Ambelain Robert - Au Pied Des Menhirs PDF
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Introduction à l'Etude des Doctrines Celtiques
EDITIONS NICLAUS
34, Rue Saint Jacques - PAR 1S Wl
1945
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Introduction à. l'Etude des Doctrines Celtiques
EDITIONS NICLAUS
34, Rue Saint Jacques - PARIS (6•)
1 94.5
TABLE DES MATIERES
Note de l'auteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
Références bibliographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
« Oiw », l'Absolu Celtique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
De la nature d' « Oiw » ................ ; . . . . . . . . . . . . . . . 15
De l'existence d' « Oiw >> • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 16
De la connaissance d' « Oiw >> • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 17
De la création totale et du dédoublement de « Oiw » . . . . 18
La Trinité Celtique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
Karidwen, la Vierge-Mère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Hu Kadarn, l'Apollon celtique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Les Dieux celtiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Cythraul, le Démon celtique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
L'Œuf du Monde, selon les Celtes et devant la science . . . . 39
Apollon, lumière vivante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
L'Homme et le Monde ou l'union de Menw et de Modurans
Awdd.............................................. 51
De la nature de l'âme humaine de Menw ou de Menwyd . . 56
Gwenved, le « Monde blanc » et la béatitude finale . . . . . . 62
De la « réalité » de Gwenved . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
Le Celte et son « Devenir >> selon les Triades . . . . . . . . . . . . 71
Abred le « Monde de douleur et de nécessité » • . . . . . . . . . 76
Les Cercles intérieurs d'Abred . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
Le Cercle de Kenmil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Le Cercle de Gobren ..................... . ...... : .. .... 86
Le Cercle d' Anwn . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
Anwn, l'Abîme et l'Existence « en puissance » . . . . . . . . . . 93
La naissance de An kou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
Kengant, le « Cercle vide » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
Les Triades de l'Ile de Bretagne.
Historique des « Triades » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Les << Triades >> de l'Ile de Bretagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
~otules et Sentences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
Celtisme et Pythagorhme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Les «Vers d'Or» pythagoriciens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
La filiation celtique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
Résumé de la tradition : Credo Celtique » . . . . . . . . . . . . . . 152
'onclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
NOTE DE L'AUTEUR
Manuscrits :
Revues:
médita et pria Apollonius de Thyane, que nous avons enfin compris intuitive-
ment les liens mystérieux mais réels qui unissent, pan:ielà des régions étran-
gères et des différences de climat considérables, le Pythagorisme éclos au
beau soleil latin, et le Celtisme né tout près des eaux glauques d'Armorique ...
Ce revirement n'est pas nouveau pour qui· connaît un peu l'âme celte. Dans
l'anthologie illustrée intitulée « La Bretagne », Anatole Le Braz a tracé du
Celte un portrait saisissant : « On a dit de la Bretagne et de sa structure.
qu'elle avait moins de chair que de nerfs. Ainsi en est-il du Breton. C'est
avant tout un nerveux, un impressionnable. Son entêtement proverbial, sujet
d'ailleurs aux plus brusques variations', l'a fait prendre pour un volontaire,
alors que sa faculté dominante est la sensibilité, une sensibilité de Celte,
frémissante, inquiète, ombrageuse, et que surexcite encore une imagination
infatigable, toujours en travail. Il est rare qu'il ne se laisse pas diriger par
elle, et, le plus souvent, il est à sa merci ... Il n'y a pas d'être sur la constance
duquel on puisse s'appuyer plus solidement, et il n'y en a pas dont la versati-
lité soit plus ingénieuse à vous décevoir. .. L'argent ne compte pas à ses yeux ...
Mais, une fois contaminé par la fièvre du lucre, vous ne rencontrerez pas de
quémandeur plus naïvement éhonté ... Son courage, quelles preuves éclatantes
n'en a-t-il pas données ? En revanche, d'une timidité presque enfantine devant
la vie, trop délicat pour se pousser, trop faible ou trop fier pour réclamer
son dû, résigné au fait accompli ... Conservatçur, routinier, ennemi de l'ini-
tiative, prisonnier de la tradition, il l'est, certes ; mais curieux aussi de nou-
veautés, avide de changement, l'oreille tendue à l'appel de l'Aventure, le pied
levé pour la marche à. l'Inconnu, quel qu'il soit ! Arraché à sa passivité, il se
rue dans l'audace. Réfractaire, ai-je dit ; et libertaire, faudrait-il ajouter !
Nul n'est plus respectueux de la règle ; nul n'en est plus impatient .. Hier :
chouan ; demain : anarchiste ; sans cesse en réactions violentes contre quel-
que chose ou contre quelqu'un ... Il ne saurait pas plus se dispenser de croire
que de respirer. Mais il n'a pas une religion, il les a toutes. Sa foi, dans son
ardeur éclectique, déborde les orthodoxies ! Comment s'étonner dès lors
qu'elle s'en évade ? En fait, depuis Pélage et Abélard jusqu'à Lamennais,
Renan, Le Dantec, les plus fervents exemples, non pas d'incrédulité, mais
d'inversion de croyance, ont été fou.rnics par la « pieuse » Bretagne ... »
Quel portrait serait plus juste et plus fouillé ?
Du Celte de jadis, Renan, en son « Essai de Morale et de Critique », nous
dit ceci :
« Un des traits qui frappèrent le plus les Romains, ce fut la précision
de leurs idées sur la vie future, leur penchant pour le suicide, les prêts et
les contrats qu'ils signaient en vue de l'autre monde. Les peuples plus légers
du Midi, voyaient avec terreur en cette assurance, le fait d'une Race mysté-
rieuse, ayant le sens de l'Avenir et le secret de la Mort. »
« Aussi loin, en effet, que nous remontions dans leur histoire, nous dit
encore A. Le Braz, la préoccupation de l'au-delà, comme nous disons aujour-
d'hui, semble avoir exercé sur leur imagination un prestige vraiment singu-
lier. César nous montre les Gaulois se réclamant, sur la foi des Druides, de
la paternité du Dieu de la Mort, et faisant profession d'en être tous des-
cendus. » ·
(Il s'agit là du dieu Valfadir, « Père des gt,erriers morts :., des traditions
celtiques). « C'est pour cette raison, ajoute-t-il qu'il , mesurent la marche du
temps, non par les jours, mais par les nuits. ~ 'ous saYons également, grâce
aux Commentaires de César, quelle importance ils attachaient aux funé-
AU Plli;D DES MENHIRS II
C'est donc avec respect que nous devons considérer ces humbles et pre-
nants récits, et nous croyons leur rendre justice en reconnaissant ici même,
au début du livre, toute la part qu'ils y ont apportée. Pour la Métaphysique
celtique, nous avions le texte gallois des Triades de l'Ile de Bretagne, et sa
traduction bretonne par Yves Berthou. Nous en donnons une interprétation
française nouvelle, qui, si elle est moins littérale, utilise néanmoins davan-
tage les finesses de notre langue. Pour l'Ethique, nous ne possédions plus
rien. C'est donc vers la Grèce que nous nous sommes tournés. Arguant l'opi-
nion des anciens auteurs qui font du Pythagorisme un rameau issu de l'Ini-
tiation druidique, nous avons présenté comme une morale celtique celle que
le Maître de Samos nous révèle en ses vers immortels. Et les « Vers d'Or »
de Pythagore viennent alors prendre place, à leur rang, parmi cette tradi-
tion. Pour lever un coin du voile qui nous masque les mystères de la Mort,
les clés de la Migration vitale, et les arcanes de la Vie Posthume, nous
nous sommes servi de la tradition arvcnne avec le « Bardo Thodol » thibé-
tain et égyptienne, avec le « Livre' de la Demeure », rituel funéraire de
l'antique Egypte. Par là, nous rejoignions la civilisation rouge atlantéenne.
Est-ce là un acte si audacieux ? Nous ne le pensons pas. De l'Hyperborée
à l'Atlantide, la route est courte ... D'autant que les légendes de la Mort, en
Bretagne, confirment rigo~treusement le processus de la désintégration pos-
thume selon les Thibétains. Quoi qu'il en soit. cet essai se présente avec le
simple désir de résumer des données éparses et peu accessibles au grand
public ; aussi, de mettre à la portée des celtisants une sorte de memento qui
leur permette de comparer la Tradition raciale avec les autres, et de pouvoir
aussi la soutenir, avec quelques arguments solidement étayés, le cas échéant.
Mais surtout, de montrer que l'Occident possède, lui aussi, une de ces reli-
gions purement métaphysiques, qu'on supposait - jusqu'à présent du moins,
- l'exclusif privilège de l'Orient ...
A notre époque, les vieilles religions officielles, issues des cultes sémite~
ou asiates, déclinent ct meurent doucement. Sclérosées par des dogmes étroits
et stériles, se refusant par la voix de leurs prêtres à mettre autre chose à la
portée de l'homme moderne que l'élémentaire bagage qu'on confie à la prime
enfance, leurs jours sont comptés. Elles meurent de l'indifférence et de
l'indulgence des foules modernes pour leurs mythes trop exotérisés. Mais il
s'en faut néanmoins que cès foules soient exclusivement matérialistes ! Et
l'engouement des peuples jeunes et neufs pour les croyances ou les théories
les plus audacieuses, démontre sans conteste que l'âme humaine garde toute
sa fraîcheur. Encore faut-il que ce qu'on veuille lui faire absorber possède
la même vertu ! Et si les mystiques surannées sont incapables de limiter et
d'endiguer le matérialisme bestial qui pointe depuis cent ans, peut-être
d'autres mystiques, satisfaisant davantage l'esprit moderne, peuvent le faire.
Il suffit de voir l'importance que la pensée bouddhiste, voire taoïste, a pris
dans les milieux spiritualistes européens, pour admettre sans peine que
n'importe quelle religion est susceptible de pénétrer les élites intellectuelles,
si sa mystique repose sur une métaphysique suffisamment justificative de
_es exigences. Or, cette condition, le Celtisme la remplit parfaitement. Sa
simplicité même épaule considérablement la thèse de son hien-fondé. Sa con-
ception divine demeure suffisamment abstraite pour éviter l'intransigeance
• dogmatique, inhérente à toute anthropomorphisation. Et on absolu mono-
théisme, tout en offrant au mystique des « rnanife ta ions :. suffisamment
évocatrices, permet au rationaliste scientifiqu~ de défricher, en toute indépen-
dance d'esprit, les laborieux problèmes de l'Inconnu et de l'Autre Monde.
AtJ PIE:D DES MENHIRS i3
Qu'ajouter de plus ? On reprochait au message venu de l'Asie d'être anti-
constructif, négateur en ses conclusions, et de détruire cette espérance, si
chère à l'Homme d'Occident, en une vie future ou sa personnalité demeurait
entière et complète. Le Celtisme nous apporte une métaphysique plus qu'une
religion (ce qui n'est pas pour nous déplaire !) mais, de ce rationalisme appa-
rent, il en dégage la certitude en une éternelle et personnelle vie. Que
demander encore ?
Le temps fera justice de nos prétentions, ou, au contraire, les réalisera.
L'idée celte est en marche, laissons-là cheminer ! Que d'autres, plus qualifiés
que nous, reprennent le même spoir, fassent leur le même désir. Que des
érudits, de l'envergure des Arbois de Jubainville ou des de la Villemarqué se
rallient à la vieille mystique celtique, et les cultes étrangers s'effaceront
doucement, avec la conquête des élites spiritualistes.
Et qui sait ? Un jour peut-être, quand les Cycles du Temps seront enfin
bouclés, nos fils verront revenir les « anciens jours ». En eux et grâce à
eux, par la plénitude de cette race que nous promettent les vieilles Triades,
nous revivrons les grandes heures de l'Armorique. Et derrière les menhirs et
les pommiers en fleurs, au fier soleil levant, monteront les Dieux d'Armor !...
***
« OIW », L'ABSOLU CELTIQUE
L n'est qu'un seul Etre, un seul Etre qui soit, très réellement. Hormis cet
1 Etre, l'Etre par excellence, il n'en est pas d'autre. Car tous les autres êtres
procèdent de lui, subsistent en lui et par lui, et retournent un jour à lui.
Il est tout ce qui aurait pu être, mais ne sera jamais.
Il est cc qui aurait pu être, et qui a effectivement été ; tout ce qui aurait
pu être, et qui est effectivement ; tout cc qui pourrait être et qui très réelle-
ment sera.
Il est donc éternellement lui-même, l'ETRE-des-ETlUCs...
Cet Etre, Ineffable, Incréé, Parfait, nous autres les fils de la très vieille
Celtide, nous le nommons d'un seul mot de trois lettres. il
Ces trois lettres sont OIW, ou encore IOW, symbolisées par 11\ (1).
Parce que ce nom est le premier qu'on lui ait donné, secrète et mystérieuse.
est sa prononciation. Profères-le donc si tu peux, et surtout si tu sais .. ,
*
**
De ces trois attributs primordiaux, naît alors sa JusTICE.
Mais sans l'un d'eux trois, il ne pourrait être nulle Justice au monde ...
*
**
Que peut-on envisager, en déclarant que « OIW » est un Esprit ? Qu'il
n'a point de forme corporelle particulière, qu'il est libre de toute matière,
ou même de toute nature distincte de son être, sans que, pour cela, l'inverse
soit véridique.
Il s'ensuit que « OIW » n'est pas un être comme tous les autres êtres
qui ne sont que tels ou tels êtres particularisés. Il est, au contraire, au sens
le plus véritable, le plus transcendant ct le plus absolu de tous les êtres,
soit l'Etre même.
*·
**
« OIW » doit nécessairemet:1t être parfait, car il ne peut rien lui manquer.
Il doit être la Bonté même, étant le principe et le terme de tout Amour. Il
est l'Infinité, elle-même, n'étant ct ne pouvant être limité par rien. Il doit
pénétrer toute chose et être partout, car ce qui existe, existe nécessairement
en Lui et par Lui.
*
**
« OIW » est nécessairement immuable,
car il ne peut, étant la Perfec-
tion même, avoir besoin d'acquérir quoi que ce soit. Il est éternel, car il ne
saurait y avoir de succession en Lui, ne pouvant varier par le fait même
de son absolue Perfection.
*
**
« OIW » ne peut être qu'unique ; il ne peut y avoir qu'un seul Créateur,
une seule Cause Première, ses attributs ne pouvant être partagés et demeurer
unis.
..:': ..
.... -r-
*
**
Il doit de même être immuable, sans quoi il serait à la recherche de
quelque chose, afin de se compléter. S'il est immuable, c'est qu'il est éternel,
DE L'EXISTENCE DE « OIW »
***
Ce qui existe, et n'est pas « OIW », n'existe que par Lui, pour la raison
que, ce qui n'existe pas par soi, n'existe en dernière analyse que par un
Autre, qui, lui, est par soi. Cet Autre, nous avons convenu de le transcrire
par les Trois Lettres « OIW ».
Or, ce qui existe, et n'est pas « OIW », n'existe point par soi, le fait est
évident. Donc, tout ce qui existe et n'est pas totalement Lui, n'existe que
par Lui,
***
On démontre philosophiquement que ce qui existe, et n'est pas « OIW »,
n'existe point par soi, à l'aide du raisonnement suivant :
Rien de ce qui a besoin de quelque chose (pour subsister), n'existe par
soi-même. Or, tout ce qui existe, et n'est pas réellement « OIW », a besoin
de quelque chose. Donc, ce qui existe, subsiste, tout en n'étant pas « OIW »
soi-même, n'existe point par soi.
***
Si quelque chose existait par soi, ce quelque chose ne dépendrait et ne
pourrait dépendre de rien, ni de personne. Or, tout ce qui a besoin de quelque
chose ou de quelqu'un, dépend (pour être et subsister), de ce quelque chose ou
de ce quelqu'un.
***
Quelque chose existant par soi ne saurait dépendre de nulle autre chose,
ayant nécessairement tout, et en lui-même et par lui-même. Par conséquent,
ce quelque chose existant par soi, ne peut recevoir quoi que ce soit de rien ni
de personne.
***
Toute chose ou tout être, existant, ayant donc besoin de quelque chose
pour être et subsister, prouve alors manifestement (par sa seule présence)
qu'une Cause Première existe, en qui et par qui tout se puise ou s'obtient.
.I.Û PIED Dll:S M:ltNHIRS
*
**
DE LA CONNAISSANCE DE « OIW »
***
Nous pouvons néanmoins le connaître, par la Raison d'une part, et par la
Foi mystique d'autre part.
Le connaître par la Raison, c'est le percevoir, à travers les êtres qu'il créa,
à travers les buts et les motifs qui les justifient.
Le connaître par la Foi, c'est le percevoir à l'aide de ce qu'il veut bien
nous révéler de Lui-même, par le canal de ce qu'il est convenu d'appeler
la Mystique, dont les étapes sont la méditation et l'illumination.
La Raison appartient à l'Homme, la Foi vient de « OIW ».
***
Concluons que la Raison et la Foi ont toutes deux pour objectif la Gnose,
ou Connaissance. Cette expression impliquant la Connaissance Totale, et non
des connaissances imparfaites. Il ressort alors de ce raisonnement que, puisque
« OIW » est TouT, comme on l'a précédemment démontré, cette Connais-
sance Totale n'est autre et ne peut être que la Connaissance de « OIW ».
Elle s'obtient, en son épanouissement maximum, dans un état et un
« plan » créatoriel particulier, que la Tradition Celtique nomme le « Monde
Blanc » ou Gw&NVltD.
***
Concevoir, percevoir, comprendre la Cause Première et toute son Œuvre,
doit donc suffire à l'Homme pour ne plus rien avoir à désirer.
Mais l'Homme, créature pleine d'imperfections, ne saurait s'attaquer au
mystère de l'Absolu, être dégagé et indépendant de tout ce qui n'est pas Lui,
et que la Tradition Celtique nomme le K:i;;UGANT1 ou < Monde Vide ),
18 AU l'lED DES Mf;, HI~
***
DE LA CREATION TOT ALE ET DU DEDOuBLL !:.. •
DE« OIW »
Tout est enfermé en « OIW », le Monde est, bien q.:e ::. ·• : pas
« OIW », enclos néanmoins en « OIW » puisqu'il est le .o ·; -- excel-
lence, et que rien ne saurait exister sans lui. Mais alors, il se ~ou ·e ue le
Mal serait l'œuvre de « OIW » puisque le Mal est inhérert - .loade ?
Effectivement. .
Dans une certaine partie de ce TouT absolu qui constitue e=:se ·e même
de « OIW », la Perfection Suprême s'est retirée, créant ai::-.~1 le .londe.
Nous allons voir pourquoi et comment.
*
**
« OIW » s'aime, nécessairement, d'un unique, infini, et éternel Amour.
Et cela par le fait qu'il ne saurait raisonnablement-, ni ne pas s'aimer (ce qui
serait impossible), ni s'aimer insuffisamment (ce qui serait contraire à sa
perfection naturelle).
Il s'aime, avant tout autre créature, par le fait qu'il était, avant qu'aucune
créature soit elle-même. Il est donc le premier Etre à être aimé. L'infinité
de cet Amour, soutenu par l'infinité de sa Toute-Puis_ance. justifiée par
l'infinité de sa Sagesse, constitue alors les conditions nécessaires pour établir
sa propre Eternité. Il est éternellement pour trois motifs :
a) parce qu'il est logique qu'il s'aime lui-même, avant tout autre être,
lui succédant simplement ;
b) parce qu'il est logique que cet amour soit d'une inaltérabilité absolue,
puisqu'il es1i tout-puissant ;
c) parce qu'il est logique que cet amour éternel lui assure ainsi une éter-
nelle durée.
Pour que « OIW » ne soit plus éternel, il faudrait donc qu'il cessât de
s'aimer.
*
**
Mais rien n'existe pourtant en dehors de « OIW ». Alors, l'infinité de cet
Amour divin, l'incite à s'extérioriser et à se répandre hors de lui-même.
Cependant, rien n'existe en dehors de Lui, puisqu'il contient tout, en puis-
sance ou en acte. « OIW » ne peut donc que d1fférencier ce qu'il a dessein
d'aimer. C'est cette obligatoire et inéluctable différenciation des Etres qu'il
conçoit, extérieurement à sa propre essence, qui constituera alors l'œuvre de
Création.
AU PIÈD DES MJ!NHIRS
*
**
Pour différencier certaines parties de sa propre essence du reste, « OIW »
se bornera à diminuer la somme de perfection qui résidait auparavant en
chacune d'elles. « OIW » tend alors à se rétracter ; il se retire en partie de
certaines fractions de son essence, et ceci constitue alors la Création. Elle
sera nécessairement imparfaite, puisque la PeT;fection Totale n'y est plus ...
Etant imparfaite, le Mal (Bien incomplet) y apparaît aussitôt.
Souvenons-nous cependant que ce Mal n'est qu'apparent et momentané.
En se retirant d'elle-même, en partie, en libérant des particules de son
essence, « OIW >> ne cède qu'à cet Amour Infini qui lui est propre, et qui
est, avant tous les autres, le premier de ses Attributs. « OIW » n'a créé que
pour aimer davantage.
Mais « OIW » n'a pu demeurer un temps sans créer, puis devenir créa-
teur, car alors il aurait varié, et cette variation (impliquant une mutation)
est inapplicable à l'Infinie Perfection divine. Concluons donc que « OIW »
n'a jamais varié, et qu'il a, en conséquence, éternellement créé.
Chacune de ses émanations fragmentaires, chacune des particules de son
essence, ainsi différenciée du reste de lui-même, porte alors dans la théodicée
celtique le nom de MANRED, les « germes de Lumière », les atomes.
Leur ensemble a constitué par la suite MonuRANS Awnn, « ce qui est
mù », soit le Monde. MonuRANS Awnn a été soumis à deux lois çontraires,
qui jouent alternativement, et dont l'apparent combat est destiné à assurer
le « jeu » de la Vie. Ces deux forces sont DRouG, le Bien, et MAD, le Mal.
***
Lorsque « OIW » s'est scindé én deux par son acte primitif de retrait
en lui-même d'une partie de ses perfections éternelles, il a donné naissance
à deux « personnes >> divines indépendantes et différentes.
La première, demeurée infiniment et éternellement parfaite, a été nommée
DouÉ, Dieu. C'est un des multiples noms de « OIW ». La seconde, impar-
faite, constitue alors le vide, le néant, l'aveugle, le noir, l'inconscient, le désor-
donné. C'est en quelque sorte le chaos primitif. La tradition celtique l'a
nommé, en son aspect le plus extrême : CYTHRAUL, la Puissance du Mal.
Mais comme cette division de « OIW » en deux aspects a éternellement
eu lieu, nous sommes amenés à conclure que CYTHRAUL et DouÉ sont coexis-
tants tous deux, alors que l'Eternité absolue est le propre de « OIW », la
Monade.
Nous avions déterminé plus haut que deux choses semblables ne sauraient
coexister, et CYTHRAUL et DouÉ semblent alors venir contredire ce raisonne-
ment logique. Mais, sagement, la tradition celtique fait observer que
CYTHRAUL et DouÉ sont dissemblables, étant les deux opposés, les deux
contraires. Il n'y a pas éternellement deux Perfections divines mais une
Infinie Perfection, et une Imperfection relative et momentanée.
Une image peut rendre accessible cette énigme. Celle d'un cône de lumière,
jaillissant d'un phare, et se perdant dans l'immensité de la Nuit. Puis, son
contraire, celle d'une ombre, dressée face à la source lumineuse, et allant se
20 AU PIED Dl\S MENHIR"
***
Chacun des germes de MANRED a constitué une créature
A travers tous les plans et tous les cycles du MoDURANS Awn
chacun d'eux a successivement été un minéral, un végétal,
homme, ct tous les états naturels ont été franchis. Chaque i
qu'une forme apparente. Seul le MANRED primitif constituait 1
manent, incorruptible, l'animateur, de la forme apparente ...
Plus un de ces germes de lumière aura eu conscience de sa
tence, en tant qH'être distinct de « OIW », plus il se sera indindua
de l'influence et de l'essence divine absolue, et plus la somme de œ~
fections (inhérentes à cet éloignement) se sera accrue.
Il semble alors que, pour employer une image grossière, plus on 'e ~ne
de « OIW » (et plus on en ressent l'absence), plus on en distingue:a a ~éa
lité, au dernier jour du Monde.
Le MANRED extrême, le germe le plus imparfait, le plus éloigné de D :i,
est donc nécessairement le principe même de CYTHRAUL.
*
**
Mais la dualité créatrice de « 01\IV » est simplement le premier stade
de son action. MonuR (Moteur) est aussi un des noms de « OIW ». Et
d'autres « apparences », d'autres personnes divines, vont jaillir de l'opposition
CYTHRAUL-Dow-É, et des « mondes » secondaires seront l'œuvre de ces Ema-
nations.
même chose. Mais pour Dieu, qui est l'Ittre Absolu, c'est par le fait même
de ce caractère absolu, par son omniscience, qu'il conçoit simultanément ces
de1~x possibilités.
Et alors, on peut être amené à admettre que la « manifestation négative »
(vulgairement appelée le Mal), est consécutive au rejet, dans le Monde
(domaine de la Négation) de l'aspect négatif d'une chose, et sa « manifesta-
tion active » (le Bien), dans le plan céleste ou divin, à sa conservation par
Dieu, à son adoption.
Pour l'Homme, quand il envisage deux issues à un même acte, et qu'il en
écarte une, de ces deux pensées qu'il a ainsi amenées à l'Univers-Mental, il
en est une qui est introduite dans le Réel, et une autre qui est rejetée. Mais
si la pensée de l'Homme était éternelle comme celle de Dieu, ce rejet équi-
vaudrait à la Création d'un second domaine mental, domaine où toutes les
pensées ~ue l'Homme écarte et rejette, se manifesteraient à leur tour. Ce
domaine serait alors nécessairement le reflet, inversé et contraire, du pre-
mier. ..
*
**
Or, la Pensée divine est éternelle, comme « OIW » Lui-même. Si elle
ne se manifeste pas de façon permanente, si elle équivaut à une apparence
de variation dans ses concepts, il n'en est pas moins vrai que Dieu étant tout
« ce qui a été, ce qui est, ce qui sera », tôt ou tard elle se manifestera.
*
**
Concluons donc que tous les futurs possibles seront.
Mais il est non moins évident que le Mal (parce que le Mal), ne saurait
être l'œuvre de « OIW », la Perfection même. On est alors amené à envi-
sager deux modalités conscientes d'action de « OIW », s'équilibrant l'une
l'autre, et cela dans un domaine où ces deux modalités ne soient plus, éter-
nellement, mais où elles soient introd1tites dans la Durée, soumises à une
succession mutuelle et à un mutuel équilibre.
Or, le seul domaine où cela soit possible est le Monde (MonURANS Awnn),
ce Monde qui est le résultat de la manifestation du Temps et de la Limite
spatiale.
En Dieu, tous les futurs possibles résident éternellement, et parce qu'il
est infiniment puissant, il lui serait possible de les objectiver. Mais, parce
qu'il est infiniment parfait, il ne peut souhaiter que le Mal soit réellement.
En lui s'établit donc une éte1·nelle discrimination. Et ce choix, éternel comme
lui, établit donc deux Univers, l'un qui sera parce que Dieu le souhaite, et
-qui sera beau et bon parce que DietJ le veut ainsi. L'autre, qui ne sera
jamais réalité, et qui est le mal total, parce que Dieu ne le souhaite ni ne
l'inspire.
Ainsi donc, face au Beau, au Bon, au Réel, se dressent le Laid, le
Mauvais, l'Irréel (CYTHRAUL). Et cela, par le fait de cette éternelle concep-
tion divine de tous les possibles, coexistante à une éternelle discrimination.
L'univers voulu par Dieu, c'est GwENVED. L'Univers rejeté, c'est ANWN.
Entre les deux : ABRED, la « route » (1) ...
Concluons alors que cette lutte des deux possibilités est le propre de l'Uni-
vers matériel, mais que le Monde Divin en est exempt. En lui, tout au plus,
peut-on envisager une discrimination permanente, analogue, en chimie, à la
séparation des éléments subtils des éléments grossiers.
( 1) De red : errer.
22 AU ·PIED DES MENHIRS
***
LA TRINITE CELTIQUE
*
**
Si nous demandons à la scholastique de vérifier et d'étayer la thèse du
ternaire divin, nous voyons aussitôt se formuler des définitions aussi claires
que logiques.
Dieu est éte·rnellemC'nt créateur, nous l'avons vu, sous peine de varier et
de ne plus être immuable.
AU PIED DES MENlURS 23
**,.. ,,
*
*';'
Ce dédoublement est-il susceptible d'être situé . dans le Temps ? Assuré-
ment non, puisque la Divinité est hors de la Durée, donnée uniquement ter-
restre, et impliquant cette impossible variation.
La Mère Eternelle est donc bien coa.âstante au Père, et son éternité est la
s1enne.
'*
**
Issue éternellement du Dieu unique (puisque coexistante), la Mère est
donc éternellement sa Fille. Et puisque coexistante, elle est, à la fois « en
puissance de génération », et « génératrice », tout aussi bien !
Etant éternellement « en puissance de générations », elle est alors éter-
nellement vierge. Et là, l'image de la jeune fille, de la vierge, correspond
donc parfaitement à la définition première de la Nature Naturante.
*
**
Mais puisqu'éternellement coexistante au Père, et puisque tout aussi bien
éternelle génératrice, la Vierge Divine est donc éternellement son Epouse. Et
la seconde image théologique est, à son tour, justifiée.
*
**
Etant éternellement l'Epouse, il s'ensuit que l'acte fécondateur du Père
est éternellement accompli.
Eternellement conçue, éternellement issue, éternellement unie, éternelle-
ment fécondée, la Mère engendre donc éternellement le Fils.
24 AU PIED DES MENHIRS
***
Mais si le Fils est éternellement conçu et engendré, c'est qu'il est éternel
comme son Père et comme sa Mère. Dans ce cas, sa génération ne saurait se
différencier de celle de la Vierge, la Fille Céleste.
Et si sa génération est logiquement parallèle à l'autre, c'est que le Fils
et la Vierge sont communément engendrés. Ils sont donc le Frère et la Sœur
Célestes, par le fait d'une « naissance » gémellaire.
*
::'*
Et dans l'esprit de l'Homme, sondant ces mystéres, naît aussitôt l'idée
d'une copulation transcendantale• possible entre le Fils et la Fille. Comme le
Père et la Mère avaient constitués nécessairement un couple, de même le
Fils et la Fille vont en constituer un.
Et de cette « union » divine, naîtra le Monde, la Nature Naturée.
Cette Nature Naturée, elle est avant tout l'œuvre du Fils. C'est lui qui
opère la rétraction de l'essence divine, délimitant ainsi le domaine d''ANWN,
l'abîme originel. Il n'est pas que l'organisateur du Chaos, et l'ordonnateur du
Monde. Il en est aussi nécessairement le créateur.
Et parce que cette Nature n'est déjà plus la Divinité Totale, la Perfection
absolue y disparaît aussitôt. L'Imperfection est, obligatoirement, la caracté-
ristique de tout ce qui est créé et n'est pas absolument Dieu lui-même. Elle
en est le seul mode de différenciation.
*
**
C'est parce que la Nature Naturée, le Monde matériel, est un élément
imparfait, périssable et aveugle, que la Tradition Celtique l'a symbolisée par
un objet inerte : le chaudron ou l'amphore que KARIDWEN porte en ses bras.
Le Celte a choisi un vase plutôt que tout autre objet, parce que la
Création cosmique s'apparente merveilleusement à celle qui se peut accomplir
au sein du creuset rougeoyant ... C'est une immense et insondable œuvre
alchimique que KARIDWE::-1 a charge de mener à bien ; et c'est aussi le rappel
du lieu naturel où naît la Vie ...
Ainsi, KARIDWEN (dont le nom signifie la « Porte de Dieu ») est bien
très réelle·ment cette porte. Car c'est en épuisant toutes les modalités de
l'ex istence, toute la pluralité des formes corporelles, que l'Ame se rapproche
de la Divinité. Dieu est Tout; et certes, l'Homme n'est pas Tout ! Mais pour
comprendre Dieu et se fondre enfin en lui, il lui faut avoir été par tous les
éléments de ce T mtt J( 1)
*
**
Nous allons donc étudier chacune des « personnes » divines. Et avant
de commencer chaque étude, rappelons encore une fois que le latin personna
signifie, masque, apparence, rôle.
Qu'o1~ ne fasse pas dire à la Traditimt Celtique ce qu'elle n'a jamais sous-
entendu, savoir la pluralité des Dieux !
Et, parce que nous avons personnellement une vénération particulière
pour la Vierge-Mère Eternelle, parce que la Dea Myrionyme éveille en nous
des souvenirs et des échos venus d'un autre M·onde, c'est par Elle que nous
commencerons cette étude ...
***
KARIDWEN, LA VIERGE-MERE
{1) Tel le sucees du culte du Sacré-Cœur dans les ordres remtnlns, et celui de la V!er8'e
et de l'Immaculée Conception dans les ordres masculins.
AU PIED D:ËS MENHIRS 27
***
HU ~DARN, L'APOLLON CELTIQUE
Entre Apollon .1. Iusagète (" conducteur des Muses »), et notre Hu
KADARN celtique, il y a d'autres analogies. \-oici un texte révélateur à ce
sujet que la tradition celtique nous apporte : " Sean à la forte enceinte,
Sean à la Porte inébranlable !... Là où est le Chaudron sacré, le Per gallois,
le Kabus gaulois, que gardent les Neuf Vierges qui célèbrent les Mystères de
Hu KADARN ... ». C'est là, incontestablement, un rapport analogique entre
l'Apollon hyperboréen et ses Muses et notre dieu solaire du Nord.
« Le plus petit des plus petits, c'est Hu KADARN, selon le jugement du
monde. Il est le plus grand, et pour nous il est DIEU. Nous le croyons tel. Il
est notre Dieu caché, notre Dieu céleste. Légère est sa marche, et toujours
il est en travail. Il a pour support et pour char un élément de chaleur trans-
parente. Grand sur la terre, grand sur les mers, il est le plus grand pour moi,
la chose la plus évidente. Il est plus grand que les mondes. Gardons-nous
donc d'être inattentionné envers cette Grandeur généreuse ... »
Telle est l'énigmatique définition du dieu que nous donne Rhys Brydydd,
barde gallois (1450-1490) dans un texte que nous traduit William an Ithel.
Certains « celtisants » catholiques y ont voulu voir une définition particu-
lière du Christ. Avec Yves Berthou, en son ouvrage « Sous le Chêne des
Druides », nous concluons à une identification du dieu avec l'Ether cos-
mique:
« Il nous paraît évident qu'il est ici, fait allusion au Nwyr, ou éther, et
à rien d'autre. Car Dieu est Nwyr, disent bien des leçons, recueillies dans
la Barddas. Qu'y a-t-il de plus petit qu'un élément d'éther ? Qu'y a-t-il de
plus grand que cette immensité d'éther ? Actif est cet éther qui donne la vie
à toute chose, partout et toujours. Il est plus grand que les sphères, puisque
celles-ci ne sont pour ainsi dire que des atomes dans son immensité. »
Si nous nous souvenons que les Hermétistes connaissaient un cinquième
élément, constitutif et synthèse des quatre autres (Feu, Air, Eau, Terre), que
Plutarque y fait allusion, à ce cinquième élément, en dissertant sur l'ésoté-
risme de l'E du temple de Delphes et du dit nombre nous constatons que là
encore, derrière la vieille divinité celtique, se modèle déjà l'image du dieu
de connaissance, de jeunesse, et de beauté ...
Dans un autre ouvrage, intitulé « du Menhir à la Croix », ouvrage dans
lequel l'auteur tente de concilier celtisme et christianisme, Savoret nous dit
ceci sur Hu :
« Hu KADARN est l'époux mystique de KoRIDWEN ; il est aussi appelé
HuAN ou HoEL. Exposer la signification détaillée de ces vocables serait dif-
ficile. Hu KADARN est un symbole d'ordte universel, qui a pris, conformément
à la tournure d'esprit synthétique des Anciens, de nombreuses significations
secondaires, clés des différents mythes dont l'enchevêtrement ne facilite pas
la tâche du chercheur. Il y a là des adaptations impossibles à rétablir en
langage moderne. Selon le premier sens, le plus important, Hu IV.oARN est
le Verbe. C'est lui qui apparaît, d'après la Tradition bardique, à MENW-HEN
(l'Adam Kadmon celtique) sous la forme des Trois Rayons, ou Colonnes de
Lumière, à l'aurore des Temps ... Il est l'Epoux de KoRIDWEN, la Nature-
Principe, la Vierge-Noire (GwEN, comme radical, pouvant signifier, selon le
cas : blanc, brillant, béatifique, etc ... et DwEN signifiant comme radical : une
chose sombre, abyssale, ténél;lreuse, profonde). Comment et pourquoi celle-ci
pouvait être mystiquement considérée comme Vierge et comme Mère, com-
ment et pourquoi celui-ci pouvait être envisagé comme son Epoux ou comme
son Fils, tel est l'objet de l'exégèse orale des druides. Selon son sens astrono-
AU PIED DES MENHIRS 29
*
**
Sur l'avatar hellénique du dieu celtique, nous pouvons étudier tout parti-
culièrement le type apollonien · que nous commente Plutarque, et que les
c Hymnes Orphiques » nous précisent en détail.
c Viens donc, ô Bienheureux, tueur de Tytios, ô Phoïbos Lykoréen,
yénérable dieu de Memphis, dispensateur des richesses, Toi qui a la Lyre
Ad PIED DES MENHIRS 31
(1) .Le terme assyrJen de kéroub, qul a donné l'hébreu chéruhim, et notre français
chérubin, slgnlfle laboureur. En effet, les Dieux des Astres labourent l'Espace e~
l'ensemencent des germes de la Vie.
(2) Pausanias, X, 24, 1-5.
AU PltD DtS :M:l;:NHIRS
effet considéré comme la Divinité Suprême dont tous les autres ne seraient
que des « émanations », ou des hypostases second,lres, personnifications
purement humaines, et donc diverses.
Mais d'ordinaire, c'était Zeus, « père des dieux et des hommes », selon la
formule rituelle, qui résumait en Lui tout le panthéon antique. Ici, Plutarque,
avec toute la tradition delphique, attribue ce premier rôle à Apollon, qui
apparaissait, en sa fonction de magister, enseignant les hommes, et de devin,
les conseillant, comme le porte-parole de Zeus auprès d'eux. C'est pourquoi,
à Delphes, on l'assimile à son Père céleste, tout comme le Christ est assi-
milé au Père pour la religibtÏ chrétienne.
Voici ce que nous dit Plutarque :
« Quant à ces prétendues « émanations » ou transformations de l'Etre
Divin, voilà ce que l'Homme pieux refusera même d'entendre, car, admettre
cet embrasement et cette reconstruction périodique de l'UNIVERs (assimilé au
Dieu par le Polythéisme), c'est rabaisser la Divinité au-dessous de l'enfant
qui construit sur la plage des murs de sable, pour le seul plaisir de les
abattre ensuite ... Ce n'est qu'à un autre dieu, ou plutôt •à un Génie, ayant
pour domaine cette Nature où· se succèdent naissances et morts, qu'il convient
de s'engager en de tels avatars. Apollon ne connaît ni dégénéresce1,ce ni
tr~nsformation. Il est la « Lumière Ineffable »..• »
En effet, on voit alors combien, pour Plutarque, Apollon est le die·u
aimé ! Au même titre que le Christ peut l'être de ses modernes fidèles !
L'expression employée dès le début de l'ouvrage le montre : << ô philos
Apollon ... » ( « ô Apollon aimé ... »), est révélatrice de l'attachement spirituel
et intérieur du prêtre pour son dieu. Tout de suite, il nous montre le double
aspect de la « philanthropie » d'Apollon (philanthropie : mot à mot « amour-
des-hommes »), qui se manifeste à la fois dans le domaine matériel pratique
(lorsqu'il vient à notre aide par ses oracles, en tant que dieu de la divination)
et dans le domaine intellectuel (lorsqu'il éveille et qu'il guide l'esprit de
recherche en tant que dieu de la connaissance). C'est ce second aspect que
Plutarque examine dans le « De E Delphico ».
Apollon est, par excellence le « dieu philosophe », comme le montrent les
cinq vocables rituéliques qui lui étaient consacrés : Pythien (chercheur),
Délien (Clair), Phanaen (Lumineux), Isméen (Savant), Leschéborien (Conver-
sant). Termes qui peuvent en quelque ~orte jalonner les progrès des esprits
en quête de la vérité.
Plutarque nous développe d'ailleurs toute une théorie profonde sur les
rapports unissant le symbolisme philosophique du nombre Cinq et le dieu de
Delphes. On saisit mieux alors les relations mystérieuses qui unissent, au delà
des siècles, le Pentalpha maçonnique, avec sa lettre G (Genitor... ), et le dieu
delphique ou l'Apollon hyperboréen du maître de Samos ! Et même on aper-
çoit le fil unissant, par ce même nombre cinq, la tradition celtique, maçon-
nique, pythagoricienne, delphique. La fameuse lettre G des temples de la
Franc-Maçonnerie, cette lettre qui flamboie au centre de l'Etoile Pentagram-
matique, signifie en effet « Gnose, Géométrie, Génération (le voilà, le deus
genitor !), Grandeur », aussi peut-elle également signifier « Gwenved "•
puisqu'aussi bien, le Gwenved, ou « Monde Blanc », est le monde lumineu:r
des Héros et des Dieux ... « Ce nombre (cinq), nous dit Plutarque, est l'image
de la Cause Première qui organise l'Univers ».Voilà le GRAND ARCHITECTJt !
En résumé, Apollon est le dieu grave, serein, sage et, surtout, le divin
initié. Pour compléter son identité absolue avec les dieux classiques, il lui
faut être aussi le dieu sacrifié. Or, il l'est...
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34 AU PIED D'' S MENH1RS
Son fils, Esculape, ayant ressuscité un homme par son art (qu'il tient de
son père ... ), les Olympiens le font mourir. Pour venger cette injustice, Apol-
lon perce de flèche les Cyclopes qui ont , forgé la foudre qui a tué Esculape.
Zeus condamne Apollon à l'exil. Durant son séjour chez le roi Admete,
Apollon garde les troupeaux, charme de sa flûte les pâtres du voisinage,
, et surtout , enseigne aux hommes les choses utiles et saintes. JaJoux du bon-
heur qu'il apporte avec lui, les dieux de l'Olympe le rappellent parmi eux.
Forcé par sa nature, Apollon ne peut s'y soustraire, et remonte vers Zeus.
Telle est la légende mythologique. N'est-elle pas purement gnostique ?
Quand à prendre Plutarque pour un mystique exalté ou crédule, il faut,
avant de prononcer pareil jugement, lire ses œuvres !
Son attitude religieuse personnelle, Plutarque nous la définit en son
traité « Sur Isis et Osiris » : « C'est ainsi, Cléa, qu'il faut accueillir et
accepter sur les dieux, ce qu'en rapportent et en expliquent les esprits qui
unissent le sens religieux au sens philosophique, tout en persévérant dans la
pratique et dans l'observance des prescriptions relatives aux saintes céré-
monies. Mais en pensant aussi que rien ne saurait être plus agréable aux
dieux que d'avoir sur leur compte des opinions qui soient vraies, tu pourras
éviter un mal non moins à craindre que l'athéisme, et qui est la supersti-
tion !... » .
Sages paroles, et dont bien des mystiques pourraient se pénétrer !
Apollon Delphien est donc l'avatar supérieur de l'Hu KADARN celtique.
Cette avance dans le temps réalisée, revenons en arrière, et reprenons
l'étude de notre vieille tradition blanche.
*
**
Chaque année, à l'automne, disaient les aèdes, Apollon-Phoibos remontait
vers les régions nordiques, où régnaient, derrière une triple barrière de
glaces bleues, l'éternel printemps hyperboréen, que baignait la chaude lumière
d'un soleil doré. Et le dieu de Lumière, de Sagesse, et de Beauté, y demeurait
alors six longs mois, parmi les Cygnes sacrés qui le devaient ramener au
retour du printemps, vers les premières fleurs de Délos ...
Car nous retrouvons en Grèce, le Cygne hyperboréen. Les Hellènes de
la grande époque l'attelaient parfois aux chars de Dyonisos et d'Aphrodite,
mais plus souvent encore à celui d'Apollon. Leurs mythes nous disent qu'à
Délos, au moment de la naissance du dieu, l'enfant-divin avait' bondi au
milieu des Cygnes, accourus pour chanter son avènement.
Aux Indes, dans les Védas, le Cygne était l'image de Vishnou et un des
véhicules de Brahma. Semblablement, Zeus le prit comme médiateur pour
féconder Léda, image symbolique de l'Humanité tout entière, et la renouveler
en la faisant enfanter les Dioscures., présage de l'universelle fraternité.
L'œuf du Cygne, d'où naquirent Castor et Pollux, était alors l'image du
Monde. C'est cet ésotérisme profond qui justifie le fait que la grande porte
de l'église Saint-Pierre de Rome porte l'image de la païenne Léda ; près de
son Cygne ...
*
**
En effet, le Cygne est l'oiseau mystique des traditions celto-nordiques.
« Tout blanc en sa robe immaculée, nous dit Charbonneau-Lassay, le
Cygne emblématique nous vient de ces pays septentrionaux que d'éblouis-
AU PIED m:s MJ;:NHIRS 35
santes neiges couvrent quasi-toujours. Quand on étudie les olus anciens
témoignages de la présence humaine en ces hautes régions européennes, le
premier des oiseaux que l'on y rencontre clans l'art emblématique naissant,
c'est le Cygne. Quel peuple vivait alors en ces contrées et sous ce ciel
serein et magnifique ?... A peine venait-il d'ajouter à son outillage premier
de pierre, qu'il savait à merveille façonner, des instruments de cuivre et de
bronze, que, tout aussitôt, le Cygne s'y montre partout comme le confident
de la pensée de ces primitifs, et la gracieuse expression de leur croyance en
un Etre, supérieur et lumineux, maître du Monde et père de leur race ... » (1)
Le Cygne· était en effet pour les nations nordiques, ce qu'Apollon sera
plus tard pour la civilisation hellénique, l'image et la personnification, si
l'on peut dire, de la Lmnièrc Di~·ine. Voilà pourquoi outre les bijoux et les
armes, le Cygne de l'Apollon nordique orne le char et la barque du dieu de
Beauté, de Sagesse et de Sérénité.
Dans l'extrême Nord, en Laponie, du Cap Nord à la Mer de Kara, les
traditions populaires perpétuent encore le mystère de l'Oiseau Divin :
porte-bonheur dans la vie matérielle, et image de l'Infini Céleste.
De très bonne heure, le Cygne paraît descendre des régions nordiques vers
le centre et le sud de l'Europe.
Dès l'époque du bronze, on le rencontre en Hibernie, en Germanie, dans
le Sud-Est des Gaules et en Lombardie. C'est ainsi qu'un fragment de plaque
de ceinturon, d'origine ligurienne, nous montre le Cygne devant la Roue
Solaire. A Bibracte, près d'Autun, les fouilles du Mont-Beuvray ont livré
un Cygne en bronze, antérieur à l'invasion romaine. Il surmonte une douille,
comme la main, le sm~glier, l'alouette, le coq ou le cheval, des en~eignes
gau.loises.
Au Moyen Age, le Cygne accompagnera le Chevalier Mystique. Car, pour
la blancheur de son plumage, plus blanc que ceux de la colombe, de l'ibis
ou de tout autre oiseau, pour son goùt des eaux limpides et claires, aussi pour
son courage et pour sa puissance, le Cygne deviendra l'emblème du clas-
sique Chevalier, type renouvelé du héros grec, lequel correspond parfaitement
à l'être parvenu au sein du Gwenved, le « Monde Blanc »...
Chez les Anciens, et comme la Colombe, le Cygne fut également un
oiseau d'amour, emblème de l'affection et de la tendresse fidèle et pure.
C'est ce qu'exprimait magnifiquement « l'Aphrodite d'Or » des Grecs montée
sur le Cygne, la déesse qui enseignait aux Hommes l'Amour Céleste.
Le Cygne immaculé est enfin l'image de l'épanouissement final de l'Ame,
accédant enfin au Gwenved, au « Monde Blanc », parce qu'à son dernier
moment il exprime la Beauté de la Vie et la Grandeur de la Mort, par un
dernier chant.
« A l'Automne, nous dit Edouard Schuré, Apollon retourne en sa patrie,
au pays des Hyperboréens. C'est le peuple mystériewr: des Ames, lumineu.ses
et tmnspanntes. Là sont ses vrais prêtres, et ses prêtresses aimées. Quand
il veut faire aux Hommes un don royal, il leur amène, du pays des Hyper-
boréens, une de ces grandes âmes lumineuses. Et Lui-même revient à Delphes,
tous les printemps, dans sa blancheur lumineuse et ,pure, sur un char traîné
par des cygnes... :<>
Comment ne pas voir, dans cette mythique Hyperborée, avec Philéas
Lebesgue, le « Monde Blanc », le GwENVED où tout n'est que blancheur,
pureté, beauté, lumière ?
**
~::
« Le Temps n;exï'stê pas pa:r lui-même, mais bien par les Objets sensibles
seuls, dont résulte la notion du Passé, du Présent, et de l'Avenir. On ne
peut concevoir le Temps en soi, et indépendamment du mouvement ou du
repos des Choses. »
Tette egt 1a définition du Temps, exprimée par Lucrèce, dans son ouvrage
DeNatura Rerum.
Au contraire, pour Newton, « le Temps absolu, vrai, mathématique, pris
et1 soi et san:5 relation à aucun objet extérieur, coule uniformément par sa
propre nature... L'Espace absolu, d'autre part, indépendant (par sa propre
flature) de toute relation à des Objets extérieurs, demeure toujours immuable
et immobile ... »
On le voit, par cet extrait de son célèbre Scholie, pour le g-énial auteur
de ia théorie de la gravitation universelle, le Temps de la Science classique
serait analogue â un fleuve qui s'écoulerait d'un cours égal et uniforme, par
son essence propre, soit que des navires le parcourent et l'animent (permet-
tant ainsi d'apprécier des distances et des durées), soit au contraire que
ses eaux demeurent perpétuellement désertes !
A tout prendre, la définition antique que nous apporte Lucrèce nous
parait plus proche de la vérité, puisqu'elle sous-entend déjà, par une sorte
d'intuition (fréquente d'ailleurs chez les penseurs gréco-latins), une vague
conception d'un T emps relatif, et dont l'existence même serait liée aux
objets contingents.
La physiologie moderne a permis d'établir que le Temps humain, pris
comme indice, s'accélère ou se ralentit en fonction de l'impulsion et du
désir vital de l'individu. Concluons-en donc que l'Emotion J'accélère et est
susceptible de le manifester à son maximum, alors qu'au contraire, la Séré-
nité naturelle le ralentit, que l'Impassibilité et l'Inaltérabilité spirituelles et
physiques, J'annulent et le transmutent, pour en faire l'ébauche de l'Eternité.
C'est pourquoi la Mort a, de tous temps, été représentée comme disposant
à son gré du Temps, et en porte les symboliques attributs, qui sont la Faux
et le Sablier.
« Délivre-nous du Temps, du Nombre et de l'Espace
Et rends-nous le Repos que la Vie a troublé ... »
s'écrie -Leconte de Lisle, s'adressant à l'Ankou ...
Pourtant, dès l'époque de Newton comme dès celle d'Aristote, un méta-
physicien un peu réfléchi aurait dû sentir où était l'erreur de cette concep-
tion. Car nous n'avons idée du Temps que par nos sens, prenant appui sur
des rapports contingents. C'est ainsi que le grand mathématicien Henri Poin-
caré a suffisamment poussé ses déductions pour nous affirmer que : « la
rotation même de la Terre autour du Soleil, n'est que l'Hypothèse la plus
commode, mais non point la plus véridique, par rapport à l'hypothèse inverse,
car elle impliquerait sans cela l'existence d'un Espace Absolu... »
Ainsi donc l'Espace, frère jumeau du Temps, n'est rien qu'une propriété
que nous donnons aux objets. Pour lui, la notion que nous en avons n'est
ainsi que la résultante héréditaire des tâtonnements sensuels par quoi nous
essayons péniblement d'embrasser le monde extérieur à un moment donné.
La Relativité du Temps est tellement une réalité, et son caractère new-
tonien absol1-' une erreur, que si le Démiurge s'avisait, durant le sommeil de
AU PIJ;D nr:s MENHIRS
l'Homme, de rendre mille fois plus lents les phénomènes de l'Univers, nous
n'aurions aucun moyen de nous en apercevoir au réveil 1 Rien ne nous
apparaîtrait changé, puisque chacune des Heures de nos horlo~es mettrait
mille fois plus de temps à s'écouler que nos Heures anciennes (ralentisse-
ment du mécanisme), et que, parallèlement, toutes nos sensations seraient
également ralenties d'autant.
Cette Relativité, Henri Poincaré et de nombreux auteurs l'ont jadis sou-
tenue. Mais il appartenait au génie d'Einstein de la démontrer scientifi-
quement.
***
On sait que le milieu dans lequel nous vivons en tant que terriens, et
dans lequel nous situons les activités de l'Univers (nébuleuses, étoiles,
systèmes solaires, etc ... ), a été dénommé l'Ether.
Pour les anciens philosophes, l'Ether était l'essence divine elle-même (et
nous verrons plus loin qu'ils n'étaient pas tellement dans l'erreur en avan-
çant cette hypothèse). Le mot grec aether, dérive du verbe grec aetho, signi-
fiant en latin a1'deo (je brûle), et d' aer, mot grec équivalent au latin spiritus
(esprit) ; d'où ce mot grec aether, soit en latin spiritus ardens (esprit igné) .
Orphée le nommait le pyripnon, soit le souffle ardent.
Notons en passant que l'Ether n'est pas obligatoirement et a priori la
même chose que l'Espace ! Ce sont là deux termes distincts.
Or, l'expérience elite de Michelson, appliquant la théorie de Fizeau (mesure
ultra-précise des longueurs par les franges d'interférences de la Lumière), a
démontré que le rayon lumineux se propageait rigoureusement avec la même
vitesse (entre sa source et la Terre), que celle-ci s'éloigne ou se rapproche de
la dite source.
Conséquence, l'Ether participe du m01wement de notre Globe !
Mais, bien auparavant, de nombreuses expériences, antérieures à la genèse
Lle cette théorie, avaient établi que l'Ether ne participait pas à ce même
mouvement ! Or, c'est de cette contradiction, en apparence inconciliable, que
s'est servi Einsfein pour établir et démontrer la théorie de la Relativité.
Résumons donc :
I" L'observation des Astres prouve que l'espace interplanétaire n'est pas
vide, mais occupé par un milieu particulier, nommé l'Ether, dans lequel sc
propagent les oncles lumineuses ;
2" l'existence de diV'ers. phénomènes (notamment celui de l'aberration des
Astres), semble prouver que l'Ether · n'est pas entraîné par la Terre dans son
mouvement circumsolaire ;
3" l'expérience de Michelson semble prouver au contraire que l'Ether est
entraîné par la Terre dans ce mouvement.
La contradiction finale est éliminée par l'hypothèse de •Fitzerald et de
Lorentz, que nous pouvons ainsi résumer :
« Tous les corps subissent, clans le sens de leur vitesse, par rapport à
l'Ether, un raccourcissement égal, une contraction semblable. Cette dernière
est telle, qu'elle compense l'allongement au trajet des rayons lumineux entre
deux points de la Matière (l'émetteur et le récepteur). Elle est d'autant plus
grande que la vitesse des corps envisagée, par rapport à l'Ether, est plus
grande. »
Cette co11traction apparente n'est nullement due au mouvement des
« objets » par rapport à l'Ether. Elle est essentiellement l'effet des mouve-
AU PIED DES MENHIRS 41
ments des objets et des observateurs, les uns par rapport aux autres, soit des
mouvements relatifs, au sens de l'ancienne Mécanique.
Ceci ressort d'expériences indiscutables.
Cette conclusion peut alors s'énoncer ainsi, selon Minkowski :
« L'Espace et le Temps ne sont que des illusions. Seul existe, dans la
, Réalité, une sorte d'union intÏMie de ces de1{X entités ... ~
*
**
Parallèlement à la relativité du Temps, la Masse, élément que la physique
ancienne considérait comme un terme pratiquement invariable, la Masse croît
avec la Vitesse, puisque, sans changer quoi que ce soit à sa propre substance,
une Masse de r kilogramme pèsera 2 centigrammes de plus à la vitesse de
r.ooo kilomètres à la seconde ; qu'elle pèsera 1.050 grammes à celle de
roo.ooo kilomètres à la seconde ; 1.341 grammes à 200.000 kilomètres à la
seconde ; 2.000 grammes, soit le double, à 2S9.8o6 kilomètres-seconde ;
3.9os grammes à 29o.ooo kilomètres à la seconde, etc ...
Concluons donc que la Masse est quelque chose de très variable, et que si,
à l'échelle de la perception sensorielle du Microcosme, cette variation est
inappréciable, elle est considérable à l'échelle des Macrocosmes peuplant les
espaces interstellaires.
Ceci découle d'une autre constatation, savoir que la Matière est composée
de plus de vides que de pleins ...
Ainsi, si nous réussissions à supprimer l'espace séparant les électrons et
le proton constitutifs d'un atome, et à agglutiner ces divers éléments, et si
nous répétions cette opération pour tous les atomes constituant un corps
clOimé, la réduction de volume de ce corps serait telle qu'elle équivaudrait à
nos yeux à sa quasi-disparition ...
*
**
D'ailleurs, si tous les corps de l'Univers venaient à se dilater simultané-
ment et dans la même proportion (proportion consécutive à leur nature
substantielle, et donc, - unité d'origine de cette Matière, - égale en toutes
ses manifestations atomiques), nous n'aurions aucun moyen de le constater.
Nos instruments, nos organes de perception et nous-mêmes, étant pareillement
dilatés, nous ne nous apercevrions même pas de ce formidable événement :
l'agrandissement de l'Univers !
Nous pourrions poser l'hypothèse inverse, et admettre que sous une modi-
fication analogue, l'Univers pourrait se rapetisser au liel!1 de se dilater.
Et nous devons reconnaître que, si ce phénomène s'est déjà produit ou s'il
répond à une loi naturelle (contraction et dilatation successive équivalent
à une sorte de pulsation universelle), nous n'avons aucun moyen de le
vérifier.
Notons en passant que cette simultanéité ne pourrait être, pour rester dans
la logique, et puisque procédant de corps à vitesses très différentes, que pré-
cédée d'une préalable « mise au pas » des élément$ constitutifs de l'Univers.
AU PISD DES MISNHIRS
...... _
Cette hypothèse des réductions et des augmentations des volumes maté-
riels, par suite de la modification dès distances inter-électrons, est justifiée
par de nombreuses expériences de laboratoires eHectuêes pâr d'habiles phy•
siciens. C'est elle qui est à la base de la théorie moderrte de la transmiliâtidti
métallique, théorie qui n'est d'ailleurs pas absolument ce11e des anciens alchi=
mîstes, nous tenons à le signaler.
Le résultat plus que surprenant de ces expériences est que la Masse réelle
d'un corps est nulle. Toute cette Masse, cet ensemble de particules consti-
tutives (électrons, proton, etc ... ) est d'origine électro-magnétique. A l'heure
actuelle, la science moderne a dépassé en son domaine expérimental le stade
purement atomique.
Voilà qui modifie totalement nos idées sur l'essence de ce qu'on a convenu
d'appeler la Matière. Et on aboutit alors à cette conclusion que la sttbstance
spirituelle n'est que de la substance matérielle, contractée ou dilatée, et inver-
se'm ent que la substance matérielle n'est que de la substance spirituelle
modifiée.
Vérité d'où découle, aveuglante de clarté, l'axiome fondamental de l'at1•
cienne philosophie hermétique : l'unité de substance de tout ce qui a été, est
ou sera.
« Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ... », nous dit la 'l'able
d'Emeraude, attribuée à Hermès Trismégiste. Et les « Vers d'Or » pythago-
riciens nous disent à leur tour que : « ... Tu connaîtras ainsi que la Nature
est, en tous points, semblable à Elle-même ... ».
Et ce n'est pas tout encore. Le postulat métaphysique qui nous avait servi
de point de départ pour établir l'identité relative de la substance divine et
de la substance universelle, devient alors un axiome fondamental de notre
synthèse scientifique.
Car nous pouvons alors conclure que, pour créer (éternellement ou pas, ceci
est l'affaire du théologien et non de l'homme de science), l'Absolu n'a fait que
contracter sa propre essence, et se retirer partiellement de son propre Espace.
Et ainsi, l'Esprit (Spered) est devenu Matière (Danvezenn).
*
**
Comment a pu s'effectuer cette variation substantielle ?
Nous l'avons vu tout à l'heure. Par une simple variation du Mouvement.
Le résultat expérimental envisagé plus haut est sans ambiguïté. (Certaines
expériences ont porté sur les rayons « beta » du Radium, correspondant à
ùne valeur de Masse décuple de la Masse initiale.) La conclusion est celle-ci :
les Masses varient avec la Vitesse.
Ceci tend donc à établir que la Mécanique céleste classique n'était qu'une
approximation grossière, valable pour les vitesses médiocres que peut seul
percevoir le système sensoriel de l'Homme.
Cela tenait à ce que nous avions tout simplement confondu la Substance
et la Masse, la Matière et son Volume !
Ainsi, les notions physiques qu'on croyait les mieux établies, les plus
constantes, doivent céder la place à des conceptions a priori. moins ration-
nelles, plus nébuleuses, moins nettes, mais par contre mieux adaptées aux
exigences des conceptions surhumaines de la philosophie moderne, com~e au.x.
exigences expérimentales de ses laboratoires.
AU PIF:D o:es MENHIRS 43
*
*:::
Nous avons noté, tout à l'heure, la nécessité d'un Univers sphérique et
limité, constitutif de l'Œttf symbolique de notre Tradition, comme condition
primordiale de son éternité (toutes choses égales d'ailleurs, et sans que
doivent jouer, en ce postulat, les variations relatives de son volume propre).
Or, il est expérimentalement démontré que la Lumière ne se propage pas
en ligne droite- dans les régions du Monde où se fait sentir la gravitation.
Au contraire, sa trajectoire est incurvée, comme celle des objets pesants.
Cette observation était impossible à réaliser sur un rayon lumineux
allant d'un point à un autre de la surface terrestre. D'abord, parce que la
pesanteur de la Terre est trop faible pour infléchir ce rayon ; ensuite, parce
que nous ne pouvons pas la suivre sur une distance suffisante, la Terre, Pi!:r
rapport à l'Univers, étant littéralement inexistante.
Mais ce qui est impossible dans la minuscule cornue terrestre, devient aisé
dans cet immense laboratoire qu'est le Ciel. Et l'observation astronomique a
vérifié et démontré la variation subie par la Lumière près des zones de gravi-
tation.
Cette variation est d'une seconde de degré et quarante-cinq tierces. Ne
dédaignons point cette faible ampleur angulaire, puisqu'elle constitue un
des facteurs de la victoire d'Einstein sur Newton ...
D'autre part, il est également démontré que : « tout mobile, abandonné
librement à lui-même, décrit dans l'Univers une géodésiqtte, c'est-à-dire une
que les prêtres d'Egypte confiaient comme ultime secret, de bouche à oreille,
lors des mystères initiatiques : « Osiris même, est un dieu noir ... »
C'est peut-être parce qu'ils connaissaient la profondeur de la grande
nuit sidérale, que les scribes anonymes qui ont rédigé le Deutéronome sous
l'éponyme de Moïsché, prêtent à Iaveh cette lourde parole : « Les Ténèbres
seront mon Domaine ... » (1).
Ainsi, pour démontrer à l'inlassable curiosité humaine l'inaccessibilité de
Sa Nature, il suffit à « OIW » de reculer d'énigmes en énigmes, et de laisser
veiller, aux frontières de KL:UGANT, l'infrangible cohorte des mystères célestes,
inviolés ...
Nous savons que pour Plutarque et les traditions helléniques, Apollon est
la « Lumière Ineffable », et que cette Lumière est vivante, baignant tout
le Cosmos d'une subtile et mystérieuse imprégnation. C'est l'Ether, la
Lumière Astrale, l'Od, etc ... et il n'est que de relire tels textes anciens pour
s'en convaincre :
« Parce que c'est de VIE et de LuMIÈRE qu'est composé le Père-de-Tout,
de qui est né l'Homme, comprends donc la LuMIÈRE et connais-là ... », nous
dit Hermès Trismégiste dans le Poimand·res.
« Lorsqu'OIW prononça Son Nom, alors de Sa Parole, jaillirent la
LuMIÈRE et la VIE... », nous dit Le Barddas.
« Toutes Choses ont été faites par Elle (la Parole), et rien de ce qui a été
fait n'a été fait sans Elle. En Elle était la VrE, et la VIE était la Lu.J.UÈRE
des Hommes », conclut le Livre de Jean.
Qu'est-ce donc que la Lumière r Les physiciens modernes nous répondent
que c'est une onde électromagnétique, qu'elle soit visible ou non à nos yeux.
Qu'il s'agisse des ondes indécelables, parce que trop faibles, qui s'échappent
de nos usines électriques, et dont la longueur d'onde est grande comme la
Terre, jusqu'aux rayons gamma du radium, qui logent 140 millions de sinuo-
sités dans un espace de un millimètre, la série des « lumières » est ininter-
rompue. Nous en connaissons 65 octaves, et une seule d'entre elles impres-
sionne notre œil ! Successivement, et par ordre de fréquence croissante, nous
les dénommons ondes hertziennes, ondes. infrarouges, ondes visibles, ondes
ultraviolettes, rayons X, rayons gamma. A la fréquence près, elles sont toutes
' rigoureusement identiques entre elles.
Or, notre « Lumière totale », absolue, c'est-à-dire l'ensemble de toutes
ces ondes que nous venons de décrire, et qui constitue le « Rayonnement
Universel», est bien cette «Vie» que le prologue de saint Jean nous affirme
être une des manifestations du Logos, du Verbe divin. Car le physicien
apporte son concours au théologien pour nous démontrer que cette « Lumière
Totale » qui vibre et agit dans l'Univers, est L'unique agent de la transforma-
tion perpétuelle de la Matière. Qu'on en juge. C'est Plank et ses « quanta »
qui vont nous le démontrer l
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*
**
« Au Commencement, était la Parole. La Pa-role était avec Dieu, et la
Parole était Dieu. Elle était att Commencement, avec Dieu. Toutes choses ont
été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle. En Elle
était la Vie, et la Vie était la Lumière des hommes. La Lwmière luit duns les
Ténèbres, et les Ténèbres ne l'ont point reçue. ~
(1) N'oubl!ons pas en erret que lorsqu'un corps chang-e son rayonnement c'est qu'il a
changé de nature ! Puisque justement l'expérience de Rutherford démontre que le
« bombardement » atomique a pour obJet de modifier le dit rayonnement.
Et ceci est d'autant plus lntéressan! que rtéjà, il y a des siècles, un des ouvrages
les plus profondément métaphysique qu'at! enranté l'Humanité, nous avons nommé
le Zohar, nous dit que, pour créer l'Uni vers, Dieu a simplement rétracté son Essence,
lui retirant une partie de Ses Perfections Inrtnlcs, ct créant. nécessairement l'Imper-
rection, Inhérente au cosmos, tmperrectton sans laquelle le dit Cosmos ne saurait
plus se distinguer de la Substance Divine elle-même.
At1 PIÈD m:s MÈNHIRS
Nous voyons ici se dessiner l'affirmation classique d'un Logos (ou Pa~ole
divine), présent aux côtes de l'Absolue-Divinité au Commencement de ce qui
est, en même temps que l:affirmation que ce Logos est substantiellement
identique à cette même Divinité-Absolue. (Consubstantialité d'essence).
Ensuite, le texte classique nous avertit que ce Logos est le véritable et
seul Créateur, et que rien de ce qui existe n'a été et ne sera sans Lui.
Enfin, nous apprenons qu'en ce même Logos est la Vie, soit la puissance
d'être, et la puissance « de faire que quelque chose soit ». Or, cette Vie, c'est
ce que les hommes appellent la Lumière. Cette lumière est donc créatrice.
Et puisqu'elle est la Vie, que la Vie est participante de la nature du Logos
ou Verbe Créateur, ledit Logos Créateur est aussi la Lumière ...
Or, nous savons que l'atome est composé d'un noyau et d'électrons cir-
culant autour ; que le noyau est composé de protons et de neutron!'!, que la
destruction réciproque de grains d'électricité positifs et négatifs (ou électrons
des deux signes) produit deux photons, que les photons sont des corpuscules
lumineux, et que la Lumière est à la fois composée de corpuscules lumineux
et d'ondes (étant en même temps ondulatoire et corpusculaire), et que la
Matière est finalement réductible en photons, nous concevons alors comment
(selon la Tradition religieuse), la Lumière a pu être avant le soleil et les
Astres J(l) Et ainsi, la Parole fut, avant tout.
Nous pouvons donc conclure que le « rayonnement universel », (dont la
lumière physique n'est qu'une des manifestations sensibles, il y en a 65 autres
décelées par l'homme ... ), joue, dans le Cosmos, le rôle de l'Ame dans le corps
humain, conservatrice et transmutatrice tout à la fois, de la masse substan-
tielle qu'elle administre, gère et conduit vers sa Finalité.
D'autre part, nous pouvons considérer ces échanges d'énergie entre les
éléments constitutifs de l'Univers (ce par la voie de l'émission et de la récep-
tion qui régit les rapports des Astres - cellules cosmiques - entre eux),
comme l'équivalent dans le Macrocosme, des échanges organiques essentiels
dans le Microcosme. Et la parenté constitutionnelle des deux, semble sura-
bondamment démontrer le bien-fondé de cette équivalence analogique.
La Lumière serait alors la manifestation apparente des fonctions nutritives
ct fécondatrices du Macrocosme. On comprend alors que les antiques Cosmo-
gonies la placent au premier instant de la Création. Du « Fiat Lux » de la
Genèse moïsiaque aux trois « Cris » du Barddas, l'identité est complète.
Ainsi au stade inférieur et selon l'heureuse définition du Docteur Jaworski,
« ce qui est contact direct dans le plan cellulaire, et lien dans le plan hominal,
devient simplement radiation dans le plan cosmique ... » (2)
L'HOMME ET LE MONDE
OU L'UNION DE MENW ET DE MODURANS AWDD
(1) Il est donc Indifférent d'ouvrir la Bible au premier verset de I'Evanglle de Jean,
ou au premier verset de la Genèse, puisque ce dernier nous arflrme, lu! aussi, que
• Dl.eu dlt, que la Lumière soit, et la Lumière rut... •· De toutes façons, c'est la
LHmlère que nous rencontrons au début du Tout.
(2) • Le Géon, ou la Terre vivante >>.
~U PIED PF.S MENHIRS
***
Reste un autre dilemne, aspect supérieur du problème.
Cette Ame du Monde, avec qui nous vivons la grande aventure de la Vie,
en qui nous voyageons au sein de l'Immensité Divine, est-elle le Divin
Ouvrier, le Verbe Eternel et Créateur, le Logos, fils de Dieu, Je céleste
« Maître-Jacques », intermédiaire métaphysique, seul issu primitivement de
la Lumière ·Ineffable, perdue en son abstraction ? Ou est-elle au contraire
J' Arkonte en révolte, le Démiurge ignorant et simplement imitateur de ce
qu'il perçoit intuitivement, véritable « singe » de Dieu, tel que le conçoivent
les Gnostiques et les Manichéens ? Cette aventure prestigieuse, fantastique,
la vivons-nous avec lui et par lui ? Nos essences collectives constituent-elles
la Sienne ? Son Devenir est-il le nôtre ? Ou, au contraire, vivons-nous par
lui, mais extérieurement, et en ce cas, les routes du Démiurge et de l'Homme
sont-elles divergentes ?
C'est ce que nous définirons par la suite. Pour l'instant, sachons seule-
ment que l'Animateur, le Maître du Ciel, c'est celui que les Druides nom-
maient Hu KAnARN, le Tout-Puissant, le Fils de D,ieu. Et nous saurons, dès
à présent, que nulle entité, nulle émanation, 11-'ont fait du Monde selon les
Celtes, le séjour de la révolte et de l'imprév~t, mettant. l'omniscience Divine en
défaut...
***
Mais, dira le sceptique, cette Force qui meut, transforme et conserve
l'ensemble de l'Univers, est-elle intelligente, consciente de ses actes, libre ?
Ou n'est-ce pas plutôt une force, un potentiel démesuré, qui, comme la Va-
peur, l'Electricité, la Pesanteur, se manifeste de façon absolument incons-
Par lui, Menw est réellement le coopérateur de Dieu, son instrument dans
la matière, répandue d'Anwn en Abred. C'est par Menw, uniquemenf par ,lui,
que Hu Kadarn peut réaliser son plan grandiose, et terminer son éternelle
Œuvre d'Amour. Comme en un immense athanor, Menw épure et transforme
la Création universelle. En lui, matériellement et spirituellement, au cours
des multiples existences, passent les éléments constitutifs des êtres pénible-
ment dégagés d'Anwn, !'-Abîme primordial. Par lui, la Terre, l'Eau, l'Air et
le Feu, soit Kalas, Gwiad, Fun, et Uvel, se subliment et se divinisent, se
muant ainsi en Nwyre l'Ether divin. Comme le Feu vulgaire l'Homme, par
ses vies et leurs nécessités dissout les éléments grossiers, bruts de leur sortie
d'Anwn. Il les transmute en lumière rayonnante, en chaleur spirituelle. Avec
lui, grâce à lui, la N.a ture matérielle s'élève ; le Maître divin pétrit à sa guise
le levain rebelle du Modurans Awdd, la Matière du Monde Futur, ce Monde
qtû doit être, un jour, tout en Gwenved ...
*
**
DE LA NATURE DE L'AME HUMAINE
DE MENW OU DE MENWYD
*
**
En français moderne, le mot âme dérive du celtique anm, d'où est venu
le grec amenas, le latin anima, puis le vieux français amène, pour, par
contraction, donner !'âme, déformation du terme primitif anm.
On peut rattacher ces dérivés successifs du celtique anwn (phonétique-
ment anounn), désignant l'Abîme primordial, la source où s'élabore la Vie,
que symbolyse le fameux vase ou chaudron, tenu en son sein par KARIDWEN,
la Nature Eternelle. ANWN est en effet le vase où tout se génère, le chaos
où tout est en puissance et en gestation. On peut établir une parenté avec
ANu, principe et dieu créateur assyro-babylonien, et le rattacher semblable-
ment aux Anounaki, nom des Gardiens de l'Abîme originel, serviteur d'Alla..
tou, reine des Enfers.
*
**
Chez les anciens auteurs, comme. chez les philosophes du Moyen-Age
ce mot (l'âme), a une signification plus étendue et plus conforme à son éty-
mologie celtique que chez la plupart des modernes.
En celtique, nous avons l'AwEN, le Souffle animateur divin. Selon cette
même définition, pour les anciens, le terme s'appliquait alors sans distinction
à tout ce qui constitue, dans les corps organisés, le principe de vie et de
mouvement. C'est en ce sens qu'il faut entendre la définition célèbre d' Aris-
tote : « L'âme est la première entéléchie d'un corps naturel organisé, ayant
la -ie en puissance, c'est-à-dire la force par laquelle la Vie se développe et
se manifeste réellement dans les corps destinés à la recevoir. »
AU PI:E:D DES MENHIRS 57
Platon concevait trois âmes s'intégrant au corps : la prem-i ère était selon
lui l'âme raisonnable, placée dans la tête, et seule pouvant prétendre à
l'immortalité posthume.
La seconde était l'âme irrascible, source des passions supérieures, principe
d'activité et de mouvement, située dans le cœur.
La troisième était l'âme appétive, source des passions grossières et des
instincts physiques, liée à la partie inférieure du corps, et destinée à se dis-
soudre avec la dépouille corporelle.
Platon ainsi, reconnaissait implicitement que l'Homme était la synthèse
des règnes inférieurs de la Vie (théorie soutenue par la Tradition Celtique),
règnes dans lesquels se manifestaient successivement l'âme constittttive (de ~
la forme), l'âme végétative (présidant au développement et à la reproduction
de cette forme), l'âme sensitive (mettant cette forme en rapport émotionnel
avec les éléments contingents). Ces trois âmes sont encore, pour les modernes
comme pqur les scholastiques médiéYaux. les mobiles du minéral, du végétal
et de l'animal.
Aristote, lui, en admettait cinq.
Il découvrait successivement l'â·ne rationnelle, ou raisonnable, l'âme appé-
tive, (source du désir,,de la volonté et de l'énergie morale), l'âme motrice,
(principe du mouvement), l'âme sensiti'O·e, (principe de la sensation et des
sens), l'âme nut-ritive (présidant à la perpétuité de la nutrition physique et à
la reproduction de l'espèce).
Nous nous rangeons quant à nou à la classification, traditionnelle et
séculaire, des trois âmes de Platon, mais réparties dans les trois règnes.
*
**
En déclarant que l'âme humaine es~ une substance spirituelle, nous enten-
dons qu'elle est simple, immp.térielle, incorporelle. Nul n'osera nier qu'il y
ait en l'homme un principe intelligent, sensible, et libre. En d'autres termes,
personne ne contestera sa propre existence, celle de son soi. Et les négateurs
qui, se rangeant aux théories de la mystique e..xtrême-orientale, considèrent
cette existence comme illusoire, admettent toutefois que cette illusion n'est
liée qu'au rapport avec l'Archétype, et que, dans le relatif, cette « illusion »
y est momentanément « réalité ».
Mais cette personnalité constituée par l'âme a-t-elle une existence propre,
immatérielle, bien qu'étroitement liée à des organes physiques, ou n'est-elle
qu'une propriété de l'organisme vivant, et même peut-être, un des éléments
de la Matière, soit quelque fluide subtil, pénétrant de sa substance et de sa
vertu les autres constituants de son véhicule ?
Adopter la première solution, c'est se déclarer spirrtualiste. Adopter la
seconde, c'est se ranger parmi les matérialistes.
*
**
II n'existe point de preuves plus solides de la spiritualité de l'âme que
celles qu'on a tirées de son unité et de son identité.
Sans unité, il ne saurait être de conscience.
Sans conscience, point de pensée, de facultés intellectuelles, et morales,
point de moi. - « Je ne suis à mes propres yeux, nous dira l'Homme,
qu'autant que je sens, que je connais, ou que je veux. Réciproquement, je ne
puis sentir, penser ou vouloir, qu'autant que je suis, ou bien que l'unité de
ss AU PIED DES MENHIRS
......
**
L'âme, étant une substance matérielle, certes, ma1s simple et indivisible,
n'a aucun besoin des éléments du monde grossier pour subsister. La décom-
position du corps ne peut par conséquent pas affecter cette substance, ni son
existence. Il est donc admis que l'âme soit : immortelle en sa réalité, éternelle
en son principe, et qu'elle persiste après la dissolution de la forme corporelle.
Si, par ailleurs, l'âme peut subsister après la dissolution de cette forme
qui ne lui aura servi que de Yéhicule pour un temps donné, il est également
possible qu'elle préexista à cette forme, et si elle a pu préexister à la forme
présente, elle a pn, tout aussi bien, animer nne forme antérieure à celle-là.
Concluons alors que si la vie présente et la vie antérieure sont des choses
on ne peut plus logiques, la vie future l'est tout autant, et que la réincarnation
n'est pas une chose aussi étrange que certains philosophes fanatiques veulent
bien l'a ffirmer.
Et la Doctrine Celtique, reposant tout entière sur les migrations de l'âme,
d'existences en existences, demeure fort plausible. On peut d'ailleurs étayer
cette hypothèse d'arguments tirés de la raison et de la morale.
***
Le grand argument généralement opposé à la pluralité des existences est
l'absence totale des souvenirs. « L'homme, nous objectent le matérialiste ou
le dogmatique, ne se souvient pas d'une autre vie. C'est donc qu'il n'en a pas
vécu d'autre ... »
Cet argument fait une part trop belle à la mémoire matérielle ! En effet,
il n'est pas nécessaire de franchir les bornes du Tangible, de remonter le
cours du Temps, et de se lancer dans l'océan obscur de la Durée, pour
constater que cette mémoire est chose éphémère et toute relative. Il suffit,
bien au contraire, de rechercher parmi les souvenirs de la toute première
enfance pour constater chez la plupart des humains, une viduité absolue. Quel
est l'être qui se souvient de l'instant de sa naissance ? Quel est l'être qui
saurait, sur des photographies prises à cet instant, retrouver et définir chacun
des assistants, répéter leurs paroles ? Et n'est-il pas courant de voir un enfant,
perdre petit à petit ses souvenirs, avec et sous l'affluence des impressions
nouvelles ?
Comment, en ce cas, exiger que l'âme se souvienne de l'Au-delà d'où
elle émerge, et admettre qu'elle puisse retrouver ses corporéités passées ?
Ces erreurs, communes chez la plupart des hommes, proviennent d'une
Imparfaite définition et compréhension du soi et du moi.
On commettrait en effet une erreur profonde en confondant ces deux
termes.
Ce sont les sensations qui, en s'ajoutant les unes aux autres, durant l'exis-
tence matérielle d'un être dans les Cercles d'AB RED, lui donnent l'impression
de constituer une unité particulière, le moi.
6o AU PIED m:s MENHIRS
En fait, ce moi n'est que pure illusion, résultant d'une habitude, d'une
succ·ession et d'une répétition de sensations diverses, sensations elles-mêmes
produites par la localisation de l'être en un point donné de l'Espace et du
Temps.
Bien au contraire, le soi est l'essence même de l'âme, c'est le germe de
lumière divine, le MAN RED originel.
Le moi serait la personnalité relative et momentanée. Le soi serait au
contraire l'identité absolue.
On emploie fréquemment le terme de personne (du latin personna :
masque, apparence, visage), pour désigner un aspect de la Divinité. La per-
somta divine serait alors la divinité relative; et l'Absolu serait l'identité
divine. Ainsi se définissent les rapports de Hu, KARIDWtN, Esus, TARRAN,
TEUTATEs, avec OIW.
Il en sera de même du moi et du soi. Le moi serait la personne httmai1te,
située dans le Temps et l'Espace, à leur mutuel croisement, par le fait d'une
incorporation matérielle et momentanée. Le soi serait, au contraire, son
propre « absolu », l'identité permanente du MAN RED, l'être même.
Pour les Celtes. l'Archétype d'où sont issues les âm.es humaines, le prin-
cipe immortel, animateur de formes illusoires, puisque passagères et fugitives,
porte le nom de l\IENW ou MENWYD, comme nous l'avons déjà dit.
C'est MENW, la source de l'intelligence et du bonheur qui constitue l'esprit
ou l'Ame, et il en est à la foi . la source et le but. Comme tel, il est issu de
M:eN, le Principe Créateur, il est animé par AVEN, le Souffle divin.
L'Homme n'a pas toujours conscience d'un moi, toujours unique au milieu
de la variété de ses modes et de ses attributs. Mais il sait aussi être toujours
la même personne, ce malgré les manifestations si diverses de ses propres
facultés, et la rapidité de succession des phénomènes qui constituent son exis-
tence terrestre.
Son identité ne peut pas plus être mise en doute que son unité ; elle n'est
pas autre chose que cette unité elle-même, considérée dans la succession, au
lieu de l'être simplement dans la variété ! (Car on ne saurait confondre ces
deux mots.) Et si on voulait la nier, malgré l'évidence, il faudrait alors nier
également la liberté (qui est impossible sans intelligence), et 165 plus nobles
sentiments du cœur, dont le smtVenir de ce qui nous est cher (c'est-à-dire ce
ql.li est la preuve évidente de l'identité de l'être !) est la condition indispen-
sable...
Au contraire, nos organes et les éléments les constituant ne demeurent les
mêmes ni par la forme, ni même parfois par la substance. Au bout d'un cer-
tain nombre d'années, ce sont autant d'autres mollécules, d'autres dimensions,
d'autres proportions, d'autres nuances, un volume toujours différent, une vita-
lité accrue ou diminuée, d,'autres organes parfois même, qui les ont complétés,
amputés, ou remplacés.
Ainsi notre corps se dissout et se reconstitue plusieurs fois durant la
vie terrestre. Et cependant le moi se sent toujours le même, embrassant en
une seule pensée toutes les modalités et les périodes de sqn existence. Ce fait
est donc le résultat des expériences les plus positives.
Pottrquoi le soi, seule parcelle impérissable et étemelle de nous-même,
11e conserverait-il pas, en une sorte de sanctuaire intérieur où nulle lumière
matérielle, issue des organes de chair, ne pénètre jamais le secret et le sou-
ve11-ir de ses vies passées"? Pourquoi, en ces « régions :. encore inconnues de
AU PIED DES MENHIRS 6r
*
**
Nous avons démontré précédemment que l'âme était une substance spm-
tuelle, simple et indivisible, n'ayant aucun be ·oin du corps de chair et donc de
la matière. organique, pour subsi ·ter. Concluons donc que la décomposition de
ce corps ne saurait affecter son existence propre et sa perpétuité. Et, en toute
logique, si elle est destinée à disparaître dans un nouvel état (ce que le catho-
licisme nomme « l'âme séparée »), nous devrons en rechercher la cause
ailleurs que dans la mort physique.
La plupart des Religions, manifestation collective de philosophies très
diverses, ont senti que le désir instinctif de l'homme, lorsqu'il réclamait pour
l'âme toutes les prérogatives de l'Immortalité, ne s'attardait pas à savoir si
le principe métaphysique même de cette âme subsistait seul. Bien au con-
traire, ce que l'être de chair désirait ardemment, ce qu'il exigeait même de
ce Créateur qu'il avait conçu parfait (on ne prête qu'aux riches ... ), c'était la
persistance de sa personnalité, du moi qui avait pensé, qui avait agi, souffert
ici-bas, du moi qui avait aimé, voulu, espéré en un Bonheur, malheureuse-
ment toujours absent du Monde matériel, des Cercles d'ABRED. En un mot,
ce que l'être intelligent désirait c'était l'union parfaite, malgré la perte de son
enveloppe charnelle, entre le moi et le soi.
Et finalement, la grande énigmè posée par l'homme est celle qui exige
réponse à ces trois questions :
- d'où vient l'Etre ?
- pourquoi est-il ici-bas ?
- où va-t-il ?
Certains philosophes nous disent que toute fin, imaginée par l'Homme,
sera toujours illusoire, parce qu'incessamment ramenée à une solution pure-
ment anthropomorphique. Et cela est vrai. Mais nous devons alors aban-
donner toute tentative de perception du spirituel, si nous prétendons raison-
ner autrement qu'avec des images et des exemples perceptibles à notre moi 1
Il est possible que notre soi détecte des lumières et des connaissances d'une
tout autre réalité, mais il est bien obligé de les mettre à la portée de ce moi
plus ou moins compréhensif, et qui, à son tour les traduira à notre intelli-
gence balbutiante, avec des concepts et des images appropriés.
Chaque homme aspire invinciblement au Bonheur ici-bas, au mieux-être.
Et c'est un lieu commun qu'affirmer qu'il y est irréalisable. Or, chaque
homme normal et saint d'esprit, donne toujours une raison à ses actes. Pour-
quoi, en cette matière, agirait-il autrement ?
Si l'état idéal auquel aspire tout être n'existe pas, il faut alors expliquer
pourquoi l'âme humaine l'envisage toujours, quelque soit le temps, le lieu,
la race. Le Bonheur, l'Homme passe sa vie entière à le rechercher. Il est
le mobile de toutes nos actions, et il peut, seul, concrétiser toutes les espé-
rances humaines.
Ce serait donc une loi de notre « nature » que de tendre vers un état
idéal. Mais une loi ne saurait exister sans raison, et même si la science
AU PIÉD DES MI!;NHIRS
humaine ne peut la fournir, il n'en est pas moins vrai qu'à défaut d'expli-
cation, sa constatation en établit péremptoirement l'existence.
Nous avons démontré déjà l'existence, nécessaire, de l'Absolu. Nous
l'avons démontré infiniment parfait et infiniment bon. Concluons que
« OIW » ne peut avoir créé l'Homme pour le faire éternellement souffrir,
ni même pour en faire le jouet d'une éternelle duperie. C'est donc que ce
Bonheur existe.
Or, nouveau dilemne, ce Bonheur, dont la réalité est ainsi établie, échappe
sans cesse à l'Homme ici-bas.
Puisque l'Infinie Perfection de « OIW » le lui doit, s'il est absent de
la vie en ABRED, c'est que le Créateur le réserve pour un autre monde, un
autre état.
Cet autre Monde, où l'Homme jouit d'un état idéal et d'tm parfait Bon-
heur, c'est le GwF.NVIW, le « Monde Blanc », des Celtes. Nous venons de
démontrer ct sa nécessité, et sa réalité, et sa définition. Précisons encore que
ces trois réalités doivent alors nécessairement donner satisfaction aux légi-
times désirs rencontrés postérieurement, en notre étude de l'âme. C'est-à-
dire qu'en GwENVED. nous devons retrouver notre personnalité permanente,
immortelle, l'union du soi impérissable et de tous les moi successifs, le souve-
nir de toutes nos existences, de toutes nos sensations, le bénéfice de toutes
nos expériences, de toutc5 nos incarnations. Le « Monde Blanc » nous doit
encore quelque chose, sans quoi il ne serait pas l'idéal état, il nous doit
encore les éléments mh11cs de ces som·cnirs et de ces conditions, c'est-à-dire
tous ceux que nous avons ::timés, tou ceux qui nous ont aimés, tout ce qui
a été, fragmentairement et passagèrement, les conditions trop brèves de nos
joies terrestres. Et cela, nous dit la Tradition Celtique, nous l'y retrouverons.
Les Triades Bardiques nous l'affirment, et nous les commenterons tout à
l'heure.
C'est en GwENYED, dans le « Monde Blanc », que sc trouvent ceux que
nous nommons les Maîtres, en celtique ATHRAWON. C'est de GwENVED qu'ils
descendent, en de nouvelles incarnations, parmi les hommes. Là, mêlés à eux
sous des formes modestes et humbles, ils y colportent la sainte Religion du
TouT en UN. Ils y réveillent, par leurs lumineux enseignement, le Souffle
divin, l'Inspiration salvatrice, èn celtique AwEN ...
Et c'est AwEN qui fait lever en nous cette joie intérieure, faite de la certi-
tude de notre Immortalité, de notre Identité, de notre Béatitude immortelle,
un jour, et qui équivaut, dans la Tradition Celtique, à ce que le Catholicisme
nomme du doux nom de GRACE ...
(1) Qu'on ·se reporte au conte de Peredur ab Ewrack, au • Gué des Ames •. comment ne
pas retrouver là, en ce passage mystérieux des énigmatiques Mablnogglon, l'échange
perpétuel qui veut que les times blanches passent de Gwenved en Abred, y devenant
alors momentanément noires, et des ames noires passan.t d'Abrea en owenvecl, pour
1 retrouver leur b)ancheur ?
AU PIED DES MENHIRS
DE LA « REALITE » DE GWENVED
*
**
Que tout élément contingent ait son double, situé en un quelconque hyper-
espace, peut évidemment être admis par un raisonnement haussé aux extrêmes
confins de la rêverie anagogique. Mais que cela puisse être scientifiquement
démontré, voire même envisagé, eut semblé une utopie il y a encore peu
d'années. Malgré cela, il semble bien que la philosophie, en ses toutes der-
nières 1et audacieuses investigations, apporte sa pierre à l'assise d'un concept
aussi traditionnel, parmi ceux qui constituent l'héritage ésotérique.
Toujours en son ouvrage « La. Philosophie du Non », G. Bachelard nous
dit que « le calcul nous livre cette notion du concept scientifique de Masse,
avec les moments magnétiques et électriques, les spins, en respectant jusqu'au
bout le syncrétisme fondamental et caractéristique d'un rationalisme com-
plet. »
Mais où ceci devient d'une extrême importance, c'est en fin de calcul,
lorsque nous voyons que la notion de Masse nous est remise, étrangement
dialectisée(tJ ! Nous avions besoin d'une masse; et le calcul nous en livre
deux, deux masses pour un seul objet ! C'est du moins ce qui découle des
expériences de Louis de Broglie, citées plus haut(2l.
L'une de ces masses résume parfaitement tout ce qu'on savait de la
« masse » dans les quatre philosophies antécédentes : réalisme naïf, empi-
risme clair, rationalisme newtonien, rationalisme complet ou einsteinien. Mais
l'autre masse, dialectique de la première, est une masse négative 1 C'est là
un concept inassimilable dans ces ~quatre philosophies antécédentes.
Par conséquent, une moitié de la mécanique de Dirac retrouve et continue
la mécanique classique et la mécanique relativiste ; l'autre moitié diverge sur
une notion fondamentale, elle donne autre chose, elle suscite une dialectique
externe, une dialectique qu'on n'aurait jamais trouvée en méditant sur
J'essence du concept de masse, en creusant la notion lewtonienne et relativiste
de la masse<Sl.
(1) Dédoublée.
(2) Louis de Broglie • L'Electron magnetique •·
(3 cr. Bachelard.
AU PIED DES MF:NHIRS
***
Le concept d'énergie négative s'est en effet présenté, en mécanique de
Dirac, exactement de la même manière que le concept de masse négative A
son propos, nous pourrions reprendre, point par point, toutes les critiques
précédentes. Nous pourrions affirmer qu'un tel concept eût semblé mons-
trueux à la science du xrx• siècle, et que son apparition, dans une théorie,
eût paru le signe d'une erreur capitale, viciant entièrement la construction
théorique. Pourtant, Dirac n'en fit pas une objection à son système. Au
contraire, puisque ses équations de propagation conduisaient au éoncept
d'énergie négative, Dirac se donna pour tâche de trouver une interprétation
phénoménale de ce concept ! « Cela, nous dit Bachelard, c'est de l'esprit
scientifique, audacieux pour notre temps ... ».
Son ingénieuse interprétation put d'abord apparaître comme une pure
construction de l'esprit. Mais la découverte expérimentale de l'électron posi-
tif, par Blackett et Occhialini, vint donner une. confirmation inattendue aux
1
vues diraciennes. Au vrai, ce ne fut pas le concept d'énergie nég-ative qui fit
rechercher l'électron positif. II y eut, comme souvent, synthèse accidentelle
de la découverte théorique et de la découverte expérimentale. Mais tout de
même, le lit était prêt, où le phénomène nouveau est ven\1 s'étendre, juste à
sa mesure. Il y avait une théorie intuitiYe, qui énonçait le fait. En un certain
sens, on peut donc bien dire, en suivant la construction diracienne, que la
dialectique de la notion d'énergie a trouvé sa double réalisation.
*
**
Reste le caractère propre à ces deux masses, qu'il s'agit de définir.
La masse négative est-elle le caractère qu'on devrait trouver dans le pro-
cessus de la dématérialisation, alors que la masse positive s'attacherait à la
matière résultant d'une matérialisation ? Autrement dit, les processus de
création et ceux de destruction matérielles (si nouveaux pour l'esprit scienti-
fique), sont-ils en rapport avec les dialectiques profondes des concepts de
base, comme les masses positives et négatives, les énergies positives et néga-
tives ? N'y a-t-il pas liaison entre l'énergie positive et la masse positive, et
entre l'énergie négative et la masse négative ?
Là, alors que l'esprit scientifique moderne cherche, rêve et, ensuite, tente
de justifier et démontrer, la tradition celtique répond affirmativement. Qu'on
veuille bien se référer à la conception dualiste du Pan-Cosmos, sous-entendant
en ce terme nouveau une conception synthétique de l'univers visible et de
l'univers invisible, ·du monde matériel et du monde spirituel. Qu'on se réfère
à cette tradition. Et on verra que masse et énergie positives, masse et énergie
négatives, étaient des concepts familiers aux ésotérismes antiques ...
Voici à ce sujet une tradition, définitive à cet égard.
*
**
Dans les « Mabinogion », recueil de contes constituant, dans la littéra-
ture celtique du Pays de Galle un ensemble d'enseignements ésotériques des-
tinés aux disciples (en gallois : mabinog), et formant le cycle arthurien du
haut-moyen-âge en Bretagne insulaire, il en est un intitulé « Le Gué des
Moutons »,ou « Traversée des Ames », qui est significatif à cet égard.
68 AtJ l'U:D Df.S MENHIRS
riel est générateur d'un acte correspondant dans le « plan » réflétant celui-ci.
Mais, s'agit-il d'un acte identique, ou d'un contraire absolu ? En un mot,
l'analogie est-elle génératrice de similitude, ou (vérité ici, erreur en deça ... ),
cet te analogie déclenche-t-elle, bien au contraire, le principe d'activité à la
fois complémentaire mais opposé ? Il semble que cette dernière hypothèse
soit la bonne. « Pardonnez à vos ennemis,. vous amasserez sur leur tête des
charbons ardents », nous disent les évangiles chrétiens. Et ce principe a été
le point de départ de la médecine homéopathique.
Dans l'ancienne philosophie scientifique, et notamment celle de Leibnitz,
il était d'une vérité évidente d'énoncer que : « deux objets différents ne
peuvent occuper la même place en même temps ». On y verra la condition
même de toute intuition géométrique, on érigera ce postulat en axiome évi-
dent. Mais en fait, il ne fait qu'appliquer, avec présomption, la notion phy-
sique des « objets indiYidualisés », bien séparés et bien classés par leur loca-
lisation. Il est solidaire d'un type particulier d'objet, ceux constituant des
solides absolus, impénétrables à d'autres. Mais il est bien évident que le
flacon de cristal extrêmement mince, et le"liquide qu'il contient, occupent de
façon identique un seul et même volume spatiaL
Ainsi, un volume d'eau donné peut très bien se voir surajouter une quan-
tité « n » d'oxygène, ou de tout autre gaz. Et si liquides et gaz peuvent
s'interpénétrer, emboîtés eux-mêmes au sein d'un solide contenant, rien ne
nous empêche d'envisager deux « univers », différents en leur substance,
séparés par les conditions de vie impliquées par chacun d'eux, bien que soli-
daires l'un de l'autre ... Or la tradition celtique exprimée par le « légendaire »
breton nous montre les morts vivant parmi les vivants, d'une.vie étrangère
totale. Qu'on se reporte aux « Légendes de la Mort » de A. Le Braz, on
verra que le purgatoire ou l'enfer se trouvent dans la Nature autour de nous ...
C'est ce qu'on appellerait avec plu s de précision encore, une affaire de
« dimension ». Nous y reviendrons tout à l'heure.
Afin qu'on ne nous ace se pas d'avoir « imaginé » les traditions concer-
n1ant le « devenir » celtique nous avons tiré des « Triades » l'essentiel
concernant la Vie future. \"oici ces textes :
83. - De trois causes a résulté la chute en Abred. Ce sont :
- l'Orgueil, qui fit que la c~éature désira s'aventurer au Cercle de Keu-
gant. Et la Mort lui barra la route du Retour ;
- de la Haine (du Mépris, ou Absence d'Amour). Et ceci l'exclut alors
nécessairement du Gwenveà ;
- du désir de changer. Et ceci au mépris de la Raison et du Devoir.
Cette triade fait tache parmi rLrmonieuse sérénité métaphysique des
autres. Il semble que la pensée chrétienne médiévale l'ait inspirée. Sinon, si
c'est là véritablement le primitii en,eiznement celtique, nous y retrouvons
l'indication d'un anéantissement en Die 1 puisque, sortant du Gwenved, l'Etre
franchit là aussi un cercle d' Ankou (- ort) . Il meurt donc « en Dieu ». Or,
c'est en Dieu que les germes d' Anwn prennent leur genèse principielle. L'Etre
sert donc à Dieu de germe pour l' Anwn • Iais, d'autre part, cette involution
a pour racine trois défauts qui, nous di la triade 78, ne se peuvent trouver
en Gwenved : la Mort, le Désordre, l'absence d'Amour ... Et la triade 67 nous
précise qu'en Gwenved, il y a trois aspec s principaux du Bonheur, qui sont :
la Vie Eternelle, l'absence de tout Mal, la Joie sans cesse renouvelée.
Tout l'ensemble d'ailleurs de la Tradition celtique, tel que nous la rap-
portent les triades, se rebelle contre cette triade 83, que nous n'hésitons pas
à considérer comme interpolée par des ccltisants chrétiens inquiets pour leur
première croyance, et désireux de concilier celle-ci et celle-là...
Not~s concluons donc qu'il n'y a pas de c chute » pour le Celtisme, et
q16'att ·ne peut retomber en Anwn une fois le cercle de Gwettved atteint.
Simplement, comme dans la religion védique, ou comme ljenseigne le boud-
dhisme, les grands Etres qui ont atteint la pure lumière divine, peuvent par
altruisme, redescendre au sein de la douleur, pour y instruire les hommes.
Alors, comme nous le verrons plus loin, on peut revenir de Gwenved en
Abred. Mais jamais en Anwn.
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AU PI!D DES MENHIRS 73
*
**
72. - Il y a trois places pour tout Etre et pour toute existence animée,
au cours de l'Existence Totale de cet Et re ou de cette Forme de vie. Ce sont :
- avec Cythraul, le Principe du Mal (Néant), dans l'Abîme d'Anwn ;
- avec la lumière du Choix, dans l'état d'homme, en Abred ;
- avec Dieu, dans le cercle de Gwenved.
Ainsi donc, en Gwenved, l'Etre, dégagé d' Abred, possède au maxium la
plénitude béatifique susceptible d'être atteinte en conservant sa personnalité.
Il ne lui manque rien, et il n'a nulle crainte de déchoir et de revenir dans
l'Abîme. La triade 83 est donc antitraditionnelle.
*
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13. - Il est trois genres d'existence et de vie pour les Etres vivants.
Ce sont :
- l'état de soumission à la Fatalité, dans l'Abîme (Anwn) ;
- l'état de liberté morale, dans l'humanité (Abred) ;
- l'état de félicité et d'amour parfait, dans la Lumière (Gwenved).
Ceci confirme encore notre thèse précédente.
*
**
84. - Il y a trois genres de mort, trois façons de mourir. Ce sont :
- par le Châtiment, découlant de la faute ;
- par l'Amour de Dieu, attirant toute créature du pire au meilleur,
d'Ab red en Gwenved ;
- par le repos en Gwenved, pour l'Etre qui ne peut supporter Keugant.
Cette triade semble nous signaler une sorte de parallélisme entre le plan
nirvanique du Bouddhisme, et son absolue Béatitude, sans désirs et sans agi-
tations vaines.
***
24. - Il y a trois alternatives pour l'Homme. Ce sont :
- soit le cercle d'Abred, soit celui de Gwenved, en tant que but ;
- soit la Fatalité, soit la Liberté morale, en tant que moyens et possi-
bilités de manifestations ;
- soit le Mal, soit le Bien, en tant que résultat.
Tout étant en équilibre, tout étant en possibilités en son domaine, l'Homme
a donc le pouvoir de s'attacher à l'une ou à l'autre, selon sa volonté propre.
Cette triade nous montre encore la possibilité de chute en Abred, mais
pas en Gwenved.
*
**
I4· - Il est trois choses inéluctables dans la Vie, trois nécessités aux-
quelles n'échappe aucune existence. Ce sont :
- l'inévitable genèse dans le cercle d'Anwn ;
- l'inévitable périple dans le cercle d' Abred ;
- l'inévitable accès final dans le cercle de Gwenved.
Et sans traverser ces trois états, nul Etre ne saurait exister, sauf Dieu
seul.
Cette triade nous précise donc que tous les Etres seront « sauvés », au
sens chrétien du mot. Pour le Celte, nul enfer éternel, nulle prédestination
74 AU PIED DJ:;S MENHIRS
*
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12. - Il existe trois cercles dans la Vie Universelle. Ce sont :
- le cercle de Keugant, cercle vide, où nul Etre ne peut subsister, hormis
Dieu lui-même. Ni les Vivants ni les Morts n'y accèdent, et Dieu seul
le peut franchir ;
- le cercle d' Abred, cercle de la Fatalité, du Destin inéluctable, ou chaque
nouvel état, chaque existence nouvelle, naît de la mort (conditionnée
par la précédente). Et celui-là, l'Homme le traverse ;
- le cercle de Gwenved, cercle de la Béatitude, le « monde blanc », où
chaque état dérive et naît de la vie. Et celui-là l'Homme le franchira
un jour.
On le voit, la notion (qu'on croit à tort spécifiquement asiatique) du
karma (balance des actions passées, bonnes ou mauvaises), conditionne la
nouvelle forme en Abred. Ce n'est pas là le seul lien du Celtisme et de
l'Indouisme.
***
77· - La Mort (Ankou), a trois justifications, et Dieu l'a voulue pour :
- permettre à l'Homme d'évoluer dans le cercle d'Abred ;
- rénover la Vie, afin de se reposer ensuite en Gwenved ;
- éprouver chaque modalité de forme et de vie, avec ses lois et ses acci-
dents. Et par cela on obtient ainsi une parfaite et complète connais-
sance de toute existence animée, de tout être, de toute qualité ott
essence.
Là encore nous trouvons la notion de « repos », consécutive à l'accès en
Gwenved. Nous pouvons admettre que la notion d' « action » est donc
dépendante du cercle d'Abred, et, conséquemment, que pour mériter davan-
tage, il faut agir, que pour agir il faut passer en Abred, et donc quitter
un temps le cercle de Gwenved. Là encore le Védantâ rejoint l'héritage
celtique (ou le précède, comme on voudra ... ).
*
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30. - Il est trois différences, inévitables et nécessaires, entre Dieu,
l'Homme et le reste des Etres. Ce sont :
- la limite (espace et durée), pour l'Homme. Or, on n'en saurait trouver
à Dieu;
- le Commencement, pour l'Homme. Et on n'en saurait imaginer à Dieu ;
- le Renouvellement, nécessaire, de la condition humaine, dans le cercle
de Gwenved. Alors que Dieu subsiste dans celui de Keugant.
Cette triade, elle aussi, nous pose l'hypothèse d'une mise au point (renou-
vellement), réalisée lors de l'accès au Gwenved. Gwenved est donc le plan
d'équilibre, statique, où l'Etre ne mérite ni ne démérite plus. Il y est sans
désirs, sans peines, sans souffrance, ce qui explique cette stabilité parfaite
(nirvâ.na).
AU PIED DES MÈNHIRS 75
*
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40. - Il est trois mobiles du renouvellement de la condition humaine
dans le cercle de Gwenved. Ce sont :
- l'Instruction (augmentant la Connaissance) ;
- la Beauté (sa recherche);
- le Repos (par inaptitude à supporter Keugant et son éternelle viduité
absolue).
Cette triade est énigmatique ! Elle semble nous dire qu'en Gwenved,
l'Etre peut pourtant a\ oir quelque désir, mais ne portant que sur un complé-
ment de Connaissance, ou un complément de sa vision béatifique (Beauté).
Et il faut alors mériter davantage pour acquérir davantage. D'où le nouveau
passage en Abred. Enfin, l'inquiétude métaphysique ; l'Etre désire échapper
à l'énigme entrevue du cercle de Keugant.
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r9. - Il est trois nécessités primordiales, préexistantes à toutes les autres,
et qui doivent nécessairement jouer avant que l'Etre n'atteigne la plénitude
de sa Connaissance. Ce sont :
- traverser le cercle d'Ab red, en toutes ses modalités ;
- traverser le cercle de Gwenved ;
- se souvenir de toutes choses, au long du cercle d'Anwn ...
On le voit, cette triade nous parle d'une traversée du Gwenved, et pas
seulement d'un repos possible en ce cercle.
17. -
***
Il y a trois raisons d'être à la Fatalité et au Destin qui règnent dans
le cercle d'Abred. Ce sont :
- la nécessité de reèueillir le fruit de chaque existence et de chaque état
de vie ;
- la nécessité de connaître toutes choses ;
- la nécessité de recueillir la force morale nécessaire pour triompher de
toute haine, de toute répugnance, et pour se dépouiller de tout Mal en
dominant les mauvais principes.
Sans ces trois nécessités d' Abred, dans la traversée de chaque état de vie,
il n'est nul être vivant, nulle forme, qui pourrait atteindre le cercle du
Gwenved.
En effet, si nulle loi divine inéluctable n'obligeait le MAN RED originel,
le germe lumineux, à passer par toutes les formes et les vies possibles, il
ne possèderait jamais la plénitude des souvenirs possibles et l'expérience
serait incomplète. Or, l'accès au Gwenved exige cette plénitude pour offrir
en échange l'autre plénitude, celle de la sérénité. Donc la loi divine doit être
inéluctable au cercle d'Abred.
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21. - II est trois moyens, que Dieu accorde dans le cercle d' Abred, pour
permettre de triompher du Mal et du Principe d'Anéantissement (Cythraul).
Ce sont:
- le Destin originel et sa nécessité ;
- l'oubli des modalités successives d'existence ;
-la Mort.
AU PIED DES MENHIRS
*
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ABRED LE « MONDE DE DOULEUR ET DE NECESSITE »
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C'est dans ABRED que l'Homme, plus qu'ailleurs, manifeste le mieux son
rôle de reflet et d'auxiliaire de Hu GADARN. Nous avons vu précédemment
ce rôle, nous n'y reviendrons pas.
On a coutume de dire de l'Homme que c'est un être à part, une catégorie
tout à fait distincte, car il est un composé où se trouvent réunis le « Ciel »
et la « Terre », la Matière et l'Esprit.
A vrai dire, l'Homme n'est pas le seul être qui soit doué de cette nature
gemellaire. Nous savons que tout, dans l'Univers, est constitué par NwYRE,
l'Ether divin, synthèse des quatre Eléments, et animé par MAN Rtn, la
lumière divine dissociée.
C'est pourquoi, avec d'autres écoles d'ailleurs (la Cabale hébraïque, la
Gnose alexandrine, Je brahmanisme, le pythagorisme, etc ... ), la Tradition Cel-
tique affirme que toutes les choses ont une âme. Plantes, animaux, minéraux,
détiennent chacun une parcelle de l'énergie divine à des degrés différents.
L'existence des minéraux-plantes (coraux, zoophites, etc ... ), des plantes-
carnivores, des divers « chaînons » unissant les trois• règnes de la Nature,
montre sans contestation possible que la Vie pénètre toutes choses.
At1 PI~D DES M~NHIR~
et qu'à l'aide de ce qui tombe sous ses sens, il peut, se servant de son raison-
nement, connaître ce qui est reqzûs pour être ce qu'ü est. Mais tant qu'il est
dans ce Monde, il ne peut toutefois concevoir qu'imparfaitement la nature
de l'être en GwENVED. Ceci en raison de la nature de l'être parvenu en ce
plan, nature qui n'appartient pas au domaine des choses sensibles, objets
propres de la « ratio » humaine. Et encore bien moins peut-il pénétrer la
nature de « OIW », trop différente de tout ce qui existe, en Sa Plénitude.
Tout étant inclus dans l'Essence Divine (bien qu' « OIW » ne soit pas,
totalement, en tout), il s'ensuit que rien, même en ABRED, ne peut échapper
à- son action. C'est cette action qui tire d' ANWN (l'Abîme Originel) les
Etres, les manifeste, les conserve et les conduit vers la Béatitude finale. Et
là encore, c'est Dieu qui se manifeste par son Infini Amour.
Tout étant en « OIW », il s'ensuit que Hu GADARN ne détruit jamais
rien de ce qui existe. Il tranSforme, mais ne détruit pas.
Cette éternité d'essence, que nous avons été amené à accorder à la Créa-
tion (ce mot n'implique pas l'Univers physique nécessairement) au début de
cette étude, n'entraîne pas pour cela que l'Univers soit immuable. Ces varia-
tions perpétuelles étant au contraire l'assurance de sa perpétuation.
Hu, le Logos Créateur, pétrit et modèle la matière essentielle que lui
fournit KARIDWEN. En puissance en celle-ci, en son sein, est donc la créature
idéale, l'image divine, l'Homme-Dieu, l'Enfant que porte la Vierge celtique
sur ses genoux. Et pour souligner que cette créature idéale ne sera pas de
ce monde, la Mère Eternelle a les yeux clos. C'est au Royaume du Rêve, dans
l'idéalité de GwENVED, qu'il « sera » un jour. Mais comme il constituera
pourtant, au sein de cette Création et de la N atzwe Eternelle, la seule réalité
émanée de l'Absolu, l'Enfant de la Vierge Celtique a les yezt.x ouverts(lJ ...
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LES CERCLES INTERIEVRS D'AB RED
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Emané d'ANwN, l'Abîme primordial, l'être essentiel (la monade du MAN
RED ou germe de lumière émané de « OIW »), se concrétise alors dans une
vie totalement inconsciente, mais cependant réelle. C'est la profondeur obs-
cure, où la Vie commence à se manifester au sein d'une sourde fermentation,
le premier aspect de la Création. L'état de minéral, de métal, avec ses
réactions naturelles (contraction, allongement, déformation, attractivité
magnétique, etc ... ) en est une image. Cette tradition est appuyée par l'expéri-
poraine et l'antique conception païenne des anciens Celtes, ce n'est sans doute
pas le moins significatif ... Le défunt est parti. Mais la vie qu'il mène en sa
nouvelle patrie est identique à son existence d'autrefois. Comme le Celte des
âges épiques était assuré de retrouver sur l'autre rive son harnois de guerre
et ses armes, de même le Celte contemporain est censé reprendre dans l'au-
delà ses habitudes, ses travaux, ses outils. Dans les -« apparitions :., le mort
conserve son vêtement coutumier, ou plus rarement le dernier habit de ce
monde, le suaire. Il porte généralement la même veste de travail en drap
rude, le large feutre, ct c'est sous ce simple aspect que les conteurs et
conteuses décrivent l'Ange de la Mort, le terrifiant AN Kou, conduisant sa
charrette grinçante, tirée par trois chevaux sans tête ! Le mort a toujours
ses sympathies, ses rancunes, ses haines. On peut l'offenser comme on peut
le réjouir. D'où la coutume (extrêmement ancienne) de garder les portes
ouvertes certains jours de l'année, de préparer des aliments et un couvert,
près du foyer, dans la nuit de la Toussaint. Les morts reviennent ches eu.r,
mûs par les souvenirs...
C'est donc bien là cette vie subconsciente dont tous les rituels funéraires
antiques ont tenu compte, et d'où dérive la coutume égyptienne d"offrir une
reconstitution de la vie réelle à celui qu'on abandonne pour toujours à l'éter-
nel silence et aux ténèbres. C'est de cette survivance de la conscience que
tient scrupuleusement compte le c Livre de sortie à la lumière du Jour :. de
l'antique Egypte (ou « Livre de la Demeure »), et le Bardo Tôdol thibétain.
Puis, petit à petit, avec la dissolution des formes-pensées issues de son
cerveau charnel, au fur et à mesure que sa chair, qui enregistra les sensations
et leurs souvenirs, se désagrège et que ses cellules cérébrales se fondent, les
souvenirs s'effacent, et la « seconde mort :.. survient.
Quittant la vie illusoire et irréelle du cercle d'ANKou, l'âme émerge en
un nouveau monde, dans le « cercle » d' ANKOUN, le Monde de l'Oubli. Là,
ses souvenirs s'effacent, complètement, et la seule conscience qui demeure
vivante en elle, c'est celle, purement transcendante, de son identité. Le moi
a disparu, avec tous les détails de la dernière vie corporelle, comme, et à
plus fortes raisons, le souvenir des « moi :.. précédents. Mais le soi demeure.
L'âme est, non pas tellement parce qu'elle sait qu'elle est, mais par le fait
qu'impérissable (puisque d'origine absolument divine), elle ne saurait dispa-
raître, et que sa substance est nécessairement son identité...
Par le fait qu'elle ne possède plus de conscience réelle, qu'elle ne se rend
compte de rien, le Temps pour elle n'existe plus. Rien n'a prise sur elle, qui
eut permis (par appréciation du contingent) de lui fixer des étapes. N'évo-
luant plus, eUe ne saurait concevoir la Durée. Ne concevant pas la Durée,
ceUe-ci n'a pas prise sur elle. Et par conséquent l'ANKOUN est c sans durée >.
Pour la créature introduite dans le Temps par la vie réelle, l'ANKOUN est
sans réalité propre, et elle ne saurait le concevoir que comme le point géomé-
trique ou la ligne, par rapport à l'être à trois dimensions.
Concluons donc qu'instantanément après la sortie d'AN Kou, a lieu le pas-
sage dans une nouvelle forme. C'est la « troisième mort », et le trépas (tré-
pas, trois pas ... ) est accompli.
Selon son degré• d'évolution, l'âme passe alors dans GwENVED, où cette
renaissance lui apporte tous les bienfaits inkérents à sa nouvelle condition,
décrite précédemment. Si son long voyage, d'existences en existences, n'est pas
terminé, elle repasse directement d'ANKOUN en ANWN, en GoBREN, ou en
KENMtL, selon son degré d'évolution. Et elle ne saurait aller là où elle ne
doit pas, en vertu de l'Infinie JusTICE divine, réglant immuablement toutes
les lois de la Vie. Car c'est l'état final de l'âme qui détermine la c POJUŒ »
suivante, par le simple jeu des AFFINITÉs.
AU PI!tD DES MENHIRS Sx
*
**
Dans ces « Cercles » successifs, il ne faut pas voir autre chose que des
états, analogues à ces divisions conventionnelles que l'homme a établi comme
repères en toutes choses. L'Enfance, la Jeunesse, la Maturité, la Vieillesse, ne
possèdent pas de limites absolument définies, et le passage de l'une à l'autre
est graduel. Il en est de même de tous les « cercles » de la Tradition Cel-
tique, comme des « véhicules » corporels des âmes, en cette Nature qui ne
fait pas de sauts ...
Résumant le « schéma » celtique, nous pouvons alors disposer les Cercles
ainsi :
KtuGAN1' : le Monde Vide.
GwEXVED : le Monde Blanc.
~
ANKou : la Mort.
ANKOU:-1 : l'Oubli.
AB RED KENMIL : la Cruauté.
( ANK : la Fatalité GoBREN : l'Injustice.
ANWN : l'Orgueil.
LE CERCLE DE K8NMIL
*
**
Nous négligerons dans cet examen de l'instinct animal, tout ce qui de
près ou de loin, se rapporte à des animaux exceptionnels, et le lion d' Andro-
clès, la tigresse de Néron, l'éléphant de Parus, le cheval d'Alexandre, le
chien d'Ulysse ou celui de Montargis, de lord Byron, la biche de Geneviève
de Brabant, l'araignée de Pélisson, le chat de Bokanowsky ou celui de Cle-
menceau, ne nous serviront pas de témoins de l'inteJiigence et de l'affection
des animaux pour le maître ...
Les descriptions anatomiques, les caractères extérieurs qui distinguent les
espèces, les inclinaisons naturelles qui les différencient, sont sans doute des
objets très importants de l'histoire animale ; mais quand tout cela est connu,
il reste encore beaucoup de mystères dans l'âme de l'animal...
Sans doute, ne saurons-nous jamais de quelle nature précise est l'âme des
bêtes, et il faut convenir que cela importe peu. L'infinité de la hiérarchie
animale est teJle que l'étude de chaque âme d'espèce serait une tâche impos-
sible ! Nous sommes assurés néanmoins qu'elle est, nécessairement, immor-
telle, voire éternelle, en son principe, puisqu'elle est, elle aussi, un MANRIW,
un « germe de lumière », issu d' « OIW », à l'origine du Tou•r.
Mais, de même qu'en observant la structure intérieure du corps des ani-
maux, nous apercevons des rapports d'organes qui servent souvent à nous
éclairer sur la structure et l'usage des parties de. notre propre corps, ainsi,
en observant les actions produites par la sensibilité qu'ils ont ainsi que nous,
on peut acquérir des lumières sur le détail des opérations de l'âme, relative-
ment aux mêmes sensations.
Dès maintenant, nous affirmons hautement que la bête sent, comme nous,
la joie et la douleur. Celui qui pourrait entendre, sans être ému, les cris de
douleurs d'un animal, serait à peu près certainement aussi insensible à .ceux
d'un homme ! Ce sont les marques de la douleur et de la joie, qui nous
assurent de la sensibilité de nos semblables, plus que de leurs affirmations
purement verbales ! Or, ces mêmes marques témoignent avec autant de force
en faveur de la sensibilité animale. Et s'il fallait réclamer contre les impres-
sions de notre sentiment intime sur des faits aussi simples, on n'aurait dès
lors aucun moyen d'acquérir des connaissances en ce domaine ...
Les plus obstinés partisans de l'automatisme instinctif des animaux leur
accordent au moins encore tacitement la faculté du souvenir, de la mémoire,
car ils tiennent à posséder des chiens sages, qui conservent le souvenir des
coups de fouet du dressage !. .. Mais si nous voulons alors vérifier si les
bêtes qu'on dit sauvages, ou celles qu'on dit domestiquées (au fait, pourquoi
cette différence, puisqu'il n'est que l'instinct ?... ), nous devrons nous dé-
pouiller d'un certain nombre de préjugés, prêter à la bête nos propres
réactions sentimentales, et voir si elle se conduit ainsi que nous en telles ou
telles circonstances. Car la forme, tant intérieure qu'extérieure, la durée
de l'accroissement et de la vie, la manière de se nourrir, les inclinations
dominantes, la manière et le temps de l'accouplement, celui de la gesta-
tion, etc ... , ne sont là proprement que des objets de première vue, sur lesquels
AU PIED DES MENHIRS
il suffit d'avoir les yeux ouverts. Mais suivre l'animal dans toute:s ces opéra-
tions, pénétrer les motifs secrets de ses déterminations, voir comment les
sensations, les besoins, les obstacles, les impressions de toute espèce dont un
être sentant est assailli, multiplient ses mouvements, modifient ses actions,
étendent ses connaissances, ceci nous paraît être du domaine même de la
Philosophie.
Si c'est un animal carnassier dont on écrit l'histoire, ce n'est pas assez
d'indiquer en général quels animaux lui servent de proie, ni comment il s'en
saisit. Il faut encore voir par quels degrés l' e,r:périence lui apprend à rendre
sa chasse plus facile et plus sûre, comment la disette éveille son industrie,
combien les ressources qu'il emploie supposent de faits connus, notés, appré-
ciés, ?'etracés par la mémoire, et combinés ensemble par la réflexion. Il faut
encore observer tout ce que l'activité des différentes passions (crainte, amour,
etc ... ) apporte de modifications mûrement pesées à ses démarches, combien
la vivacité des besoins écarte l'idée de la crainte, voire même de la prudence.
De ces remarques, on peut pressentir que, parmi les bêtes, celles-là doivent
avoir un plus grand ensemble de connaissances qui, en vertu de leur orga-
nisation et de leurs appétits, ont un plus grand nombre de rapports avec les
objets qui les environnent. Et si, dans chaque espèce, les connaissances sont
limitées par l'organisation et la nature des appétits, les circonstances qui
rendent la satisfaction des besoins plus ou moins facile pour lès individus,
étendent plus ou moins leurs idées.
Remarquons d'ailleurs en passant que ceux que leur nature porte à se
nourrir de chair (sans doute cet « appétit » a-t-il joué un rôle quelconque
dans le choix de la matrice d'incarnation, et dérive-t-il peut-être - pour
l'âme en quête d'une forme corporelle et d'un germe adéquat - du concept
de possession, de jalousie amoureuse, etc ... , qui aurait été celui du conscient
précédent), ont un plus grand nombre de rapports que les autres avec les
objets contingents. Aussi, marquent-ils généralement une plus grande étendue
d'intelligence dans les détai s ordinaires de leur humble vie. La nature leur
a donné des sens déliés, la force et l'agilité ; et ceci était nécessaire car ils
sont en relations de guerre avec les autres espèces, du fait même de leur
genre de nutrition.
Ainsi, pour nos carnassiers, dans les lieux éloignés de toute habitation
humaine, où le gibier est abondant, la vie des bêtes carnassières est bornée
à un petit nombre d'actes et d'événements simples, assez uniformes même.
Elles passent successivement d'une rapine aisée et régulière, au repos et au
sommeil. Mais, lorsque la concurrence de l'homme met un obstacle à la satis-
faction de ses appétits naturels, lorsque cette rivalité de proie prépare des
pièges terribles sous les pas de nos carnassiers, les tenant éveillés en une
continuelle crainte, alors un intérêt puissant les force à l'attention, la
mémoire de l'animal se charge de tous les faits relatifs à cet objet, et les 1
circonstances analogues ne se présentent plus sans les leur rappeler vivement.
L'idée de l'homme réveille celle de l'existence du piège-principe, d'un danger
mal connu, et cela rend suspect les appâts les plus friands.
Nous avons donc la preuve de la mémoire, de la réflexion et. du raison-
nement chez la bête, toutes choses découlant de l'observation. Mieux encore,
nous avons la preuve de leur sensibilité morale, maintes fois observée. C'est
ainsi que tel carnassier, endurci par des années de chasse impitoyable, habi-
. tué à entendre gémir la proie qu'il attaque, puis hurler lorsqu'il la déchire,
et ce sans paraître s'en inquiéter, montrera les signes de la crainte, de la
douleur, puis de l'affolement, s'il a reconnu le cri de son petit, ou de son
compagnon, ou de sa compagne.
.\U PIED DES MENHIRS
Pour les animaux herbivores, frugivores, il n'en est pas ainsi. Ils ont
moins d'idées, plus de douceur, une conduite uniforme qui donne le sp~c
tacle du calme et de la paix. On dit que les peuples heureux n'ont pas d'his-
toire. Celle des animaux qui se nourrissent d'herbes est presque dans ce cas.
Elle est aussi simple que leurs besoins. Toute leur science se borne au sou-
venir d'un petit nombre de faits et, si quelques carnassiers (ou l'homme) ~e
roublaient point cette paix, ils sauraient encore moins de choses, leur Vle
.erait libre et heureuse autant qu'elle est naturellement uniforme ...
AU PitD DrtS lv!ENHIRS 85
Cepe~dant, parmi les frug-ivores, on note un sentiment que l'homme
connaît mais que les animaux carnassiers ignorent, c'est le sens de l'épargne.
Car c'est le souve11ir qui les fait soigneusement engranger en leur asile
d'hiver les graines, fruits, ramassés dans la belle saison, et ce sentiment n'est
pas autre chose que celui de l'épargne, de la prévoyance. Mais, revienne le
temps des beaux jours, et cet attachement s'efface promptement devant les
graines et fruits nouveaux que leur offre la Nature à son réveil. Logique que
l'homme avare ne connaît pas ...
Sur le sens moral des bêtes, on ne peut dire beaucoup de choses. D'ins-
tinCt, le chat ou le chien savent lorsqu'ils ont mal fait. Et si on demande
à un de ces animaux, innocent du crime dont on l'accuse : « pourquoi as-tu
volé la viande ? », il ne comprendra pas ou il demeurera calme et tranquille.
Est-il coupable, une gêne immédiate le saisit alors, il baisse le nez, son regard
fuit le vôtre, et il se dérobe aussitôt !. ..
Mais, comme le note Condillac, il y a tm moi d'habitude, et un moi de
réflexion. La réflexion veille naturellement à la naissance des habitudes,
et l'habitude, une fois formée, prend alors le caractère de l'instinct, laissant
ainsi méconnaître sa véritable origine.
« Pourquoi, nous dit Reimar, entre tous les moyens possibles qui pourront
conduire à certaines fins, les animaux choisissent-ils, le plus souvent, le plus
sage et le meilleur de tous ? »...
Pourquoi ? « Mais parce que, nous répond Fournier, parce qu'il est néces-
saire que des êtres qui n'ont que peu de moyens à combiner, fassent peu de
méprises ! Si ma partie est devenue telle, au jeu d'échecs, qu'il ne me reste
plus que deux ou trois pièces, je ferai moins de fautes qu'au début de la
partie, quand elle m'offrait un grand nombre de combinaisons possibles ... »
C'est le cas des animaux. Ils sont moins 'iOUvent placés que l'homme
devant l'alternative du Bien et du Mal moral, et ils n'ont point de luttes spiri-
tuelles à soutenir, mais des luttes matérielles.
L'Homme peut être homicide en intention, et il peut l'être en fait.
Mais il peut, en ce dernier cas, l'être volontairement ou involontairement.
Dans le premier cas, son esprit y a eu part. Il est intégralement coupable.
Dans Iè second cas, sa forme corporelle seule y a trempé. Son esprit ne
souhaitait ni n'a approm•é l'homicide involontaire. Coupable ? Il l'est infini-
ment moins ...
Or, l'animal a rarement pareil dilemne intérieur à trancher. Il tue, vole,
chaparde, poussé par la faim ou par la gourmandise (et ce dernier cas est-il
bien différent du premier ?... ).
L'Homme a eu la révélation de ce qtti était bien et de ce qtû était mal,
devant l'Absolu 1 C'est ce qui a fait de lui un Homme. « Choisir... », nous
disent les Triades ... Choisir pour devenir ...
Mais dans l'âme animale, embuée par son infériorité naturelle, ce dilemne
n'existe pas ou peu. Et c'est lentement, insensiblement, par des manifestations
presque incontrôlables extérieurement à elle, qu'elle s'approchera ou s'éloi-
gnera de la condition humaine. En réalité, ce sera une évolution intérieure
Ï1tsensible, sans manifestations tangibles au dehors, qpi sera à la base de sa
libération vers l'état d'Homme en ABRED, ou son involution vers les états
inférieurs d'ANWN.
86 AU PIED TlF.S MENHIRS
LE CERCLE DE GOBREN
.,.
·'·
..., .....-.
~·.-.
ble, ces monstres dégagent une avertissante horreur. Il n'y a pas à s'y
méprendre. D'autres bêtes meurtrières n'inspirent que l'effroi, chez qui le
stigmate n'exclut pas· une allure noble, parfois même une réelle beauté : tels
les grands félins, lion, tigre, panthère ; tels les oiseaux de proie : aigle,
épervier, grand-duc et condor. · Ils portent plus l'estampille de la férocité que
de l'ignominie. Mais tout, en eux, dit à l'observateur : Garde-toi !
« Les exemplaires dangereux du Règne végétal n'ont pas un aspect moins
trompeur, pour qui sait observer et voir. Elancées, ou bien courtes et trapues,
les Solanées ne savent point mentir ; l'avertissement est dans leur port, dans
leur feuillage sombre ou blême. Voyez la Belladone, la Mandragore, le
Datura : fleurs livides, pommes épineuses, baies fades ... Observez la Jus-
quiame, aux feuilles velues et dentelées, à l'odeur vireuse et répulsive ;
quelle menace éloquente sur les lèvres de ses corolles !... Les Ombellifères
toxiques n'ont pas -un air plus engageant. Les Ciguës épanouissent un feuil-
lage agressif ; des macules de pourpre ensanglantent leurs tiges ; la Ciguë
vireuse, et I'JEnanthe safran ée répandent, quand on les brise, un suc jaunâtre
comme du pus. Des Euphorbiacées, sinistres à la vue, giçle à la moindre égra-
tignure un lait corrosif. Issues de familles très distantes, la Sabine et la Rue
trahissent .diversement, par leur physionomie antipathique et le relent qu'elles
dégagent, leur antique emploi d'avorteuses. Les roides dentelures de l'Aconit,
d'un vert presque noir, livide par en dessous, encadrent bien la fleur élégante
et triste, d'un bleu vénéneux d'azotate de cuivre. La Digitale pourprée n'im-
pressionne pas moins, par sa feuille g-auffrée, sombre et veine, que par le
tigrimrtnt interne de ses corolles. Le Colchique d'automne montre à niveau
du sol sa fleur violacée, sans tige ni feuillage ; c'est la « veilleuse » des
deuils prochains ... L'Arum obscène étale sous bois son phallus malade, d'un
lilas maculé. Et la Renoncule scélérate rampe à terre et se cache à demi
sous l'herbe et la mousse, comme un serpent... » (ll
***
Le stade ultime et final de l'existence du Minéral est généralement une
dissociation, identique à celle qui suit immédiatement la mort de l'organisme
vivant. Le cas se présente ainsi pour les feldspaths, qui se dédoublent en
silicate alcalin, soluble, et en argile. Il peut aussi y avoir dispersion totale.
Mais alors celle-ci n'est pas nécessairement suivie d'une destruction morpho-
logique. Ainsi, des cristaux de quartz, de sidérose, de smithsonite, de cassi"
térite, de péridot, de pyroxène et d'amphibole, ont subi la pseudomorphose,
c'est-à-dire une substitution molléculaire qui, sans altérer leur apparence le
moins du monde, les a transformés en calcaires, en fer peroxydé, en galène,
en orthose et en serpentine.
Voici donc des minéraux qui, tout comme les os et les coquilles des grands
animaux disparus, nous parviennent à ~'état fossile 1
AU PIED DES MtNHIRS 93
*
**
Quelle est donc ce principe mystérieux qui vient animer et constituer le
minéral, puis le quitte ainsi que le papillon abandonne son cocon ? Toujours
le même. C'est le MAN REn, le « germe de Lumière » primordial, primitive-
ment émané de « OIW ». C'est le même voyageur éternel, inconscient par-
fois du monde extérieur, parfois au contraire y collaborant démiurgique-
ment ... C'est l'Ame, en quête de sa Destinée et du Grand Refuge, l'Ame qui,
sous cent formes et cent aspects divers, retourne, consciente, cette fois, vers
l'Immortalité ...
*
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ANWN, L'ABIME, ET L'EXISTENCE « EN PUISSANCE»
*
**
On voit par ce qui précède que la Matière originelle, soit Anwn lui-même,
n'est pas le Néant absolu, mais bien l'être en puissance. Or, si nous nous
souvenons que le Celtisme passe, aux yeux des historiens, pour avoir formé
le Pythagorisme, et si la philosophie platonicienne dérive directement de
celui-ci, nous pouvons sans crainte de nous égarer, puiser dans Plotin, dis-
ciple de Platon, et dans ses « Ennéades philosophiques, la description des
attributs de cette Matière originelle. Il nous suffira de remplacer les expres-
sions nominales grecques par des dénominations celtiques traditionnelles, et
tout s'éclairera sans contestation possible. Nous aurons alors retrouvé en son
esprit la primitive version.
Voici donc cette adaptation de Plotin(lJ,
*
**
Une question se pose donc nettement : est-ce la « Privation » elle-même
qui est la Matière, ou la « Privation » est-elle la qualité de la Matière ?
L'opinion d'après laquelle les deux choses seraient en réalité une seule,
dans laquelle on fait une distinction de Raison, aurait à nous expliquer le
motif de cette distinction ; et donc, qu'est-ce qui distingue la notion de
Matière, en dehors de la notion de « Privation » et de même, ce qu'est elle-
même la « Privation » ? Et si aucune des deux notions ne fait partie de
l'autre, ou bien si chacune est comprise dans l'autre, ou bien laquelle des
deux fait partie de l'autre, et comment cela ? Si chacune est une chose à
part de l'autre, cela sera alors deux choses, et la Matière sera une chose
différente de la « Privation », à quoi celle-ci sera une chose surajoutée !
Et il faut dans la notion de chacune des deux choses que rien n'existe qui
appartienne à l'autre.
Mais, de même que dans Je Feu et la Chaleur, la Chaleur fait un avec le
Feu, et cependant est aut1·e chose que le Feu, si de même la Matière est
« Privation » comme le Feu est Chaleur, de sorte que la « Privation » sera
une forme de la Matière et une forme qui a celle-ci pour fond nécessaire
(quoique différent de cette forme), alors les deux choses ne sont pas une
seule et même chose ...
En ce cas, elle sont, daus le fait, une même chose, quoique distincte dans
le « langage », et « Privation » n'indique pas quelque chose qui existe mais
quelque chose qui n'existe pas ; de sorte que la « Privation » exprime le
contraire de « Chose existante » comme le Non-Etre.
Si cependant, il est « Non-Etre » parce qu'il n'a pas l'Etre, alors il est
quelque chose d'autre, et c'est pourquoi nous avons deux notions.
L'une indique quelque chose qui réellement existe ; mais celle de « Pri-
vation » indique uniquement un vide que les autres choses peuvent combler,
de sorte que le propre de la Matière est d'être propre aux autres choses, et
tout autre propre est le propre des autres choses.
Mais. dira-t-on, la notion de « manque », en indiquant son état indéter-
miné, n'indique-t-elle pas ce qu'elle est par elle-même ?
Nous répondrons qu'elle est l'une et l'autre chose à la fois en fait, et la
dualité ne parait être que dans notre raisonnement.
Si cependant, c'est par le fait de n'être pas déterminée, de n'être pas
limitée, d'être sans forme, que la Matière est Matière, comment cela peut-il
constituer une deuxième notion ?
Nous examinerons, pour cela, de nouveau si l'Indéfini et l'Indéterminé
(au sens d'Illimité), sont quelque chose d'accidentel à une nature autre que
ce qui est signifié par ces adjectifs ; et comment cette adjonction a été
faite, si « Privation » est accidentel.
*
**
On le voit, ainsi que l'affirme Taliésin, dans l'Abîme d'ANwN, se trouve
le moins possible de marques d'existence, c'est-à-dire (en inversant la propo-
sition), le plus possible de « privation ». En effet, par rapport à GENWED,
qui est la « plénitude » de la Créature, et à KEUGANT (la plénitude divine),
ANWN est en perpétuelle déficience de « possibles ». Et si le « manque :.
est sa nature, plus il y a de « possibles » en GENWED et en KEUGANT, plus
il y a de chances d'absence de quelque chose en ANWN. D'où une infinité
relative de celui-ci, corrélative de l'infinité absolu de KtUGANT ...
AU PIED DÉS MENHIRS
LA NAISSANCE EN ANKOU
(1) L'Idée de vall~e est liée au • séJour • des Morts dans la plupart des symbolismes
runératrcs. Voir le conte • Peredur ab Evrac •, dans les Mabim>ggton.
AU PIÈD DES MENHIRS 97
telle que les vivants la définissent, issue du Soleil, de la Lune ou des Etoiles,
est absolument invisible au défunt. Cette clarté diffuse, triste, cette lumière
éclairant vaguement une contrée fantômatique, c'est la lumière naturelle de
la Nature, appelée par les alchimistes médiévau:r la « lumière astrale ».
Universellement diffuse dans NYwR, l'Ether, elle est invisible au:r humains,
mais suffisamment visible au:r hôtes de l' ANKou. C'est elle qui auréole presque
tottjours les apparitions noclttrnes que nous rapportent les contes ; et elle
disparaît toujours instantanément avec les modalités de la vision.
Les manifestations hostiles d'êtres imaginaires sont uniquement des créa-
tions de J'égoïsme de l'âme, qui, par réaction naturelle, s'imagine que les
autres hôtes de l'ANKOU sont ses ennemis, tout comme elle-mênie se condui-
sait à l'égard de ses semblables durant sa vie terrestre.
Les sons, déclenchant dans l'âme séparée l'illusion de cyclônes, d'oura-
gans, etc ... proviennent de la perception intuitive du processus désintét;ra-
teur des éléments grossiers. Ainsi, la disparition de la force vitale de KALAS
(la Terre) donne l'illusion de l'écroulement d'une avalanche. La disparition
de GwYAD (l'élément Eau) évoque la tempête en mer. La désintégration de
la force vitale incluse en FuN (l'Air) évoque le vent violent, la tornade qui
brise tout. La désintégration de UVF:L (le Feu) évoque la forêt grondante
sous l'incendie ...
Quant à NYWRE, l'Ether, il ne déclenche aucun phénomène puisqu'il
constitue ce corps que l'âme s'est créé, qui a jailli hors du corps de chair,
trois à quatre jours après la mort.
Pour l'âme suffisamment évoluée, rien de ce monde terrifiant et illusoire
ne se manifeste. Comme l'autre, néanmoins, elle vit d'illusions, mais plus
douces et moins heurtées. Comme l'Egypte, tous les peuples Celtiques ont
connu la tradition qui fait nourrir les Morts. En effet, de même que le
vivant s'assimile la Matière physique sous les quatre éléments (KALAS, GwYAD,
FuN et UvtL), de même l'hôte de l' ANKOU s'assimile leur essence subtile,
soit NYWRE, l'Ether qui les concrétise. (D'où le rôle magique des Parfums
brûlés, des victimes qu'on carbonise sur les autels, etc ... )
En ANKou, comme le pèlerin solitaire fixe successivement son attention
sur tout ce qui, dans le paysage, paraît particulier, de même les Morts ont
des expériences similaires pendant leur séjour en ce Cercle. Ils sont attirés
sans doute près des lieux familiers, près des vivants qu'ils ont connus. Mais
la subtilité de leur corps éthérique les fait invinciblement céder au mobile
même qui créa ce corps éthérique, soit le désir. C'est pourquoi ces variations
perpétuelles de lieux génèrent dans l'âme et le principe de conscience qui y
subsiste, l'impression d'être ballottée sans qu'elle puisse résister.
Vient alors le terme de ce séjour en ANKOU.
L'accoutumance à ce monde illusoire et aux possibilités supranormales du
corps éthérique, amène bientôt la satiété. Concevant malgré tout, à la longue,
le côté décevant de cette existence pleine de mirages, en un monde absolu-
ment irréel bien que déprimant, l'âme raisonnable se tourne alors vers la
spiritualité. ·
La conscience de ses actions passées lui revient, en un relief plus accusé
que jadis. Le remords de son mauvais passé, la fierté de ses bonnes actions,
par leur parallélisme antithétique, génèrent alors de nouvelles hallucinations.
Selon la propre conception religieuse du Mort, cette appréciation du Passé
revêt des aspects divers. Mais toutes convergent vers la notion confuse de
jugement. Tour à tour accusatrices ou protectrices, les Puissances divines
passeront en revue la longue chaîne de ses actes terrestres, et en tireront
7
AU PIED DES MENHIRS
une symbolique sentence. En réalité, c'est l'âme elle-même qui, par sa trans-
cendance, par le divin qui y réside toujours, choisit sa future existence.
Pour l'âme hautement évoluée, nous le savons déjà, ce choix s'effectuera
dans le GwENYED qu'elle a enfin atteint. Et son évolution post-mortem aura
été autrement rapide et différente que celle encore enténébrée par ANWN.
Mais pour le commun des êtres, le Jugement mène l'âme vers un nouveau
Destin, prisonnière qu'elle est de cette Fatalité (une des trois grandes cala-
mités d'ABRED), dont elle est pourtant l'auteur responsable.
Alors, le corps éthérique qui la véhicule lui semblera se colorer de façon
singulière. Cette coloration sera le résultat de la perception intérieure de son
sort futur (un peu comme l'émotion fait blanchir ou rougir le visage du
corps terrestre). Et· c'est l'émotivité du corps éthérique (aux déplacements
instantanés) qui le lancera vers le destin correspondant. Si l'âme pouvait et
savait demeurer inerte, indifférente, nulle émotivité ne déclencherait son
retour vers l'existence en ABRED. Mais celle qui mérite d'y échapper n'a
, nul besoin de cette différence ! Et le « jugement » de Dieu demeure donc,
avec toute sa raison d'être ...
Dès que le principe d'une nécessaire réincarnation aura été admis par
l'âme, de nouvelles hallucinations s'élèvent. Elles sont générées par la per-
ception intuitive par l'âme elle-même de l'existence future ; et le corps éthé-
rique la traduit à sa façon. Dès cet instant, apparaîtront des paysages caho-
tiques, de plus en plus sombres. Tl semblera à l'âme qu'elle s'enfonce dans des
gorges profondes, étroites, humides et ténébreuses. Au cours de cette chute
dans des profondeurs inconnues, des cavernes béantes, des buissons, des bois
obscurs, lui apparaîtront comme des refuges préférables à cette chute. C'est
le corps éthérique, toujours, qui détecte et traduit en concepts anthropomor-
phiques l'arrivée de l'âme vers les régions où elle doit trouver le germe
matériel à animer, la matrice qui la doit recevoir. Là, le corps éthérique
(dont la dissolution est commencée depuis l'instant même de sa première
manifestation, hors du cadavre de chair) est arrivé à son terme. Une perte
totale de sensation, comparable à l'évanouissement physique, ,nanifeste la
« troisième mort ». L'âme passe dans le Cercle d'ANKOUN, l'Oubli; et nous
avons vu déjà la suite de ce passage. ·
Dans la mythologie celtique, lorsque le Mort descendait au Cercle
d'ANKou, il était jugé par un tribunal qui le condamnait ou l'absolvait, ainsi
qu'il en était d'ailleurs dans l'antique Egypte. Mais alors que, sur les bords
rln Nil, c'était Osiris qui jugeait le défunt, chez les Celtes, c'est GwroN et
SA!\IANN, le « juge inflexible ». Le premier était le défendeur, le second
l'accusateur.
En pays celte, lorsque le mort avait été jugé, l'âme était alors conduite
dans la direction du coucher solaire. Et pour le Celte d'Europe, ce voyage
l'amenait tout naturellement à l'extrémité occidentale du continent, sur les
côtes d'Armorique. Les habitants de ces régions soutinrent toujours devant
les conquérants divers, le refus du tribut de guerre, arguant que les Divinités
leur avaient donné pour tâche de conduire les Morts dans l'autre monde.
Et la légende nous dit en effet que certains jours de l'année, une main
mystérieuse frappait à la porte des pêcheurs bretons, et une voix lointaine
leur ordonnait de s'habiller et de sortir. Ils ouvraient leur porte, mais nul
être de chair ne se dressait sur le seuil, pour les accueillir. Ils comprenaient
alors que l'AN KOU, la Mort, venait les quérir pour la funèbre tâche. Ils se
rendaient jusqu'au rivage, près de leur barque, et ils constataient avec stu-
1
peur que bien qu'elle parusse vide, le bordage affleurait l'eau noire comme
~! la nef eût été surchargée de pas'sagers. La même voix leur ordonnait de
AU PIED DES MltNHIRS 99
prendre les rames ou de hisser la voile. Docilement, ils obéissaient et, en
moins d'une heure, ils abordaient à un nouveau rivage, alors qu'il leur eîü
fallu des jours pour une navigation normale. En débarquant, la même voix
se faisait entendre de nouveau, dénombrant les Trépassés, et la barque sans
cesse s'allégeait. Bientôt elle était vide, les âmes étaient sur l'autre rive, et le
marin regagnait son pays d'Armor.
Où était située cette contrée mystérieuse ? Certaines traditions nous
parlent de l'Islande, d'autres de la Grande-Bretagne, l'Albion, qui aurait été
le royaume de GwYoN. Et certains auteurs songent que la nef cinglait peut-
être vers un continent « inconnu », dénommé parfois les Iles Fortunées.
Si nous nous reportons au texte de Plutarque, prêtre de l'Apollon del-
phien, texte connu sous le nom de « Du Visage du rond de la Lune », nous
lisons ceci relativement aux « Iles Fortunées ».
« Je commencerai par présenter L'auteur de la pièce, après vous avoir
servi tm début avec votre permission, emprunté d'Homère :
« Ogygie est tme île, bien loin en mer. »
à cinq journées de la Grande-Bretagne pour un dmmon qui cingle vers
l'Ouest. »
Arrêtons-nous déjà ! . •ous sommes en présence d'une tradition celtique,
car cette île, située bien loin à l'Ouest, c'est l'Atlantide de Platon, l'Ile de
Kronos, les « Fortunées » des Grecs. Et nous allons voir que les Anciens
avaient parfaitement défini l'ésotérisme de cette conception et que la sim-
plicité avec laquelle ils l'avaient exposé n'a pourtant jamais été signalée par
les lettrés qui s'attaquèrent aux traductions originales !
Le récit que Plutarque met dans la bouc~e de Sylla continue :
« D'atttres îles, au nombre de trois, aussi éloignées de la première qu'entre
elles, sont situées devallf, exactement dans la direction du couchant d'été.
C'rst dans l'une d'elles que Kronos, d'après la mythologie des Barbares, est
retemt prisonnier par Zeus. »
Dès à présent, nous voyons que ce récit est purement ésotérique, car, si
nous tentions d'établir sur un plan le schéma signalé ci-dessus, savoir trois
îles aussi éloignées d'une quatrième qu'entre elles, nous verrions que c'est
impossible ! Ceci équivaudrait à tenter de construire un triangle équilatéral,
dont le côté soit égal au rayon du cercle circonscrit ...
Dans notre «. dimension », l'archipel des « Iles Fortunées » est chose
impossible à réaliser. Concluons que ces îles mystérieuses ne sont pas de
notre « Monde »...
Et à la fin de son récit, Sylla, s'adressant à Lamprias, lui dit : « II y a
bien des choses qui se débitent en Grèce, sur les Dieux. Elles ne sont point
toutes exactes ... »
Et sur les phénomènes de l'éclairage solaire restreint, propre aux « îles »
merveilleuses, Sylla, commentant la tradition ésotérique qui veut que ce soit
dans le cône d'ombre que la Terre .traîne derrière elle dans l'espace sidéral
que les âmes s'épurent, nous dit (toujours sous la plume de Plutarque) que :
« Dans cette région, il n'y a personne de mauvais, ou qui n'ait été du moins
purifié. Les bons y sont transportés après leur fin, et, là, assurés dès lors
d'une vie très facile, qui n'est pourtant pas encore celle des bienheureux ni
des dieux, ils y attendent la seconde mort. »
On croirait lire, en vérité, le « Serpent de la Genèse » de Stanislas de
Guaita ! Il faut regretter que tant d'occultistes aient leur instruction ésoté-
100 .\U PIED DES MENHIRS
rique limitée par leur ignorance des anciens auteurs et que les lettrés qui
nous traduisent les auteurs anciens ne soient pas toujours des occultistes ...
Que trouvait le Celte, selon· la croyance populaire, en abordant au
Royaume des Morts ? Rien que ce qu'il était accoutumé à voir et à faire
dans le cours de sa vie terrestre. Magnifiée par un climat merveilleux, par la
pureté et la richesse des éléments la constituant, la Terre de Beauté et
d'Amour le comble de ses dons. II foule au pied des prairies d'émeraude ;
il cueille de doux fruits d'or à des arbres d'argent ; à ses pieds, coulent dans
un léger murmure, des ruisseaux d'hydromel. S'il chasse, son gibier renaît
après qu'il l'a mangé. Et une douce harmonie se fait continuellement entendre.
Le souvenir des siens ne l'a pas quitté. Une fois par an, il pourra
reprendre la Barque du nocher des Morts, mais en sens inverse. Le premier
jour du mois actuel de Novembre, les siens, vêtus de blanc, c'est-à-dire de
deuil, se réuniront près du foyer familial. Avec piété et crainte, on préparera
le repas destiné à apaiser la faim du voyageur venu d'outre-tombe, et on
laissera seulement veiller près du dîneur solitaire le feu rougeoyant dou-
cement...
Dans le clair « Pays des Morts », aux Iles Bienheureuses, il n'est pas
de temps humain. C'est ainsi que les dieux et les humains qu'ils ont emmenés
avec eux au séjour divin, peuvent être mortels, soumis aux accidents, à la
mort violente, ce qui, pour le Celte, est le type de mort le plus souhaitable.
Et pourtant, ils sont immo'ttels d'essence. Comment concilier ces contradic-
tions ? En se souvenant simplement que le temps humain n'existe pas en leur
domaine, leur monde n'est pas sozonis au temps. Ainsi en est-il de tout homme
qu'une déesse ou un dieu a introduit dans le divin royaume. Mais, veulent-ils
revoir leur pays, avoir des nouvelles des leurs, ils tourneront leur nef vers
la terre d'Irlande, de Bretagne, de Cornouailles ou le pays gallois. Arrivés à
portée de voix des rivages de leur patrie, qu'ils se gardent de mettre pied à
terre, et qu'ils interrogent simplement les gens elu rivage. S'ils demandent des
nouvelles des leurs, on leur répondra toujours que personne de ce nom n'est
connu sur la côte, mais par la suite, interrogés, les vieux se souviendront que,
dans les légendes ou les vieux récits historiques, les personnages dont on leur
demande des nouvelles figurent, vagues, fugaces, telles des ombres oubliées ...
Car il y aura des siècles que nos navigateurs ne sont point revenus. Mais si,
pris du désir de fouler le sol de leur patrie, ils mettent pied à terre, ils tom-
beront en cendres ... Et si, le cœur et la gorge serrés devant pareil oubli, ils
cinglent de nouveau vers les Iles Fortunées, lorsqu'ils reviendront près des
immortels et des déités qui y s~nt demeurées durant leur voyage, ils cons-
tateront avec stupeur que tout est tel qu'à la seconde de leur départ, le mer-
veilleux royaume s'est arrêté, semble-t-il, à l'instant où ils l'ont quitté. Et la
vie y reprend aussitôt, lorsqu'ils y abordent ...
Merveilleuse intuition de l'~me celte, richesse prodigieuse de cette race,
qui détecte intuitivement les grandes vérités métaphysiques, par le seul fait
d'y laisser jouer son imagination ...
***
On conçoit que là encore, l'enseignement celtique établit un parallélisme
entre la vie en ANKOU et la vie dans le monde des vivants.
Et ceci mérite d'être approfondi.
AU PIE:D DE:S ME:NHIRS IOI
***
D'où peuvent venir les conceptions funéraires, tant des Celtes que des
divers peuples ? Incontestablement du principe d'analogie qui doit régir, leur
semble-t-il, la vie des vivants et celle des morts. Dans la précédente étude
sur la naissance en ANKou, nous avons tenu compte de la tradition égyp-
tienne, incluse dans le papyrus du « Livre de la Demeure », et dans le rituel
thibétain nommé « Bardo Thodol ». Pour ce dernier, surtout, il semble que
des connaissances - d'origine supra-normales - aient joué. Le lamaïsme
affirme en effet que les rites du « Bardo » et les commentaires qui les
accompagnent ont été obtenus par des clairvoyants (ou des clairaudients),
suivant attentivement les diverses phases de la désintégration post-mortem
d'un décédé récent. Egalement, par des messages (perçus par la voie médium-
nique), émanant de saints personnages (gürus) récemment décédés.
L'intérêt de la théorie exposée dans le « Bardo Thôdol », est qu'elle
s'identifie absolument à ce que la science occidentale a permis de dégager
de l'étude des diverses psychanalyses, et surtout de celle des réactions men-
tales subconscientes.
C'est un lieu commun que de comparer la Mort au Sommeil et la Vie à
l'état de veille. Or, il est de fait que la vie mentale, durant le dit sommeil,
dérive en partie des événements qui l'ont immédiatement précédé durant la
veille, et des préoccupations particulières ayant imprégné le mental durant
la journée.
On a donc pu conclure, a,·ec quelque logique, que la vie posthume devait
manifester les mêmes réactions subconscientes, et qu'elles devaient prendre
leur source dans les actions et les préoccupations qui avaient constitué la vie
réelle.
Parallèlement, d'autres réactions subconscientes devaient éclore au sein
du même mental, corrélatives aux impressions perçues par l'activité posthume.
Ainsi, par exemple, la dissolution physique du corps de chair devait néces-
sairement générer des hallucinations analogues aux cauchemars du Vivant.
- Egalement, les courants mentaux générés dans la vie réelle devaient, lors de
leur dispersion post-mortem, se traduire et apparaître (véritables formes-
pensées), générant ainsi de nouvelles hallucinations.
Il en est de même dans le sommeil. Non seulement les souvenirs de la
journée génèrent des rêves, mais encore les sensations du moment : chute
d'un corps léger sur le visage ou les membres, sensation de chaud ou de
froid, besoins physiologiques, audition inconsciente de bruits extérieurs, appel
du dormeur, etc ... , en génèrent également d'autres.
Ces réactions sont valables pour tout être normal et sain. Mais en plus,
pour l'homme évolué, pour l'être dont l'activité consciente de la journée
s'exerce dans le domaine de la rêverie anagogique (tel le mystique), pour le
philosophe ou le métaphysicien, pour tous ceux que les préoccupations quoti-
diennes absorbent et situent dans des plans infiniment plus élevés que ceux
où se complaisent le matérialiste ou le primitif, un nouveau domaine s'ouvre
très réellement à l'activité subconsciente, durant le sommeil. De là ces inspi-
rations soudaines que connaissent bien les Occultistes, les Philosophes, les
Métaphysiciens. De là les Songes prémonitoires où, selon les Anciens, les
Dieux apparaissent pour avertir les Hommes.
Et ceci est, affirmons-le, absolument indiscutable. il est réellement un
« domaine », situé dans le Mental collectif de l'Humanité ou dans celui de
l'Univers, où le matérialiste n'a pas accès. Et telle faculté, prémonitoire ou
. '
AU PIED Dl~S MENHIRS 103
*
**
KEUGANT, LE « CERCLE VIDE... »
***
Le croyant vulgaire se révoltera contre cette définition du Celtisme.
Dieu, si lointain que l'Etre ne le peut atteindre ? Allons donc ! Dieu me doit
que je le contemple face à face ! Vraiment ? « Eh bien, rétorque la Raison
à l'enfant gâté, puisque tu veux tout approfondir, médite un peu sur tes non-
sens !...
« Tu as campé Dieu en ton esprit, tu l'as doté de qualités, de toutes les
qualités, et il est là, à ta portée, devenu davantage ton œuvre que tu n'es
la sienne ! C'est tout ? Alors, continue la froide Raison, réponds donc à ceci,
si tu le peux. »
« Si ton Dieu est parfait, c'est qu'il ne désire plus rien. Or, si tu le dotes
de la volonté, il désire, nécessairement ! En ce cas, ou il n'est pas absolu-
ment parfait, ou il ne fait rien de sa volonté et ne désire rien 1
!'.U PIJ;;D DES MENHIRS 105
*
**
« Un être conscient e.t celui qui a acqt,lis la notion de son existence
individuelle par la constatation d'une relation entre lui-même et quelque
chose d'extérieur. Donc, si ton Dieu a créé le Monde, avant qu'il ne l'eût
créé, il existait seul. Alors, il n'était pas conscient ! Et il ne l'est devenu que
parce qu'il a créé le l\Ionde, cl~montrant ainsi qu'il n'est pas immuable et qu'il
dépend de quelque chose.
« Ou alors, il n'a pas créé le Monde ...
***
« Si ton Dieu a créé l'Univers, il a dû lui assigner une fin, et alors, dès
qu'il ama disparu, il ce:scra d'être absolument parfait et il cessera d'être
conscient (puisqu'il lui manquera alors cette nécessaire relation avec l'exté-
rieur). Alors, il n'était pas immuable !
« Si ton Dieu a créé l'l_'niYers et l'a fait impérissable, c'est donc que
la persistance de ses attributs d' bsolue Perfection et d'Absolue Conscience
est subordonnée à la persistance de quelque chose d'extérieur à lui-même.
Et alors, ton Dieu dépend de quelque chose ...
*
**
« Si Dieu a créé Je l\Ionde, ainsi que tu le dis, ou bien il a cédé à une
nécessité, et alors il n'est pas tout-puissant, il y a donc quelque chose au-
dessus de Lui ! Ou bien il n'a point cédé à une quelconque nécessité ; et alors
il ne peut désirer quelque chose qui n'est point absolument nécessaire. Car
s'il désirait quelque chose d'inutile, il ne serait plus l'Absolue Perfection ...
« Tu dis d'une chose qu'elle est extérieure à une autre, lorsqu'elle n'a
point de contact commun avec cette autre. Si donc ton Dieu est extérieur au
Monde, il n'a pas de point commun avec lui. Conclus alors ... Ou bien il n'est
pas omniprésent, ou bien il n'est pas extérieur au Monde ...
***
« Tu dis d'une chose qu'elle est extérieure à une autre lorsque, par cette
autre, elle est exclue d'une certaine portion de l'Espace. Si donc ton Dieu
est extérieur au Monde, il y a une certaine portion de l'Espace dont il est
exclu ! Alors, il n'est pas infini ... Ou bien il n'est pas extérieur à la
Nature?... ·
I06 AU PIE!J m:s MENHIRS
***
« Si ton Dieu a cree l'Univers, il a dû le créer fini ; et alors il s'est
limité lui-même par les limites de ce Monde ! Si oui, ton Dieu limité n'est pas
infini ...
« Et s'il l'a créé infini, il ne lui est pas supérieur et il '!l'est pas l'Unique ...
Ou serait-ce au contraire que ton Dieu et le Monde sont associés ?
***
« Si ton Dieu a créé le Monde, ou bien ce Monde était en sa Pensée
avant qu'il ne le créât. Alors, conclus ; c'est qu'il ne pouvait objectiver cette
pensée plus tôt. Ton Dieu est donc soumis au Temps ?...
« Ou bien il pouvait encore ne pas objectiver cette même Pensée. Et
alors il peut avoir des pensées inutiles et vaines. Il n'est donc pas absolument
parfait ?...
« Ou bien encore, ton Dieu ne pouvait pas ne pas l'objectiver. Et alors,
il y a donc quelque chose qui l'y a obligé. Il n'est pas parfait en ce cas, ni
tout-puissant ?...
« Ou bien encore, le Monde n'était pas dans sa Pensée. Alors, ton Dieu
n'est pas omniscient ?...
***
« Si ton Dieu a créé la Nature de rien, ou bien ce rien existait en sa
Pensée avant qu'il n'en tirât le Monde. Alors, ton Dieu lui-même, par cette
conception du Néant, a conscience qu'il existe quelque chose en dehors de
lui-même et du Monde. Et il a donc conscience que lui ct le Monde pourraient
fort bien ne pas exister !
« Ou bien alors, ce « rien » n'existait pas en sa Pensée ? Alors il n'est
pas omniscient !...
*
':'*
« Si en dehors de ton Dieu, il n'y a rien ; ou bien le Monde ne lui est
pas extérieur ; ou bien le Monde n'existe pas. C'est donc qu'il ne l'a pas créé !
***
Si ton Dieu existe, ou bien il ne peut pas ne pas être tel qu'il est. Alors,
il y a .quelque chose qui est au-dessus de lui et le limite et le bride. Ou bien
il ne peut pas être tel qu'il est. Alors, il n'est pas immuable, ni absolument
parfait, puisque cette perfection n'est pas encore atteinte !
*
**
« Enfin, si Dieu existe, ou il ne pourrait pas ne pas être, et encore une
fois, il y a donc quelque chose dont il dépend, qui lui est par conséquent
supérieur ? Cela est un non-sens ! Ou bien, il pourrait ne pas être ? Alors,
en ce cas, il n'importe en quoi que ce soit ; il est inutile pour justifier le
Monde, inutile pour le conserver, et s'il n'existait pas, il serait inutile de
l'imaginer... :. (1).
(1) Ces lemeB théologiques sont tirées de l'ouvrage, rarissime, de A. Cbaboseau, cl~é plus
bout : • Essai sur la Pensée Bouddhique. •
AU PIED DES MENHIRS
1
LES TRIADES DE L'ILE DE BRETAGNE
HISTORIQUE DES « TRIADES ».
*
**
2. - Il est trois choses, émanées à leur tour des trois unités primitives. Ces
trois chas~ sont :
-La Vie;
-Le Bien;
- La Puissance.
***
3· - En Dieu sont trots nécessités primordiales. Ce sont :
- Que Dieu soit nécessairement la Vie, à son maximum ;
- Que Dieu soit nécessairement la Connaissance, à son maximum ;
Que Dieu soit néccs ~ain:mcnt b Puissance, à son maximum.
Et il ne se peut pas que ces trois nécessités se retrouvent, complètes
en un autre Etrc.
*
**
4· - En Dieu sont trois impossibilités. Il ne se peut pas que Dieu ne soit
à la fois :
- La Plénitude du Bien, en tant que devenir;
- La plénitude du Bien, en tant que désir ;
La plénitude du Bien, en tant que possibilité.
***
s. Dieu nous donne trois preuves de ce qu'il a fait et de ce qu'tl fera, en
tant que nature ; ces trois preuves sont
Sa Puissance infinie ;
Sa Sagesse infinie ;
Son Amour infini.
***
6. - Dieu, infiniment parfait, a nécessairement trois desst:ins en créant
chaque chose. Ces trois desseins sont :
- Amoindrir le Mal ;
- Accroître le Bien ;
- Justifier les différences entre les choses, pour que puisse être discerné
ce qui doit être de ce qui ne doit pas être. Car il n'y a rien qu'Il ne
puisse réaliser, qu'Il ne puisse connaître, et qu'Il ne puisse amener à
l'être.
AU PIED DES MENHIRS
***
7· - Il est trois choses que Dieu, infiniment parfait, ne peut éluder :
- En toute chose, faire le meilleur possible ;
- En toute chose, faire le plus nécessaire possible ;
- En toute chose, faire le plus beau possible.
8. -
***
La Vie est soumise à trois nécessités, du fait de la perfection de son
Auteur :
- Elle ne peut être autre qu'elle n'est ;
- Elle ne doit pas être autre qu'elle n'est ;
- Elle ne peut être conçue, en conséquence, d'une autre façon qu'elle
n'est.
Et de là, vient que toute chose a bien la fin qui lui est propre.
9. - ***
En Dieu, il est trois choses qui sont nécessairement forcées d'être. Ces
trois choses sont :
- La Suprême Puissance ;
.- La Suprême Intelligence ;
- Le Suprême Amour.
Et ceci justifie la fin de toute chose.
***
ro. - Dieu possède donc trois suprématies :
- La Vie Universelle ;
- La Science Universelle ;
- La Puissance Universelle.
r2. - ***
Il existe trois Cercles dans la Vie Universelle ou Univers. Ces trois
Cercles sont :
- Le Cercle de Keugant, cercle vide, où nul être ne peut subsister,
hormis Dieu. Ni les vivants ni les morts n'y accèdent, et Dieu seul
peut le traverser, par ses manifestations diverses ; .
- Le Cercle d'Abred, cercle de la Fatalité, du Destin inéluctable, dù
chaque nouvel état, chaque existence nouvelle, naît de la mort. Et
celui-là, l'Homme le traverse ; ·
- Le Cercle de Gwenved, cercle de,la Béatitude, le monde blanc, où
chaque état dérive et naît de la vie. Et celui-là, l'Homme le traversera
finalement.
Il
II4 AU t>u:o DeS MENHIRS
***
13. -,Il est trois genres d'existence et de vie pour les vivants. Ce sont :
- L'état de soumission à la Fatalité, dans l'Abîme (Anwn) ;
- L'état de liberté morale, dans l'Humanité (Abred) ;
- L'état de félicité et d'amour parfait, dans le Ciel (Gwenved).
*
**
14. - Il est trois choses inéluctables dans la Vie, trois nécessités auxquelles
n'échappe aucune existence. Ce sont .:
- L'inévitable genèse dans le Cercle d'Anwn ;
- L'inévitable périple dans le Cercle d'Ab red ;
- L'inévitable accès final dans le Cercle de Gwenved.
Et sans traverser ces trois états, nul être ne saurait exister, sauf Dieu
seul.
***
15. - Il y a trois nécessités fatales dans le Cercle, d' Abred, nécessités iné-
vitables. Ce sont :
- La manifestation la plus minime possible de l'Existence. Et de là le
début de toute vie ;
- La prise de possession du principe de Substance. De là dérive celui de
Croissance, lequel ne se pourrait dans un autre état ;
- La transformation de cette Substance et de cette Existence par la
Mort et ses conséquences. Et de là dérive la débilité et la brièveté de
la Vie elle-même.
***
r6. - Il y a trois choses qu'on ne peut réaliser, en quelque forme d'Exis-
tence que ce soit, que parce que Dieu est l'Infinie justice. Ce sont :
- La nécessité d'épuiser la Souffrance, sans laquelle on ne saurait obtenir
la Connaissance complète de Tout ; ceci en Abred ;
- La certitude d'obtenir une part en l'Infini Amour de Dieu ;
- Réussir, grâce à sa toute-puissance, à faire ce qui est juste et bien.
Et sans Lui, ces trois tâches ne sauraient être menées à bien.
***
17. - Il y a trois raisons d'être à la Fatalité et au Destin qui règne dans le
Cercle d' Abred. Ce sont :
- La nécessité de recueillir le fruit de chaque existenc~ et de chaque
état de Vie ;
- La nécessité de connaître toutes chos.es ;
- La nécessité de recueillir la force morale nécessaire pour triompher
de toute haine, de tout répugnance, et pour se dépouiller du Mal en
dominant les mauvais principes.
Sans ces trois nécessités d' Abred, dans la traversée de chaque état de
vie, il n'est nul vivant, nulle forme, qui pourrait atteindre le Cercle
de Gwenved.
AU PIED DES MENHIRS 115
*
**
18. - Du principe de Fatalité et de Nécessité, inclus par définition dans le
Cercle d'Ab red, découlent trois Calamités de ce Cercle. Ce sont :
- Le Destin fatal ;
- L'Oubli des existences successives ;
- La Mort, nécessaire aux renouvellements.
l*
r9. - Il est trois nécessités primordiales, préexistantes à toutes les autres,
qui doivent nécessairement jouer avant que l'Etre atteigne la plénitude
de la Connaissance. Ce sont :
- Traverser le Cercle d'Abred, en toutes ses modalités ;
- Traverser Gwenved ;
Se souvenir, de toute chose, au long du Cercle d'Anwn.
*
**
20. - Il est trois contacts nécessaires avec le Cercle d'Abred. Ce sont :
- La nécessité de transgresser la règle et de se libérer de la Fatalité.
Car il ne peut en être autrement ;
- La nécessité de se dépouiller du Mal et de la Corruption, et cela par
la Mort ;
- La nécessité d'accroître sa bonté propre et le principe de sa Person-
nalité, en se dépouillant du Mal et en se libérant par la Mort.
Et ces trois choses ne peuvent être, que par l'Amour Infini de Dieu,
qui, nécessairement, conserve ce qu'il a créé.
21. - Il est trois moyens, que Dieu accorde dans le Cercle d' Abred, pour
permettre de triompher du Mal et du Principe d'Anéantissement.
Ce sont:
- Le Destin primitif et sa Nécessité ;
- L'oubli des modalités successives d'existences ;
-La Mort.
Et ces trois choses permettent de s'évader d' Abred et de passer en
Gwenved, échappant ainsi au Mal et à l'Anéantissement.
*
**
22." - Il est trois événements, qui furent, simultanément, à l'origine de tout.
Ce sont:
-L'Homme;
- La Liberté, en tant qu'Ordre autonome, ou libre-arbitre ;
- La Lumière spirituelle, éclairant les êtres sur ce qui est bien et ce
qui est mal.
*
**
23. - Il est donc pour l'Homme trois nécessités inéluctables. Ce sont :
- La nécessité de souffrir ;
- La nécessité de se renouveler ;
- La néce~sité de choisir.
II6 AU PIED DES MENHIRS
*'
**.
24. - Il est trois alternatives pour l'Homme. Ce sont :
- Le Cercle d'Abred ou le Cercle de Gwenved, en tant que buts ;
- La Fatalité ou la Liberté morale, en tant que moyens ;
Le Mal ou le Bien en tant que résultats.
Tout étant en équilibre, tout étant dans le domaine de ses possibilités,
l'Homme a donc le pouvoir de s'attacher à l'une ou à l'autre, selon sa.
volonté propre.
*
**
25. - La Fatalité inhérente au Cercle d'Abred découle de trois choses, et
ce sont ces trois choses qui y enchaînent l'Homme, savoir :
Le défaut d'efforts vers la Connaissance ;
Le défaut d'attachement et d'attirance vers ce qui est le Bien ;
La préférence pour ce qui est le Mal.
Par ces trois erreurs ou ces trois fautes, l'Homme s'enlise dans le
Cercle d'Ab red, il s'y attarde et, au cours de ce dangereux séjour, il
retourne vers sa condition antérieure.
*
**
26. - Trois erreurs font tomber, inévitablement, dans le Cercle d'Abred, et
cela malgré qu'on soit par ailleurs attiré vers le Bien. Ce sont :
L'orgueil égoïste, qui fait retomber en Anwn ;
Le mensonge égoïste, qui fait retomber en Gobren ;
La cruauté égoïste, qui fait retomber en Kenmil.
Et l'Homme retourne ensuite à l'Humanité, comme auparavant.
*
**
27. - Pour parvenir à l'état d'Homme, il est trois nécessités pour l'Etre.
Ce sont :
,_ La nécessité d'acquérir la Science, l'Amour, la Force morale, et cela
avant que la Mort ne survienne.
Or, cela ne se peut que par un Choix délibéré, et une Liberté morale,
existant avant l'état d'Humanité.
Ces trois acquisitions sont nommées les « Trois Victoires ».
*
**
28. - Il est donc trois victoires sur le Mal et sur le Principe d' Anéan-
tissement. Ce sont :
- La Science, l'Amour, la Force morale.
Car la Connaissance, le Désir et la Forçe accomplissent par leur intime
union tout ce qu'elles désirent. Elles débutent dans la condition hu-
maine ; et elles durent ensuite, ininterrompues, à travers toutes les
existences successives, dans toute l'éternité.
AU PIED DES MENHIRS
*
*':'
30. - Il est trois différences, inévitables et nécessaires, entre Dieu, l'Homme
et Je reste des êtres. Ce sont :
- La limite (d'Espace et de Durée) pour l'Homme. Et on n'en saurait
trouver à Dieu ;
- Le commencement de l'Homme. Et on n'en saurait intaginer un à Dieu ;
Le renouvellement nécessaire de la condition humaine, dans le Cercle
de Gwenved. Alors que Dieu subsiste dans le Cercle de Keugant, le
Cercle Vide ...
*
**
31. - Il est trois états, particuliers au Cercle de Gwenved, pour la Créature.
Ces trois états sont :
Sans aucune souffrance (Annrwg) ;
Sans aucun besoin (Annesiau) ;
Sans aucune terminaison (Annarfod).
~...
~-
..
32. - Il est trois choses que I'Etre retrouve dans le Cercle de Gwenved.
Ce sont:
- La Puissance primitive ;
- La Mémoire primitive ;
- L'Amour primitif.
Et sans ces trois félicités, nul bonheur ne saurait être.
*
**
33· - Il est trois différences essentielles entre un être vivant et un autre,
trois choses qui font que chaque être n'est absolument identifiable à
aucun autre. Ce sont :
La Personnalité essentielle, ou Ame ;
- Le Souvenir de tout ce qu'on a pu être, de tout ce qu'on a .connu
La Destinée finale, ou « devenir ».
En chaque être, mais pour chaque être, ces trois choses sont complètes,
et elles ne sauraient être communes ou partagées avec aucun autre
être. Chacun a son héritage, dès l'origine de Tout, et il ne saurait être
deux plénitudes identiques.
II8 AU PU:D DES MENHIRS
*
**
34· - Il est trois dons que l'Infinie Bonté de Dieu fait à tout vivant. Ce
sont:
- La plénitude de sa descendance propre ;
- La conscience du soi ;
- La distinction particulière de son Ame des autres.
Et ainsi, par ces trois dons, chaque être diffère des autres.
***
35· - Par la compréhension de trois choses, on peut amoindrir le Mal, la
Mort, et en triompher finalement. Ce sont :
- La compréhension de leur nature, de leur véritable aspect ;
- La compréhension de leur cause et de leur raison d'être ;
- La compréhension de leurs modalités d'action.
Et ces trois compréhensions, on les trouve dans le Cercle de Gwenved .
•
36. - Il est trois choses qui constituent la Connaissance, ou Science que
chaque •être doit finalement posséder. Ces trois choses sont :
- Le fait d'avoir enfin achevé la traversée de tous les états d'existence ;
- Le fait d'avoir le souvenir de la traversée de chacun de ces états de
vie, avec tous ses incidents, ses peines et ses joies ;
- Le fait de pouvoir traverser n'importe quel état d'existence, à volonté,
aux fins d'expérience et d'appréciation.
Et ces trois choses, qui constituent la Connaissance finale réservée à
chacun des êtres, ne se trouvent qu'au Cercle de Gwenved.
\
37· -
***
Tout être vivant a trois prééminences sur chacun des autres vivants
(prééminences qui le distinguent des autres), dans le Cercle de Gwen-
ved. Ce sont :
- Sa vocation propre (ou personnalité finale) ;
- La liberté morale que Dieu lui a accordée ; - ou « privilège » ;
- Son Ame elle-même, qui fait que deux êtres ne sauraient être sem-
blables en rien.
Ainsi, chacun d'eux possède, dans le Cercle de Gwenved, tout ce qu'il
faut pour qu'il se distingue des autres êtres, et pour cela, à chacun
d'eux, il ne manque rien.
*
**
38. - Il y a trois choses qui sont impossibles, sauf à Dieu. C'est :
- De supporter l'éternité absolue du Cercle de Keugant ;
- De participer à tous les états d'existence sans se renouveler ;
D'améliorer et de renouveler toute choses sans le faire à perte.
39. -
***
Il est trois choses qu'on ne pourra jamais anéantir, et cela, à cause de
la nécessité de leur existence. Ce sont :
- La « forme » de l'être (sa nature, sa race) ;
AU PIE;D D8S MENHIRS Il9
40. -
***
Il est trois mobiles du renouvellement de la condition humaine, dans
le Cercle de Gwenved. Ce sont :
- L'Instruction (qui augmente la Connaissance) ;
- La Beauté (sa recherche) ;
- Le Repos (par inaptitude à supporter Keugant et son Eternité vide).
*
**
41. - Il est trois choses qui sont sans cesse en croissance dans l'Univers.
Ce sont:
- La force, ou Lumière divine ;
- La Conscience, ou Vérité ;
- L'Ame vivante, ou Vie.
Et parce que ces trois choses prévaudront sur toutes les autres, fina-
lement, de là découle la disparition d' Abred.
*
**
42. - Il est trois choses qui, sans cesse, sont en décroissance, et en voie de
disparition dahs le Monde. Ce sont :
- Les Ténèbres, ou Ignorance ;
- Le Mensonge, ou Erreur;
-La Mort.
*
**
43· - Il est trois choses qui vont chaque jour en se renforçant. Ce sont :
- L'Amour (de tous les êtres les uns pour les autres, de tous les êtres
à l'égard de Dieu) ; ·
- La Science (ou Connaissance progressive des êtres) ;
- La Justice (droiture, équité, des êtres à l'égard des autres êtres et
harmonie progressive des éléments constitutifs du Monde).
Et cela parce que le maximum d'efforts -va vers elles.
*
**
44· - Il est trois choses qui vont s'affaiblissant sans cesse, chaque jour :
- La Haine (des êtres les uns pour les autres. C'est ce qui s'oppose à
, leur harmonie générale) ;
- La Déloyauté (ce qui génère l'Injustice et le Désordre du Monde) ;
- L'Ignorance (qui empêche l'Homme de vaincre la Mort et la Fatalité
du Destin).
Et cela parce que la plus grande somme d'efforts va contre elles.
*
**
45· - Il est trois plénitudes au sein du Cercle de Gwenved. Ce sont :
- Le fait d'avoir participé à chaque état de vie et d'avoir finalement la
plénitude de l'un d'eux ;
120 AU PIED DES JU:NHIRS
46. -
***
Il est trois nécessités auxquelles ne peut se soustraire Dieu lui-même.
Ce sont:
- Le fait d'être Infini lui-même (et parce qu'il est Dieu) ;
- Le fait d'être obligé de se limiter, par rapport à ce qui est limité (et
cela parce que le Relatif ne pourrait alors concevoir l'Absolu) ;
- Le fait d'être Unifié avec chaque état de Vie, chaque modalité d'exis-
tence, dans le Cercle de Gwenved (et cela parce qu'en ce Cercle, les
êtres et les choses sont tels que Dieu les a primitivement conçus et
désirés).
*
**
47· - Trois choses ne peuvent pas ne pas exister (litt. ne peuvent qu'exister):
-La Vie; 1
- La Puissance ;
-La Vérité.
*
**
48. - Dieu existe par le concours de trois choses :
-La Vie;
- Le Pouvoir ;
- La Connaissance.
Autrement dit : Trois choses qui ne peuvent être absentes en Dieu.
*
**
49. - Les trois essences principales de la Bonté :
- Amour, Pouvoir et Sagesse ;
chacune étant parfaite nécessairement, rigoureusement et naturelle-
ment.
- Amour, Justice et Vérité.
***
so. - Il y a trois Unités et il ne peut y en avoir d'autres :
-Un Dieu;
- Une Vérité;
- Un Point de liberté ;
et en elles trois toute Bonté est enracinée par le Pouvoir, ~a Bonté et
la Connaissance.
***
sr. - Il y a trois distinctions nécessaires entre l'homme et Dieu :
- L'homme a une grandeur déterminée et une mesure que Dieu ne peut
avoir ;
AU PIED DES MENHIRS I2I
*
**
53· - Trois choses que Dieu ne peut être
-Faible;
- Sans sagesse ;
- Sans miséricorde.
*
**
55· - Trois choses que Dieu ne peut qu'être :
- Tout ce que doit être ;
- Tout ce que veut être ;
Tout ce que peut être la Bonté Parfaite.
56. -
***
Trois choses sans lesquelles il ne peut y avoir ni Dieu, ni parfaite
bonté :
- La Connaissance parfaite ;
- La Volonté parfaite ;
- Et la Puissance parfaite.
*
**
57· - Les trois buts vers lesquels s'oriente l'œuvre divine dans la formation
de toutes choses :
- Dompter le mal ;
- Exllter le bien ;
- Et manifester chaque nature conformément à sa destinée et à son
privilège(2) ;
- Affaiblir le mal ;
(1) VIvants, morts, ces termes s'appliquent non seulement aux êtres humains mals à
toute créature : minérale, végétale, animale, soit qu'elle soit réellement en Abred,
salt qu'elle passe pour un temps en Ankou ou encore : en Keugant, en Gwenved, en
Ab red.
(2) C'est-à-dire manifester le caractère distinctif ete chaque chose, négativement (destinée)
et positivement (privilège) manifester l'essence de chaque chose en montrant tout
ce qu'elle ne peut être, et tout ce qu'elle peut éJ,r!l.
I22 AU PIED m:s MENHIRS
- Fortifier le bien ;
- Et manifester chaque distinction.
•**
58. - Trois choses que Dieu a fixées comme étant les principales de toute
existence :
-L'Amour;
-La Vérité;
- Et la Connaissance.
*
**
s9. - Les trois soutiens d'un homme vertueux :
-Dieu;
- Sa conscience personnelle ;
- Et la louange de tous les sages ;
•*•
61. - Il y a trois existences nécessaires qui ne peuvent qu'être :
- La grandeur suprême de chaque chose qui est Dieu ;
- La petitesse suprême de chaque chose qui est le néant ;
- Et le milieu qu'est le fini.
62. -
•*•
Trois choses qui ne peuvent qu'être en tout lieu ou en .tout temps :
- Ce qu'il y a de plus nécessaire ;
- De plus avantageux ;
- Et de plus désirable,
Et cela ne peut qu'être Dieu.
•*•
63. - Trois choses que Dieu ne peut pas ne pas accomplir :
- Ce qui est le plus utile ;
- Le plus nécessaire ;
- Et le plus désiré.
64. -
•*•
Les trois témoignages rendus à Dieu par ses Œuvres :
- Son infini pouvoir ;
- Sa Connaissance infinie ;
- Et son amour infini ;
Car il n'y a rien que ces attributs ne puissent accomplir, ne puissent
poursuivre, ne puissent désirer.
AU PIED DÈS MtNHUtS
***
65. - Les trois principaux attributs de Dieu :
-Essence;
- Connaissance ;
- Et Pouvoir.
*
**
66. - Les trois principales propriétés de la Connaissance :
- Sensibilité ;
- Compréhension ;
- Et Activité.
*
**
67. - Les trois principales propriétés de l'Essence :
- La Substance ;
- La Qualité ;
- Le Mouvement.
*
**
68. - Les trois principales propriétés de la Puissance :
-L'Amour;
-Le But;
-Et la Loi.
:,-.:.
*
**
69. - Les trois principales manifestations de Dieu :
- Ce que peut faire la Puissance parfaite ;
- Ce qui est accompli par l'Amour parfait ;
- Et ce que suit la Connaissance parfaite.
Autrement dit : Les trois manifestations de Dieu :
- Paternité ;
- Filiation;
- Spiritualité.
*
**
70. - Trois choses qui sont une dans la Volonté et le But avec toute Bonté :
- Dieu dans son Pouvoir ;
- Une conscience vigilante ;
- Et le jugement des sages.
*
'~*
71. - Les trois sources des êtres animés dans les mains de Dieu :
- L'amour, désirant le bonheur pour le plus grand développement de la
compréhension parfaite ;
- La sagesse, connaissant les moyens suprêmes ;
- Et le pouvoir, de réaliser la suprême conception de l'intelligence_ et
de l'amour.
124 AU PIED DES MENHIRS
*
**
72. - Les trois causes de tous les actes :
- La nécessité et la contingence dans le cercle d'Ab red ;
- Le choix par le moyen de la liberté dans la vie humaine ;
- Et le choix par amour dans le cercle de Gwenved.
*
**
73· -Les trois opérations communes (coopérations) de l'homme avec Dieu
- Souffrir(l)
- Réfléchir ;
-Et Aimer.
Et l'homme ne ,peut coopérer avec Dieu en nulle autre chose. La souf-
france est le commencement de tout, car le reste ne peut prendre place
sans elle.
*
**
74· - Trois choses qui sont en désaccord avec Dieu
- Le malheur ;
f- Le mensonge ;
- Et le désespoir.
*
**
75· - Trois places où résidera Dieu dans sa plénitude
- Là où il sera le plus aimé ;
- Là où il sera le plus recherché ;
- Là où l'égoïsme sera le moindre.
*
**
77· - Trois chàses dont l'homme ignore l'essence :
-Dieu;
-Le Néant;
-L'infini.
(1) L'Idée de Dieu compatissant, souffrant avec l'homme est comme on vol~ druidique
antérieurement au cllrlsUanlsme.
AU PIÉD DÉS MENHIRS
*
**
79. - Les trois substances employées par Dieu pour faire toutes choses :
-Amour;
-Sagesse;
- Et Puissance.
*
**
81. - Les trois bonheurs du ciel
La domination complète sur tout mal ;
La vie éternelle ;
Et la félicité sans cesse renouvelée.
*
**
82. - Les trois choses primitiv~ment contemporaines de l'Univers :
-L'homme;
La lumière;
- Et la liberté.
*
**
84. - Dieu existe par le concours de trois qualités
Il ne peut être autrement ;
On ne peut se passer de Lui
Et il ne peut être meilleur.
*
**
85. - Les trois plénitudes du Keugant :
-Dieu;
- La Justice ;
-Et l'Amour.
*
**
86. - Trois choses qui ne peuvent qu'être en Dieu ·
- La suprême puissance ;
- La suprême sagesse ;
- Et le suprême amour.
AU l>U:D DES MF;NHiltS
*
**
87. - Il y a trois causes de mort :
- -L'ignorance ;
- L'amour déréglé pour le bien-être ;
- Et l'incapacité à supporter Je Keugant (infini).
Ce qui veut dire :de l'amour précède la conn;J.issance et par la connais-
sance l'obligation du Keugant peut être évitée, car de la connaissance
procède le changement de condition.
*
**
88. - Les trois attributs essentiels de Dieu :
- Eternité;
- Puissance ;
-Et Amour.
Et ils sont nommés « attributs impulsifs )), parce que Dieu ne peut
exister sans eux.
*
**
9o. - Les trois conditions de nécessité de l'humanité :
- Le moyen terme entre (litt. le mélange équilibré de) l' Abred et du
Gwenved, et, en conséquence, l'expérience du bien et du mal, et par
suite, le jugement, le choix dérivé du jugement après examen, et de là :
la liberté.
*
**
9r. -Les trois moyens employés par Dieu en Abred pour dompter le mal
et Cythraul et s'en échapper vers Gwenved :
-La mort;
- La nécessité ;
- Et l'oubli.
*
**
92. - Les trois fondements de Gwenved :
- Jouir des dons de Dieu ;
- Etre fortifié par la puissance divine ;
- Etre dirigé par la Science de Dieu.
*
**
93. - Les trois propriétés de la connaissance :
- L'amour pour ce qui est le meilleur ;
AU PIED m:s MENl-llnS
*
*'~
94. - Trois choses préYaudront à la fin :
-Le Feu;
- La Vérité;
-Et la Vie;
*
**
96. - Il y a trois violences et trois attaques contre le cercle de Keugant :
- L'Orgueil ;
- Le Parjure ;
- Et la Cruauté.
Car par libre volonté, effort et préméditation, ils empruntent l'exis-
tence à des choses qui ne doivent pas être et qui ne peuvent s'accorder
avec les lois du cercle de Gwenved. Et en accomplissant ces violences,
l'homme tombe en Abred jusqu'à l'Anwn (Abîme). La principale et
la plus grave est l'orgueil, car c'est de celui-ci que les deux autres
violences sont dérivées ; et ce fut grâce à l'orgueil qu'arriva la pre-
mière chute en Abred après la montée originelle vers l'espèce et la
condition humaine en Gwenved.
*
**
97. - Trois victoires seront un moyen de délivrance : à savoir
- Les victoires sur l'orgueil ;
- La haine impitoyable ;
- Et la cupidité ;
Car personne avec ces choses ne peut parvenir au cercle de Owenved,
parce qu'elles ne sauraient s'accorder avec Gwenved, et leurs natures
s'opposent à ce qu'on puisse y parvenir.
*
**
98. - Les trois œuvres de l'orgueil :
- Jeter la confusion dans tout, de sorte que la vérité n'est plus apparente;
- Entraver toute liberté, de sorte qu'on ne peut se libérer d'Abred ;
- Et commettre une usurpation contre Dieu et ce qui lui est dû, de
sorte qu'il ne peut y avoir de justice.
99. -
***
Les trois fondements de l'orgueil :
- Usurpation et vol ;
- Meurtre et guet-apens ;
- Et ob1igation de croire ce qui est faux.
AU PIJO:D DÈS MENHIRS
***
roo. - Les trois principaux péchés sont :
- L'Orgueil ;
- La Cruauté ;
- Et le Mensonge.
***
ror. - Il y a trois cercles de l'existence :
- Le cercle de Keugant où il n'y a rien d'animé ou d'inanimé, excepté
Dieu, et Dieu seul peut le traverser ;
Le cercle d'Ab red où ce qui est mort est plus fort que ce qui vit et où
chaque existence principale dérive de ce qui est mort, et l'homme l'a
traversé ;
Et le cercle de Gwenved où ce qui est vivant est plus fort que ce qui est
mort et où chaque existence dérive de ce qui vit et de la vie, c'est-à-
dire de Dieu ; et l'homme le traversera ; et l'homme ne parviendra
point à la parfaite conn.aissance jusqu'à ce qu'il ait complètement tra-
versé le cercle de Gwenved, car aucune connaissance absolue ne peut
être obtenue sinon par l'expérience des sens de la part de celui qui a
supporté et souffert chaque état et chaque épreuve.
*
**
103. - Il y a trois choses qui distinguent tous les êtres vivants les uns des
autres :
- L'Awen distinctif que nul autre ne peut posséder de la même manière
et que la suprême félicité dont chacun possède la plénitude selon son
genre.
104. -
***
Chaque être vivant possède trois choses. en rapport avec son indivi-
dualité et son caractère particulier, à sav01r .
La plénitude de ce qu'il est et il est impossible qu'il y en alt une
seconde égale, car il ne peut y avoir deux plénitudes d'une chose quel-
conque;
AU PI~D DE:S ME:NHIRS I2<J
***
105. - Il y a trois raisons pour changer l'état de l'existence et de la vie en
Gwenved :
- L'instruction qui est ainsi obtenue ;
La beauté de la transformation ;
et le repos rendu nécessaire par J'impossibilité de supporter l'éternité
de Keugant.
*
**
ro6. - Il y a trois choses dont chacun ne peut posséder qu'une
- Une plénitude d'inspiration en rapport avec sa nature ;
- Une manière d'être conformée à l'ordre et à la solidarité ;
- et une suprématie semblable à celle de Dieu sur tous .
•.:1:••
"'•'"'""
*
**
ro8. - Trois choses ne peuvent exister dans le cercle de Gwenved
-La mort;
- Le manque d'amour ;
- et Je désordre. ·
Autrement dit :
-Le besoin;
- Le défaut de charité ;
- et la confusion.
*
**
ro9. - Il y a trois considérations relatives au devoir et qui le font com-
prendre :
- Ce qu'un homme défend et ce qu'il s'interdit à l'égard d'autrui ;
- Ce qu'il recommande et ce qu'il cherche à faire lui-même pour son
semblable dans les mêmes circonstances ;
Enfin, ce qui peut être possédé et désiré pour jamais par tous les
êtres animés et les existences dans le cercle de Gwenved, où ni l'indif-
férence, ni J'injustice ne peuvent exister, car tout ce qui ne peut rien
d'autre que la désobéissance, le désordre, l'injustice et le manque de
charité, n'y ont pas accès.
'
At! PIED DES MENHIRS
~
r ro. -
**
Les trois fondements de Gwenved :
Connaître la nature du mal et l'avoir supporté en Abred ;
Connaître la nature du bien et l'éprouver en Gwenved ;
et connaître de chaque forme vivante son caractêre spécial, son indi-
vidualité et comment ils concourent par le plaisir, le dessein et la
volonté de Dieu au . bien général. Et dans ces trois choses se trouvent
la sécurité et la fermeté, car Dieu ne pourrait autrement supporter
l'absence d'amour envers la justice et l'amour du Vrai ; et Dieu ne
saurait agir sans vérité et sans justice, car de la vérité et de la justice
il ne peut provenir que l'amour parfait ; tout acte contraire à la cha-
rité ne pouvant avoir pour cause que l'iniquité.
*
**
III. - De trois causes provient le manque de charité ; savoir
- De celui qui accomplit l'injustice et qui provoque de la sorte le ressen-
timent chez l'offensé ;
De celui qui souffre et reçoit l'injure de la p'a rt d'autrui ;
Par suite naît le manque de charité à l'égard de celui qui accomplit
l'injustice ; et par l'ignorance de la nature de la haine et de la vie par
où elle inspire la colère, la vanité et la révolte, naît l'inimitié qui par-
court le monde sans fin.
*
**
r 12. - Les trois fondements de l'Unité :
- Elle est une à l'exclusion de toute autre chose, et de là vient la liberté
inébranlable ;
- Elle est « l'entièreté » qui exclut la multiplicité et de là naît son
ferme pouvoir ;
et elle est la multiplicité contenue dans « l'Entièreté » (1) d'où provient
la ferme connaissance ; et de ces trois choses est formée l'Unité
immuable ; et il ne peut exister d'autre Unité semblable que Dieu.
(!) On peut dlre, - moins exactement - intégrité. C'est d'allleurs le doublet d'entièreté,
mals avec une nuance dans la slgnlrtcatlon.
\Û PII':D DES MENHIRS
Pour cette raison, Dieu ou les dieux ne peuvent être plusieurs et Dieu
ne peut être multiple ou divisé.
*
**
I 14. - De trois causes résulte une chute en Abred
De l'orgueil qui s'aventura dans le cercle de Keugant ;
Du mépris et de la haine du cercle de Gwcnved, et du désir de chan-
ger ; ce fut une violence faite à Dieu et à sa bonté et aux attributs
essentiels de Gwenved qui sont l'Amour et toute Vérité et toute Jus-
ti ce, cela au mépris de la raison et du devoir.
.1
*
**
us. - Les trois principaux états des créaturesanimées :
- L' Anwn où fut leur origine ;
- L'Abred qu'elles traversent dans le but de s'instruire;
et le Gwenved où elles aboutiront dans l'accroissement indéfini du
Pouvoir, de la Connaissance et de la Bonté jusqu'à ce qu'il ne soit pos-
sible d'en acquérir davanta~e.
*
**
u6. Les trois causes de la mort
Délivrer et être délivré de la fatalité du mal et du pire
S'approcher et s'élever vers le Gwenved ;
L'impossibilité d'endurer Kcugant et de s'y reposer, car il n'y a que
Dieu qui, étant in fini, peut le traverser ; et le fini ne peut prévaloir
contre l'infini.
***
I I 7. - Il y a trois genres de mort , :
- Le châtiment et la peine pour le péché ;
L'amour de Dieu attirant toute vie et existence du pire au meilleur
en Gwenved;
et le repos en Gwenved pour ceux qui ne peuvent supporter les éter-
nités du Keugant.
=!·'
120. -
***
Il y a trois unités primitives et il ne peut exister qu'une de chacune
-Un Dieu;
- Une Vérité ;
et un Point de liberté. c'est-à-dire où toutes choses et toutes oppositions
s'équilibrent.
I2I. -
***
Trois choses naissent des trois unités primitives
-Toute vie;
- Toute bonté ;
- et tout pouvoir.
*
**
122. - Les trois attributs de Dieu existant pnmttlvement ensemble
Le plus grand de tous par rapport à la vie et le plus grand de tous
par rapport à la force et au pouvoir. D'autres disent ainsi
123. -
***
Par une triple nécessité Dieu est
- Le plus grand quant à la vie ;
- Le plus grand pour la connaissance ;
- et le plus grand en force et en pouvoir et il ne peut y avoir qu'un
être qui soit Je plus grand en quelque chose.
124. -
***
Trois choses que Dieu ne peut qu'être
- Ce qui doit être ;
Ce qui désirerait être ;
et ce qui peut-être la bonté parfaite.
•**
I2S.- Les trois principes de toutes les choses
- La matière ;
Le mouvement ; .
- La vitalité.
***
127. - Les trois fondements de l'existence
-La nature;
- L'individualité
- La continuité.
AU P1E:D m:s MENHIRS 133
*
**
128. - Les trois choses qui distinguent les existences
La qualité ;
La forme;
et le travail.
*
**
!29. - Il y a trois fondements de l'unité, savoir :
- La perfection ; car il ne peut y avoir deux genres d'une universalité ;
- L'Infinité, car il ne peut exister aucune limite à une « Entièreté » ;
- et l'Immuabilité, car il ne peut y avoir qu'une seule perfection, univer-
salité et entièreté de quelque nature que ce soit. C'est pourquoi on n~
peut concevoir Dieu que dérivé d'une fondamentale Unité.
*
**
130. - Trois choses par leur union engendrent le Pouvoir : Moi, Toi et
Lui ; c'est-à-dire le Moi-voulant ; le Toi-réalisant ce que je veux et le
Lui devenant ce qui est décidé par le Moi-voulant en union avec le Toi.
Et on les. nomme les trois bases parce que d'elles sont produites à la
fois la force et l'existence.
***
131. - Il y a trois considérations qui font comprendre la na.t ure du devoir
- Ce qu'un homme défend à autrui ;
- Ce qu'il cherche chez autrui ;
- et ce qui est compatible avec le cercle de Gwenved.
*
**
132. - Trois victoires amèneront une délivrance : celles sur le manque de
charité, la cupidité et le désordre, car ces choses ne sauraient s'accorder
avec le cercle de Gwenved.
133· -
***
Les trois principales coexistences du cercle de Gwenved
- L'amour aussi loin que sa nécessité l'exige ;
- L'ordre jusqu'à ce qu'il ne puisse être perfectionné ;
et la connaissance aussi loin qu'elle peut être conçue et comprise.
*
**
134· - Il y a trois choses qui ne peuvent prendre place dans le cercle de
Gwenved :
-La Mbrt;
- Le manque de charité ;
- et le désordre.
*
**
136. - Les trois pouYoirs de l'Unité :
- Etre une à l'exclusion de tout autre ;
- L'entièreté sans la pluralité et la pluralité dans l'entièreté et il ne peut
y avoir aucune unité stable qui ne vienne pas de Dieu.
***
I37· - Les trois instabilités de la pluralité
- Le défaut d'universalité
-Le fini;
et le changement ;
Car où il y a deux ou plus d'un l'emportant sur l'autre, il y aura pos-
sibilité de changement jusqu'à ce que le premier devienne !e dernier.
*
:::*
138. - Les trois principales perceptions corporelles de l'homme
-La Vue;
-L'Ouïe;
- et le Toucher.
***
I39. - Les trois principale perceptions de l'âme humaine
- L'Amtur;
-La Haine;
- et la Compréhension.
qo. -
***
Il y a trois choses qui viennent de Dieu, savoir :
Ce qui ne peut être considéré comme bon sans lui
Ce que tous voient leur manquer ;
et ce que nul autre ne peut satisfaire.
*
**
q2. - Les trois impossibilités de Dieu
-Haïr;
AU PIED DES MENHIRS 135
- Devenir faible ;
- et devenir trop grand.
.....:':
-~
*
::~*
*
**
145. - Les trois voies par le moyen desquelles travaille Dieu
- L'expérience ;
- La sagesse ;
- La miséricorde.
*
**
146. - Chaque acte de l'homme devrait posséder trois harmonies
Harmonie avec la morale naturelle ;
- Harmonie avec les facultés supérieures de l'humanité ;
ct Harmonie avec cc qui peut subsister pour jamais de chaque chose
dans le cercle de Gwenvcd.
Autrement dit : harmonie avec la volonté de Dieu ! harmonie avec les
perfections humaines ct harmonie avec ce qui peut exister pour jamais
de la divinité de leur essence dans le cercle de Gwenved.
Autrement dit (harmonie) : avec l'avantage de tous les. êtres vivants
avec la justice de Dieu ct avec l'amour du cercle de Gwenved.
147. -
. ***
Les trois principaux usages de toutes choses dans les mains de Dieu
Etre destinées au plus grand besoin
à la plus grande utilité ;
ct au plus grand amour.
***
149. - Les trois soins journaliers qui devraient occuper l'esprit de chaque
homme
- Adorer Dieu ;
AU PIED DES MENHI:RS
*
**
150.- Les trois craintes d'un sage.
- La crainte d'offenser Dieu ;
- La crainte d'agir envers un homme contrairement à la charité ;
- et la crainte des richesses et de la prospérité excessives.
Autrement dit : la crainte de Dieu ; la crainte du péché et la crainte
d'une trop grande prospérité.
.I 51. -
***
Les trois craintes d'un insensé :
- La crainte de l'homme ;
- La crainte du démon ;
- et la crainte de la pauvreté ou de l'inimitié du monde.
***
152. - En trois choses un homme ressemblera à un démon :
- En mettant des pièges sur la route ;
- En craignant un petit enfant ;
- et en se plaisant au mal.
•*•
153· - Les trois moments où Dieu sortit hors de son immensité :
- Le premier fut pour faire ce qui n'avait jamais existé auparavant et
cela en vue du bien et pour prévenir tout mal. De là sortit l'existence
ou l'œuvre de sa Création ; et bien que cela aurait pu différemment
se produire, ainsi furent manifestées la puissance et la sagesse infinies.
- Le second fut pour délivrer toutes les créatures et existences du mal
et de l'assaut de Cythraul (Le Néant) et pour réparer ce qui avait été
perdu, ou était devenu corrompu ; ou pour le rejeter, et lui substituer
un meilleur (être) . Ainsi en sera-t-il et adviendra-t-il pour chaque
existence jusqu'à ce que tout être et toute la crt!ation aient évolué
jusqu'aux dernières limites de la Bonté.·
(Tirées du Barddas)
1
r. - Rien n'est véritablement caché, que l'IJ;lconcevable.
Rien n'est inconcevable, que l'Incommensurable.
Rien n'est incommensurable que Dieu.
Et il n'y a pas de Dieu, que l'Inconcevable.
Rien d'inconcevable que ce qui est réellement caché.
Et rien de vraiment caché que Dieu.
*
**
2. - Nul Dieu, sinon l'Inconcevable.
Rien d'inconcevable que Dieu.
Nul Dieu, sinon l'Incommensurable.
Rien d'incommensurable que Dieu.
*
**
. 3· - « Je suis Homme, par le privilège du Vouloir Divin. Car ce que
Dieu veut, est. Je vins du Macrocosme, et mon origine fut en Anwn. Je suis
maintenant dans le Microcosme, où je vins à travers le Cercle d'Abred.
Et maintenant. je suis un Homme près de son terme ...
« Auparavant, j'étais en Anwn, l'Abîme, la moindre particule de Vie
qu'on puisse concevoir, et le plus près possible de la Mort absolue. Puis, je
suis passé dans chaque forme d'existence, et à travers chaque forme où il
était possible que soient le Corps et la Vie.
« Je suis venu jusqu'à l'état d'Homme, au long du Cercle d'Abred, où
pénible et vide fut ma condition à travers les Ages, depuis mon dégagement
de la Mort dans l'Abîme. Et cela, par la grâce de Dieu, sa grande Bonté
et son infini Amour.
« A travers chaque forme susceptible de renfermer la Vie, dans les eaux,
dans les airs, dans le ciel, j'ai enduré rigueurs et tourments, mal et souf-
france, et petites et minces furent mes joies, jusqu'à ce que je devinsse
Homme.
« Car, si on n'a vu et connu toute chose, le Gwenved demeure inacces-
sible ; et on ne peut voir et connaître nulle chose si on a souffert. Il ne
peut y avoir d'Amour, co'mplct et parfait, qui ne confère le pouvoir d'acquérir
la Science menant au Gwenved. Car, le Gwenved ne saurait être sans la Con-
naissance complète de toute forme d'existence, de toute souffrance, de toute
joie, de tout mal et de tout bien.
« Or, il n'est de science qui ne s'acquière sans l'épreuve de chaque forme
de Vie, de chaque vicissitude, de chaque douleur. Et ces connaissances déri-
vent les unes des autres. Et tout cela est nécessaire avant que le Gwenved ne
soit enfin possible ; et nécessaire avant d'arriver au total Amour de Dieu.
,
une forme d'existence conforme à ses désirs, adaptée à ces tristes affinités.
Puis, il remontera, selon qu'il se sera attaché à la Sagesse, vers la condition
d'Homme. II montera alors au Gwenved, ou retombera en Abred à sa mort.
Et il y retombera toujours ainsi, jusqu'à ce qu'il consente à pratiquer le Bien
et à s'y maintenir.
*
**
« Là où se trouvent le moins possible d'âme et de vie, où la Mort est
la plus profonde (et ce indépendamment de toute manière d'être), là est
Anwn, l'Abîme primordial.
« Là où est la légèreté, la lumière, la chaleur, l'incorruption, l'invaria-
bilité, se trouve la Vie. Là où se trouvent la pesanteur, le froid, les ténèbres,
la corruption, là est la Mort.
*
**
« Il y a trois· choses qu'on ne peut concevoir en Dieu. Savoir : son Ori-
gine, car il ne peut y avoir nul temps où il n'ait pas existé ; la grandeur de
son Amour, car quelqu'immense que soit son Œuvre, il ne verra jamais de
terme à ce qu'il peut justement accomplir ; et enfin son Pouvoir, car il
n'y a aucune fin, aucune borne ou mesure, à ce qu'il peut faire, au delà de
tout ce qu'on peut imaginer.
***
« Dieu est à la fois la Vie, complète et parfaite, et le total anéantisse-
ment de la Mort.
*
**
« Dieu est la Vie, pleine et entière, impérissable et sans fin. Dieu est le
Bien absolu, destructeur de tout mal. Dieu est le Pouvoir absolu, exclusif de
toute impuissance. Dieu est la Sagesse et la Connaissance absolues, anéantis-
sant toute ignorance et toute folie. '
« Cythraul est la Nuit, ténèbres des ténèbres, l'impuissance privée de toute
capacité. Cythraul est dépourvu de toute volonté ; créature de Nécessité et
non de Vouloir ; sans être ni vie ayant rapport avec l'existence et l'indivi-
dualité ; vide comme le Vide, mort comme la Mort, nul comme le Néant.
« Et, par ce qui précède, on comprend qu'il ne puisse exister à l'origine
que Dieu et Cythraul, l'Etre et le Non-Etre, la Vie et la Mort, la Lumière
et les Ténèbres.
« Dans l'Abîme d'Anwn, les âmes ne possèdent de la vie ou du bien que
le degré le plus infime. Et de la mort et du mal, elles ont le degré le plus
élevé qu'il puisse y avoir. D'où vient qu'elles sont essentiellement mauvaises,
par suite de cette prépondérance du Mal sur le Bien. Et c'est à peine si elles
vivent et existent, inconsciemment parfois.
« Et la durée de leur forme est nécessairement courte, tandis que par la
dissolution, née de la Mort, elles avancent et progressent graduellement vers
un plus haut degré de Vie de plus en plus rapprochées de la Vie et du Bien
Suprême. Durant ce périple de formes en formes, Dieu, en sa miséricor-
dieuse affection pour tout être vivant, les guide au long du Cercle d' Abred,
poussé par l'Amour Infini qu'il leur porte. Et cela jusqu'à l'état d'Homme,
là où Bien et Mal s'équilibrent, aucun ne l'emportant sur l'autre, hormis
par le- choix- de la criature.
« Alors apparaissent la Liberté, le Discernement, le Pouvoir de Choisir.
et l'Homme se dirige librement vers le Mal ou vers le Bien.
AU PIED DES MENHIRS
*
**
« J'ai été marqué par Math, la Na ture, avant de devenir immortel. Pour
faire de mon âme animale une âme humaine, Gwion a versé sur mes lèvres
le Breuvage d'Immortalité que contient la Coupe dont il a la garde. La
Coupe de Karidwen, la Mère-Divine...
« Mon pays d'origine est la région des étoiles d'été. Le Distributeur des
Mondes m'avait près de Son Trône, dans la galaxie primitive, et je suis une
merveille dont l'origine n'est pas connue ! J'ai été en Asie, avec Noé, dans
l'Arche. J'étais clans l'Inde quand Rome fut bâtie, J'ai accompagné ici les sur-
vivants de Troie. Je serai, jusqu'au Jour du Jugement, sur la face de la terre,
et je suis capable d'instruire un univers entier ... Idno et Heinin me nom-
maient Merlin, mais les rois de l'avenir m'appelleront Taliésin ...
(1) Les « rameaux elu Bouleau "• ar·bre ('onsacré à Karldwen, la Nature-Eternelle, sont
lei l'image des mille et une possibllltés tle celle-ci. Tuliésin enseigne tet les modu-
ltttis multiples de l'émanation (se faisant à travers le canal des formes natureltes)
elu Manredd, Je « germe de Jumtère , prJmo.rdlal.
(2) Les Neur Formes Elémenlalres sont les neur " Nombres ''• véritables régents de
l'Univers et rte la Vie. Taliésln enseigne tel que Je principe qui présida à l'émanation
ete l'homme ne fut point celui d'un couple prlmltlf, créé ex nihilo, mals hien le
résultat d'une action créatrice transcendantale des régents que sont les • Nomb1'es-
Dieux "·
.\U PIED DF.S MENHIRS
CELTISME ET PYTHAGORISME
(1) Dans un passé extl'êmement lointain, les Celtes ne reconnaissaient qu'un seul dieu,
aussr les Drutdes se nommaient-ils Semnothécs, c·cst-à-dire adorateurs de D'ieu. Ils
se distinguaient Pli rela Cie la gentilité, puisque le principe fondamental de leur
tliéutllcée falsalt clP l'Pnilé abstraite, de la spiritualité de la Puiss~nce Suprême, la
source éternelle de toutes choses. Et 11 raut voir dans les •Jienx <li><'rS qui aopa-
raissent ensuite. tels E~1ts, Turann, Teuta1ès, cles divinités se~onclalres. superposées
à la Triacle primll 1ve, par les vicissitudes m!gratives de la Race. comme les sur-
vivances du culte /IOn au Thlbet •ont pénétré le J)oucthisme prtmltlf qui crut l'effacer
ou Je supplanter. comme les résurg-ences r.eltiques ont pénétr~ en Bretagne le chris-
nanisme qui s'ima;<innlt les erracet', de même les culles préi\,Istorlques ont survécu
et p<'nétré la pen~re celtique qui l'enuit les supplanter.
De qui les rtrutdes tenaient-Ils cette 11aute doctrine ? Cette question est rort
controversée. D'nPI'èS les uns ils en seraient Je'! rréateui'S. D'après les autres, tls
J'auraient tenue "" Pythagore ou d'un cie res clisciples nommé Zumalxls. Il est rort
probable, nous pouvons dire certain, que les Gaulois avaient précé<lé les Grecs en
toute chose. et que ceux-cl avalent appris de Pythagore la philosophie celtique des
Gaules.
Un ratt est. patent : les Gaulois et les Pythrzrrorieiens avalent la mihne opinion
philosophiqne, ce rait est allesté par un granci nombre d'lllstorlens. Jamblique, en
sa Vie de Pytha(fore, nous elit que ce philosophe avait étudié chez l<'s Celtes; Polystor,
en <nn Ut•re ni•.< symboles, rapporte que le m~ltre ete Samo3 avait voyagé chez les
Gaulois et élurlié avPc leurs Pl'êtres. Saint Clémen1, qui rapporte ce fait, se range
lut-même à l'opinion de PolysJor. parre que, nous clil-ll, lA. ressemblance des doctrines
adoptées chez les Grecs et les Gaulois la justifie plelncmcm. Ennn, Valère-Maxtme
nous dit quelque part : " Je croirais rous les Gaulois si, avec leurs braies, ils ne
proressalent la même doctrine que le grand Pythagore avec son manteau ! ... »
AU PIED DÉS MP;NHili.S
ont-ils voulu par là que les successeurs lointains des philosophes vêtus de lin
blanc, soient amenés d'eux-mêmes, à réunir dans la même vénération, les
Vers d'Or et les Triades !
Ainsi, sans doute, pourrions-nous reconstituer l'essentiel du message venu
de l'Hyperborée ...
Quoi qu'il en soit, notre travail eut été à nos yeux incomplet sans cette
adjonction. Voici donc, après les Triades Celtiques, les Vers d'Or pytha-
goriciens. Et comme pour celles-là, nous donnons une adaptation nouvelle de
ceux-ci ...
***
LES « VERS D'OR » PYTHAGORICIENS
LA FILIATION CELTIQUE
*
**
Morvan Marchal, s.ous le pseudonyme d'Artonovios, a publié dans Neme-
ton (3• numéro) une pénétrante étude des résurgences celtiques, depuis la
conquête romaine. Nous nous y reporterons donc puis nous complèterons cet
exposé de renseignements inédits, venant d'archives privées, qu'il nous sera
possible de préciser un jour.
*
**
« L'organisation druidique présentait pour la Celtide un caractère œcumé-
nique, et s'étendait .au-dessus des clans, des tribus ou des Etats. Un sanc-
tuaire central, dans chaque grand pays celte, rassemblait le collège des
druides : CHARTREs, la ville des Carnutes(l) (où les écoles druidiques sub-
sistèrent jusqu'au christianisme, qui les assimila, semble-t-il, sous l'évêque
Arbogaste(2), et qui étaient eiJAore en plein éclat au x• siècle), pour les
Celtes de Gaule ; Mo.-.\, actueJ,ement Anglesey, où les druides de Grande-
Bretagne résistèrent jusqu'à la mort aux armées de Rome ; TARA, enfin, la
capitale du roi des rois d'Irlande, selon toute vraisemblance, pour la grande
île gaélique. Les corporations druidiques des différentes régions de l'impe-
rium celtique se tendent la main, échangent des initiés, se rencontrent. En
Gaule, outre le grand centre carnute, Bibracte(3), dans le Morvan, semble
avoir été un lieu initiatique important. « C'est vers l'an 47 avant Jésus-Christ,
écrit Ragon (4), que les derniers coups furent portés aux Mystères celtiques.
Bibracte, fameuse par son collège de druides, sa civilisation et ses écoles, était
la mère des sciences. »
« D'après César, le druidisme était originaire de Grande-Bretagne, ou tout
au moins les Druides de Gaule s'y rendaient pour visiter écoles et sanc-
tuaires, ce qui est assuré pour les Druides d'Irlande. L'ordre druidique
se divisait, - nous le saY ons depuis Po sidonius et Timag-ène(5), - en trois
branches : les druides. philosophes et littérateurs, les bardes, littérateurs
populaires et chantres, et les ovates (filid en Irlande), poètes et devins. Les
druides paraissent avoir été vêtus de lin, de couleur blanche(6), peut-être avec
des bandes pourpres croisées. Leur arbre mystique était le chêne(7).
« Leur enseignement était donné en secret(8), et était purement oral, sem-
blable en cela à celui des mages iraniens qui, suivant saint Basile, n'ont
jamais eu de livres(9). II faut être borné pour le leur reprocher. La tradition
orale ne risque en effet jamais de devenir un héritage mort, et, suivant le
mot si exact de Dumézil (lü), « est vivante par définition ... , et équivaut, elle
aussi, à une « transmigration ». A chaque génération, en chaque étudiant,
JO .
Al.! PIED D"P,S MENI-J'IRS
le savoir se réincarne ... Les Druides n'ont pas -voulu immobiliser dans des
signes morts une science qu'ils considéraient comme sans cesse renaissante ».
La conquête romaine, en Gaule, et la conquête chrétienne, en Grande-
Bretagne, devaient atteindre profondément les collèges druidique~. Les Césars,
qui ne se trompaient pas en voyant dans cette organisation l'élément de cohé-
sion par excellence du monde celtique, menèrent vigoureusement le combat
contre elle. En Gaule, en effet, s'il existait des cultes de métiers analogues,
en beaucoup plus libres, aux corporations latines(l), jamais cependant ces
groupements celtiques ne devaient véhiculer, comme celles-ci, une tradition
ésotérique ou quasi-philosophique, et connaître leurs complexes devenirs. Par
contre, le druidisme, appuyé sur une doctrine originale et concrète, forte-
ment hiérarchisée dans sa forme, apparaissait alors comme la première garan-
tie de durée pour les Celtes, et de résistance à l'assimilation.
« Les Latins vainqueurs ne supprimèrent pas d'un coup l'institution drui-
dique, mais, fort accueillants pour le polythéisme gaulois, qu'ils syncréti-
sèrent vite et très naturellement avec le leur, ils commencèrent en revanche
par accabler la confrérie sous les calomnies(ll.J. Auguste interdit aux Gaulois
la célébration des mystères druidiques, comme contraires aux croyances
romaines, bientôt suivi par Tibère, qui, selon Pline, voulut interdire jusqu'à
la corporation elle-même<3J. Claude, enfin, grand centralisateur, abolit et ie
culte et la confrérie ; des hommes du chêne, suppliciés ou proscrits, les uns
gagnent la sylve armoricaine ou l'île de Bretagne ; les autres continuent en
secret à instruire la jeunesse<4J, puis se soumettent, deviennent parfois pro-
fesseùrs dans les grandes écoles romaines qui succèdent aux leurs.
« Parallèlement, le culte pol) théiste gaulois évolue. Sous l'influence médi-
terranéenne, les vieux dieux celtes s'anthropomorphisent. BoRvo s'identifie
à Apollon, CAMULOS à l\Iars. Mais certaines assimilations sont impossibles :
Teutatès, Esus, Epona, les cornes de Cernunnos, le maillet de Sucellos restent
celtiques. En outre, et au-dessus de tout cela, Rome impor~e ses cultes offi-
ciels' : il existera un flamine des Drvr, c'est-à-dire des empereurs divinisés,
ayant le pas sur les humbles prêtres des vieilles divinités gauloises. Chaque
année, cependant, les délégués des cités gauloises se réunissent à Lyon, où
siège le grand-prêtre des Gaules rorhaines (5).
« Les résistances gauloises à l'assimilation, trop pudiquement passées sous
silence par l'académisme français depuis quatre siècles, furent nombreuses.
Les premières, certainement inspirées par les druides, eurent un caractère
national, mais, par la suite, si l'on en excepte l'étrange tentative du paysan
boïen Mariccus, qui, se déclarant prophète et dieu, voulut, sous Vitellius,
affranchir la Gaule, ces soulèvements tendent plus à investir un empereur,
parfois gaulois, qu'à se séparer absolument de Rome. Les invasions germa-
niques, de plus en plus fréquentes, et leur triomphe avec les Francs de Clovis
vinrent mettre fin à ces tentatives d'empire des Gaules, tandis que la langue
latine, devenue celle des villes, appuyée par l'Eglise chrétienne étroitement
(1) Hubert. Op. ciL .. Il, 312 et Cbapot, le Monde Romain, même collection, p. 369.
(2) Notamment par l'accusation de sacnnces ilumams, tant de fols reprise depuis. Outr&
qu'à l'époque, ces sacrifices - Pharmako\ hel!éntque, voire même en un sens jeux
ctu cirque romain - aient été d'usag-e général. Il est absolument gratuit d'en raire,
en soi, une institution druidique. Le Febvre. Deux Etudes Pélagiennes, 1918, pp.
37 et sq.
{3) Tibère accusait les druides de magie, comme plu~ tard Domitien le rit pour les
chrétiens. Fossey. Op. clt., p, 137.
(4) Pomponius Méla, III, 2, 19.
(5) L'arcbevêque catholique de Lyon porte toujours le titre de I>rlmat des Gaules,
AU PI~D DÉS M~NHIRS 147
Mais, sur la « frange » des terres désormais celtiques, les restes du drui-
disme agonisent obscurément. L'Armorique, touchée fort peu par le chris-
tianisme, vers z9o, avec Rogatien et Donatien à Nantes, reçoit Je flot des
émigrants bretons, chassés de Grande-Bretagne par les Saxons et par les
Angles. Ces émigrants s'installent d'abord sur le littoral, guidés par leurs
chefs de clans, militaires ou monastiques, et ces chefs, au moins, sont chré-
tiens. Pendant tout le v• siècle, les guerriers bretons favorisent l'évangélisa-
tion des Armoricains conquis, et les prêtres d'outre-mer consolident la domi-
nation politique de ces princes. Le druidisme, réfugié dans les forêts cen-
trales de la péninsule et dans les îles, se défend pied à pied. Et, sous, la
légende des SAINTs BRETONS évangélisateurs, derrière l'image de ces dragons
mythiques enchaînés et détruits par Pol Aurélien, Efflam ou Samson, l'on
devine les dernières résistances des druides, traqués et poursuivis par les
chrétiens comme leurs pères l'avaient été par Rome. C'est la païenne Keban
attaquant saint Renan ; c'est le barde Gwenc'hlan, dont la haine anti-
chrétienne a des accents inouïs(l). C'est même le grand Merlin, fils de la
nonne excommuniée, qui, réfugié près de Taliésin, chef des bardes, est initié
par lui aux mystères druidiques, et, combattu par les évêques du roi Arthur,
passe en Armorique et succombe aux maléfices de Viviane. Le mythe
rejoint l'histoire.
Au v1• siècle, en Grande comme en Petite-Bretagne, le sort du druidisme
était donc réglé. « La lutte des deux religions, l'essai de revanche armori-
caine du paganisme contre le christianisme », dont parle· La Bordcrie( 2)
se soldait en définitive par la victoire de ce dernier, dans Je cours du
vi" siècle.
Pat contre, en Irlande, les collèges druidiques organisés subsistent long-
temps, contrairement à leurs confrères bretons et continentaux, réduits à des
groupes isolés depuis la conquête romaine. Mais, de même qu'en Gaule la
jalousie des chevaliers s'était faite sentir au détriment de l'influence drui-
dique, de même l'hostilité de certains rois irlandais favorisa l'action des
missionnaires chrétiens. L'Ordre se brise : les druides disparaissent en Erin,
et les FILID, ou bardes, ne conservent à l'assemblée de Druim Ceta, en 574,
une partie de leurs privilèges que grâce à l'intervention de saint Colomban.
La corporation des druides, bardes et ovates, est donc abattue par la
victoire chrétienne, au début du vn• siècle. Mais, de même que les FILID
irlandais survivent au désastre, les bardes, leurs frères, vont se maintenir
dans ce' qui reste de la Grande-Bretagne celtique, le pays de Galles. Pour des
siècles, druides et ovates disparus, les bardes seuls maintiendront la tradition ;
christianisés, et pour certains, comme saint Sulio et Hyvarnion, devenus de
zélés auxiliaires de l'Eglise, ils n'en transmettront pas moins avec eux -
(comme les confréries chrétiennes de bâtisseurs les symboles pythagoriciens),
- l'essentiel de la pensée druidique. Lorsque la sourcilleuse intolérance
ecclésiastique, appuyée par le pouvoir anglais, se fait trop forte, les bardes
gallois se dispersent, ne se réunissant, secrètement, qu'en CvvAIL, groupe
essentiel de trois membres. En Irlande, comme jadis les druides en Gaule,
c'est à l'enseignement que se consacrent les FILID, se substituant ainsi aux
druides. '
(1) ::;cutrort. Rénovaliun L'ellif/<te, I, 471, Champlon, Parts, 1903. Ch. de Gaulle. Les Celte~
nu XIX• siècle. Le Dault, l'ar·ls, 1003. Enfin Ch. Le Gofflc. L'Ame brrtonne, Champlon
1912, t. II, pp. 221 ct sq. L'opportuniste Le nome, bien que témoin oculaire de
l'Eistedd{ud de Curdtfr, oo tl rut tniHé banle, é<Tit Il. ce sujet lies pages toutes pleines
rlu plus plat. confurmisrue pl1ar·Isien, et ll~ur.ement ncadêmisables.
(2) Le Grand-druide breton est en ce moment Tuldir-Jarrrenou. Le Gnrseàd breton com-
J'Orte un .\U>IO:-iiER CATHOLIQUE : Le Gorscdd dr·s Gaules a pour animateur savoret
Ab-Gwalwys). Les préoccupations chrétiennes ont une grande place dans les travaux
de ce collège.
AU PU:D DES MENHIRS
C'est dire que Llyvelin Sion (xvr• siècle), qui transcrivit enfin pour la
première fois la tradition verbale exprimée dans les Triades (qu'il fallait
auparavant connaître par eœur ... ), lolo Morganwg, qui les publia (xvrrr• siè-
cle), Ewans Davies (Myfyr Morganwg), qui constitua le sanctuaire et l'école
druidique de Pontypprid (en r888), étaient des successeurs légitimes, régu-
liers, de la filiation druidique de Sion Cent ...
De nos jours, elle existe encore, au sein de quelques sociétés secrètes
occultistes anglaises, et quelques rares Français l'ont reçue, aux environs du
début du xx• siècle, à Londres. C'est de là que procède le « GWÉNWÉD »,
mouvement celtique occultiste.
***
RESUME DE LA TRADITION
*
**
Tels sont les dL"< points du Crédo celtique...
•
CO.'CLUSION
(1) un mJJiton et demi de Gaulois et de Gauloises rurem vendus comme esclaves dans
les villes d'Ilialle, s;ms considération de parenté, d'Q8'e, ou de 11exe.
AU PIED DES MENHIRS