Laissez venir à moi les petits enfants
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À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTRICE
Journaliste et diplômée en Lettres, Frédérique Nguyen-Huu prend la plume pour nous offrir "Laissez venir à moi les petits enfants", son premier roman publié.
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Aperçu du livre
Laissez venir à moi les petits enfants - Frédérique Nguyen-Huu
Mardi 7 mars, 15 heures
Aujourd’hui, c’était une chauve. Ici, la monstruosité tenait au genre. Difficile de se concentrer comme d’empêcher son cerveau de vagabonder sur ce qui pouvait être à l’origine de ce crâne exagérément clairsemé : chimiothérapie, surdosage de teinture ammoniaquée ou tout bonnement, la faute à pas de bol ? À l’exception de deux petites zones encore dotées de quelques cheveux filasse, son interlocutrice avait, bel et bien, le crâne glabre. Qu’elles s’affichent ostensiblement, comme aujourd’hui, ou qu’elles cherchent à se dissimuler, aucune des monstruosités de la vie ne lui échappait. Elle n’en ratait aucune, pas même les plus infimes, les invisibles au plus grand nombre. L’aurait-elle voulu, elle ne pouvait les manquer. Leur manifestation avait tout d’une agression, minuscule ou monstrueuse, quel que soit son type, toute bizarrerie ne lui apparaissait jamais autrement qu’en lui sautant au visage. À chaque confrontation, c’était le même scénario. Son esprit cherchait à s’en arracher tandis qu’attirés par l’étrangeté comme par un aimant puissant, ses yeux ne parvenaient à s’en détacher qu’au prix d’incommensurables efforts. Alors, une lutte s’engageait pour chasser le flot de questions que suscitait l’anomalie. Quel défaut de vision pour des verres si épais ? Pourquoi une telle épaisseur de fond de teint ? Aujourd’hui, le problème n’était pas mince. L’entretien s’annonçait laborieux face aux crins clairsemés et jaunasses qui subsistaient sur le crâne de la nounou. Mais pourquoi ne se rase-t-elle pas le peu qui reste ? Une perruque ferait bien l’affaire. Voilà les questions qui repartaient.
Elle aurait mieux fait de commencer par les parents qui, depuis qu’elle avait rencontré cette femme, l’intriguaient grandement. Pour confier un gosse à cette bonne femme, il ne fallait pas être regardant. Lisa ne savait que trop combien il était difficile de trouver un mode de garde. Sa sœur, mère de famille accomplie et communicante parisienne à succès, ne lui ayant jamais épargné les détails de ses déconvenues dans ce domaine. Son aînée n’avait donc rien exagéré dans le récit de ses malheurs. Il fallait en effet que le marché soit tendu pour qu’un père et une mère choisissent de s’en remettre à Annie Prisseux, son maintien flasque, sa tenue plus que négligée et le manque de propreté de son appartement. Pour tenter de balayer de ses pensées ce cuir chevelu et les auréoles du canapé hésitant entre l’orangé et le marron clair, Lisa prend une grande respiration. Puis, après une pause d’une durée plus ou moins contrôlée dont elle est coutumière, elle reprend la parole pour résumer la situation.
Ses sanglots redoublent pendant que Lisa finit de résumer la situation. Après un dernier tour rapide de ce logement social parisien, exigu et crasseux, où s’entassent chaque jour Annie Prisseux, trois enfants, ainsi que deux horribles chiens au pelage irrégulier et parfaitement assorti à la couleur du canapé, elle quitte non sans soulagement l’appartement.
En sortant de l’immeuble, Lisa se dirige vers la rue de la Croix. Là, elle s’assied sur un des bancs. C’est vite vu. Comment l’enfant a-t-il pu échapper à la surveillance de Prisseux ? Le square tient dans une parcelle rectangulaire d’à peine 200 mètres carrés prise entre trois immeubles. Une grille plus rouillée que verte et de maigres buissons le séparent de la rue. À côté de la porte, une petite cahute en bois et, au centre, plantés sur un sol en plastique mou, un mini-toboggan et des animaux sur ressort. Ces interprétations ludiques, mais ratées du crocodile, du castor ou du canard en bêtes à bascule ultracolorées ont dû en effrayer plus d’un… Des bancs, verts bien sûr, sont disposés autour des jeux et dans l’angle gauche, une petite fontaine. Bientôt, un cortège de trois poussettes fait son entrée dans les lieux. Aussi longues que larges, elles ploient sous un chargement mêlant sacs et marmots. Le timing est respecté : il est presque 16 heures. Une petite dizaine de gamins et trois femmes qui les accompagnent prennent possession de l’espace. Les plus grands enfourchent les animaux tandis que les nounous se posent sur les bancs à côté des cargaisons roulantes qu’elles viennent de garer. Restés dans les poussettes, les plus jeunes ne tardent pas à manifester leur impatience. Les grognements se font cris puis pleurs, s’arrêtent quelques secondes, avant de reprendre. Les larmes succèdent aux hurlements et, ainsi de suite. Rien n’y fait, même les appels les plus stridents restent sans effet. Ils ne sont pas extraits de leurs sièges. On les calme à coup de biscuits, quignons de pain et petits jouets en plastique. Léchés, triturés, jetés à terre non sans violence parfois, ces objets ou denrées sont inlassablement ramassés et rendus aux petites mains, qui de même que les contours de bouches, prennent peu à peu la teinte grisâtre des gravillons poussiéreux qui composent le sol. Ce manège conduit d’une main distraite se fait en parallèle des conversations téléphoniques et discussions entre collègues dont le niveau sonore se module en fonction de celui émanant des chariots. Les plus grands ne se sont pas attardés sur les monstres à ressort et, s’arrosent, à présent, à l’aide d’une bouteille en plastique crevée ramassée sous un buisson. Son contenu se vide presque entièrement au sol avant d’atteindre ses cibles, mais le jeu semble plaire. Deux jeunes filles s’assoient sur le banc resté vide à côté de celui de Lisa. Rivées sur l’écran d’un portable, elles rient en regardant ce qui semble être des vidéos, tandis que les trois vieux assis en face se lèvent pour partir. Rien de particulier. Des retraités, des ados, des petits et des tout-petits dans un square parisien à l’heure du goûter, pense-t-elle en quittant les lieux.
Les parents d’Hector habitent à quelques pas dans un immeuble haussmannien plus cossu que la plupart des bâtisses de ce quartier populaire à tendance bobo. Deux coups de sonnette. Plusieurs minutes d’attente. À nouveau, un coup avec une pression du doigt un peu plus longue et marquée. Finalement, Marie Warrière ouvre la porte. Lisa se présente. La jeune mère l’invite à entrer et la fait asseoir dans la pièce située dans le prolongement de l’entrée. Un salon de rêve, digne d’un magazine de déco. Lumière, hauteur sous plafond, harmonie des teintes, vastes canapés et, posés dans un « ça et là » très étudié, quelques beaux objets. Tout est à sa place. On est loin du désordre et de la crasse de chez Prisseux. Lisa observe l’espace, la femme qui lui fait face. Les marques sous ses yeux, certainement liées à l’angoisse et au manque de sommeil, ne parviennent pas à enlaidir cette blonde, au visage doux, d’un ovale fin et régulier, éclairé par des iris d’un bleu froid et clair de glacier.
Après la chauve, c’est un véritable soulagement. Lisa demande à faire le tour de l’appartement. Partout le même ordre et un style épuré sans faute de goût. Jouets en bois, cubes et livres cartonnés, rien ne retient son attention dans la chambre d’Hector. Les deux femmes retournent au salon. S’asseoir sans se vautrer dans ce canapé bas, à l’assise très large, lui demande pas mal de concentration. Tout dans le maintien de son interlocutrice, cette façon de croiser les jambes et de garder le dos droit sans paraître rigide, trahit son appartenance à la grande bourgeoisie. Pas vraiment à son aise dans ce décor trop parfait, carnet sur les genoux et stylo en main, Lise écoute la mère d’Hector.
Marie Warrière lui raconte comment Mme Prisseux lui a appris la nouvelle. Lisa l’interroge ensuite sur leur vie quotidienne, leurs habitudes, avant d’orienter ses questions vers la nourrice. La chauve est-elle fiable ? N’ont-ils jamais eu de problème avec elle ou entendu parler d’un incident par d’autres parents ? Depuis quand s’occupe-t-elle d’Hector ? Ça fait maintenant près d’une heure que Lisa questionne la jeune mère. Malgré quelques brefs sanglots et une respiration qui peine parfois à retenir des montées mêlant angoisse et chagrin, elle répond cependant de façon claire et structurée à ses questions. À l’évocation de la nounou, l’ensemble s’émousse un peu, son ton perd de son calme, la partition dérape.
Lisa opine tout en continuant de noter les éléments susceptibles d’orienter ses recherches. Tout semble si logique, simple et bien rangé dans l’esprit comme dans la vie de cette femme. Absolument l’inverse de sa boîte crânienne pour le moins bordélique. Elle lui demande de la prévenir dès que son mari aura pu quitter New York, où il est bloqué par la tempête qui paralyse depuis quarante-huit heures la Côte-Est des États-Unis. Marie acquiesce. Puis, elle lui donne les coordonnées de ses beaux-parents et parents auxquels Hector est régulièrement confié.
Lisa est un être aléatoire. C’était ainsi. Elle n’y peut rien. De là, vient certainement son admiration pour ceux qui, comme Marie Warrière, possèdent une tête bien ordonnée. Ceux que guide une résolution sans faille, ceux capables de dérouler un discours logique sans pause ni hésitation. Ceux qui, comme sa sœur et ses parents, savent sans jamais tergiverser, ce qu’il est bon et juste de faire. « Du chaos naissent les étoiles ». Elle avait fait sienne cette citation, trouvée au hasard d’une lecture dont elle s’était empressée d’oublier l’auteur. Peu importait. Là n’était pas la question. Elle se retrouvait dans cette phrase, qui la rassurait, non sans l’inquiéter aussi un peu. Ses étoiles, c’étaient les idées qui, sans qu’elle sache comment, naissaient du grand bordel de son esprit et de sa vie et qui lui permettaient de résoudre des affaires généralement assez peu jolies, voire pour certaines parfaitement sordides. Quand elle prenait le temps, ce qui lui arrivait plutôt rarement, d’une petite introspection, elle se demandait s’il ne fallait pas trouver dans le désordre et l’indécision qui la caractérisaient, la raison de sa fascination pour l’ordre et la beauté, de même que son inconfort face à tout ce qui pouvait venir les troubler.
Pour regagner son bureau sur les quais, Lisa choisit de marcher. Ça ne prendrait pas beaucoup plus qu’une grosse demi-heure. Et puis, elle tenterait pendant le trajet de trier un peu tout ça, de réfléchir à ce qu’elle allait dire à son équipe.
Mardi 7 mars, 17 heures 30
Paul était parvenu à battre le rappel, comme elle le lui avait demandé au téléphone alors qu’elle regagnait leurs locaux. Son équipe au complet l’attendait autour des tables de la salle de réunion qu’ils avaient aménagée sur le palier desservant leurs bureaux. Ici, comme dans toute administration parisienne n’ayant pas encore opéré sa réimplantation dans la petite couronne, le manque de place se faisait cruellement sentir. Avec trois bureaux et ce qu’ils appelaient leur salle de réunion, Lisa et ses hommes s’en tiraient mieux que nombre de leurs collègues, contraints de s’entasser parfois jusqu’à cinq dans une seule et même pièce. Les gars se partageaient deux pièces en soupente chacune dotée de deux tables et deux chaises. Que demander de plus ? Également niché sous les toits, son bureau à elle tenait tout à fait du cagibi. N’était son ouverture, à peine plus large qu’une meurtrière, c’était l’exact pendant du placard à balais et produits d’entretien qui lui faisait face. Lisa et ses hommes vivaient ici, à l’écart du centre névralgique de la fourmilière. Le gros des équipes était logé aux 2e et 3e étages du bâtiment principal. Quant aux bureaux des grands chefs, on les trouvait à l’étage noble. Ils étaient même agrémentés, pour le haut du panier, d’une porte-fenêtre ouvrant sur la cour d’honneur de ce bâtiment empreint d’histoire, mais conçu pour répondre à des exigences autres que celles de la police parisienne. Lisa, qui goûtait peu la vie en meute, ne détestait pas cet isolement. Ses hommes en souffraient. Ils s’en plaignaient à chaque fois qu’il leur fallait se rendre aux toilettes et pour se faire, descendre un étage et traverser dans son entièreté la salle de lecture du service des archives et de la documentation. Pour elle, c’était pire. Atteindre les toilettes des femmes nécessitait de descendre non pas un, mais deux niveaux et de longer quasiment jusqu’au bout le couloir desservant les onze bureaux de la scientifique.
Comme demandé, les garçons l’attendaient. À son arrivée, ils sortent de leurs bureaux et prennent place en silence face au tableau plus gris clair que blanc qui orne le seul mur plan de leur palier.
Cet échange illustrait à merveille l’atmosphère qui régnait dans son équipe qui n’en était pas une. Comme auraient dit les coaches des séminaires annuels de « management » que la police payait à ses « leaders » : il faudrait travailler le « team building ». Appliquer les méthodes qu’on leur débitait lors de ces formations sous forme de graphiques colorés et d’exercices pratiques, à grand renfort de mauvais anglais, elle n’y avait jamais songé, pas plus qu’à « libérer la parole ». Elle assumait parfaitement son côté rétrograde et continuait de penser que les équipes se soudent dans les méandres des affaires les plus épineuses. D’ailleurs, elle souhaitait bien du plaisir à quiconque tenterait de réduire les antagonismes existant entre les mecs formant son unité. Fallait-il même le souhaiter ? Elle en doutait.