Dialectique
Dialectique
Dialectique
ET
MOUVEMENT
DIALECTIQUE
DANS LA
PHÉNOMÉNOLOGIE
DE L'ESPRIT
DE HEGEL
ANALYSE ET RAISONS
PIERRE-JEAN LABARRIÈRE
STRUCTURES
ET
MOUVEMENT
DIALECTIQUE
DANS LA
PHÉNOMÉNOLOGIE
DE L'ESPRIT
DE HEGEL
Nouvelle édition
AUBIER
COLLECTION
ANALYSE
ET RAISONS
COMITÉ DE DIRECTION
FONDÉ PAR
MARTIAL GUEROULT
Membre de l'Institut
Professeur au Collège de France
VICTOR GOLDSCHMIDT
Professeur à la Faculté des Lettres
de Clermont-Ferrand
GILLES-GASTON GRANGER
Professeur à la Faculté des Lettres
d ' Aix-en-Provence
PAUL RICOEUR
Professeur à la Sorbonne
Si v o u s s o u h a i t e z
être tenu au c o u r a n t
de nos publications,
il v o u s suffit
d'envoyer
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@ 1968, 1985 Aubier Montaigne.
Droits de b , E d i réservés pour tous pays.
Cette étude a été présentée comme
thèse de doctorat en philosophie à
l'Université Grégorienne (Rome).
Qu'il soit permis de remercier le
P. Pierre Henrici (Rome), qui a bien
voulu en accepter la responsabilité et
en diriger la rédaction, ainsi que le
P. Joseph Gauvin (Paris), qui l'inspira
à l'origine et encouragea sa réalisation.
PROBLÉMATIQUE
CHAPITRE PREMIER
I. INTRODUCTION A LA SCIENCE
OU PREMIÈRE PARTIE DU SYSTÈME?
Deux textes déjà évoqués, que Hegel écrivit à dix ans de dis-
tance, vont nous permettre d'apporter une première réponse.
Dans la lettre à Schelling qu'il écrivit depuis Bamberg le 1er mai
1807, nous lisons : « Je suis curieux de ce que tu diras sur l'idée
de cette première partie, qui est à proprement parler l'introduc-
tion — puisque je ne me suis pas encore avancé au-delà de cet
4: introduire », in mediam rem6. » En 1817, au début de la
première partie de l' Encyclopédie, Hegel, comparant la démarche
de sa Phénoménologie avec celle qu'il met en œuvre dans le texte
sur « les trois positions de la pensée à l'égard de l'objectivité »,
parle encore à son propos d' « introduction » et de « première
partie du Système9 ». Or ces deux expressions semblent bien
recouvrir des projets assez radicalement divers, de sorte que
19. Cf. les remarques de O. Pôggeler (op. cit., p. 267, trad., p. 203), qui
démontrent l'insuffisance de l'interprétation de Heidegger, voulant comprendre
toute la Phénoménologie à partir de la seule Introduction.
20. O. Pôggeler (op. cit., pp. 272 sq., trad. pp. 210-216) démontre la
fragilité des arguments de Haering sur ce point.
21. Haering, Hegel, sein Wollen und sein Werk, II, p. 485.
les figures de la conscience deviennent figures du monde, et dans
ce cadre déployé l'objet n'est plus l'individu mais l'Esprit qui se
révèle Il ne reste plus qu'à changer le titre, qui ne répond plus
au contenu : la Science de l'expérience de la conscience est
devenue la Phénoménologie de l'Esprit 23.
Tel quel, le livre se présente alors comme la « Première partie
de la Science ». Et il faudra attendre cinq ans pour que paraisse
cette Logique que Hegel avait dessein de publier dès 1806, aussi-
tôt après une courte réflexion sur la conscience, et qu'il visait
alors comme le premier moment de son Système de la Science.
A vrai dire, ce Système de la Science ne sera complet qu'en
1817, avec l' Encyclopédie des Sciences philosophiques. Mais ces
oeuvres postérieures ne sont pas connumérées avec la Phénomé-
nologie, de sorte que la « première partie » de 1807 demeure
sans correspondant dans la suite des publications. On ne peut
donc arguer de ce titre très général (Système de la Science) pour
la faire basculer du côté du Système. En fait, la Phénoménologie
fait partie du Système et n'en fait pas partie : elle est bien la
révélation de l'Esprit absolu, mais dans une conscience ; elle
retrace l' expérience concrète de l'homme (et de l'humanité) dans
sa marche vers la vérité. En ce sens, son intérêt demeure, intact,
même après la publication de l' Encyclopédie.
Il n'est donc pas exact de prétendre, sans plus de nuances, que
l'ouvrage est devenu, purement et simplement, une « première
partie » du Système. Trois textes de Hegel, écrits en 1807, 1817
et 1831, le montrent à l'évidence. Le premier, extrait de sa lettre
a Schelling du 1er mai 1807, a déjà été évoqué : « ... cette pre-
miere partie, qui est à proprement parler l'introduction — puis-
que je ne me suis pas encore avancé au-delà de cet " introduire
zn mediam rem. 1> Le second se trouve dans le paragraphe 25
de l'Encyclopédie, cité plus haut : Hegel y parle de « ma Phéno-
ménologie de l'Esprit, qui, pour cette raison24, lors de sa paru-
tion, a été désignée comme la première partie du Système de la
Science » ; mais c'est pour souligner aussitôt que, partant de la
conscience sensible immédiate, et déployant la totalité de ses
,,1fl^res concrètes, « elle ne pouvait à cause de cela séjourner dans
1 élément formel de la conscience simple » ; elle ne répond donc
pas a cette exigence de la Science, laquelle ne se déploie que dans
22. lbid., p. 483.
édition de la Ph. G., p. 577. O. Pôggeler, loc. cit., pp. 271-
272(trad.,pp. 208-209). Ce titre nouveau apparaît, au milieu de l'année 1806,
dans
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ebes,rXX par Hegel des leçons qu'il prévoit pour l'hiver 1806-
24C
.e deswegen a un sens explicatif par rapport à ce qui va suivre : si
Hegela pu parler de « Première partie du Système », c'est en effet parce
qu'il s' agissait de la manifestation de l'Esprit.
ce « formalisme », et elle n'est donc en vérité qu'une Intro-
duction". Enfin, en 18-31, commençant de revoir le début de
la Préface en vue de la réédition de l'ouvrage, Hegel supprime
purement et simplement les mots que nous mettons ici entre
parenthèses : « Ce devenir de la Science en général ou du Savoir
est ce que cette Phénoménologie de l'Esprit présente (comme
la première partie du Système de cette Science) 26. »
Ces jugements de Hegel portent sur l'ensemble du livre ; et
voilà qui relativise l'opinion de Haering, pour qui seules les deux
premières sections et le début de la troisième répondent au
dessein primitif d'une introduction. Il est vrai que celui-ci nuance
ses affirmations, concluant ainsi son exposé : « Tout cela, natu-
rellement, ne doit en aucune manière faire dire que Hegel aurait
à un moment donné changé fondamentalement son ancien point
de vue [...]. Il me paraît seulement incontestable que, dans la
Préface (comme aussi plus tard), il a cherché en quelque manière
à justifier, en lui donnant sa juste place, la forme qu'avait prise,
presque contre sa volonté, cette publication, qui ne devait avoir
que le caractère d'une introduction, mais qui, sortant de ce qui
lui avait été assigné comme fondements, s'était grossie sous sa
main jusqu'à devenir pratiquement un Système de Philosophie
de l'Esprit ". » Qu'il se soit « passé quelque chose » pendant
la rédaction de la « Raison observante », que Hegel, au cours de
cet été 1806, ait comme « perdu le contrôle de son travail28 »,
qu'il ait dû, bon gré mal gré, se laisser mener par le dynamisme
propre de son objet, nul ne songe à le nier. Mais, paradoxale-
ment, cet échappement imprévisible à l'intention initiale, loin
de dessiner une rupture qui rendrait l'œuvre contradictoire en la
dressant contre elle-même, nous assure de la très intime connexion
entre les « deux parties 2. que l'on distingue en elle, — puisque
c'est la logique propre du développement lui-même qui contrai-
gnit Hegel à outrepasser (s'il en fut bien ainsi) les limites qu'il
s'était peut-être assignées tout d'abord.
Notre dessein, rappelons-le, n'était pas de discuter pour elle-
même la thèse de Haering 29, mais de nous assurer que l'œuvre,
nant (en quoi Pôggeler s'accorde avec Haering), non plus que la section
Raison (en quoi il se sépare de lui), mais le point où, « dans la C o n s a c r a
de soi, vérité et certitude, concept et objet deviennent mutuellement égaux »
(p. 283, trad., p. 222). Cf. Ph. G., 140 (I, 154). Alors, en effet, peut s'opérer
l'entrée dans la « Science p r o p r e m e n t dite », — laquelle ne serait pas la
Logique, mais la Philosophie de l'Esprit (ou plus exactement l'Esprit objectif,
c'est-a-dire « le point dans la Philosophie de l'Esprit où apparence et essence
s'identifient », c o m m e elles le font, dans la Phénoménologie de l'Esprit, au
t£e section « Conscience de Soi »). — D e toute façon, il reste,
pour « Poggeler, que le dessein primitif comportait (sous une forme autre,
celle qu'elle reçut en fait dans les Sections Esprit et Religion)
30. réa "sation concrète, en leur universalité, des dialectiques de la Raison.
t . Introduction qui, précise Haering, « a repris simplement m a démons-
• ratic)n, et, lui ayant ajouté des précisions de dates, a achevé de l'élever
squ a une évidence absolue » (op. cit., p. 479).
31. Ph. G., X X X V .
H e s I ^ Hyppolite, Genèse et Structure de la Phénoménologie de l'Esprit de
que HP" • — N o t o n s que l'expression « Phénoménologie de la Conscience »,
fonde Haering emploie également (op. cit., p. 484) semble bien n'avoir pas de
ment hégélien. Il vaut mieux sans doute, quitte à renoncer au parallèle
III. APPROCHE LOGIQUE, LE MOUVEMENT
INTERNE DE LA PHÉNOMÉNOLOGIE
L'AUTO-MOUVEMENT DU CONTENU
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