Guide RechDidactBaT 06092011 PDF
Guide RechDidactBaT 06092011 PDF
Guide RechDidactBaT 06092011 PDF
Sous la direction de :
Philippe BLANCHET
Université Rennes 2 – Haute-Bretagne
Laboratoire PREFics EA 3207
Patrick CHARDENET
Université de Franche Comté
Directeur délégué « Langue et communication scientifique en français », AUF
Copyright © 2011 Éditions des archives contemporaines (EAC)
En partenariat avec l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF)
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représenta-
tion intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit (électronique, mécanique, photocopie, enregistrement,
quelque système de stockage et de récupé-ration d’information) des pages publiées dans le présent ouvrage faite sans
autorisation écrite de l’éditeur, est interdite.
www.archivescontemporaines.com
ISBN : 9782813000484
Avertissement :
Les textes publiés dans ce volume n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs.
Pour faciliter la lecture, la mise en pages a été harmonisée, mais la spécificité de cha-
cun, dans le système des titres, le choix de transcriptions et des abréviations, l’emploi
de majuscules, la présentation des références bibliographiques, etc. a été le plus sou-
vent conservée.
Avec la collaboration de :
Philippe Blanchet2
La finalité d’une recherche est la production de connaissance nouvelle, soit par la des-
cription et la compréhension de phénomènes nouveaux ou non étudiés jusque là, soit
par une analyse et une interprétation renouvelées de phénomènes déjà étudiés (suite à
une modification de point de vue, de méthode, de catégories d’analyse, de mise en
contexte, de questionnement scientifique, de demande sociale, de perspectives
d’intervention, etc. : ce qu’on appelle une problématique). Cette finalité implique une
réflexion sur l’activité de production de connaissance elle-même (en l’occurrence par
une recherche scientifique − mais il y a d’autres formes de connaissances produites au
moins partiellement selon d’autres dispositifs et modalités, cf. infra), sur le statut de
cette connaissance et notamment sur son double statut scientifique et social : c’est cela
l’objectif d’une réflexion épistémologique, réflexion de type méta-scientifique (en ce qui
nous concerne ici) dont l’objectif est une connaissance de la connaissance (Morin,
1986)3. Il serait pour le moins naïf, en tout cas biaisé voire dangereux (sur les plans
éducatifs, sociaux, politiques, éthiques) de mener une recherche sans s’interroger sur
ce qu’est cette recherche elle-même, quels sont ses tenants et ses aboutissants. Cela
reviendrait à l’inclure dans la cadre d’une croyance superficielle en l’« évidence » de ce
que seraient une connaissance, une démarche scientifique, une recherche. Cela revien-
drait à se désintéresser des utilisations potentiellement inacceptables voire dangereuses
que d’aucuns pourraient en faire. Dans le domaine didactologique4, où la recherche est
souvent sinon toujours une recherche-action (à finalité directe de formation et/ou
d’intervention institutionnelle, politique, etc.), il est d’autant plus important
d’« expliciter ses présupposés » (Germain, 2000 : 297 ; Reuter, 2006).
1 Les parties du texte rédigées par Philippe Blanchet appliquent les rectifications de l’orthographe du
français officialisées en 1990.
2 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : épistémologie, problématique, con-
ficités d’une discipline scientifique. Pour la didactique du plurilinguisme / des langues / du français, voir
Marquillo-Larruy, M, 2000.
4 Il semble plus clair de distinguer didactique « ensemble des modalités d’enseignement-apprentissage dans
5 En ce sens que ce que nous percevons comme des « objets » provisoirement stables et définis peuvent
être considérés comme des processus ouverts en émergence récurrente, tel un être vivant qui est aussi un
bouillonnement d’atomes, de molécules, de fluides, en mouvement, en circulation et renouvellement
permanents, en continuité de son environnement.
6 Cette affirmation révèle déjà un choix épistémologique : celui de la pensée complexe inspirée par E. Morin
(1997-2004 ; 2005) qui vise des connaissances complexes (s’intéressant aux systèmes globaux en termes
de processus) et rejette une connaissance atomisante (s’intéressant aux plus petits éléments identifiables
comme possiblement constitutifs des « objets »).
7 Au sens de « ensemble clos d’idées a priori tendant à répondre à tout ».
Philippe Blanchet | 11
rence recherchée des matériaux, des moyens et des sources utilisés sous la forme de
textes, de schémas, de tableaux, d’annexes, de bibliographies, etc.) : la rationalisation,
l’explicitation (incluant la réflexivité épistémologique), la confrontation, la relativisa-
tion en sont les principes clés.
Un problème important découle de ce continuum de production de connaissance par
les humains. Parce que les êtres humains sont des « êtres connaissants », qui ne peu-
vent pas s’empêcher de chercher à comprendre leur existence et leur environnement, à
s’en construire des représentations (Giordan, 1994), les trois polarités de ce continuum
unique ne sont pas étanches l’une à l’autre et interagissent. L’être humain ne peut pas
connaitre hors du filtre de ses modes de perception (ses « sens ») et du traitement de
ses perceptions par son système neuro-cérébral qui utilise pour cela, outre ses modali-
tés biogénétiques de traitement cognitif organisé en rationalité-affectivité, les
catégories signifiantes dont il dispose en fonction de la ou des langues et cultures, de la
ou des groupes humains, société(s) etc., qui ont implémenté une bonne part de ses
outils, mais aussi de ses expériences individuelles. Les connaissances ordinaires, cumu-
lées par les groupes sociaux, sont en effet organisées en cultures anthropologiques :
chaque groupe humain se construit, se transmet, se reconstruit, se retransmet une
grille globale d’interprétation du monde et d’adaptation au monde (naturel et social)
tendant donc vers une représentation spécifique, relativement partagée au sein de ce
groupe, de l’environnement, du groupe, des relations entre individus au sein du
groupe, avec d’autres groupes et avec l’environnement. Les classifications signifiantes
de cette culture, dont la ou les langues qui y sont incluses constituent un moyen essen-
tiel, sont inculquées aux membres du groupes (notamment via l’éducation des enfants,
les idéologies, les croyances religieuses) et proposent ainsi, en général imposent, des
connaissances tendant dès lors vers des croyances : vers des « vérités » dont le ques-
tionnement critique et la transformation sont plus difficilement possibles, d’autant
qu’elles contiennent des hiérarchies de valeurs et des enjeux idéologiques. Ce sont les
représentations sociales ordinaires, dont l’étude et la prise en compte son si importantes
pour comprendre comment tels humains vivent leur univers (linguistique, entre
autres…).
Or, les chercheurs, les scientifiques, sont aussi et avant tout des êtres humains sociali-
sés, éduqués, « enculturés », porteurs de ces schèmes interprétatifs profondément
installés dans leur vision du monde et qu’ils n’ont appris à mettre en question, en gé-
néral, qu’à propos de leur champ de spécialisation, mais pas ou peu, pas aisément en
tout cas, dans tous les autres champs et sur tous les autres facteurs et phénomènes que
croise leur spécialité. Et même au sein de leur champ d’étude, la puissance des grilles
culturelles et idéologiques est telle que la remise en question critique n’est pas évi-
dente. Elle relève d’un effort de vigilance. Dans le domaine des phénomènes
linguistiques, qui nous intéressent ici au premier chef et dont la fonction de construc-
tion des sociétés est forte, instrumentalisée, il est fréquent que des chercheurs
notamment débutants (et souvent aussi enseignants parce que les sociétés leur assi-
gnent une mission de reproduction de leurs normes et de leurs idéologies) utilisent des
stéréotypes comme celui de la « clarté et de la difficulté de notre langue » (sous-
entendu : « française ») ou n’imaginent même pas de remettre en question la définition
12 | Nécéssité d’une réflexion épistémologique
même d’une langue (le français, l’arabe, le breton…), pour ne pas parler de la notion
même de langue. Les conséquences de cette nécessaire remise en question critique ne
sont d’ailleurs pas simples à traiter du point de vue de la restitution des résultats de la
recherche, car soit l’on évite tout terme ordinaire, remplacé par un néologisme scienti-
fique, et la diffusion sociale des connaissances scientifiques devient impossible car le
discours scientifique devient incompréhensible hors du cercle étroit de ses spécialistes,
soit l’on utilise néanmoins des termes ordinaires mais on risque de charrier avec eux
toutes sortes de significations parasites même si l’on prend soin d’expliciter (d’une
façon obligatoirement limitée) les redéfinitions que l’on propose pour ces termes.
L’équilibre précaire entre les deux périls est une invention permanente.
Un autre effet puissant du continuum {croyance < − > science} est la croyance en une
Vérité scientifique définitive, c’est-à-dire la récupération et transformation de connais-
sances scientifiques (relatives, prudentes, discutables) en croyances (universelles,
omniscientes, incontestables), éventuellement via le filtre des connaissances ordinaires
qui tendent à généraliser abusivement des expériences singulières, et par ricochet à géné-
raliser abusivement des connaissances scientifiques relatives. D’autres facteurs y ont
contribué et y contribuent encore : dans certaines sociétés (la France en est un exemple
frappant), le remplacement d’une Religion marginalisée par une Raison divinisée (depuis
la Révolution française), la domination idéologique du chiffre (Desrosières, 2008 et b)
comme instance suprême d’argumentation issue de la pensée positiviste du XIXe
siècle8, les bénéfices que peuvent dès lors tirer de leur pouvoir les scientifiques ou en
tout cas certains d’entre eux, etc. Des expressions usuelles en français comme « c’est
prouvé scientifiquement » témoignent de cette croyance en une vérité scientifique su-
périeure et définitive. Les chercheurs sont ainsi investis du pouvoir de « révéler la
vérité » grâce à leur capacité transcendante à « décrypter » l’univers naturel et social et
à en rendre compte à travers une parole dont les fondements sont opaques (jargon,
discours d’autorité, légitimité autoconsacrée), en constituant une caste à part où l’on se
sélectionne entre pairs, où l’on se présente souvent comme des êtres de « pure objecti-
vité » hors du monde et de ses enjeux. Ils constituent de cette façon, aux yeux des
profanes et avec le consentement d’une part d’entre eux9, une réédition tacite d’un
clergé disant la Vérité révélée en interprétant dans une langue incompréhensible des
signes inaccessibles au commun des mortels. Les connaissances scientifiques sont
certes davantage étayées, détaillées, argumentées, explicitées, contre vérifiées que des
connaissances ordinaires, mais elles restent des propositions relatives à des points de
vue, à des contextes de connaissances préalables et simultanées, à des questionne-
ments précis, à des projets et éventuellement à une efficacité ciblée. La non
acceptation des limites, des incomplétudes, des impasses, de la subjectivité de toute
connaissance humaine, la quête spirituelle d’un absolu de certitudes permettant de
maitriser le monde, sont probablement à l’origine de la tentation de transformation
des connaissances relatives en croyances définitives (et à l’origine de la croyance elle-
même). Beaucoup de chercheurs ont fait l’expérience de la difficulté d’exposer la
nuance, la complexité et la relativité d’un point de vue scientifique face par exemple à
une demande médiatique qui veut des réponses tranchées, entières, simplistes. Cette
reconfiguration de la science en croyance constitue un détournement ou une instru-
mentalisation des connaissances scientifiques qui doit attirer la vigilance des
chercheurs (sauf à accepter la notion de croyance scientifique, bien sûr, mais elle parait
confuse et contradictoire du seul point de vue scientifique). Cela ne signifie pas qu’un
discours scientifique ne puisse être un discours de conviction, ni qu’il puisse être ins-
crit dans un discours plus large d’intervention et d’implication sociale, politique, etc.
En didactologie, la finalité pratique des recherches est fortement prégnante (Plane,
2000). Il est, au contraire, fondamental de développer une science avec conscience (Morin,
1982) qui, tout à la fois, reste scientifique en refusant de devenir croyance et reste
connaissance au service de l’humain, le critère d’opérationnalité étant l’un des critères de
scientificité (cf. infra). Les enjeux − et trop souvent les dérives − de l’élaboration et la
diffusion de connaissances scientifiques sont graves (Morin, 1999) : poser des prin-
cipes éthiques réflexifs pour un projet de société explicite dans le cadre desquels va se
développer une recherche scientifique consciente constitue donc un préalable indis-
pensable à toute recherche dans tout domaine.
didactique des langues, au sein des SHS, est directement concernée par cette spécificité
et cette exigence épistémologiques.
La distinction entre recherche fondamentale (« sans finalité concrète ») et recherche appliquée
(« à finalité directe d’application ») fréquente en SNF, où elle pose néanmoins des
problèmes, est peu pertinente en SHS, où le transfert des connaissances produites est
beaucoup plus directement réalisé, soit qu’il soit envisagé clairement dès le début de la
recherche qui, dans la plupart des cas, propose des réponses à un questionnement ou à
une demande sociale, soit que les connaissances, mêmes conçues hors d’une problé-
matique concrète, fassent de toute façon l’objet d’exploitation dans telle ou telle
pratique sociale.
12 Demaizière et Nacry-Combe (2007) emploient ces deux termes avec des sens différents.
16 | Nécéssité d’une réflexion épistémologique
rantir une objectivité intrinsèque, elle-même renforcée par le fait que le chercheur se
positionne hors du monde social et isolé de ses influences). Le résultat de la recherche
est donc déduit de la confirmation de l’hypothèse initiale. Le postulat épistémologique
qui fonde cette forme de science est celui d’un monde logique constitué d’unités mi-
nimales subissant des relations de causalité, dont l’organisation serait dévoilée de
l’extérieur et avec objectivité par un chercheur hyper-spécialisé qui expliquerait ainsi
des lois universelles permettant des prédictions. On a vu plus haut en quoi ces choix
épistémo-méthodologiques peuvent convenir pour certaines recherches en sciences
naturelles et formelles et en quoi ils sont peu et mal adaptés en sciences humaines et
sociales.
Le projet d’une méthode EI est de proposer une compréhension (une interprétation)
de phénomènes individuels et sociaux observés sur leurs terrains spontanés13, en pre-
nant prioritairement en compte les significations qu’ils ont pour leurs acteurs eux-
mêmes et donc en vivant ces phénomènes aux côtés des acteurs, comme un acteur
parmi d’autres mais selon des procédures méthodiques qui garantissent la significativi-
té des situations observées et comparées et qui exploitent consciemment les relations
intersubjectives entretenues au sein du groupe, notamment celles où le chercheur est
impliqué. Ce sont les phénomènes observés qui induisent l’interprétation, laquelle ré-
sulte de la recherche : il n’y a pas d’hypothèse de départ (au sens d’une « réponse
prédéterminée » à valider ou invalider) mais un questionnement auquel la rechercher
permet d’apporter des éléments de réponse (on parle en anglais de data driven research,
« recherche pilotée par les données »14). Les principes épistémologiques fondamentaux
de cette forme de science sont le principe d’humanisme (les humains, individus et/ou
groupes, sont considérés comme des sujets autonomes, dignes, respectables, riches de
toute leur singularité), le principe d’intersubjectivité (c’est dans et par les interactions entre
les sujets et les significations qu’ils y attribuent, chercheur compris, que se dévelop-
pent et peuvent être compris les phénomènes humains et sociaux), le principe d’endo-
référentialité (compréhension des sujets à partir de leur propre système de référence, de
valeurs, de significations), le principe d’hétérogénéité (les phénomènes humains et sociaux,
les humains, sont avant tout marqués par leur extrême hétérogénéité, complexe et
chaoïde15, qui interdit de les réduire à des règles universelles et qui permettent de pro-
poser des connaissances profondément situées, en dégageant éventuellement des
tendances partielles mais jamais des prédictions absolues). L’argument principal y est
donc de type qualitatif : on recherche et on propose en priorité des significations et
non des chiffres (qui peuvent néanmoins venir corroborer, secondairement, les inter-
prétations proposées). Cette forme de recherche est, on l’a dit, bien adaptée aux
sciences humaines et sociales (pour une analyse plus directement centrée sur les re-
cherches linguistiques, y compris didactologiques, cf. Blanchet, 2000 ; Blanchet, Calvet
13 Un terrain social pouvant être défini comme un réseau d’interactions et par uniquement comme un
espace géographique.
14 Le terme donnée est inapproprié car rien n’est « donné » : tout est suscité, pris, transformé en observable
par le chercheur.
15 Le terme chaoïde est proposé pour éviter les connotations négatives du terme chaotique : cela semble
totalement désordonné d’un point de vue rationnel mais cela peut correspondre ou contribuer à une or-
ganisation fonctionnelle (Blanchet, 2007a : 267).
Philippe Blanchet | 17
et Robillard, 2007 ; Blanchet et Robillard, 2003 ; Calvet, 2004 ; Heller, 2002 ; Rispail,
2005 ; Robillard, 2008).
La question des chiffres est fortement corrélée à celle de l’objectivité, dont ils sont
supposés être porteurs et garants par « nature » (et par opposition au qualitatif suspec-
té de « subjectivité ») selon une représentation commune y compris dans
l’épistémologie HD dominante en science et instrumentalisée politiquement de façon
récurrente (Desrosières, 2008a et b). Or, au fond, le quantitatif est du qualitatif. D’une
part, tout dépend de la façon dont on définit, dont on identifie et dont on va chercher
ce que l’on compte : les questions et les catégories selon lesquelles les « données »
quantitatives sont « recueillies » sont des éléments signifiants, issus d’interprétations
préalables. D’autre part, de toute façon, les chiffres ne disent rien en eux-mêmes : il
reste à les interpréter, c’est-à-dire à leur donner du sens, à les contextualiser, même dans
une démarche statistique qui commence par « interroger les données » selon des pro-
cédures mathématiques et non selon des procédures qualitatives. Des procédures
statistiques sont d’ailleurs mises en œuvre pour « valider » la « représentativité » des
« échantillons » et des « données », notamment le test du khi 2 qui vise à établir la signi-
ficativité de différences de fréquence entre des variables. Sa motivation est que les
statisticiens constatent toujours un décalage entre « les observations et la théorie »
(Marien, 2004 : 11), puisque « la réalité » leur apparait toujours plus complexe et aléa-
toire que cette hypothèse de base « qu’il n’y a pas de différence entre les observations
et la théorie » (ibid.). Le test du Khi 2 sert alors à réguler l’écart entre l’hypothèse théo-
rique de départ et les « données recueillies ». Or, le degré de d’écart retenu comme
significatif ou non dans ce test est décidé par le chercheur… On est donc bien dans une
démarche qualitative, subjective, interprétative, mais souvent qui ne le dit pas.
16 Voir : Contextualiser les savoirs en didactique des langues et des cultures (J.-C. Beacco).
18 | Nécéssité d’une réflexion épistémologique
envisager au moins trois autres critères : un terrain est également un espace temporel,
social et situationnel (au sens d’une micro-situation d’interactions). Il est nécessaire de
prendre explicitement en compte le fait que le terrain n’est pas un « objet » dissocié du
chercheur mais que le terrain un réseau d’interactions humaines et sociales, fréquenté et
transformé par le chercheur, qui en fait partie de façon récursive : « Le terrain n’est
pas une chose, ce n’est pas un lieu, ni une catégorie sociale, un groupe ethnique ou
une institution (…) c’est d’abord un ensemble de relations personnelles où "on ap-
prend des choses" » (Agier, 2004 : 35). Cela dit, la multiplicité des observables grâce
auxquels travaille un chercheur en didactologie, plus hétérogènes dans ce champ de
recherche que dans d’autres, inclut des phénomènes qui ne relèvent pas directement
de relations interpersonnelles, notamment les sources écrites ou audio-visuelles
comme les manuels et autres supports pédagogiques, les programmes d’enseignement,
les textes officiels, etc., même s’il est souvent pertinent qu’on en observe la réception
et l’exploitation par les acteurs sociaux « sur le terrain ».
Davantage qu’une simple question technique, la question des « corpus » est l’une des
entrées par lesquelles se pose le problème fondamental de la configuration théorique
et épistémologique d’une recherche. Dans une approche EI qualitative, ethnogra-
phique, des phénomènes humains et sociaux, on peut considérer qu’il n’y a pas de
corpus « objectivement représentatif », pas de données objectives, pas de généralisation
déterministe acceptable à partir d’un corpus clos. Le rôle du « corpus » dans la re-
cherche en SHS peut être représenté sur un continuum entre deux polarités (Blanchet,
2007b) qui lui accordent des statuts et des rôles différents :
- un statut primordial, en ce sens que le travail du chercheur est fondé en
priorité sur un ensemble de « données » prélevé dans le « réel » et analysé en lui-
même (voire pour lui-même), la technicité méthodologique étant alors
focalisée sur l’élaboration et la présentabilité du corpus (corpus constitutif) ; on
tend dans ce cas un peu plus vers la polarité HE du continuum épistémo-
méthodologique ;
- un statut secondaire, en ce sens que le travail du chercheur est fondé en
priorité sur sa fréquentation assidue et réflexive du « terrain », dont le corpus
constitue un exemplier d’observables interprétables en les re-contextualisant, la
technicité méthodologique étant alors focalisée sur les modalités
d’investissement dans le terrain social (corpus restitutif) ; on s’inscrit dans ce
cas très fortement du côté de la polarité EI du continuum épistémo-
méthodologique.
Ainsi, ce qui est corpus dans un cas (un matériau enregistré, organisé, nettoyé et archi-
vé comme un produit fini) ne l’est pas pour l’autre (qui préfère un matériau plus
« sauvage » ou plus « brouillon » témoignant d’un processus non artificiel
d’investissement du terrain, du type notes à la volée, carnet de terrain, photos sur le
vif, tranches de vie, etc.). Dans une méthode ethnographique, le statut des observables
réunis en un « corpus » selon une élaboration orientée par la compréhension du terrain
Philippe Blanchet | 19
Lorsqu’on voit quelqu’un aller à la pêche avec un harpon, on en déduit qu’il cherche
des baleines (ou en rivière, des saumons), pas des crevettes, et s’il prend une petite
« épuisette » à mailles fines, qu’il cherche des crevettes et pas des requins. Cela signifie,
mutatis mutandis, que les technologies et méthodologies des sciences humaines, souvent
implicitement (et trop rarement explicitement), reposent sur des hypothèses, des anti-
cipations concernant ce à quoi elles s’intéressent : l’homme, la langue, la société, la
classe, etc.
17 Je préfère, pour ma part dire « donner sens », mais je conserve « comprendre » pour faire écho aux
approches herméneutiques.
18 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : altéro-réflexivité, anticipation, expé-
moins un aspect. Quelle que soit la fluidité, l’historicité, le chaos qu’elles puissent pos-
tuler dans les langues et cultures des autres, elles organisent leurs pratiques
scientifiques autour de deux piliers implicites :
- un être humain peut en « comprendre » un autre ;
- le sens construit par le discours scientifique sur le discours des autres
échappe, au moins partiellement, aux vicissitudes et tribulations du
« comprendre ».
Pourtant, Y. Winkin (2006 : 514) peut considérer que lorsque E. Goffman écrit Pre-
sentation of Self in Everyday Life (1956), son regard serait aiguisé par « une tentative de
maîtrise des codes sociaux de la part d’un jeune immigré juif [comme lui] qui entre
dans la bourgeoisie WASP ». De même, S. Freud écrirait Psychopathologie de la vie quoti-
dienne « comme un vade mecum lui donnant les moyens intellectuels de contrôler son
accès à la bourgeoisie viennoise ». Dire cela ne signifie pas indifférencier les discours
dans une sorte de relativisme nihiliste, mais se poser la question de la construction et
des transformations des significations dans l’acte de « comprendre », en y incluant la
part individuelle des recherches.
Un enseignant, comme le rappelle ici-même P. Blanchet19 dans d’autres termes, ne
peut exercer son métier que si l’un des pivots de son activité est le « comprendre ». Il
lui faut « comprendre » comment est reçu son discours didactique, sans donner sens à
ce « métier impossible » (S. Freud), sans faire sens de chacune de ses activités au quo-
tidien, qu’il informe d’une « compréhension » du contexte, etc. De même, un
« apprenant », qui n’en est pas moins une personne, doit donner sens à sa présence en
classe, à son activité d’apprentissage, etc.
Face à ces questions, la situation actuelle en Europe continentale est assez curieuse. La
philosophie dite « continentale » s’interroge sur le sens global de l’homme, des rela-
tions sociales, elle reste fortement attachée à la spéculation et au travail du sens, et à
l’historicisation, mais elle est largement ignorée des spécialistes des sciences humaines,
qui se sont développées sur un terreau, quoi qu’on en dise, où demeurent de significa-
tifs vestiges positivistes.
Les sciences humaines, en Europe, ont subi de puissantes influences de la part des
sciences humaines telles qu’envisagées en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne,
influencées par le cadre de la philosophie analytique, qui estime que le travail des
« grandes questions » est une tâche vaine, puisque travailler les ambiguités du langage
est déjà bien suffisant :
Tout en disant que « [c]eci reste insuffisant néanmoins à caractériser la philosophie
analytique », J.G. Rossi la définit lapidairement ainsi :
« Dans tous les cas, il s’agit d’aborder les problèmes philosophiques du point de
vue du langage et d’apporter à ces problèmes une solution en procédant à une
analyse du langage » (Rossi, 2002 : 4).
R. Pudal caractérise pour sa part par un tableau reproduit plus bas les lignes de clivage
entre philosophies « analytiques » et « continentales » :
Il est intéressant de noter qu’une partie des sources qui ont inspiré la sociolinguis-
tique20 actuelle, les analyses des discours au sens large21, et une partie des perspectives
des didactiques des langues et cultures provient en ligne plus ou moins directe de
perspectives élaborées dans le cadre des philosophies analytiques (J.L. Austin, par
exemple, en fait clairement partie, mais pas des courants les plus « durs », J. Searle n’en
est pas éloigné, Ch. S. Peirce les a largement préparées, cf. Blanchet 1995). Les pers-
pectives pragmatiques par exemple, ont ainsi été empruntées comme des
« technologies » intellectuelles, sans préoccupation à propos des arrière-plans de ces
questions, tant le terrain avait été préparé par le positivisme, cadre dans lequel il est
cohérent d’emprunter des « technologies » intellectuelles en les déshistoricisant et en
20 Voir les conséquences de cette discipline dans le domaine didactique : Les pratiques plurilingues :
d’une communication pédagogique médiée par ordinateur [synchrone] (C. Develotte et S. Drissi).
L'analyse de discours : exemple d’une communication pédagogique médiée par ordinateur [asynchrone]
(C. Develotte et Ch. Celik).
De l’analyse du discours à l’analyse des discours en situation comme outil de recherche et d'intervention
(P. Chardenet).
24 | Les vicissitudes et tribulations de « comprendre »
les décontextualisant. Il n’est donc pas étonnant que le « comprendre », dans ces con-
ditions soit une question considérée comme pertinente pour ceux qui sont étudiés, et
n’organise pas en profondeur la réflexion des sciences humaines, et des didactiques.
De l’analyse du discours à l’analyse des discours en situation comme outil de recherche et d'intervention
(P. Chardenet).
Dessins d'enfants, recherche qualitative, interprétation. Des poly-textes pour l'étude des imaginaires du
plurilinguisme (D. Moore et V. Castellotti).
La méthode biographique : de l’écoute de l’apprenant de langues à l’herméneutique du sujet plurilingue
(M. Molinié).
23 Tout le monde sera d’accord avec cela. Combien de processus de formation d’enseignants l’explicitent,
et en tiennent compte au point d’en faire une partie revendiquée de la formation dispensée ?
Didier de Robillard | 25
Chacun peut constater à quel point il y a une tension contradictoire entre d’une part
« techniques », et d’autre part « attitude intuitive ».
À la réflexion, une façon de poser cette question est celle-ci : comprendre, certes, mais
comme qui ? En effet, « comprendre » ne saurait se concevoir sans un point de vue, des
co-ordonnées temporelles et culturelles, et la possibilité qu’on « comprenne » de plu-
sieurs manières différentes sans être capable de désigner la meilleure ou « la » bonne.
Comprendre qui, quand, à partir de quoi, en vue de quoi ?25
« (Se) représenter », catégoriser, dans cette perspective, devient une activité historico-
politique : toute catégorisation, même celles en apparence les plus anodines (quoi de
plus négligeable que des « phonèmes », confettis sonores dénués de signification ?26)
repose sur une « jection » dans le monde, une manière de se projeter avec les autres
nication réduite à sa plus simple expression comme fonction principale des langues.
26 | Les vicissitudes et tribulations de « comprendre »
dans le monde, ce qui en fait tout sauf une simple activité de connaissance « purement
intellectuelle » et permettant une connaissance « neutre » du monde et des autres.
Si la « jection », comme argumenté plus haut, articule histoire et avenir, « à partir de »
et « en vue de », on comprendra, alors, que soient ici considérées comme d’inspiration
positiviste les approches qui travaillent à minimiser ou occulter la place des représenta-
tions de l’histoire, et celles de l’avenir, et se prétendant capables de « descriptions » au
sens fort, là où le qualitatif voit des récits, forme humanisée de la description dans des
temporalités, et la prise en charge par un être en devenir revendiquant son historicité,
sa part de responsabilité dans ce qu’il dit du monde, et sa propre finitude, autant
d’éléments qui laissent de la place à d’autres discours.
Les points de vue que j’ai mobilisés ci-dessus sont ceux des herméneutiques de
H.G. Gadamer et de P. Ricœur, qui postulent que vivre c’est donner du sens et que, au
départ de toute vie humaine, se trouve un pari que l’on peut trouver inconsidéré ou
irrationnel. Pour vivre, il nous faut nous jeter dans le monde. Or, pour nous y jeter,
pour y vivre, il faut que nous disposions d’hypothèses sur comment il fonctionne pour
nous y intégrer, quitte à réviser ces hypothèses en cours de route. L’hypothèse fonda-
trice d’humanité, en l’absence de toute expérience ou histoire, serait que, de manière
très irrationnelle, nous avons confiance en notre capacité à donner sens au monde.
Cela s’imagine difficilement comme un processus purement individuel, puisque nous
sommes socialisés, et que certaines orientations nous sont données, ou interdites, par
le corps social. La réflexivité est ce qui nous permet, par le récit (Ricœur) de faire
l’histoire de nos expériences révolues, de leur donner sens, dans une perception du
temps humain, et en construisant une identité. L’hypothèse sous-jacente est donc que
vivre et « donner sens » sont un peu synonymes. Le travail réflexif est, de ce fait
crucial, y compris (et même surtout, parce que dans la vie quotidienne, nous sommes
loin de tout expliciter) dans le travail scientifique. Si notre faculté à donner du sens est
indissociable de notre historicité, notre activité scientifique en est pétrie, et elle ne
pourrait pas exister sans cela, en tout cas pas dans la forme qu’on lui connaît (cf.
Winkin plus haut). Il est donc important de ne pas ignorer ce qui fait que nous
produisons du sens d’une manière, pour chacun(e) sans doute unique, liée à notre
histoire non reproductible, et la réflexivité est ce qui nous permet de donner sens au
passé donc à l’avenir, et réciproquement, puisque les significations données à l’avenir
informent la façon dont est construite l’histoire.
ment replâtrée) à partir de ces bases. Cela d’autant plus qu’il s’agit de didactique, qui,
plus encore que beaucoup d’autres champs de recherches, ne peut pas ne pas se poser
la question du « comprendre » des autres, surtout, comme le voudrait le stéréotype,
lorsque cette activité se produit dans un cadre pluriculturel et plurilingue.
En effet, la perspective herméneutique fait l’hypothèse que c’est autant l’héritage his-
torique que l’anticipation d’enjeux (à partir de notre histoire et de notre projection-
jection) qui suscite la construction de différences/analogies attribuées aux autres face à
soi pour pouvoir structurer la relation : « tous les concepts sont devenus » (Nietzsche),
et il n’y a pas de raison pour que les différences/analogies linguistiques, culturelles, y
échappent. Elles sont historiquement construites, se transmettent tant qu’il n’y a pas
de sentiment qu’il y a une raison pour en changer. Pour caricaturer, alors que le plus
souvent on a tendance à considérer que ce sont les différences (linguistiques, cultu-
relles) qui provoquent les malentendus et les conflits, l’hypothèse herméneutique
postule que ce sont les enjeux hérités/anticipés qui maintiennent les différences ou les
construisent. Bien entendu, à cela on oppose généralement que si un sinophone et un
francophone ne se comprennent pas, ce n’est pas en raison des enjeux entre eux, mais
parce que les langues sont différentes. Une réflexion historicisante suggère que, si
l’histoire au long cours de la Chine et de la France/francophonie en avait fait des par-
tenaires (co-opératifs et/ou antagoniques) et surtout sans doute, si la Grèce Antique
avait rencontré la Chine, la grammaire grecque se serait configurée autrement, pour
permettre le travail de la différence linguistique avec la Chine (le travail de la diffé-
rence se fait toujours, sur l’arrière-plan des analogies, et réciproquement). À cela, on
rétorque généralement qu’avec des « si »..., ce qui est une manière de couper court à
toute altérité postulée. Il faut alors rappeler que, justement, le travail de l’altérité con-
siste à ne pas considérer a priori que certaines formes d’altérité sont inenvisageables.
Lorsqu’on dit cela, implicitement, et le coup de force est d’autant plus habile,
l’expérience de celui qui le dit est érigée en norme. Il ne s’agit pas de se complaire dans
des altérités fictives, mais de prendre conscience que, lorsqu’il y a conflit, donc désir
de ne pas se rencontrer ou dans alors dans le conflit, les interactants en relation choi-
sissent précisément de se peindre (et d’envisager les autres) sous les couleurs sous
lesquelles, selon leur anticipation, ils pensent que les autres refuseront de les rencon-
trer, ou les agresseront. On ne peut alors prédire quelle figure inattendue choisira
l’autre pour se manifester.
Cela a donc pour résultat que, en la matière, aucune expertise ne peut se concevoir
dans le surplomb (ce n’est pas le sens que donne à ce terme la contribution de
J.C. Beacco ici même)27, parce que les autres peuvent être trop changeants, évolutifs
pour cela. On ne pourrait être « expert », dans le sens classique de celui qui « assure »,
que de ce que l’on peut maîtriser, et on trouvera ici la conviction partagée chez les co-
auteurs de cet ouvrage que les didactiques des langues et des cultures ne visent pas la
maîtrise et le contrôle des autres. Le chercheur tient alors un discours que, en toute
cohérence, il prend soin d’expliciter, de situer historiquement, y compris dans sa di-
mension personnelle si cela est pertinent (et cela l’est souvent), car, en dernière
analyse, c’est l’expérience de sa propre trajectoire comme chaos historique (Robillard,
27 Voir : Contextualiser les savoirs en didactique des langues et des cultures (J.-C. Beacco).
28 | Les vicissitudes et tribulations de « comprendre »
2009) qui ouvre la possibilité de donner sens aux autres, à leurs langues et cultures,
qui, dans un premier temps, lorsqu’il y a des enjeux importants, nous apparaissent,
stratégiquement, comme des chaos incompréhensibles.
C’est ce que H.G. Gadamer (1976) appelle « le travail de l’histoire », qui consiste à
prendre conscience que le chercheur est construit par l’histoire, et que son travail doit
commencer par comprendre comment il est influencé par cela. Dans la mesure où il
ne peut pas s’extirper de son histoire pour la considérer du point de vue de Sirius, il
peut travailler (et non pas « échapper à ») cette histoire en se concevant pluriel, à la
croisée de plusieurs influences constituées en différences, qu’il peut alors travailler,
mais jamais dans l’absolu, et toujours les unes par rapport aux autres, dans des « à par-
tir de » et des « en vue de » limités, et qui changent dans le temps.
C’est dans cette veine que H.G. Gadamer considère que le « préjugé », ou
« l’anticipation » fait partie indissociablement du travail de recherche en sciences hu-
maines. En effet, si le travail de l’histoire est une des tâches prioritaires des sciences
humaines, afin d’assumer pleinement la/les tradition/s linguistique/s et culturelle/s
dont le chercheur est issu, cela signifie donc que, au lieu, comme dans les approches
positivistes, de se prétendre « neutre », le chercheur travaille explicitement ses préjugés
ou « anticipations », puisqu’elles sont indissociables de ce à quoi aboutit son travail.
Paul Veyne cite ainsi une communication personnelle de Jean-Marie Schaeffer :
« [Q]u’est-ce que la connaissance, sinon une interaction entre deux réalités
spatio-temporelles, l’individu et son milieu, c’est-à-dire un processus empirique
et non pas un miroir ? [...]
Elle ne pourrait être cette adéquation véridique, ce miroir, cette pure lumière
que si un fondement transcendantal ou transcendant (la garantie donnée par
l’existence de Dieu) venait en assurer miraculeusement la réussite. Miracle
auquel la philosophie a cru jusqu’à Nietzsche (on pourrait aussi évoquer le
scepticisme. [...] Malheureusement aucun discours ne peut remplir ce rôle
sublime, car, "les différents discours étant équipotents, continue Schaeffer, seul
un ordre de discours supérieur, incommensurable avec les discours humains,
pourrait opérer une telle soustraction." » (Veyne, 2009 : 77)
Cela me semble bien dépeindre le statut des connaissances produites en général donc
dans une problématique interculturelle, où il serait incohérent de poser un quelconque
cadre de production de connaissances (au hasard, celui du chercheur) comme le seul
pertinent si les discours sont « équipotents ».
Il faudrait bien plus de place pour exposer pleinement les conséquences profondes qui
découlent de ces choix initiaux. On perçoit cependant déjà le caractère stimulant de
ces propositions pour des perspectives en didactiques des langues et cultures.
Les perspectives herméneutiques ne font en un sens qu’approfondir, extrapoler,
rendre plus cohérentes, le plaidoyer, qui a fait date, de D. Schön (1994) à propos de
son « praticien réflexif », ou les travaux sur les représentations. Cela place la notion de
« compréhension » au cœur de bien des questions, en sciences humaines donc en di-
Didier de Robillard | 29
dactique générale, et plus encore en didactique des langues et cultures. Cela non pas
parce que les différences linguistiques et culturelles « ajouteraient » à la difficulté, mais
parce qu’elles constituent simplement un cas où, plus qu’ailleurs, et seulement parce
que les sciences occidentales nous ont formés autour de la notion d’homogénéité,
l’herméneutique nous semble particulièrement adéquate. On peut argumenter que ces
situations font simplement partie de ce que signifie « apprendre », « comprendre »,
« évoluer », « rencontrer les autres », etc.
3. Contextualiser les savoirs
en didactique des langues
et des cultures
Jean-Claude Beacco28
Le champ dit de la « didactique des langues et des cultures » n’est pas de nature fonciè-
rement épistémologique, mais il correspond à un ensemble des domaines
d’intervention sociaux, ceux de l’enseignement des langues, sous toutes ses formes, et
des politiques linguistiques éducatives que celui-ci met en œuvre. Nous ne discuterons
pas cette dénomination, lourde de conséquences théoriques mais nous nous borne-
rons à constater que, pour ce qui concerne l’espace francophone, ce champ est né
d’une « didactique du français langue étrangère », puis « didactique du français langue
étrangère et langue seconde », réflexion sur l’enseignement du français, destinée à en
accompagner la diffusion à l’étranger et à améliorer la qualité et l’efficacité de son en-
seignement, comme langue étrangère, seconde ou de scolarisation. Ce statut,
désormais ancré dans des institutions nationales et internationales, dont des instances
universitaires d’enseignement et de recherche, est spécifique, comparé à d’autres
formes prises par préoccupations comparables pour d’autres langues dans d’autres
espaces géopolitiques (comme en attestent sa dénomination : applied linguistics pour
l’anglais, glottodidattica pour l’italien...). Il constitue le socle sociologique des connais-
sances qui s’y élaborent, lesquelles doivent aussi être rapportées à leurs conditions de
production strictement méthodologiques et, plus largement, épistémologiques.
On se propose d’attirer l’attention des jeunes chercheurs sur la nature différenciée des
savoirs produits et impliqués dans et par la didactique des langues et des cultures et sur
leur nécessaire articulation davantage que sur leurs modalités internes d’élaboration
(voir contribution de D. de Robillard dans ce même chapitre)29. On rappellera que
cette diversité a pour origine celle des objets construits dans ce champ social, qui n’en
a pas réduit la complexité (voir contribution de Ph. Blanchet, ci-dessus)30, en particu-
lier avec l’institution (récente) en objet de recherche des cultures/contextes/situations
d’enseignement-apprentissage. On mettra en évidence une autre diversité, celle des
28 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : savoirs banalisés, savoirs d’expertise,
savoirs circulant dans ce champ où n’interviennent pas que des savoirs acadé-
miques/universitaires/savants mais aussi des représentations sociales ordinaires et des
savoirs d’expertise, qui se croisent et se métissent et ce dans des relations qu’il importe
de clarifier pour chaque recherche entreprise. La perspective contextualisante adoptée
ici n’est plus alors de nature géopolitique ou culturelle mais méta-épistémologique, en
quelque sorte, puisqu’elle vise à clarifier la variabilité et les relations entre les formes
de la connaissance produites ou convoquées en didactique des langues et des cultures.
destinée à les « exploiter ». Celles-ci, comme on l’a relevé à maintes reprises, sont déjà
établies dans d’autres champs disciplinaires et sont mises à contribution dans les
champ de la didactique des langue et des cultures : D. Nunan (1992), par exemple,
examine les formes et les conditions d’emploi dans ce champ des démarches expéri-
mentales (par exemple de type psychométrique), ethnographiques, par enquête,
questionnaire, entretien ou échantillon, par analyse des interactions (par exemple, des
interactions enfants-adultes, en milieu interculturel, dans le cadre théorique de
l’analyse de conversation ou de l’analyse de discours comparative...). De son côté, et
dans une optique comparable, J.-M. Van Der Maren (1999) expose les différentes mé-
thodologies susceptibles d’être utilisées en pédagogie, en les classifiant par objectifs,
selon qu’elles ont une visée évaluative (à des fins de décision ou d’amélioration),
qu’elles empruntent la forme de la recherche-action, de la recherche-développement
ou de l’amélioration de ses propres capacités (dite recherche ontogénétique, p. 123 et sui-
vantes).
On s’emploie régulièrement à articuler ces objets et démarches disjoints, dont
l’universitarisation de la didactique du français langue étrangère a accentué le caractère
monographique et sectoriel, en modèles. Ces modélisations du domaine social de
l’enseignement-apprentissage des langues cherchent à rétablir des transversalités entre
les différentes tendances de la didactique (identifiées32 par Halté, 2001 : 16) qui na-
vigue entre des pôles technologiste (prééminence donnée à la transposition du savoir
savant en savoir scolaire), psychopédagogiste (on privilégie les déterminants externes
comme la psychologie ou la sociologie des apprenants), sociodidactiste (articulations
forte des pratiques scolaires aux pratiques sociales, avec focalisation sur les pratiques
langagières) ou encore praxéologiste (perspective interventionniste).
32 En ce qui concerne le français langue maternelle, mais que l’on peut aussi adopter pour caractériser
plus généralement la production en didactique des langues et des cultures.
34 | Contextualiser les savoirs
33 Pour une analyse de phénomènes de cette nature dans la communauté scientifique de l’astronomie, voir
On représentera, par commodité, cette configuration, par le schéma suivant aux al-
lures de carré sémiotique et on posera donc que des savoirs produits et circulant dans
les conditions décrites ci-dessus sont à l’œuvre en didactique des langues et des cul-
tures, ce qui n’est déterminant pour l’ancrage épistémologique de l’ensemble du
champ.
Savoirs ↔ Savoirs
savants/ d’expertise/
académiques professionnels
↕ ↕
↔
Savoirs Savoirs
diffusés/ sociaux/
banalisés ordinaires
34 Voir parties : La recherche impliquée par les pratiques : l'axe méthodologique; Les objets de recherche
sont là les conditions minimales, au demeurant bien banales, qui permettent aux sa-
voirs savants de la didactique des langues et des cultures de devenir une praxis sociale
et non de demeurer une discipline ésotérique.
Les démarches savantes peuvent aussi prendre pour objet les savoirs sociaux ordi-
naires, tout spécialement celles des « acteurs des langues » : les apprenants
(motivations aux choix d’apprendre une/des langues ; représentation des styles
d’apprentissage de prédilection...), les enseignants (représentations de la formation
initiale, convictions relatives au bien parler et à la norme sociolinguistique à ensei-
gner...), les décideurs (croyances des directeurs/trices d’établissements scolaires quant
à la diversité des langues à proposer, croyance que le temps consacré aux langues
étrangères est « perdu » pour l’acquisition de langue maternelle/de scolarisation...) ou
les citoyens ordinaires (croyance que les langues s’acquièrent « surtout » dès le plus
jeune âge). Ces recherches savantes sur les savoirs ordinaires devraient conduire à re-
mettre en cause ou en perspective ces micro théories explicatives, parce que celles-ci
sont souvent les seuls savoirs convoqués, sans recours à de l’expertise savante, comme
allant de soi et sans distanciation aucune, pour servir de fondement à des choix de
politique linguistique éducative.
Une autre configuration est celle de recherches déclenchées par des convictions qui
relèvent de savoirs banalisés de la didactique des langues elle-même : on voit souvent
des travaux se proposer, par exemple, de justifier l’efficacité pour l’apprentissage de
l’emploi des supports d’enseignement authentiques, des méthodologies
d’enseignement communicatives ou actionnelle, pour ne citer que celles de la dernière
averse, au moyen des démarches savantes classiques de la didactique des langues et des
cultures... Le biais méthodologique de telles investigations est que, comme on le sait,
en ces matières l’on démontre toujours plus aisément le bien-fondé de la thèse que
l’on soutient que son contraire. Cette « didactique ordinaire » pourvoyeuse de convic-
tions, essentiellement diffusée par les instances de formation initiale et continue du
« français langue étrangère », porte la marque des distorsions attendues de toute trans-
position scientifique. Mais elle présente, en outre, la caractéristique de diffuser des
savoirs qui peuvent venir confluer, se superposer, ou se confondre avec des représen-
tations sociales ordinaires, qui elles n’ont pas cette origine savante. Cette didactique
banalisée demeure peu étudiée, même si elle semble très active surtout dans le do-
maine des méthodologies d’enseignement (ou, plus largement, des pratiques de classe)
pour lesquelles la démonstration de la supériorité de telle ou telle démarche par rap-
port à d’autres, réputées « traditionnelles », est pratiquement impossible à établir de
manière objectivée, aussi bien dans l’absolu que par rapport à des situations délimitées
d’enseignement/apprentissage.
Les savoirs d’expertise des enseignants sont peu connus et facilement considérées
comme suspects par la communauté scientifique de la didactique des langues et des
cultures, sauf à être érigés en objet d’étude. Dans les pratiques d’enseignement, ils
peuvent être en osmose avec des savoirs savants acquis ou avec les versions transpo-
sées de ceux-ci. Mais, comme ils sont attachés à des personnes singulières, et qu’ils ne
Jean-Claude Beacco | 39
donnent souvent lieu qu’à une transmission globale intuitive35, cette spécificité conduit
aisément à les faire appréhender comme fragmentaires. De plus, ces savoirs sont nor-
malement tributaires des caractéristiques des situations éducatives, au-delà desquelles
ils ne sont guère diffusés. Ces savoirs sont trop locaux pour que les centres historiques
français ou francophones de la didactique des langues et des cultures puissent le rece-
voir immédiatement comme légitimes36, même si cette situation tend à évoluer. Ils
sont enfin influencés par les savoirs ordinaires dans la mesure où des professionnels
ne sont pas à l’abri de la doxa relative aux langues, puisque celle-ci peut informer les
croyances et opinions de tous, chaque acteur social ayant voix au chapitre en tant que
locuteur, y compris donc les « gens des langues ».
Ces savoirs ont conduit à la création d’une méthodologie ordinaire de l’enseignement
des langues, d’emploi relativement indépendant des contextes, qui n’est ni théorisée ni
même dénommée, et qui se caractérise par une approche globaliste de la langue, dans
une démarche non contraignante, particulièrement adaptée à l’imprévisibilité constitu-
tive de l’objet à enseigner (Beacco, 2007). Ils comportent aussi un fort accent sur les
acquisitions lexicales, sur la mémorisation, ainsi que sur la centralité les enseignements
de grammaire. Le discours grammatical de la classe, dans ses formes et ses contenus,
tend à véhiculer une grammaire ordinaire du français, pleine et non problématisée,
dérivée des descriptions linguistiques savantes ou traditionnelles mais sans plus de
contacts avec celle(s)-ci. Mais il adopte aussi un régime proche de celui des enseigne-
ments grammaticaux premiers (quand ils existent), ceux de la langue maternelle / de
scolarisation. Ce savoir faire, probablement largement partagé par des enseignants de
même langue première que leurs apprenants se monnaie, par exemple, en représenta-
tions graphiques ad hoc des phénomènes morphosyntaxiques de la langue cible, en
utilisation d’exemples canoniques opérationnels, sélectionnés sur la base de leur im-
médiateté constatée pour les apprenants, en termes de « fautes » fréquentes ou
prévisibles qui constituent des lieux de cristallisation des interlangues du fait de la na-
tivisation... Il semble clair que ces savoirs interrogent en retour les savoirs savants, qui
privilégient l’universel généralisable. Mais cette articulation est encore peu explorée :
cette expérience de l’acquisition des enseignants n’a pas encore trouvé sa place dans le
champ des recherches savantes en acquisition des langues. Une telle expérience con-
trastive est remise sur le devant de la scène épistémologique par la réflexion sur
l’éducation plurilingue et interculturelle (Conseil de l’Europe, 2009) laquelle, ayant en
charge la valorisation et le développement des répertoires linguistiques individuels, est
amenée à privilégier les convergences et les transversalités de langue à langue.
35 Voir, par exemple, les « observations de classe » proposées dans les stages de formation initiale des
enseignants de langue, où les novices sont mis en contact direct avec des pratiques pédagogiques qui
peuvent souvent être reproduites par imitation.
36 À la différence de la didactique de l’anglais comme langue autre (TESOL), qui est polycentrique.
40 | Contextualiser les savoirs
Cette prééminence non surprenante des savoirs savants se note au fait qu’ils peuvent
prendre tous les autres comme objet, mais que l’incidence de ceux-ci sur leurs propres
modes de constitution, de démarche méthodologique ou de validation n’est pas ou
peu questionnée. Pour pouvoir les instaurer en champ cohérent, la délimitation
intrinsèque des savoirs savants ainsi produits invite à théoriser fortement le concept de
situation/contexte, en particulier sous la forme des cultures éducatives, linguistiques et
didactiques, c’est-à-dire à y faire jouer pleinement les savoirs d’expertise/
professionnels. Puisque la didactique des langues et des cultures semble procéder
moins par accumulation que par circulation(s), il importe que chaque recherche soit
repérée par rapport à l’ensemble des savoirs qui la configurent. Il m’a été donné de
noter (Beacco, 1990 : 16) que la didactique du français langue étrangère avait non
seulement une histoire mais aussi une géographie culturelle. Il me revient, cette fois,
d’attirer l’attention des jeunes chercheurs sur le fait qu’elle a, de plus, une topologie
scientifique propre, en tant discipline que ses responsabilités d’intervention sociale
façonnent en retour.
4. Recherche
et prise de position
Michael Byram37/38
Les représentations répandues des relations entre enseignement et recherche sont in-
fluencées par les relations entre science fondamentale et technologie : la recherche y
précèderait l’enseignement et celui-ci s’efforcerait de présenter les résultats de la re-
cherche. Le rôle de la didactique est alors de faciliter ce processus. En réalité, les
relations entre la didactique et la recherche sont bien plus complexes, quel que soit le
domaine sur lequel on se centre, la compétence interculturelle dans notre cas. D’un
côté, c’est la didactique elle-même qui est objet central de la recherche et qui donc la
précède, mais de l’autre, on s’attend à ce que la didactique bénéficie des acquis de la
recherche et, de ce fait, contribue à améliorer la formation des enseignants en se fon-
dant sur eux. De plus, quand la didactique se veut innovante, la complexité à gérer est
accrue par des questions relatives aux finalités et aux valeurs : par exemple, que doit-
on privilégier la connaissance ou la compétence et à quels niveaux d’enseignement ?
Pour nous saisir d’un peu de cette complexité, nous expliciterons d’abord la différence
entre recherche et prise de position, entre analyse de ce qui se fait et analyse (de la fai-
sabilité) de ce qui devrait se faire. Cette distinction est centrale dans les domaines de la
didactique, comme celui de la compétence interculturelle, où émergent de nouvelles
dynamiques. Elle est moins importante, par exemple dans les recherches sur
l’acquisition des langues, où les discussions portent moins sur ce que devrait être un
enseignement idéal que sur ce qui se passe effectivement et sur les moyens d’améliorer
cet état de fait. Cependant, même là, il y a débat pour savoir si les apprenants doivent
chercher à acquérir une compétence de « locuteur natif », lequel débouche nécessaire-
ment sur des problématiques liées aux idéologies et aux valeurs. Malgré la croyance
répandue que la recherche est située au delà des valeurs et qu’elle recherche le vrai tout
simplement, on sait que cela n’est pas la situation la plus répandue et qu’il n’en va cer-
tainement pas ainsi dans les sciences de l’éducation. Les questions liées aux idéologies
et aux valeurs sont gérées sur le mode théorique mais elles se manifestent aussi dans la
recherche empirique.
37 Ce texte doit beaucoup à Anwei Feng, avec lequel j’ai collaboré depuis des années, en particulier dans
un article qui rend compte des recherches dans ce domaine de manière bien plus précise qu’il n’est pos-
sible de le faire ici (Byram & Feng, 2005).
38 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : explication (erklären), compréhension
quantitatives que qualitatives, tout autant que des recherches visant la compréhension
ou celles qui argumentent pour l’adoption de nouvelles pratiques. Cela aussi signifie
que l’on peut avoir légitimement recours à n’importe quel instrument de recherche
pour la collecte des donnés.
De plus, il est clair que le sujet de recherches retenus et les méthodes choisies sont
souvent en relation avec un intérêt personnel des chercheurs ; le même chercheur peut
privilégier l’explication et la compréhension de la situation actuelle mais, parfois aussi,
s’engager pour promouvoir des recherches à propos d’innovations spécifiques, comme
l’enseignement de la compétence interculturelle. Les thèmes de recherche dépendent
aussi de la demande sociale, laquelle se traduit souvent en allocations de crédits pour
des recherches. De nombreux aspects de l’enseignement/apprentissage des langues
présentent des implications, propres à des contextes culturels, susceptibles de rencon-
trer l’intérêt de telle société ou des tels individus. Une question est de savoir si des
traditions et des conceptions différentes de l’apprentissage en général sont pertinentes
pour décrire les processus d’apprentissage des langues. Par exemple, une discussion
est ouverte pour savoir si les apprenants relevant des « cultures de tradition confu-
céenne » apprennent les langues plus efficacement moyen de méthodes « par cœur »
ou par des techniques alliant mémorisation et compréhension (Feng, 2003 ; Watkins &
Biggs, 2001). De manière comparable, on s’interroge sur l’incidence des conditions
sociétales sur la motivation à l’apprentissage des langues et à la compétence intercultu-
relle, par exemple relativement à la question de savoir si les apprenants de sociétés
anglophones sont motivés pour l’apprentissage des langues (Byram et al., sous presse).
En ce qui concerne la compétence interculturelle, on s’interroge pour savoir si la cul-
ture d’un pays donné doit occuper une place centrale dans l’enseignement (la France
dans l’enseignement du français comme langue étrangère, par exemple) ou si aucune
connaissance sur le pays ne devrait en faire partie et l’enseignement être centré sur des
savoirs-faire interculturels, surtout si une langue est apprise comme lingua franca. Les
réponses à de telles questions dépendent probablement de la société dans laquelle
l’enseignement est organisé et des finalités qui lui sont assignées.
5. Le plurilinguisme sur un baril de
poudre : splendeur d’un idéal
et violences des pratiques
Patrick Dahlet
Alors que la considération du vécu langagier du plus grand nombre des plurilingues le
montre comme un espace d’ellipses et de discordes de soi, plus ou moins criantes,
nous avons aujourd’hui tendance à répondre en démarquant idéalement dans le scéna-
rio plurilingue le triomphe de la concorde sur la discorde, individuelle et collective.
Certes c’est la demande de concorde plurilingue qui nous porte et à laquelle il faut
faire confiance, mais assurément pas en la retenant au début et à la fin d’un cycle pluri-
lingue attendu comme projet de sociétés, au risque de méconnaître les retentissements
des violences qui lui sont coextensives et sans la (dé)mesure desquelles il n’y a pas de
mise en réseaux possible de consciences et de sociétés plurilingues. L’expérience pluri-
lingue ne laisse que rarement les coudées, ou plutôt les langues franches, aux locuteurs
qu’elle implique dans un face-à-face souvent angoissant et qui déstabilise, voire fait
voler en éclats, des postures identitaires en elles-mêmes déjà fragilisées.
Si le plurilinguisme a une chance de ressortir comme pivot de l’unité humaine, c’est en
ne séparant pas son dynamisme de la charge des déplacements et des discordances
subjectives par lesquels il s’enlève, sur fond de ressentis de défigurations et de désap-
partenances, dans le vivre et l’agir de la majorité des locuteurs plurilingues du monde,
qui sont aussi, rappelons-le, les plus démunis économiquement et socialement. Alors
que structurellement et symboliquement leurs langues premières sont par définition
aussi fortes de significations que toutes les autres, elles ont toujours – et leurs sujets du
même coup aussi − plus de mal qu’elles à se frayer un chemin hors de leur espace mi-
nimal d’existence, et du même coup à pouvoir être entendues, vues, et choisies d’être
apprises par ceux qui n’en sont pas originaires.
Le fait plurilingue présuppose la violence des faits et l’incarnation de son idéal dans
une décision de société (qui ne soit pas seulement une supplication) comme condition
du vivre ensemble et de la préservation du langage de tous, la re-figuration des formes
et degrés de cette violence.
46 | Le plurilinguisme sur un baril de poudre
surcharge, menace ou accompagne la traversée des autres. C’est en ce sens que l’on
considèrera que toute emprise plurilingue est irrépressiblement conflictuelle, plutôt
que fusionnelle par nature, puisqu’elle implique toujours que l’appropriation d’un bien
linguistique conspire à l’appauvrissement ou à la destruction de l’autre.
Quand c’est contre son gré qu’on se retrouve plurilingue, alors la pratique plurilingue
prend le plus souvent l’allure d’une supplique qui chuinte la contradiction et chahute la
représentation de soi pour soi. Car au-delà de l’idéal qu’il faut annoncer et défendre, il
existe toujours toutes sortes de difficultés à considérer la compénétration de l’Autre en
soi et des autres langues dans la sienne. Des difficultés auxquelles nul ne peut prétendre
échapper. C’est en quoi, beaucoup plus qu’un acte de révélation (puisque somme toute
cette dimension des maux plurilingues est loin d’être méconnue), cette étape se veut
simplement un support, parmi d’autres, de toute recherche et conscience lucides sur une
déclinaison plurilingue des sociétés et personnes, à distance de toute croyance naïve à un
« fait » plurilingue qui serait séparable de la confiscation par effet de domination de
quelques-unes, de la majorité des langues qui définissent pourtant ce fait.
Pour prendre plus précisément la mesure de cette contention, aux accents plus ou
moins perturbants et violents, je me propose de faire entendre une poignée de d’auto-
représentations de locuteurs plurilingues réunies parmi bien d’autres dans la Caraïbe et
les Amériques : quelques voix plurilingues d’un travail sur soi-même, recueillies sur
l’épreuve d’une expérience vive et âpre, de leur plurilinguisme.
Affaire de violence, même quand s’épuisant d’elle-même, elle ne s’autoconçoit pas ou
plus comme telle : à San Martin Alto, hameau quechua à 3300 m de la chaîne andine
équatorienne, l’engagement des agriculteurs dans la production vivrière de quinoa bio
est une réussite dans le pays et sur le marché international via les débouchés du
commerce équitable. Mais dans les assemblées de discussion et de décisions
traditionnelles pratiquées dans la communauté, animées par un président du village élu
annuellement, et où l’affirmation de la culture indigène – voilà que je dis moi aussi
« indigène » – est farouchement d’actualité, si on parle des vêtements traditionnels, de
laines sombres et colorées, des maisons de terre sèche plus calorifuges mais qui
disparaissent, de la préservation des sols, de la présence de la télévision, on parle aussi
de la langue quechua beaucoup plus qu’en langue quechua. La situation n’est pas sans
similitude avec celle de la réflexion sur les conditions du développement créole aux
Antilles : « ma fille ne parle PAS créole + elle le comprend très bien + même si elle ne
le parle pas mais elle SAIT que cette langue existe ++ c’est quand même SA langue »
(Yolène, Martiniquaise).
Affaire de mémoire de langage à fleurs de discours (et de nerfs). La grande défaite se-
rait de l’oublier. Tous ces locuteurs, qui ont bien voulu faire retour sur leur biographie
langagière, n’ont rien oublié. Ils attestent combien la configuration de répertoires et
d’identités plurilingues peut être lourde de controverses, incertitudes et conflits, et
pour ces raisons particulièrement délicates à vivre et à exercer.
En dépit de la labilité des pratiques plurilingues et de la diversité des politiques
d’imposition qui les contraignent, il me semble possible d’y circonscrire très synthéti-
quement trois grands registres de signification, qui relient les (dé)compositions des
50 | Le plurilinguisme sur un baril de poudre
Sans aller jusqu’à de telles extrémités, et tirés d’une actualité récente des plus popu-
laires, ces deux commentaires parmi d’autres qui, à la télévision brésilienne (TV
Globo), ont déporté le mouvement du ballon vers celui du contact des langues lors de
la récente coupe du monde de football en Afrique du Sud, vont dans le même sens
d’une croyance à la conspiration possible masquée par l’usage plurilingue: « o fato de
compartir a mesma lingua que o juiz francês pode favorecer a Costa do Marfim ++ mas cuidado,
temos Michel Bastos que é francófono e que poderia entender tudo » (Galvão Bruno, rendant
compte du match Brésil – Côte d’Ivoire, Jornal da Copa, TV Globo, 21 juin 2010) ;
« O sul-coreano não entendeu a provocação + os urugaios parecian tão simpáticos » (Renato Peters,
commentant l’invective en espagnol d’un supporter sud-coréen par un supporter uru-
guayen, Journal National, TV Globo, 26 juin 2010).
Soumis aux vertiges du préjugé et de l’agressivité, confondu avec un dispositif
d’offensive et de jugement, le plurilinguisme est hanté par la traîtrise plausible des
communautés d’autre langue, et par suite prompt à l’attaque, pour que les langues non
comprises du plus puissant ou de l’oppresseur ne se transforment pas en bombes à
retardement contre lui.
Cela dit, et en dépit de la diversité des voies empruntées, la violence plurilingue ne se
retrouve pas seulement dans l’assaut direct des collectivités de langues non contrôlées,
mais beaucoup plus généralement dans les déplacements fractals vécus par les locu-
teurs, entre sentiment d’incompréhension, de stigmatisation et d’aliénation, sous l’effet
du processus de désappropriation ou négation identitaire auxquels les contraignent les
nouvelles dimension symboliques qui les absorbent dans des voies contraintes et des
expériences de domination.
Le discours singulier de Julien Constance, gendarme martiniquais, livre un raccourci
saisissant de la manière dont peuvent se faire jour, durement, ravageuses d’inquiétudes
et de démons, des identifications plurilingues, dans des contradictions qui les font
s’évanouir au moment même où elles se disent, excluant pourtant qu’elles soient des
mirages. De fait, Julien Constance, juste après avoir souligné que « c’est euh le créole
et le français dans lesquels je suis très à l’aise ++ les deux langues + les les deux », as-
sure de manière étrangement basculante : « c’est les deux les les deux euh
incontournablement et et je dirais le français parce que nous avons tellement parlé
français pendant des millénaires que euh des fois je je je parle le créole en français je
francise le créole ce qui veut dire que le le français est la langue dans laquelle je
m’exprime le mieux voilà des fois j’écorche mon créole au profit du français ». Tout
en déniant qu’il existe pleinement quand il s’exprime en français, comme si son con-
sentement au français avait pour revers inévitable de le mener à la déprime ou à
l’implosion : « le français n’est pas ma langue, le français n’est pas ma langue, le fran-
çais vient d’Europe, je ne suis pas européen, à aucun moment je ne suis un européen,
dans l’esprit peut-être, mais dans les faits non. »).
Certes, les identités plurilingues peuvent se nouer dans un « en commun » effectif des
langues qui les traversent. Il y a bien sûr des plurilingues heureux. Ce sont ceux qui,
combinant compétences communicatives et identifications positives avec les réper-
toires linguistiques et culturels de deux ou plusieurs communautés, convertissent leur
Patrick Dahlet | 53
pour leur rendre le sens de sa durée. L’enfant dans ce cas est une étrange proie. Devant
priser la langue de ses parents, il est enjoint à s’en déprendre presque pour neutraliser la
gêne qu’il produit et apaiser la tentation qu’il le parcourt. Une injonction qui n’exclut pas
d’extirper par l’agression physique du locuteur enfant cette langue, dont on lui dit qu’elle
ne peut l’habiter que muette, alors qu’à sa grande stupeur et bientôt à sa honte aussi, elle
comparaît spontanément et à l’aise pourtant dans son discours.
C’est par un trémolo dans une voix d’allure brisée que Serge fait retour sur la re-
cherche de ses premiers mots qu’il n’a jamais croisés: « c’est dans la langue créole que
je me suis exprimé le premier + ce qui m’avait valu la première fessée de ma vie +
parce-que nos parents pour eux le créole était source d’échec » (Serge, étudiant
haïtien). La fin prématurée d’un monde, ou plutôt de son monde. Avant de se recons-
truire. Plurilingue oui, mais peu enclin à l’extase cosmopolite: « l’enfilade des langues,
ça me fout les foies ».
Quant à Mireille, entendez bien, « on me tordait la bouche » quand elle rêvait d’être
elle au-delà du français: « Je pensais en français + je jouais en français + je / je / je
voulais m’expliquer quelque chose je me l’expliquais en français + j’excluais le créole
compl / presque complètement +++ Mais au dehors + je parlais français + j’étais
chez les soeurs / là où j’étais au jardin d’enfant + je parlais créole ++ on me tordait la
bouche (Mireille, collège haïtienne). Mireille, locutrice plurilingue comme groggy dans
une chambre de langage d’observation, prégnance du grand trou noir, des mots de
l’enfance comme la clef des songes, des écoutes qui se ferment s’il s’en tient à sa
langue, des attentes en consentant à d’autres, le soulagement enfin, peut-être, mais
dans l’impression d’un immense gâchis.
On voit, dans les perturbations de tous ces témoignages, où la langue admise, quelle
qu’elle soit, créole ou français, nahuatl ou espagnol, français ou portugais, est irréduc-
tiblement aussi la langue démise, d’une histoire oblitérée par l’autre, à quel point le
processus d’identification plurilingue peut s’avérer comme béance ou suture de con-
nexions impossibles ou assujettissantes, parce que fondées sur le manque, le manque
d’une langue, même si ce manque ne fonde pas toujours le désir.
Désinvestis d’eux-mêmes, les sujets, ébranlés par des considérations économiques et
sociales soumises à des jugements de valeurs manichéens, se figurent l’extérieur de
tout ce qu’ils savent, rivés à l’hallucination d’un double déficit, à l’instar de José
Ramirez, maître maya : « yo no sé como hablar bien mi lengua, de mi lengua, como bien evaluar
las performancias de mis alumnos, y aparte en español tampoco ». Leur plurilinguisme ne les
affirme pas positivement, eux-mêmes et leur communauté d’appartenance. Il explicite
d’abord le sentiment d’une infériorité, voire d’une déchéance statutaire, et cela même
lorsque la connaissance de plusieurs langues est perçue par leurs locuteurs comme un
signe majeur de distinction, voire comme une vertu intellectuelle et identitaire
irrécusable, comme le révèle dramatiquement la fracassante ambigüité de la formule
par laquelle M. Labonté, leader de la communauté Palikur de Saint-George de
l’Oyapok (Guyane française), qui pourtant parle fort bien quatre langues (palikur,
créole, français, portuguais), se revendique plurilingue : « malgré on on est les indiens,
mais on parle plusieurs langues sans avoir de l’école ».
Patrick Dahlet | 55
La première, c’est la tentative de la langue double : « La raison voudrait que je dise que
ma langue c’est le français, mais c’est le cœur qui va parler et++<et ma langue c’est le
créole parce que c’est la la la langue de mon pays c’est l’histoire de mon pays / est pa-
rallèle à cette langue et et c’est une langue que je trouve très belle et que je je
j’apprends à écrire et à parler + donc si on demande quelle est ma langue maternelle je
réponds avec fierté le créole » (Erika, Martiniquaise). En identifiant le sujet à une pa-
role double, et en tant que telle librement consentie, ce témoignage paraît contenir
tous les éléments d’un pluringuisme harmonieusement vécu. Mais l’expérience est
peut-être plus complexe qu’elle paraît à première vue : justification qui se présente
comme irrationnelle, donc non conforme à l’auto-perception des conditions de réalisa-
tion de la parole du locuteur au sein de la société ; disjonction entre le français,
raisonné – raisonnant, et le créole, ressenti et abîmé comme langue maternelle dans sa
propre étrangeté au locuteur, d’autant plus distante et énigmatique qu’elle est fouillée
comme cette langue, produit d’une histoire qui ne la fait pas battre comme ma langue.
Comme on s’en rend compte, le choix du dédoublement peut cacher le désarroi non
exprimé d’une inauthenticité (si le cœur indique le créole, c’est que le français est rai-
sonnablement intégré comme une langue d’emprunt qui, implacablement, implique le
locuteur dans un jeu de rôle inauthentique, le désir d’authenticité étant de son côté
difficilement exprimable par une langue maternelle créole dont le locuteur n’est pas, à
ce moment, suffisamment équipé pour s’y raconter. Le dédoublement de l’être de lan-
gage en deux compétences linguistiques étanches, peut être associé au sentiment plus
ou moins déstabilisant d’un dédoublement de soi, voire d’une schizophrénie subjec-
tive: « Mais ma langue c’est quand même le créole oui ++ ça c’est AFFIRMATIF +
ben parce que++ euh euh pfff + je sais pas c’est notre langue quand même + et puis
euh + euh +++ quand quand on est euh +++ avec tout tout tout l’esclavage tout ce
qu’il y a eu donc euh automatiquement euh + les les les esclaves euh++ ont ont eu
cette langue donc nous après on a continué + pour moi c’est c’est plutôt ça quoi + je
l’ai trouvé là la langue créole en plus » (Yolène, Martiniquaise). Il n’y a certes pas dans
cette dernière introspection des contours schizophrènes, mais encore une fois le sen-
timent d’être confronté au régime heurté et démuni de la (dé)sappropriation d’une
langue créole, déclinée comme historiquement centrale, mais accepté par loyauté
comme un héritage en plus, une modalité de consentement qui risque de rendre impos-
sible la parole double, en la divisant en deux moitiés (in)également fictives et
interdisant toute totalité nouvelle.
C’est l’invention d’une totalité nouvelle, en l’occurrence celle d’un langage qui ne serait
pas scindé en deux langues séparés, mais s’énonçant dans ce que l’écrivain russe,
Andrei Makine, bilingue russe – français, a désigné comme une langue intermédiaire
(1995 : 251) et qui correspondrait au produit de ce que l’on conçoit et étudie
aujourd’hui comme l’alternance de langues (Lüdi, 1987 ; Py, 1992 ; Lüdi, Py et al.,
1995 ; Lüdi, 1999 ; Castellotti et Moore, 1997, Castellotti, 2001 ; Lüdi et Py, 2002 ;
Porquier et Py, 2004 ; Castellotti et Moore, 2005 ; Vasseur, 2005 ; Moore, 2006),
autrement dit le passage (ir)régulier d’une langue ou d’une variété linguistique à l’autre,
qui tend à faire du croisement des langues et de signification un argument de création
littéraire – « vim me aventurar nesta terra de boms e maus odores, quando não havia ainda tanto
58 | Le plurilinguisme sur un baril de poudre
chômeur pelas ruas. Fiz de tudo. /.../ Hoje vivo de dar aulas de brésilien /.../ E nada de encontrar
o amor. O tal coup de foudre nunca me aconteceu » (A. C. Viana, 2004 : 64) – et une pratique
générico-constitutive des échanges plurilingues contemporains à l’image de ces
échantillons de messages internet et de dialogues imméditats de jeunes bilingues
plurilingues : « donc je me suis assise sur la muraille et j’ai regardé le pôr do sol, c’est
magnifique vraiment » (Lol, 16 ans) ; « On est allés à la escola do salgueiro /.../ a gente
assistiu à apuração dos pontos là, e a salgueiro ganhou !!! on est resté deux heures en train de
danser !!! foi muito bom » (Gala, 19 ans) ; « – Thiago «muitos parabéns, félicitations,
sweetheart » – Ligia « thks querido!!! resposta oficial so final de maio, mas já é bom saber q
mandaram o dossie! I'll let you know! Beijos!! » (dialogue immédiat, Ligia/Thiago). Le
mélange, l’alternance et les hybrides de langues peuvent ainsi former la toile de fond et
l’activité discursive centrale des identifications plurilingues, comme le fait encore
observer à la fois en pratique et réflexivement Julien Constance, gendarme
martiniquais : « on se dit bonjour en créole [so’w fè bagay konsa] et puis après on va se
dire alors ça se passe bien il y a invariablement un mélange des deux ».
Absorbé dans des langues qui lui font défaut, dessaisi d’une langue fondamentale, per-
due ou imaginaire, confronté à l’instabilité et aux échappées de leurs pratiques, défait
de la langue, chaque locuteur plurilingue est induit à « se faire sa langue », comme y
engageait Proust. Plus exactement à se faire sa langue entre les langues : se faire l’écho
de leurs contacts par le déploiement du mélange en réponse à l’impossibilité de se
vivre et se reconnaître dans une seule langue. Les antagonismes qui et que traversent
les tensions plurilingues au sein des sujets dessinent corrélativement la possibilité,
voire même l’exigence, comme l’attestent les témoignages cités, d’une sorte de brico-
lage identitaire, qui négocie des échanges et croisements entre les différentes
composantes linguistico-identitaires impliquées dans ces conflits.
Si la trame des tensions plurilingues offre des potentialités de ponts réciproques entre
communautés, c’est probablement dans un tel échangeur toujours imprévisible de
langues, ce champ frontière que je suggère d’appeler mixilingue plutôt que plurilingue, pour
souligner la matérialisation de ses médiations par entrelacements et hybridations, plutôt
que par additions et buissonnements. Car, en inventant des manières mêlées de
s’exprimer (compréhensibles en théorie par tous, puisque enracinées en chacun, et en
pratique par tous ceux que cette hybridité concrètement habite), le champ mixilingue,
inséré dans une éducation mixilingue, réintroduit au centre de la communication, non pas
par définition en son entier, mais assurément pas non plus en surnombre ou dans ses
bordures, le registre de cette ou ces langues d’origine qui, jusqu’alors n’avaient plus de
langue, ou si peu dans une « bouche tordue » pour ne pas se laisser aller à elle(s), libérant
ainsi des recherches personnelles et / ou collectives, explicites ou simplement suggérées
ou rêvées, d’une dynamique d’interactions et de complémentarités entre langues attri-
buées aux sujets, dont le mouvement incarnerait des possibilités de mieux être.
Encore faut-il, dans cette perspective, que les sujets parlants, et les locuteurs minorisés
en particulier, acceptent de s’hétéro-concevoir, autrement dit de se trouver changés
dans le jeu des connexions de langues, et de concevoir que le rapprochement en eux
de langues inégalement partagées, puisse être pour eux porteur d’espérances et de re-
connaissances.
Patrick Dahlet | 59
Par exemple pour agir sur les représentations, solliciter les locuteurs des langues (inter)
nationales en tant qu’usager potentiel de langues de scénarios intracommunautaires en
devenir scolaire, intercommunautaire et / ou régional, en d’autres termes, faire habiter
l’esprit et le corps de tous ceux qui sont à proximité de cette (re)construction par la
perception de ses formes et de ses enjeux, jusqu’à ce qu’elle prenne effet dans la vie
sociale, quelle que soit la durée du processus.
Et pour conforter et accompagner institutionnellement l’organisation et la validation
publiques de cette grande diversité, pourquoi ne pas songer à des modes alternatifs de
soutien qui permettent de soustraire l’indispensable socio-diversité linguistique à la
pression du marché. Par exemple, en créant des fonds d’appui, garantis par les Etats,
pour anticiper et traiter les contacts asymétriques entre langues, pour en amenuiser les
chocs en retour sur les plus faibles, ou encore en proposant des fonds de mutualisa-
tion des langues, qui seraient alimentés par le prélèvement de taxes sur le volume des
informations communiquées dans les langues d’extension internationale et la propor-
tion des usagers étrangers de ces transactions linguistiques.
Les deux mots s’entendent à égalité : politiques des subjectivités plurilingues et subjec-
tivités des politiques plurilingues. Qu’aujourd’hui, si tant est qu’elle soit possible, la
pratique des plurilinguismes doive être contractée pour l’intérêt commun, par la con-
jonction de telles garanties politico-financières et de l’activation de la productivité des
relations qu’un même sujet peut nouer dans la tension avec l’ensemble des variétés
linguistiques dont il dispose pour communiquer et se parler dans le jeu de ses identifi-
cations intimes et de leurs méandres, c’est une évidence. Comme c’en est une aussi
que de redire que le rôle des chercheurs et formateurs que nous sommes, est de fonda-
tion et d’action en ce sens.
Et c’est dans cette mesure, et avec des mesures de cette nature, que la générosité in-
trinsèque du concept plurilingue peut signifier le nécessaire et vital élargissement des
horizons : la mondialisation des univers et des points de vue, au bon sens du terme,
autrement dit de visions avec profondeur du champ de la pertinence, plus ou moins
visible, des différences que cette pluralisation (devenue instinctive ?) du globe
n’arrêterait pas d’exposer, d’assembler et de recadrer.
Enfance de nouveaux liens mondiaux ? Et si c’était la vocation discrète des plurilin-
guismes de chacun : nous rapprocher, comme l’annonce le mythe, en faisant (enfin)
rentrer au cœur de l’histoire commune, la puissance sémantique et critique que con-
jugue ensemble la séparation même de leurs composantes
.
La recherche impliquée
par les pratiques :
l’axe méthodologique
Dans le cadre d’une science qui entreprend de décrire, d’analyser et d’orienter des pra-
tiques sociales inscrites dans des processus, il existe toujours, sinon une méthodologie
explicite, au moins une question méthodologique.
Le terme méthodologie est très utilisé dans la recherche scientifique avec des significa-
tions variables. D’une part parce que la question de la méthode/méthodologie de
production de la connaissance est fondamentale : elle est l’un des garants primordiaux
de la scientificité des connaissances produites. D’autre part les significations de ce
terme sont variables, non seulement parce que les usages langagiers sont toujours fluc-
tuants, mais aussi et surtout parce que, comme on l’a vu dans la partie précédente, la
question des méthodes/méthodologies est étroitement liée à celle des cadres épisté-
mologiques et théoriques.
La méthodologie dans notre domaine, se construit dans la réflexion sur les principes,
dispositifs et procédures qui sont mis en œuvre en vue de susciter, rassembler, décrire,
analyser et interpréter les informations, les éléments, les phénomènes observés pour
produire une connaissance scientifique relevant des sciences humaines et sociales. Un
ensemble de principes constitue une méthode, qui s’actualise de façon adaptée aux
contextes, enjeux, objectifs, contenus, etc., de la recherche menée.
Il n’existe pas, dans une approche contextualisée, de méthodologie modèle ni a fortiori
de méthode standardisée applicables à tous les sujets de recherche, tous les contextes.
La construction méthodologique, nécessairement réflexive, doit d’autant plus être ex-
plicite pour remplir sa double fonction :
- organiser consciemment l’activité de recherche non seulement au départ du
projet mais également tout au long de la recherche ;
- rendre lisible la façon dont sont réunis les matériaux étudiés et dont sont
élaborés des résultats : rechercher, susciter, organiser un ensemble
d’observables (aussi appelés données, matériaux, corpus), analyser ces
observables avec des outils pertinents et autres moyens justifiés, le tout de
façon compatible avec le cadre théorique, lui-même étant explicitement inscrit
dans un cadre épistémologique.
39 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : sociodidactique, contextualisation
lieux de scolarisation, car elles entrent nécessairement en interaction avec leurs pra-
tiques scolaires – qu’ils soient apprenants ou enseignants. Ces études rendent aussi
compte du fait que les acteurs de l’école, et dans notre cas de la didactique des langues,
ne se limitent pas au seul couple trop longtemps restreint apprenant / enseignant : les
parents y ont leur place, comme les décideurs institutionnels, les formateurs et inspec-
teurs, les concepteurs de manuels ou les auteurs de manuels. C’est tout un tissu
contextuel qui est visé, aux interactions riches et complexes, aux dynamiques à explici-
ter et aux tensions évidentes, qui vont bien sûr toucher aux politiques linguistiques et
donc aux environnements politiques et idéologiques dans lesquels elles prennent place.
Toute recherche sociodidactique commence par étudier la spécificité du terrain où elle
s’inscrit, avant de chercher à mettre au jour des corrélations parfois généralisables ou
transférables entre les divers paramètres qui la composent. On arrive ainsi parfois à ten-
ter une typologie des terrains didactiques, en tant qu’ils sont le théâtre de pratiques
sociales et langagières qui peuvent se reproduire, avec des variations. La notion de varia-
tion, à la fois didactique, politique et linguistique, est ainsi promue au cœur de la
sociodidactique, dont elle constitue un fondement sur lequel est construit tout l’édifice.
C’est au nom de l’hétérogénéité et de la variation que l’accent a été mis, dans les prin-
cipes méthodologiques, sur les représentations des acteurs définis ci-dessus. En effet,
comment s’en tenir à leurs seules pratiques langagières ? Comment ne pas prendre en
compte leurs représentations des langues dans lesquelles ils évoluent ? langues de la fa-
mille, de l’entourage social, du terrain scolaire, langues institutionnelles ou intersticielles
à l’école, pour ne citer que celles-là, qui ne peuvent qu’intervenir sur leurs actions
d’enseignement / apprentissage. Cet enchevêtrement des langues en contact crée d’une
part l’identité linguistique et langagière de l’apprenant ou de l’enseignant, mais elle crée
aussi d’autre part la physionomie de la collectivité, ou des collectivités dont il est
membre. Car les langues connues, entendues, apprises, etc. s’organisent selon des rap-
ports de force, des jeux de relations, des combinaisons parfois, auxquels font écho les
comportements langagiers, les attitudes linguistiques et les représentations sur ces
langues et leurs rapports de leurs locuteurs. Louise Dabène (1994) a mis depuis long-
temps l’accent sur ces phénomènes dans son ouvrage précurseur. On y voit entre autre
comment cette approche sociodidactique nait de la rencontre entre didactique des
langues et sociolinguistique, qu’elle présente comme indissociables, du moins sur le plan
théorique, pour qui s’intéresse à la vie des langues, et en particulier à leur transmission
scolaire et comment elle induit certaines pratiques méthodologiques, parfois inspirées de
sciences connexes à la didactique : questionnaires, entretiens semi-directifs, corpus com-
plexes, méthode dite des « biographies langagières », à l’oral ou à l’écrit, enregistrements
de pratiques sociales contextualisées, mise en relation, approches comparatives, pour ne
citer que celles-là. Plusieurs d’entre elles font d’ailleurs l’objet de passages spécifiques
dans les chapitres de cet ouvrage, ce qui nous évite de les définir une à une. Elles ont en
tout cas en commun de privilégier, par leur prise en compte des diversités tous azimuts,
les traitements qualitatifs qui permettent de fouiller, d’inventer, de comparer, de décrire
en détail, d’interroger des fonctionnements, plus que de tirer des conclusions à priorités
généralisantes ou à prétention exhaustive. Ce sont des méthodologies qui apportent
Marielle Rispail, Philippe Blanchet | 67
souvent plus de questions que de réponses, car elles travaillent un objet dans le sens de
son approfondissement plus que de son éclairage « exact ».
On voit aussi comment ce qui précède détermine un certain nombre d’objets de re-
cherche40, souvent à la frontière entre plusieurs champs scientifiques, dont on pense
que, tout en le complexifiant, ils restituent au champ didactique toute sa profondeur et
son ancrage social. C’est ainsi qu’on peut étudier les pratiques langagières de certains
apprenants dans des lieux précis (la cour de récréation, les abords d’une machine à
café, …) ou des situations particulières (conseils de classe, rencontres avec des parents
…), la façon dont parlent ou écrivent les membres d’une même famille, des élèves
d’une même classe mais d’origines différentes, l’évolution d’un enfant particulier au
cours d’un temps donné, les diverses étapes qui ont amené certains acteurs sociaux à
leur place actuelle (biographie langagière des enseignants de langues, des apprenants
en cours pour adultes, …), les différences de pratiques linguistiques entre filles et gar-
çons d’un même groupe, etc. La sociodidactique s’intéressera, on s’en doute, aux
parcours des migrants, aux situations individuelles et collectives de contacts de
langues, à toutes les situations linguistiques complexes, aux évolutions personnelles
marginales ou atypiques. On voit se dessiner un champ de l’apprentissage / enseigne-
ment qui ne prend sens que sous la lumière des conditions sociales où il s’enracine, et
qui deviennent donc, de fait, une première étape méthodologique indispensable avant
toute analyse et encore plus prescription ou préconisation didactique.
Cette approche remet bien sûr en question les confortables transferts des méthodes de
langues à prétention universelle, les kits didactiques tout faits et la préférence pour le
savoir au détriment des apprenants et de leurs processus particuliers d’avancée dans
les apprentissages. Elle s’ouvre à la rencontre des cultures comme indissociable de la
rencontre des langues et interroge les déterminismes sociaux autant qu’elle veut les
faire évoluer voire les éradiquer. Son articulation avec la variété des contextes et les
aspects institutionnels, socioculturels et politiques des situations d’enseignement/ ap-
prentissage la met en contact étroit avec les champs anthropologique et sociologique.
La sociodidactique, dans ses dimensions théorique et méthodologique, s’inscrit donc au
premier titre dans le sens d’une recherche didactique impliquée socialement qui a pour
objet et objectif l’intervention sur les terrains analysés et creuse le sillon pour un enga-
gement du chercheur : c’est toujours, sous des modalités diverses, une recherche-action.
Une sociodidactologie ou sociodidactique (nécessairement « de terrain » donc est ainsi
interpellée par la question de la contextualisation à plusieurs titres :
- parce que, comme toute recherche de terrain, elle se déroule dans un certain
contexte (le terrain au sens large défini au chapitre 3 ci-après) ;
- parce que, comme toute recherche en SHS, ses résultats sont diffusés et
exploités dans divers contextes (problème de la demande sociale, de la
restitution de la recherche et de ses implications en termes de formation,
d’actions, d’interventions) ;
40 Voir partie C : Des objets de recherche variables : les principaux phénomènes étudiés.
68 |Principe tranversaux pour une sociodidactique
- parce que, enfin − et c’est là une orientation forte sur laquelle insiste le préfixe
socio-, elle étudie des phénomènes didactiques qui eux-mêmes sont pensés
comme contextualisés, voire qui visent explicitement une contextualisation.
41 Voir partie C : Des objets de recherche variables : les principaux phénomènes étudiés.
Marielle Rispail, Philippe Blanchet | 69
En ce sens, l’interdisciplinarité n’est pas une indisciplinarité : il faut des disciplines dis-
tinctes pour et suffisamment différentes pour qu’elles puissent se croiser et réaliser des
apports mutuels, au fond dans une démarche comparatiste, dont on sait qu’elle
s’applique nécessairement à des éléments à la fois suffisamment semblables et dissem-
blables pour être comparés.
La transdisciplinarité caractérise une méthode, un outil, un concept, etc., présent dans
diverses disciplines. Mais il ne peut s’agir exactement de la même méthode, du même
outil, du même concept, car ceux-ci sont nécessairement adaptés à chaque champ dis-
ciplinaire, y font sens dans un réseau de significations toujours partiellement
spécifique. L’emprunt adapté de termes et de concepts d’une discipline à l’autre est de
type transdisciplinaire. Et il faut ici se garder d’une illusion trompeuse : celle selon la-
quelle, parce qu’on partage certains éléments, parce qu’on travaille sur ce qu’on
désigne par le même terme (par exemple interaction, représentation, discours, apprentis-
sage…), il s’agirait − voire il devrait s’agir − du même élément exactement, du même
concept, du même objet. Cela n’est ni possible, ni souhaitable. La condition, l’enjeu de
l’enrichissement mutuel, résident dans la diversité relative, explicitée et articulée
d’apports partiellement distincts, par la libre adaptation à son nouveau contexte de
l’élément emprunté. L’interdisciplinarité est nécessairement hétérodoxe et les concepts
migrants se transforment.
Des exemples de croisements, de transferts et d’adaptations interdisciplinaires sont
proposés dans les récits de recherches de la partie D.
3. Les principales méthodes et leurs
techniques de construction des
observables
3.1. L’observation participante (Philippe Blanchet)
L’observation participante est une méthode principalement issue du champ de
l’ethnologie (Cuisenier, 1993 ; Lombard, 1994) où elle est largement pratiquée, no-
tamment pour accéder aux pratiques langagières au sens large (Copans, 1998). C’est la
méthode fondamentale de toute recherche ethnographique, qualitative, de type empi-
rico-inductive donc (cf. partie A chapitre 1. 2). J. Gumperz en fait un préalable à toute
recherche sociolinguistique et éducative (Gumperz, 1989 : 112 et 162). Ce type
d’enquête consiste à réaliser des observations en participant soi-même aux situations
authentiques qui les produisent, en contextes spontanés, hors de toute situation expli-
cite et formelle d’enquête. Selon le degré de connaissance du terrain (au sens complexe
défini au chapitre 2) et d’insertion dans la communauté observée, les modalités de
l’observation varient, progressant par paliers successifs vers une participation accrue et
directe aux échanges. On distingue parfois à cet égard observation participante (avec faible
implication participative) et participation observante (avec forte implication participative).
Cela peut soulever un problème éthique (comme toute démarche de recherche), car
cela implique une stratégie d’évitement de l’explicitation trop précise du motif de la
participation, quand celui-ci ne va pas de soi. En général, le chercheur est déjà, au pré-
alable, impliqué dans le terrain car c’est le cas le plus favorable à l’observation
participante et à toute recherche ethnographique, tel un enseignant qui fait une re-
cherche sur les choix de manuels dans son institution ou sur les interactions verbales
entre apprenants dans les classes de ses collègues. Mais quand ce n’est pas le cas, il
faut évidemment donner une raison à la fois crédible et honnête de sa présence mais
qui ne révèle pas précisément ni la démarche de recherche ni ce qui va être principa-
lement observé. Un exemple banal dans notre domaine consiste à se présenter comme
un stagiaire se préparant au métier d’enseignant et venant observer la pratique effec-
tive de cette profession en situation concrète. La plupart des chercheurs étant
également ou aspirant également à être enseignants, l’explicitation est honnête. Mais
elle ne dit pas que parmi tout ce qui est observable dans cette perspective, l’un des
phénomènes qui y est inclus fera l’objet d’une attention privilégiée. Et lorsque l’on
passe, ensuite, comme c’est presque toujours le cas, à une phase de recherche explicite
par entretiens, questionnaires, etc., on doit alors préciser ce qui a retenu l’attention au
premier chef. L’explicitation de la démarche est donc progressive mais réelle et
l’anonymat garanti aux témoins renforce le respect qui leur est dû. Les témoins sont
74 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
des acteurs et pas seulement des « informateurs », ne sont pas des « cobayes » mais de
véritables producteurs de savoirs.
Les avantages de ce type d’enquêtes sont nombreux et particulièrement efficaces en
termes scientifiques (Blanchet, 2000 ; Juillard, 1999). Il permet de réduire au maximum
le paradoxe de l’observateur (la présence de l’observateur modifie les pratiques qu’il sou-
haite observer), puisque le témoin ne se sent pas observé ; il permet en outre
d’intégrer à l’analyse et d’assumer les effets produits par le sujet-chercheur dans son
interaction avec les témoins, de comparer les pratiques par rapport au discours sur les
pratiques ; il permet d’enquêter de l’intérieur des situations étudiées(s) et donc
d’observer des phénomènes habituellement peu perceptibles pour des regards exté-
rieurs. En revanche, l’observation participante présente certaines limites : la difficulté
d’enregistrement des faits observés par de simples notes à la volée (la présence d’une
caméra, d’un micro ou même d’un simple calepin n’étant pas fréquente dans les situa-
tions de communication usuelles et les enquêtes à appareil caché étant
déontologiquement discutables) ; l’implication personnelle de l’observateur, qui peut
parfois induire une perception très orientée des phénomènes sans recul ni métaposi-
tion suffisante ultérieurement (à l’analyse) ; les dimensions réduites d’un terrain qui,
certes riche de la complexité des paramètres observés finement et en profondeur dans
leur contexte, ne permet pas nécessairement une significativité voire une représentativité (si
tant est que l’on tienne à cette perspective) suffisantes.
C’est la raison pour laquelle peuvent être utiles des procédures de distanciation, de
comparaison et de contre-vérification par d’autres types d’enquêtes (semi-directives et
directives) qui permettent des traitements comparatifs voire quantitatifs.
même dans ce contexte. Des cas de figure intermédiaires peuvent se répartir sur un
continuum {entretien non directif (ouvert) <−> questionnaire directif (fermé)}.
L’intérêt majeur de ce mode de construction des observables est la collecte
d’informations attendues, estimées nécessaires à la compréhension du cas étudié, selon
un cadre plus ou moins précis qui permet l’addition et le traitement quantitatif des obser-
vables recueillis auprès de différents et parfois nombreux témoins. On recueille des
informations préalables sur les caractéristiques sociologiques (dans notre domaine,
surtout sociolinguistiques) des informateurs (âge, origine, profession, langues, etc.), qui
permettront d’établir d’éventuelles corrélations avec certaines réponses, ainsi que
d’établir un éventuel échantillonnage statistique (y compris à partir d’un entretien se-
mi-directif, car les informateurs proposent en général des réponses regroupables en
types communs par la méthode des classes d’équivalences). On peut choisir ses informa-
teurs, si l’on pense qu’il est important d’équilibrer variables et invariants (par exemple,
si l’on fait varier la tranche d’âge, on garde la même localisation, etc.), et sachant qu’il
est toujours important de ne pas se limiter au type d’informateurs que le chercheur se
représente a priori comme symptomatique de ce qu’il recherche (sinon, il confirme
artificiellement ses idées préconçues). Enfin, l’entretien semi-directif permet également
de recueillir du discours, du matériau linguistique plus autonome sinon plus spontané
que lors de réponses fermées (en tenant compte de la situation d’entretien).
La difficulté principale de ce type d’enquête est double : premièrement, le pré-
établissement du questionnaire induit des réponses, notamment dans le cas de
l’enquête directive où même les réponses sont préparées (démarche à tendance hypo-
thético-déductive) ; on reproche souvent à ce genre d’enquête de refléter davantage les
représentations a priori du chercheur que celles des informateurs : nous avons tous
fait l’expérience de notre insatisfaction lorsque nous avons dû répondre ce genre de
questionnaire (dans des sondages notamment) ; deuxièmement, la situation explicite et
plus ou moins formelle de l’enquête développe des attitudes et discours d’ajustement du
témoin à cette situation même et à l’enquêteur (paradoxe de l’observateur) ; le témoin,
parfois réduit au rôle d’informateur, est ainsi conduit à présenter de lui la facette qui
lui semble le mieux convenir au rôle social qu’il joue, à proposer des réponses qu’il
présuppose attendues par l’enquêteur, sollicitant même souvent de ce représentant
institutionnel du « savoir » la confirmation qu’il a effectivement fourni « la bonne ré-
ponse ».
Ces biais méthodologiques peuvent toutefois être atténués par des préalables essentiels
pour en atténuer les inductions et les lacunes (Blanchet, 2000). La succession des
étapes méthodologiques offre de bonnes possibilités. Le problème du biais introduit
par le pré-établissement des questions peut ainsi être atténué de deux façons. L’une,
méthodologique, en faisant se succéder les enquêtes dans l’ordre participante > semi-
directive > directive > interprétation comparative. Les questionnaires sont alors fon-
dés sur des indices recueillis sur le terrain (et non dans les spéculations du chercheur),
de façon de plus en plus cadrée. Les enquêtes à caractère plus ou moins directif ne
viennent alors que contre-vérifier sur des échantillons plus larges d’informateurs la
portée plus générale des observations recueillies par interactions participantes. En
outre, la comparaison entre les divers résultats recueillis par les différents types
76 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
d’enquête sur un même terrain ou sur des terrains différents (mais comparables) met
en lumière les éventuels effets d’orientation des réponses induits par le mode
d’observation ainsi que les spécificités frappantes du cas examiné. Le recours à une
documentation générale présentant des données globales (historiques, sociologiques,
etc.) contribue à cette démarche et fournit des points de repères essentiels à la contex-
tualisation des faits observés 43: le chercheur peut alors croiser les informations, les
renvoyer en interrogations complémentaires auprès des témoins, dégager une interpré-
tation. Tenir compte de l’effet d’interaction et du contexte, c’est également poser des
questions d’abord indirectes : il est plus facile de faire parler les gens sur les autres que
sur eux-mêmes et de contourner ainsi les accommodations personnelles du témoin à
l’enquêteur, qui amènent le témoin à se présenter au chercheur tel qu’il suppose que le
chercheur le souhaite (on lui répond ce qu’on croit qu’il attend pour lui faire plaisir ou
ce qu’on croit convenable de dire dans cette situation). C’est surtout ne pas imposer
de catégories et de désignations préconçues mais faire émerger celles de l’acteur social
pour les réutiliser et éventuellement les confronter ultérieurement à d’autres. Des
questions se recoupant et se contre vérifiant permettent de déceler les paradoxes, os-
tentations et dissimulations dans les réponses. L’utilisation de questionnaires élaborés
par d’autres chercheurs, avec ou sans adaptation selon le besoin, permet également de
réduire le manque de mise en question critique du chercheur hyper-spécialisé et trop
impliqué sur un terrain.
Une autre forme d’atténuation des biais est possible en considérant que l’essentiel visé
est la pratique entre les acteurs sociaux dans sa relativité au contexte spécifique de
l’échange langagier. Et ceci qu’il s’agisse des conversations du vécu « ordinaire » ou du
dialogue chercheur/témoin, en ce sens que la rencontre des subjectivités,
l’intersubjectivité, est le meilleur garant contre la subjectivité unilatérale (au mauvais
sens du terme). Or une enquête directive laisse une place énorme à la parole du sujet
enquêteur et une place minime à celle du sujet informateur, contraint de se fondre
dans le cadre préconçu par l’enquêteur. En fait, toute théorie interprétative (dite aussi
herméneutique44, cf. partie A chapitre 2) est nécessairement fondée sur une démarche
interactionnelle (dite aussi dialogique)45. C’est bien par l’examen prioritaire de la com-
plexité de diverses situations contextualisées que l’on tend vers une vision plus
générale, laquelle n’a d’intérêt scientifique et social qu’en tant qu’elle permet de com-
prendre, de prendre en compte et de résoudre éventuellement des problèmes
effectivement vécus sur le terrain par les acteurs sociaux, dans leurs dimensions con-
crètes et situées.
43 Voir : Contextualiser les savoirs en didactique des langues et des cultures (J.-C. Beacco).
44 Voir : Les vicissitudes et tribulations de « Comprendre » : un enjeu en didactique des langues et cul-
tures? (D. de Robillard).
45 Voir : L’échange avec les acteurs comme méthode de production de données pour la recherche sur
46 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : analyse des données (de recherche),
corpus (de recherche), entretien (de recherche) directif, semi-directif, non-directif, groupe focus.
47 En formation à la recherche, la collecte de données comparables confiée simultanément à plusieurs
interviewers permet d’observer des différences individuelles dans leur aptitude à recueillir l’information.
Elles peuvent ensuite faire l’objet d’une analyse critique. Cette démarche peut également être utilisée lors
d’une pré-enquête préparatoire dans une équipe.
78 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
reposant sur du langage est foncièrement engagée par l’activité langagière et la pré-
sence de subjectivèmes, terme qui définit les unités linguistiques porteuse de
subjectivité (Kerbrat-Orecchioni, 2002 ; Pastor de la Silva, 2000).
À partir d’un article ancien de Tzvetan Todorov (Todorov, 1970), Raluca Balatchi
(Balatchi, 2005), montre comment le je engendre deux types de discours, personnel /
impersonnel, en fonction d’une valeur indicielle affectée au pronom. Le discours
personnel se caractérise par la présence active de deux interlocuteurs (je/tu), ce qui en
fait un discours-action où l’énoncé se confond à l’énonciation. Dans le discours
impersonnel, il y a absence d’action, on ne fait généralement que se souvenir, ou
raconter ; je n’est pas le je qui parle bien qu’il s’agisse d’un seul locuteur et l’énoncé se
sépare de l’énonciation. À la différence du discours impersonnel, le discours personnel
utilise un je à forte valeur indicielle. Rendre une valeur indicielle égale à zéro,
reviendrait à l’effacement du locuteur en parlant de soi comme un il, en remplaçant
l’agir par un dire, en se détachant de sa subjectivité. Cette distanciation de soi est-elle
techniquement réalisable ? On peut en douter dans la mesure où même le dire est de
l’agir. Chercher à faire disparaître la subjectivité dans l’activité évaluative, c’est tenter
de faire disparaître le langage même. Or l’entretien de recherche se caractérise selon le
modèle (de directif à non-directif), par le principe du récit de vie à forte implication de
je évaluatif (bien/mal ; juste/injuste ; beau/laid ; correct/incorrect ; grand/petit ; long/court ;
gros/mince, réussi/échoué…) et d’une participation active ou passive de la personne qui
conduit l’entretien (l’interviewer), qui peut conduire à la nécessité d’utiliser une
approche à la fois passive et active (Wichroski, 1996).
La problématique de la subjectivité est peut-être une fausse piste, un débat inutile qui
conduit à tenter de se défaire du discours par la technique (décentration de
l’interviewer hors du contexte qui se faisant risque de laisser échapper des indices ;
échantillons représentatifs des populations de sujets dont les critères multiples ne peu-
vent que conduire à considérer que chaque individu est unique, niant renvoyant ainsi
le sujet collectif au sujet psychologique).
L’avantage de la recherche dans le domaine social du langage que représente
l’enseignement/apprentissage des langues, est de pouvoir disposer des outils théo-
riques et techniques de la connaissance du langage. Ici, la distanciation s’obtient par la
conscience de la subjectivité du langage et par son traitement analytique dans le dis-
cours analysé, et dans la compréhension de l’interaction socio-langagière dans laquelle
l’interviewer agit. On peut ainsi définir l’entretien comme une interaction verbale avec
un objectif spécialisé préalablement posé par l’interviewer, à travers le canal direct de
la relation de face ou les canaux médiatisés de la relation virtuelle, qui le différencie
d’une discussion courante.
48 Voir l’article de Michel Lobrot « Directivité et non – directivité », dans Percepire, creare, divenire...
(http://www.nume.it/000034it_michel-lobrot.php, 05/08/09).
49 Voir par exemple : http://www.greenfield.com/content/index.html.
80 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
nateur, des ordinateurs en réseau, un logiciel, ne sont que des outils construits qui as-
semblent dans des algorithmes, des savoirs et du langage, c’est-à-dire, des réalisations
de comportements et de discours. Encore une fois, même dans l’hybridation de
l’interactivité homme/machine/savoir, la subjectivité est un élément constitutif des
liens virtuels et des interactions réelles.
De une à deux heures, le déroulement du groupe de discussion animé par un intervie-
wer se trouve en général plus réduit en ligne car la lassitude des participants est plus
forte.
52 L’analyse propositionnelle du discours a été élaborée par Rodolphe Ghiglione pour éliminer certains
biais des analyses de contenus thématiques comme la définition arbitraire des unités de codage et le choix
subjectif des catégories sémantiques d’interprétation.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 83
53 Le logiciel Tropes, par exemple, s’appuie sur une analyse morphosyntaxique, une analyse du lexique et
des réseaux sémantiques (avec un éditeur d’ontologie), pour catégoriser les textes qui lui sont soumis. Il
peut fournir une extraction terminologique, une arborescence de la référence, une analyse chronologique
du récit et les résultats sont présentés sous la forme de rapports ou de représentations graphiques hyper-
textes http://www.acetic.fr/demo.htm, 25/08/09). Une liste de logiciels pouvant servir à l’analyse du
discours et à l’analyse de contenu est en élaboration sur Wikipédia
(http://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_du_discours, 28/08/09).
54 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : mode – multimodalité, intervention,
56 Chacune de ces fonctions comporte deux pôles : pour la fonction Task area : attempted answers /
verbaux de l’enseignant mis en évidence sont classés en 10 catégories: Initiation : questionne (1), instruit
(2), donne des directives (3) ; Réponse : accepte des sentiments (4), encourage (5), accepte ou utilise des
idées de l’élève (6), critique ou justifie l’autorité (7). L’élève répond (8) ou prend la parole pour exprimer
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 85
s’appuyant sur le modèle de Flanders, Sinclair et Coulthard (1975) ont développé leur
propre modèle d’analyse de la communication en classe. Celui-ci est organisé en rangs
hiérarchisés : la leçon, la transaction, l’échange, le mouvement, l’acte. Chaque rang
(excepté le plus élevé) est un élément constitutif du rang de niveau supérieur dans la
hiérarchie. Le rang « mouvement », par exemple, permet d’étudier de manière précise
la structure des échanges. Les trois fonctions principales de ce rang sont : l’initiation,
la réponse et le feedback. Le rang « acte » spécifie chaque acte de parole. Le modèle
répertorie les vingt-deux actes pédagogiques les plus courants en classe. Ce type de
grille d’analyse, initialement appliquée à des interactions de classe traditionnelle, est
transférable à des interactions en ligne.
Avec l’apparition de nouveaux systèmes de communication, dans les années quatre
vingt-dix, les dispositifs d’enseignement à distance se sont considérablement dévelop-
pés. Dès lors, des recherches sur cette nouvelle forme de communication ont été
menées et ont abouti à l’émergence de nouveaux modèles permettant l’analyse de la
communication pédagogique en ligne. Par exemple, Henri (1992) propose un modèle
d’analyse du contenu de la communication médiée par ordinateur (dorénavant CMO)
permettant de comprendre le processus d’acquisition du savoir. Il est constitué de cinq
catégories : la participation, l’interaction, la dimension sociale, la dimension cognitive
et la dimension métacognitive. Cette dernière catégorie reste, selon certains chercheurs
(Gunawardena et al., 1997), difficile à explorer à partir d’une analyse de contenu.
Ces grilles d’analyse du contenu de la communication en ligne ont été établies à partir
de corpus asynchrones (des forums pour la plupart). En synchronie, les chercheurs
ayant appliqué l’analyse de contenu se sont plutôt tournés vers les grilles d’analyses de
classes « traditionnelles » et les ont adaptées. Peuvent être cités les travaux de
Pilkington (2004, 1999) qui a adapté la grille d’analyse de Sinclair et Coulthard pour
l’étude de la CMO. Puis, dans le cadre de sa thèse, Ling (2006) applique le modèle de
Pilkington à un corpus d’échanges par chat afin d’étudier l’impact de la CMO
synchrone sur le processus d’apprentissage. Le modèle peut-être appliqué afin
d’étudier à la fois le processus et le produit de la communication.
Les travaux évoqués jusqu’ici sont représentatifs de l’analyse de contenu en tant que
technique de recherche descriptive. Mais à partir des années quatre vingt dix, Ahern,
Peck, and Laycock (1992) ont eu recours à l’analyse de contenu dans le cadre de re-
cherches expérimentales. Ils ont évalué l’impact du discours pédagogique de
l’enseignant en ligne en contrôlant la variable « discours de l’enseignant ». De même,
Quintin (2008) a mené une recherche expérimentale appliquant l’analyse de contenu à
des interventions d’enseignants en ligne en contrôlant les variables comportementales
de ces enseignants (socio-affectif, pédagogique et organisationnelle).
Nous venons d’exposer les principales recherches ayant utilisé l’analyse de contenu
selon qu’elle s’intéresse au produit ou au processus de la communication et selon
qu’elles soient de type descriptif ou expérimental. Dans la suite de ce chapitre, nous
nous concentrerons sur l’analyse de contenu en tant qu’outil méthodologique
ses propres idées (9). Enfin, les silences (10) sont des moments également pris en compte dans ce modèle
d’analyse.
86 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
s’intégrant dans une démarche que nous qualifierons de type à la fois descriptif et
naturaliste de la communication pédagogique en ligne. Par naturaliste, nous voulons
dire que nous nous appuyons sur des données issues de situations d’enseignement/
apprentissage authentiques (c’est-à-dire déterminées par les objectifs pédagogiques de
la formation et non par les recherches susceptibles d’être conduites en aval).
3.4.2.1. La préanalyse
Elle concerne l’organisation de la mise en œuvre de l’analyse de contenu liée à la for-
mulation d’hypothèses et d’objectifs de recherche. Nous incluons dans cette première
phase, le recueil de données et leur transcription. Les questions de recherche vont ai-
der à choisir la quantité et la qualité des données dont le recueil est souhaitable. Ainsi,
dans le domaine de l’enseignement-apprentissage des langues en ligne, nous pouvons
prendre comme exemple la question de recherche suivante : comment s’opèrent les
échanges pédagogiques entre quatre locuteurs (2 enseignants et 2 apprenants) dans un
environnement vidéographique synchrone ?
Selon Bardin, les principales règles à respecter au cours de la pré-analyse pour la cons-
titution du corpus sont les suivantes :
- règle de l’exhaustivité des catégories choisies : elle est à apprécier, à chaque
fois, en fonction des questions de recherche que l’on pose.
- règle de représentativité : le chercheur peut avoir recours à un échantillonnage
(plus manipulable) pour chercher à rendre compte de l’ensemble des données.
Les analyses effectuées à partir d’un échantillon représentatif doivent être
généralisables à l’ensemble du corpus;
- règle d'homogénéité : le chercheur doit chercher à obtenir des données
comparables entre elles (à partir par exemple de l’application d’une grille de
critères) ;
- règle de pertinence : les données recueillies doivent correspondre aux
objectifs de l’analyse et pouvoir répondre à la question posée.
(diffusion, etc.). Outre les informations liées à la recherche, le document pourra contenir des informa-
tions sur les personnes ayant accès aux données, sur la manière dont elles seront anonymisées etc.
60
Eudico Linguistic Annotator
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 89
Le souci de lisibilité du tableau conduit à opérer des choix dans les données réperto-
riées : ici, par exemple, seuls deux plans d’image ont été sélectionnés, à savoir ceux qui
montrent les gestes « quasi-linguistiques » (Cosnier, 1989) considérés comme équiva-
lents à des tours de parole verbaux dans la recherche menée. À partir d’un tel
décompte des opérations discursives, le chercheur pourra, par exemple, quantifier
chaque type d’acte réalisé par l’enseignant afin d’évaluer la manière selon laquelle se
déroule la communication et d’obtenir ainsi des indications sur la manière dont le
cours de langue en ligne est orchestré. (cf. partie C Le codage).
La représentation sous forme de tableau facilite l’étape de codage du corpus. On peut
conseiller ici d’intégrer la transcription dans un tableur si l’on se destine à effectuer
une analyse de contenu car le décompte des occurrences en sera plus aisé.
Une fois la grille de catégories obtenue, il convient d’appliquer ces catégories à des
unités. Celles-ci correspondent à des segments délimités. L’organisation du codage
consiste donc à choisir des unités, à les dénombrer et à les classer dans des catégories.
Le codage aboutit « à une représentation du contenu, ou de son expression, suscep-
tible d’éclairer l’analyste sur des caractéristiques du texte qui peuvent servir d’indices ».
(Bardin, 1977 : 102).
90 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Les unités peuvent être délimitées selon des critères stylistiques/syntaxiques, ou sé-
mantiques. Les unités stylistiques (le mot, la phrase, la proposition, le paragraphe etc.)
permettent de délimiter le texte de manière formelle. Concernant la CMO asynchrone,
le message est l’unité stylistique la plus souvent employée (Ahern et al., 1992). L’unité
message permet notamment d’étudier aisément la structure de l’interaction. Henri
(1992) propose d’aborder cette forme de communication en utilisant une unité de sens
ou unité thématique. Mais choisir pour unité, l’unité de sens uniquement ne permet
pas de répondre au critère d’objectivité. En effet, le choix du seul critère de sens court
le risque d’une subjectivité trop forte voire inconsciente. Rourke et al. (2001), propose
quant à eux, de fusionner unité thématique et unité stylistique en fonction des objec-
tifs de recherche et de la granularité des analyses envisagées. Quintin (2008) a effectué
un tel codage en choisissant l’unité « paragraphe » pour unité formelle et « l’acte de
parole » comme unité thématique, dans l’objectif de refléter au mieux les intentions
communicatives des interlocuteurs.
Concernant la communication en ligne synchrone, et afin de répondre à la question de
recherche proposée dans ce chapitre à savoir : comment s’opèrent les échanges péda-
gogiques entre quatre locuteurs (2 enseignants et 2 apprenants) dans un
environnement vidéographique synchrone ? Opter pour la combinaison des formes
d’unités stylistiques et thématiques semble également pertinent. L’unité formelle serait
alors le tour de parole et l’unité thématique serait « l’acte de parole » ou
« l’intervention » (Kerbrat-Orecchioni, 1996).
La figure ci-dessous montre une manière de coder un corpus de communication péda-
gogique vidéographique synchrone.
Dans cet exemple, chaque tour de parole est étiqueté à partir de la grille de Sinclair et
Coulthard (1975). Le tour de parole 41, par exemple, est composé de deux mouve-
ments (le premier est une réaction à la réponse de l’apprenant SAR (Feedback), le
second est une initiation). Ce tour de parole est composé de trois actes : acceptation
« oui en Afrique du nord oui », puis une évaluation « oui » suivie d’une sollicitation
« est-ce que vous vous souvenez la semaine dernière on a dit le Maroc, la Tunisie et
euh l’Algérie font partie des pays qu’on appelle les pays du ». Ce type d’analyse permet
de répondre à la question de recherche concernant la manière dont se déroulent des
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 91
Logiciels cités
Camtasia, Site de l'éditeur du logiciel :
http://www.techsmith.fr/camtasia.asp?CMP=KgoogleCSfr&gclid=CJ3j2d7A-
5sCFQUUzAodIVb7yQ
ELAN, Site de l'éditeur du logiciel : http://www.lat-mpi.eu/tools/
Screen Video Recorder, (2004), Site de l'éditeur du logiciel :
http://www.wordaddin.com/screenvcr/INDEX.html.
Windows Live Messenger, Site de l'éditeur du logiciel :
http://www.windowslive.fr/messenger/.
61 Voir : Enquêtes semi-directives et directives avec ou sans entretien (chap. 3. 3. 2, même partie). ;
L'échange avec les acteurs comme méthode de production de données (entretiens et groupes de discus-
sion) (chap.. 3. 3. 3). ; De l’analyse du discours à l’analyse des discours en situation comme outil de
recherche et d'intervention (chap.. 3. 3. 6).
92 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
62 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : distance transactionnelle, interactivi-
té, analyse de discours médiée par ordinateur (ADMO), corpus.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 93
Selon les objectifs et les questions de recherche choisies, les références théoriques qui
seront convoquées seront en partie différentes. Dans la suite de ce chapitre, nous re-
tiendrons l’angle du tutorat et illustrerons plus précisément la question du lien social
avec et entre les apprenants.
63 Ceci dans le but d’éviter de partir trop précocement vers des analyses très fouillées risquant de se révé-
ler peu rentables si par la suite leur structuration d’ensemble n’a pas été prévue en amont.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 95
systèmes comme par exemple la plateforme dokeos et le chercheur peut y accéder sans
crainte de déperdition aucune, ce qui cependant n’est pas sans soulever un certain
nombre de problèmes éthiques et juridiques. Le chercheur veillera donc à bien ano-
nymer ses données (en retouchant les copies d’écran par exemple), à éventuellement
les protéger par un mot de passe sur un cd-rom à part, ou encore à obtenir
l’autorisation des personnes concernées.
Dans une optique méthodologique sémio-linguistique, le chercheur peut avoir intérêt
à récupérer :
- la structure de l’ensemble afin de pouvoir étudier la mise en écran et la mise
en rubriques ;
- la structure des échanges (en vue d’une analyse des interactions) ;
- l’ensemble des pièces jointes et déposées sur la plateforme afin d’analyser la
mise en média ;
- le contenu intégral des messages afin qu’il puisse étudier la mise en discours.
Selon Herring (2004), le recueil des données pourra se faire de différentes manières :
en fonction du hasard (par ex. les 3 premières interactions, les 3 du milieu et les 3 der-
nières de chacun des modules de la formation), d’un thème (par ex. un fil de
discussion particulier), d’une certaine temporalité (par ex. une semaine d’échanges),
d’un phénomène (par ex. les messages humoristiques), d’un individu ou d’un groupe
(par ex. les messages des femmes), par commodité (par ex. ce qu’il a été possible de
recueillir). Toujours selon Herring (2004), temporalité et thématique sont deux asso-
96 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
ciations privilégiées. Dans tous les cas, par sa taille et sa nature, l’échantillon retenu
doit permettre de répondre aux questions de la recherche et rester maîtrisable dans la
durée impartie pour la recherche.
Des échanges (entre apprenants ou avec les tuteurs) ont également souvent lieu en
dehors du forum et il peut être intéressant que le chercheur y ait le plus possible accès
mais ce recueil de conversations « privées » n’est pas aisé.
Dans une démarche compréhensive, on s’intéresse aussi à l’avis des participants, qui
vient porter un éclairage différent sur les échanges linguistiques étudiés sur la plate-
forme. Ces points de vue d’utilisateurs sont recueillis à partir d’entretiens (ou faute de
mieux, de questionnaires) avec les différents participants à ces échanges asynchrones
afin d’avoir non seulement connaissance de ces échanges hors forum (et éventuelle-
ment d’y avoir accès, s’il s’agit de courriels), mais aussi de prendre en compte ce que
les utilisateurs savent, pensent ou ressentent. Selon ce que l’on cherche à étudier, des
observations audio-visuelles peuvent s’avérer également utiles pour analyser les pos-
tures d’un utilisateur devant l’environnement informatique.
Des chercheurs en informatique (May, George et Prévôt, 2008) développent actuelle-
ment des outils qui visent à faciliter l’analyse et la visualisation des traces de
communication médiée par ordinateur, comme par exemple la plateforme TrAVis
(Tracking Data Analysis and Visualisation). Ces outils très prometteurs faciliteront gran-
dement le travail du chercheur en CMO en lui donnant accès à différents types de traces
comme notamment les interactions homme-machine (comme les différentes actions des
utilisateurs de l’interface d’un forum) et les interactions homme-hommes médiatisées par
la machine (comme les différents échanges entre les participants à travers les modes de
communication mis à disposition – tchat, forum, vidéoconférence, etc.).
64 Nous ne développerons pas ici la mise en écran illustrée dans Develotte 2006.
98 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
garder en mémoire que la question du droit à la reproduction dans le cadre des forma-
tions en ligne peut aussi être un frein à la publication de fichiers extérieurs.
Le chercheur pourra aussi s’intéresser à la mise en rubriques et, en particulier, aux ru-
briques autres que celles consacrées aux cours. En effet, dans une rubrique consacrée
à la présentation des différents membres de la communauté, les tuteurs peuvent per-
sonnaliser leur présentation en mettant par exemple un autoportrait humoristique de
lui-même, ils peuvent aussi lire les présentations des étudiants et y faire référence par
la suite au cours d’échanges plus cognitifs. Une rubrique récréative, si elle existe, où
tuteurs et apprenants peuvent échanger librement, peut également favoriser
l’établissement du lien social.
Afin de mettre en évidence le degré d’interactivité dans une rubrique particulière, il peut
être intéressant de repérer la structure des interactions. Il s’agira alors de distinguer et de
comptabiliser les monologues (messages indépendants), les dialogues (échanges de deux
interlocuteurs) apprenant/tuteur, à deux tours de parole, à trois tours de parole ou plus,
les dialogues apprenant/apprenant (à deux tours de parole, à trois tours de parole ou
plus), les polylogues (échanges de trois interlocuteurs ou plus), à trois tours de parole ou
plus. Il sera alors possible d’étudier pourquoi dans une rubrique on observe de nom-
breux polylogues apprenant/apprenant alors que dans telle autre, les interactions ont
essentiellement eu lieu entre le tuteur et les apprenants ou encore que telle rubrique pré-
sente une suite continue de monologues et très peu d’interactions.
Figure 2 : Copie d’écran d’un forum de maîtrise de FLE (2004-2005) présentant une succession
de monologues et un dialogue apprenant/apprenant à plusieurs tours de parole.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 99
De façon à pouvoir affiner les résultats issus de ces premiers niveaux de recherche, il
conviendra alors de s’intéresser au contenu linguistique de chacun des messages rete-
nus pour le corpus d’étude et de procéder à une analyse discursive. Le chercheur
pourra observer par exemple les marques de la présence de l’énonciateur dans les con-
signes afin de voir si le tuteur personnalise ses messages dès la rédaction des
consignes. Il pourra aussi pointer les termes d’adresse au destinataire afin d’étudier le
mode sur lequel le tuteur choisit de s’adresser à ses apprenants. S’adresse-t-il à eux par
leur prénom ? L’ouverture des messages est-elle ritualisée par un terme générique
comme « Bonjour » ou au contraire personnalisée en fonction du destinataire ? Il sera
intéressant également d’analyser la manière dont ces pratiques influent sur le compor-
tement discursif des apprenants. Pourront aussi être étudiés les différents tons
employés par le tuteur, comme par exemple le ton humoristique. L’observation de
l’ensemble de ces pratiques discursives permettra ainsi de révéler l’éthos développé par
chaque tuteur.
Le format de ce chapitre ne permet pas de préciser plus avant l’application de ces dif-
férents outils méthodologiques qui s’appuient sur la matérialité des discours pour en
dégager des régularités, des ruptures, aptes à mettre au jour certaines caractéristiques
du comportement des acteurs de la formation en ligne. Ces entrées (en particulier les
entrées énonciatives) peuvent être appliquées à l’étude des entretiens des acteurs dont
on a précédemment évoqué l’utilité. Elles peuvent être également complétées (selon
les corpus) par des outils sémiotiques plus spécifiques (analyse de l’image par
exemple)65
65 Des corpus d'interactions de formation en langue en ligne sont également traités par d'autres équipes :
- Laboratoire ICAR - Interactions, Corpus, Apprentissages, Représentations
Unité Mixte de Recherche -UMR- 5191 (activités scientifiques pluridisciplinaires focalisées sur l’analyse
multidimensionnelle des usages de la langue dans l’interaction et dans le texte, appréhendée de manière
outillée sur de grands corpus de données orales interactives et textuelles), http://icar.univ-lyon2.fr/
(27/04/10), la plateforme Corpus de langues parlées en interaction (CLAPI) du laboratoire ICAR est un
environnement d’archivage et d’analyse de corpus d’interactions enregistrées en situation authentique, qui
comporte environ 75 corpus, soit plus de 150 heures de données transcrites ou 2,5 millions de mots, et
fournit un ensemble croissant d’outils pour la construction de ce type de corpus, pour leur stockage, leur
communication et pour leur analyse qualitative et quantitative. L’orientation scientifique de CLAPI est
déterminée par l’une des spécialités scientifiques traditionnelles du laboratoire ICAR, l’analyse interac-
tionniste de faits de langue et de discours en contexte ;
- GALANET et GALAPRO, dans le domaine de l'intercompréhension, c'est-à-dire une forme de com-
munication plurilingue où chacun comprend les langues des autres et s'exprime dans la ou les langue(s)
romane(s) qu'il connait, développant ainsi à différents niveaux la connaissance de ces langues. L'élabora-
tion d'un projet commun en ligne motive la communication qui est facilitée par les tuteurs et la mise à
disposition de nombreuses ressources, http://www.galanet.eu/ (27/04/10) ;
- le français en (première) ligne : création et tutorat d'activités multimedias pour des apprenants distants ;
cette recherche-action qui a débuté en 2002, consiste d'une part à faire réaliser par des étudiants en master
de français langue étrangère (FLE) des tâches multimédias pour des apprenants étrangers distants, d'autre
part à susciter des échanges en ligne entre les deux publics autour de ces tâches, http://w3.u-
grenoble3.fr/fle-1-ligne/ (27/04/10).
Voir également le site de la banque de corpus Mulce, expliquant la méthodologie de constitution des
corpus d’apprentissage et des outils d’analyse associés. Site destiné aux contacts entre chercheurs désirant
partager leurs corpus et analyses sur les situations d’apprentissage en ligne, http://ubpweb.univ-
bpclermont.fr/HEBERGES/mulce/ (27/04/10).
100 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
66 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : langue maternelle, langue étrangère,
dérivent varient selon les cultures, les contextes et les objectifs, il existe toujours un
noyau minimal de consensus partagé par les acteurs. Ceux-ci se réunissent dans un
même espace, avec une régularité préétablie et pour des périodes fixes de temps afin
de mener à bien un programme déterminé par l’institution. Ce programme est organi-
sé par un expert qui en assume la responsabilité tout en sachant que « les interactants-
apprenants ont besoin de sa collaboration pout parvenir aux résultats escomptés » et
que « les interactions ont une visée cognitive : il s’agit d’enseigner-apprendre un avoir
ou un savoir-faire » (Cicurel, 2001 : 22).
Les apprenants partagent le contrat de classe de façon consciente ou tacite. Ils savent
qu’ils doivent produire du discours pour mettre à l’épreuve leur interlangue et pour
obtenir, petit à petit, une plus grande fluidité de parole. Ils veulent également surmon-
ter le paradoxe bien connu selon lequel : « Il faut à la fois interagir pour apprendre et
apprendre pour pouvoir interagir » (Vasseur, 1993 : 26). « Les échanges verbaux sont
ainsi la condition et le résultat de l’appropriation de la L2 » (Giacobbe, 1994 : 30). Un
autre aspect du contrat à considérer c’est l’utilisation de la LM en classe. Dans la cul-
ture argentine où l’influence de la méthodologie audio-visuelle a été très importante, il
existe une idée très répandue selon laquelle l’omission de la LM dans l’enseignement
d’une LE facilite son apprentissage. Cependant cette croyance n’est pas exclusive de
notre pays. R. Phillipson (1992 : 185), par exemple, fait allusion à cette tendance en
citant « the monolingual fallacy ». Quant à L. Gajo (2001 : 164), il remarque que l’étudiant
généralement perçoit l’utilisation de la LM en classe comme une déviation non con-
forme à la situation didactique. « C’est un peu comme s’il essayait de faire de la
géographie en classe d’histoire ».
l’énonciation des éléments dont il a besoin dans la nouvelle langue, il utilise alors des
termes de la LM ou des mots voisins ou des expressions inventées. Dans ce travail,
nous adoptons la dénomination de « marques transcodiques » de G. Lüdi et B. Py
(1986 : 142) pour parler des traces d’autres langues, surtout la LM, qui traversent les
productions des apprenants lorsque ceux-ci essayent de surmonter des obstacles
communicatifs. L’expression « marques transcodiques » est neutre par rapport aux
dénominations « mélange des langues », « interférences » ou « transferts négatifs » utili-
sées par les contrastivistes des années cinquante pour remarquer l’incidence alors jugée
nuisible de la LM dans l’apprentissage. La formulation transcodique « fait partie des
stratégies compensatoires interlinguales » (Lüdi, 1994 : 123), c’est-à-dire, des stratégies
potentiellement conscientes qui permettent d’atteindre un objectif communicatif
quand le sujet doit résoudre des problèmes linguistiques ou discursifs. Dans ce travail,
on consigne les exemples qui contiennent des marques transcodiques considérées pa-
radigmatiques compte tenu de leur occurrence.
Dans ce cas, l’apprenant se sert du mot français fourni par P, en 3. Il répète sans diffi-
culté et semble l’incorporer car il le dit deux fois, la première en écho après avoir
entendu la formulation de P, en 5, et, ensuite, dans une construction personnelle dans
l’énoncé 7. Il va de soi que seule une étude longitudinale pourrait déterminer si
l’appropriation du terme a eu lieu ou non.
5. P : sauf
6. A : *saufant la guerre ((à l’exception de ceux de guerre))
7. P : Quoi?
8. A: Oui, les films d’amour, les [amerikan], tous *saufant la guerre
9. P: Ah, oui, tous les films sauf ceux de guerre
Il est bien connu que grâce à la LM ou à d’autres langues, l’apprenant met en marche
des procédés variés de création lexicale ou grammaticale. Dans le cas des hispano-
phones, en milieu naturel, certaines démarches fréquentes ont été déjà décrites
(Cammarota et Giacobbe, 1986). L’un des procédés usuels consiste à effacer les ter-
minaisons des substantifs espagnols afin d’introduire les mots ainsi générés dans le
discours exolingue, indépendamment de leur existence en français. Le dialogue précé-
dent nous offre un exemple de ce genre. Le mot « [amerikan] » en 8, est formé à partir
de : « americanos » par suppression de la dernière voyelle. Dans d’autres situations, la
marque transcodique est le témoignage d’un processus complexe d’élaboration comme
quand Ana dit: « *saufant la guerre », en 8.
Observons de près la genèse de la construction. En 4, l’apprenante demande à
l’enseignant la traduction du mot « excepto » (sauf, excepté). Une fois le terme obtenu,
elle construit une forme verbale qui ressemble à un gérondif car elle possède la termi-
naison « ant ». Ana a l’air d’être très sûre de sa production. En effet, lorsqu’elle essaie
de surmonter le malentendu cristallisé, en 7, par la question du professeur « ¿Quoi? »,
Ana répète sa création lexico-grammaticale. Elle explicite « tous » en énumérant des
genres de films « les films d’amour, les [amerikan], tous ». Elle oppose cette partie de
l’énoncé à celle qu’elle veut faire comprendre « *saufant la guerre ». Elle y parvient car,
en 9, l’enseignant acquiesce et coopère en proposant l’énoncé correct: « Ah, oui, tous
les films sauf ceux de guerre ». Une fois de plus, J. Kristeva (2007), jouant sur son vé-
cu et ses connaissances de linguiste, d’écrivain et de psychanalyste synthétise en belles
images les sentiments de celui qui apprend une nouvelle langue. « Dans ce deuil infini,
où la langue et le corps ressuscitent dans les battements d’un français greffé, j’ausculte
le cadavre toujours chaud de ma mémoire maternelle ».
Cet échange d’informations sur le week-end est marqué par une sensation de lenteur.
On est pris dans une vraie spirale écholalique (Klett, 2007 : 89) car des mots sont fré-
quemment répétés en écho. Ainsi, le terme « voyage » a 7 occurrences, l’onomatopée
106 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
façon sporadique, le recours à la langue natale s’avère intéressant aussi bien pour
l’enseignant que pour l’apprenant. Le premier, peut mieux situer l’état de l’interlangue
de son élève, observer les stratégies utilisées pour surmonter les difficultés de commu-
nication et, enfin, promouvoir la réflexion à partir des créations discursives. Le
second, exploitant sa créativité, peut augmenter sa puissance référentielle (Lüdi et Py,
2003), enrichir son répertoire linguistique, essayer, répéter, préciser, éclaircir ou con-
fronter certains aspects des langues en contact ce qui exige une intense activité
cognitive. Nous croyons qu’un pareil effort accroît sa confiance face à la nouvelle
langue et favorise l’incorporation de connaissances. C’est à la croisée de deux langues
et, à partir des deux, que l’apprenant augmentera son aptitude à assurer des interac-
tions communicatives.
Conventions de transcription
P enseignant
E, A initiale du nom de l’apprenant
+ pause, ++ pause plus longue
xxx' reprise d’une partie du mot
xxx/xxx reformulations
[xxx] transcription phonétique
(xxx) traduction ou commentaires sur le non-verbal
((xxx)) interprétation du chercheur
« xxx » mots en LM
*xxx mot inexistant
MAYOR emphase
Ma-jor-dome scansion
67 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : genre discursif (ou genre de dis-
cours), notion.
108 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
les agents sociaux s’affrontent pour conserver ou transformer ces rapports de forces,
avec des mécanismes spécifiques d’accumulation des ressources dont le discours
(Bourdieu, 1997).
Il peut également être décrit par l’analyse du discours qui contribue à en façonner les
rapports, notamment par le processus de production et de circulation des notions. La
description, l’explication, l’argumentation par exemple sont des formes dont on
retrouve la trace dans la matière linguistique des textes produits aussi bien dans les
sciences formelles, les sciences médicales et les sciences des sciences humaines et
sociales, rendant compte d’une activité cognitive. Une question se pose alors pour le
chercheur qui prend comme objet la variabilité de l’usage des notions dans des
discours circulants dans une sphère sociale, d’impliquer son propre discours et son
propre usage des notions dans l’exercice critique.
leurs effets sur la recherche et sur le corpus : l’implication du chercheur au cœur du processus de re-
cherche, quand il cherche « faire sens » plutôt que de donner des explications des phénomènes étudiés ;
110 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
l’implication des sujets participants à une activité de recherche qui lui confèrent une intelligibilité propre.
Approfondir pour cela les notions d’ethnométhodologie (Garfinkel, 2007), de recherche-action et courant
praxéologique (M-F et J-P Narcy-Combes, 2005), d’objectivation participante (Bourdieu, 1987 ; Hamel,
2008).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 111
dispositifs, les politiques linguistiques des institutions et des établissements, passe par
la construction des observables : des corpus de textes (productions écrites et orales
sous des formes variables) ou des corpus d’actes (observations d’activités et de com-
portements directs ou enregistrés). Ce qui suppose le choix d’une ou de plusieurs
techniques d’investigation. Le principe d’enquête préside toujours : trouver et colliger
des textes à partir de différents supports, produits dans différents contextes sociaux
(œuvres : ouvrages, articles ; textes réglementaires : lois, décrets, règlements, circu-
laires, missions) ; saisir les comportements et les discours (échanges in situ ; entretiens,
questionnaires ouverts ou fermés).
Deux corpus ont été constitués :
α) les textes qui forment l’ensemble des discours de l’évaluation ; les textes
produits en situation d’évaluation ou aux fins d’organisation de celle-ci dans un
établissement d’enseignement du français langue étrangère72 (les discours
d’évaluation) ;
β) les textes écrits par ceux qui interviennent directement (en publiant) ou
indirectement (par les références qu’ils imposent dans le champ plus large de
l’éducation) dans le domaine de l’enseignement du français, langue étrangère
et qui forment, avec les ouvrages spécialisés en évaluation hors matière
d’enseignement spécifique, le corpus des discours de l’évaluation (sur
l’évaluation et au nom de l’évaluation).
Superordonné "évaluation"
Faible marquage "test" "contrôle" "devoir"
Marquage précis "partiel" "examen"
Hypernotion ["évaluation"]
Hyponotions ["test"] ["contrôle"] ["devoir"]
["partiel"] ["examen"]
Cependant, il est difficile d’envisager l’emploi du même terme dans le cadre d’une no-
tion et dans celui d’une opération75. Les domaines de description de l’une et de l’autre
se croisent, mais les appareils descriptifs puisés dans les travaux sur la référence et
ceux produits dans le cadre de la logique naturelle ne sont pas de même nature. Si
l’articulation est périlleuse, elle peut, par ailleurs contribuer à éclairer la dynamique de
la production notionnelle. Ainsi la formation de termes ad hoc ne correspond pas tou-
jours aux dérivations terminologiques nécessaires au recouvrement des catégories (N
disciplinaire, N action de, V). Nous devons donc poser différemment le problème de
la référence en synchronie.
Je tentais d’approfondir l’approche en montrant comment se structure sémantique-
ment une notion à partir de sa composition organique en éléments de sens. Si la
notion est un construit cognitif prenant la forme d'un terme, ou plus exactement d'un
syntagme, dont la fonction référentielle est de représenter un objet cognitif opératoire
reconnu comme tel dans un univers de savoir ou de pratique qui la légitime, constitué
par abstraction à partir de propriétés communes à un ensemble d'objets de cet univers.
Il doit donc y avoir cohérence entre les constituants de la notion et l'univers de réfé-
rence, ce qui explique les difficultés, les malentendus, voire les incongruités dues à la
nomadisation des notions (cf. partie B chapitre 2). Disons que si une notion est consti-
tuée d'éléments a, b, c, chacun de ces éléments devrait appartenir au même univers de
référence selon le schéma :
a ∈ U1
b ∈ U1
N
c ∈ U1
d ∈ U1
75 S’il semble possible de définir cette coexistence des opérations cognitives (ou mentales) et des opérations
langagières, les mouvements des unes et des autres ne peuvent se résoudre à des unités minimales dites
« signes » de représentation ou « marques » instrumentales du langage. Apotheloz et Grize (Apotheloz et
Grize, 1987) rappellent que « Bruner conçoit le langage comme un médiateur et un amplificateur de capa-
cités et [...] considère, à l’instar de Vigotsky, que dès le moment où interviennent la représentation et
l’instrumentation langagière, il n’est plus possible de dissocier le développement cognitif du langage ».
Partant de cette complexité, la description d’opérations se développe selon les points de vue spécifiques à
chaque domaine :
- opérations logiques (négation, conjonction, implications, équivalences ...) ; - opérations cognitives (iden-
tification / différenciation, stabilisation / déstabilisation ; - appropriation / désappropriation) ;
- opérations langagières (localisation / identification, différenciation / détermination ...) ; qui peuvent être
reliés par un modèle cognitif de l’argumentation en opérations discursives génériques : - sélection des
références ; - caractérisation ; - détermination, ; - jugement.
114 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
S’il peut y avoir concurrence entre les termes au plan linguistique étant donné la va-
riété des possibilités de dénomination : emprunt d’un terme dans un autre domaine,
néologie, emprunt d’une base lexicale étrangère ou d’un terme étranger, elle ne devrait
pas s’exprimer ou plan cognitif. Pour analyser l’originalité d’une notion, on peut ten-
ter de décrire ses composants sémiques notionnels.
Sans entrer dans le détail, on voit ici un exemple d’effet de la production des données
sur l’objet d’étude. Il peut s’agir alors, soit de reconfigurer l’objet directement dans le
processus de recherche en cours, soit de mettre l’option de côté le temps de pour-
suivre sur la voie tracée au préalable, dans une perspective de recherche ultérieure
colatérale à l’objet initial, en fonction des implications de l’origine de la recherche
(thèse, réponse à un appel d’offre, commande). La reconfiguration de l’objet étant liée
à la détermination épistémologique des choix méthodologiques (comme ceux de
l’implication des acteurs abordée dans la partie 3).
« Notre étude a voulu montrer la nécessité, pour tout travail de recherche, d’établir un
dialogue permanent entre l’objet d’étude, la situation d’enquête, les acteurs comme
individus réagissant à la situation, et le chercheur lui-même comme observateur et ac-
teur. C’est une invitation à engager une réflexion épistémologique sur les objets de
savoir produits en sociolinguistique » (Vigouroux, 2003).
Dans le cas de cette recherche, deux options s’avéraient ouvertes : ou bien il fallait
requestionner les fondements de la démarche si l’on souhaitait en faire un modèle gé-
néral, ou bien préciser que l’on considérait qu’un tel modèle n’était pas compatible
avec la démarche, qui s’inscrirait par conséquent dans un cadre épistémologique re-
connaissant avant tout la variation de l’objet comme déterminant.
Poser la question de savoir si la formation linguistique de la notion à travers les dis-
cours ne relève pas aussi de phénomènes de variations sociodiscursives, amenait à
déplacer quelque peu un champ de connaissance vers un autre. Mais le corpus appelait
également à prendre en compte l’analyse des échanges en classe de langue, à la fois
influencée par l’analyse du discours (Cicurel, 1994, 1995) et par l’analyse conversa-
tionnelle76.
- sur les conversations exolingues dans les classes de langue (Porquier, 1984)
- sur les styles communicatifs des enseignants à partir d’une approche discursive en psychosociologie
(Chabrol et Olry, 2007) ;
- sur les interventions des enseignants dans la classe de langue seconde (Markee, 2000) ;
- sur les échanges conversationnels dans les pratiques des apprenants (Gajo et Mondada, 2000) ;
- sur l’approche acquisisionniste (Pekarek Doehler, 2006) ;
- sur l’approche interactionniste (Bange, Carol et Griggs, 2005).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 115
que la réalité concrète de l’évaluation n’est pas donnée, qu’elle se fonde sur des savoirs
et des représentations et se co-construit à travers les canaux d’échanges. Les échelles
argumentatives par exemple, permettent d’expliciter des formes d’énoncés correctifs
dans les discours d’évaluation (Bien, mais attention à l’orthographe en serait un modèle
emblématique repérable et transférable entre les pratiques vécues d’apprenant / éva-
luataire et celles de l’évaluataire devenu enseignant / évaluateur), comme a pu l’être
pendant une période, la désignation de toute acte d’évaluation sous par le terme de test,
quelle que soit la forme de la procédure utilisée, comme peut l’être aujourd’hui la réfé-
rence constante au Cadre européen commun de référence pour l’apprentissage des
langues (CECR), comme facteur de valeur qualitative ajoutée.
Ce système global ne peut être isolé de l’ensemble des systèmes qui forme un réseau
d’établissements liés par un cadre contractuel à plusieurs facettes, administratif, juri-
dique, pédagogique (comme peuvent l’être un réseau d’Alliances françaises,
d’Institutos Cervantes dans un pays, voire un réseau scolaire). Le système global
d’évaluation se co-construit à l’aide de systèmes de signes, en acceptant un certain
nombre de principes permettant l’échange et un certain nombre de règles le gérant.
Pour rendre compte des rapports entre ce qui détermine les discours produits par les
acteurs dans le but de répondre à l’acte d’évaluation qui s’inscrit dans une nécessité, et
les actes concrets en évaluation, il est nécessaire de croiser deux logiques : celle issue
d’une articulation entre des grilles d’analyse de discours élaborée à partir de repérages
sur une variété d’établissements ; celle élaborée par une articulation parallèle entre plu-
sieurs grilles d’analyse répondant aux spécificités des organisations de ces
établissements. L’enjeu, à ce niveau, pourrait se définir par le repérage d’une logique
d’action77 de l’évaluation qui transcende les variables locales, et par-là même, la sélec-
tion des facteurs de variation qui pèsent sur les réalisations concrètes de l’évaluation.
Dans le cadre d’une recherche, dont les corpus proviennent d’un seul établissement,
ces variables ne sont pas isolables. Cependant, un tel développement peut s’avérer
opérationnel par des transpositions du modèle de recherche à d’autres situations so-
ciales, d’enseignement dans lesquelles une action d’évaluation est produite.
L’introduction de changements par décision d’autorité (niveau institutionnel), et la
contestation de ceux-ci (niveau des acteurs) ou à l’inverse, l’exigence de changement
de la part des acteurs, niée par l’institution, ne peuvent pas ne pas provoquer des
mouvements et laisser des traces dans les échanges.
77 La logique d’action est une évolution conceptuelle de la logique d’acteur développée dans le cadre de la
sociologie des organisations. L’objet « acteur » ne pouvant être isolé des conditions et situations qui le
réalisent comme acteur, la logique d’action tend à objectiver cette représentation des actes sociaux en
révélant également les variables de détermination et d’influence qui en font un acteur pluriel, stratégique,
social, identitaire, culturel, groupal, pulsionnel (Amblard, Bernoux, Herreros et Livian, 1996).
78 Sophie Moirand part de l’hypothèse que l’analyse de l’oral (comme celle d’ailleurs de l’écrit) en situation
s’appuie sur un recueil d’« unités discursives empiriques », qui relève, consciemment ou non, d’une repré-
sentation à priori des genres, on propose en deuxième partie une grille heuristique de catégories dites
116 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
constituent des repères (comme les échelles argumentatives pour les énoncés
correctifs), Christine Develotte montre comment se constitue une catégorie
d’intelligibilité du discours à l’extérieur, en ayant recours à la notion d’exotopie
développée par Bakhtine, pour proposer les notions descriptives d’espaces
d’exposition et de production discursives (Develotte, 2006 : 88-100)79 dans l’analyse
du discours multimédia . L’irruption de la sphère Internet dans les années 1990
(courrier électronique et web) génère une profusion de textes qui progressivement
dépassent les bornages imposés par l’imprimé et l’enregistrement sonore et vidéo. Des
flux non finis de discours déterritorialisés, des traitements lexicaux et syntaxiques
compressés, des mélanges de langues tendent à bouleverser les modèles de
construction des corpus et interrogent les outils de l’analyse du discours. L’accès aux
savoirs a longtemps été considéré comme une relation bipolaire avec un entrant, un
sortant et une boite noire spéculative largement utilisée par le behaviorisme, puis
ensuite, comme une relation plus constructive entre trois pôles avec le fameux triangle
de la formation. Ce modèle schématisé sur un seul plan, affronte aujourd’hui
l’immédiateté d’un accès global générant plusieurs types de contraintes. L’espace
cybernétique est devenu très rapidement un espace social virtuel où se développent de
nouvelles pratiques sociales, distinctes des rapports sociaux concrets. Langues et
cultures y sont en contact quasiment sans l’histoire et sans les territoires de référence
aux rencontres qui avaient façonnés le monde.
Compte tenu des difficultés de bornage et d’ancrage territorial, on peut considérer que
les échanges dits virtuels, s’organisent dans des espaces d’interlocution plastiques et
que c’est la co-construction des objets de discours (Chardenet, 2005 : 57-73) qui dé-
termine les communautés discursives, aussi rapidement formées que dissoutes.
L’enseignement tutoré à distance n’échappe pas à ce qui pourrait relever de règles gé-
nérales. La question qui se pose alors du point de vue des discours de l’évaluation dans
ces contextes d’enseignement/apprentissage, est de savoir si ce qui a pu être constaté
dans les situations orales de classe (par exemple : déplacements de place énonciative
entre l’évaluateur et l’évaluataire, mais aussi changement de rôle lorsqu’un apprenant
élucide un problème pour d’autres apprenants. En situation d’oral en classe,
l’évaluateur et l’évaluataire doivent faire face à l’immédiateté de toute production :
consigne, réponse devoir, correction, jugement. En situation d’écrit en classe,
l’immédiateté disparaît au profit d’un temps de réponse devoir et de correction élargi.
À distance, l’écrit peut être presque aussi immédiat que l’oral (forums), et s’étirer sur
un temps plus ou moins long géré directement et individuellement par les interlocu-
teurs (courrier électronique), avec des énoncés correctifs (évaluateurs), des
justifications ou explications (évaluataires), des remédiations consécutives individuelles
ou collectives.
« micro », « meso » et « macro », dont la combinaison vise à mettre au jour à posteriori les caractéristiques
de genres et des sous-genres, leurs ressemblances, leurs différences et leurs variations (Moirand, « Quelles
catégories descriptives pour la mise au jour des genres du discours ? », http ://icar.univ-
lyon2.fr/Equipe1/actes/Journee_Genre/Moirand_cat_genres.rtf (15/08/09).
79 Voir également document de soutenance de HDR http ://w3.u-grenoble3.fr/fle-1-
ligne/docs/Develotte%20extraits%20HDR.doc (15/08/09).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 117
80 On verra dans ces travaux comment l’objet et le chercheur qui en était éloigné se rapprochent au point
81 Voir 3.2.
82 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : imaginaire, contexte, recherche quali-
tative.
83 En référence à la notion de « communication inégale » (François, 1990) qui pourrait s’appliquer à de
nombreuses situations de recherche, plus particulièrement par exemple avec des migrants, ayant une
compétence partielle de la langue utilisée, ou des enfants, dont le statut est manifestement différent de
celui des chercheurs adultes.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 119
truit en effet une légitimité différente dans la relation avec le chercheur et bouscule
son implication, l’interprétation se construisant de manière plus négociée et équitable.
En mettant en évidence des positionnements, des résonances et des résistances, en
ouvrant les possibilités de donner sens aux voix d’enfants, le dessin et les discours qui
l’accompagnent permettent de co-construire un espace d’interprétation et, ainsi,
d’ancrer la recherche dans l’action, notamment didactique. Ils conduisent, enfin, à
concevoir des projets, à imaginer, seuls ou en commun, un monde pluriel et divers
(Castellotti et Moore, 2009). En ce sens, dessins et discours tissent et construisent un
poly-texte, qui demande de le comprendre pour, aussi, se comprendre.
Notre ambition ici n’est donc pas de proposer des techniques clefs en main ou de pré-
senter un panorama exhaustif des méthodes utilisées dans la recherche avec des
enfants, mais plutôt de poser quelques repères de réflexion ancrés, bien entendu, dans
la littérature spécialisée, mais aussi dans notre expérience de quinze ans de terrain,
dans les familles et dans les classes. Encore plus peut-être que la recherche avec les
adultes, le travail avec de jeunes enfants questionne la posture du chercheur, ses
croyances épistémologiques, sa tolérance à l’ambiguïté, sa compréhension du fluide,
du dynamique et du complexe, en l’engageant dans une salutaire « altéro-réflexivité, où le
chercheur navigue avec d’autres » (Robillard, 2008, vol. 2 : 30).
84 Pour Piaget et Inhelder (1966), le dessin permet de manière efficace d’atteindre l’image mentale (la
perceptions de la variation dialectale pour produire des cartes topographiques moyennes numérisées.
120 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Pour Giordan (non daté), il est indispensable pour les éducateurs de comprendre les
(pré)conceptions des élèves, parce que : i) celles-ci correspondent à la structure de
pensée sous-jacente à l’origine de ce que l’élève pense, dit, écrit ou dessine ; ii) elles
sont le socle sur lequel ce dernier construit les nouveaux savoirs et, donc, ses appren-
tissages ; iii) elles appellent la prise de recul, la distanciation, nécessaire à tout
processus de transformation (voir aussi Giordan, Girault et Clément, 1994) :
« [Une conception] est à la fois sa grille de lecture, d’interprétation et de
prévision de la réalité que l’individu a à traiter et sa prison intellectuelle. Il ne
peut comprendre le monde qu’à travers elle. Elle renvoie à ses interrogations
(ses questions). Elle prend appui sur ses raisonnements et ses interprétations
(son mode opératoire), sur les autres idées qu’il manipule (son cadre de
références), sur sa façon de s’exprimer (ses signifiants) et sur sa façon de
produire du sens (son réseau sémantique). Ces divers éléments ne sont
évidemment pas facilement dissociables, ils sont totalement en interaction. »
(Giordan, non daté)
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 121
Parce que le dessin est ici entrevu à la fois comme visible et dicible (plutôt que lisible),
il se perçoit et se construit comme un texte visuel, il appartient à une « texture du dis-
cours »87, dont les valeurs et le sens sont construits et négociés dans leur déroulement
discursif, entre pairs et entre participants et chercheurs88. Le dessin induit aussi des
effets de prise de distance qui permettent des formes de transaction ou médiation mé-
taphoriques entre les contextes, et l’innovation au niveau du sens.
90 Kaufmann s’oppose ainsi aux orientations positivistes dominant les recherches par entretien, qui po-
réalité sociale, des méthodes, conçues comme l’ensemble des procédures et techniques permettant la récolte
et l’analyse des données. NB : dans le présent volume d’autres contributeurs font la même distinction en
utilisant les termes méthode et méthodologie à l’inverse (cf. partie A chapitre 1)
92 Pour Groulx, le questionnement réflexif concerne en effet l’ensemble de la démarche : « La réflexivité
renvoie à un travail constant d’auto-analyse [...]. Elle oblige le chercheur à constamment réinterroger les
conditions sociales et le sens de chacun des actes de recherche qu’il pose » (Groulx, 1999 : 322).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 123
Ils présentent ainsi des recherches menées en milieu scolaire (exemple 1) et dans les
familles (exemples 2 et 3), de manière ponctuelle (on envisage l’état des représenta-
tions du plurilinguisme à un moment donné dans la trajectoire de l’enfant, comme
dans l’exemple 3), ou dans une perspective longitudinale, en cherchant à retracer les
mobilités identitaires au travers des dessins et des discours, sur plusieurs années et
différents continents (comme dans l’exemple 2). Les objectifs sont aussi variés : mieux
comprendre l’influence des choix pédagogiques scolaires sur les représentations de la
pluralité chez les enfants à l’école primaire (exemple 1) ; comment l’expérience de
mobilité affecte les rattachements plurilingues et identitaires chez les enfants (exemple
93 Ricœur préfère s’interroger sur les distances de l’interprétation (liées à l’appartenance irréductible du sujet
interprétant au monde qu’il interprète), plutôt que de n’en entrevoir que les dimensions critiques, qui
prennent le risque de l’enfermement sur la recherche du dévoilement des dimensions politique, éthique
(et, donc, émancipatrice) du discours, au détriment d’une approche de la complexité du discours, « où
l’être se construit, notamment verbalement, de manière fluide dans la réflexivité » (De Robillard, 2008,
vol. 2 : 47). Pour De Robillard (2008), la posture herméneutique et constructiviste de Ricœur, qui pose
l’interprète comme quelqu’un qui se place au cœur même des tensions et contradictions, permet alors
d’articuler chaos, construction et responsabilité (vol. 1 : 106).
94 On notera au passage notre préférence pour parler de « construction » des données, qui permet de
mieux rendre compte que le chercheur est aussi engagé dans un rôle de co-acteur de la recherche (De
Robillard, 2008).
124 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Les deux dessins précédents ont été élaborés, le premier individuellement (Samuel)
puis en groupe (Samuel dans le groupe G4) dans une classe suisse où les enfants
étaient encouragés dans le quotidien des activités de classe à réfléchir sur les liens
entre les langues et à considérer les langues de leurs répertoires comme des ressources
d’apprentissage. Les conceptions du plurilinguisme dans cette classe se sont avérées,
de manière générale, plus souples, mobiles et riches que dans les autres contextes étu-
diés, même celui d’enseignement bilingue qui encourageait plutôt, de fait, une
séparation des langues dans le curriculum et dans les productions des enfants en classe
(les classes d’Alsace ont été l’objet d’analyses dans Castellotti et Moore, 2005).
Notre intérêt ici porte essentiellement sur les évolutions du dessin et du discours qui
l’accompagne, selon que celui-ci est produit, dans un premier temps, de manière indi-
viduelle, puis qu’il donne lieu à négociation visant une production collective. Le travail
met en jeu deux formes de production d’observables, construits sur deux temps,
i) l’entretien compréhensif d’explicitation (on demande à Samuel d’expliquer son des-
sin, qu’il a élaboré seul pendant la première phase de l’enquête, et qui laisse surgir ses
représentations spontanées sur le plurilinguisme) et ii) l’enregistrement du déroule-
ment des interactions de groupe, lorsque les enfants sont invités à produire
collectivement un seul dessin (on suit alors les processus de négociation en contexte).
Le dessin de Samuel présenté en (1) (re)présente une organisation complexe et inter-
reliée des langues dans le cerveau. On y voit des espaces possiblement ouverts ou
fermés les uns ou les autres par un système de trappes dont Samuel explique en
entretien qu’on peut les ouvrir et les fermer, d’échelles et d’un ascenseur, qu’il nous dit
permettre de passer plus ou moins rapidement d’une langue à l’autre. Dans le dessin
initial de Samuel, chaque langue dispose d’un espace réservé dans le cerveau, que
Samuel explique être plus grand pour le latin « parce que c’est une langue dont
dérivent les autres ». Il explique aussi qu’un espace central plus important sert
l’ensemble des langues, où circulent des petits personnages noirs et rouges, dont les
fonctions de « contrôleurs » et de « correcteurs » permettent un bon flux des langues.
Une fois en groupe (2), l’enregistrement des interactions montre comment Samuel
oriente, discursivement, la production collaborative du dessin avec ses pairs. Le
groupe retient ainsi pour le dessin les échelles de différentes tailles, horizontales et de
traverses, et la présence des petits bonhommes régulateurs des langues. En même
temps, construite sur un effort coopératif et le partage équitable des savoirs (« on est
quatre, on n’a qu’à partager », « tu fais quatre tiroirs et on met quatre langues »), la
confrontation réflexive de leurs représentations amène les enfants à une conception
plus épurée et, au final, plus vraisemblable, des répertoires plurilingues. Samuel, Félix,
Déborah et Céline s’entendent ainsi sur quatre langues (au lieu des dix représentées
dans le dessin initial de Samuel), la discussion portant ensuite sur le choix de celles-ci :
l’allemand et le français, langues de l’école dans leur contexte scolaire suisse, le turc,
l’anglais, l’italien, l’espagnol et l’alsacien, langues présentes dans les répertoires de plu-
sieurs des enfants de la classe. Au final, le groupe retient les deux langues suisses, une
langue minoritaire proche (l’alsacien) et une langue de la migration (le turc), un pay-
sage linguistique fort proche de la réalité socio-culturelle de ces enfants :
126 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
A. quand tu vois dans les dessins ça nous rappelle des bulles [commente
un dessin-texte où apparaît le caractère pour poisson] c’est tout quelque chose
qui n’est pas vraiment. si tu enlèves la crinière c’est encore UN CHEVAL
PARFAIT . c’est encore UN MOT . c’est encore l’animal
Dans cet extrait (dont on reprend l’analyse formulée dans Moore, 2005 et 2006),
Anaële explique comment son amie et elle s’y prennent pour mémoriser des sino-
grammes. En comparant deux documents produits deux années plus tôt, l’enfant
montre leurs relations, en particulier en regard du sinogramme signifiant cheval (en
haut à droite du document présenté ici), oiseau et poisson (document non présenté).
La stratégie mise en avant consiste à « remonter » l’étymologie graphique du signe
pour en rechercher la motivation pictogrammique (et donc la transparence du sens),
en reconnaissant des éléments de leur combinaison et leurs relations (la crinière du
cheval est ici comparée aux bulles du poisson, et aux plumes de l’oiseau)95. Ces élé-
95L’enfant dit ailleurs dans l’entretien : « comment je me rappelais que c’était homme . c’est facile parce
qu’ils l’ont écrit comme ça pour faire les jambes . le cou . et les bras d’un homme », et à propos du carac-
tère pour oiseau : « ça ça donne comme une aile donc les petits traits en-dessous du signe ça te rappelle
des plumes ça »). On remarque d’ailleurs comment elle « prolonge » (d’une couleur différente) les carac-
128 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
ments sont analysés comme partie du tout, mais pouvant en être dissociés sans altérer
la signification de ce tout (« c’est comme si tu enlèves quatre plumes d’un oiseau c’est
ENCORE un oiseau »). Les stratégies sont construites sur la décomposition des signes
en « clefs » ou « radicaux » (les caractères qui entrent en composition avec d’autres), le
comptage du nombre de traits (qui permet de trouver un signe dans un dictionnaire),
et s’appuient sur la composition graphique et l’imagination, à la fois pour décrypter et
mémoriser les signes qu’elles rencontrent et qui leur « parle à l’œil » (Calvet, 1996). Ces
stratégies, utilisant combinaisons et associations graphiques, sont réinvesties dans
d’autres contextes pour « deviner » le sens de signes inconnus, ou pour en inventer de
nouveaux (« j’ai essayé de faire cheval et voir ça ressemble à quoi si je fais plus de
lignes et voir si ça voulait dire quelque chose »).
Cet exemple, qui montre comment le chinois s’inscrit, du point de vue de l’enfant,
comme une langue du répertoire plurilingue et une ressource communicative supplé-
mentaire dans des icônotextes mêlant plusieurs langues et plusieurs écritures, s’appuie
sur une démarche résolument réflexive en permettant à l’enfant de dérouler une narra-
tion interprétative de ses actions et intentions, dans leurs articulations entre un passé
(là-bas) et le présent (ici). L’enfant s’engage alors dans un récit de vie que mettent en
résonance ses textes et les contacts de langues et d’écriture qu’ils mettent en scène,
tout comme les projets identitaires qu’ils permettent de figurer. La dimension réflexive
de l’acte d’expliquer (et donc de comprendre et faire comprendre) impulse une tran-
saction pratique complexe qui fait appel à des logiques d’action multiples ; celles-ci
impliquent la mise en oeuvre d’ajustements contextuels réconciliant les
(dis)continuités de l’expérience linguistique et identitaire associées à la mobilité et la
migration et, de là, la transformation de l’expérience ainsi saisie.
tères dans le texte-dessin présenté dans l’exemple (voir en particulier le signe pour l’arc, légendé phonéti-
quement « lark »).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 129
Bien que le questionnement identitaire n’ait pas été, avec ces enfants, la thématique
principale de la recherche, plusieurs d’entre eux réinvestissent discursivement celui-ci,
comme dans le double exemple présenté plus haut (celui de Mar. et de Ang.). Comme
130 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
partie du protocole de recherche, nous avions donné à chaque enfant, dans chacune
des familles, une feuille présentant le sinogramme 马
cheval96, accompagné d’une
consigne (écrite en français et non commentée par le chercheur, qui se contente de
dire « on va colorier ensemble » ou comme dans l’exemple présenté « je vais te passer
ceci, tu vas le colorier »), engageant à colorier les différentes parties du cheval.
Cette simple consigne visait à inviter chacun des enfants dans un déplacement entre
signifiant visuel et signifié, pour envisager le caractère comme une image visuelle, qui
met alors en jeu la mémoire et l’imaginaire de l’enfant97. C’est pourtant alors dans une
autre relation métaphorique que les deux fillettes se déplacent soudain, en interrom-
pant le chercheur. Elles s’engagent alors dans l’affirmation d’une identité complexe,
enfantine et moderne (le Pokémon), pluriculturelle (être chinois et/ou canadien) et
plurilingue. La figuration des identités passe ici par des formes de réinvestissements
plurigraphiques spontanés, qui accompagnent des discours de défiance : « je ne suis
pas chinoise », « je suis canadienne-chinoise » dans le cas de Mar. (non présenté ici), et
« je ne suis pas vraiment chinoise » et « je suis chinoise aussi mais », dans le cas
d’Ang.).
Le dessin de Mar. peut aussi s’analyser comme un exemple complexe d’un texte poly-
graphique plurilingue (en français et en chinois), qui met en scène tout à la fois des
code-switches et des crossings scripturaux98, selon que les langues et les écritures mo-
bilisées appartiennent ou non au répertoire familial de l’enfant qui a produit le texte.
Pour les deux cas, le texte présente toutefois des enjeux d’apprentissage (et du français
et du chinois) pour l’enfant, en même temps que des investissements identitaires dans
les deux langues.
Les dessins ne constituent pas, pour nous, une simple technique ou un moyen efficace
de recueillir des données observables. En fonction de la posture qualitative et interpré-
tative adoptée, ils investissent une dimension importante des recherches, de leur co-
construction et de leur contextualisation. Cette posture se caractérise par un processus
de production des connaissances conjoint, la valorisation du savoir des enfants et le
renforcement d’une prise de conscience (ici de l’altérité au travers du cheminement à
96 Les sinogrammes (hànzì en mandarin) sont les unités de lecture de l’écriture logographique chinoise
han. Ils se classent en différentes catégories : on distingue en particulier les pictogrammes (les caractères
simples), les idéogrammes (qui peuvent être composés de plusieurs pictogrammes, et comportent générale-
ment une clé), les idéophonogrammes, qui comprennent trois éléments: la figure, le son et le signifié. Pour
Huo Datong (non daté), le caractère chinois s’insère dans une relation trigone, qui fait intervenir le son
(l’image acoustique), la figure (l’image visuelle ou le signifiant visuel) et le signifié du caractère chinois.
Selon lui, le système du signifié appartient à l`ordre du réel, le système phonétique, à l`ordre du symbo-
lique et celui de la figure du sinogramme, à l`ordre de l`imaginaire.
97 Situant, de la sorte, un travail sur la valeur symbolique pictogrammique et idéographique du caractère
écrit.
98 Il s’agit ici de néologismes. Nous inspirant du modèle de Rampton (1995 et 2005), nous avons en effet
proposé de distinguer, dans les textes plurilingues spontanément produits par les enfants, des phéno-
mènes identico-scripturaux, les uns relevant du code-switche et les autres du crossing, pour tenter de mieux
rendre compte des tissages identitaires qu’ils permettent de mettre en scène, selon que les langues invo-
quées appartiennent au répertoire hérité ou imaginaire du locuteur-scripteur concerné (voir Moore, 2005
et 2006).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 131
travers les expériences des dessins et de leur négociation). Elle permet de saisir les des-
sins et les mises en formes discursives qui les accompagnent comme des poly-textes,
dont les résonances ouvrent une zone interprétative partagée.
La posture de recherche implique en effet un maillage des perspectives et des points
de vue, un engagement99 des participants100, ainsi qu’une mise en scène différente de la
parole. Celle-ci s’accompagne alors d’une projection corporelle, de la production d’un
tracé qui permet d’aller à la rencontre de l’autre pour construire du sens avec lui, de
dessiner non seulement pour dire (Molinié, 2009 : 12) mais aussi pour montrer, figu-
rer, représenter et imaginer. Le dessin et, plus largement, les productions plastiques,
graphiques et visuelles contribuent à construire autrement les recherches, en y insuf-
flant le sensible et l’imaginaire101, et en les reliant plus directement à une perspective
d’appropriation. La projection dans l’imaginaire invite en effet soit à prolonger
l’existant, à le renouveler, soit à tenter de rompre avec lui pour construire du nou-
veau : innovations de croissance ou de rupture, comme les définit Schurmans (2006).
Mais ces évolutions sont aussi historicisées, et les aspects biographiques et réflexifs,
comme on peut le voir dans les exemples à différents titres, nourrissent fortement les
productions et les échanges ; l’imaginaire est donc aussi ancré dans l’expérience, c’est
le retour sur expérience, opéré au moyen de différents détours, qui permet à
l’imaginaire de prendre son essor.
Les arguments proposés ici, comme les exemples et les commentaires qui les accom-
pagnent, visent à contribuer à une réflexion sur la recherche qualitative, qui se
construit transversalement à différents domaines des sciences humaines et sociales,
malgré des points de vue et des approches largement diversifiées (voir par exemple
Groulx, 1999 ; Charmillot et Dayer, 2007). Si le point de vue adopté peut au premier
abord apparaître particulier, dans la mesure où il est construit à partir d’un secteur
bien précis, celui des recherches en articulation entre sociolinguistique et didactique
des langues menées avec un public d’enfants, il nous semble cependant qu’il se rat-
tache à un positionnement épistémologique beaucoup plus large, partagé par un
certain nombre de recherches diversement contextualisées.
Comme l’explicite dans ce même ouvrage Didier de Robillard (partie A chapitre 2), il
s’agit d’essayer de « comprendre », de donner du sens à la rencontre de recherche, ren-
contre qui vise à produire une connaissance intégrée et contextuelle. Selon cette
perspective, le sens et la compréhension du sens sont construits et co-construits dans
l’interaction, elle-même comprise comme une co-production engageant participants et
chercheurs et non seulement, comme dans de nombreux travaux « interactionnistes »,
99 Au sens aussi où l’entend Goffman, c’est-à-dire celui de « la façon dont un individu prend en main ses
propres histoires de chercheures, histoires individuelles (Castellotti, 2009) et histoire commune (en douze
ans, nous avons notamment partagé la rédaction de 20 articles ou ouvrages, ce qui implique une complici-
té à la fois personnelle et professionnelle, mais aussi un mode d’engagement particulier dans la recherche
et l’écriture).
101 Dimensions qui se construisent le plus souvent, dans le langage verbal, au moyen des métaphores (voir
comme un échange et une négociation verbale. Dans cette perspective aussi, on consi-
dérera que l’entretien permet la (re)construction de la connaissance, plutôt que son
élucidation par le biais de techniques appropriées, en incluant « la possibilité qu’on
« comprenne » de plusieurs manières différentes sans être capable de désigner la meil-
leure ou la bonne » (De Robillard, dans cet ouvrage). L’expérience partagée de la
recherche permet, alors, pour reprendre la belle formule de Vatz Laaroussi (2007 : 11),
le développement de « connais-SENS ».
102 Le terme suivant est défini dans l’index notionnel et factuel : bi-plurilingue.
103 Voir : Nécessité d’une réflexion épistémologique (partie A chapitre 1).
104 Voir : Contextualiser les savoirs en didactique des langues et des cultures (partie A chapitre 3).
105 Voir les autres chapitres de cette partie B.
106 Voir les chapitres, 3.3.4., 3.3.5, et 3.3.6. ci-dessus sur l’analyse du discours.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 133
nent la forme. Cet outil, qui est une grille d’observation, présente la particularité, parce
qu’elle conduit à une observation qui est d’emblée organisée, d’être à la fois un outil de
recueil de données et de première analyse.
Nous allons commencer par exposer les types de question qu’une recherche en didac-
tique des langues menée en Afrique francophone, dans un contexte où le
plurilinguisme107 est de règle, doit prendre en compte ; nous montrerons ensuite les
conditions de l’élaboration de cette grille, illustrant ainsi le fait que les outils de re-
cherche, s’ils ont une validité générale, sont toujours déterminés par la recherche
précise qui les met en œuvre et les objectifs qu’elle se fixe ; enfin, nous verrons com-
ment, en didactique des langues, un outil de recherche peut également devenir un outil
de formation, selon l’utilisation qui en est faite.
107 Plurilinguisme social bien entendu mais aussi, de plus en plus souvent, plurilinguisme scolaire.
134 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Pour ces parties de l’enquête, les données sont donc essentiellement à recueillir en
dehors de la classe, en analysant les documents du gouvernement (politique linguis-
tique), de différentes directions des Ministères (curriculum, examens, formation) ainsi
que des partenaires techniques et financiers.
Ces points sont ensuite à corréler avec la variable maître que l’on peut rapidement ca-
ractériser par quelques points :
136 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
108 Blaise Djihouessi, Issaou Gado (Bénin), Norbert Nikiema, Afsata Paré (Burkina Faso), Maurice Mazu-
nya, Raymond Kimanuka (Burundi), Barnabé Mbala Zé, Rodolphine Wamba (Cameroun), Maman
Mallam Garba, Seydou Hanafiou (Niger), Modou Ndiaye, Mamadou Cissé (Sénégal).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 137
Classe A Classe A
Lieu et date : Lieu et date :
Effectif : Effectif :
Niveau : Niveau :
Langue medium : Langue medium :
Matière et sujet de la Matière et sujet de la
leçon : leçon :
Classe A Classe A
Lieu et date : Lieu et date :
Effectif : Effectif :
Niveau : Niveau :
Langue medium : Langue medium :
Matière et sujet de la Matière et sujet de la
leçon : leçon :
expliquer
5. Supports de l’enseignement
- un manuel est-il utilisé ?
- combien d’élèves par manuel pendant la leçon ?
- combien d’élèves avec le manuel pendant la leçon ?
- des supports authentiques (journaux, chansons,
publicités) sont-ils utilisés ? Si oui, lesquels ?
- d’autres matériels sont-ils utilisés ? Si oui, lesquels ?
6. Niveau linguistique du maître dans la langue de
scolarisation
- le maître a-t-il la langue de scolarisation comme langue
première ?
- le maître a-t-il eu une formation initiale générale ?
- le maître a-t-il eu un renforcement linguistique dans cette
langue ?
- le maître a-t-il eu une formation didactique dans cette
langue ?
- le maître s’estime-t-il bien « armé » pour enseigner cette
langue ?
- le maître s’estime-t-il bien « armé » pour enseigner dans
cette langue ?
- dans quel(s) domaine(s) le maître aimerait-il recevoir un
appui ?
1. Les méthodes
d’enseignement/apprentissage
Type transmissif (indices ci-dessous donnent
une note agrégée de 0 à 6)
Le temps de parole du maître est X X
supérieur à celui des élèves
Le maître pose toujours les questions X X
Il n’y a qu’une réponse possible aux
attentes du maître
Il n’y a pas d’interaction élèves-élèves X X
Le maître donne d’abord la règle, que
les élèves appliquent
L’activité de l’élève est souvent résumée
à la récitation/répétition de la règle
3 3
Type constructiviste (indices ci-dessous donnent
une note agrégée de 0 à 6)
Le temps de parole des élèves est X X
supérieur à celui du maître
Les élèves posent des questions
Le maître prend en considération X X X X
plusieurs types de réponses
Il y a des interactions élèves-élèves X X
Les élèves construisent une règle à X X
partir de manipulations/observations
L’élève est amené à réinvestir les règles X X X
dégagées
3 3 4 4
2. Apprentissage de la langue
d’enseignement
L’enseignement de la langue est-il un
enseignement de type communicatif ? (indices
agrégés ci-dessous donnent une note de 0 à 4)
Données fournies par l’équipe du Sénégal, composée de Modou Ndiaye et Mamadou Cissé.
109
On voit que l’équipe du Sénégal a adapté la grille, ajoutant un item, le sujet de la leçon, au-delà de la
110
matière.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 141
- apprentissage de la compréhension X X
orale
- apprentissage de la lecture X
- apprentissage de la production orale X X
- apprentissage de la production écrite X
L’enseignement de la langue de s’accompagne-t-
il d’une réflexion sur le fonctionnement
(grammatical, linguistique) de cette langue ?
(indices agrégés ci-dessous donnent une note de
0 à 3)
- activités sur la morphosyntaxe de X X
cette langue
- activités sur la correction phonétique
de cette langue
- activités sur le lexique de cette langue X X
3. Modèles didactiques : existe-t-il
des liens entre les apprentissages en
LN et les apprentissages en
français ? (indices agrégés ci-
dessous donnent une note de 0 à 3)
- comparaisons explicites faites entre
les systèmes
- analyses d’erreurs des apprenants à
partir des différences entre les langues
- recours à des traductions d’une langue X (F → LN) X (F → LN) X (F → LN)
à l’autre
4. Gestion de l’utilisation des
langues dans la classe
- une seule langue présente dans la X X
communication
- recours à des emprunts à l’autre X
langue quand le mot emprunté n’existe
pas
- recours à de l’alternance codique X X
servant à mieux expliquer
5. Supports de l’enseignement
- un manuel est-il utilisé ? Non Non Non Non
- combien d’élèves par manuel pendant Aucun Aucun Aucun Aucun
la leçon ?
- combien d’élèves avec le manuel Aucun Aucun Aucun Aucun
pendant la leçon ?
- des supports authentiques (journaux, Non Non Non
chansons, publicités) sont-ils utilisés ?
Si oui, lesquels ?
- d’autres matériels sont-ils utilisés ? Si Ardoises, craie Ardoises, craie Ardoises, craie
oui, lesquels ?
6. Niveau linguistique du maître
dans la langue de scolarisation
- le maître a-t-il la langue de Non Non Oui Oui
scolarisation comme langue première ?
- le maître a-t-il eu une formation Oui Oui Oui Oui
initiale générale ?
142 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Cette grille a pu être remplie par un seul observateur par séance, simplement. On peut
même considérer qu’une vingtaine de minutes passées dans la classe suffit à fournir
l’essentiel des informations.
L’analyse agglomérée de plusieurs réalités de classe de ce type peut contribuer à avoir
une vue précise de la situation et aider à prendre des mesures éventuelles en matière
de formation des maîtres si l’on considère que tel ou tel point n’est pas conforme aux
attentes d’une politique de scolarisation bi-plurilingue.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 143
On voit tout le parti qu’on peut donc tirer d’un tel outil, non seulement comme ins-
trument primaire de recueil de données didactiques, mais également comme
instrument secondaire, utilisé de manière réflexive, en formation des maîtres.
111 F.-O. Seewald, 2009, Rapport de stage effectué au Burundi dans le cadre de l’IFADEM. Mémoire de
112 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : approches biographiques des par-
cours et des mobilités plurilingues, biographie langagière, éducation biographique, démarche Portfolio,
Portfolio, récit de vies (et de parcours) plurilingues, réflexivité, paradigme réflexif, dessin réflexif.
113 Histoire de vie est la traduction littérale de l’anglais life history.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 145
114 L’expression « récit de vie » apparaît en France dans le but de distinguer l’histoire vécue par une per-
Coordonnée par M. Molinié et M. Blancart, elle rassemblait des contributions de Véronique Castellotti et
Danièle Moore (Université François Rabelais-Tours et Université Simon Fraser), Masahiro Terasako
(Université Préfectorale d’Osaka), Aline Bergé (Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle), Stéphanie Clerc
(Université d’Avignon), Muriel Molinié et Marie Blancart (Université de Cergy-Pontoise).
116 Cette seconde journée intitulée Dessin et destin : du tracé aux traces ; Mobilités, plurilinguisme et francophonies, a
réuni Véronique Castellotti (Université François Rabelais-Tours), Fabienne Leconte (Université de Rouen),
Christiane Perregaux (Université de Genève), Muriel Molinié, Marie Blancart (Université de Cergy-Pontoise),
Hideo Hososkawa (Université Waseda, Tokyo) et Elatiana Razafimandimbimanana (Université de
Rennes 2).
146 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Participent aux travaux du groupe Sodilac actuel : Jacqueline Billiez, Marielle Rispail, Chantal Domp-
117
Didactique des - Correspondances (écrites, audio, - Faire prendre conscience aux enseignants
langues et du vidéo) de la réalité plurilingue.
plurilinguisme
- Journaux de bord d’apprentissage Problème de manque de conscience des
enseignants face à la situation plurilingue des
- Biographies, Histoires et Parcours élèves. Les biographies langagières : un outil
langagiers important pour pouvoir travailler avec eux sur une
- Portfolio socio-constructiviste (vs prise de conscience de la variété.
applicationniste) « Quand la formation - ou l’école - s’intéressent au
- « dessin réflexif » et verbalisations biographique, elles ouvrent un espace de parole et
orales (entretiens) et/ou écrites d’écriture à la reconnaissance individuelle et
souvent collective des savoirs langagiers des
apprenants, des représentations qu’ils ont
construites des rapports aux langues et à ceux qui
les parlent » (Perregaux, 2002 : 93).
- Faire travailler les apprenants
- sur leur répertoire linguistique dans les contextes où
celui-ci s’est construit et évolue, avec mise en
évidence des moments où ce répertoire se modifie
(influence de l’environnement sur les
apprentissages)
- sur les apprentissages (linguistiques et culturels)
réalisés au contact des autres.
148 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/CADRE_FR.asp (27/04/10).
150 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
tions sociales et identitaires. Molinié (2008) propose de voir comment ces compo-
santes s’organisent dans deux textes écrits par une étudiante portugaise (Catia) afin de
présenter son Parcours international de formation et son Projet personnel, mené dans le cadre
de ses études en lettres et sciences humaines, en séjour Erasmus. Séjournant à Paris
dans sa famille portugaise, c’est dans le cadre d’un cours de français langue étrangère,
délivré par son université francilienne, qu’elle choisit d’enquêter et d’interviewer ses
proches au sujet de leur émigration en France. Elle souhaite comprendre les raisons
qui ont poussé et poussent encore tant de Portugais à quitter leur pays natal. Une série
d’informations, (recueillies à travers lecture, documentaire, conférence et entretiens
d’enquête), lui permettent de resituer ces processus dans une perspective historique et
à mieux situer la migration de sa famille dans l’histoire collective120. Lorsqu’elle de-
mande à ses interviewés de s’exprimer sur leur identité française et/ou portugaise elle
réalise que « le migrant doit mettre en relation deux mondes, deux cultures, articulées
autour de la langue d’origine et de la langue d’accueil » (Lüdi et Py, 1986 : 59).
Le bilinguisme franco-lusophone transmis par sa famille est interrogé par Catia au regard
de sa situation présente (en séjour Erasmus121 en France), avant d’être mis en relation
avec son questionnement sur l’avenir (rentrer au Portugal ou émigrer ?). Ce questionne-
ment est articulé sur des notions d’espace (Portugal, France, ailleurs) puisqu’elle va
comparer la migration familiale avec sa propre mobilité. Le tableau ci-dessous montre
que a) Catia dit de son identité première qu’elle est marquée par – et reliée à – celle de la
migration portugaise en France (colonne de gauche), mais que b) la représentation
qu’elle se forge de son identité présente (colonne centrale) et à venir (colonne de droite),
n’est pas exactement celle d’une migrante entre Portugal et France.
Tableau : Reconfiguration identitaire en diachronie
Identité héritée122 en contexte Identité acquise dans le contexte Identité espérée, en contexte
d’émigration Portugal-France de la Réforme de Bologne « international » ?
Je voulais beaucoup venir en France Aujourd’hui, je suis ici en France. Ce que je veux savoir est si cela vaut
pour étudier, parce que dès que j’étais Maintenant, je réalise un projet de vraiment la peine d’émigrer du
petite je pensais qu’un jour je sortirais mobilité internationale (même que Portugal parce que pour mon avenir
du Portugal pour avoir, au moins, une soit temporaire) (Catia, Projet cette réponse peut-être très
petite expérience à l’étranger car ma personnel). importante […].
famille habite presque en totalité à
l’étranger (Catia, Projet personnel). Bologne a été adopté par mon Chaque expérience internationale est
université et la confusion continue très personnelle et parfois c’est
Depuis que je suis petite j’entends jusqu’aujourd’hui (ECTS). Avec difficile d’associer leurs histoires à la
presque toute ma famille parler l’adoption de la Déclaration de mienne (Catia, Projet personnel).
français. Alors j’ai passé toute ma vie Bologne, la direction de l’école
en écoutant des expériences de vie en commence à essayer de motiver ses
France (Catia, Récit d’un parcours étudiants pour l’expérience qui est
international de formation). l’Erasmus (Catia, Récit d’un parcours
…).
120 À travers son questionnement sur les raisons de l’émigration portugaise en France, Catia interroge les
conditionnements familiaux et historiques qui ont conduit la génération précédente à développer des
formes de mobilité et d’identité bi-pôlaires.
121 Erasmus (European Region Action Scheme for the Mobility of University Students) est le nom donné
au programme d’échange d’étudiants et d’enseignants entre les universités et les grandes écoles euro-
péennes.
122 Identité héritée, acquise, espérée (voir Vincent de Gaulejac, 2002).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 151
Au cours de son séjour à Paris, elle accomplit le projet forgé dans l’enfance d’avoir
« au moins, une petite expérience à l’étranger ». Mais ce sont les notions de « mobili-
té » et « d’expérience » internationales qui semblent désormais constituer pour elle une
possibilité d’étayer son désir de mobilité identitaire. Elle perçoit son statut social
d’étudiante Erasmus comme ouvert sur d’autres mobilités que le seul va-et-vient iden-
titaire entre deux destinations. C’est le sens de la question posée dans son récit de
parcours : « Est-ce que je dois continuer avec mon expérience internationale ou je dois
rentrer au Portugal ? ». L’alternative posée ici n’est plus entre Portugal ou France mais
entre expérience internationale ou Portugal.
On rejoint là, la position exprimée par Baroni et Jeanneret selon qui, articuler les pers-
pectives, réflexive et identitaire, contribue à offrir aux sujets « l’occasion de renouveler
leur motivation pour la tâche d’appropriation, dans le sens où les expériences vécues
ainsi que les identités sociales des apprenant·e·s sont susceptibles d’être valorisées
(socialement, institutionnellement, professionnellement, etc.) par le biais de la produc-
tion biographique ».
3.10.2.2. Où le discours sur la mobilité se co-construit dans une interaction qui ne le fige pas
Revenant sur la méthode biographique mise en œuvre dans son travail de recherche
(portant sur les recompositions identitaires de sujets plurilingues en situation de mobilité dans un
contexte d’entreprise internationale), Nathalie Thamin (2008), constate que, dans les entre-
tiens biographiques menés, les marques de co-construction du récit sont de diverses
natures. Il arrive que les relances de l’enquêteur conduisent l’entretien là où
l’expérience vécue n’avait pas encore été analysée par le sujet. Le sujet amorce alors
« une prise de conscience de ses attitudes et de ses stratégies langagières et identi-
taires ». Certes, réfléchissant in situ le sujet produit son discours sur des thématiques en
partie familières qui sont alors abordées sous des angles de réflexion nouveaux et à
travers une nouvelle verbalisation du familier, ce qui contribue à ramener au présent
certains souvenirs, « à revenir sur les propos antérieurs, les reprendre, les développer,
les affiner, les compléter ».
Elle montre ensuite que le récit de vie est également ponctué de « marqueurs qui met-
tent en valeur le souci de répondre aux attentes de l’enquêteur et de s’inscrire dans les
objectifs de la recherche » :
5. Vous voulez que je vous parle librement de ce qui m’avait semblé important ?
16. […] puis j’ai peut-être un autre un autre point à ajouter qui me concerne
moi personnellement
35. […] et puis j’ai peut-être aussi quelque chose à vous dire sur + vous avez
parlé d’identité euh :
Ce qui intéresse ici N. Thamin, c’est la mise en valeur des indices marquant l’attitude
réflexive de Silvana, en situation de raconter sa vie. La chercheure s’associe à
C. Perregaux pour qui,
«… ce qui nous intéresse en fait, c’est "le biographique" comme processus
152 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
- récit de votre enquête : hypothèses : de départ / d’arrivée ; principaux outils conceptuels ; méthode d’enquête ;
- analyse de votre implication dans – et au cours de - cette enquête (réflexivité) ;
- présentation et analyse des résultats de la recherche.
Chaque analyse est précédée d’un compte-rendu des extraits d’entretiens sélectionnés pour analyse. Votre analyse est
toujours précédée d’une reformulation de l’extrait d’entretien choisi (transcriptions en annexe). Conclusion : qu’avez-
vous appris, et compris à travers cette démarche ? Bibliographie commentée.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 153
diversité culturelle, 2005). Ainsi, l’écoute et le recueil d’un récit de vie peuvent être utilisés
comme source de connaissance sur l’intégration et comme point de départ à une in-
tervention pédagogique. Quatre idées clés illustrent les apports de cette démarche et
les transferts didactiques explicités par les étudiants en fin d’année universitaire :
- l’apprenant est désormais perçu comme une source de savoirs ;
- il faut comparer les cultures sans jamais les dévaluer ;
- pédagogie et contexte d’enseignement sont intimement liés ;
- journal de terrain et entretien de compréhension biographique sont des outils
indispensables à l’enseignant : « Ce projet d’enquête m’a ouvert une nouvelle
perspective sur le monde du FLE (…). J’ai remarqué que le journal de terrain et
l’entretien de compréhension sont des outils indispensables pour comprendre le
cheminement des apprenants face à leur apprentissage : leurs représentations,
leurs expériences, leurs réflexions et je pense que je réutiliserai ces outils qui peu-
vent aider à parfaire une pédagogie d’enseignement» (E.D., Dossier d’anthropologie de
la diversité culturelle, 2005).
devenir un levier de communication entre les enfants (ou les adolescent) et les adultes
(chercheurs et formateurs) qui les sollicitent. Inspirée par deux consignes initiales127, la
réalisation de nombreux dessins contribue d’ores et déjà à enrichir les connaissances
circulant (en didactique des langues et des cultures, en sociolinguistique et en sciences
de l’éducation), sur un certain nombre de problèmes : depuis la solitude et l’ennui res-
sentis dans les apprentissages scolaires des langues jusqu’aux représentations clivées
du répertoire plurilingue, sans oublier le fort sentiment d’isolement exprimé par les
enfants nouvellement arrivés sur le territoire.
Il est cependant capital de préciser que ce n’est pas le dessin en lui-même mais le dispo-
sitif comprenant le moment de la consigne, le moment du dessin et celui des entretiens
d’explicitation, des entretiens biographiques (ou encore de verbalisations) qui s’avère
126 Voir : Dessins d'enfants, recherche qualitative, interprétation. Des poly-textes pour l'étude des imagi-
naires du plurilinguisme (D. Moore et V. Castellotti).
127 La consigne n° 1, proposée par V. Castellotti et D. Moore, « dessine comment c’est dans la tête de
quelqu’un qui parle plusieurs langues », est reprise et mise en œuvre dans le dispositif et la recherche pré-
sentée dans cet ouvrage par F. Leconte. La consigne proposée aux enfants par C. Perregaux est
simplement de « dessiner plusieurs langues ». La consigne n° 2, formulée par H. Trocmé, « dessine-toi en
train d’apprendre une langue », a inspiré le dispositif analysé dans l’article de S. Clerc qui a simplement
demandé « dessine-toi en train d’apprendre » à un groupe d’enfants nouvellement arrivés en France.
154 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
être le levier permettant d’enclencher des dynamiques d’interprétation (sur la place des
apprentissages de langues et de cultures dans sa vie) de la part du sujet « dessinateur ».
En effet, ce dispositif permet, en premier lieu, de rendre visibles et de prendre acte des
déterminants sociolinguistiques et de leur circulation dans le milieu scolaire. Il permet
en second lieu de conduire des processus de conscientisation, de verbalisation et de
réflexion sur ces déterminants. Enfin, il ouvre la voie à la remédiation pédagogique et
à la production de nouvelles représentations, complétant en cela les dispositifs
d’intervention conduits notamment dans le champ de l’éveil aux langues. Ces disposi-
tifs permettent aux dessinateurs réflexifs de développer une perception d’eux-mêmes
en interaction avec leur environnement (Wallon, 2001) et de nouer des dialogues in-
terprétatifs ou herméneutiques (De Robillard, 2009) avec leurs pairs et avec les
chercheurs. Ces étayages sont nécessaires aux sujets plurilingues pour advenir comme
médiation, c’est-à-dire « comme troisième terme face à l’ensemble des déterminations
plus ou moins contradictoires qui les constituent » (Gaulejac, 2009 : 12).
La transmission d’un récit de vie peut contribuer à créer des « ressources subjectives »
tant chez celui qui l’énonce que chez celui à qui ce récit est adressé et transmis. Cette
hypothèse, forgée par Catherine Delcroix à propos des récits d’émigration transmis
par les parents à leurs enfants, est explicitée de la façon suivante : « la connaissance de
l’histoire des parents constitue une véritable ressource pour les enfants et sa mécon-
naissance, conséquence de sa non-transmission, un facteur de déséquilibre» (Delcroix,
2001 : 73). Si la transmission ou l’élaboration d’un capital d’expérience biographique
contribue à donner du pouvoir d’action aux sujets (qu’ils soient en formation en
langue ou en formation didactique), alors la méthode biographique présentée ici à sans
aucun doute une pertinence.
Ainsi, autoriser un jeune adulte en formation aux métiers de la transmission, à sollici-
ter un récit d’émigration, qui ne lui avait pas été transmis, peut lui permettre de
répondre à une question. C’est le cas de Danièle (issue de l’émigration malgache) qui
relève : « le malaise ambigu des minorités, notamment celui des enfants d’immigrés »
et s’interroge :
« Se peut-il que ce malaise soit le fruit (conscient ou inconscient) de la
souffrance des parents ou des grands-parents qui eux, ont vécu la colonisation
donc l’occupation française et la décolonisation ? Je veux chercher à
comprendre […] une partie au moins, de l’origine de ce malaise, qui remonte
loin dans l’histoire d’une famille. Je dois trouver une personne qui a vécu ces
événements et analyser leurs répercussions sur la vie personnelle, familiale et
autres, et voir si cette personne a pu dire ou transmettre cette souffrance à ses
enfants ou petits-enfants ».
Comprendre les déficits dans les transmissions passées, y remédier pour tenter, à son
tour, de transmettre la langue française, à travers un métier (celui d’enseignant) et se
construire un avenir, est l’une des motivations les mieux repérées en formation
d’enseignants à/par la méthode biographique.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 155
128 Dans cette présentation, nous allons uniquement introduire les notions de base pour l’utilisation
d’Excel, mais avec un peu de pratique, il est aisé de percevoir que OpenOffice Calc et Excel sont très
proches d’usage et ont – de toutes les façons – les mêmes propriétés. Excel et OpenOffice Calc sont des
marques déposées.
156 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
ser les outils statistiques, dès lors que l’on travaille sur du qualitatif (même quanti-
fiable) ou des tendances129.
Les tableurs actuels sont des logiciels largement répandus130 qui intègrent un tableur
puissant, un gestionnaire de base de données, ainsi qu’un grapheur. Utiliser Excel131 –
qui va donc servir de base à cette présentation – permet à un chercheur de se libérer
des tâches secondaires (trier des données, calculer des moyennes à la main, ou dessiner
des graphes sur papier) et lui permet ainsi de consacrer plus de temps à l’interprétation
des résultats ou à la recherche de nouvelles hypothèses.
Ce texte est ainsi organisé en deux temps :
Temps 1 : Avoir les compétences nécessaires
- créer des bases de données ;
- utiliser les filtres automatiques pour extraire et présenter les données qui vous
intéressent ;
- générer des tableaux croisés permettant de regrouper et recouper les données
en vue de les analyser et les interpréter ;
- utiliser le grapheur pour représenter graphiquement ces données.
Temps 2 : Travailler sur des données langagières
- le projet d’analyse
- le dépouillement des données
- la pré-analyse des réponses
- l’analyse
129 Sans quoi nous vous renvoyons à l’utile manuel de Jean-Pierre Georgin (2002), ainsi qu’à celui de Ni-
cole Berthier (1998), mais également au travaux de Bruno Marien (2004) et de Bruno Marien et Jean-
Pierre Beaud (2003).
130 Hors les aides intégrées sur les logiciels, des forums aux questions sur l’Internet fournissent des con-
seils et astuces en grand nombre… Ainsi si vous ne savez pas faire de capture d’écran pour les insérer
ensuite sous Word, tapez sur un moteur de recherche : « capture d’écran vers Word ». Vous serez sans
doute surpris.
131 Cette présentation implique la connaissance des notions de base du tableur Excel, à savoir la saisie et
formatage de données dans une feuille de calcul, la sélection de plages de cellules et le chargement et
sauvegarde de classeurs, etc. Cependant, si ces principes de base ne sont pas connus, il faut se référer à
l’aide intégrée d’Excel (touche F1).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 157
Figure 1
132 Type Excel de Microsoft (il existe Calc de la suite Open Office, logiciel gratuit en open source).
158 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Figure 2 Figure 3
Cliquez sur la case déroulante d’un des champs : la liste exhaustive des valeurs prises
par le champ tout au long de la base apparaît alors. Si un champ prend plus de quatre
valeurs différentes, une barre de défilement permet de se déplacer dans cette liste.
Pour établir vos critères, cliquez alors sur le mot ou la valeur de votre choix pour cha-
cun des champs désirés (Figure 3).
Tous permet de supprimer le(s) critère(s) mis en place sur ce champ. En pointant sur
une des trois valeurs vous mettez en place le critère d’égalité sur cette valeur à ce
champ (vous opérerez un tri à plat). L’exemple ci-dessous montre ce qui se produit
lorsque l’on sélectionne licence » dans la case « déroulante » correspondant au diplôme
(Figure 4).
Figure 4
Dès qu’un critère est positionné sur un champ, les numéros de ligne de la feuille sont
en bleu. Les champs sur lesquels les critères sont en cours ont aussi leur case « dérou-
lante » en bleu. Pour retrouver une visualisation intégrale de la liste il suffit de
supprimer les critères en cours en sélectionnant « Tous » ; les numéros de ligne repas-
sent en couleur noire.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 159
Figure 5
Pour remplir le TDC, il suffit de : faire glisser le libellé « Rive » vers la case « Déposer
champs de ligne ici », faire glisser le libellé « Diplome » vers la case « Déposer champs
de colonne ici » et faire glisser le libellé « Prénom » vers la case « Déposer données
ici ». Le tableau croisé se transforme alors pour donner (Figure 6) :
160 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Figure 6
Notez qu’Excel ajoute automatiquement des lignes où figurent les totaux et sous-
totaux. Par défaut, Excel affiche la somme des âges. Or, dans le cas de notre étude
fictive, c’est la moyenne des âges qui nous intéresse. Il suffit de le préciser à Excel, à
nouveau par un clic-droit (le pointeur positionné sur « Données », puis en choisissant
l’item Champ. On choisit « Synthèse par moyenne » au lieu de « Synthèse par somme »
et on obtient enfin un tableau où des valeurs significatives (moyennes et totaux) sont
en évidence (Figure 10). Le menu Format/Cellule/Nombre/Nombre de décimales
nous permet finalement de n’afficher qu’un nombre après la virgule, ce qui est am-
plement suffisant pour notre étude d’où ce tableau définitif de la figure 11
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 161
Figure 10 Figure 11
L’intérêt des TCD est alors évident : les données y sont plus lisibles grâce aux regrou-
pements et calculs effectués automatiquement par le tableur
Figure 12 Figure 13
On peut bien entendu changer le type de diagramme. Optons par exemple pour des
histogrammes groupés car ce type de graphe peut sembler mieux correspondre à
l’analyse que nous voudrions effectuer (Menu Graphique > Type de graphique). Le
résultat obtenu ci-dessous est vraiment plus facile à lire : il permet de voir clairement
la répartition des diplômes des étudiants en fonction de leur origine géographique et
de leur sexe (Figure 14). On peut très rapidement obtenir un diagramme133 représen-
tant l’âge moyen des différentes catégories d’étudiants : il suffit pour cela a) sur le
TCD de désactiver dans le champ Données le bouton « Nb d’étudiants » puis de
mettre à la place le champ « Sexe » et on obtient alors un histogramme qui permet de
faire des comparaisons entre les étudiants originaires de la rive droite et ceux issus de
la rive gauche (Figure 15).
Figure 14 Figure 15
133 Étant donné que les données traitées ici sont fictives, ce diagramme n’est en rien significatif.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 163
Figure 16
à la condition de bien discriminer les items choisis, car ainsi, l’aide à la saisie automa-
tique du logiciel permet de gagner ainsi beaucoup de temps (Figure 17)
Figure 17
Pour les échelles d’attitudes, il suffit de reprendre chacune des cases possibles et de les
recoder arbitrairement par des lettres continues, pour ainsi mettre en place par la suite
des tableaux croisés dynamiques. Dans ce tableau (Figure 18), la question initialement
posée pour la colonne EK3 est :
1) Pensez vous parler le cauchois ? (cochez la case qui correspond à votre réponse et ainsi
de suite pour toutes les autres questions de cette étape)
La première case sur la gauche est a, puis la suivante b et ainsi de suite jusqu’à g (ce
qui explique en partie dans l’exemple les oui/non, non et oui de la colonne intitulée
« Locuteur ».
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 165
Figure 18
Figure 19
166 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
3.11.2.5. L’analyse
Nous le rappelons, l’analyse consiste à faire des tris à plats, des TCD et des graphiques.
Ainsi (Figure 20) considérant le tableau ci-dessus (et en vous reportant à la présentation
du logiciel) nous avons un tri à plat sur plusieurs catégories (par les boutons-ascenseurs)
des personnes enquêtées à Dieppe (cellule A3) qui sont de femmes (cellule C3) qui
sont nées en 1984 (cellule D3), jeunes (cellule E3), nées en Pays de Caux (cellule F3) et
habitant au moment de l’enquête en zone rurale (cellule H3)
.
Figure 20
Des deux tableaux suivant, le premier (Figure 21) est un tableau croisé dynamique il-
lustrant les réponses du groupe le plus jeune de l’enquête (cellule B8), garçons ou filles
(cellule C10) sur les corrélations entre le fait de se déclarer locuteurs ou non (en habi-
tant en zone rurale ou urbaine) et de poser le cauchois comme étant la langue de la
région (à 68%). Le second (Figure 22) rend compte des corrélations entre le score ob-
tenu aux tests de compétence linguistique en cauchois et le fait de se déclarer locuteurs
ou non. On perçoit ainsi que, proportionnellement les bons locuteurs en terme de
compétence (score entre 8 et 11) se déclarent moins locuteurs que ceux qui (avec les
mêmes scores) se pensent locuteurs (nous renvoyons à Bulot, 2006 pour le détail de
ces analyses).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 167
Figure 21 Figure 22
Figure 23
168 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
En conclusion, et sans pour autant dénier à d’autres logiciels ces propriétés134, Excel
est un outil d’aide au dépouillement et à l’analyse des données langagières ; il permet
de ne pas être enfermé dans des modèles de langue (pour l’analyse linguistique entre
autres) qui évacueraient la complexité et le dynamisme des pratiques langagières. Sa
souplesse d’utilisation (la base de données est sans cesse évolutive et modifiable sans
pour autant perdre des informations) en font un auxiliaire très utile pour la mise en
place d’un objet de recherche : il est effectivement ce type d’objet technique à penser
comme utilisable dans la définition des objets d’enquête (autrement dit il faut l’intégrer
dans la définition de l’objet de recherche ) par le cadre des possibilités135 qu’il offre à
l’analyse (en d’autre termes, il faut construire formellement, par exemple, un protocole
d’enquête en rendant possible la recherche de corrélations.
Ainsi, tout chercheur peut dépouiller un corpus d’observable ave ce type de tableur et
de tenter des analyses sur la totalité des pratiques.
logiciel.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 169
À ce titre, l’analyse d’un corpus didactique est avant tout linguistique, et la réalité so-
ciale étudiée est celle d’échanges verbaux organisés dans la classe (ou autour de la
classe, en cas d’entretiens). On se basera sur le cas de corpus interactifs, c’est-à-dire
résultant d’enregistrements « écologiques » faits en classe ou par entretiens. Le corpus
sur lequel nous nous sommes basés, des « ateliers de philo » (AP désormais), avec des
élèves de 5 à 8 ans, nous invite à nous demander ce qui s’articule avec quoi lorsque des
enfants, dans un cadre scolaire, débattent autour d’un thème donné. En effet, dans
« inter-action » il y a « inter » et « action ». Mais agir « entre » quoi et quoi ? On
n’épuise pas la question à dire que les échanges s’enchaînent, ou que du sens se crée
par les échanges. Il faut aussi se demander quels outils, conceptuels et méthodolo-
giques, vont nous permettre de décrire et d’entrer dans le fonctionnement des
interactions développées dans cette situation (de classe) particulière, quel processus se
met en place et pour quelle construction.
A priori, on entend souvent parler d’analyse de discours et d’analyse propositionnelle,
selon la méthode exposée par Rodolphe Ghiglione137 – les deux n’étant pas toujours
distinctes dans les faits, et se réduisant souvent, par déformation, à des analyses thé-
matiques. Nous verrons plus loin que réduire un texte, interactif ou pas, à une
composition thématique, revient à oublier les mots choisis, les tournures syntaxiques
et lexicales, les bribes et hésitations, bref à nier le locuteur et ses choix, conscients et
inconscients, ses avancées ou sa façon d’avancer. Or il nous semble important de resti-
tuer à celui-ci la priorité de l’analyse, car celui qui parle, ou ceux qui parlent, sont
d’abord des sujets, des acteurs par la langue, et que l’élucidation de cette action est
l’objet de notre analyse. C’est donc des « actions de parole » que nous allons tenter de
décrire dans une analyse qualitative d’interactions verbales.
Je commencerai par résumer la situation de recherche qui me servira de référence,
pour résumer ensuite la démarche de recherche dans son ensemble, avant d’en dégager
quelques principes méthodologiques pour analyser des corpus oraux, et de poser pour
finir la question des implicites du discours.
136 Cf. Calvet L.J., La sociolinguistique, PUF, QSJ ?, n° 2731, 1993, Paris, p. 88.
137 On notera que ses travaux qui, à partir d’un ancrage psychosociologique, construisent l'analyse propo-
sitionnelle de discours (apd) issue de l'analyse de contenu, puis évoluent vers l'analyse cognitivo-
discursive, peuvent inciter à identifier davantage des « objets de discours » que des « modes du dire » et, à
ce titre, qu’ils sont parfois peu aptes à rendre compte du fonctionnement d’échanges et interactions.
138 Zone d’Education Prioritaire.
170 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
tous le français en langue seconde ou troisième. Chaque atelier dure 10’ et commence
rituellement par le rappel des « règles » et l’annonce du sujet du jour. L’enseignante s’y
est donné pour fonction de poser le sujet sous forme de question, de relancer éven-
tuellement le débat, de donner la parole et de clore le débat une fois le temps convenu
écoulé.
B. La problématique posée à notre corpus est la suivante : Comment se résolvent,
dans des débats scolaires enregistrés140, les différentes tensions inévitablement géné-
rées par la rencontre des cultures ? Comment les observer ? et à quels indices les
repérer ? À travers des interactions enregistrées, nous nous proposons donc d’explorer
la façon dont les élèves abordent le rapport à l’autre, l’intègrent dans leur discours, se
l’approprient et parviennent ou non à apprendre à vivre et dire l’autre. Autrement dit,
nous posons la question du rapport entre identité et altérité, à travers des interactions
langagières : y a-t-il rupture ou complémentarité ? inclusion de l’une dans l’autre ? in-
tersection de l’une avec l’autre ? Nous soulignons avec Marinette Matthey que
« (celui qui) dit interaction sociale dit aussi, bien sûr, activités langagières. Le
rôle du langage dans les interactions sociales est ainsi fortement souligné : la
langue est envisagée comme un puissant outil de médiation symbolique, dont
va dépendre le développement global de l’individu.141 ».
On peut en outre considérer que, dans une situation scolaire, l’individu invité à se dé-
velopper est le groupe-classe.
C. Voici les hypothèses principales qui ont été posées :
Nous postulons que ces débats créent un espace interactionnel (H1) où peut se déve-
lopper l’action verbale, dans lequel peuvent se déployer la découverte de l’autre et
parallèlement la construction du sujet langagier, grâce à la mise en place de « balises de
risques » à identifier.
On risque donc de trouver, dans les manifestations langagières de cette expérience,
des formes de contournement des conflits, de tractations et de négociations (H2), plus
que des affrontements explicites.
D. Nos préalables théoriques se sont attachés à créer des relations, des liens de conni-
vence, comme des « zones conceptuelles », qui permettent de mettre en synergie des
concepts, plus que de les figer dans des définitions. Ces zones se sont organisées au-
tour des « couples » ou « trouples » suivants : altérité / identité, culture / interculturel,
altérité / langage / langue, débat / interactions / citoyenneté, construction de soi /
construction de l’autre, débattre en classe / enjeux scolaires, enjeux scolaires / enjeux
sociaux. On voit que ces figures à deux ou trois termes peuvent donner lieu à diffé-
rentes combinaisons et emboitements, à des jeux d’échos et de mises en abyme. Cette
139 Sud-est de la France, région à forte population immigrée.
140 Une littérature très fournie existe sur les ateliers de philosophie à l’école. Par manque de place, nous
laissons le lecteur s’y référer pour comprendre la situation de parole ainsi construite.
141 Cf. « Le français à l’école et ailleurs, langue des apprentissages et de la socialisation », L’intégration des
migrants en terre francophone, aspects linguistiques et sociaux, textes réunis par V. Conti et J.F. de Pietro, Déléga-
tion à la langue française de Suisse romande, Lausanne, éd. Lep, 2005, p. 145.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 171
dynamique conceptuelle est fondamentale pour l’étude du corpus, et elle fait vérita-
blement partie de l’analyse et de sa méthodologie, dont elle est la première étape ; car
elle dessine un paysage et ses repères, où pourront s’enraciner et prendre forme les
détails de l’analyse. Si nous insistons ici sur cette phase, c’est aussi pour combattre ce
principe trop répandu de l’étanchéité entre les phases (et ensuite dans l’écriture des
parties) théorique, méthodologique et analytique, alors que toutes trois relèvent du
même mouvement et se répondent.
E. Réponse aux hypothèses de travail
Pour faire écho à notre H1, nous répondons que c’est bien dans l’espace interactionnel
créé par ce débat scolaire que se construit le rapport à l’autre, rapport que nous avons
pu aborder grâce à certains outils de la didactique des langues, de la linguistique et de
la sociolinguistique, entre autre par les notions de culture, de rapport entre langue et
culture, et les outils des systèmes énonciatif et lexical. L’analyse du corpus, même si ce
n’était pas l’objet premier de notre étude, souligne le rôle de l’enseignant dans ces inte-
ractions : il guide le bateau, même s’il le laisse souvent dériver à dessein, et ses
formulations de sujets ou interventions sont prépondérantes. Les AP sont une zone
privilégiée du développement de la Zone Proximale de Développement (ZPD), où,
sans être quantitativement équivalentes, les interventions du maître sont aussi impor-
tantes que celles des pairs. On en conclut que l’identité se renforce au contact de la
différence, qui devient peut-être première dans le processus de construction de soi.
C’est parce que je pose l’autre et son altérité, qu’en rebond mon identité m’apparaît, se
révèle, comme sur une plaque photographique. Dans les AP, la découverte est une
entreprise collective, où l’on évite autant les ruptures à l’intérieur du groupe qu’entre le
groupe et l’extérieur de l’école (H2).
F. Au-delà de ces réponses, des résultats transférables
Il est symptomatique finalement de ne pouvoir atteindre la notion d’altérité qu’à tra-
vers celle d’identité, comme si la première n’était que le verso de la seconde, ou
l’inverse. Nous avons pu montrer que l’enfant se construit en élargissant son identité
aux limites de l’altérité et en se frottant à elle – et vice-versa.
Notre étude a déterminé aussi comment la présence de l’autre, venu d’une autre cul-
ture, se manifeste sous des formes discursives diverses et signifiantes ; et comment
interagissent ces diverses manifestations entre elles. Après avoir interrogé, pour
l’invalider finalement, une première « évidence » selon laquelle l’altérité s’opposerait à
l’identité, nous nous sommes demandé si et dans quelle mesure le débat dans la classe
favorisait le chemin identitaire entre élèves. Frédéric François nous a guidée :
« C’est la relation aux mots d’autrui qui fait la réalité du langage »142.
Il est ainsi apparu que, si une altérité discursive peut prendre place dans ce dispositif,
c’est parce qu’elle y est aussi importante que l’identité discursive, au sens de « dite », au
point qu’on pourrait parler, à propos des jeunes enfants participant aux AP, d’une
142 F. François, « Langage et pensée : dialogue et mouvement discursif chez Vygostki et Bruner », Interpré-
tation et dialogue chez les enfants et quelques autres, ENS éd., p. 136.
172 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
affirmation de Tomy en fin d’année : / on a peur / parce qu’on se connaît pas / (31, 95),
montrant la fonction d’apprivoisement dans et par le langage.
Ces 4 éléments identifiés sont un exemple et non un modèle. D’autres apparaîtraient
dans d’autres contextes, à propos d’autres objets observés, avec d’autres objectifs.
143Sur la multimodalité de l’oral dans la classe, on consultera utilement les travaux de Jean-Marc Colletta
de Grenoble 3.
174 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
Ainsi notre attention a été, on l’a vu, peu à peu attirée par les pronoms, les noms de
personnes, les formules impersonnelles, non dans l’idée d’un langage imparfait ou la-
cunaire, mais dans celle d’une façon spécifique aux enfants d’utiliser et de s’approprier
la langue. Il en va de même quand on travaille sur un corpus de locuteurs qui ne par-
lent pas dans leur langue maternelle.
D. Tous ces phénomènes patiemment étalés et rassemblés créent peu à peu des
groupes (quatrième phase), des ensembles : on fait des rapprochements (les noms de
personnes, les façons de désigner le temps), on tente des cohérences (effets de listes,
effets de balancier, reprise d’un même connecteur, régularité d’un lien espace / temps,
etc). Ainsi se redessine finalement sous nos yeux le paysage discursif : des motifs devien-
nent apparents, qu’on n’avait pas prévus, des reliefs s’opposent à des creux du
discours, des insistances soulignent des non-dits, on « entend » ce qui, dans une prise
de parole, fait écho à une (pas obligatoirement « la ») précédente ou une suivante du
dialogue.
E. Parmi ce qui nous échappe, plus grave est sans doute la difficulté à saisir la « parole
silencieuse » (phase 5) (l’expression est de Marcelline Laparra, de l’Université de Metz,
qui l’employait volontiers lors de séances de formation continue avec des enseignants),
ou le « rhizome » propre au langage enfantin (ou au langage de celui qui apprend),
comme le démontre Nicolas Go144, ce trajet soudain souterrain, d’un processus ou
d’une parole, dans l’être intime du sujet, qui nous le rend invisible sans pour autant
cesser d’exister. C’est dire le rôle du temps dans la saisie des interactions, et ce temps,
qui déroule la parole et ses effets dans la durée, est souvent une inconnue dans les
études interactionnelles. Enregistrer et transcrire de façon longitudinale ne suffit pas à
résoudre le problème : il faut encore mettre en correspondance les paroles enregis-
trées, trouver des échos, voir que ce qui était décalé un jour J paraît central à J + 1 – et
tout cela crée de l’incertitude, de l’insécurité. Comment alors retrouver le chemine-
ment de la pensée de chacun ? Du groupe ? On bricole, jamais sûr-e de ne pas se
tromper, on tente des rapprochements, on fait des flèches sur le papier, on écrit des
mots vus plusieurs pages plus haut dans les marges, on essaie de retrouver des fils, des
réseaux, des courants souterrains qui affleurent par la formation de champs lexicaux
ou des réseaux anaphoriques, par la mise en relation de connecteurs.
F. La phase 6 consiste alors à observer ce qu’on vient d’aider à naitre. Observer pour
comprendre. C’est là que peuvent se donner à voir les enchainements, comment tout
cela fait corps : par des mots repris ou contredits, des fils qu’on étire pour les prolon-
ger, des oppositions franches qui vont ailleurs, des silences bruyants et de subreptices
connivences.
Etudier des interactions, travailler sur l’oral, ne peut se faire que si on accepte qu’on
travaille avec des pertes, qu’on va perdre du matériau et que, paradoxalement on va
passer par la mémoire de l’écrit. Peut-on faire de ce bouquet de fragilités une méthode
transférable ? Peut-on donner à cette méthode la forme réflexive d’une méthodologie
144Cf. sa thèse de doctorat, non publiée, soutenue sous la direction de Michel Tozzi à l’Université de
Montpellier (déc. 2006) et intitulée Vers une anthropologie didactique de la complexité : la philosophie à l’école, p.
195.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 175
145 Je pense à ces enfants de Palestine, avec lesquels travaille une de mes étudiantes, qui demande dès les
premières leçons de français comment on dit « chek-point » ou « fusil » et qui appellent leurs poupons
« Arafat ».
176 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
s’agit du même objet d’étude : on peut y lire les différentes étapes d’accès à
l’abstraction et à la connaissance146.
e) On n’oubliera pas, enfin, cette voie royale vers l’implicite que sont les bribes, re-
prises, hésitations du discours : autrement dit les ratures de l’oral. On peut y lire les
stratégies de parole, les désirs de gommer ou de mettre en valeur, les choix de mons-
tration, les (dé)gradés de la pensée, l’ascension vers une expression maîtrisée qui
exhibe, dans le même temps, ce qu’elle laisse en chemin. Ces caractéristiques des inte-
ractions verbales pourraient même constituer ce qu’il faudrait étudier en priorité,
puisqu’on peut y voir le dit en train de se dire, et ce que les locuteurs décident de ne
pas dire.
Dans tous les cas, on ne répètera jamais assez, il est essentiel de questionner les mots
plus que des thèmes reformulés, de s’accrocher à qui dit à qui, à comment on dit plu-
tôt qu’à ce qui est dit, et de questionner sans cesse son propre regard, dans un
dynamique réflexive qui n’a pas de fin.
Pour nous, on le voit, la méthodologie est un ensemble plus vaste que la simple définition des
outils de travail. Elle comprend la mise en forme de la problématique, dont dépen-
dront les moyens d’analyse, et un perpétuel aller-retour de l’une aux autres. Elle ne
peut exister a priori : seule la confrontation avec le corpus d’une première idée, encore
vague, d’une problématique virtuelle, peut donner naissance à l’ensemble probléma-
tique / moyen d’analyse efficace et pertinent, par un trajet en spirale ascendante qui
pourrait ne jamais s’arrêter, tant on ne peut être définitivement satisfait-e, au sens
étymologique, d’une étude interactionnelle. Par exemple, la notion seule d’altérité,
première dans notre intention, ne pouvait, sans jeu de mots, qu’altérer le sens du pro-
cessus collectif des enfants : il a fallu la lier à celles d’identité et de culture, et modifier
ainsi en retour notre problématique.
Alors, devant un corpus, quelle attitude ? lire, lire et relire, s’imprégner, sentir le flux, le sens
du courant, noter des liens, souligner, encadrer, une espèce de travail de peintre qui
fait une esquisse, très empirique, très intuitive, difficile à transmettre, mais facile à
montrer, à faire-avec, dans lequel on se sent de plus en plus guidé-e au fil des années
et sûr-e de soi. Peu à peu, des formes émergent, des échos se font, on se met alors à
identifier des natures de phénomènes épinglés : des formes linguistiques, des natures
grammaticales, des procédés lexicaux – autant de phénomènes qui reviennent, d’un
corpus à l’autre.
Ceux-ci vont servir de guides, dans un second temps, pour une relecture systématique du
corpus. Ils vont devenir têtes de listes à compléter : nous avons ainsi trouvé pour ce
corpus (sans trop de surprise, vu notre habitude de ce type de travail) les titres sui-
vants « phénomènes énonciatifs », « outils syntaxiques », « éléments servant de liens
sémantiques », « champs lexicaux », etc. Sous chaque titre, nous avons composé une
colonne d’extraits du corpus pour que l’étude devienne dans un premier temps ex-
haustive. Alors se sont composées des masses, vivantes, avec une double épaisseur
146Sur le lien entre langage et inégalités dans l’accès au savoir, on lira avec profit tous les travaux
d’Elisabeth Bautier.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 177
147 Détaillé dans la synthèse écrite pour mon Habilitation à Diriger des Recherehes, Plurilinguisme, pratiques
langagières, enseignement : pour une socio-didactique des langues, Université Rennes 2, dir. Ph. Blanchet, 2005.
178 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
placement. Elle fait accéder au « concept » dont F. François dit aussi que c’est « une
façon de se déplacer dans le déjà-dit, dans le discours de soi ou de l’autre. »148.
b) Sommes-nous encore dans la méthodologie ?
Notre étude de référence posait des problèmes intrinsèques de méthodologie « au car-
ré » puisqu’il fallait récolter des indices de présence d’une altérité / identité en
constitution chez les enfants, dans un matériau qui est lui-même fait d’échanges et
donc de contacts avec l’autre. La méthodologie est peut-être avant tout
l’expérimentation de valeurs, à l’œuvre, de la façon le plus rigoureuse possible, dans un
objet donné. Et ce qui s’y construit, surtout et indéfiniment, c’est l’altérité / identité
du chercheur. Nous nous référons encore une fois à F. François149 :
« (…) la place du « chercheur » : ne doit-on pas la considérer comme
doublement dialogique ? D’une part par rapport aux discours des autres
« scientifiques ». (…) D’autre part, qu’est-ce que comprendre ce que disent ces
enfants, sinon reformuler ces discours ou, en tout cas, en reconstruire les
entours ? (…) Certes, expliciter de l’implicite fait problème, ne peut renvoyer à
une méthode « objective » comme celle qui construit une « syntaxe de
l’enfant » (« objectivité » dont on peut assurément critiquer la fermeture et le
caractère fictif, mais c’est une autre question). Mais comment faire
autrement ? ».
Peut-on appeler cela une méthode ? Et encore plus une méthodologie ? Oui si on ad-
met qu’une méthode est un chemin et une méthodologie la réflexion sur ce chemin,
les deux étant fondées sur des principes théoriques qui confinent à l’affirmation de
valeurs et priorités éminemment sociales. Parmi elles, nous placerons au premier plan
un empirisme revendiqué : lire / relire / écouter / souligner / rapprocher, relier /
faire apparaître des dessins souterrains, faire émerger des mots, expressions, repères
qui aident l’édifice à se construire, repérer des formes discursives : listes, anaphores,
etc., oui, tout cela constitue une méthode, un cheminement qui se répète et devient mo-
dèle, chemin aisé peu à peu après avoir été défrichage à l’aveuglette. Mais sa légitimité
vient davantage de son usage multiplié que d’une efficacité affirmée a priori. Une autre
valeur affirmée est celle de l’insécurité : on pourrait dire en exagérant à peine qu’elle est
le garant du bon travail, quoi qu’il en coûte.
Le chercheur est un ouvrier qui met les mains dans la pâte, peaufine ses outils en
même temps qu’il façonne son objet de travail, et se façonne lui-même dans le même
temps. Cette interaction permanente à trois pôles (chercheur / objet / outil) s’appuie
sur l’importance à parts égales de ces trois pôles, elle réclame la révision permanente
des outils de travail et par là même la modestie du chercheur.
Étudier des interactions n’est pas un objet innocent, c’est en soi déjà une expérience
de l’altérité où le chercheur met à l’épreuve son identité, s’essaie à ses propres fron-
tières.
150 En psychologie sociale, on parle parfois à propos de ces constituants de « cognèmes », unités mini-
males composant les représentations sociales. Les linguistes verront aisément le parallèle avec phonème et
morphème : je retiendrai cette dénomination.
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 181
Parmi ces quatre types de « représentations », les trois premières sont ce que l’on
pourrait appeler des « représentations de pratiques » : elles traduisant la manière dont
les enquêtés voient les usages linguistiques. Le dernier ensemble est d’une autre na-
ture : il permet d’atteindre un système de valeurs. Celui-ci présente à nos yeux une plus
forte valeur heuristique en ce sens : il peut permettre d’expliquer les choix faits par les
sujets en matière de pratiques linguistiques, il se situe en amont de ces choix et peut
les motiver. Il constitue une sorte de partie moins visible de l’iceberg qu’il faut aller
explorer si l’on veut parvenir à une compréhension du comportement des acteurs lin-
guistiques.
C’est à ce niveau-là, celui de l’étude des systèmes de valeur construits par les sujets,
que se situe notre effort en matière d’étude des représentations. L’outil qui est présen-
té, nommé méthode d’analyse intégrée des représentations sociales (dorénavant MAI),
est inapte à analyser les réponses à des questionnaires portant sur les trois premiers
points. Il est en revanche tout à fait approprié dès lors qu’on veut savoir à quelles va-
leurs un groupe social associe les langues de son environnement.
Son développement répond à une insatisfaction face aux outils disponibles et que l’on
peut classer en deux grandes catégories : interviews (recueil) et analyse de dis-
cours/contenu (méthode d’analyse) pour les approches qualitatives ; questionnaires
(recueil) et analyse par pourcentages (méthode d’analyse) pour les approches quantita-
tives. On trouvera ailleurs (Maurer, Domergue, à paraître 2010) le détail des critiques
que nous adressons à ces deux types d’enquête et que l’on se contentera ici d’évoquer :
pour les interviews et analyses de discours, lourdeur de la mise en œuvre et temps re-
quis, importance de la subjectivité du chercheur, impossibilité de tirer des conclusions
générales de quelques cas particuliers ; pour les questionnaires analysés par séries de
pourcentages, aucune validité statistique en raison de la faiblesse des échantillons,
atomisation de ce qui constitue un système de valeurs construit autour d’une langue en
une série de résultats partiels sans liens entre eux, impossibilité de hiérarchiser
l’importance relative des items (imaginons que 90 % des enquêtés pensent que
l’anglais est une langue cousine de l’allemand ; ce n’est pas pour autant que cette idée
sera importante à leurs yeux, dans leurs choix… On confond trop souvent % de ré-
ponses positives et degré d’adhésion).
L’outil que nous proposons permet une vision qualitative fondée sur des éléments
quantitatifs, il discerne l’importance relative des différents cognèmes d’une représenta-
tion sur une base statistique (non fondée sur des calculs de pourcentage) et permet
donc d’articuler les approches quantitative et qualitative.
représentation sociale (les cognèmes), tous ne jouent pas le même rôle, certains appar-
tenant au noyau de la représentation sociale, d’autres à sa « périphérie ».
Cette distinction s’origine dans les premiers écrits de Moscovici sur la représentation
de la psychanalyse, dès 1961, avec une différenciation entre certains éléments, en petit
nombre, et l’ensemble des autres éléments de la représentation. Après Moscovici, la
plupart des chercheurs se rangent à cette analyse tout en baptisant cette formation de
diverses manières.
Abric (1976) prend appui sur cette hypothèse générale pour poser que toute représen-
tation sociale est structurée et qu’elle est organisée autour d’un noyau central. Le
noyau central est la partie la plus stable de la représentation. Il en détermine à la fois la
signification et l’organisation. Les éléments placés sous la dépendance du noyau cen-
tral sont dits “périphériques” par Flament (1994) Ils « assurent le fonctionnement
quasi instantané de la représentation comme grille de décryptage d’une situation ». Ce
sont eux également qui sont se modifient pour entraîner des changements de repré-
sentation sociale. La mise en évidence des répartitions noyau/périphérie a été opérée
par l’usage de différentes techniques parmi lesquelles celles de réfutation (Moliner,
1994).
Nous situant dans ce paradigme, nous proposons de mesurer l’importance relative
qu’un groupe de sujet accorde à différents cognèmes, et de procéder à cette évaluation
sous trois angles différents et complémentaires.
Nous mesurons d’abord l’adhésion des sujets à chaque cognème151, c’est-à-dire le de-
gré d’attachement/rejet que les sujets d’un groupe manifestent à son égard. Cette
évaluation se fait de manière simple par un calcul de moyenne.
Puis nous évaluons la manière dont les cognèmes sont, parmi les membres du groupe,
l’objet d’un consensus. Cela permet de voir si cette adhésion/rejet est fortement par-
tagée ou non par les membres du groupe152.
Nous mesurons enfin les distances153 entre les différentes cognitions, qui, fait des
scores moyens obtenus, sont rapprochées/éloignées par les membres du groupe au-
près de qui l’enquête est réalisée. On se sert parfois, en psychologie sociale, de cette
donnée pour évoquer une dimension appelée polarisation, capacité qu’ont les éléments
les plus centraux à rassembler autour d’eux, dans des distances faibles donc, d’autres
cognitions.
feuille de calcul automatisée, qui sera mise à disposition des chercheurs intéressés, permet d’obtenir
automatiquement les moyennes, les consensus et les distances une fois les résultats de l’enquête saisis. Le
détail mathématique figurera dans une publication à paraître (Maurer, Domergue, à paraître 2011).
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 183
Les résultats de ces trois traitements statistiques permettent de déterminer, parmi une
série d’images composant la représentation sociales, lesquelles sont vraisemblablement
centrales, c’est-à-dire réunissant trois qualités : les sujets y adhèrent de manière maxi-
male, elles sont l’objet des consensus les plus forts, et elles sont entre elles proches,
liées.
3- Il n’y a pas plus de la moitié des élèves du lycée qui la parle couramment
8- Le peuple français
9- La colonisation
11- La littérature
16- Le christianisme
1- La langue maternelle
12- La fierté
13- L’indépendance
17- Le sous-développement
Légende :
- sur l’axe des abscisses est marquée la saillance : à droite les éléments qui recueillent
l’adhésion maximale ; à gauche, ceux qui sont rejetés ;
- la taille des cercles est proportionnelle au degré de consensus ; plus les cercles sont
gros, plus les sujets ont été d’accord pour traiter en adhésion ou en rejet un item ;
- les traits entre les items symbolisent les distances les moins fortes, donc les zones de
plus grande proximité. On a choisi de n’en représenter qu’une partie, pour des raisons
de lisibilité, fixant arbitrairement un seuil de distance au-delà duquel on ne représente
plus les liens entre les items, jugés non significatifs.
Nous signalons ici qu’une deuxième étape est possible, qui interprète ensuite ces résul-
tats et va discriminer des zones de centralité/périphérie dans ce continuum. Pour des
raisons de temps, nous ne présentons pas cette étape, qui n’est pas absolument néces-
saire à la compréhension de la dynamique de la représentation sociale et préférons
aller d’ores et déjà aux éléments d’analyse des deux représentations. Pour plus de déve-
loppements sur ce sujet, nous renvoyons à Maurer, Domergue (à paraître 2011).
Les éléments les plus consensuels se trouvent aux deux extrêmes, signe d’un accord
fort entre les membres de ce groupe relativement à certains items, qui se dégagent,
tant en négatif qu’en positif.
Quand on combine ce critère avec celui de la saillance, qui marque l’adhésion, on voit
nettement se dégager deux éléments, très fortement privilégiés par le groupe, et en
même temps associés par un lien de polarisation, fort, le plus fort de tous. On a là
probablement les éléments les plus centraux de la représentation.
Le français est vu à la fois comme une langue très employée et très entendue et elle
joint à cette caractéristique pratique une dimension utilitaire dans la mesure où elle
conditionne la capacité à tisser un riche réseau relationnel qui sera utile pour effectuer
un bon parcours professionnel. La combinaison des aspects pratique et utilitaire est
solidement opérée par le groupe des lycéens.
Ces résultats sont à considérer relativement au fait que le groupe est constitué de ly-
céens de la capitale et, sur cette base, il serait utile de comparer avec des utilisateurs
venus d’autres régions afin de voir les éléments communs et ceux qui varient.
Il n’est pas surprenant non plus de constater qu’avec un degré de saillance moins éle-
vé, on trouve une série d’éléments peu polarisés et objet de consensus de second
ordre, comme le fait que le français est lié au milieu scolaire.
En continuant de s’éloigner du motif central, s’étend un plan incertain pesant faible-
ment dans le tableau et formant probablement une partie malléable susceptible d’une
certaine sensibilité aux pressions de l’environnement dans ses possibles évolutions : le
Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables | 189
romantisme souvent supposé du français, ainsi que son association avec la littérature,
qui ne semble pas du tout un élément important pour ce public de lycéens.
Enfin, comme un repoussoir venant mettre en valeur ce qui fait à titre essentiel la re-
présentation, un certain nombre de cognitions situées dans la zone de périphérie la
plus extrême, si l’on reprend les catégorisations de la théorie standard du noyau en
psychologie sociale, qui sont également très intéressantes pour les enseignements
qu’elles délivrent. Il en est ainsi de la prétendue question de la difficulté : la difficulté
de la syntaxe est un élément peu saillant, et le fait que l’anglais serait jugé plus facile est
même fortement repoussé. On voir aussi, à la place extrême qu’occupent ces items
que les associations langue française − peau blanche ou langue française − peuple
français ou colonisation sont peu choisies : sociolinguistiquement, c’est peut-être là un
signe d’appropriation du français pour les membres de ce groupe. Il est à remarquer
que le rejet à la marge de l’élément peau blanche se fait sur le mode d’un très fort con-
sensus.
Ces mêmes lycéens retiennent une tout autre approche dans leur façonnage de la RS
du malgache. Cette voie est celle de l’affectivité. Ils se laissent gagner par une sorte de
vague émotionnelle chaleureuse pour composer une figure maternelle à la fois mère
nourricière et mère patrie pour laquelle ils éprouvent tendresse et fierté.
c) La posture : distance vs immédiateté
La posture qu’ils adoptent pour forger la RS de la langue française conduit les lycéens
à préserver une distance à cet objet. Ce recul est celui de la maîtrise de soi et de la vo-
lonté de domination intellectuelle du sujet.
En revanche, c’est sans prise de distance ni mise en perspective qu’ils se laissent ab-
sorber et en quelque sorte submerger par leur formation affective alors qu’ils évoquent
la langue malgache.
d) Les références : socio-académique vs socio-personnel
Les références mobilisées par les lycéens pour construire la RS de la langue française
sont faites de caractéristiques à retentissement social puissant : l’intérêt utilitaire et pra-
tique. Puis, selon une orientation que l’on pourrait dire à tournure « scientifique » ou
académique, elles consistent également, d’une part, à souligner la capacité de cette
langue à servir une expression fine et juste de la pensée et, d’autre part, à faire ressortir
le fonds culturel de la littérature française.
Le malgache apparaît dans la RS comme combinant des références sociales solidement
établies à des références personnelles profondément ancrées. Cette langue singulière et
distinctive est sujette à de multiples interprétations, celles que donnent les unités de
base de l’organisation sociale que sont les nombreuses tribus du pays. À cela se mêle
l’évocation attendrie de la langue entendue par chaque personne dès la naissance et qui
berce le plus jeune âge.
e) La question du contexte
Deux représentations très fortement différenciées ont été mises en évidence. Dans
une RS très ordonnancée, c’est une langue française, pratique, utilitaire, employée, fé-
conde. Selon une organisation plus incertaine, c’est une langue malgache inscrite dans
le registre de la conscience nationale, baignant dans les émotions et la tendresse, les
unes comme les autres fièrement assumées.
La question du contexte de réalisation de ces deux langues se pose toutefois dans une
double perspective, d’approfondissement et d’extension.
Il serait intéressant de procéder à des approfondissement sur des territoires nationaux
autres – les études sont encours à la Réunion (français et créole) et à Maurice (anglais,
français et créole) dans le but de se rendre compte si le tableau obtenu ici reste propre
à la situation et au statut du français (vs le malgache) à Madagascar ou si se trouve là
dessinée une forme type qui pourrait rendre compte de la dynamique qui se joue au-
tour de la langue française lorsqu’elle est langue en contact.
192 |Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables
155La reproduction de l’enquête à plusieurs mois d’intervalle a donné des résultats similaires à plus de
95 %.
Des objets de
recherche variables :
les principaux
phénomènes étudiés
Certaines déterminations et certaines stratégies font que les objets étudiés sont cons-
truits de façon variable, selon les époques, les contextes, les points de vue ou les
tendances de la discipline. Tout champ de savoir est plastique dans son étendue, ses
constituants, ses enjeux. Certains phénomènes surgissent, d’autres disparaissent. Ces
changements sont surtout dus au fait que ces phénomènes sont ou ne sont pas perçus,
identifiés, considérés comme pertinents selon les contextes historiques, sociaux et
scientifiques, problématisés par des questionnements de recherche.
Un champ de savoir peut parfois paraitre relativement stabilisé, pendant de longues
périodes au cours desquelles ses constituants apparaissent comme des « objets156 »
récurrents : par exemple l’évaluation qui a succédé à la docimologie; les cultures éduca-
tives qui ont pris le relais de la centration sur l’apprenant; les environnements
technologiques qui ont émergé après les méthodes ; les langues et les cultures qui dé-
passent la langue cible, pour ce qui concerne notre domaine. Un champ de savoir peut
aussi sembler grandement instable quand, par exemple, des normes sociales sont re-
mises en question brutalement (les effets d’une politique linguistique radicale ;
l’accroissement des flux de population ; l’extension rapide des moyens de communica-
tion), des constituants sont alors mis en question parce que pensés en termes de
processus plutôt qu’en termes d’objets, de nouveaux paradigmes scientifiques posent
les problèmes autrement. Les faits étudiés qui sont abordés dans cette partie ne témoi-
gnent que de leur importance au moment où cet ouvrage est écrit. Il est nécessaire
pour les chercheur(e)s d’être attentif aux enjeux nouveaux qui peuvent être mis au
jour, de porter un regard sur les tendances globales, aussi bien qu’un regard curieux
sur les innovations locales et les pratiques didactiques qui s’ignorent en tant que telles.
La partie qui s’ouvre ici propose ainsi un panorama non exhaustif et non définitif de
faits identifiés, posés comme observables, questionnés et étudiés dans le champ de la
didactique des langues et des cultures en ce début de XXIe siècle. Leur liste a été arrê-
tée et complétée par les suggestions des nombreux contributeurs de cet ouvrage. On
peut penser qu’au vu de leur expérience et de leur diversité, ils ont identifié les faits les
plus saillants dans l’actualité pour la recherche en didactique des langues et des cul-
tures : transposition didactique, littéracie, contextualisation, compétences plurilingues
et pluriculturelles, compétences interculturelles, approches plurielles des langues et des
cultures, programmes et référentiels, méthodes, manuels, interactions en classe et en
ligne, contacts de langues, évaluation… L’ordre de présentation de ces faits (constitués
en « objets » mais on aura compris que ce terme ne nous satisfait pas sur le plan épis-
témologique car il ne rend pas entièrement compte des conséquences
méthodologiques de la prise en compte de leur plasticité), n’est pas significatif de quel-
conques priorités ou hiérarchisations. En revanche, la progression permet des
« tuilages », chevauchements partiels qui instaurent des liens que le lecteur pourra re-
pérer en s’appuyant sur les renvois entre les textes.
Pour chaque fait étudié, les auteurs présentent un historique, un état de l’art, des
exemples de recherches réalisées (y compris de méthodes utilisées), des pistes de re-
cherches à ouvrir et des références bibliographiques. Là encore, nous avons recherché
1.1. Définitions
Au départ, le concept porte sur les transformations indispensables que subissent les
savoirs savants (mathématiques) quand ils deviennent des savoirs scolaires pour qu’ils
soient enseignables/apprenables, en fonction des contextes et des publics auxquels ils
sont enseignés. L’enseignement est alors envisagé dans une fonction de médiation entre
des savoirs de références (et des pratiques, cf. infra) et des apprentissages didacti-
sés/pédagogisés à finalités diverses. Le concept a été rapidement étendu à des
domaines où les savoirs savants (les connaissances scientifiques y compris fondamen-
tales) ne sont pas les seules références à partir desquelles les objectifs et les contenus
d’enseignement-apprentissage sont élaborés. On a étendu la question aux savoirs experts
(dits aussi professionnels mais ce terme laisse de côté les expertises non professionnelles),
partagés par les acteurs d’un même champ d’activité, qui font l’objet de transposition
didactique, notamment pour former à ces activités (Joshua, 1996). Enfin, le concept a
été élargi aux pratiques sociales de références (Martinand, 1995) pour ce qui est notam-
ment des domaines de formation à ces pratiques fondamentales parmi lesquelles on
retrouve, au moins pour partie, les langues et les cultures (au sens anthropologique).
Les savoirs incluent par conséquent les savoir-faire (les compétences s’ajoutent aux connais-
sances cf. Castellotti et Py, 2002).
On voit poindre ici l’un des motifs de débat suscité par l’élargissement du concept ; la
didactique des langues-cultures en offre un exemple significatif au demeurant : définir
les objectifs et les contenus de l’enseignement-apprentissage des langues à partir des
pratiques sociales ordinaires et non plus, ou plus exclusivement, à partir des savoirs
experts des enseignants de langue scolaire ou des grammairiens, ou encore à partir des
savoirs savants des linguistes, c’est définir les langues non plus comme des normes
157 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : sociodidactique, contextualisation
littéraires ni comme des structures techniques, mais comme des pratiques sociales de
communication. Cela remet en question la définition même de l’objet d’enseignement-
apprentissage et de l’enseignant puisqu’il n’est plus le seul détenteur légitime ni modèle
des références visées. Le statut même des savoirs enseignés est concerné : c’est une
question profondément épistémologique et politique qui est soulevée et il y a eu des
réactions selon lesquelles les seuls véritables savoirs seraient les savoirs scientifiques
et/ou institués dans les normes dominantes158. L’une des conséquences, au delà des
refus de principe, pourrait être la dissolution du concept à force d’élargissements peu
ou pas pertinents. Une reconceptualisation intégrante a été proposée par
P. Perrenoud, s’appuyant sur une analyse épistémologique et sociologique pour affir-
mer qu’il n’y pas de différences radicales mais au contraire un continuum entre ces
différentes formes de savoirs (Perrenoud, 1998) : il n’y a pas de savoirs savants
« purs » dégagés de toute expertise technique professionnelle et de toute pratique so-
ciale ; il n’y pas de savoirs experts sans pratiques ni sans relation avec des savoirs
savants ; il n’y pas de pratique sociales sans savoirs, qu’il s’agisse des savoirs scienti-
fiques diffusés dans le corps social ou des savoirs experts que développent au moins
pour partie les acteurs sociaux, mais aussi des savoirs procéduraux, ces savoirs explicites
(qu’on appelle aussi déclaratifs pour cette raison) qui sont développés à partir des savoirs
opératoires (lesquels peuvent rester peu conscients). Sur ce point voir aussi Coulon
(1993).
La question de la transposition didactique est corrélée à celle de ce qu’on a appelé
péjorativement l’applicationnisme : le fait de plaquer directement, sans modalités de
transposition didactique ni a fortiori de questionnement sur les besoins effectifs
d’apprentissage, des savoirs savants dans l’enseignement. Ce phénomène a notamment
été actif en didactique des langues dans les années 1960-70, sous l’impact d’une
linguistique structurale et générative culminante, dont la didactique des langues et la
recherche en didactique étaient positionnées comme de simples prolongements
(Martinez, 1996 : 23 et suiv.). Il a été radicalement remis en question dès les années
1980 dans l’espace francophone (Hymes, 1984 ; Dabène, 1994).
La transposition didactique peut ainsi être définie et être déclinée, dans tout domaine
d’enseignement-apprentissage comme une opération complexe de « sélection, adapta-
tion, organisation des savoirs et pratiques scientifiques, expertes et sociales de
référence afin de constituer des objectifs et des contenus d’enseignement en fonction
de besoins et de modalités d’apprentissages ciblés ». Cette opération est complexe
parce qu’elle fait entrer en jeu une relation réciproque {savoirs et pratiques de réfé-
rences <−> besoins et modalités d’apprentissages}, au sein de laquelle, selon les cas,
l’un des pôles peut jouer un rôle pilote de façon ponctuelle ou durable. Elle est com-
plexe également parce que trois types de références entrent en jeu (savantes, expertes,
sociales) et que ces trois pôles interagissent entre eux. Dans certains cas les savoirs
savants sont issus d’analyses des pratiques sociales alors que dans d’autres ils sont
coupés de ces pratiques et sont construits sur des hypothèses abstraites (ainsi en est-il
pour les langues d’une théorie sociolinguistique des pratiques langagières ou d’une
théorie structurolinguistique de langues idéelles).
158 Voir : Cadre épistémologique et principes théoriques.
Philippe Blanchet | 199
Enfin, elle est complexifiée parce qu’on peut identifier deux étapes ou niveaux de
transposition didactique : une transposition depuis les savoirs et pratiques vers les
programmes, instructions, curriculum d’enseignement. Cette transposition est dite
externe parce qu’elle part de l’extérieur du champ éducatif et didactique. Une deuxième
transposition a lieu lorsque ces intentions que constituent les programmes et autres
dispositifs institutionnels apparentés sont effectivement mises en œuvre dans les pra-
tiques d’enseignement-apprentissage. Pour diverses raisons (adaptation au contexte,
formation des enseignants, contraintes multiples, flou ou contradictions dans les pro-
grammes…), les enseignants et formateurs s’approprient à leur façon, adaptent, trient,
mélangent à d’autres sources, recomposent les résultats de la transposition externe.
Cette deuxième transposition est dite interne parce qu’elle est réalisée à l’intérieur du
champ didactique et pédagogique. Elle produit de fait les programmes et curriculum
effectivement fonctionnels sur le terrain. Les manuels constituent un exemple de phé-
nomène à la jonction des deux formes de transposition didactique : une partie de leur
élaboration (par des savants) et le rôle prescriptif que leur attribuent spontanément
nombre d’enseignants les assimilent à des programmes (transposition externe) mais une
partie de leur élaboration (par des enseignants usagers de manuels) et leur fonction de
transformation des programmes en supports pédagogiques concrets est de type trans-
position interne.
Pour autant, tous les savoirs enseignés ne relèvent pas d’une transposition didactique :
les institutions scolaires de formation initiale notamment, dont les motivations, les
objectifs politiques et les moyens sont puissants, génèrent en leur sein leurs propres
savoirs, par exemple ceux permettant l’exécution du « métier d’élève » (rituels acadé-
miques, compréhension de consignes, fausses questions du cours dialogué, normes
des écrits et des oraux scolaires, contenus encyclopédiques, etc.), au point d’ailleurs
qu’on peut aussi y voir des systèmes plus ou moins clos sur eux-mêmes, formant sur-
tout et prioritairement à leurs propres exigences. Ils sont alors coupés
− volontairement ou non − des besoins d’apprentissages, des pratiques sociales, des
savoirs experts et savants extérieurs à l’école, ce qui n’est pas sans soulever des ques-
tions, y compris pour les chercheurs en didactique des langues : par exemple que
transpose-t-on (ou pas) quand on fait faire en anglais des dissertations à la française
dans l’enseignement de l’anglais en France ? ; sur quelles références sociales, expertes
ou savantes s’appuie ou ne s’appuie pas l’apprentissage par cœur de textes, de
« règles » de grammaires, de paradigmes orthographiques ou de normes perfection-
nistes dans l’enseignement des langues de nombreux systèmes éducatifs du monde ?
Et pourquoi… ? Qu’est-ce que cela peut signifier des finalités générales de tel ou tel
système éducatif (cf. Baudelot et Establet, 2009, qui montrent par une comparaison
internationale − dans laquelle ils ne remettent pourtant pas en cause les choix de con-
tenus et d’objectifs d’apprentissages − que la finalité principale et implicite de l’école
française est la sélection d’une élite et non la formation de tous) ?
200 |Les transpositions didactiques
que leurs propres expériences, formations, expertises, convictions les amènent à pro-
céder à un travail complet, plus ou moins explicite, de transposition didactique en
complément ou en contestation des instructions, programmes et autres incitations
officielles plus ou moins coercitives.
Un des points importants des phénomènes de transposition didactique est constitué
par ce qui n’est pas transposé. Sélectionner des contenus, c’est ne pas en sélectionner
d’autres. Lesquels ? Pour quelles raisons telle ou telle pratique sociale, tel ou tel savoir
expert ou savant sont-ils écartés, implicitement le plus souvent ? Les absences, les
points aveugles et les trous noirs des transpositions didactiques sont tout aussi signifi-
catifs que ce qui y est choisi.
Les recherches sur les transpositions didactiques ont été et restent extrêmement nom-
breuses, dynamiques, surtout si l’on considère la transposition comme le cœur de
toute activité didactique. Deux exemples récents de transposition didactique explicite,
réalisée par des chercheurs en didactique des langues (ou plutôt, en l’occurrence, du
plurilinguisme) sont riches d’enseignements : le Cadre européen commun de référence pour
l’apprentissage et l’enseignement des langues159, y compris grâce à ses documents de prépara-
tion (Coste, Moore et Zarate, 1997) et d’accompagnement (notamment son guide160,
les portfolios ; Beacco et al., 2004) et aux analyses dont il a fait l’objet (par exemple
Coste, 2007 ; Rosen, 2007). L’autre exemple est constitué par le Cadre de référence pour les
approches plurielles des langues et des cultures (Candelier, 2007), dont le programme de re-
cherche et d’élaboration est décrit sur
http://www.ecml.at/mtp2/ALC/html/ALC_F_news.htm.
On ne pourra donc ici en citer que quelques unes à titre de cas significatifs, tout en
renvoyant à des ouvrages de synthèse sur la transposition didactique (Gautier et al.,
1993 ; Ropé, 1996), sur les recherches dictatologiques en général (Altet et Vinatier,
2008 ; Raisky et Caillot, 1996), ou en didactique des langues de façon transversale
(Castellotti et Py, 2002 ; Chiss et al., 1995 ; Dabène, 1994 ; Marquilló Larruy, 2000 ;
Moore, 2006 ; Plane, 1995 ; Porquier et Py, 2004 ; Zarate, Kramsch et Levy, 2008).
L’ouvrage de Blanchet (1998) sur l’enseignement du « français langue étrangère » est
entièrement construit autour d’une réflexion globale et détaillée de transposition
didactique des pratiques sociales et de leur analyse sociolinguistique. L’étude globale
dirigée par Asselah Rahal et Blanchet (2007) propose une analyse d’instructions
officielles, de manuels, de pratiques de classes, de savoirs savants de références et de
pratiques sociales de références pour l’enseignement-apprentissage des langues
« étrangères » en Algérie. On trouve des exemples précis d’études de transpositions
didactiques : chez Berrendonner (1999) à propos d’un concept grammatical, chez
Auger (2007) à propos du champ de l’interculturel dans les manuels de langue, chez
Bertucci et Corblin (2004) à propos des normes du français, chez Doucet (2009) à
propos de l’enseignement du français en Louisiane, ou, pour se décentrer vers un
autre domaine, en didactique des activités sportives chez Léziard (2003). L’étude
d’Auger (2007) s’inscrit dans un axe émergent de recherche sur ce que l’on appelle la
manuélisation, « transposition didactique dans les manuels » (voir aussi Saad, 2008).
Enfin, les pratiques de transposition didactique méritent d’être étudiées dans leurs
dimensions historiques, comme l’ont magistralement montré les travaux pionniers de
Chervel (1977) et les panoramas historiques de Puren (1988), de Galisson (1990), de
Germain (1993).
2. Les pratiques plurilingues :
quelques leçons d’enquête
Jacqueline Billiez161
161 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : terrain, didactique du plurilin-
guisme.
162 J’ai commencé cette réflexion lors d’une communication « Dynamique du plurilinguisme en contextes
migratoires : comment saisir la dimension espace/temps » dans un panel intitulé « Comment saisir les
pratiques langagières transméditerranéennes et transafricaines ? » au colloque Vals-Asla, Sociétés en muta-
tion : les défis méthodologiques de la linguistique appliquée, (Lugano, 7-9/02/2008) puis l’ai continuée dans une
communication « Interculturalité et enquêtes sociolinguistiques en terrains plurilingues : "papa, maman, la
langue et moi" » au colloque international Interculturalité : enjeux pour les pays du sud (19/20 novembre 2008,
Béjaïa) dont je reprends ici les principaux développements.
204 |Les pratiques plurilingues
163 Les exemples ne revêtent qu’un statut d’illustration pour soulever des questions méthodologiques.
Elles n’invalident nullement les travaux en question qui, au contraire, ont servi de révélateur pour en tirer
quelques leçons.
206 |Les pratiques plurilingues
À un moment d’un entretien avec un garçon de 10 ans, à sa question portant sur les
usages entre l’enfant et son père, elle obtient une réponse qui permet de voir à quel
point on peine, dans nos modalités de questionnement, à prendre en compte la di-
mension situationnelle alors que l’enfant en très fin observateur de ses pratiques des
langues la pointe immédiatement (296) :
- En quelles langue(s) te parle ton père ?
- ça dépend où on est, si on est à la maison, il va parler plus arabe, mais s’il y a
des copains avec moi, il va parler français.
- Et toi tu lui tu réponds en quelle(s) langue(s)?
- Ça dépend, si on est entre nous je parlerai arabe.
Et un autre, de descendance tunisienne (334), lui répond également :
- Des fois je parle français, des fois je parle tunisien (…) c’est comme ça la
double langue !
Et un autre encore (annexe, 64) :
- (…) Alors à la maison dans ta famille quelle(s) langue(s) utilise-t-on ?
- Ben on utilise l’arabe, le français et puis des fois ben on utilise le chaoui.
Il convient de noter qu’étant posées à l’oral ces questions devraient comporter une
indication audible et repérable de la marque du pluriel, comme « quelles sont les
langues que ton père utilise quand il te parle ? »
Un autre enfant, du même âge et de même origine algérienne répond par une question
à celle que lui pose l’enquêtrice :
- Quelle est ta langue maternelle ?
- Madame est-ce que je peux dire que j’en ai deux ?
Ces réactions très spontanées, qui révèlent des auto-observations pertinentes et une
conscience linguistique précoce, amènent à constater que, dès la première socialisa-
tion, au moins deux langues sont employées dans des usages adaptés aux types
d’interactions. Elles indiquent également qu’il est très difficile, pour le chercheur-
enquêteur, de se départir d’un modèle qui est celui du monolinguisme pour concevoir
des usages plurilingues. La notion de langue maternelle, fort ambiguë, étant ici contes-
tée parce que l’enfant a quant à lui bien établi le constat que deux langues étaient en
usage (autour de lui et avec lui) depuis sa plus tendre enfance. Et en répondant claire-
ment en fonction des usages tels qu’il les a perçus, on peut émettre l’hypothèse qu’il
n’a sans doute pas encore accédé aux autres significations plus symboliques de la no-
tion, qui pourraient l’amener, à un âge plus avancé, à déclarer, comme l’a fait un
témoin dans une enquête du même type : « ma langue c’est l’arabe mais je la parle
pas » (Billiez, 1985).
Jacqueline Billiez | 207
Plus fermé que l’entretien, le questionnaire peut plus difficilement permettre ce type
de réajustement initié par l’enquêté et/ou prendre en considération toutes ces varia-
tions alors qu’elles sont consubstantielles aux pratiques plurilingues étudiées.
M. Zue Elibiyo (2008), dans le cadre d’une thèse de doctorat, a réalisé une enquête au
Gabon. Après les questions traditionnelles d’identité, le questionnaire (annexe, 310)
démarre par quatre questions sur les usages des langues au sein de la sphère familiale :
- « Quelle langue parlent vos parents (ou tuteurs)164 entre eux ?
- Dans quelle langue vos parents vous parlent-ils le plus souvent ?
- En quelle langue parlez-vous le plus souvent à vos parents ?
- À la maison vos parents vous incitent-ils à parler une langue particulière ? ».
164 À noter l’effort réalisé pour prendre en considération les spécificités de la famille gabonaise par ailleurs
bien décrites par ce chercheur.
165 Il est à noter que les conditions de passation ont été variables et les questionnaires remplis à partir de
questions posées à l’oral, mais ayant nécessité souvent de nombreux commentaires, qui ont pu indiquer
que la pluralité de langues était possible.
208 |Les pratiques plurilingues
Cet exemple nous montre tout l’intérêt que l’on doit porter à cette génération, qui,
dans de nombreuses sociétés, prend régulièrement en charge la garde des enfants. Et
cela est d’autant plus important que les grands-parents sont souvent locuteurs d’une
langue que les parents pratiquent déjà beaucoup moins avec leurs propres enfants. Or,
il peut s’avérer que, même dans le cas de relations épisodiques avec un petit enfant, le
fait pour lui d’être, par contraste, confronté avec des habitudes parentales plurilingues
différentes favorise son appropriation de cette langue moins usitée habituellement.
C’est ce que montre, dans sa thèse, A. Ghimenton (2008), en étudiant de façon longi-
tudinale l’appropriation plurilingue d’un enfant dans un environnement où la famille
élargie pratique, à des dosages différents, l’italien et le vénitien.
Dans une enquête de plus grande ampleur, celle de l’INED166 (Deprez et al., 2002) sur
la transmission intergénérationnelle des langues, on découvre aussi une omission à
propos des grands-parents. Même s’ils sont pris en compte, ils ne le sont que dans une
perspective quelque peu mécanique, dans une sorte de transmission séquentielle selon
le schéma suivant : des grands-parents qui ont parlé telle langue à des enfants, puis
ceux-ci, devenus parents à leur tour, ont parlé telle ou telle langue à leurs enfants. Au-
cune question ne portant sur la possibilité que les grands-parents aient pu parler
directement à leurs petits-enfants telle ou telle langue, différente de celle que leurs en-
fants leur parlent régulièrement. Or cette configuration génère souvent un type de
bilinguisme désigné de « passif », caractère qui l’amène à jouir d’une moindre considé-
ration à la fois dans l’approche sociolinguistique du phénomène plurilingue et dans la
didactique des langues.
langues des répertoires plurilingues. On ne pourra cependant jamais saisir, à partir des
seuls outils qui reposent sur les déclarations des sujets sur leurs pratiques, la complexi-
té des usages ou activités plurilingues où les locuteurs jouent des langues de leur
répertoire pour des fins pragmatiques comme des musiciens peuvent jouer des mor-
ceaux variés avec divers instruments de musique. Seuls des enregistrements directs
d’interactions ordinaires ou des relevés minutieux des pratiques réelles auto-observées,
comme ceux que préconise et réalise C. Juillard (1999 : 109-110) en terrain sénégalais
sont à même d’en rendre compte. Et ce, d’autant plus que les individus sont socialisés
dans des cadres familiaux où le voisinage dans la concession (habitat groupé autour
d’une cour) est aussi important sur le plan interactionnel que celui de la famille nu-
cléaire, telle qu’elle est conçue, entre autres, dans la société française (hexagonale
devrait-on encore préciser).
Je reproduis, à des fins pédagogiques, un de ses tableaux (p. 110) qui illustre ce type de
recueil de données où « le témoin s’observe lui-même, au travers de la répétition des
habitudes relationnelles qu’il relate successivement, passant du cercle familial à celui
des copains de classe ou du quartier, etc. ». Cette modalité de recueil évite l’écueil du
questionnaire fermé et permet de rendre compte de nouveaux lieux d’interactions plu-
rilingues, des interlocuteurs négligés comme les grands-parents, ou occasionnels (le
patron du père) que les questionnaires ne peuvent pas, a priori, prendre en compte,
ainsi que des modalités diverses d’usage des langues aussi en réception et pas seule-
ment en production :
Exemple loc 20 ans, lycéen Langues parlées à : Langues que lui parlent
Grands-parents paternels, père et balant, manding balant, manding
mère
Frères et soeurs balant, manding et balant, manding et wolof
wolof
Grand-père maternel - balant, manding, diola,
créole
Patron du père - manding, wolof, français
Etc.
qu’elle était monolingue en français, puisqu’ils avaient fait le choix de ne lui parler que
cette langue. Leur surprise à son retour fut de découvrir qu’elle avait parlé couram-
ment le japonais en quelques mois seulement parce qu’elle avait d’emblée quasiment
tout compris.
Ceci est à mettre en relation avec des travaux en acquisition du langage, même s’il ne
s’agit que de l’acquisition d’une seule langue. Les études de J.F. Dunn et M. Shatz
(1989, cité par Ghimenton, 2008 : 40) montrent par exemple que les conversations
auxquelles des enfants ne participent pas directement, dans lesquelles ils sont seule-
ment auditeurs, « constituent une source importante d’input linguistique et habituent
l’enfant à prendre des rôles divers dans un monde social varié ».
Des psycholinguistes ont ainsi pointé cette focalisation excessive sur les interactions
dyadiques (la mère et son enfant, le père et son enfant), et une insuffisance sur les in-
teractions « multipartites » (Ghimenton, 2008 : 38). Or, dans certaines cultures, la
communication strictement dyadique entre une mère et son très jeune enfant n’existe
quasiment jamais. Il en est ainsi dans les communautés kaluli ou samoane. L’enfant n’y
étant pas considéré comme un interlocuteur à part entière, des paroles lui sont rare-
ment directement adressées par ses parents ou d’autres adultes. Par exemple, la mère
samoane n’adresse pas la parole directement au jeune enfant mais s’adresse à l’aîné de
la fratrie. Le principe général des interactions est appliqué, à savoir que le locuteur
s’adresse à l’individu qui occupe la position immédiatement inférieure à la sienne dans
la hiérarchie familiale (Ghimenton, 2008 : 14 cite Ochs et Taylor, 1996). Le foyer de
vie samoan est étendu à la famille élargie, la socialisation langagière ne s’y déroule
donc pas comme dans une famille américaine selon le chercheur qui l’a étudiée à cette
fin comparative (Ochs, 1983 cité par Ghimenton, 2008 : 38). Ochs et Schieffelin
(1995, cité par Ghimenton, 2008) montrent en outre dans la suite de leurs travaux que
la capacité d’apprentissage langagier est plus développée chez les enfants kalulis et sa-
moans que chez des sujets habitués seulement à des échanges dyadiques qui leur sont
exclusivement consacrés.
Dans ce même ordre d’idée, dans la société française, près d’un enfant sur quatre vit
dans une famille recomposée, avec un beau-père ou une belle-mère. Cette variable
serait à renseigner aussi dans la perspective évoquée plus haut. Tenir compte des évo-
lutions familiales paraît évident à formuler mais déjà beaucoup moins à mettre en
oeuvre. Dans les établissements scolaires, les fiches que le chercheur peut le plus faci-
lement utiliser ne fournissent pas ces renseignements. Et il n’est pas aisé de
questionner un enfant voire un adolescent sur des aspects qui touchent à sa vie intime
privée.
De la même façon, les chercheurs ou jeunes apprentis chercheurs me semblent frap-
pés par une certaine lenteur pour intégrer à leurs protocoles de recueil de données sur
des situations de plurilinguisme des activités dont on sait qu’elles sont aujourd’hui très
variées et fondamentales dans les choix de langues et/ou de variétés stylistiques,
comme les textos, les courriers électroniques, les blogs, etc.
Ces constats m’amènent, pour conclure, à m’interroger sur la formation méthodolo-
gique que dispensent des enseignants-chercheurs, sociolinguistes et didacticiens,
dirigeant des mémoires et des thèses d’étudiants. Même si l’on trouve, dans les ma-
nuels à orientation méthodologique (Calvet et Dumont, 1999), que nous n’avons fait
que parcourir à l’occasion de cette étude, qu’il faut adapter les catégorisations exis-
tantes aux cas étudiés (Blanchet, 2000 : 55), il me paraît qu’il faudrait insister,
beaucoup plus lourdement encore, sur les aspects culturels implicitement diffusés dans
les méthodologies et outils présentés lors des formations à la méthodologie des re-
cueils de données. En fait, au lieu de les présenter comme exemples ou modèles à
suivre, il faudrait explicitement donner comme consignes de les questionner pour être
sévèrement critiqués puis reconstruits pour être adaptés à tel et tel contexte précis de
certains des étudiants du groupe. Ce serait au fond mettre en pratique avec les appren-
tis-chercheurs un décentrement réciproque et audacieux, susceptible de permettre la
remise en cause des catégories et des outils utilisés par les maîtres pour comprendre le
monde et les autres en tenant compte de leurs évolutions. Une formation forcément
exigeante et déstabilisante qui exigerait du temps pour les tâtonnements, les aller et
retour entre pré-test sur le terrain et remaniements multiples, bref pour une formation
méthodologique en groupe interculturel tout au long du suivi de ses apprentis avec le
chercheur confirmé. C’est ce qui me paraît avoir été écrit, dans une contribution pre-
mière de 1942, par Alfred Schütz :
« La méthodologie n’est pas le précepteur ou le tuteur du scientifique. Elle est
toujours son élève, et il n’existe pas de maître en son champ scientifique qui ne
puisse enseigner aux méthodologues comment procéder. (…) Dans cette
logique, le méthodologue doit s’adresser à son maître en l’interrogeant sur la
technique qu’il emploie. Et si ces questions aident les chercheurs à bien
réfléchir à ce qu’ils font réellement, et peut-être à éliminer quelques difficultés
intrinsèques cachées dans la fondation de l’édifice scientifique où les
scientifiques ne vont jamais, la méthodologie aura accompli sa tâche. » (2007 :
67-68)
3. La littéracie
Christine Barré-de Miniac
Depuis qu’elle existe, l’écriture marque profondément les formes de relations sociales
au sein des sociétés. Ainsi, formes sociales et formes scripturales sont totalement im-
briquées, l’une et l’autre s’influençant mutuellement. Marquées par les contextes dans
lesquelles elles s’inscrivent, les pratiques de lecture et d’écriture varient dans le temps
et dans l’espace. Et les variations sont inter- autant qu’intra- individuelles.
Lecture et écriture, lire et écrire, apprendre à lire et à écrire : ces expressions binaires
ont longtemps été les seules utilisées. Depuis plusieurs décennies maintenant le terme
de littéracie s’impose – ou tend à s’imposer dans des contextes plus réfractaires à
l’introduction de ce néologisme, comme l’est le contexte français. Revenant sur la dé-
finition de ce terme, nous en précisons l’intérêt pour la recherche et la pratique
didactiques.
Nous montrons ensuite pourquoi les pratiques de littéracie et donc les compétences
en la matière deviennent cruciales dans les sociétés modernes. Cela justifie que de
nombreux courants de recherche s’emparent de cette notion, qui tire sa valeur heuris-
tique notamment du fait qu’elle se situe au carrefour de courants de recherche qui ont
peu l’occasion de se rencontrer et de se parler. De ces travaux et rencontres se déga-
gent certes des résultats, mais aussi des débats, ouverts à ce jour. Nous présentons les
termes de ces débats et leurs enjeux.
Enfin, nous abordons l’usage de cette notion pour la didactique, d’un point de vue
prospectif autant que critique.
Le terme de littéracie, progressivement introduit, a suivi, lui aussi, les méandres de ces
hésitations entre définition étroite et définition large. Ainsi, J.P. Jaffré (2004) montre
que le Dictionary of the English Language (4e édition publiée en 2000 par la Houghton
Mifflin Compagny) propose deux définitions : l’une minimaliste selon laquelle la litté-
racie désigne la capacité élémentaire de lecture et d’écriture ; l’autre étendue, selon
laquelle la littéracie désigne « une série de relations significatives aussi larges les unes
que les autres entre l’écrit et l’ensemble des connaissances » (Jaffré, 2004 : 30).
L’examen des définitions retenues par l’UNESCO (Barré-De Miniac, 2003) montre un
même mouvement d’une définition étroite vers un élargissement. Des années 1960
aux années 1980 on passe d’une logique de fonctionnement dans la vie quotidienne à
une référence au rôle de l’écrit dans le développement personnel et dans la vie sociale,
dans le monde du travail notamment.
La définition proposée par J.P. Jaffré (2004 : 30-31) nous paraît résumer au mieux les
réflexions et travaux de recherche actuels : la littéracie « désigne l’ensemble des activi-
tés humaines qui impliquent l’usage de l’écriture, en réception et en production. Ce
concept met un ensemble de compétences de base, linguistiques et graphiques, au ser-
vice de pratiques, qu’elles soient techniques, cognitives, sociales ou culturelles. Son
contexte fonctionnel peut varier d’un pays à l’autre, d’une culture à l’autre, et aussi à
travers le temps ». Peut-être faudrait-il ajouter aussi : d’une langue à l’autre.
Terminons ce paragraphe sur une question plus technique, celle de l’orthographe, en
français, de ce terme. La forme française du terme anglo-saxon est un équivalent à
peine modifié du terme anglais literacy. Le choix d’une orthographe de ce terme a susci-
té de nombreux débats, et les arguments sont d’ordre linguistique autant que politico-
institutionnels (Jaffré, 2004 ; Barré-De Miniac, 2003). Le principal désaccord porte sur
Christine Barré-de Miniac | 215
168 Ce paragraphe et le suivant reprennent, en les condensant et en les articulant avec des analyses plus
récentes, des éléments d’un article paru dans la Revue Française de Linguistique Appliquée (Barré-De Miniac,
2004).
169 http://secteurpublic.fr/public/article/chiffres-cles-de-l’education-en-europe.html?id=20776&rub=1, p. 1 (24/07/ 2009)
216 |La littéracie
monter. En s’appropriant la notion de raison graphique introduite par J. Goody, les di-
dacticiens incluent dans les types d’écrits à traiter et à produire : les plans, les gra-
graphiques, les schémas, les tableaux, etc. (voir notamment Lahanier-Reuter, 2006, in
Kara et Privat, dir.).
C’est dans ce contexte qu’il faut entendre les discours parfois alarmistes concernant
l’insuffisante maîtrise de l’écrit, en réception comme en production, d’une partie de la
population. Non pas que le niveau baisserait, comme le laissent entendre certains dis-
cours alarmistes, mais que le niveau doit suivre celui attendu, mais aussi que les
pratiques doivent s’adapter aux nouvelles formes d’usage de l’écrit.
Son intérêt pour des pratiques comme la confection de listes, de tableaux, mais aussi
de formules (littéraires autant que mathématiques) fournit des arguments en faveur de
la thèse selon laquelle l’écriture a une importance décisive dans le travail de la pensée
parce qu’elle extrait du langage parlé les éléments constitutifs et les réorganise. Les
didacticiens y verront une convergence avec la vision vygotskienne (Brossard, 2004)
qui, comme le rappelle Y. Reuter (in Kara et Privat, 2006 : 136) a montré l’importance
de l’écrit dans le développement des fonctions psychiques supérieures.
Enfin, l’intérêt porté aux écritures du quotidien ou écritures ordinaires a permis de
repérer les manières singulières et multiples d’existence de l’écrit en dehors des lieux
officiels et institutionnels. Sur le plan théorique, cet intérêt a aussi contribué à montrer
que l’écriture, dès qu’elle est là, marque le social et les relations de l’individu à celui-ci.
Street (1995) réfère à une définition de la littéracie comme une pratique sociale et à la
pluralité des littéracies à laquelle conduit nécessairement cette définition. B. Street re-
prend cette définition dans sa contribution à l’ouvrage de Wagner et al. (1999 : 36 et
suivantes). Dire que la littéracie est une pratique sociale est à la fois banal et profond,
dit-il. C’est en effet banal au sens où il est évident que la littéracie est toujours prati-
quée dans des contextes sociaux. Y compris à l’école. Même si on accuse celle-ci de
mettre en place des situations artificielles, les pratiques scolaires sont des pratiques
sociales ayant leur logique en tant que telles. Mais si la littéracie est une pratique so-
ciale, alors elle varie selon les contextes, et n’est pas tout à fait la même dans les
différents contextes. D’où le concept de littéracies multiples, qui varient dans le temps
et dans l’espace, et qui sont insérées dans des pratiques culturelles spécifiques.
Cette idée fait l’objet d’un débat non clos et ouvre donc des perspectives de recherche.
L’enjeu du débat est le suivant : la multiplication des littéracies peut engendrer une
nouvelle réification de la notion. En effet, si chaque littéracie devient une chose fixée,
on est conduit à définir des formes de littéracies propres à des sous-populations ou à
des sous-cultures. G. Kress et D.A. Wagner, dans ce même ouvrage, soulignent que
cette prétention de pluralité est paradoxale puisqu’elle implique la stabilité de chaque
littéracie, ce que précisément les nouvelles orientations de recherches rejettent. La plu-
ralité n’est pas, selon eux, entre les littéracies, mais elle est une caractéristique propre à
toutes les formes de littéracie.
Le débat n’est donc pas clos. La perspective tracée pour le faire avancer consiste à
proposer de mettre au centre des travaux la notion de « pratiques de littéracie »
(Lefstein et Street, 2007), et conduit à mettre l’accent sur les particularités des
pratiques culturelles auxquelles sont associées la lecture et/ou l’écriture dans des
contextes donnés. On voit que sur ce point également, la tendance est à la description
qualitative fine.
lors d’un colloque, le premier en France, portant sur la littéracie170. À l’appui de la ré-
ponse négative : le fait qu’une très grande majorité des communications proposées
auraient pu l’être sous un autre intitulé de colloque. Il en est ainsi de textes comme :
l’oral au service de l’écrit ; les relations entre la lecture et l’écriture. Autre réserve : la
notion est en général utilisée sans être définie, sans être interrogée, le plus souvent
simplement substituée aux expressions classiques que sont lecture/écriture/rapport à
l’écrit, etc. Nous pourrions faire la même remarque à propos d’une publication plus
récente relative à la littéracie en contexte plurilingue (Kadi et Barré-De Miniac, 2009).
Outre l’absence de définition de la littéracie et du lien entre les caractéristiques contex-
tuelles étudiées, on voit poindre, de manière très implicite, l’idée que l’apprentissage
du français langue étrangère dans sa globalité serait un apprentissage de la littéracie.
Or, si l’on se réfère à la définition donnée ci-dessus, il importe de garder à l’esprit que
la littéracie a à voir avec l’écrit. Si l’intérêt de la notion de littéracie est d’ouvrir le
champ des recherches à la prise en compte des contextes linguistiques et sociaux
d’apprentissage et d’usage, il s’agit bien d’apprentissage et d’usage de l’écrit.
Y. Reuter (2006) met également en garde les didacticiens à propos de leurs emprunts
aux travaux de J. Goody. Il formule à ce sujet deux critiques à l’égard de la manière
dont ceux-ci se réfèrent aux travaux de ce dernier.
- d’une part, dit-il, J. Goody est le plus souvent cité d’une manière
« agglomérante » : on se réfère à lui au sein d’un conglomérat d’auteurs (B.
Lahire ; Vygotski ; etc.) et le plus souvent de manière « médiée » par d’autres
auteurs, le plus grave étant que ces emprunts ne sont pas objectivés.
Poursuivant le propos d’Y. Reuter, nous dirions que la didactique des langues
ne doit pas s’autoriser à échapper aux règles de la vie scientifique, et que donc
les emprunts se doivent d’être repensés dans une problématique didactique et
être soumis aux épreuves de l’expérience ;
- d’autre part, il attire l’attention sur une dérive perceptible dans les travaux
didactiques, à savoir celle d’une survalorisation de l’écriture et d’une
dévalorisation de l’oral. Ceci renvoie à l’un des débats que nous avons évoqué
ci-dessus à propos de l’apport de l’anthropologie et de J. Goody en particulier.
J. Goody lui-même est revenu sur ces questions des statuts respectifs de l’oral
et de l’écrit dans les sociétés. Y. Reuter souligne à juste titre que la didactique
se doit de ne pas figer une théorie dont elle emprunte des hypothèses. Il
souligne aussi et, pensons-nous, à juste titre l’obligation pour la didactique
d’analyser et de discuter ses emprunts : « Par un curieux renversement, celui
qui a tant travaillé sur les modes de construction de la pensée, se trouve
rigidifié en une sorte de prêt à penser empêchant (…) la didactique de se
penser en tant que lieu théorique spécifique susceptible de faire des usages
singuliers de corps théoriques divers » (139).
170 Il s’agit du colloque organisé à l’Institut Universitaire de Formation des maîtres de Grenoble, en oc-
tobre 2004, intitulé : « La littéracie : le rôle de l’école », colloque dont le numéro 27 de la revue Lidil se fait
l’écho.
Christine Barré-de Miniac | 221
Ces quatre niveaux forment système, car chaque niveau fait appel à l’autre et fait partie
d’un ensemble. S’il y a continuum au sens où, par exemple, les niveaux 1 et 2 sont né-
cessaires pour accéder aux niveaux 3 et 4, dire que ces quatre niveaux font système
signifie que plus les tâches sont élaborées, plus elles mobilisent de niveaux. Ainsi,
composer/comprendre un texte suppose la maîtrise du code (niveau 1), le choix du
bon registre et la prise en compte du destinataire (niveau 2), mais aussi le choix de la
forme linguistique et l’analyse de la forme existante, selon la structure conceptuelle
(mobilisation du niveau 3, voire du 4 selon la nature du texte à élaborer, à interpréter
ou analyser). Des travaux actuels tendent à valider cette hypothèse, montrant par
exemple que les processus dits de bas niveau, en lecture comme en écriture, peuvent
se trouver mis en difficulté lors de tâches complexes.
222 |La littéracie
Pour la didactique, l’idée à retenir est qu’elle doit penser ce continuum pour en favori-
ser la construction. Là où il y a nécessité d’une mise en garde, c’est dans une
interprétation du modèle en terme de progression didactique calquée sur cette descrip-
tion de niveaux de littéracie. Ce serait une simplification dangereuse, en effet, que de
considérer que les premiers apprentissages doivent se concentrer sur les niveaux 1 et
2, et qu’il faudrait attendre les niveaux scolaires plus avancés pour commencer à envi-
sager le travail aux niveaux 3 puis 4. Une hypothèse didactique alternative consiste à
considérer que les niveaux 3 et 4, c’est-à-dire les usages pour communiquer et pour
transformer (construire) les connaissances, sont à l’œuvre dès les premiers apprentis-
sages, sous des formes spécifiques qu’il importe de reconnaître et d’exploiter, et à
propos d’activités susceptibles de les mobiliser. D’où la nécessité de recherches qui
identifient les modes de fonctionnement des quatre niveaux du modèle aux différentes
tranches d’âges, et de travaux didactiques qui construisent des modèles d’activités sus-
ceptibles de mobiliser ces fonctionnements.
une forme artisanale à base de photocopies reliées, avec une couverture mais sans tou-
jours de numéro ISBN. Le constat est particulièrement criant pour les travaux,
nombreux et de qualité, produits en Afrique par les équipes de chercheurs africains et
ce n’est qu’à la faveur d’un passage dans un pays que, visitant l’université ou passant
dans une direction ministérielle, on peut mettre la main sur des rapports et des ana-
lyses dont les conclusions gagneraient pourtant à être largement diffusées. Le résultat
de cet état de fait est le sentiment, parfois, que « ça n’avance pas » alors même que sur
plusieurs terrains, la recherche fait des avancées notoires mais sans que celles-ci profi-
tent seulement au pays voisin… lequel n’en a pas connaissance et, parfois, va
commanditer le même type de travail. Il y a là un constat inquiétant pour l’état même
de la recherche en didactique des langues en contexte africain qui, ne parvenant pas à
faire circuler les résultats de ses recherches, en est conduite, imitant en cela Sisyphe, à
recommencer toujours le même chemin sans pouvoir aller beaucoup plus loin... Mais
alors que Sisyphe avait, hélas pour lui, l’éternité pour cela, les politiques éducatives
ayant un coût, il n’est pas sûr qu’on accorde autant de temps aux recherches en didac-
tique des langues si elles n’aboutissent pas à des résultats concrets, mesurables,
capitalisables.
Qu’il me soit permis, dans un tel ouvrage, de formuler un vœu à l’attention des institu-
tions évoquées ci-dessus, plus spécialement celles en charge de la francophonie,
Organisation Internationale de la Francophonie et Agence Universitaire de la Franco-
phonie : celui que des programmes de numérisation des documents scientifiques
soient mis en place afin de constituer des bases de données des recherches déjà ac-
complies en la matière, lesquelles seront dans l’avenir nourries des versions
électroniques des futurs documents produits.
Si un chapitre de cet ouvrage de didactique des langues est consacré à l’inscription
sociolinguistique de ces recherches, c’est parce que le contexte d’enseignement-
apprentissage est toujours important, voire primordial, ce que j’illustrerai pour le do-
maine africain francophone en montrant que, si les méthodes de recherche ne sont
pas différentes de celles que l’on suit sur d’autres terrains – ce qui est heureux… - les
objets et les problématiques sont relativement spécifiques, certains angles d’attaque
étant bien entendu partagés avec d’autres terrains, d’autres étant plus spécifiques. Je ne
pourrai, dans les limites de cette contribution, faire allusion à l’ensemble des travaux et
beaucoup de chercheurs se verront oubliés. Qu’ils m’en excusent : j’ai dû, pour chaque
direction de recherche, me contenter de quelques illustrations…
Charlot, Bautier et Rocheix (1992), Charlot (1999) ou Lahire (1993)172 . Elle prend un
éclairage particulier quand il s’agit de s’intéresser aux populations de migrants en
France et à la manière dont les cultures d’origine entrent ou non en résonnance avec la
culture scolaire, comme dans les travaux de Castellotti, Huver, Vigner (2007) ou ceux
de De Nuchèze (2007).
Cette question est particulièrement importante en terrain africain où les modes tradi-
tionnels de transmission des connaissances sont le plus souvent éloignés de ceux de
l’école occidentale qui, dans sa philosophie générale, continue à être le modèle domi-
nant utilisé par les différents acteurs de l’éducation (ministères mais aussi organisation
non gouvernementales ou acteurs privés), même si c’est avec des moyens nettement
inférieurs à ceux des pays développés. En effet, même si on ne peut pas parler sans
risque « d’enfant africain », en généralisant à l’extrême, on retrouve dans beaucoup de
sociétés africaines un certain nombre de constantes sur le plan éducatif qui ne sont pas
sans importance quand on s’intéresse à la didactique des langues, notamment dans des
perspectives communicatives ou actionnelles :
- sexualisation précoce des modes éducatifs qui propose aux garçons et aux
filles des apprentissages différents ;
- - restriction des modes de communication de l’enfant face à l’adulte ;
- - apprentissage par observation et imitation de l’adulte, passage à l’action sous
le contrôle d’un aîné.
Or le modèle d’école dans lequel les langues sont enseignées, largement héritier du
modèle français par le biais de la colonisation, fonctionne sur ces trois points particu-
liers de manière très différente :
- on s’efforce de proposer aux filles les mêmes apprentissages que les garçons ;
- - on encourage les enfants, par le biais des méthodes communicatives
d’enseignement apprentissage des langues qui proposent des jeux de rôles, à
prendre la parole face à des adultes ;
- - l’essentiel des apprentissages s’opère par exposé de l’adulte, explication par
l’adulte, mémorisation de l’élève.
Le travail de Doumbia (2001) sur les groupes d’âge et l’éducation chez les Malinké du
sud du Mali est un bon exemple des recherches menées sur ces points en Afrique.
Doumbia expose dans un chapitre consacré à l’école en langue française le constat des
difficultés qui était dressé en 1978 dans un séminaire tenu à Bamako sur l’éducation
scolaire et dont les conclusions étaient de « ruraliser » l’école (Doumbia, 2001 : 190),
de sortir d’un enseignement « livresque, théorique et abstrait, dominé par la sélection
et la course aux diplômes », de tenter d’opérer la « liaison de l’école à la vie »… Cette
ruralisation n’a, si l’on en croit Doumbia (2001 : 191), convaincu personne et « le dé-
bat reste toujours d’actualité » pour « enrayer la déperdition scolaire ». Doumbia
montre notamment que la réalité des classes d’âge en milieu rural (des classes res-
treintes à tous les enfants d’un même sexe, d’un même âge et d’un même village)
continue d’interférer avec la notion de classe scolaire (limitée à certains élèves du vil-
lage mais pouvant accueillir des enfants résidant ailleurs, et mêlant garçons et filles).
Dans un autre contexte, celui de Mayotte (Comores), Lacombe (2009) montre
également les écarts existant entre l’école et la société. Elle prend ainsi
l’exemple des processus d’apprentissage (2009 : 32).
« La famille, premier centre éducatif, s’efforce d’intégrer les enfants aux normes
de la communauté. On éduque à la conformité avec la référence adulte. On y
transmet un savoir qui est souvent un savoir-faire, un savoir-reproduire.
L’attribution de ce savoir ainsi que de la raison revient à l’adulte qui a
l’expérience de la vie. Il résulte de cet apprentissage une division des tâches par
âge et par sexe. L’apprentissage est marqué par la communication verbale,
l’imitation et l’évaluation par des châtiments. On ne forme nullement à
l’innovation, on ne prépare pas au transfert vers une nouvelle tâche mais on
s’assure de la continuité et de l’efficacité immédiate ».
Il est ainsi patent que les courants pédagogiques dominants en didactique des langues,
approches communicative ou approche actionnelle, supposent que l’apprenant est un
sujet doté d’une grande autonomie, d’esprit d’initiative, qu’il est autorisé à dire « je » en
toute circonstance et à entrer librement en communication bien au-delà de son groupe
de pairs… Or ces prérequis sont rarement réunis pour l’enfant africain qui risque bien,
en apprenant une langue étrangère, de se voir proposer l’adoption de comportements
communicatifs à rebours de ceux qu’il a intégrés depuis son plus jeune âge.
trent que la parole magistrale elle-même est de plus en plus éloignée du français stan-
dard et des normes de l’écrit :
« Dans ces pays où des parlers autochtones assurent la fonction véhiculaire, le
français de référence véhiculé et représenté par les maîtres, source exclusive ou
prédominante d’exposition à la langue pour les enfants, et déjà acquis par les
maîtres à travers cette expérience scolaire, présente à la fois des traits de norme
endogène, des traits de tension vers l’écrit normé des manuels, et des marques
de l’insécurité linguistique qui affecte le discours de ces locuteurs autorisés.
L’accroche à un français standard tend à s’affaiblir étant donné le peu de
contact des élèves et même des maîtres avec le monde de l’écrit ».
Pourtant, les manuels de français ne changent guère et le français tel qu’on l’enseigne,
mis à part quelques termes déjà présents dans les manuels des années 70, enregistrent
l’écart croissant entre français tel qu’on le parle en Afrique et le français tel qu’on
l’enseigne, fait de parlers mixtes avec alternance de langues.
production écrite (PE). Des supports oraux, écrits et visuels sont utilisés. La mesure
des aspects de production orale implique que l’on effectue des enregistrements. Les
candidats répondent à des questions orales et écrites, racontent des histoires à partir
d’un canevas d’images séquentielles, remplissent des cases dans des exercices à trous
ou répondent à des questionnaires à choix multiples.
Les unités et les structures évaluées relèvent de la phonétique, du lexique et de la
grammaire, ainsi que d’éléments relevant de la cohérence textuelle. On conçoit, à la
lecture de ces éléments, tout le parti qu’une didactique du français en contexte africain
gagnerait à reposer sur de réelles évaluations des compétences des élèves, que l’on
adopte l’outil de Chaudenson ou qu’on lui en préfère un autre.
langue de scolarisation n’est pas une variété du français mais une fonction qui consiste
à apprendre l’école en même temps que le français et se subdivise en une multitude de
compétences diverses qu’elle propose de regrouper en trois domaines : celui des con-
naissances et des représentations du monde, celui des comportements sociaux et
langagiers et celui de la méthode. De ce fait, c’est une fonction commune aux situa-
tions d’enseignement du français langue maternelle et de français langue seconde.
Verdelhan (2002) propose de réfléchir en termes de priorités dans l’enseignement de la
langue, de méthodologie à mettre en œuvre et d’outils à utiliser et sa recherche fournit
des pistes concrètes de mise en œuvre pédagogique. Le chantier ainsi ouvert, pour ce
qui concerne le domaine africain, devrait dans les prochaines années connaître des
développements intéressants, non seulement pour la didactique du français mais éga-
lement pour celle des langues africaines dans toutes les situations où ces dernières,
appelées à devenir medium d’enseignement dans les premières années de scolarisation,
vont devoir remplir à leur tour la fonction de langue de scolarisation. Il y a là sans
doute une piste pour la construction d’une didactique des langues africaines comme
langues premières qui ne fait que s’ébaucher. Nous reviendrons plus loin sur ce point.
Dans le même esprit, on peut mentionner les études portant de manière générale sur
les interactions scolaires. De quelle nature sont les interventions du maître lors de
l’enseignement des langues ? De quel type sont les étayages qu’il propose pour faire
entrer les élèves dans la tâche, les aider à l’accomplir ? Les formats de communication
pédagogique ont une influence considérable sur les apprentissages. On reconnaît là
des problématiques qui ne sont ni récentes ni proprement africaines – les travaux de
Bruner (1966) ont été amplement utilisée en didactique du français langue maternelle –
mais qui commencent seulement à entrer dans les descripteurs des situations didac-
tiques africaines. Une grille d’observation mise au point dans le cadre du projet
LASCOLAF propose des items prenant en compte ces points de vue174.
174Voir : Propositions pour une grille d’observation des pratiques didactiques : un exemple en Afrique
francophone.
Bruno Maurer | 235
l’instruction est donnée dans au moins deux langues, dont l’une est normalement la
première langue de l’élève », la diversité des modèles possibles est très importante.
Rappelons pour mémoire, la classification devenue traditionnelle qui distingue le bilin-
guisme transitionnel dans lequel la L1 est employée pour les premiers apprentissages
et rapidement relayée par une autre langue d’enseignement ; le bilinguisme asymé-
trique où l’on utilise bien les langues mais où l’on apprend à lire et à écrire que dans
une seule langue, celle de l’école ; le bilinguisme complémentaire, les deux langues se
partageant tout au long du cursus le rôle de medium ; le bilinguisme d’immersion, la
langue de scolarisation étant partiellement ou totalement incomprise et utilisée par les
apprenants ; enfin mentionnons l’existence d’un pôle possible, rarement actualisé ce-
pendant, celui d’un bilinguisme total dans lequel les élèves développeraient toutes
leurs habiletés dans les deux langues pour toutes les matières.
La question du choix est toujours vive et nombre de pays n’ont pas arrêté pour
l’instant de stratégie claire. Le modèle le plus souvent choisi est le transitionnel, sans
doute parce qu’il maintient le français dans un rôle dominant qui rassure les différents
acteurs du système éducatif, au premier rang desquels les parents. Ce choix ne fait
pourtant pas l’unanimité dans la communauté des chercheurs. Pour prendre un
exemple récent, Nikiema (2009), dans le texte qu’il donne à la conférence inaugurale
d’un colloque sur la coexistence des langues en Afrique de l’ouest dresse un état des
lieux de l’utilisation des langues africaines comme véhicules/médiums d’enseignement
dans l’éducation formelle dans les pays de la sous-région ouest-africaine. Examinant
les modèles de bilinguisme adoptés et constatant la prédominance du modèle transi-
tionnel avec sortie précoce de la langue africaine, qui débouche sur un bilinguisme
soustractif, Nikiema préconise de changer de paradigme et de maintenir
l’enseignement dans les langues nationales sur tout le cycle de l’enseignement de base
(10 ans).
paysans que chez les intellectuels qui fait qu’ils peuvent s’opposer à ce que leurs en-
fants apprennent (dans) une autre langue que la leur, rendant ainsi difficile le choix de
langues d’instruction dans ce contexte multilingue.
À l’autre bout de la chaîne, en aval de ces décisions et une fois les politiques de scola-
risation mises en place, on peut tenter de prévoir les conséquences que ces décisions
éducatives pourraient avoir à moyen et long terme sur les dynamiques sociolinguis-
tiques. Sur ce sujet Maurer (2007b), après avoir examiné le poids démolinguistique des
11 langues destinées à devenir langues d’enseignement au Mali et l’avoir mis en rela-
tion avec la disponibilité des ressources en manuels et en enseignants, arrivait à la
conclusion qu’au lieu d’aider à la promotion de toutes les langues nationales,
l’introduction des langues nationales dans le système éducatif risquait, au final, de ren-
forcer la domination des grandes langues véhiculaires et de conforter la minoration
des autres et qu’il fallait prendre en compte ces effets possibles au moment de mettre
en place les politiques de bilinguisme.
tion de ceux qui les produisent, peinent à pénétrer les sphères de décision et sont bien
incapables d’atteindre les populations concernées.
Pour rester dans le même pays, le travail de Kabore (2009) mené de manière qualita-
tive auprès de 10 parents d’élèves de Ougadougou révèle des représentations négatives
des langues nationales de leur part, et des doutes et réserves sur l’introduction des
langues nationales dans le système éducatif. On voit ainsi qu’une partie de leurs ré-
serves met en avant comme obstacles à la généralisation de l’enseignement bilingue la
mobilité intranationale des fonctionnaires d’une zone linguistique à l’autre.
De toute évidence, des recherches approfondies doivent être menées sur les représen-
tations des langues, de manière à accompagner les campagnes de sensibilisation : c’est
un axe de recherche qui, si la politique d’utilisation des langues africaines dans les sys-
tèmes éducatifs devait se confirmer, serait de première importance.
176 Entre les études contrastives et ces bi-grammaires, on trouve plusieurs « chaînons manquants » qui
permettent de tracer une sorte de généalogie, mais encore une fois ces travaux sont souvent non publié,
rapports ou mémoires. Nous citerons par exemple le bon travail de Seydou Hanafiou H. (2007).
238 |La contextualisation : l’exemple francophone africain
blique Démocratique du Congo pour réfléchir à la mise en place d’une stratégie mé-
thodologique visant à définir des règles de grammaire bilingue à partir de la grammaire
unilingue.
Les bi-grammaires sont des ouvrages conçus et réalisés dans le but principal de facili-
ter l’enseignement et l’apprentissage du français en contexte multilingue africain en
prenant appui sur les acquis culturels et linguistiques de l’apprenant. Les langues qui
ont pour l’instant été l’objet de productions sont des langues transfrontalières : ful-
fulde, lingala, manding (bambara, dioula, malinké), songhay-zarma, wolof. Les
ouvrages, consultables et téléchargeables sur le site http://lewebpedagogique.com/oif,
se présentent sous forme de fiches pédagogiques. Par rapport aux approches contras-
tives, l’intérêt et le mérite de ces fiches est de se présenter comme des outils à
vocation didactique, de dépasser en quelque sorte la seule comparaison des systèmes.
Là où les approches contrastives cherchaient à prédire les erreurs des apprenants, à les
comprendre et à y remédier, les fiches de bi-grammaire affichent dès leur titre leur
intention pédagogique : « Apprentissage des phrases composées », « Apprentissage de
la subordonnée complétive », « Apprentissage du nombre », etc. Une partie corpus
d’observation est donnée, suivie de règles et d’exercices d’application et de consolida-
tion : on trouve là un matériau intéressant pour faire de la formation d’enseignants
dans un domaine où les outils ne sont pas légion.
Mais au-delà de ces aspects de didactique intégrée des deux langues en présence dans
le système, la question qui reste encore à traiter au plan de la recherche nous semble
être celle de l’émergence d’une didactique des langues africaines comme langues pre-
mières. Nous avons abordé ce sujet dans Maurer (2009) : que signifie par exemple
enseigner le bambara langue maternelle ? Quels paradigmes solliciter ? Toutes propor-
tions gardées, le chantier est aussi vaste que celui qui a consisté à instituer le français
comme discipline au XIXe siècle, à l’autonomiser par rapport à l’enseignement du latin.
Mais à l’inverse de ce qui s’est passé pour le français, dont l’institution en tant que dis-
cipline scolaire s’est faite au détriment du plurilinguisme (par négation/effacement des
langues des régions), la didactique des langues africaines en tant que langues premières
ne peut se penser que dans un cadre de plurilinguisme, étant entendu que dans aucun
des pays, même les plus avancés en la matière, il n’est envisagé que le français soit éva-
cué.
C’est la raison pour laquelle, d’emblée, le modèle de l’enseignement du français langue
première, avec hypertrophie de l’activité grammaticale, ne saurait être retenu pour di-
dactiser ces langues (Cuq et Queffelec, 2005). Les contextes de construction de ces
didactiques sont, on le voit, diamétralement opposés. Mais le paradigme du français
langue étrangère ne peut pas plus être retenu pour ces langues ; les principes de la pé-
dagogie dite convergente au Mali, nourries d’idéologie SGAV mal comprise, ont
généré des pratiques strictement communicatives où l’on s’interdisait de réfléchir au
fonctionnement des systèmes linguistiques (Maurer, 2007), préférant opter pour un
parallélisme méthodologique : on enseigne la L2 comme la L1, selon les mêmes prin-
cipes communicatifs (bain de langue, absence de réflexivité dans les apprentissages
linguistiques, rapports interlinguistiques non-pensés).
Bruno Maurer | 239
Le chantier qui s’ouvre consistera à fonder une didactique des langues premières en
Afrique qui évite à la fois un enseignement exagérément descriptif, normatif, gramma-
tical (lequel risque trop aisément de basculer vers un enseignement de type transmissif
doctrinaire) un modèle strictement communicatif qui ne préparerait pas suffisamment
à aller ensuite à la rencontre d’une autre langue, le français. Forts des réflexions me-
nées ailleurs dans le monde sur l’éducation en contexte plurilingue, sur la didactique
du plurilinguisme qui est en train de poser ses jalons théoriques, les pédagogues afri-
cains doivent résolument penser l’enseignement de leurs langues premières comme
constructeur des premiers éléments constitutifs d’un répertoire scolaire plurilingue.
On le voit au terme de ce parcours, les recherches en didactique des langues sur le
terrain africain se sont considérablement diversifiées ces dernières années, investissant
des domaines nouveaux. L’émergence de concepts comme français langue seconde et
français langue de scolarisation, la multiplication d’expériences d’enseignement dans
les langues africaines ne sont pas étrangères à ce développement, amenant à poser de
nouvelles questions, à chercher de nouveaux angles d’attaque. Bien des points ont été
capitalisés et constituent aujourd’hui le socle de recherches futures. Pour autant, les
avancées de la recherche peinent encore, faute de diffusion suffisante sans doute, faute
de moyens également, faute aussi parfois de volonté politique, à trouver leur traduc-
tion en matière de politique éducative ou de formation des maîtres.
5. La compétence plurilingue et
pluriculturelle : genèse et évolutions
d’une notion-concept
Veronique Castellotti, Danielle Moore177
C’est à partir de la fin des années 90, puis surtout au cours des années 2000, suite à la
publication du Cadre européen commun de référence pour les langues (Conseil de l’Europe,
2001), que la notion de compétence plurilingue et pluriculturelle (désormais CPP) s’est
imposée comme une référence essentielle pour penser le rapport à la pluralité et à la
diversité, du point de vue des questionnements sur l’appropriation. Conçue au départ
comme relevant « du volontarisme didactique et d’un essai de déplacement des repré-
sentations de ce qu’est un acteur social bi-plurilingue » (Castellotti et al., 2009), visant
notamment à se démarquer d’une vision binaire et idéalisée des situations
d’apprentissage et d’enseignement des langues, elle se construit et évolue en lien avec
des finalités en matière de politique linguistique et éducative en Europe et, plus ré-
cemment, dans d’autres aires géopolitiques du globe (voir par exemple Zarate et
Liddicoat, 2009). Sa mise sur le marché didactique constitue, à l’époque, un « coup de
force didactique » (Coste, 2008), un « coup de force interventionniste » (Castellotti,
Cavalli, Coste et Moore, 2009), un « renversement copernicien » (Blanchet, 2007), au-
trement dit, un pavé dans la mare des idéologies alors prévalentes, aussi bien dans la
sphère publique que scientifique. Nous en proposons ici une relecture178, à la lumière
des différents textes ayant contribué à son émergence et à son évolution, au cours des
douze dernières années, dans le champ européen.
177 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : appropriation, compétence, compé-
tence plurilingue et pluriculturelle, compétence d’appropriation plurilingue.
178 Ce texte reprend partiellement, tout en les reformulant, des extraits de « Didactique(s) du (des) pluri-
linguisme(s) », Castellotti et Candelier (à paraître). Voir aussi Moore (2006), Moore et Castellotti (2008) et
Moore et Gajo (2009).
242 |La compétence plurilingue et pluriculturelle
Candelier (2008) parle de « l’impasse sur le cœur même du projet [la CPP] » qui est faite dans les usages
179
180 La notion de compétence plurilingue apparaît pour la première fois en français en 1991, sous la plume
de Daniel Coste (Coste, 1991 : 174) dans un numéro du Français dans le Monde - Recherches et Applications
intitulé Vers le plurilinguisme ? École et politique linguistique, codirigé avec Jean Hébrard et simultanément pu-
blié dans la collection F.
L’étude préparatoire dont il est fait ici mention donne lieu à une traduction en anglais la même année (la
parution en est d’ailleurs annoncée en page de garde de l’étude citée). Elle ne sera pourtant publiée qu’en
2009, sans doute à cause de la difficulté d’acclimatation à l’époque d’une notion non encore installée (la
notion, d’abord traduite par multilingual and multicultural competence dans la traduction initiale non
publiée de 1997 est systématiquement remplacée par plurilingual and pluriculural competence en 2009 ; la
parution en anglais du CECR date, comme sa parution en français (et en plusieurs autres langues de
l’Union), de 2001. On rappellera que le Cadre synthétise plusieurs études de référence, écrites à l’origine
dans des langues différentes. Voir à ce propos les remarques formulées dans Moore et Gajo (2009) con-
cernant les glissements conceptuels introduits par la traduction de la définition de la CPP dans la version
anglaise du Cadre.
181 La vision additive (ou soustractive) de l’apprentissage des langues, surtout développée dans le contexte
canadien notamment en référence aux travaux sur l’immersion, insiste sur les conditions sociales de
l’apprentissage et les attitudes (positives ou négatives) que celles-ci génèrent chez les apprenants de
langues. Toutefois, de notre point de vue, la notion a encouragé une lecture statique du bilinguisme qui
fige celui-ci dans l’idée que les compétences dans une langue s’ajoutent aux compétences dans une autre,
et qui condamne dans la foulée la possible perte des langues. On trouve aussi plus récemment dans le
monde anglophone l’apparition de la notion de « plurilinguisme additif », à laquelle nous opposons les
mêmes arguments d’opacification de la notion, le plurilinguisme pour nous se définissant comme intrin-
sèquement dynamique, ouvert au déséquilibre, aux interalliages et à l’ambivalence, ne pouvant ainsi
− surtout pas − se réduire à une addition des compétences. Les compétences partielles ou les mises en
(in)visibilité de certaines composantes de la compétence plurilingue et pluriculturelle font aussi partie, à
244 |La compétence plurilingue et pluriculturelle
183 Le Cadre européen commun de référence pour les langues (2001) distingue ainsi le « plurilinguisme »
du « multilinguisme » qui est la connaissance d’un certain nombre de langues ou la coexistence de langues
différentes dans une société donnée » (p. 11).
Veronique Castellotti, Danielle Moore | 245
des savoirs autres que langagiers sur les caractéristiques et les acteurs de langues et cul-
tures autres) » (Ibid. : 14). Cela conduit aussi à valoriser des capacités d’approximation.
Enfin, ce déséquilibre n’est pas fixe. La CPP est donc fondamentalement dynamique,
évolutive et malléable, à la fois dans le temps et dans l’espace. Elle « s’enrichit de nou-
velles composantes, en complète ou en transforme certaines autres, en laisse encore
certaines autres dépérir » (Ibid. : 15). Bénéficiant de l’apport de la sociologie de Bour-
dieu, mais aussi de Touraine et, plus tard, de Giddens, la notion doit encore lutter
contre des idéologies circulantes (le texte initial de 1997 comporte par exemple tout un
développement visant à déconstruire la notion de semilinguisme, Ibid. : 21-23). L’idée
de « perte » peut alors être entrevue comme partie d’une écologie des usages, et
comme forme (en creux) de capital, selon une perspective de l’économie des biens
symboliques, et le « déséquilibre » comme une forme « ordinaire » (12) de
« l’expérience plurilingue et pluriculturelle » (16).
La notion, en passant d’une représentation des apprentissages visant une maîtrise
complète et parfaite, hors contexte, à la mise en oeuvre d’une compétence située, tou-
jours différente et constamment renouvelée, déstabilise ainsi les paradigmes
dominants. En replaçant au centre des préoccupations l’autonomie de la personne, sa
liberté et son histoire, elle porte en filigrane des préoccupations de critique sociale, de
questionnements épistémologiques, d’engagement intellectuel et social.
184 La notion a ensuite été relue et précisée par d’autres chercheurs (voir notamment Moore, 2006 ; Moore
et Castellotti, 2008 ; Moore et Gajo, 2009 ; Castellotti, Cavalli, Coste et Moore, 2009). La diffusion et la
complexification de la notion est aussi due aujourd’hui à une relève générationnelle qui contribue large-
ment à en étendre la (re)connaissance et les usages (voir par exemple Bono et Stratilaki, 2009).
246 |La compétence plurilingue et pluriculturelle
Parallèlement, des travaux sur l’acquisition des langues s’intéressent aussi aux phéno-
mènes de pluralité, mais d’un point de vue plus psycholinguistique ; les travaux de Jim
Cummins, en particulier, centrés sur des enfants de différents groupes sociaux et lin-
guistiques, postulent l’existence d’une « compétence sous-jacente commune » (common
underlying proficiency) et, dans certaines conditions, d’une « interdépendance » linguis-
tique chez les bilingues (pour un retour sur ces travaux, voir Cummins, 2001).
Ces deux courants, socio- et psycholinguistique, vont également coïncider avec une
montée en puissance à la même époque de l’intérêt porté aux orientations socio-
constructivistes en psychologie de l’apprentissage, suite aux travaux de Lev Vygotski
(voir notamment Schneuwly et Bronckart, 1985), qui insistent sur la nécessité de
s’appuyer sur l’existant et de l’intégrer pour développer de nouveaux apprentissages.
C’est en particulier à partir de ces réflexions que se construit, dans les années 80 et 90,
un nouveau regard, chez les chercheurs européens notamment, sur les phénomènes de
bilinguisme et un rapprochement entre bilinguisme et apprentissage des langues. Les
représentations du bilinguisme étaient en effet, jusque-là, très majoritairement influen-
cées par la conception structuraliste monolingue ; dans ce cadre, illustré notamment
par les positions de Bloomfield, un bilingue ne peut être qu’un « double monolingue »,
quelqu’un qui disposerait d’une maîtrise « parfaite et équilibrée » de deux systèmes
linguistiques soigneusement distincts et étanches. En étudiant le bilinguisme d’un
point de vue non plus « idéal » mais fonctionnel, à partir d’études sur les usages de
migrants, un groupe de chercheurs suisses construit, au début des années 80, une tout
autre définition du bilinguisme. Peuvent alors être considérés comme bilingues :
« People who use two or more languages in their everyday life. Contrary to general belief,
bilinguals are rarely equally fluent in their languages ; some speak one language better than
another, others use one of their languages in specific situations, and others still can only read or
write one of the languages they speak185 ». (Grosjean, 1982)
Cette orientation sera enrichie d’une composante identitaire avec les travaux de
Georges Lüdi et de Bernard Py sur les usages contextualisés de migrants en Suisse,
invitant, à partir d’une analyse de leurs pratiques, à les interpréter comme des indices
d’une compétence bilingue originale qui ne relève pas de la simple addition des
langues en présence, mais possède un statut d’autonomie relative qui témoigne d’une
identité linguistique et culturelle particulière (Lüdi et Py, 1986/2002 et 2009).
Un rapprochement peut alors s’opérer entre des recherches en sociolinguistique, en
acquisition et en didactique des langues. Elles débouchent sur une confrontation pro-
ductive de différentes formes d’usages bilingues, scolaires et ordinaires (voir
notamment Dabène, 1990 et Py dans Gajo et al., 2004). Ce foisonnement des re-
cherches dans la sphère langagière (sociolinguistique, psycholinguistique, didactique)
185 Notre traduction : « (sont bilingues) des personnes qui utilisent deux langues ou plus dans leur vie
quotidienne. Contrairement à une croyance répandue, les bilingues ont rarement une aisance équivalente
dans leurs langues ; certains parlent une langue mieux qu’une autre, d’autres emploient l’une des langues
dans des situations spécifiques, et d’autres peuvent seulement lire ou écrire l’une des langues qu’ils par-
lent ». Voir aussi Grosjean (2008).
Veronique Castellotti, Danielle Moore | 247
rejoint dans les années 90, comme nous l’avons rappelé ci-dessus, des questionne-
ments de politique linguistique et éducative liés à la construction européenne et à ses
conséquences, ce qui conduit à la fois à investir la notion de compétence mais à la
construire non plus comme bilingue186 mais plurilingue et pluriculturelle.
Reformulée en 2001 comme la « capacité d’un individu à opérer à des degrés variables
dans plusieurs langues et à gérer ce répertoire hétérogène de manière intégrée » (Coste,
2001a : 192), la notion est reprécisée en insistant sur le point de vue de l’acteur social
qui construit, restructure, met en œuvre, reconfigure une « palette de ressources dont
il [l’acteur social] peut jouer, de manière plus ou moins volontaire et réfléchie » (Coste,
2001a : 198), en mobilisant diversement les langues qui jouent « un rôle de pivot,
d’appui, de référence » (Coste, 2001a : 196 ; voir aussi Coste et Simon, 2009).
On peut donc pointer un certain nombre d’accents d’insistance et de précisions qui
densifient la notion et la rendent à la fois plus complexe et plus opératoire, parmi les-
quels :
186 Dabène rappelle ainsi que « l’édifice théorique de la didactique des langues s’est fondamentalement
partiellement occultée dans le CECR et n’apparaît que de manière diffuse dans les outils qui en découlent
(voir par exemple Zarate et Gohard Radenkovic, 2004 ; Castellotti et Moore, 2005b et 2006).
248 |La compétence plurilingue et pluriculturelle
paramètres propres, qui ne sont pas ceux que l’on peut trouver chez le
locuteur monolingue188 » (Ibid. : 19, n.t.). D’autres travaux, dans la même
lignée, s’attachent à approfondir le rôle des différentes langues (L1, L2, L3,
etc.) dans le processus d’acquisition (voir par exemple Cenoz, Hufeisen et
Jessner, 2001). Ils soulignent également « les avantages linguistiques et
éducatifs qui résultent de ponts construits par l’enseignant entre des
disciplines linguistiques qui sinon restent isolées189 » (Herdina et Jessner,
2002 : 161).
188 « the multiple language speaker and her/his language system is not merely the result of adding the two
or more language systems but a complex dynamic system with its own parameters, which are not to be
found in the monolingual speaker ».
189 « the linguistic and educational advantages gained from bridges built by the teacher between otherwise
Comme nous l’avons déjà remarqué, cette CAP se traduit plus concrètement par un
certain nombre de capacités comme, en particulier :
- savoir mettre en relation des ressources dans plusieurs langues/variétés pour
résoudre des problèmes dans des langues/variétés peu familières ;
- se positionner comme interlocuteur bienveillant /attentif dans les échanges
190 Candelier (2008) remarque que ce positionnement didactique se trouve rassemblé, grosso modo, sous
l’ombrelle de la « didactique du plurilinguisme », un terme dont il note qu’il n’apparaît pourtant pas dans
l’étude pré-citée de 1997 (Candelier, 2008 : 73). On rappellera cependant que la CPP constitue à l’époque
un putsch didactique et que, si les auteurs de l’étude sont déjà plus ou moins directement impliqués dans
une didactisation de différentes formes d’approches plurilingues (rassemblées sous diverses appellations :
éducation bilingue, didactique intégrée, intercompréhension, éveil aux langues, approches interculturelles),
celles-ci ne sont pas encore nécessairement pensées dans leurs articulations. Ce n’est que plus tard que se
développe une théorisation didactique fédératrice de ces approches (voir par exemple Castellotti, Coste et
Duverger, 2008 ; Moore, 2006 ; et pour une discussion, Candelier, 2008 ; Candelier et Castellotti à pa-
raître ; Zarate, Kramsch et Lévy, 2008).
Veronique Castellotti, Danielle Moore | 251
En ce sens, elle englobe, de notre point de vue, la compétence interculturelle, comme une compétence
191
spécialisée qui met en relief les habiletés de dialogue et de médiation et prend la forme d’actions faisant
appel à des ressources sociales spécifiques. Pour une discussion sur les liens entre « bi »/« pluri »/« inter »,
voir Coste, Moore et Zarate (1997 : 11-12).
252 |La compétence plurilingue et pluriculturelle
192 Ce texte doit beaucoup à Anwei Feng, avec lequel j’ai collaboré depuis des années, en particulier dans
un article qui rend compte des recherches dans ce domaine de manière bien plus précise qu’il n’est pos-
sible de le faire ici (Byram et Feng, 2005).
254 |La compétence interculturelle
Ce qui donne lieu au plus grand nombre de recherches sur l’apprentissage culturel est,
sans aucun doute, le domaine des explications des relations entre la compréhension
qu’un apprenant développe d’autres cultures et son degré de motivation et de réussite
dans l’apprentissage des langues. Dans les premières recherches de Gardner et Lam-
bert (1972), la notion de « motivation intégrative » – comme désir d’apprendre une
langue pour être plus proche, d’une certaine manière, de ses locuteurs et de leur cul-
ture – a été considérée comme le meilleur garant de succès. Mais, plus tard, d’autres
recherches (Dörnyei, 2001) ont montré que la motivation « instrumentale » peut être
plus importante que la motivation intégrative, ceci en fonction du contexte social
d’apprentissage. Si dans les représentations des apprenants aucun lien n’est établi entre
la langue apprise et ses locuteurs natifs (ce qui peut être le cas de l’anglais internatio-
nal) la motivation « instrumentale » ou « pragmatique » semble être un concept qui
rend mieux compte de la réussite dans les apprentissages.
Les relations causales entre la didactique des langues et l’apprentissage des cultures a
été l’objet de recherches, même si elles sont rares. Byram, Esarte-Sarries et Taylor
(1991) ont mené une enquête sur les effets des différences de style dans
l’enseignement des langues et des cultures sur les représentations et la compréhension
des apprenants d’une culture nationale. Les résultas ont été décevants en ce que il n’a
pas été possible d’identifier des effets de l’enseignement mais une forte action d’autres
facteurs, extérieurs à la classe et à l’école. Plus récemment, des chercheurs australiens
ont enquêté sur les relations entre de l’enseignement et la constitution des attitudes. Là
encore, les résultats sont décevants car il semble qu’on ne puisse établir aucun lien
causal entre l’enseignement et le développement d’attitudes positives (Ingram et
O’Neill, 2002). Une étude sur grande échelle menée récemment en Allemagne (Göbel
et Hesse, 2008) a mis en évidence des relations entre l’expérience d’autres cultures des
enseignants et le degré de compétence interculturelle de leurs apprenants (Göbel,
2009), mettant en évidence des effets positifs.
Les produits de recherches de cette nature peuvent conduire à des recherches sur les
interventions et à des argumentations susceptibles de faire évoluer la formation des
enseignants et les méthodologies d’enseignement.
Michael Byram | 255
Les relations entre l’enseignement et la compréhension des cultures et les attitudes par
rapport à soi-même et à l’altérité, a sa propre culture et à des cultures étrangères cons-
tituent un domaine qui requiert encore de nombreuses recherches. De tels travaux
pourraient tirer parti et s’enrichir des recherches comparatives sur l’apprentissage cul-
turel, comparant par exemple des opinions et des réactions à l’approche
communicative propres à la Chine et au monde occidental (Rao, 2002), en Colombie
et aux USA (Schulz, 2001). On dispose d’un filon particulièrement bien exploité en ce
qui concerne les recherches sur les différences lexicales entre, par exemple, l’anglais et
le chinois (Cortazzi et Shen, 2001) ou l’anglais et l’allemand (Olk, 2002) ou encore le
français et l’anglais (Boers et Demecheller, 2001). On y analyse la compréhension que
les locuteurs ont de mots en apparence semblables et on en tire des conséquences
pour l’enseignemement/apprentissage.
Les recherches centrées sur la compréhension (Verstehen) ne sont pas toujours consi-
dérées comme pertinentes en didactique parce qu’elles ne sont pas axées sur les
relations cause-effet. Elles constituent cependant un domaine important parce qu’elles
situent la didactique de la compétence interculturelle dans des contextes sociaux spéci-
fiques. Lantolf (1999, 2000a et 2000b) a développé une argumentation en faveur d’un
positionnement théorique qui reconnaisse la valeur des processus d’apprentissage des
cultures, du point de vue des apprenants, dans des contextes d’acquisition informels.
Pavlenko et Lantolf ont utilisé comme données des histoires personnelles pour analy-
ser l’apprentissage des langues secondes comme implication et (re)construction de soi
(2000). D’autres ont étudié les questions de « perte d’identité » d’enfants apprenant des
langues (Downes, 2001 ; Jo, 2001) ainsi que le rôle particulier joué par le manuel dans
le maintien de l’identité des apprenants (Arbex, 2001). On note un intérêt croissant
pour l’incidence des apprentissages des langues et des cultures sur l’identité culturelle
des apprenants qui effectuent des séjours à l’étranger pour améliorer leur apprentis-
sage (Crawshaw, Callen et Tusting, 2001 ; Jordan, 2001), mais aussi, plus largement,
sur la question des « identités en langue étrangère » (Dörnyei et Ushioda, 2009).
Il est aussi important de comprendre comment les apprenants, dans la classe, interprè-
tent leur expérience d’apprentissage. Cependant, peu de recherches sont consacrées,
par exemple, a l’influence de la perception et à l’interprétation de leurs connaissances
d’autres pays sur la compréhension qu’ils ont d’eux-mêmes ou sur les réactions des
apprenants aux attentes de leurs enseignants qui souhaitent les voir adopter des atti-
tudes plus positives. De nombreuses pistes de recherches novatrices sont ouvertes
dans ce domaine.
pliqués dans l’enseignement/apprentissage. Mais, celles qui ont pour objet de modifier
le statu quo sont tenues de clarifier au préalable les directions des évolutions souhai-
tées. Cela signifie que les dernières reposent davantage sur les élaborations théoriques
et conceptuelles antérieures aux enquêtes empiriques à mener. Mais il existe d’autres
différences entre elles. La qualité des résultats des recherches portant sur le statu quo
sera évaluée à partir de critères comme la clarté des opérationnalisations qu’elles auto-
risent, la validité et la représentativité des données quantitatives ou l’authenticité et la
fiabilité des donnes qualitatives ou encore la rigueur dans l’interprétation des donnes
et dans l’élaboration de conclusions. Les recherches procédant d’une prise de position
sont évaluées en fonction de leur force argumentative et de la rhétorique qui les fonde,
par la pertinence des arguments par rapport à un contexte donné et par les recherches
qui peuvent être citées à l’appui. L’argumentation selon laquelle l’enseignement des
langues doit comporter le développement de la compétence interculturelle est un
exemple privilégié de cela, dans la mesure ou les références aux évolutions des sociétés
contemporaines et à la « globalisation » y sont davantage présentes que les résultats de
recherches empiriques.
Ces recherches fondées sur une prise de position reflètent l’état des relations entre
l’enseignement/apprentissage et les conditions sociales ou elles sont ancrées. Les
théories actuelles de la compétence interculturelle sont, par conséquent, concernées
par la réflexion sur les contextes sociaux et politiques. Par exemple, en Allemagne,
Kramer (1997) argumente en faveur d’un enseignement de l’anglais (Anglistik) qui cor-
responde aux nouvelles formes qu’ont les gens de vivre leur vie, de s’impliquer dans
leur culture, en une période de changements rapides. L’étude des langues et des cul-
tures devrait aborder des questions telles que « comment vivons-nous ? » et
« comment devrions-nous vivre ? », ce qui introduit une dimension éthique explicite
dans l’enseignement/apprentissage. L’évolution des conditions sociales est aussi reflé-
tée dans les travaux de Kramsch aux États-Unis et dans ceux de Zarate en France. La
première défend, comme Kramer, l’idée d’une redéfinition des finalités et de l’étude
des langues, qui devrait correspondre à la « mutation épistémologique en cours dans
les universités » (1995 : XIV). Son argumentation pour que l’étude des langues crée
« un troisième lieu », un espace privilégié et interrogeant, où les apprenants puissent
acquérir une meilleure perception de leur culture et de celles des autres, est désormais
largement acceptée. Zarate (2003), elle aussi, redéfinit la nature et les finalités des en-
seignements des langues et des cultures, en soulignant le rôle particulier des situations
d’entre deux ou de frontières ainsi que la nécessite de mettre en adéquation
l’enseignement des langues avec le défi particulier que représente l’intégration euro-
péenne, à un moment où les états nations et les identités nationales tendent à se
dissoudre. En Grande-Bretagne, Starkey (2002) introduit une forte composant éthique
en plaidant pour que l’enseignement des langues et des cultures fasse une place, dans
ses objectifs et ses finalités, a une éducation aux droits de l’homme. Guilherme va en-
core plus loin en mettant l’accent sur les dimensions politiques des enseignements des
langues et des cultures étrangères :
L’éducation aux langues et aux cultures étrangères comporte un rôle politique
car, d’une part, elle est un élément particulier du curriculum, en ce qu’elle a
Michael Byram | 257
partie liée avec les politiques culturelles et que, d’autre part, elle permet
d’introduire un élément nouveau plus large de nature politique, a savoir
l’éducation a la citoyenneté démocratique. (2002 : 155-155)
Le modèle critique qu’elle propose intègre trois « composantes » qui ont toutes un
fondement politique : éducation aux droits de l’homme et éducation à la citoyenneté
démocratique ; combinaison interdisciplinaire d’études culturelles, de communication
interculturelle et de pédagogie critique ; et une série « d’opérations » pédagogiques
comme analyser et évaluer, apprécier, faire l’expérience de et agir.
Ces auteurs pressentent de nouvelles perspectives et finalités et, du même coup, ils
ouvrent de nouvelles problématiques de recherche et des possibilités d’autres prises de
position. Les chercheurs pourraient chercher à comprendre les auto-identifications des
apprenants et des enseignants qui vivent dans ces nouvelles conditions et ceux qui
s’intéressent à l’intervention et au développement pourraient y trouver des éléments
susceptibles de les guider dans la planification de leurs recherches action relatives à ces
nouveaux objectifs et finalités.
Certains indices laissent à penser que ces développements ont déjà une certaine effica-
cité. On prendra pour exemple celui du vocabulaire, déjà mentionne, ou les
enseignants cherchent a enseigner des différences a travers des mots a forte charge
culturelle (Qi, 2001 ; Galisson, 2000). Un autre exemple est celui de l’emploi de corpus
de langue pour enseigner les différences pragmatiques (Berrier, 2001). Sans surprise,
les nouvelles technologies sont considérées comme un moyen de réduire les distances
et de permettre aux apprenants de faire l’expérience d’interactions avec des locuteurs
natifs. Les contacts par e-mail (Liaw et Johnson, 2001 ; Blez, 2001 ; Jogan, Heredia et
Aguilera, 2001), les discussions électroniques (Truscott et Morley, 2001 et Internet
comme source d’information (Herronet et al., 2002 ; Gruber-Miller et Benton, 2001)
sont représentatifs de cette tendance, bien caractérisée dans un ouvrage sur les
échanges interculturels en ligne (O’Dowd, 2007). L’enseignement mutuel en tandem,
destiné à l’origine au développement de la compétence linguistique, est aussi un
moyen de créer des occasions d’apprentissages culturels (Rohrbach et Winiger, 2001 ;
Kötter, 2001). Quand des visites et des échanges sont proposés aux apprenants de
langue dans le même but, on relève des tentatives comparables de créer des opportu-
nités d’apprentissages culturels (Godard-Radenkovic, 2001 ; Harbon, 2002 ; Breugnot,
2001). Toutes ces démarches permettent aux chercheurs d’évaluer leur efficacité et
leur efficience.
L’innovation peut s’effectuer à travers les manuels. L’analyse des contenus culturels
des manuels est un domaine bien reconnu et il comprend des recherches sur leurs ef-
fets sur les représentations des apprenants (Sercu, 2000). Les comptes-rendus
concernant les difficultés à utiliser un manuel élaboré dans un pays donné pour ensei-
gner dans un autre (Yakhontova, 2001) ressemble à ceux relatifs à l’emploi des
nouvelles technologies occidentales ailleurs que dans l’espace occidental (Smith, 2001 ;
Takagaki, 2001 ; Feng et Byram, 2002). On y plaide pour une représentation de
l’interculturel dans le choix des matériaux destinés à l’enseignement et pour une ana-
lyse des intentions des auteurs de manuels et des interprétations des apprenants quand
258 |La compétence interculturelle
on utilise des documents authentiques en classe. La prise de position est, dans ce cas
tout à fait explicite et elle invite à nouveau les chercheurs à évaluer les effets de tels
choix.
ception l’étude de Dahlen (1997) qui analyse de l’intérieur la manière dont les forma-
teurs « emballent » les connaissances culturelles. Il analyse leurs relations avec le
monde économique et les marchés et défend la thèse que cela conduit à utiliser un
concept « marchandisé » et daté de culture. La didactique de ces formations n’a pas
fait l’objet de nombreuses recherches et elle offre encore de nombreuses opportunités
d’étude.
Les professionnels des langues peuvent aussi être surpris par le fait que les recherches
en acquisition des langues étrangères accordent peu d’attention à la compétence inter-
culturelle. Ces recherches ont pour objet les problématiques de l’acquisition des
langues en tant que systèmes, les parcours d’apprentissage, les causes des fossilisations,
etc. Les questionnements relatifs aux apprentissages culturels concernent sans doute la
manière dont enfants et adultes acquièrent les concepts de leur nouvel environnement
culturel, les « mots-clé » qui distinguent les langues entre elles (Wierzbicka, 1997b), les
« domaines riches » d’une culture (Agar, 1991). Lantolf estime qu’il est important de
chercher à comprendre « comment et jusqu’où on peut devenir cognitivement iden-
tique aux membres d’une autre culture […] et voir le monde à travers un regard
culturellement différent. » (1999 : 29). Il fournit une très utile présentation des re-
cherches relatives au lexique et aux métaphores, mais il relève que ces recherches en
sont encore à leurs premiers stades.
Un développement récent tend à élargir le champ d’intérêt des recherches sur
l’acquisition des langues étrangères. Norton (2000) défend l’idée que l’acquisition des
langues est influencée par les relations sociales, par les identités sociales que les per-
sonnes immigrantes sont autorisées à construire dans la société où ils vivent. Miller
(2003) a mené des recherches comparables auprès d’enfants, pour analyser les formes
de l’impact de leurs auto-représentations sur leur acquisition des langues. L’un et
l’autre sont à la recherche d’explications (Erklären), mais ils tentent aussi de com-
prendre ces expériences du point de vue des apprenants (Verstehen). Dans une autre
tentative pour comprendre ces expériences d’apprentissage, Pavlenko (1998) a analysé
les récits autobiographiques d’apprentissage des langues, notamment ceux extraits de
ce qu’elle nomme les « chefs d’œuvre incontestés de la littérature », comme les textes
de Ewa Hoffmann, de Julien Green et de Salman Rushdie. Elle montre qu’on y ren-
contre à un haut degré la capacité à se rappeler et à réfléchir sur sa propre expérience
d’apprentissage langagier. Mais, par ailleurs, on dispose de peu de réflexions de lin-
guistes bilingues sur leur propre expérience, à part, à nouveau, les exemples de
Wierzbika (1997a) et de Paulston (1992), lesquelles suggèrent que les chercheurs qui
ont cette riche expérience possèdent un fort potentiel.
Il est clair que la didactique peut tirer profit des recherches empiriques sur les proces-
sus d’apprentissage et d’enseignement/formation tels que ceux que nous avons
mentionnés ici. Il est tout aussi évident que les méthodologies de collecte des données
et de leur analyse varient en fonction des finalités de la recherche. Nous n’avons pas
mis l’accent sur les méthodologies, dans la mesure où l’emploi d’aucune d’entre elles
ne peut être tenu pour spécifique aux recherches sur la compétence interculturelle et
sur la didactique correspondante, tout comme aucune ne peut en être exclue.
L’exemple de l’analyse précise des textes des chefs d’œuvre de la littérature peut être
260 |La compétence interculturelle
Le projet CARAP – que nous présentons ci-après – présente diverses particularités qui
ne sont pas sans influencer la méthodologie mise en œuvre dans le travail de recherche
effectué.
Dans la suite de ce texte, nous discuterons notre projet et sa méthodologie avec pour
arrière-fond cet ancrage contextuel – que nous assumons pleinement et qui ne fait que
mettre en évidence la nécessaire contextualisation de toute recherche. Nous commen-
cerons par présenter la visée du projet (§ 2) et tenterons de montrer comment nous
avons conçu un cadre théorique et des outils méthodologiques pertinents (§ 3). Ce
faisant, nous discuterons quelques difficultés que nous avons rencontrées (§ 3 et 4).
Puis nous illustrerons brièvement les résultats auxquels nous sommes parvenus (§ 5)
avant de conclure sur les orientations actuelles du projet et quelques questions encore
ouvertes.
sieurs (= plus d’une) variétés linguistiques et culturelles. Nous les opposons aux ap-
proches que l’on pourrait appeler singulières dans lesquelles le seul objet d’attention pris
en compte dans la démarche didactique est une langue ou une culture particulière, prise
isolément. Ces approches singulières ont été tout particulièrement valorisées lorsque
les méthodes structurales puis communicatives se sont développées et que toute tra-
duction, tout recours à la langue première étaient bannis de l’enseignement.
Sous réserve d’une analyse ultérieure plus fine, nous avons recensé quatre approches
plurielles : l’approche interculturelle, l’éveil aux langues, l’intercompréhension entre les langues pa-
rentes et la didactique intégrée des langues apprises (pendant le cursus scolaire et au delà).
Nous n’entrerons pas ici dans une discussion approfondie de ces approches, de leur
choix voire de la limitation à ces quatre seules. L’important à retenir, du point de vue
méthodologique, c’est que nous avons choisi de nous limiter à des approches qui nous
apparaissent comme privilégiées pour développer précisément les aspects plurilingues et
interculturels de la compétence des sujets apprenants. En effet, sans approches plu-
rielles, c’est la formation plurilingue préconisée par le Guide pour l’élaboration des
politiques linguistiques éducatives en Europe qui est compromise. Sans articulation entre les
langues, tout effort visant à augmenter le nombre de langues apprises par un même
individu dans le cadre de l’éducation formelle se heurtera immédiatement à des limites
en termes à la fois de capacité d’apprentissage et d’espace dans les curricula, limites
que la synergie mise en oeuvre par les approches plurielles permet d’élargir. Sans ap-
proches plurielles, c’est donc la diversité des langues proposées et apprises qui est
réduite, c’est-à-dire la capacité de l’école à doter les apprenants des compétences lin-
guistiques et culturelles diversifiées (et de la faculté à les étendre) dont chacun a besoin
pour vivre, travailler, participer à la vie culturelle et démocratique dans un monde où
la rencontre avec la diversité des langues et des cultures fait de plus en plus partie du
quotidien, pour un nombre de plus en plus élevé d’individus. Sans articulation entre
les langues, ce sont enfin des pans entiers de l’expérience langagière antérieure des
apprenants qui restent ignorés, c’est-à-dire à la fois inexploités et, pour certaines
langues, dévalorisés198.
198 On notera le lien étroit qui lie les approches plurielles à ce que l’on appelle par ailleurs la (les) didac-
tique(s) du/des plurilinguisme(s) : si on considère que ce qui caractérise comme telle(s) la/les
didactique(s) du plurilinguisme, c’est la volonté de favoriser, par l’intervention didactique, des démarches
d’apprentissage des langues dans lesquelles l’apprenant peut s’appuyer sur ses connaissances linguistiques
préalables, dans quelque langue que ce soit, on comprend que cela ne peut se faire qu’en ayant recours à
des approches didactiques qui mettent en oeuvre des activités d’enseignement-apprentissage impliquant à
la fois plusieurs (= plus d’une) variétés linguistiques et culturelles (définition retenue ici pour les ap-
proches plurielles). Pour une réflexion plus approfondie sur les liens entre didatique(s) du/des
plurilinguisme(s) et approches plurielles, cf. Candelier et Castellotti (à paraitre).
266 |Les approches plurielles
Comme on le voit, c’est la partie commune – au niveau du sens – entre ces différentes
entrées qui donne lieu au descripteur, par-delà les spécificités de chacune (ici : les
« noms », qui sont une catégorie particulière de mots (pour les deux premiers) ; la réfé-
rence à la mémorisation dans d), à des suites plus larges dans e).
La formulation définitive retenue est souvent influencée par la structuration
d’ensemble donnée à la partie du CARAP dans laquelle elle s’insère. Ici, par exemple,
le choix du recours à l’expression « la proximité et la distance » découle de celui effec-
tué au niveau du descripteur de niveau supérieur « 3. : Savoir comparer les
phénomènes linguistiques / culturels de langues / cultures différentes [Savoir perce-
voir / établir la proximité et la distance linguistique / culturelle] ».
L’influence de la structuration d’ensemble, qui résulte elle-même de la confrontation
entre les représentations des auteurs, liées à leur propre itinéraire scientifique, conduit
parfois à introduire des descripteurs pour lesquels on n’avait pas relevé d’entrée. C’est
le cas pour le descripteur S-3.3.2 (« Savoir percevoir la proximité et la distance entre
des éléments écrits de la taille d’un morphème / d’un mot°»), qui a été retenu en fonc-
tion d’une volonté de parallélisme entre les sous-catégories de deux descripteurs : « S-
3.2 Savoir percevoir la proximité et la distance sonores [savoir discriminer auditi-
vement]» et « S-3.3 Savoir percevoir la proximité et la distance graphiques ». Puisque
cette perception pouvait être conçue au niveau du mot à l’oral, il nous semblait en ef-
fet qu’il n’y avait aucune raison pour qu’il n’en aille pas de même à l’écrit.
Ce travail de recueil et de sélection a été parsemé d’embuches et de difficultés qui,
souvent, mettent en même temps en évidence le caractère peu satisfaisant de nom-
199 Le tableau de départ dans lequel nous avons regroupé l’ensemble des citations recueillies s’étendait sur
Dans le cas de a), nous sommes clairement, pour « reconnaitre », devant un savoir-
faire, d’ordre perceptif et cognitif. On ne peut appliquer la même analyse à b). En fait,
une interprétation relevant du savoir-faire cognitif n’est pas totalement absente face à
b), mais b) renvoie en même temps à un savoir-être que l’on pourrait paraphraser par
268 |Les approches plurielles
« accepter ». Pour notre part, nous avons préféré les termes « identifier » ou « repérer »
pour les savoir-faire, et « accepter » pour les savoir-être.
Des problèmes du même ordre se posent pour « concevoir », « disposition / être dis-
posé à », « estimer », « valoriser »… À titre d’illustration, développons encore
l’exemple de « valoriser » :
a) Valoriser la pratique orale d’une langue.
b) Valoriser les langues parlées par des élèves par la présentation ou la
mémorisation d’énoncés, de chants ou de comptines dans ces langues.
c) Valoriser la langue et la culture de chaque individu, en les envisageant comme
moyens de développement humain.
Dans c), la personne qui « valorise » est semble-t-il l’élève. Il s’agit donc d’un savoir-
être qu’il convient de développer chez lui. Dans b), celui qui doit valoriser est manifes-
tement le maitre, de sorte qu’il s’agit cette fois d’un savoir-faire. L’énoncé a- permet
les deux interprétations… Pour éviter cette ambigüité, nous utilisons pour le premier
sens (celui présent dans c) des termes tels que « avoir de l’estime pour » ou « accorder
de la valeur à ».
On notera enfin, sans pouvoir développer ici cette remarque, que les difficultés men-
tionnées ci-dessus sont le plus souvent propres à la langue dans laquelle les entrées
sont exprimées (ce qui nous a conduits à prévoir une liste de difficultés terminolo-
giques pour chacune des langues dans lesquelles le CARAP a été rédigé). Si on
rencontre en allemand « Lernen, die Bedürfnisse, Gefühle und Wünsche anderer zu erkennen
und zu beachten (apprendre à reconnaitre et respecter les besoins, les sentiments et les
souhaits des autres) », on comprend clairement qu’il s’agit du sens « savoir-faire » ex-
posé plus haut. En effet, l’allemand distingue « erkennen » (reconnaitre comme savoir
faire cognitif) et « anerkennen » (reconnaitre l’existence, le statut…).
Les compétences s’inscrivent principalement dans une logique d’usages sociaux, alors
que les ressources semblent plutôt dans une logique de psychologie sociocognitive (et
développementale). Dans cette perspective, ce sont bien les compétences qui sont en
jeu lorsque l’on est engagé dans une tâche socialement située. Cependant, ce sont vrai-
semblablement les ressources qu’il est – jusqu’à un certain point – possible d’isoler et
201 Cf. Bronckart et Dolz : « […] il nous parait évident qu’on ne peut raisonnablement "penser" la problé-
matique de la formation en usant d’un terme qui finit par désigner tous les aspects de ce que l’on appelait
autrefois les "fonctions psychologiques supérieures" (…) et qui accueille et annule tout à la fois
l’ensemble des options épistémologiques relatives au statut de ces fonctions (savoir, savoir-faire, compor-
tement, etc.) et à celui de leurs déterminismes (sociologiques ou biopsychologiques) » (1999 : 35).
202 Ainsi, même s’ils distinguent par ailleurs trois degrés de compétences (2002, 6), Rey et al. (2002) souli-
gnent également que « dans la plupart des cas, pour accomplir la tâche, il doit choisir non pas seulement
un de ces éléments, mais plusieurs. Il s’agit donc d’une tâche complexe » (3).
203 Ces « ressources » sont parfois nommées capacités, dispositions, ou encore connaissances ou compo-
santes. Pour notre part, nous avons retenu le terme ressources, car c’est celui qui nous a paru le moins
connoté et qui préjuge le moins de ce que l’on est amené à y placer.
270 |Les approches plurielles
7.5. Le produit
Notre cadre – que nous ne pouvons bien sûr présenter ici dans son intégralité mais
que le lecteur peut consulter en ligne204, contient ainsi des compétences qui nous parais-
sent particulièrement importantes par rapport au caractère pluriel de la compétence
plurilingue et interculturelle et des ressources qui, croisées entre elles, en sont constitu-
tives et peuvent être travaillées dans le cadre d’approches plurielles des langues et
cultures. Il comporte par conséquent plusieurs niveaux hiérarchisées :
- 2 compétences supra-ordonnées : la compétence à gérer la communication linguistique
et culturelle en contexte d’altérité (C1) et la compétence de construction et d’élargissement
d’un répertoire linguistique et culturel pluriel (C2) ;
204http://carap.ecml.at/Resources/tabid/425/language/fr-FR/Default.aspx (05/05/10).
Michel Candelier, Jean-François De Pietro | 271
1.3. Savoir °observer / analyser° les écritures (dans des langues peu ou pas
connues).
++
1.3.1. Savoir isoler les unités graphiques (/ phrases / mots / unités minimales /)
++
1.3.2. Le cas échéant, savoir établir des correspondances entre graphie et phonie
++
1.3.2.1. Savoir déchiffrer un texte rédigé en écriture non familière lorsqu’on en a
isolé les unités et établi les correspondances grapho-phonétiques
+++
205 Quelques conventions de lecture : °x / y° = soit x soit y (y n’étant pas une sous-catégorie de x) ; x
(/y/z/) = soit x soit y soit z, y et z étant des sous-catégories de x ; (…) = ajout facultatif ; les signes +,
++ et +++ indiquent l’importance du descripteur par rapport aux approches plurielles.
272 |Les approches plurielles
compétence d’adaptation et en déclinant toutes les ressources qui pouvaient, selon les si-
tuations, être mobilisées pour lui donner corps206.
Nous avons voulu présenter ici une méthodologie de recherche quelque peu particu-
lière, qui montre selon nous à quel point chaque méthodologie doit être « située »,
adaptée au contexte dans lequel la recherche prend place et à ses finalités. Le fait de
travailler sous l’égide du Conseil de l’Europe, via le CELV, à des fins d’abord pra-
tiques, a bien sûr des répercussions sur la manière de conduire le travail. Il ne saurait
être question, dans un tel cadre, de réaliser de longues observations sur le terrain. Mais
il nous paraissait important aussi d’éviter de trop projeter nos propres conceptions et
convictions sur notre objet d’étude. Les analyses d’ouvrages que nous avons réalisées,
basées sur des grilles, puis tout le travail de sélection / reformulation / organisation
des données nous semblent apporter une réponse intéressante au défi que nous de-
vions relever. La procédure choisie permet en effet, « à moindres frais », d’assurer une
certaine représentativité et objectivité du produit, sans exclure pour autant un sérieux
examen critique des données sur lesquelles nous travaillions et la construction d’un
cadre conceptuel rigoureux.
Le produit de cette recherche – le référentiel – ne constitue pas encore véritablement
une description scientifique de la compétence plurilingue, mais il fournit un bon reflet
des multiples aspects de celle-ci qui, sous diverses formes, ont été mis en évidence par
différents experts du domaine (ou, plus concrètement, des quatre approches prises en
considération), à travers leurs descriptions ou leurs expérimentations. Ce produit est
provisoire. Il doit servir de base à la fois pour des actions didactiques et de formation
et pour des recherches ultérieures qui prendraient comme objet la description de l’une
ou l’autre zone du référentiel, voire de l’ensemble.
De notre côté, nous travaillons en permanence à sa révision, à travers des expériences
de formation et, surtout, en poursuivant désormais le travail, toujours sous l’égide du
CELV (Programme 2008-2011), sous une autre forme. Notre nouveau projet est plus
directement ciblé sur les enseignant-e-s et les formateurs d’enseignants et vise d’une
part à une mise au point de l’outil que constitue ce référentiel, d’autre part à sa mise en
œuvre dans différents contextes de formation. Il en résultera, outre une version révi-
sée du référentiel, deux ensembles de matériaux :
- un kit pour les formateurs d’enseignants, proposant plusieurs manières
d’introduire les approches plurielles, d’amener les enseignants à « entrer »
dans le référentiel et à l’utiliser de manière opératoire ;
- un outil pour les enseignant-e-s, élaboré autour du référentiel, mais qui
comportera une présentation plus « visuelle » des descripteurs de
ressources207, et surtout une « banque de matériaux didactiques » indexés en
fonction de ces mêmes descripteurs.
206 cf. À travers les langues et les cultures / Across Languages and Cultures, p. 44-50,
http://carap.ecml.at/Portals/11/documents/C4pub2007F_20080228_FINAL.pdf (05/05/10).
207 En lieu et place des tableaux de descripteurs, quelques peu rébarbatifs, des figures géométriques y
expriment à la fois la place et l’importance qui peuvent être attribuées à un descripteur donné aux diverses
Michel Candelier, Jean-François De Pietro | 273
Cet outil, qui est déjà disponible en ligne, suppose la recherche et l’analyse (voire, par-
fois, la création) de nombreuses activités didactiques.
Le projet actuellement en cours soulève, parallèlement au travail concret sur le réfé-
rentiel et les activités, de nombreuses questions théoriques et méthodologiques. En
voici un bref échantillon :
- Actuellement, nous travaillons essentiellement au niveau des ressources –
puisque ce sont elles qu’on peut viser de façon la plus précise par une
intervention didactique – mais cela ne risque-t-il pas de faire perdre à
l’utilisateur (que ce soit l’enseignant, l’évaluateur, le formateur…) la vision des
compétences visées et des tâches complexes à effectuer ?
- Comment évaluer la réception de ces outils par les enseignants et les
formateurs ?
- Dans quelle mesure le CARAP, qui se veut un guide pour enseigner, se doit-il
de devenir aussi un instrument d’évaluation des apprenants ? Et s’il le doit,
comment évaluer la compétence plurilingue, ses diverses composantes et
ressources constitutives ?
étapes d’une carrière d’apprenant. De plus, un va-et-vient hypertexte permet de circuler entre catégories
génériques et sous-catégories de descripteurs.
8. Des programmes et des
curricula : cursus, curricula,
certification, instructions,
référentiels...
Pierre Martinez208
Nous nous bornons, dans ce texte, à examiner le domaine de recherche que peut
constituer ce qu’on appelle curriculum d’enseignement, en laissant de côté, clairement,
tout ce qui est lié à l’apprentissage lui-même et au parcours de l’apprenant sur le long
chemin de la maîtrise d’une langue. Ce texte se donne donc des objectifs bien limités
par rapport à la question du curriculum209. Un curriculum est, ici, la forme que prend
l’action de rationalisation conduite par des décideurs de l’éducation pour faciliter une
expérience d’apprentissage. Nous visons d’abord à rappeler quelques définitions de
base. S’agissant de pistes de recherche, nous entendons ensuite explorer trois zones
d’investigation complémentaires : la diversité des formes de curriculum, l’économie
d’ensemble du curriculum plurilingue, enfin son articulation avec son environnement
théorique et pratique (programme, référentiel…). Nous ne faisons que conclure à la
nécessité d’études scientifiques sur ces questions. Elles sont attendues des décideurs
comme des praticiens.
Nous avons eu personnellement, à plusieurs reprises210, l’occasion de signaler que les
études curriculaires n’avaient pas, du moins dans le monde francophone, et moins en
France qu’ailleurs, la place qu’elles devraient avoir parmi les questions de recherche à
approfondir en priorité. D’une part, elles sont souvent renvoyées aux seules sciences
de l’éducation et, par là-même, leur traitement est opéré avec moins de spécificité qu’il
ne pourrait l’être par des didacticiens des langues et des cultures. D’autre part, le terme
de curriculum est apparu pendant longtemps comme étranger à la réflexion des spécia-
listes, sans doute par le fait même de leurs liens personnels à la linguistique et non à
l’ingénierie éducative, mais aussi par une tradition de culture d’enseignement d’une
208 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : curriculum, programme, évaluation
de projet.
209 Une vue d’ensemble dans A. Lewy (éd.), 1991.
210 Martinez, 2002, 2005, entre autres. Le présent texte reprend des idées et des formulations puisées dans
des écrits antérieurs, à commencer par la Didactique des langues étrangères, Paris, PUF, Que Sais-je ?, 2008
(5e éd.).
276 | Des programmes et des curricula
Mais le sujet est aussi à l’ordre du jour en Afrique, en Amérique latine et en Asie, no-
tamment dans des pays émergents soucieux de promouvoir une offre d’éducation trop
longtemps retardée, ou encore de se libérer de carcans idéologiques hérités d’un ensei-
gnement qui datait de la colonisation ou de l’immédiat après-indépendance.
Il s’agit parfois de diversifier les propositions : ainsi le Vietnam, la Thaïlande, les pays
du Golfe ont-ils, ces dernières années, entamé une réflexion sur la possibilité de faire
étudier à leurs ressortissants d’autres langues (le français, l’allemand, l’espagnol, des
langues dites « régionales » comme le chinois ou le japonais), à côté de l’anglais (ou
211 Chapitre 8 du CECRL, Conseil de l’Europe, 2001. S. Määtä a fort bien décrit la position européenne :
« Langue et identité européenne ou "locuteur idéal" trilingue » in Martinez, Moore et Spaëth (coord.),
Plurilinguismes et enseignement. Identités en construction, Paris, Riveneuve, 2008, p.p. 91-100, http://www.aplv-
languesmodernes.org/spip.php?article2517 (05/05/10).
212 Pour juger de la situation en Grande-Bretagne, consulter (05/05/10).
213 Voir : C. Truchot, 2008, Europe : l’enjeu linguistique, La Documentation française, Paris.
Pierre Martinez | 277
214 Cette réciprocité est très attendue, mais ne vient pas toujours, notamment de grands pays qui, au con-
traire, freinent des quatre fers ou même réduisent leur offre de formation : il y a, en France, six ou sept
académies où aucune possibilité d’apprendre le japonais n’est donnée aux élèves.
278 | Des programmes et des curricula
minimales attendues (ce qu’on appelle, en anglais, core curriculum) ; des méthodes de
gestion de l’action de formation et d’évaluation des acquis de l’apprenant et de l’action
elle-même.
Quel que soit le contexte, le mode de fonctionnement est, en effet, toujours le même
et aucune étape ne saurait être escamotée. La recherche préalable s’appuie sur une ana-
lyse multifactorielle, qui porte sur les plans de l’observation des langues (status et
corpus), de l’anthropologie, de l’histoire, des représentations, de l’environnement, de
la géopolitique contemporaine, de l’économie, etc., avec des études de terrain qui
prendront du temps : il n’est pas question de courtes incursions de « missionnaires »
avant d’engager un changement qui aura des conséquences à long terme : une erreur
de mise en place (comme ce fut le cas pour certains créoles dont l’introduction ne fai-
sait pas forcément consensus socialement) laisse des traces durables : l’expérience
devra peut-être, après un échec ou un accueil trop tiède, attendre des décennies pour
qu’on ose la renouveler.
Ensuite, la recherche est l’indispensable accompagnatrice de tout projet curriculaire :
elle passe par les phases que connaît celui-ci, avec la définition de ce projet, des en-
quêtes et actions préparatoires (sensibilisation, recueil d’opinions, séminaires), la
détermination des moyens, la réunion de ces moyens intellectuels ou matériels, la
constitution d’équipes ou de groupes de travail, une période d’élaboration,
d’expérimentation sur un échantillon limité et une autre de validation avant tout élar-
gissement, et une évaluation qui se fera de manière optimale en plusieurs temps (mi-
parcours, bilan final, évaluation postérieure). Tout au long du processus, il y a lieu de
susciter des formes de recherche qui associeront experts, institutionnels, praticiens et
autres acteurs sociaux (décideurs, éducateurs, médecins, associations…).
On a vu que nous nous situions d’emblée dans une perspective plurilingue, conforme
au fonctionnement collectif (avec ses langues et ses variétés géographiques ou so-
ciales) et individuel (le répertoire linguistique du locuteur). L’évolution
épistémologique que constitue ce passage d’un curriculum unilingue à d’autres formes
élargies de construction de parcours d’enseignement-apprentissage a été un phéno-
mène plus important qu’on ne croit. Un état des lieux que ce glissement théorique
pouvait entraîner figure dans un rapport préparatoire destiné au Conseil de l’Europe
voici quelques années (Coste, Moore, Zarate, 1997). Il évoquait une « triple évolu-
tion » : le passage d’une didactique de langue étrangère à une didactique du
plurilinguisme ; le passage d’une didactique des contextes de formation à une didac-
tique de la mise en relation de ces contextes avec d’autres ressources d’apprentissage ;
le passage d’une conception homogène des curricula à une conception multidimen-
sionnelle et plus ouverte de leur mise en œuvre.
Cette conception différente nous amène, à présent, à aborder une deuxième zone de
recherche. Pour caractériser les constructions curriculaires qui ont été dessinées dans
des contextes spécifiques à l’origine, il faut examiner comment elles renvoient à des
modèles plus larges et peuvent relever de critères et de contenus analysables sous la
forme de ce qu’on appellera une économie linguistique d’ensemble du curriculum. Par écono-
mie linguistique d’ensemble, on veut désigner, à la suite d’Hawkins (1981) les modes
Pierre Martinez | 279
215 Voir Curriculum scolaire de la République de Corée (Source, KICE, Ministère coréen de l’Éducation,
2007) : « Il vise simultanément l’unité nationale et la diversité des individus. Il est centré sur l’apprenant et
favorise son autonomie et sa créativité. Élèves, parents, enseignants, établissements et administrations
coopèrent pour construire le curriculum. Il entend rendre effectif un système scolaire basé sur le curricu-
lum. Il cherche à entretenir et maîtriser la qualité des processus et des résultats de l’éducation. »
216 Nous renvoyons, pour des définitions complémentaires, à nos contributions au Dictionnaire de didactique
du français langue étrangère et seconde (J.-P. Cuq (dir.), 2003) et à nos ouvrages à paraître.
280 | Des programmes et des curricula
et ce, parfois, jusqu’à la caricature, par exemple au fil du même calendrier pour tout un
pays. Le programme proposé (ou imposé) en classe aux apprenants nous semble dès
lors être plus un produit qu’un processus, s’opposant ainsi au curriculum : il est la mise
en forme concrète mais figée des activités de conception et d’exploitation des choix,
certes réfléchis, faits précédemment : logique du projet, évaluation des niveaux
d’entrée et de sortie, choix des contenus en termes de savoirs, de savoir-faire et savoir-
être, séquençage (détermination d’un ordre, avec une « progression »), planification,
préparation des éléments (Richards, 2001).
C’est justement ce caractère figé qui appelle à un élargissement conceptuel en direction
du curriculum. On ne saurait en rester à ce qui a déjà été évoqué et qui guide trop
souvent l’enseignant dans sa pratique, enseignant qui n’en est nullement responsable,
bien entendu : le système de formation initiale ; le manuel ou la méthode avec son
« livre du maître » ; les textes réglementaires ou instructions officielles et le corps
d’appui et d’inspection pédagogique. Bien sûr, les choses ont souvent changé depuis
quelques années, avec une meilleure circulation des résultats de la recherche en didac-
tique des langues et dans les domaines contributifs217.
Les enseignants sont désormais − nous nous plaçons dans une hypothèse favorable −
éclairés sur les résultats obtenus par la recherche en linguistique et en psycholinguis-
tique. Ces informations sont de nature à leur permettre de mieux comprendre ce
qu’est l’appropriation des langues. Ils sont aussi capables d’intégrer dans leur réflexion
l’analyse des besoins et la typologie des situations d’enseignement-apprentissage,
comme impliquant des aspects cognitifs, affectifs ou encore psychosociaux. L’impact
des nouvelles technologies ou dispositifs d’appui (TICE, formes d’apprentissage inno-
vants, tels que l’intercompréhension ou l’éveil aux langues, portfolio) est désormais
mieux mesuré et mieux connu. La construction, l’emploi et l’évaluation d’éléments de
dispositifs didactiques sont dans tous les cas des activités qui gagnent à être rendues
objectives et formalisées. Des outils peuvent aussi y aider : des référentiels (le terme
vient d’abord du secteur professionnel et définit les compétences attendues sur un
poste de travail) qui donnent à l’enseignant des normes et des repères. De tels sys-
tèmes de référence ont marqué et marquent encore, sous des formes diverses, la
didactique des langues. Allant du français fondamental au Cadre Européen, en passant par
le niveau-seuil ou le référentiel pour le français langue seconde, ils autorisent ou facilitent
l’action pédagogique, de l’élaboration des programmes et manuels à l’évaluation des
apprentissages.
Mais ce « tableau de bord » des question importantes au regard d’une problématique
du curriculum, ce tableau que nous brossons à grands traits, ne s’arrête pas là : il doit
inclure que l’on ait bien compris et retenu les finalités et objectifs d’un enseignement,
ainsi que l’organisation et la distribution des contenus selon ce qu’on appelle progres-
sion, ou encore les questions de mise en forme et de contextualisation des matériaux
didactiques, sans oublier la formation des acteurs et l’évaluation. Nous évoquerons un
simple exemple, celui des grandes écoles en Europe. En matière de langues étrangères,
217 Voir : Zarate, G.,et Liddicoat, A., (coord.), 2009, Le français dans le monde, Recherches et applications,
n° spécial « La circulation des idées en didactique des langues », Paris, CLE International et FIPF.
Pierre Martinez | 281
dans le cursus des futurs ingénieurs, les paramètres les plus importants pour
l’élaboration des curricula y sont aussi les plus récents et l’ambition curriculaire est de
savoir les intégrer218 :
- évolution actuelle de la taille des établissements de formation (regroupements,
réseaux) ;
- compatibilité requise des formations avec le système Master généralisé
(Bac+5) ;
- entrants étrangers plus nombreux ;
- stages et périodes de formation hors de France encouragés ;
- mobilité professionnelle accrue ;
- politique européenne à l’appui, depuis le traité de Bologne, en 1999.
218 Intervention personnelle, Conférence des Grandes Écoles, École nationale des télécommunications,
Parallèlement, les orientations données par le Conseil de l’Europe sont un puissant moteur de réflexion et
déjà, sans doute, d’action, dans l’Union.
9. La « méthode », outil de base de
l’analyse didactique
Christian Puren220
Dans son Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences
(1637), Descartes fonde le paradigme rationaliste de la démarche scientifique occiden-
tale en le définissant en particulier par l’enchaînement de deux principes opposés :
- un principe d’analyse : « diviser chacune des difficultés que j’examinerois, en
autant de parcelles qu’il se pourroit, et qu’il seroit requis pour les mieux
résoudre » ;
- un principe de synthèse : « conduire par ordre mes pensées, en commençant par
les objets les plus simples et les plus aisés à connoître, pour monter peu à peu
comme par degrés jusques à la connoissance des plus composés, et supposant
même de l’ordre entre ceux qui ne se précèdent point naturellement les uns
les autres ».
Depuis lors, toutes les disciplines scientifiques se sont efforcées de trouver la « par-
celle » ultime de l’analyse, l’« atome », la « brique fondamentale » qui permettrait
d’appréhender et manipuler la complexité de leur domaine à partir d’un seul et même
élément constitutif de base. On sait que le projet n’a pas abouti en physique nucléaire
(on découvre régulièrement des particules subatomiques différentes), mais un exemple
de réussite en est donné en technologie par le bit informatique, unité binaire
d’information (de valeur 0 ou 1).
Pour prendre des exemples dans des disciplines plus proches de la didactique des
langues-cultures, ont obtenu ce statut de plus petite unité significative le sème en sé-
mantique, le trait en phonétique, le phonème en phonologie et l’acte de parole en
pragmatique.
Je ne connais pour ma part que deux tentatives de ce genre en didactique des langues-
cultures :
220 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : approche, démarche, méthodologie,
L’une est le « didactème » de Claude Germain, qu’il présente dans le n° 114 (avril-juin
1999) d’Études de linguistique appliquée comme un effort pour précisément donner à cette
discipline une théorie scientifique :
« C’est ainsi que, en dépit des observations qui font largement état de la
variation dans l’enseignement d’une L2, l’équipe de recherche ASHILE221 en
vient à croire que l’enseignement d’une L2 pourrait peut-être reposer sur
quelques invariants. Autrement dit, partant de l’idée qu’il s’agit, chaque fois,
d’enseigner une L2, il se pourrait bien que, en creusant sous la surface des
phénomènes observés, on puisse un jour en arriver à dégager un certain
nombre de régularités : « Le but des théories, écrit Hampel, est d’exprimer des
régularités ». Tel est l’objectif premier du groupe ASDHILE : rechercher des
régularités dans l’enseignement d’une L2, de manière à contribuer à bâtir une
éventuelle théorie de (l’enseignement d’une L2. » (p. 174)
[…] « Quant à l’unité minimale d’enseignement, elle est appelée didactème. Le
didactème est la plus petite unité d’enseignement, dotée à la fois d’une FORME (une
activité observable) et d’un CONTENU d’apprentissage (une partie de la matière
enseignée). » (p. 178)
Le projet de Claude Germain s’est heurté sans doute au fait que ce « didactème » pré-
sente des variations internes trop nombreuses pour fonctionner véritablement comme
une unité minimale, parce qu’il se situe à un niveau déjà complexe, « méta-
méthodologique », auquel les manières d’enseigner-apprendre varient en fonction non
seulement des types d’activité et des contenus d’apprentissage (comme on le voit dans
la définition qu’en donne Claude Germain), mais aussi des objectifs, des modèles (pé-
dagogiques, méthodologiques, linguistiques, cognitifs,…) et, last but not least, des
environnements d’enseignement-apprentissage.
L’autre tentative (antérieure d’une décennie) est la « méthode » dans le sens où j’ai été
amené à la concevoir au cours de mes recherches pour la rédaction de mon Histoire des
méthodologies de l’enseignement des langues (1988), parce qu’il me fallait impérativement,
pour pouvoir appréhender rationnellement la très grande diversité des méthodologies
constituées, faire jouer le principe cartésien de l’analyse avant la synthèse en dégageant
la « parcelle » ultime concernant les manières d’enseigner et d’apprendre une langue-
culture étrangère. Il m’a semblé l’avoir trouvée dans la « méthode », définie dans cet
ouvrage comme « ensemble de procédés et de techniques de classe visant à susciter
chez l’élève un comportement ou une activité déterminés (p. 121, avec une schémati-
sation de l’organisation interne de la méthodologie directe sur la base de sept
méthodes : directe, active, orale, interrogative, intuitive, imitative et répétitive).
Dans les années suivantes, j’ai défini plus précisément ce concept de « méthode »
comme « unité minimale de cohérence méthodologique », et je l’ai constamment de-
puis lors utilisé dans ce sens pour mes cours de formation d’enseignants et de
formation à la recherche. Je l’ai présenté (avec la typologie que je reprendrai plus bas)
221 ASHILE : Analyse de la structure hiérarchique de l’enseignement d’une langue étrangère ou seconde.
Christian Puren | 285
travailler en commun lors des exercices de lecture ; il fait corriger les fautes par
toute la classe222. » (Closset : 52-53)
222 Dans cette citation, la méthode active est combinée avec plusieurs d’autres, que nous présenterons
plus avant. Notons aussi le renforcement de la méthode active dans la mise en œuvre du procédé de ques-
tionnement, avec les questions posées non par l’enseignant mais par les élèves eux-mêmes.
223 Voir : Cadre épistémologique et principes théoriques (liens conceptuels et distinctions entre méthode
2. LA METHODE REPETITIVE
224 J’utilise ici l’expression « élève » et non « apprenant », parce que dans l’enseignement scolaire, beau-
coup d’élèves ne deviennent éventuellement des « apprenants » que parce que les enseignants les ont mis
et maintenus en activité de manière volontariste : la mise en œuvre de la méthode active y exige souvent
un certain activisme de l’enseignant…
225 On parlait dans ce dernier cas de « répétition mentale » au début du XXe siècle, la forme privilégiée de
mise en œuvre étant la question posée à l’ensemble de la classe avec la désignation de l’élève autorisé à
répondre seulement au bout de quelques secondes, de manière à ce que tous les élèves préparent menta-
lement la réponse. Il fallait, disait-on, que la question « menace chacun des élèves » (à cette époque où la
288 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
directivité de l’enseignant était forte, la méthode active, comme on le voit, savait être parfois… éner-
gique).
Christian Puren | 289
J’ai pendant longtemps ajouté à ces 9 paires de méthodes une 19e, isolée, la « méthode
interrogative », qui me semblait mériter ce statut parce qu’elle correspondait à ce que
l’on appelle en philosophie la « méthode socratique » ou la « méthode maïeutique ». Il
m’apparaît maintenant plus pertinent de considérer le questionnement comme un
simple procédé de sollicitation et de guidage (constitué de la séquence question de
l’enseignant – réponse de l’élève – réaction/évaluation de l’enseignant) qui peut être
mis au service de la plupart des méthodes, en particulier les méthodes active, orale, et
directe : dans la culture occidentale, au moins, la question orale « oblige » pratique-
ment à la réponse orale immédiate, et la question en L2 « oblige » tout aussi fortement
à une réponse en L2. Nous verrons que la combinaison des méthodes orale, active et
directe constitue précisément le « noyau dur » de la méthodologie directe, l’objectif
principal des enseignants étant de faire parler les élèves eux-mêmes en L2. Il est donc
logique que le questionnement ait été permanent dans cette méthodologie, et que les
enseignants aient toujours recours massivement à ce procédé dans les séquences
d’enseignement frontal où ils se donnent aujourd’hui ce même objectif. Les seuls al-
ternatives au questionnement de l’enseignant sont le questionnement réciproque entre
élèves (comme le propose François Closset dans la citation supra ; mais ce procédé est
290 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
226 Voir au chap. 4.1 ci-dessous les définitions de « combinaison » versus « articulation ».
Christian Puren | 291
aussi par une autre étudiante stagiaire dans une classe d’espagnol dans un collège en
France – le français y est donc la langue première –) est à ce propos très représenta-
tive :
Activités observées Analyse méthodologique
En reprenant au tableau des phrases proposées Utilisation de la méthode active pour la constitution du
par les élèves, [l’enseignante]… corpus de conceptualisation grammaticale.
… a demandé [à ses élèves] d’énoncer eux-mêmes – Conceptualisation de la règle par les élèves eux-mêmes à
en français le fonctionnement de la règle partir des exemples mis au tableau : combinaison de la
concernant l’emploi et la morphologie de ces méthode conceptualisatrice, inductive et active.
adjectifs. – Passage à la méthode écrite (les phrases sont au tableau),
mais combinée avec la méthode orale (ces phrases servent
de support à une réflexion immédiatement verbalisée).
– Il y a aussi combinaison entre méthode directe (la
réflexion se fait sur des exemples en L2) et indirecte (la
langue utilisée pour la réflexion est la L1, ici le français
langue maternelle)
Elle a repris leurs observations en en faisant la – Passage à la méthode transmissive, mais il y une certaine
synthèse dans un énoncé simplifié. combinaison avec la méthode active puisque ce sont les
observations des élèves eux-mêmes que l’enseignante
reprend.
– Méthode orale.
Elle a écrit l’énoncé de cette règle au tableau en – Passage à la méthode écrite et à la méthode déductive
écrivant en face une des phrases proposées par les (on va maintenant de la règle aux exemples, ici
élèves, comme exemple d’illustration. Elle a utilisé d’illustration) de la part de l’enseignante.
des couleurs différentes, notamment le rouge pour – Méthode transmissive (c’est l’enseignante qui met
mettre en valeur ce qui devait être retenu. certains éléments en valeur) mais aussi méthode active
(utilisation de couleurs différentes pour attirer l’attention
des élèves).
Elle a laissé le temps aux élèves de recopier sur Passage à la méthode écrite de la part des élèves. Recours
leur cahier ce qu’elle avait mis au tableau. à la méthode répétitive combinée à la méthode
conceptualisatrice et active (répétition de la règle à l’écrit
par les élèves eux-mêmes). Il y a à nouveau combinaison
de la méthode transmissive et active (les élèves copient
eux-mêmes, mais ils copient ce que l’enseignante a écrit)
Toujours au tableau, elle a écrit quelques phrases Exercice d’application (méthode applicatrice et déductive)
d’exercices à trous… mise en œuvre cette fois par les élèves eux-mêmes
(méthode active). Combinaison avec la méthode écrite.
… et quelques modèles à imiter portant sur la Méthode active et écrite à nouveau, et méthode répétitive
description de la bande dessinée. (il s’agit toujours d’exercices portant sur la même règle de
grammaire), mais là il s’agit d’une combinaison avec la
Elle a passé dans les rangs pour faire une méthode imitative (et non plus applicatrice). C’est une
première correction individuelle de ces exercices. sorte de combinaison éclectique entre l’exercice
d’application (application réfléchie de règles à l’écrit) et
l’exercice d’entraînement (reprise orale de modèles) : il a
en effet reprise de modèles, mais à l’écrit.
Ceux-ci ont été repris à l’oral par des élèves qui se – Passage à la méthode orale.
sont portés volontaires ou qui ont été désignés, de – Méthode active (élèves volontaires).
manière à en faire la correction collective. – Méthode répétitive (reprise des mêmes exercices).
292 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
9.4.1. Les méthodes peuvent être reliées entre elles de deux manières
différentes
Nous en avons déjà vu précédemment de nombreux exemples.
a) Il y a combinaison lorsque deux méthodes sont utilisées conjointement. Voici
quelques autres exemples, qui correspondent à des combinaisons très fréquentes :
- un enseignant qui demande à ses élèves d’induire une règle de grammaire à
partir de quelques phrases en L2 écrites au tableau combine ainsi les
méthodes active, inductive, conceptualisatrice et écrite ;
- un enseignant qui demande aux élèves d’appliquer les règles de grammaire
dans des exercices basés sur le passage L1-L2 (version et thème) combine
ainsi les méthodes applicatrice et indirecte ;
- un enseignant qui amène ses élèves à la compréhension d’un point de
grammaire en L2 en s’appuyant sur la comparaison avec la L1 combine ainsi
les méthodes conceptualisatrice et indirecte.
Il est fréquent d’articuler deux méthodes opposées. C’est même la règle actuelle dans
les deux exemples suivants :
- les enseignants qui font induire une règle de grammaire par leurs élèves
(méthode inductive) les amènent ensuite à la mettre en œuvre dans un
exercice d’application (méthode déductive) ;
- les enseignants commencent généralement le travail sur un document
nouveau par la compréhension globale (méthode synthétique), passent à
l’explication détaillée (méthode analytique) avant de solliciter finalement des
réflexions, impressions, réactions portant sur l’ensemble du document
(méthode synthétique).
227 Il n’est donc pas nécessaire, dans les analyses méthodologiques, d’ajouter « méthode conceptualisa-
pas d’utilisation de la méthode inductive : cette séquence s’analyse en termes d’articulation entre la com-
binaison « méthode conceptualisatrice + méthode transmissive » puis la combinaison méthode
applicatrice + méthode transmissive ».
294 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
9.4.4. Une même méthode peut se combiner avec chacune des méthodes
opposées de la même paire
Il y a combinaison de la méthode conceptualisatrice avec la méthode active lorsque
l’enseignant demande aux élèves de découvrir eux-mêmes les régularités ou les règles à
partir d’un corpus. C’est le cas actuellement le plus courant parce que nous sommes en
régime de paradigme actif (cf. chap. 4.3 ci-dessus).
Voici, dans un manuel de français langue étrangère, un exercice classique combinant
ces deux méthodes229 :
230 « Leçon » a ici le sens de lectio en latin, c’est-à-dire une présentation magistrale. Notons que la « leçon »
de grammaire, qui commençait l’unité didactique, a fini par désigner celle-ci dans son entier, comme lors-
que l’on parle des différentes « leçons » d’un manuel. Cette synecdoque apparaît dans toutes les disciplines
scolaires, l’approche transmissive étant à l’époque un principe de pédagogie générale.
296 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
On voit qu’il s’agit de faire parler (méthode orale) les élèves eux-mêmes (méthode ac-
tive) en L2 (méthode directe), en l’occurrence en utilisant comme support leur
environnement immédiat que l’on va élargir progressivement en cercles concentriques.
Ce noyau dur de la méthodologie directe peut se représenter de la manière suivante
(les doubles flèches représentant une relation de combinaison) :
méthode
directe
méthode méthode
active orale
Appliqué non plus à l’environnement immédiat des élèves dans les tout débuts de
l’apprentissage scolaire, mais dans un second temps aux documents authentiques en
L2, le même noyau dur méthodologique va générer une activité apparemment très
différente, à savoir « l’explication de textes à la française », où l’enseignant va deman-
der à ses élèves de réaliser un maximum de tâches d’explication différentes
(paraphraser, analyser, interpréter, extrapoler, réagir, transposer) les amenant égale-
ment à parler eux-mêmes en L2 sur le texte231.
b) Le noyau dur de la méthodologie audio-orale
Le noyau dur de la méthodologie audio-orale apparaît pour la première fois aux États-
Unis dans la « Army Method », la « Méthode de l’Armée » (américaine) au cours de la
seconde moitié des années 1940. Un visiteur français, A. Roche, décrit ainsi les classes
qu’il a observées au début des années 1950 (la division en 7 séquences et les 7 para-
graphes correspondants est de moi, mais le texte originel n’est pas modifié) :
Voici comment se déroulaient le plus souvent ces classes :
Séquence 1. Devant son groupe de 10, l’assistant lit, à la vitesse ordinaire de
conversation, un dialogue d’une trentaine de questions et de réponses. Il
aide à la compréhension par l’intonation, les gestes et expressions du
visage. Après deux ou trois lectures,
Séquence 2. La classe commence à répéter en chœur après lui, phrase après
phrase. On fait alors passer aux étudiants des feuilles avec le texte imprimé,
et la répétition en chœur reprend, en suivant sur ce texte. Dix minutes
environ sont consacrées à cet exercice.
Séquence 3. La classe se scinde alors en deux groupes de 5, chacun se formant
231 Ne pouvant développer plus avant ce point dans le cadre du présent article, je renvoie à Puren 2006
en demi-cercle. L’un, dans chaque groupe, pose les questions à son voisin
qui y répond. Le second pose alors les questions au troisième et ainsi de
suite. Les fautes de prononciation sont corrigées par les autres membres de
l’équipe, tandis que l’assistant surveille, tour à tour, l’un ou l’autre groupe.
Cet exercice se poursuit également pendant une dizaine de minutes.
Séquence 4. Finalement les hommes se lèvent, abandonnent leurs feuilles et se
divisent en 5 groupes de 2. L’assistant a écrit au tableau une série
d’expressions ou mots essentiels tirés, dans leur ordre, du dialogue, et, avec
cette aide, les étudiants entament simultanément 5 conversations
différentes en différents coins de la salle. Cela ressemble à une véritable
Babel, mais le brouhaha oblige les hommes à écouter avec attention et à
parler fort, et distinctement.
Séquence 5. Au milieu de cet exercice, on efface les mots sur le tableau et les
élèves commencent à improviser des variations sur le dialogue dont les
phrases essentielles sont maintenant sues par cœur et utilisées couramment.
Séquence 6. Le lendemain, la classe de grammaire, ou plutôt de
« démonstration », est consacrée à l’explication de ces formes et
constructions nouvelles qu’on vient d’apprendre, et la session d’entraînement
suivante à un nouveau dialogue, dans lequel sont répétées la plupart de ces
formes et constructions et où l’on en introduit également d’autres. (Roche,
1955 : 101-102)
Méthode
imitative
Méthode Méthode
répétitive orale
Parce que cette méthodologie à usage des militaires avait obtenu d’excellents résultats,
la méthodologie mise au point pour le grand public dans les années 1950 va étendre le
champ d’application de ce noyau dur – limité au dialogue de base dans la Méthode de
l’Armée – à l’enseignement de la grammaire. C’est ce qui provoque l’invention de
l’exercice structural, qui commence toujours par un modèle de langue orale (un « pat-
tern », une « structure ») que l’on demande ensuite aux élèves de reprendre
intensivement.
L’exercice structural est un bel exemple d’innovation didactique qui ne peut
s’expliquer que par la conjonction de plusieurs facteurs différents. Il y a, à l’origine
première de l’exercice structural, un phénomène méthodologique, et c’est donc cette
extension du noyau dur de la Méthode de l’Armée à l’enseignement de la grammaire
dans la méthodologie audio-orale. Mais ce type d’activité d’apprentissage n’a pu pren-
dre la forme historique sous laquelle on le connaît, s’imposer et perdurer, que parce
qu’il a coïncidé à l’époque avec le béhaviorisme et le distributionnalisme (qui vont lui
servir de garants scientifiques), ainsi qu’avec la disponibilité du magnétophone à
bande, qui va faciliter techniquement sa mise en œuvre. Les potentialités de cet appa-
reil, mis au point à l’époque, se trouvent être en effet en homologie avec le nouveau
noyau dur méthodologique : un magnétophone est une machine à répéter indéfini-
ment à l’identique la parole humaine. Enfin, pour comprendre comment certains
méthodologues américains sont allés jusqu’à inventer des « machines à enseigner »
consistant en des séries de batteries d’exercices structuraux portant sur toutes les
structures de la L2 repérées comme étant « de base », il faut faire appel à un facteur
idéologique, à savoir le modèle de productivité de l’usine fordiste : une batterie
d’exercices structuraux fonctionne comme une chaîne de montage d’automatismes
langagiers.
c) Un cas historique d’éclectisme par articulation de deux noyaux durs méthodolo-
giques : le schéma de classe de la méthodologie audiovisuelle structuro-globale (MAV
SGAV)
Contrairement aux affirmations de ceux que l’on appelait les « sgavistes », la méthodo-
logie audiovisuelle première génération qu’ils ont élaborée à la fin des années 50 n’était
originale que dans le sens où elle reposait sur une articulation inédite, au sein de son
modèle d’unité didactique, entre le noyau dur de la méthodologie audio-orale et celui
de la méthodologie directe. On se reportera à l’annexe 1, où je présente une schémati-
sation de ce qu’ils appelaient à l’époque « les moments de la classe de langue », avec les
commentaires correspondants.
On voit (cf. les commentaires de ce schéma) que deux activités apparemment aussi
différentes que la dramatisation des dialogues et l’exercice structural relèvent, au ni-
veau de l’analyse micro-méthodologique permise par le concept de « méthode », de
l’application du même noyau dur à des objets différents, à savoir d’une part l’ensemble
des formes linguistiques du dialogue de base, d’autre part une structure grammaticale
particulière.
Christian Puren | 299
9.5.1. Approche
Méthode utilisée la première lors d’une activité. Exemple : « l’approche globale » d’un
document correspond à l’utilisation initiale de la méthode synthétique. Cette approche
globale est très courante en didactique des langues-cultures parce que la méthode syn-
thétique vient ainsi se combiner avec de nombreuses autres, en l’occurrence les
méthodes sémasiologique, inductive, compréhensive et active. La cohérence méthodolo-
gique d’une activité ou d’une séquence, en effet, est fonction du nombre de méthodes
utilisées conjointement de manière rationnelle232.
9.5.2. Démarche
Dans le sens réel, manière de marcher, ce qui suppose au moins deux pas successifs. Si
l’on reporte cette condition sur le sens métaphorique, « démarche » en didactique des
langues-cultures correspond à l’articulation d’au moins deux méthodes. On peut ainsi
qualifier de « démarche classique » en enseignement-apprentissage de la grammaire
l’articulation de la combinaison méthodes inductive + conceptualisatrice (on fait appel à
la réflexion des élèves pour remonter des exemples à la régularité ou à la règle corres-
pondante) avec la combinaison méthodes déductive + applicatrice (on demande aux
élèves de s’appuyer consciemment sur ce savoir métalinguistique pour produire ra-
tionnellement des phrases en L2).
9.5.3. Méthodologie
Ensemble historiquement stabilisé de méthodes couvrant la totalité des pratiques
d’enseignement-apprentissage. La cohérence de cet ensemble est assurée par un
« noyau dur » de méthodes privilégiées fortement combinées et articulées qui va générer
des activités de référence, et par des « procédures » spécifiques. Voir plus bas la défini-
tion de ce concept, ainsi que l’analyse micro-méthodologique, en Annexe 2, de la
« procédure standard d’enseignement-apprentissage scolaire de la grammaire » mise au
point initialement par les méthodologues directs au tout début du XXe siècle, suffi-
samment complexe pour avoir résisté jusqu’à nos jours, du moins dans l’enseignement
scolaire français, aux procédures concurrentes développées par les méthodologies sui-
vantes.
232 Dans l’expression consacrée « approche communicative », « approche » a un autre sens, proche de
celui de « méthodologie ».
300 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
9.5.4. Procédé
Moyen utilisé pour appliquer le principe d’une méthode et atteindre l’objectif corres-
pondant. Pour mettre en œuvre la méthode active par exemple quand il a décidé de
corriger en temps réel une erreur d’un élève lors d’un échange oral entre eux en classe,
un enseignant peut lui dire qu’il a commis une erreur (et signalant éventuellement de
quel type d’erreur il s’agit), reprendre la forme linguistique erronée avec une intonation
interrogative, reprendre la phrase en s’arrêtant juste avant l’erreur, faire une grimace,
faire un geste codé (doigt en avant pour le temps futur, en arrière pour le temps pas-
sé,…), ou encore interpeller les autres élèves (« La phrase de votre camarade est
correcte ? Vous êtes d’accord ? », etc. Voir aussi les exemples de procédés de mise en
œuvre des méthodes active et répétitive donnés supra dans le tableau du chap. 1.
9.5.5. Procédure
Ensemble prédéfini de tâches partielles visant à la réalisation d’une tâche globale : on
parlera ainsi de la « procédure d’autocorrection » d’une production écrite par révisions
successives de l’orthographe, de la morphologie, de la syntaxe, du plan, de la présenta-
tion matérielle, etc. On trouvera en annexe 2 la présentation de la procédure standard
d’enseignement-apprentissage scolaire de la grammaire telle qu’on peut l’analyser en
termes d’articulations et de conceptions de méthodes.
9.5.6. Technique
Ensemble de procédés liés non à la mise en œuvre d’une méthode déterminée, mais à un
type d’activité, de support ou de matériel didactique. Exemples : la technique de
l’explication directe des mots inconnus est constituée de tous les procédés correspon-
dants (définition, synonymie, antonymie, exemple, situation, gestuelle, mimique,…) ;
« la technique audio-orale » et la « technique du tableau de feutre »correspondent à
l’ensemble des procédés adaptés à l’utilisation, respectivement, d’un document audio
uniquement sous sa forme orale support d’expression orale en classe, et de ce type de
matériel didactique233.
Je laisse les lecteurs évaluer eux-mêmes dans quelle mesure le concept de « méthode »
dans le sens d’unité minimale de cohérence méthodologique est efficace pour analyser,
comme je l’annonçais dans mon introduction, tout à la fois les propositions des mé-
thodologues, les méthodologies, les manuels de langue et les pratiques de classe
observées.
Ce concept est par définition limité à la seule perspective méthodologique : il ne prend
donc pas en compte les deux autres perspectives constitutives de la didactique des
langues-cultures, à savoir les perspectives didactiques et didactologiques, qui se sont
233 Je prends volontairement des exemples historiques. Mais on parlera de « technique du TBI (Tableau
blanc interactif)" » si les didacticiens de langues-cultures développent dans les années à venir, pour cet
outil, un ensemble de procédés spécifiques à leur discipline.
Christian Puren | 301
234 Cf. Puren 1994 pour la présentation de cette évolution historique, et Puren 2001 pour des propositions
EXPLOITATION
EXPRESSION
DU DIALOGUE LIBRE
CORRECTION EXERCICES (passage au style (commentaires
première génération (Voix et Images de France, 1961)
1 2 3 4 5 6 7 8
Annexe 1 – Analyse méthodologique du schéma de classe de la MAV SGAV
Christian Puren | 303
ANNEXE 1 – COMMENTAIRES
Phase 1 – Présentation : L’enseignant se contente de faire défiler deux fois la bande son
du magnétophone et le film fixe sur le projecteur, de manière à faire coïncider la ré-
plique enregistrée et l’image correspondante. La combinaison son +image (« audio
+visuelle ») est supposée donner immédiatement aux apprenants la compréhension
globale de la situation de communication et du dialogue. La MAV SGAV reprend ici
l’approche globale qui était de règle dans la méthodologie directe.
Phase 2 – Explication : L’enseignant revient sur chaque image et la réplique orale cor-
respondante du dialogue. Il explique le sens des mots en recourant à l’image et à tous
les procédés directs (synonyme, antonyme, hyperonyme, hyponyme, définition, geste,
mimique, dessin, objet montré, exemple, rappel d’une situation antérieure, utilisation
d’une situation en classe ou dans la vie quotidienne des apprenants, création d’une
situation imaginaire,…) ; il explique le sens des phrases en recourant à la paraphrase.
La MAV SGAV reprend ici les différents procédés mis au point par la méthodologie
directe.
Phase 3 – Correction phonétique : L’enseignant revient sur chaque réplique enregistrée, et
pour chacune d’elle, il fait répéter par chaque apprenant, plusieurs fois si nécessaire.
Au besoin, il utilise, outre cette simple méthode imitative-répétitive, la « méthode ver-
bo-tonale » (on joue sur un environnement favorable du phonème à faire corriger) et
les autres procédés de correction phonétique déjà disponibles : on fait répéter de ma-
nière régressive (en commençant par les derniers mots de la phrase), on isole le
phonème en neutralisant la voyelle (on prononce « chhh… » pour faire mieux en-
tendre le son [∫] du mot « chapeau »), etc.).
Phase 4 – Mémorisation : L’enseignant reprend le dialogue en s’arrêtant après chaque
combinaison image-réplique sonore et fait à chaque fois répéter quelques apprenants,
sur un rythme rapide. Il le fait autant de fois qu’il le faut pour que le dialogue soit
mémorisé.
Phase 5 – Dramatisation : L’enseignant fait « jouer la scène » par groupes de 2 ou 3 ap-
prenants (suivant le nombre de personnages), comme au théâtre (d’où le nom donné à
cette phase). Les élèves sont censés s’identifier aux personnages : on leur demande
d’imiter aussi les gestes et les attitudes des personnages, cette identification étant sup-
posée faciliter l’assimilation des formes linguistiques nouvelles. Il s’agit là de
l’application du noyau dur de la méthodologie audio-orale au dialogue de base : dans la
dramatisation, les élèves doivent montrer qu’ils ont capables de reprendre indéfini-
ment l’ensemble des modèles de langue donnés par ce dialogue parce qu’ils l’ont
mémorisé.
Phase 6 – Exercices structuraux : L’enseignant fait passer les apprenants au laboratoire de
langue, où ils sont soumis à des batteries d’exercices structuraux sur chacune des
structures de base introduites par le dialogue de l’unité. (Ces exercices structuraux sont
ajoutés à Voix et Images de France en 1967, à la demande de certains utilisateurs, en par-
ticulier nord-américains, très influencés à l’époque par la méthodologie audio-orale.)
304 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
Lorsque l’on descend au niveau fondamental des unités minimales de cohérence mé-
thodologique, on constate donc que des activités apparemment aussi différentes que la
dramatisation et l’exercice structural correspondent à l’application du même noyau dur
appliqué à des objets différents (le dialogue et la grammaire, respectivement).
Phase 7 – Exploitation du dialogue : L’enseignant demande aux apprenants de passer le
dialogue au style indirect, de faire le récit de l’histoire, ou encore de décrire et com-
menter les images, en particulier les images les plus riches du point de vue de la
représentation de la situation de communication, ou les plus susceptibles de donner
lieu à des commentaires de la part des apprenants.
Phase 8 – Expression libre : L’enseignant demande aux apprenants de commenter libre-
ment les situations du dialogue, les personnages ou les thèmes abordés par ceux-ci, ou
encore de transposer les uns et les autres dans leur propre culture (« Chez nous, ça se
passe de telle manière ; on n’aurait pas dit telle chose mais telle autre ; etc. »).
méthode
directe
méthode méthode
méthode méthode méthode
imitative active
écrite orale répétitive
Annexe 2 – Procédure standard en enseignement scolaire de la grammaire
Christian Puren | 305
306 | La « méthode », outil de base de l’analyse didactique
ANNEXE 2 – COMMENTAIRES
PHASES
1 2 3 4 5 6
repérage/
reconnais- Conceptua- application Entraînement
Reprise
sance lisation de règles Réemploi
Phase 1 Dès la fin de la présentation des formes linguistiques nouvelles, par exemple
sous forme de dialogue oral, l’enseignant fait reprendre (méthode imitative)
par les élèves eux-mêmes (méthode active) ces formes, en posant sur le
dialogue des questions qui amènent les élèves à intégrer d’emblée ces formes
dans leurs réponses.
Phase 2-3 L’enseignant demande aux élèves eux-mêmes (méthode active) de repérer
dans les exemples le point de grammaire commun (phase 2 de repérage ou
reconnaissance), afin ensuite de pouvoir réfléchir sur ces exemples (méthode
conceptualisatrice) de langue étrangère (méthode directe) pour en induire la
règle de grammaire (phase 3 de conceptualisation)
Phase 4 L’enseignant propose aux élèves des exercices d’application (méthode
applicatrice) à l’écrit. S’il veut combiner aussi ces deux méthodes avec la
méthode active, il demandera aux élèves de produire leurs propres phrases
d’application.
Phase 5 L’enseignant passe au second type d’exercices grammaticaux, de type
« exercices structuraux ») : il va demander aux élèves de reprendre
intensivement (méthode répétitive) à l’oral (méthode orale) des modèles
(méthode imitative) de langue orale (méthode orale). Les modèles ont été
choisis par lui pour qu’il y ait reprise automatique de la même règle de
grammaire par les élèves.
Phase 6 L’enseignant propose des situations de plus en plus ouvertes de production
(orale ou écrite) qui vont permettre aux élèves de réemployer de plus en plus
spontanément les formes linguistiques, jusqu’à les faire « assimiler » (une
forme linguistique est dite assimilée lorsqu’elle est immédiatement
disponible à tout moment pour l’expression personnelle).
10. Les manuels et supports
pédagogiques : catégorisations
Michèle Verdelhan-Bourgade, Nathalie Auger235
235 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : manuel, macrostruc-
Conditions éditoriales
Éditeur (du pays, étranger, co-édition …)
Auteurs (indiqués ou pas, pays, fonctions occupées …)
Date d’édition, éditions successives (une 25e édition est la marque d’un succès certain)
Support faisant partie d’une collection ou pas (un CD-Rom accompagnant un manuel
ne peut être jugé à part)
En cas de site internet, est-ce un site labellisé (organisme international, association,
ministère…) ? Ou un site personnel ? Ou un site d’échange, de partage ?
Le public visé
Tranche d’âge
Niveau d’apprentissage (quelle que soit sa dénomination)
Objectifs d’apprentissage
Nombre (restreint, confidentiel vs large, « universel »)
La situation d’utilisation
Apprentissage du français langue étrangère (désormais FLE), langue maternelle
(FLM), ou langue seconde (FLS)
Zone géographique (l’enseignement du français langue seconde par exemple comporte
des paramètres très différents au Canada et au Mali)
Enseignement en situation de scolarisation ou non
Auto apprentissage, apprentissage à distance, ou apprentissage avec un enseignant vs
formateur
L’arrière-plan méthodologique du moment de conception du manuel
Quelles sont la ou les méthodologie(s) dominante(s) ou en usage à un moment donné
en un lieu donné pour un domaine donné (FLE vs FLS vs FLM …) ?
Observe-t-on à cette époque des mouvements de circulation de ces méthodologies ?
Exemple 1. L’évolution timide de l’enseignement du FLS vers l’ouverture à la
communication depuis 1990.
Exemple 2. La prise de conscience que l’apprentissage du français par les
enfants immigrés ne relevait pas seulement du FLM, comme cela se pratiquait
au milieu du XXe siècle, ni du FLE pur et simple comme on l’a pensé un
moment au début des années 1970, mais d’un hybride lié au caractère second de
la langue et à la scolarisation.
10.1.2. L’objet
On s’appuiera sur l’étude parue en 2002 (Verdelhan-Bourgade, 2002 : 109-140), qui
liste un certain nombre de points constitutifs de l’objet-manuel, ou du support péda-
Michèle Verdelhan-Bourgade, Nathalie Auger | 309
gogique, selon certains éléments donnés par Choppin (1992), ici complétée et réorga-
nisée.
La macrostructure (ou organisation générale)
Titre
Couverture
Structure générale, découpage en unité, chapitres, dossiers etc.
Tables des matières, sommaires
Thématiques
Pages spécifiques (présentation tableaux de conjugaison, lexique, bilans, révisions, en-
traînements, cartes, documents annexes…)
La microstructure (ou organisation d’une unité)
Les rubriques : intitulés, ordre, régularité, longueur respective …)
La mise en pages (maquette, double page, couleurs, typographie, rapport texte-image)
L’iconographie (place, type, rôles…)
L’exploration de ces indices peut permettre de répondre à deux questions importantes
pour l’utilisateur du support pédagogique :
Quels sont les moyens donnés à l’utilisateur (enseignant ou apprenant) de se
repérer dans le support ?
Quel est le degré de lisibilité ?
entre un texte de départ sur les chemins de fer et des activités portant sur une prome-
nade au zoo ? En méthodologie, peut-on parler de cohérence si les points travaillés
dans la partie linguistique ne figurent pas dans les dialogues ou textes servant de point
de départ ?
La méthodologie de l’enseignement et de l’apprentissage par domaine
L’oral et l’écrit, aussi bien en compréhension qu’en production, la langue, la culture …
Les activités proposées
Typologie
Priorités
Exercices, activités, tâches, projets ?
Toute étude des manuels suppose la combinaison de ces trois paramètres : une dé-
marche, un point de vue, un domaine, qui vont s’appliquer à un corpus particulier
choisi par le chercheur. Les possibilités de combinaisons sont donc nombreuses, c’est
pourquoi il ne peut y avoir de grille unique d’analyse applicable dans tous les cas.
Chaque grille est marquée par une époque, un contexte méthodologique, des enjeux et
des objectifs spécifiques. Contrairement à ce que croient les doctorants débutants, il
n’y a pas de grille miracle, chaque chercheur doit construire son propre modèle
d’analyse, même s’il s’inspire des essais réalisés et publiés auparavant, dont certains
sont restés célèbres (Bertoletti et Dahlet, 1984).
Le cadre de recherche proposé ici pour l’analyse des manuels a été conçu à partir
d’une étude quantitative et qualitative sur près de cinquante manuels de FLE en usage
dans l’Union européenne (Auger 2007). Le lecteur pourra y trouver davantage de
pistes pour affiner ses études discursives qui peuvent s’orienter différemment selon les
objectifs visés par sa recherche.
Les conditions de production agissent fortement sur l’élaboration des manuels. Tout
d’abord, la caractéristique essentielle du discours didactique est de s’inscrire dans un
contexte de parole particulier, celui de la transmission des savoirs. Ainsi,
l’énonciateur/les énonciateurs du manuel informe(nt) le discours en fonction du pu-
blic d’apprenants avec la volonté « d’amener à interpréter les propos tenus dans le sens
que l’on souhaite » (Grize (1994 : VII) dans Boutet). Les recherches sur les manuels
236 Voir :L’analyse de discours : exemple d’une communication pédagogique médiée par ordinateur [asyn-
chrone]
De l’analyse du discours à l’analyse des discours en situation comme outil de recherche et d’intervention
237 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : analyse du discours (didactique),
ont donc intérêt à être mis en perspective avec les textes officiels des instances éduca-
tives dont les manuels dépendent (pays, région, province etc.), avec l’histoire du pays
mais aussi selon l’histoire des relations avec les communautés des locuteurs dont la
langue est objet d’apprentissage.
Par ailleurs, les énonciateurs ressentent plus ou moins consciemment parfois le parti
pris de certains énoncés qu’ils tentent d’atténuer par des modalisateurs (soulignés dans
les exemples) ou des masques énonciatifs tels le « on » :
Mais le sport a pour eux [les Français] aussi un côté concurrence et compétition qui semble
être particulièrement important. (Unité 2)
Beaucoup de jeunes Français mangent à la cantine de l’école et certains à la maison. Le
dîner : on mange vers 7 heures. C’est souvent un repas complet comme pour le déjeuner.
(p. 265)
On reproche à l’enseignement français de valoriser seulement la culture nationale. (p. 424)
Autrefois, on disait que les Français étaient très conscients de leur histoire mais peu doués
pour la géographie. (p. 121)
Ce fonctionnement donne à l’énoncé un statut de vérité générale que nul ne peut con-
tester, car à qui s’adresser puisqu’il est impossible d’en identifier la source énonciative.
Dans tous les cas, il faut remarquer que les représentations de l’autre sont plutôt néga-
tives : « nationaliste », « peu doués ». Le masque du « on » est souvent utilisé par
l’énonciateur dans le but de s’éloigner le plus possible de la prise en charge d’un énon-
cé d’axiologie dévalorisante.
Tel que de nombreux travaux l’ont montré (De Pietro, 1994 ; Ellis, 1999 ; Nussbaum,
1999 ; Gajo et Mondada, 2000 ; Pekarek, 2000 ; Cicurel 2002), « le postulat du rôle
constitutif de l’interaction sociale pour l’apprentissage des langues […] est au cœur de
l’approche interactionniste de l’acquisition » (Pekarek, 2000 : 1). Ainsi, l’interaction
sociale met en jeu, de façon interdépendante, trois types de pratiques :
− des pratiques de mise en rapport des subjectivités (intersubjectivité,
confrontation, découverte de l’autre, respect, « sympathie » - « empathie »…) :
enjeu socio-psychologique;
− des rapports d’interlocution (enjeux linguistique et sociolinguistique :
socialisation langagière) :
a) mise en place des dimensions du processus de communication : espace,
temps, rapports entre action et discours ;
b) organisation du discours / des échanges sous forme de dialogue (conduite
dialogique): plus contrôlée / ritualisée ou plus participative ; questions de
politesse linguistique ; reformulation, correction… versus forme
unidirectionnelle / linéaire (conduite explicative) : désignation,
exemplification, description, exposé…
− des pratiques pédagogiques (enjeu pédagogique) :
a) cadrage et organisation de la participation et de l’activité (tâche, action) des
apprenants : coordination des comportements (à travers des pratiques
langagières interactives : prescription plus ou moins autoritaire, injonction,
requête d’engagement d’une activité, appel à la réflexion, conseils, menaces,
etc.) ;
b) orientation de la focalisation (l’attention) des apprenants ;
238 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : interaction (interaction endolingue,
239Derrière les discours « didactiquement corrects », qu’en est-il des modalités locales, collectives et indi-
viduelles, d’appropriation du Français Langue Étrangère et du Français Langue Seconde en milieu
institutionnel ? Quelles données comparables, quelles variables, quels traits universaux peuvent être repé-
rés et analysés dans les pratiques ? Près de 140 enseignants-chercheurs universitaires, dans 20 pays, se
sont engagés en 2007, dans le projet de recherche mondial CECA (Cultures d’enseignement / Cultures
d’apprentissage), à l’appel de la FIPF (Fédération internationale des professeurs de français), du CRAPEL
(Centre de Recherche et d’Applications Pédagogiques En Langues, Université Nancy 2) e det l’AUF
(Agence universitaire de la francophonie). Les corpus vidéographiés sont à la disposition des chercheurs
sur demande (http://ceca.auf.org/, 10/05/10).
Javier Suso López | 319
« La préoccupation centrale qui caractérise le domaine dès l’abord est donc celle
du lien entre mécanismes interactifs et conditions d’apprentissage. La réflexion
est menée sur deux axes indissociables : l’un porte sur les schémas
communicatifs qui sont susceptibles de servir de support à l’apprentissage et
l’autre sur les conditions socio-interactives plus générales qui cadrent cet
apprentissage dans différents contextes socio-institutionnels » (2000: 12).
C’est en se regardant faire chacun à un niveau microscopique, d’un point de vue « eth-
nographique » et non plus seulement « technique-pédagogique », qu’on pourra tous
prendre conscience des répercussions qui sont produites par les comportements et les
actions mis en œuvre dans la salle de classe, mais aussi être capable d’y introduire de
petits changements, peu à peu, qui vont transformer les données en présence. Toute
stratégie qui se pose pour but de tout changer à la fois (combien d’échecs a-t-on pu
constater le long de l’histoire des méthodologies !) est doublement dangereuse : non
seulement, elle consiste à jeter le professeur et les élèves « à la piscine » sans savoir
nager, mais surtout, elle prévient contre toute tentative de changement postérieure.
Ainsi, il ne faut pas que l’appréciation soit réduite aux manifestations langagières, mais
y intégrer également les comportements, et, à l’intérieur de ceux-ci, ne point se limiter
à ce qui est embrassé traditionnellement sous le parapluie de la pédagogie (types de
rapports) et de la didactique (qui correspond à ce que F. Cicurel nomme les « pratiques
de transmission » (2002 : 11) : sélection, présentation du contenu, techniques de travail
spécifiques, etc.).
En effet, F. Cicurel, en s’appuyant sur le corpus DELCA240, montre bien que
« l’enseignant, pour réaliser sa performance de professeur, puise à la fois dans son ré-
pertoire linguistique ordinaire et fait appel à un répertoire didactique et interactionnel »
(Cicurel, 2002 : 12). Ainsi, l’objet d’étude des recherches doit comprendre globalement
la saisie de l’interaction sociale en classe de langue étrangère ou de la pratique psycho-
sociologique réelle, qui se manifeste à travers les trois types de pratiques signalées plus
haut.
Si les perspectives de la recherche sont claires, ainsi que l’objet central de celle-ci241,
nous croyons qu’il reste encore définir un terrain commun d’entente où les travaux ne
s’accumulent point, mais s’intègrent les uns les autres pour dévoiler une réalité com-
plexe. Pour rendre possible cela, nous proposons une échelle d’observation, qui
240 Le corpus DELCA (Discours d’Enseignement, Langues en Contact et Appropriations) /SYLED (Sys-
tèmes Linguistiques, Énonciation et Discursivité, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle), constitué grâce
à C. Carlo) entre 2001 et 2004, rassemble plusieurs séquences de classe de français langue étrangère, au
cours desquelles le même enseignant se livre à des activités didactiques différentes. Il s’agit de cours don-
nés en milieu universitaire à des étudiants assez avancés et résidant en France. Voir : Francine Cicurel, «La
classe de langue un lieu ordinaire, une interaction complexe», Acquisition et Interaction en Langue Étran-
gère http://aile.revues.org/document801.html (10/05/10).
241 On pourrait le résumer encore de la façon suivante : il s’agit de répondre à la question suivante : com-
ment définir la forme sociale de l’enseignement et de l’apprentissage ‘une LE ?, que se posait déjà L.
Schiffler (1991 : 39).
320 | Interaction en classe et enseignement-apprentissage des langues
comprend une série de critères ou paramètres (de base), que nous reproduisons à con-
tinuation.
242Bien sûr, ces paramètres (ou critères) prennent pied sur des propositions antérieures, dont celle de
Flanders (1960) reprise par L. Schiffler ([1980] 1991 : 40-45).
Javier Suso López | 321
Finalement, pour que les recherches puissent avancer, il faut bien sûr une dernière
condition, complémentaire : une délimitation précise de la situation d’enseignement
apprentissage (langue étrangère – langue seconde ; caractérisation des apprenants (âge,
sexe, statut social, filière scolaire…) ; caractère institutionnel ou pas de l’établissement
scolaire ; statut de la matière « français » : obligatoire ou optionnelle…) pour que les
recherches puissent être significatives au-delà du cadre strict de l’observation.
13. Les interactions en situation
d’enseignement-apprentissage :
observer, transcrire, analyser
Francine Cicurel243
Depuis une bonne trentaine d’années, la classe de langue a suscité des descriptions
effectuées à partir de recueils de séquences de classes prélevées dans des contextes
éducatifs variés. Issues de courants sociologiques américains qui s’intéressent aux ma-
nières d’interagir des locuteurs et à la façon dont la conversation progresse, de
nouvelles manières d’appréhender les échanges se font jour (Goffman, Gumperz…).
L’introduction des travaux des Britanniques Sinclair et Coulthard (1975) considérés
comme relevant de la Discourse Analysis, ouvre des perspectives sur la dimension de
« conversation » de la classe et permet de progresser dans la connaissance de la struc-
ture des échanges (on connaît l’échange canonique ternaire en classe de langue :
sollicitation/réponse/rétroaction). L’entrée interactionniste porte une attention parti-
culière à la relation qui s’établit entre des sujets sociaux réunis par un projet commun.
Ces sont les manières de donner la parole, de faire parler les autres qui font l’objet
d’observations : on identifie des types d’échanges (symétriques vs asymétriques), un
cadre de participation, des formats communicatifs, on s’occupe du système
d’alternance des tours de parole, on se préoccupe de la façon dont on ménage ou non
la face des participants.
La situation de classe doit être envisagée en prenant en compte ce qui lui est caracté-
ristique ; les échanges se font à propos d’objets de savoir et parce qu’il y a une
transmission du savoir à opérer.
Au fil d’observations fines du comportement langagier des participants, on est parve-
nu à dégager des principes de l’interaction en classe : il s’agit d’une interaction planifiée
mise à l’épreuve au moment du cours et de la rencontre avec une force de coopération
ou de résistance, et dotée d’une dimension fortement métalinguistique puisque c’est
d’enseignement de langue qu’il s’agit.
Ces recherches mettent en évidence la spécificité d’un travail qui se fait dans la classe
dans des situations particulières et dans des cultures éducatives situées qui ont un pou-
243 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : contexte éducatif, interaction didac-
voir déterminant sur les conduites interactionnelles. Elles s’appuient sur des observa-
tions de terrain qui se font selon des méthodologies de recueil de données et d’analyse
dont nous allons rappeler les grandes lignes.
244 Au moment du recueil de données de classes dans le cadre de l’enseignement du FLP (français comme
langue professionnelle) à la fin des années 90 : voir à cet effet Les Carnets du Cediscor 7.
326 | Les interactions en situation d’enseignement-apprentissage
245 Interactions didactiques et agir professoral du centre de recherches DILTEC (Didactique des langues, des
Au-delà de ces difficultés − dont le chercheur doit avoir conscience − soulignons que
les classes, comme tout terrain, sont avant que le chercheur ne les prenne pour objet
un réel vaste et informe. Ce n’est qu’après le recueil de données qu’il devient possible
de révéler des fonctionnements autour de la langue à apprendre, autour de pratiques
de transmission, que l’on peut tenter de saisir les moyens mis en place par les locu-
teurs pour parvenir à des buts d’apprentissage. La courte séquence suivante possède
les traits caractérisant un échange de type didactique.
Corpus Valérie247. Cours de FLE destiné à des femmes travaillant en entreprise
en France
138.E : donc comme d’habitude on va s’appuyer d’abord sur c’que vous
connaissez d’accord + vous allez repérer + les mots que vous connaissez déjà
+++ euh : + exemple +++
139.Linh : brûlure d’estomac
140.E : voilà par exemple + vous pouvez le répéter s’il vous plaît ↑
141.Linh : brûlure d’estomac
142.E : brûlure de l’estomac qu’est que c’est les brûlures de l’estomac
143.Linh : mal à l’estomac
144.E : mal à l’estomac d’accord + et euh
145.Savonn : irritation
146.E : comment
147.Savonn : irritation
148.Afs : irritation
149.E : i + i-rri-ta-tion ouais très bien + qu’est que c’est + c’est quoi l’irritation
247 Corpus recueilli par Laurence Corny au cours de son Master 2 recherche en didactique du français et
être devant des dires effectivement prononcés. Lorsqu’on lit quelques lignes de trans-
cription et que l’on s’attache par exemple au détail de l’énonciation, on y passe un cer-
certain temps, nécessaire à la compréhension de ce qui en réalité n’a mis que quelques
secondes à être produit.
On peut donc émettre les mises en garde suivantes :
- la tendance à surinterpréter le sens d’un événement en le considérant comme
ayant plus d’impact qu’il n’en a en réalité ;
- le temps de l’analyse n’est pas le temps de l’action elle-même ;
- les différents modes de contacts ne peuvent tous être pris en compte ; le
contact visuel, les gestes, l’intonation, le rythme, le ton, etc. sont pour une
bonne part absents en partie de la transcription ;
- l’histoire interactionnelle des sujets échappe à l’analyste qui vient en un point
x du déroulement de l’interaction248.
Rappelons-le, la classe n’est pas a priori un objet de recherche, c’est d’abord un lieu de
travail où on apprend et où on enseigne. S’y entrecroisent des forces provenant de
sources différentes : interactions verbales, programmes, résultats, méthodologies, pas-
sé et buts des acteurs, contraintes institutionnelles, enjeux symboliques, système de
place, etc. sont des facteurs dont l’analyste n’a pas toujours connaissance249.
Cependant malgré son imperfection, une transcription, c’est-à-dire une médiation par
l’écrit, est indispensable. Mais on se souviendra qu’elle n’est qu’une trace de la vie de la
classe, un cliché où subsistent d’importantes zones d’ombre.
248 On s’en aperçoit aisément quand on lit une transcription et que l’on regarde ensuite la séquence fil-
mée : quelque chose du réel ne peut pas être « imaginé » par le biais de la seule transcription.
249 Il existe deux conceptions de l’analyse conversationnelle : une analyse conversationnelle de type eth-
nométhodologique (Garfinkel, Mondada) où on ne tient pas compte du contexte en-dehors de celui que
les interactants définissent au cours de l’interaction et une conception plus souple, plus ethnographique,
où l’on considère que les rôles et la situation sont à prendre en compte. Dans le cas de l’enseignement-
apprentissage, le contexte institutionnel ne peut que pré-définir si fortement des attitudes qu’il nous
semble préférable d’examiner les interactions en classe en intégrant les données du contexte au préalable.
250 Nous n’exposons dans ce chapitre que les méthodes d’analyse qui prennent des données naturelles, in
situ, en compte. Pour cerner plus largement l’« agir professoral » nous avons également mis en place des
techniques d’autoconfrontation au cours desquelles l’enseignant verbalise son action et révèle des mobiles
actionnels sous-jacents (voir Cicurel, 2007).
Francine Cicurel | 329
Le cadre-classe réunit pour un temps limité plusieurs participants qui ont un but
commun : acquérir ou faire acquérir des connaissances et faire progresser. Les interac-
tants ont un comportement verbal à rapporter à leur rôle interactionnel, il est
conditionné par le rapport au savoir des participants – place d’expertise vs place
d’apprentissage.
L’espace-classe est un lieu où doit s’accomplir l’appropriation d’une langue. C’est par
excellence le lieu d’observation de sujets en train d’acquérir un savoir. Il s’agit de la
transmission de savoirs qui ressortent à une discipline donnée. Dans l’étude de ce type
d’interaction on porte une attention plus accentuée que dans l’étude des interactions
330 | Les interactions en situation d’enseignement-apprentissage
ordinaires au mode de transmission, aux contenus traités, aux modes d’évaluation, aux
stratégies mises en œuvre pour enseigner (modes explicatifs, reprises du dire, mode de
la sollicitation, techniques de réparation, encouragement à la parole).
On y voit à l’œuvre une organisation de la parole spécifique : les rôles conversation-
nels sont inégalement répartis : l’introduction des thèmes et des contenus est le fait de
l’enseignant, c’est lui qui a le pouvoir de nommer le next speaker et c’est encore lui qui
dirige l’activité de remédiation en décidant quelles contributions sont acceptables et
quel type de réparation elles requièrent le cas échéant.
Enfin signalons que ce lieu classe demande une extrême attention de la part des partici-
pants qui sont constamment sollicités – dans un même temps sur le contenu du
message, sur sa forme, et sur le format de l’interaction.
On voit comme l’approche d’un texte ici littéraire se fait par « ses mots ». La langue
parle de la langue, se prend elle-même comme objet (phénomène d’autonymie, poly-
phonie du discours, pseudo-référence, entre autres). Des régimes discursifs
cohabitent ; discours de simulation, de commentaire, de prescription. Les textes
(oraux ou écrits) introduits en classe de langue, en raison du traitement qui en est fait
par les participants, se trouvent déréférencialisés » ou déréalisés. Ce n’est plus le con-
tenu qui est au premier plan mais la langue.
251Il s’agit du roman Thérèse Raquin, de Zola. Nous avons nommé ML(P) l’enseignante qui est en voie
d’acquérir un statut de professeur de langue. Au moment de l’observation elle est stagiaire en master 1 de
Didactique du français et des langues.
Francine Cicurel | 331
Il est à considérer comme centraux les effets que la manipulation du système codique
effectuée dans les classes de langue peuvent avoir sur la communication entre les par-
ticipants, et ceci de manière différente selon la place des interactants. L’interactant-
enseignant « manipule » le langage dans le but de l’enseigner et développe nécessaire-
ment des stratégies de simplification, de clarification du sens, d’encouragement à
prendre la parole, de renforcement de ce qui est en voie d’être acquis, alors que
l’interactant en position d’apprentissage opère une simplification d’un autre type : il
répond d’une certaine façon dans la langue-cible, il co-construit avec les autres un dia-
logue dont l’enseignant est certes le centre, mais dont les autres apprenants sont
également les partenaires. L’objet des échanges étant de faire acquérir des éléments sur
le code, la dimension métalinguistique vient constamment infiltrer le langage et, là
même où on ne la détecte pas − à la surface de la langue −, on la retrouve dans
l’intention du locuteur.
252Les caractères gras indiquent les éléments repris par l’enseignant et dans le second exemple la partici-
pation de Rosa.
332 | Les interactions en situation d’enseignement-apprentissage
L’étudiante Rosa montre ici combien en deux tours de parole elle sait se montrer « ac-
tive », elle fait un commentaire spirituel sur le fait que David n’entende pas les
Français en raison de sa haute taille et elle tente de compléter la règle de l’emploi de
l’adjectif « haut ».
Dans cet autre extrait, c’est l’enseignante qui joue à passer du niveau didactique où elle
se trouve alors qu’elle travaille sur l’emploi des majuscules des adjectifs au niveau
communicationnel ordinaire alors qu’elle attrape au vol les proposition de E1 et E11
(TP 21 et 22) sur l’arrogance des Français afin d’exprimer son opinion et de « provo-
quer » les étudiants.
Corpus C. Carlo( IDAP-DILTEC)
16. P : les femmes françaises sont très (rire des étudiants) très quoi
17. E9 : arrogantes
18. P : arrogantes↑(rire des étudiants) tu as eu des problèmes avec les femmes
françaises mon pauvre xxx (rire des étudiants) écoutez + je crois que les
femmes françaises sont très arrogantes mais les hommes sont + relativement
arrogants aussi
19. E10 : c’est moins grave
20. P : hm↑
21. E1 : c’est moins grave xxx
22. E11 : ouais + c’est moins grave
23. P : ah bon↑pourquoi c’est + pourquoi c’est moins grave du côté masculin↑
Francine Cicurel | 333
Il s’agit d’une recherche de type qualitatif qui examine le détail de l’interaction, elle ne
permet pas de déterminer si un interactant-enseignant a toujours recours à telle ou
telle stratégie, car il faudrait pour cela disposer de corpus plus larges. Cependant,
l’hypothèse que l’on peut faire est que l’institution éducative provoque nécessairement
l’émergence d’actes de langage et de rituels liés aux contraintes de l’instance communi-
cative. Pour connaître l’action professorale il est indispensable d’avoir accès à des
pratiques. C’est l’observation et parfois l’entretien avec les acteurs qui permet de sa-
voir comment se développe concrètement une interaction en classe. Mais il ne suffit
pas d’observer ni même de transcrire. Ce n’est qu’au travers d’une méthodologie qui
s’appuie sur les faits langagiers, qui prend en compte la multiplicité des enjeux lorsqu’il
y a transmission de connaissances que l’on peut espérer apporter un éclairage sur la
manière dont les interactants communiquent pour enseigner/apprendre.
1. Site de l’interaction
Privé, public, caractéristiques liées à l’institution, à la salle de cours…, disposition de la salle,
des participants.
2. Cadre temporel
Début /fin des cours, rythme des rencontres sur une durée donnée.
3. Cadre participatif
Nombre des participants, statut, rôle interactionnel (dissymétrique vs symétrique). Format de
réception dans la séquence étudiée : participants ratifiés (qui font partie du groupe
conversationnel) et participants exclus temporaierment de la transaction en cours.
4. Buts de l’interaction
Objets d’apprentissage à identifier. Activités didactiques mises en place
5. Régulation de la parole
Système d’alternance des prises de parole. Prise de parole autosélectionnée ou donnée par
autrui. Qui parle à qui ? Qui a droit à la parole ; initiatives.
Identification de la structure canonique en trois temps : sollicitation/réponse/réaction.
Francine Cicurel | 335
6. Construction du thème
Le thème conversationnel. Guidage par l’enseignant. Détopicalisation. Changement de thème.
7. Métalangage
Quelle terminologie grammaticale et quel rôle dans l’interaction ? (une interaction
d’apprentissage de la langue est nécessairement très riche sur le plan métalinguistique).
Commentaires sur la langue.
8. Histoire conversationnelle
Marques d’un vécu du groupe ou de l’un des participants qui préexiste à l’interaction observée.
9. Pratiques de transmission
Manières de faire qui paraissent caractéristiques d’une époque, d’une culture, d’un individu,
etc ; conduites typiques que les participants reconnaissent, par exemple rappel de la leçon,
annonce de l’activité. Modèles didactiques qui transparaissent à travers les pratiques.
10. Répertoire didactique
Ressources sur lesquelles l’enseignant semble s’appuyer dans sa pratique (modes explicatifs,
méthodes, manières d’évaluer, etc.).
14. Les interactions en ligne comme
objet d’étude pour la didactique des
langues et les sciences du langage
François Mangenot253/254
253 Ce texte est une version actualisée d’une communication faite au Congrès Mondial de Linguistique
dinateur (CMO), dispositifs hybrides, échanges exolingues via Internet, formation ouverte et à distance
(FOAD), formation en ligne.
255 Voir notamment le numéro 104 de Langage et société, le numéro 8 des Carnets du Cediscor et le numéro 10
de Glottopol.
338 | Les interactions en ligne comme objet d’étude
256 Voir le site consacré à ce projet qui se poursuit depuis 2002 : http://w3.u-grenoble3.fr/fle-1-ligne/
340 | Les interactions en ligne comme objet d’étude
1995 ; Mangenot et Salam, 2009), celle de la richesse lexicale (Fitze, 2006), celle de la
négociation du sens (Vandergriff, 2006).
De même, la question de l’acquisition d’une compétence interculturelle a-t-elle fait
l’objet de plusieurs recherches récentes portant sur les échanges en ligne. Aux États-
Unis, un courant est même apparu, avec la publication d’un ouvrage éponyme,
l’Internet-mediated Intercultural Foreign Language Education (Belz et Thorne, 2006). Les au-
teurs de cet ouvrage se penchent souvent sur des épisodes de communication
manquée (« missed communication ») et tentent de modéliser les conditions d’un dialogue
interculturel efficace. Dans le même esprit, Mangenot et Tanaka (2008), s’appuyant sur
la notion d’ethos communicatif, montrent comment certains malentendus potentiels entre
étudiants japonais et français peuvent être désamorcés – voire explicités – par les
coordonnateurs de l’échange.257
257 Voir : L’analyse de contenu : exemple d’une communication pédagogique médiée par ordinateur [syn-
chrone]
L’analyse de contenu : exemple d’une communication pédagogique médiée par ordinateur [asynchrone]
342 | Les interactions en ligne comme objet d’étude
core, de manière plus praxéologique, pour déterminer quel impact sur l’apprentissage
ont différentes modalités d’intervention tutorale (Quintin, 2007).
L’étude des apprentissages collectifs en réseau, enfin, est l’objet de tout un champ de
recherche très développé dans le monde anglo-saxon, le Computer-supported Collaborative
Learning (CSCL). Contentons-nous ici de signaler que Dejean-Thircuir et Mangenot
(2009) critiquent l’omniprésence, au plan de la recherche, de la question de la collabo-
ration (très exigeante pour les étudiants comme pour les tuteurs), au détriment de
l’analyse d’autres formes d’apprentissage collectif comme la mutualisation ou la dis-
cussion.
Leur hypothèse était que l’analyse des interactions pouvait permettre de caractériser
les situations lors desquelles la collaboration se révélait efficace, plus sûrement qu’une
approche expérimentale cherchant à contrôler le maximum de variables et à établir des
rapports de cause à effet entre d’autres variables définies a priori. Cependant, la grande
majorité des études qui ont emprunté cette voie (par exemple, Quintin, 2007) se sont
appuyées sur l’analyse de contenu quantitative (ACQ), méthodologie impliquant
« deux opérations fondamentales, la précatégorisation thématique des données tex-
tuelles, et leur traitement quantitatif, généralement informatisé » (Charaudeau et
Maingueneau, 2002 : 39) ; on notera que ces auteurs opposent cette méthodologie à
l’analyse du discours. De Wever et al. (2006) se livrent à une revue critique de quinze
recherches consacrées à l’étude des forums pédagogiques et utilisant la méthodologie
de l’ACQ ; en réaction à cette étude, Mangenot (2007) remarque que la plupart des
cadres théoriques passés en revue relèvent de la dimension cognitive ou socio-
cognitive et émet l’hypothèse que l’ACQ se prête moins bien que des approches plus
linguistiques à l’examen de phénomènes complexes liés à la dimension socio-affective
ou au contexte socio-culturel, dans la mesure où elle se contente de coder et compter
des énoncés au lieu de les analyser de manière plus fine.
L’on peut ainsi avancer que l’apport des sciences du langage se situerait plutôt du côté
du qualitatif et de démarches ethnométhodologiques, l’idée étant d’observer, de dé-
crire et de chercher à comprendre les logiques (les « méthodes ») des acteurs,
éventuellement de parvenir à certaines modélisations, plutôt qu’à essayer de prouver
l’efficacité de telle ou telle situation de collaboration à distance. Par manque d’espace,
François Mangenot | 343
258 On remarquera que l’analyse de discours « à la française » ne correspond pas à ce que les anglo-saxons
appellent « Discourse analysis » ; Herring (2004), notamment, propose une approche, la Computer-Mediated
Discourse Analysis, qui n’exclut ni l’analyse de contenu quantitative, ni des méthodes plus linguistiques.
15. L’évaluation, un domaine de
connaissances complexe entre
théorie et pratiques sociales
Patrick Chardenet259
Pour appréhender la place tenue et les rôles joués par l’action d’évaluation dans
l’enseignement-apprentissage des langues (Chardenet, 2006), il est d’abord nécessaire
de connaître et de comprendre comment s’est constitué ce domaine de connaissance
en dehors de la didactique des langues et comment il s’y est intégré globalement et en
contexte. Pour cela, l’étude des discours tenus sur l’évaluation et au nom de
l’évaluation par les spécialistes qui en parlent dans des publications, par les enseignants
praticiens évaluateurs à propos des approches théorique, des techniques et de leur pra-
tique, constitue donc une approche heuristique où l’on peut établir le fil de
l’épistémologie du domaine.
Mais les actes d’évaluation sont aujourd’hui complètement intégrés en éducation. Ils
deviennent même dominants, dans une société qui met en avant le paradigme social de
la compétition élitiste en fabriquant l’excellence qui n’existe à une extrémité de
l’échelle, que parce que l’échec est son corollaire à l’autre extrémité). Cette situation
relayée par le poids du marché des certifications qui la légitiment, particulièrement en
langue étrangères, contribue à affaiblir le questionnement heuristique en le réduisant
parfois à un enjeu méthodologique, voire technique. Or, l’acte d’évaluation est égale-
ment la manifestation d’une situation complexe entre :
- l’activité évaluative (d’ordre cognitive) ;
- l’acte d’évaluation et ses acteurs (d’ordre socio-pédagogique) ;
- les procédures et les procédés (d’ordre didactique et docimologique) ;
- les certifications (d’ordre économique et politique).
Ce qui conduit à faire émerger trois approches dominantes des faits d’évaluation
(Figari et Achouche, 2001) :
259 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : évaluateur / évaluataire, activité
260Ces travaux déterminent comment un processus de référenciation agit sur l’évaluateur en formatant la
pensée qui l’oriente dans ses choix procéduraux et les procédés.
Patrick Chardenet | 347
Axe paradigmatique (ordre des choix dans les syntagmes) : (la / le / une) ; (Mercedes
/ véhicule / voiture), (avance /fonce / roule). Axe syntagmatique (combinaison des
syntagmes) : det, N, V, Prép., Dét., N., Adj.
Cette combinatoire permet alors d’élaborer des tests de contrôle d’appropriation des
structures sur des modèles mécaniques comparables à ceux utilisés pour
l’entraînement de l’apprenant. Dés le début des années 1960 en France, le Centre in-
ternational d’études pédagogiques (CIEP) avait imaginé pouvoir ainsi devenir un
centre producteur de tests de français pour le monde entier. Les théories sous-jacentes
en étaient : une langue identique pour tous ; un découpage structural des formes et du
sens ; un processus d’apprentissage et des objectifs identiques partout ; une capacité à
mesurer la performance par des tests construits sur des modèles psychométriques.
Mais depuis les années 1980, le paradigme communicationnel, puis son complément
actionnel ont bouleversé l’approche en évaluation et conduit à une redéfinition des
procédures. On passe du principe de la procédure monoréférentielle (le test de con-
trôle), à celui d’une procédure nécessairement multiréférentielle (bilan), de la
centration sur la connaissance du fonctionnement de la langue, à celui de la mise en
oeuvre de compétences langagières. Sur le plan épistémologique, l’objet (langue) et
le sujet (apprenant) se complexifient.
L’intégration active de l’évaluation en didactique des langues à partir des années 1980,
sera déterminée par le développement des notions de communication et de compé-
tence, qui conduisent à élargir l’unité linguistique de référence de la phrase à l’énoncé
et au discours, et à une synthèse psychosociale de la notion d’apprentissage qui con-
fère à l’acteur apprenant un rôle dans son propre apprentissage et dans celui des autres
apprenants (auto-socio-construction de la compétence communicative). Si la langue
est impliquée sous différents aspects linguistiques et langagiers, le sujet qui apprend est
à la fois un être psychologique (individu), sociologique (élève) et pédagogique (appre-
nant). Ce qui se traduit par un changement de paradigme, du behaviorisme (Skinner,
1957), au constructivisme (Vygotski, 1985 ; Piaget, 1937 ; Bruner, 1987).
348 | L’évaluation, un dommaine de connaissance complexe
261 Dès le VIIe siècle, la dysnastie Sui (581-618) a mis en place un dispositif sévère de sélection des fonc-
tionnaires chargés de gouverner l’Empire, notamment la levée des impôts par les mandarins. Les lauréats
pouvaient accéder, après plusieurs examens, au titre suprême de shin-shih.
350 | L’évaluation, un dommaine de connaissance complexe
vement, à l’encontre de l’héritage des charges et des fonctions. Trois avantages y sont
liés (De Ketele, 1986) :
- moralisation de l’accès à certaines fonctions ;
- promotion par le mérite de la réussite à l’examen représentant une épreuve
identique pour tous ;
- émergence d’une élite sur des valeurs publiques.
Ces fonctions forment un ensemble difficilement dissociable dans les systèmes so-
ciaux hiérarchisés. Elles construisent ainsi, ce qu’on pourrait appeler un processus
qualifiant qui dans le domaine de l’enseignement-apprentissage des langues, peut être
articulé à la notion de compétences. Rendre compétent en langue étrangère, tel est le
but de l’enseignement des langues. Quand on a dit cela, on a l’impression d’avoir tout
dit, mais on a rien dit du point de vue de ce que l’on entend par compétence. La com-
pétence est, généralement, entendue comme la possibilité qu’a un individu à manier
une langue, au moment où il en a besoin et en fonction de ces besoins ; cette compé-
tence étant reconnue ou pas, valorisée socialement ou pas. C’est ce que j’appellerais :
l’aboutissement du processus qualifiant. Le processus qualifiant part des aptitudes ac-
quises par l’espèce, développées en capacités, spécifiées en compétences réalisées sous
262 Que l’on retrouve aussi bien en esthétique (jugement du laid et du beau) ou en droit (injuste/juste).
Patrick Chardenet | 351
forme de performances, certifiées par des concours, des diplômes, une réputation as-
surant une qualification sociale.
263 On trouvera le détail des références du corpus (auteurs et ouvrage), dans les deux ouvrages cités.
352 | L’évaluation, un dommaine de connaissance complexe
où l’on ne précise pas les formes repérables dans le matériel comportemental ou linguis-
tique qui renvoient précisément à telle ou telle valeur de la représentation (Jodelet,
1989 ; Bonnardi et Roussiau, 1999). Ce qui pose le problème de son unité épistémolo-
gique dans le même temps où elle est « aujourd’hui largement circulante en didactique
et dans les travaux portant sur l’acquisition des langues264 ». Tout le problème réside
dans les lieux (comportements, discours) et les modes de repérage (signes, marques)
de ces représentations. L’association spontanée de termes se révèle de ce point de vue,
l’une des modalités de production de ces objets complexes : à quoi associez-vous le
terme « évaluation » ?
En général, l’expérience montre (Chardenet, 2006), que les catégories autour des-
quelles s’articule l’objet de discours, sont :
- les aspects technologiques de l’évaluation ;
- les relations entre la pédagogie et la didactique ;
- les sentiments à l’égard de l’évaluation.
264 Ibidem.
354 | L’évaluation, un dommaine de connaissance complexe
Ces deux champs peuvent faire l’objet de recherches propres, faisant produire des
données à partir de situations concrètes (organisations humaines où sont mis en œuvre
des actes d’évaluation, comme l’école, l’entreprise, l’administration) et en traitant les
corpus avec les outils adaptés à chacun de ces champs.
La mise en discours de l’évaluation, à partir des acteurs sociaux, praticiens (évaluateurs
et évaluataires), et spécialistes (chercheurs, formateurs de formateurs), montre com-
ment nous pouvons schématiser deux cheminements épistémologiques principaux,
deux organisateurs des discours dans ce domaine :
- l’approche psychométrique qui valorise la mesure et dont s’est inspirée en
grande partie la docimologie constructive, puis l’édumétrie265 ;
- l’approche socio-sémantique, puis cognitive qui met en avant le sens, tant
dans les actes d’apprentissage que dans ceux de l’enseignement266.
265 Après les travaux critiques du psychologue H. Piéron en France sur la subjectivité des corrections, un
courant se développe largement en Europe et aux États-Unis pour mettre en avant l’importance des réfé-
rentiels, des critères et des indicateurs (Piéron, 1963 ; Bonboir, 1972 ; Landsheere, 1972), sur la base de
travaux de psychométrie, dont l’objet réside dans l’élaboration de concepts, de méthodes et de techniques
qui régissent les opérations de mesure en psychologie. Parallèlement, aux États-Unis, Benjamin Bloom,
fait émerger une classification des niveaux de pensée processus d’apprentissage. Il fait l’hypothèse que les
habiletés peuvent être mesurées sur un continuum allant de simple à complexe. La taxonomie des objec-
tifs éducationnels de Bloom est composée de six niveaux, dont : la connaissance, la compréhension,
l’application, l’analyse, la synthèse et l’évaluation (Bloom, 1956). D’autres taxonomies seront ainsi consti-
tuées à la suite. Docimologie et taxonomie s’articulent progressivement dans une approche de la mesure
en éducation. Si la psychométrie ne prenait en compte que l’activité des individus, l’édumétrie vise à inté-
grer les cas où la mesure s’applique à des entités autres que des individus : par exemple les items d’un test
(pour déterminer leur niveau de difficulté), les objectifs d’un programme de formation (pour déterminer
jusqu’à quel point ils sont maîtrisés par une population d’élèves), les étapes d’un processus
d’apprentissage (pour déterminer des progrès (Leclercq, 1999 ; De Ketele et Gérard, 2005).
266 Désigner l’élève (sujet sociologique), par le terme d’apprenant (sujet pédagogique), constitue un pas-
sage vers une prise en compte de la spécificité de la situation didactico-pédagogique où sont en jeu des
individus, des connaissances et des compétences. L’apprenant est engagé dans une situation
d’apprentissage, qui vise l’appropriation d’un savoir, d’un savoir-faire ou encore d’un savoir être à travers
des pratiques qui produisent du sens (Perrenoud, 1994 ; Gaté, 1998 et 2002).
Patrick Chardenet | 355
typologie des approches de l’évaluation à travers les manuels permet à la fois de mieux
comprendre les potentiels d’impact de la recherche en évaluation sur les pratiques et
de fournir des données organisées pour les prescripteurs.
La méthode analysée la plus récente à l’époque, est Le nouveau sans frontières273, dont
l’appareil de contrôle est identifié comme un « bilan à la fin de chaque unité », avec
« un exercice de contrôle pour chacun des savoir-faire acquis dans l’unité ».
267 A-M Thierry, 1987, Analyse de méthodes, français langue étrangère, CIEP. Un courant de la didactique, visant
à construire des grilles d’analyse de méthodes selon des critères ad hoc, s’est développé au cours des an-
nées 1980. Il correspondait, à la fois à une demande des professionnels de l’enseignement devant
l’accroissement de l’offre et sa diversité, et s’inscrivait dans une perspective implicite d’idéal méthodolo-
gique.
268 F. François et E. Companys, 1969, Tests de langue, document BELC n° 2440. Cette « testing period » est
L’ÉVALUATION
Les épreuves d’évaluation paraîtront manquer à cet ensemble pédagogique : leur absence relève
d’un choix délibéré de notre part. Quatre raisons principales nous ont amenées à cette prise de
position.
1. La légitimité d’un système de contrôles imposés nous a paru, en soi, fortement contestable
dans un cycle de formation destiné aux adultes.
2. Des contrôles linguistiques seraient en contradiction, dans leur principe même, avec les
options méthodologiques qui fondent ce matériel. Ce dernier a été conçu dans un souci
constant de réunir des conditions favorables pour que les participants au cours parviennent
progressivement à auto-évaluer leurs performances orales ou écrites. À l’heure actuelle, les
techniques d’évaluation disponibles fonctionnent toutes à l’inverse de cette proposition
fondamentale. Elles requièrent toutes la connaissance préalable de critères constitués
indépendamment et extérieurement aux personnes qui ont à répondre aux épreuves : nous
souhaitons, à l’inverse, que les participants se constituent eux-mêmes leurs propres systèmes de
repères pour juger de la validité de leur pratique langagière.
F. Lapeyre, D. Bourgain et A. Pelfrêne, 1977, « ...et dire », Didier/Crédif, p. 30.
Dans les années 1980, une tendance novatrice fait apparaître au sein des manuels, une
partie consacrée à de l’évaluation, qui hésite d’abord à se présenter sous cette désigna-
tion. Mis à part la méthode Bonne route, qui suggère d’utiliser la table des matières du
manuel en évaluation, selon la présentation suivante :
- évaluation.
Van Zundert, D., 1988, Bonne route, guide pédagogique, Hachette/Alliance française, p. XIX.
En général, c’est le manuel de l’élève qui propose, sous une forme d’adresse directe à
l’apprenant, des pages intitulées « bilan » :
Les bilans. Tests, documents et exercices de révision sur les acquisitions des cinq
leçons de chaque unité.
P. Dominique, J. Girardet, M. et M. Verdelhan, 1988, Le nouveau sans frontières, CLE International, niveau 1,
description du matériel, p. 4.
Pour ces bilans, qui font parfois de la place à des activités d’auto-évaluation, le « test »
reste un moyen central. Il s’agit toujours de mettre l’apprenant à l’épreuve. Tout se
passe comme si l’évaluation n’arrivait pas à être située en didactique, entre domaine de
connaissances étendues et pratiques ancrées dans le plan d’enseignement, comme des
répétitions, ou des résurgences d’examens. Même quand le terme « évaluation » appa-
raît, aucune autonomie ne lui est concédée, par composition imposée avec un autre
terme (ici « évaluation-bilan »).
LE LIVRE
6 sections de 5 leçons chacune = 30 leçons.
Dans chaque section, une leçon est consacrée à la révision et une autre à l’évaluation-bilan.
B. Job, 1994, Mosaïque, CLE International, niveau 1, organisation, p. 4.
Un test d’évaluation est proposé toutes les cinq leçons. Les résultats de ce test permettront de
mesurer les besoins de révision et de consolidation. Pour ce faire, une leçon de révision suit la
leçon d’évaluation.
R. Gomes et B. Job, 1994, Mosaïque, cahier d’exercice 1, CLE International, p. 3.
10 TEST CULTUREL
a) Quel est le symbole attaché à ces lieux ou à ces objets ?
Exemple : La tour Eiffel → Le progrès industriel
• L’Arc de triomphe
• La place de la Bastille
• Le centre Georges-Pompidou
• L’hexagone
• Le buste de Marianne
J. Girardet et J-M Gridlig, 1996, Panorama, niveau 1, CLE International, p. 144.
274 La grande majorité désigne alors ce moment comme un « bilan » (C. Paccagnino et M-L. Poletti, 1987,
Grand large, Hachette ; J. Girardet, 1988, Le nouveau sans frontières, CLE International ; M-L. Parizet, 1989,
Bonne route, Guide pédagogique, Hachette ; J. Vassal, 1992, Pile ou face, CLE International ; J. Blanc et J-M.
Cartier, 1994, Scénarios professionnels, CLE International).
275 P. Gibert et P. Greffet, 1988, Bonne route, Hachette/Alliance française.
276 Op. cit.
277 P. Dominique, J. Girardet, M. et M. Verdelhan, 1988, Le nouveau sans frontières, CLE International.
278 Ibid.
279 Ibid.
280 B. Job, 1994, Mosaïques, CLE International.
281 Ibid.
Patrick Chardenet | 359
284Conseil de l’Europe, 2001, Cadre européen commun de référence pour les langues (Apprendre, ensei-
gner, évaluer), Hatier, p. 129 et suivantes.
Patrick Chardenet | 361
Rares sont les intégrations didactiques multilingues qui sont appliquées aux curricu-
lums scolaires et universitaires (l’éveil aux langues, l’intercompréhension,
l’apprentissage simultané) et quasiment absentes sont les procédures d’évaluation de la
compétence plurilingue intégrées. Une voie a cependant été ouverte avec le Cadre de
référence pour les approches plurielles des langues et des cultures (CARAP285), qui
propose un véritable référentiel des savoirs, savoir-être et savoir-faire susceptibles
d’être développés par des approches plurielles des langues et des cultures.
Ces arrières-plans structurants construit autour de la problématique des référentiels
(description de compétences langagières sous forme de savoirs, savoir-être et savoir-
faires ; descripteurs sous la forme de structures langagières et linguistiques) ont princi-
palement été développé dans un contexte européen et il reste à s’interroger sur les
conditions de leur éventuelle exportation sous la forme de modèles conceptuels, sur
leur exploitation en matière d’évaluation. Si l’acte d’évaluation construit ne repose tou-
jours pas sur la compréhension de ce qu’est l’activité évaluative (Chardenet, 2000), le
risque est grand de n’emprunter à ces modèles que ce qui facilite l’émergence d’une
technologie et de ses outils (les méthodes, les manuels, les tests). Rien ne garantit par
exemple que ces modèles, dans leur expression européenne, s’articulent automatique-
ment avec l’ensemble des cultures d’enseignement et d’apprentissage de telle ou telle
langue de tel ou tel statut, dans tel ou tel contexte. Il y a pour la recherche, un vide à
combler pour favoriser le développement de médiations (Castillo et Ciekanski, 2002),
qui permettent d’appréhender l’apprentissage comme un objet de formation où les
langues ne seraient plus gérées indépendamment les unes des autres.
286
Davantage ailleurs qu’en France, me semble-t-il.
287
L’ethnographie de longue durée n’étant pas, bien entendu, la seule forme possible d’une pratique de
l’enquête de terrain (voir Winkin, 1992 ; Blanchet, 2000 ou Céfaï, 2003, et la partie B du présent ouvrage).
368 | Au lycée Gajart
terrain. Mais cet apprentissage, de nature profondément dialogique, passe souvent aus-
si par le partage d’expériences avec d’autres chercheurs, apprentis ou confirmés.
C’est précisément dans le but de partager des fragments de mon expérience que je vais
tenter de mettre en lumière quelques-unes des facettes de la dimension relationnelle
du terrain, et de certaines implications qu’elle a pu avoir dans la pratique d’une re-
cherche sociolinguistique ethnographique (Lambert, 2005). Cette recherche doctorale,
fondée sur un travail de terrain au long cours (2001-2005), a été conduite dans un ly-
cée professionnel grenoblois classé en Zone d’Education Prioritaire. Les données
proviennent de quatre grands types de méthodes ethnographiques : des observations
directes (comprenant l’utilisation d’un enregistreur audio), des procédés de recension
(dont la tenue systématique d’un journal de notes de terrain), la collecte de divers types
de sources écrites (programmes scolaires, instructions officielles, manuels scolaires,
règlement intérieur, etc.), la réalisation d’entretiens semi-dirigés (avec guide
d’entretien) et d’échanges très peu dirigés lors des conversations ordinaires au gré des
rencontres. Deux enquêtes exploratoires par questionnaires, qui ont aussi servi
d’entrée en contact avec différents acteurs du terrain, sont venues compléter ces
modes de production des données288. La pratique de la recherche a enfin compris la
sélection et l’élaboration d’un panel d’outils destinés à appréhender, de manière cohé-
rente, la pluralité des répertoires verbaux des jeunes filles d’une classe de seconde
professionnelle (âgées de 16 ans en moyenne). Située à la croisée des champs sociolin-
guistique et didactique, cette recherche a en effet porté sur l’étude de l’hétérogénéité
des ressources langagières de ces jeunes filles et sur la mise en œuvre d’activités péda-
gogiques visant à conscientiser et à exploiter cette diversité linguistique dans le cadre
des apprentissages scolaires.
Je vais donc tenter de donner à lire quelques aspects du déroulement du travail sur ce
terrain scolaire, en choisissant « les relations ethnographiques » (Agier, 2004) comme
angle principal pour le revisiter. Tout en précisant les objectifs généraux de cette re-
cherche impliquée dans le champ de l’action éducative, je présenterai tout d’abord les
conditions dans lesquelles j’ai accédé, avec d’autres chercheurs, au site scolaire investi-
gué. Je m’attacherai ensuite à explorer quelques liens entre des dynamiques
relationnelles dans une classe de seconde, la place du chercheur et certains choix mé-
thodologiques opérés.
288 Voir : Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables.
289
Linguistique et Didactique des Langues Etrangères et Maternelles, Université Stendhal Grenoble3.
Patricia Lambert | 369
290
La notion de répertoire verbal est définie comme « the totality of linguistic forms regulary employed in the course
of socially significant interactions » (l’ensemble des formes linguistiques régulièrement utilisées au cours
d’interactions socialement significatives) (Gumperz, 1964 : 137). Autrement dit, le répertoire est envisagé
comme un ensemble variable de possibilités expressives qu’un locuteur mobilise selon sa connaissance
des contraintes grammaticales et des normes sociales qui autorisent ou invalident certaines réalisations.
291
Courant successivement décliné en éveil aux langues, au langage, ouverture aux langues et aux cultures,
ouverture à la pluralité linguistique…
292 Voir :
J’intègre donc l’équipe293 dès la phase de conception de ce projet, qui vise la descrip-
tion et la prise en compte de la diversité des ressources langagières présentes –
pratiquement ou symboliquement – au sein de la communauté scolaire. Au cours de
cette phase, sont longuement élaborés et négociés, en partenariat avec les différents
acteurs du lycée, trois axes de recherche collaborative :
- une recherche descriptive des répertoires verbaux des élèves ;
- des sessions de formation en direction des enseignants ;
- la conception et l’expérimentation d’activités pédagogiques.
Cette posture collaborative qui tentait d’impliquer pleinement les enseignants dans la
recherche, ainsi que la méthode de l’observation participante privilégiée, nous parais-
saient à même de favoriser notre entrée294 sur ce terrain scolaire.
293
D’autres chercheurs du Lidilem ont participé, sous diverses formes, à la recherche : Jacqueline Billiez,
Elisabeth Calaque, Marinette Matthey, Cyril Trimaille.
294
La distinction entre « accès » et « entrée » effectuée par Lapassade (1996 : 46) permet de souligner le
fait qu’une autorisation, voire une invitation pour ce qui nous concerne, pour enquêter sur des terrains
scolaires, peut constituer une condition légale minimale mais que celle-ci est souvent loin d’être suffisante
pour garantir une intégration des chercheurs à la communauté scolaire.
Patricia Lambert | 371
des situations variées (pas seulement en classe), pour amener ensuite les enseignants à
prendre en compte, dans des actions d’intervention différées, les compétences pluri-
lingues/pluristyles identifiées295. De leur côté, les enseignants et la direction mettaient
l’accent sur les difficultés, les manques, les handicaps linguistiques des élèves, sur la
dyslexie de certains ; et, dans cette même logique, sur la nécessité de mise en œuvre
rapide d’outils de « diagnostic » et de « remédiation ».
L’existence de ces logiques temporelles et professionnelles en tension, également révé-
latrice de postures idéologiques distinctes296, a donc impliqué la recherche d’un
consensus permettant la poursuite des activités de recherche. Des réunions rassem-
blant tour à tour différents partenaires – personnels enseignant et administratif du
lycée, inspectrice académique de lettres/histoire, chercheurs du Lidilem – ont permis
de préciser progressivement les objectifs et les axes de la collaboration, d’établir les
contenus des séminaires de formation, et de tenir informés les différents partenaires
du déroulement et des avancées du travail. La rédaction de rapports d’activité de re-
cherche représentant un vecteur complémentaire d’information et une autre forme de
retour au terrain. Plusieurs sessions de formation d’enseignants du lycée ont enfin été
conçues et animées par des chercheurs, entre autres dans le but d’identifier ensemble
des « bouts de longueur d’onde commune »297.
Pendant toute cette période, mon statut au sein de l’établissement, les modalités
d’observation, d’intervention, ou celles de coopération avec différents membres de la
communauté lycéenne ont fait sans cesse l’objet de négociations et de re-négociations.
Ce contexte fournissait un riche matériau empirique, tout en retardant la possibilité de
nouer avec des élèves les relations de confiance souhaitées pour documenter de ma-
nière plus précise leurs situations sociolinguistiques.
Gajart, comme à Belten High, les enseignants étaient tentés d’assimiler l’ethnographe à
leur groupe professionnel, allant parfois jusqu’à lui laisser la responsabilité de leur
classe en leur absence. Le risque consécutif de cette prise en charge était une mise à
distance ou un rejet de la part de certains adolescents. Il m’était toutefois impossible
de résoudre l’ambiguïté de mon statut à la manière de Eckert qui avait pu choisir de ne
plus entrer dans les salles de cours et de ne fréquenter que les autres lieux de sociabili-
té adolescente au sein de l’établissement (cour, réfectoire, terrains de sport, etc.). À
Gajart, compte tenu de la situation instaurée et du caractère impliqué de la recherche
(Billiez, 1997), les enseignants ne pouvaient me considérer, et à juste titre, comme une
simple observatrice, mais bien comme une participante dont la présence était aussi desti-
née à les aider dans leur tâche professionnelle. L’option de Penelope Eckert aurait
peut-être été plus confortable, mais elle m’aurait en outre partiellement privée de la
prise en compte des points de vue des enseignants sur les langues, sur le langage, sur
les pratiques langagières de leurs élèves, sur leur métier et sur le lycée, dimensions qui
ont ainsi pu être pleinement intégrées aux analyses.
Dans un climat (somme toute relativement ordinaire) caractérisé par des contradic-
tions fortes entre attentes, accueil et résistances sceptiques de la part des enseignants,
c’est donc avant tout sur la régularité, l’intensité et le degré d’implication dans ma par-
ticipation à diverses activités lycéennes qu’ont reposé les possibilités de mon
intégration à ce réseau scolaire. Le contexte gagnait en épaisseur et en complexité au
fil des observations menées et de ma participation à diverses activités de la vie du ly-
cée ; les unes comme les autres me permettant d’affiner ma connaissance de cette
micro-société lycéenne et de resserrer, en les précisant, les vastes questionnements de
départ.
Pour tenter de décrire les répertoires des élèves dans leur complexité formelle et sub-
jective, il s’agissait d’avoir accès aux biographies langagières d’élèves, ainsi qu’aux
manières dont ils mobilisaient diverses ressources de leurs répertoires verbaux. Dans
ce type de contexte scolaire, socialement et scolairement disqualifié ainsi que forte-
ment empreint de l’idéologie dominante monolingue et normative, certaines
ressources font l’objet de masquages et de focalisations (elles sont peu visibles et/ou
stigmatisées) et la réalisation de ces objectifs nécessitait donc encore davantage
l’établissement de relations peu formelles et durables avec les sujets enquêtés.
Cela a finalement été rendu possible dans le cadre d’une participation observante (Gold,
1958), pendant toute une année scolaire (2002-2003), dans une classe de seconde de
secrétariat-comptabilité. Comprise dans l’une des filières les moins valorisées du lycée,
cette classe était composée en majorité de jeunes filles qui sont peu à peu devenues les
principaux sujets de ma recherche. La démarche entreprise dans cette classe m’a con-
duite à mettre en œuvre différents procédés de production de données300, dont le
choix a été pour partie orienté par la nature des relations construites dans la classe.
300
Les notions de production ou de fabrication des données ont ma préférence par rapport à celles de recueil,
de cueillette ou de collecte. Même si les deux premiers termes ont le désavantage de ne pas mettre l’accent sur
les conditions in vivo/écologiques de la recherche, les trois suivants présentent l’inconvénient de tendre à
Patricia Lambert | 373
masquer le fait que sans la présence du chercheur, sous quelque forme que ce soit, les données
n’existeraient pas en tant que telles (Voir notamment Trimaille, 2003 : 114 et svtes).
301
Les professeurs titulaires de lycée professionnel sont recrutés par concours pour enseigner deux disci-
plines, lettres signifie « langue et littérature françaises ».
302
Le recrutement s’opère dans des collèges ZEP-REP de la périphérie de l’agglomération grenobloise.
Zones d’Education Prioritaire et Réseaux d’éducation prioritaires. Les espaces urbains où les conditions
sociales sont de nature à constituer un risque pour la réussite scolaire des enfants étaient appelées
d’éducation prioritaire depuis le début des années 1980, mais en 1999 une restructuration sous la forme
des Réseaux d’Education Prioritaire est mise en place, supprimant les ZEP au sens de « zone », mais inté-
grant des établissements relevant de ZEP travaillant en réseau REP
(http://www.educationprioritaire.education.fr/, 15/05/10).
303
Celles de la filière « Industrie graphique » par exemple, dans lesquelles les élèves viennent parfois de
loin et sont sélectionnés sur la base de la qualité de leur dossier scolaire.
374 | Au lycée Gajart
1.2.1.2. Enclicages
Sur ce terrain qui m’obligeait à « sortir des cadres bien établis, tout en préservant un
équilibre fragile entre engagement et distanciation » (Billiez et Trimaille, 2001 : 105), la
fragilité de l’équilibre a souvent été éprouvée. Nombre d’ethnographes soulignent
cette difficulté constante de l’ethnographie : l’équilibre à tenir entre implication et dis-
tanciation. L’un des risques, parce qu’il peut représenter un biais, mais qui représente
en même temps un gage d’un certain degré d’intégration à un groupe observé ou à une
fraction de celui-ci, est ce que l’anthropologue Olivier de Sardan (1995) désigne par le
terme enclicage.
Sur le terrain, le chercheur court en effet le risque d’être encliqué, c’est-à-dire d’être
« recruté » ou « adopté » par un groupe, ou par une partie de celui-ci, comme un
membre porte-parole ou un représentant naturel. Cet effet d’enclicage paraît inévi-
304
Et ce, malgré l’ambiguïté des objectifs de cette enquête qui, afin de limiter les effets du paradoxe de
l’observation sur leurs conduites langagières, n’étaient jamais rendus totalement explicites.
Patricia Lambert | 375
table, et la participation affective aux situations observées en constitue sans doute aus-
si un élément de compréhension.
Il m’est ainsi arrivée d’être ponctuellement encliquée tour à tour par des enseignants
contre des élèves, par des élèves contre d’autres élèves, par des enseignants contre
d’autres enseignants ou contre l’administration. La distance que j’essayais de conserver
par rapport à certains conflits ou tensions n’était pas toujours bien perçue par
l’ensemble des sujets. Mais elle a sans doute représenté au final une relative garantie de
maintien d’une position médiane, à l’intersection des groupes, souvent proche d’un
statut de médiatrice institutionnelle entre ces différents groupes et leurs membres.
On l’aura peut-être deviné, c’est avec les enseignants que les relations ont été les plus
délicates. Le « fil » n’a, en effet, jamais été aussi ténu que dans mes rapports avec les
deux enseignants-collaborateurs qui avaient fait preuve d’une bonne dose de courage,
je l’ai assez vite compris, pour accepter de participer à un projet dans lequel une cer-
taine « navigation à vue » était obligatoirement de mise.
La qualité des rapports que je m’efforçais d’établir et d’entretenir avec les élèves pou-
vait parfois provoquer avec eux une sorte de rivalité affective tacite. À cette
compétition masquée, venait se greffer une série de brouillages qui ont parfois rendu
la tâche de déchiffrement des situations investiguées particulièrement ardue. Toute-
fois, au moins une part de leur motivation reposait sur une intuition partagée. La piste
de travail proposée leur semblait en effet également prometteuse pour tenter
d’améliorer les rapports des élèves aux activités scolaires et à l’institution. Aussi, mal-
gré des incompréhensions réciproques, la « dé-stigmatisation » d’élèves porteurs de
compétences dans des langues et des styles de parole peu valorisés nous apparaissait
comme une condition nécessaire, non seulement pour l’amélioration des rapports des
élèves du groupe des 13 aux apprentissages et à l’institution scolaire, mais aussi pour la
reconfiguration des relations entre l’ensemble des membres de la classe.
susceptible de faire l’objet d’un ensemble d’analyses portant sur différents niveaux,
allant de l’analyse thématique d’entretiens à celle de variantes lexicales ou phonétiques,
en passant par l’étude d’interactions courtes et localement situées.
En résumé – et en simplifiant grossièrement un processus complexe, dialogique et non
linéaire – la sélection des données, la formulation des hypothèses et des objectifs, ainsi
le choix des outils d’analyses ont tous été guidés par la question suivante : Quelles sont
les directions me semblent les plus pertinentes pour poursuivre la réflexion et la
« conversation » (Heller, 2002) autour du traitement de la diversité et de la variation
linguistiques dans le contexte local de la recherche et, plus largement, dans le système
éducatif ?
La recherche ethnographique évoquée dans ce texte avait pour contexte initial un con-
trat – davantage moral que légal305. Mon but était ici, en portant un regard rétrospectif
sur la dimension relationnelle du travail de terrain, de mettre en lumière au moins deux
types d’implication, pratique et éthique.
Dans le cadre d’une enquête ethnographique s’appuyant sur une immersion prolongée
et des observations répétées, tout en se combinant avec une recherche impliquée dans
le champ de l’action éducative, la posture de recherche est forcément à géométrie va-
riable. Elle alterne différents degrés d’implication en fonction des rôles du chercheur,
du type de données nécessaire selon la situation, des critères de faisabilité, mais aussi
des rapports aux sujets et aux groupes. Le contexte contractuel dans lequel s’est dé-
roulée la recherche a ainsi d’abord grandement facilité l’entrée en relation avec divers
acteurs d’un type d’établissement scolaire difficilement accessible à des chercheurs. Ce
contrat, et cet accueil, m’enjoignaient à tenter en retour de tenir compte des demandes
et des attentes exprimées par les différents partenaires dans l’orientation de la re-
cherche. Les divers choix opérés dans cette recherche ne pouvaient donc être
simplement de méthode. En même temps qu’elles ont souvent guidé les modes de
production des matériaux empiriques qui ont fondé les analyses, ces demandes et ces
attentes ont fait partie intégrante des données produites.
Ainsi que le souligne Olivier de Sardan (2001 : 76), il existe une certaine « affinité sé-
lective entre des dispositifs méthodologiques et des questions de recherche ». Cette
affinité sélective n’est pas entendue comme un déterminisme méthodologique, mais
plutôt comme une compatibilité plus ou moins grande entre des problématiques et des
types de combinaisons de méthodes306. Mais il souligne aussi que l’élaboration con-
crète de la démarche dépend toujours largement de la nature du terrain, des difficultés
et des opportunités qui se présentent au chercheur. Tous les aspects de la pratique
méthodologique de terrain ne sont pas explicitables (Whyte (1955 [1996]). C’est par
exemple le cas de certains « microréglages » (Olivier de Sardan, 1995) caractéristiques
305
Un texte de convention avait été élaboré et signé par les partenaires, mais celui-ci laissait la liberté à
chacun de s’impliquer, ou non. Ce projet fonctionnant par ailleurs sans financement spécifique,
l’engagement pouvait être rompu à tout instant.
306 Voir :
Ce chapitre présente les résultats d’une recherche308 dont le but est de contribuer à
une meilleure compréhension du travail du professeur de français langue étrangère309,
à travers l’analyse des pratiques langagières qui se déroulent dans sa situation de tra-
vail. Plus précisément, cette étude se propose de montrer comment les rapports entre
langage et travail s’établissent et de vérifier comment le travail du professeur est repré-
senté dans des textes portant sur une situation de travail enseignant. Il s’agit ainsi d’un
travail qui cherchera à étudier la morphogenèse de l’agir du professeur, à partir de
l’analyse de ces textes.
Le cadre théorique et méthodologique plus large qui sous-tend cette étude est celui de
l’interactionnisme socio-discursif (Bronckart, 1997, 2004, 2006), dont un des objectifs
est d’étudier la problématique de l’agir humain ayant pour base le langage. En étudiant
la question de l’agir humain à partir de l’analyse du travail d’un professeur de FLE,
nous considérons l’activité enseignante du professeur comme un « travail », à la diffé-
rence des recherches précédentes dans ce domaine qui s’attachaient plutôt à
l’élaboration de programmes ou aux effets de ces programmes sur les apprenants, plu-
tôt qu’au professeur lui-même310. Pour ce faire, on s’est également basé sur
l’ergonomie de l’activité Amigues, 2002, 2003, 2004; Saujat, 2001, 2002, 2004) et sur la
clinique de l’activité Clot, 1999, 2001; Clot et al., 2001; Faïta, 1997, 2002, 2004, 2005).
Pour atteindre l’objectif de cette étude, j’ai analysé la situation de travail enseignant
d’un professeur de FLE qui enseignait à des étudiants de niveau avancé dans une école
de français de São Paulo, Brésil. Le corpus choisi est celui des auto-confrontations311,
307 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : interactionnisme socio-discursif,
travail prescrit, travail réalisé (activité réalisée), activité réelle (réel de l’activité), polyphonie.
308 Il s’agit d’une recherche plus large, développée dans le cadre du Groupe ALTER (Analyse du langage,
travail enseignant et leurs rapports), coordonnée par Anna Rachel Machado (PUC-SP, Brésil).
309 Dorénavant FLE.
310 Ce n’est que récemment que l’activité du professeur a commencé à être considérée comme un travail
et à être analysée dans le cadre des Sciences du Travail. Auparavant, le travail enseignant était considéré
comme étant très différent des autres activités de travail (Machado, 2004).
311 Cette procédure de filmage des discussions entre chercheur et travailleur, à partir de l’observation des
vidéos des cours filmés, a été développée par des chercheurs de la Clinique de l’Activité (Clot, 1999 ; Clot
et al., 2001). Pour la réaliser, il faut filmer le travailleur pendant qu’il réalise une tâche de travail. Ensuite,
380 | Le discours de l’enseignant
chercheur et travailleur assistent à ce filmage et en discutent. Ce dialogue est encore filmé. Pour une ex-
plication plus complète, voir Clot (1999), Clot et al. (2001).
312 C’est le cas de l’auto-confrontation.
313 De l’analyse du discours à l’analyse des discours en situation comme outil de recherche et
d’intervention.
Eliane Gouvêa Lousada | 381
langées, de sorte que l’identification des énonciateurs n’est perceptible qu’à travers une
bonne compréhension du contexte de production du texte. Maingueneau (1991, 1996)
et Authier-Revuz (2001) mentionnent encore le présupposé comme un élément ca-
pable de dévoiler l’existence d’une voix autre que celle qui peut être facilement
identifiée. De même, Maingueneau (1996) cite les propositions et/ou conceptions évi-
dentes comme des manières d’identifier la polyphonie et de mieux comprendre
l’hétérogénéité constitutive du texte.
La modalisation autonymique cherche à identifier les non-coïncidences du dire
(Authier-Revuz, 2001:20; Maingueneau, 2001:159), qui concernent, par exemple, les
expressions qui indiquent distance ou nécessité d’accord entre les co-énonciateurs.
Authier-Revuz (2001:19) aborde cette question et propose une échelle où elle classe
les voix moins explicites et les voix plus explicites, en y identifiant six types d’insertion
de voix. Un de ces types concerne les formes « purement interprétatives » qui font
partie de l’hétérogénéité constitutive. Parmi les formes purement interprétatives, nous
avons la non-coïncidence du discours avec lui-même (Authier-Revuz, 2001:21) qui est
considérée comme constitutive à partir des notions d’interdiscours et de dialogisme de
Bakhtine, vu que tout mot est habité par le discours de l’autre, car il a été produit dans
le déjà dit des autres discours. Parmi plusieurs catégories, nous en relevons deux :
extérieur approprié à l’objet du dire, dans laquelle sont utilisés des mots d’un autre
lieu, d’une autre époque, d’une autre théorie, d’une autre personne, etc ; type d’autre,
dans laquelle sont employés des mots d’une autre langue, région, époque, registre,
« sociolecte »314, discours théorique, position politique, etc.
En ce qui concerne les sciences du travail, il convient de signaler deux concepts tradi-
tionnels dans ce domaine: celui de travail prescrit et celui de travail réalisé. Le travail
prescrit concerne ce qui est demandé par l’organisation, l’entreprise, l’institution. Selon
Goigoux (2002), on pourrait parler, dans le domaine du travail enseignant, de
l’ensemble de ce qui est défini par l’institution scolaire et qui est communiqué aux en-
seignants pour les aider à concevoir, à organiser et à réaliser leur travail. Cela peut
concerner l’élaboration de directives à un niveau national, régional, institutionnel, lo-
cal, etc. Le travail réalisé pourrait être considéré comme celui qui peut être observé au
moment de la réalisation de la tâche de travail. Finalement, on aurait un autre concept
proposé dans le cadre de la clinique de l’activité (Clot, 2001), celui de réel de l’activité.
L’activité réelle comprendrait tout ce qui englobe le travail, non seulement le travail
qui est effectivement réalisé, mais aussi ce qu’on aurait voulu faire, toutes les possibili-
tés qui ont été empêchées de se réaliser, etc.
Dans cette perspective, le travail enseignant serait bien plus complexe que ce que l’on
voit dans la salle de classe, c’est-à-dire que ce qui semble être effectivement réalisé par
le professeur. Il comprendrait, selon Saujat (2002) :
« celui de l’organisation du travail prescrite par l’institution scolaire (depuis les
programmes, instructions et recommandations pédagogiques jusqu’aux
314 Variations du langage, registres de langue, qui peuvent comprendre des spécificités lexicales, phoné-
Ce travail de re-conception, la réorganisation des prescriptions, aussi bien par les col-
lectifs d’enseignants que par chaque enseignant, en fonction de ses élèves, dans une
situation particulière, est très important pour cette étude, étant donné qu’il permet de
mieux comprendre les transformations et les auto-prescriptions élaborées par le pro-
fesseur que nous avons observé. Dans son travail de conception ou de re-conception
des prescriptions, l’enseignant va se servir de plusieurs artefacts (moyens matériels ou
symboliques, selon Clot, 1999 :124) disponibles dans son milieu de travail.
C’est de cette manière que l’on peut comprendre les contributions individuelles de
chaque enseignant au renouvellement du métier : en ré-inventant les manières de faire
la classe, d’utiliser les artefacts matériels et symboliques disponibles, l’enseignant in-
troduit des contributions stylistiques. Comme le souligne Saujat :
« Les contributions stylistiques de chaque enseignant, liées à la façon dont il
s’approprie singulièrement un patrimoine commun, peuvent alors être
reconnues comme des moyens de revitaliser le genre professionnel, qu’on
définira ici comme un ensemble en mouvement de manières de faire, de dire et
de penser le métier. » (Saujat, 2002 : 73)
À travers cette citation, on voit le concept de genre professionnel qui peut évoluer
grâce aux contributions du style de chaque enseignant, si ces contributions reviennent
au collectif. En réalité, selon Clot (1999) et Amigues (2004), le genre professionnel
représenterait la partie sous-entendue qui est inscrite dans la tradition sociohistorique
du métier et pré-organise les conduites des travailleurs/professeurs. De cette façon,
tout comme les genres de textes ont des dimensions prescriptives qui conditionnent
l’élaboration du texte, les genres professionnels ont également des dimensions pres-
criptives qui pré-organisent le travail, mais qui ne sont pas explicites, pour être
économiques et donc efficaces.
Il semble également important de souligner que le travail enseignant est défini dans
cette perspective plutôt comme un travail d’organisation, de constitution de son milieu
de travail et de celui des apprenants pour que l’objet-horizon – l’apprentissage des
élèves – puisse avoir lieu (Amigues, 2004).
Eliane Gouvêa Lousada | 383
Afin de répondre à la première question, une analyse des marques énonciatives a été
réalisée. Pour répondre à la deuxième question, on a cherché la présence de différentes
voix qui traversent le discours du professeur volontaire, afin de mieux connaître les
instances prescriptives qui interviennent dans son agir.
En ce qui concerne le plan énonciatif, nous avons identifié les marques énonciatives,
c’est-à-dire les unités linguistiques qui révèlent la situation d’action langagière
(Bronckart, 1997). En outre, nous avons essayé de trouver des indices sur les diffé-
rentes voix qui traversent les textes des auto-confrontations, afin de comprendre la
morphogénèse de l’agir du professeur de notre étude.
Après ces étapes d’analyse des données, nous avons cherché à croiser les résultats ob-
tenus avec des concepts tels que : travail prescrit, travail réalisé, travail réel, genre
professionnel. De plus, nous avons essayé d’identifier les instances qui sont à l’origine
du travail prescrit du professeur, à travers l’analyse des voix présentes dans les textes
des auto-confrontations. Pour ce faire, nous avons considéré que le travail prescrit
peut être prescrit par la didactique ou par la didactique du FLE ; par l’école ou par le
programme de cours ; par le propre professeur (en fonction des élèves, de son micro-
contexte de travail, comme une reconception des prescriptions initiales) ; par le pro-
fesseur mais comme une manière de faire du collectif restreint des professeurs de cette
école ; par le collectif plus large qui caractérise les professeurs en général.
315Dorénavant Paulo.
316Les discussions ont été réalisées en français, langue utilisée dans les contextes de formation de cette
école.
384 | Le discours de l’enseignant
En ce qui concerne l’étude des voix, on propose d’aborder seulement les indices de
voix moins perceptibles, mais qui peuvent être détectées si nous considérons que
l’hétérogénéité est constitutive du langage. Nous verrons par la suite qu’à travers la
voix du professeur d’autres voix peuvent être entendues, telles que :
- la voix de l’école: qui exprime des convictions et des prescriptions qui ont leur
origine à l’école ;
- la voix de la didactique (didactique des langues, du FLE) : qui véhicule des
aspects basés sur ces théories ;
- la voix du collectif de travail plus restreint : la voix de l’ensemble de
professeurs de l’école ;
- la voix du métier: la voix du collectif de travail plus large, basée sur la
tradition du métier de professeur, qui explicite la partie sous-entendue du
travail du professeur.
Eliane Gouvêa Lousada | 385
La voix du collectif de travail plus restreint peut être remarquée quand le professeur
parle au nom de ses collègues, comme dans l’exemple ci-dessous :
1P23 – oui oui je pense c’est vrai que chacun travaille un peu à sa façon t’as
prévu t’as des documents chacun travaille un peu à sa façon bon il y a des
avantages et des inconvénients mais je pense que tout le monde dans
l’ensemble se sent un peu avalé par le nombre de documents de matériel
quoi et finalement comment gérer tout ça et c’est pas facile et je pense que
le mieux c’est c’est de préparer une fiche de compréhension orale ...
Le professeur mentionne le fait que les professeurs travaillent chacun à leur manière,
que tous se perdent dans la quantité de matériel didactique et qu’il n’est pas facile
d’organiser tout cela. Même si l’on note la référence à l’ensemble des professeurs de
l’école où la recherche a été réalisée, on peut reconnaître aussi un agir du métier, étant
donné que le professeur aborde des conduites qui appartiennent à tous les profes-
seurs : l’individualisme et la solitude, qui sont caractéristique du métier d’enseignant,
selon Saujat (2004). Dans ce même exemple, il cite également une caractéristique du
professeur de cette école en particulier, dans laquelle la quantité de matériel est très
grande, ce qui cause une fatigue parmi les professeurs.
Dans le prochain exemple, le professeur évoque la question de l’expression orale, en
mentionnant qu’il a parlé à la place des élèves, ce qui laisse entrevoir la voix de la di-
dactique. On remarque la non-coïncidence du dire avec lui-même, car le professeur
montre qu’il sait qu’il ne doit pas prendre la parole des élèves, comme indique la di-
dactique, mais pense quand même que ce qu’il a fait était juste, étant donné que, selon
lui, les élèves auraient appris quelque chose.
1P2 – La prise de parole là vraiment j’ai pris la parole un peu à leur place là
vraiment je pense que ... ils n’avaient pas la parole facile et pourtant je les
connais ils ont vraiment une bonne compréhension orale et cette vidéo n’est
pas difficile je pense qu’ils sont capables de comprendre mais ils n’arrivent pas à
articuler les réponses ...
1C3 – et les points positifs ?
1P4 − Je pense qu’ils ont appris quelque chose je pense enfin même si c’est
moi qui ai pris la parole je pense que j’ai réussi à les faire raisonner ils ont
réussi à comprendre quel est le rôle et le parcours du chef d’orchestre ...
À côté des voix déjà mentionnées, on trouve la voix du métier qui semble indiquer des
conduites appartenant au genre professionnel du métier d’enseignant inscrites dans la
mémoire impersonnelle et collective de ce métier (Clot, 1999, 2001). Voyons, la ques-
tion du manque de temps, qui semble préoccuper souvent le professeur. Dans
l’exemple ci-dessous, Paulo explique qu’il n’écrit pas au tableau, car il trouve que ce
serait long et qu’il perdrait du temps. Cette affirmation révèle la conception selon la-
quelle le professeur ne doit pas perdre de temps :
Eliane Gouvêa Lousada | 387
1P15 – je n’écris pas de questions au tableau parce que c’est un peu trop
long je crois que c’est une perte de temps ...
Dans cet exemple, c’est encore la négation (je n’écris pas au tableau) qui révèle le fait que
d’autres professeurs écrivent au tableau, ce qui, pour Paulo, est une perte de temps.
Dans la même auto-confrontation, Paulo reprend la question de la lenteur et du be-
soin de gagner du temps :
2P5 – je pense que là j’ai beaucoup parlé et j’ai trouvé quand même que là mon
discours était assez pertinent... j’ai essayé d’être le plus clair possible..... je vois
pas je répète j’avais conscience que c’était un peu trop lent j’ai profité
pour gagner du temps il y avait des gens qui arrivaient ...
Dans le prochain exemple, c’est le besoin de faire quelque chose de différent, quand
les étudiants sont fatigués, qui révèle la voix du métier, à travers la proposition évi-
dente, qu’on ne peut pas nier :
3C11 – tu penses qu’ils étaient quoi... fatigués ?
3P12 – je crois que c’est la première chose qui m’est venue à l’esprit... c’était ça
comme justificatif c’était qu’ils étaient un peu lassés, un peu fatigués...j’ai
essayé de comprendre et de faire quelque chose de différent... mais enfin,
les fidèles, parce que c’était en fait il y a 1 ou 2 élèves de CP3 et peut-être qu’il y
avait 3 ou 4 de CA1.. tu vois un peu, quand même... on se connaissait quoi, on
pourrait dire comme ça, on se connaissait quand même pas mal...
En ce qui concerne l’analyse des voix, nous avons essayé d’identifier les couches de
prescriptions qui sont à l’origine de l’agir du professeur, comme dans le tableau ci-
dessous :
Voix de l’école 3
Voix du collectif 2
Voix de la didactique 7
Voix du métier 11
Les voix qui prédominent dans les paroles du professeur viennent de la Didactique et
surtout du métier, qui représente l’inconscient du travail de professeur. À partir de ces
considérations, nous nous demandons: avec quelles voix le professeur est-il d’accord,
avec lesquelles n’est-il pas d’accord ? Comment est le dialogue entre ces voix ? Quelles
prescriptions sont acceptées, lesquelles sont réfutées ? C’est ce que montre le tableau
ci-dessous :
317 Communication personnelle, cours à la PUC/SP (Pontifícia Universidade Católica de São Paulo).
Eliane Gouvêa Lousada | 389
Voix de la Véhicule la prescription de parler moins et de faire parler les élèves. Le professeur n’est
Didactique pas toujours d’accord avec cela et affirme l’importance du temps de parole du professeur.
Voix de Véhicule les notions/idées créées à l’intérieur de l’école, comme : le programme du CA
l’école (cours avancé) et la prescription d’arriver dix minutes avant le cours. Paulo accepte la
voix de l’école avec certaines restrictions, comme par exemple la difficulté d’intégrer les
deux manuels
Voix du A travers cette voix, Paulo parle au nom du collectif de travail, en soulignant le caractère
collectif individuel du travail du professeur et la difficulté à gérer l’excès de matériel.
Voix du Exprime les convictions du professeur, ou les auto-prescriptions, avec lesquelles il est
métier souvent d’accord. Les thèmes évoqués sont liés au besoin de gagner du temps/de ne pas
perdre de temps, profiter des moments, être dynamique, être clair, équilibrer les
différents niveaux des apprenants, reconstituer les groupes, faire des choses différentes
pour intéresser les élèves.
À partir du tableau ci-dessus, on peut remarquer qu’il y a deux voix que le professeur
accepte, mais avec des restrictions : celle de la Didactique et celle de l’école. Paulo
montre souvent un désaccord ou une restriction par rapport à celles-ci, en raison de la
difficulté de les suivre ou au manque de temps. Ces restrictions et désaccords sont
liés :
a) au rôle du professeur qui doit parler le moins possible et laisser plus d’espace
à la prise de parole des élèves. Il montre qu’il n’est pas tout à fait d’accord
avec cette notion ;
b) aux outils matériels (artefacts) que l’école met à disposition du professeur (la
quantité de matériel, par exemple) ou que l’école attend que le professeur
élabore (les fiches de compréhension orale).
En revanche, le professeur finit par exprimer ses opinions sur le travail enseignant
dans cette école à travers la voix du collectif, en présentant ce qu’il imagine que tous
les professeurs ressentent ou pensent. À travers la voix du métier, l’enseignant ex-
plique et justifie son agir en salle de classe, en soulevant des aspects qui ne sont
préconisés ni par la voix de la Didactique, ni par la voix de l’école. Dans le tableau
précédent, nous pouvons voir que la voix du métier considère que le travail enseignant
englobe la conception, l’organisation et la régulation du milieu de travail des élèves,
pour qu’il y ait apprentissage. Cette voix est également responsable pour l’émission de
jugements sur les outils (artefacts) qui sont mis à disposition du professeur dans son
milieu de travail, caractérisant ainsi une dimension plus quotidienne du travail ensei-
gnant. Dans cette perspective, cette voix s’approche plus des aspects pris en compte
par l’ergonomie de l’activité, c’est-à-dire, les « manières de faire » le travail.
Ainsi nous pouvons conclure, contrairement à ce que l’on peut penser dans les pro-
grammes de formation, que le professeur n’est pas quelqu’un qui exécute tout
390 | Le discours de l’enseignant
Une autre voix mise en évidence dans les analyses est celle du collectif qui exprime la
situation de travail vécue par les professeurs de l’école, rapportée par le professeur
volontaire. Elle semble montrer le travail réel du professeur, stressé par l’excès de ma-
tériel et par le manque de temps pour tout gérer. Voilà pourquoi un plus grand
dialogue avec les instances prescriptives semble essentiel pour équilibrer les désirs et la
possibilité de leur réalisation.
En résumé, le genre professionnel du métier de professeur serait inscrit dans une véri-
table tradition de la profession qui rend superflue l’explicitation de quelques
prescriptions. Cependant, puisque plusieurs manières d’agir ne sont pas une applica-
tion stricte des théories de la didactique, il serait intéressant de les expliciter dans des
programmes de formation de professeurs. Même si elles sont disponibles dans le col-
lectif de travail, leur explicitation pourrait faciliter l’insertion de nouveaux professeurs
ou même contribuer à aider les professeurs en difficulté. Ces manières d’agir seraient
ainsi un objet d’apprentissage pour l’appropriation du genre professionnel, de même
que les manières de faire le texte sont un objet d’apprentissage pour l’appropriation
des genres textuels.
Il semble donc important d’accorder une place à cette voix du métier, à cette manière
de faire le travail du professeur, comme une manière de souder le collectif et comme
une alternative à la solitude du métier de professeur. Dans cette perspective, prendre
en compte la voix du métier pourrait être une piste pour une nouvelle voie dans le
domaine de la formation de professeurs.
3. L’apprentissage de la lecture
à Madagascar
Muriel Nicot-Guillorel
En cette période où la « qualité de l’éducation » constitue un défi majeur pour les pays
en développement, il leur est demandé d’adopter des « standards internationaux » en
termes de curricula pour l’enseignement fondamental. Une voie en vogue pour soute-
nir ces réformes curriculaires est celle de la formation à distance des enseignants
(souvent contractuels communautaires) dans des réseaux d’écoles de proximité avec, si
possible, le recours aux supports numériques. Ces pays sont-ils prêts à faire face à ce
défi ? En effet, pour pouvoir tirer profit de la masse des connaissances écrites, acces-
sibles entre autres par Internet, encore faut-il que les utilisateurs soient des lecteurs «
compreneurs » autonomes capables de sélectionner et de traiter les informations
écrites.
À Madagascar, la tradition écrite est ancienne. Concernant les usages sociaux de l’écrit,
la fracture entre monde urbain et monde rural reste cependant marquée. Par ailleurs, la
Grande Ile est encore largement sous la dépendance de l’importation d’ouvrages,
l’édition locale étant encore insuffisamment soutenue. Néanmoins, depuis plus de
deux cents ans, la lecture et l’écriture sont enseignées en L1 et en L2. Depuis l’époque
de l’introduction de l’écriture au début du XIXe siècle, Madagascar, comme les autres
pays du Sud, a développé sa propre culture de l’écrit, même si une partie importante
de sa population demeure analphabète et relativement à l’écart des pratiques sociales
lettrées318. Ainsi, même dans les sociétés dites de « culture orale », l’écrit occupe dé-
sormais une place incontournable. Les Objectifs du Millénaire pour le Développement
(OMD, 2000319) font de « l’alphabétisation universelle » une priorité pour permettre à
tous d’avoir accès aux biens culturels de l’écrit et d’en produire de nouveaux, éléments
concourant au développement économique des pays. L’institution privilégiée pour la
transmission de la culture écrite est, pour la grande majorité des enfants de ces pays,
l’école.
318 Le gouvernement malgache indique un taux d’alphabétisation chez les adolescents/adultes âgés de
plus de 15 ans de 56 % (MAP, 2006 : 59). Pour la population analphabète, l’utilisation de l’écrit est inévi-
table et nécessite des stratégies de substitution.
319 Les Objectifs du millénaire pour le développement sont huit objectifs que les États membres de
l’ONU ont convenu d’atteindre d’ici à 2015. La déclaration fut signée en septembre 2000
(http://www.un.org/fr/millenniumgoals/ 15/05/10).
394 | L’apprentissage de la lecture à Madagascar
320 Muriel Nicot-Guillorel, 2009, « L’appropriation de l’écrit en contexte scolaire multilingue. La situation
de Madagascar. Des résultats des élèves en malgache et en français aux pratiques d’enseignement-
apprentissage » Université de Haute-Bretagne, Rennes 2, PREFics (EA 3207), Directeur de thèse : Thierry
Bulot.
321 Aide-programme gérée par le Ministère de l’Éducation nationale malgache financée par l’Agence fran-
est en discussion
323 Il n’existe pas à l’INFP de travaux de « recherche » sur les apprentissages fondamentaux du primaire. Il
en est de même à l’Université ou à l’ENS. De plus, le corps d’inspection est en voie d’extinction. De ce
fait, très peu de personnes sont spécialisées sur les apprentissages de base de l’école. Face à ce déficit, la
stratégie ministérielle est d’avoir recours massivement aux « opérateurs » occidentaux, en leur demandant
un appui à la fois pour les programmes d’études de l’école, la conception de dispositifs de formation à
moindre coût et la formation de formateurs.
324 Voir : La contextualisation : l’exemple francophone africain.
Muriel Nicot-Guillorel | 395
coloniale à l’origine d’une coexistence parfois difficile, illustrée par exemple par la fluc-
tuation du statut du français dans les différentes constitutions du pays. Pour autant, ce
sont encore les deux langues les plus utilisées aujourd’hui sur la Grande Ile. Le mal-
gache, avec ses nombreuses variantes, est la langue de communication généralisée
dans le pays alors que le français apparaît fortement investi des fonctions profession-
nelles et institutionnelles. Le nombre de locuteurs francophones (compétences larges
ou réduites) avoisine les 20 %. À l’école primaire, ces deux langues sont toutes deux
langues de scolarisation (langues enseignées et langues d’enseignement). Cette entrée
sociolinguistique a donc permis de mieux comprendre le contexte langagier dans le-
quel les enseignants exercent leur métier, la coexistence des langues dans une même
société, la complémentarité ou l’opposition de leurs fonctions, pouvant retentir sur
leurs didactiques. Ainsi, dans la mesure où la pratique du français est essentiellement
scolaire, on peut alors mieux percevoir les difficultés des enseignants confrontés à la
double problématique du Français Langue Seconde (FLS) et du Français Langue de
scolarisation (FLsco), auxquelles il convient d’ajouter leur propre insécurité linguis-
tique pouvant freiner l’usage du langage indispensable aux activités métacognitives en
classe en français.
Malgache Français
Langue austronésienne Langue romane
325 Conférence des Ministres des pays ayant le français en partage (15 pays membres).
Muriel Nicot-Guillorel | 397
le TCF, soit : 3086 élèves répartis dans 132 classes de CP2 (deuxième année du pri-
maire) et 122 classes de CM2 (cinquième année du primaire) pour un total de
249 enseignants.
À la fin du CP2, en malgache, la majorité des enfants sont capables de déchiffrer des
mots isolés mais très peu semblent autonomes face à un texte écrit (seulement 27,6 %
des élèves en moyenne ont plus de 50 % de bonnes réponses). Il s’agit pourtant de la
première langue de scolarisation des enfants. Il en est de même en français (avec des
scores sensiblement moins élevés dès que la connaissance de la langue à l’oral entre en
jeu) : les mots isolés sont mieux lus que le texte. L’hypothèse d’un déficit pédagogique
dans l’enseignement de la lecture compréhension à l’école a donc alors été posée.
En fin de CM2, les résultats pour la lecture compréhension apparaissent dans le ta-
bleau 3
398 | L’apprentissage de la lecture à Madagascar
Comme prévisible, en fin de scolarité primaire, les élèves comprennent plus facilement
un texte en malgache qu’un texte en français (score global en malgache : 62,66 %, vs
43,20 % en français). Les résultats en malgache indiquent cependant que près de 30 %
des élèves obtiennent moins de 50 % de réussite dans les tâches de compréhension.
On observe que, dans les deux langues, il est plus difficile de répondre à des questions
nécessitant un raisonnement (inférence, interprétation) que de trouver des réponses
écrites littéralement dans le texte. L’hypothèse que les faibles résultats enregistrés en
compréhension en L2, et dans une proportion relativement importante aussi en L1,
soient une conséquence de l’enseignement de la lecture, tel que pratiqué à Madagascar,
a donc été de nouveau envisagée.
Cette étude quantitative a été l’occasion de présenter, pour chaque composante mobi-
lisée en lecture, les données scientifiques sur lesquelles s’accorde actuellement la
communauté internationale, en s’appuyant sur les apports du courant social et culturel,
de la psychologie cognitive, des recherches inter- et trans-linguistiques, etc. afin que les
synthèses opérées puissent éventuellement plus tard être utilisées par les cadres mal-
gaches. À l’issue de l’analyse descriptive des résultats CP2 et CM2, cinq hypothèses de
Muriel Nicot-Guillorel | 399
recherche ont été discutées. De cette discussion, deux éléments majeurs peuvent être
retenus.
Premièrement, au sein des écoles publiques, la variable « merina326 » apparaît significa-
tive dès le CP2 pour deux compétences en lecture : la conscience phonémique (+5,62,
t = 3,30, p<.001) et la lecture de mots isolés (+8,84, t = 5,87, p<.001). Les enfants du
public scolarisés en région merina arrivent donc à comprendre plus facilement le code
qui régit la langue écrite malgache que ceux scolarisés dans les régions où d’autres va-
riantes du malgache sont usuelles. Ce résultat, à confirmer par de nouvelles études,
inviterait à porter une attention particulière sur les aspects phonologiques nécessaires à
l’appropriation de la langue écrite officielle, en travaillant de manière explicite les con-
trastes phonologiques existant entre les variantes dialectales et le malgache officiel.
Cette tendance se confirme en CM2. À la différence du CP2 où la liaison n’était pas
statistiquement significative, la variable « merina » pèse maintenant sur la compréhen-
sion de texte écrit (+4,9, t = 3,69, p<.001), dans le secteur public.
Le deuxième élément à retenir est l’influence significative du niveau linguistique de
l’enseignant sur les résultats en français des élèves. Malgré son évidence, ce résultat est
une indication précieuse dans un contexte de réforme éducative. Les élèves scolarisés
avec des maîtres dépassant le niveau seuil (B1) obtiennent de meilleurs résultats pour
lire en français comme l’indiquent ces données en CP2 : tous secteurs de scolarisation
confondus, la variable « B1 et + » se montre particulièrement forte en compréhension
de texte : +9,29 points (+9,29, t =4,61, p<.001) et dans une moindre mesure en cons-
cience phonémique : +4,46 points (+4,86, t= 2,22, p <.02). Cette tendance, qui se
vérifie aussi en CM2, souligne l’importance d’un renforcement des compétences lin-
guistiques des maîtres en français pour qu’ils puissent atteindre au minimum le niveau
seuil (B1) afin de mieux aider les élèves.
Représentations induites
PROPOSÉE À L’ENFANT
↓
Représentations induites
Matériel
ÉLÈVE ↓
Représentations
induites
On sait que les discours produits à l’école face à un texte reposent à la fois sur les as-
pects sociaux des rituels conversationnels (contrat scolaire, éthos communicatif329) et
les aspects cognitifs contenus dans les actes de langage. Le choix d’analyse de l’étude
est de s’intéresser aux aspects cognitifs engagés dans les tâches de lecture proposées à
l’école.
Puisque le travail des enseignants est instrumenté, l’évolution des prescriptions en lec-
ture à Madagascar est décrite pour voir dans quelle mesure elle peut influencer le
travail des enseignants aujourd’hui. En effet, les prescriptions sédimentent, pour une
certaine part, le genre professionnel et font ainsi partie de la mémoire du métier. On
en retient que Madagascar, souvent comparée aux pays africains, se distingue par une
ailleurs, le plan EPT332 malgache (2008) en cours, largement appuyé par la Banque
mondiale (maîtres contractuels communautaires, niveau BEPC, s’auto-formant dans
les « cercles de qualité d’échanges d’expériences ») est actuellement cité en exemple
dans les pays bénéficiant de l’initiative Fast Track. Evidemment cette idée est sédui-
sante, mais quelle sera la nature des « échanges d’expériences » sur l’apprentissage de la
lecture, compte tenu des schèmes professionnels repérés, si des appuis à la « médiation
sémiotique » des concepts relatifs aux processus mis en jeu dans l’acte de lire ne sont
pas fournis aux maîtres pour leur permettre d’explorer d’autres manières de faire ?
Face à cette problématique, il nous semble que les choses auront du mal à évoluer tant
que la réflexion sur l’appropriation des savoirs ne s’effectue pas au sein des pays du
Sud par les nationaux eux-mêmes. On sait que très peu d’universités de ces pays se
sont emparées de la question de l’éducation fondamentale, même pour ce qui relève
de l’apprentissage de la lecture dans leurs L1. Par ailleurs, lorsqu’ils existent, les tra-
vaux entrepris ne sont pas mutualisés. C’est pourquoi, avec l’aide des financements
internationaux, un centre de recherche et de collaboration à disposition des pays méri-
terait d’être mis en place, pouvant bénéficier des contributions des meilleurs
spécialistes internationaux en la matière. En effet, la problématique de l’apprentissage
de la lecture est commune à de nombreux pays : « apprendre à lire en langue(s) natio-
nale(s) et en langue(s) officielle(s) au sein d’une culture professionnelle des enseignants
ne permettant pas actuellement à suffisamment d’élèves d’être des lecteurs autonomes
en fin de primaire ». Pour améliorer l’apprentissage de la lecture en L1 ou en L2, il
conviendrait d’abord de réfléchir aux aspects linguistiques des langues nationales en y
intégrant les apports de la psychologie cognitive avec ses données inter-langues
(langues à caractère : accentuel, agglutinant, tonal, etc.) et les données trans-langues de
la perspective plurilingue. Il s’agirait aussi de croiser les regards in situ sur les réalités
scolaires et de se confronter concrètement aux situations extrêmes d’enseignement
(classes pléthoriques, classes multigrades, manque de matériel, etc.) pour réfléchir en
commun aux pratiques professionnelles et examiner la faisabilité de leurs transforma-
tions possibles. Par ce centre, suite à des expérimentations concrètes en classe,
pourraient être créés de nombreux supports contextualisés et mutualisables, en déve-
loppant en particulier les outils vidéo.
D’autre part, on suppose aujourd’hui que les formateurs ont le recul suffisant pour
créer spontanément leurs situations de formation. Mais pour créer des situations, en-
core faut-il pouvoir anticiper sur les attendus en termes d’apprentissage et donc
comprendre les processus mobilisés par les élèves. Or souvent, les représentations des
formateurs sur les apprentissages fondamentaux sont figées à l’image de ce qu’ils fai-
saient eux-mêmes quand ils étaient élèves. Peu d’entre eux sont donc capables de
mener une analyse réflexive des pratiques enseignantes dans une perspective
d’amélioration, leurs efforts actuels portant sur l’assimilation des nouveaux termes de
l’ingénierie éducative importée. C’est à ce niveau que la qualité de formation nous
semble devoir être interrogée. Outre la priorité à accorder à l’apprentissage de la lec-
ture, l’appui aux formateurs nous apparaît donc essentiel : leur fournir des activités de
332 Plans d’action nationaux d’éducation pour tous 2001-2005 dans le cadre des Objectifs du Millénaire.
404 | L’apprentissage de la lecture à Madagascar
formation « clé en main » avec les outils afférents, ensemble didactique conçu et expé-
rimenté avec certains d’entre eux, pourrait permettre d’apporter aux maîtres, plus ra-
rapidement que la simple diffusion de manuels scolaires, davantage de recul pour
comprendre les processus cognitifs en jeu dans les apprentissages. Des formations
basées sur des illustrations concrètes d’activités de classe (vidéo) pourraient, par leur
médiation, enclencher des procédures réflexives plus rapides chez les maîtres. Ainsi,
les formateurs seraient mieux armés pour accompagner les instituteurs, dans la classe,
vers la « zone de développement professionnel » qu’il convient d’urgence d’explorer.
En ce sens, les deux suggestions émises se rejoignent et pourraient s’alimenter réci-
proquement.
Le fait d’avoir réalisé cette étude en immersion professionnelle interculturelle est pro-
bablement la caractéristique majeure du travail relaté ici, situation apportant un atout
incontestable pour une connaissance fine du terrain de recherche. Cependant,
l’immersion professionnelle engendre aussi de nombreuses contraintes, notamment
celui bien connu du paradoxe de l’observateur. De plus, l’urgence de l’action profes-
sionnelle amène parfois à dévier des attendus académiques universitaires. Nous avons,
par exemple, effectué de nombreuses synthèses de données communément partagées
dans le monde de la recherche, au risque d’alourdir la thèse, afin d’en assurer la com-
préhension par les différents destinataires visés. Par ricochet, cet effort de synthèse
nous a amenée à approfondir nos propres connaissances interdisciplinaires tout en
réalisant un protocole scientifique répondant à des questionnements majeurs en coo-
pération (la formation des maîtres, en particulier en français), ce qui a orienté de fait
un certain nombre de nos actions techniques quotidiennes. C’est là ce qui caractérise
cette étude : sa dynamique de recherche-action au plus près du concret de notre activi-
té professionnelle, les suggestions émises pouvant aussi, éventuellement, alimenter les
réflexions en cours dans les pays en développement.
4. La prise en compte par des
enseignants de français langue
seconde des facteurs d’ordre
culturel en contexte pluriculturel
adulte au Québec
Shenaz Bhanji-Pitman333
333 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : modes d’échange communicatif,
culturel en contexte pluriculturel adulte au Québec, Université du Québec à Montréal, Montréal. », thèse de doc-
torat en éducation sous la direction de Monsieur Claude Germain et Madame Louise Langevin.
406 | La prise en compte par des enseignants de français langue seconde des facteurs d’ordre culturel
335 Dans ce texte, le genre masculin est utilisé de manière générale afin d’alléger le texte
Shenaz Bhanji-Pitman | 407
culée et solide et qui a également contribué à réduire mon anxiété lors de moments de
découragement.
Pendant l’élaboration du cadre théorique de référence qui a servi à clarifier et à déve-
lopper les concepts ayant émergé dans la problématique, un va-et-vient fréquent entre
ces deux chapitres s’avérait absolument essentiel pour s’assurer de la cohérence entre
la problématique, la question de recherche et le contenu du cadre théorique. Il importe
de souligner que cette démarche itérative a permis de repérer la répétition de certains
détails se rapportant aux concepts dans les chapitres précités. Par conséquent, il a été
nécessaire de retravailler la problématique afin de n’y retenir que l’essentiel pour
mettre à jour l’état du malaise scientifique.
Signalons que le plus grand défi dans la rédaction du cadre théorique avait trait au dé-
veloppement d’un discours argumentatif. Par conséquent, la consultation de certains
écrits (Gohier, 2000 ; Van Der Maren, 1995) a permis de renforcer la cohérence et la
logique de la trame discursive et argumentative. De plus, la comparaison des versions
antérieures du texte me permettait de constater que je comprenais de mieux en mieux
comment développer le discours argumentatif.
Pour ce qui est du contenu du cadre théorique de référence, mon enthousiasme
m’avait amenée à explorer les cinq dimensions de la variabilité culturelle dans la taxo-
nomie de Hofstede et Hofstede (2005). Toutefois, il importe de noter que grâce aux
conseils expérimentés de mes directeurs, n’ont été retenues que deux dimensions afin
de respecter les normes doctorales quant à la longueur de la thèse.
Enfin, il importe de souligner que ma préoccupation constante d’une articulation co-
hérente entre le cadre théorique et méthodologique a contribué à orienter les choix
méthodologiques dont il est question dans la section suivante.
faits observés, des entrevues semi-dirigées ont permis de compléter les données issues
des observations. Enfin, compte tenu de la pertinence de certains aspects méthodolo-
giques se rapportant à l’observation et aux entrevues, il importe d’en exposer les
détails.
4.2.2.1. Observation
Même si l’observation permet de mieux connaître la réalité de la salle de classe et
mène ainsi à une compréhension plus profonde du phénomène à l’étude, l’observateur
se trouve souvent devant un grand nombre de difficultés en fonction de l’objectif de
l’étude et de la situation observée (Jaccoud et Mayer, 1997 ; Trognon, 1987). Par
conséquent, de nombreuses lectures ont été essentielles pour se préparer à faire face à
certains biais inhérents à ce mode particulier de collecte de données (Allwright, 1988 ;
Arborio, Fournier et Singly, 2005 ; Germain, 1999 ; Good et Brophy, 1994, 2000 ;
Jaccoud et Mayer, 1997 ; Laperrière, 2003 ; Pambianchi, 2003 ; Postic et De Ketele,
1988 ; Puren, 1999 ; Waxman, Tharp et Hilberg, 2004). Compte tenu des limites de cet
article, la discussion se limitera à l’attitude d’un chercheur sur le terrain et à
l’importance du rôle de l’étude préliminaire pour mettre au point un certain nombre
de considérations méthodologiques.
D’entrée de jeu, l’arrivée du chercheur sur le terrain exige certaines précautions afin de
perturber le moins possible le fonctionnement habituel du milieu observé. Rétrospec-
tivement, les qualités humaines et professionnelles du chercheur sont incontournables
pour pouvoir établir sa crédibilité sur le terrain (Angers, 1996, 2005 ; Lessard-Hébert,
Goyette et Boutin, 1995 ; Spradley, 1980). Ainsi, dès les premiers contacts avec les
responsables et les enseignants, il a été primordial d’adopter une attitude empreinte de
chaleur, de respect et d’absence de jugement à l’égard des participants afin d’établir
une relation de confiance. De plus, l’apport de leur expérience professionnelle dans
l’avancement de la connaissance a été constamment valorisé et la pertinence de leur
contribution soulignée. Il semble opportun de mentionner l’effet boule de neige qui
s’est produit pendant la phase de travail sur le terrain. En fait, le grand nombre
d’enseignants ayant découvert le projet de recherche par l’intermédiaire d’un(e) col-
lègue déjà participant à l’étude et manifestant de l’intérêt à y participer dépassait
largement mes attentes. Il convient de préciser que cet effet non planifié a été agréa-
blement surprenant et extrêmement facilitant pour le travail sur le terrain. Toutefois,
par rapport à l’observation directe et en fonction des objectifs visés, dès le début de la
recherche, la précision de mon implication en tant que chercheuse dans le milieu s’est
avérée utile pour résoudre des situations délicates. Rapportons le cas d’un enseignant
désireux de se porter volontaire pour participer à la recherche, mais qui a insisté pour
que ses pratiques soient évaluées à la fin des observations. Il a donc été nécessaire de
réitérer la nature descriptive et non évaluative de mon étude.
L’élaboration d’une étude préliminaire a été nécessaire pour mettre au point un certain
nombre de considérations méthodologiques tels le choix de l’endroit stratégique pour
pouvoir observer la totalité des interactions tout en atténuant les incidences de ma
présence, l’enregistrement sonore des observations et la préparation d’une fiche
d’observation pour consigner les notes de terrain.
410 | La prise en compte par des enseignants de français langue seconde des facteurs d’ordre culturel
En ce qui concerne la prise de notes, les conseils pratiques abondent dans les écrits
consultés à ce sujet. Toutefois, deux constats s’imposent. Premièrement, ils sont de
divers ordres et leur appellation varie selon les auteurs. Deuxièmement, des modèles
pratiques de fiches d’observation étant quasi non existants, en retenant les
propositions de certains auteurs (Jaccoud et Mayer, 1997 ; Laperrière, 2003 ; Miles,
Huberman et Bonniol, 2003), j’ai élaboré une fiche d’observation avec une démarche
de prise de notes plus personnalisée. Les détails dans le tableau 3.5 extrait de ma thèse
(Bhanji-Pitman, 2009) pourraient s’avérer utiles pour des recherches ultérieures. Ainsi,
sur chaque fiche d’observation, la première rangée spécifie d’abord les détails tels la
date, l’heure, la durée de l’observation, la semaine de la session à laquelle les
observations ont eu lieu, le pseudonyme de l’enseignant observé ainsi que le code du
milieu de travail, le niveau de compétence du groupe-classe et sa composition. Dans la
deuxième rangée, une première série de notes de terrain d’ordre descriptif permettait
de rendre compte de la situation observée de façon concrète et neutre dans la colonne
de gauche. Dans la colonne de droite, l’abréviation C.O., se référant aux commentaires
de l’observateur, a servi à tenir compte de mes réactions, impressions, intuitions,
réflexions, interprétations et prises de conscience relatives à certains faits observés
ainsi qu’à des aspects à approfondir. Enfin, l’abréviation Q a servi à inscrire des
questions potentielles à poser à l’enseignant pendant les entrevues subséquentes.
Par ailleurs, l’épineuse question concernant la sélection des données s’est posée avant
d’aller sur le terrain. À cet égard, certains chercheurs (Laperrière, 2003 ; Spradley,
1980) préconisent de passer de l’observation générale à une observation centrée ou
sélective. Cependant, compte tenu de la diversité et de la quantité des phénomènes
présents sur le terrain, il a été important, avant toute observation in situ, de bien saisir
ce qu’est la délimitation d’une unité d’observation afin d’éviter l’accumulation d’une
masse d’informations non pertinentes. Selon Savoie-Zajc (2004), une unité
d’observation fournit un mécanisme systématique permettant d’extraire des données
des comportements observés à partir des notes d’observations et d’autres enregistre-
ments audio ou vidéo. Étant donné que cette unité doit préciser le début et la fin de
l’épisode observé, il a été indispensable d’effectuer l’étude préliminaire d’observation
afin de pouvoir la définir.
Enfin, l’enseignant ayant participé à l’étude préliminaire a suggéré de prévoir une ren-
contre avec les apprenants, quelques jours avant le début des observations. Étant donné
que celle-ci contribuerait à les mettre à l’aise et à atténuer l’effet du chercheur sur le ter-
rain, la proposition de cet enseignant a été retenue pour les observations ultérieures.
Shenaz Bhanji-Pitman | 411
4.2.2.2. Entrevue
Parmi les différentes formes d’entrevues rapportées dans les écrits, la méthode adop-
tée a permis de privilégier l’entrevue semi-dirigée étant donné qu’elle consiste en une
interaction verbale animée de façon souple par le chercheur afin de construire con-
jointement avec l’interviewé une compréhension riche du phénomène à l’étude
(Savoie-Zajc, 2003 : 296)336. Notons que, comme le noyau du canevas d’entrevue por-
tait sur les faits observés en salle de classe afin de comprendre la perspective des
participants à l’étude, il a été nécessaire de préciser que les entrevues étaient de type
« explicatif », un terme qui ne figure pas dans les écrits se rapportant aux différents
types d’entrevues.
Compte tenu de l’importance des considérations d’ordre psychologique pour une pré-
paration adéquate à l’entrevue, les qualités humaines essentielles du chercheur se
révèlent indispensables dès son premier contact avec les participants. En effet, j’ai re-
marqué que plus l’interviewé était à l’aise, plus il participait pleinement pendant
l’échange. Une attention positive inconditionnelle (Boutin, 1997 ; Rogers, 2005) de ma
part s’avérait primordiale pour faire preuve d’ouverture et d’intérêt sincère envers les
propos des participants. Par ailleurs, afin de créer une ambiance et un cadre qui favori-
sent les échanges fructueux, j’ai dû prêter une attention particulière à de nombreux
éléments tels le choix du moment le plus propice à l’entrevue, le lieu le plus favorable
au bon déroulement de l’entrevue ainsi que les mesures prises pour minimiser l’effet
de l’emploi des appareils d’enregistrement. Notons que, comme le noyau du canevas
d’entrevue portait sur les faits observés en salle de classe, il a été important de rencon-
trer les enseignants le plus tôt possible après la fin des observations pour s’assurer
qu’ils n’oublient pas leurs propos. Cependant, selon l’avis de l’enseignant ayant parti-
cipé à l’étude préliminaire, les enseignants ne seraient pas tout à fait disponibles pour
l’entrevue immédiatement après les observations. Selon lui, après trois ou quatre
heures d’affilée de prestation de cours, la disponibilité et la concentration nécessaires
pendant l’échange ne seraient pas à leur optimum. Étant donné qu’il fallait prévoir
approximativement deux heures pour l’entrevue, il a donc été convenu de fixer la ren-
contre quelques jours après la fin des observations, en fonction de la disponibilité des
participants. Toutefois, il importe de préciser que je me suis permis de poser quelques
questions d’ordre général à l’enseignant observé afin de prendre le pouls et de déceler
des indices pouvant améliorer les prochaines observations et les entrevues : « Com-
ment ça a été? », « Comment avez-vous trouvé ça? », « Comment vous sentez-vous? »
sont des exemples de ces questions.
Comme le canevas d’entrevue inspiré de divers écrits consultés à ce sujet (Boutin,
1997 ; Poupart, 1997 ; Savoie-Zajc, 2003 ; Seidman, 1998) pourrait servir de modèle
pour d’autres études, il importe de décrire brièvement ses diverses composantes, cha-
cune comportant un objectif et un contenu spécifiques :
336 Voir: Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables.
412 | La prise en compte par des enseignants de français langue seconde des facteurs d’ordre culturel
Accueil
En vue de créer une atmosphère propice à l’échange qui mettait le participant à l’aise
et l’amenait ainsi à participer de façon optimale, une période d’accueil a été prévue au
début de l’entrevue. Ainsi, la rencontre a démarré avec des remerciements soulignant
l’appréciation de l’intérêt que le participant a témoigné au projet de recherche et du
temps qu’il y a consacré.
Questions sur les faits observés
Cette partie de l’entrevue en constituait le noyau, car les questions portaient sur les
faits observés en salle de classe et visaient à faire expliciter par les enseignants le sens
qu’ils conféraient à la prise en compte des modes d’échange communicatif des appre-
nants. Ainsi, la formulation de toutes les questions posées pendant l’entrevue devait
rester neutre pour éviter tout jugement de valeur. De plus, un soin particulier a été
apporté à la formulation de questions ouvertes, courtes, simples et claires en vue
d’aider le participant à organiser sa pensée.
Formation et expérience professionnelles
Quant aux détails se rapportant à la formation et à l’expérience professionnelles des
enseignants ainsi qu’au milieu d’enseignement, il a été jugé préférable de poser des
questions immédiatement avant la fin de l’entrevue, et ce, pour deux raisons. D’abord,
certains chercheurs déconseillent de poser une série de questions fermées concernant
les données sociodémographiques au début de la rencontre, car elles risquent de blo-
quer la dynamique des échanges. Par conséquent, ils recommandent de reporter cette
prise de données plutôt à la fin de l’entrevue (Boutin, 1997 ; Lessard-Hébert, Goyette
et Boutin, 1995 ; Pourtois et Desmet, 1988). Enfin, un autre recommande d’utiliser le
potentiel de concentration au début de l’entrevue pour poser des questions sur les faits
observés relatifs à l’objet d’étude (Savoie-Zajc, 2003).
Clôture
Un soin particulier a été pris pour que l’entrevue se conclue sans brusquer le partici-
pant qui a consacré du temps et de l’énergie à partager ses pensées et parfois ses
sentiments les plus intimes. Pour ce faire, l’entrevue se clôturait graduellement avec
trois questions qui amenaient le participant à prévoir la fin de l’entrevue. Sur le plan
technique, la première question permettait de savoir si le participant avait d’autres
choses à ajouter. Ensuite, sur le plan humain, la technique de debriefing (Boutin, 1997) a
été utilisée pour poser la deuxième question qui consistait à recueillir ses sentiments
relatifs à l’expérience de sa participation aux observations et à l’entrevue. Enfin,
l’entrevue se bouclait par des remerciements en guise d’appréciation de la collabora-
tion et de l’apport du participant à la recherche.
et interprétation des données », a permis ensuite d’attribuer un sens aux résultats en les
reliant aux objectifs de la recherche ainsi qu’aux concepts découlant du cadre théo-
rique de référence.
Le chapitre « présentation et analyse des données » a été divisé en deux parties princi-
pales, la première portant sur une analyse descriptive des données issues des
observations dans huit classes de FLS et la seconde comportant des explications des
enseignants provenant des données des entrevues. Les suggestions de Miles et al.
(2003) ont été prises en compte pour inclure des tableaux récapitulatifs qui ont contri-
bué à synthétiser l’ensemble des données présentées et à exposer les liens entre les
faits observés et les explications de chaque enseignant. Enfin, un résumé concluait
chacune des huit descriptions. Malgré les mesures précitées, l’abondance des données
recueillies a rendu la lecture de ce chapitre ardue. Par conséquent, deux constats
s’imposent a posteriori. Premièrement, rappelons que dans le deuxième chapitre por-
tant sur le cadre théorique de référence, le nombre de dimensions de la variabilité
culturelle de la taxonomie de Hofstede et Hofstede (2005) a été réduit de cinq à deux
pour donner suite à la rétroaction de mes directeurs. Toutefois, compte tenu de nom-
breux modes d’échange communicatif qui en résultaient, il aurait été préférable de
limiter l’étude à une seule dimension afin d’alléger le canevas d’observation. Deuxiè-
mement, étant donné que l’observation des pratiques de huit enseignants a généré une
abondance de données, le fait de limiter l’étude à six enseignants au lieu de huit aurait
contribué à réduire le volume considérable du chapitre IV.
Enfin, il importe de préciser qu’à toutes les étapes du projet, les procédures utilisées
faisant part des conventions employées ont été détaillées systématiquement dans la
thèse afin d’en accroître la crédibilité.
Pour terminer, je constate que mes études doctorales furent très fécondes en appren-
tissage. Sur le plan rédactionnel, les réécritures de la thèse m’ont permis surtout de
développer le discours argumentatif et l’esprit de synthèse, des composantes essentielles
dans le parcours doctoral. Au point de vue méthodologique, grâce aux divers écrits
consultés ainsi qu’indications de mes directeurs, j’ai appris à adopter une démarche
scientifique. Toutefois, davantage d’ouvrages axés sur les aspects plus pratiques de la
recherche en éducation contribueraient à faciliter le cheminement des chercheurs no-
vices. Des outils concrets reliés aux observations et aux entrevues, par exemple, leur
permettraient d’avancer plus rapidement. Enfin, pour ce qui est de la préparation de la
soutenance, des écrits explicitant le processus et les exigences s’y rapportant aideraient
les doctorants à mieux organiser cette partie culminante et cruciale des études docto-
rales.
5. Les dynamiques plurilingues
identitaires d’enfants migrants dans
une école francophone à Montréal
Elatiana Razafi337
337Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : intersubjectivité, observables, repré-
sentation(s).
416 | Les dynamiques plurilingues identitaires d’enfants
Le paradigme de Morin (1990) se traduit aussi sur le plan éthique et nous avons vu en
quoi les implications et positionnements du chercheur gagnent à inclure ceux de
l’autre (chercheur, informateur, participant, observateur...). Au risque de se noyer dans
la foule de significativités d’une démarche complexe, une visée principale doit per-
mettre de sélectionner, organiser et problématiser les différents observables et
composants de la recherche.
tations antagonistes. Pour caricaturer, le manichéisme attribué aux enfants en fait tan-
tôt des miniatures attendrissantes (« ’ti bouts »), tantôt des figurines effroyables
(« petits monstres »). Cette ambiguïté entre l’affection et l’impatience marque tout au-
tant les discours des professionnels de l’enfance qui peuvent valoriser par là même les
« enfants comme il faut » (enseignant interlocuteur dans Shiose, 1994 : 85). Quelques
interlocuteurs adultes parlent en effet d’enfant(s) ou d’élève(s) « modèle(s) » mais en
situation d’entretien, pouvons-nous approcher l’enfant comme un informateur mo-
dèle ?
L’observatoire des enfants, comme celui des adultes, est avant tout empreint de com-
plexités liées aux conditions de socialisation Kanoute (2002 : 24). L’entretien n’étant
pas un laboratoire immunisé contre ces donnes « sociométriques » (ibid.), la considéra-
tion de chaque enfant ne peut s’uniformiser sous un cadrage normatif où chacun
produirait des réponses idéales. Avec les enfants, l’intention est de prendre en compte
les différentes subjectivités autour d’une thématique commune. Dès lors, le statut de
dominant s’inverse en fonction du domaine d’expertise. Les enfants possèdent les
connaissances biographiques sur lesquelles se fonde le travail de recherche. Dans cette
optique là, j’occupe une position de demandeuse. Les termes de la collaboration avec
les enfants soulignent explicitement leur rôle central. Toutefois, la cumulation des ca-
tégorisations minorisées « enfants », « apprenants », « migrants » et « allophones »
renforce l’idée du déséquilibre imputé par défaut au statut d’« informateurs ». Men-
tionnons également que les représentations socioculturelles peuvent d’autant plus
cristalliser une hiérarchie ascendante adulte - enfant.
Par ailleurs, les inégalités en situation d’observation ou d’entretien relèvent de facteurs
tant situationnels (contrat implicite, distribution des rôles, lieu de rencontre, etc.)
qu’internes aux protagonistes (pratiques et représentations socioculturelles). À cela
s’ajoutent les constructions propres aux enfants qui, aux yeux de l’adulte, ne sont ni
forcément logiques (Moscovici, 2003 : 88-91), ni forcément accessibles. De ce fait, les
échanges interpersonnels ne peuvent être complètement évacués de diverses formes
d’inéquations d’autant plus que certaines d’entre elles servent précisément à délimiter
les pouvoirs d’action de chacun. Les différences d’âge, par exemple, posent implicite-
ment des contraintes d’entraide où il peut être socialement convenu que l’aîné offre
conseil et assistance au plus jeune. Néanmoins, chacun est tenu de respecter
l’autonomie et les compétences de l’autre. Je fais ainsi confiance aux participants pour
occuper l’espace d’échange qu’ils ont consenti d’investir personnellement tandis
qu’eux, engagent le sérieux d’un professionnel dans le traitement de leurs confidences.
338 Voir : Les principales méthodes et leurs techniques de construction des observables.
422 | Les dynamiques plurilingues identitaires d’enfants
2000 ; 2007). Or, ce qui est pertinent dans un « corpus » pour moi ne l’est pas forcé-
ment pour un autre. La citation et l’explicitation du corpus sont alors tributaires de
l’accessibilité du travail, voire de sa validité. Les entrées en questions sont à la fois
construites et induites à partir du terrain. Nous avons vu que leur nature est tant dis-
cursive que non discursive de par les observations combinées. Dans un double souci
de pertinence et de faisabilité, les observables font nonobstant l’objet d’une sélection
critique avec une priorité accordée à ceux explicitement sollicités (questionnaires, en-
tretiens, ateliers de discussion, autoportraits). Outre l’intérêt que représente chacune
de ces entrées, leur combinaison permet aussi de pallier aux faiblesses respectives :
« Il ne peut y avoir d’indice mesurable de façon simple et immédiate dans un
questionnaire […] mais des traces qui ne peuvent prendre sens que dans un cadre
théorique plus large : théories de la mobilité et de la domination sociales, du
changement linguistique, de l’identité sociale, etc. Il nous semble que l’insécurité
linguistique est moins un objet en soi, susceptible d’être saisi par des méthodes
adéquates, qu’une hypothèse interprétative, une construction théorique basée sur
une pluralité d’observables » (De Pietro et Matthey, 1993 : 121)
Le corpus multisectoriel comprend ainsi différentes « traces » telles qu’elles ont pu être
remarquées, identifiées et (re)transcrites. Il se veut contextualisé car il inclut et reflète
des conditions de coproduction situées. La dimension contextuelle tient aussi de
l’inclusion d’observables non sollicités, indicateurs d’autres réalités du terrain : affi-
chages, disposition des salles de cours, codes vestimentaires. La prise de photos et de
notes a permis d’archiver ces traces supplémentaires. Enfin, les informations du ter-
rain issues de discours publics, textes de lois (documents officiels) ou articles
journalistiques sont intégrés au corpus en tant que documentation complémentaire.
Afin de clairement référencier ces différents observables non sollicités dans le corps
du texte et à l’instar d’autres initiatives (Feussi, 2006 : 297), la codification suivante a
été adoptée :
- notes de terrain (N.D.T.) ;
- corpus non sollicité (C.N.S.) ;
- documentation complémentaire (D.C.).
À plus d’un titre, faire le récit d`une recherche consiste à faire aussi le récit d’un pan
de vie. Lors de la rédaction de ce texte, une image s’est progressivement imposée à
moi : celle de la cure psychanalytique. Mais si cure il y a, c’est plutôt une cure épisté-
mologique, d’après la définition donnée par Barbier à l’épistémologie : « [elle] n’est pas
la science du savoir, mais un acte réflexif sur les actes de production de savoirs. »
(2008 : 138). Certes, ce compte rendu de recherche traduit un souci personnel de mise
au clair ; mais il véhicule surtout une volonté de partage. Partage d’une expérience de
recherche ancrée dans un temps, dans un espace, dans un parcours et dans un projet
de vie spécifiques, mais qui se voudrait utile pour les différents destinataires de cet
ouvrage. Dès lors, toute la difficulté a été pour moi de démêler ce qui dans le témoi-
gnage tient du privé et ce qui tient du public et donc du publiable. Personnellement, j’y
ai trouvé mon compte ; c’est désormais à chaque lecteur de décider s’il l’y trouve aussi.
inscrite dans une démarche d’investigation aux contours beaucoup plus larges et
volontairement flous.
Pour ce faire, j’ai choisi de suivre les étapes suggérées par Albarello (2007 : 24), à sa-
voir : le champ de la recherche, les angles disciplinaires, les objectifs, le cadre
théorique, les hypothèses et les moyens disponibles, auxquels j’ajouterai les résultats.
C’est sans doute là un choix arbitraire, dont le caractère linéaire traduit mal la com-
plexité de l’expérience. J’espère néanmoins que peu à peu le lecteur verra se dessiner le
motif qui lentement se trame pour lui dans le tissu des mots.
339La configuration didactique « correspond à un mode de découpage des questions traitées et donne aux
objets ainsi isolés une cohérence suffisante dans un cadre théorique identifiable. » (Daunay et Reuter,
2008 : 63)
Haydée Silva | 427
340« il y a naturalisation lorsque les construits du chercheur à des fins d’interprétation […] se substituent
de fait aux objets du monde physique et social dont la recherche a pour mission de rendre compte » (Bar-
bier, 2008 : 137).
428 | Le jeu en classe de langue
rogeant d’abord le jeu en général, pour s’intéresser ensuite au jeu en éducation, au jeu
dans la didactique générale, au jeu dans la didactique des langues, au jeu dans la didac-
tique du français, au jeu dans la didactique du français langue étrangère… Il s’agit de
« privilégier […] les aspects métathéoriques et reprendre certains débats épistémolo-
giques pour construire des armatures conceptuelles » et « clarifier les notions qui
nourrissent le discours pédagogico-linguistique […] pris[es] dans un écheveau de réfé-
rences […] qu’il faut démêler » (Chiss, 1989 : 51).
La réflexion autour du jeu peut donner lieu à la production de connaissances nouvelles,
obtenues selon une démarche d’investigation rigoureuse, dont les résultats peuvent et
doivent être communiqués : autant de critères identifiés par Beillerot dans sa définition
minimale de la recherche (1991 : 19-21). La recherche sur le jeu peut aussi devenir une
recherche « au second degré », si elle inclut « une dimension de critique et de réflexivité
[…] sur ses sources, ses méthodes, ses modes de travail » ; une « systématisation dans le
recueil de données » ; et une « présence d’interprétations énoncées selon des théories
reconnues et actuelles qui contribuent à permettre l’élaboration d’une problématique
aussi bien que l’interprétation des données » (Beillerot, 1991 : 19).
La question de la légitimité et la légitimation scientifiques, particulièrement sensible
dans le domaine de la didactique des langues, devient plus épineuse lorsqu’elle im-
plique des praticiens-chercheurs. À l’instar de Bucheton, je suis convaincue que « les
rôles des différents acteurs ne sont pas seulement complémentaires mais hybrides,
interactifs. » (2008 : 207-208), car divers rôles peuvent échoir, diachroniquement ou
synchroniquement, à un seul et même acteur. Même si pour certains cette posture
semble poser problème341, dans mon expérience la mobilité entre espace universitaire
et espace professionnel est un atout.
Depuis le carrefour de la recherche, la formation, la conception d’outils pédagogiques
et l’enseignement, voire la prescription et l’expertise, je propose d’élargir à ces diffé-
rents univers la réflexion de Clerc à propos des liens qui unissent recherche et
formation, « univers distincts par le statut social de leurs acteurs respectifs et par les
finalités qu’elles poursuivent », qui entretiennent « un rapport étroit, hiérarchisé » mais
dont les liens « ne se réduisent pas être cette hiérarchie : la formation est un des objets
de la recherche, elle en utilise les productions et l’interpelle au sujet des problèmes
qu’elle contribue à faire émerger et à nommer ; la recherche conteste les contenus de
la formation, lui propose des voies nouvelles » (2008 : 5).
341 Je passe ici sous silence des anecdotes montrant à quel point chercheurs et praticiens peuvent poser
On notera que ces trois objectifs correspondent en partie à des objectifs de recherche
proprement dits mais qu’ils renvoient déjà aussi à la praxis ludique. En cela, ma vision
de la recherche est moins proche du modèle production / transmission / application
que de celui « qui lie action, production de savoirs et construction des sujets humains. » (Barbier,
2008 : 133).
- le jeu en classe de langue peut aller au-delà des jeux de lettres, jeux de mots et
autres jeux directement rattachés à la compétence linguistique, pour mettre
l’accent sur diverses activités langagières de communication et/ou sur
différentes compétences langagières ou générales.
342 Tels ceux des projets interuniversitaires développés par des organisations comme l’Agence universi-
en plus présente dans d’autres milieux linguistiques et culturels. Cet exemple souligne
l’importance de ne pas cantonner la réflexion didactique et pédagogique sur le jeu au
monde de l’enfance, où elle reste plus largement présente encore aujourd’hui.
Dans le même souci d’élargissement et de diversification, il semble essentiel de ne pas
s’en tenir aux regards psychologiques et sociologiques, en intégrant divers angles
d’approche susceptibles de mieux éclairer les très nombreux enjeux du phénomène
ludique dans la classe. Évidemment, cela ne revient pas à abandonner définitivement
la psychologie et la sociologie, dont on peut encore attendre de nombreux apports, par
exemple à travers un approfondissement de la question de l’attitude ludique propice à
l’apprentissage (voir par exemple la notion de flow proposée par Csikszentmihalyi,
1979). Quant à la sociologie, elle pourrait entre autres contribuer à déterminer si la
notion de pratiques sociales de référence, développée par Martinand (1986) et souvent
reprise en sciences de l’éducation, peut être articulée avec profit avec la question du
jeu tel qu’il apparaît dans les pratiques scolaires et extrascolaires des apprenants et des
enseignants.
On devrait aussi accorder un intérêt tout particulier à la question du plurilinguisme et
du pluriculturalisme, car la place accordée aux outils ludopédagogiques varie selon les
horizons culturels. Un autre thème de recherche encore appelé à se développer forte-
ment est celui de l’articulation entre jeu, langue et technologies de l’information. Le
jeu peut enfin ouvrir des pistes intéressantes en association avec les différents phéno-
mènes et objets de la didactique évoqués au cours de cet ouvrage collectif :
motivations, inscriptions dans le social, programmes, compétences, dispositifs, sup-
ports, interactions, stratégies, opérations didactiques, évaluation, littéracie, etc.
Contextualiser, comparer,
relativiser : jusqu’où aller ?
Pierre Martinez343
Nous partons, dans ce texte, de l’idée que le modèle pédagogique s’est complexifié et
que le cadre de référence et les instruments d’analyse de la recherche en didactique
s’en sont trouvés bousculés. Le travail de diffusion de la réflexion lui-même, avec ses
caractères propres qui sont la lisibilité, l’ouverture, la possibilité des transferts, s’en
ressent.
Nous examinons ensuite quelques-uns des facteurs qui pèsent sur une épistémè de la
didactique : sa solidification et sa structuration scientifique – son utilité – le statut so-
cial des chercheurs et la visibilité de la production en didactique – le rejet de
l’instrumentalisation idéologique – l’élargissement conceptuel et la capacité à intégrer
les acquis.
La didactique est une praxéologie, qui ne peut fonctionner sur le flou, sur l’im-pensé,
sur un non-dit des théories sous-jacentes aux pratiques observées. Or les écueils sont
nombreux : comment partager « les mêmes pratiques sociales de références », être en
mesure de faire que les pistes de réflexion convergent et autorisent l’émergence d’un
modèle global, comment prendre en compte les questions que n’ont pas su résoudre
les sciences connexes et, enfin, trouver des modes d’accès aux résultats. Notre abou-
tissement n’est certainement pas un relativisme absolu, entre opinion, croyance et
« vérité », mais la conscience aiguë d’une fragmentation des objets et des méthodolo-
gies, qui ne saurait aller sans une éthique du chercheur.
Il faut, pour bien comprendre l’état des choses, revenir en arrière, à un moment-clé de
la recherche en didactique pour le monde universitaire. C’est dans les années quatre-
vingt : alors prospérait l’approche communicative – du moins sur une partie de la pla-
nète, mais l’on faisait « comme si » son avancée inexorable avait démodé toutes les
343 Les termes suivants sont définis dans l’index notionnel et factuel : cadre de référence, transferts de
344 Les sources sont nombreuses : Richards et Rodgers, 1986 ; Puren, 1988 ; Germain, 1993 ; Martinez,
1996 (2008)...
345 En France, cette période correspond à ce qu’on a appelé l’universitarisation des formations à
l’enseignement du FLE.
346 Voir sur ces débats Puren, 1997, p. 5.
Pierre Martinez | 437
Ce modèle sera repris et aménagé dans Stern, pour distinguer, de bas en haut, au Ni-
veau 1, des concepts fondamentaux (bases théoriques ou philosophiques), au Niveau
2, des catégories générales de l’enseignement des langues (niveau « politique »), au Ni-
veau 3, des activités d’enseignement / apprentissage (comportement de la classe /
observation de la classe : niveau d’action pratique). Ce qui fait l’intérêt de ce modèle
général est souligné par Stern lui-même347, d’abord son caractère « compréhensif »,
c’est-à-dire global et transférable de langue à langue, ensuite son fonctionnement dy-
namique (l’interactivité des composantes), et enfin le traitement multifactoriel de
l’enseignement qu’il instaure et qui conduit à une approche multidisciplinaire (Stern ne
parle pas d’interdisciplinarité). Le champ de recherche d’une didactique générale des
langues s’inscrit dans ce cadre tracé.
Certes, dans la lignée des propositions faites antérieurement ou parallèlement dans le
monde anglo-saxon (Mackey, 1962, Strevens, 1977, Spolsky, 1978) et ailleurs (en
France, notamment Coste, Galisson, 1976), cet essai de modélisation n’est qu’un point
de départ : « Towards a conceptual framework », écrit modestement Stern. Il met, d’une
part, en valeur l’importance d’une réflexion approfondie sur le processus enseigne-
ment/apprentissage, et d’une théorisation qui tente de dégager le champ didactique
d’un impensé ou d’un intuitif ascientifique trop souvent évoqué à son propos. Il im-
pose, d’autre part, une vision systémique qui permettra à la fois de souligner les
insuffisances du modèle et de l’autoriser à s’étendre : insuffisances, par exemple,
quand il néglige des facteurs tels que l’économie de l’éducation ou la technologie (ni-
veau 3) ou distingue peu ou apparemment peu (niveau 1) langue maternelle, seconde
et étrangère. Mais l’horizon est ouvert à une extension des facteurs, en direction des
sciences cognitives, de l’ingénierie de formation, des théories de la communication et
de l’information influencées par le jeu ou les réseaux internet. La recherche en didac-
tique avait besoin de cette nouvelle frontière.
À la question « quel cadre de référence et quels instruments d’analyse pour la didac-
tique ? », Eddy Roulet, un spécialiste suisse, donne alors une réponse qui ne laisse
aucun doute sur les nouvelles préoccupations, plus larges, des chercheurs : « analyse
des interactions entre natifs ou entre natifs et alloglottes; analyse du discours didac-
tique; analyse des interdiscours des apprenants (comme on parle des interlangues);
analyse des interdiscours de la didactique (réflexif ou prescriptif) » (Roulet in Coste,
1994 : 15). Communication sociale, pratiques transfrontalières, approche fine de pro-
fils d’apprenants, biographies langagières, état des lieux technologique, le « triangle
didactique » n’en finit pas d’interroger autour de lui les sciences humaines et sociales,
mais aussi celles du cerveau ou de la machine. Tout un programme, qui ne se réalisera
qu’au prix de lourds investissements, dont les retombées ne sont pas assurées ni sou-
vent assumées, car bien des ajustements et des adaptations sont nécessaires. « Les
347 H.H. Stern, figure 1.2 : « Les niveaux de bas en haut en pédagogie des langues », 1983, p. 5.
438 | Post-face
L’accumulation des références (où trouver ces textes ?) comme la longueur des
phrases assure plutôt le contraire. Peut-être une bonne mise en page y remédierait-t-
elle ? Nous espérons faire réfléchir nos lecteurs, eux-mêmes futurs « communicants »,
à ces questions dans le cours même de leur lecture.
Pour les contraintes théoriques, elles sont de l’ordre de l’ouverture, de la possibilité
des transferts et de la capacité à synthétiser ce qui n’a pas naturellement vocation à se
laisser faire.
L’ouverture, c’est le refus de l’esprit de chapelle, qui ne caractérise pas per se, les
modes de pensées scientifiques, tributaires des frontières disciplinaires, des lieux de
formation et de pratique, des groupements de recherche et des outils de diffusion des
idées (revues, colloques, réseaux), sans que nous ayons à nous en sentir totalement
coupables, mais pas non plus irresponsables ; la constitution des équipes est bien le
reflet de ces partitions, selon par exemple qu’elles seront constituées de praticiens,
d’universitaires qui n’ont pas eu de classe en responsabilité depuis longtemps, de lin-
guistes, de spécialistes des sciences de l’éducation, etc.
La possibilité des transferts, c’est tout l’intérêt pédagogique d’un outil qui s’affiche ici
comme un guide, une sorte de « manuel » : les exemples qui y sont donnés ne sont ni
tout à fait ceux que rencontrera le lecteur dans son expérience, ni tout à fait différents.
Le danger est grand de ne rien évoquer (les expériences n’étant pas du même ordre
chez le doctorant en début de thèse et chez le chef de projet à dimension [inter-
]nationale) ou de tout amalgamer ; ainsi une référence bibliographique sur
l’épistémologie générale de la didactique des langues ne saurait certainement relever
d’un point de vue, d’un « zooming » de spécialiste. On trouve des éléments de ré-
flexion éclairants sur une articulation nécessaire entre les points de vue dans la
rencontre de Louvain, 2003 (Actes, Defays et coll., 2003) où se posait la question d’une
co-extension (non d’une confusion) de la réflexion en direction du FLM, du FLE et
du FLS, avec le sous-titre « Vers un nouveau partage ? ». Même si dans les travaux
actuels, on voit apparaître des généralisations ponctuelles à la DDLES (Didactique des
Langues Etrangères et Secondes), il manque une théorisation générale des didactiques
des langues étrangères en français et sans doute dans les autres langues. Et la difficulté
de construire cette théorie vient pour partie de l’inachèvement des concepts en jeu, ou
de leur polysémie.
Ainsi en est-il de l’interculturel. Actuellement, le débat sur la culture, vue tantôt
comme ensemble donné à voir, tantôt comme construction individuelle, met au pre-
mier plan la différence culturelle et celle-ci, notamment fondée sur une conception
multiréférenciée, semble un horizon d’attente pour beaucoup de didacticiens des
langues348. L’enjeu n’est pas que didactique et c’est peut-être de là, on le pressent, que
viendra une réflexion dont dépend en partie notre conscience « d’être au monde »
pour le siècle commençant. On mettra seulement un bémol à ce jugement optimiste
en observant qu’il y a loin de la coupe aux lèvres : l’interculturel ne semble pas être
348Un exemple à voir dans les remarquables journées d’études organisées récemment par « Langues’ O»,
Paris : « Au delà de la conception occidentale de l’individu », 2-4 juin 2008, Inalco, Paris.
440 | Post-face
349 CECA - Cultures d’enseignement, cultures d’apprentissage, AUF et FIPF, étude en cours.
Pierre Martinez | 441
350 On a fait, à propos de la linguistique de terrain, la même remarque (Blanchet, 2000 : 12).
442 | Post-face
ils n’ont pas été conçus au départ jusqu’au moment où ils perdent leur signification.
Exemples : comment comparer le « méta » de la relation binaire maître/disciple dans
des types d’enseignements aussi profondément différents que celui de la madrassa,
l’école coranique traditionnelle, celui d’un enseignement SGAV, d’une approche
communicative née finement d’une anthropologie différencialiste à son origine (et
depuis longtemps privée de toute signification, à cet égard, notamment par ses avatars
commerciaux), d’une didactique du plurilinguisme et du pluriculturalisme largement
anticipatrice au regard de ce que sont les cultures éducatives dans des sociétés con-
temporaines, avec leurs tendances mal analysées : ivresse du tout technologique, replis
identitaires ou encore aspirations à une reposante uniformité.
Par ailleurs, la recherche en didactique reste liée à la résolution de questions latentes
dans les sciences connexes. Par exemple, en acquisition, l’indécision entre hypothèse
innéiste et universaliste (mécanisme linguistique naturel, Chomsky) et hypothèse cons-
tructiviste (processus cognitifs généraux, Piaget) ou encore la question de l’âge critique
optimum d’acquisition, etc. On avait le vélo et on avait le moteur, mais on n’a pas pu
inventer le vélomoteur tant que le propulseur n’a pas été convenablement miniaturisé.
Le deuxième ordre de contraintes est sociologique : L’universitarisation des langues
étrangères est récente, le nombre des chercheurs en didactique très faible, parfois in-
certain (un annuaire de la recherche est assez éloquent sur ce point). Par exemple,
nombre de didacticiens publient un peu « honteusement» ou se rachètent, tout au long
de leur carrière universitaire, par des productions en linguistique, en littérature ou en
civilisation, plus « avouables ». Le statut social de la recherche en didactique n’est pas
assuré. G. Zarate (2009 : 18) montre comment la langue d’accès à la publication est
discriminante, comment la possibilité de communiquer en colloque peut être déniée
aux jeunes chercheurs par une quelconque « gérontocratie universitaire locale », com-
ment s’opère difficilement, à travers des « prismes » souvent nationaux la
détermination d’objets de recherche transnationaux recevables et quel rôle jouent des
instances d’évaluation contestables et parfois contestées dans le champ (Martinez in
Zarate, 2008 : 281; Zarate et Liddicoat, 2009 : 60).
Sans doute la recherche en didactique est-elle plus sensible que d’autres à
l’instrumentalisation idéologique : l’objectivité du chercheur se frotte douloureusement
aux politiques de tous poils et dans bien des cas, modélisation scientifique et arrière-
plan idéologique ne nous semblent pas converger. L’espace européen « berceau » idéo-
logique à l’origine d’une nouvelle « manière d’être » (Beacco, 2005) reprend l’antienne
de la « grande maison » qui reste à construire (Neuner, 1998). Y a-t-il là plus qu’un
« mythe fondateur » ?
C’est que le prestige et la diffusion de la recherche sont aussi dépendants de son utilité
telle qu’elle est perçue. Mackey (1972 [1962] : 17-19) pointe du doigt les soupçons qui
pèsent sur l’applicabilité des résultats obtenus dans la recherche didactique, sa fré-
quente absence de rentabilité, les doutes qui affectent les preuves qu’elle dit savoir
rassembler en faveur de telle ou telle hypothèse pédagogique. À cela s’ajoute une ten-
dance courante et bien connue, à voir mettre en question par le grand public l’activité
Pierre Martinez | 443
de sciences humaines, a priori moins convaincantes que ne le sont les sciences dites
« dures » et habillées de blouses blanches.
Il n’en reste pas moins d’indiscutables réussites. On voit, par exemple (Springer, 1996 :
11), que, dans le domaine de la formation des adultes, une réflexion systémique entre-
prise de longue date, pilotée par les besoins de l’économie, a permis des avancées dont
la didactique bénéficiera : mise en place de dispositifs de formation et d’évaluation
« alternatif et concurrent » du modèle traditionnel, celui des unités capitalisables ; indi-
vidualisation de la formation ; ingénierie et recherche de la qualité en formation. Les
modes d’accès aux résultats de la recherche ayant joué, on a eu, en l’occurrence, des
données, produites et stockées qui ne sont pas restées hors d’atteinte, et ont nourri
l’action comme la réflexion.
Il y a, dans un récent numéro de la revue Le français dans le monde, Recherches et applica-
tions, consacré à « La circulation des idées en didactique des langues » (Zarate et
Liddicoat, 2009), quelques articles qui laissent entendre ce dont on pouvait se douter :
l’objet premier, la didactique, dont Coste et Galisson (1976 : 150) écrivaient voici
trente ans : « De tous les termes qui touchent à l’enseignement des langues, c’est l’un
des plus ambigus et des plus controversés », la didactique n’est pas franchement ré-
ductible aux idées toutes faites et il faudra travailler encore un peu sur la
conceptualisation du champ avant de pouvoir en produire une synthèse acceptable.
Modèle pédagogique, cadre de référence et instruments d’analyse nous ont amenés
peu à peu à ceci : s’il faut prendre autant de chemins de traverse, c’est bien parce que
la simplicité, nous dirons même la simplification abusive, ne sauraient être de propos.
Dans son positionnement épistémologique, la recherche en didactique des langues
aboutit non pas à un relativisme absolu entre opinion, croyance et « vérité », mais à
une fragmentation méthodologique qui doit inciter à la plus grande vigilance. Elle est à
la fois instable intérieurement (dans sa construction, son identification comme son
domaine d’extension) et extérieurement (dans ses rapports à son environnement scien-
tifique et social). Cette volatilité n’interdit pas la recherche, elle incite à en mesurer la
difficulté, la richesse, la complexité. Elle invite à s’en donner les moyens et à en voir
les limites. Elle nous rappelle à une éthique, où les déclarations d’intention ne suffisent
pas et où le dogmatisme n’a pas sa place. « Eurêka » − j’ai trouvé − ne se dit guère en
langue didactique.
Index notionnel et factuel
des ressources et compétences locales ou à distance. Elle n’est pas exécutée nécessai-
rement sous le contrôle permanent d’un formateur. ». (François Mangenot, partie C,
14)
Genre discursif (ou genre de discours) : la question de savoir si des discours peu-
vent constituer un genre qui les détermineraient dans un certain nombre d’aspects a
fait l’objet de nombreuses discussions depuis les années 1990. Sophie Moirand (1990,
p. 59) a jeté les bases d’une approche contextuelle du genre par « une analyse qui dé-
crit le fonctionnement des systèmes linguistiques, tels qu’ils s’actualisent dans les
textes et les conversations […] [et] qui permet de comprendre le fonctionnement d’un
domaine, à partir de l’observation de discours qui circulent en son nom ».
Jean-Claude Beacco (2004) questionne la notion du point de vue théorique de trois
perspectives, tandis que Jean-Yves Colin et Florence Mourlhon-Dallies (2004) réinter-
rogent la notion à partir d’un corpus. De son côté, Jean-Paul Bronckart (1997) insiste
sur la détermination interactionnelle socio-discursive, quand le segment de texte peut
être appréhendé comme une expression pré-construite dans un espace professionnel.
On trouvera là un éclairage sélectif rendant compte de la complexité de la définition et
des conséquences méthodologiques qu’entraînent les différentes approches.
Voir également : type, registre, formation discursive
(Patrick Chardenet, partie B, 3.7)
Herméneutique (posture) : posture travaillant le paradoxe suivant : dans les sciences
humaines, on essaie de donner sens à d’autres, à ce qu’ils ont fait, à partir des ques-
tions que l’on se pose pour soi, à partir de l’histoire et des projets du chercheur. La
posture herméneutique place donc à parité celui qui donne sens à l’autre et ce dernier
dans le processus de construction du sens, ce qui redéfinit la saillance et le statut des
« traces » (corpus, autres traces) dans la recherche. (Didier de Robillard, partie A, 2)
Idéologie et statut social de la recherche : la didactique praxéologique est inscrite
dans le champ social et reste donc imprégnée d’idéologie. Le choix des méthodologies
en est un exemple. La nécessité de convaincre que la didactique est fondée scientifi-
quement en est un autre. Décliner les implicites reste une nécessité constante dans la
formation des enseignants comme dans la pratique de classe. La recherche se doit
d’être interventionniste, et elle trouve sa justification dans son utilité, dans une fonc-
tion de médiation sociale, ce qui n’exclut pas la recherche fondamentale. (Pierre
Martinez, post-face)
Imaginaire : aptitude à créer des images, des représentations, des visions, pour ex-
primer sa façon de concevoir sa relation aux autres et au monde, et à mobiliser son
histoire pour mieux se projeter dans l’avenir et dans le changement. (Danièle Moore et
Véronique Castellotti, partie B, 3.8)
Interaction : à partir de l’acception courante (« action réciproque qu’exercent entre
eux des êtres, des personnes et des groupes », Trésor de la langue française ; « Influence
qu’exercent les uns sur les autres des phénomènes, des faits, des objets, des per-
454 | Index notionnel et factuel
Langue étrangère : la langue étrangère est une langue autre que la langue maternelle.
On l’on append par simple contact ou par la voie scolaire à travers des cours, des
stages ou des formations. Le degré d’étrangeté que cette langue suscite varie selon les
individus et dépend des représentations qu’ils possèdent de la distance linguistique,
géographique ou culturelle qui sépare la langue en question de la langue maternelle.
(Estela Klett, partie B, 3.6)
Langue maternelle : c’est la langue acquise pendant l’enfance, celle de la première
socialisation de l’enfant. Elle possède un statut particulier pour celui-ci car il l’acquiert
au fur et à mesure qu’il découvre le monde. C’est donc la langue dans laquelle
l’individu apprend à communiquer, à réfléchir, à conceptualiser et, par conséquent, la
langue qui lui permet de construire sa personnalité et se construire en tant que sujet.
(Estela Klett, partie B, 3.6)
Langue de scolarisation : langue dans laquelle se font les apprentissages scolaires
(savoirs, notions, raisonnements, comportements…), qu’elle soit langue maternelle ou
non. La langue de scolarisation peut notamment être la langue officielle du pays (par
ex. le français en France, le portugais en Angola), une des langues nationales (ex. le
bamanankan au Mali), la langue de l’établissement d’enseignement (le français dans les
établissements français à l’étranger, l’occitan dans les calandretas en France). (Michèle
Verdelhan-Bourgade et Nathalie Auger, partie C, 10)
Macrostructure/microstructure d’un manuel (termes utilisés par Choppin, 1992) :
la structure d’un manuel peut être étudiée sous sa forme macro (organisation
d’ensemble, progression…) ou micro (organisation de chaque partie, leçon, unité ou
page…) (Michèle Verdelhan-Bourgade et Nathalie Auger, partie C, 10)
Manuel : support destiné à un enseignement et à un apprentissage, prenant générale-
ment la forme d’un ouvrage et supposant certaines caractéristiques : simplicité,
maniabilité, organisation en parties dirigée par une progression, visant l’acquisition de
connaissances ou le développement de capacités. (Michèle Verdelhan-Bourgade et
Nathalie Auger, partie C, 10)
Marques transcodiques : ce sont les traces de la langue maternelle ou d’autres
langues dans les productions des apprenants voulant surmonter des obstacles com-
municatifs. L’expression est neutre par rapport aux dénominations « mélange des
langues », « interférences » ou « transferts négatifs » utilisées par les contrastivistes des
années cinquante pour remarquer l’incidence nuisible de la LM dans l’apprentissage.
(Estela Klett, partie B, 3.6)
Métalangage en classe de langue : en vue de la transmission d’une langue, le lan-
gage est « manipulé » : stratégies de simplification, de clarification du sens, de
renforcement de ce qui est en voie d’être acquis. L’objet des échanges étant en grande
partie de faire acquérir des éléments sur le code, la dimension métalinguistique vient
constamment infiltrer le langage de la classe et, là même où on ne la détecte pas de
façon explicite on la retrouve dans l’intention des locuteurs participants à la classe de
langue. (Francine Cicurel, partie C, 13)
Index notionnel et factuel | 457
vision du monde qui est orientée souvent de façon implicite par les différentes com-
posantes de sa culture d’origine. (Shehnaz Bhanji-Pitman, partie D, 4)
Notion : objet cognitif opératoire (c’est-à-dire reconnu comme tel dans un univers de
savoir), constitué par abstraction à partir de propriétés communes à un ensemble
d’objets de cet univers. C’est par un processus de dénomination que la notion, en tant
qu’élément mondain, prend une forme linguistique (création d’un vocable). (Patrick
Chardenet, partie B, 3.7)
Noyau dur méthodologique : ensemble très limité, cohérent et stable de quelques
méthodes (sens 1) combinées et/ou articulées très fortement les unes aux autres et qui
vont déterminer les activités d’enseignement-apprentissage constamment privilégiées
dans la mise en œuvre d’une méthodologie constituée (sens 2). Ex.: le noyau dur de la
méthodologie directe des années 1900 combine les méthodes (sens 1) directe, active et
orale. (Christian Puren, partie C, 9)
Observables : terme utilisé ici pour désigner les « données » de recherche sous le pa-
radigme de l’intersubjectivité. Face au terrain et aux réalités qui s’y coproduisent, les
« observables » signifient des entrées compréhensives, non représentatives et non ab-
solues. (Elatiana Razafimandimbimanana, partie D, 5)
Paradigme réflexif : implique la conjonction entre expérimentation formelle (qu’elle
se construise par l’écriture ou par toute autre médiation sémiotique), et expérience de
soi. Les pratiques didactiques de biographisation des expériences langagières se situent
dans une tradition intellectuelle qui, depuis Montaigne, revendique l’idée selon laquelle
le sentiment de vivre et d’apprendre, loin d’être immédiatement donné, se développe
par un travail qui consiste à convertir en mots le vécu et à verbaliser le ressenti. (Mu-
riel Molinié, partie B, 3.10)
Polyphonie : au sens de Volochinov/Bakhtine (1977), la polyphonie peut être définie
comme la pluralité de voix qui traversent les discours. Dans cette perspective, le dis-
cours est toujours « dialogique », marqué par l’altérité (la présence de l’Autre), puisqu’il
est toujours inspiré par et répond à un Autre. Il est donc toujours traversé par des
voix, dont le degré d’explicitation peut varier. Ainsi, le phénomène de la polyphonie
aurait lieu dans n’importe quel texte, même dans ceux d’apparence plus monologique.
(Eliane Lousada, partie D, 2)
Portfolio : le Portfolio européen des langues est souvent défini comme un moyen
d’évaluation qui permet aux apprenants de garder et de valoriser toutes les preuves de
leurs apprentissages réalisés aussi bien dans le cadre institutionnel que dans d’autres
contextes », (d’après Dobson, 2001, p. 204, notre traduction). (Muriel Molinié, partie
B, 3.10)
Pratiques de transmission : pratiques langagières didactiques (verbales, non ver-
bales, mimogestuelles) et pratiques interactionnelles qu’un locuteur expert met en
œuvre afin qu’un public moins savant puisse s’approprier des savoirs et des savoir-faire.
Ces pratiques dépendent de la culture d’origine des interactants, de la formation de
l’enseignant, de son expérience, et de sa personnalité. (Francine Cicurel, partie C, 13)
Index notionnel et factuel | 459
Récit de vies (et de parcours) plurilingues : dans son récit, le narrateur, quelles que
soient les sources de son plurilinguisme/pluriculturalisme, (qu’ils proviennent d’une
histoire migratoire, d’une trajectoire scolaire ou de formes variées de mobilités sociales
et culturelles), repère et met en scène des événements significatifs de son parcours
culturels, donne du sens à celui-ci et le situe dans une histoire. Ces récits mettent en
scène la manière spécifique avec laquelle chaque sujet plurilingue « historicise » sa di-
versité, reconfigure son identité culturelle, lui donnant de nouveaux contours. (Muriel
Molinié, partie B, 3.10)
Référentiel : ce terme, utilisé dans plusieurs domaines de connaissance, peut être dé-
fini par une base minimum commune, comme un élément ou un ensemble d’éléments
constituant un groupe, un type, une catégorie, un genre, qui implique des conditions
d’appartenance d’un objet, d’un signe, d’une structure à cet ensemble.
Dans la méthodologie des sciences sociales, le référentiel sera l’ensemble auquel les
catégories d’analyse du contenu d’un discours, ou l’orientation du questionnaire doi-
vent correspondre à ce que l’on cherche. En physique, le terme « référentiel » est
utilisé par L. de Broglie comme notion déterminant un cadre ou un système de réfé-
rences. Sur un plan épistémologique, la notion psychologique de « référentiel » est liée
à la psychologie génétique de J. Piaget et s’y définit comme un système composé d’un
ou plusieurs référents et d’une capacité de mise en relations permettant de situer un
être ou un objet dans l’espace. En évaluation, le référentiel est un ensemble constitué
d’éléments qui permettent de donner un sens à l’information traitée, sous la forme de
référents explicites ou implicites, locaux ou généraux.
Ce terme est aujourd’hui fréquemment employé dans les milieux de la formation et de
l’éducation sous les formes et dans les acceptions suivantes :
- un champ scientifique, cadre ou système de références par rapport auquel
l’explication d’un phénomène observé va être fournie (Ardoino, J. ; Berger,
G., 1989, D’une évaluation en miettes à une évaluation en actes, ANDSHA, Matrice).
Le référentiel est un « système de références, constituant une optique, un type
de lecture, une perspective d’analyse privilégiés » ;
- un « catalogue d’objectifs hiérarchisés dans le système des unités
capitalisables » (Nunziati, G., 1987 : « Pour construire un dispositif
d’évaluation formatrice », dans Cahiers pédagogiques, n° 280) ;
- un « ensemble des normes de l’évaluateur » (ibid.) ;
- l’ « ensemble des outils qui permettent de conduire des tâches d’analyse et de
synthèse [...] avec les modèles de références qui le sous-tendent » (ibid.).
Dans le cadre de cet ouvrage, nous définirons le référentiel comme l’ensemble des
éléments connus (implicites ou explicites) auxquels renvoient les critères qui permet-
tent de porter un jugement sur un objet concret, symbolique ou conceptuel. Ces
éléments connus pouvant être une(des) théorie(s), un(des) domaine(s) de connaissance
épistémologiquement déterminé(s), des échelles (de valeurs, de classement, de catégo-
risation), des ensembles articulés d’objectifs, de buts et de finalités. Comme le montre
G. Figari (1994, Évaluer : quel référentiel ?, De Boeck, Bruxelles), toute activité évaluative
Index notionnel et factuel | 461
appréhendées par le biais des traces énonciatives laissées par l’énonciateur dans son
dire ou encore par les images des manuels qui peuvent mériter un examen
sémiologique. (Nathalie Auger, partie C, 11)
Représentations sociales : chaque groupe humain construit une grille évolutive
d’interprétation du monde naturel et social relativement partagée au sein de ce groupe.
Les classifications signifiantes de cette culture, dont la ou les langues qui y sont in-
cluses constituent un moyen essentiel, sont transmises aux membres du groupes
(notamment via l’éducation des enfants, les idéologies, les croyances religieuses) et
proposent/imposent, des connaissances tendant vers des croyances, dont le noyau est
stabilisé et contient des hiérarchies de valeurs et des enjeux idéologiques. (Philippe
Blanchet, partie A, 1.1)
Rétro-anticipation : dialectique des représentations que se fait le chercheur de
l’histoire (la sienne, celle de la recherche, de ses groupes sociaux de référence) et de
celles qu’il se fait de sa projection dans l’avenir, puisqu’il interprète des éléments du
passé (par exemple un corpus) à la lumière de ce en vue de quoi il travaille, et cet « en
vue de » est issu d’une transformation de la macro-/micro-historicité du chercheur
(Robillard, 2008). (Didier de Robillard, partie A, 2)
Savoirs banalisés : savoirs divulgués qui entrent dans le stock de connaissances ency-
clopédiques, dit souvent culture générale ; ils peuvent alors se présenter sous forme
d’opinions, puisque pour les fonder le locuteur/citoyen ordinaire ne peut invoquer
que l’autorité de ses sources d’information. Ils peuvent se fondre avec ou être assimi-
lés par les savoirs ordinaires. (Jean-Claude Beacco, partie A, 3)
Savoirs divulgués (ou de vulgarisation, transposés, transmis, didactisés, diffusés...) :
formes prises par les savoirs savants tels qu’ils sont diffusés/divulgués par différentes
canaux de transposition. Ils sont mis en circulation par les institutions éducatives et
par les médias accessibles au grand public (c’est-à-dire à des non spécialistes de ces
disciplines). (Jean-Claude Beacco, partie A, 3)
Savoirs d’expertise (ou experts) : connaissances nées des pratiques professionnelles
et fondes essentiellement sur une capacité de diagnostic et d’analyse des situation Les
enseignants de langues sont des « sujets expérimentés » en mesure d’agir avec efficaci-
té grâce à des connaissances spécialisées et au recours à des situations type déjà. Ces
savoir agir sont spécifiques à certaines catégorie de tâches ou de contextes
d’intervention. (Jean-Claude Beacco, partie A, 3)
Savoirs ordinaires (ou sociaux ) : ces connaissances sont constitutives des représenta-
tions sociales ; ce sont des « explications du monde » ad hoc et prêtes à l’emploi. Elles
sont simples, d’application large et facilement mobilisables. Leur légitimité leur vient
de ce qu’elles sont très diffusées. Ces croyances sont indispensables à la vie sociale et
notamment à la communication verbale, où elles assurent une certaine forme
d’économie cognitive, si elles sont partagées. (Jean-Claude Beacco, partie A, 3)
Savoirs savants (ou académiques, universitaires, scientifiques...) : connaissances pro-
duites par une communauté scientifique ; elles se définissent par leurs modalités des
Index notionnel et factuel | 463
tive ethnographique dégage des traits spécifiques à la communauté qu’il étudie. (Fran-
cine Cicurel, partie C, 13)
Transferts de concepts et de technologies : une extension de la réflexion en direc-
tion de domaines nouveaux constitue toujours une prise de risque épistémologique. La
généralisation d’un concept (« interculturel »), d’une référenciation (« CECRL »), d’une
méthodologie (« pédagogie de projet ») est pourtant chose courante dans un champ
global comme celui de l’enseignement des langues et des cultures. Le monde est loin
de partager les mêmes pratiques de référence, mais la réinterprétation de ce qui est
transmis (ou imposé) par les lieux de constitution de la didactique, est un facteur de
prise de conscience, de prise de position aussi, face à l’idéologie dominante, et, sou-
vent, suscite une créativité surgie du contexte. (Pierre Martinez, post-face)
Transposition didactique : le concept de transposition didactique porte au départ sur les
transformations indispensables que subissent les savoirs savants quand ils deviennent
des savoirs scolaires pour qu’ils soient enseignables/apprenables, en fonction des con-
textes et des publics auxquels ils sont enseignés. Il a ensuite été étendu à la
transposition des savoirs professionnels, plus largement à tous les savoirs experts, et enfin à
l’ensemble des pratiques sociales (elles-mêmes éventuellement décrites et analysées via
des savoirs savants). Cela inclut dès lors les savoir-faire et les savoir-être. (Philippe Blanchet,
partie B, 1 et partie C, 1)
Travail de l’histoire : selon H.G. Gadamer (Histoire et vérité), indispensable travail
d’explicitation de la pertinence de l’histoire et de l’expérience qui a construit celui qui
tente de construire le sens des autres, parce que cela influence le sens qu’il leur confère
(par exemple dans une recherche). (Didier de Robillard, partie A, 2)
Travail prescrit : cette définition a été proposée dans le cadre épistémologique des
Sciences du Travail (ergonomie, psychologie du travail, etc.) dont un des objectifs
premiers a été de comprendre les écarts le travail prescrit et le travail réel (compris ici
comme le travail qui est effectivement réalisé). Dans cette perspective, le travail pres-
crit concerne ce qui est demandé par l’organisation, l’entreprise, l’institution. Selon
Goigoux (2002), on pourrait parler, dans le domaine du travail enseignant, de
l’ensemble de ce qui est défini par l’institution scolaire et qui est communiqué aux en-
seignants pour les aider à concevoir, à organiser et à réaliser leur travail. Cela peut
concerner l’élaboration de directives à un niveau national, régional, institutionnel, lo-
cal, etc. (Eliane Lousada, partie D, 2)
Travail réalisé (activité réalisée) : cette définition a été proposée dans le cadre épisté-
mologique des Sciences du Travail (ergonomie, psychologie du travail, etc.). Le travail
réalisé pourrait être considéré comme celui qui peut être observé au moment de la
réalisation de la tâche de travail. (Eliane Lousada, partie D, 2)
Valeurs dans la recherche : reconnaître que les recherches pédagogiques ne sont pas
« neutres » (Michael Byram, partie A, 4).
Références bibliographiques
citées dans le texte
ABOLOU, C., (2006), « De l’apport de l’information statistique à la constitution des corpus des français
populaires africains : cas du français populaire d’Abidjan », Le français en Afrique, n° 22, pp. 107-
126.
AGAR, M., (1991), « The biculture in bilingual », Language in Society, n° 20, pp. 167-181.
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE, (2000), Enseignement du français langue
seconde : un référentiel général d’orientations et de contenus, EDICEF-AUF, Paris.
AGIER, M., (2004), La sagesse de l’ethnologue, L’œil neuf, Paris.
AHERN, T. C., PECK, K. L., et LAYCOCK, M., (1992), « The effects of teacher discourse in computer-
mediated discussion », Journal of Educational Computing Research, n° 3, vol. 8, pp. 291-309.
ALBARELLO, L., (2007), Apprendre à chercher. L’acteur social et la recherche scientifique, De Boeck,
Bruxelles.
ALBERO, B., et THIBAUT, F., (2004), « Enseignement à distance et autoformation à l’université: au-
delà des clivages institutionnels et pédagogiques ? » dans Saleh, I., et Bouyahi, S. (éd.),
Enseignement ouvert et à distance, épistémologie et usages, Lavoisier, Paris, pp. 35-52.
ALIDOU, H., et MALLAM GARBA, M., (2003), « Évaluations des expériences d’utilisation de langues
africaines dans l’enseignement de base en Afrique », Association pour le Développement de
l’Education en Afrique.
ALLWRIGHT, D., (1988), Observation in the language classroom, Longman, London.
ALTET, M., et VINATIER, I., (2008), Analyser et comprendre la pratique enseignante, PUR, Rennes.
AMBLARD, H., BERNOUX, P., HERREROS, G., et LIVIAN, Y.-F., (1996), Les nouvelles approches
sociologiques des organisations, Seuil, Paris.
AMIGUES, R., (2004), « Trabalho do professor e trabalho de ensino » dans Machado, A. R. (dir.), O
ensino como trabalho: uma abordagem discursiva, Eduel, Londrina.
AMIGUES, R., (2003), « Pour une approche ergonomique de l’activité enseignante » dans Amigues, R.,
Faïta, D., et Kherroubi, M. (dir.), Métier enseignant, organisation du travail et analyse de
l’activité, Skholê, hors série. 1, pp. 5-16.
AMIGUES, R., (2002), « L’enseignement comme travail » dans Bressoux, P. (dir.), Les stratégies
d’enseignement en situation d’interaction, Note de synthèse pour Cognitique, Programme École et
Sciences Cognitives, Paris.
ANGERS, M., (2005), Initiation pratique à la méthodologie des sciences humaines (4e éd.), Éditions CEC, Anjou,
Québec.
ANIS, J., (1998), Texte et ordinateur, l’écriture réinventée ?, De Boeck, Bruxelles.
APOTHELOZ, D., et GRIZE, J. B., (1987), Langage, processus cognitifs et genèse de la communication,
Travaux du Centre de Recherches Sémiologiques, n° 54, Université de Neuchâtel.
466 | Références bibliographiques
ARBEX, M., (2001), « La diversité culturelle dans les méthodes de FLE utilisées au Brésil », Dialogues et
Cultures, n° 44, pp. 92-98.
ARBORIO, A.-M., FOURNIER, P., et SINGLY, F.D., (2005), L’observation directe (2e éd.), Armand Colin,
Paris.
ASSELAH-RAHAL, S., et BLANCHET, P. (dir.), (2007), Plurilinguisme et enseignement des langues en Algérie :
rôles du français en contexte didactique, Éditions Modulaires Européennes, Fernelmont.
ASSOCIATION POUR LE DEVELOPPEMENT DE L’EDUCATION EN AFRIQUE, (2006),
Éduquer plus et mieux. Écoles et programmes d’alphabétisation et développement de la petite
enfance : comment assurer l’efficacité des apprentissages ?, Compte-rendu de la biennale de
l’éducation en Afrique Libreville Gabon 27-31 mars 2006, ADEA /Paris, IIPE/Paris.
AUGER, N., (2007), Constructions de l’interculturel dans les manuels de langue, Editions Modulaires
Européennes, Fernelmont.
AUSTIN, J., (1962), How to do things with words, Clarendon Press, Oxford.
AUTHIER-REVUZ, J., (2001), Palavras incertas: as não-coincidências do dizer, Editora da Unicamp, Campinas.
BADINI, A., (1994), « Le français, langue nationale burkinabè : aberration historique ou exigence du
Burkina contemporain ? » dans Direction Générale de l’Institut National d’Alphabétisation
(dir.), Les langues nationales dans les systèmes éducatifs du Burkina Faso : état des lieux et perspectives,
Actes du colloque organisé du 2 au 5 mars 199[3] à Ouagadougou, MEBAM-DGINA,
Ouagadougou, pp. 120-130.
BAKHTINE, M., (1984), Esthétique de la création verbale, Seuil, Paris.
BAKHTINE, M., (1981), textes signés Volochinov 1926 et 1930, « Le discours dans la vie et le discours
dans la poésie », « La structure de l’énoncé », dans Todorov, T., Mickhaïl Bakhtine, Le principe
dialogique, suivi de Écrits du Cercle de Bakhtine, Seuil, Paris, pp. 179-215.
BAL, W., (1983), « Introduction », dans IFA, Inventaire des particularités lexicales du français en Afrique
noire, EDICEF/AUF, Paris.
BALATCHI, R., (2005), «Les déictiques : des subjectivèmes ?», dans Écho des études romanes, n° 2, vol. 1,
pp. 23-30. Disponible sur : http://www.eer.cz/files/eer_I-2-02-balatchi.pdf (16/08/09).
BALES, R. F., (1950), « A set of categories for the analysis of small group interaction », American
Sociological Review, pp. 257-263.
BANGE, P., CAROL, R., et GRIGGS, P., (2005), L’apprentissage d’une langue étrangère : cognition et interaction,
L’Harmattan, Paris.
BANGE, P., (1992), « A propos de la communication et de l’apprentissage en L2, notamment dans ses
formes institutionnelles » dans AILE, no 1, publié par l’association ENCRAGES.
BANGE, P., (1992), Analyse conversationnelle et théorie de l’action. Hatier-Credif, Paris.
BARBIER, J.-M., (2008), « Entretien de Jean-Marie Barbier par Françoise Clerc », Recherche et formation, nº
59, pp. 133-140.
BARDIN, L., (1977), L’analyse de contenu, PUF, Paris.
BARONI, R., et JEANNERET, T., (2009), « Différence et pouvoirs du français. Biographie langagière et
construction de genre », dans Huver, E., et Molinié, M. (dir.), Praticiens et chercheurs à l’écoute du
sujet plurilingue. Réflexivité et interaction biographique en sociolinguistique et en didactique, Université de
Picardie.
BARONI, R., et JEANNERET, T., (2009), Autobiographie du sujet plurilingue, Projet de panel pour le
Colloque VALS-ASLA intitulé « Les compétences langagières dans la formation et dans la vie
professionnelle. Transitions et transformations », Zurich, 4-6 février 2010.
BARONI, R., et JEANNERET, T., (2008), « Parcours de vie, identité féminine et trajectoire
d’apprentissage », Langage et société, n° 126, pp. 101-124.
BARRÉ-DE MINIAC, C., (2006), « Les pratiques de littératie des adolescents et des jeunes adultes »,
dans Pasa, L., Ragano, S., et Fijalkow, J. (dir.), Entrer dans l’écrit avec la littérature de jeunesse, ESF
éditeur, Paris.
Références bibliographiques | 467
BARRÉ-DE MINIAC, C., et REUTER, Y. (dir.), (2006), Apprendre à écrire au collège dans les différentes
disciplines, INRP, Lyon.
BARRÉ-DE MINIAC, C., (2004), « Savoir lire et écrire dans une société donnée », Revue française de
linguistique appliquée, vol. VIII, pp. 107-120. Disponible sur : http://www.cairn.info/revue-
francaise-de-linguistique-appliquee-2003-1.htm (24/07/2009).
BARRÉ-DE MINIAC, C., (2003), « La littéracie : au-delà du mot, une notion qui ouvre un champ de
recherches variées », Revue suisse des sciences de l’éducation, n° 25, vol. 1, pp. 111-124.
BARRÉ-DE MINIAC, C. (dir.), (2003), La littéracie. Vers de nouvelles pistes de recherche didactique,
Lidil, n° 27.
BARTHELME, B., (2000), Une philosophie de l’éducation pour l’école d’aujourd’hui, L’Harmattan, Paris.
BATESON, G., et al., (1981), La nouvelle communication. Textes recueillis et présentés par Y. Winkin, Le
Seuil, Paris.
BAUDE, O., (2007), « Aspects juridiques et éthiques de la conservation et de la diffusion des corpus
oraux », Revue française de linguistique appliquée, n° 1, vol. 12, pp. 85-97.
BAUDELOT, C., et ESTABLET, R., (2009), L’élitisme républicain. L’école française à l’épreuve des
comparaisons internationales, Seuil, Paris.
BAUDELOT, C., CARTIER, M., et DÉTREZ, C., (1999), Et pourtant ils lisent …, Le Seuil, Paris.
BAUDELOT, C., (1989), Le niveau monte, Le Seuil, Paris.
BAUDIN, M., et ROSNAVAS, P., (1993), L’alphabétisation en français des adultes indochinois : vers un
apprentissage de la tolérance à l’ambiguïté. Rapport de recherche, Service d’interprète et d’aide
aux réfugiés indochinois, Montréal.
BAUTIER, E., (2004), « Formes et activités scolaires : secondarisation, reconfiguration et différenciation
sociale », dans Ramognino, N., et Vergès, P. (dir.), La langue française hier et aujourd’hui, Politiques
de la langue et apprentissages scolaires, Presses de l’Université de Provence, Aix-en –Provence.
BAUTIER, E., (2002), « Du rapport au langage : question d’apprentissages différenciés ou de
didactique ? », Pratiques, n° 113-114, Metz.
BAZERMAN, C., et PRIOR, P., (2005), « Participating in emergent socioliterate worlds. Genre,
disciplinarity, interdisciplinarity », dans Beah, R., et al. (éd.), Multidisciplinary perspectives on literacy
research, Hampton Press, Cresskill (NJ), pp. 133-178.
BEACCO, J.-C., (2007), L’approche par compétences dans l’enseignement des langues, Didier, Paris.
BEACCO, J.-C, CHISS, J.-L., CICUREL, F., et VÉRONIQUE, D. (dir.), (2005), Les cultures éducatives et
linguistiques dans l’enseignement des langues, Actes du colloque : La didactique des langues face aux
cultures linguistiques et éducatives, (12-14 décembre 2002), PUF, Paris.
BEACCO, J.-C., (2005), « Métamorphoses de l’ailleurs. Éléments pour une histoire de la notion de
situation en didactique du français langue étrangère » dans Barbot, M.-J., Castellotti, V., Chiss J.-
L., et al. (dir.), Plurilinguisme et apprentissages, Hommages à Daniel Coste, ENS LSH, Lyon, pp. 59-68.
BEACCO, J.-C., BOUQUET, S., et PORQUIER, R., (2004), Le niveau B2, un référentiel, Didier, Paris.
BEACCO, J.-C., (2004), « Trois perspectives linguistiques sur la notion de genre discursif », dans Langages,
numéro 153. Disponible sur : http://www.cairn.info/revue-langages-2004-1-page-109.htm
(27/10/2010).
BEACCO, J.-C., (1999), « Les communautés discursives » et « L’actualité des sciences astronomiques
dans les quotidiens : le gai savoir » dans Beacco, J.-C. (dir.), L’astronomie dans les médias, Presses
de la Sorbonne nouvelle, Paris, pp. 11- 23 et pp. 199-226.
BEACCO, J.-C., (1990), « L’intervention didactique et les variables culturelles » dans Beacco, J.-C., et
Lehmann, D. (dir.), Publics spécifiques et communication spécialisée. Le français dans le monde, Recherches et
application, pp. 8-16.
BEAUD, S., (1998), Guide de l’enquête de terrain - Produire et analyser des données ethnographiques,
Éditions La Découverte, Paris.
468 | Références bibliographiques
BEAUNE, D., et REVEILLERE, C., (1996), « L’entretien clinique en psychopathologie », dans Beaune,
D., et Réveillere, C., Psychologie clinique et pathologique, Gaétan Morin éditeur, Montréal, pp. 18-23.
BECKERS, J., (2002), Développer et évaluer des compétences à l’école: vers plus d’efficacité et d’équité,
Labor, Bruxelles.
BEILLEROT, J., (1991), « La Recherche : essai d’analyse », Recherche et formation, nº 9, pp. 17-31.
BELIN, O., (2007), « Expérience et recherche qualitative : appréhender "en complexité" des situations
d’appropriation des outils d’intelligence collective », Recherches Qualitatives, hors série n° 3,
pp. 540-556. Disponible sur : http://www.recherche-qualitative.qc.ca/hors_serie_v3/Belin-
FINAL2.pdf (12/10/07).
BELZ, J. A., et THORNE, S. L. (éd.), (2006), Internet-mediated Intercultural Foreign Language Education,
Thomson Heinle, Boston.
BELZ, J. A., (2001), «Institutional and individual dimensions of transatlantic group work in network-
based language teaching», ReCALL, nº 13, vol. 2, pp. 213-231.
BENNETT, M. J., (1993), «Towards ethnorelativism: A developmental model of intercultural sensitivity»,
dans Paige, R. M. (éd.), Education for the intercultural experience, Intercultural Press, Yarmouth, ME.
BENVENISTE, E., (1966), Problèmes de linguistique générale, Gallimard, Paris.
BERELSON, B., (1952), Content analysis in communication research, Free press, Illinois.
BERRENDONNER, A., (1999), « Histoire d’une transposition didactique : les types de phrases » dans
TRANEL, n° 31, pp. 37-54.
BERRIER, A., (2001), « Culture et enseignement de l’oral en français langue seconde: quel cadre et quels
aspects présenter en classe », Les Langues Modernes, n° 1, pp. 12-18.
BERTAUX, D., (1989), « Les récits de vie comme forme d’expression, comme approche et comme
mouvement », dans Jobert, G., et Pineau, G. (dir.), Histoires de vie, Tome 1, L’Harmattan, Paris,
pp. 17-38.
BERTAUX, D., (1980), L’approche biographique. Sa validité méthodologique, ses potentialités, Cahiers
internationaux de sociologie, LXIX, n° 2, juil.-déc. 1980, pp. 198-225.
BERTHIER, N., (1998), Les techniques d’enquêtes, Armand Colin, Paris.
BERTOCCHINI, P., COSTANZO, E., et PUREN, C., (1998), Se former en didactique des langues, Ellipses,
Paris.
BERTOLETTI, M.- C, et DAHLET, P., (1984), « Ébauche d’une grille d’analyse », Le Français dans le
monde, n° 186, Hachette-Larousse, Paris.
BERTUCCI, M.-M., et CORBLIN, C. (éd.), (2007), Enseigner les langues d’origine, Le Français
Aujourd’hui, n° 157.
BERTUCCI, M.-M., et CORBLIN, C., (2004), Quel français à l’école ? Les programmes de français face à
la diversité linguistique, L’Harmattan, Paris.
BESSE, H., (1987), « Langue maternelle, étrangère et seconde », Le français aujourd’hui, n° 78, pp. 9-18.
BESSE, H., (1964), « Les exercices de conceptualisation ou la réflexion grammaticale au niveau 2 », Voix
et Images du CRÉDIF 2, CRÉDIF, Paris, pp. 38-44.
BHANJI-PITMAN, S., (2009), Prise en compte par des enseignants de français langue seconde des
facteurs d’ordre culturel en contexte pluriculturel adulte au Québec, Université du Québec à
Montréal, Montréal.
BIANQUIS-GASSER, I., (2004), « Technique de l’observation participante », dans Mucchielli, A.,
Dictionnaire des méthodes qualitatives en sciences humaines, Armand Colin, Paris.
BILLIEZ, J., et LAMBERT, P., (2009), « À propos d’une recherche impliquée dans un lycée
professionnel : quelques réflexions sur l’observation participante », dans Pierozak, I., et Eloy, J.-
M. (éd.), Intervenir : appliquer, s’impliquer ?, L’Harmattan, Paris.
Références bibliographiques | 469
BILLIEZ, J., et LAMBERT, P., (2008), « Autour de "savoirs" sur les langues dans une classe de seconde
professionnelle », dans Candelier, M., Ioannitou, G., Omer, D., et Vasseur, M. T. (dir.),
Conscience du plurilinguisme : pratiques, représentations et interventions, PUR, Rennes, pp. 79-91.
BILLIEZ, J., et TRIMAILLE, C., (2001), « Plurilinguisme, variations, insertion scolaire et sociale »,
Langage & société, n° 98, pp. 105-127.
BILLIEZ, J., (dir.), (1998), De la didactique des langues à la didactique du plurilinguisme. Hommage à
Louise Dabène, CDL-Lidilem, Grenoble.
BILLIEZ, J., (1997), Bilinguisme, variation, immigration. Regards sociolinguistiques, vol. 1 et 2, dossier présenté
pour l’HDR, Université Stendhal-Grenoble 3.
BILLIEZ, J., (1985), « La langue comme marqueur d’identité », Revue Européenne des Migrations
Internationales, n° 2, vol. 1, pp. 95-105.
BIRELLO, M., (2005), La alternancia de lenguas en la clase de italiano lengua extranjera. Disponible sur :
http://www.tesisenxarxa.net/TESIS_UB/AVAILABLE/TDX-0205107-
140710//MB_TESIS.pdf (23/05/2009).
BLANCHET, A., et GOTMAN, A., (1992), L’enquête et ses méthodes : l’entretien, Nathan Université, Paris.
BLANCHET, A., (1991), Dire et faire dire. L’entretien, Armand Colin, Paris.
BLANCHET, A., (1989), «L’entretien : la co-construction du sens», dans Revault d’Allonnes, C., et al., La
démarche clinique en sciences humaines, Dunod, Paris, pp. 87-102.
BLANCHET, A., (1985), L’entretien dans les sciences sociales, Dunod, Paris.
BLANCHET, Ph., MOORE, D., et ASSELAH RAHAL, S., (2008), Perspectives pour une didactique des langues
contextualisée, Éditions des Archives contemporaines et Agence Universitaire de la
Francophonie, Paris.
BLANCHET, Ph., CALVET, L.-J., et ROBILLARD (de), D., (2007), Un siècle après le Cours de Saussure, la
linguistique en question. L’Harmattan, Paris. Disponible sur : http://www.u-
picardie.fr/LESCLaP/spip.php?rubrique55.
BLANCHET, Ph., (2007), « Quels "linguistes" parlent de quoi, à qui, quand, comment et pourquoi ? Pour
un débat épistémologique sur l’étude des phénomènes linguistiques », dans Blanchet, Ph.,
Calvet, L.-J., et Robillard (de), D., Un siècle après le Cours de Saussure, la linguistique en question.
L’Harmattan, Paris, pp. 229-294. Disponible sur : http://www.u-
picardie.fr/LESCLaP/spip.php?rubrique31.
BLANCHET, Ph., (2007), « Sur la statut épistémologique de la notion de "corpus" dans un cadre ethno-
sociolinguistique » dans Auzanneau, M. (dir.), La mise en œuvre des langues dans l’interaction.
L’Harmattan, Paris, pp. 341-352.
BLANCHET, Ph., (2007), « Pour un débat épistémologique sur l’étude des phénomènes linguistiques »,
Carnets de l’Atelier de Sociolinguistique, n° 1. Disponible sur : http://www.u-
picardie.fr/LESCLaP/IMG/pdf/blanchet_CAS_no1.pdf (03/04/07).
BLANCHET, Ph., et ROBILLARD (de), D. (dir.), (2003), Langues, contacts, complexité. Perspectives
théoriques en sociolinguistique, PUR, Rennes.
BLANCHET, Ph., (2000), Linguistique de terrain, méthode et théorie (une approche
BLANCHET, Ph., (1998), Introduction à la complexité de l’enseignement du Français Langue Etrangère,
Peeters, Louvain.
BLANDIN, B., (2004), « La relation pédagogique à distance : que nous apprend Goffman ? », Distances et
savoirs, n° 2-3, pp. 357-381.
BLONDEL, E., et DEVELOTTE, C., (2004), « Enseignement d’une nouvelle compétence méta-
discursive à l’Université : la lecture « revisitée » par l’analyse du discours », dans Simon, J.P., et
Grossmann, F. (éd.), Lecture à l’université. Langue seconde, maternelle, seconde et étrangère, Peter Lang,
Berne, pp. 255-270.
BOERS, F., et DEMECHELEER, M., (2001), «Measuring the impact of cross-cultural differences on
learners’ comprehension of imageable idioms», ELT Journal, n° 55, pp. 255-262.
470 | Références bibliographiques
BROSSARD, M., (2004), Vygotski. Lectures et perspectives de recherches en éducation, Presses Universitaires du
Septentrion, Villeneuve d’Ascq.
BROSSARD, M., (1998), « Approche socio-historique des situations d’apprentissage de l’écrit », dans
Brossard, M., et Fijalkow, J. (dir.), Apprendre à l’école : perspectives piagétiennes et vygotskiennes, PUB,
Talence.
BROUGÈRE, G., (2005), Jouer/Apprendre, Economica, Paris.
BROUGÈRE, G., (1995), Jeu et éducation, L’Harmattan, Paris.
BRUNER, J. S., (1966), Le développement de l’enfant, Savoir faire, savoir dire, PUF, Paris.
BRUYER, R. (dir.), (1984), Les sciences humaines et les droits de l’Homme, Mardaga, Bruxelles.
BUCHETON, D., (2008), « Au carrefour des métiers d’enseignant, de formateur, de chercheur » dans
Chiss, J.-L., et al., Didactique du français, De Boeck, Bruxelles, pp. 193-210.
BULLEN, M., (1997), A case study of participation and critical thinking in a university-level course
delivered by computer conferencing. Thèse de doctorat non publiée, University of British
Columbia. Disponible sur : http://www2.cstudies.ubc.ca/~bullen/Diss/thesis.doc
(25/02/2003, disparu depuis).
BULOT, T., (2006), La langue vivante, L’Harmattan, Paris.
BULOT, T., (2006), « La production discursive des normes : centralité sociolinguistique et
multipolarisation des espaces de référence », French Language Studies, vol. 16, pp. 305-333.
BYRAM, M., LAPKIN, S., LO BIANCO, J., et MET, M., (sous presse), « Teaching foreign languages in
anglophone countries », dans Hallet, W., et Königs, F. (Hsg.), Wörterbuch des
Fremdsprachenunterrichts, Klett/Kallmeyer, Berlin.
BYRAM, M., BARRE-DE MINIAC, C., HAMMAN, M., et SMIDT, J. (dir.), (2007), Langue d’enseignement
dans l’éducation primaire, trois études de cas : incidences pour un cadre européen, Conseil de l’Europe,
Division des Politiques linguistiques, Strasbourg.
BYRAM, M., et FENG, A., (2005), « Culture and language learning: teaching, research and scholarship »,
Language Teaching, n° 37, pp. 149-168.
BYRAM, M., ESARTE-SARRIES, V., et TAYLOR, S., (1991), Cultural Studies and Language Learning : a
Research Report, Multilingual Matters, Clevedon.
CALISTRI C., et al., (2007), Apprendre à parler, apprendre à penser, Les ateliers de philosophie, éd.
CRDP, Nice.
CALVET, L-J., (2007), « Pour une linguistique du désordre et de la complexité », Carnets d’Atelier de
Sociolinguistique, n° 1. Disponible sur :
http://www.u-picardie.fr/LESCLaP/IMG/pdf/Calvet_CAS_no1.pdf (03/04/07).
CALVET, L.-J., (2004). Essais de linguistique. La langue est-elle une invention des linguistes ?, Plon,
Paris.
CALVET, L.-J., et DUMONT, P. (dir.), (1999), L’enquête sociolinguistique, L’Harmattan, Paris.
CALVET, L.J., (1993), La sociolinguistique, PUF, QSJ ? n° 2731, Paris.
CAMBRA GINE, M., (2003), Une approche ethnographique de la classe de langue, Didier, Paris.
CAMILLERI, C., (1990), Stratégies identitaires, PUF, Paris.
CAMMAROTA, A., et GIACOBBE, J., (1986), « L’acquisition du lexique en français par des adultes
hispanophones », Langages, nº 84, pp. 65-78.
CAMPS, A. (coord.), (2006), Diálogo e investigación en las aulas, Graó, Barcelona.
CANDELIER, M., et CASTELLOTTI, V., (à paraître), « Didactique(s) du (des) plurilinguisme(s) », dans
Simonin, J., et Wharton, S., Sociolinguistique des langues en contact, modèles, théories. Dictionnaire
encyclopédique des termes et concepts, ENS-Éditions, Lyon.
CANDELIER, M., (2008), « Approches plurielles, didactiques du plurilinguisme : le même et l’autre », Les
Cahiers de l’Acedle,, n° 5, vol. 1, pp. 65-90. Disponible sur :
http://acedle.org/spip.php?article1009
472 | Références bibliographiques
CANDELIER, M. (dir.), (2007), Cadre de référence pour les approches plurielles des langues et des cultures, Conseil
de l’Europe / Centre européen pour les langues vivantes, Strasbourg / Graz. Disponible sur :
http://www.ecml.at/mtp2/ALC/pdf/CARAP_F.pdf.
CANDELIER, M. (éd.), (2003), Evlang – l’éveil aux langues à l’école primaire – Bilan d’une innovation
européenne, De Boek – Duculot, Bruxelles.
CARIGNAN, N., SANDERS, M., et POURDAWOOD, R. G., (2005), « Racism and ethnocentrism:
social representations of preservice teachers in the context of multi and intercultural
education », International Journal of Qualitative Methods, n° 4, vol. 3, pp. 1-17.
CARLO, C., (2005), « Le "naturel didactique" : analyse du répertoire d’un enseignant chevronné » dans
Bigot, V., et Cicurel, F. (éd.), Les interactions didactiques : enjeux, ressources, perspectives, Le français dans
le monde. Recherches et applications.
CASTELLOTTI, V., (2009), « Réflexivité et pluralité / diversité / hétérogénéité : soi-même comme des
autres ? », dans Robillard (de), D. (dir.), Sociolinguistique et réflexivité : vers un paradigme réflexif ou
herméneutique ?, Cahiers de sociolinguistique, n° 14, pp. 129-144.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2009), « Dessins d’enfants et constructions plurilingues. Territoires
imagés et parcours imaginés », dans Molinié, M. (éd.), Le dessin réflexif. Élément pour une
herméneutique du sujet plurilingue, CRTF-Encrages, Belles Lettres, Paris, pp. 45-85.
CASTELLOTTI, V., CAVALLI, M., COSTE, D., et MOORE, D., (2009), « À propos de la notion de
compétence plurilingue en relation à quelques concepts sociolinguistiques ou du rôle de
l’implication et de l’intervention dans la construction théorique », dans Pierozak, I., et Eloy, J.-
M. (éd.), Intervenir : appliquer, s’impliquer ?, L’Harmattan, Paris, pp. 95-104.
CASTELLOTTI, V., HUVER, E., et VIGNER, G. (dir.), (2008), « Insertion scolaire et insertion des
nouveaux arrivants », Glottopolitique, n° 11, janvier 2008.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2008), « Contextualisation et universalisme. Quelle didactique des
langues pour le XXIe siècle ? » dans Blanchet, Ph., et al., Perspectives pour une didactique des langues
contextualisée, AUF / Éditions des Archives Contemporaines, Paris, pp. 183-203.
CASTELLOTTI, V., COSTE, D., et DUVERGER, J. (coord.), (2008), Propositions pour une éducation au
plurilinguisme en contexte scolaire, ADEB et Université François Rabelais, Paris, Tours.
CASTELLOTTI, V., (2008), « L’école française et les langues des enfants : quelle mobilisation de
parcours plurilingues et pluriculturels ? », dans Chiss, J.L. (dir.), Immigration, École et didactique du
français, Didier, Paris, pp. 231-279.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2007), « Le bilingue était presque parfait », dans Lambert, P.,
Millet, A., Rispail, M., et Trimaille, C. (éd.), Variations au cœur et aux marges de la sociolinguistique.
Hommage à Jacqueline Billiez, L’Harmattan, Paris, pp. 227-236.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2006), « Parcours d’expériences plurilingues et conscience
réflexive : le portfolio européen des langues pour le collège », dans Molinié, M. (éd.), Biographie
langagière et apprentissage plurilingue. Le Français dans le Monde. Recherches et applications, n° 39, pp. 54-
68.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2005), « Répertoires pluriels, culture métalinguistique et usages
d’appropriation », dans Beacco, J.-C., Cicurel, F., Chiss, J.-L., et Véronique, D. (éd.), Les cultures
éducatives et linguistiques dans l’enseignement des langues, PUF, Paris, pp. 107-132.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (2005), « Les portfolios européens des langues : des outils
plurilingues pour une culture éducative partagée », Repères, n° 29, pp. 167-183.
CASTELLOTTI, V., et PY, B. (dir.), (2002), La notion de compétence en langue, ENS éditions, Lyon.
CASTELLOTTI, V. (2001), La langue maternelle en classe de langue étrangère, CLE International, Paris.
CASTELLOTTI, V., (2001), « Pour une perspective plurilingue sur l’apprentissage et l’enseignement des
langues », D’une langue à d’autres, pratiques et représentations, PUR, Rouen, pp. 9-13.
CASTELLOTTI, V., et MOORE, D., (1999), « Schémas en coupe du plurilinguisme », Bulletin suisse de
linguistique appliquée, VALS-ASLA, n° 70, pp. 27-50.
Références bibliographiques | 473
CHISS, J.-L., (2004), « La littératie : quelques enjeux d’une réception dans le contexte éducatif et culturel
français », dans Barré-De Miniac, C., Brissaud, C., et Rispail, M. (dir.), La litéracie : histoire d’un
mot, effets d’un concept, L’Harmattan, Paris.
CHISS, J.-L., et MARQUILLO, M., (1998), « Écriture et lecture : ‘literacy’, pratiques ordinaires, pratiques
lettrées », dans Grossmann, F. (dir.), Pratiques langagières et didactiques de l’écrit, IVEL-LIDILEM,
Grenoble.
CHISS, J.-L., DAVID, J., et REUTER, Y. (dir.), (1995), Didactique du français. État d’une discipline, Nathan,
Paris.
CHISS, J.-L., (1989), « Revendication d’autonomie et horizon de scientificité en didactique du français »,
Langue française, nº 1, vol. 82, pp. 44-52.
CHOPPIN, A., (1992), Les manuels scolaires. Histoire et actualité, Hachette, Paris.
CHOU, C., (2002), « A comparative content analysis of student interaction in synchronous and
asynchronous learning networks », Paper presented at the 35th Annual Hawaii International
Conference on System Sciences, Hawaii.
CICUREL, F., (2007), « L’agir professoral, une routine ou une action à haut risque », dans Plazaola Giger,
I., et Stroumza, K. (dir.), Paroles de praticiens et description de l’activité. Problématisation méthodologique
pour la formation et la recherche, De Boeck, Bruxelles.
CICUREL, F., (2002), « La classe de langue un lieu ordinaire, une interaction complexe », AILE, n° 16.
Disponible sur : http://aile.revues.org/document801.html.
CICUREL, F., (2001), « Quand le français professionnel est l’objet de l’interaction », Les Carnets du
Cediscor, n° 7, pp. 21-36.
CICUREL, F. ? et DOURY, M. (dir.), (2001), « Discours et interactions professionnels : usages et
transmission », Les Carnets du Cediscor, n°7.
CICUREL, F., (1999), « Littérature, fiction, apprentissage : le mode fictionnel du discours » dans Études de
linguistique appliquée, n° 115.
CICUREL, F., et BLONDEL, E. (dir), (1996), « La construction interactive des discours en classe de
langue », Les Carnets du Cediscor, n° 4.
CICUREL, F., et BLONDEL, E. (coord.), (1996), La construction interactive des discours de la classe de langue,
Les Carnets du CEDISCOR, n° 4.
CICUREL, F., (1995), « L’instabilité énonciative en classe de langue », dans Les Carnets du Cediscor, n° 4,
pp. 77-92.
CICUREL, F., (1995), « Schéma facilitateur et métalangage dans l’apprentissage d’une langue étrangère »,
dans Les cahiers du français contemporain.
CICUREL, F., (1994), « Marques et traces de la position de l’autre dans les discours de l’enseignement des
langues », dans Les Carnets du Cediscor, n° 2, pp. 93-104.
CICUREL, F., (1990), « Eléments d’un rituel communicatif dans les situations d’enseignement », dans
Dabène, L., et al., Variations et rituels en classe de langue. Crédif-Hatier, Paris, pp. 22-54.
CLAD (Centre de Linguistique Appliquée de Dakar), (1971-1978), Pour parler français, 5 livres de l’élève et
11 livres du maître, EDICEF-NEA Paris-Dakar.
CLERC, F., (2008), « Éditorial », Recherche et formation, nº 59, pp. 5-10.
CLERC, S., (2009), « Les dessins d’apprentissage d’élèves nouvellement arrivés en France : vecteurs d’un
apprendre autrement ? », dans Molinié, M. (éd.), Le dessin réflexif. Élément pour une herméneutique du
sujet plurilingue, CRTF-Encrages, Belles Lettres, Paris, pp. 119-139.
CLOSSET, F., (1950), Didactique des langues vivantes, Didier, Paris.
CLOT, Y., (2004), « Action et connaissance clinique de l’activité », Activités revue électronique, nº 1, vol. 1,
pp. 23-33. Disponible sur : http://www.activités.org
CLOT, Y., (2001), « Editorial », Clinique de l’activité et pouvoir d’agir, nº 146, pp. 7-16.
Références bibliographiques | 475
CLOT, Y., et al, (2001), « Entretiens en auto-confrontation croisée: une méthode en clinique de
l’activité », Clinique de l’activité et pouvoir d’agir, nº 146, pp. 17-25.
CLOT, Y., (1999), La fonction psychologique du travail, PUF, Paris.
CNRS, (2005), « Travailler au CNRS », Plaquette éditée par la Délégation à l’Information Scientifique et
Technique et la Direction des ressources humaines au CNRS.
COLIN, J,-Y., MOURLHON-DALLIES, F., (2004), « Du courrier des lecteurs aux forums de discussion
sur l’internet : retour sur la notion de genre », Les Carnets du CEDISCOR, numéro 8, p. 113-
140.
CONSEIL DE L’EUROPE, (2009), Langues de l’éducation, langues pour l’éducation. Plateforme de ressources et de
références pour l’éducation plurilingue et interculturelle. Site : www.coe.int/lang.
CONSEIL DE L’EUROPE, (2007), De la diversité linguistique à l’éducation plurilingue: guide pour l’élaboration des
politiques linguistiques éducatives en Europe, Conseil de l’Europe, Strasbourg. Disponible sur le site
du Conseil de l’Europe: http://www.coe.int
CONSEIL DE L’EUROPE, (2001), Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner,
évaluer, Didier, Paris.
COPANS, J., (1998), L’enquête ethnologique de terrain, Nathan-université, Paris.
CORDER, S.P., (1980), « La sollicitation de données d’interlangue », dans Langages, nº 57, pp. 29-38.
CORDIER-GAUTHIER, C., (2002), « Les éléments constitutifs du discours du manuel », Études de
Linguistique appliquée (éla), n° 125, Didier, Paris, pp. 25-36.
CORTAZZI, M., et SHEN, W. W., (2001), «Cross-linguistic awareness of cultural keywords: a study of
Chinese and English speakers», Language Awareness, nº 10, pp. 125-142.
COSNIER, J., (1989), « V comme la Voix, les Gestes, le Corps », dans Cerquiglini, B. (dir.), Tu parles !, le
français dans tous ses états, Flammarion, Paris, pp. 325-338.
COSTE, D., et SIMON, D.-L., (2009), « The Plurilingual Social Actor. Language, Citizenship,
Education», International Journal of Multilingualism, nº 6, vol. 2, pp. 168-185.
COSTE, D., MOORE, D., et ZARATE, G., (2009), Plurilingual and Pluricultural Competence, Council of
Europe, Strasbourg.
COSTE, D., (2008), « Éducation plurilingue et langue de scolarisation », Les Cahiers de l’Acedle, nº 5, vol. 1,
pp. 91-107. Disponible sur : http://acedle.org/spip.php?article1011
COSTE, D., (2007), « Le Cadre européen commun de référence pour les langues. Contextualisation et/ou
standardisation ? ». Disponible sur :
http://www.francparler.org/dossiers/pj/coste_190607.doc
COSTE, D., SOBRERO, A., CAVALLI, M., et BOSONIN, I., (2006), Multilinguisme, Plurilinguisme,
Éducation – Les politiques linguistiques éducatives, IRRE-VDA, Aoste.
COSTE, D., (2004), « De quelques déplacements opérés en didactique des langues par la notion de
compétence plurilingue », dans Auchlin, A., et al. (éd.), Structures et discours. Mélanges offerts à Eddy
Roulet, Nota Bene, Québec, pp. 67-85.
COSTE, D., (2002), « Compétence à communiquer et compétence plurilingue », Notions en Questions, nº 6,
pp. 115-123.
COSTE, D., (2001), « De plus d’une langue à d’autres encore. Penser les compétences plurilingues ? »,
dans Castellotti, V. (dir.), D’une langue à d’autres : pratiques et représentations, PUR, Rouen, pp. 191-
202.
COSTE, D., (2001), « Compétence bi/plurilingue et (in)sécurité linguistique », L’École Valdôtaine. Valle
d’Aoste regione d’Europa : l’educazione bi/plurilingue, ponte verso la cittadinanza europea, nº 54, pp. 10-18.
COSTE, D., MOORE, D., et ZARATE, G., (1997), Compétence plurilingue et pluriculturelle. Vers un
Cadre Européen Commun de Référence pour l’Apprentissage et l’Enseignement des Langues :
études préparatoires. Conseil de l’Europe, Strasbourg. Disponible sur :
http://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Publications_FR.asp#P465_26519
476 | Références bibliographiques
COSTE, D., (1995), « Curriculum et pluralité », Études de linguistique appliquée, nº 98, pp. 68-84.
COULON, A.-R., (1993), Ethnométhodologie et éducation, PUF, Paris.
COULTHARD, M., (1977), An introduction to Discourse Analysis, Longman, Londres.
COUNCIL OF EUROPE, (2001), Common European Framework of Reference for Languages, Cambridge
University Press, Cambridge.
CRAWSHAW, R., CALLEN, B., et TUSTING, K., (2001), «Attesting the self; narration and identity
change during periods of residence abroad », Language and Intercultural Communication, nº 1, pp.
101-119.
CSIKSZENTMIHALYI, M., (1979), « The Concept of Flow », dans Sutton-Smith, B. (éd.), Play and
Learning, Gardner Press, New York, pp. 257-274.
CUISENIER, J., (1993), « La démarche ethnographique et la pluralité des perspectives », dans Filloux, J.-
C., et Maisonneuve, J. (dir.), Anthologie des sciences de l’Homme. Dunod, Paris, t. 2, pp. 89-119.
CUMMINS, J., (2001), Language, Power and Pedagogy. Bilingual Children in the Crossfire. Multilingual Matters,
Clevedon.
CUQ, J.-P., et QUEFFELEC, A., (2005), « Enseignement de la grammaire et enseignement
grammaticalisé en français langue seconde », Le français dans le Monde. Recherches et applications,
numéro spécial, janvier, pp. 75-84.
CUQ, J.-P., (2003), Dictionnaire de didactique du Français, Clé International, Paris.
CUQ, J.-P., (1991), Le français langue seconde. Origines d’une notion et implications didactiques, Hachette, Paris.
CUSHNER, K., et BRISLIN, R. W. (éd.), (1997), Improving intercultural interactions: modules for cross-cultural
training programs, vol. 2, Sage Publications, Thousand Oaks.
DABÈNE, L., (1997), « L’image des langues et leur apprentissage », dans Matthey, M. (éd.), Les langues et
leurs images, IRDP Éditeur, Neuchâtel, pp. 19-23.
DABÈNE, L., (1994), Repères sociolinguistiques pour l’enseignement des langues, Hachette, Paris.
DABÈNE, L., (1990), « Didactique des langues et sociolinguistique », dans Acedle, Recherche, terrain et
demande sociale, Actes du 2e colloque international Acedle, Strasbourg, Université des sciences
humaines, 16-17 novembre 1990.
DABÈNE, L. (coord.), (1989), Les langues et cultures des populations migrantes : un défi à l’école française, Lidil,
no 2.
DABÈNE, L., et BILLIEZ, J., (1984), Recherche sur la situation sociolinguistique des jeunes issus de l’immigration,
rapport de recherche pour la Mission Recherche Expérimentation, Centre de Didactique des
Langues, Université Stendhal-Grenoble3.
DABÈNE, M., (2002), « Réactions de Michel Dabène à la "notion" de littéracie », La Lettre de la DFLM,
30, pp. 33-34.
DABÈNE, M., (1991), « La notion d’écrit ou le continuum scriptural », Le Français Aujourd’hui, n° 93, pp.
25-37.
DAHL, Ø., (2006), Signes et significations à Madagascar. Des cas de communication interculturelle, Présence
Africaine, Paris.
DAHLEN, T., (1997), Among the interculturalists, Stockholm Studies in Social Anthropology, Stockholm.
DAUNAY, B., et REUTER, Y., (2008), « La Didactique du français. Questions d’enjeux et de
méthodes », Pratiques, nº 137-138, pp. 57-78.
DEARDORFF, D. (éd.), (2009), The SAGE handbook of intercultural competence. Sage, ThousandOaks, CA.
DECLERCQ, K., (2007), « Une ethnographie sociolinguistique de deux classes multiculturelles à
Bruxelles », VEI diversité, pp. 61-67.
DEGACHE, C., et MANGENOT, F. (coord.), (2007), Échanges exolingues via Internet et appropriation des
langues-cultures, Lidil, n° 36, Ellug, Grenoble.
DEGACHE, C., et NISSEN, E., (2007), « Formations hybrides et interactions en ligne du point de vue
de l’enseignant : pratiques, représentations, évolutions », dans Lamy, M.-N., Mangenot, F., et
Références bibliographiques | 477
Nissen, E., Actes du colloque EPAL (Echanger pour apprendre en ligne), Grenoble 7-9 juin 2007.
Disponible sur : http://w3.u-grenoble3.fr/epal/actes.htm
DEGACHE, C., (2006), Didactique du plurilinguisme : travaux sur l’intercompréhension et l’utilisation des technologies
pour l’apprentissage des langues, dossier présenté pour l’HDR, volume 1, synthèse de l’activité de
recherche, Grenoble 3.
DEGACHE, C., et TEA, E., (2003), « Intercompréhension : quelles interactions pour quelles
acquisitions ? Les potentialités du Forum Galanet », Lidil, n° 28, pp. 75-94.
DEJEAN-THIRCUIR, C., (2008), « Modalités de collaboration entre étudiants et constitution d’une
communauté dans une activité à distance », Apprentissage des Langues et Systèmes d’Information et de
Communication, n° 1, vol. 12. Disponible sur : http://alsic.org
DELAMOTTE, R., et CAITUCOLI, C. (dir.), (2008), Morales langagières, PURH.
DELCROIX, C., (2001), Ombres et lumières de la famille Nour, Payot, Paris.
DELORME, C., (2002), « Les parents et l’école en Afrique de l’Ouest », Revue internationale d’éducation, n°
31, Sèvres.
DEMAIZIERE, F., et NARCY-COMBES, J.-P., (2007), « Du positionnement épistémologique aux
données de terrain », dans Méthodologie de recherche en didactique des langues, Les Cahiers de l’Acedle,
n° 4, Strasbourg, pp. 1-20. Disponible sur : http://acedle.org/IMG/pdf/Demaiziere-
Narcy_cah4.pdf
DENIS, B., (2003), « Quels rôles et quelle formation pour les tuteurs intervenant dans des dispositifs de
formation à distance ? », Distances et savoirs, n° 1, vol. 1, pp. 19-46.
DEPREZ, C., HERAN, F., et FILHON, A., (2002), « La dynamique des langues en France au fil du XXe
siècle », Populations et société, n° 376, INED, Paris, pp. 14.
DEPREZ, C., (2000), « Histoires de langues, histoires de vies », Cahiers de Sociolinguistique, n° 5, PUR,
Rennes, pp. 167-174.
DERIVRY-PLARD, M., (2005), « L’entretien de type sociologique et la didactique des langues et des
cultures », dans Zarate, G., et Cain., A. (dir.), L’entretien : ses apports à la didactique des langues,
EAN, pp. 29-42.
DESLAURIERS, J.-P., (1987), Les méthodes de la recherche qualitative, Presses de l’Université du Québec,
Sainte-Foy.
DESROSIÈRES, A., (2008), Pour une sociologie historique de la quantification, Presses de l’École des Mines,
Paris.
DESROSIÈRES, A., (2008), Gouverner par les nombres, Presses de l’Ecole des Mines, Paris.
DEVELOTTE, C., (2006), « Décrire l’espace d´exposition discursive dans un campus numérique », Le
Français dans le monde, Recherches et applications : Les échanges en ligne dans l’apprentissage et la formation,
Clé International, Paris, pp. 88-100. Disponible sur : http://halshs.archives-
ouvertes.fr/docs/00/15/18/51/PDF/expositiondiscursive.pdf (21/07/2009).
DEVELOTTE, C., et MANGENOT, F., (2004), « Tutorat et communauté dans un Campus numérique
non collaboratif », Distances et savoirs, n° 2-3, vol. 2, pp. 309-333.
DILLENBOURG, P., BAKER, M., BLAYE, A., et O’MALLEY, C., (1996), « The Evolution of
Research on Collaborative Learning », dans Spada, E., et Reiman, P. (éd.), Learning in Humans
and Machines: Towards an interdisciplinary learning science, Elsevier, Oxford, pp. 189-211.
DOLCI, R., et SPINELLI, B., (2007), « La dimension idioculturelle des micro-communautés
d’apprentissage en ligne », Lidil, n° 36, pp. 69-92.
DONAHUE, C., (2008), Écrire à l’université. Analyse comparée en France et aux États-Unis, Septentrion Presses
Universitaires, Villeneuve d’Ascq.
DÖRNYEI, Z., et USHIODA, E., (2009), Motivation, Language Identity and the L2 Self, Multilingual Matters,
Clevedon.
DÖRNYEI, Z., (2001), Motivational Strategies in the Language Classroom, Cambridge University Press,
Cambridge.
478 | Références bibliographiques
DÖRNYEI, Z., (1998), « Motivation in second and foreign language learning », Language Teaching, n° 31,
pp. 117-135.
DOUCET, C., (2009), « Paradoxes de l’enseignement du français en Louisiane : quelles perspectives
didactiques pour quel français ? » dans Blanchet, Ph., Moore, D., et Asselah-Rahal, S. (dir.),
Perspectives pour une didactique des langues contextualisée, AUF/Éditions des archives contemporaines,
2e éd. complétée, Paris.
DOUMBIA, T., (2001), Groupes d’âge et éducation chez les Malinké du sud du Mali, L’Harmattan, Paris.
DOWNES, S., (2001), «Sense of Japanese cultural identity within an English partial immersion
programme: should parents worry ?», International Journal of Bilingual Education and Bilingualism n°
4, pp. 165-180.
DREYFUS, M., (2006), « Enseignement/apprentissage du français en Afrique : bilan et évolutions en 40
années de recherches », Revue française de linguistique appliquée, no 1, vol. XI, pp 73-84.
DUMONT, P., et CALVET, L.-J., (1999), L’enquête sociolinguistique, L’Harmattan, Paris.
DUMONT, P., (1991), Le français langue africaine, L’Harmattan, Paris.
DUNN, J. F., et SHATZ, M., (1989), « Becoming a conversationalist despite (or because of) having an
older sibling », Child development, n° 60, vol. 2, pp. 399-410.
DURANTI, A., (1997), Linguistic Anthopology, Cambridge University Press, Cambridge.
DURU-BELLAT, M., (2003), Inégalités sociales à l’école et politiques éducatives, Unesco, Paris.
ECKERT, P., (2000), Linguistic variation as social practice, Blackwell Publishing, Oxford.
ELLIS, R., (1999), Learning a second language through interaction. Studies in Bilingualism, n° 17, John
Benjamins, Amsterdam/Philadelphia.
EYINDANGA, E., (2008), Les usages des langues locales dans les quartiers-est de Libreville, enquêtes
sociolinguistiques, thèse de doctorat sous la direction de J. Billiez, Université Stendhal-Grenoble 3.
FAHY, P., (2001), « Addressing some common problems in transcript analysis », International Review of
Research in Open and Distance Learning, n° 2, vol. 1.
FAÏTA, D., (2005), Análise dialógica da atividade profissional, Imprinta Express, Rio de Janeiro.
FAÏTA, D., (2004), « Gêneros de discurso, gêneros de atividade, análise da atividade do professor », dans
Machado, A. R. (dir.), O ensino como trabalho: uma abordagem discursiva, Eduel, Londrina.
FAÏTA, D., (2002), « Análise das prácticas linguageiras e situações de trabalho : uma renovação
metodológica imposta pelo objeto », dans Pérez Souza-e-Silva, M. C., Faïta, D. (org.), Linguagem
e trabalho. Construção de objetos de anaálise no Brasil e na França, Cortez Editora, Sao Paulo, pp. 45-
60.
FAÏTA, D., (1997), « La conduite du TGV: exercices de styles », Champs visuels, n° 6, pp. 75-86.
FAYOL, M., et GAONAC’H, D., (2003), « La compréhension : une approche de la psychologie
cognitive », dans Fayol, M., et Gaonac’h, D. (dir.), Aider les élèves à comprendre. Du texte au
multimédia, Hachette Education, Paris, pp. 5-72.
FENG, A., BYRAM, M., et FLEMING, M. (éd.), (2009), Becoming Interculturally Competent through
Education and Training, Multilingual Matters, Clevedon.
FENG, A. W., (2003), « Intercultural competency for TESOL professionals », Reflections on English
Language Teaching, n° 2, pp. 138-172.
FENG, A. W., et BYRAM, M., (2002), « Authenticity in college English textbooks – An intercultural
perspective », RELC Journal, n° 33, pp. 58-84.
FEUSSI, V., (2006), Une construction du français à Douala – Cameroun, Université de François Rabelais de
Tours. Thèse de doctorat soutenue, réalisée sous la direction de Didier de Robillard, Volume 2.
FIJALKOW, J., et VOGLER, J., (2000), « Vous avez dit "littéracie" ? », dans Leclercq, V., et Vogler, J.
(dir.), Maîtrise de l’écrit : quels enjeux et quelles réponses aujourd’hui ?, L’Harmattan, Paris.
Références bibliographiques | 479
FILLIETTAZ, L., (2008), « L’analyse des interactions », dans Filliettaz, L., Saint-Georges, I. (de), et Duc,
B., « Vos mains sont intelligentes ! » Interactions en formation professionnelle initiale, Cahiers
de la section des sciences de l’éducation, n° 117, Université de Genève.
FITZE, M., (2006), « Discourse and participation in ESL face-to-face and electronic written
conferences », Language Learning and Technology, n° 1, vol. 10, pp. 66-86. Disponible sur :
http://llt.msu.edu
FLANDERS, N. A., (1970), Analyzing teaching behaviour, Addison-Wesley Publishing Company, Reading,
Massachusetts.
FORMAN, E. A., MINICK, N., et ADDISON STONE, C. (dir.), (1993), Contexts for learning. Sociocultural
dynamics in children’s development, Oxford University Press, Oxford.
FORTIN, F., (1996), Le processus de la recherche de la conception à la réalisation, Décarie, Ville Mont-Royal.
FORTIN, R., (2000), Comprendre la complexité, L’Harmattan/Presses de l’Université Laval, Paris/Québec.
FOSTER, D., et RUSSEL, D. R. (dir.), (2002), Writing and learning in cross-national perspective. Transitions from
secondary to higher education, NCTE-IEA, Urbana-New Jersey.
FOWLER, S. M., et MUMFORT, M. G (éd.), (1999), Intercultural sourcebook: Cross-cultural training methods,
vol. 2, Intercultural Press, Yarmouth, ME.
FRANÇOIS, F., (2005), « Langage et pensée : dialogue et mouvement discursif chez Vygostki et Bruner »,
Interprétation et dialogue chez les enfants et quelques autres, ENS éd., Lyon.
FRANÇOIS, F., (1998), Le discours et ses entours : essai sur l’interprétation, L’Harmattan, Paris.
FRANÇOIS, F., (1993), Pratiques de l’oral, Nathan, Paris.
FRANÇOIS, F. (dir.), (1990), La communication inégale. Heurs et malheurs de l’interaction verbale, Delachaux et
Niestlé, Lausanne, Paris.
FREUD, S., (1953), La technique psychanalytique, PUF, Paris.
GADAMER, H.-G., (1996), Le philosophie herméneutique, PUF, Paris.
GADAMER, H.-G., (1996), Vérité et Méthode, trad. P. Fruchon, éd. Revue et complétée, Seuil, Paris.
GAJO, L., MATTHEY, M., MOORE, D., et SERRA, C., (2004), Un parcours au contact des langues. Textes de
Bernard Py commentés, Didier, Paris.
GAJO, L., (2001), Immersion, bilinguisme et interaction en classe, Didier, Paris.
GAJO, L., et MONDADA, L., (2000), Interactions et acquisitions en contexte, Éditions universitaires, Fribourg.
GALISSON, R., (2000), « La pragmatique lexiculturelle pour accéder autrement à une autre culture par
un autre lexique », Mélanges CRAPEL, nº 25, pp. 47-73.
GALISSON, R., (1990), De la linguistique appliquée à la didactologie des langues-cultures : vingt ans de réflexion
disciplinaire, Didier, Paris.
GALISSON, R., (1989), « Problématique de l’autonomie en didactique des langues (contexte français) »,
Langue française, nº 1, vol. 82, pp. 95-115.
GALISSON, R., (1986), « Éloge de la “didactologie/didactique des langues et des cultures (maternelles et
étrangères) D/DDLC” », Études de Linguistique Appliquée, nº 64, pp. 38-54.
GAONAC’H, D., (2006), L’apprentissage précoce d’une langue étrangère. Le point de vue de la psycholinguistique,
Hachette Education, Paris.
GARDNER, R., et LAMBERT, W., (1972), Attitudes and motivation in second language learning, Rowley,
Massachusetts.
GARFINKEL, H., (2007), Recherches en ethnométhodologie, PUF, Paris.
GARRISON, D.-R., et ANDERSON, T., (2003), TE-learning in the 21st Century. A Framework for
Research and Practice, Routledge, New-York.
GARRISON, D.-R., ANDERSON, T., et ARCHER, W., (2000), « Critical inquiry in a text based
environment : computer conferencing in higher education », The Internet and Higher Education,
nº 2/3, vol. 2, pp. 87-105.
480 | Références bibliographiques
GARTON, A.F., (1992), Social interaction and the development of language and cognition, Laurence Erlbaum
Associates, Hillsdale (USA).
GAULEJAC, V., (2009), Qui est « je » ?, Seuil, Paris.
GAULEJAC, V., (2002), « L’identité », dans Barus-Michel, J., Enriquez, E., et Lévy, A. (dir.), Vocabulaire
de psycho-sociologie : Références et positions, Erès, Paris, pp. 174-180.
GAUTHERON-BOUTCHATSKY, C., (2005), « L’entretien biographique dans la recherche en langues /
cultures : un outil précieux et exigeant », dans Zarate, G., et Cain., A., (dir.), L’entretien : ses
apports à la didactique des langues, EAN, pp. 43-54.
GAUTHIER, B., et BEAUD, J.-P., (2009), Recherche sociale : de la problématique à la collecte des données (5e éd.),
Presses de l’Université du Québec, Québec.
GAUTHIER, B., (2003), Recherche sociale : de la problématique à la collecte des données (4e éd.), Presses de
l’Université du Québec, Sainte-Foy, Québec.
GAUTIER, M., MELLOUKI, M., et TARDIFF, M., (1993), Le savoir des enseignants. Que savent-ils ?,
Editions Logiques, Montréal.
GEORGIN, J.-P., (2002), Analyse interactive des données (ACP, AFC) avec Excel 2000 : Théorie et pratique,
PUR, Rennes.
GERMAIN, C., (2000), « Didactique du français et épistémologie : de la nécessité d’expliciter ses
présupposés », dans Marquilló-Larruy, M. (coord.), Questions d’épistémologie en didactique du français,
DFLM/Cahiers du FORELL, MSHS, Poitiers, pp. 297-300.
GERMAIN, C., (1999), « Structure fondamentale de l’enseignement d’une langue étrangère ou seconde »,
Études de Linguistique Appliquée, n° 114, pp. 171-187.
GERMAIN, C., (1993), Evolution de l’enseignement des langues, 5000 ans d’histoire, Clé international, Paris.
GHIGLIONE, R., KEKENBOSCH, C., et LANDRE, A., (1995), L’analyse cognitivo-discursive, PUG,
Grenoble.
GHIGLIONE, R., et MATALON, B., (1995), Les enquêtes sociologiques : théories et pratiques, Colin, Paris.
GHIGLIONE, R., et BLANCHET, A., (1991), Analyse de contenu et contenus d’analyses, Dunod, Paris.
GHIGLIONE, R., (1982), « Analyse propositionnelle et modèles argumentatifs », dans Connexions, nº 38,
pp. 89-106.
GHIGLIONE, R., BEAUVOIS, J. L., CHABROL, C., et TROGNON, A., (1980), Manuel d’analyse de
contenu, Armand Colin, Paris.
GHIMENTON, A., (2008), Acquisition plurilingue chez un jeune enfant de Vénétie : Étude de la fréquence d’usage
des langues et des indices pragmatiques lors des interactions familiales, thèse de doctorat sous la direction
de J.-P. Chevrot et J. Billiez, Université Stendhal-Grenoble 3.
GIACOBBE, J., (1994), « Construction des formes lexicales et activité cognitive dans l’acquisition du
français L2 », Aile, nº 3, pp. 29-54.
GIACOBBE, J., (1990), « Le recours à la langue première », Le Français dans le Monde, numéro spécial
février/mars, pp. 115-123.
GIBSON, R., (2000), Intercultural Business Communication, Cornelsen, Berlin.
GIDDENS, A., (1996), Modernity and Self-Identity: Self and Society in the Late Modern Age, Polity Press,
Cambridge.
GILLY, M., (1995), « Approches socio-constructives du développement cognitif », dans Gaonac’h, D., et
Golder, C. (dir.), Manuel de psychologie pour l’enseignement, Hachette Education, Paris, pp. 130-167.
GIORDAN, A., et al., (1994), Conceptions et connaissance, Peter Lang, Berne.
GIORDAN, A., GIRAULT, Y., et CLEMENT, P., (1994), Conceptions et connaissance, Peter Lang, Berne.
GIORDAN, A., (non daté), Les conceptions de l’apprenant comme tremplin d’apprentissage… ! Disponible sur :
http://www.ldes.unige.ch/publi/rech/concep/concep.htm (14/10/09).
GIRARDEAU, B., et HUVER, E., (2008), « Le biographique et la formation des enseignants de langues :
vers l’émergence d’une posture de praticien réflexif ? », dans Huver, E., et Molinié, M. (dir.),
Références bibliographiques | 481
GROBOIS, M., (2007), « Didactique des langues et recherche expérimentale », dans Méthodologie de recherche
en didactique des langues, Les Cahiers de l’Acedle, n° 4, pp. 65-83. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Grosbois_cah4.pdf
GRONDIN, J., (2008), L’herméneutique, PUF, Paris.
GRONDIN, J., (2003), Le tournant herméneutique de la phénoménologie, PUF,
Paris.
GRONDIN, J., (1993), L’universalité de l’herméneutique, PUF, Paris.
GROSJEAN, F., (2008), Studying Bilinguals, Oxford University Press, Oxford.
GROSJEAN, F., (1984), « Le bilinguisme : vivre avec deux langues », Tranel, no 7, pp. 15-42.
GROSJEAN, F., (1982), Life with two languages, Harvard University Press, Cambridge.
GROULX, L. H., (1999), « Le pluralisme en recherche qualitative : essai de typologie », Revue suisse de
sociologie, no 25, vol. 2, pp. 317-339.
GRUBER-MILLER, J., et BENTON, C., (2001), « How do you say MOO in Latin? Assessing student
learning and motivation in beginning Latin», CALICO Journal, no 18, pp. 305-338.
GUDYKUNST, W., et KIM, Y. Y., (1992), Communicating with strangers an approach to intercultural
communication (2nd éd.), McGraw-Hill, New York, Montréal.
GUILHERME, M., (2002), Critical Citizens for an Intercultural World, Multilingual Matters, Clevedon.
GUMPERZ, J., (1989), Engager la conversation, introduction à la sociolinguistique interactionnelle, Éditions de
Minuit, Paris.
GUMPERZ, J. (éd.), (1982), Language and Social Identity, Cambridge University Press, Cambridge.
GUMPERZ, J., (1982), Discourse strategies, Cambridge University Press, Cambridge.
GUMPERZ, J., (1964), « Linguistic and Social Interaction in Two Communities », The Ethnography of
Communication, American Anthropologist, no 6, vol. 66, pp. 137-153.
GUNAWARDENA, C. N., LOWE, C. A., et ANDERSON, T., (1997), « Analysis of a global online
debate and the development of an interactional analysis model for examining social
construction of knowledge in computer conferencing », Journal of Educational Computing Research,
n° 4, vol. 17, pp. 397-431.
GUSDORF, G., (1988), Les origines de l’herméneutique, Payot, Paris.
HALAOUI, N., (2005), Langues et systèmes éducatifs dans les États francophones d’Afrique subsaharienne. Un état
des lieux, Autrement, Paris.
HALL, E. T., (1989), Beyond culture, Doubleday, New York, Toronto.
HALTE, J. F. (dir.), (1993), Inter-actions, L’interaction, actualités de la recherche et enjeux didactiques, CRESEF,
Université de Metz.
HAMEL, J., (2008), « Qu’est-ce que l’objectivation participante ? Pierre Bourdieu et les problèmes
méthodologiques de l’objectivation en sociologie », dans Socio-Logos, no 3. Disponible sur :
http://socio-logos.revues.org/document1482.html (10/08/09).
HAMERS, J. F., et BLANC, M., (1989), Bilinguality and bilingualism, Cambridge University Press,
Cambridge.
HARBON, L. A., (2002), « Stories of raw green chillies and unlocked cupboards », Babel (AFMLTA), no
36, pp. 23-38.
HAWKINS, E. W., (1984), Awareness of Language: An introduction, Cambridge University Press, Cambridge.
HAWKINS, E. W., (1981), Modern Languages and the Curriculum, Cambridge University Press, Cambridge.
HELLER, M., (2002), Eléments d’une sociolinguistique critique. Didier, Paris.
HELLER, M., (2001), « Discourse and Interaction », dans Schiffrin, D., Tannen, D., et Hamilton, H.
(éd.), The Handbook of Discourse Analysis, Blackwell, Oxford, pp. 250-264.
HENRI, F., et LUNDGREN-CAYROL, K., (2001), Apprentissage collaboratif à distance, Presses de
l´Université du Québec, Québec.
Références bibliographiques | 483
HENRI, F., (1992), « Computer conferencing and content analysis », dans Kaye, A. R. (éd.), Collaborative
Learning Through Computer Conferencing: The Najaden Papers, Springer, New-York, pp. 115-136.
HENRI, F., (1992), « Formation à distance et téléconférence assistée par ordinateur: interactivité, quasi-
interactivité, ou monologue? », Journal of Distance Education, no 7, vol. 1, pp. 5-24.
HENRIOT, J., (1989), Sous couleur de jouer. La Métaphore ludique, J. Corti, Paris.
HENRIOT, J., (1969), Le Jeu, Synonyme SOR, Paris.
HERDINA, P., et JESSNER, U., (2002), A Dynamic Model of Multilingualism, Multilingual Matters,
Clevedon.
HERRING, S.-C., (2004), « Computer-Mediated Discourse Analysis : An Approach to Researching
Online Behavior », dans Barab, S.A., Kling, R., et Gray, J.-H. (éd.), Designing for Virtual
Communities in the Service of Learning, Cambridge University Press, New York, pp. 338-376.
HERRON, C, CORRIE, C., DUBREUIL, S. et COLE, S., (2002), « A classroom investigation: can video
improve intermediate-level French language students’ ability to learn about a foreign culture »,
The Modern Language Journal, no 86, pp. 36-53.
HOFSTEDE, G.J., PEDERSEN, P.B., et HOFSTEDE, G., (2002), Exploring Culture. Exercises, stories and
synthetic cultures, Intercultural Press, Yarmouth, Maine.
HOFSTEDE, G., (1991), Cultures and organizations, McGraw-Hill, London.
HONJO, T., (2008), Les facteurs de transmission du japonais au sein d’unions linguistiquement mixtes dans la région
Rhône-Alpes, thèse de doctorat sous la direction de J. Billiez, Université Stendhal-Grenoble 3.
HU, A., (2000), « Intercultural Learning and its difficult aspects. An analysis of the criticism in relation to
a controversial concept », dans Harden, T., and Witte, A. (éd.), The Notion of Intercultural
Understanding in the Context of German as a Foreign Language, Iudicium, Bern.
HUMPHREY, D., (2007), Intercultural Communication Competence: the State of Knowledge. Disponible sur :
http://www.cilt.org.uk/standards/donnareport.pdf (04/08/2009).
HUO, D., (non daté), L’inconscient est structuré comme l’écriture chinoise. Disponible sur :
http://www.lacanchine.com (10/10/09).
HUVER, E., et MOLINIE, M. (dir.), (2009), Praticiens et chercheurs à l’écoute du sujet plurilingue. Réflexivité et
interaction biographique en sociolinguistique et en didactique, Université de Picardie. Disponible sur :
http://www.u-picardie.fr/LESCLaP/spip.php?rubrique101
HYMES, D., (1984), Vers une compétence de communication. Didier, Paris.
INGRAM, D., et O’NEILL, S., (2002), « The enigma of cross-cultural attitudes in language teaching: Part
2 », Babel (AFMLTA), no 36, pp. 17-22.
ISAMBERT-JAMATI, V., (1970), Crises de la société, crises de l’enseignement, PUF, Paris.
JACCOUD, M., et MAYER, R., (1997), « L’observation en situation et la recherche qualitative », dans
Poupart, J., et Groupe de recherche interdisciplinaire sur les méthodes qualitatives (dir.), La
recherche qualitative enjeux épistémologiques et méthodologiques, G. Morin, Montréal.
JAFFRÉ, J. P., (2004), « La littéracie. Conceptions théoriques et pratiques d’enseignement de la lecture-
écriture », dans Barré-De Miniac, C., Brissaud, C., et Rispail, M. (dir.), La litéracie : histoire d’un
mot, effets d’un concept, L’Harmattan, Paris.
JAROUSSE, J.-P., (1993), L’école primaire en Afrique. Analyse pédagogique et économique. Le cas du Togo,
L’Harmattan, Paris.
JEZEGOU, A., (2007), « La distance en formation. Premier jalon pour une opérationnalisation de la
théorie de la distance transactionnelle. », Distances et savoirs, n° 3, vol. 5, Cned/Lavoisier,
Paris, pp. 341-366.
JO, H-Y., (2001), « Heritage’ language learning and ethnic identity: Korean Americans’ struggle with
language authorities », Language, Culture and Curriculum, no 14, pp. 26-41.
JOBE, A., (1992), « Le répertoire de l’enfant gambien, compte rendu d’enquête », Lidil, n°6, pp. 27-51.
JODELET, D. (éd.), (1989), Les représentations sociales, PUF, Paris.
484 | Références bibliographiques
JOGAN, M. K., HEREDIA, A. H., et AGUILERA, G. M., (2001), « Cross-cultural e-mail: providing
cultural input for the advanced foreign language student », Foreign Language Annals, no 34, pp.
41-46.
JOSHUA, S., (1996), « Le concept de transposition didactique n’est-il propre qu’aux mathématiques ? »
dans Raisky, C., et Caillot, M. (dir.), Au delà des didactiques, la didactique. Débats autour des concepts
fédérateurs, De Boeck, Bruxelles, pp. 61-73.
JUILLARD, C., (1999), « L’observation des pratiques réelles » dans Calvet, L-J., et Dumont, P. (dir.),
L’enquête sociolinguistique, L’Harmattan, Paris, pp. 103-123.
KABORE, B., (2009), « Quel partenariat français/langues nationales dans le système éducatif burkinabè ?
dans Napon, A. (dir.), Actes du septième colloque inter-universitaire sur la coexistence des langues en
Afrique de l’Ouest (20-22 octobre 2008), Université de Ouagadougou, Presses Universitaires de
Ouagadougou, Ouagadougou, pp. 233-251.
KADI, L., et BARRÉ-DE MINIAC, C. (dir.), (2009), Littéracie et contexte plurilingue. Synergie Algérie, n° 6.
KALFON, P., (1967), Argentine, Seuil, Paris.
KALLMEYER, W., (2004), « Variation multilingue et styles sociaux communicatifs. L’exemple de jeunes
migrants turcs en Allemagne », Langage & société, no 109, pp. 75-93.
KANOUTE, F., (2002), « Un regard "sociométrique" sur la classe : pour mieux enseigner et pour mieux
intégrer », Vie pédagogique, n° 122, pp. 24-26. Disponible sur :
http://www.viepedagogique.gouv.qc.ca/numeros/122/vp122_24-26.pdf (21/04/07).
KARA, M., et PRIVAT, J. M. (dir.), (2006), « La littératie. Autour de Jack Goody », Pratiques, n° 131-132.
KARSENTI, T., et SAVOIE-ZAJC, L., (2004), La recherche en éducation : étapes et approches (3e éd. revue et
corr.), Éditions du CRP, Sherbrooke.
KARSENTI, T., et SAVOIE-ZAJC, L., (2000), Introduction à la recherche en éducation, Éditions du CRP,
Sherbrooke.
KAUFMANN, J.-C., (2001), L’entretien compréhensif, (2e éd.), Nathan, Paris.
KELLERMAN, E., (2000), « Lo que la fruta puede decirnos acerca de la transferencia léxico-semántica:
una dimensión no estructural de las percepciones que tiene el aprendiz sobre las relaciones
lingüísticas », dans Muñoz, C. (éd.), Segundas Lenguas. Adquisición en el aula. Ariel, Barcelona, pp.
21-37.
KENDRICI, M., et MCKAY, R., (2002), Uncovering Literacy Narratives through Children’s Drawings,
Canadian Journal of Education, no 27, pp. 45-60.
KERBRAT-ORECCHIONI, C., (2005), Le discours en interaction. Armand Colin, Paris.
KERBRAT-ORECCHIONNI, C., (1996), La conversation, Seuil, Paris.
KERBRAT-ORECCHIONI, C., (1990-1994), Les interactions verbales, tomes 1, 2, 3, Armand Colin, Paris.
KERBRAT-ORECCHIONI, C., (1980 -2002), L’énonciation de la subjectivité dans le langage, Armand Colin,
Paris.
KERN, R. G., (1995), « Restructuring classroom interaction with networked computers: effects on
quantity and characteristics of language production », dans The Modern Language Journal, no 79,
pp. 457-476.
KLETT, E., (2007), « Características discursivas de la comunicación en clase de lengua extranjera », dans
Vallejos Llobet, P. (coord.), Los estudios del discurso: nuevos aportes desde la investigación en la Argentina,
EDIUNS, Bahía Blanca, pp. 75-102.
KOHLS, L. R., et KNIGHT, J. M., (1994), Developing intercultural awareness: A cross-cultural training handbook
(2e éd.), Intercultural Press, Yarmouth, ME.
KÖTTER, M., (2000), « MOOrituri te salutant? Language learning through MOO-based synchronous
exchanges between learner tandems», Computer Assisted Language Learning, no 14, pp. 289-304.
KRAMER, J., (1997), British Cultural Studies, Wilhelm Fink, München.
Références bibliographiques | 485
KRAMSCH, C., (1995), Redefining the Boundaries of Language Study, Heinle and Heinle, Boston,
Massachusetts.
KRIEG-PLANQUE, A, (2007), « Travailler les discours dans la pluridisciplinarité, Exemples d’une
« manière de faire » en analyse du discours », dans Bonnafous, S., et Temmar, M. (éd.), Analyse
du discours et sciences humaines et sociales, Ophrys, Paris, pp. 57-71.
KRISTEVA, J., (2007), « Diversité c’est ma devise » dans Kristeva, J., Diversité et culture, Édition bilingue
Cultures France, Paris. Disponible sur : http://www.kristeva.fr/diversite.html (30/04/2009).
KRISTEVA, J., (1995), « Bulgarie, ma souffrance ». L’Infini, n° 51, pp. 42-52. Disponible sur :
http://www.kristeva.fr/bulgarie.html) (30/04/2009).
KRUMM, H. J., (2008), « Plurilinguisme et subjectivité : "Portraits de langues" par les enfants
plurilingues », dans Zarate, G., Lévy, D., et Kramsch, C. (éd.), Précis du plurilinguisme et du
pluriculturalisme, Éditions des archives contemporaines, Paris, pp. 109-112.
LACOMBE, D., (2009), Enseigner et apprendre le français à Mayotte : pour une didactique de l’oral, Mémoire de
master 2, Montpellier III.
LAFAGE, S., (1977), « Facteurs de différenciation entre le français central et le français d'Afrique », CIRL
( Abidjan), 1, pp. 1-69.
LAHANIER-REUTER, D., et REUTER, Y., (2002), « Écrits et apprentissages. Première approche dans
quatre disciplines au collège», Pratiques, n° 113-114, pp. 113-134.
LAHIRE, B., (1995), Tableaux de famille, Gallimard Le Seuil, Paris.
LAHIRE, B., (1993), Culture écrite et inégalités scolaires. Sociologie de l’échec scolaire à l’école
primaire, PUF, Paris.
LAINE, A., (1996), Faire de sa vie une histoire, Desclée de Brouwer, Paris.
La lettre de la DFLM, (2002), PISA et la littératie, pp. 3-36.
LAMBERT, P., (2005), Les répertoires plurilectaux de jeunes filles d’un lycée professionnel. Une approche
sociolinguistique ethnographique, Thèse de doctorat sous la direction de J. Billiez, Université
Stendhal-Grenoble 3.
LAMY, M.-N., et HAMEL, R., (2007), Online Communication in Language Learning and Teaching, Palgrave
Macmillan. Basingstoke (U.K.).
LAMY, M.-N., MANGENOT, F., et NISSEN, E., (2007), Actes du colloque EPAL (Echanger pour apprendre
en ligne), Grenoble 7-9 juin 2007. Disponible sur : http://w3.u-grenoble3.fr/epal/actes.htm
LAMY, M.-N., et GOODFELLOW, R., (1998), « Conversations réflexives dans la classe de langues
virtuelle par conférence asynchrone », ALSIC, n° 2, vol. 1, pp. 81-99. Disponible sur :
http://alsic.org
LANTOLF, J. P., (2000), « Second language learning as a mediated process », Language Teaching, no.33, pp.
79-96.
LANTOLF, J.P., (2000), « Introducing sociocultural theory », dans Lantolf, J.P. (éd.), Sociocultural theory
and second language learning, Oxford University Press, Oxford.
LANTOLF, J. P., (1999), « Second culture acquisition. Cognitive considerations», dans Hinkel, E., Culture
in second language teaching and learning, Cambridge University Press, Cambridge, pp. 28-46.
LAPASSADE, G., (1996), Les microsociologies, Economica, Paris.
LAPERRIÈRE, A., (2003), « L’observation directe », dans Gauthier, B. (dir.), Recherche sociale : de la
problématique à la collecte des données, Presses de l’Université du Québec, Sainte-Foy, Québec.
LATOUR, B., (2001), Le métier de chercheur, regard d’un anthropologue, INRA éditions, Paris.
LAVOIE, L., MARQUIS, D., et LAURIN, P., (1996), La recherche-action - Théorie et pratique. Manuel
d’autoformation, Presses de l’Université du Québec, Québec.
LE BOTERF, G., (1994), De la compétence: essai sur un attracteur étrange, Éditions d’organisation, Paris.
LEBRUN, M. (dir.), (2004), Les pratiques de lecture des adolescents québécois, Éditions MultiMondes, Québec.
486 | Références bibliographiques
MALATESHA JOSHI, R., et AARON, P. G. (dir.), (2005), Handbook of orthography and literacy, Lawrence
Erlbaum associates, publishers, Mahwah, New Jersey, London.
MALDIDIER, D. (éd.), (1990), L’inquiétude du discours, Textes de Michel Pêcheux, éd. des Cendres, Paris.
MANESSY, G., BENIAMINO, M., et BAVOUX, C., (1994), Le français en Afrique noire : mythes, stratégies,
pratiques, L’Harmattan, Paris.
MANESSY, G., (1992), « Normes endogènes et normes pédagogiques en Afrique noire », dans Baggioni,
D. (dir.), Multilinguisme et développement dans l’espace francophone, Didier érudition, Paris, pp. 43-75.
MANGENOT, F., et DEJEAN-THIRCUIR, C., (2009), « Modalités de communication pédagogique
dans la formation en ligne », dans Canelas-Trevisi, S., et al. (dir.), Langage, objets enseignés et travail
enseignant, Ellug, Grenoble, pp. 335-351.
MANGENOT, F., et SALAM, P.-L., (2009), « Quelles normes langagières dans les échanges
pédagogiques en ligne ? Une étude de cas », dans Actes du Colloque International : Quel Français
enseigner, la question de la norme dans l’enseignement / apprentissage, Éditions de l’École Polytechnique,
Paris.
MANGENOT, F., et TANAKA, T., (2008), « Les enseignants de langue comme médiateurs entre deux
cultures dans les interactions en ligne : le cas d’un échange franco-japonais », dans Apprentissage
des langues et systèmes d’information et de communication, no 1, vol. 11, pp. 33-59. Disponible sur :
http://alsic.org
MANGENOT, F., (2007), « Analyser les interactions pédagogiques en ligne, pourquoi, comment ? », dans
Gerbault, J. (coord.), La langue du cyberespace : de la diversité aux normes, L’Harmattan, Paris, pp.
105-120.
MANGENOT, F., et NISSEN, E., (2006), « Collective activity and tutor involvement in e-learning
environments for language teachers and learners », dans Calico Journal, no 3, vol. 23, pp. 601-
622.
MANGENOT, F., (2006), « Analyser les interactions pédagogiques en ligne, pourquoi, comment ? »
Revista Intercompreensão, no 13 (dezembro 2006), Cosmos, Escola Superior de Educação de
Santarém, Portugal.
MANGENOT, F., (2004), « Analyse sémio-pragmatique des forums pédagogiques sur Internet », dans
Salaün, J.-M., et Vandendorpe, C. (coord.), Les défis de la publication sur le Web : hyperlectures,
cybertextes et méta-éditions, Presses de l’Enssib, Villeurbanne, pp. 103-123.
MANGENOT, F., (2003), « Tâches et coopération dans deux dispositifs universitaires de formation à
distance », ALSIC, no 1, vol. 6, pp. 109-125. Disponible sur : http://alsic.org
MANGENOT, F., (2002), « Forums et formation à distance : une étude de cas », Education permanente, no
152, pp. 109-119.
MARCOTTE, J.-F., (2001), « Communautés virtuelles : la formation et le maintien des groupes sur
Internet », Esprit critique, pp. 3-10. Disponible sur : (http://www.espritcritique.org
(23/09/2009).
MARIEN, B., (2004), Principes d’analyse statistique pour sociolinguistes. Disponible sur http://www.sdl-
old.auf.org/documents/MarienAufcorrSTAT.pdf (04 septembre 2009).
MARIEN, B., et BEAUD, J.-P., (2003), Guide pratique pour l’utilisation de la statistique en recherche: le cas des
petits échantillons. Disponible sur http://www.sdl.auf.org/IMG/pdf/Guide_de_statistiques.pdf
(04 septembre 2009).
MARKEE, N., (2000), Conversation Analysis, Erlbaum, Mahwah, New Jersey.
MARKOVÁ, I., (2003), Dialogicality and Social Representations, Cambridge University Press, Cambridge.
MARQUILLÓ-LARRUY, M. (dir.), (2001), Questions d’épistémologie en didactique du français (langue maternelle,
langue seconde, langue étrangère, Actes des journées d’études DFLM, 20-22 janvier 2000, Les
Cahiers du FORELL, Université de Poitiers.
MARQUILLÓ-LARRUY, M., (2000), « Métaphores et représentations du cerveau plurilingue », dans Py,
B. (éd.), Analyse conversationnelle et représentations sociales, TRANEL, no 32, pp. 115-146.
488 | Références bibliographiques
MARTIN, D., (2003), « Forum de discussion en formation des maîtres : apprentissage de la délibération
collégiale », dans Deaudelin, C., et Nault, T. (coord.), Collaborer pour apprendre et faire apprendre. La
place des outils technologiques, Presses de l’Université du Québec, Québec, pp. 103-119.
MARTINAND, J.-L., (1995), « La référence et l’obstacle » dans [collectif], Perspectives documentaires en
éducation, n° 34, INRP, Lyon, pp. 7-22.
MARTINAND, J.-L., (1986), Connaître et transformer la matière, Peter Lang, Berne.
MARTINEZ, P., MILED, M., et TIRVASSEN, R. (coord.), (à paraître, 2011), Des programmes au curriculum
en langues et cultures étrangères, Le français dans le monde, Recherches et Applications, Clé
international, Paris.
MARTINEZ, P., (2005), « Itinéraires, carrefours et curriculum », dans Mochet, M.-A., et coll. (éd.),
Plurilinguisme et apprentissages, Mélanges Daniel Coste, ENS Éditions, Paris, Lyon, pp. 121-132.
MARTINEZ, P., (2002), Le français langue seconde. Apprentissage et curriculum, Maisonneuve et Larose, Paris.
MARTINEZ, P., (1996), La didactique des langues étrangères, PUF, Paris.
MATTHEY, M., (2005), « Le français à l’école et ailleurs, langue des apprentissages et de la socialisation »,
dans Conti, V., et Pietro (de), J.-F. (éd.), L’intégration des migrants en terre francophone, aspects
linguistiques et sociaux, éd. Lep, Lausanne.
MATTHEY, M., (2003), Apprentissage d’une langue et interaction verbale, 2e éd, Peter Lang, Berne.
MAUNY, R., (1952), Glossaire des expressions et termes locaux employés dans l’Ouest africain, IFAN,
« Catalogues », Dakar.
MAURER, B., (2009), « Éléments de réflexion pour une didactique du plurilinguisme en Afrique
francophone », Actes de la Journée d’étude NeQ, janvier 2009, Université de Tours, Les Cahiers
de l’Acedle, n°6.
MAURER, B., (2007), « Introduction des langues maliennes dans le système éducatif et effets éventuels
sur les hiérarchies sociolinguistiques », dans Chevalier, G., Les actions sur les langues. Synergie et
partenariat, Archives contemporaines, collection « Actualité scientifique », Paris.
MAURER B., (2007), De la pédagogie convergente à une didactique intégrée. Langues africaine – langue française, OIF-
L’Harmattan, Paris.
MAURER, B., (1995), « La didactique du français langue seconde, entre approches communicatives et
français de scolarisation », Tréma, n° 7, pp. 13-25.
MAY, M., GEORGE, S., et PREVOT, P., (2008), « Tracer, analyser et visualiser les activités de
communications médiatisées des apprenants », dans Actes du colloque JOCAIR 2008, pp. 251-263.
Disponible sur : http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/38/58/17/PDF/Jocair-Draft.pdf
(21/07/2009).
MEINTEL, D., (1989), « Satellite Famille et communautés culturelles Atelier II », Le Regroupement inter-
organismes pour une politique familiale au Québec, no 1. Disponible sur :
http://www.familis.org/riopfq/publication/pensons7/meintel.html.
MEISSNER, F.-J., MEISSNER, C., KLEIN, H., et STEGMANN, T., (2004), EuroComRom. Les sept tamis.
Lire les langues romanes dès le début, Shaker-Verlag, Aachen.
MERTON, R., FISKE, M., et KENDALL, P. L., (1990), The Focused Interview, 1ère éd. 1956, The Free
Press, New-York.
MESURE, S., et SAVIDAN, P., (2006), Le dictionnaire des sciences humaines, PUF, Paris.
MIALARET, G., (2004), Les Méthodes de recherche en science de l’éducation, PUF, Paris.
MICC, (2006), Rapport annuel de gestion 2005-2006. Disponible sur :
http://www.micc.gouv.qc.ca/publications/fr/ministere/rapport-annuel/Rapport-annuel-2005-
2006.pdf
MILES, M. B., HUBERMAN, A. M., et BONNIOL, J.-J., (2003), Analyse des données qualitatives (2e éd.),
De Boeck Université, Bruxelles.
Références bibliographiques | 489
MILES, M. B., et HUBERMAN, A. M., (1984), « Drawing valid meaning from qualitative data: toward a
shared craft », Educational researcher, no 13, vol. 4, pp. 20-30.
MILLER, J., (2003), Audible Difference, Multilingual Matters, Clevedon.
MOEGLIN, P. (dir.), (1998), L’industrialisation de la formation. État de la question, CNDP Paris.
MOIRAND, S., (1990), « Pour une linguistique de discours adaptée à des objectifs didactiques », Journal of
Applied Linguistics 6, pp. 59-74.
MOIRAND, S., (1988), Une histoire de discours…, Hachette, Paris.
MOLINIE, M. (éd.), (2009), Le dessin réflexif. Élément pour une herméneutique du sujet plurilingue, CRTF-
Encrages, Belles Lettres, Amiens.
MOLINIE, M., (2008), « Variations identitaires et réflexivité en contexte plurilingue », dans Martinez, P.,
Moore, D., et Spaëth, V., Plurilinguismes et enseignement, identités en construction, Riveneuve éditions,
Paris, pp. 47-61.
MOLINIE, M., (2006), « Construire une identité d’enseignant francophone », dans Chaulet-Achour, C.
(dir.), Convergences francophones, CRTF, Encrage-Les Belles ettres, Amiens.
MOLINIÉ, M. (dir.), (2006), « Biographie langagière et apprentissage plurilingue », Le français dans le
monde. Recherches et applications, n° 39, Clé International, Paris.
MOLINIE, M., et BISHOP, M.-F. (dir.), (2006), Autobiographie et réflexivité, CRTF- Encrage-Les Belles
Lettres, Amiens.
MOLINIÉ, M., (2004), « Finalités du "biographique" en didactique des langues », dans Le Français
aujourd’hui, Le biographique, n° 147, pp. 87-95.
MOLINIÉ, M., (2002), « Discontinuité sociolinguistique et cohérence biographique », dans Bulletin vals-
asla, n° 76, Bulletin suisse de linguistique appliquée, pp. 99-113.
MOLINIE, M., (2000), « Écrire son histoire pour penser la culture », dans Lainé, A., Les histoires de vie,
Théories et pratiques, Education Permanente, n° 142, Paris.
MONDADA, L., (2007), « Le code switching comme ressource pour l’organisation de la parole en
interaction », Journal of language contact. Thema, no 1, pp. 168-197. Disponible sur :
http://cgi.server.uni-frankfurt.de/fb09/ifas/JLCCMS/issues/THEMA_1/JLC_THEMA_
1_2007_08Mondada.pdf.
MONDADA, L., (2001), « Analyser les interactions en classe : quelques enjeux théoriques et repères
méthodologiques », TRANEL, no 22, Université de Neuchâtel, Neuchâtel.
MOORE, D., et GAJO, L., (2009), « Introduction. French Voices on Plurilingualism and Pluriculturalism.
Theory, Significance and Perspective», International Journal of Multilingualism, no 6, vol. 2, pp. 137-
153.
MOORE, D., et CASTELLOTTI, V., (2008), La compétence plurilingue : regards francophones, Peter Lang,
Berne.
MOORE, D., (2006), Plurilinguismes et école, Didier, Paris.
MOORE, D., (2005), « Rencontres graphiques, pratiques cross-scripturales et mondes imaginés », dans
Synergie France, no 4, pp. 58-75.
MOORE, D. (éd.), (2001), Les représentations des langues et de leur apprentissage : Références, modèles, données et
méthodes, Collection Essais, Didier-Crédif, Paris.
MOORE, D., et CASTELLOTTI, V., (2001), « Comment le plurilinguisme vient aux enfants », dans
Castellotti, V. (éd.), D’une langue à d’autres : Pratiques et représentations, Dyalang, Rouen, pp. 151-190.
MOORE, M.-G., (1993), «Theory of transactional distance », dans Keegan, D. (dir.), Theoretical
Principles of Distance Education, Routledge, New York, pp. 22-38.
MORGAN, C., (1993), « Attitude change and foreign language culture learning », Language Teaching, no. 26,
pp. 63-75.
MORGENSTEIN, S., (1928), Psychanalyse infantile. Symbolisme et valeur clinique des créations imaginatives chez
l’enfant, Denoël, Paris.
490 | Références bibliographiques
MORIN, E., (2005), Communication et complexité, introduction à la pensée complexe, 1ère éd. 1990,
Seuil, Paris.
MORIN, E., MOTTA, R., et CIURANA, E.-R., (2003), Éduquer pour l’Ère Planétaire. La pensée complexe
comme méthode d’apprentissage dans l’erreur et l’incertitude humaines, Balland, Paris.
MORIN, E, (1999), Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Seuil, Paris.
MORIN, E., (1991), Les idées (La Méthode, tome IV), Seuil, Paris.
MORIN, E., (1990). Introduction à la Pensée Complexe. ESF, Paris.
MORIN, E, (1986), La connaissance de la connaissance (La Méthode, tome III), Seuil, Paris.
MORIN, E., (1982), Science avec conscience, Fayard, Paris.
MORIN, E., (1977-2004), La Méthode, Seuil, Paris (6 tomes).
MOSCOVICI, S., et BUSCHINI, F. (éd.), (2003), Les méthodes des sciences humaines, PUF, Paris.
MOSCOVICI, S., (2003), « Des représentations collectives aux représentations sociales : éléments pour
une histoire », dans Jodelet, D. (dir.), Les représentations sociale, PUF, Paris.
MOURLHON-DALLIES, F., (2008), Enseigner une langue à des fins professionnelles, Didier, Paris.
MOURLHON-DALLIES, F., (2007), « Communication électronique et genres du discours », Glottopol,
vol. 10. Disponible sur : http://www.univ-rouen.fr/dyalang/glottopol
MRCI, (1997), Les besoins relatifs à l’apprentissage et à l’usage du français chez les immigrants adultes admis au Québec
entre 1992 et 1995 et ne connaissant pas le français (région de Montréal).
MUCCHIELLI, A., (2003), L’identité, PUF, Paris.
MUCCHIELLI, R., (1998), L’analyse de contenu des documents et des communications, ESF éditeur, Paris.
MÜLLER-JACQUIER, B., (2000), «Intercultural training», dans Byram, M. (éd.), Routledge Encyclopedia of
Language Teaching and Learning, Routledge, London.
NAPON, A., (2007), « Les obstacles sociolinguistiques à l’introduction des langues nationales dans
l’enseignement primaire au Burkina Faso », dans Compaoré, F., (dir), La question éducative au
Burkina Faso. Regards pluriels, Imprimerie de l’avenir du Burkina, Ouagadougou, pp. 253-264.
NAPON, A., (1994), « Pour un bilinguisme français/langues nationales. Propositions de
glottopolitiques », dans Direction Générale de l’Institut National d’Alphabétisation (dir.), Les
langues nationales dans les systèmes éducatifs du Burkina Faso : état des lieux et perspectives, Actes du
colloque organisé du 2 au 5 mars 199[3] à Ouagadougou, MEBAM-DGINA, Ouagadougou,
pp. 94-101.
NARCY-COMBES, J.-P., (2005), Didactique des langues et TIC : vers une recherche-action responsable, Ophrys,
Paris.
NARCY-COMBES, M.-F., (2005), Précis de didactique, Devenir professeur de langue, Ellipses, Paris.
NATIONAL STANDARDS IN FOREIGN LANGUAGE EDUCATION PROJECT, (1996), Standards
for Foreign Language Learning: Preparing for the 21st Century (SFLL), Allen Press, Lawrence, KS.
NAULT, G., et NAULT, T., (2003), « Communauté virtuelle : un soutien pour des enseignants novices
en cheminement vers la collégialité », dans Deaudelin, C., et Nault, T. (coord.), Collaborer pour
apprendre et faire apprendre. La place des outils technologiques, Presses de l’Université du Québec,
Québec, pp. 191-210.
NEUMAN, S. B., et DICKINSON, D. K. (dir.), (2001), Handbook of early literacy research, The Guilford
Press, New-York-London.
NICOT-GUILLOREL, M., (2008), Dires d’enseignants sur l’apprentissage de la lecture : un élément pour interpréter
les résultats d’élèves de 2e année du primaire en lecture compréhension à Madagascar ?, Le Français dans le
Monde, Recherches et applications, juillet 2008, Clé international, Paris, pp. 85-97.
NICOT-GUILLOREL, M., (2002), Écritures et multilinguisme. Apprendre à lire et à écrire à l’école ivoirienne en
français, dioula ou sénoufo par des enfants monolingues ou bi(pluri)lingues, L’Harmattan, Paris.
NIEDZIELSKI, N., et PRESTON, D., (2000), Folk Linguistics, Mouton de Gruyter, The Hague.
Références bibliographiques | 491
NIKIEMA, N., (2009), « Pour un statut de "langue partenaire de scolarisation" pour le français dans
l’espace francophone », dans Napon, A. (dir.), Actes du septième colloque inter-universitaire sur la
coexistence des langues en Afrique de l’Ouest (20-22 octobre 2008),Université de Ouagadougou,
Presses Universitaires de Ouagadougou, Ouagadougou, pp. 419-458.
NORTON, B., (2000), Identity and Language Learning. Gender, ethnicity and educational change, Longman,
Harlow.
NORTON PIERCE, B., (1995), « Social identity, investment, and language learning », TESOL Quarterly,
n° 1, vol. 29, pp. 9-31.
NOYAU, C., (2009), Modalités d’optimisation du passage de L1 à L2 dans l’enseignement primaire en contexte
multilingue. Mauritanie, Mali, Seychelles, OIF, Paris.
NOYAU, C., (dir.), (2007), « Appropriation du français et construction de connaissances via la
scolarisation en situation diglossique », Université de Paris-X-Nanterre, COMETE, CD-rom.
NOYAU, C., (2006), « Le langage des maîtres comme français de référence : rôle de l’école dans la
transmission de la langue (Togo) », Le Français en Afrique, n° 21, pp. 339-350.
NOYAU, C., (2005), « Comparaisons acquisitionnelles dans l’étude du français langue seconde » dans
Ploog, K., et Rui, B. (dir.), Appropriation en contexte multilingue - éléments sociolinguistiques pour une
réflexion didactique à propos de situations africaines, Presses de l’Université de Franche-Comté,
Annales littéraires, série Linguistique et appropriation des langues, n° 3, pp. 33-57.
NOYAU, C., et KOUDOSSOU, S.-G., (2004), « Rôle des pratiques d’enseignement et des modalités
d’évaluation dans l’appropriation du français langue "seconde" à l’école : le français face aux
autres disciplines au Togo », Marges Linguistiques. Disponible sur : http://www.revue-
texto.net/1996-2007/marges/marges/000_presentations_art_html/doc0245presentation.htm
NUCHEZE (de), V., (2007), « L’Académie de Grenoble à l’épreuve des ENA(F) », Ecarts d’identité –
migration – égalité – interculturalité, n° 110, vol. 1, pp. 45-52.
NUCHEZE (de), V., (1998), Sous les discours, l’interaction, L’Harmattan, Paris.
NUNAN, D., (1992), Research Methods in Language Learning, Oxford University Press, Oxford.
NUSSBAUM, L., (2008), « Construire le plurilinguisme à l’école : de la recherche à l’intervention et de
l’intervention à la recherche », dans Candelier, M., Ioannitou, G., Omer, D., et Vasseur, M.T.
(dir.), Conscience du plurilinguisme : pratiques, représentations et interventions, PUR, Rennes, pp. 125-146.
NUSSBAUM, L., (1999), « Émergence de la conscience langagière en travail de groupe entre apprenants
de langue étrangère », Langages, no 134, pp. 35-50.
OCHS, E., et TAYLOR, C., (1996), « The father knows best’dynamic in family dinner narratives », dans
Hall, K (éd.), Gender articulated : language and the socially constructed self, Routledge, London, pp. 97-
121.
OCHS, E., et SCHIEFFELIN, B., (1995), « The impact of language socialization on grammatical
development », dans Fletcher, P., et Macwhinney, B. (éd.), The handbook of child language,
Blackwell, pp. 73-94.
OCHS, E., (1983), « Cultural dimensions of language acquisition », dans Ochs, E., et Schieffelin, B. (éd),
Acquiring conversational competence, Routledge and Keagan, London, pp. 185-191.
O’DOWD, R. (éd.), (2007), Online Intercultural Exchange, Multilingual Matters, Clevedon.
OGER, C., et OLLIVIER-YANIV, C., (2007), « Analyse du discours et sociologie compréhensive.
Retour critique sur une pratique de recherche transdisciplinaire », dans Bonnafous, S., et
Temmar, M. (éd.), Analyse du discours et sciences humaines et sociales, Ophrys, Paris, pp. 39-55.
OLIVIER de SARDAN, J.-P., (2001), « L’enquête de terrain socio-anthropologique », Enquête, pp. 63-81.
OLIVIER de SARDAN, J.-P., (1998), « Émique = Emical », L’Homme, no 147, pp. 151-166.
OLIVIER de SARDAN, J.-P., (1995), « La politique du terrain. Sur la production des données en
anthropologie », Enquête, no 1, pp. 71-112.
OLK, H. M., (2002), «Translating culture – a think-aloud protocol study », Language Teaching Research, no 6,
pp. 121-144.
492 | Références bibliographiques
PAHL, K., (2006), « An Inventory of Traces: Children´s Photographs of their Toys in three London
Homes », Visual Communication, no 5, vol. 1, pp. 95-114.
PAMBIANCHI, G., (2003), Modélisation des démarches pédagogiques dans les pratiques de classe de français langue
seconde chez les immigrants adultes, Université du Québec à Montréal, Montréal.
PAN, Y., SCOLLON, R., et SCOLLON, S., (2002), Professional communication in international settings,
Blackwell, Malden, MA.
PAPATSIBA, V., (2003), Des étudiants européens. Erasmus et l’aventure de l’altérité, Peter Lang, Bern.
PASTOR DE LA SILVA, R., (2000), « Le repérage des traces de subjectivité dans la construction de la
relation lecteur – scripteur au cours de la lecture de textes de médiacritique d’art en langue
étrangère », AILE, no 13. Disponible sur : http://aile.revues.org/sommaire71.html (14/08/09).
PAULSTON, C., (1992), Sociolinguistic perspectives in bilingual education, Multilingual Matters, Clevedon.
PAVLENKO, A., BLACKLEDGE, A., et al. (dir.), (2001), Multilingualism, Second Language Learning, and
Gender, Mouton de Gruyter, Berlin & New York.
PAVLENKO, A. et LANTOLF, J.P., (2000), « Second language learning as participation and the
(re)construction of selves », dans Lantolf, J.P. (éd.), Sociocultural theory and second language learning,
Oxford University Press, Oxford.
PAVLENKO, A., (1998), « Second language learning by adults: testimonies of bilingual writers », Issues in
Applied Linguistics, no 9, pp. 3-19.
PEIGNE, C., et RAZAFIMANDIMBIMANANA, E., (2008), « Recherches empiriques et sociétés en
mutation : questionnements autour de la notion d’"altérité" et des négociations de corpus en
Afrique du Sud et au Québec. » Conférence VALS-ASLA, Università della Svizzera italiana,
Lugano, 07-09 février 2008 (cpeigne@hotmail.com et elatiana@gmail.com ).
PEKAREK DOEHLER, S., (2006), « Analyse conversationnelle et recherche sur l’acquisition des
langues », Revue française de linguistique appliquée, no 2, vol. XI.
PEKAREK DOEHLER, S., (2000), « Approches interactionnistes de l’acquisition des langues
étrangères : concepts, recherches, perspectives », Aile, no 12. Disponible sur :
http://aile.revues.org/document934.html
PEKAREK, S., (1999), Leçons de conversation. Dynamique de l’interaction et acquisition de compétences discursives en
classe de langue seconde, éditions universitaires, Fribourg.
PENLOUP, M. C., (2007), « Literary temptation and leisure copying: spontaneous adolescent writing
practices in contemporary France », dans Lyons, M. (dir.), Personal narratives – ordinary writings,
Peter Lang, Berne.
PENLOUP, M. C., (1999), Les pratiques extrascolaires des collégiens, ESF Editeur, Paris.
PENNYCOOK, A., (2001), Critical Applied Linguistics: A Critical Introduction, Lawrence Erlbaum, Mahwah,
New Jersey, London.
PERAYA, D., (2000), « Le cyberespace : un dispositif de communication et de formation médiatisées »
dans Alava, S. (éd.), Cyberespace et formations ouvertes. Vers une mutation des pratiques de formation, De
Boeck, Bruxelles, pp. 17-44.
PERREGAUX, C., (2002), « (Auto)biographies langagières en formation et à l’école : pour une autre
compréhension du rapport aux langues », Bulletin Vals-Asla, n° 76, Bulletin suisse de
linguistique appliquée, Biel/Bienne, pp. 81-94.
PERRENOUD, P., (1999), « D’une métaphore à l’autre: transférer ou mobiliser ses connaissances? »,
dans Dolz, J., et Ollagnier, E., L’énigme de la compétence en éducation, De Boeck, Bruxelles, pp. 45-
60.
PERRENOUD, P., (1998), « La transposition didactique à partir des pratiques : des savoirs aux
compétences », dans Revue des Sciences de l’éducation, n° 3, vol. XXIV, pp. 487-514. Disponible
sur :
http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1998/1998_26.html
Références bibliographiques | 493
PERRIN-GLORIAN, M.-J., et REUTER, Y., (2006), Les méthodes de recherche en didactique. Presses
Universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Ascq.
PEYTARD, J., et MOIRAND, S., (1992), Discours et enseignement du français, Hachette, Paris.
PHILLIPSON, R., (1992), Linguistic Imperialism, Oxford University Press, Oxford.
PIAGET, J., et INHELDER, B., (1966), La psychologie de l’enfant et de l’adolescent, PUF, Paris.
PIETRO (de), J.-F., (1994), « Une variable négligée : les attitudes », Education et recherche, no 18, pp. 89-111.
PIETRO (de), J-F., et MATTHEY, M., (1993), « "Comme Suisses Romands, on emploie déjà tellement
de germanismes sans s’en rendre compte…" Entre insécurité et identité linguistiques : le cas du
français à Neuchâtel (Suisse) », Cahiers de l’Institut Linguistique de Louvain, n° 3-4, pp. 121-136.
PIETRO (de), J.-F., MATTHEY, M., et PY, B., (1989), « Acquisition et contrat didactique : les séquences
potentiellement acquisitionnelles dans la conversation exolingue », dans Weil, D., et Fugier, H.
(éd.), Actes du troisième Colloque régional de linguistique, Université des Sciences humaines,
Strasbourg.
PILKINGTON, R., (2004), « Developping discussion for learning », Journal of Computer-Assisted Learning,
n° 3, vol. 20, pp. 161-164.
PILKINGTON, R., (1999), Analysing educational discourse: The DISCOUNT Scheme (CBLU Technical
Report 99/2), Université de Leeds, UK. Rapport disponible auprès de l’auteur
(r.m.pilkington@bham.ac.uk).
PINEAU, G., et LEGRAND, J.-L., (1993), Les histoires de vie, coll. Que sais-je ? n°2760 ?, PUF, Paris.
PINEAU, G., et MICHELLE, M., (1983), Produire sa vie, autoformation et autobiographie, Edilig, Montréal.
PLANE, S., (2000), « Diffusion et destinataires de la recherche en didactique » dans Marquilló-Larruy, M.
(coord.), Questions d’épistémologie en didactique du français, DFLM/Cahiers du FORELL, MSHS,
Poitiers, pp. 227-234.
PLANE, S., (1995), Didactique et pratiques d’écriture, Nathan, Paris.
POIRIER, J., CLAPIER-VALLADON, S., et RAYBAUT, P., (1983), Les récits de vie. Théorie et pratique,
PUF, Paris.
PORQUIER, R., et PY, B., (2004), Apprentissage d’une langue étrangère : contextes et discours. Didier, Paris.
PORQUIER, R., (1995), « Trajectoires d’apprentissage des langues: diversité et multiplicité des
parcours », Études de linguistique appliquée, n° 98, pp. 92-102.
PORQUIER, R., (1984), « Communication exolingue et apprentissage des langues », Acquisition d’une
langue étrangère III, Actes du 5e Colloque international, Acquisition d’une langue étrangère :
perspectives et recherches, Encrages, no spécial, pp. 17-47.
POSTIC, M., et KETELE (de), J.-M., (1988), Observer les situations éducatives, PUF, Paris.
POUPART, J., (1997), « L’entretien de type qualitatif : considérations épistémologiques théoriques et
méthodologiques », dans Poupart, J., et al. (dir.), La recherche qualitative. Enjeux épistémologiques et
méthodologiques, Gaétan Morin Editeur, Chenelière Édition, Québec, pp. 173-209.
POUPART, J., et GROUPE DE RECHERCHE INTERDISCIPLINAIRE SUR LES MÉTHODES
QUALITATIVES, (1997), La recherche qualitative enjeux épistémologiques et méthodologiques, Gaétan
Morin Editeur, Montréal.
POURTOIS, J.-P., et DESMET, H., (1988), Épistémologie et instrumentation en sciences humaines, P. Mardaga,
Liège.
PUDAL, R., (2004), « La difficile réception de la philosophie analytique en France », Sciences Humaines,
Revue d’histoire des sciences humaines, n° 11, vol. 2, pp. 69-100.
PUREN, C., (2006), « Explication de textes et perspective actionnelle : la littérature entre le dire scolaire
et le faire social ». Disponible sur : http://www.aplv-
languesmodernes.org//spip.php?article389.
494 | Références bibliographiques
PUREN, C., (2001), « Processus et stratégies de formation à la recherche en didactique des langues-
cultures », ÉLA revue de didactologie des langues-cultures, n° 123-124, Didier-Érudition, Paris,
pp. 293-418.
PUREN, C., (2000), « Méthodes et constructions méthodologiques dans l’enseignement et l’apprentissage
des langues », Les Langues modernes, n° 1, pp. 62-70.
PUREN, C., (1999), « Observation de classes et didactique des langues », Études de linguistique appliquée,
n° 114, pp. 133-140.
PUREN, C., BERTOCCHINI, P., et COSTANZO, E., (1998), Se former en didactique des langues, Ellipses,
Paris.
PUREN, C., (1994), La Didactique des langues à la croisée des méthodes. Essai sur l’éclectisme, CRÉDIF
- Didier, Paris.
PUREN, C., (1994), « Quelques remarques sur l’évolution des conceptions formatives en FLE de 1925 à
1975 », Études de Linguistique Appliquée, n° 95, pp. 13-23.
PUREN, C., (1988), Histoire des méthodologies de l’enseignement des langues, Nathan, Paris.
PY, B., (2004), « Pour une approche linguistique des représentations sociales », Langages, n° 154, pp. 6-19.
QI, D. S., (2001), « Identifying and bridging cross-cultural prototypes: exploring the role of collaborative
dialogue in second language lexical meaning acquisition », The Canadian Modern Language Review/
La Revue canadienne des langues vivante, no 58, pp. 246-272.
QUINTIN, J.J., (2008), Accompagnement tutoral d’une formation collective via Internet - Analyse des effets de cinq
modalités d’intervention tutorale sur l’apprentissage en groupes restreints, thèse de doctorat, Université de
Mons-Hainaut, Laboratoire LIDILEM.
QUINTIN, J.J., (2007), Accompagnement d’une formation asynchrone en groupe restreint : modalités
d’intervention et modèles idiosyncrasiques des tuteurs, dans Lamy, M.-N., Mangenot, F., et
Nissen, E., Actes du colloque EPAL (Echanger pour apprendre en ligne), Grenoble 7-9 juin 2007.
Disponible sur : http://w3.u-grenoble3.fr/epal/actes.htm
QUIVY, R., et CAMPENHOUDT, L. V., (1995), Manuel de recherches en sciences sociales, Dunod, Paris.
RAISKY, C., et CAILLOT, M., (1996), Au delà des didactiques, la didactique. Débats autour de concepts fédérateurs,
De Boeck, Bruxelles.
RAMPTON, B., (2006), Language in late modernity: Interaction in an urban school, Cambridge University Press,
Cambridge.
RAMPTON, B., (1995 et 2005), Crossing: Language and Ethnicity among Adolescents, St Jerome Publishing,
Manchester.
RAO, Z., (2002), « Chinese students’ perceptions of communicative and non-communicative activities in
the EFL classroom », System, no 30, pp. 85-105.
RATHJE, S., (2006), « Interkulturelle Kompetenz. Zustand und Zukunft eines umstrittenen Konzepts »,
Zeitschrift für Interkulturellen Fremdsprachenunterricht, no 11.
RAZAFIMANDIMBIMANANA, E., (2009), Autoportraits d’enfants migrants plurilingues en classe
d’accueil à Montréal : une démarche altéro-réflexive, dans Molinié, M. (éd.), Le dessin réflexif.
Élément pour une herméneutique du sujet plurilingue, CRTF-Encrages, Belles Lettres, Amiens, pp. 141-
163.
REASON, P., et BRADBURY, H., (2000), The Handbook of Action Research: participative inquiry in
practice, Sage, London.
REBOUL, O., (1984), Le langage de l’éducation, PUF, Paris.
REPOBLIKAN’I MADAGASIKARA, (2006), Madagascar Action Plan 2007-2012, Antananarivo.
REUTER, Y., (2008), « Synthèse. Didactique du français : éléments de réflexion et de proposition », dans
Didactique du français, De Boeck, Bruxelles, pp. 211-234.
Références bibliographiques | 495
REUTER, Y., (2006), « Penser les méthodes de recherche en didactique » dans Perrin-Glorian, M.-J., et
Reuter, Y. (éd.), Les méthodes de recherche en didactique, Presses Universitaires du Septentrion,
Villeneuve d’Ascq, pp. 13-26.
REUTER, Y., (2006), « À propos des usages de Goody en didactique. Éléments d’analyse et de
discussion », Pratiques, no 131-132, pp. 131-154.
REUTER, Y., (2003), « La littéracie. Perspectives pour la didactique », Lidil, no 27, pp. 11-23.
REY, B, CARETTE, V., et KAHN, S., (2002), Lignes directrices pour la construction d’outils d’évaluation relatifs
aux socles de compétences, Rapport auprès de la Commission des outils d’évaluation, Bruxelles.
RICHARDS, J.-C., (2001), Curriculum Development in Language Teaching, CUP, Cambridge.
RICHTERICH, R., (1989), « De la transversalité et des spécificités : pour une didactique à imaginer »,
Langue française, nº 1, vol. 82, pp. 82-94.
RICHTERICH, R., et CHANCEREL, J.-L., (1977), L’identification des besoins des adultes apprenant une langue
étrangère : le recueil d’informations pour prendre en compte les besoins de l’apprenant dans un système européen
d’unités capitalisables pour l’apprentissage des langues par les adultes, Conseil de l’Europe, Didier-Hatier,
Paris.
RICŒUR, P., (1990), Soi-même comme un autre, Seuil, Paris.
RICŒUR, P., (1986), Du texte à l’action. Essais d’herméneutique II, Seuil, Paris.
RICŒUR, P., (1983), Temps et récit. 1. L’intrigue et le récit historique, Seuil, Paris.
RICŒUR, P., (1983), Temps et récit. 2. Le temps raconté, Seuil, Paris
RICŒUR, P., (1975), La métaphore vive, Seuil, Paris
RICŒUR, P., (1969), Le conflit des interprétations, essais d’herméneutique, Seuil, Paris.
RISAGER, K., (2007), Language and Culture Pedagogy, Multilingual Matters, Clevedon.
RISPAIL, M., (2008), « Évolution des concepts de l’oral en FLS et en FLE », Le Français dans le Monde,
Recherches et applications : «Quel oral enseigner, cinquante ans après le Français
Fondamental ? », Clé international, Paris.
RISPAIL, M., (2005), Plurilinguisme, Pratiques Langagières, Enseignement : pour une Socio-Didactique des Langues,
Mémoire d’Habilitation à Diriger des Recherches soutenu à l’université Rennes 2 sous la
direction de Ph. Blanchet.
ROBERT, A., et BOUILLAGUET, A., (1997), L’analyse de contenu, Que sais-je ?, PUF, Paris.
ROBILLARD (de), D., (2010), « Les vicissitudes et tribulations de "Comprendre" : un enjeu en
didactique des langues et des cultures ? », dans Blanchet, P., et Chardenet, P. (dir.), Méthodes de
recherche contextualisée en didactique des langues et des cultures, Agence universitaire de la
Francophonie.
ROBILLARD (de), D. (dir.), (2009), « Réflexivité : sémiotique ou herméneutique, comprendre ou donner
sens ? » Cahiers de sociolinguistique, n° 14, P.U.R, Rennes, pp. 153-175.
ROBILLARD (de), D., (2008), Perspectives alterlinguistiques, 2 tomes., L’Harmattan, Paris.
ROBILLARD (de), D., (2007), « La linguistique autrement : altérité, expérienciation, réflexivité,
constructivisme, multiversalité : en attendant que le Titanic ne coule pas. » Carnets d’Atelier de
Sociolinguistique, n° 1. Disponible sur : http://www.u-
picardie.fr/LESCLaP/IMG/pdf/robillard_CAS_no1.pdf (03/04/07).
ROCHE, A., (1955), L’étude des langues vivantes, PUF, Paris.
ROGERS, C. R., (1968), Le développement de la personne, Dunod, Paris.
ROHRBACH, R., et WINIGER, E., (2001), « Tandem statt Unterricht », Babylonia, no 3, pp. 64-68.
ROMELAER, P., (2005), « L’entretien de recherche », dans Roussel, P., et Wacheux, F. (éd.), Management
des ressources humaines : méthodes de recherche en sciences humaines et sociales, De Boeck, Bruxelles, pp.
101-137.
496 | Références bibliographiques
ROOS, E., et ADAMZIK, K. (dir.), (2002), « Biographies langagières », Bulletin VALS-ASLA, n° 75,
Biel/Bienne.
ROPE, F., (1996), Savoirs universitaires, savoirs scolaires. L’Harmattan, Paris.
ROSE, G., (2001), Visual Methodologies. An introduction to the interpretation of visual materials, Sage Publications,
Londres.
ROSEN, E., (2007), Le point sur le CECR. Clé International, Paris.
ROSSI, J.-G., (2002), La philosophie analytique, L’Harmattan, Paris.
ROULET, E., (1989), « Des didactiques du français à la didactique des langues », Langue française, nº 1, vol.
82, pp. 3-7.
ROURKE, L., ANDERSON, T., GARRISON, D. R., et ARCHER, W., (2001), « Methodological issues
in the content analysis of computer conference transcripts », International Journal of Artificial
Intelligence in Education, vol. 12, pp. 8-22.
ROUSSI, M., (2009), L’insécurité linguistique des professeurs de langues étrangères non natifs : le cas des professeurs grecs
de français, thèse pour le doctorat en didactique de langues et des cultures, Université Paris III.
SAAD, S., (2008), La manuélisation des langues et des cultures, Thèse sous la direction de J.-L. Chiss, Université
Paris III.
SABATIER, C., (2004), Rôle de l’école dans le développement et la construction du plurilinguisme chez des enfants issus
de la migration maghrébine en France, sous la direction de J. Billiez, Université Stendhal-Grenoble 3.
SAIBOU ADAMOU A. et IBRAHIM H., (2008), Manuel de référence pour l’enseignement du français langue
étrangère et seconde. Classes bilingues. Niamey, SOUTEBA.
SAUJAT, F., (2004), « O trabalho do professor nas pesquisas em educação: um panorama » dans
Machado, A. R. (dir.), O ensino como trabalho: uma abordagem discursiva, Eduel, Londrina.
SAUJAT, F., (2002), Systèmes d’apprentissage: systèmes d’évaluation, Thèse de doctorat, Université de Provence,
Provence.
SAUJAT, F., (2001), « Co-analyse de l’activité enseignante et développement de l’expérience: du travail de
chacun au travail de tous et retour », Clinique de l’activité et pouvoir d’agir, no 146, p. 87-98.
SAVIGNON, S. J., (1972), Communicative Competence: An Experiment in Foreign Language Teaching, Center for
Curriculum Development, Philadelphia.
SAVOIE-ZAJC, L., (2004), « La recherche qualitative/interprétative en éducation », dans Karsenti, T., et
Savoie-Zajc, L. (dir.), La recherche en éducation: étapes et approches, Éditions du CRP, Sherbrooke.
SAVOIE-ZAJC, L., (2003), « L’entrevue semi-dirigée », dans Gauthier, B. (dir.), Recherche sociale: de la
problématique à la collecte des données, Presses de l’Université du Québec, Sainte-Foy, Québec.
SCHIFFLER, L., (1991), Pour un enseignement interactif des langues étrangères, Hatier/Didier, Paris.
SCHNEUWLY, B., et THÉVENAZ-CRISTEN, T. (dir.), (2006), Analyse des objets enseignés : le cas du
français, De Boeck, Bruxelles.
SCHNEUWLY, B., et BRONCKART, J. P. (éd.), (1985), Vigotsky aujourd’hui, Delachaux et Niestlé,
Neuchâtel-Paris.
SCHÖN, D., (1994), Le praticien réflexif, Les Éditions logiques, Montréal.
SCHULZ, R., (2001), « Cultural differences in student and teacher perceptions concerning the role of
grammar instruction and corrective feedback: USA-Colombia», The Modern Language Journal, no
85, pp. 244-258.
SCHUMANS, M.-N., (2006), « Expliquer, interpréter, comprendre. Le paysage épistémologique des
sciences sociales », Carnets des sciences de l’éducation, Genève.
SCHÜTZ, A., (2007), « Le problème de la rationalité dans le monde social », trad. The problem of
rationality in the social world, Collected papers II. Studies in social theory, La Haye (1976), dans Essai
sur le monde ordinaire, Le félin poche, Paris, pp. 31-68.
SCOLLON, R., et SCOLLON, S. W., (1995), Intercultural communication, Blackwell, Oxford.
Références bibliographiques | 497
SEARLE, J., (1969), Speech acts: An essay in the philosophy of language, Cambridge University Press,
Cambridge.
SEIDMAN, I., (1998), Interviewing as qualitative research a guide for teachers in education and the social sciences,
Teachers College Press, New-York.
SERCU, L., (2000), Acquiring Intercultural Communicative Competence from Textbooks, University Press Leuven,
Leuven.
SEYDOU HANAFIOU H., (2007), Grammaire comparée français - songhay-zarma. Institut de recherche en
sciences humaines, Université de Niamey.
SHARPLES, M., PEMBERTON, L., (1990), « Starting from the Writer : Guidelines for the Design of
User-centred Document Processors », Computer Assisted Language Learning, vol. 2, Intellect,
Oxford, pp. 37-57.
SHIOSE, Y., (1994), « Nous et les Autres dans une classe à Québec : des univers parallèles », Anthropologie
et Sociétés, n° 1, pp. 77-92.
SILVA, H., (2008), Le Jeu en classe de langue, Clé International, Paris.
SILVA, H., (1999), Poétiques du jeu. La métaphore ludique dans la théorie et la critique littéraires françaises au XXe
siècle / thèse de doctorat, dirigée par Philippe Hamon, Littérature et Civilisation Françaises,
Paris III.
SIMON, D., et THAMIN, N., (2008), « Réflexions épistémologiques sur la notion de « biographies
langagières », dans Huver, E., et Molinié, M. (dir.), Praticiens et chercheurs à l’écoute du sujet
plurilingue. Réflexivité et interaction biographique en sociolinguistique et en didactique, Université de
Picardie.
SINCLAIR, J., et COULTHARD, M., (1975), Towards an Analysis of Discourse, Oxford University Press,
Oxford.
SMITH, P. B., (2006), « When elephants fight, the grass gets trampled: the GLOBE and Hofstede
projects », Journal of International Business Studies, no 37, pp. 915-921.
SMITH, R., (2001), « Group work for autonomy in Asia: insights from teacher-research », AILA Review,
no 15, pp. 70-81.
SOUBRIE, T., (2007), « Images de soi dans un blog professionnel d’enseignants stagiaires », dans Lamy,
M.-N., Mangenot, F., et Nissen, E., (2007), Actes du colloque EPAL (Echanger pour apprendre en
ligne), Grenoble 7-9 juin 2007. Disponible sur : http://w3.u-grenoble3.fr/epal/actes.htm
SPRADLEY, J. P., (1980), Participant observation, Holt Rinehart and Winston, New York ; Montréal.
STARKEY, H., (2002), Democratic Citizenship, Languages, Diversity and Human Rights, Council of Europe,
Strasbourg.
STRATILAKI, S., (2005), « Mon chat, je lui parle en allemand même s’il vient de France. Contacts de
langues et représentations du plurilinguisme chez les jeunes apprenants frontaliers », Repères, no
29, pp. 233-249.
STRAUSS, A., et CORBLIN, J., (2004), Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de
développement de la théorie enracinée, Academic Press Fribourg, Fribourg.
STREET, B., (1995), Social literacies: critical approaches to literacy in development, ethnography and education,
Longman, London.
TAKAGAKI, Y., (2001), « Des phrases mais pas de communication. Problème d’organisation textuelle
chez les non-Occidentaux: le cas des japonais », Dialogues et Cultures, no 44, pp. 84-91.
THAMIN, N., (2008), « Recompositions identitaires de sujets plurilingues en situation de mobilité dans
un contexte d’entreprise internationale : récit de vie de Sylvana », dans Huver, E., et Molinié, M.
(dir.), Praticiens et chercheurs à l’écoute du sujet plurilingue. Réflexivité et interaction biographique en
sociolinguistique et en didactique, Université de Picardie.
THAMIN, N., (2007), Dynamiques des répertoires langagiers et identités plurilingues de sujets en situation de mobilité,
Thèse de doctorat, Université Stendhal, Grenoble.
498 | Références bibliographiques
THORNE, S. L., (2006), « Pedagogical and Praxiological Lessons from Internet-mediated Intercultural
Foreign Language Education Research », dans Belz, J. A., et Thorne, S. L. (dir.), Internet-mediated
Intercultural Foreign Language Education, Thomson Heinle, Boston, pp. 2-30.
TOCHON, F. V., (1993), L’enseignant expert, Nathan Pédagogie, Paris.
TODOROV, T., (1989), Nous et les autres, La réflexion française sur la diversité humaine, Seuil, Paris.
TODOROV, T., (1981), Mikhaïl Bakhtine, le principe dialogique suivi des écrits du cercle de Bakhtine, Seuil, Paris.
TODOROV, T., (1970), « Freud sur l’énonciation », dans Langages, no 17, pp. 36-45.
TOURAINE, A., (2000), A Method for Studying Social Actors, Journal of World-Systems Research, no 3, vol.
VI, pp. 900-918.
TOZZI, M., (2006), Débattre à partir des mythes à l’école et ailleurs, Chronique Sociale, Lyon.
TRIMAILLE, C., (2003), Approche sociolinguistique de la socialisation langagière d’adolescents, Thèse de doctorat
sous la direction de J. Billiez, Université Stendhal-Grenoble3.
TROGNON, A., (1987), « Produire des données », dans Blanchet, A. (dir.), Les techniques d’enquête en
sciences sociales, observer, interviewer, questionner, Dunod, Paris.
TROMPENAARS, F., (1993), Riding the waves of culture, Nicholas Brealey Publishing, London.
TRUSCOTT, S., et MORLEY, J., (2001), « Cross-cultural learning through computer-mediated
communication », Language Learning, no 24, pp. 17-23.
UNRUG (d’), M. C., (1974), Analyse de contenu et acte de parole, éditions universitaires, Paris.
VALASTRO, O. M., (2002), « Recherche ethnographique et communautés virtuelles : entretien avec
Alessandra Guignon », Esprit critique, no 4-5. Disponible sur : http://www.espritcritique.org
(25/09/2009).
VANDERGRIFF, I., (2006), « Negotiating common ground in computer-mediated versus face-to-face
discussion », Language Learning and Technology, no 1, vol. 10, pp. 110-138. Disponible sur:
http://llt.msu.edu
VAN DER MAREN, J.-M., (1999), La recherche appliquée en pédagogie. Des modèles pour l’enseignement, De
Boeck Université, Paris & Bruxelles.
VAN DER MAREN, J.-M., (1995), Méthodes de recherche pour l’éducation, Presses de l’Université de
Montréal, Montréal.
VASSEUR, M.-T., (2005), Rencontres de langues, question(s) d’interaction, Didier, Paris.
VASSEUR, M.-T., (1993), « Gestion de l’interaction, activités métalangagières et apprentissage en langue
étrangère », Aile, no 2, pp. 25-59.
VATZ LAAROUSSI, M., (2007), « La recherche qualitative interculturelle. Une recherche engagée ? »,
dans Recherches qualitatives, Hors Série no 4, pp. 2-13. Disponible sur : http://www.recherche-
qualitative.qc.ca/hors_serie_v4/laaroussi.pdf (22/07/09).
VERDELHAN-BOURGADE, M., (2007), « Les manuels de français langue seconde, quelques
problèmes actuels », dans Verdelhan-Bourgade, M., (dir.), Le français langue seconde : un concept et
des pratiques en évolution, De Boeck, Bruxelles, pp. 190-196.
VERDELHAN-BOURGADE, M., (2002), Le Français de scolarisation. Pour une didactique réaliste, PUF, Paris.
VEYNE, P., (2008), Foucault. Sa pensée, sa personne, Albin Michel, Paris.
VIGNER, G., (2009), Le français langue Seconde, Comment apprendre le français aux élèves nouvellement arrivés,
Hachette Education, Paris.
VIGNER, G., (1989), « Le français langue de scolarisation », Diagonales, n° 9, pp. 41-45.
VIGOUROUX., C., (2003), Réflexion méthodologique autour de la construction d’un objet de recherche : la dynamique
identitaire chez les migrants africains francophones au Cap (Afrique du Sud), thèse de doctorat,
Université Paris X, Nanterre (non publiée). Résumé disponible sur : http://www.unice.fr/ILF-
CNRS/ofcaf/19/vigouroux.pdf (10/07/09).
VINCK, D., (2000), Pratiques de l’interdisciplinarité : mutations des sciences de l’industrie et de l’enseignement, Presses
Universitaires de Grenoble, Grenoble.
Références bibliographiques | 499
VION, R., (1992), La communication verbale, analyse des interactions, Hachette supérieur, Paris.
VOLOCHINOV, V. N. /BAKHTINE, M., (1977/1929), Le marxisme et la philosophie du langage, Les
Éditions de Minuit, Paris.
VON WRIGHT, G. H., (1971), Explanation and Understanding, Routledge and Kegan Paul, London.
VYGOTSKI, L. S., (1997), Pensée et Langage, 3e éd., La dispute, Paris.
WAGNER, D. A., VENEZKY, R. L., et STREET, B. (dir.), (1999), Literacy. An international handbook,
Westview Press, Oxford.
WALLON, P., (2001), Le dessin d’enfant, PUF, Paris.
WAMBACH, M., (2001), Méthodologie des langues en milieu multilingue, AIF-CIAVER, Mons.
WARD, C., BOCHNER, S., et FURNHAM, A., (2001), The Psychology of Culture Shock, 2e éd., Routledge,
London.
WARE, P. D., et KRAMSCH, C., (2005), « Toward an intercultural stance: Teaching German and
English through telecollaboration », The Modern Language Journal, no 89, vol. 2, pp. 190-205.
WATKINS, D., et BIGGS, J. (éd.), (2001), Teaching the Chinese learner: cultural, psychological and contextual
influences, CERC, Hong Kong.
WAXMAN, H. C., THARP, R. G., et HILBERG, R. S., (2004), Observational research in U.S. classrooms : new
approaches for understanding cultural and linguistic diversity, Cambridge University Press, Cambridge.
WELLS, G., et CHANG-WELLS, G. L., (1992), Constructing knowledge together. Classrooms as centers of inquiry
and literacy, Heinemann, Porthmouth.
WELLS, G., (1991), « Apprenticeship in literacy », dans Literacy as a praxis culture, language and pedagogy,
Alex, Norwood NJ.
WERTSCH, J. V., PABLO DEL RIO, P., et ALVAREZ, A., (1995), Sociocultural studies of mind, Cambridge
University Press, Cambridge.
WEVER (de), B., SCHELLENS, T., VALCKE, M., et VAN KEER, H., (2006), « Content analysis
schemes to analyze transcripts of online asynchronous discussion groups: A review», Computers
& Education, no 46, pp. 6-28.
WHYTE, W. F., (1996), Street Corner Society : la structure sociale d’un quartier italo-américain, traduction
française de l’édition augmentée de 1955, La Découverte, Paris.
WICHROSKI, M. A., (1996), « Breaking silence: Some fieldwork strategies in cloistered and non-
cloistered communities », dans Qualitative sociology, no 1, vol. 19, Springer, Heidelberg, pp. 153-
170.
WIERZBICKA, A., (1997), « The double life of a bilingual: a cross-cultural perspective », dans Bond, M.
(éd.), Working at the interface of culture: eighteen lives in social science, Routledge, London.
WIERZBICKA, A., (1997), Understanding Cultures through Key Words. English, Russian, Polish, German, and
Japanese, University Press Oxford, Oxford.
WINKIN, Y., (1992), « L’ethnographie en éducation aux États-Unis : une première cartographie avec une
ébauche de projection sur la Belgique », dans Degembe, M. F., Odyssée dans un archipel scolaire :
enquête en écoles secondaires, Erasme, Namur, pp. 129-152.
WOODS, D., (1996), Teacher Cognition in Language Teaching. Beliefs, decision making and classroom practice,
Cambridge University Press, Cambridge.
WOODS, P., (1990), L’ethnographie de l’école, Armand Colin, Paris.
YAKHONTOVA, T., (2001), « Textbooks, contexts and learners », English for Specific Purposes, no 20, pp.
397-415.
ZARATE, G., (2009), « La circulation internationale des idées en didactique des langues dans le triangle
France, Europe, États-Unis », Le Français dans le Monde, Recherches et applications, vol. 46.
ZARATE, G., LEVY, D., et KRAMSCH, C. (éd.), (2008), Précis du plurilinguisme et du pluriculturalisme,
Éditions des archives contemporaines, Paris.
500 | Références bibliographiques
ZARATE, G., (2008), « Introduction : Appartenances et lien social », dans Zarate, G., Levy, D., et
Kramsch, C. (éd.), Précis du plurilinguisme et du pluriculturalisme, Éditions des archives
contemporaines, Paris, pp. 173-180.
ZARATE, G., et CAIN, A., (dir.), (2005), L’entretien : ses apports à la didactique des langues, EAN.
ZARATE, G., et GOHARD RADENKOVIC, A. (éd.), (2004), « La reconnaissance des compétences
interculturelles : de la grille à la carte », Les Cahiers du CIEP, Sèvres.
ZARATE, G., (2003), « Identités et plurilinguisme: conditions préalables à la reconnaissance des
compétences interculturelles », dans Byram, M. (éd.), La Compétence interculturelle, Conseil de
l’Europe, Strasbourg.
ZARATE, G., (2003), « Identities and plurilingualism: Preconditions for the recognition of intercultural
competence », dans Byram, M. (éd.), Intercultural competence, Council of Europe Publishing,
Strasbourg, pp. 85-117.
ZARATE, G., (1998), « D’une culture à d’autres : critères pour évaluer la structure d’un capital
pluriculturel », Lidil, no 18, pp. 141-151.
ZUE ELIBIYO, M., (2008), Transmission intergénérationnelle des langues au Gabon, une étude à partir des usages
déclarés, thèse de doctorat sous la direction de M. Matthey, Université Stendhal-Grenoble 3.
Bibliographie et
sitographie générale et thématique
Alexandra Poulet
VINCK, D., (2000), Pratiques de l’interdisciplinarité : mutations des sciences de l’industrie et de l’enseignement, Presses
Universitaires de Grenoble, Grenoble.
Sociolinguistique
AUZANNEAU, M. (éd.), (2007), La mise en œuvre des langues dans l’interaction, L’Harmattan, Paris.
BLANCHET, P., CALVET, L.-J. et ROBILLARD (de), D., (2007), « Un siècle après le cours de Saussure
: la linguistique en question », Carnets de l’Atelier de sociolinguistique, no 1, L’Harmattan, Paris.
Disponible sur : http://www.u-picardie.fr/LESCLaP/spip.php?rubrique31 (16/06/09).
BLANCHET, P., et ROBILLARD (de), D. (dir.), (2003), « Langues, contacts, complexité. Perspectives
théoriques en sociolinguistique », Cahiers de sociolinguistique, no 8, Presses Universitaires de
Rennes, Rennes.
CALVET, L.-J., (1993), Sociolinguistique. Paris, PUF.
CALVET, L.-J., (1999), Pour une écologie des langues du monde, Plon, Paris.
DABENE, L., (1994), Repères sociolinguistiques pour l’enseignement des langues, Hachette, Paris.
GASQUET-CYRUS, M., et PETITJEAN, C., (2009), Le poids des langues. Dynamiques, représentations, contacts,
conflits, L’Harmattan, Paris. Vidéos, diaporamas et textes disponibles sur :
http://tice.univ-provence.fr/document.php?pagendx=4884&project=dsiitice (25/06/09).
GUMPERZ, J., (1989), Sociolinguistique interactionnelle, L’Harmattan, Paris.
KERBRAT-ORECCHIONI, C., (1990, 1992 et 1994), Les interactions verbales, Armand Colin (3 tomes),
Paris.
MOREAU, M.-L. (éd.), (1997), Sociolinguistique, concepts de base, Mardaga, Bruxelles.
NEVEU, F., (2004), Dictionnaire des sciences du langage, Armand Colin, Paris.
WHARTON, S., et SIMONIN, J., (éd.), (à paraître), Dictionnaire encyclopédique des contacts de langues, ENS-
éditions, Lyon.
Méthodologie
BLANCHET, P., (2000), La linguistique de terrain : méthode et théorie : une approche ethno-sociolinguistique, Presses
Universitaires de Rennes, Rennes.
CALVET, L.-J., et DUMONT, P., (1999), L’enquête sociolinguistique, L’Harmattan, Paris.
GADET, F., (2003), « Derrière les problèmes méthodologiques du recueil de données », Texto !.
Disponible sur :
http://www.revue-texto.net/Inedits/Gadet_Principes.html (17/06/09).
GROSSEN, M., (2006), « Qu’est-ce que répondre à un questionnaire ? Réflexions à partir de l’analyse de
discussion en groupes focalisés », dans Delamotte-Legrand, R., Hudelot, C., et Salazar Orvig,
A., Dialogues, mouvements discursifs, significations, Editions Modulaires Européennes, Paris, pp. 89-
104.
MAHMOUDIAN, M., et MONDADA, L., (1998), « Le travail du chercheur sur le terrain. Questionner
les pratiques, les méthodes, les techniques d’enquête », Cahiers de l’Institut de Linguistique et des
Sciences du Langage de l’Université de Lausanne, n° 10, Lausanne.
MARIEN, B., (2004), Principes d’analyse statistique pour sociolinguistes, AUF, Québec. Disponible sur :
http://www.sdl-old.auf.org/documents/MarienAufcorrSTAT.pdf (17/06/09).
MARIEN, B., et BEAUD, J.-P., (2003), Guide pratique pour l’utilisation de la statistique en recherche : le cas des
petits échantillons, AUF, Québec. Disponible sur :
http://www.sdl.auf.org/IMG/pdf/Guide_de_statistiques.pdf (17/06/09).
Bibliographie et sitographie | 503
Francophonie
BENIAMINO, M., et GAUVIN, L. (2005), Vocabulaire des études francophones. Les concepts de base, Presses
Universitaires de Limoges, Limoges.
CALVET, L.-J., et CHAUDENSON, R. (éd.), (2001), Les langues dans l’espace francophone : de la coexistence au
partenariat, L’Harmattan, Paris.
CHAUDENSON, R., et RAKOTOMALALA, D., (2004), Situations linguistiques de la Francophonie, AUF,
Québec.
[COLLECTIF], (2008), Séminaire international sur la méthodologie d’observation de la langue française dans le monde,
OIF/AUF, Paris. Disponible sur :
http://www.auf.org/communication-information/actualites/actes-du-seminaire-international-
sur-la-methodologie-d-observation-du-francais.html (24/06/09).
HALAOUI, N., (2005), Langues et systèmes éducatifs dans les états francophones d’Afrique
subsaharienne, Autrement, Paris.
MAURAIS, J., DUMONT, P., KLINKENBERG, J.-M., MAURER, B. et CHARDENET, P. (éd.),
(2008), L’Avenir du français, Editions des Archives Contemporaines, Paris.
MOUSSA, D., PRIGNITZ, G., BLANCO, X., QUEFFELEC, A et al. (2004), Penser la francophonie-
Concepts, actions et outils linguistiques, Editions des Archives Contemporaines, Paris.
ROBILLARD (de), D., et BENIAMINO, M. (dir.), (1993 et 1996), Le français dans l’espace francophone,
Champion (2 tomes), Paris.
Plurilinguisme
BAVOUX, C., PRUDENT, C., et WHARTON, S. (dir.), (2008), Normes endogènes et plurilinguisme, aires
francophones, aires créolophones, ENS-éditions, Lyon.
BLANCHET, Ph., KEBBAS, M. et KARA-ABBES A. Y. (éds), (2010), Influences et les enjeux des contextes
plurilingues sur les textes et les discours, Limoges, Lambert-Lucas.
BOTHOREL-WITZ, A., (2008), « Le plurilinguisme en Alsace : les représentations sociales comme
ressources ou outils de la description sociolinguistique », Les cahiers de l’Acedle, vol. 5, no 1, pp.
41-63. Disponible sur : http://acedle.org/IMG/pdf/Bothorel_Cah5-1.pdf (16/06/09).
CANDELIER, M., GINA IOANNITOU, M., OMER, D., et VASSEUR, M.-T. (dir), (2008), Conscience du
plurilinguisme. Pratiques, représentations et interventions, Presses Universitaires de Rennes, Rennes.
HELLER, M. (ed.), (2007), Bilingualism : a social approach, Palsgrave McMillan, New-York.
ZARATE, G., LEVY, D et KRAMSCH, C, (2008), Précis du plurilinguisme et du pluriculturalisme / handbook of
multilingualism and multiculturalism, Paris, Ed. des Archives Contemporaines.
SALINS (de), G., (1992), Une introduction à l’ethnographie de la communication pour la formation à l’enseignement du
F.L.E., Didier, Paris.
Épistémologie et méthodologie
ALARCÃO, I., ANDRADE, A. I., ARAÚJO E SÁ, M.-H., et MELO-PFEIFER, S., (2009), « De la
didactique de la langue à la didactique des langues : observation d’un parcours
épistémologique », Les cahiers de l’Acedle, vol. 6, no 1, pp. 3-36. Disponible sur
http://www.auf.org/communication-information/actualites/actes-du-seminaire-international-
sur-la-methodologie-d-observation-du-francais.html (24/06/09).
BESSE, H. (2001), « De la "première didactique (des langues)" et de son oubli, en France, durant près de
deux siècles », dans Marquillo Larruy, M. (éd.), Questions d’épistémologie en didactique du français
(langue maternelle, langue seconde, langue étrangère), pp. 67-72.
BRONCKART, J.-P. (2008), « Du texte à la langue et retour : notes pour une "reconfiguration" de la
didactique du français », dans Pratiques, n°137-138, pp. 97- 116.
CHISS, J.-L., SAVATOVSKY, D. (éd.), (à paraître), La disciplinarisation des savoirs linguistiques. Histoire et
épistémologie, actes du colloque organisé par la SHESL et HTL, avec la collaboration du
DILTEC, Paris, 29 et 30 janvier.
CHISS, J.-L., DAVID, J., REUTER, Y. (éd.), (2005), Didactique du français - Fondements d’une discipline, De
Boeck, Bruxelles.
CHISS, J.-L., (2001), « Didactique des langues et disciplinarisation », dans Marquillo Larruy, M. (éd.),
Questions d’épistémologie en didactique du français (langue maternelle, langue seconde, langue étrangère),
pp.159-163.
CHISS, J.-L. et PUECH, C., (1999), Le Langage et ses disciplines XIXe-XXe siècles, Duculot, Bruxelles.
CHISS, J.-L., et PUECH, C., (1998), « De l’émergence disciplinaire à la didactisation des savoirs
linguistiques : le tournant des années 60 et ses suites », Langue Française, n° 117, pp. 6-21.
CHISS, J.-L., (1997), « La didactique des langues : champs d’exercice et spécificités nationales », dans
Cahiers de l’Asdifle, n° 8, pp. 346-350.
CHISS, J.-L., (1989), « Revendication d’autonomie et horizon de scientificité en didactique du Français »,
dans Langue Française, n° 82, pp. 44-52.
COSTE, D., (2007), « Quelques aspects historiques et actuels de la distinction entre FLM, FLE et FLS »,
dans Lambert, P., Millet, A., et Trimaille, C. (éd.), Variations au coeur et aux marges de la
sociolinguistique : mélanges offerts à Jacqueline Billiez, L’Harmattan, Paris, pp. 215-225.
COSTE, D., (2004), « De quelques déplacements opérés en didactique des langues par la notion de
compétence linguistique », dans Auschlin, A., et al. (éd), Structures et discours. Mélanges offerts à
Eddy Roulet, pp. 67-85.
DEFAYS, J.-M., DELCOMINETTE, B., et DUMORTIER, J.-L. (éd.), (2003), Didactique du français: langue
maternelle, langue étrangère et langue seconde : vers un nouveau partage ?, Editions Européennes
Modulaires, Cortil-Wodon, Belgique.
DEMAIZIÈRE, F., et NARCY-COMBES, J.-P., (2007), « Du positionnement épistémologique aux
données de terrain », Les Cahiers de l’Acedle, no 4, pp. 1-20. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Demaiziere-Narcy_cah4.pdf (24/06/09).
GAGNE, G., et al., (1989), Recherches en didactique et acquisition du français langue maternelle. Tome 1. Cadre
conceptuel, thésaurus et lexique des mots-clés, De Boeck-Wesmael, Bruxelles.
MARQUILLO-LARRUY, M., (2001), « Questions d’épistémologie en didactique du français (langue
maternelle, seconde, étrangère) », Cahiers du FORELL / DFLM, Université de Poitiers /
DFLM, Poitiers.
MASSERON, C. et GARCIA-DEBAN, C. (coord.), (2008), Pratiques n°137-138 : La didactique du français.
Hommages à Jean-François Halté., CRESEF, Metz.
Bibliographie et sitographie | 505
Didactique contextualisée
BLANCHET, P., MOORE, D., et ASSELAH-RAHAL, S., (2009), Perspectives pour une didactique des langues
contextualisée, AUF/Editions des archives contemporaines, 2e éd. complétée, Paris.
CAMBRA GINÉ, M., (2003), Une approche ethnographique de la classe de langue, Didier, Paris.
CASTELLOTTI, V., et CHALABI, H. (dir.), (2006), Le français langue étrangère et seconde : des paysages
didactiques en contexte, L’Harmattan, Paris.
CHATEAU, A., (2006), « Spécificités des techniques d’enseignement par rapport aux publics, mythe ou
réalité ? », Les cahiers de l’Acedle, no 2, pp. 74-88. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Chateau-A_cah2.pdf (24/06/09).
CHAUDENSON, R. (coord.), (2008), Didactique du français en milieux créolophones. Outils pédagogiques et
formation des maîtres, L’Harmattan, Paris.
CHAUDENSON, R. (coord.), (2008), « Adaptation de la didactique des langues à la diversité culturelle »,
Etudes créoles, no 1, L’Harmattan, Paris.
CICUREL, F., (2002), « La classe de langue : un lieu ordinaire, une interaction complexe », AILE, no 16.
Disponible sur :
http://aile.revues.org/document801.html (17/06/09).
COSTA, J., (2008), « Langues et cultures régionales, langues vivantes étrangères. Quels enjeux pour une
convergence didactique ? », Les cahiers de l’Acedle, vol. 5, no 1, pp. 109-128. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Costa_Cah5-1.pdf (24/06/09).
COSTE, D., (2007), « Le Cadre européen commun de référence pour les langues. Contextualisation et/ou
standardisation ? ». Disponible sur :
http://www.francparler.org/dossiers/pj/coste_190607.doc (19/06/09).
COSTE, D., (2005), « Quelle didactique pour quels contextes ? », Enseignement du français au Japon, no 33.
Disponible sur :
http://wwwsoc.nii.ac.jp/sjdf/Revue/%83t%83%89%83%93%83X33-001-014.pdf (19/06/09).
COSTE, D., (2002), « Quelle(s) acquisition(s) dans quelle(s) classes(s) ? », AILE, no 16. Disponible sur :
http://aile.revues.org/document747.html (19/06/09).
CUET, C., (2008), « Une didactique du compromis face aux éditeurs et professeurs chinois : concilier
deux approches de l’enseignement et innover dans l’élaboration de manuels », Les cahiers de
l’Acedle, vol. 5, no 1, pp. 151-166. Disponible sur : http://acedle.org/IMG/pdf/Cuet_Cah5-
1.pdf (24/06/09).
FATTIER, D. (éd.), (2006), Vers une didactique du français en milieu créolophone, L’Harmattan, Paris.
ISHIKAWA, F., (2004), « L’intervention de l’« extérieur » dans la construction des motivations des
apprenants et des représentations relatives à la langue : la didactique du FLE au Japon mise en
jeu par le contexte », Enseignement du français au Japon, no 32, pp. 45-66. Disponible sur :
http://wwwsoc.nii.ac.jp/sjdf/Revue/f032-045-066.pdf (20/06/09).
506 | Bibliographie et sitographie
MAÏGA, A., (2008), Français dans les aires créolophones. Vers une didactique adaptée, L’Harmattan, Paris.
MAURER, B., (2007), De la pédagogie convergente à la didactique intégrée : langues africaines-langue française,
L’Harmattan, Paris.
PALLOTTI, G., (2002), « La classe dans une perspective écologique de l’acquisition », AILE, no 16.
Disponible sur : http://aile.revues.org/document1395.html (17/06/09).
PORQUIER, R., et PY, B., (2004), Apprentissage d’une langue étrangère : contextes et discours, CREDIF-essais,
Didier, Paris.
RISPAIL, M., (2003), Le francique. De l’étude d’une langue minorée à la socio-didactique des langues, L’Harmattan,
Paris.
Plurilinguisme et didactique
ASSELAH-RAHAL, S., et BLANCHET, P., (2007), Plurilinguisme et enseignement des langues en Algérie : rôles
du français en contexte didactique, Éditions Modulaires Européennes, Cortil-Wodon, Belgique.
CANDELIER, M., (2008), « Approches plurielles, didactiques du plurilinguisme : le même et l’autre », Les
cahiers de l’Acedle, vol. 5, no 1, pp. 65-90. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Candelier_Cah5-1.pdf (24/06/09).
CANDELIER, M. (dir.), (2007), Cadre de référence pour les approches plurielles des langues et des cultures.
Disponible sur :
http://www.ecml.at/mtp2/ALC/pdf/CARAP_F.pdf (17/06/09).
CASTELLOTTI, V., (2006), « Une conception plurielle et intégrée de l’enseignement des langues-
principes, modalités, perspectives », Les Cahiers de l’Acedle, no 2, pp. 319-331. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Castellotti-V_cah2.pdf (24/07/09)
CHATRY-KOMAREK, M., et LEZOURET, L.-M., (2007), Enseigner le français en contextes multilingues dans
les écoles africaines, L’Harmattan, Paris.
COSTE, D., (2008), « Éducation plurilingue et langue de scolarisation », Les cahiers de l’Acedle, vol. 5, no 1,
pp. 91-107. Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Coste_Cah5-1.pdf (24/06/09).
COSTE, D., MOORE, D., et ZARATE, G., (1997), Compétence plurilingue et pluriculturelle, Conseil de
l’Europe, Strasbourg.
GAJO, L., et MONDADA, L., (2000), Interactions et acquisitions en contexte : modes d’appropriation de compétences
discursives plurilingues par de jeunes immigrés, Editions Universitaires Fribourg, Fribourg, Suisse.
LÜDI, G., (2004), « Pour une linguistique de la compétence du locuteur plurilingue », Revue Française de
Linguistique Appliquée, Volume IX, pp. 125-135.
LÜDI, G., et PY, B., (2002), Être bilingue, Peter Lang, Berne.
LÜDI, G., et PY, B., (1994), Changement de langage et langage du changement, L’âge d’homme, Lausanne
MARTINEZ, P., MOORE, D., et SPAËTH, V. (coord.), (2008), Plurilinguismes et enseignement : identités en
construction, Riveneuse, Paris.
MONTAGNE-MACAIRE, D., (2008), « D’une didactique des langues à une didactique des
plurilinguismes ? Réflexions pour la recherche », Les cahiers de l’Acedle, vol. 5, no 1, pp. 3-40.
Disponible sur :
http://acedle.org/IMG/pdf/Macaire_Cah5-1.pdf (24/06/09).
MOORE, D., et CASTELLOTTI, V., (2008), La compétence plurilingue : regards francophones, Peter Lang,
Berne.
MOORE, D., (2006), Plurilinguismes et école, Didier, Paris.
PRUDENT, L.-F., TUPIN, F., et WHARTON, S. (éd.), (2005), Du plurilinguisme à l’école. Vers une gestion
coordonnée des langues en contextes éducatifs sensibles, Peter Lang, Berne.
WAMBACH, M., (2001), La méthodologie d’enseignement des langues en milieu plurilingue, CIAVER, Bruxelles.
ZARATE, G., KRAMSCH, C., et LEVY, D. (dir.), (2008), Précis du plurilinguisme et du pluriculturalisme,
Editions des archives contemporaines, Paris.
508 | Bibliographie et sitographie
Sciences de l’éducation
HOUSSAYE, J. (dir.), (1993), La pédagogie : une encyclopédie pour aujourd´hui, ESF, Paris.
REUTER, Y. (éd.), (2007), Dictionnaire des concepts fondamentaux des didactiques, De Boeck, Bruxelles,
Belgique.
REYNAL, F., et RIEUNIER, A.., (1998), Pédagogie : dictionnaire des concepts-clés, ESF, Paris.
Méthodologie
ALTET, M. et VINATIER, I., (2008), Analyser et comprendre la pratique enseignante, P.U.R., Rennes.
KARSENTI, T., et SAVOIE-ZAJC, L., (2004), La recherche en éducation: ses étapes, ses approches, Ed. du CRP,
Sherbrooke, Canada.
LAHANIER-REUTER, D., et RODITI, E., (2007), Questions de temporalité. Les méthodes de recherche en
didactiques (2), Presses Universitaires du Septentrion,Villeneuve d’Asq.
MIALARET, G., (2004), Méthodes de recherche en science de l’éducation, P.U.F., Paris.
PERRIN-GLORIAN, M.-J., et REUTER, Y., (2006) Les méthodes de recherche en didactique, Presses
Universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Asq.
PESCHEUX, M., (2007), Analyse de pratique enseignante en FLE/S - Mémento pour une ergonomie didactique en
FLE, L’Harmattan, Paris.
POISSON, Y., (1992), La recherche qualitative en éducation, Presses de l’Université du Québec, Québec,
Canada.
VAN DER MAREN, J.-M., (1999), La recherche appliquée en pédagogie. Des modèles pour l’enseignement, De
Boeck, Bruxelles, Belgique.
VAN DER MAREN, J.-M., (1996), Méthodes de recherche pour l’éducation, De Boeck, Bruxelles, Belgique.
Éducation comparée
GONCALVES, C., et GROUX, D., (2009), Approches comparées de l’éducation des langues et de la formation des
enseignants, L’Harmattan, Paris.
GROUX, D. (dir.), (2003), Dictionnaire d’éducation comparée, L’Harmattan, Paris.
MERCIER, A., SCHUBAUER-LÉONI, M.-L. et SENSEVY, G., (2002), « Vers une didactique
comparée », Revue Française de Pédagogie, no 141, pp. 5-16.
PORCHER, L., (2009), Education comparée : pour aujourd’hui et pour demain, L’Harmattan, Paris.
Interculturalité et éducation
BLANCHET, Ph. & COSTE D. (Dir.), 2010, Regards critiques sur la notion d’« interculturalité ». Pour une
didactique de la pluralité linguistique et culturelle, Paris, L’Harmattan.
Bibliographie et sitographie | 509