Le tueur de jonquilles: Dans la tête d'un serial killer
Par Michel Joiret
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À propos de ce livre électronique
La motivation lui échappe et la relation entre les différents crimes lui apparaît incohérente. Il faut être malade (ou désespéré) pour exécuter sauvagement des jeunes gens promis à un bel avenir. Théo rumine de sombres pensées et sa victoire à la Pyrrhus conforte sa perplexité. Et puis il y a ce dingue qui fauche stupidement des jonquilles dans un jardin public… "Seul dans son bureau, Théo regarde sa montre : quatre heures du matin… Il fait silence dans le centre ville à part les beuglements intermittents de quelques ivrognes… Le commissaire a tout relu pour la centième fois. Il n'y a rien, rien qui puisse le mener à un embryon de piste…"
Avec "Le Tueur de jonquille", Michel Joiret signe son troisième polar
EXTRAIT
– Faut vraiment être givré pour commettre un acte aussi répugnant !
– Mais que vous arrive-t-il, ma chère Jacqueline, et de qui parlez-vous ?
Jeanne Crayon, une petite dame à la coiffure rehaussée d’un curieux chignon gris traversé par une épingle observe Madame Pernelle, habillée de son sempiternel tablier bleu, qui pointe un doigt accusateur vers le massif de jonquilles au centre du square Marie-Louise à Bruxelles.
– Là, là, regardez ce qu’« ils » ont osé faire !
Les deux locataires s’avancent sur le trottoir pour mieux fixer le parterre qui garnit le cœur du petit parc. Le cercle des fleurs printanières y a été proprement investi et les jonquilles « exécutées » ! Comment dire cet état de désolation qui sape le moral au premier regard ? Il ne reste rien de ce jardin d’avril qui invite à la promenade et à la rêverie. Les quatre bancs où viennent s’asseoir les habitants du square s’érigent comme les sentinelles d’une imprévisible désolation. Les jonquilles qui ont été sectionnées à la base et piétinées rageusement ne sont plus qu’un champ de bataille après l’affrontement, un amas de déchets…
À PROPOS DE L'AUTEUR
Michel Joiret est né à Bruxelles le 31 janvier 1942. Professeur de français dans l'enseignement secondaire. Depuis 1980, détaché pédagogique puis chargé de mission du CPEONS (Conseil des Pouvoirs organisateurs de l'Enseignement officiel neutre subventionné). Animateur du Projet-Lecture Charles Bertin en Hainaut (Belgique), tente de concilier enseignement et culture autour de projets interdisciplinaires. Aujourd'hui conseiller pédagogique à la Fondation Michel de Ghelderode et animateur de la revue trimestrielle d'art et de littérature LE NON-DIT. Organisateur de débats, foires du livre, conférencier. Responsable de séjours pédagogiques dans les sites littéraires pertinents : Alain-Fournier, Marcel Proust, Ronsard, Pierre Loti, Chateaubriand et George Sand. Ecrivain (roman, poésie, essai, nouvelle théâtre). Nommé Chevalier de l'Ordre des Arts et des Lettres en 1990 par Jack Lang, Ministre de la Culture, de la Communication, des Grands Travaux et du Bicentenaire.
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Aperçu du livre
Le tueur de jonquilles - Michel Joiret
Chapitre 1
Jacqueline Pernelle met l’index à la tempe de manière significative.
Les Crayon qui occupent le premier étage sont habitués à ses sautes d’humeur mais ce matin-là, la concierge des Marronniers est habitée par la fureur. Il suffit de suivre la couperose de son visage en ébullition pour apprécier son état d’excitation. Henry Crayon, un homme paisible, retraité de l’Administration des Postes, détaille le mouvement du visage comme le flanc d’un volcan lézardé par les langues de feu. Les lèvres de la pipelette crachent des paroles assassines qui pètent comme des châtaignes sur la grille d’un brasero :
– Faut vraiment être givré pour commettre un acte aussi répugnant !
– Mais que vous arrive-t-il, ma chère Jacqueline, et de qui parlez-vous ?
Jeanne Crayon, une petite dame à la coiffure rehaussée d’un curieux chignon gris traversé par une épingle observe Madame Pernelle, habillée de son sempiternel tablier bleu, qui pointe un doigt accusateur vers le massif de jonquilles au centre du square Marie-Louise à Bruxelles.
– Là, là, regardez ce qu’« ils » ont osé faire !
Les deux locataires s’avancent sur le trottoir pour mieux fixer le parterre qui garnit le cœur du petit parc. Le cercle des fleurs printanières y a été proprement investi et les jonquilles « exécutées » ! Comment dire cet état de désolation qui sape le moral au premier regard ? Il ne reste rien de ce jardin d’avril qui invite à la promenade et à la rêverie. Les quatre bancs où viennent s’asseoir les habitants du square s’érigent comme les sentinelles d’une imprévisible désolation. Les jonquilles qui ont été sectionnées à la base et piétinées rageusement ne sont plus qu’un champ de bataille après l’affrontement, un amas de déchets…
– C’est un acte gratuit, soupire Henry !
– Tout à fait inexplicable, renchérit Jeanne.
– Je vous le dis, et ce n’est pas d’hier que ma conviction est faite, siffle Jacqueline, « ils » dépassent les bornes !
– Avez-vous des soupçons ?
Jeanne se pince les lèvres. Henry vient d’ouvrir distraitement le couvercle d’une logorrhée vertigineuse… La concierge avait posé son balai à l’angle du porche d’entrée comme pour signifier que la réponse allait prendre le large :
– Depuis le temps que je le dis ! La nuit, « ils » me réveillent alors que je viens seulement de m’assoupir. Un pétard qui déchire les oreilles et je suis assise sur mon lit ! Et ce n’est qu’un début… Une voiture qui prend le virage au cordeau et grince dans ma tête ! Sans parler de la musique de dingue qui bat au rythme d’un cœur affolé, des portières qui claquent, des bruits de disputes au loin d’abord et puis, de plus en plus rapprochés…
Henry n’a pas senti le coup de coude réprobateur de Jeanne.
– Vous n’avez jamais appelé la police ?
– Parce vous croyez qu’« ils » se dérangent pour si peu ? – Un ricanement et quelques sifflantes entre les dents – La police, elle prend la tangente si vous voyez ce que je veux dire… Les cortèges du vingt et un juillet, les motards pour la visite du Président français et, pour Jacqueline, rien d’autre que des haussements d’épaules et des questions idiotes – elle prend une voix de fausset – « Avez-vous un signalement ? Savez-vous s’ils étaient nombreux ? » Tout ça pour dire qu’ils ne savent rien et que…
L’arrivée providentielle de Marc Wilrock, l’ingénieur du second, cinquante-deux ans, la mise impeccable, la serviette sous le bras, le regard pointu sous d’épaisses lunettes noires, permet aux Crayon de fausser compagnie à la volubile Madame Pernelle. En marchant d’un bon pas, ils traversent précipitamment la place pour échapper à la furie…
– Regardez Monsieur Marc, voyez ce qu’ils ont osé faire…
Et c’est reparti ! Elle prend l’ingénieur par le bras. Ce dernier laisse tomber son calepin, le ramasse mais il ne peut résister aux foudres de l’imprécatrice !
– Tout ça, c’est la faute des politiques, nous le savons bien ! Lors des campagnes électorales, les policiers sont plus nombreux dans le quartier et le bourgmestre multiplie ses plans de sécurité ! Mais entre deux élections, adieu la milice et vivent les bandes de pourris !
Le ciel s’est obscurci et un vent léger vient hérisser plus distinctement encore la chevelure rousse de Jacqueline Pernelle. Il y a un attroupement autour des jonquilles défuntes comme si un accident venait de se produire : Fabien Raille, fondé de pouvoir au Crédit foncier… « Mais bon dieu quelle idée saugrenue ! » ; Denis Crèvecœur, le boucher : « On commence par couper des tiges et on finit par trancher des cous ! » ; Francine, la veuve de Coppée, le pharmacien : « Tiens ! Voilà autre chose maintenant, ça nous change des pédophiles … ». Valentine Choiseul, la coiffeuse : « Viens voir, Lara, le bouquet final ! Mais viens donc je te dis ! ».
Lara, la fille de Valentine, hausse les épaules en mâchant son chewing-gum aux cerises. Cheveux blonds coupés à hauteur de nuque, yeux noisette, mince d’un long dégraissage diététique, le jean décoloré, en sandales à larges lanières… Lara, qui jette sur le monde des yeux de génisse, indifférente au spectacle du quartier, qui vote écolo pour mettre son père en boule, lui qui chante l’Internationale à chaque congrès du parti socialiste… Lara qui se fout de tout sauf des parties de baise avec un flic pas comme les autres et dont elle pourrait bien être amoureuse : Julien Roos, adjoint de Théodore Saint-Loup, commissaire en chef de la police de Bruxelles.
– Faudrait téléphoner…
– Mais à qui Madame Francine, à qui ?
– Ben, je ne sais pas moi, téléphoner…
Jacqueline Pernelle fait un tour sur elle-même comme pour souligner son exaspération.
– Si vous croyez que j’ai attendu le désastre d’aujourd’hui pour sonner la cavalerie !
– Tiens, elle est en pantoufles, chuchote le boucher à l’oreille de Fabien Raille.
– Il n’y a que la pluie qui pourra la faire taire.
– Mais vous invoquez les forces d’en haut, mon cher fiscaliste, glousse Marc Wilrock en tendant négligemment la main pour effacer quatre gouttes.
Un ciel plombé couvre la scène comme s’il était aux prises avec des larmes habilement retenues puis, un crépitement régulier rompt l’ordre de la cérémonie improvisée. On lève le nez, on se raidit un peu devant l’averse, on se disperse dans un désordre d’urgence.
– Tu pourrais en parler à Julien, fait Valentine en rentrant dans son salon de coiffure aux quatre chaises occupées : « Odette, vous commencez la coupe de Madame Benoît, Julienne, vous faites les mèches de Madame Genville, Cécile, le coup de peigne de Madame Octave… ».
– C’est vrai tout de même…
– Tout de même quoi ? fait Lara.
– Moi, ce que j’en dis, mais ton Julien, il faudrait bien qu’il serve à quelque chose.
– Arrête, maman, tu l’as vu deux fois et il faut déjà que tu le pourrisses !
– Tout va bien Madame Benoît ? s’empresse la coiffeuse, le jabot haut et la bouche en cul de poule, ondulant de la blouse blanche comme si elle n’avait rien entendu.
L’averse est drue et le vent s’est levé. Les marronniers dégouttent de tout leur jus, les allées saturées repoussent l’eau dans des rigoles de fortune. « Il n’y a plus de printemps », maugrée Jacqueline Pernelle en saisissant son balai. « Et bonjour les pluies acides ! Dans quelques mois, il n’y aura plus de feuilles, plus de marrons, plus rien. ».
En quelques minutes, le square Marie-Louise avait pris son étole grisâtre et boursouflée. La concierge avait sonné la retraite, fonçant dans la salle de bain pour sécher sa lourde tignasse rousse. De la fenêtre, elle pouvait voir le triste spectacle d’un jardin dévasté. De retour dans la salle de séjour, elle ouvrit la porte du bar. Un verre et une bouteille de whisky l’attendaient en permanence, pour les coups durs, pour les coups de blues, pour les coups de sang.
Le verre à la main, elle détailla les jonquilles blessées dans les flaques brunâtres. Son esprit nouait d’étranges fils qui se détachaient d’elle en permanence… « Les couper, peut-être, mais les piétiner »… Quand elle était adolescente, elle flirtait avec Alex, un jeune voyou du quartier du Midi. Une nuit, il l’avait amenée jusqu’au jardin du directeur d’école. Entré par effraction dans la propriété, il avait saccagé un rosier à coups de machette, rien que pour se venger d’une récente humiliation. Jacqueline avait protesté pour la forme mais les mains du garçon avaient eu raison de ses réticences. C’était il y a longtemps. Et puis il s’agissait d’une vengeance… Mais ici, qui serait assez fou pour labourer du pied le bouquet des beaux jours ?
Julien Roos leva le pied. Sa berline noire avait franchi les barrages de la fin de journée. La radio débitait les infos habituelles : « Bagdad, vingt-cinq tués… La Chine à la conquête du monde, les élections françaises… » Il sourit en pensant à la petite Lara qui devait l’attendre et il se mit à la dévêtir dans un grand fantasme de chasseur ! D’un geste machinal il saisit la petite boucle en or qu’il portait en permanence à l’oreille droite, au grand dam de son chef, Théodore Saint-Loup ! Il l’entendit lui reprocher : « Roos, la police n’est pas un claque et quand je déciderai de remplacer les ampoules du couloir par des néons roses, je vous sonnerai ! »
Il faisait calme, rue du Marché-au-Charbon, et seuls les coups de tonnerre du commissaire Saint-Loup défrayaient la chronique de ce début de printemps.
Chapitre 2
Théodore Saint-Loup passe en revue son râtelier de pipes ; la plus courtisée d’abord, polie au carré de flanelle comme la patte d’oie d’un guéridon, acquise à Cogolin, au cœur de la garrigue ; une autre, verte celle-là, au fourreau serré et au jabot en tulipe, cueillie sur un plateau de la Cordillère des Andes ; et puis la plus rapprochée, au corps tourmenté, fille rugueuse de la vallée de la Semois ; sa préférée enfin, une pipe longue et fine dont il caresse le corps du bout des doigts comme la peau de Rim, avec une volupté et une passion à peine contenues… Un cadeau de Thérèse à son retour de Londres !
Il lève la tête avec