Refus de Soins en Situation D Urgence TRES FAIBLE
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URGENCES
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REFUS DE SOINS EN SITUATION DURGENCE
1. Praticien Hospitalier.
2. Professeur des Universits, Praticien Hospitalier.
Correspondance :
Universit Paris-Descartes, AP-HP, Htel Dieu/Cochin, Service des urgences, Place
du Parvis Notre-Dame, 75004 Paris.
1. Introduction
Pendant de trs longues annes, les rapports entre le patient et son mdecin ont
t rgis selon le principe de bienfaisance. En dautres termes, le mdecin por-
teur dun savoir, scientifique de surcrot, savait ce qui tait bon pour le patient.
Les examens, les traitements mdicaux ou chirurgicaux ntaient que modr-
ment soumis discussion, mme si le Code de Dontologie ou tout simplement
la bonne pratique recommandait quune information soit dlivre.
La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et la qualit du systme
de sant a affirm avec force le droit au consentement aux soins, impliquant de
fait une information descriptive pour que le patient puisse prendre sa dci-
sion en toute connaissance de cause. Dune manire caricaturale, le mdecin ne
devrait plus dire voil ce que je vais faire , mais voil ce que je vous pro-
pose... les avantages sont les suivants, les complications prvisibles sont rares,
lalternative serait de... . Quantitativement et qualitativement, le message nest
donc plus de mme nature...
Poser le concept du droit au consentement induit forcment la notion du
droit au refus . Celui-ci ne peut tre formalis quau terme dune information
claire et loyale qui, plus que descriptive, devient explicative . Le but est
daboutir une relation contractuelle, base sur une confiance rciproque.
Chapitre
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Refus de soins
en situation durgence
G. K
IERZEK
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, J.-L. P
OURRIAT
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Culturellement, le changement est profond puisque le refus de soins fait appel
au principe dautonomie de la personne. Cette libert de choix heurte de plein
fouet la conviction profonde des soignants qui est la sauvegarde de la vie ou du
moins ce qui est bon pour la sant.
On pourrait penser quen urgence , tout cela devient secondaire puisquil y
a urgence . Il nen est rien et la loi de 2002 na pas prvu dexception dans ce
domaine. La question devient alors de quelle urgence parle t-on ? sur quel tat
antrieur ? dans quelles conditions ? et surtout quel est le degr dautono-
mie du patient ce moment prcis ? . La rponse nest pas simple, quelle soit
thique ou juridique...
2. Causes du refus de soins
La typologie du refus de soins est large et de nombreux motifs peuvent en tre
lorigine. Cest l que commence un rle essentiel du mdecin, celui dentre-
prendre avec son patient une discussion empathique pour dterminer la raison
du refus. Ce passage est dautant plus important quil peut sagir de soins vitaux
pouvant modifier le pronostic. Il ne saurait tre question de se satisfaire dune
rponse rapide du patient ou de son entourage car tout mdecin qui se trouve
en prsence dun malade ou dun bless en pril ou, inform quun malade ou
un bless est en pril, doit lui porter assistance ou sassurer quil reoit les soins
ncessaires
(1)
. Cest donc par linstauration dun climat de confiance quune
dcision adapte pourra tre prise conjointement.
Ainsi, au terme de lentretien, la raison invoque au refus de soins pourra tre
au minimum le respect dune marge de libert laisse au patient dans un choix
dont les enjeux ne seront clairs que si une information dtaille lui a t dlivre.
Dans le mme ordre dides et de mme nature, tout soin vcu comme une
atteinte la dignit de la vie pourra tre refus et donc le choix respect.
Il peut sagir dun refus de soins douloureux ou jugs comme tels, quils soient
redouts par le patient car il sait que leur instauration marque un tournant dans
lvolution de sa maladie, soit parce quil connat ces soins pour les avoir dj
vcus. Leur rptition devient insupportable, marquant ltat dpuisement psy-
chologique du patient. On peut percevoir dans cette dernire ventualit une
volont den finir, lapproche dune fin de vie, la revendication dun droit
mourir dans la dignit. Le refus dtre nouveau intub, ventil, hospitalis en
ranimation pour un insuffisant respiratoire chronique dont cest la nime
dcompensation marque bien les limites de laction mdicale.
Enfin la dimension culturelle dun refus de soins ne saurait tre laisse de ct :
la transfusion pour un africain peut tre attribue laggravation de sa maladie
voire une issue fatale proche
(2)
.
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3. Lexpression du refus de soins
3.1. thique et refus de soins
3.1.1. Le principe dautonomie
Linterrogation nest pas nouvelle : Musset, sentant la fin, refuse les soins
danciennes amies... Rainer Maria Rilke meurt dune leucmie au sanatorium de
Valmont, aprs avoir refus les traitements...
Le refus de soins fait appel au principe dautonomie et de dignit. Cest la capa-
cit grer seule sa vie quotidienne. Cest la facult dagir par soi-mme en se
donnant sa propre loi ; lautonomie est une libert intrieure, une capacit
choisir de son propre chef, sans se laisser dominer par ses tendances, ni se laisser
dominer de faon servile par une autorit extrieure. Classiquement on distingue
trois niveaux dautonomie : lautonomie daction (autonomie de se dplacer),
lautonomie de pense (argumenter, rflchir et dcider), lautonomie de volont
(se dcider en fonction dune rsolution consciente et personnalise).
Cest donc la revendication lgitime de la responsabilit sur sa propre vie qui est
le cur du refus de soins.
3.1.2. Les difficults thiques
Nanmoins, le principe dautonomie vient en contradiction avec la dimension
paternaliste de la relation mdicale (sauvegarde de la vie), voire avec le principe
de bienfaisance, notamment en ranimation, et ceci jusqu un pass encore trs
proche. Et bien que le Code de Dontologie (CD) stipule que le mdecin doit
respecter la volont de la personne aprs lavoir informe des consquences de
son choix et avoir tout mis en uvre pour la convaincre daccepter les soins
indispensables..., il est galement rappel le devoir impratif dassistance et de
soins
(3)
et son obligation dassurer personnellement au patient des soins
fonds sur les donnes acquises de la science
(4)
.
Par ailleurs, le principe dautonomie, garant de la libert individuelle, nengage
pas uniquement celui qui lexerce.
Le personnel soignant, au premier rang, peut voir bousculer des convictions pro-
fondes, qui motivent sa vie professionnelle et gnralement qui ont t dter-
minantes dans le choix de son mtier.
La collectivit est galement partie prenante. Le choix personnel de refuser des
vaccinations pour soi-mme et ses enfants, le refus de traitement dune maladie
haute contagiosit reprsentent un danger manifeste pour autrui et un cot
pour la socit. Il nest pas exclu que ces comportements puissent rentrer lave-
nir dans les procdures dindemnisation
(2)
.
ct de la difficult structurelle qui oppose ces deux principes (autonomie et
bienfaisance), dautres points amnent discussion :
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Concernant linformation dlivre au patient, le niveau de comprhension du
patient est videmment fondamental. De nombreux travaux ont montr les rel-
les difficults sur ce sujet, notamment dans le dcalage entre ce qui est dit et
ce qui est reu. Par exemple, en anesthsie, linformation doit porter sur ltat
du patient, son volution prvisible et les investigations ou soins ncessaires, la
nature et les consquences de la thrapeutique propose, les alternatives thra-
peutiques ventuelles, les suites normales dun traitement ou dune interven-
tion avec la rserve sur des complications ventuelles susceptibles dentraner un
allongement de lhospitalisation ou de la convalescence et les risques des inves-
tigations ou des soins
(5)
. En pratique, le degr de comprhension est variable,
notamment en fonction des profils comportementaux
(6)
.
Toujours dans le domaine de linformation, les progrs de la mdecine rendent
plus complexe le message. La surinformation souvent approximative, disponible
sur internet, contribue la difficult du ncessaire contrat de confiance entre le
patient et son mdecin.
Ainsi, dun patient passif recevant une vrit mdicale , on passe progres-
sivement un patient actif , prenant ses responsabilits au terme dune infor-
mation parfois multiple. Le patient devient un acteur du systme de sant. Par
consquence, les associations de patients jouent galement un rle, la fois
dans linformation mais aussi en prenant position sur tel ou tel choix thrapeu-
tique et en suscitant le dveloppement de la recherche dans des domaines appa-
remment dlaisss (par exemple, en matire de VIH, la promotion de protocoles
dinterruptions squentielles de trithrapie, rapidement arrts en raison de la
surmortalit que cela induisait
(7)
).
3.2. Rglementation et refus de soins
Venant lappui de lthique, le lgislateur a, depuis longtemps, voulu renforcer
le principe dautonomie dans le but dtablir une relation contractuelle, un con-
trat de confiance entre les parties qui deviennent des partenaires. Dans ce cadre,
linformation passait dun devoir thique une obligation rglementaire.
Le Code de Dontologie Mdicale consacre galement cette obligation de
recueillir le consentement et de respecter la volont du patient.
le mdecin doit la personne quil examine, quil soigne ou quil conseille,
une information loyale, claire et approprie sur son tat, les investigations et les
soins quil lui propose
(8)
,
le consentement de la personne examine ou soigne doit tre recherch
dans tous les cas
(9)
(art. 36 du CD),
lorsque le patient refuse les investigations ou le traitement, le mdecin doit
respecter ce choix aprs lavoir inform de ses consquences (art. 36 du CD).
Un arrt de la Cour de Cassation du 11 octobre 1988 prcise que le mdecin
ne peut, sans le consentement libre et clair de son malade, procder une
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intervention chirurgicale qui nest pas impose par une ncessit vidente ou un
danger immdiat pour lintress.
La circulaire du 6 mai 1995 introduit la Charte du malade hospitalis selon
laquelle tout patient, inform par un praticien des risques encourus, peut refu-
ser un acte de diagnostic ou un traitement, linterrompre tout moment ses
risques et prils .
La Loi du 29 juillet 1995 relative au respect du corps humain et lutilisation des
lments et produits du corps humain raffirme les principes de dignit et
dautonomie.
La Loi du 4 mars 2002 dfinit clairement le consentement aux soins et le devoir
dinformation. Le mdecin se doit dinformer sur les consquences du choix et
donc sur les consquences dun refus : toute personne prend avec le personnel
de sant et compte tenu des informations et des prconisations quil lui fournit,
les dcisions concernant sa sant (art. L. 1111-4).
Les textes internationaux vont dans le mme sens, avec une volont marque du
respect de la libert individuelle et du choix du refus. Rappelons que le principe
dautonomie fait partie intgrante de la culture anglosaxonne.
Aucun acte mdical ne peut tre pratiqu sans le consentement clair pra-
lable du patient .
Ce principe fondamental est rappel dans les textes suivants :
Dclaration dHelsinki de 1964 (art. 3 et 9).
Pacte international relatif aux droits civils et politiques de New York de 1966
(art. 7).
Dclaration de Manille de 1984 (art. 6).
Dclaration sur la promotion des droits des malades en Europe de 1994
(art. 3-1).
Convention du Conseil de lEurope sur les droits de lhomme et la biomde-
cine de 1996 (art. 5 9).
4. Consquences du refus de soins
4.1. Consquences pour le patient
Tout en respectant le principe dautonomie, les consquences sont videmment
diffrentes selon que les soins sont indispensables la survie ou quils sont
mineurs.
Pour des soins mineurs, sans jamais rompre le dialogue, les autres possibilits
thrapeutiques sont exposer sans parti pris, en dclinant leurs avantages et
leurs inconvnients. Si le patient laccepte, la participation la discussion du
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mdecin traitant, des proches, de la personne de confiance, est retenir de prin-
cipe. Diffrer la dcision est galement possible.
Pour les soins indispensables la survie, le refus peut conduire mettre en
danger la vie du patient. Ds lors, le principe dautonomie et de dignit se trouve
en contradiction avec le principe de souverainet. La souverainet est une valeur
philosophique fondamentale dont le but est le respect de la vie : est autonome
celui qui est souverain. Celui qui refuse un soin vital nest pas autonome.
loppos, le refus de soins vitaux qui se rclame du principe dautonomie et de
dignit, est une absurdit dans la manire de concevoir la relation mdecin-
malade.
En consquence, partir de l, il apparat que :
tout refus nest pas mettre sur le mme plan selon la nature des soins enga-
gs,
assurer la continuit des soins ou laccompagnement reste un devoir absolu,
comme tout droit, le droit au refus peut connatre certaines limites.
4.2. Consquences pour le mdecin
Avant tout, il faut rappeler que la non assistance personne en danger est un
dlit pnal, puni de cinq ans demprisonnement et de 75 000
damende
(10)
.
Cette ventualit, toujours possible, est prvenir par une attitude responsable
o toutes les prcautions sont prises, notamment par linformation, le dialogue,
la confiance, laccompagnement ou la continuit des soins.
Le passage du principe de bienfaisance (modle paternaliste) au principe dauto-
nomie (modle contractuel) est un acquis essentiel. Certains ont parl du pas-
sage de conscience confiance . Cependant, la notion de contrat a un ct
rducteur car le contrat suppose que le mdecin donne une information objec-
tive que le patient accepte ou refuse, lui laissant la totale responsabilit de son
choix. Le mdecin risque alors de se dsengager dune persuasion thique en se
limitant lEvidence Based Medicine , mais la mdecine se limite-t-elle
lobjectivit des faits identifiables et mesurables ?
(11)
5. Conduite tenir en situation durgence
5.1. Dfinition de lurgence
Lurgence mdicale, chirurgicale ou psychiatrique se dfinit par toute symptoma-
tologie dont le diagnostic et surtout le traitement, voire lorientation ne peuvent
tre diffrs. Malheureusement, depuis plusieurs annes, cette dfinition thori-
que sest trouve confronte une augmentation considrable des appels et des
consultations durgence pour des raisons diverses, notamment sociologiques.
Dans le cas du refus de soins, il est parfaitement tabli que lurgence doit tre
prise dans son sens le plus restrictif, cest--dire quand le patient ne peut plus
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revendiquer le principe dautonomie. Le lgislateur ne sy est dailleurs pas
tromp puisque la loi de mars 2002 ne prvoit pas lurgence (en gnral) comme
exception au respect du refus de soins.
Dans le cas o le patient est conscient et quil peut sexprimer, le consentement
aux soins est fondamental, donc le refus aux soins galement. Ds lors le mde-
cin doit tablir la confiance, convaincre laide dune information sur les risques
du refus, faire intervenir un autre mdecin etc. Le renfort dun autre collgue
urgentiste, dun spcialiste, du mdecin traitant ou du mdecin rgulateur est
toujours possible... Tout doit tre mis en uvre pour emporter ladhsion du
patient la proposition de soins. Ainsi, mme en cas de dtresse vitale chez un
adulte conscient, le refus doit tre respect tant quil na pas perdu connaissance
et quil reste capable dexprimer
(12)
.
En cas de refus dfinitif, limportant est de : 1) laisser une possibilit au patient
de revenir sur sa dcision (coordonnes tlphoniques par exemple), 2) conserver
la trace de linformation, 3) obtenir une attestation de refus o sont clairement
exposs risques et complications.
5.2. Les limites au refus de soins
5.2.1. Situation gnrale
Dans la logique de ce qui est crit plus haut, cest la perte dautonomie, cest-
-dire limpossibilit de sexprimer, la perte de conscience qui autorise ne pas
disposer de son accord. En cas de manquement, le mdecin sexpose lobliga-
tion dassistance personne en danger . Plusieurs conditions sont requises :
1) mise en jeu du pronostic vital, 2) lacte doit tre indispensable la survie du
patient, 3) lacte doit tre proportionnel son tat
(13)
.
5.2.2. Cas particuliers
La tentative de suicide
Le mdecin doit tout faire pour sauver la vie. Linformation de lentourage est
ncessaire, au besoin en rappelant la rglementation : Lorsque la personne est
hors dtat dexprimer sa volont aucune intervention ou investigation ne peut
tre ralise
sauf urgence ou impossibilit
, sans que la personne de confiance
prvue larticle L. 1111-6, ou la famille ou dfaut un des proches ait t
consult (art L. 1111-4, CSP . Au dcours de la ranimation, lentretien indi-
viduel permettra dexpliquer au patient la raison des actes pratiqus. La prise en
charge psychiatrique est habituelle.
Le grviste de la faim
L encore, la rponse du mdecin urgentiste est la mme : le grviste de la faim
peut mettre sa vie en danger au nom du principe dautonomie. Dans ces condi-
tions, il est en droit de refuser tout soin ou acte mdical qui ne peut lui tre
impos contre sa volont.
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En revanche, quand le grviste de la faim prsente une atteinte des fonctions
suprieures, notamment sil nest plus conscient, le devoir du mdecin est de
dcider lhospitalisation o des soins adapts son tat lui seront prodigus.
Le malade mental
Le problme est plus complexe selon que la pathologie psychiatrique est connue
ou non, quil sagit dune urgence ou que la patient est dangereux pour lui-
mme ou son entourage...
Dans ce contexte, la Loi du 4 mars 2002 est difficile appliquer. Que dire du
principe dautonomie devant un tat psychotique aigu o la perte du rel est
une caractristique fondamentale de la maladie ? dun tat dpressif aigu avec
tentative de suicide ?
Dans tous ces cas, tout doit tre instaur pour sauver la vie du patient, quitte
lui expliquer les raisons de ce choix au dcours de la crise (par exemple, au
dcours de la tentative de suicide).
Lhospitalisation sans consentement est un recours toujours possible :
Soit une hospitalisation demande par un tiers : (HDT : deux certificats mdi-
caux, un tiers) ou HDT en urgence, avec pril imminent (un certificat mdical, un
tiers) o le soin est ncessaire pour ltat de sant du patient devenu inapte
en juger de la ncessit.
Soit une hospitalisation doffice (HO) : un certificat mdical avec arrt prfec-
toral est tabli stipulant que le soin est ncessaire pour ltat de sant du patient
et pour lordre public.
Dans tous les cas, le dialogue avec le patient et linformation des proches sont
indispensables, sans oublier de colliger lensemble de la dmarche dans le dossier
mdical, dune manire aussi complte que possible (recours ultrieur de la per-
sonne pour internement abusif).
Les drives religieuses et sectaires...
La transfusion sanguine chez les tmoins de Jhovah est un problme rcur-
rent, dautant que le mdecin se trouve confront, non pas un choix du patient
lui-mme, mais un ensemble familial, associatif, voire mdical... Pourtant, latti-
tude doit rester simple en noubliant jamais de poursuivre le dialogue avec le
patient et de tenter de la convaincre :
Urgence relative, pas de saignement actif, pas de mise en danger immdiat
de la vie : on peut toujours proposer le transfert, accept par le patient, vers
un autre tablissement habitu recevoir ces patients. Il ne faut pas oublier,
non plus, les alternatives la transfusion...
Urgence absolue, saignement actif, mise en danger immdiat de la vie,
conscience conserve ou non : cest le principe de sauvegarde de la vie qui
joue et qui prend le pas sur le principe dautonomie. Une information voire
une demande davis auprs du Procureur de la Rpublique est souvent trs
utile, voire indispensable.
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Les refus dorigine religieuse sont malheureusement devenus frquents dans
le monde hospitalier. Ils sont gnralement prononcs au nom dautrui : le refus
dun mari de faire examiner sa femme par un mdecin de sexe masculin est une
circonstance qui nest plus anecdotique. La commission Stasi a fait le point sur
ces drives et a propos un rapport extrmement clair sur le respect de la lacit
dans la Rpublique
(14)
. Une circulaire de la DHOS en a dfini des rgles prcises
(15)
. Les attitudes contrevenant ce respect de la lacit font lobjet de condam-
nations exemplaires
(16, 17)
.
Lbrit dans les services durgence est un motif frquent et banal de consul-
tation. Amens gnralement par les services de police dans le cadre de certifi-
cats de non admission, ces patients reprsentent pour le mdecin urgentiste une
situation trs haut risque, car la pression policire peut tre forte, le sujet est
souvent ininterrogeable et il peut refuser totalement lexamen clinique. La Loi de
2002 na prvu aucune disposition spcifique pour les sujets en tat dbrit si
bien qua priori le refus de soins devrait tre respect. Faut-il dcider pour ces
patients une mesure dhospitalisation sous contrainte ? Certainement pas car
lhospitalisation sous contrainte rpond des conditions strictes tant dans le
fond que sur la forme. Un internement abusif exposerait le mdecin des pour-
suites judiciaires.
6. Conclusions
Le refus du soin est limage en miroir du consentement aux soins. Il relve du
principe dautonomie de la personne qui est un droit fondamental tant thique
que juridique. De fait, il soppose au principe de bienfaisance. Cependant, celui-
ci reprend ses droits en cas daltration de ltat de conscience.
En mdecine durgence, deux situations sont schmatiquement possibles : 1) Si
le patient est conscient, le refus de soins doit tre respect, mais tout doit tre
mis en uvre pour le convaincre du bien fond des soins... 2) Si le patient est
inconscient, laction mdicale doit tre guide selon le principe de bienfaisance,
en veillant scrupuleusement linformation des proches, notamment de la per-
sonne de confiance.
Rfrences bibliographiques
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