Dispositifs: Anne-Marie Duguet

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Communications

Dispositifs
Anne-Marie Duguet

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Duguet Anne-Marie. Dispositifs. In: Communications, 48, 1988. Vido. pp. 221-242;

doi : 10.3406/comm.1988.1728

http://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1988_num_48_1_1728

Document gnr le 21/03/2017


Anne-Marie Duguet

Dispositifs

Le temps d'une dfense acharne *de la vido est rvolu. Plus question
d'en rechercher l'essence partir de considrations techniques
lmentaires, plus de combats perdus pour la dfinition d'un territoire
ncessairement incertain. Il nous importe aujourd'hui davantage de cerner quelques
problmatiques fondamentales ayant stimul des artistes utiliser ce
mdium. Ni les dveloppements techniques, ni les stratgies industrielles,
ni les effets de mode ne permettent de rendre compte simplement de cet
intrt. La question n'est plus celle de la nature de la vido mais de son
apport cet art infiniment pluriel des deux dcennies prcdentes. Il faut
alors faire retour sur le contexte de son mergence pour approcher la
manire dont elle a particip aux investigations critiques et autocritiques
sur le statut de l'art et la reprsentation. C'est sans doute travers les
exprimentations concernant les dispositifs que la vido a contribu le plus
vivement au dveloppement de nouvelles conceptions de l'uvre d'art
contemporaine. Dans un grand nombre d'installations qui mettent en scne
la reprsentation mme, le thtral va se rvler comme une catgorie
centrale, la fois principe critique et mode d'existence de l'uvre.
La vido surgit dans un contexte artistique radicalement en marge du
modernisme tel que le dfendait Clement Greenberg l. Le formalisme li
l'obsession de la spcificit (chaque art ne devait faire usage que des
moyens qui lui sont propres) et l'autonomie de l'uvre l'gard de tout
contexte (refus de l'illusionnisme, des lments narratifs, etc.) taient
autant de proccupations trangres au dveloppement du happening dans
les annes cinquante, au pop art puis la nouvelle danse, la performance,
l'art minimal, etc.
La vido des artistes commence avec Fluxus, cr l'initiative de
quelques lves de John Cage au dbut des annes soixante. Fluxus ne se dfinit
pas comme un mouvement, c'est un mode de vie, pas un concept
artistique , selon Nam June Paik 2. D'esprit dadaste ou zen, il se manifeste
essentiellement dans des concerts happenings, des expositions, des
manifestes, etc. Les rituels de l'art et ses institutions, la notion mme d'uvre
d'art et le march qu'elle autorise y sont soumis une drision et une

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dmystification systmatiques. C'est avant tout la sparation entre l'art et la


vie qui tente d'tre dpasse. Pas d'objets mais des vnements qui
proposent d'autres relations avec le public. Pas d'artistes professionnels non plus.
N'importe quoi peut se substituer l'art et n'importe qui peut le faire. Si la
musique joue un rle dominant avec la participation dcisive de John Cage,
il est fait appel toutes les techniques, tous les matriaux. Tout pouvait
tre retenu, dit Joseph Beuys, de l'acte de dchirer un morceau de papier
la formulation d'ides visant transformer la socit 3. Musique, arts
plastiques, danse, posie sont alors troitement lis. C'est dans ce contexte
que Nam June Paik et Wolf Vostell intgrent la vido leurs performances
et ralisent aussi leurs premires installations avec des tlviseurs.
Ce n'est qu' la fin des annes soixante cependant que la vido est utilise
plus largement aux tats-Unis comme en Europe. La scne artistique se
caractrise alors par un foisonnement de tendances et de dnominations
dont les projets sur bien des points se recoupent et concourent des
questionnements similaires.
La vido participe presque tous ces courants, qu'ils s'appellent art
conceptuel, performance, body art ou land art... Elle est de toutes les ftes,
implique dans tous les labels. Mmoire d'une performance (mais d'emble
l'instrument impose ses propres donnes et l'enregistrement engage
l'uvre mme), seule manifestation sensible d'une proposition
conceptuelle, lment parmi d'autres d'une ralisation multimdia, elle s'affirme
aussi comme le mdium essentiel d'uvres nouvelles.
Sa position est nanmoins paradoxale. Frquentant la danse, la musique,
les arts plastiques, etc., elle est d'emble impure. Et c'est prcisment un
aspect essentiel de l'art de cette priode que d'avoir opr les
dcloisonnements les plus divers. Cependant, frachement arrive dans le champ
artistique, elle est somme par quelques dfenseurs encore tenaces du
modernisme de prouver sa spcificit et de procder son autodfinition. Si
plusieurs ralisations semblent explorer des questions purement formelles
partir de principes techniques spcifiques comme le direct, c'est un
travail critique de porte plus gnrale que se livrent les uvres les plus
fcondes. Elles appellent contexte et rfrence, elles se jouent travers des
hybridations multiples et des confrontations qui dbordent largement les
limites territoriales de chaque art pour mettre en cause les limites de
l'art mme.
C'est essentiellement partir d'un double dplacement des
problmatiques artistiques durant les annes soixante que l'on peut comprendre
l'intrt suscit par la vido. D'une part la perception de l'uvre, son exprience
par le spectateur constituent un enjeu dterminant. Approche laquelle les
artistes dits de l'art minimal ont contribu de faon dcisive. D'autre part le
concept de l'uvre est tenu pour l'essentiel. Telle a t la position en
particulier des artistes dits conceptuels, allant parfois jusqu'au refus de
toute production matrielle.
D'un ple l'autre, l'uvre est remise en cause dans ses fondements
traditionnels, comme objet unique, achev, autonome. Se dveloppent alors

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d'autres modalits de cration comme la performance et l'installation qui


vont dominer aussi la production vido. On soulignera ici les liens troits
que celles-ci entretiennent avec le thtre pour avancer l'hypothse qu'elles
ont accompli en quelque sorte certains projets essentiels du thtre
exprimental de cette poque, tels que l'exploration de nouveaux rapports avec le
spectateur, sollicit chaque fois de faon diffrente, ou la mise en uvre
d'autres logiques discursives.

Exprience de Vuvre/Exprience de thtre.

Art o se croisent diffrentes disciplines et surtout art du temps, le


thtre resurgit ainsi avec force dans ces nouvelles approches. Ce qu'un
critique moderniste comme Michael Fried reprochait aux artistes de l'art
minimal tait, travers la manifestation du caractre objectai de leurs
uvres, leur incapacit les dfinir comme peinture ni comme sculpture.
Et le thtre est prcisment ce qui se trouve entre les arts 4 . Le verdict
de Michael Fried est clair : tout ce qui s'en rapproche quitte la lgitimit
moderniste. L'adoption littraliste pour l'objectit ne signifie rien d'autre
qu'un plaidoyer pour un nouveau genre de thtre ; et le thtre est
maintenant la ngation de l'art 5.
En fait cet acharnement de Fried contre le thtre concerne avant tout la
ncessaire implication du public et la dpendance de l'uvre son gard. Ce
qu'il dnonce est la complicit extorque au spectateur par cette sorte
de prsence scnique de l'uvre minimale. Il pointe ainsi, travers ses
condamnations, un aspect effectivement essentiel de ces exprimentations :
le dplacement radical de l'attention sur l'exprience de l'uvre, qui se
rapproche, comme il la dcrit, d'une exprience de thtre . La
sensibilit littraliste est thtrale d'abord parce qu'elle est concerne par les
circonstances relles dans lesquelles le spectateur rencontre l'uvre
littraliste 6.
L' installation qui autorise cette exprience devient alors une proprit
fondamentale de l'uvre. Dans ses Notes on Sculpture 7 , Robert Morris
dfinit quelques donnes essentielles de cette nouvelle conception
d' uvres en situation , dont le statut est difficilement assignable une
catgorie dj existante. Il plaide d'une part pour des objets de grandes
dimensions, qui engagent une participation physique du visiteur plus active
que le mode intime, et d'autre part pour l'utilisation de formes connues,
aisment identifiables, de sorte que l'attention ne se fixe pas sur l'objet mais
sur sa mise en situation, et qu'ainsi le spectateur se trouve renvoy plus
directement sa propre activit perceptive. Le petit nombre d'lments en
jeu, leur caractre souvent gomtrique et rptitif, cette conomie des
moyens par laquelle on a qualifi trop simplement l'uvre minimale ne
relvent pas d'un culte de la sobrit ou d'un asctisme obsessionnel, mais
d'une conception de l'uvre comme systme relationnel. Selon Morris,

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l'objet n'est plus qu'un des termes dans la nouvelle esthtique. D'une
certaine manire elle est plus reflexive, parce que l'on a davantage
conscience du fait que l'on existe dans le mme espace que l'uvre qu'on ne
l'avait en face d'uvres prcdentes avec leurs multiples relations internes.
On se rend mieux compte qu'auparavant que l'on est soi-mme en train
d'tablir des relations, pendant qu'on apprhende l'objet partir de
positions diffrentes et sous certaines conditions variables de lumire et
d'espace 8 . L'uvre est ainsi conue partir de paramtres lmentaires
susceptibles d'entretenir des relations constamment modifies. Les
variables nonces par Morris, objet, lumire, espace et corps humain 9 ,
rappellent la hirarchie des lments de la ralisation thtrale propose au
dbut du XXe sicle par Adolphe Appia : acteur, espace, lumire, peinture .
Les installations vido ajouteront leur terme propre : le dispositif
lectronique.

Dan Graham, Three Linked Cubes, 1986.

Ce qui est remis en cause dans les propositions du minimalisme telles que
les formule Robert Morris est la notion de point de vue unique et privilgi.
C'tait l aussi une proccupation essentielle du thtre des annes soixante
qui s'est traduite par l'invention de multiples dispositifs autorisant la
simultanit des scnes, l'clatement des lieux de jeu, ou entranant le
spectateur dans un parcours. L'installation vido propose de mme au
visiteur de se dplacer autour/devant/ travers l'uvre, pointant sa manire,
comme l'uvre minimale, la thorie de la relativit : car c'est
l'observateur qui change continuellement la forme en changeant sa position par
rapport l'uvre 10 , dit encore Morris.
L'exploration physique est devenue le mode privilgi de la perception de
l'uvre. Ainsi son exprience se fait-elle ncessairement dans le
temps n . C'est l encore ce qui relance la condamnation moderniste :
Cette proccupation pour le temps plus prcisment pour la dure de
l'exprience est un paradigme thtral 12. Pour Michael Fried, l'uvre
doit se livrer dans l'instant, convaincre sans dlai. Or, les uvres nouvelles

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ne croient pas la rvlation, elles nient les catgories a priori de l'espace et


du temps et se construisent progressivement, partir d'aller-retour
physiques et mentaux, d'un travail de la mmoire et de postures anticipatoires
aussi bien.
L'uvre ne se donne plus d'emble ( condition que cela mme ne soit
pas un mythe) et se prsente essentiellement comme un processus, travers
la fois les modalits de sa perception et celles de sa ralisation. Elle est
uvre ouverte par excellence, au sens o elle se prte une infinit
d'interprtations, o elle ne saurait plus tre un produit achev, o chacune
de ses actualisations implique la variation.

Le concept de Vuvre.

Un projet des artistes conceptuels est de solliciter avant tout l'activit


mentale du spectateur, de dplacer l'attention qu'il porte habituellement
l'objet d'art sur ses prsupposs, sur les principes prsidant sa conception.
Selon Sol Le Witt, dans l'art conceptuel, l'ide ou concept est l'aspect le
plus important de l'uvre. Tous les plans et dcisions sont dfinis au
pralable et l'excution est une affaire sans importance. L'ide devient une
machine qui fabrique l'art 13 . L'essentiel rside ainsi dans la matrice, dans
l'ensemble des rgles et dispositions susceptibles d'engendrer l'uvre, ou de
la penser tout simplement. Ainsi le langage, la description, la notation, le
document peuvent-ils se substituer l'objet, emportant avec lui la notion
mme d'original. On ne peut manquer d'voquer alors les ready-made de
Marcel Duchamp et ses propos rejetant la rtinalit , la physicalit de
la peinture. Je m'intressais aux ides et pas seulement aux produits
visuels. Je voulais remettre la peinture au service de l'esprit 14 , dit-il
propos d'uvres comme le Roi et la Reine entours de Nus Vite.
Pour Kosuth, la vraie nature de l'art est dans sa dfinition, l'art ne peut
qu'tre conceptuel. Ce qui l'a logiquement amen, avec les artistes d'Art-
Language, l'limination de la manifestation sensible de l'objet d'art au
profit des seules propositions 15. Cette attitude radicale ne doit cependant
pas faire oublier d'autres pratiques qui, tout en accordant une importance
particulire l'laboration conceptuelle, ne renonaient pas une
ralisation concrte. Plutt que d'un abandon de l'objet (ou qu'une
dmatrialisation de l'art, comme Lucy Lippard et d'autres critiques l'avanaient
alors), il vaudrait mieux parler d'une ouverture, d'une diversification des
actualisations possibles des concepts : texte, photo, document, carte,
graphique, film, tlgramme, carte postale, corps, vido, etc.
Le propos de mettre en vidence par l'uvre mme le fonctionnement, le
statut et les enjeux de la reprsentation lance un dfi la critique
traditionnelle. Il lui offre des vnements, des processus qui exposent eux-mmes
leurs conditions de possibilits, l'obligeant ainsi se poursuivre au niveau
mtacritique.

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La vido apparat alors comme un instrument privilgi de tels


questionnements. Elle peut n'tre que processus, pure virtualit d'images. Et plutt
qu'un objet c'est un systme de reprsentation, qui s'expose et dfinit un
espace conceptuel sensible, de rflexion et de perception la fois. Les
installations mobilisant tout le corps dans la comprhension d'une certaine
gense de l'image deviennent le lieu o concept et percept peuvent se
penser/s'exprimenter autrement.
Les uvres de quelques pionniers amricains dans ce domaine, comme
Bruce Nauman, Dan Graham, Peter Campus, Bill Viola, Michael Snow ou
Keith Sonnier, aussi diverses soient-elles, constituent un corpus critique
systmatique o prcisment l'approche phnomnologique se trouve
ressaisie par une dmarche pistmologique. Dans la grande diversit de ce
que l'on appelle installations vido , nous ne choisirons d'tudier ici
qu'une petite partie. Celle o des dispositifs sont l'enjeu essentiel de
l'uvre, tels qu'ils ont t travaills aux dbuts de la vido, entre 1969 et
1975. Et cela essentiellement du point de vue d'une interrogation sur la
reprsentation.

Le dispositif.

En de de l'image, en de des modles narratifs et des questions de


style, ces installations se sont saisi des modles mmes de la reprsentation
pour les djouer et les rejouer autrement. En cela elles recoupent les
recherches effectues dans un grand nombre de films exprimentaux et
assument leur tour cette fonction critique que s'assignent dans les
annes soixante diverses approches artistiques.
L'imagination de dispositifs de captation/production/perception de
l'image et du son apparat alors comme un paradigme essentiel de la vido.
L'important n'est pas de produire une image de plus, comme l'artiste
conceptuel Douglas Huebler le disait propos de l'objet d'art, mais de
manifester le procs de sa production, de rvler les modalits de sa
perception par de nouvelles propositions.
La notion de dispositif est ici centrale. A la fois machine et machination
(au sens de la mchan grecque), tout dispositif vise produire des effets
spcifiques. Cet agencement des pices d'un mcanisme est d'emble un
systme gnrateur qui structure l'exprience sensible chaque fois de faon
originale. Plus qu'une simple organisation technique, le dispositif met en
jeu diffrentes instances nonciatrices ou figuratives, engage des situations
institutionnelles comme des procs de perception. Si le dispositif est
ncessairement de l'ordre de la scnographie, il n'est pas pour autant le fait des
seules installations. Dans les bandes aussi bien sont actualiss certains
rglages du regard ou des modes particuliers d'implication du
spectateur.
Bien des uvres ont expriment le dispositif cinmatographique, en
multipliant les crans, en explorant d'autres surfaces de projection (corps,

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miroirs, objets eux-mmes en mouvement...), en inventant divers systmes


de captation de l'image 16. Mais d'une part des questions d'ordre technique
(par exemple, la dure limite des bobines de films, qui condamne une
image en boucle, la ncessaire obscurit de l'espace, etc.) limitent les
modulations auxquelles peut tre soumis un tel dispositif. D'autre part celui-ci
rpond des normes fortement institues : une projection frontale sur un
grand cran dans une salle obscure o le spectateur est immobilis dans
un fauteuil, entre l'cran et le projecteur. Une telle machine de fiction
accepte des variations infimes.
En effet les exigences du processus d'identification, une certaine
conomie spectatorielle lie la narration dterminent ce dispositif. C'est
essentiellement de ce point de vue d'ailleurs qu'il a fait l'objet de recherches
thoriques comme celles de Christian Metz, de Thierry Kuntzel ou de Jean-
Louis Baudry n. Seul le cinma exprimental littral , a-narratif tait
susceptible d'interroger plus directement un tel fonctionnement.
De mme plusieurs artistes, indiffrents aux contraintes de la fiction
classique, se sont immdiatement intresss la vido en tant
qu'instrument de reprsentation. Le dispositif lectronique leur offrait une grande
libert dans l'agencement des diffrents lments qui le constituent
(autonomie de la camra et du moniteur, objet-image qui peut tre dplac-plac
n'importe o...), une gamme plus vaste de modalits de diffusion (vido-
projecteurs reproduisant les conditions du cinma mais aussi moniteurs
dont l'image est indpendante de la lumire environnante). Il n'y a pas une
manire de regarder la tlvision. Et c'est cette souplesse mme, la diversit
des configurations auxquelles la vido se prte qui ont incit les artistes
l'utiliser.
Un paramtre est nanmoins dterminant pour expliquer encore
pourquoi lui est revenue essentiellement cette fonction mtacritique : la
possibilit d'une confrontation immdiate entre la production de l'image et cette
image mme, par le direct. Ainsi le dispositif peut-il tre la fois concept de
l'uvre et instrument d'une propdeutique.
Une certaine catgorie d'installations vido a pu ainsi jouer le rle
d'analyseur de ce qui constitue les fondements de la reprsentation
dominante depuis la Renaissance, labore selon le modle perspectiviste et qui
se prolonge travers la conception et les rglages des diverses camras
actuelles. Ce ne sont prcisment ni le cinma, ni la peinture, ni la photo
que la vido soumet ce rexamen minutieux, mais les dispositifs
originaires, qu'ils soient mythiques ou non, de la caverne platonicienne la tavo-
letta de Brunelleschi, de la vitre de Lonard au portillon de Durer, de la
camera obscura aux systmes modernes de la surveillance. La vido, ultime
moyen de reproduction, rejoue ainsi toute une histoire des
reprsentations.
Elle opre principalement par la mise en scne. C'est le thtre du
voir/percevoir qu'elle constitue, en dramatisant le dispositif, en
l'envisageant travers divers rles. La mimsis thtrale est convoque dans sa
fonction heuristique. Le simulacre permet d'exprimenter le modle, rvle

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ce qui n'est pas manifeste, produit de l'intelligible, selon un principe proche


de l' activit structuraliste des annes soixante telle que Roland Barthes
la dfinissait 18.
Si l'installation est le moyen privilgi de cette rflexion, c'est parce
qu'elle peut exposer le processus mme de la production de l'image,
parce qu'elle travaille sa fiction dans un espace rel. Comme l'objet de l'art
minimal, l'image est mise en situation et n'est plus qu'un terme dans une
relation qui met en jeu conjointement : la machine optique et lectronique
(une source de lumire, une camra et un moniteur ou un vidoprojecteur),
l'espace environnant ou une architecture spcifique, le corps du visiteur
repris dans l'image ou simplement impliqu dans la perception du
dispositif.
La mthode consiste isoler et dployer dans l'espace les constituants
lmentaires de la reprsentation pour les rorganiser, les repositionner
ensuite selon de nouvelles configurations. Elle procde des dissociations
premires de la costruzione legittima , celle du point de vue et du point de
fuite, du plan du tableau (mur, cran...) et du centre organisateur, etc. Elle
les dplie, les dplace, produit des carts spcifiques. Ce faisant elle ressaisit
la scne dans une dimension perdue travers l'image, la rtablit dans sa
tridimensionnalit, crant un espace penetrable et praticable dans lequel
peuvent se rejouer de nouveaux rapports. L'espace contract dans l'instant
de la surface de l'image est ici dilat pour l'observation, soumis une sorte
de ralenti. Pour mieux voir, voir autrement, faire voir le voir. L'installation
cre un retard en vido pour paraphraser ce que Duchamp disait du
Grand Verre. En livrant simultanment l'image rsultant de ce nouvel
agencement, elle confronte deux espaces de fiction, dont l'un celui de
l'image son tour procde une tentative de recouvrement, de
rajustement des carts, en reprenant dans sa bidimensionnalit l'espace
environnant et en bouclant le circuit.
La machine lectronique produit ces transformations travers au moins
trois oprations essentielles :
en testant l'espace avec le temps, en le livrant aux jeux du direct, aux
subtilits du faux direct ou du lger diffr, du pass ou du futur antrieur,
convertissant le point de fuite en point de temps, rendant les perspectives
relatives ... ;
en confrontant l'espace virtuel, immatriel, de l'lectronique, des
espaces de rfrence : constructions ou lments d'architecture ;
en faisant du corps du visiteur l'instrument privilgi de
l'exploration, c'est--dire de la rvlation du dispositif : il est celui qui l'active et va
en djouer l'nigme.
Les modles qui fondent les arts de reprsentation en Occident sont ainsi
manifests et gauchis selon des procdures diverses et des figures
structures principalement par des sries d'opposition entre voir et tre vu,
intrieur et extrieur, priv et publique, prsence et absence, deux et trois
dimensions, prsent et pass, etc.
Ils sont rvls d'abord par des jeux d'absence, de dissociation et

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Dispositifs

d'attente : privation de l'image, instabilit, ddoublement, recouvrement


partiel, distorsion... L'image n'est plus donne selon les rglages perceptifs
habituels, elle se mrite dsormais, elle se fait dsirer. Et si un tel dsir peut
se produire hors d'une fiction narrative, c'est parce que la pulsion scopique
se nourrit de l'image mme du spectateur, parce que cette image, toujours
reprise, est pour lui la promesse de sa propre image, exhibe d'autres
regards, dculpabilise, lgitime par le contexte artistique. En se fondant
sur la clture du dispositif vidographique par le feed-back et le procs
d'autocontemplation qu'il instaure, Rosalind Krauss a envisag le
narcissisme comme un caractre dfinitoire de la vido mme 19. Sans adhrer
franchement une gnralisation qui psychologise autant le mdium,
mais en reconnaissant l'importance de ce procs dans un grand nombre
d'uvres, nous considrerons plutt l'investissement narcissique comme
un moteur essentiel au fonctionnement du dispositif, un gnrateur
d'nergie autorisant l'exprimentation d'une uvre dont l'enjeu est aussi bien la
dcouverte de ses propres rgles.
Ces modles sont aussi soumis des procdures de mconnaissance
par leur croisement, en greffant par exemple la tavoletta avec la camera
obscura. Donner la visibilit ce qui constitue le visible passe, dans ces
uvres, par un dplacement d'un systme dans un autre et par de
surprenantes hybridations.
Embotements, intgrations, retournements, redoublements,
transgressions se font travers quelques changeurs/oprateurs privilgis qui sont
le corps, l'architecture, l'image et le temps.

La surveillance comme dispositif de rfrence.

Le questionnement du sujet dans la philosophie et l'art contemporain a


pris les aspects les plus divers, souvent contradictoires ou ambigus. Si
certains artistes se proposaient d'liminer de l'uvre toute subjectivit,
c'tait gnralement pour convoquer le spectateur comme sujet de la
perception. Ce sont les regardeurs qui font les tableaux , disait Duchamp 20.
L'auteur ne saurait plus tre le garant de la vrit de l'uvre, il n'en assume
plus la seule responsabilit. L'enjeu principal de ces diverses
exprimentations lectroniques est en dfinitive le sujet, et ce sont la stabilit, la cen-
tralit du point de vue, sa position d'extriorit qui sont testes,
questionnes, branles.
Dans la quasi-totalit des installations vido qui utilisent le direct, la
camra, qu'elle soit fixe sur un trpied, au mur ou ailleurs, fonctionne de
manire autonome. Le sujet s'absente et dlgue son regard la machine.
Tel est le principe de la surveillance vido.
Ce n'est pas l pourtant une nouvelle catgorie sous laquelle on pourrait
subsumer un certain nombre d'uvres. Si plusieurs d'entre elles s'y
rfrent explicitement, le dispositif de la surveillance est constitutif de toute

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installation fonctionnant en circuit ferm (rappelons que les camras de


surveillance industrielles ou policires ont t parmi les premiers matriels
que des artistes ont pu rcuprer pour leurs installations).
La surveillance procde de quelques principes lmentaires que le
dispositif lectronique ne fait que parachever ou complter :
l'omnivoyance : il s'agit de couvrir le champ le plus vaste et au moins
les lieux stratgiques susceptibles de briser la clture du systme : les issues
(portes, fentres...). Nul ni rien ne doit chapper. Les camras sont
gnralement en plonge, places en hauteur, et peuvent pivoter selon plusieurs
axes ;
la continuit : il n'y a pas d'interruption de la saisie, le balayage est
constant, avec ou sans mouvement. Tout, tout moment, est susceptible
d'tre interprt comme un vnement, peut en tre le signe ;
l'automatisme : la camra est pilote distance ou ses mouvements
sont prprogramms ils sont nets, secs, mcaniques. Ils oprent un
quadrillage prcis et systmatique de l'espace ;
l'invisibilit de l'observateur : la camra est un il seul, visible ou
non, qui fonctionne sans prsence humaine. Cette prsence est ailleurs,
dans la rgie de contrle. Confront cette vision sans regard , on ne sait
jamais si l'on est effectivement regard, mais le fait de pouvoir l'tre tout
instant sufft crer le sentiment de l'tre en permanence. Tel est le
principe du Panopticon de Jeremy Bentham (xvne sicle) analys par Michel
Foucault 21. Ce qui en rend le contrle extrmement efficace est prcisment
l'invisibilit des observateurs dans la tour centrale ;
la circularit : celle de l'architecture panoptique correspond celle
du dispositif lectronique : le circuit ferm de tlvision, la boucle du
direct ;
la dissociation du voir et du vu : par sa possibilit de transmission
distance, la vido perfectionne le systme en dissociant totalement le lieu de
l'observation et le lieu observ. Si l'instantanit de la captation et du
regard est prserve, la contigut des espaces n'est plus ncessaire ;
la rversibilit des espaces : intrieur et l'extrieur communiquent,
s'changent, s'intgrent.
Ainsi les installations qui exploitent le direct jouent-elles avec ce
systme, quasi ontologiquement. Elles rpondent toujours un ou deux
principes au moins dfinissant la surveillance. Celle-ci y est cependant rarement
traite comme telle, isolment. Elle participe d'approches complexes, qui
impliquent des lments fctionnels, l'exploration d'autres concepts
concernant l'espace et le temps, la perception, les rapports priv/public, etc., qui
interpellent le spectateur comme sujet et objet la fois.

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Vision automatique et panoptique.

Certaines uvres citent le dispositif panoptique trs directement en


travaillant le principe de captation de l'image, l'autonomie de la prise et la
globalit du regard.
De La (1969-1972) est une installation vido ralise par Michael Snow
avec la machine qu'il a utilise pour la Rgion centrale. Dans ce film, la
camra est place sur un bras articul adapt sur un axe central. Elle peut
ainsi balayer la totalit de l'espace environnant 360 degrs, filmer dans
toutes les directions et en continuit, et pivoter sur elle-mme pour
produire des effets de spirales, des trajets obliques, traant une sorte de
labyrinthe arien. Cette machine voir selon des angles impossibles adopter
par l'il humain est place seule au centre d'un vaste paysage sauvage d'o
tout tre humain est absent et qu'elle enregistre comme le tmoignage
ultime d'une nature pas encore dtruite qu'elle seule matrise par son
regard panoptique. Michael Snow parvient produire ainsi des sensations
particulires, et surtout une impression d'apesanteur, un flottement
perceptif entre le centre et la priphrie, l'illusion de tourner soi-mme ou que
le paysage tourne autour de soi 22.
Avec De La, changeant de mdium et de contexte, Snow renverse la
situation tout en dveloppant la problmatique premire. La machine,
adapte pour la camra lectronique, est expose dans une galerie sur un
socle circulaire de bois peint et entoure de quatre moniteurs, tels quatre
points cardinaux qui diffusent en direct l'image capte. Ce qui est exhib
alors est la simultanit de la gense des images et les images mmes. De
La concerne prcisment le fait de voir la machine produire ce que l'on
voit 23 , ce qui est normalement limin de toute ralisation
cinmatographique ou tlvisuelle.
Michael Snow prsente aussi cette machine comme une sculpture, un
objet dynamique, mtallique, dont le mouvement mme est beau. C'est par
ailleurs une sculpture sonore : le bruit rgulier produit par les mouvements
de rotation est essentiel. Il confre la machine plus de prsence, la signifie
comme telle, et contribue dplacer l'attention de la reprsentation au
procs de sa constitution.
Objet principal de l'exposition, cette machine est absente de l'image, la
diffrence du film o parfois elle saisit sa propre ombre. Mais elle se
redouble ici d'une autre manire, elle se cite travers ses propres effets,
quand elle croise dans son champ un cran et reprend l'image mme qu'elle
produit dans un bref effet de feed-back.
Enfin, l'espace de la galerie tant largement ouvert sur l'extrieur par des
baies vitres, la camra procde au cours de son balayage une intgration
de l'espace urbain environnant et de l'espace d'exposition lui-mme.
L'uvre se construit ainsi partir d'un ensemble de propositions qui en
fait la complexit et engage ncessairement le spectateur dans un procs de
perception de l'espace nouveau.

231
Anne-Marie Duguet

Le propos de l'installation de Steina Vasulka, Allvision, est similaire.


Deux camras tournes vers le centre de l'espace sont situes de part et
d'autre d'un axe qui tourne lentement. Elles saisissent la fois le reflet de la
salle sur un miroir sphrique plac entre elles et une partie de
l'environnement. Les deux images sont diffuses en direct sur deux moniteurs. A
nouveau la performance de la machine est expose. Une machine voir
autonome, fonctionnant sans oprateur humain et explorant le concept de
vision totale de l'espace. Je voulais crer une vision qui verrait l'espace
en entier tout le temps 24 , dit Steina Vasulka. Cette surveillance/analyse de
l'espace manifeste de la mme manire une volont de librer la camra de
toute subjectivit, en la dissociant d'un point de vue humain, en attribuant
les dcisions de slection au seul mcanisme prrgl, la programmation
des mouvements. Mais l'enjeu de la pice concerne essentiellement des effets
perceptifs particuliers. Le visiteur est amen confronter l'espace de la
galerie avec la machine centrale, cet espace et lui-mme se refltant sur la
sphre, enfin l'ensemble ressaisi dans la bidimensionnalit de l'cran du
moniteur, redonn au cadre, la fragmentation.

Retournement du regard.

D'autres uvres mettent en scne la position du sujet dans le dispositif de


la reprsentation et questionnent le statut du regard. Elles procdent une
srie de retournements o l'observateur devient l'observ, o il est l'un et
l'autre simultanment, elles dplacent le centre organisateur de la
scne.
Utilisant la tavoletta de Brunelleschi, le spectateur, rejet l'extrieur,
observe la scne travers un petit trou pratiqu au revers de la peinture
l'endroit du point de vue, peinture dont il ne voit que le reflet dans le miroir
qui lui fait face 2S. Peep Hole, de Bill Viola 26, invite de la mme manire le
spectateur regarder par une petite ouverture lgrement dcentre
(premier gauchissement) et grossirement (deuxime gauchissement) pratique
au niveau du regard dans une construction ferme. Mais ce qu'il aperoit
alors est seulement le reflet de son propre il dans un miroir oppos. Au
mme moment ce regard est capt par une camra et projet l'extrieur de
la bote optique sur le dos mme de celui qui regarde. Faon humoristique
de fermer le circuit du regard en le re-plaant l o il ne peut tre par la
projection de sa propre image.
Le spectateur, qui adopte la posture du voyeur, se surprend donc se
voyant dans la bote optique. Mais en mme temps son voir lui chappe. Il
est vu par d'autres dans cette activit voyeuriste sans qu'il matrise cette
image, ni mme la souponne s'il est le premier se risquer vers
l'ouverture. Ce n'est plus l une exprience prive, elle devient publique, livre
d'autres regards derrire lui. Est opre ici une triple transformation qui
confronte la surveillance lectronique, la tavoletta et la camera obscura.
Dans le modle primitif de celle-ci, le petit trou pratiqu dans une paroi est

232
Dispositifs

destin laisser entrer l'image de l'extrieur pour qu'elle s'y projette


renverse sur la paroi oppose. Dans Peep Hole, le regard seul pntre et
l'image qui se forme est simplement inverse par le miroir. Elle est surtout
instantanment rejete l'extrieur par la camra. L'lectronique branche
sur le dispositif un second voyeurisme qui contrle en l'exhibant le
narcissisme mis en scne dans la zone close. Est ainsi mis en place une sorte
d'changeur optico-lectronique qui fonctionne comme la bote noire des
cybernticiens o sont transformes les informations entres. Et c'est de ce
traitement par tlescopage des modles que rsulte l'image lectronique.

Point de vue et plan de projection.

Plusieurs installations vido invitent le spectateur pntrer


l'intrieur d'tranges camera obscura, l o l'attention peut se concentrer sur la
seule image-lumire, o celle-ci peut avoir de grandes dimensions grce au
videoprojecteur et se former sur toutes sortes de surfaces, o le rfrent de
cette image peut tre inclus dans l'espace mme de sa projection... Ainsi les
installations de Peter Campus relvent-elles la fois des fantasmagories de
Robertson et des cabinets de perspective du XVIIe sicle, comme le cabinet
d'anamorphoses optiques du pre Du Breuil o des visages surgissent et
disparaissent selon la position du visiteur, mais c'est l'image de ce dernier
qui nourrit ici l'illusion. Si le feed-back vido permet en effet au sujet d'tre
au mme instant l'objet de son propre regard, Campus produit entre le sujet
et cette projection de lui-mme un rapport dlibrment difficile, instable,
troitement contrl, quasi impossible. C'est travers cette organisation
d'une relative frustration du regard qu'il va permettre au spectateur
d'exprimenter une situation psychologique et perceptive inhabituelle, tout en
s'prouvant comme sujet de la reprsentation.
Dans deux installations de 1975, il explore plus particulirement les
relations entre le point de vue et le plan de projection.
Mem est une sorte d'anamorphose lectronique. La camra est place trs
prs du mur et son objectif est orient paralllement celui-ci. Le vido-
projecteur y projette l'image obliquement, lui donnant une forme
trapzodale, entranant diverses dformations, soufflant le corps dans la matire
du mur. Jurgis Baltrusaitis dfinit l'anamorphose comme une projection
des formes hors d'elles-mmes , mais distordues de manire tre
redresses quand elles sont vues d'un point dtermin 27.
Des viseurs divers dfinissent le lieu o l'il doit se placer pour oprer
cette rvlation. Le redressement de l'image de mem, s'il est possible, est
refus au sujet/objet de la reprsentation et ne pourrait tre que le fait d'un
autre observateur.
Pour entrer dans le champ de vision restreint de la camra, le visiteur
doit s'avancer si prs du mur qu'il ne peut saisir globalement son image.
S'il s'en carte il la (se) perd. Projet, plaqu ainsi sur cette projection de
lui-mme, tellement agrandie qu'elle perd dtails et profondeur, il y pro-

233
mem, 1975.

dor. 1975.
Dessins de Peter Campus.
Dispositifs

duit aussi ncessairemnt sa propre ombre : au moment o il s'approche du


mur pour tre la fois clair et saisi par la camra, il intercepte la
projection de cette image mme. Le rbus rsultant de l'image anamorpho-
se est ici dplac du ct du systme qui la produit. En dramatisant
l'appropriation de sa propre image par le spectateur, c'est le problme du
ncessaire loignement de l'il par rapport la surface de projection qui est
soulev. Le regard ne peut constituer, ordonner la reprsentation qu'en
maintenant ses distances l'gard de la scne. Le visible ne peut surgir que
dans l'cart. La question n'est plus que l'image puisse sembler vraie partir
d'un seul point mais qu'il n'y ait qu'une zone troite o l'image puisse se
former/s'apprhender. Le spectateur se trouve en quelque sorte immobilis
dans le virtuel. Il est la fois sujet et objet du regard, mais aussi plan de
projection.
Il n'y avait qu'un point de concidence possible entre deux images de
soi-mme dans les installations prcdentes de Peter Campus, de mme il
existe dans ces dernires un point limite o l'image bascule en sa ngation.
Dor est install de telle sorte que l'image du visiteur se forme correctement
au moment o il pntre dans la salle, mais le seuil o il se tient est dans le
prolongement du mur sur lequel cette image est projete. Ainsi doit-il
choisir entre tre vu et ne pouvoir se voir et tenter de se voir et risquer de se
perdre. Le point d'observation (celui du spectateur) est radicalement
dtach du point de vue (celui de la camra) dissociation qui autorise la
production de l'image , mais celui-ci tant rabattu en quelque sorte sur le
point de distance, intgr au plan de projection de l'image, il en rend
problmatique la perception.
L'interdit du voir est littralement thtralis. La porte est grande
ouverte sur une scne qui se joue sur cette limite mme. Il n'y a pas d'image
sans la prsence de quelqu'un sur le seuil, il n'y a plus d'image si le seuil est
franchi. Le voyeur n'a pas entrouvrir la porte, il est condamn une
posture de regard oblique, prolongeant la surface de projection. Il y a
toujours dans ces uvres un pige djouer ou un pige avec lequel il faut
jouer. Le spectateur est alors ncessairement renvoy l'acte de vision
mme, une interrogation sur les limites de la reprsentation.

change d'espaces. Mise en scne de V absence.

Les installations vido de Bruce Nauman jouent de la mme manire avec


cette dception de l'image. Mais, se rfrant prcisment au systme de la
surveillance, elles problmatisent aussi les relations entre espaces distincts,
entre le corps et l'architecture. Vido Surveillance Piece (Public
Room/Private Room, (1969-1970) 28 redouble l'absence du regard qui caractrise ce
systme, par le vide de la scne capte. L'image d'une camra place en
hauteur dans l'angle d'une pice ferme au public est diffuse dans une
autre pice o pntrent les visiteurs. Ici une seconde camra saisit leur
image et la diffuse son tour sur un moniteur dans la premire pice. La

235
Anne-Marie Duguet

vido a pour fonction d'exhiber ainsi l'espace cach ou inaccessible,


question essentielle l'ensemble de l'uvre de l'artiste. Elle transgresse
l'impntrable mais pour ne rien donner voir que l'absence. Le paradoxe est un
des instruments d'investigation privilgis de Nauman. Celui-ci offre aux
spectateurs l'image d'un espace o il n'y a rien observer, o la possibilit
mme d'un vnement est exclue puisque rien n'y pntre, tout en les
privant de la jouissance de leur propre image, l prcisment o ils
s'attendent la voir. Djouant l'attente du visiteur, il interroge par la surprise, la
frustration. A travers l'exposition de cet espace sous surveillance sont
signifies la fois la pure activit d'observation et cette transformation de
l'espace tridimensionnel qu'effectue sa mise en images.
Par ailleurs, grce cette figure du chiasme, l'lectronique opre
l'change entre l'intrieur et l'extrieur, rend le priv public et le public
priv, intgre les espaces trangers, le prsent dans l'absent et inversement,
dfiant les lois traditionnelles de l'architecture et les cltures qu'elle
impose. Mais l'accs au priv, l'interdit, ne peut tre que le fait d'une
mdiatisation.
C'est aussi la galerie qui est mise en scne. Avec un certain humour,
Nauman valorise la non-exposition, appelle l'intrt sur l'absence
d'uvre, montre qu'il n'y a rien montrer. Un tour de plus dans la critique
des diffrentes instances instauratrices de l'objet d'art, aprs le cadre,
l'espace de la galerie, la situation musale.

Corps/image/architecture.

Le privilge de l'installation vido est de ne pas simplement saisir le


regard du sujet, mais de l'impliquer globalement en mobilisant tous ses
sens. Le corps n'y est pas seulement confront au dispositif lectronique,
mais aussi un espace dtermin. L'installation peut nier l'architecture du
lieu d'exposition et abolir tout repre en plongeant la salle dans l'obscurit.
Elle peut exploiter aussi ce lieu tel qu'il est avec ses pices spares, la
transparence des vitres ouvrant sur l'extrieur, ses couloirs, escaliers,
entres, ses vastes salles ou ses recoins... Il lui arrive aussi de procder des
constructions spcifiques (les chambres optiques de Dan Graham) ou des
amnagements intrieurs l'aide d'lments architectoniques, tels des
panneaux de diverses dimensions (les couloirs de Bruce Nauman). Quelle que
soit l'option adopte, l'architecture joue un rle essentiel dans la conception
de ces uvres. Elle ne constitue pas une simple modalit originale de
prsentation de l'image, ni un ornement ni un avatar de la dcoration
thtrale illusionniste, elle est organisation du visible mme, elle en
structure les conditions de perception.
Comme dans les scnographies contemporaines, chaque uvre exige
alors l'laboration d'un espace spcifique, engageant une certaine
exprience de l'image et du son.
La construction, qui n'est pas ncessairement acheve et peut se rduire

236
Dispositifs

un simple fragment, a un statut ambigu. Celui-ci n'est pas vraiment


fonctionnel, il n'est pas purement symbolique non plus. L'enjeu consiste
produire certains effets sur le comportement du visiteur, veiller chez lui
des sensations susceptibles d'ouvrir diverses interrogations.
L'architecture offre d'abord des rsistances au corps humain. Elle lui
oppose sa rigidit, lui dicte certaines postures, le pige dans des labyrinthes,
lui suggre des parcours, le confronte des espaces exigus ou trop vastes...
Bruce Nauman contraint le corps dans d'troits corridors, Peter Campus le
maintient dans un champ de vision et de vise limit, l'obligeant des
rponses prcises, une exploration dtermine.
La fonction de l'espace construit est aussi de dfinir un cadre de rfrence
la reprsentation, le lieu de la fiction, son thtre. Ainsi oppose-t-il sa
matrialit l'espace lectronique que celui-ci transgresse, manifestant la
puissance de son immatrialit mme, s'affrmant comme pur signal, un
nouveau type d'architecture temporelle.
Une uvre de Keith Sonnier {Projects, 1971) 29 est exemplaire de ces
fonctions diverses de l'architecture dans l'installation. Elle se compose de
deux salles adjacentes dont la premire a fait l'objet d'une reconstruction
intrieure spcifique. Le plafond en a t abaiss de telle sorte que le visiteur
ne puisse s'avancer que courb. Au fond de la galerie seulement, une
ouverture rectangulaire (d'environ 1,20 m/1,50 m) dans ce plafond bas permet de
se tenir debout. Alors on aperoit, dans la moiti suprieure de la galerie,
une source de lumire rouge intense, une camra fixe au mur et oriente en
plonge vers cette ouverture o se redresse le visiteur. Un son perant et
continu gnr par le feed-back du signal vido emplit la salle. Cette
persistance sonore et lumineuse renforce celle de l'il lectronique, crant le
sentiment d'un contrle gnralis. Au moment mme o le corps se
dplie , c'est pour se livrer des agressions environnantes, impalpables
comme le regard, c'est pour faire l'exprience d'une autre clture,
immatrielle mais persuasive. C'est ici le corps qui connecte les espaces, qui est
l'changeur privilgi.
Mais son image lui est aussi subtilise, transporte ailleurs, rendue
publique, dans l'autre espace. Le visiteur comprend qu'il ne se verra pas, il
saura qu'il a t vu seulement s'il pntre dans l'autre pice. Aux
oppositions qui structurent les installations de Nauman, Viola, Campus, s'ajoute
ici une figure de scission supplmentaire : l'image que prend la camra de
ces corps tronqus par l'agencement architectural est elle-mme divise en
ngatif et positif et projete sur deux murs opposs dans l'autre galerie.
Par ailleurs, si la position de la camra impose fortement le sentiment de
surveillance, par son orientation prcisment sur l'ouverture qu'elle
contrle, la reprise qu'elle opre sur celle-ci rpte la vise illusionniste : le
dcoupage architectural devient le cadre du tableau, dfinit les limites de la
scne reprsente. Mais ce passage du volume la surface, de trois
deux dimensions, se fait en basculant la bote optique, en dcouvrant sa face
suprieure.
Les diverses configurations produites par l'espace architecture jouent

237
Anne-Marie Duguet

ROOM A ROOM B

ainsi sur l'exclusion de l'image du champ de vision, sur des rapports de


distance et d'chelle, la fragmentation, la clture, le redoublement, etc.
Plusieurs installations sont conues partir de couples d'espaces autorisant
certains procs de dlocalisation, d'change, voire d'intgration. Si Two
Viewing Rooms (1975) de Dan Graham confronte deux espaces adjacents,
l'architecture problmatise cette contigut mme. Elle met en scne, avec
un systme de surveillance, la combinaison complexe de plusieurs
dispositifs de reprsentation boucle par un jeu de miroirs. Graham reconstruit
deux petites pices, l'une obscure et l'autre claire, qui sont spares/relies
par un miroir biface, transparent seulement du ct de la chambre noire.
Dans celle-ci est place une camra oriente vers l'autre pice brillamment
claire, o la cloison devient miroir et rend invisible la camra. Un
moniteur adoss cette paroi centrale diffuse l'image prise par la camra et
se reflte sur un autre mur-miroir qui lui fait face. Le visiteur qui pntre
au hasard dans l'un ou l'autre espace adoptera dans chacun une position
totalement diffrente dans le jeu de la reprsentation. Dans la chambre
claire il est vu et se voit la fois rflchi par les miroirs, et sur le moniteur
tel qu'il est observ par les visiteurs de l'autre pice et par la camra qu'il ne
voit pas (et dont il peut ignorer l'existence). L'nigme commence pour lui
avec cette image qui semble venir de nulle part, sinon de la cloison-miroir,
du moniteur mme... Il y a l une surveillance raffine, comme elle peut
exister dans certains centres de psychiatrie. Dans la chambre obscure le
visiteur est en position de voyeur, protg, visible de ses seuls complices.
Trs trangement il voit bien un miroir en face de lui sur le mur oppos de
l'autre pice et le reflet des autres visiteurs, mais il ne peut s'y voir lui-

238
Dispositifs

mme. Le paradoxe est tel que ce qui l'autorise voir de l'autre ct (la
transparence de la cloison du ct de l'obscurit) lui interdit en mme
temps de s'y projeter. Il ne peut tre qu'observateur du comportement de
l'autre, celui qui pntre dans la chambre claire. Son point de vue est
mobile et multiple : il peut voir aussi bien la scne travers la cloison et
l'embrasser dans ses dimensions relles que dans le viseur de la camra ou
encore sur l'cran du moniteur reflt dans le miroir oppos. Mais il doit
respecter la frontire. Il ne peut tre la fois des deux cts de l'image mme
si le panneau duplice entretient l'illusion d'une permabilit des espaces.
Celui-ci rvle avant tout la double nature du plan de projection : vitre
ouvrant sur la scne et miroir du sujet.
Comme dans le dispositif de Brunelleschi, l'objectif de la camra est
rejet l'extrieur de la scne (ici dans une autre camera obscura). Et
l'image-tableau qu'elle produit est vue travers son reflet dans le miroir
qui lui fait face. Mais au lieu de la petite ouverture pour l'il pratique dans
le plan du tableau, c'est la transparence de celui-ci mme qui livre la scne
au regard. Ce n'est plus la seule tavoletta qui est convoque mais aussi bien
la vitre de Lonard ou de Durer. Quant aux miroirs, ils oprent la fois la
clture de la scne et sa mise en perspective. En branchant le dispositif
spculaire sur le dispositif lectronique et architectural, Graham procde
une cascade de transformations o il saisit le spectateur dans une structure
autorflexive qui l'instaure la fois comme sujet et objet de son propre
regard.
A travers ces gauchissements et ces hybridations multiples de dispositifs
se joue ainsi la position fragile d'un sujet qui ne peut se constituer qu'en
saisissant les principes mmes de sa constitution. C'est en mme temps le
procs de la perception qui est activ, analys, selon des modalits de vision
chaque fois diffrentes o le corps entier est engag avec le regard, o se
manifestent l'instabilit et la relativit du voir. Divers dispositifs pervers
rendent la perception de l'image difficile, du moins inhabituelle,
produisant une vritable propdeutique du regard qui vise dfaire les
sensations , comme le proposait Paul Valry 30.

Synthse en gestation.

Un tel questionnement systmatique de la reprsentation dont la vido


produit la mise en scne comme on rpte une mise mort a prpar aussi de
nouvelles attitudes l'gard de l'image telles que les engagent les
dveloppements actuels de l'informatique. Plus qu'une simple transition historique
entre les dispositifs et les fonctions de la reprsentation dominants depuis la
Renaissance et ceux qui s'laborent aujourd'hui, la vido se rvle tre un lieu
privilgi o se travaillent passages et reprises, un espace de transformations,
une charnire critique brassant une multiplicit de modles.
Quelques aspects mritant d'autres tudes peuvent tre ici rapidement
suggrs.

239
Anne-Marie Duguet

Les trucages lectroniques ont largement contribu par exemple au


dplacement du statut de l'image vers celui d'objet, au dveloppement de
l'activit ludique et manipulatoire, aboutissant le plus souvent une mise
entre parenthses du sens. Grce au direct et ds l'invention des premiers
synthtiseurs, nous nous sommes familiariss avec une image qui
rpond immdiatement, comme Edmond Couchot qualifie l'image de
synthse 31.
Les installations vido ont pour leur part activ la mobilit du point de
vue qui n'est plus le seul fait de l'image mais du spectateur aussi bien,
engag ncessairement dans un parcours. Il se dplace dans la scne, il peut
y voluer comme l'acteur sur les planches, tout en restant confront
d'autres scnes, les images, que certes il ne pntre pas. La conception d'un
espace tridimensionnel de synthse nous propulse aujourd'hui l'intrieur
d'un thtre virtuel o se trouve simule une incroyable mobilit du
regardeur dans l'espace. Mais si cette exploration qu'euphorise la
pratique interactive possde une vitesse, une agilit inconcevables pour le corps
humain, elle l'immobilise en retour comme au cinma. Le regard est activ
d'abord et le corps nouveau s'abme dans un tat de sous-motricit
relative. Un geste infime sufft transformer la scne, un simple mouvement
des yeux.
Enfin, le travail vidographique sur les dispositifs met surtout en
vidence le fait qu'il est n'est plus possible dsormais de penser la
reprsentation seulement en termes d'image. Elle s'apprhende d'abord comme un
systme, un processus la fois technique, sensible et mental.

Anne-Marie DUGUET

NOTES

1. Cf. Clement Greenberg, a Modernist Painting , in Modem Art and Modernism, Francis
Frascina et Charles Harrison (ds), Londres, Harper and Row, 1982 (texte publi pour la
premire fois dans Art and Littrature, n 4, printemps 1965, p. 193-201).
What had to be exhibited and made explicit was that which was unique and irrductible
not only in art in general, but also in each particular art. Each art had to determine, through
the operations peculiar to itself, the effects peculiar and exclusive to itself (p. 5).
The task of self-criticism became to eliminate from the effects of each art any and every
effect that might conceivably be borrowed from or by the medium of any other art. Thereby
each art would be rendered "pure " and in its "purity "find the guarantee of its standards of
quality as well as of its independence (p. 5 et 6).
2. In l'Art vivant, n 55, fvr. 1975.
3. Cit dans Joseph Beuys, de Caroline Tisdall, The Solomon R. Guggenheim Museum
(d.), New York, 1979, p. 84 : Anything could be included, from the tearing up of a piece of
paper to the formulation of ideas for the transformation of society.
4. Michael Fried, Art and Objecthood , in Minimal Art, Gregory Battcock d.,

240
Dispositifs

New York, Dutton, 1968, p. 142 (texte publi pour la premire fois dans Artforum, juin
1967).
Cf. l'analyse de Thierry de Duve, Performance Ici et maintenant , in Alternatives
thtrales, n 6-7, janv. 1981.
5. Ibid., p. 125 : the literalist espousal ofobjecthood amounts to nothing other than a plea
for a new genre of theatre ; and theatre is now the negation of art .
6. Ibid., p. 125 : Literalist sensibility is theatrical because, to begin with, it is concerned
with the actual circumstances in which the beholder encounters literalist work.
7. Robert Morris, Notes on Sculpture , in Regards sur l'art amricain des
annes soixante, anthologie critique tablie par Claude Gintz, Paris, d. Territoires,
1979.
8. Ibid., p. 89.
9. Ibid., p. 90.
10. Ibid.
11. Ibid.
12. Michael Fried, art. cit, p. 145 : The literalist preoccupation with time more
precisely, with the duration of experience is, I suggest, paradigmatically theatrical.
13. Sol Le Witt, Paragraphs on Conceptual Art , in On Art. Artists' s Writings on the
Changed Notion of Art after 1965, Gerd de Vries, Verlag Dumont International (d.),
Cologne, 1974, p. 176 : In conceptual art the idea or concept is the most important aspect of the
work. When an artist uses a conceptual form of art, it means that all of the planning and
decisions are made beforehand and the execution is a perfunctory affair. The idea becomes a
machine that makes the art.
14. Marcel Duchamp, Duchamp Du Signe, Paris, Flammarion, 1975, p. 171-172.
15. Cf. Joseph Kosuth, Art after Philosophy , in Studio International, oct. 1968 (trad,
fr. in Art Press, dec. 1972-janv. 1973).
16. Cf. Dominique Noguez, loge du cinma exprimental, Paris, Muse national d'art
moderne, centre Georges-Pompidou, 1979, chap, x, Le cinma prend le large; Une
renaissance du cinma. Le cinma a underground amricain, Paris, Klincksieck, 1985, chap.
28, Le cinma littral .
Cf. Gene Youngblood, Expanded Cinema, Londres, Studio Vista, 1970.
17. Cf. Communications, n 23, Psychanalyse et Cinma , 1975 : Christian Metz, Le
film de fiction et son spectateur ; Jean-Louis Baudry, Le dispositif ; Thierry Kuntzel,
Le travail du film, 2 .
18. Roland Barthes, L'activit structuraliste , Essais critiques, Paris, d. du Seuil, coll.
Tel Quel , 1964, p. 213-200.
19. Rosalind Krauss, Video : The Aesthetics of Narcissism , in New Artists Video,
Gregory Battcock d., New York, Dutton, 1978, p. 43-64.
20. Op. cit., p. 247.
21. Cf. Michel Foucault, Surveiller et Punir, Paris, Gallimard, 1975, Le panoptisme
p. 197-229.
22. Cf. Afterimage, n 11, hiver 1982-1983 ; Sighting Snow , p. 14 et 15.
23. Michael Snow, in Video Art. An Anthology, Ira Schneider et Beryl Korot (eds.), New
York-Londres, Harcourt Brace Jovanovich, 1976 : De La precisely has to do with seeing the
machine make what you see (p. 118).
24. Principe partir duquel Steina Vasulka a invent une srie d'installations et de
bandes partir de 1975 : Allvision n" 1, Albright-Knox Gallery de Buffalo, 1978 ; et Allvision
n" 2, New York, The Kitchen, 1978-1979.
Woody Vasulka, qui a construit la machine, avait dj travaill la question du cadre et ses
oprations de slectivit, en laborant des dispositifs de captation d'image rotatifs et stro-
boscopiques, diffrentes projections pivotantes.
Steina Vasulka, in Steina et Woody Vasulka Vidastes 1969-1984, Paris, Cine-MBXA/Cine-
doc, 1984, p. 27.
25. Cf. Hubert Damisch, L"' origine " de la perspective , in Macula, n 5/6, 1979.
26. Peep Hole, New York, The Kitchen Center, 1974. Description partir des notes de
l'artiste.

241
Anne-Marie Duguet

27. Jurgis Baltrusaitis, Anamorphoses, Paris, Olivier Perrin, 1969, p. 5.


28. BN, n 19, coll. Panza di Biumo ; cf. les articles de Jane Livingstone et de Marcia
Tucker dans le catalogue Bruce Nauman Works from 1965 to 1972, Los Angeles, Los Angeles
County Museum of Art/Whitney Museum of American Art, 1972.
29. Keith Sonnier, Projects, New York, exposition au MOMA, 1971. Cf. La description de
Kenneth Baker, Keith Sonnier at the Modern , in Artforum, oct. 1971.
30. Paul Valry, uvres, 1. 1, Paris, Gallimard, coll. Bibl. de la Pliade , 1957, Thorie
potique et esthtique , p. 1165-66.
31. Cf. Edmond Couchot, Images. De Voptique au numrique, Paris, Herms, 1988.

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