
supranationaux et peuvent donc avoir plusieurs lieux de rattachement. C’est le cas de
quelques chanteurs algériens bien connus ou d’autres moins connus.
L’éloignement de la culture d’origine, d’une partie de la deuxième génération issue de la migration,
jugé par les parents comme problématique, a impliqué l’apparition de nouvelles stratégies. C’est ainsi
que des formes de migrations circulaires peuvent apparaître au début de la scolarité des enfants ou à
leur adolescence. En effet, les enfants vont subir des immersions totales dans le pays d’origine plus ou
moins longues avec ou sans leurs parents et donc vont être accueillis par la famille élargie. Ces enfants
vont souvent revenir dans le pays d’émigration de leurs parents, soit après le mariage pour les filles,
ou après l’obtention du baccalauréat pour les garçons.
Pour répondre de façon plus précise à la question posée au début de cette section, nous avons
procédé à une segmentation selon quatre variables : la situation familiale, la situation individuelle
actuelle, l’âge et le sexe. Seules les deux premières sont retenues, car les plus discriminantes.
L’objectif de cette procédure étant de déterminer des profils en fonction de leur projet de réémigration et donc sur ceux qui s’inscrivent dans la circularité.
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CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Tableau 6. Répartition des trois segments de migrants de retour,
selon leur projet de ré-émigration
Total
Segments*
Nature de l’intention de re-émigrer
1
2
3
Très certainement
24,3% 12,2% 10,2% 16,6%
Probablement
9,3% 18,1%
23,6% 21,6%
Pas pour le moment
17,1% 10,8% 10,2% 13,3%
Jamais plus
11,4% 13,5% 49,2% 25,3%
Ne sait pas
23,6% 41,9% 21,2% 26,8%
Total
100,0% 100,0% 100,0% 100,0%
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
* Les segments :
Segment 1 : célibataires ou mariés à l’étranger, ils représentent 42,2% de l’échantillon ;
Segment 2 : (mariés avant de partir ou mariés au retour ou autre) et (salariés, indépendants
irréguliers, chômeurs), ils représentent 22,3% de l’échantillon ;
Segment 3 : (mariés avant de partir ou mariés au retour ou autre) et (indépendants réguliers, chefs
d’entreprise, inactifs), ils représentent 35,5% de l’échantillon.
Les trois segments sont classés selon la probabilité décroissante de vouloir repartir à l’étranger.
Les migrants de retour du segment 1 sont partagés équitablement entre désir, certain ou probable,
de ré-émigrer ou incertain (un peu moins du quart pour les trois modalités).
Ceux du segment 2 sont plutôt indécis, par contre ceux du segment 3 près de la moitié ne veulent
plus ré-émigrer.
Pour l’avenir, les migrations circulaires pourront intervenir en début de vie active, mais aussi
durant toute la vie active pour certaines professions (recherche par exemple). D’ailleurs, l’ouverture de
l’économie algérienne aux sociétés étrangères a un impact certain sur la gestion des ressources
humaines. C’est ainsi que certaines entreprises proposent des plans de carrière à leurs futurs cadres
intégrant des périodes d’immersion dans la société mère ou dans leurs succursales étrangères, pour
inculquer leur culture managériale et technique.
2. Durée des phases migratoires
Les durées de séjour sont variables selon le type de profession :
•
•
•
- quelques années une fois ;
- quelques semaines ou quelques mois pour les travailleurs saisonniers et chaque année ;
- plusieurs séjours de quelques mois, plusieurs fois durant la vie active.
L’enquête que nous avons effectuée en 2005, dans le cadre de l’étude ROSES - FEMISE sur la
flexibilité du travail et la concurrence sur le marché des biens et services, nous donne un ordre de
grandeur sur l’importance des migrations circulaires chez les salariés du secteur concurrentiel d’au
moins 10 salariés : 2,8% ont fait des études à l’étranger et 2,2% ont travaillé à l’étranger pour une
durée moyenne de 4 années. L’âge moyen de ceux qui ont travaillé à l’étranger est de 43 ans et ceux
qui ont fait des études à l’étranger est de 44,5 ans. Ce qui dénote que le mouvement s’est tari. Ces
proportions sont plus élevées pour les employeurs puisque un sur cinq a fait ses études à l’étranger et
que 14% ont travaillé à l’étranger.
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
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Nacer-Eddine Hammouda
Tableau 7. Répartition des migrants de retour, selon le moment envisagé pour repartir
Moment de départ de nouveau à l’étranger Effectif Pourcentage
Cas non éligibles
217
65,4
Dans moins de six mois
23
6,9
Dans moins d'un an
19
5,7
Dans plus d'un an
10
3,0
Ne sait pas
63
19,0
Total
332
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Il ressort du tableau 7 que 1/5 des migrants qui envisagent de retourner dans l’ancien pays d’accueil
envisagent de le faire dans moins de six mois et ¼ pendant la durée située entre 6 mois et un an. Ceci
dit, il convient de noter que le migrant ne dispose pas de toute la latitude pour organiser sa circularité,
dans la mesure où beaucoup de paramètres lui échappent et que ces mouvements ne sont pas organisés
par un quelconque dispositif ou institution.
Tableau 8. Répartition des migrants de retour, selon le nombre de fois qu’ils se sont rendus à
l'étranger depuis leur retour
Effectif Pourcentage Pourcentage cumulé
Deux ou plusieurs fois par an
67
20,2
20,2
Une fois par an
73
22,0
42,2
Moins d'une fois par an
14
4,2
46,4
De façon sporadique
19
5,7
52,1
Jamais
159
47,9
100,0
Total
332
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Ce tableau nous indique qu’un cinquième des migrants de retour se sont rendus au moins deux fois
par an à l’étranger et 42% une fois par an. Globalement, un peu plus de la moitié des migrant garde un
lien avec leur ancien pays d’accueil par des visites régulières ou sporadiques. S’agit-il d’une migration
circulaire non explicite ?
3. Profil des migrants circulaires
On retrouve plusieurs profils selon le degré de qualification et surtout selon le niveau d’étude: il y a
des universitaires mais aussi du personnel non qualifié. Ceux qui ont migré plusieurs fois sont plus
instruits que ceux qui n’ont connu qu’un seul parcours migratoire et ce parmi les migrants de retour.
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CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Tableau 9. Répartition des migrants de retour, selon les trois principales raisons pour lesquelles
ils souhaitent quitter de nouveau le pays d'origine
Première raison
Cas non éligibles
217
Je connais déjà le pays et souhaite y vivre
24
Pour renouveler mes papiers
22
Pour des raisons familiales
12
Nouvelles opportunités d'emploi à l'étranger
12
Je ne trouve pas d'emploi ici
12
Je n'ai pas d'avenir dans mon pays d'origine
11
Je ne m'adapte pas dans mon pays d'origine
9
Pour des raisons de santé
8
Pour d'autres raisons
4
ND
1
Total
332
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
65,4
7,2
6,6
3,6
3,6
3,6
3,3
2,7
2,4
1,2
,3
100,0
Deuxième raison
217
11
10
18
8
7
17
12
15
9
8
332
65,4
3,3
3,0
5,4
2,4
2,1
5,1
3,6
4,5
2,7
2,4
100,0
Troisième raison
217
7
10
11
17
6
14
12
11
12
15
332
65,4
2,1
3,0
3,3
5,1
1,8
4,2
3,6
3,3
3,6
4,5
100,0
Parmi les raisons invoquées pour vouloir repartir, les quatre premières relèvent les liens très forts
qu’ont gardés les migrants de retour avec le pays d’accueil, qu’ils soient familiaux et/ou
professionnels (tableau 9). Ce sont ses liens, plutôt assimilés à des facteurs attractifs, qui prédominent
les raisons avancées en premier lieu par les migrants : 2/3 d’entre eux. Les trois raisons suivantes, liés
à des difficultés d’emploi, d’adaptation et d’avenir incertain, sont plutôt assimilées à des facteurs
répulsifs dans le pays d’origine. Ces raisons suscitent le désir de repartir auprès de plus d’¼ de
migrants en premières raisons. Le reste de migrants expliquent leur désir de départ par d’autres raisons
y compris les problèmes de santé.
Tableau 10. Répartition des migrants de retour, selon la fréquence des contacts avec de
membres de la famille ou des amis à l'étranger, au cours des 12 derniers mois.
Fréquence des contacts avec des membres
Effectif Pourcentage
de la famille ou des amis à l'étranger
Au moins une fois par semaine
59
17,8
Quelque fois par mois
58
17,5
Une fois par mois
28
8,4
Plusieurs fois par an
49
14,8
Une fois par an
9
2,7
De façon sporadique
73
22,0
Jamais
56
16,9
Total
332
100,0
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Trois migrants sur cinq ont eu des contacts très fréquents avec des membres de leurs familles ou
des amis installés à l’étranger qui vont d’au moins une fois par semaine jusqu’à plusieurs fois par an.
¼ des migrants effectuent ce contact une fois par an ou de façon sporadique. C’est une nouvelle forme
de sociabilités transnationale opérée par les contacts et les liens que facilitent de nos jours les moyens
de communication. La circulation des personnes va accroître les rencontres et donc le tissage de
nouveaux réseaux sociaux.
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
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Nacer-Eddine Hammouda
Tableau 11. Répartition des migrants de retour, selon la raison de voyage
Raison de voyage
Cas non éligibles
Raisons administratives
Familiales
Affaires
Vacances
Autres
Effectif
167
103
54
52
28
18
Pourcentage
50,3
31,0
16,3
15,7
8,4
5,4
Source : Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
On remarque que la première raison de retour à l’étranger est pour régler des affaires
administratives (près du tiers). Ce qui dénote qu’en cas de besoin, les migrants de retour ont gardé des
liens avec le pays d’accueil. Ce lien se trouve renforcé si une partie de la famille est restée dans le
pays d’accueil ou si le migrant y a des intérêts économiques. Ayant passé une partie de leur vie à
l’étranger, les migrants sont souvent contraints à garder des liens administratifs induits surtout par
l’exercice d’un travail dans le passé et les avantages sociaux qui y sont liés. Les autres raisons de
voyage des migrants sont réparties, dans l’ordre d’importance décroissant, entre la famille, les affaires et les vacances.
3.1 Déterminants de la migration circulaire : l’intention de re-émigrer
Dans la suite, nous nous intéressons aux déterminants de la migration circulaire. Pour ce faire, nous
définissons les migrants circulaires comme ceux qui ont l’intention de repartir à l’étranger
(certainement ou probablement). Nous avons introduit comme variables explicatives, les
caractéristiques sociodémographiques (âge, sexe, situation matrimoniale), économiques (groupe de
profession, statut professionnel actuel), ainsi que la trajectoire migratoire (durée de séjour, statut
professionnel avant le retour). Seules deux variables ont été retenues par le modèle : la situation
matrimoniale et le groupe d’âge (dans cet ordre). Le modèle arrive à classer convenablement les deux
tiers des individus. C’est-à-dire que ces deux variables permettent de prédire si l’individu a ou non
l’intention de ré-émigrer avec un risque d’erreur d’un tiers. L’introduction des autres variables
n’améliore pas sensiblement la prédiction.
Tableau 12. Résultats de la régression logistique binaire
Etape 2(b)
Classe d’âge
Jusqu’à 30 ans (référence)
31 à 40 ans
41 à 50 ans
51 à 64 ans
65 ans et +
B
e.s.
Ddl
Signif.
Exp(b)
20,254
4
,000
,411
4,487
1
,034
1,315
,470
7,816
1
,005
3,724
,086
,476
,033
1
,856
1,090
-,378
,479
,620
1
,431
,686
24,711
4
,000
14,390
1
,000
,205
,870
Etat civil
Célibataire (référence)
-1,586
,418
Marié avant de partir
,004
,421
Marié à l’étranger
-1,243
,404
Marié au retour
-,921
,512
Autre
-,669
,139
Constante
Source : Traitement de l’Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
8
Wald
2,387
,000
1
,992
1,004
9,485
1
,002
,289
3,236
1
,072
,398
23,273
1
,000
,512
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Les migrants circulaires seraient plutôt aux âges médians (entre 31 et 50 ans) puisqu’ils ont entre
deux à trois fois plus de probabilité d’être circulaires que les plus jeunes. Mais ils sont plutôt
célibataires puisque les autres situations matrimoniales ont des probabilités bien moindre d’être des
migrants circulaires. On aurait pu penser que ceux mariés à l’étranger le sont aussi (dans notre
échantillon l’effet n’est pas significatif). Ce qui pourrait s’expliquer par l’ambiguïté autour de cette
modalité. En effet, beaucoup de migrants se marient pendant leur séjour à l’étranger, mais avec des
résidentes dans leur pays d’origine.
Nous avons testé un deuxième modèle en remplaçant la variable profession par le niveau d’études.
La pertinence du modèle s’améliore et une troisième variable explicative est retenue à savoir la
situation professionnelle actuelle.
Tableau 13. Résultats de la régression logistique binaire
Etape 3(c)
B
e.s.
Wald
Ddl Signif.
13,950
4
,007
2,900
5,134
,265
2,138
1
1
1
1
,089
,023
,607
,144
19,383
4
,001
1
1
1
1
6
,006
,482
,013
,163
,069
Exp(b)
Classe d’âge
Jusqu’à 30 ans (référence)
31 à 40 ans
41 à 50 ans
51 à 64 ans
65 ans & +
,711
1,061
-,264
-,850
,418
,468
,514
,581
2,037
2,888
,768
,427
Etat civil
Célibataire (réference)
Marié avant de partir
-1,130
,410 7,612
Marié à l’étranger
,300
,427
,494
Marié au retour
-1,038
,419 6,146
autre
-,715
,513 1,945
Situation professionnelle actuelle
11,694
Employé salarial (réf)
Travailleur saisonnier
20,919 40192,919
,000
Employeur/chef d'entreprise
-,231
,450
,264
Travailleur autonome régulier
-,634
,499 1,614
Travailleur autonome irrégulier
1,893
,677 7,808
Actifs au chômage
,167
,426
,154
Inactifs
,346
,466
,549
Constante
2,396 5741,846
,000
,323
1,350
,354
,489
1
1
1
1
1
1
1,000 1215905568,240
,608
,794
,204
,530
,005
6,638
,695
1,182
,459
1,413
1
1,000
10,980
Source : Traitement de l’Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
La seule modalité significative est que les travailleurs autonomes irréguliers ont 6,6 fois plus de
probabilité d’être des migrants circulaires que les salariés (qui est la modalité de référence), toutes
choses égales par ailleurs. Ce qui renvoie probablement aux « trabendistes » du commerce informel de
la valise.
Tout porte à croire que les migrants circulaires sont ceux qui ne se sont pas stabilisés ni
familialement (célibataires), ni professionnellement (autonomes irréguliers).
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
9
Nacer-Eddine Hammouda
3.2 Le nombre de départs à l’étranger
La deuxième variable sur laquelle nous avons travaillé est le nombre de départs à l’étranger. C’est-àdire, sur le passé migratoire avec toujours comme variable explicative les caractéristiques
sociodémographiques et économiques du migrant. Seule la durée de l’expérience migratoire est
acceptée comme variable explicative : la migration circulaire concernerait plus les nouveaux migrants
puisque la probabilité d’avoir fait plusieurs séjours à l’étranger diminue avec la durée du séjour. La
circularité est donc un phénomène qui va prendre de l’ampleur, tout comme les flux de marchandises
et de capitaux, du fait de la mondialisation
Tableau 14. Résultats de la régression logistique binaire
Étape 1(a)
Durée 1
Constante
B
-,028
-1,261
e.s.
,011
,209
Wald
6,417
36,457
Ddl
1
1
Signif.
,011
,000
Exp(b)
,973
,283
Source : Traitement de l’Enquête CREAD projet MIREM-EUI, 2006
Bien que cette enquête soit de type exploratoire, elle peut nous renseigner sur le phénomène. Nous
proposons d’ailleurs de généraliser le présent travail aux deux autres pays maghrébins, qui ont réalisé
la même enquête. Dans une seconde étape, l’observation du phénomène à partir des pays d’accueil
serait judicieuse. En effet l’augmentation continue du nombre de binationaux aura un impact certain
sur l’émergence de nouvelles formes migratoires. D’ailleurs, il serait fort utile de réfléchir au nouveau
concept de co-citoyenneté. C’est ainsi que nous observons des familles qui, pour des raisons
socioculturelles et à une période de leur cycle de vie, vont faire une immersion complète dans le pays
d’origine. Des opportunités économiques vont en pousser d’autres à investir de part et d’autre de
la Méditerranée.
3.3 Profil des français résidants en Algérie et en Afrique du Nord
Depuis les années 2000, le taux de croissance des binationaux est beaucoup plus élevé que pour les
autres français. C’est ainsi qu’en 2006, plus des trois quarts des Français résidents en Algérie sont des
binationaux.
La structure par âge des binationaux a nettement évolué : alors que dans les années 1980, il
s’agissait d’une migration familiale, à partir des années 1990 il s’agit d’une migration d’adultes. C’està-dire qu’il s’agit maintenant beaucoup plus d’une migration choisie.
4. Pays de destination
Le choix du pays de destination − Europe, Amérique du nord, Moyen Orient − dépend du profil du
migrant. L’émigration vers le Canada est souvent envisagée comme une étape dans le projet
migratoire. En effet, du fait de la loi sur la citoyenneté, elle permet au bout de trois ans au migrant
d’avoir des documents canadiens qui vont améliorer le pouvoir de circulation du migrant.
Dans la mesure où la migration circulaire touche aussi les non Algériens, il faudrait aussi
l’envisager par rapport aux pays d’origine : Afrique subsaharienne (voir résultats immigration vs
transit), France, Chine.
La migration a un coût qui augmente avec la distance séparant le pays d’accueil du pays d’origine,
mais aussi selon sa forme. La migration organisée légalement serait nettement moins coûteuse que la
migration irrégulière où les réseaux de passeurs et de fournisseurs de documents de voyages,
monnayent grassement leurs services. Ce coût est supporté par le migrant, mais aussi souvent par sa
famille.
10
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
5. Bénéfices
La migration circulaire pourrait réduire le chômage des personnels non qualifiés PNQ, et donc être
bénéfique pour l’individu et sa famille. Les migrants subsahariens qui s’inscrivent dans les migrations
alternantes transfèrent une part de leur épargne à leur famille restée dans le pays d’origine,
contrairement aux migrants de transit qui consacrent leur économie pour la poursuite de leur projet
migratoire.
Ces transferts ont peu d’impact sur l’économie locale, encore moins sur l’économie nationale, dans
la mesure où ils se dirigent essentiellement à la consommation ou à la construction du logement
familial.
Si la migration circulaire est un projet construit et non forcé par les circonstances, ces transferts
pourraient être orientés vers l’investissement productif. Il est clair que l’environnement institutionnel y
sera pour beaucoup, mais aussi la densité du réseau social du migrant.
En dehors de la migration, dont le but initial était la formation, les autres formes de migration
agissent marginalement sur le capital humain. D’ailleurs, les premières générations de migrants ne
parlent même pas la langue du pays d’accueil.
5.1 Capacité d’exportation
La méthode utilisée pour l’estimation de ce modèle est celle de « Wald » descendante. Le modèle est
globalement significatif (voir tableau A5 en annexe). Les résultats de l’estimation sont donnés dans le
tableau A6 en annexe.
L’expérience du chef d’entreprise à l’étranger est un facteur déterminant de succès de la firme en
terme de capacité d’exportation. Le modèle accorde une probabilité de 2,05 fois supérieure aux
entreprises pilotées par des personnes ayant vécu une expérience professionnelle à l’étranger par
rapport à celles pilotées par des personnes qui n’avaient pas l’occasion de travailler à l’étranger.
6. Coûts
Il faut poser le problème des coûts en tenant compte de l’ensemble des facettes :
•
•
•
•
plus le niveau du migrant est élevé, plus l’est le coût de sa formation. Du fait que l’enseignement
est quasi gratuit, ce coût est supporté par la collectivité.
Le différentiel de rémunérations entre pays d’accueil et pays d’origine peut être très important
du fait que les compétences disponibles sont sous-utilisées et donc sous-rémunérées. Ce qui
renvoie à la configuration du système productif et aux problèmes de gouvernance économique.
L’inadéquation du système éducation-formation aux besoins du marché du travail amplifie la
mauvaise gestion des ressources humaines. Ceci est vrai pour l’Algérie mais aussi pour les pays
subsahariens. Plus le niveau d’instruction augmente,
c’est–à-dire plus on investit en capital humain, plus le désir de migration augmente (Hammouda,
2006).
7. Formes de migration
Il est clair que, pour l’économie nationale, les migrations circulaires ou les migrations temporaires
seraient plus bénéfiques, si suffisamment de flexibilité y était introduite. La situation actuelle relève
plus de stratégies individuelles que de formes organisées.
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
11
Nacer-Eddine Hammouda
8. Institutions en charge de l’organisation de la migration du travail
L’une des premières institutions de l’Algérie indépendante fut l’Office National pour la Main-d’œuvre
(ONAMO qui deviendra l’ANEM à partir de septembre 1990), créé en novembre 1962 et sera chargé
de l’organisation des mouvements des travailleurs dans les deux sens. Cette institution a organisé des
migrations temporaires dans les années soixante-dix vers l’ex RDA dans le cadre d’accords
gouvernementaux. Nous n’avons pas trouvé de bilan de cette expérience pilote.
Les administrations et les grandes entreprises nationales vont pour leur part prendre en charge la
mobilité de leur personnel, essentiellement les profils qualifiés ou hautement qualifiés. Beaucoup de
défections ont été signalées sans qu’un bilan exhaustif en ait été fait.
Conclusion
L’ensemble des sources de données que nous avons pu mobiliser nous ont permis de nous assurer
qu’une migration circulaire non négligeable existe quantitativement, mais sous plusieurs formes. La
migration circulaire touche des segments particuliers de migrants. Cette forme de migration obéit à des
logiques différentes : elle peut être choisie et s’inscrit alors dans la mobilité des talents globaux ou
profite d’opportunités conjoncturelles ou structurelles forcée, elle correspond à une phase du cycle de
vie d’instabilité familiale et/ou professionnelle. La migration circulaire s’étend même aux enfants de
migrants porteurs de la double nationalité. Cependant, le tableau que nous avons présenté est
incomplet et devrait être complété par d’autres investigations en particuliers dans les pays d’accueil.
Bibliographie
Hammouda N.-E. « Le désir de migration chez les jeunes célibataires de 15 à 29 ans : essai de
modélisation», communication lors de la journée mondiale de la population du 11 juillet 2006 à
l’INSP Alger
Hammouda N.-E. & MUSETTE M.S. « Migration et développement » communication
présentée au CERI-EUROMESCO le 18 juillet 2007 à Paris
Hammouda N.-E. & MUSETTE M.S. « Impact économique et socio-culturel de l’émigration sur le
développement de l’Algérie» pp 41-58 in « L’impact de la migration sur la société marocaine »
sous la direction de KHACHANI M., Rabat 2007
Khaled N. & Ali « Profils des migrants subsahariens en situation irrégulière en Algérie » rapport de
recherche CISP SARP, Alger, avril 2007
Souag A. « L’impact de la flexibilité du marché du travail sur la compétitivité des entreprises du
Maghreb central », mémoire de magistère en statistique et économie appliquées, INPS, Alger 2007
12
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Annexe 1 : Questions
Questions ayant un lien avec la migration circulaire, au sein du questionnaire de l’enquête sur les
migrations de retour durant les dix dernières années, que nous avons réalisée en 2006, dans le cadre du
projet MIREM avec un financement de l’UE :
•
•
•
•
•
•
•
•
Combien de fois avez-vous quitté votre pays pour aller vivre à l’étranger ?
Avant de partir, aviez-vous l’intention de rester dans le pays d’accueil de manière permanente ou
provisoire ?
Lorsque vous étiez à l’étranger, quelle a été la fréquence de vos visites dans votre pays d’origine,
au cours de la dernière année ?
Lors de votre retour, aviez-vous l’intention de rester de manière permanente ou provisoire ?
Envisagez-vous de repartir à l’étranger ?
Dans quel pays ?
Dans combien de temps ?
Depuis votre retour, combien de fois vous êtes-vous rendu à l’étranger ? Pour quelles raisons ?
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
13
Nacer-Eddine Hammouda
Annexe 2 : Tableaux statistiques
Tableau A1. Répartition par catégories socioprofessionnelles des Français résidants en Afrique
du Nord, inscrits auprès des consulats
Exploitants agricoles
Entrepreneurs
Cadres supérieurs et professions intellectuelles
Professions intermédiaires
Employés
Ouvriers
Total occupés
Actifs à la recherche d’un emploi
Total actifs
Retraités
Autres inactifs
Total inactifs
1995
133
2 367
6 898
4 159
2 770
296
16 623
740
17 363
2 189
29 218
31 407
48 770
2 000
204
2 650
7 631
2 914
2 872
213
16 484
235
16 719
2593
26 954
29 557
46 276
2 005
300
4 438
11 334
3258
5 035
278
24 643
367
25 010
3 865
55 161
59 026
84 049
2 006
317
4 834
12 418
3 394
5 291
282
26 536
416
26 952
4 680
59 454
64 134
91 092
TOTAL
Source : Cellule statistique DFAE4
Tableau A2. Répartition par secteur d’activité des Français occupés en Afrique du Nord, inscrits
auprès des consulats
Agriculture
Industrie
Bâtiment
Tertiaire
1995
419
3414
280
12510
2000
365
2863
268
12988
2005
475
3139
500
20529
2006
510
3153
554
22321
Source : Cellule statistique DFAE
Tableau A3. Evolution du nombre de Français et de binationaux immatriculés en Algérie
Année Immatriculés Indice Binationaux Indice
1985
28122 317
6418 94
1990
20128 227
14341 211
1995
13000 147
10010 147
2000
8865 100
6802 100
2002
12541 141
10165 149
2003
22202 250
19308 284
2004
30964 349
27723 408
2005
38080 430
34290 504
2006
41498 468
37160 546
Source : Cellule statistique DFAE
4
Direction des Français à l’étranger du ministère français des Affaires étrangères
14
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
Migration circulaire : cas de l’Algérie
Tableau A4 : Répartition par âge de la population binationale inscrite auprès des consulats
français en Afrique du Nord
année
1985
1990
1995
2000
2005
2006
0-5 ans
2 259
4 167
2 125
2 809
6 127
6 270
%
14,2%
15,4%
8,1%
10,5%
10,4%
9,9%
6-17 ans
6 955
9 433
5 433
7 779
14 420
15 576
%
43,6%
34,8%
20,7%
29,0%
24,4%
24,5%
18 ans et +
6 741
13 541
18 673
16 241
38 456
41 621
%
42,3%
49,9%
71,2%
60,5%
65,2%
65,6%
total
15 955
27 141
26 231
26 829
59 003
63 467
Source : Cellule statistique DFAE
Tableau A5 : Tests de qualité d’ajustement du deuxième modèle
Rubrique
Valeur
Signification
-2log-vraisemblance
241,35
0,000
Chi-Square
169,20
0,000
Source : Traitement de la base de données ROSES FEMISE 2005
Tableau A6 : Résultats d’estimation du modèle logit binaire
B
Pays
Tunisie
Maroc
Algérie
Wald
Ddl
Signif.
Exp (b)
9,82
1,46
0,49
8,77
1,41
0,52
7,33
référence
Caractéristique de la firme
2
1
1
0,010
0,000
0,010
4,33
4,11
0,50
0,51
0,58
0,66
1,04
8,96
18,84
0,64
5,09
7,36
11,34
5,96
1
5
1
1
1
1
1
0,000
0,000
0,420
0,020
0,010
0,000
0,010
1,49
3,16
4,85
9,15
12,52
0,66
0,83
8,63
0,14
4,69
2
1
1
0,010
0,710
0,030
1,28
5,98
0,46
0,43
10,79
8,71
7,69
2
1
1
0,000
0,000
0,010
3,83
3,28
0,43
4,18
1
0,040
2,40
le niveau technique de la firme
la part des cadres et ingénieurs
4,05
niveau technique
niveau 1
0,40
niveau 2
1,15
niveau 3
1,58
niveau 4
2,21
niveau 5
2,53
niveau 0
référence
structure du capital
structure du capital
privé national
0,25
privé étranger
1,79
Etatique
référence
la taille de l'entreprise
taille
[50-99]
1,34
100 et plus
1,19
[10-49]
référence
l'organisation de la firme
l'entreprise fonctionne t-elle comme sous-traitante
oui
0,87
non
référence
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS
e.s.
Pays
1,35
57,63
15
Nacer-Eddine Hammouda
L'environnement de la firme
33,75
-2,00
0,46
18,82
-3,36
0,61
30,80
-1,79
0,53
11,33
référence
caractéristiques du chef d'entreprise
l'expérience du chef d'entreprise à l'étranger
oui
0,72
0,41
3,00
non
référence
la constante
Constante
-3,01
0,82
13,36
Source : Traitement de la base de données ROSES FEMISE 2005
secteur d'activité
secteur protégé
secteur neutre
secteur concurrencé
secteur le plus concurrencé
16
3
1
1
1
0,000
0,000
0,000
0,000
0,14
0,03
0,17
1
0,080
2,05
1
0,000
0,05
CARIM-AS No.2008/41 © 2008 EUI, RSCAS