Explorez plus de 1,5 million de livres audio et livres électroniques gratuitement pendant  jours.

Seulement €10,99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Egoheim - Tome 1
Egoheim - Tome 1
Egoheim - Tome 1
Livre électronique1 037 pages7 heuresEgoheim

Egoheim - Tome 1

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Egoheim, roman de fantasy contemporaine, allie habilement la technologie moderne avec les mystères de la magie ancestrale. L’histoire suit le périple d’Azazel, un enfant du désert arraché à son village natal, qui se voit confronté à la tâche de vaincre un mal ancestral en traversant un monde étrange et inconnu. Au cours de cette première partie captivante, Azazel pénètre dans d’imposantes cités fumantes et empreintes d’angoisse, où il devra maîtriser l’art du combat pour percer les énigmes mystérieuses qui se dressent devant lui.


À PROPOS DES AUTEURS

Victor Rawecki & Florian Verzele sont deux jeunes esprits créatifs qui publient leur tout premier livre. Avec l’un attelé à la rédaction et l’autre complémentant l’intrigue et le travail créatif du premier, l'écriture devient un travail d’équipe enrichissant et passionnant pour eux. Ayant baigné dans les histoires de science-fiction et de fantasy de leur enfance, ils veulent créer à leur tour un monde où leurs lecteurs pourraient se perdre et découvrir une histoire riche en émotions.




LangueFrançais
ÉditeurLe Lys Bleu Éditions
Date de sortie16 oct. 2023
ISBN9791042202521
Egoheim - Tome 1

Auteurs associés

Lié à Egoheim - Tome 1

Titres dans cette série (1)

Voir plus

Livres électroniques liés

Catégories liées

Avis sur Egoheim - Tome 1

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Egoheim - Tome 1 - Victor Rawecki

    Prologue

    Doux brasier, grand incendie

    Aujourd’hui encore, comme tous les jours, le désert était brûlant et interminable. Le sable fin volait au fil du vent. Les cactus, enracinés là depuis des années, n’avaient pour seule compagnie que les rochers grisâtres à la surface brillante et dépolie par ce même zéphyr ardent, servant parfois de refuge aux souris des sables.

    Cependant, aujourd’hui n’était pas tout à fait un jour comme les autres.

    Le désert comptait en son sein un nouveau venu, un « grain de sable », noyé parmi l’immensité des autres. Si le désert avait pris la peine de s’y intéresser, il aurait pu observer un enfant jeune qui marchait, droit, la tête baissée, aux portes de la mort. Son état était pathétique : il ne restait de ses vêtements, qui avaient autrefois dû être beaux, que des lambeaux. Sa peau, cuivrée par le soleil des contrées de l’Ouest, était toute boursouflée et rougie par les coups de soleil, et la sueur dégoulinait de ses cheveux roux. On pouvait difficilement savoir depuis combien de temps il était ici, car malgré sa déshydratation avancée, il tenait encore debout, flageolant.

    Il tomba une première fois tel un arbre qui s’écroule lors d’une tempête, son énergie fauchée en un seul coup.

    Les vautours qui le suivaient s’agglutinèrent au-dessus de lui, formant un nuage d’ombre inattendue, comme si le désert avait eu pitié de lui. Lentement, l’enfant se releva, profitant de ce répit, et reprit sa marche vers le rien, les yeux recouverts de sable sec.

    Comme si le destin n’était pas déjà assez cruel, il se prit une masse de plein fouet et s’écroula pour la seconde fois, dos contre terre.

    Se relevant, il s’aperçut qu’il avait heurté une porte. Une… porte ? Une petite roulotte en bois se tenait devant lui. Était-elle déjà là avant ? Il n’avait pas dû la remarquer. L’œil unique du ciel le torturait de plus en plus. L’enfant ne comprit pas ce que cette roulotte faisait là. Peut-être était-ce la façon de traverser la porte vers le royaume des morts. Peut-être n’était-il plus. Tout le poussait à ouvrir cette porte. Lentement, ses doigts glissèrent sur la poignée.

    Un clic se fit entendre. L’enfant entra et ferma la porte derrière lui, il sentit immédiatement l’air frais sur sa peau brûlée par le soleil. Une douce odeur d’herbes mystérieuses et de nourriture chatouillait ses narines. On entendait distinctement le bruit d’une averse tombant désormais à l’extérieur. Au milieu de la pièce, un doux brasier répandait lumière et chaleur. Une bibliothèque recouvrait tout un pan de mur. Fasciné, l’enfant s’en approcha, cette petite roulotte était féerique. Mais il n’avait pas touché un livre qu’un bruit venu d’une autre pièce le fît sursauter. Il sentait une chose de l’autre côté… quelque chose de si familier, qui le mettait si en colère…

    La tête d’une femme d’âge mûr dépassa soudain de l’encadrement de la porte. Le sentiment de l’enfant disparut immédiatement. Le voyant, elle s’écria :

    — Oh ! Tu es plus jeune que ce que je ne pensais.

    Il ouvrit la bouche pour répondre, mais aucun son ne s’échappa de sa gorge meurtrie, trop sèche pour parler. La femme se rapprocha de l’enfant, qui recula.

    — N’aie pas peur. Je ne te veux aucun mal, bien au contraire ! Mon nom est Hel.

    Hel lui fit un sourire puis lui tendit la main. À demi convaincu, il l’agrippa. Était-ce la mort venue le chercher ?

    Sa poigne était froide comme la mort. L’enfant sursauta en retirant sa main.

    En voyant sa surprise, Hel sourit encore plus largement, puis replia le bras. Serrant son membre contre son torse. L’enfant dévisageait à présent la femme avec un mélange de peur et de dévorante curiosité.

    C’était une femme à la chevelure imposante, blonde et blanchie par l’âge. Elle portait une tenue simple qui ne laissait voir d’elle que ses mains et son visage. Sans cesser de sourire, elle commença à déposer ses doigts sur la peau craquelée de l’enfant. Comme sous l’effet d’un charme magique, il ressentait une incroyable sensation de bien-être, mais aiguillée par une pointe de malaise. Quand elle eut fini, elle se leva et partit dans l’autre pièce quelques secondes, avant de revenir avec un plateau rempli de nourritures inconnues pour l’enfant.

    — Je te conseille de manger tant que c’est chaud.

    Hésitant, il attrapa premièrement le pichet d’eau désaltérant sa gorge aussi sèche que le sable. Le breuvage lui faisait un bien fou. Puis, guidé par son instinct de survie, agrippa un met au hasard, le porta à sa bouche et le goûta. La saveur était… si étrange… L’enfant finit par décider que c’était bon et avala goulûment le reste du plateau.

    Une fois terminé, il sentit un sang nouveau lui couler dans les veines. Hel s’approcha de nouveau et lui tendit une feuille et un crayon.

    — Tu sais écrire ? Tu pourrais écrire ton nom puisque tu ne peux pas le dire.

    Il attrapa le crayon et le regarda d’un air ahuri. Hel eut comme un geste d’agacement.

    — Je sais que tu comprends ma langue : tu as mangé quand je te l’ai dit, alors, écris.

    — …

    L’enfant se tordait la gorge à deux mains, essayant de faire sortir un son de sa gorge mais rien ne lui venait.

    — C’est inutile de t’acharner ainsi, il te faudra encore quelques jours.

    L’enfant se calma. Il se demandait pourquoi cette femme était si gentille à son égard, lui qui n’était qu’un pauvre chien galeux perdu entre les sables.

    — Allez savoir pourquoi Surt a choisi un hôte comme celui-là…

    L’enfant eut un air surpris. Hel avait soudainement une expression moins joyeuse et plus… terne.

    — Désolée, il m’arrive de dire n’importe quoi… Je suppose que tu es fatigué, il serait temps de dormir.

    Le son de sa voix était d’un coup irrésistible… L’enfant glissa et se laissa tomber sur la couchette, déjà à moitié endormi. Alors qu’il basculait dans les bras de Morphée, il put vaguement entendre une phrase.

    — J’ai besoin de ton nom… Surt quel monstre tu fais d’avoir choisi un enfant.

    Dans le désert, on ne trouvera jamais cette roulotte en bois, comme cet enfant d’ailleurs à la grande tristesse des vautours aux environs.

    Bien plus loin de là, en bordure du désert, c’est un garde qui trouva l’enfant endormi dans les bois, alerté par le bruit sourd de sa respiration.

    — Un enfant ? Je me demande comment il est arrivé ici.

    L’homme s’empressa de le mettre sur son dos quand il constata l’état affreux du petit. Le jeune enfant dormait mais ne se reposait pas pour autant, se serrant la poitrine de douleur, dans son triste sommeil.

    Partie I

    Chapitre 1

    La joie des temps présents

    Les rayons du soleil tapaient doucement le désert et ses environs, du plus petit des grains de sable au plus large des toits.

    Près d’un charmant bois en bordure du désert, un rustique village se remplissait de bruits joyeux, de cris enthousiastes et de musique douce. Aujourd’hui c’était le grand marché : chaque adulte ici avait une tâche précise et les enfants jouaient entre les étals en s’émerveillant sur chaque marchandise.

    Ce village fut celui qui accueillit cinq ans plus tôt l’orphelin du désert. Celui-ci avait bien grandi depuis la dernière fois. Sur ses lèvres, un léger sourire flottait en permanence, sa crinière roux flamme recouvrant sa peau sablée lui ajoutait une certaine prestance et de ses doux yeux émeraudes s’échappait une étincelle de dynamisme. Du haut de ses 17 ans, les travaux manuels avaient bien forgé son corps. Et il n’était plus le frêle enfant d’autrefois. Il avait été recueilli par un couple d’anciens du village. Au début, il avait eu du mal à s’intégrer mais maintenant il faisait partie lui aussi du village, avec sa famille et ses amis.

    C’est dans ce cadre de vie, il était installé à un établi avec un de ses nombreux amis : Cassandre, un jeune homme du désert aux courts cheveux bruns bouclés avec un constant air malicieux sur le visage. L’orphelin travaillait à la confection d’un arc tandis que son ami s’amusait de le voir essayer sans jamais réussir.

    — Ahah Azazel, c’est plus une canne à pêche qu’un arc, ça !

    — Désolé… J’ai du mal avec les armes…

    — Ah ça non ! La dernière fois, la hache que tu as forgée a impressionnée le forgeron. Encore heureux en tant qu’apprenti bûcheron.

    — Un arc et une hache, ce n’est pas la même chose.

    Azazel se frotta la tête, gêné, Cassandre ricana du malheur du rouquin, tout en restant bienveillant bien sûr. Puis dans tout le brouhaha, il crut entendre quelqu’un prononcer son nom. Il se retourna : c’était la doyenne du village, sa mère adoptive.

    — Azazel ! Tu veux préparer le repas avec moi ?

    — Bien sûr j’arrive !

    Azazel rendit l’ébauche d’arc à son ami et le salua.

    — Tu pars déjà ? N’oublie pas pour ce soir hein !

    — Ne compte pas sur moi pour rater une fête pareille. A plus !

    Le jeune homme couru pour serrer l’ancienne dans ses bras. Celle-ci se mit à rire, sentant les muscles de son fils la broyer d’amour. La doyenne était une petite femme âgée portant un grand panier en osier rempli de denrées achetées au marché. Elle avait de longs cheveux gris légèrement recouverts d’un foulard coloré attaché à une longue robe de couleur vive. Elle sourit à son fils de sa bouche dégarnie par l’âge.

    — Eh bien ! Tu m’as l’air en forme aujourd’hui !

    — Toujours quand c’est pour te serrer dans mes bras.

    — Eheh ! Petit coquin va.

    Ils prirent le chemin vers la maison en discutant gaiement, le cœur léger. Leur maison était une des plus riches du village, tout en restant très modeste : une large bâtisse en pierre jaunie. Azazel attrapa le panier de courses et partit tout ranger, tandis que l’ancienne s’asseyait dans le fauteuil un instant, se reposant de son périple entre les étals. Elle admira tristement un vieux dessin représentant une jeune femme embrassant un homme. La doyenne soupira, le souffle emplit de nostalgie.

    — Mère, tu sais… Il m’a toujours dit que ça ne servait à rien de pleurer les morts.

    — Ce qui ne t’a pas empêché de pleurer pendant une semaine.

    La vieille femme se mit à ricaner toute seule tandis qu’Azazel continuait de ranger les courses, faisant le compte mentalement.

    Cette vie calme plaisait à Azazel, vivre avec sa petite famille, ses amis et tout le village. Malheureusement certaines personnes le rejetaient sans aucune raison. Sûrement le fait qu’il soit un orphelin au passé douteux.

    Ce même passé mystérieux qui le torturait. Mais à quoi bon penser au passé quand le présent a tout à nous offrir, pas vrai ? Même si ce flou reste pesant…

    — Tu sembles pensif Azazel, tout va bien ?

    — Oui je vais bien, je me demande juste…

    — Ton passé te trouble encore ?

    La femme âgée se leva lentement pour se diriger vers Azazel, elle lui prit les deux épaules.

    — Combien de fois t’ai-je dit de ne plus y penser ? Tu es bientôt un homme, beau et compétent. Ne te gâche pas en broyant du noir.

    — Merci mère… j’ai tendance à l’oublier.

    Elle secoua la tête avant de sortir un objet d’un petit coffret à thé caché entre deux boîtes de sucre. Cela semblait être une sorte d’amulette faite d’ambre taillé réfléchissant la lumière frappant sa surface d’une façon magnifique.

    — Nous étions jeunes quand ton père venait de devenir bûcheron apprenti, comme toi à son âge. Nous nous aimions beaucoup et il m’a promis que le premier arbre qu’il allait couper seul serait le symbole de notre amour. Nous nous étions donné rendez-vous dans la forêt un midi et je l’observais avec admiration trancher le bois. Il était tellement beau. Je m’attendais à une souche lisse où écrire nos noms dans un cœur, comme faisaient les jeunes avant.

    Azazel était confus, pourquoi sa mère lui racontait tout ça ? La vieille femme semblait heureuse, tout en caressant la surface orange de l’amulette.

    — Mais nous avons trouvé à la place cette magnifique pierre d’ambre. Nous ne pouvions que reconnaître le pouvoir des Dieux constatant la force de notre amour. Il a ensuite passé des semaines à polir cette pierre et me l’a offerte avant notre mariage.

    — Vous ne m’aviez jamais parlé de ça.

    — Oui et ce jour est venu. Nous voulions la confier à notre enfant après que notre amour soit cloué par la dure barrière de la mort, ainsi que notre amour divin serait transmis de génération en génération garantissant leur bonheur. Malheureusement, nous n’avons jamais eu d’enfant par nous-même mais nous t’avons eu toi ! Tu es notre enfant et j’aimerais te donner cette amulette bienfaitrice.

    Azazel était ému par l’histoire de ses parents adoptifs mais à la fois surpris d’un tel présent, lui qui n’avait jamais connu l’amour autre que familial et amical. Il n’eut même pas le temps de protester que sa mère vint la lui mettre autour du cou.

    — Tu es ravissant comme ça ! Ton père serait heureux de voir ça.

    — Je ne sais vraiment pas quoi dire. Mais je suis sûr qu’il nous voit actuellement.

    Le jeune homme serra très fort sa mère pendant de longues secondes, jusqu’à ce que son regard se posa sur le calendrier.

    — Nous sommes déjà le denier jour du marché ?

    — Ah bon ? Je l’avais oublié, Ce soir c’est donc la fête au village.

    — Oh c’est vrai que je dois y retrouver tout le monde ! Préparons d’abord le repas, nous irons dans une petite heure et je te mettrais ensuite au lit.

    — Hehe ! Ne me traite pas comme un bébé.

    Il passa le temps du repas avec sa mère, puis passa le reste de la journée à décorer le village avec ses amis qui le complimentèrent tous pour son nouveau collier.

    Le soir venu, le centre du village était plus qu’animé, rempli de monde et de feux de joie. Musique et festins étaient les maîtres mots ce soir. Azazel laissa sa mère avec les autres anciens et partit rejoindre ses amis. Il croisa Amélie sur le chemin en train de faire la lecture à des enfants. Cette jeune érudite ferma son livre quand elle aperçut Azazel. Celui-ci avait beaucoup d’estime pour elle car elle lui avait appris à lire et à écrire. Elle était plutôt mignonne, un visage fin, de longs cheveux noirs bouclés et une petite paire de lunettes sur le bout du nez.

    — Je pensais que tu allais rester avec les anciens : jeune de corps mais vieux d’esprit.

    — Oh, c’est bon ! Toujours à devoir taquiner les gens, moi aussi je veux profiter de la fête.

    — Ahah, je rigole, ne t’en fait pas. Allons donc rejoindre les autres, je suis sûr qu’ils ont prévu des trucs super pour ce soir.

    Les deux jeunes gens se mirent à rire avant d’être surpris par Cassandre et un groupe de jeunes du village. Le jeune narquois passa son bras par-dessus l’épaule d’Azazel, l’observant d’un œil amusé.

    — Encore en train de flirter vous deux ?

    — Quoi ? Non pas du tout ! Nous étions juste…

    Les garçons s’amusaient à simuler une embrassade pour se moquer gentiment, Azazel ne pouvait que sourire face à cette scène. Amélie était rouge de gêne.

    — Arrêtez avec cette blague, vous la faites à chaque fois…

    — Ahah ! Désolé Amélie, c’est plus fort que nous !

    La jeune érudite alla railler ses amis indiscrets, la scène était plus qu’enfantine.

    Profitant de la zizanie, Cassandre s’approcha d’Azazel furtivement pour lui chuchoter à l’oreille.

    — Nous allons au feu chercher de la chair fraîche si tu vois ce que je veux dire. Tu nous accompagnes ?

    — Je ne fais que vous accompagner, j’ai promis à Amélie de danser avec elle pour la fête. Ne va pas faire peur à toutes les filles du village cette fois-ci.

    — Elles sont juste trop timides pour me dire leurs sentiments. Aller je te souhaite bonne danse « entre amis ».

    — Je te donne trois secondes avant que je ne te jette dans le feu.

    — Ahah ! Non ! C’était une blague !

    Cassandre prit la fuite, Azazel sourit gaiement avant de lui courir après, prêt à lui faire regretter ses paroles.

    Quand le soleil disparut complètement pour faire place à la lune, le groupe d’amis s’agglutinait autour du feu, se mêlant aux autres villageois, dansant pour certains, buvant ou draguant pour d’autres. Tout le monde y trouvait son compte.

    Bien qu’effrayé par l’immense feu, Azazel ne pouvait se sentir qu’heureux, bougeant son corps en rythme de celui de son amie. Son passé restait derrière lui lors de ces moments de joie pure avec ses proches, se disant que, peu importe sa vie d’avant, elle ne pouvait pas être meilleure que celle de maintenant.

    Cela faisait une heure que la fête durait. Les anciens du village étaient partis s’occuper les uns les autres pour laisser les jeunes profiter. Azazel jouait désormais aux anneaux avec deux autres de ses amis, sans grande réussite.

    — Mince encore raté…

    — Ah bah ça tu ne peux pas être bûcheron et agile de tes mains en même temps.

    — Tu verras, je vais en mettre au moins un. Je te parie ce que tu veux que le prochain ce sera la bonne !

    — Eheh on paie un biscuit de ta mère ou un de la mienne.

    — Je prends le pari !

    Le jeune homme prit une grande respiration puis visa d’un œil. Malheureusement, il fut déconcentré par une vieille personne encapuchonnée qui lui tapotait l’épaule. Mais eut cependant le temps de faire son lancer et d’étonnement le réussir.

    — Je vous l’avais dit !

    — Autant pour moi, il semble que tu coupes aussi bien des arbres que je ne lance des anneaux. Tu es demandé, on va te laisser tranquille. Passe demain à la maison pour ton biscuit, on en profitera pour partir à la pêche avec mon grand frère.

    — D’accord, je passerai, passez une bonne fin de soirée.

    Ses deux amis partirent après avoir fait signe, Azazel se retourna vers le nouveau venu un sourire aux lèvres.

    — Vous semblez m’avoir porté chance, je n’ai jamais réussi à mettre le moindre anneau.

    — C’est donc bien Azazel ton nom ? C’est un plaisir de te rencontrer.

    La personne semblait être une vieille femme à la chevelure blond clair et au visage caché. Pris par l’insouciance de la fête, le jeune homme ne se méfia pas.

    — Moi aussi, et vous êtes ? Je ne vous ai jamais vu auprès des anciens.

    — Oh, je ne suis pas si vieille que ça, tu sais. Je suis du voyage et je me suis retrouvée dans ce charmant village. Que dirais-tu d’une danse ?

    — Avec grand plaisir, si je peux rendre une ancienne du voyage heureuse.

    Le jeune homme, enjoué, prit la main de la vieille femme, qui était d’un froid polaire, ce qui lui fit perdre une partie de son engouement.

    — Mais vous êtes gelée ! Vous devriez vous réchauffer.

    — Une bonne danse me réchauffera le corps bien plus rapidement que n’importe quel feu.

    Azazel se mit à rire, admirant la poésie de l’inconnue et commença à valser doucement avec elle. La vieille femme semblait tout de même encore avoir une certaine souplesse et vigueur, cependant cela perturbait quand même un peu le jeune homme de ne pas voir le visage de sa cavalière mais voir son léger sourire fit disparaître toutes ses peurs.

    La fête continua tard dans la nuit. Après sa danse, la vieille inconnue s’en alla après avoir dit à Azazel de profiter le plus possible de la vie. C’était étrange mais le jeune homme l’oublia bien vite et s’amusa encore des heures avant que les premiers rayons de soleil soient arrivés.

    Le lendemain matin Azazel remarqua un problème dans les armoires. Sa mère passait un coup de balai dans la maison.

    — Tu as oublié les épices hier ?

    — Non je ne pense pas… J’étais bien sûre de les avoir prises. Tu veux bien aller me les chercher si tu trouves un étal ?

    — Hier c’était le dernier jour du marché, le marchand d’épices est censé plier bagage dans la matinée. Je vais aller le voir, souhaite moi bonne chance !

    Azazel embrassa l’ancienne sur le front et attrapa la bourse d’argent avant de partir en courant comme un diable.

    Dans sa frénésie, il heurta Amélie et ils tombèrent tous deux à terre. La jeune femme lâcha un petit cri de surprise.

    — Oh, Amélie, je suis tellement désolé !

    — Non non c’est moi j’étais sur le chemin…

    La jeune femme était gênée de sentir la chaleur du solide corps d’Azazel, aussi proche du sien hors contexte de fête. Elle devenait toute rouge, se cachant timidement derrière un de ses livres.

    — S-S’il te, tu peux te dépêcher de me relever, je ne voudrais pas que Cassandre nous voit ainsi.

    — Pourquoi tu n’aimes pas bronzer sur les pavés tel un lézard au soleil ?

    Le jeune homme parlait avec un ton innocent ce qui fit rire la jeune femme, sur certains points il restait toujours un enfant. Ils se levèrent ensemble puis partirent joyeusement vers le marché se vidant de ses commerces. Il ne restait que les vendeurs essayant de finir leurs stocks en bradant leurs prix.

    — Sinon Azazel, je peux te demander quelque chose ?

    — Ahah, c’est toi qui es censée être la tête pensante du village pourtant.

    — Oh, ne fait pas l’idiot ! Juste, je me demandais est-ce que… est-ce que tu es libre ce soir ? Il y aura une comète qui passe dans le ciel et j’aimerais te la montrer.

    — Bien sûr, j’adore les étoiles !

    — Je t’ai déjà dit que ce ne sont pas des étoiles.

    — Désolé j’avais oublié. Mais pourquoi moi spécifiquement ?

    — Eh bien c’est parce que… tu vois, je sais que tu aimes … observer le ciel la nuit.

    Les joues de la jeune érudite passèrent au rouge écarlate. Heureusement, Azazel était trop innocent pour comprendre et ne fit qu’acquiescer.

    Ils discutèrent toujours jusqu’à la grande place. Amélie remarqua immédiatement un étal en particulier.

    — Il a toujours été là cet étal ?

    — Toujours. Tu es sûre que ça va ? Tu sembles… excitée.

    C’était un marchand de bijoux. Amélie restait plantée à regarder les cristaux rutilants, sous l’œil méfiant du vendeur qui avait appris à prendre garde aux voleurs et à gérer ses ventes lors de ses passages dans le village. Étant des fins de série, le prix avait drastiquement baissé.

    — Je vais rester là quelques minutes, tu n’as qu’à partir devant. Moi aussi je veux un collier aussi beau que le tien.

    Azazel partit en rigolant vers la boutique d’épices tout en faisant la bise à la jeune fille lui disant « A ce midi ! », sachant qu’elle allait passer la matinée à jouer avec la joaillerie.

    Le marchand d’épices n’était plus très loin mais il trouva un nouvel étal d’épices plus près. Une forte odeur de lavande lui fit soudain tourner la tête vers une femme à la tête cachée sur le pas d’une petite roulotte.

    — Oh c’est vous ! Je ne savais pas que vous vendiez des épices.

    — Tu sais petit, je suis avant tout une guérisseuse. De quoi as-tu besoin ? J’ai de tout : des fleurs médicinales, des épices orientales, des poisons en tous genres et même de la pommade anti-brûlure, si tu en trouves l’utilité.

    Azazel s’approcha avec légèreté de la roulotte seule dans cette petite ruelle, ne se posant aucune question.

    Chapitre 2

    La genèse du malheur

    Le jeune homme s’arrêta un instant d’être un enfant insouciant.

    La vielle femme semblait inviter Azazel à acheter chez elle plutôt que d’acheter chez son concurrent, à cela rien d’incroyable. Ce qui était étrange était que sa roulotte n’était pas là, lors du marché un jour plus tôt. Cela rendait Azazel méfiant.

    — Vous n’êtes pas une simple femme du voyage ?

    — Je suis aussi une marchande itinérante, ce qui fait de moi une femme du voyage.

    Ne voyant que le bas du visage de cette étrange femme, Azazel ne pouvait donc que voir l’expression de sa bouche qui était d’une neutralité déstabilisante. Mais où était passée la chaleureuse vieille femme d’hier soir ?

    — Eh, ce n’est pas que je ne vous fais pas confiance mais je préfère… soutenir mon épicier local.

    — Mes épices sont trois fois moins chères !

    Le jeune homme commençait à s’éloigner furtivement, sa mère lui avait toujours dit de se méfier des inconnus, encore plus s’ils sont louches. Étrangement ses pas semblaient devenir de plus en plus lourds, plus il s’éloignait de la roulotte, à tel point qu’au bout de cinq mètres, il tomba au sol. Complètement ahuri, il ne savait pas ce qu’il lui arrivait et commençait à paniquer.

    — P-Pourquoi, je ne peux plus marcher ?! S’il vous plaît, madame aidez-moi !

    En se retournant, il vit que la femme le fixait avec la même expression de visage, toujours immobile.

    — Ma… mais qui êtes-vous ?

    — Il semble que j’ai répondu à cette question plus d’une fois.

    Son cœur battait la chamade. Ses membres étaient comme paralysés. Son souffle devint court et irrégulier. Les paupières d’Azazel se faisaient de plus en plus lourdes. Il essaya de crier mais le seul bruit qui sortit de sa bouche ne fut qu’un gémissement presque inaudible. La femme se rapprocha de lui, ses bruits de pas résonnaient dans la boîte crânienne du jeune effrayé.

    — À quoi bon faire preuve de ruse avec les Hommes ? Ils sont si méfiants. J’aurais dû aller droit au but au lieu de tenter un semblant de gentillesse.

    Pris d’un élan de courage et de colère, Azazel bondit sur l’étrangère, quand elle fut suffisamment proche, pour lui asséner un coup de poing. Mais celle-ci lui attrapa le cou en plein vol. Sa main était d’un froid si glacial que le jeune homme ne pouvait plus respirer, avec à sa fatigue, ses bras ne lui obéissaient plus.

    — Je ne comprendrais jamais ton choix de l’avoir pris comme hôte.

    Azazel avait l’impression que son cœur s’était arrêté, il regardait au loin dans l’espoir de voir une personne arriver ! Cassandre, Amélie, sa mère, n’importe qui ! Mais il ne vit rien d’autre que les ombres qui commençaient à s’abattre sur lui, plongeant sa vision dans le noir total.

    Azazel reprit conscience dans le noir et le froid. Il n’arrivait même pas à voir son propre corps tellement l’endroit était sombre.

    — Je… qu’est-ce que c’était ? Où… où suis-je ?

    Il se leva sans grande peine et se mit à avancer à l’aveuglette dans l’espoir de rencontrer un mur.

    Cela faisait déjà deux bonnes minutes qu’il avançait dans le noir quand pris de panique, il s’assit sur le sol complètement effrayé du noir l’entourant, à la recherche d’une échappatoire à cet enfer de ténèbres.

    Qui était cette femme ? Que lui voulait-elle ? Pourquoi s’était-il retrouvé là ? Toutes ces questions tournaient dans la tête du jeune homme avant de commencer à sangloter. C’est un cauchemar ! Rien qu’un cauchemar !

    Soudain, il sentit une incroyable chaleur lui prendre le corps de façon irrégulière et il remarqua que son environnement devenait de plus en plus clair, jusqu’à ce qu’il fût ébloui, l’obligeant à se cacher les yeux.

    Azazel suffoqua comme s’il était au bord de la noyade, il s’immobilisa tout en reprenant son souffle, observant timidement où il était. Le jeune homme se trouvait dans une sorte de roulotte en marche, il pouvait entendre le bruit de sabots des chevaux devant.

    Extrêmement fatigué, il se leva et marcha pitoyablement vers la fenêtre la plus proche. Dehors il ne vit qu’une mer de sable plongeant peu à peu dans la froideur de la nuit.

    — J-Je suis dans le désert ?

    Se demandant ce qu’il pouvait bien faire là, il chercha un moyen de fuir, il vit la porte du cocher puis l’ouvrît prestement, remarquant avec horreur la même vieille femme conduisant calmement sa roulotte.

    Il était curieusement à bout de forces. Pris d’une terrible colère, il commença à insulter l’inconnue, il s’entendit marmonner des provocations qu’il n’aurait jamais prononcées en temps normal.

    — Vous là, espèce de sorcière ! Qu’est-ce que vous me voulez à la fin ? Ramenez-moi chez moi, sale folle !

    — …

    Aucune réponse. Elle continuait à avancer dans le plus grand des calmes sur cette route désertique. Soudain elle tapota la place à côté d’elle invitant Azazel à venir s’asseoir. Il refusa violemment en premier lieu mais l’aura malsaine de cette femme lui ôtait la volonté d’être résistant. Qui sait ce qu’elle serait prête à faire. Il s’assit donc à bonne distance.

    — Je suis désolée, ne va pas croire que je prends plaisir à te faire souffrir.

    — Dites-là, votre raison, que je rigole !

    Elle tourna la tête de façon effrayante, lentement et mécaniquement comme celle d’une momie revenant d’entre les morts. Tellement effrayante qu’Azazel préféra s’abstenir de la provoquer.

    — T’es-tu déjà posé des questions sur toi même auparavant ?

    — Des… pardons, quoi ?

    — Ne te sentais-tu pas différent des autres gens de ton village ?

    — Je ne suis pas originaire de ce village, c’est normal que je sois différent.

    Le soleil était presque couché, le froid commençait à mordre les bras nus d’Azazel, cependant la vieille femme restait impassible au changement de température.

    — Pourtant tu as déjà vu ton village, ne t’en souviens-tu pas ? Ces cauchemars que tu fais à répétition ?

    La peur du jeune homme qui avait disparu revint aussitôt à la charge. Ces cauchemars de village en feu et villageois en combustion tournaient en boucle depuis des années lors de son sommeil. Il voulut sauter de la roulotte mais se ravisa : ce n’était pas le moment de se perdre en plein désert.

    L’étrange femme se mit à pousser un soupir plein de remords, puis pointa l’horizon à Azazel. La vue de la lumière rouge lointaine lui glaçait le sang, était-ce… ? Sachant le risque trop grand, il sauta du banc pour retomber violemment… contre le banc. Il n’avait pas bougé d’un poil, comme téléporté.

    La roulotte arriva à l’orée du village se faisant consumer par les flammes. La vieille femme s’arrêta et poussa Azazel pour qu’il tombe sur le lit de cendres sans se cogner la tête. Il se releva immédiatement, observant avec crainte les édifices en proie aux flammes.

    — S’il vous plaît, dites-moi que c’est encore un cauchemar !

    — Tout ceci est la réalité, ce village est aussi vrai que toi et moi.

    Il se mit à tousser : une fumée épaisse et noire lui emplissait la gorge et lui lacérait les poumons. Un bruit sourd se fit entendre. Il sursauta de terreur pour s’apercevoir qu’une cabane entière venait de s’effondrer devant lui. Il fit un tour sur lui-même. Espérant apercevoir quelque chose. N’importe quoi qui aurait pu le sauver. Il aperçut sur le sol des masses calcinées qui avaient pu être humaines. Une bile amère remonta de l’estomac du garçon.

    — Et tu sais où on est, n’est-ce pas ?

    Azazel mit ses mains sur la bouche pour ne pas hurler. À ce moment précis, il aurait tout fait pour que tout ceci ne soit réellement qu’un immonde rêve mais il sentait que ce n’était pas le cas. La femme s’engagea plus profondément dans le dédale des rues de son rêve. Azazel voulut fuir loin les flammes mais encore une fois il fut comme transporté à son point de départ. Il se retourna prudemment, remarquant Hel tournée vers lui.

    — Dépêche-toi, nous n’avons pas le temps pour ces gamineries.

    Ils marchaient sur une couche de cendres et de débris de plus en plus épaisse, si épaisse que leurs pieds s’enfonçaient dedans. Azazel ouvrit enfin la bouche, ne pouvant pas supporter le crépitement des braises.

    — He-Hel, c’est bien ça ?

    La vendeuse qui n’en était pas une se retourna, les muscles de son visage bizarrement crispés.

    — Ainsi donc tu te souviens… Je n’aurais jamais dû te sauver, il est clair que mon frère a encore une fois joué sur mes sentiments.

    — Mais qui est donc ce frère à la fin ?

    — Surveille ton langage.

    Azazel effrayé fit un pas en arrière mais Hel se rapprocha pour finir presque collée à lui.

    — Ton démon est mon frère, le huitième, condamné à ramper dans les corps des mortels pour avoir voulu la toute-puissance.

    — D-Démon ? Les monstres pour faire peur aux enfants ?

    Hel se retourna sans répondre. Ils reprirent leur marche funeste.

    Ils arrivaient vers une cabane où les flammes montaient beaucoup plus haut qu’ailleurs mais étrangement le bâtiment restait debout.

    — C’est dans cette maison que tu es né, tu sais. Mais ce que tu ne sais pas, c’est que tu es né exactement au moment où l’ancien hôte de Surt est mort.

    — Mais qu’est-ce que vous me voulez à la fin ? Pourquoi me rappeler tout ça ?

    La peur du jeune homme se transformait peu à peu en rage à l’égard de Hel. Tout était si rapide que toutes les émotions passaient en même temps dans son esprit.

    — C’est pour te faire prendre conscience de son existence avant qu’il ne gagne trop de puissance et qu’il réussisse à détruire le monde.

    Hel s’accroupit pour balayer les cendres du sable afin de dévoiler des petites traces de pas enflammées s’enfonçant loin dans le désert.

    — Le feu de naissance de Surt ne peut être éteint qu’à condition que moi et Eir nous unissions pour ceci. À l’heure qu’il est, je suppose que ce trou brûle encore. Pour faire clair, tu es victime de mon frère, et si tu ne veux ne pas trop souffrir, tu dois m’obéir.

    Azazel ne disait plus rien, comme anéanti mais il cherchait en réalité le moyen de se tirer de cet endroit. Soudain, un coup de vent chaud vint découvrir de sous les cendres une très vieille hache de bûcheron. C’est le moment. Sans perdre un instant, vif comme un chat, le jeune homme s’en empara à deux mains. Elle n’était pas très lourde mais sa présence le rassurait. Il avait l’impression de pouvoir compter dessus.

    Hel se releva regardant l’enfant de manière consternée comme si elle savait que cela devait arriver.

    — Pff… Tels sont les humains, impulsifs et stupides.

    Hel resta droite face à Azazel menaçant. De sa main droite, elle fit apparaître une antique faux de laboureur du vide. Elle n’avait pas posé ses doigts dessus que tout son bras droit se mit à fondre et à pourrir, en dégageant une horrible odeur de décomposition. Le jeune homme tremblait de peur, qui était cette sorcière ?

    — Ne rends pas mon travail plus compliqué et pose cette arme au sol.

    — Allez-vous-en ! Vous n’êtes qu’un cauchemar ! Tout n’est qu’un cauchemar !

    Hel brandit son arme d’une façon menaçante, le combat était maintenant inévitable.

    Elle lâcha un coup latéral rapide sur Azazel qui l’esquiva de justesse. Lorsqu’il se releva, il vit que le sol qui avait reçu l’impact commençait à moisir, cette sorcellerie effraya encore plus le jeune homme. Cependant il garda son objectif en tête et chargea, ivre de rage. Hel se rapprocha de lui, menaçante mais Azazel réussit à se retrouver dans son dos suite à un nombre de galipettes rapides à la suite.

    — Mais où as-tu appris à faire ça ? Tu n’es qu’un enfant !

    Azazel n’avait jamais appris ces enchaînements, pourtant il… il les maîtrisait à la perfection. Il voulut porter un coup fatal à son adversaire. Hel se retourna et se protégea avec sa faux qui vint rencontrer violemment la hache dans un cliquetis épouvantable. Le jeune homme tomba à la renverse alors que Hel fut simplement repoussée. Le choc a, cependant, réussi à faire tomber son capuchon, découvrant une imposante chevelure variant entre le blond et le gris, ses yeux violets intenses foudroyaient l’enfant du regard.

    — Ça suffit ! Ne te crois pas maître de la puissance de Surt.

    Elle fit une grimace et plaça sa main gauche devant elle, avant de lancer un petit trait d’ombre qui transperça la tête du garçon à peine relevé. Immédiatement, il s’écroula à terre encore une fois en hurlant de douleur, serrant son crâne à deux mains comme s’il avait voulu le broyer.

    — J’ai beau savoir que tout ceci était prévisible ça ne m’empêche pas d’être triste de l’issue de cette balade.

    Azazel ne répondait rien, ne criait même plus : dans son crâne des millions de cloches sonnaient et lui vrillaient les tympans, l’empêchant de penser clairement. Il ne remarqua pas qu’autour de lui, tout redevenait sombre, et que le sol sous son corps avait changé. Hel marmonna une parole et soudain, la douleur cessa.

    Azazel rouvrit les yeux, encore une fois. Il avait l’impression que l’on venait de lui mettre un coup de marteau en plein sur le crâne. En se relevant, hébété, il s’aperçut que ses vêtements étaient pour la plupart inutilisables : sa tunique était fendue en deux et noircie de tous côtés, ses braies étaient percées par les cendres brûlantes et une de ses chaussures avait perdu sa semelle.

    Deuxième surprise : il était de retour dans la roulotte. Elle ne paraissait même pas brûlée. Dans un coin sombre, Hel était assise à une table, une plume à la main semblant écrire un livre. Azazel s’approcha en courant, ne songeant même plus à l’attaquer.

    — Hel ! Pourquoi m’avoir montré tout ça ?! Pourquoi faites-vous tout cela ?!

    — Pour faire clair, jeune fou, j’ai fait ceci pour limiter les dégâts.

    Azazel commençait à s’énerver, il ne comprenait pas ce que voulait cette vieille femme à part simplement le faire souffrir. Il frappa du poing sur la table, faisant tomber l’encrier sur le sol.

    — Ramenez-moi chez moi je saurais contrôler cette… chose en moi, je ne suis plus un enfant, je n’ai plus besoin de votre aide !

    — Tu ne sais pas ce qu’il y a en toi, idiot ! Je sais ce qui est bon pour toi, alors soit juste sage, d’accord ?

    Hel réfléchit un instant en fermant les yeux, comme si elle venait d’avoir une illumination. Elle attrapa brutalement la main d’Azazel. Un froid mortel la parcourut.

    — Reste juste sage, tu peux te débarrasser de mon frère mais tu ne le pourras pas de façon directe… trouve le docteur, il sera le commencement de ta quête… le docteur trouve-le…

    Azazel reprit connaissance au milieu d’une prairie verte, où l’herbe le dépassait largement. Caché parmi la verdure, il observa le ciel vaciller vers le crépuscule puis pleura longtemps avant que doucement, le courage prenne la place du chagrin dans son esprit. Il se releva, flageolant. La vieille hache qu’il avait saisie tout à l’heure était de nouveau près de lui. Il s’en saisit : elle le rassurait encore une fois.

    Il ne reconnaissait rien de ce qu’il voyait : ni les plantes ni les animaux lui disaient quelque chose. En essuyant ses larmes, il prit une direction un peu au hasard, dos au soleil couchant, et avança sans plus penser.

    Quand il fit trop sombre pour marcher sans risques, Azazel se coucha simplement : il n’avait jamais connu une telle sensation de froid auparavant. Il essaya de se rappeler de ce que disait Hel ; le démon, la quête… le docteur.

    Chapitre 3

    Une nouvelle maison

    Le matin suivant, à l’aurore, un vieil homme se promenait, avançant à l’aide d’une canne jusqu’à ce que celle-ci heurta quelque chose de dur : la tête d’Azazel. Il eut très peur que le garçon soit mort mais il fut vite rassuré en entendant des ronflements discrets. De sa canne, il tapota le crâne du garçon étranger.

    — Wouaaaaaah !

    Azazel avait hurlé tant de peur que de surprise, se réveillant en sursaut, sa hache à la main. Avant de se rendre compte que la chose qui l’avait réveillée n’était qu’un vieillard qui avait reculé de frayeur.

    — Oh… Excusez-moi ! J’ai l’esprit occupé…

    — Je crois que j’avais remarqué.

    Il se rapprocha encore, jusqu’à poser une main sur l’épaule dévêtue du garçon. Azazel repoussa violemment la main de l’inconnu, presque grognant.

    — Une peau mate, c’est si rare par ici ! De quelle région viens-tu ?

    — Je viens du désert… vous sauriez par où c’est par hasard ? Je dois impérativement y retourner.

    Avant que le vieillard pût répondre, le ventre d’Azazel gargouilla distinctement, le vieil homme éclata de rire.

    — Je suppose que te ne verrais pas d’objection à partager ton histoire autour d’un bon repas ?

    — Je n’oserais pas. Je veux juste rentrer chez moi…

    — Pauvre enfant, tu sembles complètement ahuri de ta situation. Ne t’en fait pas, je vais t’aider à retrouver ta maison.

    — V-Vous allez faire ça ?!

    — Ahah, ce n’est pas la première fois que je raccompagne un enfant perdu. Aller vient donc grignoter quelque chose.

    Le vieil homme tapa dans le dos d’Azazel avec un grand sourire aux lèvres, puis il l’invita à le suivre, en parlant de tout et n’importe quoi. Azazel n’était pas confiant mais il ne savait pas où il était, autant faire confiance à ce natif semblant assez amical.

    Au bout de dix minutes, ils arrivèrent devant une petite chaumière à l’orée d’un bois. Le vieil homme ouvrit la porte et invita Azazel à rentrer. L’intérieur était simple : une table, quelques chaises, une multitude d’armes accrochées à un mur, un petit phonographe et une cuisinière dans un coin de la pièce, sans oublier la petite mezzanine à l’étage. Le vieil homme posa son sac sur la table et fit quelques étirements.

    — Ce genre de promenade est mauvais pour mes vieux os, sinon comment tu t’appelles ?

    — Eh, moi ? C’est Azazel… monsieur.

    — Original comme nom, on voit que tu n’es pas du coin ! Et aussi, ne m’appelle pas monsieur : appelle-moi Hörd.

    Hörd s’installa sur une chaise à bascule et remit le phonographe en marche. Une valse lente commença à se faire entendre du vieil appareil.

    Azazel soupira : combien de fois sa mère lui avait-elle dit de se méfier des inconnus ? Hörd s’alluma un cigare puis fit le vide dans son esprit, comme il avait coutume de faire. Azazel en profita pour examiner son hôte en détail, essayant de déceler un éventuel danger chez le vieil homme. Il devait avoir une soixantaine d’années. Sur sa barbe et sa chevelure, quelques mèches dorées venaient rehausser l’argenté. Il portait un costume étranger assez riche mais ce qui intriguait le plus Azazel était une cicatrice bouffie et difforme qui traversait tout son visage en largeur, en passant en plein dans les yeux, yeux que Hörd avait clairs.

    Le vieil homme, comme pris d’une inspiration soudaine, se leva puis se rapprocha d’Azazel.

    — Tu comptes aller couper du bois avec ta hache ? Tu peux la poser, tu sais.

    — Oh oui, désolé.

    Il la posa contre un mur, pas trop loin de lui quand même : sa rencontre avec Hel lui avait appris entre autres que les vieilles personnes n’étaient pas toujours les plus rassurantes.

    Cependant, Hörd continuait à dévisager le garçon.

    — Il faudrait peut-être songer à te rhabiller et à te secouer un peu, par contre. Tes parents ne voudraient pas te retrouver dans un tel état, jeune homme.

    Azazel se rendit soudain compte que tous ses vêtements paraissaient pitoyables et que son visage était sans doute couvert de suie. De honte, il essaya de le cacher entre ses mains, ce qui fit rire Hörd une fois de plus.

    — Malheureusement je n’ai plus de vêtements à ta taille ici depuis bien longtemps, il va falloir aller en acheter en ville.

    — En ville ? Il y a une ville par ici ?

    — Bien sûr, il y a la grande ville de Gimlé, tout près d’ici. Tu as dû en entendre parler, non ?

    — Mais où est-ce qu’on est exactement ?

    — Mmh, je crois que je vais devoir te faire un petit cours de géographie, en plus de tout le reste. Mais en attendant, direction le bain public, ce n’est pas ma vieille bassine d’eau froide qui va rattraper de tels dégâts.

    — Le bain public ?

    Hörd prit un léger manteau en cuir qu’il donna à l’enfant pour couvrir ses épaules et sortit, Azazel sur ses talons. Ils partirent derrière la maison, où une vieille… carriole poussiéreuse les attendait.

    — J’ai oublié mon argent ! Attends-moi près de la voiture, tu veux ?

    Hörd sortit. Azazel en profita pour dévorer ce qui semblait être une voiture de ses yeux : il n’en avait jamais vu de sa vie, est-ce que cette chose roulait vraiment sans bœufs ni chevaux ? L’intérieur était tout sale, tout comme les vitres. Avec ce qui lui restait de manche, Azazel épousseta un peu l’avant et fit tomber par inadvertance un cadre posé sur la boîte à gant comportant une photo. Le ramassant, il s’aperçut qu’elle représentait un jeune homme, une femme dont le visage était invisible et un enfant. Le cadre était cassé et Azazel se mit à prier ses dieux que ce ne fût pas sa faute. Il ne l’avait à peine remis que, déjà, Hörd revenait.

    — Voilà, nous pouvons y aller !

    — Où est-ce que vous voulez m’emmener ? Comment pourrais-je vous faire confiance ?

    — Ahah, pour un jeune homme je te trouve bien méfiant. Ne t’en fait pas, en tant qu’ancien agent des forces de l’ordre, tu peux me faire confiance. Aller monte donc avant que tu n’attrapes froid.

    — Mmh…

    Azazel s’assit timidement sur la place du passager puis Hörd démarra doucement l’automobile et ils partirent. La voiture était vieille, soulevait une poussière monstre en avançant et le moteur vrombissait sans arrêt. Un bon cheval serait allé largement plus vite mais Azazel trouvait ce véhicule inconnu magique.

    Ils se mirent à emprunter de petites routes de campagne avant d’arriver sur une grande route pavée.

    — Azazel regarde là-haut, un zeppelin ! Je suppose que tu n’en as jamais vu de si près.

    Azazel tourna son regard si vite qu’il se fit mal au cou. Dans les cieux, une majestueuse créature en forme d’ogive fendait l’azur créant une immense ombre sur la toute petite voiture. En suivant la trajectoire de l’engin, il pouvait voir des cheminées actives et d’autres de ces machines volantes à l’horizon. Azazel se leva, totalement fasciné par ce paysage imaginaire, quand un petit coup le rappela à l’ordre.

    — Veux-tu bien te mettre correctement sur ton siège ? Ce serait dommage que tu te prennes un caillou en pleine tête.

    — C’est possible ?!

    — Tu me parais bien étonné, c’est la première ville que tu visites ?

    — À vrai dire… oui, c’est la première fois que j’en vois une aussi grande.

    — J’espère pour toi que tu n’iras jamais à Bilskin alors.

    Hörd tourna et ils débouchèrent sur un boulevard. Quelques voitures passaient et un nombre impressionnant de personnes marchaient. L’architecture était aussi totalement différente, des maisons de briques jaunes et rouges aux angles tranchants, agressifs pour les yeux d’Azazel habitués aux petites maisons carrées de chez lui. Le jeune homme commençait à se sentir très mal.

    Ils finirent par s’arrêter à l’entrée d’une place ronde. Azazel remarquait plusieurs commerces sans pouvoir les différencier. Hörd lui tendit un billet. Évidemment, cette monnaie était totalement étrangère au garçon.

    — Les bains sont par là. Pendant ce temps, je vais aller te racheter des vêtements. Quand tu seras habillé, nous chercherons tes parents.

    — Mais je n’ai rien pour vous rembourser…

    — Non, non, pas besoin ! J’ai tellement d’argent que ce serait hypocrite de demander remboursement.

    Hörd partit vers les magasins, laissant Azazel seul au milieu de la place. Il contempla le billet jauni un moment avant de se décider pour la direction indiquée par son hôte, suivant les panneaux « bains publics ». Sur son passage, il avait la désagréable impression que les gens se retournaient vers lui et marmonnaient à leurs voisins. En entrant dans le bâtiment, il passa sans faire exprès devant le comptoir.

    — Excuse-moi ? Tu as l’intention de payer ?

    — Oh, désolé ! Voici, enfin je crois…

    — Ce n’est pas grave, je suppose que c’est ta première fois. Les bains pour hommes sont à gauche et le vestiaire aussi.

    — Merci bien…

    Azazel était confus, c’est un manque de pudeur les bains publics pourtant, non ? Il se dirigea vers le vestiaire, qui n’était rien d’autre qu’une longue salle carrelée où les clients déposaient leurs vêtements sur des étagères avant de s’engager vers les bains. Azazel lut la notice accrochée au mur puis enleva ses « vêtements » pour finalement entrer dans la salle vaporeuse.

    C’était une salle aux proportions monumentales, du moins pour Azazel, pour un habitant de Gimlé c’est plutôt une pièce normale. Elle était toute carrelée de blanc. Creusés dans le sol, les bains étaient tous plus ou moins remplis de monde. Il se dirigea vers le moins fréquenté, faisant de son mieux pour ne pas croiser le regard des occupants. Effleurant avec anxiété la surface de l’eau avec son pied, l’eau était chaude et c’est avec plaisir qu’il finit par s’enfoncer dans la vasque. Conquis par la sensation, il s’immergea tout entier dans l’eau, des orteils jusqu’aux cheveux. Azazel resta un bon moment en apnée, pensif. Pourquoi avait-il atterri dans cet endroit étrange ? Pourquoi le vieux Hörd semblait si gentil avec lui ? Le jeune homme ne pouvait être que confus et décida donc de faire confiance à son hôte. Il aurait bien pu être seul ce qui aurait sûrement été pire pour lui.

    En émergeant au bout de plusieurs minutes, il retira toute la crasse de ses cheveux pour être enfin propre. Quand il retira ses mèches rousses de ses yeux, il s’aperçut que deux jeunes de son âge s’étaient approchés de lui et le regardait avec fascination.

    — Tu es d’ici ? Je ne t’ai jamais vu avant.

    — Non je ne suis pas d’ici, je…

    — Elle est drôlement belle ta couleur de peau ! Comment t’as fait pour l’avoir ?

    — Merci mais je…

    — Et tes cheveux ! C’est marrant, cette orange !

    — Je…

    — Laisse-moi deviner ! Tu viens de la capitale ?

    Beaucoup les personnes de la salle s’étaient dirigées vers lui et lui posaient des questions sans interruption, sans même lui laisser le temps de répondre, jusqu’à ce qu’une détonation brusque les fit tous sursauter.

    Ils se retournèrent : Hörd se tenait à l’entrée de la salle, tout habillé et une pétoire à la main.

    — Oups… Eh. Laissez-le tranquille, il est avec moi.

    — Dé-Désolé, Hörd !

    — On était juste intrigué…

    Les gens s’éloignèrent d’Azazel, qui sortit du bain pour retourner au vestiaire avec Hörd sous le regard fasciné des hommes le voyant comme un objet de curiosité.

    D’une main, le vieil homme lui tendit une pile de vêtements et ils repartirent vers les vestiaires.

    — Ils semblaient tous avoir beaucoup de respect pour vous, dites ?

    — C’est à cause de l’arme… Je t’avoue que j’ai un peu honte, je n’étais pas censé tirer, juste faire semblant… Le coup est parti tout seul…

    Azazel se rhabilla lentement, prenant le temps de détailler ses nouveaux habits : une tunique beige de lin épais, un pantalon court et une paire de chaussures hautes. C’étaient des vêtements de bonne facture, qui en plus d’être résistants lui allaient à merveille et lui plaisaient. La confusion du jeune homme faisait maintenant place à un certain émerveillement.

    — J’ai pensé que tu préférerais une tenue pas trop voyante. Sois heureux que j’aie trouvé ça, sinon c’était le costume trois pièces.

    — Merci, je ne sais vraiment pas comment vous remercier ! C’est quoi un costume de trois pièces ?

    — Ahah, ne dit pas ça, c’est tout naturel.

    À ce moment-là, la porte du vestiaire claqua violemment contre le mur dans un fracas infernal libérant avec elle un léger nuage de poussière.

    Hörd était resté de marbre, tandis qu’Azazel avait fait un bond monumental en couinant. Un nouveau danger ?

    Devant eux, une femme recouverte d’une armure venait de surgir. Son heaume cachait son visage, l’armure était d’acier et de cuivre tout deux extrêmement lourds et solides. Sur le mince amas de tissus qui recouvrait son armure, un symbole de dragon rouge se retrouvait. Dans sa main gantée d’acier, elle brandissait une magnifique lance. Même sans voir son visage, tout dans son attitude indiquait qu’elle était furieuse.

    — Hörd, je te l’ai pourtant déjà dit, non ? Il est interdit d’utiliser une arme dans l’enceinte de la ville ! Tu aurais pu blesser quelqu’un !

    — Tyr, quel honneur ! Pour ma défense, le coup est parti seul. De plus, j’avais une raison valable.

    — Et je serai honorée de la connaître !

    Hörd pointa l’enfant roux du doigt, avant de commencer à s’allumer un cigare le plus tranquillement du monde. Bien que ce soit interdit dans le vestiaire.

    — Hörd ! Tu te lances dans le trafic d’enfants maintenant ?!

    — Je l’ai trouvé dans la plaine. Il dit qu’il ne sait pas comment il est arrivé ici mais il vient de loin.

    — Toi là ! Identité !

    — A-Azazel…

    — Tyr, je sais bien que le devoir prime avant tout mais jusqu’à nouvel ordre nous sommes encore dans le vestiaire des hommes.

    Un soupir énervé sortit de l’armure en même temps qu’une masse de vapeur grise. Elle se retourna avec dynamisme.

    — Bien, sortons dans ce cas.

    Hörd fit signe à Azazel de suivre Tyr. Le jeune homme la suivit jusqu’à la sortie et le vieil homme arriva une minute plus tard en mimant une course au ralenti.

    — Hörd, je vais devoir emmener cet enfant au poste tant que nous ne savons pas s’il est hostile ou non.

    — Ce n’était pas le mot d’ordre de la ville que d’accueillir tous les étrangers ?

    — Ce n’est pas ce que je veux dire : juste que cet enfant ne peut pas rester avec toi !

    — Et pourquoi pas ? Je veux juste qu’il retrouve ses parents.

    — Dans ce cas pourquoi n’es-tu pas tout simplement allé au poste ?

    — Car il était recouvert de suie et ses vêtements complètement brûlés. Mets-toi à sa place un peu.

    Azazel s’était un peu éloigné de la dispute, conscient qu’un amas de passants curieux se formait autour des deux personnes qu’il venait à peine de rencontrer. Soudainement il sentit un souffle froid émaner d’une ruelle, Hel ! Depuis la ruelle une silhouette sombre l’observait bizarrement. Imprudent et curieux de ce souffle, il s’approcha mais la silhouette disparut. En courant, Azazel déboucha dans la ruelle, pour s’apercevoir qu’une personne vêtue d’un large manteau noir était en train de s’enfuir. Il avait lâché un petit appareil où émanait ce souffle froid, lui rappelant la vieille femme, c’était louche.

    — Attendez !

    Azazel se mit à courir après l’inconnu, il savait forcément quelque chose sur lui.

    Sur la place, Tyr et Hörd continuaient de se disputer lorsque l’un des deux remarquèrent que l’enfant avait disparu.

    — Quoi ? Il était là il y a une minute.

    — Ce qui fait de lui un fugitif ! Je mets Forseti sur le coup.

    — On sort les grands remèdes ! Je te parie une bourse que c’est juste toi qui lui a fait peur.

    Azazel courut après l’inconnu jusqu’à un cul-de-sac. Là, l’inconnu tira un couteau de sa manche et marcha soudainement vers Azazel.

    — Attends ! On n’est pas obligés de faire ça ! Je veux parler !

    L’inconnu fonça vers Azazel qui esquiva le coup.

    — Mais tu es qui, enfin ?

    — Je pourrais te poser la même question !

    Il continuait à attaquer mais Azazel esquivait toujours, avec de grands coups d’épaules maladroits.

    L’inconnu sortit un pistolet de sa ceinture. Stupidement, Azazel se couvrit le visage de ses mains, comme pour se protéger d’un ballon. Trois coups furent tirés.

    Quand Azazel baissa les mains, il se rendit compte que les plombs ne l’avaient pas atteint. Ils semblaient s’être vaporisés dans les airs. L’inconnu se mit alors dans une rage folle.

    — Non… non, ce n’est pas vrai, le docteur a donc raison !

    — Le docteur ? Comment ça, le docteur ?

    Azazel allait poser d’autres questions quand une légère détonation suivie d’une épaisse fumée blanche recouvrit tout d’un coup la ruelle. Azazel ne vit plus rien mais entendit très clairement des bruits de pas, des coups de feu et un cri. Quand le jour se fit de nouveau, un homme en uniforme se tenait droit devant le corps de l’inconnu étendu à terre. De l’autre côté, Hörd et Tyr arrivaient en courant aux côtés de plusieurs soldats en armure qui quadrillaient la zone.

    — Azazel, tout va bien ?

    — Plutôt. Mais l’homme-là a essayé de me tuer puis il a été…

    — Ne dis rien. Forseti nous le dira plus clairement.

    — … qui ça ?

    Tyr pointa du doigt l’homme devant le cadavre qui se retourna avec un sourire innocent pour faire signe de la main à Tyr, qui se claqua la main contre son casque, de honte.

    Chapitre 4

    Camarade d’entraînement

    Azazel avait finalement eu le droit de rester

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1