Newton : sa vie, son œuvre et ses découvertes
Par Paul de Rémusat et &al.
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À propos de ce livre électronique
Newton est né dans le comté de Lincoln, le 25 décembre 1642. Il est mort à Kensington, en 1727, après une vie de quatre-vingt-cinq ans, illustrée par les plus grandes découvertes. Rien n’est plus célèbre que son nom, rien n’est moins connu que sa vie. Il n’est pas de livre de physique, d’analyse, de géométrie, de philosophie ou d’astronomie, où ce nom ne se trouve à chaque page.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Paul-Louis-Étienne, comte de Rémusat, né le 17 novembre 1831 à Paris et décédé le 22 janvier 1897 à Paris, est un journaliste, écrivain et homme politique français.
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Aperçu du livre
Newton - Paul de Rémusat
Newton : sa vie, ses écrits et ses découvertes.
Newton
sa vie, son œuvre et ses découvertes
Paul de Rémusat ; &al.
EHS
Le soleil, disait Galilée, a des taches aussi apparentes, pour qui sait les regarder, que de l’encre sur du papier blanc. N’en est-il pas de même de l’esprit si élevé, si étendu et si droit du grand Newton ?
(Joseph Bertrand, Les Fondateurs de l’astronomie moderne)
Première partie
{1}
I.
Newton est né dans le comté de Lincoln, à Woolsthorpe, près de Colsterworth, le 25 décembre 1642. Il est mort à Kensington, en 1727, après une vie de quatre-vingt-cinq ans, illustrée par les plus grandes découvertes. Rien n’est plus célèbre que son nom, rien n’est moins connu que sa vie. Il n’est pas de livre de physique, d’analyse, de géométrie, de philosophie ou d’astronomie, où ce nom ne se trouve à chaque page, mais les détails de ses découvertes, les événements de son existence, sont inconnus, surtout dans notre pays. Les documents pourtant ne manquent pas, et, si l’on veut s’en donner la peine, on peut connaître avec certitude les incidents les plus puérils de sa biographie. En France, Voltaire et Fontenelle au XVIIIè siècle, M. Biot plus récemment, ont commenté ses ouvrages et raconté sa vie. En Angleterre, sir David Brewster avait dès 1831 publié un volume sur lui, et il en publié deux nouveaux. On a imprimé dans des recueils divers les œuvres que Newton a laissées in édites, les lettres qu’il a reçues ou écrites ; ses notes même, ses agendas et ses livres de dépenses n’ont pas échappé à la publicité. Tous ceux de ses contemporains qui l’ont approché ont décrit sa personne et sa conversation avec le soin et l’admiration que doit inspirer un homme dont un Anglais, Halley, a pu dire : Nec propius fas est mortali attingere divos, sans qu’aucune nation rivale ait réclamé. Aujourd’hui encore il n’est pas un biographe qui ne parle de lui avec toute la partialité d’un contemporain et d’un ami.
En France pourtant, cette biographie est peu connue malgré l’éloge de Fontenelle. Réduits à ne plus pouvoir nier la grandeur des découvertes de Newton et la vérité de sa philosophie, nous semblons nous consoler en médisant de sa personne. M. Biot lui-même a contesté souvent la nécessité de connaître la vie du héros qu’il a célébré, et il est parfois entré en controverse avec sir David Brewster, le plus instruit, le plus récent et le plus habile de ses panégyristes. Il pense d’ailleurs en général que les grands hommes perdent à être bien connus, que, surtout pour les mathématiciens, pour ceux dont les études sont abstraites, la vérité sur leur personne n’est ni intéressante ni utile. Le public semble avoir pensé comme lui, et il est admis que la biographie de Newton ne peut pas être intéressante, sans doute parce qu’on n’y trouve pas la passion exigée pour la tragédie, et dont les deux tentatives de Racine et de Voltaire n’ont pu nous apprendre à nous passer. Quant à l’inutilité, je l’accorde, et la vie des savants est d’ordinaire peu instructive ; les événements qui l’ont signalée aident rarement à comprendre mieux leurs découvertes, et ne peuvent conduire à en faire de nouvelles. À quoi sert de savoir que la chute d’une pomme a mis Newton sur la voie de la gravitation ? Un tel exemple ne peut être utile à personne, et Newton, n’eût-il jamais vu de pommier, n’aurait probablement pas moins découvert la cause du mouvement des astres. Chaque inventeur a des procédés d’esprit différents, et, par cela même qu’il est inventeur, n’emprunte rien à personne. Quant à la manière de vivre, l’étude n’en peut avoir non plus de grands résultats pratiques, car les idées, les goûts, les habitudes des grands hommes n’ont jamais été les mêmes. Il serait difficile de décider en ce sens quel est le caractère du génie, et de choisir entre la sagesse proverbiale de Newton et les passions de Bichat. En ce genre, il n’y a pas de modèles, et si l’on n’avait que le désir d’être utile, il faudrait négliger la biographie des hommes d’esprit, et ne raconter que les actions des grands citoyens.
Cependant, si l’utilité est médiocre, l’intérêt de curiosité est grand selon nous, et le livre de sir David Brewster est attachant, bien qu’un peu diffus, et quoique l’auteur soit toujours monté sur le ton du panégyrique. Il y a même quelque chose de singulier à le voir s’efforcer d’être vrai, tout en voulant être toujours admiratif, et chercher à faire de Newton l’homme le meilleur et le plus juste de la terre, tout en citant de lui les lettres les plus vives et quelquefois les plus injurieuses pour ses adversaires. Il le représente à chaque page comme la douceur, la modestie, la candeur même, et à côté il imprime des documents qui le montrent passionné, défendant avec ardeur, avec injustice parfois, la priorité de ses découvertes et la vérité d’une admirable philosophie. Rien de tout cela n’est très blâmable en effet, et l’amour de la gloire, la passion de la renommée, le sentiment de la supériorité ne sont pas chez Newton des sentiments coupables. Un Anglais peut bien les reconnaître chez lui, de même que les français savent les démêler chez Voltaire. Une sorte de patriotisme s’é meut trop facilement chez M. Brewster, qui a accusé injustement les Français du désir de déprécier un étranger, sans penser que les honnêtes gens, les libéraux de tous les pays, auront toujours du patriotisme au service de l’Angleterre.
Comme bien des hommes destinés à une longue vie, Newton naquit petit, faible et maladif. Son père, d’origine écossaise, s’appelait comme lui Isaac Newton et mourut peu de temps après son mariage avec Hannah Ayscough, deux mois avant la naissance de son fils. Il laissait à sa famille une ferme d’une étendue médiocre qu’avait achetée son père en 1623 et qui rapportait 50 livres (1250 fr.), et une petite maison qui existe encore. Cette propriété est située dans le comté de Lincoln, à six milles au sud de Grantham, dans ce pays qu’on appelle, à cause du climat, le Montpellier de l’Angleterre. Newton y passa sa première enfance sous la garde de son oncle James Ayscough et de sa tante, car sa mère se remaria en 1645 au révérend Barnabas Smith, recteur de Northwitham, où elle le suivit. L’oncle et la tante de Newton s’établirent donc à Woolsthorpe, d’où ils l’envoyaient aux écoles de Skillington et de Stoke. C’est là qu’il apprit à lire, à écrire et à compter : A l’âge de douze ans, il fut mis à l’école publique de Grantham, tenue par un homme instruit, M. Stokes, et comme la distance était plus grande, il logea à la ville chez M. Clark, pharmacien dans High-Street, et dont le petit-fils exerçait encore au même endroit en 1727, l’année de la mort de Newton ; On dit que jusque-là il avait montré d’assez grandes dispositions à apprendre, mais, les études devenant apparemment plus difficiles, il passa bientôt pour un élève médiocre. Son plus réel talent était la boxe, où il excellait, et comme le caractère patient et doux que ses panégyristes ont su trouver en lui ne perçait pas encore, il donna souvent des preuves de sa supériorité en ce genre. Un autre talent s’était montré dès sa jeunesse avant son voyage à Grantham, c’est l’habileté dans toutes les parties de la mécanique pratique, habileté que l’on a reconnue chez tous les mathématiciens, chez Leibnitz par exemple. On montre encore, ou du moins l’on a longtemps montré à Woolsthorpe, un moulin à vent, une voiture se dirigeant elle-même, une horloge à eau, etc., que Newton construisit dans son enfance, lorsque ses goûts, un peu solitaires et taciturnes, l’éloignaient de ses camarades. Il fit même sur les cerfs-volants et sur le point où la ficelle doit être attachée, sur la rapidité du vent et la manière d’en mesurer la force, des expériences que l’on a décrites avec soin et où l’on sait voir des signes précurseurs de son génie futur, sans songer que ces goûts et ces talens se rencontrent chez la plupart des enfants et sont accompagnés, chez Newton même, d’une passion pour le dessin, pour la peinture et pour les vers, qu’il faisait fort bien, au dire de son neveu, M. Conduitt. Et pourtant il accusait plus tard son ami lord Pembroke, le protecteur éclairé des arts en Angleterre, d’avoir du goût pour les poupées de pierre (stone dolls), et dans son âge mûr il pensait sur les poètes et la poésie comme Malebranche.
Newton ne logeait pas seul dans la maison de M. Clark, et, durant les sept années qu’il y passa, il vit souvent et distingua parmi les locataires une jeune personne, miss Storey, sœur d’un médecin da Buckminster et fille de la seconde femme de M. Clark. Elle était de deux ou trois ans plus jeune que lui, et l’on fait des descriptions charmantes de sa beauté et de ses talens. Newton préférait, assure-t-on, sa société à celle des jeunes garçons de son âge, et longtemps après, à l’âge de quatre-vingt-deux ans, après deux mariages, elle avouait au docteur Stukely que Newton l’avait aimée