100+symboles de FRANCE
100+symboles de FRANCE
100+symboles de FRANCE
DE
F RANCE
DEPUIS
1903
100 SYMBOLES
pour raconter
LA FRANCE
Textes
Sabrina Tricaud
Photographies
David Bordes
L E TOUR
DE
F RANCE
DEPUIS
1903
100 SYMBOLES
pour raconter
LA FRANCE
Sabrina Tricaud
Prface
ric Roussel
Photographies
David Bordes
SOMMAIRE
PRFACE
Le taureau de Lascaux
Lart parital
Les Menhirs de Carnac
La France palolithique
Le cratre de Vix
La France celtique
Les chanes de Vercingtorix
La Gaule conquise
Le vase de Soissons
Murs et coutumes franques
Le baptistre de Clovis
La France, fille ane de lglise
La culotte de Dagobert
Les Mrovingiens
Le glaive de Charles Martel
La lutte contre les Sarrasins
La chanson de Roland
Mythes et Moyen Age
La couronne de Charlemagne
La coiffe de lEmpereur
La tapisserie de Bayeux
Les Normands la conqute de l'Angleterre
Le chne de Saint Louis
La justice pour tous
Les flches de la cathdrale de Chartres
La spiritualit au Moyen ge
Le clotre de Moissac
Le monachisme
Le dernier des Templiers
Royaut franaise et papaut
Le bcher de Jeanne dArc
Une hrone controverse
Les cages de Louis XI
La royaut tyrannique
Les toits de Chambord
La Renaissance
Le Chevalier Bayard
Lidal chevaleresque
Lordonnance de Villers-Cotterts
La langue franaise
Les Mignons dHenri III
La France des courtisans
Les plaies dAmbroise Par
Une mdecine moderne et dmocratique
La poule au pot dHenri IV
Le bon roi Henri
Les trois Mousquetaires
Capes et pes
La robe du Cardinal
Le spirituel et le temporel
8
9
10
12
13
14
16
18
19
20
22
23
24
25
26
28
30
32
34
35
36
38
40
42
43
La plume de Molire
La libert dexpression et de pense
Le dernier festin de Vatel
Gastronomie et art de vivre la franaise
La galerie des Glaces de Versailles
Le Roi-Soleil
Les fortifications de Vauban
Le gnie militaire
Le Code noir
Commerce et esclavage
Les Bulles de Dom Prignon
Le vin de la civilisation
Le bon sauvage
Les dcouvertes de Bougainville
Le fardier de Cugnot
Science, vapeur et progrs
LEncyclopdie de Diderot et dAlembert
La France des Lumires
Les corsaires de Surcouf
La France sur les mers
Le collier de Marie-Antoinette
Complots et dclin de la monarchie
La Boussole de La Prouse
La conqute des ocans
Les Tuileries
Le lieu de toutes les histoires
La Dclaration des Droits de lHomme et du Citoyen
Libert, galit, Fraternit
Le drapeau tricolore
Trois couleurs pour un pays
La Bastille
Le mythe fondateur de la Rpublique
La guillotine
La France dcapite
La Marseillaise
Le chant de la Rpublique
La baignoire de Marat
Le bain de sang de la Rvolution
Le mtier Jacquard
La rvolution industrielle
Le chapeau de Napolon
La silhouette de lEmpereur
La lgion dhonneur
Le service rcompens
Le Code civil
Le droit codif
La girafe de Charles X
Lart de la diplomatie
Le fauteuil de Balzac
Portrait de la France du XIXe sicle
44
45
46
48
49
50
52
53
54
56
57
58
60
62
63
64
66
68
69
70
72
74
76
77
78
80
82
83
84
86
87
88
90
92
93
94
96
98
99
100
102
104
106
107
108
110
112
114
115
116
Le tandem de 1936
Les premiers congs pays
Le pantalon de Coco Chanel
La rvolution du pantalon
Le tirailleur sngalais de Banania
Exotisme et commerce
La ligne Maginot
La guerre de position
La poigne de main de Montoire
La Collaboration
Le micro du Gnral
La Rsistance
Le vote des femmes
La France au fminin
Le Tour de France
Tour de France, tour de souffrance
La N7
Les vacances dt
La 2 CV
Les Trente Glorieuses
Le Deuxime sexe de Simone de Beauvoir
La libration de la femme
Je vous ai compris
Les plaies de la guerre dAlgrie
Le Journal Tlvis
La rvolution mdiatique
La Nouvelle Vague
Le cinma davant-garde
Le cuir de Johnny
Lamricanisation de la socit
Le pav de Mai 1968
La jeunesse en colre
Les larmes de Simone Veil
La libre disposition du corps de la femme
La rose de Mitterrand
La gauche au pouvoir
Le Centre Pompidou
La culture pour tous
Le Minitel
Made in France
Le TGV
La France grande vitesse
La pyramide du Louvre
Les rois btisseurs
La coupe du monde 1998
La France Black-blanc-Beur
Le franc
De la France lEurope
Le Concorde
Grandeur et dclin
118
119
120
122
123
124
126
128
130
131
132
134
135
136
137
138
140
141
142
144
145
146
148
149
150
P RFACE
E RIC R OUSSEL
mesure que lethnocentrisme recule, la mmoire nationale semble se dissoudre. trange fatalit que naurait
certainement pas souhaite un homme tel que Claude Levi-Strauss, principal artisan dune ouverture salubre
sur des civilisations lointaines, mais qui, par ailleurs, se montrait passionnment attach tout ce qui peut
donner vie et relief notre pass. La construction europenne, la monte des pays mergents, la rapidit
des changes ont videmment donn bien des rides au roman national dautrefois, ptri de simplifications
abusives. Pour autant, la nation, cadre naturel de la vie en socit, reste un objet dhistoire lgitime et passionnant.
On peut mme dire quelle a trouv une nouvelle justification avec la globalisation en marche et le besoin
dancrage quelle suscite.
Jeune agrge dHistoire, Sabrina Tricaud a bien ressenti la force de ce phnomne. Do ce livre singulier dont
le grand mrite est doffrir un aperu stimulant de tout ce qui a contribu construire la France. Lentreprise
tait seme dembches. Si grande que soit lhonntet dun historien, la tentation est vive pour lui
de privilgier tel ou tel pisode, telle ou telle reprsentation au dtriment dautres. Rien de tel ici. juste titre,
Sabrina Tricaud a estim que lHistoire de France ne saurait tre divise, quelle forme un bloc indissociable
dont on ne peut retrancher des pages au gr de ses humeurs. Dans le tableau le vieux catchisme rpublicain
nest pas oubli comme en tmoignent les notices consacres la Dclaration des Droits de lHomme
et du Citoyen, au Mur des Fdrs, ou au Jaccuse de Zola, vnements fondateurs de notre dmocratie.
Paralllement, tout ce qui a pu contribuer en profondeur forger la mmoire nationale est bien mis en lumire
geste de Vercingtorix, premier hros de lunit franaise ; ordonnance de Villers-Cotterts, vritable acte
de naissance du franais ; fortifications de Vauban, insparables de tant de nos paysages. Mme sret enfin
dans le choix de traits marquants de lpoque contemporaine : o lon saperoit quun livre tel que
Le Deuxime Sexe de Simone de Beauvoir, paru en 1949, a pu avoir une rsonance dans les mentalits,
au moins gale des pisodes dhistoire politique.
Somme toute et sans vouloir craser lauteur sous des comparaisons insoutenables, cest une vision gaullienne
de notre Histoire qui nous est ici propose. En juin 1940, le gnie du gnral de Gaulle fut alors quil tait
issu dune droite catholique et monarchiste dassumer toute notre Histoire pour runir tous ceux qui
refusrent la dfaite. Aujourdhui, les enjeux sont heureusement moins dramatiques mais il na jamais t plus
urgent pour aborder lavenir de savoir qui nous sommes et do nous venons. Les Lieux de mmoire
si brillamment clairs par Pierre Nora il y a vingt ans ne demandent qu tre revisits avec science, mthode
et talent, comme vient de le faire Sabrina Tricaud.
I NTRODUCTION
S ABRINA T RICAUD
Mmoire, histoire : loin dtre synonymes, () tout les oppose explique Pierre Nora dans Les Lieux
de mmoire. La mmoire est la vie (). Lhistoire est la reconstruction toujours problmatique et incomplte
de ce qui nest plus. () La mmoire installe le souvenir dans le sacr, lhistoire len dbusque. 1 Ce livre
cherche prcisment dpasser cette opposition de fond. travers cent symboles de lHistoire de France,
il sagit de runir la fois les reprsentations qui fondent notre mmoire nationale et les connaissances
historiques de ces reprsentations. En partant dimages et de lvocation figure dun personnage,
dun vnement, dune uvre dart ou dune dcouverte, il est question de dbusquer le vrai du faux,
de comprendre les raisons de cette dformation entre mmoire et histoire.
Le bon roi Dagobert avait-il vraiment mis sa culotte lenvers ? Pourquoi vhiculer dans la mmoire
collective limage dun roi fainant alors quil nen tait rien ? De mme, les contemporains du bon roi Henri
IV mangeaient-ils de la poule au pot tous les dimanches ? Pourquoi faire de ce rgne un moment privilgi
dans lhistoire du peuple franais ?
Le choix des symboles rpond au souci de couvrir lensemble de notre Histoire tout en privilgiant
des clairages sur les priodes les plus rcentes o la mmoire collective est encore trs vivace. Quil sagisse
dobjets (le glaive de Charles Martel, le bicorne de Napolon Ier ou le blouson de Johnny Halliday),
de monuments (les Tuileries ou le Centre Georges-Pompidou), dinventions (le fardier de Cugnot,
le daguerrotype), de personnages historiques (de Clovis Franois Mitterrand), de figures littraires (Balzac
ou Victor Hugo), dhommes de sciences, tous et toutes ont t choisis pour leur caractre imag et emblmatique
dun aspect politique, conomique ou social de lhistoire de France de la Prhistoire nos jours. Louvrage
retrace les principaux pisodes de notre roman national (de Roland Roncevaux aux Taxis de la Marne en
1914), ses hros (tels Vercingtorix ou Jeanne dArc), ses lieux (comme la Bastille). Il raconte galement les
grands bouleversements conomiques et sociaux quont connus les Franaises et les Franais, en mtropole et
dans les colonies, au travers des sicles. Le tirailleur sngalais de Banania, symbole de la France coloniale,
voisine ainsi avec le pantalon de Coco Chanel, emblme de lmancipation fminine au XXe sicle.
Chaque symbole est illustr, souvent en puisant dans le rpertoire des images de notre mmoire collective, puis
comment afin de le replacer dans son contexte historique, social et culturel. En plus de la description du
symbole, louvrage montre la faon dont les historiens et les hommes politiques ont progressivement construit,
parfois reconstruit, notre pass suivant les poques et les besoins du moment. La Troisime Rpublique de
Jules Ferry et dErnest Lavisse, avec sa clbre imagerie dEpinal, constitue assurment un temps fort de la mise
en place de cette mmoire nationale enseigne aux enfants de France partir de manuels scolaires
vocation pdagogique mais aussi patriotique et morale. Nombreux sont ceux qui, aujourdhui, dplorent que
lon napprenne plus lhistoire de France nos enfants.
Ils trouveront dans ces pages de quoi nourrir leurs souvenirs et expliquer leur descendance, comme lcrivait
lhistorien Charles Seignobos que les manuels scolaires franais ont tort denseigner aux lves Les Gaulois,
nos anctres, taient grands et blonds, car ces enfants ne descendent pas des guerriers nordiques, mais
des paysans tablis plus anciennement. Tout ce quon a le droit de leur dire, cest que leurs anctres ont parl
la langue celtique introduite par ces guerriers. 2
1. Pierre Nora, Les Lieux de mmoire, 1984.
2. Charles Seignobos, Histoire sincre de la nation franaise, 1937.
LE
TAUREAU DE
L ASCAUX
POQUE
PA L O L I T H I Q U E
10
L ES
MENHIRS DE
C ARNAC
5 000-3 000
A V.
J.- C .
LE SYMBOLE
11
L E C RATRE
DE
V IX
l a Fr ance ce lti q ue
VE
S I C L E A V . J.- C .
12
13
L ES
CHANES DE
V ERCINGTORIX
L a Gaul e co nq uise
52
A V.
J.- C .
Vercingtorix jette ses armes aux pieds de Csar, carte postale daprs Louis Royer, 1899.
14
LE
VASE DE
S OISSONS
486
Le vase de Soissons, Raoul Lamourdedieu, bas-relief, 1926, Monument aux morts, ville de Soissons.
LE SYMBOLE
15
16
LE
BAPTISTRE DE
C LOVIS
VERS
500
17
LA
CULOTTE DE
DAGOBERT
Le s M ro vingi e ns
629-639
Cest bien cette chanson populaire qui, loin de la vrit historique du personnage, la fait vivre
dans notre mmoire collective. Car Dagobert Ier, roi des Francs de 629 639, ne fut pas
le prototype du roi fainant, couard et malhabile, dcrit par le folklore. Dagobert rorganisa
ladministration et la justice du royaume mrovingien, consolida le domaine royal, et fit riger
lglise de Saint-Denis, ncropole des rois de France. La construction de son image remonte
au Moyen ge et spanouit lpoque moderne jusquau milieu du XVIIIe sicle o un
chansonnier anonyme sen empare. Sur lair dune musique de chasse courre utilise en
Poitou, les couplets seraient une caricature de Louis XVI, adapte par la suite Napolon III.
LE SYMBOLE
La culotte de Dagobert symbolise, tort, les rois fainants, dont le rgne commence la mort
de Dagobert Ier, en 639. Elle est caractristique de notre culture populaire, qui transforma
les faits et gestes dun grand roi mrovingien en comptine pour enfants. crite peu avant
la Rvolution, elle fut sans doute un moyen de tourner en drision la royaut affaiblie.
Elle inspira Charles Pguy, qui lui ajouta des couplets, mais aussi le 7e Art.
18
19
LE
GLAIVE DE
C HARLES M ARTEL
732-733
20
LA
CHANSON DE
R OLAND
My the s e t Mo ye n ge
778
21
LA
COURONNE DE
C HARLEMAGNE
l a co i ffe d e l e m pe r e ur
800
e 25 dcembre 800, Charlemagne est couronn Rome par le pape Lon III,
empereur dOccident. Au cours de la crmonie, le Pape dpose sur la tte
de Charles Ier dit le Grand (n en 742, 747 ou 748, mort en 814) la couronne
impriale. Le peuple acclame le nouvel empereur. En 813, Charlemagne lui-mme couronne
son fils Louis Le Pieux, qui se fait sacrer Reims par le pape tienne IV en 816.
Le couronnement devient insparable de la crmonie du sacre et la couronne de Charlemagne,
lun des insignes royaux, les regalia, conservs dans le trsor de labbaye de Saint-Denis.
La couronne est utilise jusquen 1590 lorsquelle est dtruite par la Ligue. Des couronnes
dites de Charlemagne ont ensuite t fabriques, notamment pour le sacre de Napolon Ier
en 1804 et celui de Charles X en 1825.
LE SYMBOLE
La couronne de Charlemagne, tout comme sa barbe fleurie (Victor Hugo), sont
indissociables des reprsentations de lempereur. Elle symbolise la fois la dignit impriale
et le sacre des rois de France, hritiers du souverain carolingien.
Statuette questre "Charlemagne" , IXe sicle, bronze autrefois dor, Muse du Louvre.
23
LA
TAPISSERIE DE BAYEUX
Les Normands l a co nqu te d e l A ngl e te r re
FIN
DU
XIE
SICLE
La bataille sengage, dtail de la Tapisserie de Bayeux, laine tisse sur lin, avant 1082.
24
LE
CHNE DE
SAINT LOUIS
L a justice p o u r to u s
1226-1270
LE SYMBOLE
Louis IX apparat comme le modle du roi pieux
et vertueux, lantithse des rois tyranniques
et arbitraires qui lont prcd. Le chne du bois
de Vincennes symbolise la bont dun roi proche
du peuple, accessible et rendant la justice pour tous.
Les rpublicains surent le reconnatre comme
un exemple des valeurs morales que leur cole
se devait de transmettre.
Saint Louis rendant Justice sous un Chne, chromos, d. Chicore Extra Bonzel.
25
L ES
FLCHES DE LA
CATHDRALE DE C HARTRES
XIIE
SICLE
LE SYMBOLE
Les flches de la cathdrale de Chartres sont un chefduvre de lart gothique franais. Notre-Dame
de Chartres a t construite en vingt-six ans aprs
lincendie de 1194, soit un dlai exceptionnellement
court pour lpoque, grce au soutien des habitants
de la ville de Chartres, qui financrent et accomplirent
une partie des travaux. Ses flches, tel llan des fidles
vers Dieu, constituent un tmoignage vivant de
la spiritualit et de la foi chrtiennes au Moyen ge
qui firent jaillir de terre ces poustouflantes
constructions de pierre.
26
LE
CLOTRE DE
M OISSAC
l e m o nachi sm e
VERS
1100
LE SYMBOLE
Le clotre de Moissac est un emblme de la vie
monastique au Moyen ge. Chef-duvre de la sculpture
et de lart romans, inscrit au patrimoine mondial
de lUnesco, il reflte la richesse et la puissance
de lordre de Cluny au XIIe sicle. Mais il est aussi
un tmoignage de la foi et de la spiritualit au temps
de lapoge du christianisme.
27
28
LE
1312
e 13 octobre 1307, tous les Templiers du royaume sont arrts sur ordre de Philippe
le Bel et leurs biens squestrs. En avril 1312, le roi de France obtient du pape
Clment V la dissolution de lOrdre. Cr en 1129, lordre du Temple, constitu
de moines-soldats, est n en Terre sainte pour dfendre la rgion et protger les plerins.
Cette milice du Christ sillustre sur les champs de bataille des croisades et dans la lutte
contre les Infidles. Les Templiers sont alors reconnaissables la croix rouge quils portent
sur leur manteau de moine. Pour financer les expditions, lentretien de lOrdre et ses efforts
de guerre, les Templiers exploitent de vastes domaines en Occident, les commanderies.
Fort habiles grer et transfrer des fonds vers lOrient, ils deviennent les banquiers des rois
ainsi que les gardiens de leurs trsors, dposs dans leur forteresse du Temple. La richesse
de lOrdre suscite des convoitises, dautant plus quen 1291, aprs la perte de la Terre sainte,
lutilit de lOrdre ne parat plus vidente. On accuse les moines de donner dans limmoralit,
lhrsie, lidoltrie. Philippe le Bel saisit loccasion pour intervenir et accaparer les biens
du Temple. Le procs des Templiers est instruit par lInquisition, qui extorque des aveux sous
la torture. Le Pape se rserve le jugement des dignitaires de lOrdre, dont le grand matre
Jacques de Molay. Mais ces derniers reviennent sur leurs aveux. Le Roi les dclare relaps
(retomb dans lhrsie) et les condamne au bcher. Le 18 mars 1314, ils sont brls vifs
sur lle de la Cit. Proclamant son innocence et sen remettant la Justice Divine, Jacques
de Molay avant de mourir aurait maudit le Roi et le Pape..
LE SYMBOLE
Laffaire des Templiers est rvlatrice de la puissance des ordres monastiques au Moyen ge.
Leur fin tragique alimenta limagination populaire et leur lgende, celle du trsor perdu
ou de la clbre maldiction qui a inspir luvre de Maurice Druon, Les Rois maudits.
Mais le procs des Templiers est en ralit un symbole du conflit qui a oppos le roi de France,
Philippe IV le Bel, la papaut. La fin des Templiers marque la naissance du gallicanisme :
la fille ane de lglise entend que le pouvoir spirituel soit dsormais soumis au temporel.
29
L E B CHER
J EANNE
DE
D A RC
Une h ro ne co ntr o ve r s e
1431
e 30 mai 1431, neuf heures du matin, Jeanne dArc est conduite sur la place
du Vieux-March, Rouen, pour y tre brle vive. Jeanne est ne Domrmy,
un petit village de Lorraine, vers 1412. La France est alors plonge dans
la guerre de Cent Ans. Le roi dAngleterre, aid des Bourguignons, occupe la plus grande
partie du pays et revendique la Couronne. Le dauphin de France, Charles, priv de ses droits,
est retir Bourges. Extrmement pieuse, Jeanne croit entendre, vers lge de treize ans,
des voix clestes lenjoignant daller au secours de sa patrie et de bouter les Anglais hors
de France. Elle russit gagner la confiance du Dauphin quelle na jamais vu mais quelle
a reconnu au milieu de ses courtisans : Gentil dauphin, je te dis, de la part de Messire Dieu,
que tu es vrai hritier du trne de France. Aprs avoir dlivr Orlans assig par les Anglais,
Jeanne dArc fait sacrer Charles VII Reims le 17 juillet 1429. Elle choue cependant
conqurir Paris et est capture par les Bourguignons au printemps 1430. Ils la vendent
aux Anglais, qui veulent la faire tomber pour dstabiliser Charles VII. Jeanne est juge
par labb Cauchon, vque de Beauvais, pour hrsie et sorcellerie. La Pucelle dOrlans,
lissue dun procs inique, est condamne au bcher. En 1456, un second procs la rhabilite.
Jeanne dArc sera canonise en 1920.
LE SYMBOLE
La destine de cette petite paysanne de Domrmy, qui sest impose comme chef de guerre,
a profondment marqu lHistoire de France. Jeanne dArc fut populaire de son vivant.
Son martyr est un exemple de la lutte contre les hrsies, et sa foi inbranlable, un modle
de pit. Mais Jeanne dArc est surtout une hrone nationale, une figure populaire reprsente
depuis le XIXe sicle par des statues sur les places des villages, dont la mmoire demeure
cependant discute. Symbole dunion nationale pour les uns, symbole nationaliste pour
les autres (elle fut sous Vichy une alternative la Marianne, rcupre par le Front National
quelques annes plus tard), La Pucelle reste lemblme de la libert et de la bravoure,
une des rares figures fminines de notre Histoire.
Ingrid Bergman sur le bcher dans Jeanne DArc, un film ralis par Victor Flemming, 1948.
30
31
L ES
CAGES DE
LOUIS XI
l a ro yaut t yr anni q ue
1461-1483
l tait dur et cruel. Il enfermait ses prisonniers dans des cages de fer si petites quon
ne pouvait y tenir debout ni y dormir. Lors du supplice du duc de Nemours,
il aurait pouss la cruaut jusqu placer les enfants du duc sous lchafaud afin
quils fussent arross de son sang. Louis XI (1423-1483) a laiss la postrit limage dun roi
barbare et sans piti qui a inspir Walter Scott, Balzac, Dumas et Hugo dans Notre-Dame de
Paris. Pourtant, la ralit historique du personnage est tout autre. Les fameuses cages, appeles
fillettes du roi , encore visibles au chteau de Loches, sont hautes de plus de deux mtres
et larges dautant. Il sagissait donc plutt de cellules que de cages. Le cardinal Jean Balue,
dtenu pendant 11 ans, ny allait que pour dormir. Certes Louis XI a svrement chti ceux
qui lont trahi, tels le conntable de Saint-Pol ou Charles dArmagnac qui passa 13 ans en prison.
Mais il soumettait ainsi les princes une poque o le royaume tait divis entre les fidlits
aux Anglais, aux Armagnacs et aux Bourguignons. Il restaura ltat monarchique que la guerre
de Cent Ans avait mis mal et fit de la Realpolitik la Bismarck.
LE SYMBOLE
Les fillettes du roi sont le symbole de la tyrannie du roi Louis XI, et lemblme dun Moyen ge
quon a longtemps considr comme barbare et obscur. Les historiens cependant soulignent
aujourdhui la modernit de laction de Louis XI et son gnie politique dans la consolidation
du royaume.
32
33
34
L ES
TOITS DE
C HAMBORD
L a Renaissance
1519-1539
prs sa victoire Marignan, en 1515, Franois Ier revient dItalie avec Lonard
de Vinci, qui passe les trois dernires annes de sa vie (1516-1519) en France.
Le roi de France nomme le prince de la Renaissance italienne premier peintre,
premier ingnieur et premier architecte du roi. Vinci amne avec lui des tableaux, dont
la clbre Joconde, et travaille plusieurs projets, notamment le chteau de Chambord
dont larchitecture originelle, ainsi que lescalier double rvolution, portent son empreinte.
Franois Ier souhaite faire de ce lieu un reflet de ses gots artistiques, un chteau limage
de sa dmesure. Lescalier vis conduit sur les toits, qui constituent une vritable terrasse
autorisant la circulation autour du donjon. Perces de lucarnes et de chemines sculptes,
les toitures reprsentent une ville en miniature, o les fentres apparaissent tels des palais
et les lanternons des clochers. Chambord prsente une architecture dexception, qui
sduisaient les visiteurs de son temps, comme cet ambassadeur vnitien, en 1577 :
Nous partmes de l merveills ou, pour mieux dire, bahis.
LE SYMBOLE
35
L E C HEVALIER B AYARD
l id al cheval e re sq ue
1476-1524
LE SYMBOLE
La bravoure de Bayard est lemblme de ses qualits
chevaleresques. Chevalier sans peur et sans
reproche , Bayard est lun de nos hros nationaux,
abondamment peint par limagerie dEpinal.
Il incarne lidal et les vertus chevaleresques, alors
mme que la Renaissance et les guerres dItalie jettent
les derniers feux sur lesprit chevaleresque. Sa mort
semble annonciatrice de la dfaite de Pavie, en 1525,
au soir de laquelle Franois Ier dclara : Tout est
perdu, fors lhonneur.
36
L ORDONNANCE
DE VILLERS - COTTERTS
1539
Premire page du recueil de lOrdonnance de VillersCotterts, dition de 1539, Archives nationales de France.
37
38
L ES
MIGNONS D H ENRI
III
l a Fr ance d e s co u rtisans
1574-1589
bir, complaire et servir . Telle tait la devise des mignons du roi Henri III
(1551-1589). lpoque, le terme dsigne les favoris des seigneurs et des princes,
sans la connotation sexuelle quon lui connat aujourdhui. Il sagit de jeunes gens
qui partagent la Cour un mode de vie raffine, qui aiment les joutes oratoires et le bilboquet,
shabillent avec grce et prodigalit, se fardent et portent bijoux. Derrire ce culte des apparences,
qui leur donnent des airs effmins, les mignons rivalisent de dvouement et de fidlit
la personne royale. Parmi eux, les ducs dEpernon et de Joyeuse suscitent les jalousies. On raille
les hermaphrodites, leur apparence et leurs murs prtendues dissolues. Les mignons dHenri III
alimentent ainsi la lgende noire du dernier des Valois, fils de Catherine de Mdicis, pris dans
la tourmente des guerres de religion et assassin par le moine Jacques Clment en 1589.
LE SYMBOLE
Les mignons dHenri III sont le symbole des courtisans. Ils incarnent le systme de Cour
qui repose sur des codes vestimentaires et des comportements sociaux. Mais au-del
de la lgende, le systme des mignons fut un mode de gouvernement. Dans un royaume
dchir par les guerres de religion et les ambitions des Grands, il fut un moyen dasseoir
lautorit du roi. Les mignons taient des faire-valoir de la majest royale. Ils rappelaient
aux yeux de tous que le roi est au centre de tout, et que seul il ordonne la hirarchie politique
et sociale du royaume. Les mignons dHenri III sont ce titre les emblmes dun absolutisme
naissant qui prfigure ltiquette du Roi-Soleil.
Henri III et ses mignons, in Costumes de Paris travers les sicles, Roy diteur, vers 1881.
39
L ES P LAIES
D A MBROISE
PAR
XVIE
SICLE
574. Charles IX est alit, fivreux, et peine respirer. Ambroise Par, son chirurgien,
est ses cts :
Jespre que tu vas mieux soigner les rois que les pauvres.
Non, sire, cest impossible.
Et pourquoi ?
Parce que je soigne les pauvres comme des rois.
Chirurgien des rois de France Henri II, Franois II, Charles IX et Henri III, Ambroise Par
(1509-1590) soigna les plaies des soldats, officiers et seigneurs du royaume avec de nouvelles
mthodes, notamment la ligature des vaisseaux aprs amputation. Il pratique avec succs
la cautrisation des plaies par armes feu, et simpose comme un des meilleurs chirurgiens
de son temps. Soucieux de diffuser son savoir, il publie en franais de nombreux ouvrages
danatomies et des crits sur le traitement des plaies, qui provoquent lhostilit de la Facult
de mdecine.
LE SYMBOLE
Ambroise Par est considr comme le pre de la chirurgie moderne. Cet humaniste franais
est aussi le reprsentant dune thique mdicale hritire du serment dHippocrate, comme
lillustre sa devise : Je le pansai, Dieu le gurit.
40
42
LA
IV
L e bo n ro i He nri
1572-1610
i Dieu me prte encore de la vie, crit Henri IV au duc de Savoie en 1600, je ferai
quil ny aurait point de laboureur en mon royaume qui nait le moyen davoir
une poule dans son pot. La clbre anecdote demeure un vu pieux, car la volaille
nest pas accessible tous les Franais au XVIe sicle. Henri de Navarre na donc pas institu
la poule au pot comme plat national et dominical. Mais elle fut largement exploite par
la lgende, ne du vivant du Roi, et magnifie par sa fin tragique. Le geste de Ravaillac
transfigura Henri de Navarre (1553-1610) en bon roi Henri . En 1661, Hardouin
de Prfixe, le prcepteur de Louis XIV, rdige une Histoire dHenry le Grand, dans laquelle
il fixe les reprsentations (le fameux panache blanc) et les anecdotes de son rgne. On enjoint
au futur Roi-Soleil d'imiter son aeul, un roi simple et proche du peuple. Un sicle plus tard
les philosophes des Lumires loueront le roi tolrant et pacificateur, le seul roi dont le pauvre
ait gard la mmoire (Voltaire, Henriade, 1728). Au XIXe sicle, Michelet en fait une figure
essentielle de notre roman national, qui inspire limagerie dEpinal.
LE SYMBOLE
La poule au pot est lun des emblmes dHenri IV illustrant son image dun roi proche
de ses sujets, soucieux de leur bonheur et de leur prosprit. On prte Henri de Navarre
dautres anecdotes culinaires et une rputation de bon vivant. Juste aprs sa naissance,
son grand-pre maternel lui aurait frott les lvres avec une gousse dail et fait humer du vin
de Juranon. Voyant la raction du nouveau-n, il se serait cri : Tu seras un vrai Barnais !
Symbole de la lgende henricienne, la poule au pot est devenue, comme son roi, un lieu
de notre mmoire nationale.
43
L ES
TROIS MOUSQUETAIRES
C ap e s e t p e s
1667-1673
44
L A R OBE
LE
DU
C ARDINAL
SPIRITUEL ET LE TEMPOREL
1622-1640
LE SYMBOLE
La robe du cardinal de Richelieu est lemblme
de sa puissance. Serviteur du roi de France,
qui est le lieutenant de Dieu sur Terre ,
45
LA
PLUME DE
M OLIRE
1655-1673
46
LE
1671
47
LA
GALERIE DES
G LACES
Le Ro i - So l e il
1678-1684
48
L ES
FORTIFICATIONS DE
VAUBAN
le g nie m il i tair e
1667-1707
50
LE
CODE NOIR
Comm er ce e t e scl avage
1685-1848
51
L ES
BULLES DE
D OM P RIGNON
XVIIE
SICLE
adame de Pompadour disait du champagne quil tait le seul vin quune femme
puisse boire sans senlaidir . Les vins de Champagne existent depuis
le Moyen ge. Ils taient utiliss pour les sacres de rois de France, Reims,
mais on leur prfrait en ralit les vins de Beaune. Les vins du pays champenois
nacquirent leurs lettres de noblesse quau XVIIe sicle grce au moine cellrier de labbaye
de Hautvillers, Dom Prignon (1638-1715). Constatant la tendance naturelle du vin
mousser, il domestique et perfectionne cette qualit. Pour maintenir leffervescence du vin,
il a lide denfermer le jus dans des bouteilles paisses au long col et de les fermer laide
dun bouchon de lige au lieu du traditionnel chanvre. Le nouveau nectar dtrne bientt
les vins rgionaux et simpose la Cour sous Louis XIV et Louis XV. Il ne quittera plus
les sphres du pouvoir et de la haute socit.
LE SYMBOLE
Les bulles de Dom Prignon, qui na pas invent le champagne mais amlior la qualit
des vins du pays champenois et matris leur effervescence, sont un symbole festif :
Dans la mousse dA luit lclair du bonheur. crit Alfred de Vigny. Ptillantes comme
la joie, les bulles accompagnent les heureux vnements, naissances, baptmes, mariages.
Les hussards de la garde napolonienne avaient lhabitude de sabrer le champagne
pour rendre hommage la victoire. Le nectar marque galement la signature des traits
diplomatiques et saffirme comme symbole de la fraternit entre les peuples. La plus clbre
de nos boissons demeure lun des emblmes de lart de vivre la franaise et lun
des vecteurs du rayonnement international de la France.
52
53
LE
BON SAUVAGE
1771
54
LE
FARDIER DE
C UGNOT
1769-1771
55
56
DE
LE NCYCLOPDIE
D IDEROT ET D A LEMBERT
l a Fr ance d e s L um i r e s
1751-1772
usquici, personne navait conu un ouvrage aussi grand crit Diderot en1750
dans son Prospectus de prsentation de lEncyclopdie. Lentreprise a un double
objectif. Vritable Dictionnaire raisonn des sciences, des arts et des mtiers,
elle prtend exposer lenchanement des connaissances humaines, reflet des progrs
scientifiques et techniques, et les diffuser un large public. Publie entre 1751 et 1772,
la premire dition comprend 17 volumes de texte, et 11 volumes de planches illustres.
Les quelques soixante-dix mille articles ont t rdigs par une soixantaine de collaborateurs
sous la conduite de Diderot et dAlembert, parmi lesquels de grands esprits comme
Voltaire, Rousseau, le chevalier de Jaucourt ou le baron dHolbach, sans compter
les graveurs et dessinateurs. Mais lEncyclopdie est aussi un projet politique. Il sagit
de diffuser un savoir libre de tout prjug et de proposer une rvolution dans les esprits .
Jespre, ajoute Diderot, que les tyrans, les oppresseurs, les fanatiques et les intolrants
ny gagneront pas. Nous aurons servi lhumanit.
LE SYMBOLE
Emblme des Lumires, lEncyclopdie en est galement le manifeste. Elle sera mise
lindex par le Pape, interdite par le roi de France et condamne paratre secrtement.
Son aventure et ses pripties cristallisent lopposition entre les ides nouvelles
et lobscurantisme dun Ancien Rgime de plus en plus contest.
Planche sur le lissoir servant fabriquer la poudre canon, tire de LEncyclopdie de Diderot et dAlembert.
57
L ES
CORSAIRES DE
S URCOUF
l a Fr ance su r l e s m e rs
1793-1815
LE
COLLIER DE
MARIE-ANTOINETTE
co mplots e t d cl in de l a m o narchie
1785
LE SYMBOLE
59
60
L A B OUSSOLE
DE
L A P ROUSE
l a co nq u te d e s o c ans
1756-1788
rest. 1er aot 1785. Deux frgates, La Boussole et LAstrolabe, quittent la rade
pour une expdition de dcouverte dans le Pacifique. Louis XVI en a confi
le commandement Jean-Franois de Galaup (1741-1788), comte de La Prouse.
Celui-ci embarque avec 226 hommes et 500 tonneaux. Aprs un priple de trois ans
de lAtlantique au Pacifique, La Boussole et LAstrolabe quittent Botany Bay, au sud
de lAustralie, le 10 mars 1788 et mettent le cap lest. Les deux navires se brisent
lt 1788 sur les rcifs des les Salomon (Vanikoro).
LE SYMBOLE
Louis XVI donnant ses instructions au capitaine de vaisseau La Prouse pour son voyage d'exploration
autour du monde, Nicolas Andr Monsiau, huile sur toile, 1817, Chteau de Versailles.
61
L ES T UILERIES
Le li eu de tou tes l e s Histo i re s
DEPUIS
1564
ares sont les pierres avoir t le tmoin de tous les pisodes marquants de lHistoire
de France. Cest pourtant le cas du palais des Tuileries, qui surgit en 1564 de la volont
de la rgente Catherine de Mdicis sur une ancienne fabrique de tuiles. la mort
dHenri II, elle installe la cour au Louvre. La proximit des Tuileries lui donne lide dy faire
construire par Philibert Delorme une maison de plaisance litalienne, entoure dun parc.
Le chantier est loin dtre achev sa mort, mais il est poursuivi par ses successeurs. Henri IV
fait difier la Grande Galerie et le pavillon Flore qui runissent le Louvre aux Tuileries. En juin
1662, Louis XIV donne une grande fte dans les jardins. Le Grand Carrousel met en scne
cinq quadrilles commands par le Roi et les grands du royaume devant dix quinze milles
spectateurs. Le Roi-Soleil confie Le Vau et Le Ntre lembellissement du palais et du parc.
Le premier rige le pavillon de Marsan, tandis que le second cre la belle perspective centrale,
creuse les bassins, amnage les parterres la franaise. la fin du XVIIIe sicle, le palais abrite
lOpra et la Comdie franaise. Lieu des divertissements, il devient un lieu politique sous
la Rvolution. Louis XVI et sa famille y vivent de 1789 1792, aprs que les meutiers
parisiens les ont ramens de Versailles Paris. Le 10 aot 1792, la prise des Tuileries
par les sans-culottes parisiens consacre la chute de la monarchie. Le palais est mis sac
et six cents gardes suisses sont massacrs. Rebaptises Palais National, les Tuileries deviennent
le sige de la Convention, puis en 1796, du Conseil des Cinq-Cents. Napolon Ier, Louis XVIII,
Charles X, puis Louis-Philippe et Napolon III en font leur rsidence officielle. Symbole
du pouvoir, elles sont incendies en 1871 par la Commune. Seuls les pavillons de Flore
et de Marsan ont t reconstruits. Les jardins demeurent un modle de grce et de got
avec la grande alle qui, dun lan triomphal, souvre sur la perspective des Champs-lyses.
LE SYMBOLE
Raconter les Tuileries, cest raconter la France. Le palais a vcu toutes les convulsions
de son histoire, de la Rvolution la Commune. La force du symbole est telle quil est envisag
de les reconstruire. Mais le projet dchane les passions tant le lieu reste li lhistoire du pays.
Perspective sur les jardins du Louvre et des Tuileries, carte postale, d. Mona, vers 1920.
62
63
64
LE
DRAPEAU TRICOLORE
Tr oi s co u l e ur s p o u r un pays
DEPUIS
1789
Lexercice des futurs poilus, square Ordener, crayon sur papier, dbut du XXme sicle.
65
L A B ASTILLE
Le my the fo nd ate ur d e l a R p u bl iq ue
1789
La place de la Bastille en 2012. Au premier plan, surmonte de son angelot, la Colonne de Juillet
clbrant les Trois Glorieuses de 1830.
67
LA
GUILLOTINE
l a Fr ance d cap ite
1792-1977
La guillotine attend l'arrive de Dor et de Berland, Le Petit Journal illustr, 8 aot 1891.
68
69
L A M ARSEILLAISE
Le chant de l a R p ubl iq ue
1792
70
LA
BAIGNOIRE DE
M ARAT
1793
LE SYMBOLE
Le geste de Charlotte Corday fait de Marat
la victime expiatoire de la Rvolution, un martyr
de la Libert. La baignoire en est la mtaphore,
et a suivi une curieuse destine. Aprs une odysse
qui la fit voyager au gr des hritages, elle choua
entre les mains du recteur cur de Sarzeau, dans
le Morbihan, qui la vendit au Muse Grvin
la fin du XIXe sicle.
71
72
LE
MTIER
J ACQUARD
L a r vo lutio n i nd u str ie l l e
1801
Un tisseur au mtier Jacquard, usine de Flers, carte postale, dbut du XXe sicle.
73
LE
CHAPEAU DE
N APOLON
L a sil ho u e t te d e l' Em p e re u r
1799-1815
LE SYMBOLE
Te voil ! Lgendaire ! lance haineusement le prince Metternich, dans LAiglon
dEdmond Rostand, ladresse du chapeau mythique cens reprsenter lEmpereur dchu.
Le chapeau de Napolon et sa clbre redingote grise constituent en effet des lments
caractristiques de la silhouette napolonienne. Si les contemporains ne laperoivent pas
au cours des parades et sur les champs de bataille, la propagande officielle qui donne
naissance la lgende napolonienne se charge de la populariser. Du tableau
de Jacques-Louis David Le Premier consul franchissant le col du Grand Saint-Bernard
la Campagne de France dErnest Meissonier, en passant par la Bataille dAusterlitz
de Franois Grard ou encore Napolon visitant le champ de bataille dEylau dAntoine-Jean
Gros, ce chapeau symbolise un Empereur, un commandant en chef qui se veut proche
de ses hommes.
74
75
76
LA
LGION D HONNEUR
Le se rvice r co mp e ns
DEPUIS
1802
77
L E C ODE
CIVIL
L e d r o it co d i fi
1804
78
LA
GIRAFE DE
C HARLES X
Lart d e l a d ip l o m ati e
1826
LE SYMBOLE
La girafe de Charles X illustre les usages et
les pratiques diplomatiques. Il ntait pas rare
doffrir des animaux en guise de cadeaux
diplomatiques. Depuis le Moyen ge, ils taient
un signe de prestige pour celui qui les offrait
comme pour celui qui les recevait. La coutume
a perdur jusquaux annes 1980. Cest ainsi
que le Premier ministre indien offrit en 1985
Franois Mitterrand une lphante dAsie
du nom de Kaveri...
79
L E FAUTEUIL
DE
B ALZAC
1829-1852
insi ferez-vous, vous qui tenez ce livre dune main blanche, vous qui vous
enfoncez dans un moelleux fauteuil en vous disant : peut-tre ceci va-t-il
mamuser. Le ton est donn ds le propos liminaire du Pre Goriot par
Honor de Balzac (1799-1850). Ce fauteuil, de style Restauration, le suit de maison
en maison, tout comme sa table de travail. Reflet dun art de vivre la franaise,
il accompagnait linsatiable labeur de lcrivain, drap dans sa longue robe blanche
de cachemire lhiver, de toile lt. Car il ntait pas rare que lauteur de La Comdie
humaine passe seize dix-huit heures par jour assis dans son fauteuil travailler.
LE SYMBOLE
LE
FAUTEUIL DE
B ALZAC
1829-1852
insi ferez-vous, vous qui tenez ce livre dune main blanche, vous qui vous enfoncez
dans un moelleux fauteuil en vous disant : peut-tre ceci va-t-il mamuser.
Le ton est donn ds le propos liminaire du Pre Goriot par Honor de Balzac
(1799-1850). Ce fauteuil, de style Restauration, le suit de maison en maison, tout comme
sa table de travail. Reflet dun art de vivre la franaise, il accompagnait linsatiable labeur
de lcrivain, drap dans sa longue robe blanche de cachemire lhiver, de toile lt. Car il
ntait pas rare que lauteur de La Comdie humaine passe seize dix-huit heures par jour
assis dans son fauteuil travailler.
LE SYMBOLE
Le fauteuil de Balzac, Chteau de Sach, Val de Loire. Il y crivit notamment Les Illusions Perdues.
81
L ES
POIRES DE
DAUMIER
1831
Le FauteuilMtamorphose
de Balzac, poque
Restauration,
de Sach,
ValPhilipon,
de Loire
de Louis-Philippe
en poire,Chteau
encre sur papier,
Charles
1831.
82
83
LA
1830-1831
La Libert guidant le peuple, Eugne Delacroix, huile sur toile, 1830, Muse du Louvre.
84
L ES H ALLES
DE
B ALTARD
Le Ventre d e Par is (Z o l a)
1858-1972
LE
DAGUERROTYPE
L a Fr ance d o cum e nt e
1835-1855
86
87
LE
TABLEAU NOIR DE
JULES FERRY
l co l e d e l a Rp u bl iq u e
1879-1883
LE SYMBOLE
Le tableau noir est la mtaphore de lcole
de Jules Ferry, qui voulait enraciner les valeurs
et la culture rpublicaines par lcole, parce que
pour lui lducation du peuple tait la condition
indispensable dune dmocratie solide et durable.
Symbole de la connaissance, il est aussi celui
de la prparation la Revanche contre
lAllemagne.
88
LA
BARBE DE
V ICTOR H UGO
1818-1885
LE SYMBOLE
La barbe de Victor Hugo, immortalise par
Nadar en 1883, est la mtaphore de l'crivain,
de son gnie, de son uvre. Elle est aussi
la barbe de celui qui, la fin de sa vie, se posa
en patriarche de la gnration romantique
et en prophte d'une nouvelle re. Cest lui qui
annona, au milieu du XIX e sicle, la cration
des tats-Unis d'Amrique : Un jour viendra
(...) o vous toutes, nations du continent, sans
perdre vos qualits distinctes et votre glorieuse
individualit, vous vous fondrez troitement
dans une unit suprieure, et vous constituerez
la fraternit europenne.
89
90
LE
COQ GAULOIS
Lo rg ue il Fr anais
805. Napolon Ier a vaincu, mais cest le coq gaulois qui rveille le monde /
Et son cri peut promettre votre nuit profonde / Laube du soleil dAusterlitz.
(Victor Hugo, Odes et Ballades, 1826). Le coq apparat ds lAntiquit sur
les monnaies gauloises. Il devient une allgorie de la France la suite de lhomonymie
qui amuse les Romains : en latin gallus signifie gaulois etcoq. Au Moyen ge, on retrouve
le coq dans certaines reprsentations des rois de France. Les Anglais auraient us du jeu
de mots pour railler lorgueil du roi Philippe Auguste. Utilis pendant la Rvolution
franaise, notamment sur le sceau du Directoire, il sera propos comme emblme
Napolon Ier. Mais lAigle refuse car le coq na point de force, il ne peut tre limage
dun empire tel que la France. Aprs les Trois Glorieuses, Louis-Philippe dcide que le coq
gaulois doit figurer sur les boutons dhabits et surmonter les drapeaux de la garde nationale.
Cest sous la IIIe Rpublique quil devient un emblme national : la grille du parc du Palais
de llyse, construite la fin du XIXe sicle, est orne dun coq.
LE SYMBOLE
Symbole national, mme si on lui prfre Marianne ou le drapeau tricolore, le coq gaulois
est reprsent sur linsigne des maires, ainsi que sur de nombreux monuments aux morts
et sur la grille du palais de llyse. Il est galement utilis comme emblme sportif.
91
L ES G RANDS B OULEVARDS
Ur bani sm e e t m o de r nit
DEPUIS
1850
aris est le cur de la France. Mettons tous nos efforts embellir cette grande cit,
amliorer le sort de ses habitants. Tel est le projet de Louis-Napolon Bonaparte
en ce 10 dcembre 1850. Il en confie la mise en uvre un homme nergique,
Georges-Eugne Haussmann (1809-1891), nomm prfet de la Seine en 1853. Outre
louverture de la Grande Croise dest en ouest (la rue de Rivoli et la rue Saint-Antoine)
et du nord au sud (du boulevard de Sbastopol au boulevard Saint-Michel), Haussmann
achve le trac des Grands Boulevards. Les boulevards dsignaient lorigine les remparts
forms de terrasses amnages pour linstallation des canons. Ils ont t transforms
en larges avenues doubles de contre-alles bordes darbres sous Louis XIV. Le prfet
de la Seine relie le premier cercle de Grands Boulevards celui du mur des Fermiers
gnraux. Il perce sur la rive droite le boulevard qui porte son nom, ou encore le boulevard
Voltaire, et sur la rive gauche le boulevard Saint-Germain. Il impose de nouvelles normes
de construction, lalignement de faades au plan identique, et des immeubles dont la hauteur
est proportionnelle la largeur de la rue. Ces boulevards deviennent un haut lieu de la vie
parisienne, o se pavane la bourgeoisie du Second Empire. Les cafs prolifrent boulevard
des Italiens. Toute la socit lgante dfile au glacier Tortini et au Caf de Paris frquents
par Alexandre Dumas, Alfred de Musset ou Thophile Gautier, tandis quOffenbach triomphe
au thtre des Varits du boulevard Montparnasse.
LE SYMBOLE
Les Grands Boulevards sont le symbole de lhaussmannisation de Paris. Si certains la dcrient,
tels Baudelaire expliquant que Le vieux Paris nest plus ; la forme dune ville / Change plus
vite, hlas ! Que le cur dun mortel , dautres la louent : La civilisation se taille de larges
avenues dans le noir ddale des ruelles (). Des habitations dignes de lhomme dans
lesquelles la sant descend avec lair et la pense sereine avec la lumire du soleil.
(Thophile Gautier). Par-del cette bataille entre conservateurs et partisans de ce chantier
de lhistoire de lurbanisme, Haussmann reste, dans la mmoire collective, le pre du Paris
moderne.
92
93
L E M UR
DES
F DRS
L a Co m mune
1871
M ARIANNE
l a fil l e d e l a Rp u bli q u e
DEPUIS
1792
95
L A TOUR E IFFEL
l a vi tr ine d e Par is
1887-1889
Les travaux de la Tour Eiffel, les ouvriers 50 mtres au-dessus du sol, gravure de Louis Tinayre,
Le Monde Illustr, 11 fvrier 1888.
96
97
98
L ES
GUEULES NOIRES
Le m o nd e o uvr ie r
XIXE-XXE
SICLE
lles sont les hrones de Germinal de Zola (1885). Mais elles sont noires
de souffrance, de sacrifices, de labeur au fond de la mine. Les Gueules Noires
dsignent les mineurs de fond qui ont travaill lextraction du charbon du XIXe
sicle jusqu la fermeture des derniers puits au dbut du XXIe sicle. Mais ce surnom
voque surtout une identit, une culture, un langage de ce pays noir, o lon est mineur
de pre en fils. Il renvoie aux conditions de travail prouvantes, inhumaines, dans
les fosses qui dvorent les hommes, les femmes, les enfants chaque effondrement
ou coup de grisou.
LE SYMBOLE
Les Gueules Noires sont lemblme de la mine et des mineurs. Elles rsument lhistoire
du monde ouvrier, son patrimoine industriel, sa mmoire. Elles rappellent aussi la varit
des flux dimmigration qui a marqu lhistoire de la mine : Belges, Polonais, Italiens ont
su dans les mines de charbon. Elles symbolisent enfin la lutte du travail et du capital ,
comme le formulait admirablement Zola dans Germinal : Des hommes poussaient
une arme noire, vengeresse, qui germait lentement dans les sillons grandissant
pour les rvoltes du sicle futur, et dont la germination allait faire bientt clater la terre.
99
L E M OULIN R OUGE
l a Be l l e p o q u e
DEPUIS
100
1889
LE
CINMATOGRAPHE
1895
101
L E JACCUSE
D MILE
ZOLA
L affaire Dreyfu s
1898
3 janvier 1898. Alors que le capitaine Alfred Dreyfus, accus de haute trahison,
purge sa peine au bagne de lle du Diable, mile Zola prend sa plume.
Dans le journal LAurore de Georges Clemenceau, il sadresse publiquement
au prsident de la Rpublique. Aprs avoir rappel lhistorique de lAffaire, il dresse
une liste des accuss : Jaccuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam () jaccuse
le gnral Mercier () jaccuse le gnral Billot Cest le cri dun crivain renomm,
au nom de la vrit et de la justice : Quant aux gens que jaccuse, je ne les connais pas (),
je nai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que () des esprits
de malfaisance sociale. () Je nai quune passion, celle de la lumire, au nom de lhumanit
qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Le style est saillant, la rhtorique digne
dun prtoire. LAffaire Dreyfus est relance. Comme il lavait prvu, Zola est jug pour
diffamation devant la cour dassises de la Seine en fvrier 1898. Lcrivain sera condamn
un an de prison ferme et 3 000 francs damende. Le soir-mme, il prend les chemins
de lexil et gagne lAngleterre.
LE SYMBOLE
La porte du Jaccuse est immense. Outre la relance de lAffaire, elle cristallise les positions
des dreyfusards et des antidreyfusards. Les dreyfusards, favorables la rvision du procs,
se battent pour le triomphe de la Justice, de la Vrit, des Droits de lhomme.
Les antidreyfusards se dchanent contre lcrivain, tratre la nation, qui ose ternir limage
de larme. Symbole de lAffaire Dreyfus, ce texte marque la naissance de lintellectuel
engag , qui prend publiquement la parole pour dfendre des valeurs. Il est galement
emblmatique de laffirmation de la presse comme quatrime pouvoir .
102
103
104
LE
PETIT PRE
C OMBES
1902-1905
La lutte anticlricale du Petit pre Combes symbolise la politique laque mise en place
au dbut de la IIIe Rpublique. Il sagit alors dune lacit de combat. La lacisation
progressive de la socit au XXe sicle a largi cette valeur rpublicaine en une neutralit
bienveillante lgard des religions, au sein de ltat et de lcole.
Le Combes de lactivit dvorante pour faire le mal, caricature dAchille Lemot, Le Plerin, 27 juillet 1902.
105
L ES
VTEMENTS
DE S AVORGNAN DE B RAZZA
L a co l o ni sati on
1880-1905
aigre et hirsute, le dos vot, la barbe inculte, les yeux infiniment doux,
il apparaissait dans notre sceptique Paris comme un prophte du dsert.
(Gabriel Hanotaux). Cette description de Pierre Savorgnan de Brazza
(1852-1905) reflte la fascination des contemporains pour lexplorateur. Cet Italien
naturalis franais a senti trs jeune lappel de la mer et de lAfrique. En 1875, il quitte
Libreville et part la dcouverte du fleuve Ogoou. De retour Paris en 1878, il souhaite
gagner de vitesse son meilleur ennemi, Stanley, qui explore le Congo pour le compte du roi
des Belges, Lopold II. Brazza repart pour le Congo en 1880 pour y tablir la domination
franaise. Aprs avoir fond Franceville, il remonte le fleuve Congo et entre en contact
avec le grand chef noir Makoko qui accepte le protectorat franais. Le Congo franais est n.
Brazza organise la colonie franaise et fonde Brazzaville en 1884. Mais sa gestion du Congo
est critique par le parti colonial, qui lui reproche de faire obstacle lexploitation
des colonies et au travail forc des indignes. Du par la trahison de son idal de conqute,
Brazza steint le 14 septembre 1905 Dakar, victime de la dysenterie.
LE SYMBOLE
Savorgnan de Brazza est le symbole de la conqute coloniale de lAfrique et de la course
au clocher laquelle se sont livres les puissances europennes dans les annes
1880-1890. Le plus populaire des explorateurs franais a su entretenir sa lgende
de librateur desclaves, daptre de la paix et de chantre de la mission civilisatrice
de lhomme blanc.
106
107
LE
VACCIN DE
PASTEUR
Le pr o gr s de l a m d e cine
1885
108
L E B LRIOT
l a co nq u te d u cie l
1909
LE SYMBOLE
Les marins de LEscopette aperoivent Blriot, carte postale, Aqua-photo diteur, 1909.
109
L E B ON M ARCH
L a soci t d e conso m m atio n
DEPUIS
1852
e veux dans Au bonheur des dames faire le pome de lactivit moderne. Tel est
lobjectif dmile Zola lorsquil travaille la rdaction de ce roman sur les grands
magasins, publi en 1883, et qui sinspire du Bon March. Situ sur la rive gauche
de la Seine, Le Bon March est la proprit dAristide et Marguerite Boucicaut. Larchitecture
est mise au service de la vente : le grand magasin doit tre lumineux et tout est conu
pour le regard, la circulation des clientes, des produits, notamment grce lescalier central
qui permet une vue densemble sur les rayonnages. Boucicaut rvolutionne les techniques
de vente. Jusquau dbut du Second Empire, le commerce de dtail tait spcialis
et fonctionnait sans prix affich. La vente rsultait dun marchandage entre lacheteur
et le vendeur. Au Bon March est instaur le prix fixe du produit sur tiquette. Les ventes
sont faites petit bnfice, mais compenses par limportance des marchandises coules.
Les vendeurs sont rmunrs en fonction de leurs ventes. Lentre est libre. Cest la naissance
des grands magasins et du lche-vitrine, sans obligation dachat. Enfin, laccent est mis
sur les nouveauts, la diversit des produits, les articles de mode. Le magasin connat
rapidement un immense succs. En 1852, date de sa cration, il compte douze employs
et quatre rayons. En 1867, le Bon March emploie 1 800 personnes dans trente-neuf rayons
pour un chiffre daffaire de plusieurs millions de francs. Boucicaut ne cesse de perfectionner
sa formule : il institue les chefs de rayons spcialiss, cre un service de livraison domicile,
inaugure la vente par correspondance et la rclame . On limite avec succs : Jules Jaluzot
fonde en 1865 le Printemps, tandis quErnest Cognacq et Marie-Louise Jay ouvrent
la Samaritaine en 1869.
LE SYMBOLE
Le Bon March est lemblme des grands magasins du XIXe sicle. Il est le reflet
des transformations conomiques et sociales de lre industrielle : la cathdrale des temps
modernes quvoquait Zola. La mcanisation des industries textiles avait en effet permis
cette production de masse qui fit le succs des premiers grands magasins. Mais le Bon
March est aussi lune des premires entreprises commerciales qui dveloppe des techniques
de marketing avant la lettre. Il est en quelque sorte le symbole de la naissance de la socit
de consommation.
Le Bon March, dpartement des Tapis dOrient et vieilles tapisseries, hliogravure, dbut du XXe sicle.
110
111
112
L ES B RIGADES
DU
T IGRE
Le nouve au visage d e l a po li ce
1907-1935
but du XXe sicle. Cest la Belle poque. Mais malfrats, bandits, bagnards rdent
sur les routes de France. Linscurit est grandissante. Les bandits dHazebrouck
commands par le capitaine Pollet attaquent et pillent les bourgs du Nord
de la France. Entre 1905 et 1908, les chauffeurs de la Drme torturent, assassinent
et volent des personnes ges. Le Tigre entend restaurer lordre. Georges Clemenceau
(1841-1929), prsident du Conseil et ministre de lIntrieur, cre en 1907 douze brigades
de police mobile charges de lutter contre le crime organis sur tout le territoire.
Elles sont quipes de voitures ds 1910, des limousines de De Dion-Bouton puis
Panhard-Levassor, et utilisent les mthodes et techniques de la police scientifique,
telles que les anthropomtries de Bertillon. Lefficacit de ces units, rapidement appeles
Brigades du Tigre , le surnom politique de Clemenceau, a fait leur gloire.
LE SYMBOLE
La naissance des Brigades du Tigre consacre la cration de la police judiciaire. Elles sont
aussi lun des emblmes de luvre politique de Georges Clemenceau, premier flic
de France avant dtre le Pre-la-Victoire en 1919. Leur succs a inspir la tlvision
et le 7e Art.
La Fin du Bandit, couverture du Petit Journal, Supplment Illustr, 12 mai 1912. Le prfet de police Lpine
procde ici larrestation de Jules Bonnot, chef de la clbre Bande Bonnot.
113
L ES
TAXIS DE LA
M ARNE
1914
e 6 septembre 1914, alors que les avant-gardes allemandes sont une cinquantaine
de kilomtres de Paris, le gnral Gallieni rquisitionne six cent trente taxis parisiens,
en majorit des Renault AG1, pour acheminer des troupes franaises en renfort.
Partis de la place des Invalides en deux convois, les 6 et 7 septembre, ils acheminent
une vitesse moyenne de 25 km/h plus de cinq mille soldats des 103e et 104e rgiments
dinfanterie dans la zone des combats Nanteuil-le-Haudouin et Silly-le-Long.
Quatre cinq soldats sont chargs par taxi en plus du chauffeur, certains faisant le voyage
sur le marchepied. Les vhicules rquisitionns regagnent ensuite la capitale, o
leurs courses seront payes par ltat.
LE SYMBOLE
Lusage indit des taxis parisiens ne changea assurment pas le cours de la bataille
de la Marne, tant les effectifs transports taient modestes au regard des centaines
de milliers dhommes engags. Mais lpisode acquit, grce la presse et la propagande,
une forte porte symbolique. Les taxis parisiens reprsentaient lingniosit franaise
et le sursaut national de tous les Franais brisant la progression de lenvahisseur dans
une sorte de remake de Valmy, version 1914. La lgende des taxis de la Marne tait ne.
Un soldat au volant de lun des taxis de la Marne, photographie, anonyme, septembre 1914.
114
115
LE
WAGON DE
R ETHONDES
Gue r re e t paix
11 novembre 1918
116
LA
TOMBE DU
S OLDAT
INCONNU
Le d evoi r d e m m o ir e
DEPUIS 1919
LE SYMBOLE
La Tombe du Soldat inconnu est un haut lieu
de notre mmoire nationale. Au-del de la
commmoration des combattants de la Premire
Guerre mondiale, il rend hommage au sacrifice
de tous les soldats franais morts pour la patrie,
sa dfense, son intgrit. Cest ainsi que le
11 novembre 1940, les tudiants y manifestrent
117
118
LE
LOOK DE
J OSPHINE
Les A nn e s Fo l le s
ANNES 1920
La premire star noire de lHistoire est lemblme des Annes Folles. Sa silhouette,
ses attitudes, ses cheveux courts la garonne refltent la libration du corps des annes
1920-1930. Le look de Josphine symbolise galement le got pour lexotisme
et la culture ngre qui a inspir les peintres cubistes de cette poque. Considre
par certains comme le strotype de limage dgradante du Noir, Josphine luttait
avec humour contre les prjugs : Puisque que je personnifie la sauvage sur scne,
jessaie dtre aussi civilise que possible.
119
LE
TANDEM DE
1936
Les pr e m ie r s co ng s pay s
1936
LE SYMBOLE
Le tandem est le symbole des premiers congs de
lhistoire de France et de lt 1936.
Le jumelage des jambes accompagne celui
des curs, et reflte lembellie dune condition
ouvrire qui accde la dignit grce aux conqutes
sociales du Front populaire. Il illustre galement la
naissance des loisirs populaires, notamment sportifs,
comme en tmoigne lengouement pour le Tour de
France, inscrit dans la lgende depuis le dbut du
XXe sicle.
LE
PANTALON DE
C OCO C HANEL
L a r vo lutio n d u pantal o n
ANNES 1930
121
LE
TIRAILLEUR SNGALAIS
DE B ANANIA
E xotism e e t co m m e rce
1912-1967
122
123
LA
LIGNE
M AGINOT
L a g ue rr e d e po siti on
1930-1940
1940
LE SYMBOLE
La poigne de main de Montoire est lemblme
de la collaboration entre ltat franais
et le Troisime Reich. Pour les Franais qui
considrent lAllemagne comme un ennemi
(toute la moiti nord de la France est alors
occupe), cette entrevue fut aussi perue
comme un acte de trahison du rgime de Vichy.
Les images de lvnement sont significatives,
matrialisant la hirarchie entre vainqueur
et vaincu. Leur porte symbolique fut utilise
par la propagande allemande, par le rgime
125
126
LE
MICRO DU
G NRAL
L a R sistance
18 JUIN 1940
De Gaulle sexprime soixante-sept fois sur les ondes de la BBC durant le second conflit
mondial, notamment au cours de lmission radiophonique Les Franais parlent aux
Franais , ce qui lui vaudra le surnom de Gnral micro . Linvention du gnial Edison
(qui mit galement au point le phonographe et le tlgraphe) incarne ainsi
la voix de la libert , le lien, sonore avant dtre visuel, presque charnel, entre
les Franais et le chef de la France Libre. Symbole de la Rsistance, ce micro est aussi
le mythe fondateur du gaullisme.
127
LE
1944
128
129
L E TOUR
DE
F RANCE
DEPUIS
1903
130
131
L A N ATIONALE 7
Les vacance s d t
ANNES
1950-1960
132
L A 2 CV
Les Tre nte Gl o r ie use s
1948-1990
LE SYMBOLE
133
L E D EUXIME S EXE
L a li b r atio n de l a fe mm e
1949
134
135
JE
VOUS AI COMPRIS
1958
136
LE
JOURNAL TLVIS
L a rvo lu ti on m d iatiq ue
DEPUIS 1949
LE SYMBOLE
Le journal tlvis, emblmatique de lhistoire
de la tlvision, symbolise lentre dans lre
mdiatique. Durant les Trente Glorieuses,
le nombre de rcepteurs passe de deux dix
millions. Au poids des mots et au choc des
photos de Paris Match, le journal tlvis
137
L A N OUVELLE VAGUE
Le ci n m a d avant- gard e
ANNES
1960
138
LE
CUIR DE
J OHNNY
Lam r i canisati o n d e l a so ci t
ANNES
1960
LE SYMBOLE
Le blouson noir de Johnny Halliday est
le symbole de lamricanisation de la socit
franaise durant les annes 1960. Il est
galement lun des emblmes de la culture
jeune qui saffirme cette poque, marque
par le dsir de transgression n en Mai 68.
Elle se caractrise, selon le sociologue Edgar
Morin, par une panoplie commune ,
blue-jeans, polos, blousons et vestes de cuir,
un langage commun ponctu dpithtes
superlatives comme terrible, sensass ,
des crmonies de communion dans
une mme aspiration maintenir en vie
la flamme de la subversion.
139
140
LE
PAV DE
M AI 68
L a jeu ne sse e n co l re
1968
Le pav est lemblme des vnements de Mai 1968. Symbole des manifestations
tudiantes, il est le vecteur des revendications dune jeunesse qui refuse de se taire
et rclame une libralisation de la socit, une socit o lon prfre lamour la guerre.
Mai 68, Les Parisiens reprennent une vie normale, contournant les pavs laisss par les meutes,
photographie, Reg Lancaster, mai 1968.
141
L ES
S IMONE V EIL
LARMES DE
1974
142
1981
LE SYMBOLE
Le poing et la rose sont les emblmes du parti
socialiste depuis le congrs dEpinay en 1971.
Progressivement, la rose devint un symbole
143
L E C ENTRE P OMPIDOU
L a cu ltu re po ur to us
DEPUIS 1977
144
145
LE
MINITEL
Mad e i n Fr ance
1982-2012
L E TGV
L a Fr ance gr and e vite sse
1982
LE SYMBOLE
Fleuron de la SNCF, grande fiert industrielle
nationale, le TGV est le symbole de linnovation
technologique franaise. Il est galement
le symbole de la mobilit croissante de
notre socit.
147
LA
PYRAMIDE DU
LOUVRE
1989
La pyramide du Louvre, conue par Ieoh Ming Pei, la demande de Franois Mitterrand.
148
149
L A C OUPE
DU MONDE
1998
1998
LE
FRANC
De l a Fr ance l E uro pe
1360-2002
151
L E C ONCORDE
Gr and e ur e t d cl in
1976-2003
152
153
Crdits photographiques
Les photographies et reproductions sont de David Bordes
et :
Bibliothque Nationale de France pp. 76, 81, Branger p. 127, Cit de la Musique p. 85, Bettmann/Corbis p. 113,
Corbis p. 138, 149, D.R. pp. 8, 29, 88, 123, 124, 130, 131, 134, 135,136, 137, 140, 141, 147, E. Hutin p. 113,
Pierre-Antoine Foulquier / Shutterstock.com p. 147, Getty images pp. 27, 129,
IgorGolovniov / Shutterstock.com p. 151, p. 98, Raoul Lamourdedieu p. 13, Reg Lancaster p. 138,
J.P. Leloir p. 137, Pascal Lematre pp. 48, 122, ed. Marabout, p. 57, ed. Mona p. 61,
Jean Moral Brigitte Moral, p. 117, Ieoh Ming Pei p. 147, R. Piano/R. Rogers/G.Franchini p. 143,
Achim Scheidemann/dpa/Corbis p. 148, Jose Ignacio Soto p. 47, La Vie du Rail p. 145, ed. Yvon p. 69
Textes
Sabrina Tricaud
Remerciements
Nous tenons remercier tous ceux qui ont apport leur aide prcieuse la ralisation de cet ouvrage :
Eric Roussel,
Pascal Lemaitre, Dominique Demey, Ccile Febvre-Flory, Marc Couturier.