Gouvernance Important
Gouvernance Important
Gouvernance Important
Option : Finance.
Thème :
La Gouvernance de la
Banque Islamique
Présenté par : Sous la direction de :
BENLEKHAL Nawel M. BENBAYER HABIB
DEDICACE
Je dédie ce travail à :
REMERCIEMENT
Merci à tous.
La Gouvernance de la Banque Islamique Sommaire
SOMMAIRE
INTODUCTION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
La Gouvernance de la Banque Islamique Introduction Générale
INTRODUCTION GENERALE
Parmi ces standards nous avons choisis d’étudier les règles de gouvernance des banques
islamiques, surtout que ces banques vivent dans un environnement « intense ».
D’un autre côté, nous nous interrogeons sur l’arbitrage du dirigeant, de la banque islamique,
entre ces différentes règles, sachant que la banque islamique est caractérisée par une double
gouvernance ; celle d’un conseil d’administration préoccupé par le profit et le « bottom line »
et celle d’un conseil de la Charia dont la priorité est la conformité des opérations de la banque
avec les préceptes de la Charia.
Notre curiosité a connaitre le mode de gouvernance de ces banques islamiques, nous a poussé
a établir un mémoire de magister pour traiter ce sujet, en nous posons la question suivante :
Page 1
La Gouvernance de la Banque Islamique Introduction Générale
Notre mémoire serait réparti en deux principales parties ; une première partie réservée à la
finance islamique, ce dernier est composé de trois chapitres, le premier chapitre est consacré à
l’historique de la finance islamique, le deuxième chapitre traite les principes de la finance
islamiques et enfin, un troisième, détaillant les principaux modes de financement islamiques.
Le deuxième partie, quant a lui, est réservé à la gouvernance de la banque islamique, et est
répartit, à son tour, en trois chapitre ; le premier rappelle brièvement les principales théories
de la gouvernance d’entreprise, le deuxième chapitre détaille le cadre institutionnel (interne et
externe) des banques islamiques, et enfin, un troisième chapitre intitulée la double
gouvernance des banques islamiques : ou nous traitons le positionnement et le comportement
des dirigeants des banques islamiques face aux pouvoirs des actionnaires et celui du conseil
de la Charia.
Le champ spatial s’étant à étudier les banques islamiques en générales et tout particulièrement
à étudier les principales banques islamiques au niveau international (notamment les cinq
premières) à travers l’exploitation des sites web spécialisés de ces banques et des recherches
empiriques. Quant au champ temporel, notre effort est d’étudier les recherches et données les
Page 2
La Gouvernance de la Banque Islamique Introduction Générale
plus récentes, tout particulièrement l’étude de la situation des banques islamique après la crise
des subprime de 2007 et la crise financière de 2008.
Page 3
La Gouvernance de la Banque Islamique Introduction Générale
Première partie :
Page 4
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie
Introduction
La raison d’être d’un système financier islamique, tout comme celle d’un système financier
« classique », est la mobilisation de ressources financières et leur allocation entre différents
projets d’investissement
Du point de vue de la finance moderne, l’interdiction du riba (taux d’intérêt) est, sur le papier,
la principale différence entre la finance islamique et la finance traditionnelle. Mais ce n’est
pas l’unique point de divergence. C’est ce que nous allons essayer d’étudier à travers notre
premier chapitre. Ce dernier est structuré comme suite : un premier chapitre, où nous
rappelons l’origine et le développement de la finance islamique ; suivie en deuxième chapitre
des principes de la finance islamique ; et enfin, un troisième et dernier chapitre ou nous
étudions les instruments de financement islamique.
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Chapitre (1) :
« Historique de la finance
islamique »
Page 6
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Introduction
Les pratiques financières se basent sur les textes sacrés, en conséquence elles existaient dès
leur élaboration, en temps du prophète Mohamed (S.B.L). Ce n’est que tardivement qu’elles
se sont formalisées.
Premièrement, nous rappelons les origines de la finance islamique, par la suite, sa renaissance
avec ses pratiques actuelles. Ce dernier point, est développé en deux périodes ; Celle antérieur
a l’an 2000 : durant laquelle les activités financières islamiques croissent fortement mais
restent cantonnées dans les pays musulmans, puis celle du début du 21ème siècle durant
laquelle la finance islamique devient alors un phénomène mondial.
Page 7
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
La finance islamique, sous sa forme actuelle, n’existait pas véritablement aux premiers temps
de l’islam. Il y avait plutôt des contrats et des transactions régis par les règles du Coran et les
pratiques du prophète.
Et même si la plupart des historiens de l’économie s’étendent à dire que la finance islamique
est un phénomène moderne, il n’en reste pas moins qu’entre le VIII siècle et le XII siècle de
notre ère on observe une forme précoce d’économie que certain1 qualifient de « capitalisme
islamique ». Dans son article de 1969, du Journal of EconomicHistory, SubhiLabib rappelle
aussi que pendant l’Âge de l’or de l’Islam, on pouvait détecter dans les territoires des
khoulafa (du VIII au XII siècle) les premières formes de capitalisme et d’économie de
marché ; avec une économie monétaire basée sur une monnaie forte et stable : le dinar.
Le commerce a était l’une des principales activités économiques des cités arabes dans le passé
et a fait la richesse de ces provinces qui entretenaient des relations commerciales avec les
Etats voisins. La course à la richesse conduisait, par la suite, les gens a adopté dans leurs
activités commerciales des conduites contraires aux principes de l’Islam.
La présence occidentale due à la colonisation, dans les pays musulmans, a laissé des traces sur
le plan économique et social. Cette colonisation qui s’est étendu jusqu’aux années 1900 a
favorisé l’installation de banques classiques dans ces pays à majorité musulmane. Le système
bancaire classique a largement dominé l’activité économique pendant cette période malgré
l’interdiction par l’Islam des activités liées à l’intérêt. Les musulmans ne se reconnaissant pas
dans ce système bancaire qui pourtant est indispensable à l’activité économique, devaient
donc trouver une alternative à ce système.
Ce n’est qu’à partir de l’année 1940 environ que quelques expériences d’utilisation des
techniques traditionnelles par des économistes et des banquiers, on vu le jour en Malaisie et
au Pakistan, puis en Egypte.
1
Parmi les écrits, nous citons le livre de Maxime Rodinson, « Islam et capitalisme », Paris. Éditions du Seuil,
1966.
Page 8
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Nous citerons comme deuxième exemple, le Mit Ghamr3 ; L’expérience qui a eu lieu en
Egypte en 1963 est souvent présentée comme le point de départ du système. Cette dernière
relevait d’une expérience entièrement privée, était composé de petites coopératives
d’épargne/investissement qui opéraient dans les régions agricoles du nord de l’Egypte.
L’objectif de leur fondateur « Ahmed Al-Najar » 4 , étant d’assurer l’intermédiation des
ressources financières entre épargnants et petits investisseurs locaux. On se basant sur le
principe de partage des bénéfices et non des produits ; ces fonds récoltés étaient destinés à
financer des projets agricoles sauf que cette expérience n’a duré que quatre ans et semble
avoir pris fin pour des raisons purement politiques. En 1972, le gouvernement socialiste du
président Nasser nationalisa cette banque qui devient la Nasser Social Bank. Elle perdit sa
spécificité.
Dans les années 70 éclata la guerre du Kippour qui opposait l’Israël à un certain nombre de
pays arabe défendant la cause Palestinienne, cette crise a eu pour conséquence le premier choc
pétrolier (le prix du pétrole fut multiplié par douze). Le choc pétrolier a contribué à
l’enrichissement rapide des pays du golf exportateurs de pétrole. L’afflux de pétrodollars dans
ces pays accentuait la nécessité de la création d’institutions financières pour une gestion
durable de ces fonds et surtout une gestion conforme aux valeurs de l’Islam. Ainsi les pays
concernés, regroupés au sommet de Lahore au Pakistan en 1974 décidèrent la création de la
banque islamique de développement (BID). La Banque Islamique de Développement (BID)
est implantée a Djeddah, elle fut créée par quatre pays membres fondateurs : l’Arabie
Saoudite, la Libye, Les Émirats Arabes Unis et le Koweït, sous les auspices de l’Organisation
2
Tabung Haji or LembagaTabung Haji (Malay Jawi: ; Arabic ) is the Malaysian hajj
pilgrims fund board.(source : www.wikipedia.org )
3
Le Mit-Ghamr est une communauté rurale du delta du Nil en Egypte.
4
L’économiste Egyptien Hamed Al Naggar qui est réputé être un grand admirateur du mouvement coopératif
Allemand. C’est après un voyage d’étude en Allemagne sur les institutions d’épargne locales et les coopératifs
qu’Hamed Al Naggar décida d’adapter ce modèle à la société musulmane dans laquelle il vit.
Page 9
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
de la Conférence Islamique (OCI). Son objet est d’être la banque de développement pour le
monde musulman et à ce titre elle participe à de grands projets.
La création de la BID ouvrit la voie aux banques et autres institutions financières islamiques.
La DubaiIslamic Bank(DIB) créée en 1975 fut la toute première banque privée islamique,
puis la Koweit Finance House (KFH) en 1977, la BahreinIslamic Bank (BIB) en 1979, la
Qatar Islamic Bank (QIB) en 1982.
Mais rapidement deux autres groupes, créés en Arabie saoudite, sont venus le concurrencer :
le groupe Al Rajhi et le groupe Al Baraka. Le premier, spécialisé dans les opérations de
change et de transfert de fonds, obtient le statut de banque en 1984. Elle devient alors surtout
la banque de financement des PME en Arabie Saoudite. A contrario le groupe Al Baraka
déployé dès la départ une activité internationale en implantant un réseau dans les pays
musulmans du sud de l’ex-URSS, du Moyen Orient et du Maghreb.
L’introduction de la finance islamique en Afrique surtout dans la zone UEMOA fut une
initiative du groupe financier saoudien DMI qui, dans les années 1980 a signé des accords
avec les gouvernements des pays de la sous-région pour l’ouverture de banques islamiques.
Ainsi fut créée la Banque Massraf Fayçal Al Islami (MFIN) du Niger le 22 Février 1983, la
Société Islamique d’Investissement du Niger (SIIN) le 9 Mars 1983, la Banque Massraf
Fayçal Al Islami du Sénégal (MFIS) le 22 Février 1983, la Société Islamique
d’Investissement du Sénégal (SIIS) le 9 Mars 1983. Aujourd’hui on trouve des banques
islamiques dans beaucoup de pays africains comme la Guinée Conakry, la Gambie, l’Afrique
du Sud…
Page 10
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Nous ajoutons que, au début des années 80 certains Etats ont entamé l’islamisation de tout
leur système financier. En 1979, le Pakistan fut le premier Etat à appliquer cette politique
d’islamisation des banques mais de manière progressive. Aujourd’hui toutes les banques au
Pakistan sont islamiques. Après le Pakistan, l’Iran emboita le pas et profita de sa révolution
islamique pour islamiser une fois pour toute, toutes les banques présentes sur son territoire.
Ainsi le Pakistan, l’Iran et le Soudan sont les premiers Etats au monde qui ont islamisé
entièrement leur système financier.
Dans les années 1990, on assiste à un autre évènement marquant : l’ouverture de départements
spéciaux ou « fenêtres islamiques » par les banques conventionnelles implantées dans les pays
musulmans, par exemple, dans l’ArabBanking Corporation (ABC) et la Gulf International
Bank, toutes deux basées à Bahreïn. Ces banques entendaient également attirer la clientèle
musulmane en offrant des produits et services islamiques. Puis d’autres banques de la région
ont suivi la même voie.
A la suite de cela, les banques occidentales présentes dans le monde musulman ont également
créé des fenêtres islamiques, comme la banque néerlandaise ABN AMRO et la City Bank au
Bahreïn.
Notons que pendant cette période la finance islamique est peu présente, voire absente des pays
du Maghreb, sauf une banque de Mauritanie (la BAMIS) et une filiale d’Al Baraka en
Algérie.
Cette croissance se poursuit au cours des années 2000, mais, plus important, l'intérêt pour la
Finance Islamique dépasse pour la première fois les frontières géographiques du monde
musulman pour devenir un enjeu mondial.
Page 11
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Croissance Au seuil de
Naissance Devellopement rapide l'Age mur
Peu de banque islamique Croissance numérique et en Croissance fulgurante Croissance ne faiblit pas
taille d’actifs (chocs pétroliers
Essentiellement des Construction d’une base de Foisonnement Internationalisation
Strat-up dépôt intellectuel s’accélère
Peu de dettes beaucoup de Extension géographique en Extension du retail Nouveaux entrants et
fonds propre Asie donne un second souffle nouvelle forme de
concurrence
Base de clientèles Début d’innovation Début de Prise en conscience du
inexistante financière désintermédiation caractère fragmenté du
marché
Principes incertains Principes sous-jacents plus Principes raffinés Principe sujets à de fortes
cohérents interrogations
Source : Anouar HASSOUNE, Moody’s Investors Service «Quel(s) marché(s) pour la finance islamique? », Conférence-
débat: Finance islamique, Beyrouth, 29 février 2008, p4.
Jusqu’en 2000 le système financier islamique était plutôt considéré par le monde de la finance
conventionnelle comme une « niche de marché », à la fois exotique et peu compétitive. On ne
lui destinait pas un avenir radieux. Puis vint le 11 septembre 2001 que l’on peut considérer
comme une date charnière. L’évènement du 11 septembre a été un déclencheur car les
ressortissants des pays du golfe, qui avaient déposé leurs fonds dans des pays étrangers,
craignant le gel de leurs avoirs, les ont en parties rapatriés. De mouvement de fond a coïncidé
avec une augmentation du prix du pétrole – le prix a triplé entre 1999 et 2005- et une
augmentation du volume de sa production. L’effet conjugué de ces évènements fut
l’accumulation d’une masse de liquidités qui a été à l’origine de la progression de la finance
islamique. 5
L’internationalisation s’est traduite d’abord par la création de départements islamiques par les
banques occidentales dans les pays musulmans. Les grandes banques occidentales (HSBC,
Deutsche Bank, City Groupe, Crédit Agricole, BNP Paribas, Calyon, Société Générale) ont
voulu profiter des capitaux disponibles dans les pays du Golfe.
5
Geneviève Causse-Broquet, « La finance islamique », édition Revue Banque, 2009, Paris.
Page 12
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
HSBC Amanah, établit en 1998 est l’entité bancaire islamique du groupe ; destiné au
Moyen-Orient, l’Asie du sud-est, l’Europe et Amérique, elle représente la plus
importante division bancaire islamique occidentale ;
Citigroup a créé des départements spécialisés : CitiIslamicInvestement Bank filiale
du groupe a été créé en 1996 au Royaume du Bahreïn. Elle exerce ses activités dans
plusieurs pays comme la Turquie, l’Egypte, le Pakistan, l’Inde ou le Bangladesh ;
BNP Paribas Nejmahfiliale islamique du groupe BNP Paribas, établit en 2003 au
Bahreïn .
La finance islamique se mondialise. Elle semble fasciner l’occident et inspirer la curiosité des
financiers, qui y voit un creusé d’innovations financières. La première banque islamique créé
à l’occident fut l’Islamic Bank of Britain (IBB), créée au Royaume-Uni en 2004, est
entièrement consacrée à la finance islamique. Suivied’autresbanquestelsque :
European IslamicInvestmentbank, Bank of London and Middle East…Londres est devenu le
pôle occidental de la finance islamique. D’autres pays occidentaux, surtout ceux dont la
population comporte une forte proportion de musulmans, comme les USA, la France, désirent
suivre la voie. Les Etats-Unis créent la banque Larida. Alors qu’en 2008, la France fait une
tentative dans l’Ile de la Réunion où la Société Générale a proposé un produit financier en
accord avec la Charia, avec succès. En 2009, l’Institut Français de finance Islamique est créé
avec comme objectif de promouvoir et d’accompagner la finance islamique en France. 6
Ajoutons que depuis la crise financière de 2008, le monde occidental s’intéresse de près à la
finance islamique, fuyantla crise financière et les dérives des marchés financiers
conventionnels et surtout l’immoralité du capitalisme occidental.
En effet, au-delà d’une crise financière, on note une crise de confiance des peuplesvis-à-vis du
système capitaliste mondial.
6
Aldo Lévy, « Finance islamique », édition Lextenso, 2012, Paris.
Page 13
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Maintenant, le monde de la finance doit soit maintenir le système actuel et faire faceà des
révolutions sporadiques, soit comme le tente l’Europe, retrouver les fondamentaux commune :
pas d’opérations financières sans actifs sous-jacents, comme en finance islamique.
La finance scientifique atteints ses limites et sont mis à l’index le manque de transparence, la
voracité de ses supports, l’absence d’éthique des affaires et de morale des dirigeants.
La finance islamique connait une croissance remarquable est considérable a deux chiffre,
soit, entre 15% et 20% annuellement (Elle pesait 700 milliards de dollars en 2008 et 1 100
milliards de dollars en 2011). Son taux de croissance est au moins deux fois supérieur au taux
de croissance de la finance classique.
7
Cependant, le poids global de la finance islamique ne dépasse guère le 1% de la finance mondiale. Ce secteur
est donc encore marginal mais avec une marge de progression énorme.
Page 14
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Mesures du
succès˜
rentabilité Croissance
rapide
Elevée Maturité
Déclin
Décollage
Moyenne
Innovation
On se situe
probablement ici ; un
Basse moment idéal pour la
rentabilité ; mais
potentiellement dangereux
Source : Anouar HASSOUNE, « La gestion des risques dans les banques Islamiques », Paris,, Novembre 2008.PDF, P 26.
Les banques islamiques sont éparpillées un peu partout dans le monde, elles sont présentes sur
les cinq continents. D’une banque en 1960, on est passé à plus de 300 institutions financières
islamiques réparties dans 75 pays en 2007.
Standard &Poor’s publiait en 2007 un classement des régions selon la taille du marché
bancaire islamique, où l’Afrique Sub-saharienne occupait la 15ème place sur 16 et l’Afrique du
Nord la 5ème place.
Page 15
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Source : Anouar HASSOUNE, Moody’s Investors Service «Quel(s) marché(s) pour la finance islamique? »,
Beyrouth, 2008.
Les principales banques islamiques dans le monde sont, par ordre de taille décroissante :
Al Rajhi Bank (Arabie saoudite),
la Kuwait Finance House (Koweït),
la Qatar Islamic Bank (Qatar)
DubaiIslamic Bank (Dubaï, Émirats arabes unis),
l'Abu Dhabi Islamic Bank (Abou Dabi, Émirats arabes unis),
Page 16
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 1
Conclusion
L’historique de la finance islamique nous pousse a penser que cette éthique a un avenir
prometteur et radieux, notamment avec son développement et sa croissance a deux chiffres ;
et afin de comprendre mieux cette finance éthique, il est impératif de comprendre ces
principes (ces interdictions et ces recommandations). Ces derniers feront l’objet de notre
second chapitre.
Page 17
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Chapitre (2) :
Introduction
Dans son éthique englobant, l’islam s’est intéressé ainsi aux comportements commerciaux, il
imposa le respect de certains principes de bases (qui découlent entre autre des grands
principes islamiques de la justice, de l'équité, de la transparence et du consentement mutuel
des contractants) : Ce sont ces principes qui fondent désormais les banques et assurances dites
islamiques ou plus généralement la finance islamique.
Les contrats de financement islamique ne doivent pas aller à l’encontre des principes
fondamentaux de la Charia. Les produits ou principes autorisés sont communément appelés
halal, ceux qui sont interdits sont désignés par le terme haram.8
l’interdiction du Riba(usure) ;
l’interdiction du Gharar (spéculation) ;
l’interdiction du Maysir (incertitude) ;
l’interdiction d’investir dans les secteurs illicites ;
l’obligation de partage des profits et des pertes (principes des 3P) ;
le principe d’adossement des investissements à des actifs tangibles de l’économie
réelle.
L’exigence de la Zakat
8,2
Herbert Smith, « Guide de la finance islamique », 2009, paris, p 2.
Page 19
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
LES PRINCIPES DE LA
FINANCE ISLAMIQUE
RIBA (USURE)
ADOSSEMENT A UN
ACTIF TANGIBLE
GHARAR
(SPECULATION)
MAYSIR
LE PRINCIPE DE
(INCERTITUDE)
PARTAGE DES PERTES
SECTEUR HARAM ET DES PROFITS
(ILLICITE)
LA ZAKAT
THESAURISATION
Source : nous-mêmes
Page 20
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
1.1.L’interdiction du Riba(usure)
Ar-Ribâ : étymologiquement veut dire surplus, usufruit. Il est traduit au sens de la loi
islamique par usure, intérêt : il est Haram(illicite) en Islam par le Coran et la Sunna: en Islam
l'investisseur se comporte comme un entrepreneur et partage les risques et les rendements.
Le terme Ribâdésigne, dans le fiqh (droit musulman), l'avantage qui est perçu par l'un des
contractants sans contrepartie acceptable et légitime du point de vue dela Charia.
Le Nombre de versets qui traitent du Ribâ est de 8 (sourate 2 : Versets : 275, 276, 278, 279 et
280 ; sourate 3 : Verset 130 et sourate 30 : Verset 39).
Certains savants optent pour une classification beaucoup plus vaste et distinguent deux types
de Ribâ:
Riba an- nasîah(à terme) : c’est le surplus perçu lors de l'acquittement d'un dû (et dont le
paiement a été posé comme condition de façon explicite ou implicite dans le contrat) en
raisondu délai accordé pour le règlement différé.
Riba-An-nasîah est le type le plus répandu dans la société, notamment à travers les crédits,
des prêts et des placements proposés par les établissements bancaires et les organismes de
financement traditionnels. 10
10
Revue Faqih :"Comprendre la finance islamique"; Édition spéciale Avril 2008 - Rabî’outhThâniy1429
Page 21
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
« Ceux qui pratiquent (mangent) l'intérêt ne se lèvent qu'à la manière de celui qui,
frappé de folie, est rossé à tord et à travers par le Diable. Et ce parce qu'ils ont dit que
le commerce n'était rien d'autre qu'une forme d'intérêt. Or Dieu a permis le commerce
et a interdit l'intérêt… »
« … O vous qui avez cru! Craignez Dieu et abandonnez le restant de l'intérêt si vous
êtes croyants. Si vous ne le faites pas, acceptez alors une guerre de la part de Dieu et
de Son Messager. Si vous revenez au droit chemin, vous avez droit à vos capitaux.
Vous ne commettez pas d'injustice et vous n'en subissez point. »
Ribâ al Fadl : vente ou échange d'un bien contre un autre de même nature avec un surplus.
Sous l’autorité d’Abu SaidAl-khudri, Le Prophète (Salut et bénédiction de dieu sur lui) a dit :
"De l'or contre de l'or, de l'argent contre de l'argent, du blé contre du blé, de l'orge contre
de l'orge, des dattes sèches contre des dattes sèches, du sel contre du sel : quantité égale
contre quantité égale, main à main. Celui qui donne un surplus ou prend un surplus tombe
dans l'intérêt…"(Rapporté par Muslim, n°1584).
Sous l’autorité d’Abu Said Al-khudri, Muslim raconte l’histoire d’un homme, Bilal, qui avait
offert au Prophète (Salut et bénédiction de dieu sur lui) des dattes de très bonne qualité. Le
Prophète (Salut et bénédiction de dieu sur lui) lui demande alors si toutes les dates de sa
région étaient aussi bonnes et l’homme lui répondit : « Non, nous échangeons un volume de
dattes de bonne qualité en échange de deux à trois volumes de dattes de moindre qualité ».
Le Prophète (Salut et bénédiction de dieu sur lui) lui dit : « Ceci est exactement le riba. Ne
fais pas ceci ! Vends plutôt des dattes de qualité moyenne et utilise ces revenus pour acheter
des dattes de meilleure qualité ».
Le premier hadith énumère six matières premières qui sont susceptibles de constituer le riba.
Etant donné que le troc (tel que l’échange de dattes repris dans le second hadith) n’est pas une
pratique courante aujourd’hui, nous nous concentrerons sur le riba impliquant l’or et l’argent,
monnaies (respectivement romaines et perses) en circulation à l’époque du Prophète (Salut et
bénédiction de dieu sur lui). A l’exception des écoles de jurisconsultes, telles que les
Page 22
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Zahirites, qui refusent à considérer le raisonnement par analogie (qiyas) comme étant une
source législative ainsi que certains détracteurs contemporains, la plupart des écoles de
jurisprudence islamique jugent que l’or et l’argent repris dans le premier hadith visent l’argent
de manière générale en ce compris la monnaie.
A cet égard, lors de sa troisième réunion en l’an 1407 après l’hégire (A.H), soit en 1990 de
notre ère, l’Académie Fiqh de l’Organisation de la Conférence islamique juge que :
« Après avoir lu les études relatives à ce sujet et présentées à cette instance, cette dernière a
estimé que la monnaie fiduciaire était une forme d’argent à part entière qui, en matière de
riba, zakah et salam, devait être traitée au même titre que l’or et l’argent étant donné que les
prix s’établissent sur la base (al-thamaniyyah) ».
Le premier hadith cité spécifie très clairement qu’il existe deux conditions pour échanger de
l’agent contre de l’argent :
2
1
Passer de main en main En quantités égales
Sous l’autorité d’ibn Mas’ud, Abu Dawud mentionne que « le Prophète (Salut et bénédiction
de dieu sur lui) a banni celui qui consomme le riba, celui qui le paie, celui qui en est témoin
et celui qui en fait le contrat » (Des traditions similaires au langage légèrement différent ont été
reprises par Muslim, Al-Bukhari et Al-Tirmidhi).
Un autre hadith qui décrie véhément le ribaet qui a été mentionné par Ibn Majahet Al-Hakim
sous l'autorité d'Ibn Mas`ud rapporte que le Prophète (sbsl) aurait dit :
Page 23
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
« Il existe soixante-treize sortes de riba dont la moins dangereuse est équivalente (en
péché) à commettre un inceste et dont la pire est équivalente (en péché) à détruire
l'honneur d'un musulman ».
« O vous qui avez cru ! Le v in, la divination par les entrailles des victimes ainsi que le
tirage au sort (jeu de hasard : May sir) ne sont qu’un acte impur de ce que fait Satan.
Évitez-le !....Le diable ne cherche qu’à introduire parmi vous les germes de la discorde par
l’animosité et par la haine à travers le v in et le jeu (de hasard) et à vous détourner de
l’invocation de Dieu et de la prière. Allez – vous donc y mettre fin ? »(Coran, Sourate 5,
versets 90 et 91).
Le Qimâr et le May sir se définissent comme toute forme de contrat dans lequel le droit des
parties contractantes dépend d'un événement aléatoire. C'est notamment ce principe que l'on
trouve dans les jeux de hasard et les pariages avec mise.
En Islam, désigne toute vente à caractère aléatoire ou possédant un élément vague, imprécis,
ambigu, incertain, caché ou dépendant d’autre événement. Relatif notamment à l’objet de la
vente, au prix ou à la livraison.
Al-Gharar reprend ainsi les activités qui ont un élément d'incertitude, d'ambiguïté ou de
déception. Dans un échange commercial, il se réfère à une tromperie ou à une ignorance sur
l'objet du contrat (l'incertitude sur les matières, le prix des matières).
Page 24
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
De nombreux hadiths interdisent les ventes contenant du gharar. À ce titre, l'un des
principaux hadiths qui a été repris par Muslim, Ahmad, Abu Dawud, Al-Tirmidhi,
Al-Darami et Ibn Majah sous l'autorité d'Abu Hurairah, précise que (la traduction est
à attribuer à Muslim) : « Le Prophète interdit toute vente contenant du gharar ».
Ahmad et Ibn Majah mentionnent sous l'autorité d'Abu Sa'id Al-Khudri : « Le prophète a
interdit l’achat d’un animal non né dans la matrice de sa mère, la vente du lait dans la
mamelle sans mesure, l’achat d’un butin de guerre avant sa distribution, l’achat des dons
de charité avant leur réception, et l’achat de ce qu’a péché un pécheur avant sa pêche. »
De nombreux exemples de gharar ont été donnés dans le hadith et visent la vente de poissons
de mer non encore pêchés, d'oiseaux non encore capturés, de veaux non encore nés,
d'animaux provenant de la chasse future, de fruits non encore mûrs, etc.
Tous ces exemples concernent des objets dont la véritable existence n'est pas encore
déterminée. En effet, le poisson peut ne jamais être pêché, le veau peut être
mort-né et les fruits peuvent ne jamais mûrir. Dans tous ces cas, il est dans l'intérêt
propre du vendeur et de l'acheteur d'être le plus précis possible quant à l'objet et au
prix de la vente.
Dans la finance conventionnelle, le gharar est surtout présent dans les contrats d'assurance et
les produits dérivés.
La présence de gharardans les contrats de vente à terme tels que les « forwards » et les «
futures », les contrats d'options et dans d'autres produits dérivés, prohibent le recours à
ce genre d'instruments financiers. Les forwards et les futures contiennent un
ghararcertain étant donné que l'objet de la vente peut ne pas exister au moment où la
transaction est effectuée. Comme nous le verrons ultérieurement, la Loi islamique
tolère certaines exceptions à cette règle en autorisant les contrats salamet istisna.
Cependant, l'essence de ces contrats dérivés rend leur interdiction non équivoque. Les
juristes classiques qualifient de al-bay' al-mudaf, c'est-à-dire non conclus et donc
invalides, ces contrats où tant le prix que les biens sont livrés à une date future (« Je
vous vends cette voiture pour tel montant au début du mois prochain »).
Page 25
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Les contrats d'options (« Je vous vends ma maison pour tel montant si mon père
revient ») ont également été abordés par les juristes traditionnels qui les ont qualifiés de
vente conditionnelle suspendue (al-bay' al-mu allaq) et les ont interdits en raison de la
présence de gharar.
La Sharia exige également que tout musulman ne peut traiter des biens jugés illicites ou
Haram. En effet, il existe des exigences quant à la nature de l’activité dans laquelle un
investissement demeure conforme aux impératifs moraux et religieux tels que dictés par
l’Islam. Ainsi, les jeux de hasard, les activités en relation avec l’alcool, avec l’élevage porcin
ou encore avec l’armement. On retrouve ce principe d'exclusion dans la finance éthique en
faveur du développement durable et dans l'investissement socialement responsable.
Du point de vue financier, les sous-jacents de tout type de contrats doivent également être
conformes à la Sharia. Typiquement, dans le cadre d’une prise de participation sous la forme
d’actions, un certain nombre de secteurs dont les activités sont considérées comme illicites
sont à exclure de l’univers d’investissement.
1.5.interdiction de la thésaurisation
11
Dominique de Courcelles, la finance islamique a la française « la finance islamique est-elle aujourd’hui une
chance pour l’éthique », Secure Finance, édition Bruno Leprince, novembre 2008, France, P22.
Page 26
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Connu aussi sous le principe d’équité et de justice sociale ; de sorte que au niveau des
opérations de financement le risque doit être partagé entre le détenteur de fonds
(l’investisseur) et l’utilisateur de ces fonds (l’entrepreneur) ; de sorte que le risque sera
répartit équitablement selon des proportions déterminées à l’avance entre l’investisseur et
l’entrepreneur.
La clé de répartition doit être fixé dans une proportion et non par un bénéfice à la signature
du contrat (Partage des pertes et des profits).
Le principe du partage des risques ou le principe des 3P (participation, profit, perte) est le plus
souvent appliqué grâce au contrat de Moudaraba et de Moucharaka.
Page 27
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Toute transaction financière doit être sous-entendue par un actif pour être valide selon la
Sharia. La tangibilité de l’actif signifie que toute opération doit être obligatoirement adossée à
un actif tangible, réel, matériel et surtout Détenu.
Le principe de la tangibilité des actifs est également une manière pour la finance islamique de
participer au développement de l'économie réelle par la création d’activité économique dans
les autres domaines.
L’Islam a mis en place la zakât (l’aumône purificatrice légale) comme pilier de l’Islam pour
mieux distribuer les richesses et subvenir aux besoins des pauvres…
La zakât traduit par « purification », est le troisième des piliers de l'islam, et son essence
même révèle l'importance de la participation sociale dans l'univers musulman. Le musulman
est tenu de calculer chaque année lunaire (hégire) ce montant et de le donner aux plus
pauvres. Ce prélèvement "purifie" sur le plan religieux, sacré et moral le bien de celui qui le
possède.12
Celui qui s’acquitte de la zakât protège son argent et le bénie. Il purifie par là son cœur, élève
son âme et fait fructifier ses biens. Dieu lui multiplie les mérites.
12
www.wikipedia.org
Page 28
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Ibn ‘Umar a dit : « Toute richesse sur laquelle on prélève la zakât n’est pas considérée comme
thésaurisée, même si elle est enfouie au fin fond du sol. Mais toute richesse sur laquelle la
zakât n’est pas prélevée est considérée comme thésaurisée même si elle n’était pas cachée ».
Celui qui thésaurise les biens (et ne donne pas la zakât prescrite) est concerné par le châtiment
promis par Dieu dans le Coran à ceux « qui thésaurisent l’or et l’argent ».
L’Islam a encouragé les aumônes volontaires, les actes de charité et a mis en place le Waqf (la
fiducie) tout ceci pour amener la société à la solidarité, à la compassion, la générosité et
même à l’altruisme et arriver ainsi à l’équilibre et la justice social et par là à la sécurité et la
paix. Le Coran contient plus de 80 versets concernant la zakât et l'obligation de s'en acquitter.
Le musulman doit s’acquitter de la Zakât al mâl (aumône légale) dès lors que le montant de
son épargne dépasse un certain seuil que l’on appelle le « nissab ». Ce nissab est indexé sur le
cours de l’or ou de l’argent. Concrètement, il correspond à la valeur monétaire de 85 grammes
d’or (595 grammes d’argent pour l’école hanafite). Ainsi une personne devient imposable si le
montant de l’épargne cumulée tout au long d’une année lunaire est supérieur ou égal au
nissab.Quant à l'argent qui a été épargné pendant moins d'un an, c'est-à-dire que la personne
l'a dépensé avant ce délai, il n'y a pas de zakat à payer dans ce cas.
Soumis à la zakat
Page 29
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Page 30
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 2
Conclusion
Ce chapitre nous a résumé les principes de base de la finance islamique - ce qui est autorisé et
ce qui est prohibé - . Nous remarquons que la finance islamique est basée sur une économie
réelle, qu’elle banni l’intérêt, la spéculation (maysir) et l’incertitude (gharar) ; ce sont ces
principes qui ont mis les banques islamiques à l’abri des pertes et dommages colossales
auxquelles ont été mis les banques islamiques lors de la crise financière de 2008. Ce qui nous
pousse a dire, que si le monde occidentale aurait respecté les règles de la finance islamique, la
crise des subprimes et la crise financière 2008 n’aurait jamais vu le jour. Et c’est ce qui a
poussé les pays occidentaux a étudier cette finance éthique de prés et d’étudier ces
mécanismes. Et afin de comprendre les mécanismes et les instruments de la finance islamique,
nous vous proposons d’étudier notre prochain chapitre.
Page 31
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Chapitre (3) :
« Modes de financement islamique »
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Introduction
Tout financement reposant sur le consentement mutuel est autorisé. Toutefois, étant donné
que la plupart des musulmans ne connaissent pas suffisamment les différentes conditions qui
valident une opération de vente, les juristes contemporains aidés par les financiers ont limité
l'étendue de la finance islamique à quelques contrats nommés.
Ces derniers sont des contrats qui ont été extensivement étudiés, au cours des siècles,
par des juristes et dont la licéité est établie par les propres actions du prophète
(sunnah) ou par le consensus des premières communautés musulmanes et des juristes
(ijma’).
Page 33
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Les modes de
financement de type Les opérations
participatifs commerciales
- Mourabaha
- Moudharaba ;
- Salam
- Moucharaka.
- Ijara
- Istisnaa
Page 34
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Le contrat Moudharaba est dérivé d’une pratique ancienne, existant au temps du prophète,
selon laquelle une personne, détenteur de fonds, s’associe avec une autre personne,
entrepreneur-commerçant. L’un apporte les fonds, l’autre son activité. A l’issue de
l’opération, ils se partagent les bénéfices qui en résultent. Cette pratique a été reprise par les
banques islamiques qui peuvent ainsi assurer leur fonction d’intermédiation en prêtant des
fonds à leurs clients, sans utilisation de l’intérêt.
C’est un contrat conclu entre un (ou des) investisseur(s) qui apporte(nt) des fonds (rab-el-mal)
– en l’occurrence la banque- et un entrepreneur qui assure le travail nécessaire et apporte son
expertise pour faire fructifier ces fonds (moudharib), dans une opération conforme à la Charia
En cas de profit, le moudharib est rémunéré pour son travail et son expertise, le rab-el-mal
pour son apport en capital. La rémunération a lieu selon la proportion fixée dans le contrat.
Elle intervient après retenue de frais de gestion par le moudharib et remboursement du capital
au rab-el-mal. Le moudharib ne reçoit pas de salaire. En cas de perte, l’un perd le fruit de son
travail et ses frais de gestion, l’autre ses fonds.
Page 35
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Le contrat Moudharaba
Projet
Perte
Profit
Remboursement du capital
La Moucharaka est une sorte de société en participation pouvant prendre la forme d’une
société de personne ou de capitaux. La différence avec la moudharaba est que tous les
partenaires (moucharik) participent à la fois au capital et au travail, ou à la gestion. Dans le
cas de société de capitaux, les banques islamiques peuvent siéger au conseil d’administration
et exercer leur droit de vote.
Les acteurs qui s’engagent dans ce type de relation contractuelle partagent autant les profits
que les pertes potentielles du projet d’investissement au prorata de leur participation. Si les
apports sont égaux et le partage des pertes et des profits à égalité entre les partenaires, le
contrat est appelé moucharakamoufawadah. Les partenaires gèrent conjointement le projet ou
l’entreprise, sauf s’ils ont décidé autrement. Si les apports sont différents et les droits
diffèrent, il s’agit d’une moucharakaanan, chacun s’engage, en principe, à hauteur de sa
participation.
Page 36
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Chaque partenaire peut participer à la gestion du projet ou désigner une tièrce personne à cet
effet. Il agit comme un commanditaire. Les salaires versés seront considérés comme des
charges du projet.
Si ces deux techniques (Mourabaha et Moucharaka) sont plus fidèles à la philosophie de la loi
coranique, elles restent, pourtant, beaucoup moins utilisées.13
24%
Autres
Musharaka/Mudharaba
59% Murabaha
17%
Source : Vernimmen.net
13
KrassimiraGecheva, Olivier Pastré, Revue d'économie financière, Année 2008, Volume 92, Numéro 92, p
197- p213.
Page 37
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
La moucharaka dégressive est une formule intéressante pour la banque. L’un des
partenaires, généralement la banque, accepte de vendre progressivement ses parts à
l’autre partenaire (ou à une autre partie) contre une somme d’argent. La banque
reprend progressivement son apport en fonction de l’état d’avancement du projet, en
conséquence, le client devient progressivement propriétaire unique du projet. La part
du profit de la banque diminue alors dans la même proportion.
Le contrat Moucharaka
(4) Y%
(4) X % PERTES
(4) X’ % (4) Y’ %
PROFITS
Page 38
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Cette opération constitue l’activité la plus importante des banques islamiques. Elle prend le
nom de muajjalen Asie.
Dans une telle transaction, l'acheteur connaît le prix auquel le vendeur a obtenu l'objet
et accepte de payer une prime. Selon Ibn Mas`ud :
« Il n'y a aucun mal à percevoir des marges bénéficiaires, qu'elles soient mentionnées en termes de
pourcentage ou de somme fixe ».
Toute personne peut donc demander à une institution financière islamique d'acheter
un objet à son nom à un prix convenu en échange d'une marge bénéficiaire de 10000
DA ou encore d'acheter un objet à son nom en échange d'une marge bénéficiaire de 10
pourcent.
Le fait que la marge bénéficiaire puisse être perçu comme le paiement d'un
pourcentage ou d'un intérêt n'est pas un problème étant donné que les transactions qui
remplissent les conditions des ventes Mourabahane contiennent pas le riba.
L'usage erroné du terme « intérêt » en tant que traduction du mot « riba » a conduit à
de nombreuses fausses idées. Les intérêts bancaires constituent sans aucun doute le
riba interdit ; Toutefois, le seul fait que la marge bénéficiaire d'une vente licite soit
précisée en pourcentage, ne signifie pas qu'il s'agisse du riba. Un pourcentage n'est
que la division de la marge bénéficiaire par le prix initial suivie d'une multiplication
par 100.
Pour résumer, le contrat Mourabaha fait intervenir trois acteurs : le client de la banque qui
désire se procurer des biens, un vendeur et la banque islamique. C’est un contrat par lequel la
banque, sur ordre de son client, achète un bien (marchandises ou matières premières, ou
Page 39
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
produits semi-finis) et le revend à son client au coût de revient majoré d’une marge. Le
paiement peut être immédiat ou différé. Le plus souvent le paiement est différé.
Etapes de l’opération
Condition de validité
Comme les autres contrats, il doit être en conformité avec les règles de la Charia. De plus :
La banque ne peut pas inclure dans le contrat une clause prévoyant des intérêts de retard en
cas de paiement hors délai.
Page 40
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Contrat de Mourabaha
(5) (4)
Contrat
Livraison (3)
de vente
Mourabaha Achat du bien
(2) par la banque
Promesse
d’achat
BANQUE ISLAMIQUE
Dans une opération de vente Mourabaha, la banque Al-Baraka Algérie ne peut établir sa
qualité de premier acheteur, condition sine qua non de validité « chariatique » de la
transaction, qu’à travers une facture libellée en son nom pour le compte du client. Cependant
ce dernier la traitecomptablement et fiscalement comme s’il en était lui-même l’acheteur
initial. La banque esttenue, pour sa part et réglementation bancaire oblige, de la consigner en
tant que simpleopération de crédit. La justification de la revente de la marchandise au client
réside dans leseul contrat de Mourabaha.
Page 41
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Il est très rare que, dans le cadre d'une transaction Mourabaha, les banques islamiques
demandent à leurs clients de régler le prix immédiatement. En effet, dans un tel cas,
il n'y aurait aucun financement de la part de la banque et cette dernière serait un
intermédiaire ou encore un agent appelé simsar. Lorsqu'un client approche une institution
financière islamique pour financer l'achat d'un bien par une structure Mourabaha, le
prix n'est payé qu'ultérieurement et généralement de manière échelonnée.
Les fausses idées qui existent depuis plus de vingt ans dans la littérature traitant du
secteur bancaire islamique avancent que les profits bancaires sont une forme de riba.
Al-Kasani dans Badai AI-Sanai (œuvre principale de l'école hanafite) : » le prix peut être
augmenté sur la base de report ».
Page 42
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
La confusion contemporaine est récente. Dans l'ouvrage Ahkam Al-Qur'an, Ibn Al-Arabi
mentionne un argument souvent invoqué par les Arabes au temps du Prophète afin de
soutenir que « le commerce est similaire au riba». Le verset 275 de la deuxième
Sourate contient une réponse sans équivoque : « Allah a autorisé le commerce mais a interdit
le riba ».
La différence juridique qui existe entre les deux situations est évidente : l'une est une
vente pour laquelle le prix est augmenté en fonction du report tandis que l'autre est une
augmentation de la dette en raison du report. La première est autorisée et se permet de
répondre aux besoins de financement qui sont généralement rencontrés avec les prêts à
intérêts.La seconde est toutefois strictement interdite. L'autorisation de la première
situation et la prohibition de la seconde sont toutes les deux évidentes et sans
équivoque.
Les ventes à crédit peuvent donc être utilisées en tant que moyen de financement alors
que les prêts à intérêt sont à proscrire.
C’est un contrat de vente avec livraison différée et paiement comptant. La banque intervient
comme acheteur d’une marchandise. Elle lui sera livrée à terme pour son client.
« En se rendant à Médine, le Prophète a rencontré des habitants qui concluaient des contrats de
Salam (dont le prix était payé d'avance) relatifs à des fruits et pour une durée de un, deux ou trois
ans. Il a dit : "Quiconque conclut un contrat de Salam doit spécifier le volume ou le poids ainsi
que le terme fixe" ».
Page 43
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Il a donc permis ce genre de transaction pour laquelle le prix est payé entièrement et
immédiatement et dont le bien spécifiquement défini est livré à une date future
déterminée à l'avance. Ce prépaiement a ainsi permis à de nombreux paysans d'acheter
des semences, de subvenir à leurs besoins, etc., afin de produire les fruits.
Ce mode de financement a été ensuite utilisé dans tous les secteurs de l’activité marchande,
mais ce rappel permet de comprendre les conditions de validité imposées.
Le cas général, est celui où le contrat Salam est assorti d’un contrat Salam parallèle (Salam
mouwazi) et où vendeur et acheteur, parties prenantes de deux contrats successifs avec la
banque, se concertent préalablement.
Condition de validité
Les marchandises faisant l’objet du contrat doivent être des marchandises courantes
(produits agricoles, matières premières…) dont les unités sont interchangeables
Les marchandises ne doivent pas exister au moment du contrat.
L’objet du contrat doit être bien précisé : sa nature, sa qualité, la quantité, le prix.
Le délai de livraison ainsi que le lieu de livraison doivent être fixés, dans son contrat.
Le prix doit être précisé et payé comptant par le client acheteur.
Page 44
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Si à la date prévue pour la livraison le vendeur n’est pas en mesure de livrer la marchandise,
la solution admise par la plupart des jurisconsultes est que l’acheteur (en l’occurrence la
banque) se fasse remboursé du prix payé, sans majoration, ou attende de livraison, sans
indemnité de compensation.
(2) Contrat
(2bis) Contrat (3) (2) salam
salam parallèle Livraison Paiement
Banque
Ce mode de financement peut être rapproché des modes de financement du besoin de fonds de
roulement existant dans le système conventionnel : facilités de caisse, découvert, crédit de
compagne, etc.
Page 45
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Remarque :
Le contrat avec le vendeur peut prévoir la livraison des marchandises dans un magasin
général et donner lieu à émission de warrants dont la banque dispose comme garantie.
La vente des marchandises entreposées peut être assurée par la banque ou par le client
vendeur.
Le contrat istisna’ ressemble au contrat Salam puisqu’il est également relatif au financement
d’un bien qui n’existe pas au moment de la signature du contrat mais il porte non sur la
livraison de produits marchands courants mais sur la livraison de biens à manufacturer ou à
construire selon les spécifications fournies par l’acheteur.
C’est un contrat par lequel l’une des parties (le moustasni’) demande à l’autre partie (le sani’)
de lui fabriquer ou construire un bien moyennant une rémunération fixée par différence avec
la vente Salam, le prix n’a pas à être payé en totalité au moment de la vente ; le prix est payé
de manière échelonnée au fur et à mesure que les travaux de construction ou de production de
biens progressent.
Ce produit fait donc intervenir deux parties, l’acheteur et le vendeur. Toutefois, dans le cas de
financement par une banque islamique, l’opération prend la forme d’un double contrat istisna’
et trois parties sont concernées : le client de la banque, acheteur d’un bien pour lequel il
cherche un financement, la banque et le vendeur, maitre d’ouvrage. Les deux contrats portent
sur le même bien mais sont indépendant, notamment les prix sont différents, l’écart représente
la marge de la banque.
Page 46
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
3) La banque et le client acheteur s’engagent par un contrat istisna’, qui reprend les
spécifications du bien à réaliser, la date de livraison et précise les modalités de
paiement propres à ce deuxième contrat.
4) La banque reçoit livraison du bien, ou plus généralement, directement le client
acheteur s’il en a été convenu ainsi. Ce dernier peut alors contrôler la conformité des
biens livrés.
Le contrat Istisnaa
Banque
Condition de validité
- Le contrat doit porter sur la réalisation de biens à manufacturer selon les indications de
l’acheteur.
- La banque intervient comme entrepreneur, c’est ce qui justifie sa rémunération, qu’elle
intervienne directement ou par l’intermédiation d’un sous-traitant.
- Le contrat doit préciser la nature, la quantité, la qualité, et autres spécificités des biens
à fabriquer, ceci afin d’éviter le gharar.
Page 47
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
D’un point de vue légal le contrat de leasing n'est pas la vente d'un bien mais la
vente de son usufruit à savoir le droit de l'utiliser, pour une période de temps
déterminée La vente de l'usufruit est autorisée par l'Islam comme en témoignent les
versets suivants (leur interprétation revient à Yusuf Ali (1991)) :
« Et si elles allaitent [l'enfant né] de vous, donnez-leur leurs salaires » (al-Quran, 65:6).
« L'une d'elles dit : « Ô mon père, engage-le [à ton service] moyennant salaire, car le meilleur
à engager c'est celui qui est fort et digne de confiance ». Il dit : « Je voudrais te marier à l'une
de mes deux filles que voici, à condition que tu travailles à mon service durant huit ans. Si tu
achèves dix [années], ce sera de ton bon gré ; je ne veux cependant rien t'imposer d'excessif. Tu
me trouveras, si Allah le veut du nombre des gens de bien » (al-Qur'an, 28:26-27).
L e h a d i t h s uivant, repris par Ahmad Abu Dawud et al-Nasa'i sous l'autorité de Sa ad, le
prouve également :
« C'est avec de l'eau et des graines que les fermiers du temps du Prophète payaient pour l'usage
de la terre. Il leur a interdit de faire cela et leur a ordonné de payer leur loyer en or et en argent».
Ahmad, Al-Bukhari et Muslim ont aussi mentionné sous l'autorité d'Ibn 'Abbas, que le
Prophète a engagé un homme pour lui tirer son eau et qu'Il lui payait un salaire.
Dans la banque islamique, l’Ijara est une sorte de crédit-bail à moyen et long terme qui fait
intervenir trois acteurs : le client de la banque, locataire du bien, la banque et le fabricant,
vendeur du bien. Les secteurs concernés sont essentiellement : les transports, l’immobilier et
l’équipement.
La banque islamique achète un actif qu’elle loue à une entreprise cliente pour une période du
contrat. Il peut être revu en cours de contrat.
Dans ce contrat, il peut être prévu l’achat du bien par le locataire, en cours de contrat ou en fin
de contrat. En conséquence, il s’agit soit d’un contrat de location simple, soit d’un contrat de
crédit-bail avec option d’achat.
Page 48
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
S’il s’agit d’un contrat de location simple, en fin de contrat si la situation est l’une des
suivantes :
S’il s’agit d’un contrat de location-vente, chaque versement effectué par le locataire comprend
le loyer et une partie du prix d’achat du bien. Ces montants complémentaires successifs sont
placés dans un compte d’investissement, ce qui permettra au locataire le rachat du bien en fin
de contrat. Les profits générés par les montants déposés sur le compte sont au bénéfice du
client. Enfin, La durée du leasing ainsi que les redevances peuvent être déterminées de
manière à ce que le paiement final ne soit que symbolique.
La principale différence entre les contrats de leasing permis par l'Islam et les leasings
conventionnels est que le bailleur doit posséder le bien tout au long de la période couverte par
le contrat.L’institution financière islamique achète le bien financé et maintient son
droit de propriété tout au long de la durée du contrat.
1) Le futur locataire – ou encore futur acheteur- négocie avec le vendeur et définit les
spécifications du bien.
2) Le futur locataire prend contact avec la banque. Ils définissent les modalités du contrat
ijara qu’ils signent ensuite.
3) La banque achète le bien au vendeur. Elle peut désigner un agent pour le représenter,
son client par exemple.
4) Le vendeur livre le bien.
5) La banque (propriétaire) loue le bien à son client.
6) A maturité le dénouement de l’opération dépend du type de contrat.
Page 49
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Le contrat Ijara
Client
(locataire) (1) Négociation sur spécifications Vendeur
(2) Contrat
ijara (5) Location (4) (3) Achat
Livraison du bien
(6) A maturité
Contrat de vente
Banque
Condition de validité
Hormis les conditions qui relèvent des règles de la Charia, notamment que l’usage des biens
loués soit une activité licite, les conditions suivantes doivent être respectées :
La location doit porter sur des biens durable, non destructibles du fait de l’utilisation
ou de la jouissance ;
Les mentions suivantes doivent être indiqué dans le contrat : le montant du loyer, la
périodicité, la date de début de location, la durée de location, le délai de paiement ;
Le montant du paiement du loyer doit être précisé : soit d’avance, soit à terme.
La banque peut souscrire une assurance pour se couvrir contre les risques qu’elle encourt.
Page 50
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Remarque
C’est un prêt sans contrepartie, effectuée dans un but humanitaire ou de bienfaisance. Il est
accordé occasionnellement à des particuliers dans le besoin, à des clients en difficulté, etc. il
peut être utilisé pour financer des projets dans le domaine social, économique, éducatif et
religieux.
Les modalités de remboursement sont prévues par les parties au moment de l’octroi du prêt.
La banque peut facturer à l’emprunteur des frais de service couvrant les charges
administratives.
Page 51
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
L’offre de produits alternatifs aux instruments bancaires conventionnels n’a pas été une chose
aisée en 1991. La finance islamique n’était pas aussi développée, structurée et
institutionnalisée qu’aujourd’hui. Ses formes organisées avaient juste 15 ans d’âge –la
première banque islamique, la Dubaï Islamique Bank, a été crée en 1975 et étaient
pratiquement méconnues en Algérie hormis dans les sphères universitaires, scientifiques ou
religieuses.
Deux années après le démarrage de la banque, des comptes d’investissements étaient ouverts
sans que le système de rémunération selon les règles de la Moudaraba n’ait été mis en place.
De même, les premiers financements ont été accordés sous forme de Moudaraba et de
Moucharaka en l’absence d’études de faisabilité et de connaissance des projets financés. La
plupart de ces financements ont été détournés de leur destination déclarée et ont dégénéré en
contentieux fastidieux.
Parmi les produits de financement qui ont favorisé grandement la prospérité de la banque
durant ses premières années, celui de la moucharakadans les opérations de commerce
extérieur. Il s’agissait d’une participation au financement d’importation de produits
alimentaires ou de matériaux de construction avec partage des bénéfices ou des pertes le cas
Page 52
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
échéant. Les rendements élevés des capitaux engagés par la banque ont permis de résorber les
déficits cumulés les deux premières années. Malheureusement, il a suffi que l’une de ces
associations conclue avec un partenaire qui s’est avéré de mauvaise foi, ce qui a débouché sur
un conflit judiciaire désobligeant, pour que cette formule, qui reflète le mieux la philosophie
partenariale de la finance islamique, soit peu à peu abandonnée en faveur des formes de
financement basées sur la dette à l’instar de la mourabaha, l’ijaraou du salam. Ce dernier
produit a été justement conçu pour se substituer à la moucharakaen tant qu’instrument de
financement des besoins de trésorerie des entreprises, car il permet d’avancer des fonds en
compte courant en tant que prix d’achat par la banque de marchandises fongibles à livrer
ultérieurement. Un contrat d’agence permet au vendeur d’écouler les produits pour le compte
de la banque à un prix correspondant au capital investi majoré d’une marge bénéficiaire
convenu. Le tableau et le graphe ci-dessous illustrent le déclin du financement participatif
dans le portefeuille de la banque.
Page 53
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Source : Nasser HIDEUR, « LE BANKING ISLAMIQUE EN ALGÉRIE, VINGT ANS APRÈS », Les cahiers de la
finance islamique, N° spécial 2013.
Ceci dit, la banque a toujours veillé à consacrer une partie conséquente de ces concours au
financement de l’investissement en dépit des incertitudes et des aléas entourant ces types de
projets et les insuffisances dans les études de faisabilité y inhérentes. A fin 2011, 67 % des
crédits ont été accordés aux entreprises, dont 37% à l’investissement contre 33% aux
particuliers. L’interdiction des crédits à la consommation autres qu’immobiliers en 2009 par
les pouvoirs publics, a renforcé ce redéploiement sur le financement de l’entreprise et le
financement de l’appareil productif pour peu que les conditions de viabilité économique des
projets soient réunies.
Page 54
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
crédits aux
ménagers 33%
crédits aux
entreprises 67%
Source : Nasser HIDEUR, « LE BANKING ISLAMIQUE EN ALGÉRIE, VINGT ANS APRÈS », Les cahiers de la
finance islamique, N° spécial 2013.
Dans cette optique de finance solidaire, la Banque a accepté, dans le cadre d’une convention
de partenariat avec le ministère des affaires religieuses signée en 2006, de gérer,
bénévolement, le dispositif kardhhassan zakat à travers lequel une partie des fonds zakat
collectés par les commissions locales du fonds national de la zakat est distribuée sous forme
de prêts non rémunérés finançant la création de micro-entreprises par des promoteurs
démunis. A fin 2011, le nombre des micro-projets financés par ce dispositif a atteint 4047
pour un montant cumulé de 762,2 millions de DA (7,622 millions d’euros).
Un autre dispositif d’octroi de micro-crédits de type kardhhassana été mis en place, en 2008,
dans la région de Ghardaïa pour le financement des activités économiques de groupes de
femmes solidaires à domicile. Ce nouveau produit a permis de financer 986 femmes pour un
montant 17 millions de DA (170.000 euros). Le succès de cette formule durant la phase pilote
a encouragé la banque à le transformer en un produit de micro-mourabahapour financer
l’extension des activités réussies tout en gardant la formule du kardhhassanpour les projets en
phase de lancement.
Page 55
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
produit précédent, il a été conçu avec l’assistance d’une société suisse spécialisée en micro
finance et le concours de l’organisme de coopération allemande en Algérie (GIZ), pour le
financement de très petites entreprises. La Moucharaka, de par sa souplesse et l’indexation
des remboursements et des rendements avec le volume et l’amplitude de l’activité s’est
révélée très adaptée à la taille et aux spécificités de cette catégorie d’entreprises qui
représentent 95% des PME-PMI algériennes.
Enfin, suite à l’interdiction des crédits à la consommation autres qu’immobiliers en 2009 par
les pouvoirs publics, la BANQUE Al-Baraka Algérie a proposé diverses propositions pour le
financement de l’immobilier, dont nous citons :
2.1.Définition de Soukouk
Le mot arabe Soukouk est le pluriel du mot Sakk qui signifie « document financier permettant
au titulaire de bénéficier de la somme d’argent indiqué sur celui-ci ».
14
« LE BANKING ISLAMIQUE EN ALGÉRIE, VINGT ANS APRÈS par Nasser HIDEUR » , Les cahiers de la finance islamique,
N° spécial 2013, p5-15.
15
www.al-baraka.dz
Page 56
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Le contrat Soukouk correspond à une obligation islamique adossé à un actif tangible. Les
Soukouk représentent un droit de créance pendant une période prédéfinie. Les contrats
Soukouk sont liés au fond d’investissement.
Le propriétaire du Soukouk reçoit une part du profit attaché au rendement de l’actif sous-
jacent et non un intérêt fixe. Les produits sous-jacent des Soukouk peuvent être représentés
par des contrats comme les Ijara, Moucharaka ou Moudharaba, Salam, Istisna’ ou encore
Mourabaha.
On distingue les émissions de type souverain par un Etat et celles de type corporate par une
société ou une banque.
Remarque :
Les Soukouk constituent une opération de titrisation, ce sont plutôt des produits assimilables
aux Asset-Backed Securities (ABS)16, sauf que la titrisation en islam ne peut se faire que par
rapport à un actif tangible et surtout ne peut se faire qu’une seule fois.
2.2.Description de l’opération
Le propriétaire d’actif, qui a besoin d’argent, cède ses actifs à une structure juridique
indépendante appelé Spécial PurposeVehicul (SVP), ou fonds commun de Créances (FCC),
qui agit comme administrateur pour le compte des souscripteurs. En accord avec ces derniers,
il peut passer un contrat Moudaraba, ou tout autre contrat17, avec un manager qui, en tant que
moudharib, se chargera de la gestion du projet. Dans ce cas, les profits du projet sont partagés
entre les souscripteurs et le moudharib, la plus-value éventuelle ne revenant qu’aux
souscripteurs.
16
ABS ; que l’on traduit par « valeurs mobilières adossée à un actif ».
17
D’autres formes de contrats sont possibles : moudharaba, moucharaka, Salam ou istisnaa. Ces différentes formes vont
donner lieu à différentes catégories de Soukouk.
Page 57
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Contrat Soukouk
Véhicule
Entrepreneur Spéciale Sukuk Investisseurs
d’Actif
Liquidités Liquidités
Chaque Soukouk est considéré comme représentant une part de capital qui, en cas de faillite,
confère à son propriétaire un remboursement prioritaire par rapport à l’actionnaire. Mais elle
ne donne pas droit à participer au management. En conséquence, ce n’est équivalent ni à une
action, ni a une obligation.
Durant la vie des Soukouk, les souscripteurs ont droit à une rémunération qui dépend de la
performance des actifs ayant servi de base de financement et de la part de capital souscrit. Les
souscripteurs assument donc un risque proportionné à la part qu’ils détiennent. La valeur des
Soukouk évolue selon l’offre et la demande sur le marché. En conséquence elle peut évoluer
différemment de la valeur des biens sous-jacents.
A la maturité des Soukouk les actifs sont vendus, généralement à l’acheteur qui, par contrat
indépendant du contrat de vente initial, a pu s’engager à les racheter, par exemple par un
contrat Ijarawaiktinaa (crédit-bail avec option d’achat). Les recettes subséquentes servent à
rembourser les souscripteurs.
Page 58
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Obligations Soukouk
Les obligations ne sont pas liées à des Les Soukouk représentent chacune une part de
actifs propriété des actifs sous-jacents à l’opération.
Les obligations ont droit à un revenu Les souscripteurs n’ont pas en principe, de
fixe. revenu fixe.
Les obligations ne sont pas concernées Les souscripteurs perçoivent une part de profit
par les résultats de l’émetteur. mais supportent également les pertes.
L’échéance des obligations est Le terme des Soukouk correspond généralement
indépendante de la fin de l’activité ou du à la fin du projet qui est financé.
projet financé.
En général le remboursement se fait par
tirage au sort.
Actuellement les Soukouk représentent le produit financier le plus répondu. Si, au départ
les émissions étaient essentiellement des émissions souveraines, ces dernières ne
représentent plus que 20% environ du marché des Soukouk.
Les stocks d’obligations islamiques étaient évalués à 47 milliards de Dollars US en 2006 par
le FMI. Ce chiffre reste important même s’il est très faible par rapport aux 4700 milliards de
Dollars d’émissions d’obligations d’entreprises dans le monde la même année.
Page 59
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
25 milliards de dollars à
20 l’horizon de 2012
Essentiellement des
15 émetteurs
souverains
10 Un marché
plus diversifié : de
5
nouveaux émetteurs ;
0
des structures plus
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
complexes (titrisation et
Emission sukuk locaux Emission de *globalsukuk* en US$ convertibles en
particulier).
Source : Anouar HASSOUNE, « Cartographie de la finance islamique », Paris - 3 novembre 2009.pdf, P15.
L’Afrique est quasiment absente sur ce marché alors que ce dernier pourrait lui permettre de
lever d’importants fonds et financer son développement.
En effet, le marché des Soukouk n’est pas exclusivement réservé aux Etats arabo- islamiques
comme on pourrait le croire. Des émissions de Soukouk ont été enregistrées aux Etats-Unis et
au Royaume-Uni. Les autorités des Etats africains doivent trouver les moyens pour intervenir
sur ce marché surtout ceux qui possèdent déjà une banque islamique. Ces Etats peuvent se
servir de ces banques islamiques pour lever des fonds au niveau national et international et par
la même occasion favoriser le développement de la finance islamique sur leur territoire.
18
Bulletin du FMI, n°12, Octobre 2007
Page 60
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Concernant le marché des fonds d’investissement, le rapport Vernimmen 2006 soutient qu’en
2005, il y avait environ 100 fonds islamiques de privateequity dont le total des actifs excédait
5 milliards de Dollars. En 2004, en Malaisie on enregistrait 71 fonds de placement.
Concernant les actions, en 1999 deux indices ont été lancés pour servir de repère aux
investisseurs des institutions financières islamiques, on peut citer le GIIS (Global Islamic
Index Service) du Financial Times Stock exchange et le DJIM (Dow Jones IslamicMarket
index) au Barhaim. Le Standard &Poor’s a lancé en 2006 une série d’indices islamiques sous
la marque S&P, on peut citer : le S&P500, le S&PME Europe 350, S&P Japan 500…
Page 61
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Ces comptes sont quasiment identiques à ceux des banques conventionnelles. Les droits et
obligations respectives du déposant et de la banque sont les suivant.
Le client :
Ces comptes sont parfois considérés comme des prêts qardhassaneffectués par les déposants.
Ce sont des comptes de dépôts à terme, basés sur le principe de la participation. L’objectif de
ces comptes est d’inciter les gens à épargner.
Ces comptes sont peu répandus. Les modalités de fonctionnement sont différentes d’une
banque à l’autre. Elles sont généralement les suivantes :
Le client :
Page 62
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
- N’a aucun droit de regard sur la manière dont la banque gère les fonds,
- Doit prévenir la banque s’il désire retirer des fonds, le détail de préavis étant
préalablement précisé.
La banque :
Particularités de la solution :
Avantages de la solution :
Un produit rentable et conforme aux principes de la Sainte Charia.
Une autre solution pour gérer efficacement vos opérations en espèces (dépôt/retraits ).
Une rentabilité de vos économies sans aucune contrainte.
Une souplesse d’utilisation par le client ou par une tierce personne ayant procuration.
Page 63
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Ils constituent la principale source de fonds des banques islamiques. Leurs modes de
fonctionnement est tout à fait conforme aux principes de la Charia puisqu’ils sont basés sur le
principe du PPP et associent le facteur capital et le facteur travail ;
Caractéristiques
Ils s’apparentent plus à un achat d’actions qu’a un dépôt de type conventionnel. En effet, il
n’y a pas de garantie de remboursement à la valeur nominale, les déposants n’ont pas de
rémunération fixe, leur rémunération est basée sur le principe du partage des profits et des
pertes de la banque.
Par un contrat, le client autorise la banque à investir les fonds dans des projets.
Le contrat doit contenir toutes les modalités relatives aux opérations envisagées : objet,
échéance, règles de partage, etc. la période de dépôt est généralement comprise entre 6 mois
et 3 ans, voire plus, elle peut être renouvelable.
La banque touche une commission de gestion, les « dividendes » sont donc calculés après
déduction de la commission.
On peut distinguer deux grandes catégories de comptes : les comptes standards et les comptes
« affectés ».
1) Les comptes standard s’appellent encore dépôts d’investissement illimités (ou non
restrictifs). Les fonds sont alors intégrés dans ceux de la banque pour constituer un pool
d’investissement. La rémunération a lieu en fin d’année. La banque intervient successivement
comme moudharib, puis comme rab-el-mal. Ces comptes sont, en principe, moins risqués
pour le client puisque l’investissement porte sur plusieurs opérations.
2) Les comptes « affectés » s’appellent encore des dépôts d’investissement limités (ou
restrictifs). La banque dispose des fonds selon les indications du dépositaire. Les fonds
déposés ne peuvent alors être mélangés avec ceux de la banque. La rémunération a lieu en fin
d’opération.
Page 64
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Selon la banque Al-Baraka Algérie, les dépôts d’investissement sont régis contractuellement
par le contrat de moudharaba, donc concourant aux risques en contrepartie de la perception
d’une part des bénéfices des opérations de financement au prorata de leur contribution et
affiché dans les conditions générales de banque. D’un point de vue légal, ces comptes ne
peuvent être analysés par la loi autrement que comme des fonds empruntés par la banque à
charge de les restituer et de les rémunérer indépendamment des résultats des opérations
financées. Ceci dit, l’autorité de supervision tolère que les conditions générales de banque des
banques régies par les règles de la charia prévoient un mode de rémunération variable basé sur
la participation aux résultats des financements consentis par ces établissements. Elle admet
aussi, tacitement, que les conventions d’ouverture des comptes d’investissement se réfèrent
aux principes de la moudharabafondée sur le partage du risque.
Particularités de la solution
Accessible aussi bien aux personnes morales que physiques (Entreprises, professionnels
et particuliers).
L'argent est investi dans des opérations et des projets divers sans affectation préalable.
Le Bon de Caisse est rémunéré à la fin de chaque période en fonction des profits
générés par les investissements engagés.
La souscription des Bons peut être nominative ou anonyme.
Les Bons de caisses peuvent être souscrits pour une durée de 3 mois à 60 mois et plus.
Avantages de la solution
Une solution pour rentabiliser votre Capital ou vos excédents de Trésorerie dans le
cadre des principes de la Sainte Charia.
Possibilité de libérer votre argent avant l’expiration de l’échéance.
Possibilité de nantissement desPage
Bons65
pour l’obtention d’un financement.
Un dépôt fructifié en toute sécurité.
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Conclusion
Page 66
La Gouvernance de la Banque Islamique Première partie / Chapitre 3
Après avoir analyser et clarifier les principes de base de fonctionnement des banques
islamiques, ainsi que les principaux instruments de financement islamiques. Nous remarquons
que cette finance est caractérisé par l’éthique, le légitime et surtout la morale : ce qui a
fasciner l’occident et insister sa curiosité à étudier cette finance éthique.
Page 67
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie
Deuxième partie :
« La gouvernance de la
banque islamique »
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie
Introduction
Les décisions et les comportements des managers bancaires occidentaux sont encadrées par
des règles et par des pratiques fondées sur les principes du gouvernement d’entreprise
conventionnel (standard corporategovernance). Selon Charreaux (1997), ces principes visent à
« expliquer la performance organisationnelle des systèmes qui encadrent et contraignent les
décisions des dirigeants »; cependant, en plus des organes de gestion classique, les banques
islamiques sont dotées d’un autre organe collégiale qui est le « Conseil de la Charia » ; ce
dernier fera l’objet d’une étude spéciale. Les principes de gouvernance couvrent « les
mécanismes qui ont pour effet de gouverner les conduites de ces derniers et de définir leurs
espaces discrétionnaires ». Ces principes sont inférés de plusieurs théories fondatrices ; pour
les comprendre, il est utile de revoir le cadre conceptuel de la gouvernance d’entreprise pour
lequel nous consacrons le premier chapitre. Tandis que, au niveau duchapitre, nous étudions
le cadre institutionnel de la gouvernance de la banque islamique (en analysant de près : le
conseil d’administration et conseil de Charia). En enfin, un troisième chapitre qui résume
l’ensemble des recherches et conclusions de la gouvernance de la banque islamique, en
traitant tout particulièrement la problématique de la double gouvernance et surtout du
positionnement et comportement du dirigeant face à cette problématique.
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Chapitre (1) :
Comme nous l’avons cité auparavant, les principes de la gouvernance d’entreprise sont inférés
de plusieurs théories fondatrices ; et pour les comprendre, il est utile de revoir l’historique de
la gouvernance d’entreprise, ainsi que son cadre conceptuel. Pour cela nous lui consacrons
tout le premier chapitre.
Notre chapitre est structuré comme suite : nous commençons par la définition de la
gouvernance d’entreprise, ses objectifs, ses principes (celle édictées par l’O.C.D.E et
Calpers), son cadre d’analyse ainsi que son cadre conceptuel, et terminons avec les principales
règles de gouvernance pratiquées dans le monde ; avec comme cas particulier : les règles de
gouvernance applicables aux banques islamiques.
Page 71
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
1.1.Définition de Vernimmen
Dans une acceptation étroite, le terme « gouvernance d ‘entreprise » est utilisée pour désigner
l’articulation entre l’actionnaire et la direction de la société ; et donc principalement le
fonctionnement du « conseil d’administration » ou du « directoire » et du « conseil de
surveillance ». 19
Le gouvernement des entreprise recouvre l’ensemble des mécanismes organisationnels qui ont
pour effet de délimiter les pouvoirs et d’influencer les décisions des dirigeants, autrement dit,
qui « gouvernent leur espace discrétionnaire.
1.3.Définition de l’O.C.D.E
Corporate governance is the system by witch business corporations are directed and
controlled. The corporate governance structure specifies the distributionof rights and
responsibilities among different participant in the corporation, such as, the board, managers,
shareholders and other stakeholders, and spells out the rules and procedures for making
decision on corporate affairs. By doing this, it also provide the structure through which the
company objectives are set, and the means of attaining those objectives and monitoring
performance.
19
www.vernimmen.net
Page 72
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
La « corporategovernance » est le système par lequel les sociétés sont dirigées et contrôlées.21
Les principes de la gouvernance d’entreprise les plus exhaustifs ont été définis par deux
grands acteurs : Calpers(CaliforniaEmployees’ Retirement System) et I.C.G.N (International
CorporateGovernance Network). De son côté, l’O.C.D.E a publié ces propres règles de
gouvernance d’entreprise.
20
Hélène Ploix, « Le dirigeant et le gouvernement de l’entreprise», Pearson Education, Paris, 2003.
21
Le Royaume-Uni a codifié les pratiques souhaitables de la gouvernance d’entreprise dans son rapport
« Cadburry » (1992).
Page 73
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Dans le but de responsabiliser les dirigeants, les investisseurs institutionnels exigent de relier
leurs rémunérations à la performance économique de l’entreprise, et s’opposent aux
« parachutes dorés » en cas de départ provoqué. A leur tour, les administrateurs sont
responsable de la qualité des décisions et de leur efficacité, y compris dans l’exécution des
stratégies ; et doivent rendre compte de leur application et résultats dans le rapport annuel au
cour de l’A.G.O (Assemblé Générale Ordinaire). Par exemple la loi « Sarbane-Oxley » exige
la signature et engage la responsabilité des dirigeants sur la certification des comptes de leur
société.
Le principe d’intégrité a besoin d’être réaffirmé. L’intégrité et la « probité » sont deux valeurs
qui devraient aller de soi, en particulier pour ceux à qui le sort d’une entreprise, de ses
employés et de l’investissement des actionnaires a été confié. Pourtant certaines des déroutes
récentes ou des scandales sont la conséquence de comportements malhonnêtes tel que : les
comptes truqués, les délits d’initiés et des conflits d’intérêt.
Page 74
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
La finalité de la communication d’une information doit toujours être maitrisée, car trop
d’information peut aussi tuer l’information.
Page 75
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Les actionnaires souhaitent jouer un rôle dans les grandes décisions stratégiques de
l’entreprise. Ils doivent tous pouvoir s’exprimer aisément dans les assemblées générales
grâce à des méthodes de vote simple et efficace.
3.1.5. Une vision stratégique à long terme pour valoriser l’investissement des actionnaires
Un débat existe sur le rôle des investisseurs institutionnels dans la volatilité des marchés et sur
leur marque de fidélité aux entreprises dans lesquelles ils sont investis. De fait, il faut
distinguer entre plusieurs catégories d’investisseurs institutionnels :
Tous, ont certainement un horizon d’investissement à long terme et ont intérêt à voir
progresser la valorisation des titres qu’ils détiennent, à l’exception des fonds spéculatifs qui
gèrent à partir d’analyses différentes, aussi les gestionnaires de fonds mutuels (SICAV)
peuvent aussi rechercher des performances à court terme pour surpasser leur concurrents.
22
Bill Crist (président de CalPERS) a récemment remis en cause les obligations de publications trimestrielles des
résultats.
Page 76
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Rédiger par de grands investisseurs institutionnels, les autorités de marché, des commissions
gouvernementales ou des associations de dirigeants, des codes convergents se sont multipliés
ces dernières années sur tous les continents pour préciser les règles du gouvernement
d’entreprise s’appliquant aux sociétés cotées et même aux société non cotées.
Chaque pays comporte son propre système juridique de celui du voisin, le droit des sociétés et
le droit des marchés boursiers et financiers ne font pas exception. De plus, chaque entreprise
possède par nature ses spécificités. Les investisseurs institutionnels attendent de chaque place
financière qu’elle établisse son propre code de bonne conduite, en prenant en compte ses
particularisme et qu’elle le révise à échéance régulier. Ensuite chaque entreprise se positionne
par rapport à ce code, définit sa propre gouvernance d ‘entreprise et explique dans son rapport
annuel comment elle conçoit sa gouvernance d’entreprise et dans quelle mesures elle applique
les règles de sa place financière (Comply or explain –il s’agit d’appliquer la règle ou
d’expliquer pourquoi on ne la suit pas-).23
Prenant en compte l’expérience de certains États membres et les travaux réalisés en matière
de gouvernement d’entreprise, le Conseil de l’O.C.D.E (Organisation de Coopération et
Développement Economique) a approuvé une série de principes, en mai 1999, qu’elle a
ensuite révisés en avril 2004.
Ces principes ont pour objet d’aider les gouvernements à améliorer le cadre régissant
l’organisation des pouvoirs dans l’entreprise, en leur proposant des orientations et des
suggestions, qui ne revêtent pas de caractère contraignant et qui sont appelées à être revues en
fonction des circonstances.
23
Hélène Ploix, « Le dirigeant et le gouvernement de l’entreprise »,2003.
Page 77
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
- garantir la diffusion, en temps opportun, d’informations exactes sur tous les sujets
significatifs concernant l’entreprise ;
Un régime de gouvernance d’entreprise doit protéger les des actionnaires et faciliter leurs
exercice.
24
Jean-Jacques Caussain, dossier gouvernance d’entreprise, CAHIERS DE DROIT DE L’ENTREPRISEN° 5, Septembre-Octobre
2005, P29.
Page 78
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Un régime de gouvernance d’entreprise doit reconnaitre les droits des différentes parties
prenantes à la vie d’une société.
Page 79
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Le droit caravanier est resté coutumier et non écrit ; tandis que le droit commercial maritime,
progressivement élaboré au cours des siècles, est très explicite avec des nuances sensibles
d’un cadre national à un autre ; jusqu’au rapprochement des conceptions et l’émergence de
règles internationales. Malgré des efforts de clarifications les règles de gouvernance sont
restées complexe, tels que les contentieux liés aux sinistres.
Ce second courant est autant enraciné dans l’histoire que le précédent. De la féodalité et les
droitsseignereuxrelevaient d’une logique régalienne et non de principe de gouvernance
d’entreprise. En revanche, on retrouve ces principes dans la situation classique des relations
entre propriétaires fonciers d’une part, leurs fermiers, intendants, régisseurs et autres agents
locaux d’autres parts. Ces relations ont fait l’objet de maints règlements et lois constituant les
codes ruraux.
Les révolutions industrielles successives de la fin du 18ème siècle et du 19ème siècle ont
constitué un facteur majeur pour le développement du capitalisme occidental et lui ont donné
progressivement les traits qui la caractérisent. Les besoins en capitaux pour faire face aux
investissements industriels se sont révélés immenses et ont pu être satisfait par la
généralisation des instruments institutionnels déjà expérimentés au temps du capitalisme
marchand : les banques, sociétés de capitaux et bourses de valeurs. Ces instruments portent en
eux les éléments de cette dissociation entre détenteurs de droits patrimoniaux et responsables
managériaux : situation constituant la problématique de la gouvernance d’entreprise.
Rendue célèbre par les travaux d’A.Berle et G.Means (1932), A.Chandler (1977), l’emprise
croissante des dirigeants salariés dans la vie des grandes entreprises américianes correspond à
Page 80
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
une réalité incontestable. Cependant l’irrésistible ascension du pouvoir managériale, que l’on
pouvait considérer comme acquise au milieu du siècle dernier, a connu aux Etats-Unis mêmes
une spectaculaire mise en cause, aboutissant à la définition et la mise en œuvre de principe de
gouvernance d’entreprise traduisant un retour fort de l’actionnaire. Divers travaux ont analysé
« le retour de l’actionnaire », tels que Agliette (1997) ; l’Hélias (1997) ; ils mettent l’accent
sur l’importance prise, dans ce pays, par la financiarisation de l’économie et par le poids
croissant des investisseurs institutionnels. Les investisseurs institutionnels reflètent
l’intermédiation croissante de l’épargne des ménages à des organismes disposant de moyens
importants de gérer professionnellement. Les investisseurs institutionnelles, et tout
particulièrement les fonds de pension, ont progressivement eu à gérer des volumes
considérables d’actifs financiers, ce qui les a amenés à diversifier leurs portefeuilles afin d’en
réduire les risques. Ils sont par-là présents, souvent pour des montants significatifs, dans le
capital d’un certain nombre de grandes sociétés, notamment celles qui constituent les indices
de références. Cette contrainte de présence les a conduits a s’intéresser à la gestion desdites
sociétés, à demander à leurs directions les informations qu’ils estiment nécessaires, à
intervenir enfin auprès de ces directions pour obtenir des éclaircissements sur les activités
passées et leurs performances, puis sur les stratégies envisagées et leur impact. La
gouvernance d’entreprise, dans sa forme contemporaine reflètent un « retour de
l’actionnaire », était née, et il est significatif que les premiers principles of
corporategovernance exprimant cette tendance aient été dictés par le fonds californiens
Calpers qui a joué un rôle pionnier en la matière
5.1.L’Europe anglo-saxonne
Page 81
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
C’est le modèle dans lequel les dirigeants cherchent à concilier les intérêts des différentes
parties prenantes de l'entreprise (actionnaires, banques, salariés, clients). Les relations
banque-industrie y sont fortes, tant en terme de financement des investissements qu’en terme
de participations et de contrôle.
Corrélativement, les marchés financiers y jouent un rôle plus modeste que dans les pays
anglo-saxons.25
La gouvernance d’entreprise est focalisé sur une catégorie d’acteurs clés de toute
organisation : « les dirigeants » ; cette catégories est parfois réduite à une seule personne, le
plus souvent représentée par un petit groupe fortement hiérarchique autour du leader.
25
Michel Albert, 1995
Page 82
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Comment s’assurer que ce qu’ils disent reflète bien ce qu’ils font et que ce qu’ils font
correspond bien aux missions qui leur ont été allouées ?
Ces trois séries de composants et leurs interactions définissent les systèmes de gouvernance,
leurs modes de fonctionnement et de régulation.
Les structures (S) mobilisées par les systèmes de gouvernance sont variés. Certaines sont
propres à l’organisation concernée : assemblée générale, conseil d’administration, comité ad
hoc en charge de tel ou tel aspect de la gouvernance d’entreprise (par exemple, rémunération
des dirigeants). D’autres sont externes et interviennent sur la base de missions contractuelles
(auditeurs comptables, agence de notation…) ou dans le cadre de mission d’intérêt générale
(autorité de régulation).
Les procédures (P) sont également très diverses et plus ou moins explicitées dans les codes ou
des recueils s’imposant aux acteurs concernés (plan comptable, code de commerce…). Elles
peuvent concerner les modalités de collecte et de diffusion de l’information utile sur le
fonctionnement des entités concernées que les voies et moyens pour effectuer telle ou telle
opération (par exemple, modification du périmètre de la structure, cotation sur le marché
financier…).
Les comportements (C) complètent le diptyque précédant en lui apportant une dimension sans
laquelle il resterait, pour l’essentiel, formel. Ces comportements sont ceux des agents – les
personnes physiques et non la fiction juridique constituée par les personnes morales –
concernés par le dispositif institutionnel S-P et chargés de le mettre en œuvre et de l’animer.
Leurs « bonnes pratiques », leur déontologie ou, à l’opposé, leur absence de scrupules et leurs
Page 83
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
déviations, ont une part majeur dans l’efficacité des systèmes de gouvernance, à l’instar de
tout système humain. 26
Cette agent entrepreneur vend un produit sur un marché et achète des moyens de production
pour réaliser son produit.
Les questions de gouvernance d’entreprise sont réduites, cependant, dès cette époque se poser
des cas délégués à des opérateurs distincts des propriétaires. Les pères de l’économie
exprimer alors leurs réticence.
Le développement de la grande industrie, rendu possible par la création des sociétés faisant
appel à l’épargne publique s’est affirmé en U.S.A et Europe à partir du 19ème siècle.
26
Roland PEREZ
Page 84
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Penrose(1964), Robin Marris (1964), Oliver Williamson (1964) qui ont conceptualisé la
question et tenté de construire une théorie managériale de la firme.
La période dite des trente glorieuses « 1945-1974 » a favorisé cette vision managériale.
La théorie de l’agence est venue pour répondre aux exigences des actionnaires, cette fois s’est
manifesté au milieu des années 1970 par plusieurs contributions majeures, notamment celle de
Jensen et Meckling (1976) ; dont les propositions reposent sur plusieurs courants de
recherche : les travaux de l’école de Chicago « Finance de marché » notamment Jensen &
Eugen Fama ; ceux de l’analyse de l’organisation (Alchian&Demsetz 1972) ; le renouveau
des droits de propriété (Furuboth et Pejovich 1972) et les premiers travaux de l’agence 1973.
L’innovation principale de Jensen & Meckling est d’avoir rapproché ces courants. La firme
n’est plus représentée à travers l’entrepreneur mais comme un « nœud de contrat ».
Deux catégories de parties prenantes occupent une position particulière dans la gouvernance
d’entreprise : « les actionnaires » et « les dirigeants ».
Les actionnaires, car leurs droits patrimoniaux ne s’exercent qu’en dernier ressort. Ils
prennent un risque financier spécifique qui justifie l’appropriation exclusive du profit de
l’exercice, et de « l’actif net résiduel » en cas de cessation d’activité.
Les dirigeants, de leur part, disposent d’une information privilégiée par leur position dans
l’organisation et ils peuvent être tentés d’en profiter pour s’accorder des avantages particuliers
ou pour conduire la firme dans une direction qui leur est favorable et qui ne l’est pas
forcément pour les actionnaires.
Ainsi, sont mis de nouveau « face à face » les acteurs principaux de la pièce traditionnelle sur
le thème de la gouvernance d’entreprise.
Sur le thème de la théorie de l’agence (1976) et d’autres tels que les travaux de : E.F.Fama
(1980), M.C Jensen et M.Ruback (1983), M.C. Jensen (1984), E.Fama et M.C. Jensen (1983),
plusieurs éléments novateurs ont été ajouté dont nous citons :
Page 85
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
1) Le concept de « cout d’agence » (Agency Cost) relatifs aux dépenses que doivent
accepter d’engager les actionnaires pour pouvoir contrôler les dirigeants.
2) Le concept de « marché du contrôle des firmes » (Market of Corporate Contrôle) : à
tarvers les O.P.A-O.P.O et autres opérations de prise de contrôle.
3) Le marché des dirigeants sur lequel les managers s’apprécient ou se déprécient en
fonction, de leurs performance (marché qui complète le précédent dans le dispositif
concourant à discipliner les dirigeants).
4) Le concept de « flux de trésorerie disponible » (free cash-flew) : indicateurs
permettant d’apprécier les marges discrétionnaires dont disposent les dirigeants (degré
de liberté qu’il conviendra de réduire).
Des économistes tels que R.E.Freeman (1984) avait pris conscience de cette multiplicité de
« parties prenantes » et ont opposé « une approche pluraliste multivariée »
(Stakeholderstheory) à la conception « MONISTE » de la gouvernance d’entreprise
privilégiant l’actionnaire (Stakeholder ou stockholder).
Plusieurs voies ont été explorées pour tenter d’apporter une solution praticable à la prise en
compte d’une approche multipartenaire de la gouvernance d’entreprise.
Page 86
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
La première a consisté à rester dans le cadre de la théorie de l’agence, mais en élargissant les
paramètres :
Avant Après
Page 87
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Selon Jensen & Meckling, l’entreprise est un ensemble de fictions juridiques au sein desquels
ont lieu des transactions économiques et sociales. D’après la théorie de l’agence, le droit de
propriété confère aux propriétaires trois catégories de droits : l’usus, abusus et le fructus. Ce
sont les propriétaires (actionnaires) qui bénéficient de ces droits et qui les utilisent a leur
intérêts propres ; cela implique une autonomie limité des dirigeants (gérer l’organisation en
fonction des désirs des actionnaires). Les actionnaires ont même le droit de détruire
l’organisation si elle ne sert pas leurs objectifs et intérêts.
Le model de l’agence met essentiellement l’accent sur la lutte économique entre dirigeants et
actionnaires pour le contrôle.
Page 88
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Selon KAULMAN un comportement des dirigeants qui porterait préjudice aux propriétaires
est contraint par les forces concurrentielles dans les différents domaines. Cependant, un
système de contrôle est indispensable pour résoudre le problème d’agence tel que la mise en
place d’un conseil d’administration en plus du contrôle par le marché.
L’entreprise est vue comme une création de l’Etat à travers laquelle il vise la promotion du
développement économique. L’entreprise est un agent de l’Etat et les dirigeants les agents de
l’entreprise et non ceux des propriétaires comme c’est le cas dans la théorie de l’agence.
L’entreprise est une institution qui a une dimension sociale importante. Si dans la théorie de
l’agence, les normes d’évaluation des dirigeants sont essentiellement la valeur des actions,
27
International Accounting Standards/International Financial Reporting Standards Committee.
Page 89
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
dans la perspective légale les normes d’évaluation sont plutôt d’ordre social, en particulier les
contributions à l’égalité et au bien-être social (les responsabilités vis-à-vis les différentes
parties prenantes ou stakeholders)
Dès 1953, Bowen avait lancé le concept de responsabilité sociale entrepreneuriale (corporate
social responsability), basé sur un contrat implicite entre l’entreprise et la société. Au cours
des années 1970, les notions d’engagement des entreprises à assumer les conséquences
sociétales de leurs activités (corporate social reponsiveness), de contrat social (social contract)
entre la société et ses entreprises, de citoyenneté d’entreprise (corporatecitizenship), d’éthique
des affaires (virtue business)…furent successivement proposées, principalement par des
sociologues anglo-saxons des organisations. En 1983, Freeman &Hannan ont contesté la
logique actionnariale de la théorie de l’agence en introduisant la notion « d’intérêts de la
société toute entière et notamment des autres parties prenantes (stakeholders), considérées
comme des investisseurs au sens large de l’entreprise ». Les auteurs ont dénombré parmi les
parties prenantes, les salariés, fournisseurs, clients, collectivités territoriales, groupes
d’intérêts…liés à l’organisation. Ils ont contribué à enrichir la fonction d’utilité de
l’entreprise, en la subordonnant à la fois aux intérêts particuliers des actionnaires et à l’intérêt
général de la société. Suivant une approche différente, Shleifer&Vishny (1989) montrèrent
que le dirigeant peut, dans certains cas, servir des causes sociales ou sociétales, en agissant
sur la structure financière de l’entreprise afin de restreindre le pouvoir des actionnaires.
Donaldson, Shoorman& Davis (1997), s’inspirant de la « théorie Y » de Mc Gregor,
introduisirent la théorie de l’intendance (stewardshiptheory), selon laquelle le dirigeant peut,
dans certains cas, contribuer au développement à long terme de l’entreprise tout en servant
l’intérêt général. Porter (1992), dénonçant les effets « court-termistes » de la gouvernance
standard, montra également que le développement soutenable à long terme d’une entreprise,
exige l’engagement profond d’actions éthiques, posant ainsi les fondements d’une théorie
généralisée de l’agence.
Ces théories ont alimenté des débats académiques sur l’intérêt de nouvelles formes de
capitalisme coopératif (Aglietta&Rebérioux, 2005) – comme les coopératives, mutuelles,
associations…- et de nouveaux systèmes de régulation des entreprises socialement
responsables (Caroll, 1979) – comme les fonds d’investissement éthique et les notations
sociales des entreprises. Ces diverses initiatives visent à tempérer les effets sociétaux négatifs
de la gouvernance actionnariale standard, par une redéfinition des droits et des devoirs des
actionnaires, des salariés et des clients de l’entreprise.
Page 90
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Des auteurs tels que THOMPSON, PFEFFER & SALANCIK et CYERT & MARCH
estiment que les demandes politiques et les demandes sociales limitent singulièrement
l’autonomie des dirigeants.
De même, les adeptes de la théorie de l’écologie des populations et la théorie de la
contingence suggèrent que l’autonomie des dirigeants est limitée sévèrement par les
forces de l’environnement.
Nous concluant que les trois approches de la gouvernance d’entreprise se complètent,
cependant les organisations opérantes dans un milieu de culture intense doivent, en
plus des préoccupations de profit des actionnaires, se conformer aux exigences de
l’environnement et le respect des normes d’éthique. C’est là qu’on voit l’émergence
d’un nouveau mécanisme de gouvernance « la gouvernance éthique » et vient s’ajouter
et compléter les autres approches précédentes.
Les banques islamiques vivent dans un environnement « intense » du fait des exigences de
conformité éthique et religieuse. Son développement implique une délibération entre les
théoriciens et les praticiens des gouvernances actionnariales, partenariales et islamiques. En
effet, en plus du respect des normes de gouvernance actionnariale et partenariale, les
dirigeants des banques islamiques doivent veiller au principe du respect de la Charia, on parle
alors de « gouvernance religieuse » ; ce qui constitue une exigence pour l’existence d’une
banque islamique (plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer l’avènement des banques
islamiques ; parmi celles-ci, on trouve bien sûr les considérations religieuses). Les banques
islamiques ont vu le jour, grâce à la volonté et à l’exigence des populations musulmanes
soucieuses de faire affaires avec des banques respectant les principes de leur religions. Pour
cela, le principe fondateur des banques islamique est de réconcilier le client à la religion et
(ou) l’éthique, et par le fait, lui apporter une richesse matérielle et une satisfaction spirituelle.
Page 91
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
L’environnement est une variable importante pour toutes les organisations. Pour cerner cette
variable centrale, tentons, dans un premier temps, de la définir et, dans un deuxième temps, de
la caractériser. Pour la cause, utilisons la définition de Duncun (1972) : « l’environnement
organisationnel est définie comme la totalité des facteurs physiques et sociaux qui sont pris
directement en considération dans la prise de décision des individus de l’organisation ». ainsi,
l’environnement n’est pas une variable uniforme ; il varie d’un secteur à l’autres. Selon ses
caractéristiques, l’environnement est qualifié d’hostile (March et Simon, 1958 ; Khandwalla,
1977) ; de bénin (March et Simon, 1958 ; Khandwalla, 1977) ; de turbulent (Davis et al.,
1991 ; Naman et Selvin, 1993) ; de dynamique (Thompson, 1967 ; Miller et Friesen, 1983 ;
Dess et Beard 1984) ; de complexe (Child, 1972 ; Mintzberg, 1979 ; Tung, 1982) ; de volatile
(Bourgeois, 1985 ; McKee et al., 1989) ; ou stable (Dill, 1958 ; Dess et Beard, 1984 ;Miller et
28
Friesen, 1983).
Un environnement est dit intense lorsqu’il impose des contraintes dynamiques, évolutives,
soumises à une appréciation continuelle, aux organisations qui évoluent en son sein. Les
contraintes peuvent être faibles ou fortes ; provenir de sources différentes (gouvernement,
stakeholders, profession, groupe de pression.
Etant constitué de normes et valeurs à respecter ainsi que les interdits de natures religieuse,
l’environnement dans lequel évoluent les banques islamiques limite « considérablement » les
activités de la banque. La Charia qui définit les comportements et les actions conformes à la
religion musulmane, conditionne en fait un domaine du possible fluctuant, et ce tant pour les
organisations que pour les individus pratiquants au sein de l’espace musulman. Cet
environnement entretien une supervision constantes des comportements et est de ce fait
intense (Siagh, 2001).
Par ailleurs, les banques islamiques, en plus des principes particulièrement contraignants de la
Charia, doivent aussi satisfaire les exigences de rentabilité classiques. En effet, comme toutes
les banques, pour continuer a fonctionner, les banques islamiques doivent générer des revenus
suffisants. Cela leur permet à la fois de couvrir leurs dépenses et d’assurer un rendement
acceptable pour les clients et les actionnaires.
28
TaïebHafsa, LachemiSiagh, Alpha-Oumar Diallo, « environnement intense et choix stratégique –le cas des
banques islamiques - », Revue française de gestion, N°171/2007, P 125.
Page 92
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Comme mentionné par Siagh (2003), les banques islamiques se réfèrent aux affaires de la
Charia pour planifier, élaborer et choisir les activités qu’elles poursuivent ainsi que les
produits/services qu’elles offrent. Pour satisfaire cette exigence, les banques islamiques ont
notamment recours à leurs comité de la Charia, qui est un organe de supervision indépendant
chargé d’interpréter et de vérifier la conformité des opérations bancaires avec les principes de
la Charia, avant de valider leurs actions.
Pour résumer, nous avons vu que l’environnement des banques islamiques est intense et
complexe. Compte tenu de ce fait, nous constatons que l’habiliter à interpréter et à respecter
les principes de la Charia, ainsi que la capacité à être compétitive sont toutes deux des
dimensions capitales au sein des banques islamiques.
Page 93
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 1
Conclusion
Pour une meilleur compréhension des mécanismes de la gouvernance des banques islamiques,
il est impératif de maitriser le cadre institutionnelle (avec ses dispositifs internes et externes) :
c’est ce qui va être détaillé dans le chapitre deux (2) .
Page 94
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Chapitre (2) :
« Les dispositifs institutionnels de la
gouvernance des banques islamiques »
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Introduction
Selon Stuart & Gillan (2006), la gouvernance des entreprises admet deux dimensions. Dans
le cadre de la firme bancaire, la dimension externe se manifeste par la réglementation
prudentielle, alors que la dimension interne est le mode d’administration de la banque.
En s’inspirant de cette définition, notre deuxième chapitre est réparties en deux ; une première
partie où nous traitons les dispositifs institutionnels propres à l’entreprise « les organes et les
procédures internes » précisément les organes de gestion (Conseil d’administration et
dirigeants) et les organes de contrôle « Conseil de la Charia et auditeurs) ; et comme
deuxième partie, les organes et procédures externe à l’entreprise présentés comme des
dispositifs d’appui dont nous citons principalement : le cadre réglementaire et normes de
pratique bancaires, ainsi que les principales organisations internationales qui régulent
l’activité bancaires islamiques.
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
L’étude de la structure permet de cerner les principaux acteurs qui participent au processus de
prise de décision ainsi que les phases de la chaine de décisions.
Lors du congrès international des banques islamiques organisé par l’AIBI (Association
International des Banques Islamiques), en 1979, la banque islamique a été ainsi définie : « la
banque islamique est une institution bancaire qui collecte des fonds et les utilise sur la base de
la charia islamique, dans le but de fonder une société solidaire et de réaliser une certaine
justice dans la répartition de la richesse ».
Une structure organisationnelle est fonction de la mission et des objectifs qu’une organisation
se fixe. La structure est en principe créée pour répondre aux impératifs de la mission. Il faut
reconnaître que dans certains cas, le problème se pose autrement et c’est le cas pour les
Banques dites islamiques. Des structures bancaires dites conventionnelles existent depuis
plusieurs années et les législations (entre autres fiscales) notamment des pays musulmans ont
été structurées sur la base de ces banques.
La question qui se pose dès lors est la suivante : les banques existantes sont-elles en mesure,
moyennant quelques aménagements, de répondre aux besoins et aux impératifs de la finance
islamique ?
Page 97
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
L’AIBI (Association Internationale des Banques Islamiques) a proposé, dès les premières
années de sa création, des organigrammes types correspondant à différentes phases de la vie
de la banque, de sa naissance à la constitution d’un groupe. (Voir annexe 1)
Ils ont pu servir de référence à l’époque, mais du fait de l’accroissement de la taille des
banques mais aussi du fait de l’évolution de l’activité financière islamique, la structure
organisationnelle évolue. Des entités prennent de l’importance, des entités nouvelles sont
créées, quand d’autres disparaissent ou ont relativement moins d’activité.
Parmi les entités (départements ou divisions) qui prennent de l’importance nous trouvons :
Page 98
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Conseil d’Administration
Comité de la Charia
Direction Générale
Direction Dépôt et
Direction Administration Direction Activité Bancaire
Investissements
et Moyens
Comptabilité Participations
Caisse Zakat
Page 99
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Vu la nature spéciale de la banque islamique, dont les transactions sont régies par la charia,
les membres du conseil d'administration ne peuvent être choisis que parmi les musulmans,
cela traduit aussi le souci de préserver la confiance entre la banque et ses clients, qui semble-t-
il, en faisant confiance à ces institutions vise en premier lieu le respect du droit musulman, et
la présence d'un membre non musulman au sein de tel établissement mettrait la banque en
contradiction avec ses principes.
Les membres du conseil d'administration doivent être titulaires d'un nombre minimum
d'action fixé par les statuts, ces action son nominatives, inaliénables, elles servent à garantir
une bonne gestion de la part du membre du conseil d'administration, leur inaliénabilité prend
fin lorsque l'administrateur cesse ses fonctions. 29
29
Cette condition n'est toutefois exigée par toutes les banques islamiques, la banque islamique du Soudan précise dans ses
statuts que le membre du conseil d'administration peut ne pas être parmi les actionnaires (1), cette règle concorde mieux avec
le principe d'égalité entre les associés, ce dernier étant une règle absolue dans le droit musulman qui implique que tout
associé peut participer à la gestion de la société.
Page 100
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Cette disposition n'est pas commune à toutes les banques islamiques, la Banque Islamique de
DUBAI (D.I.B) adopte cette condition et précise que le membre du conseil d'administration
ne peut occuper dans la banque un autre poste sauf celui du président du conseil
d'administration, ou celui de directeur général.
Dans les groupes à forte activité internationale, les membres font partie du conseil
d’administration de plusieurs banques et institutions, ainsi dans le groupe AL Baraka, certains
administrateurs sont également administrateurs de la DIB (DubaiIslamic Bank), de la GFH
(Gulf Finance House) et de la BIB (BahreinIslamic Bank), de la l’AAOIFI (Accounting and
AuditingOrganization for Islamic Financial Institutions), de l’IFSB (Islamic Financial
Services Board) ;
La durée des fonctions des administrateurs élus par l'assemblé générale est en principe 3 ans.
Les administrateurs sont responsables devant la banque, les associés, et les tiers de toute
violation de la loi ou des statuts.
30
La banque islamique du SOUDAN de sa part ne voit dans l'exercice simultané de certaines fonctions par l'administrateur
de la banque aucun inconvénient, d'ailleurs ses statuts précisent que l'administrateur peut exercer n'importe quel autre poste
dans la banque, comme il peut également exercer n'importe quelle activité lucrative. Sous réserve que si l'administrateur a un
intérêt quelconque dans des opérations traitées avec la banque il doit déclarer cet intérêt lors de la réunion du conseil
d'administration et perd de ce fait son droit de vote.
Page 101
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
- certaines banques sont resetées très familiales, le contrôle et le pouvoir sont entre les
mains de membres de la même famille, ainsi le groupe Dar el Maal Al Islami Trust et
la Blom Bank ;
- dans certaines banques des comités ont étés crées afin d’assurer une bonne
gouvernance : comité d’audit, comité d’investissement, comité de management des
risques, comité de recrutement et de rémunération, il en est ainsi à la GFH, à la KFH
et à la Blom Bank.
Le conseil d'administration :
Les décisions sont priszes à la majorité et les actes accomplis contrairement aux statuts sont
nuls, et ne peuvent être ratifiés que par l'assemblée générale des actionnaires.
Les réunions des assemblées sont présidées par le président du conseil d'administration, et un
quorum doit être atteint pour que les assemblées puissent délibérées.
Page 102
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Tout actionnaire a le droit d'assister aux réunions de l'assemblée générale, et de prendre part
au vote, aussi il a le droit de discuter le rapport annuel du conseil d'administration, et le
compte des pertes et des profits. En outre l'actionnaire peut se faire représenter, pour vue que
cette représentation soit faite par écrit.
L'ordre du jour est fixé par le conseil d'administration, et tous les actionnaires, quel que soit
leur nombre d'action, peuvent participer à l'assemblée générale extraordinaire et prendre par
au vote. D'ailleurs pour pouvoir délibérer les trois quarts du capital doivent être représentés, et
les décisions sont prises à la majorité.
Les conditions pour être gouverneur ont été définies par l’AIBI :
« Le gouverneur doit être un musulman, acquis au principe même de la finance islamique,
capable d’élever ce principe au niveau d’un acte de foi et de lutter pour sa réalisation...Il doit
être un homme politique avant d’être un homme d’action. Point n’est besoin pour lui d’être un
spécialiste dans le domaine bancaire. » (Al Naggar, 1983.)
Page 103
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Les dirigeants managers exercent leur fonction sous le contrôle du conseil d’administration.
Leur rôle est difficile car ils doivent tenter de concilier la rationalité économique et les
contraintes de la réglementation islamique. Le dirigeant doit gérer deux systèmes de logique à
savoir une logique d’efficience et une logique de maintien et de protection des valeurs
éthiques et religieuses.
En fait, la marge de manœuvre des dirigeants dépend de plusieurs critères. Zied et Pluchart
(2006), considèrent que les dirigeants des banques islamiques sont soumis à des règles de
gouvernance à la fois actionnariale, partenariale et religieuse.
La plupart des travaux de recherche identifient la défaillance des systèmes de contrôle interne
comme étant la cause principale des crises financières. Partant de là, le processus d’audit,
externe ou interne, qui accorde une large place à l’évaluation du système de contrôle interne,
joue un rôle non négligeable dans la stabilité et la solidité des institutions financières.
L’importance de ces systèmes est plus grande encore dans la finance islamique.
Comme dans toute banque, la régularité et la transparence sont indispensables pour assurer la
protection des intérêts des clients en amont (déposants) et en aval (investisseurs), mais
également pour maintenir la stabilité du système financier.
31
KamelChehriti, « LE BANKING ISLAMIC », 2007, Alger, P26.
Page 104
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Cependant, pour différentes raisons, les audits revêtent une importance particulière dans la
finance islamique :
- le système de partage de profits et pertes exige le respect strict des règles définies
entre les parties prenantes et transparence des informations ;
- l’existence de produits différents de ceux des banques conventionnelles et
d’innovations nombreuses requiert un examen spécifique ;
- la nécessité de la conformité à la Charia oblige à vérifier que des procédures
systématiques de soumission au Conseil de la Charia sont prévues ;
- les procédures visant à éviter les conflits d’intérêts entre les différents organes
représentant les intérêts parfois divergents doivent être élaborées et respectées.
Rappelons brièvement les rôles respectifs des auditeurs externes par rapport aux auditeurs
internes. Ces derniers ont un rôle plus large, puisque d’une part leur champ d’examen ne se
limite pas aux états et comptes financiers, d’autre part ils agissent non seulement dans un
souci de conformité à la réglementation et de publication d’une situation économique et
financière conforme à la réalité. Ils ont également pour objectif l’amélioration de l’efficacité
économique de l’entité auditée. Par contre, leur public est différent. Si les auditeurs internes
travaillent pour la direction, et plus généralement pour l’organisation, les auditeurs externes
travaillent pour l’ensemble des stakeholders. A ce titre, ils ont une mission d’autant plus
importante que ces derniers sont nombreux et divers, ce qui est le cas dans la finance
Page 105
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
islamique. Les auditeurs externes sont, pour ce faire, soumis à une déontologie destinée à
garantir leur indépendance et leur compétence. Ils sont nommés par l’assemblée générale des
actionnaires.
Pour les auditeurs externes (ou commissaires aux comptes) des banques islamiques, l’étendue
de leur champ d’examen est à définir. En principe, ils doivent garantir la conformité de
l’information avec la réglementation. Mais de quelle réglementation s’agit-il ?
Doivent-ils se limiter au respect des normes comptables ? Faut-il inclure les principes et
règles de la Charia ?
Cette dernière question se justifie par le fait les membres de la Charia, même s’ils ne sont pas
permanents, ne peuvent être considérés comme externes à l’organisation. En conséquence, se
pose le problème de la supervision du conseil de la Charia.
On remarque tout d’abord que les audits externes des grandes banques islamiques, implantées
pour la plupart dans plusieurs pays, sont généralement réalisés par un des quatre grands
cabinets internationaux32, eux-mêmes implantés dans la plupart des pays du monde.
Par rapport à la prise en compte de la conformité aux règles de la Charia : la plupart ne font
aucune référence à la réglementation islamique. En revanche, certains rapports rappellent que
l’application des règles de la Charia est du ressort de la direction de la banque, d’autres
précisent que l’audit est effectué en accord avec les règles de la Charia et principes de la
Charia, tels que déterminés par le conseil de la Charia de la banque. Il s’agit donc, dans ce
cas, d’un contrôle de conformité aux règles définies par le conseil de la Charia, au même titre
que l’auditeur examine le respect des instructions de la banque centrale du pays.
Pour ce qui est des normes comptables de référence, ainsi que les normes d’audit, les normes
généralement citées sont à la fois les normes internationales (IFRS) mais également les
normes AAOIFI. La référence à ces normes est de rigueur pour ce qui concerne l’utilisation
des fonds de la zakat.
1. Deloitte, Ernst &Young, KPMG et PricewaterhouseCoopers. Les 3 plus importants banques : Al Rahji Bank, KFH (Koweit Finance
House) et DIB (DubaiIslamis Bank) sont auditées par le cabinet Ernst &Young. Deux d’entre elles sont co-auditées, un des « quatres
grands » effectue l’audit avec le cabinet Ernst&Young.
Page 106
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Le conseil de la charia est une entité indépendante de juristes spécialisés dans le Fikh Al
Mouamalat(la jurisprudence commerciale islamique) qui est chargée de passer en revue et de
Superviser les activités de la banque pour assurer leur conformité avec les principes de la
Charia islamique.
Selon Charpa et Khan (2001) : C’est une « entité indépendante de conseillers spécialisés dans
la jurisprudence islamique chargée de passer en revue et de superviser les activités de la
banque islamique pour assurer leur conformité avec les principes de la Charia ».
Il faut entendre par là que les membres doivent vérifier que les opérations et les activités sont
licites mais également, conformément aux principes de la théorie économique islamique, que
la banque a accompli correctement sa mission, notamment qu’elle a respecté les contrats dans
lesquelles elle s’est engagée, et que les opérations sont créatrices de richesse pour le client et
pour la communauté.
Le comité se réunit à la fin de chaque année financière pour un audit religieux des opérations
financières et d’investissement de la banque. A l’issue de cet audit le conseil émet son rapport
aux actionnaires et investisseurs de la banque.
Les institutions financières islamiques s’assurent généralement que des experts très connus
pour leur intégrité et connaissance de la jurisprudence islamique fassent parti de leur conseil
de la Charia. D’ailleurs plus les membres du comité de la Charia ont de la notoriété plus cela
confère à la banque de la crédibilité auprès des stakeholders, dont les clients en particulier.
33
RIM LOUCYF.
Page 107
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Sur le plan institutionnel, on considère que la première initiative d’introduction d’un organe
de supervision de conformité à la charia au sein de la profession bancaire a été amorcée
en1975 par la Dubaï Islamic Bank (DIB). A l’époque, cheikh Abdul Hakim ZOAIR, l’un des
oulémas des Emirats Arabes Unis, fut engagé par la DIB comme responsable d’une simple
unité de contrôle interne chargée de la conformité à la charia au sein de la banque. Toujours
par soucis de conformité à la charia, les actionnaires-fondateurs des premières banques
islamiques en Jordanie (Jordan Islamic Bank crée 1978) et au Koweït (Koweït Finance House
crée en 1979) ont également fait le choix d’incorporer dans l’organigramme un poste de
conseiller en conformité à la charia. Cependant, la création d’un conseil de la charia sous
forme d’un organe collégial est envisagée pour la première fois à l’occasion de la création de
FaisalIslamic Bank of Egypt. Le projet de loi relatif à la création de cette banque prévoyait, en
effet, l’instauration d’un haut comité d’oulémas devant être nommés par l’assemblée
constitutive afin d’assurer la conformité des activités de ce nouveau type d’établissement avec
les préceptes de la charia. Il a fallu attendre quatre ans avant que ce projet de loi soit
promulgué grâce aux efforts du ministre des Awqafs de l’époque, Cheikh Mutwalli.AL-
Chaarawi.
En pratique, la désignation des membres des conseils de la charia se fait sur la base d’une
décision du conseil d’administration ou par délibération en assemblée générale. C’est cette
dernière option qui est généralement privilégiée par les réglementations relatives aux banques
et institutions financières islamiques
Selon les standards proposés par l’AAOIFI (Accounting and AuditingOrganizations for
Islamic Financial Institutions), un conseil de la charia doit être composé d’un nombre
minimum de trois membres et ne doit pas comprendre parmi ses membres un directeur de
l’institution ou un actionnaire ayant une influence significative.
Page 108
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Le nombre est variable selon les banques. Les plus importantes34 ont des conseils comportant
6 membres, voire 7 membres35, la plupart ont un conseil composé de quatre membres, mais
certaines grandes banques36ont un conseil ne comportant que trois membres.
Les principales fonctions d’un conseil de la Charia résident dans la légitimation éthico-
religieuse et l’émission de fatwas certifiant les produits financiers islamiques. Les rares
règlementations en matière de qualification laissent entendre que cet exercice de validation
revient aux spécialistes de la Charia, autrement dit les oulémas.
La composition des conseils de la Charia est une décision stratégique car la recours à un
jurisconsulte reconnu, faisant déjà partie du Conseil d’une banque prestigieuse, voire d’un
conseil d’un organisme de normalisation- comme l’AAOIFI ou l’IFSB – ou de quasi-
normalisation – comme l’IIRA (Islamic International Rating Agency) ou l’IFA
(IslamicFiqhAcademy) – ne peut que renforcer la notoriété et la crédibilité de la banque
auprès de ses clients.
Les jurisconsultes connus sont ainsi très sollicités, certains appartiendraient à plus de trente
conseils, d’autres feraient partie d’une cinquantaine de conseils 37. Il est vrai, comme il a été
indiqué ci-dessus, que le profil exigé est rare puisque la fonction suppose des connaissances
tant dans le domaine religieux que dans le domaine bancaire et économique.
Les jurisconsultes ont généralement suivi des formations spécialisées dans la réglementation
de la Charia (Doctorat en jurisprudence islamique, Master Hadith Science, Master Chariaand
Law…) dispensés dans des établissements comme l’Université Al Azhar du Caire,
l’Université de la Zeitouna en Tunisie, The Charia College and Law Faculty de l’Université
du Koweit, l’université de Damas. Ils assument souvent, parallèlement à leur charge, des
fonctions d’enseignant dans le domaine religieux.
34
AlRajhi Bank, KFH (Koweit Finance House).
35
La QIB (Qatar Islamic Bank).
36
Comme la Dar Al Maal Al Islami Trust.
37
Ainsi :
- le Cheick Abdul Satar Karim Abu Ghuddah fait notamment partie des conseils de la Charia de la QIB, du groupe Al Baraka, de la
banque Al Jazira et de la IBB, de l’AAOIFI, du DJII (Dow jonesIslamic Index) ;
- le Cheick Nizam Mohamed Saleh Yaqoobi fait notamment partie du conseil de la Charia de la GFH, de la QIB, de l’IBB, de la
BIB, de la Shamil Bank, de l’AAOIFI, de l’IIFM (International Islamic Financial Market), de la Banque centrale du Bahrein, du
DJII.
Page 109
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Aujourd’hui, grâce à une meilleure maîtrise des techniques bancaires et financières, les SB ne
se limitent plus à valider ou à rejeter les produits qui sont soumis à leur expertise. Ils
contribuent à la conception de solutions nouvelles tout en essayant d’aider les dirigeants à
faire le bon choix ».
Une telle dynamique d’interaction positive entre les financiers et les oulémas sera sans doute
bénéfique au processus d’innovation et d’amélioration continue des produits et services
islamiques.
Le profil des membres du conseil est à ce point capital que dans les rapports financiers les
curriculum vitae des membres sont parfois insérés de manière détaillée. On y trouve : la
formation, l’expérience en matière religieuse, les fonctions antérieures, les publications.
Page 110
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Le point de savoir s’ils sont rémunérés et peu évoqué. La fonction serait bénévole mais ils
bénéficieraient du remboursement de leurs frais. Il est logique de penser qu’ils sont soumis au
même régime que les membres du conseil d’administration.
1.2.2.4.Mode de fonctionnement
Parmi les membres, l’un est généralement désigné comme président. Il peut être secondé par
un vice-président ou un secrétaire général.
Les membres, même ceux ne faisant pas partie que d’un nombre restreint de conseils, ne sont
généralement pas permanents. Le conseil peut déléguer une partie de ses pouvoirs à un comité
exécutif qui assure une présence plus régulière. Ce comité examine les affaires courantes. Les
opérations importantes, par exemple le lancement de nouveaux produits, sont examinées lors
de la réunion du conseil, et la décision est prise une fois pour toutes. Le conseil peut saisir le
conseil d’administration en cas de divergence sur ce point.
La tâche est d’autant plus complexe que l’on se trouve dans les pays où les règles à respecter
n’ont pas été formalisées, comme le Soudan, l’Iran et le Pakistan, le conseil doit seulement
vérifier que ces règles sont bien respectées. Il en est ainsi également en Malaisie où un conseil
de la Charia, crée au niveau de la banque centrale, peut élaborer les normes à respecter. Alors
que, dans les autres pays, les conseils doivent d’abord élaborer leur cadre de référence, par
exemple, examiner si une opération est licite, puis vérifier ensuite que leur avis a bien été pris
en considération.
Les décisions du conseil ne sont pas exécutoires mais une banque islamique ne se risquerait
pas de compromettre son image de marque en se lançant dans des activités déclarées illicites
par une fatwa.
Chaque fin d’année, le conseil doit rédiger un rapport d’audit « religieux ». L’AAOIFI a
élaboré des standards d’audit du conseil de la Charia. Une grande partie est consacrée à
l’élaboration du rapport. Il doit comporter les éléments suivants :
l’objet du rapport ;
la nature du travail effectué ;
Page 111
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Le rapport doit établir la conformité des contrats et de la documentation qui s’y rapporte avec
les règles et principes de la Charia.
Si le conseil a la certitude que les règles et principes ont été violés, il doit en rendre compte
dans la partie consacrée à l’émission de l’opinion.
Le rapport du conseil de la Charia doit être publié dans le rapport annuel de l’institution
financière islamique considérée.
A la suite de cela l’AAOIFI recommande que l’institution publie les règles et les guides émis
par le Conseil de la Charia durant l’année.
A la lecture des rapports annuels des grandes banques islamiques, on remarque que les
standards d’élaboration du rapport ne sont pas toujours respectés. Ils ne sont généralement
signés que par le président du conseil et, à l’instar des rapports des auditeurs externes, leur
volume dépasse rarement une page.
Page 112
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Par ailleurs, nous avons constaté que certaines banques islamiques n’hésitaient pas à «
instrumentaliser » – stratégiquement parlant – l’apport de légitimité induit par la présence de
SB en leur sein. La Dubaï Islamic Bank indique sur son site que « L’existence d’un haut
comité pour la fatwa et le contrôle-sharia, constitue une affirmation claire du caractère
islamique de notre banque». Dans le même sens, la plus grande banque islamique en termes
de capitalisation, Al-RajhiCorporation, communique largement sur son SB en précisant
souvent que « Le comité de la Charia fut établi pour donner corps et âme au choix islamique
de la banque et pour affirmer l’instauration en son sein des règles et principes islamiques ».
Page 113
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Contrôle externe
Contrôle externe
Assemblée Générale des
Actionnaires
Coordination
Schémas Organique et fonctionnelle du système de
Contrôle
supervision « Chariatique »
Désignation
Reporting
Page 114
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Les organes et les procédures externes sont variables selon les pays et les réglementations
mise en vigueur.
Le problème de l’application de la Charia ne se pose pas puisqu’il est clairement défini dans
les statuts de chacune des banques islamiques. Sur ce plan, toutes les activités de la banque
islamique sont supervisées par un comité de la Charia. Les banques islamiques cependant
rencontrent beaucoup de difficulté concernant la réglementation bancaire dans les pays
d’accueil. Les lois commerciales, bancaires et des sociétés dans la plupart des pays islamiques
sont définies selon le modèle occidental.
Dans certains pays tels que le Yémen et la Malaisie, les banques islamiques sont soumises à
un régime de réglementation et de contrôle par la banque centrale ; ce dernier, est différent de
celui appliqué aux autres banques.
D’autres pays, reconnaissent le caractère particulier des activités bancaires islamiques, mais
consiste à les placer sous le même régime de contrôle et de réglementation par la banque
centrale que pour les banques classiques tout en les accordant à ces banques islamiques des
dérogations spéciales.C’est le cas dans les Etats du Bahreïn et du Qatar au Moyen-Orient et
dans la zone UEMOA.
38
Le dispositif prudentiel destiné à mieux appréhender les risques bancaires et principalement le risque de crédit ou de
contrepartie et les exigences en fonds propres. Ces directives ont été préparées depuis 1988 par le Comité de Bâle, sous
Page 115
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
La conformité stricto sensu des opérations de la banque Al-Baraka Algérie, pour peu qu’elles
remplissent les conditions contractuellement requises dans la relation banque-client,
constituent des zones d’ombre et des sources d’interrogation, voire de doutes, quant à leur
compatibilité avec l’esprit de la charia selon certains imams et certaines franges de la
population. D’où le besoin de plus en plus ressenti d’introduire des amendements à la loi
bancaire en vue de conférer aux produits bancaires charia compatibles l’assise légale dont ils
sont dépourvus aujourd’hui. Un projet de modification de la loi sur la monnaie et le crédit
dans ce sens a été présenté, le mois d’avril 2012, par des députés de l’Assemblée précédente
et transmis au Gouvernement pour avis. Ce texte s’articule sur l’extension des définitions
légales des opérations de banque (collecte de dépôt et distribution de crédit) aux instruments
utilisés dans le banking islamique, à savoir les contrats de moudharaba, de mourabaha,
d’ijara, d’istisna, de salam, de wakalaet de moucharaka.
Par ailleurs, il a été proposé en 2010 d’insérer dans les dispositions du code de
commerceinhérents aux valeurs mobilières des sociétés par actions, une section traitant des
titres d’investissements représentatifs d’actifs réels Soukouk. En effet, l’émission de ces titres
étant subordonnée au visa de la Commission des opérations de bourse lequel est tributaire, à
son tour, de l’existence d’un ancrage légal pour ces titres, cette codification est une condition
incontournable pour le lancement de telles émissions.
Pour des raisons pragmatiques, les dits projets se sont limités à l’intégration des produits
bancaires islamiques dans le dispositif légal standard régissant l’activité bancaire. L’état
d’esprit actuel prévalant au niveau des autorités financières et de supervision n’est pas encore
préparé pour l’instauration d’un corridor légal et réglementaire dédié aux pratiques bancaires
charia compatibles. La priorité demeure à la mise à niveau, à la consolidation et au
renforcement des capacités managériales et de contrôle interne de la place. Néanmoins, les
praticiens espèrent que l’exécutif réagira favorablement à cette démarche d’autant plus que
dans les pays maghrébins voisins, où le banking islamique est plus récent, des projets de loi
similaires sont sur le point d’être adoptés.40
l'égide de la « banque centrale des banques centrales » : la Banque des règlements internationaux ( La BRI) et ont abouti à la
publication de la Directive CRD.
39
Déclaration de Monsieur « Mourad Medelci », ancien ministre des Finances. (Voir Le Quotidien d’Oran, du 13 Janvier
2007, P3.
40
Les cahiers de la finance islamique, N° spécial 2013
Page 116
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Les normes prudentielles sont appliquées dans la plupart des pays. C'est une nécessité pour se faire
une place dans le système financier désormais globalisé. L'application de cette réglementation
est du ressort des régulateurs nationaux mais également des établissements eux-mêmes qui souhaitent
une implantation ou une reconnaissance internationale.
- la suffisance du capital,
- les pratiques et procédures pour les prêts et investissements,
- l'identification des principaux types de risques et les techniques utilisées pour
les gérer efficacement,
- les méthodes d'évaluation de la qualité des actifs de la banque,
- la création de réserves pour couvrir les pertes sur les prêts,
- les différents types de contrôle interne,
- les audits externes nécessaires.
Depuis 2010, les banques islamiques malaises et du golf se soumettent aux règles de Bâle,
mais leur fonctionnement est différent de celui des banques classiques. La proscription de
l’intérêt usuraire les oblige à une ingénierie financière, pour mobiliser et utiliser les fonds.
Leur rôle ne se limite pas à l’intermédiation financière, elles intègrent un volet
« investissement financier » inséparable du commercial (Archer et Karim, 2009) au contraire
des banques classiques qui séparent l’investissement des autres produits bancaires. 41
Ainsi, les fonds sont majoritairement mobilisés pour des contrats avec PPP (Moucharaka et
Moudaraba) inscrit au passif en « comptes d’investissement participatifs ». Ce ne sont ni des
dettes externes ni des capitaux propres et la vision classique de l’intermédiation bancaire entre
dépôt et crédit, est inappropriée car les actifs des banques islamiques sont formés de
participations à des projets (Moucharaka et Moudaraba) ou de prêt avec profit pour des
projets économiques (Mourabaha, Ijara, etc.).
41
Aldo lévy, « Finance islamique », 2012, P209.
Page 117
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Cette structuration particulière du bilan implique des calculs différents pour les exigences en
fonds propres. La structure des bilans des banques islamiques contraint toute application total
des critères de Bâle. Deux séries de spécificités empêchent une application des conventions
bâloises liées à la structure des risques et aux comptes d’investissement participatifs.
Si pour certaines activités les banques islamiques et les banques conventionnelles fournissent
des prestations similaires (dépôts à vue, services bancaires, etc.), sur de nombreux points les
activités divergent. Dans les banques islamiques :
L'examen des différences entre banques conventionnelles et banques islamiques fait donc
apparaître que les activités des banques islamiques sont sur certains points plus risquées mais que
sur d'autres elles le sont moins.
La question se pose alors de savoir si la réglementation prévue pour le système conventionnel est
nécessaire, et si elle est suffisante ?
Page 118
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
La réglementation met sur le même plan les comptes de dépôts et les comptes d'investissements, or
ces derniers ne peuvent être considérés comme des dépôts. Ils ne peuvent non plus être considérés
comme des participations au capital de la banque, les déposants n'ayant pas les droits attachés aux
actions. Ainsi, ils ne peuvent participer aux réunions des actionnaires et être représentés au conseil
d'administration. D'où des interrogations à propos du « statut » de ces fonds : les intégrer dans
le capital de la banque ? Faut-il les considérer comme des quasi-fonds propres ? Faut-il les considérer
comme des actifs hors-bilan ?
Par ailleurs, l'existence de ces dépôts peut provoquer des crises de liquidité, la banque plaçant les
fonds dans des projets de moyen ou long terme alors que les dépôts sont exigibles à leur terme, et
même avant leur terme si la banque accepte le remboursement.
Selon l'étude de Charpa et Khan (2000), « en prenant en compte la nature spéciale des dépôts
d'investissements et les risques encourus par les actifs des banques islamiques, l'application des
normes internationales de suffisance du capital est devenue une tâche difficile ». Ces auteurs font
remarquer que la nature spécifique des dépôts d'investissements a conduit certaines banques islamiques à
les placer hors-bilan, ce qui est contraire aux normes préconisées par l'AAIOFI.
Si on les fait figurer au bilan, quelle est alors leur situation par rapport aux exigences de suffisance de
capital ?
Dans la gestion des comptes d'investissements, la banque assume deux types de risques :
Page 119
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Pour faire face à ces risques les profits attribuables aux actionnaires doivent en conséquence être
dirigés vers les dépôts.
«Les normes de l'AAOIFI proposent donc un schéma pour le partage des risques entre les
titulaires de dépôts d'investissements et les actionnaires de la banque. En l'occurrence, 50 %
des risques des actifs financés par les dépôts d'investissements doivent [...] être assignés aux
déposants de placements dans le but de déterminer le capital, et les 50 % restants aux
actionnaires. [...] Ceci signifie que le risque des actifs. financés par les dépôts
d'investissements va être assigné d'une pondération de 50 % dans le but de déterminer les
exigences en capital. » (Charpa et Khan, 2000.)
Concernant les réserves obligatoires, les banques islamiques sont plus ou moins pénalisées par
rapport aux autres banques. Ces réserves obligatoires qui sont constituées auprès de la banque
centrale en fonction d’un pourcentage des dépôts détenus par les banques, font l’objet d’une
rémunération de la part des banques centrales sur la base d’un taux d’intérêt. Les banques
islamiques ne peuvent donc pas bénéficier de cette rémunération à cause du taux d’intérêt or
elles sont contraintes de constituer ces réserves obligatoires auprès des banques centrales.
Certaines banques centrales pour résoudre ce problème ont tout simplement modifié la
proportion des réserves obligatoires uniquement pour les banques islamiques. Par exemple en
Jordanie dans les années 1970, ce ratio était de 25 % pour les banques islamiques et de 30 %
des dépôts pour les autres banques. La Jordan Islamic Bank a même été autorisé à inclure
dans ses liquidités ses participations dans les entreprises publiques et parapubliques. Quant au
ratio de crédit il a été fixé à 75 % pour les banques islamiques alors qu’il était de 67,54 % des
dépôts pour les autres banques. Aussi la politique des réserves obligatoires pourrait avoir
d’autres conséquences liées aux pénalités prévues dans le cas où les banques ne respectent pas
Page 120
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
la réglementation. Ces pénalités qui sont des paiements d’intérêt sur la base des sommes dues
sont contraires à la philosophie des banques islamiques.
D’un autre côté, la banque centrale ne prend pas en considération la nature des capitaux gérés
par les banques islamiques qui sont en grande partie destinés aux investissements dans le
cadre des opérations de Mourabaha et des Moucharaka, le niveau de réserve obligatoire
appliqué par la banque centrale gèle une grande partie des comptes d’investissement,
notamment, dans les pays où le niveau de la réserve obligatoire est très élevé.
Dans le système conventionnel, les banques centrales agissent comme prêteurs de derniers
recours pour les banques commerciales en accordant des prêts à des moments de crise de
liquidité. Les banques islamiques pour résoudre leurs problèmes de liquidité immédiate ne
peuvent pas solliciter ces facilités car ces fonds sont habituellement accordés avec des
intérêts. Pour rendre les refinancements de la banque centrale accessibles aux banques
islamiques, le conseil Pakistanais de l’idéologie islamique a proposé un mécanisme de partage
des profits entre la banque centrale et les banques islamiques comme dans les opérations de
Moudharaba. Certains ont proposé un "pool commun" des banques islamiques sous la
supervision de la banque centrale pour accorder de manière coopérative une aide à celles
d’entre elles qui auraient besoin de liquidité. Dans certains pays les réserves obligatoires sont
rémunérées par la banques centrale (2% dans la zone monétaire Européenne), les banques
islamiques ne peuvent pas en bénéficier, l’ensemble de ces rémunérations est mis à part dans
un compte indépendant pour financer des projets de charité ou sous forme de dons.
Cependant, l’idée proposée par la Banque Al baraka d’Algérie est qu’en cas de besoin de
financement, la banque islamique ne paie pas de réescompte par contre la banque centrale
peut encaisser le montant en le retirant du compte des intérêts reçus sur la réserves obligatoire
des banques islamiques à la hauteur de la rémunération du montant déposé, c'est-à-dire, la
somme des rémunérations des réserves obligatoires est supérieur à celui de réescompte, notant
que la jurisprudence islamique n’a pas encore tranché sur la validité de cet instrument
Makassaqui reste une proposition -sous réserves- en attendant l’accord ou le refus des
conseils de la Charia :
Page 121
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Dans les pays où la banque centrale mène des opérations d’open market, les banques
islamiques ne peuvent pas participer à ces opérations car l’achat et la vente de ces titres se fait
sur la base de taux d’intérêt.
Enfin, nous terminons cette section par les autres problèmes que subissent les banques
islamiques dans leurs relations interbancaire. En effet, on note un nombre important des
banques islamiques dans les pays sous-développés où le système classique est dominant, pour
cela, elles doivent forcement correspondre avec les banques classiques. Ainsi les banques
islamiques détiennent des comptes dans des banques classiques et vice versa. Ici le problème
se trouve au niveau de la rémunération des dépôts et des intérêts sur les soldes débiteurs. Sur
ce point les banques islamiques sont parvenues à trouver des arrangements avec quelques
banques classiques, en proposant un système d’équilibre des soldes. C’est-à-dire quand le
solde du compte d’une banque islamique chez un correspondant est débiteur, elle doit
immédiatement régulariser la situation en versant le reliquat et les autres banques doivent se
comporter de la même façon et cette convention concerne évidemment les intérêts qui doivent
être supprimés. Cependant ce système n’est pas accepté par toutes les banques surtout au
niveau international. Par conséquent les banques islamiques opèrent souvent en ayant recours
aux taux d’intérêt. D’ailleurs lors d’un entretien avec un responsable de la BIS, nous avons
appris que la BIS utilisait souvent l’intérêt dans ses opérations avec ses correspondants et
participait sans restriction aux opérations de compensation au niveau de la chambre de
compensation chaque jour. Ce fut aussi le cas de la BID pendant ses premières années
d’exercice, où les sommes non engagées dans les opérations courantes étaient placées sur le
marché financier par la banque centrale de l’Arabie Saoudite (la SAMA) selon la méthode
classique.
Page 122
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Dans leurs activités, pour résoudre leurs problèmes de liquidité les banques classiques
peuvent emprunter ne serait-ce que pour une journée des millions de Dollars grâce aux prêts
syndiqués ou au marché monétaire. Les banques islamiques ne peuvent accéder à ces prêts
parce qu’ils comportent des intérêts basés sur le capital prêté. Pour pouvoir participer à ces
opérations de prêts interbancaires, les banques islamiques ont proposé aux autres banques les
prêts basés sur le système des 3P à travers les opérations de Moudaraba, Moucharaka, Ijara…
cette proposition fut rejetée pour la simple raison que ce sont des opérations de moyen et long
terme alors que les prêts interbancaires ont en général une échéance de 24 heures ou au
maximum de 6 mois. Et aussi à cause des risques que font courir ces opérations. Pour faire
face à ce problème, des idées de création de pools bancaires "islamiques" pour des prêts
interbancaires et d’un marché financier islamique international ont été proposé.
Le corpus de règles et/ou standards mis en place concerne des domaines essentielles dans la vie
de ces institutions, tels que : la comptabilité, la gouvernance d’entreprise selon le référentiel
islamique, la surveillance des risques …etc.
Egalement basée à Jeddah, l’IIFA est un Shari’a board qui regroupe des juristes musulmans
membres de l’Organisation de la Conférence Islamique.
Elle a pour rôle d’étudier et de formuler des avis juridiques (Fatwas) ayant pour objectif de
servir de position commune en matière d’économie, de finance et de Banque. L’IIFA
regroupe en son sein, des juristes musulmans particulièrement versés dans le domaine des
transactions et fortement impliqués dans des problématiques économiques ou financières
contemporaines.
Page 123
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
2.3.2. Accounting & Auditing Organization for Islamic Financial Institutions (AAOIFI)
L’AAOIFI a vu le jour en 1990 à Alger et s'est très rapidement installée à Bahreïn dès 1991.
Elle compte 155 membres issus de près de 40 pays, et intègre en son sein, des banques
centrales, des banques islamiques et divers intervenants dans le domaine de la finance
islamique.
Du point de vue comptable, si les opérations bancaires islamiques semblent similaires aux
opérations de la finance conventionnelles, les normes IAS/IFRS émises par l’IASB sont
applicables sous condition de respect de la prééminence du fond sur la forme (ou de la réalité
économique sur l’apparence juridique). Pour leur comptabilité, les banques islamiques peuvent
appliquer soit les IAS/IFRS, soit des normes spécifiques plus soucieuses de la forme juridique
des contrats, celles édictées par l’Organisation de Comptabilité et d’Audit pour les Institutions
Financières Islamiques (AAOFI) 42 . Ces dernières normes sont dénommées IFAS (Islamic
Financial Accounting Standards).
En générale, la présentation des états de synthèse est l’expression d’une politique financière et
la manifestation d’une volonté d’atteindre les objectifs de communication. Les banques
islamiques qui privilégient l’approche juridique (AAOFI) cherchent à accroitre la légitimité
morale et envoient, à travers leur comptabilité, des messages de conformité des éléments
financiers à la Charia. Ces messages diminuent le risque de réputation prégnant dans la finance
islamique et fidélisant les clients et les investisseurs soucieux de la conformité des produits
proposés. Les autres banques islamiques qui privilégient l’approche économique (IAS/IFRS)
42
En février 1990, l’organisation appelée Financial AccountingOrganization for Islamic Banks and Financial Institutions a été
crée en tant qu’instance internationale autonome responsable du developpement des normes comptables pour les intitutions
financières islamiques. Plus tard en 1995, lorsque l’établissement des normes d’audit a été ajouté à son mandat, l’organisation
a changé son nom en Accounting and AuditingOrganization for Islamic Financial Institutions (AAOFI).
Page 124
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
cherchent à accroitre la comparabilité international de leurs états financiers. Elles estiment que
la présence d’un conseil de la Charia (structure de gouvernance éthique bancaire) est suffisante
pour garantir la légitimité morale des services offerts, ce qui leur suffit à justifier leur politique
comptable.
En mars 2006, l’AAOFI avait émis deux rapports traitant des objectifs et des conceptes de la
comptabilité financière des institutions financiers islamiques, 22 normes comptables, 5 normes
d’audit, 4 normes de gouvernance, 2 normes d’éthique et 21 normes relatives a la Charia.
Les normes de l’AAOFI ont été adoptées, sur une base obligatoire, par Bahreïn en 1998 et le
Soudan en 1999. La Jordanie a suivi en 2002 en rejoignant les rangs des pays exigeant de leurs
institutions financières islamiques qu’elles respectent les normes de l’AAOFI dans leurs
rapports financiers.
Etant donné que l’AAOFI n’a aucune autorité pour exiger le respect de ses normes, ses
accomplissements sont vraiment admirables. Toutefois, de nombreux efforts sont encore mis en
œuvre par l’AAOFI pour identifier les différents moyens et possibilités pour améliorer la
renaissance internationale de ses normes et pour harmoniser les pratiques de publication
comptable au sein des institutions financières islamiques au niveau mondial. 43
43
Syed Alwi, Mohamed Sultan, « LA COMPTABILITE POUR LES PRODUITS FINANCIERS ISLAMIQUES », édition de
boech, 2012 ,Bruxelle.
Page 125
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Basée à Kuala Lumpur depuis 2002, l’IFSB est un organisme regroupant des Banques
centrales, des autorités monétaires ainsi que diverses organisations actives dans le domaine de
la régulation et la supervision des institutions agissant dans la sphère de la finance islamique.
L’ISFB a pour rôle de mettre en place un corpus de standards et de bonnes pratiques qui
viendraient en complément des règles de surveillance édictées par le Comité de Bâle, les
organisations internationales de contrôles des activités de marchés (IOSC) et d’assurance
(IAIS).
Créée à Bahreïn en 2001, elle a pour principal objectif de définir le cadre conceptuel
nécessaire au développement de marchés monétaires et de capitaux islamiques.
Pour la bonne réussite de sa mission, l’IIFM aura également comme tâches annexes :
La promotion et l’harmonisation des avis juridiques émis dans le cadre de la
structuration de produits Shari’a ;
L’implémentation des produits Shari’a à l’étranger ;
La promotion de la cotation transfrontalière de produits Shari’a ainsi que le trading de
produits islamiques sur les marchés financiers.
La LMC a été créée en 2002 pour faciliter la mise en place d’un marché monétaire
interbancaire qui permette aux institutions islamiques de gérer leur liquidité de façon
dynamique. Cette institution avait également comme objectif de réfléchir à la mise en place
d’un marché secondaire via lequel les institutions islamiques pourraient réaliser des
opérations de trésorerie de court terme Shari’a compliant.
Page 126
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Créée en 2002, l’IIRA a pour principal objectif l’évaluation et la notation des institutions
financières islamiques ainsi que les produits créés par ces dernières.Cette évaluation intègre
également une évaluation de la conformité de ces institutions et des produits qu’elles créent
(par rapport à la Shari’a) ainsi que la probabilité de défaillance de ces institutions.
2.3.7. The Intertational Arbitration and Reconciliation Center for Islamic Financial
Institutions (ARCIFI)
Etablie à Dubaï depuis 2005, elle a un rôle de médiateur mais statue également sur les litiges
qui opposent institutions financières islamiques nationales, régionales et internationales.
2.3.8. General Council for Islamic Banks and Financial Institutions (GCIBFI)
Par le biais de ces institutions, la finance islamique est devenue, au fil des années, un acteur
majeur dans la sphère financière actuelle.
Page 127
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 2
Conclusion
Désormais, il est temps de passer au troisième chapitre, ce dernier est réservé à l’étude de la
problématique de la double gouvernance des banques islamiques.
Page 128
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Chapitre (3)
« La double gouvernance des
banques islamiques »
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Introduction
En plus d’une structure de gouvernance classique des établissements financiers, les banques
islamiques ont été contraint de mettre en place une autorité supérieur, experte en lois
islamique : « le conseil religieux ». Face a cela, les gestionnaires des banques islamiques se
trouvent soumis à un système de double gouvernance, celle du conseil d’administration et
celle du comité de la Charia. L’un défend les intérêts des actionnaires et l’autre ceux de la
charia : En effet, le premier défend les impératifs du « bottom line », le meilleur retour sur
investissement et le deuxième la meilleure performance sur le plan de l’éthique et de la
conformité avec la Charia. Les dirigeants sont de ce fait soumis à une double pression ; d’une
part, la pression du conseil d’administration qui veut une amélioration du rendement par
action et celles des clients qui exigent des produits très compétitives impliquant des marges de
plus en plus réduite pour la banque et d’autres part, la pression du comité de la charia.
Dans un environnement intangible islamique, la recherche du profit a tout prix n’est pas une
fin en soi.
Les dirigeants n’ont pas la latitude de déployer leurs ressources dans n’importe quelle activité.
Ou n’importe quel secteur. Ils ne disposent pas d’un marché secondaire ou d’un système de
dépôt inter- bancaires à l’instar des banques classiques pour rentabiliser leur excès de
liquidité à court terme par exemple ou pour couvrir des besoins immédiats en liquidité.. Ils ne
peuvent pas non plus bénéficier des techniques de « hedging » et de l’utilisation des produits
dérivés « dérivatives » en général et encore moins utiliser le levier financier. De surcroit les
dirigeants ne peuvent prendre que les décisions ayant un caractère éthique et qui assurent la
légitimité. Et l’acceptabilité de l’organisation.
Page 130
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Cela, dans certains cas, pousse les dirigeants, qui veulent à tout prix rencontrer les exigences
du profit du conseil d’administration, à faire fausse représentation au comité de la charia.
En définitive, les dirigeants se trouvent ainsi soumis à deux formes de pouvoir, l’un
décisionnel qui celui de conseil d’administration et l’autre moral qui est celui du comité de la
charia ;
Le rôle du dirigeant des banques islamiques est différents de celui auquel nous sommes
habitués dans le monde occidental, au fait son rôle va au-delà des rôles soulignés par les
auteurs des théories de l’organisation ; il va au-delà des rôles soulignés par ANDREW, celui
du leader organisationnel, et de promoteur du but organisationnel par HOMAS, celui du
leader interpersonnel préoccupé par l’efficience de l’entreprise et de qui dépend tout le réseau
d’interaction.
Est-ce à dire que les dirigeants dans les institutions Quelle marge de manœuvre et quel degré
d’autonomie peuvent avoir les dirigeants desOrganisations opérants dans un milieu de
culture intense financières islamiques manquent d’autonomie ?!
Page 131
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Le Coran et la Sunna définissent pour les musulmans un code de vie sur le plan personnel et
collectif. Dans ce contexte toutes les fonctions de la banque sont exécutées de façon stricte
conformément à la Charia. Pour ce faire un conseil religieux de supervision ou comité de la
Charia contrôle et suit toutes les transactions de la banque que doit lui soumettre la direction
de la banque.
1.1.Rôle légal
Le comité de la Charia est une entité indépendante de juristes spécialisés dans le Fikh Al
Mouamalat (la jurisprudence commerciale islamique) qui est chargée de passer en revue et de
Superviser les activités de la banque pour assurer leur conformité avec les principes de la
Charia islamique.
Les membres du conseil de la Charia ne résident pas tous nécessairement dans le lieu du siège
de la banque et les transactions leur sont généralement transmises par voie de fax. Le conseil
de la Charia nomme un conseil exécutif composé de certains de ses membres qui se réunissent
plus fréquemment, parfois mensuellement pour examiner les transactions et approuver celles
qui ne posent pas de problèmes particuliers. Les membres du Conseil sont parfois originaires
de différents pays. Les membres du conseil de l’IslamicInvestmentCompany of the Gulf et de
Faysal IslamicBank .Bahrain par exemple sont originaires de Bahrain, d’Egypte, d’Arabie
Saoudite, de Turquie et du Pakistan. Ces deux institutions sont membres du Groupe DMI et
ont donc le même comité. Le groupe DMI à cause du nombre important de ses filiales a un
comité de la Charia à plein temps, ce qui aux yeux de certains compromettrait quelque peu
l’indépendance du comité de la Chari ‘a et créerait quelques conflits d’intérêt. C’est le cas
d’autres groupes comme le groupe Al Baraka.
Le comité se réunit à la fin de chaque année financière pour un audit religieux des opérations
financières et d’investissement de la banque. A l’issue de cet audit le conseil émet son rapport
aux actionnaires et investisseurs de la banque.
Les institutions financières islamiques s’assurent généralement que des experts très connus
pour leur intégrité et connaissance de la jurisprudence islamique fassent parti de leur conseil
Page 132
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
de la Charia. D’ailleurs plus les membres du comité de la Charia ont de la notoriété plus cela
confère à la banque de la crédibilité auprès des stakeholders, dont les clients en particulier.
Par exemple, le financement d’un avion par voie de leasing risque de ne pas très accepté par
un conseil religieux d’une banque islamique (généralement conservateur) dans un pays du
Golfe parce que dans cet avion on servira de l’alcool aux passagers. Par contre, un conseil
religieux en Malaisie (beaucoup plus pragmatique) peut facilement accepter cette transaction
parce qu’il estimerait que servir de l’alcool dans l’avion aux passagers n’est pas la fonction
première de la compagnie aérienne.
1.2.Rôle tacite
Le comité de la Charia assure en fait à son niveau un rôle de double gouvernance, Celle
relative à la conformité des transactions commerciales approuvées par les dirigeants, aux
principes de la Charia et celle relative au respect par les dirigeants et par la banque de
l‘éthique islamique ou Souloukiat.
L’éthique dans le secteur bancaire islamique puise ses fondements dans les principes
fondamentaux de la Charia dont les références sont le Coran, le Hadith et la Sunna, et les
principes généraux de la Charia applicables à la banque tel que le devoir de bonne foi dans les
contrats et les transactions. Il s’agit aussi d’accomplir ses obligations correctement et
honnêtement. Les règles mises par l’Accounting, Auditing and Governance Standards for
Islamic Financial Institutions (1999) mentionnent a cet égard l’intégrité, la sincérité, la piété,
la droiture, le parfait accomplissement de ses devoirs, la peur de Dieu, l’imputabilité envers ce
dernier etc.
Les banques islamiques se singularisent par rapport aux autres intermédiaires financiers
lorsqu’elles insistent sur l’aspect éthique.
L’observance des règles d’éthique est ce qui assure à l’organisation son image et sa réputation
génératrices d’actifs intangibles. Pour garantir cette image et cette réputation, une surveillance
du caractère éthique des transactions commerciales bancaires et développement de produits ne
suffit pas. Le comportement des dirigeants et cadres de l’organisation est aussi implicitement
surveillé par le comité de la Charia.
Page 133
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
L’éthique pour les dirigeants des banques islamiques prend toute son importance dans notre
contexte lorsque l’on sait que la raison d’être même de l’activité de cette industrie est
fondamentalement basée sur l’éthique.
Selon Hussain HussainShahata (1998) dans « An Islamic code for businessmen », (en langue
arabe), Larry axlineg avait démontré dans une étude qu’aux Etats Unis, les organisations qui
se conforment à une certaine éthique et à une responsabilité sociale connaissent un taux de
croissance annuel de profit de 11% comparé à seulement 6% chez les autres.
Page 134
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Les banques islamiques n’ont pas encore atteint la taille et la complexité des entreprises
occidentales. De ce fait, les actionnaires ne sont pas des propriétaires silencieux et jouissent
de tous leurs droits et pouvoir. Dans une telle perspective, les dirigeants sont de simples
agents et doivent gérer l’entreprise dans l’unique intérêt des actionnaires.
Par ailleurs, les actionnaires ont, même, le pouvoir statuaire de révoquer le comité de la charia
mais ils ne peuvent le faire sans raison extrêmement grave et valable. Ce qui laisse sous-
entendre que le comité de la charia jouit lui aussi d’une situation de domination toute aussi
grande.
Le fonctionnement des banques islamiques est basé fondamentalement sur la mise en œuvre
des principes de la Charia et de l’éthique Souloukiat qui en découle. Le comité de la Charia
est la seule entité habilitée a interpréter et à surveiller l’application de ces principes et de cette
éthique, ce qui lui confère un pouvoir moral considérable. Ce pouvoir se trouve encore accru
par le simple fait que le comité de la Charia ne fasse pas partie de la structure hiérarchique et
jouisse d’une grande indépendance vis a vis de toutes les instances organisationnelles et des
stakeholders.
Tout à fait au début du lancement des banques islamiques les gouvernance exercée par les
comités de la Charia et du conseil d’administrationn’étaient pas du même langage. Les
membres des comités n’étaient pas très versés dans les domaines autres que la Charia et à
l’inverse les dirigeants dans la Charia. Par ailleurs, la position des comités varient d’une
banque à l’autre.
Page 135
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Les banques centrales n’étaient pas habituées à superviser les banques islamiques. Ces
dernières n’opèrent pas de la même manière que les banques classiques. Les banques
centrales n’avaient pas développé de standards. Certaines sont plus avanc.es que d’autres.
3. LE ROLE DU DIRIGEANT
En d’autres termes, le rôle du dirigeant dans notre contexte est différent de celui auquel nous
sommes habitué à savoir celui de quelqu’un qui poursuit ses intérêts de façon rationnelle,
c’est à dire un rôle qui consiste à prendre les décisions selon une logique coût/bénéfice. Car,
dans un tel cas, le dirigeant est sensé avoir un ordonnancement clair de ses préférences et
connait les liens entre les alternatives et leurs conséquences.
Dans notre contexte, le dirigeant fait taire ses choix, intérêts et préférences. Ses décisions ne
sont pas systématiques et délibérées. Son rôle s’apparente en partie à celui décrit par Selznick
(1957) à savoir celui d’un expert dans la promotion et la protection des valeurs. Son rôle va
même au-delà. C’est celui de quelqu’un dont la tâche principale est de tenter de concilier au
sein de son organisation les contradictions et incohérences que génère la prise en compte
simultané des exigences de l’environnement.
Page 136
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Réconcilier les deux systèmes de gouvernance exige des dirigeants des talents exceptionnels.
Ces talents consistent, entre autre, à assurer une interface efficace et intelligente avec les
comités de la Charia. Ceci est d’autant crucial que les actionnaires sont de plus en plus
conscients du fait que les clients exigent que les banques islamiques performent au moins
comme les banques commerciales. Les clients n’acceptent plus l’argument selon lequel elles
offrent des produits compatibles avec la Charia et que par conséquent cela justifie le fait qu’ils
soient plus chers. De plus, la concurrence venant de fenêtres islamiques établées par les
banques occidentales oblige les banques islamiques. Prendre des mesures drastiques en vue
d’améliorer leur performance et ce en recrutant les meilleurs talents.
Comme on le voit, le rôle du dirigeant n’est pas aisé. Il doit lutter sur trois fronts
simultanément :
1) lutter à armes inégales contre la concurrence provenant des fenêtres islamiques des
banques commerciales,
2) répondre à une clientèle fort exigent pour qui le caractère islamique d’un produit
bancaire n’est plus une justification suffisante pour être plus cher et enfin se plier aux
prescriptions de la Charia.
3) Le manque de gestionnaires de haut niveau et compétents qui puissent relever ces
défis économiques tout en assurant aussi une interface constructif avec le comité de la
Charia fait cruellement défaut aux banques islamiques.
L’industrie croit à une vitesse très rapide et on trouve de moins en moins les banquiers
islamiques du calibre exceptionnel requis. Les banques islamiques sont aujourd’hui, de ce fait,
les meilleurs payeurs. A leurs débuts, les banques islamiques faisaient appel à des employés
du sous-continent indien qui acceptaient de bas salaires et qui faisaient ce qu’on leur
demandait de faire. Ce qui exacerbait d’avantage les relations Charia- dirigeants. Avec la
saturation de l’industrie et la grande concurrence qui sévit les banques islamiques font de plus
en plus appel aux meilleurs talents capables de travailler en symbiose avec les comités de la
Charia.
Page 137
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Face à cela, les dirigeants des banques islamiques peuvent s’appuyer sur leurs connaissances
de la religion musulmane, plus spécifiquement des principes de la Charia islamique, pour
élaborer le positionnement stratégique de leurs banques.
Les dirigeants peuvent aussi « intégrer » les membres du comité de la Charia dans le
processus de gestion, pour augmenter leur marge de manœuvre.
Et afin de concilier ces deux système de gouvernance, le dirigeant doit être en mesure de :
auprès du personnel :
Des auteurs comme HINING & GREENWOOD, PETER & WATERMAN, PETTIGREW,
TICHY & DEVANNA, pensent que les leaderships houe un rôle important en matière de
changement organisationnel en influent la culture :
Les valeurs organisationnelles sont des croyances qui servent de guide à la compéhension, à
l’apprentissage et à l’action. Jaegen (1987) notait que « la culture organisationnelle règle la
perception et les espoires de l’individu, ce qui influence directement son comportement dans
le contexte organisationnel. La culture est fondé sur des croyances tellement enracinées
qu’elle résistent au changement ».
Page 138
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Peters et Waterman (1983) insiste beaucoup sur la loi des valeurs partagées, un attribut
important des entreprises qui réussissent.
Selznick (cité par Peters et Waterman, 1982) parle des valeurs en ces termes « la formation
d’une société est marqué par l’élaboration des valeurs à respecter, c’est-à-dire, les choix qui
guident ceux qui définissent les politiques de l’entreprise. Ces choix, souvent, ne sont pas
énoncés, il ne sont peut-être même pas conscient. Le chef d’entreprise est avant tout, un
maître en matière de promotion et de protection des valeurs. Un leadership axé sur la simple
survie est voué à l’échec. La survie passe par le maintien de valeurs et d’une identité propre ».
D’après Schein (1985) : les croyances sont l’essence de la culture organisationnelle ; les
croyances sont fondamentales puisqu’elles conditionnent les comportements.
Les leaders islamiques attachent une importance toute particulière à la mise en place dans leur
organisation d’une culture éthique islamique. Nous citons le cas de
l’IslamicInvestmentCompany of the Gulf utilisant les prières quotidiennes au sein de
l’organisation pour implanter une culture éthique ; cela aidera à créer un climat de confiance
parmi les gens et décourage le nifak (l’hypocrisie). L’éthique à l’intérieur et à l’extérieur de
l’organisation constitue un actif intangible inestimable. Cela renforcera la légitimité de
l’organisation vis-à-vis de la communauté musulmane et améliore son image.
Grace à la culture Souloukiat, il s’agit de transformer un groupe de gens neutre en des équipes
engagées vers l’activité de même objectif organisationnel.
La mise en place d’une culture éthique ou Souloukiat par les dirigeants est un élément
fondamental dans le fonctionnement de ces organisations. Elle permet à l’organisation,
d’acquérir la cohésion interne, une bonne réputation et une image dans l’environnement, qui
sont des actifs intangibles qui favorisent la performance organisationnel.
Ce qui conforte aussi bien les intérêts des actionnaires (le profit) et ceux du comité de la
charia (l’éthique).
Avec les débuts des banques islamiques, les membres du comité de la charia ne s’impliquaient
pas dans la gestion courante. Les questions de compétitivité et de « bottom line » n’influent
Page 139
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
pas sur leurs tâches et ils ne prenaient pas en considération ce qui handicape l’action des
dirigeants.
Pour certains dirigeants, la meilleure façon de concilier les impératifs de compétitivité avec
les exigences religieuse consiste à promouvoir les notions de profits et de viabilité
commerciale auprès des comités de la Charia. Ceci à travers l’élargissement de leurs
connaissance bancaires et en les impliquant, même de façon informelle, dans la fixation des
objectifs stratégiques de la banque. En effet, cette implication confère de la crédibilité et
légitimera les actions de la banque vis-à-vis des clients.
Pour Adnan Yousef, Président du Conseil d’administrations de l’ABC Islamic Bank, l’ABC a
une approche différente des autres banques. L’ABC associe les membres des comités de la
Charia aux domaines de la gestion.L’approche adoptée par l’ABC vise en fait un double
objectif. D’une part sensibiliser les membres des comités de la Charia aux défis auxquels sont
soumis la banque et ses dirigeants (compétitivité, part de marché, profit) et d’autre part
obtenir la bénédiction du Comité de la Charia quant à l’orientation stratégique et intentions
de la banque.En effet, cette implication du Comité de la Charia conférera de la crédibilité et
légitimera les actions de la banque vis à vis des clients et de la communauté. Il devient, en
quelque sorte le garant de la bonne image de la banque et ne sera pas le frein que beaucoup
pensent qu’il est, mais celui plutôt qui favorise la performance organisationnelle. Il devient
en quelque sorte l’allié des dirigeants.
Notons aussi, que les choses ont déjà beaucoup changé et qu’avec l’expérience et les efforts
faits par les membres des comités de la Charia pour s’informer sur la finance, l’économie et le
droit, le comité de la charia et les dirigeants travaillent harmonieusement ensemble.
Au fait, cette collaboration permet par ailleurs de sensibiliser le conseil de la Charia aux
exigences de performance que la banque doit satisfaire pour survivre. Ainsi, étant au fait
l’obligation qu’a la banque islamique de générer des gains, les membres du conseil de la
Charia se montreraient innovateurs et pragmatiques dans l’interprétation et l’appréciation des
principes qui régissent les affaires.
En définitive, le rôle du dirigeant consiste à aligner les préoccupations des deux systèmes de
gouvernance. Comme on l’a vu ce n’est pas une tache ordinaire. C’est une tâche qui exige de
la part des dirigeants des qualités et des talents hors du commun.
Page 140
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Pour Cheikh Yacoubiun membre du comité de la Charia de l’IICG, ce qui importe pour un
dirigeant c’est la sincérité et être convaincu du concept des banques Islamiques et des
principes de la Charia qui le sous-tendent.
“Management should be fully convinced of the concept. It should also be fully committed and
dedicated to it, anxious to implement it and comply with the teachings governing it. Unless the
entire management is committed and convinced, the business activities and the enterprise will
not be foul-free or will escape irregularities and deviation. Regardless of how strict and
stringent fatwas and contracts are, this will not ensure sound practices if there are no persons
to carry out and implement the principles, who are sincere enough and who are fully
committed to it. The general manager himself should act as a springing point and set a good
example for all in this respect”.
Page 141
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Conclusion
Nous concluons que, afin de mener leurs missions convenablement, les dirigeants des banques
islamiques doivent se soumettre aux règles de gouvernance actionnariales, partenariales,
éthiques et religieuses.
D’un autre côté, et face à la double pression auxquels sont soumises les banques islamiques,
le dirigeant doit jouer le rôle de conciliateur (entre conseil d’administration et conseil de la
charia) et de pédagogue (enseignant) en installant une culture éthique (dans le comportement
et les affaires) dans l’entreprise.
Page 142
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
CONCLUSION GENERALE
Nous avons vu que les dirigeants des banques islamiques sont soumis à la double
gouvernance d’un conseil d’administration préoccupé par les objectifs de rentabilité et
l’accroissement de la valeur de l’action et d’un comité de la charia qui veille à la conformité
des transactions et des comportement des dirigeants aux principes de la charia.
Le conseil d’administration est un acteur important, qui influe sur la capacité stratégique des
dirigeants des banques islamiques. Sa discrétion vient du fait que le gain économique n’est
pas le principal critère que les clients des banques islamiques recherchent. Sinon, elles ne se
différencieraient pas des banques conventionnelles et perdraient leurs clientèles islamiques.
Toutefois, les gestionnaires des banques islamiques partagent les préoccupations du conseil
d’administration concernant l’efficacitéorganisationnelle. Ils savent, que pour survivre, les
banques islamiques doivent être performante économiquement aussi.
Au début de l’industrie bancaire islamique, les membres du conseil de la Charia avaient une
position très stricte sur l’interprétation et l’application des principes de la Charia. Cette
position s’explique par le fait que les membres du conseil de la Charia n’étaient pas versés en
finance et ne comprenaient pas vraiment la dynamique de gestion. De plus, ils ne prenaient
pas en compte les questions liées à la performance économique et organisationnelle. Toutes
fois, on note qu’une certaine évolution s’est installée progressivement au niveau des conseils
de la Charia de différentes banques islamiques. La vive concurrence qui se livrent les banques
islamiques amène les membres du conseil de la Charia à se montrer innovateurs et
pragmatique dans l’interprétation des principes de la Charia islamique. L’association des
membres du comité dans l’élaboration de nouveaux produits/services, entre autres, a
certainement joué un rôle important dans cette transformation. Un autre facteur qui a favorisé
cette transformation est la croissance régulière du niveau d’éducation des membres du comité
de la Charia
Face à cela, les dirigeants jouent un rôle double. Celui de conciliateur et celui d’enseignant :
Le dirigeant conciliateur : son rôle va consistera à concilier les positions divergentes entre
conseil d’administration et comité de la charia ;
Page 144
La Gouvernance de la Banque Islamique Deuxième partie / Chapitre 3
Le dirigeant pédagogue : c’est celui qui construit et met en place la culture Souloukiat,
l’élément créateur de cet esprit d’équipe nécessaire à la performance organisationnel tant
recherché par les actionnaires.
Et afin de mener leurs missions convenablement, les dirigeants des banques islamiques
doivent se soumettre aux règles de gouvernance actionnariales, partenariale, éthique et
religieuses ; vue que les différentes approche se complètent : la gouvernance actionnariale
permet de maximiser la valeur de l’action et ainsi satisfaire les actionnaire, la gouvernance
partenariale traitent avec les différentes parties prenantes « stakeholders » avec prise en
compte de la responsabilité sociale ; enfin, nous terminons avec la gouvernance éthique et
religieuse qui est le cœur et l’esprit de la gouvernance islamique, vue que c’est le motif
religieux qui a mener à créer la banque islamique.
Cependant, il est primordial de noter que malgré les efforts fournis pour le développement de
la finance islamique ( à travers la création d’organismes internationaux), cette dernière
manque énormément de règles et de standards de normalisation en la comparant avec la
finance classique qui est déjà bien répondu avec ces pratiques au niveau international. Pour
cela d’énormes recherches devraient être mené, sur différents domaines tels que : la
comptabilité bancaire, la gouvernance d’entreprise, les normes de contrôle et d’audit …etc.
« Les dirigeants des banques islamiques travaillent le coran dans une main et
la calculatrice dans l’autre ».
Page 145
La Gouvernance de la Banque Islamique Table des Matières
INTODUCTION GENERALE
INTRODUCTION P.5
Introduction P.7
Conclusion P.17
Introduction P.19
Conclusion P.31
Introduction P.33
Page 146
La Gouvernance de la Banque Islamique Table des Matières
CONCLUSION P.67
INTRODUCTION P.69
Page 147
La Gouvernance de la Banque Islamique Table des Matières
Conclusion P.94
Introduction P.96
Conclusion P.128
Page 148
La Gouvernance de la Banque Islamique Table des Matières
Introduction P.130
CONCLUSION P.142
BIBLIOGRAPHIE
Page 149
La Gouvernance de la Banque Islamique Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
Les Ouvrages
Revues :
Page 151
La Gouvernance de la Banque Islamique Bibliographie
Mémoires :
Page 152
La Gouvernance de la Banque Islamique Bibliographie
Webographie :
www.afdb.org
www.bank-of-algeria.dz
www.bloomberg.com
www .doctrine-malikite.fr
www.financialislam.com
www.icgn.org
www.ifsb.net
www.kfh.com/en (le site officiel de la Kuwait Finance House)
www.qib.com.qa/ (le site officiel de la Qatar Islamic Bank
www.dib.com.ae/(le site official de la Dubai Islamic Bank)
Page 153
La Gouvernance de la Banque Islamique Bibliographie
Page 154
La Gouvernance de la Banque Islamique Glossaire
GLOSSAIRE
A
AssetBackingAdossement à un actif tangible
AAOIFI Accounting and Auditing Organization for Islamic Financial Institutions
C
Calpers California Employees’ Retirement System
CDO CollaterilazedDebtObligation, obligation adossée à des actifs
G
Gharar Incertitude
H
Haram Illicite, passible d’un châtiment
I
IjmaaConsensus de jurisconsultes
I.C.G.M International Corpoate Governance Network
I.F.S.BIndependence Federal Savings Bank
I.I.F.M International Islamic Financial Market
I.S.R Investissement Socialement Responsable
M
MayssirSpéculation
Q
QiyassRaisonnement par analogie
O.C.D.E Organisation de Coopération et Développement Economique
R
Riba Intérêt usuraire
S
Saint Coran Parole de Dieu
Salam Equivalent islamique d’un contrat à terme
Sharia Loi islamique révélée au prophète Mohammed(pbsl) et inscrite dans le Coran
Sharia BoardConseil de jurisconsultes musulmans chargé de certifier et de contrôler la
conformité à la Sharia des produits bancaires et financiers
Sounna Paroles et actes du prophète Mohammed (pbsl)
SukukEquivalent islamique d’une obligation
La Gouvernance de la Banque Islamique Résumé
Résumé
La gouvernance d’entreprise ainsi que la finance islamique sont plus que jamais au cœur des
débats au niveau international ; la première en tant qu’instrument de régulation du secteur
bancaire et le second en tant qu’alternative possible pour les financements de l’économie.
Par ailleurs, l’importance et la croissance du volume des transactions réalisées ces dernières
années par les institutions financières islamiques ainsi que la multiplication de ses institutions
à travers le monde militent pour un encadrement de leur fonctionnement par de solides règles
de gouvernance.
Cette recherche sur l’efficience de la gouvernance bancaire islamique s’efforce de répondre à
un questionnement plus général sur la gouvernance d’entreprise par des modèles socio-
économiques radicalement différents. La première partie définie et présente la finance
islamique, tandis que la deuxième partie est consacrée entièrement à la gouvernance islamique
à travers le rappel des théorie de la gouvernance d’entreprise ainsi que l’étude des différents
organes et composants qui régissent la gouvernance des banques islamique en mettant la
lumière tout particulièrement entre le Conseil d’administration, conseil de la Charia et rôle
des dirigeants.
Page 157
RESUME
La gouvernance d’entreprise ainsi que la finance islamique sont plus que jamais
au cœur des débats au niveau international ; la première en tant qu’instrument
de régulation du secteur bancaire et le second en tant qu’alternative possible
pour les financements de l’économie. Par ailleurs, l’importance et la croissance
du volume des transactions réalisées ces dernières années par les institutions
financières islamiques ainsi que la multiplication de ses institutions à travers le
monde militent pour un encadrement de leur fonctionnement par de solides
règles de gouvernance. Cette recherche sur l’efficience de la gouvernance
bancaire islamique s’efforce de répondre à un questionnement plus général sur
la gouvernance d’entreprise par des modèles socio- économiques
radicalement différents. La première partie définie et présente la finance
islamique, tandis que la deuxième partie est consacrée entièrement à la
gouvernance islamique à travers le rappel des théorie de la gouvernance
d’entreprise ainsi que l’étude des différents organes et composants qui
régissent la gouvernance des banques islamique en mettant la lumière tout
particulièrement entre le Conseil d’administration, conseil de la Charia et rôle
des dirigeants.
Mots-clés :
Gouvernance; Finance Islamique; Finance Conventionnel; Dirigeant;
Conseil d’Administration; Conseil De La Charia; Ethique; Religion; Charia;
Secteur Bancaire.