J'ai Pas Lâché L'affaire
J'ai Pas Lâché L'affaire
J'ai Pas Lâché L'affaire
« Les Anglais n’ont pas lâché l’affaire » Voilà une expression que j’ai entendue hier au
journal de RFI, ce qui m’a convaincu que cette façon de parler se répandait, gagnait des
adeptes et se présentait de façon légèrement familière certes, mais acceptable par exemple
dans un journal d’information.
Le sens est simple : cela veut dire je n’ai pas abandonné, je n’ai pas laissé tomber…
Expression à la mode donc, entendue surtout dans un premier temps parmi les jeunes.
L’expression, de toutes façons, est facile à comprendre, et l’image est transparente. Et il
faut dire aussi que ce verbe « lâcher » est assez productif dans un langage familier. Et
dans des significations assez différentes : « Il ne m’a pas lâché » peut signifier plusieurs
choses : ou bien, il n’a pas cédé, il n’a pas cessé de me harceler jusqu’à ce qu’il obtienne
ce qu’il souhaitait. Ou simplement on peut dire ça d’un gêneur, d’un sans-gêne qui ne
sent pas qu’il est de trop, et qui vous importune… ce qu’on appelait du temps de Molière
un fâcheux. Et le français argotique contemporain recourt largement à ce verbe : lâche-
moi ! c’est laisse-moi tranquille, ne m’ennuie pas, cesse d’être sur mon dos, de vérifier
tout ce que je fais. L’idée c’est que tu m’étouffes, et que j’aimerais bien que tu me laisses
un peu d’air pour respirer… Ce qui peut se décliner ou s’intensifier ; et en général
l’expression devient de plus en plus forte et argotique à mesure qu’elle se décline :
Lâche-moi les baskets, lâche-moi la grappe.
Notre formule de départ, « j’ai pas lâché l’affaire » est différente. On peut noter d’abord
qu’elle est presque toujours exprimée à la négative… On dira peu « Il a lâché s’affaire, il
a fini par mâcher l’affaire… » même si ça peut s’entendre. D’autre part, on a noté
l’aspect très orla de la phrase. Elle n’est pas de celles qu’on écrit. Et si on l’écrit, ça tient
presque de la transcription du langage parlé… la preuve : nous n’avons pas écrit « je n’ai
pas… » mais « j’ai pas… »
Pourtant, ce qui est le plus troublant dans cette expression, c’est bien l’affaire… Qui veut
dire quoi ? Le sujet, la chose, le problème parfois… le sens en est très général. Mais, ce
mot fort vague évoque souvent un français assez soutenu. Son étymologie dit bien son
premier sens : une affaire, c’est ce qu’on a à faire… donc ce qui vous occupe. Et le mot
désigne souvent une situation… un peu compliquée, embrouillée… Se tirer d’affaire,
c’est bien se sortir d’une passe difficile. Le mot renvoie également souvent à un conflit,
ou même à une action en justice : l’affaire Untel, l’affaire Dreyfus. Une affaire est même
parfois une situation délicate, illégale, scandaleuse : l’affaire pétrole contre nourriture…
Mais, dans tous ces emplois, le mot renvoie presque à un euphémisme : c’est avec
élégance qu’on reste dans le vague.
Pourtant, le même mot peut être utilisé de façon plus populaire : tout bonnement, l’affaire
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est ce qui vous concerne : « Mêle-toi de tes affaires ! » Et là, on est vraiment dans le
langage familier.
18 BRUMAIRE
Par: (pas credité)
Les mois riment entre eux 3 par 3 et font une référence explicite
à la nature :
Automne : Vendémiaire = les vendanges, Brumaire = les brumes,
Frimaire = les frimas.
Hiver : Nivôse = la neige, Muviôse = la pluie, Ventôse = le vent.
Printemps : Germinal = la germination, Floréal = les fleurs,
Prairial = les prairies.
Eté : Messidor = les moissons, Thermidor = la chaleur, Fructidor =
les fruits.
Quant aux fêtes, elles deviennent laïques : on les appelle les Sans-
Culottides.
2 CV
Par: (pas credité)
2
C'est bien beau d'avoir 100 ans, mais est-ce que ce n'est pas encore mieux
d'en avoir 50 ? Et si l'on fête avec éclat le centenaire du Salon de
l'auto - rebaptisé depuis quelques années "Mondial de l'Automobile", on
fête avec non moins de jubilation le jubilé de la deux-chevaux Citroën (et
c'est normal : les jubilés font jubiler).
ÇA
Par: (pas credité)
3
On adapte au théâtre du Rond-Point, à Paris, les "Histoires comme ça" de Rudyard
Kipling. Je sais bien que c'est une traduction mais ce "comme ça" fait diantrement
idiomatique : histoires à ma manière, comme on se les raconte…
"Ça" de toute façon est un drôle de mot, une contraction du pronom "cela" qui appartient
d'abord (et encore maintenant dans la plupart des cas) à la langue orale, et qui est assez
récente (XVIIème probablement, bien qu'il soit très difficile de dater la langue orale).
Pourtant le profil du mot a changé avec le temps. Aujourd'hui, "ça" a quand même sa
place dans la langue écrite et on a oublié le temps où il appartenait au bas-parler" à la
langue vulgaire. (Cf. Hugo et le kekcéksa de Gavroche qui anticipe Queneau).
Mais bien souvent, "ça" n'est pas un vrai pronom qui remplace mais un opérateur
grammatical qui fait fonctionner le verbe qui a bien besoin d'un sujet.
Notamment pour des verbes impersonnels ou météorologique : "ça se couvre", "ça va se
dégager". De même quand on dit "ça avance", "ça va barder", "ça va être ta fête", "ça
s'arrange, ton affaire ?" "Il n'y a pas à dire, un chien ça tient compagnie"…
Parfois, "ça" renvoie à un réel vivant qu'on évite de nommer et qu'on remplace par ce tour
indéfini. C'est très souvent péjoratif dans ce cas-là : "ça prend des manières à 15 ans et ça
les garde à 30". Cette tournure est un peu ancienne. "Ça naît un beau soir sur la Butte, ça
pousse on ne sait pas trop comment, et puis d'cabrioles en culbutes, ça tombe dans les
bras d'un amant".
Enfin, "ça" fait partie d'expressions figées où il n'a jamais remplacé "cela" : "c'est comme
ça" (= "c'est ainsi" ; Cf. "les Histoires comme ça"), "ça suffit comme ça".
On a aussi avec "ça" = par-dessus le marché, ironique, pour renchérir sur une qualité ou
un défaut ; souvent ironique : "et modeste avec ça !" "Comme ci, comme ça" = à peu
près, pas fameux, qu'on module souvent de façon familière en "couci couça".
A FORTIORI
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Donc, vous avez toujours peur, mais encore plus sur une
grande route, à plus forte raison sur une grande route. C'est le
sens de cette expression, a fortiori.
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E.LATTANZIO : C'est même le sens littéral de l'expression en
latin, puisque c'est du latin, qui est passé tel quel en français.
Y.AMAR : Ou encore, vous serez d'autant mieux reçu que vous êtes
le cousin du directeur.
Y.AMAR : Là, on surenchérit sur une qualité, non pas sur une cause
: Suzy est très jolie, excellente nageuse qui plus est. En plus
d'être ravissante, elle nage bien.
Je suis venu en courant, j’ai monté les escaliers quatre à quatre, je suis arrivé en moins de
deux, et je n’ai fait ni une ni deux, je lui ai mis une bonne claque." On le voit bien à l’aide
de cet exemple purement fictif : on a en français de nombreuses expressions qui pour
exprimer la rapidité en recours à des nombres. Des nombres en général petits (un seul
chiffre pour les écrire), mais qui excluent le plus souvent le 1.
Quatre à quatre se comprend facilement ; l’image est presque toujours confinée à
l’escalier : on monte, on descend, le plus souvent d’ailleurs, on dévale – c’est le verbe
consacré, dans une image un peu figée. Au début du 20ème siècle, l’expression a eu la
tentation de s’autonomiser, quatre à quatre signifiant très rapidement, dans n’importe quel
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contexte… mais ça n’a pas tenu…
En moins de deux signifie plus rapidement que si l’on compte jusqu’à deux…. En un
mot, c’est l’équivalent de « en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire ». Et
probablement l’abréviation de « en moins de deux secondes ».
Ne faire ni une ni deux s’emploie à propos d’une décision qu’on prend rapidement, mais
aussi sans balancer, sans état d’âme, sans hésitation.
En deux temps trois mouvements est un terme d’escrime au départ, qui donne une idée
d’efficacité : faire trois mouvements en deux temps est en effet une bonne façon de
gagner du temps sur le temps.
Pour finir, une étrange expression s’écrit ( et se prononce) de deux façons différentes : en
cinq sets ou en cinq sec. Il faut en chercher l’origine dans un ancien jeu de cartes,
l’écarté. Il s’agissait de faire cinq points de suite sans en perdre un seul : cinq coups
gagnants sec ! La locution a également pu s’attester du fait que sec pouvait passer pour
l’abréviation de seconde (en cinq secondes. Et l’usage actuel fréquent sous la forme « en
cinq sets » dénote une influence anglaise qui est passée par le sport, le tennis en
particulier… ce qui est paradoxal, car un match gagné en cinq sets est plutôt un match
long, par rapport à un match gagné en trois sets…
A L'ITALIENNE OU A LA RUSSE
Par: (pas credité)
A l'Odéon se tient en ce moment un colloque sur les théâtres à l'italienne. Les théâtres, ou
les scènes à l'italienne désignent une certaine architecture théâtrale qui, au départ, nous
vient d'Italie. Mais le plus intrigant est la formule. Pourquoi à ? Pourquoi ce féminin ? A
l'italienne est une ellipse de l'expression à la mode italienne, à la manière italienne, et
cette tournure est d'ailleurs une spécialité que nous partageons avec la langue italienne
(Cf la sonata alla turca, c'est-à-dire à la turque, que nous appelons, nous, la marche
turque).
Pour renvoyer à des usages ou des choses qui, au départ, ne sont pas de chez nous,
l'habitude s'est répandue d'utiliser ce genre de locution. Et elles déterminent soit un nom,
soit un verbe :
- Boire à la russe (en lançant, après l'avoir lampé, son verre par dessus son épaule)
- Un baiser à la russe (sur la bouche, notamment pour les hommes)
- Question à l'américaine
- Jardins à la française (symétries de Le Nôtre) opposés aux jardins à l'anglaise, qui
miment une certaine idée du naturel, avec vallonnements, points de vue surprise et salles
d'ombrage…
- Socialisme à la suédoise, etc.
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en matière artistique : des traits à la Chopin, un dessin à la Greuze, un raccourci à la
Tacite. Mais ce modèle prend facilement de l'extension : une conduite à la Fangio. A
remarquer que les noms propres ne changent pas, qu'on n'essaie pas de les féminiser, mais
que l'article féminin ne choque pas : on est habitué.
Souvent de façon un peu familière, on utilise ce tour à la … dans des locutions toutes
faites qui se veulent expressives par leur côté bricolé : A la 6,4,2 (=à la hâte), à la va vite
(= vite fait, bien fait), à la va comme je te pousse (sans ordre, ni méthode, ni projet), à la
manque, à la noix, à la flan, etc.
A PIED
Par: (pas credité)
Mais, non seulement "pedibus" est une forme de l'ablatif latin (à l'aide de
ses pieds), mais sa terminaison évoque d'autres mots relatifs au transport :
autobus, omnibus, en particulier.
Les pieds servent aussi à bien d'autres expressions : "à pied" n'est pas
"en pied".
"En pied" signifie à peu près des pieds à la tête, en entier, en
particulier quand il s'agit de l'image qu'on donne : un miroir "en pied" vous
renvoie votre image en entier. Et un portrait "en pied" représente également
tout le sujet.
Cette locution en évoque une autre, "de pied en cap", où cap représente
la tête (capot en latin), et qui s'emploie volontiers à propos
d'habillement, voire de déguisement.
Et, bien sûr, pied est associé à la marche dans bien d'autres tournures :
partir du pied gauche (et paradoxalement, à l'origine, l'expression voulait
dire qu'une affaire était bien engagée : les soldats, marchant au pas,
partaient du pied gauche. Aujourd'hui, la superstition liée péjorativement
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à la gauche, a renversé le sens de la formule).
Et "à cloche-pied", pour finir, qui signifie sur un seul pied, et dont le
sens figuré se rapproche de "en boitant".
Y.AMAR : Sur le même modèle on dit parfois "je suis pompé!". Comme
si une pompe vous avait aspiré toute votre énergie. Mais on parle
plus souvent de "coups de pompe", avec l'idée que c'est soudain et
temporaire.
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Y.AMAR : Gonflé à bloc, c'est-à-dire plein de culot et d'audace. A
l'inverse, le dégonflé, c'est celui qui n'ose pas, qui a peur.
C'est familier mais pittoresque : "Va donc, eh, dégonflé!".
C'était Parler au Quotidien, une émission proposée par le Centre
National de Documentation Pédagogique ...
A QUOI ON JOUE ?
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Noël et les jours qui suivent… période bénie pour les fabricants de jouets… La racine est-
elle productive? Pas tant que cela.
Mais on peut noter déjà que le verbe donne naissance à deux substantifs, jeu et jouet.
Apparemment, pas de difficultés pour savoir comment on utilise l’un et l’autre. Le jouet
est un objet, conçu pour qu’on joue avec. Un bilboquet, un train électrique, ou même un
ours en peluche sont des jouets. Pourquoi ? Parce qu’avec, on s’amuse. Tout ça très en
rapport avec le monde de l’enfance. Et même la langue en témoigne, puisqu’on a formé le
mot familier joujou à l’aide d’un procédé de redoublement qui est l’un des ressorts
principaux de ce qu’on reconnaît comme langage enfantin (papa, pipi, dodo…).
Le mot jouet a quelques échos particuliers, en relation avec la façon dont on joue. Car
jouer, c’est essentiellement faire semblant, faire comme si, mimer le réel : on joue au
papa et à la maman quand on n’est ni l’autre ; on joue au cow boy quand on n’en est pas
un. Le jouet est donc souvent un objet miniature, qui imite une fonction sans la remplir :
un pistolet, une dînette, une « petite voiture ». Et si, par ironie, on dit de quelque chose «
c’est un jouet ! », c’est pour en rabaisser le statut. « Cet ordinateur de poche ? Peuh ! un
jouet ! »
A noter enfin que le mot peut avoir une signification particulière quand il renvoie à une
idée d’instrumentalisation, de manipulation. « J’ai été le jouet des circonstances » ( = je
n’ai pris aucune décision, aucune initiative réelle dans cette affaire ; tout s’est décidé en
dehors de mon contrôle, malgré ou contre ma volonté…). Et on l’utilise également dans
le cas d’une manipulation délibérée. « Ce roi sans pouvoir est un jouet entre les mains de
son Premier ministre »…
Mais, en tout cas, le jouet, quelles que soient ses significations, est toujours concret.
Et c’est là sa principale différence avec le jeu. Le mot est bien trop riche pour qu’on en
évoque en quelques minutes tous les sens mais pour l’opposer au jouet, on peut dire que
le jeu, c’est donc le fait de jouer, et non l’objet avec lequel on joue. Le fait de jouer et
l’ensemble des règles qui vont déterminer un univers clos où se « joue » la partie.
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Ainsi, jouer aux cow boys et aux indiens, c’est un jeu… Jouer aux échecs, c’est un jeu.
On parle des jeux de société. Et justement, parfois, tous les objets qui servent à jouer sont
dénommés jeu : prendre un jeu d’échecs pour partir en voyage, un jeu de cartes pour faire
une belote, un jeu de monopoly pour passer une longue soirée, un jeu électronique intégré
dans un téléphone… Ce dernier est-il encore un objet ? C’est, en tout cas, un système
électronique qui rend possible une interaction entre le joueur, un ensemble d’éléments
concrets et un ensemble de règles. Et même quand le jeu est un objet, il n’est pas façonné
à l’image d’une réalité qu’il imite. Trente-deux soldats de plomb sont trente-deux jouets.
Trente-deux pièces d’échecs sont un jeu.
ABIME
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Cette sorte de répétition en miroir est parfois dénommée mise en abyme… une expression
qui n’est pas si ancienne : on en connaît l’origine et l’auteur : c’est le romancier André
Gide qui l’a inventée, et qui la cite dès 1893. Ses préoccupations littéraires en donnaient
un bon exemple, puisque le roman Les Faux-Monnayeurs met en scène un écrivain en
puissance qui s’escrime sans grand succès à mener à bien un roman intitulé « les Faux-
Monnayeurs ».
C’est, bien sûr, de là que nous vient notre verbe abîmer : s’abîmer, c’est au départ tomber
dans un gouffre, et notamment dans le gouffre du mal ou du vice. Le mot a souvent été
moralisé, de même que l’abîme a souvent désigné l’Enfer, en ancien français.
Hélas, le mot s’est largement affaibli, puisque abîmer a voulu dire précipiter dans un
gouffre sans fond, ruiner, puis simplement endommager… « Arrête ! Tu vas m’abîmer
mes affaires ! »
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ABOI, CLABAUDAGE, CLATISSEMENT
Par: (pas credité)
Qui serait aujourd'hui à Helsinki - l'une des patries du soleil de minuit - entendrait à coup
sûr clabauder, clatir et japper d'importance. Belle Evelyne, je ne vous le cacherai pas plus
longtemps, c'est en ce lieu septentrional qu'on a décidé de se réunir (hasard, instinct,
complot ?) 15 000 chiens (quinze mille - je précise en toutes lettres comme sur les
chèques) de races diverses qui vont tenir congrès (blague dans le coin, c'est une
exposition canine). Comment donc résister plus longtemps à la tentation d'explorer
l'exquis lexique (avez-vous noté l'anagramme phonologique ?) d'une expression orale à
l'ambitus large et aux nuances variées.
Commençons avec un rappel de notions simples : le chien (tous les chiens) aboie(nt).
Comme on pouvait s'y attendre, ce terme générique est une onomatopée, on y entend
clairement le ouah ouah qui sous-jace. De même, et c'était à prévoir, le verbe est passé
dans le vocabulaire des humains, tout en gardant de façon péjorative le souvenir de son
animalité : aboyer, c'est crier, protester bruyamment, prendre un ton revêche, brusque,
agressif : aboyer un ordre ou une injure.
Autre verbe expressif : hurler qui a également une origine onomatopéique (à rapprocher
de hululer, etc.), et qui, au départ, s'applique au chien aussi bien qu'au loup, puis à
l'homme. L'idée est davantage celle d'un cri prolongé, et même quand il s'agit des
humains, il peut rester dans l'infra-verbal : on hurle une insulte, mais on hurle aussi de
douleur, sans phrase et sans mot.
On est encore chez les chiens, lorsqu'on gronde et qu'on grogne (le premier verbe est né
chez les chiens, le second chez les cochons). L'onomatopée, là encore, est évidente, mais
différente, plus sourde, plus menaçante, comme un prélude à l'action violente. Et ces
deux mots ont connu chez les hommes une fortune certaine.
Par contre, quelques autres n'ont jamais vraiment quitté la niche : japper par exemple, qui
évoque un aboiement plus clair, plus aigu, plus jeune souvent et, en tout cas, plus joyeux.
Mais j'aimerais finir sur deux mots que l'usage moderne confine hélas dans une semi-
retraite où ils se morfondent : clatir, mot assez technique qui rappelle la chasse à courre :
clatir, c'est pousser des cris répétés pour annoncer que le gibier est pris ; et clabauder, qui
viendrait de Clabaud, nom propre de chien jadis aussi fréquent qu'aujourd'hui Méder ou
Mirza - qui signifie aboyer fort, d'où médire (dans une langue familière un peu jaunie).
Mais aboyer fort, n'est-ce pas le propre du chien ? Et songeant à cela, je ne peux
m'empêcher d'imaginer quelque relation probable, mais non certaine entre clabaud
(d'origine vraisemblablement néerlandaise, clébard et clebs (de kalb, le chien de l'arabe
classique), voire cabot, à l'origine si mystérieuse, qui viendrait peut-être du latin caput,
sans que personne ait très bien compris comment une tête pouvait dégénérer en chien…
ABREGE DE TOPONYMIE
Par: (pas credité)
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E.LATTANZIO : Voilà qu'on fête les 700 ans de règne de la famille
Grimaldi sur la principauté de Monaco. Excellente occasion de se
demander, sinon d'où vient cette famille, du moins d'où vient le
nom de leur capitale.
Y.AMAR : Monaco ne vient pas des princes mais des moines. Le grec
"monakhos" était passé en latin d'église et le mot a alors évolué
différemment selon les environnements linguistiques où il a vécu :
Monaco, c'est logique, dans une zone sous influence italienne,
mais Munich ailleurs, ou plus exactement "Munichen" à l'origine,
qui a donné "Munchen" en allemand et Munich dans la transcription
française.
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l'appellation "Burdigala" est plus ancienne que le nom bordel dans
cette région. Il y a donc interférence entre le bordel récent
qu'on connaît, et le "burdigala" qui se perd dans la nuit des
temps.
ABROGATION
Par: Yvan Amar
Abrogera ? Abrogera pas ? La question revient souvent à propos d’un article de loi. Il
s’agit de l’article 4 de la loi du 23 février 2005. On en a déjà largement parlé, ici comme
ailleurs : il s’agit de ce texte qui évoque un rôle positif de la colonisation qui ne devrait
pas être passé sous silence dans l’enseignement de l’histoire. L’intéressant, pour nous,
c’est de savoir si cet article va demeurer dans la loi ou s’il va être supprimé… ou
remplacé… ou amendé… ou modifié… On voit que les possibilités ne manquent pas, ni
les mots… Mais, enfin, on parle de la possibilité de son abrogation : va-t-on l’abroger ?
Pas besoin de grand discours pour comprendre le sens du mot « abroger » : il signifie, en
effet, retirer… Mais, c’est un mot particulier, dont le sens est assez restreint. En effet, on
parle d’abroger une loi ou un article de loi qui sont en vigueur. Si l’on était encore dans
l’étape précédente du processus, si la loi n’était encore qu’un projet, on parlerait de retirer
le projet… C’est bien plus facile : on arrête un processus en cours. Alors que là, il faut
effacer quelque chose qui est déjà officiel.
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Il est vrai que le mot a toujours eu un sens officiel. Déjà en latin, où il a deux sens : il
peut d’abord s’appliquer à une personne à qui on retire sa charge. Il s’agit d’un geste
symbolique fort : il y a quelque chose de rituel dans le fait d’investir quelqu’un d’une
charge officielle : un magistrat, par exemple, à qui on confère le pouvoir de condamner,
de dire si un accusé est coupable ou innocent... Lui retirer ce pouvoir, c’est le désacraliser
d’une certaine façon, le défaire de cette charge qui l’élevait, le ravaler au rang de citoyen
comme les autres. Et ça équivaut d’une certaine façon à une dégradation… mot très fort
en français, qui s’est par exemple appliqué à Dreyfus. Une fois qu’il avait été condamné,
à tort, rappelons-le, pour haute trahison, il avait été publiquement dégradé… Il n’avait
pas été abrogé. En français, le mot ne s’utilise que pour les lois. Pas les lois qu’on
dégrade… n’exagérons pas… mais les lois qu’on supprime, sur lesquelles on revient.
Alors, différents mots correspondent à différentes situations. Une loi s’abroge ; elle ne
s’abolit pas. Mais la conséquence d’une loi, la pratique qui en résulte peut s’abolir : la
peine de mort, par exemple, a été en France abolie, et non abrogée. L’esclavage a été
aboli et non abrogé…
Et ce verbe abolir apparaît plus fort encore que le verbe abroger : abolir, c’est détruire, et
non seulement supprimer. Et là encore, le sens du mot en latin nous éclaire sur les
résonances qu’il peut avoir en français d’aujourd’hui : il s’agit de supprimer jusqu’au
souvenir d’une chose, le rayer de la mémoire presque. Et il s’emploie en latin à propos de
quelque chose de honteux dont on tâche d’effacer la trace. Comme si on voulait retrouver
une certaine virginité… Ce qui est en relative contradiction avec les emplois qu’on fait
aujourd’hui du mot, puisque la plupart du temps, on veut abolir, mais garder la mémoire
de l’infamie, en faire de l’histoire. Ce qui nous renvoie indirectement au contenu de
l’article de loi qu’on va abroger … ou pas.
ABSENCE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Ne pas être là physiquement ou ne pas être là avec sa tête. On peut souvent dire à
quelqu’un « Tu as l’air absent », pour lui dire « tu as l’air ailleurs, tu ne suis pas la
conversation, tu n’es pas avec moi, ton esprit bat la campagne »
Quant à « avoir une absence », c’est encore différent. Ca s’apparente à un trou de
mémoire, mais c’est plus général. Tout d’un coup, je ne me suis plus souvenu à qui je
parlais, ou de qui je parlais. J’étais transporté ailleurs. Comme on peut dire aussi : je n’y
étais plus : c’est exactement la même image.
ABUS
Par: (pas credité)
Y.AMAR : L'abus est donc un mot qui implique toujours une idée
d'excès, même s'il se fait parfois au détriment de celui qui
abuse. Cf. vieux proverbe : "il ne faut pas abuser des bonnes
choses", Cf. aussi "abus dangereux". En tout cas, cet excès est
toujours senti comme condamnable. "Tout abus sera puni", lit-on
au-dessus du signal d'alarme dans le train.
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verbe "abuser", formé, dès le latin, à partir du verbe "user"
(= utiliser, se servir) auquel on adjoint le préfixe "ab-" dont les
sens sont nombreux, et qui ici sert d'intensif. Parfois les deux
verbes sont utilisés ensemble pour se renforcer mutuellement : "il
a usé et abusé des plaisirs de la vie" (formule toute faite et un
peu populaire).
ACADEMIE
Par: (pas credité)
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Y.AMAR : Mais comme en Italie, les académies sont récupérées par
le pouvoir politique qui les institutionnalise. En France, c'est
la création de l'Académie française à l'initiative de Richelieu,
grand centralisateur, en 1635. A l'origine, seuls les hommes y
sont admis, d'où le fait que le mot "académicien" ne s'emploiera
qu'au masculin jusqu'à l'élection de Marguerite Yourcenar,
première femme "académicienne"! Il existera des académies un peu
partout en province dans divers domaines, notamment les
belles-lettres. Aujourd'hui encore, l'Institut de France regroupe
cinq académies (dont l'Académie française) fondées à diverses
époques, entre Richelieu et la Révolution.
ACCESSOIRE
Par: (pas credité)
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Dans le vocabulaire de l'automobile, par exemple, on parle, ou plutôt on a
parlé d'accessoires à propos de tous les détails qu'on peut adapter sur un
modèle pour le rendre plus performant, plus agréable, plus impressionnant,
etc. Pourquoi en a-t-on parlé ? Parce qu'aujourd'hui, on parlerait volontiers
d'option. Le sens des deux mots n'est pourtant pas équivalent : le choix
des options se décide souvent à l'achat ; "en option" s'oppose alors à
"en série".
Mais qu'importe, les mots ont leur mode, et l'accessoire pour
la voiture a un peu "rouillé". Etymologiquement, l'accessoire, c'est ce qu'on
rajoute. Le mot s'est très tôt spécialisé en théâtre : il s'agit des petits
éléments du décor (flambeaux, écritoire, table, etc.) et il est passé à la
peinture, à la photo, et, bien sûr, au cinéma : toutes les petites choses
dont on peut avoir besoin pour parachever un décor. Il faut un gars
débrouillard pour les trouver, l'accessoiriste qui règne sur le magasin des
accessoires.
ACIER ET FER
Par: (pas credité)
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est froid à vous faire froid dans le dos.
Face à cette détermination sans affect, le fer, s'il n'est pas plus
flexible, est plus fruste, plus brut, moins secondarisé : "une santé de fer".
Mais le sens général est quand même identique, et parfois, les deux images
sont interchangeables : "une volonté de fer" s'emploie plus fréquemment qu'"une
volonté d'acier". Et, sans que l'acier soit possible dans les expressions
suivantes, on a "la main de fer" (éventuellement dans "un gant de velours")
et "la poigne de fer" pour désigner une autorité très sévère.
Mais le fer suit une pente qui l'amène plus volontiers à la métonymie qu'à
la métaphore. Le mot vient, bien sûr, du latin où il a le même sens, mais il
arrive en français avec cette première signification d'épée. Il commence
donc par le figuré ; et il reste bien des traces de ce premier sens
("croiser le fer", "par le fer et par le feu", etc.). Mais il a acquis bien
d'autres significations, dans la mesure où il symbolisait nombre d'objets
fabriqués en fer. Certains sont liés à la violence : les fers sont l'image
des chaînes des prisonniers ("être dans les fers") depuis le XIIème siècle,
et cette image est déjà présente en latin. D'autres sont bien plus
pacifiques : fer à cheval, à repasser, à friser…
ACTEUR
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Les jeunes, acteurs dans leur ville et dans leur région… c’est l’intitulé d’une conférence
donnée au Conseil de l’Europe…, et qui montre bien le succès et la fréquence de ce mot
d’acteur dans un sens particulier…
Tous les acteurs du monde éducatif… comprenez, élèves, enseignants, parents, personnel
administratif, collectivités locales, etc. Tous ceux qui, de près ou de loin, sont concernés
par le monde éducatif, et participent à sa vie. Sens très fréquent aujourd’hui, toujours
masculin, parce que vague (jamais les actrices du monde de la sidérurgie, par exemple, ni
de celui de la photo de mode…) et mot qui fait un peu hexagonal. J’entends par là, que le
mot appartient plutôt au vocabulaire bureaucratique, administratif, un peu guindé. Un
vocabulaire souvent écrit, ou qui mime l’écrit… en tout cas surveillé, pas spontané, et
surtout, qui tente d’être à peu près correct d’un point de vue politique : en effet, parler des
acteurs de l’éducation, c’est ne vouloir exclure personne, ne rien oublier, de peur de
choquer, et réserver, du moins dans la forme, le même traitement à tout le monde.
C’est ainsi que, d’ailleurs, s’explique la périphrase toute faite, elle aussi, « le monde
éducatif ». Non pas l’éducation, mais toute la sphère décrite par cette activité. De même,
les acteurs du monde sportif vont des athlètes aux soigneurs en passant par les
entraîneurs, les directeurs de club et les journalistes.
Mais ce mot d’acteur, avant d’en arriver là, a eu, et a toujours de nombreuses autres
significations.
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L’acteur c’est, en général, celui qui joue un rôle, au cinéma et au théâtre, concurrencé par
comédien. Et, par extension, celui qui sait faire un rôle de composition, ou contrefaire un
personnage. Mais étrangement, ce sens n’apparaît qu’au XVIIè siècle. Le mot existait
pourtant auparavant, avec des sens totalement différents : demandeur en justice (donc
proche de plaideur… celui qui déclenche une « action » en justice), et même auparavant,
malfaiteur. Celui qui agit, donc (c’est l’étymologie), mais qui agit mal, et commet de
mauvaises actions.
ACTEUR
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Les acteurs dans ce sens contemporain sont tous ceux qui
tiennent un rôle, qui ont un rôle à jouer. L'image vient du
vocabulaire théâtral, comme le mot acteur. C'est davantage par là
qu'on va expliquer cette dérive de sens.
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E.LATTANZIO : Et pourtant comédien n'est pas toujours un mot plus
valorisant qu'acteur : d'un personnage peu sincère, qui exagère
ses émotions et ses pensées, on dira facilement qu'il manque de
naturel, qu'il est "comédien".
ACTION
Par: Yvan Amar
Journée d’action aujourd’hui en France… Mais qu’est-ce que ça veut dire… ? C’est
vague… et pourtant précis. On a déjà compris que c’est une journée de grogne… Et que
de nombreux mécontents vont manifester leur mécontentement. Sous des formes
diverses… Grèves, débrayages, défilés, manifestations, déclarations… Une panoplie
large et disparate… d’actions justement… Un mot intéressant par son vague justement : il
ne se remplit que de ce qu’on veut bien mettre dedans… Et de la mémoire qu’il porte…
On voit bien que, dans ce contexte, l’action dont il s’agit est politique. Et le mot est
souvent utilisé avec un arrière-goût politique… Pourtant, c’est loin d’avoir été son
premier sens, puisqu’il apparaît d’abord, semble-t-il, en français, dans le vocabulaire
religieux… Une action représente le fait de rendre grâce à Dieu… Et l’action de grâce
n’est pas loin de la prière…
L’action est ensuite entrée dans le lexique juridique… Intenter une action contre
quelqu’un c’est encore maintenant porter plainte et lancer, en tout cas, la machine
judiciaire contre son ennemi. Dans un cas comme dans l’autre, on voit que ces actions se
situent dans le cadre d’une institution, fortement ritualisée, qui les entoure, les rend
possible, leur donne une forme.
Mais, l’une des choses remarquables, à propos de ce mot, est que ce n’est pas le seul nom
à dériver du verbe « agir » : on a aussi acte… Alors quelle différence fait-on entre un acte
et une action.
Ce n’est pas du tout la même chose. L’acte, jusque dans la brièveté de sa prononciation,
donne l’impression de quelque chose de ponctuel et de solitaire. Un acte est relativement
isolé. Le mot « action » donne bien davantage l’idée d’une suite d’actes coordonnés, là où
l’acte est bien plus proche du geste… Ce qu’illustre parfaitement l’expression qui nous
sert de point de départ… Journée d’action… en général écrit sans « s » à « action ». Mais,
le pluriel n’est pas nécessaire… On sait que l’action est multiple. Qu’elle se décline sous
mille formes…
Mais, l’action c’est aussi le mouvement délibéré, fait exprès, qu’il soit réflexe ou
réfléchi… Cela correspond à une profonde volonté. Alors que l’acte a quelque chose de
plus mécanique, de plus hasardeux…
Et, en particulier, l’action correspond souvent à la volonté de ne pas se laisser faire, de
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réagir, de ne pas rester le jouet d’une situation. Comme si l’action correspondait au désir
d’agir sur la réalité… Aussi bien dans un rapport de forces que dans la volonté de faire
avancer les choses.
ACTUEL
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Centre National de Documentation Pédagogique ...
ADAM ET EVE
Par: (pas credité)
Adam et Eve, quel a été le destin de ces deux personnages, et surtout celui de leur nom.
On sait que d'après la Bible, ce sont les deux premiers êtres humains, donc nos aïeux
mythiques. C'est cette parenté lointaine qui explique l'expression " je ne le connais ni
d'Eve ni d'Adam " qui signifie " je ne le connais pas du tout ", ni directement, ni de
réputation, par on-dit, par personnes interposées, etc. Je ne le connais donc par aucune de
mes relations, aussi loin que je remonte, à la limite, ni par Eve ni par Adam. Déformation
populaire et un peu lourde : " je ne le connais ni des lèvres, ni des dents ".
Adam et Eve ayant vécu au Paradis terrestre jusqu'à ce que tentés, ils pêchassent, ils
commencèrent leur vie nus, inconscients de l'être, donc innocents. Leur nom est ainsi
parfois associé à la nudité : en costume d'Adam pour un homme, en costume d'Eve pour
une femme (mais c'est plus rare), sont deux expressions plaisantes, synonymes de tout nu.
Le nom d'Adam est également associé à une idée de nature un peu fruste et bon enfant
(genre bon sauvage) : le peigne d'Adam, la fourchette d'Adam, c'est les doigts.
Eve, dit-on, fut créée à partir de la côte d'Adam. On a donc une expression rare et elle
aussi plaisante, parallèle à la cuisse de Jupiter : il se croit sorti de la côte d'Adam pour
dire il se croit de haute naissance, il ne se prend pas pour n'importe qui. Les expressions à
partir du nom d'Eve sont plus rares, mais on peut noter quand même la fille d'Eve, qui
désigne une femme frivole, stéréotype de la féminité écervelée et superficielle.
L'image qui, bien sûr, représente le mieux la destinée tragique de ce couple fondateur,
c'est celle de la Pomme, symbole de la Tentation. Nos deux tourtereaux ont succombé :
ils ont croqué la pomme - le verbe est consacré, et il faut dire qu'il est beau, tout pétri
d'onomatopées pour évoquer ce fruit sonore, qui claque franchement sous la dent, acide,
astringent et frais, plein d'une santé juvénile - à dire le vrai, le contraire de la sensualité
mystérieuse et tentatrice. Dernier paradoxe, alors que c'est Eve qui croque la première,
c'est le syntagme pomme d'Adam qui l'a emporté pour désigner notamment un attribut
purement masculin : l'excroissance cartilagineuse du larynx.
Y.AMAR : Adam et Eve : c'est le titre d'une pièce de théâtre qui se joue
actuellement. Vaste sujet, titre ambitieux !
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E.LATTANZIO : Adam et Eve : personnages célèbres, passés dans
l'inconscient collectif et dans le langage, avec leurs attributs
et leurs manques.
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pour désigner un lieu idéal, par rapport à telle ou telle
activité. Hawaï, paradis des surfeurs, la baie de Somme, paradis
des amateurs d'oiseaux.
Est-ce qu’on peut traduire Bill Gates par les portes de l’addition ? Osé. C’est pourtant ce
qu’ose Eric Vigneron, conseil en entreprise, qui a déposé, à l’Institut National de la
Propriété Industrielle, le nom de Bill Gates, au titre de traduction des Portes de
l’addition, afin d’en nommer un projet d’hôtel-restaurant.. Plainte du patron de Microsoft.
Le Tribunal de Fort-de-France décide aujourd’hui…
Et nous, on se penche sur ce terme d’addition, dont le sens ne pose pas problème : il
s’agit de ce qu’on a à payer, et le terme est presque réservé à ce qu’on doit au restaurant,
après un repas, ou au café, à la rigueur chez l’épicier. « Garçon, l’addition s’il vous plait !
» Le sens est transparent : on additionne les prix de tout ce que vous avez consommé ou
acheté. Mais au lieu de dire le total, on dit l’addition, privilégiant ainsi l’opération elle-
même à son résultat. Cf. la plaisanterie bien connue : « Garçon, la soustraction ! » De
toute façon, l’addition se voit souvent : petit calepin et opération faite au crayon… je sais
bien, la machine a tué tout ça.
Addition a un synonyme approximatif, qui est note. Pourquoi note ? Le mot désigne
d’abord un petit écrit, puis le détail d’un décompte qu’on a couché par écrit. Donc une
addition. Le mot d’ailleurs désigne très souvent le petit papier sur lequel on a porté cette
addition, le ticket de caisse. L’usage de note paraît plus large que celui d’addition : la
note du garage, la note du plombier – dans ces cas-là, on ne parlera pas d’addition.
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parce qu’on a l’idée d’une note arrangée, « cuisinée », on dit aussi assaisonnée. Le sel
relève le goût du plat ; de même on aura voulu relever l’addition…
Mais la note est souvent entendue comme note de frais, celle qu’on se fait rembourser par
son employeur, ou qu’on fait passer dans les frais généraux, lorsqu’il s’agit de dépenses
professionnelles.
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mot vient droit de l'ancien français. Il a connu une très longue
éclipse avant que quelques linguistes, et locuteurs avisés ne le
ressucitent assez récemment, et souvent pour rire.
ADIEU
Par: (pas credité)
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s'est soudée assez tôt puisqu'au 15ème siècle on parle déjà de
"dire adieu", "faire ses adieux" etc.
AERIEN
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Ce qui nous rappelle que l’air, ce gaz qu’on respire pour vivre, est en même temps
synonyme de ce qui est au-dessus de nous. Et le français l’atteste bien avec l’expression «
en l’air », c’est-à-dire, qui ne repose pas sur terre. Ça paraît si évident qu’on ne
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l’interroge même plus. Et pourtant, rien n’est spécialement logique là-dedans. Mais, le
mot « air » s’est très vite dégagé de son seul sens chimique. Et, en ce sens, il a pris assez
vite la marque du pluriel : « dans les airs ».
Ce qui est « aérien » a donc un rapport avec l’air, mais plus encore avec l’idée du vol.
Donc que les appareils s’élèvent parce qu’ils sont plus légers que l’air (donc pour des
raisons physiques) ou bien qu’ils soient plus lourds que l’air (parce qu’ils ont une
propulsion mécanique), c’est par rapport à cet air que tout se joue. Ce qu’on retrouve
dans le nom d’un certain nombre d’inventions : « aérostat » (1783), ou même « aéronaute
», mot qu’on trouve dès 1794. Quant à l’« aéronautique », qui désigne aujourd’hui l’art et
l’industrie qui s’emploient à construire des engins volants, elle apparaît en 1784
également. On aura ensuite « aéronef », puis « aéroplane », éclipsé par « avion ». Mais le
préfixe « aéro » reste très vivant avec « aérodrome », « aéroport », « aéronaval », et au-
delà, « aérospatial »…
AEROPORT & CO
Par: (pas credité)
L'image du "port" est en général oubliée, mais, c'est elle qui est
à l'origine du mot, en liaison avec d'autres images similaires
(navigation aérienne, etc.).
"Aéroport" qui date des années 20, a un frère cadet né dans les
années 50, l'héliport, base d'hélicoptères.
"Aéroplace" n'a pas survécu.
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gare maritime n'est pas le port.
AEROPORT et AERODROME
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Le mot convient tout particulièrement aux grosses structures :
Orly est un aéroport international, par exemple.
Y.AMAR : Aérodrome est formé sur "air", bien sûr, et sur "drome",
un suffixe grec, qui veut dire "course", au départ. On retrouve le
suffixe dans "hippodrome", piste où courent les chevaux,
"vélodrome" et même parfois "cynodrome", endroit où l'on organise
des courses de chiens. C'était Parler au Quotidien, une émission
proposée par le Centre National de Documentation Pédagogique ....
AFRO-AMERICAIN
Par: (pas credité)
Une formation d'ailleurs assez égalitaire, qui ne minore ni les Africains ni les Américains.
Il est important de le noter, car la langue anglaise ne voit pas toujours cela du même oeil :
ainsi les Noirs Américains, lorsqu'on pense trop embarrassant, trop direct, de les appeler
les noirs, ont été appelés d'abord Afro-Américains, puis Africains, Américains. Comme si
l'expression afro-américain ne rendait pas justice à l'Afrique, comme si la réduction
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syllabique de "afro" était dévalorisante.
Il faut signaler cette tendance américaine car elle a parfois une légère propension à
s'infiltrer chez nous. Pourtant, ce genre de formation est d'ordinaire très égalitaire,
notamment dans son usage géographique, et l'on s'en rend compte en retournant les
formules. Les relations franco-russes sont bien les mêmes que les relations russo-
françaises. Et quand on parle de l'ancien Empire austro-hongrois, des ex-relations sino-
soviétiques, on ne privilégie aucun côté. Si d'ailleurs on devait penser à un désavantage,
ce serait bien souvent le deuxième élément qui semblerait en pâtir : l'adjectif
tchécoslovaque par exemple, a parfois été senti comme donnant le côté tchèque
dominant.
Petite remarque concernant ces adjectifs géographiques : ils sont parfois formés sur un
autre radical que la région d'origine. Pour l'Allemagne, on dit germano - ou bien le radical
qui se termine en "o" subit quelques modifications, anglo-normande, hispano-italien etc...
Le premier élément est en général le plus proche de celui qui parle, ou le plus simple : on
dit "franco-suisse", plutôt que "helvéto-français".
AGE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Une conférence anti-âge s’est tenue à Paris le week-end dernier, réunissant de nombreux
spécialistes médicaux qui tous tâchent de lutter contre les méfaits de l’âge qui vient :
dermatologues, chirurgiens, esthétiques ou pas, nutritionnistes etc ont fait le point sur
leurs connaissances. Comme si l’âge était finalement considéré comme une maladie
qu’on pouvait guérir, ou tout au moins, dont on pouvait retarder les effets.
Anti-âge… La formation du mot prouve bien que l’âge est l’ennemi. Et un ennemi
particulier : on ne parle pas de lutte anti-cancer. En revanche, on parle bien de campagne
anti-tabac. Ce qui montre que l’âge est presque considéré comme une substance nocive.
A tel point d’ailleurs que l’on parle en ce moment, dans ces sphères autorisées de «
l’esprit antiaging »…. Ah ! nous y voilà ! C’est donc un anglicisme. Cette croisade vient
d’Amérique.
Oui, mais on s’y associe volontiers. Notre passé linguistique nous y pousse : on parlait il
y a bien longtemps déjà de crème anti-rides.
Mais qu’est-ce donc que l’âge cet ennemi masqué qu’on voudrait réduire ?
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Ce mot, qui dérive du latin aetas au départ le temps, désigne le temps qu’on a déjà vécu,
et se rapporte donc à l’évaluation du temps de vie. Quel âge as-tu ? Bizarrerie du langage
: on questionne sur l’âge. Et on répond toujours sur les ans, et sur leur nombre. Quel âge
as-tu ? Douze ans. Jamais on ne demandera « Combien d’ans as-tu ? » Le mot clé de la
réponse n’est donc pas exprimé dans la question.
Par ailleurs, on emploie le mot, qualifié par différents adjectif, en rapport avec toutes les
périodes de la vie : Premier âge, bas âge, âge tendre, le bel âge, âge mûr, le grand âge etc.
Mais le mot a un emploi particulier, quand il est employé sans adjectif. Quand on parle de
l’âge sans préciser, on sous-entend souvent l’âge accumulé. Et même qu’il s’en est
accumulé un peu trop. Avec l’âge qui vient… A mon âge… Et l’adjectif qui en découle
signifie toujours « vieux », mais avec une vague volonté d’euphémisme : on arrondit les
angles. Etre âgé semble plus supportable qu’être vieux. Ou tout au moins, on peut se
permettre de dire de quelqu’un qu’il est âgé, voire, très âgé alors qu’on aurait scrupule à
dire qu’il est vieux.
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Autre mot latin, ayant à peu près le même sens et d'une utilisation plus
familière, le mémento. Mot latin, il signifiait au sens propre
"souviens-toi". Il apparaît en français au XIVème siècle, il appartient alors
plutôt au vocabulaire religieux, dans la liturgie catholique, le mémento,
c'est le nom de deux prières du canon commençant par ce mot, "le mémento
des vivants" et "le mémento des morts". Le mot a ensuite élargi son
domaine de référence, pour désigner à son tour le carnet où l'on inscrit ce
qu'on veut se rappeler. Mais signalons qu'il a un autre sens également :
un mémento, c'est aussi un "aide-mémoire", destiné à rappeler les notions
essentielles d'une science ou d'une technique : "mémento de géographie",
seul reste ici le sens de facteur de mémorisation.
AGORA
Par: (pas credité)
3 - Place publique
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Terme équivalent en français aux précédents. S'utilise notamment dans
l'expression mettre, (porter) le débat, (la question, le problème) sur la
place publique = faire sortir une question du cercle restreint dans lequel
elle se tenait jusque-là afin d'en informer l'opinion et de susciter un
large débat. Se dit notamment pour des politiques et d'intérêt général (ou
supposées telles).
AIR
Par: Yvan Amar
150 A320 vendus à Pékin ? Joli contrat, qui met à l’honneur Airbus et ses avions. Airbus
? C’est le nom d’un « avionneur », comme on dit, une compagnie européenne qui
conçoit, fabrique et, accessoirement, vend des avions. Mais, ne les fait-elle pas voler ?
Que nenni ! Elle les livre et ensuite, les fait voler qui veut ! C’est qu’Airbus n’est pas une
compagnie aérienne. Elle n’organise pas de transport aérien. Ce qui peut prêter à
confusion, c’est son nom, qui commence par « air ». Le nom n’est pas mal choisi : on
sent que sa vocation est de fabriquer essentiellement de gros avions, qui sont susceptibles
de proposer un transport de masse… enfin, en tout cas, pour de nombreux passagers, et
donc peut-être de démocratiser et de banaliser la voie des airs. On prend l’avion comme
l’autobus. Et c’est le radical « bus », qui occupe cette fonction.
L’autre partie du nom « air » est souvent associée à des noms de compagnie aérienne
justement : Air France, Royal Air Maroc, Tunisair… un mot qu’on va retrouver dans bien
des langues : British Airways, Finnair, Aeroflot. Alors, bien sûr, de très nombreuses
expressions font partie du vocabulaire de l’aviation : conquête de l’air, armée de l’air,
hôtesse de l’air, pirates de l’air.
Mais, pourtant, « air » est un mot assez spécial en français : il a des sens extrêmement
différents. Au sens propre, on peut dire que c’est le nom d’un gaz, d’une combinaison de
gaz qui permet la vie sur Terre, et qui nourrit la respiration des êtres vivants. Mais, l’air
représente aussi l’atmosphère, tout ce qui nous entoure, qui est autour de nous, et
surtout… au-dessus de nous… Et bien d’autres choses encore : l’allure qu’on peut avoir :
« il a un drôle d’air celui-là » ; une mélodie musicale : « quand un air vous trotte dans le
tête, c’est bien difficile de s’en séparer »…
Mais, c’est plutôt l’air qui plane sur nos têtes qui m’intéresse, celui qui évoque à la fois la
hauteur et la légèreté. Et souvent, pour ne pas le confondre avec d’autres, on le met au
pluriel : on dit qu’un oiseau vole dans l’air. Plus fréquemment encore, on dira qu’il vole
dans les airs. Ce pluriel donne peut-être une tournure plus raffinée à la phrase… pluriel
poétique, disait-on jadis. En tout cas, il n’a, en aucune façon, un sens pluriel, et renvoie
juste à une certaine idée de la hauteur.
… Idée qu’on trouve précisée dans de nombreuses expressions : « en l’air » est
probablement la plus évidente : ce qui est en l’air c’est ce qui n’est pas en bas, en tout
cas, pas par terre. Et c’est souvent le simple synonyme de « en haut ». Comme dans des
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expressions telles que « mettez les mains en l’air » synonyme de « haut les mains ». Il ne
s’agit pas de les élever bien haut… Et l’expression prend même parfois le sens de « tout
dérangé », voire « tout cassé, tout raté ». Notamment dans des expressions familières : «
tout envoyer en l’air », ou même « ça va tout fiche en l’air » : c’est-à-dire ça va tout faire
rater…
La menace que l’âge et la santé peut-être chancelante de Maurice Papon font courir à son
procès est sans cesse celle d’un « ajournement ». C’est-à-dire d’une interruption de la
procédure, que l’on reprendra plus tard, quand les conditions le permettront. « Ajourner
», c’est donc remettre à un autre jour, à plus tard. Ce sens actuel, qu’on trouve en général
dans un vocabulaire juridique ou administratif, est en contradiction avec la première
signification de cette famille de mots : en ancien français, et toujours dans un langage
juridique, « ajourner » quelqu’un, c’était l’assigner à comparaître un jour particulier. «
Ajourner », c’était donc à l’époque, fixer un jour -pratiquement l’inverse du sens actuel,
hérité de la langue anglaise, qui nous avait emprunté le mot. Aujourd’hui, « ajourner »,
c’est remettre à plus tard, en évaluant parfois le délai -« ajourner à huitaine »- mais le
plus souvent sans donner de date précise : ajourner à une date ultérieure ou même «
ajourner sine die », c’est-à-dire, sans donner de jour. Et cette expression latine indique
bien que le délai sera long, qu’il n’est même pas nécessaire de le préciser, et qu’il sera
peut-être bien le prélude à un abandon pur et simple. (Cf calendes grecques, bien que «
sine die » n’ait pas le caractère familier, ni l’effet ironique de cette dernière expression).
Attention, là aussi, des nuances de sens : on ne « diffère » quelque chose que pour un
temps assez bref, dont on connaît presque toujours la durée ; l’événement est décalé,
simplement. Cf les retransmissions sportives « en différé » -on précise parfois « en différé
».
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Enfin, « ajourner » et « différer » s’emploient toujours lorsqu’il s’agit d’une décision
délibérée, et non d’un résultat, ou d’un concours de circonstances : « l’arrivée de l’étape a
été retardée par la pluie (on n’y peut rien). Et en conséquence, la cérémonie a été différée
par le Maire ».
ALLIANCE
Par: (pas credité)
Attention : quand on parle de ligue, on sous-entend parfois un accord qui lie des pays.
Mais ce sont plutôt des particuliers, des individus, ou même des conspirateurs, comme ce
fut le cas durant les guerres de religions en France – la Sainte Ligue. C’est aussi le nom
qu’ont pris certains groupes politiques souvent extrémistes, qui en général ne sont pas
exactement des partis politiques au sens classique du terme : ligues d’extrême-droite dans
les années 30 ; ligue Communiste Révolutionnaire en France depuis les années 70.
Le mot pacte est plus ambigu. Il s’agit parfois d’un accord de non-agression : non pas
attaquer ensemble, mais ne pas s’attaquer mutuellement. Et ces pactes sont souvent
secrets, pour tromper l’adversaire…
Et l’alliance alors ?
Terme mystérieux, qui évoquent la diplomatie mythique du moyen âge ou les âges
légendaires : ça fait un peu Guerre des Etoiles, version George Lukas…
Le mot a eu un sens religieux : il renvoie à l’Arche d’Alliance entre l’Eternel et son
peuple élu .
De là les expressions, un peu anciennes, qui ne sont plus guère usitées, mais qu’on trouve
souvent dans la littérature ; l’ancienne alliance – le judaïsme, qui renvoie à l’Ancien
Testament ; et la nouvelle, le christianisme, qui revoie au Nouveau Testament.
Maintenant ce mot d’alliance a bien d’autres acceptions. Il a désigné l’union par mariage
entre deux familles. Ce sens est sorti d’usage, mais on en a gardé le sens d’anneau
symbolique du mariage.
On en a aussi dérivé le mot mésalliance, qui même si lui aussi est un peu vieilli, désigne
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une alliance entre deux familles de statut social différent – toujours du point de vue de la
famille supérieure bien sûr… Ou bien le mariage entre deux conjoints dont on peut croire
l’un des deux déchus par cette union : un baron et une boulangère.
ALLIANCE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
C’est le mot qu’on entend beaucoup au lendemain des élections régionales en France…
Puisqu’il faut souvent s’allier pour vaincre, s’allier avec… mais, la plupart du temps,
s’allier contre ! Une alliance est donc une union de circonstance, tactique, plutôt
provisoire, non sans arrière-pensée parfois, un accord passé dans un but précis.
Le mot est donc politique, mais aussi diplomatique ou militaire avec des synonymes :
Union, on l’a dit, mais aussi entente.
Et ce mot d’alliance a désigné aussi des genres de pactes d’assistance et de non agression,
qui allaient presque parfois jusqu’à une même confédération d’états.
Les sens du mot sont pourtant multiples, puisque, depuis longtemps et surtout ,dans une
langue un peu ancienne, « alliance » a été un terme religieux : l’ancienne alliance, qui
repose sur l’Ancien Testament représente la religion juive, et la nouvelle alliance, sur le
Nouveau Testament, la religion chrétienne. Et cette idée de lien symbolique est tout à fait
forte, puisqu’elle se retrouve dans un sens tout à fait différent du mot : l’alliance, on le
sait, est aussi une bague de mariage… et d’un point de vue plus abstrait, une alliance est
un mariage…
Mais le terme « allié », de la même famille, bien sûr, reste davantage dans un giron
politique ou historique…
Les Alliés, c’était les puissances opposées, pendant les Guerres mondiales, aux
Allemands et à leurs alliés à eux. Notamment à ceux qu’on appelait, pendant le deuxième
conflit, les puissances de l’Axe.
On a donc pris l’habitude d’appeler les Alliés, ceux qui se joignent à une union
américano-britannique. Ainsi, on a entendu le terme à propos de la dernière guerre du
Golfe … et cet emploi a parfois, d’ailleurs, été critiqué.
Attention, « s’allier avec quelqu’un », ce n’est pas « se rallier à quelqu’un ». Déjà, on voit
que la construction grammaticale n’est pas exactement la même. « S’allier » peut se
construire avec « avec », ou avec « à ». « Se rallier » ne supporte que « à ».
Et si vous vous ralliez à un groupe ou à une opinion… c’est que ce n’était pas votre
premier mouvement. On se rallie… si on change d’idée… ou, à la rigueur, après mûre
réflexion… Cela signifie, qu’en fin de compte, on se range sous telle bannière, on se
place dans tel camp…
ALPINISME
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Par: (pas credité)
ALTERMONDIALISTE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Le mot est intéressant car on a déjà parlé souvent d’anti-mondialisation. Là, les opposants
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se placent davantage dans une perspective de proposition, pour tenter d’élaborer une autre
politique, une autre économie mondiale, un autre développement.
C’est tout le sens du préfixe alter, qui signifie « autre » en latin.
Déjà, ce mot « autre » a été employé pour évoquer ce qu’on aurait tendance à oublier, ce
qui ne se voit pas, ne se fait pas remarquer, mais qui existe bel et bien. : l’autre journal,
l’autre gauche.
Mais, on trouve également les mots « alternatif » et « alternative » sous bien des
plumes…
« Alternative » est un mot contesté. Il existe, depuis longtemps, avec le sens de situation
où deux solutions sont envisageables : être devant une alternative…
Mais un autre sens est extrêmement fréquent, bien qu’il soit critiqué : l’ « alternative »
c’est l’autre solution, la solution de rechange. Et c’est par rapport à cet emploi, qui dérive
de l’utilisation d’un mot semblable en anglais, qu’on comprend la formation de ce mot
long et étrange qu’est « altermondialisation ».
AMBULANCE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
On ne tire pas sur une ambulance… Dicton à la fois humaniste et populaire, qui signifie
que même dans une situation conflictuelle, on ne s’oppose pas à ceux qui tentent de
secourir les blessés : quelle que soit la cruauté de la guerre, il y a des règles à respecter…
Et l’ambulance est le véhicule qui transporte des malades ou des blessés… Blanc à croix
rouge, en général et en Occident, car bien sûr c’est un code qui change selon les époques
et les régions… De là, ambulancier, conducteur d’une ambulance, ou parfois brancardier,
ou infirmier qui travaille dans une ambulance. Mais l’origine du mot laisse un instant
perplexe : pourquoi anbulance, pourquoi ce mot qui évoque a priori le mouvement…
N’importe quel véhicule pourrait, au même titre, être qualifié d’ambulant…
Le mot dérive de l’expression « hôpital ambulant », qui apparaît au XIXè siècle, dans le
lexique des armées, pour désigner en gros une infirmerie de campagne… On a parlé à la
suite de ça du service d’ambulance, puis des chariots d’ambulance, et enfin des voitures
de l’ambulance…
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De nos jours, l’adjectif « ambulant » est assez employé, mais dans un sens particulier :
souvent à la place de vivant, pour désigner un humain – et le plus souvent de façon très
ironique : « c’est une catastrophe ambulante »… c’est-à-dire… où qu’il aille, il crée des
désastres…
AME
Par: (pas credité)
Les chercheurs d'âme. C'est le nom d'un festival de films qui se déroule chaque année à
Bénodet. On peut y voir des œuvres qui traitent de sujets élevés, et vous remuent dans la
bonne direction. Chercher son âme, même si ce n'est pas une expression figée, est donc
perçue positivement. Ce qui paradoxalement, est assez rare avec ce mot qu'on assaisonne
souvent d'une sauce ironique.
Un état d'âme, par exemple, c'est bien à la mode à condition qu'on en ait pas. Un état
d'âme, c'est donc un scrupule, un problème de conscience. Un homme d'Etat progressiste
par exemple qui réprime un mouvement social peut avoir un état d'âme, c'est à dire une
culpabilité, un malaise lié au fait qu'il agit en contradiction avec ses convictions, par
tactique ou par nécessité. L'expression s'utilise souvent au pluriel (avoir des états d'âme),
et vient au départ du vocabulaire romanesque et romantique (Mme Bovary et consorts).
D'autres expressions avec âme sont péjoratives ; vendre son âme au diable: faire quelque
chose d'impardonnable par intérêt. La référence nous replonge dans de nombreuses
légendes médiévales chrétiennes et méphistophéliques. Mais dans un vocabulaire
politique plus récent, perdre son âme, c'est se compromettre avec un parti ou des idées
honteuses (Cf il vaut mieux perdre les élections que son âme).
L'âme damnée de quelqu'un est le mauvais conseiller qui est dans l'ombre, hypocritement,
le pousse au crime ou lui inspire de noirs desseins. Le sens s'élargit parfois à celui
d'éminence grise, voire d'exécuteur des basses œuvres.
Quant à la bonne âme, elle n'a pas eu de chance. Au départ, c'est vraiment une personnes
pleine de bons sentiments. Mais on n'emploie plus l'expression qu'à propos de celui qui
dit du mal du voisin ou répète méchamment des ragots : il ne manquera pas de bonnes
âmes pour lui répéter qu'on a vu sa femme en grande conversation avec Léopold.
AMEN
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Mot unique… Bon titre… Car le mot est souvent utilisé comme une phrase… Comme
écho, comme réponse, comme signe qui indique qu’on est d’accord… Même si cet accord
est simulé, imposé, ou ironique…
Le mot est d’origine religieuse et toujours perçu comme tel, même lorsqu’il est employé
dans le langage tout à fait profane.
Amen est le mot par lequel se terminent presque toutes les prières catholiques. Il
appartient donc à un code traditionnel et liturgique qui signifie la fin de la prière, le fait
qu’elle est été bien énoncée, comme une clé qui a posteriori, lui donne son sens et son
orbe. Pour ainsi dire, le mot divinise les phrases qui l’ont précédé.
Linguistiquement, on peut noter cette bizarrerie : Amen suit un texte en latin, alors que le
mot lui-même n’est pas latin. Il est emprunté au grec, qui lui même tient le mot de
l’hébreu. Et Amen signifie au départ « vrai, certain »… Et dans un vocabulaire qui sent
encore l’encens, on le traduit en français par « ainsi soit-il… »
Mais comme un certain nombre de mots du lexique religieux, il passe en français laïque
avec un sens ironique et un emploi familier : dire amen, c’est approuver, dire oui, et bien
souvent dire oui avec une certaine cautèle.
Il peut donc souligner une approbation : « Je lui ai dit que je voulais un bureau pour moi,
un ordinateur et une secrétaire… Il a dit Amen » C’est à dire, il a accepté, il a entériné.
Mais c’est souvent utilisé pour souligner que quelqu’un ne s’oppose pas à un autre, n’a
pas le front, le culot, le courage de dire non. Signe de faiblesse ?… « Il rackette ses
camarades et l’administration dit amen… » De temps en temps, c’est presque synonyme
de « fermer les yeux », faire semblant de ne pas remarquer quelque chose de
condamnable, mais qu’on n’ose pas condamner…
Et puis le mot a eu des usages quasiment perdus aujourd’hui : L’expression de pater à
amen, qui signifiait du tout début jusqu’à l’extrême fin, de a à z… Jusqu’à amen :
jusqu’au bout, jusqu’au dernier mot.
Enfin un amen a désigné jadis un crétin, celui qui ne sait dire qu’amen…
AMOUREUX
Par: Yvan Amar
14 février… Saint-Valentin… Fête des amoureux… Une fête très prisée, très médiatisée
depuis quelques années… Non pas peut-être remise à l’honneur, mais mise à l’honneur
pour la première fois, portée par une certain enthousiasme et peut-être un certain intérêt
commercial… Ce genre de choses fait toujours vendre…
Si les « amoureux » sont à l’honneur… profitons-en pour nous interroger sur le mot lui-
même… même si rien ne vaut l’expérience vécue.
Ce mot d’« amoureux » est soit un adjectif, soit un nom… En tant qu’adjectif pas de
problème : il n’a jamais connu la crise… Et son sens est connu de tous. « Etre amoureux
» c’est donc être dans cet état particulièrement agréable (en général… sauf situation
particulièrement adverse, rejet, sentiments non partagés, dédain, froideur, indifférence…)
En tout état de cause, c’est un état provisoire, ponctuel… même s’il peut durer…
Etat de projection intense vers l’autre, qui fait que très naturellement, on le décline : «
amoureux de… »
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L’arrivée plus ou moins subite de cet état s’exprime également : « tomber amoureux »…
Et le mouvement, la chute expriment bien cette idée à la fois de soudaineté et disposition
contre laquelle on ne peut rien… Tout ça, en apparence se fait contre votre gré… en tout
cas, pas vraiment sur commande…
« Tomber amoureux »… et non pas « tomber en amour »… tout au moins en France,
puisqu’au Québec, l’expression est fréquente et rappelle exactement l’image de
l’expression anglaise « to fall in love ».
Maintenant, le nom « amoureux » est bien moins fréquent. La Saint-Valentin peut y faire
penser car elle a souvent été symbolisée par les amoureux de Peynet, petits dessins, un
peu mièvres qui représentaient deux silhouettes assez niaiseuses qui roucoulent.
AN ET ANNEE
Par: (pas credité)
L' "an" 2000, c'est pour bientôt. On en parle assez pour qu'on s'arrête quelques secondes
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sur cette dénomination : pourquoi l' "an" 2000, et pas 2000 simplement, d'autant qu'il y a
une ambiguïté possible avec la formule "en" 2000. Pourquoi l' "an" 2000 et pas l' "année"
2000 ? Et quelle différence fait-on entre "an" et "année" ?
L'expression l' "an" 2000 a une charge symbolique importante, c'est évident.
Techniquement, on ne change ni de siècle ni de millénaire (c'est pour 2001), mais le
passage d'une ère à l'autre va se faire là quand même.
D'ailleurs, cet "an" 2000 change de face au fur et à mesure qu'il se rapproche. Pendant
longtemps, disons la majeure partie du XXème siècle, il a symbolisé l'avenir, de façon un
peu futuriste, un peu comme un avenir de science-fiction auquel on faisait une référence
fantasque et imaginaire. Jusqu'au premier traiteur de luxe ouvert jusqu'à 2 heures du
matin qui, dans les "années" 50, s'appelait déjà "À l'an 2000". C'est que bizarrement ce
mot "an" qui, dans cette expression, est résolument tourné vers l'avenir est un mot assez
archaïque, qu'on trouve en français d'aujourd'hui dans des formules figées qui fleurent
bon le passé : l' "an" 2000 est un calque de l' "an" mil. Aujourd'hui, pour parler des
millésimes, on parle d' "années" : "l'année 1967 a été bonne pour le Bordeaux"…
Mais jadis, on parlait d' "an", voire, dans une langue plus marquée qu'aujourd'hui par la
préoccupation religieuse, d' "an de grâce". Mais, cet usage se retrouve pour le calendrier
révolutionnaire ("Ô soldats de l'an II"…), et s'est transmis lorsqu'il s'agit d'entamer une
nouvelle ère (Cf. le film "L'an 01").
Mais, on trouve également ce mot "an" lorsqu'on est à la frange de deux "années" : "le
nouvel an", "le jour de l'an", "au gui l'an neuf", etc. Ou dans de vieilles expressions du
genre "bon an mal an" qui signifie en gros, l'un dans l'autre, si l'on fait la moyenne entre
les bonnes et les mauvaises "années".
Mais, il serait faux de penser que le mot "an" est réservé à des expressions toutes faites :
c'est encore un mot très usuel et très vivant qu'on emploie tout le temps. Alors quelle est
la différence de sens qui le distingue de son doublet "année" ?
Et bien, comme c'est souvent le cas en français, il n'y a pas vraiment de règle, mais des
usages variés.
On peut quand même noter quelques grandes tendances : "année" pointe davantage un
contenu, une durée, alors que "an" s'utilise plus pour marquer l'âge ou l'écoulement du
temps.
Pour l'âge, c'est évident : "il a trois ans", "il a quarante ans", etc.
Pour dater, marquer le temps qui s'écoule : "depuis trois ans", "dans dix ans", "dans trois
cents ans", "j'ai vécu douze ans à Bécons"…
Mais voyez comme c'est une question d'habitude et non de bon sens : il suffit d'une
préposition pour tout faire basculer : on dit "il y a 300 000 ans" ; "il y a trois millions
d'années"… mais on ne dirait jamais "il y a trois millions d'ans". De même, on dit "une
dizaine d'années", et non "une dizaine d'ans".
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ANARCHIE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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ANE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Et si vous dîtes "Ane bâté!" c'est plutôt pire ... L'âne
bâté est celui qui porte un bât, un appareillage qui permet qu'on
vous mette un lourd fardeau sur le dos.
ANE
Par: (pas credité)
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- Déjà vu ! - Du cheval et du poney. - Réchauffé ! - Du cheval, du poney et de l'âne.
- De l'âne ? Intéressant !
Evidemment, triple buse que c'est intéressant, l'âne. Qu'est-ce que c'est
qu'un âne ? Un mammifère quadrupède domestique. Mais encore ? Un crétin. Et
bien sûr, c'est ça qui nous intéresse : l'âne, au figuré, et ça ne date pas
d'hier, désigne un imbécile, comme si l'âne était bête.
Il ne l'est pas pourtant, mais il n'est pas rebelle, convient aux tâches
serviles et quand il ne veut plus jouer au bon garçon, refuse simplement
d'obéir. De là, sa réputation d'obstination (têtu comme un âne, moins
fréquent pourtant que têtu comme une mule). Si l'âne porte des fardeaux
plus volontiers que des cavaliers, c'est qu'il galope moins que le cheval.
Le cheval est donc une figure de noblesse et d'arrogance, alors que l'âne
est la monture des humbles (Jésus entrant à Jérusalem).
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ANGES
Par: (pas credité)
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ANNÉE
Par: (pas credité)
C'est l'année Sissi ! Et l'avantage, avec l'année Sissi, c'est qu'elle nous
permet de faire une émission sur " année ". Chère Sissi ! Depuis l'année
Beethoven - on s'en souviendra de l'année Beethoven - on a pris l'habitude
de vouer nos années à un personnage particulièrement marquant (Sissi) dont
la mémoire, douce et exigeante, hantera douze mois qui eussent été bien
ternes sans le rappel d'une figure lumineuse. La formation linguistique est
intéressante, avec ce nom propre qui sert d'apposition - bien plus
séduisante que si l'on utilise l'article, ce qui se fait aussi quand il ne
s'agit pas du nom d'un personnage : année du Japon (Japon est bien un nom
propre, mais on dit le Japon), année de la femme, de l'enfance, de la
liberté de la presse, etc.
On parle parfois, mais peu, des années 10. En effet, coupée par la Grande
Guerre, cette décennie n'a pas d'unité, et les années 10 ne vont réellement
que jusqu'en 14. On retrouve un phénomène similaire avec les années 40.
L'expression existe mais renvoie plutôt à la période 45-50 qu'à la période
de l'occupation. En revanche, l'entre-deux-guerres se prête à ce type de
dénomination : années 20 et années 30, avec en plus les années folles qu'on
a davantage tendance à situer dans les années 25 : garçonnes, Coupoles et
Charleston.
Les puristes vont sourciller : j'ai bien dit les années 25, et d'aucuns
prétendent que cette tournure ne doit s'employer que pour les années toutes
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rondes, éponymes de la décennies qu'elles inaugurent. Remarquons, en ces
temps trentenaires, qu'on parle beaucoup des années 68 avec une certaine
logique, dans la mesure où mai 68, en quelques semaines a représenté une
brisure dans l'histoire des mentalités d'après-guerre, et que tous les
comportements et les attitudes culturelles se sont situés dans l'écho de
cet ébranlement.
Cf. aussi la mode du ot et du concept génération.
ANNIVERSAIRE
Par: (pas credité)
Bon anniversaire Elizabeth ! Happy birthday to you queen, darling. En effet c’est
aujourd’hui l’anniversaire de la Reine d’Angleterre. Ou plutôt non, c’était en avril, mais
c’est aujourd’hui qu’on le fête, puisque dans sa grande mansuétude, et sa grande
pénétration de la psychologie et de la météorologie britanniques, cette Reine d’Angleterre
a décidé qu’on fêterait ça en juin : moins de chance qu’il pleuve ; plus de chance que son
bon peuple ait la joie de l’honorer en plein air.
Joyeux anniversaire ! Happy birthday to you !. S’il y a bien une phrase – toute
anglomanie mise à part – que les Français savent en anglais, c’est bien celle-ci. Grâce à
une chanson célèbre. Qui a donné lieu au plus célèbre des à peu près orthographiques.
Car tout le monde connaît le pluriel de petit beurre.
Est-ce une excuse à cette faiblesse pour Albion, il faut reconnaître que l’anglais est plus
riche que nous en cette matière, puisqu’il bénéficie de deux mots, là où nous n’en avons
qu’un. Birthday et anniversary. Les Anglais ont donc un mot spécial pour l’anniversaire
de naissance.
On s’en passe en français, et on parle d’anniversaire chaque fois que dans le cours de
l’année revient une date symbolique, l’année étant considérée comme une grande roulette
cosmique à 365 trous ; l’année (annus) tourne (vertere) et cette révolution fait que
reviennent cycliquement des jours qui furent marqués par des événements: anniversaire
de naissance (et quand on ne précise pas, c’est de ça qu’il s’agit. Malheur à ceux qui,
comme le petit Jésus, sont nés le jour de Noël : un seul cadeau pour deux fêtes),
anniversaire de mariage, de rencontre etc… Et souvent, lorsqu’il s’agit d’un anniversaire
qui ne marque pas un jour de naissance, on précise, en se servant du mot comme adjectif :
date anniversaire. Le 18 juin est la date anniversaire de l’Appel du Général de Gaulle et
de la bataille de Waterloo.
Ce mot d’anniversaire est donc très lié à une idée de fête. Pourtant son premier usage était
funèbre : il s’agissait d’une messe dite pour le repos d’un défunt, et dite au jour
anniversaire de sa mort.
Il arrive souvent, quand il s’agit de célébrer le souvenir d’un événement, qu’on ne parle
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pas d’anniversaire, mais de commémoration. Là encore, le mot est religieux au départ,
mais il n’est devenu d’usage courant qu’après le Révolution, ce qui l’a infiniment laïcisé.
Et il sert surtout de nos jours, dans des contextes historiques ou politiques : rappelons-
nous 1989 et la commémoration du bi-centenaire.L Le doublet, commémoraison est sorti
d’usage.
Ce n’était pas pourtant sa vocation première :
ANNUAIRE ET BOTTIN
Par: (pas credité)
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Le Bottin mondain tourne un peu la même sauce en moins élitiste.
Mais nous voici en possession d'un troisième mot : le Bottin, qui est
également un répertoire de noms, en général, classés alphabétiquement. Et
lorsqu'on parle (ou parlait…) du Bottin, sans préciser, on pensait
généralement au Bottin du téléphone, qui concurrençait l'Annuaire. Mais
Bottin du téléphone n'est pas l'appellation officielle. Un peu d'histoire :
Sébastien Bottin, d'abord Secrétaire Général de la Préfecture dans le
Bas-Rhin, puis le Nord, établi une liste alphabétique des commerçants des
départements où il officiait. En 1819, il s'attaque à Paris. L'entreprise
fusionne en 1857 avec le célèbre Firmin-Didot, et voilà notre Bottin devenu
Annuaire du commerce. Le mot s'est, par la suite, répandu comme un synonyme
d'annuaire, et tous les petits enfants de bonne famille s'en sont servi
pour surélever leur tabouret de piano.
ANNUITE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Les récentes déclarations fracassantes de François Fillon sur les retraites ont ému. Et on a
donc agité ce problème dans tous les sens, en parlant notamment d’annuités. Un
fonctionnaire qui par exemple en ce moment doit s’acquitter de trente sept annuités et
demi pour pouvoir faire valoir complètement ses droits à la retraite devrait travailler deux
ans et demi de plus. Aller jusqu’à quarante annuités ?
De quoi se demander déjà ce que c’est exactement qu’une annuité. Un troisième mot qui
entre en concurrence avec an et année ? Vous n’y êtes pas : le sens est plus précis que
cela. Et plus financier. L’annuité, c’est la cotisation annuelle qu’on doit payer. La
traduction en euros de ce qu’une année de travail doit consacrer au fond de pension pour
la retraite.
Mais annuité a un autre emploi et désigne également ce qu’on doit payer par an pour
rembourser une dette. Par exemple, si vous avez emprunté une certaine somme sur dix
ans, on calcule combien vous devez rembourser chaque année. C’est l’annuité.
On voit que ce mot correspond exactement à la mensualité, mais sur une durée d’un an, et
non pas d’un mois.
Et ces mots s’emploient donc beaucoup dans le contexte d’une vente à crédit, puisqu’ils
décrivent les échelons de remboursement. Oh, je vous l’accorde, on ne dit pas les
échelons de remboursement, mais on parle bien d’une dette échelonnée, c’est à dire
morcelée sur une durée établie. On peut donc convenir des termes, littéralement des
limites auxquelles il faut s’acquitter d’un remboursement. Ces termes qu’on peut nommer
aussi échéance. Et le mot renvoie au moment ou le terme échoit, c’est à dire où il tombe.
c’est l’image étymologique pour un mot qui est entré dans cet usage financier : on parle
même d’un échéancier : un calendrier des échéances successives. Cet échéancier est-il
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toujours fixé définitivement ? Oh presque toujours, mais pas toujours toujours ! On peut
parfois essayer de renégocier une dette (quand la situation financière a changé par
exemple, si les taux d’intérêt ont baissé. Et avec un peu de chance, vous arriverez alors à
rééchelonner votre dette…
ANONYME
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Mais il n'y a pas que les lettres pour être anonymes :
nombre de manuscrits du Moyen-Age sont anonymes par exemple, et
des tableaux, en quantité : on ne sait pas qui les a peints.
ANTHRAX
Par: (pas credité)
PARLER AU QUOTIDIEN DU 16 OCTOBRE 2001
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L’anthrax ou le charbon ? Est-ce là une fausse interrogation du genre « la peste ou le
choléra » ? Non. Car dans le cas qui nous intéresse, l’anthrax et le charbon, c’est la même
chose. Ces deux mots qui font peur, et spécialement en ce moment où l’on a peur que le
terrorisme bactériologique suscite une épidémie.
Même si ces deux mots recouvrent la même maladie, ils n’ont pas le même écho : on a
l’impression que le premier est très savant, alors que le second est bien plus populaire, en
tout cas plus courant. Ce n’est pas faux, mais étymologiquement, il n’y a pas grande
différence entre les deux mots : en effet, anthrax veut dire charbon en grec.
Notons, au passage, que le mot n’est donc pas dérivé d’un mot grec : c’est le mot grec
lui-même, tel quel. Il est pourtant passé par le latin savant, qui l’a légué au français
médical. Mais aucun suffixe ne vient modifier le mot. Et cette finale en –ax sonne
diablement grecque.
Néanmoins, le mot a eu des dérivés. Le mot signifie donc charbon, et même charbon
ardent . Ce qui explique qu’en ancien français, l’anthracite (là, nous avons affaire à un
vrai dérivé) désigne une pierre précieuse qui brille, autant qu’un charbon ardent. Puis, ce
mot d’anthracite renvoie à une certaine qualité de charbon qui sert à se chauffer, et enfin
à une couleur, très sombre, bien sûr.
Revenons à notre maladie. Pourquoi anthrax ? Parce que c’est un syndrome à pustules
noires – encore une chose qui fait peur, comme si ça évoquait le diable aux noirs
desseins.
ANTICORPS
« Anticor »… C’est le nom d’une toute nouvelle association politique dont le but avoué
est de lutter contre la corruption en politique. Louable idée qu’on doit à trois élus
socialiste qui veulent inviter à les rejoindre les élus qui appartiennent à la droite comme à
la gauche dans un même souci d’honnêteté et de moralisation de la vie publique. Anticor
comme anti corruption donc. Mais si ce nom est bien choisi, c’est qu’il fait calembour
avec anticorps, un mot qui appartient au vocabulaire de la biologie et de la médecine. Ce
mot qui date de 1900 désigne une substance qui sert à protéger un organisme, en luttant
contre des effets toxiques éventuels, en luttant contre des organismes qui attaquent.
Comment comprendre le mot ? L’anticorps lutte contre des corps préjudiciables.
Et bien souvent tout le vocabulaire médical recourt à des images qui sont celles de la lutte
et de la guerre. On trouve ainsi à plusieurs reprises le préfixe anti : on a aussi l’antigène –
même si le mot est plus spécialisé et qu’il n’apparaît quasiment jamais dans le
vocabulaire courant. Et anti, dans cet emploi signifie clairement « qui lutte contre… » un
peu comme dans antichar ou antiaérien. On est dans le langage de l’armée et dans un sens
multiple : à la fois neutraliser ce qui existe et qui attaque, le détruire ou, plus en amont,
l’empêcher de se construire et donc d’attaquer.
Parallèlement à anticorps, on peut se souvenir du contre poison. Un mot beaucoup moins
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savant, mais qui lui se situe clairement dans l’après-coup : le contre poison étant censé
annuler ou effacer les effets d’un poison absorbé précédemment.
Il y a d’autres mots dont l’origine, plus ou moins transparente, font appel à ce genre
d’images. La prophylaxie par exemple. Puisqu’en grec, phulax signifie garde, celui qui
veille sur la sécurité (d’un lieu ou d’une personne) et qui empêche qu’on y pénètre ou
qu’on l’attaque. Les mesures prophylactiques sont donc celles qui vont sauvegarder la
santé de quelqu’un. Mais là on est toujours dans une idée de prévention : non pas
combattre le mal, mais empêcher qu’il arrive.
ANTIQUAIRES, BROCANTEURS
Par: (pas credité)
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APARTHEID
Par: (pas credité)
Les élections en Afrique du Sud ont bien montré que, si tous les problèmes raciaux n'ont
pas disparu dans cet état, une page est radicalement tournée : on n'est plus dans l'" après-
apartheid ", on est dans l'" après-Mandela ". Il n'empêche : on peut quand même revenir
sur ce mot terrible qui a marqué l'Afrique du Sud des années durant.
Il s'agit d'un mot " afrikaans ", c'est-à-dire qu'il appartient à la langue néerlandaise parlée
en Afrique du Sud. Sa traduction officielle en français est développement séparé, ce qui
ne signifie pas grand-chose si l'on ne précise pas qu'il s'agit du développement séparé de
différents groupes humains d'origines ethniques différentes : les blancs et les noirs,
pourrait-on dire, pour faire court - mais c'est compter sans l'affreuse manie classificatrice
des bureaucrates d'Afrique du Sud qui recensaient tout un éventail de statuts liés à
l'origine des gens (métis, Indiens, etc.). Tous les racismes y trouvaient leur compte,
sachant bien sûr que rien n'était censé être supérieur au blanc protestant. L'apartheid était
donc la séparation des " races " dans la vie sociale.
Le mot est bien senti comme étranger en français. Comment le prononcer ? On aurait
tendance à le prononcer " à l'anglaise " alors qu'en fait, on ferait mieux de le prononcer
tel qu'il s'écrit.
Bizarrement la transparence linguistique qu'il évoque n'est pas illusoire : il vient bien du
français à part auquel on a rajouté un suffixe qui sert à former des noms abstraits. C'est, si
l'on veut " l'apartitude ". Comme presque tous les mots qui appartiennent au vocabulaire
des pratiques racistes, le mot, pris dans son sens propre, ne pointe pas de supériorité d'un
groupe humain sur un autre : il se présente comme neutre. Ce n'est que replacé dans les
circonstances historiques qui l'ont vu se développer qu'on comprend qu'il recouvre une
oppression particulièrement odieuse.
" Apartheid " est-il synonyme de " ségrégation " ? Oui et non. " Apartheid " est d'abord
réservé au contexte sud-africain alors que " ségrégation " est plus général. D'autre part, l'"
apartheid " était officiellement un mode de vie politique, alors que la " ségrégation " est
plus un état de fait.
Ce mot à l'origine désigne la séparation du troupeau de certains animaux (même famille
que " grégaire "). Son sens politique est né avec le colonialisme et s'est d'abord appliqué
aux colonisateurs : eux-mêmes se séparaient du reste de la population et isolaient leur
habitat et leur vie. Puis le mot s'est appliqué, non plus à ceux qui s'isolaient
volontairement, mais à ceux qu'on écartait, qu'on reléguait. (Cf notamment le sud des
Etats-Unis).
Et, à cause probablement de la similitude des suffixes, on a opposé la " ségrégation " à
son symétrique opposé, l'" intégration ".
Un troisième mot exprime également un comportement dicté par le préjugé racial : la "
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discrimination ".
APERITIF
Par: (pas credité)
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On mange aussi des chips. Anglicisme. D'abord chip = copeau puis
copeau de pommes de terre : très fines rondelles de pommes de
terre. D'abord pomme chip (début du siècle vers 1910) cf pomme
vapeur puis au pluriel et tout seul : des chips.
APOCALYPSE
Par: (pas credité)
C’est un mot qu’on a beaucoup entendu, ces derniers jours, à propos de la vague
d’attentats terribles aux Etats-Unis. Vision d’ « apocalypse », spectacle « apocalyptique »
– c’est-à-dire dans le langage courant, qui passe la mesure, qu’on a du mal à décrire, et
surtout qui est extraordinaire, au sens étymologique du mot.
Non seulement ça passe l’ordinaire, mais on a même l’impression que ça passe l’humain,
qu’on entre dans un autre ordre. Les images de terreur, mais aussi de cataclysme et de fin
du monde : l’explosion finale, la catastrophe qui met un point final à l’histoire de
l’humanité. Alors, bien sûr, l’expression est souvent utilisée un peu abusivement, comme
un intensif facile. Pourtant parfois, on se dit que c’est l’image qui convient …
La plus connue évidemment est celle de Saint Jean, qui présente sept visions : les 7
étoiles et les 7 chandeliers ; les 7 sceaux du livre avec les 7 trompettes ; la femme, le
dragon et la bête ; les 7 coupes de la colère et la grande Babylone ; le grand banquet de
Dieu ; Satan lié pour mille ans et la terre nouvelle ; la Sainte Jérusalem.
Visions extraordinaires qui préfigurent la fin des temps, donc quelque chose qui échappe
à l’entendement humain et aux catégories de notre intelligence, puisqu’on sera au-delà de
l’espace et du temps.
APPEL
Par: (pas credité)
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l'UDF et le RPR. Ils parlent d'"appel" comme si cette demande se
situait au-dessus de la communication politique ordinaire,
court-circuitait les habitudes et créait un genre d'état de choc.
ARBITRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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s'il mène une bonne vie et ceux qui pensent que tout est joué en
dehors de sa volonté.
Y.AMAR : L'adjectif "arbitraire" n'a que peu à voir avec tous ces
sens : c'est ça l'étonnant. L'attitude arbitraire est le contraire
de l'attitude impartiale, c'est celle de quelqu'un qui a du
pouvoir et qui l'exerce sans demander l'avis de personne, sans
raison, sans argument. Le pouvoir arbitraire, c'est un pouvoir
absolu qui agit selon ses caprices. C'était Parler au Quotidien,
une émission proposée par le Centre National de Documentation
Pédagogique ...
ARBITRE
Par: (pas credité)
L'un des mots du vocabulaire politique qu'on a beaucoup entendu cette semaine, c'est
arbitre et son cousin arbitrage, puisque c'est en arbitre que veut se poser le Front national,
pour peser sur l'élection d'un certain nombre de présidents de région. Que veulent dire
dans ce cas-là les mots arbitre et arbitrer ? Décider, tout simplement, ou en tout cas, avoir
une influence suffisante pour imposer ses conditions, et déterminer le résultat final de
certaines élections.
Cet emploi du mot dérive en fait de certains emplois du mot arbitrage, ou du verbe
arbitrer. Il s'agit de trancher un différend, de décider, là où deux adversaires s'opposent,
sans que l'un l'emporte réellement sur l'autre par la force où le droit. Mais on peut quand
même parler d'une dérive de sens, dans la mesure où l'arbitrage, au départ, implique un
jugement dépassionné, et impartial, par quelqu'un qui se situe au-dessus de la mêlée :
l'arbitre, c'est Salomon, le vrai juge. Sans aller si loin, on parle par exemple de l'arbitrage
de la Cour de justice européenne, pour régler des conflits économiques entre certains
pays, de l'arbitrage de la Cour de justice européenne, pour régler des conflits
économiques entre certains pays, de l'arbitrage d'un juge, dans une querelle de
voisinage… Alors que dans le cas qui nous occupe, le Front national " arbitrera " en
fonction de ses intérêts propres.
Le mot arbitre a, de toute façon, en ancien français le premier sens d'autorité qui fait
respecter sa décision et observer la loi. De là dérive directement le sens sportif, apparu à
l'extrême fin du XIXème : arbitrer : veiller à ce qu'une partie, un match se déroule
conformément aux règlements acceptés au départ par les deux équipes. L'arbitre, si ses
décisions sont sans appel, se doit d'être absolument impartial, sans parti pris et sans
intérêt dans l'affaire : on est presque à l'inverse de l'usage électoral qu'on constate
aujourd'hui.
Mais de toute façon, ce mot est bien étonnant : d'un côté, il a donné naissance à
l'expression libre-arbitre : faculté de se déterminer librement, sans contrainte, ni influence
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extérieure. De l'autre, il a donné arbitraire, dont la signification a fini (à partir du début du
XVIIème siècle) par devenir contraire à son origine. Une décision arbitraire est une
décision que rien ne justifie, qui découle du caprice plus que de la raison. L'adjectif
s'applique en particulier à un pouvoir qui s'exerce pour son seul plaisir, et l'arbitraire (le
mot s'emploie souvent sous une forme substantivée) est le fait du despote, le "fait du
prince", comme on dit. Alors qu'au départ, un arbitrage est censé dire le droit et rendre
justice, l'arbitraire est devenu synonyme d'injuste.
ARBITRE
Par: (pas credité)
1) L'arbitre est, au départ, une notion juridique. C'est une personne qui est choisie par un
tribunal ou par les intéressés eux-mêmes pour trancher un différend : "on s'en rapporte à
un arbitre". C'est donc une personne qui a pour trait dominant de prendre une décision
dans un litige qui reçoit le pouvoir de choisir entre des avis divergents lequel doit être
suivi. Elle a aussi généralement pour caractéristique d'être neutre et désintéressée par
rapport au litige. Cf le rôle du roi dans la tradition médiévale et, par extension, la notion
d'"Etat arbitre" (entre les particuliers), dans la théorie politique libérale : l'Etat est conçu
comme une institution neutre, au-dessus des intérêts privés, il est censé réguler seulement
les rapports entre individus. Ceci est conforme à l'étymologie latine "arbitror" : je décide.
La notion d'"arbitre" s'est étendue à des domaines variés. On a pu parler ainsi au siècle
dernier de "l'arbitre des élégances" pour désigner en matière de goût celui qui fait
autorité, dont on suit les avis.
3) Par extension et abus, le mot arbitre en est aussi venu à désigner, en raison du pouvoir
qui est conféré à cette fonction, une personne qui jouit d'un pouvoir sans limite : on dira
de quelqu'un qui dispose du droit de vie et de mort qu'il est "arbitre" de la vie et de la
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mort. Cette expression peut être rapprochée d'une acception philosophique et
métaphysique du mot (étymologie légèrement différente : "arbitrer" alors que l'arbitre au
sens précédent vient de "arbitrium") : l'arbitre désigne alors la faculté de se déterminer
librement dans son action ou si l'on préfère la volonté.
Dans ce sens, l'expression "libre arbitre" a connu une grande faveur dans la tradition
chrétienne médiévale et classique : le libre arbitre est en effet un sujet de débat qui
engage en particulier la responsabilité du pécheur dans ses actes. Au XVIème siècle, à
l'époque de la Réforme, il y eut une vive controverse sur le "libre arbitre" (Erasme) et le
"serf arbitre" (Luther) entre ceux qui pensent que l'homme est libre et ceux qui pensent
qu'il est prédestiné.
Quoiqu'il en soit, la notion d'"arbitre" comprise comme action autonome de la volonté qui
implique l'idée de liberté, implique aussi l'idée de "pouvoir faire" sans être déterminé par
des causes, d'où l'idée de "faire sans motif" : exemple la notion d'acte gratuit (sans cause)
vulgarisé par Gide (Lafcadio dans les Caves du Vatican), qui peut être considérée comme
le degré ultime du libre arbitre (le plus haut et le plus bas).
On voit alors comment on peut passer d'"arbitre" à "arbitraire" (et "arbitrairement") : quoi
de plus "arbitraire" qu'un acte gratuit ? Trois acceptions se recoupent dans ce mot :
- pouvoir de décider
- décision sans motif
- par extension, pouvoir despotique, c'est-à-dire où la volonté sans limite aboutit à la
tyrannie.
ARC
Par: (pas credité)
Il ne s'agit, en fait, que d'une alliance mais ce mot ne pouvait être retenu,
puisque trop marqué par l'usage récent qu'en fait la politique.
Alors, va pour l'"arc", dont les deux extrémités peuvent toucher des
sensibilités bien différentes et bien éloignées : c'est cette image qui
semble primer, d'autant que la forme courbe de l'arc rappelle peut-être
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celle de l'hémicycle de l'Assemblée Nationale.
Les autres sens du mot sont anciens, toujours par analogie de forme et il
est très employé en architecture, un arc est d'abord une voûte (arc en
plein cintre, par exemple), avant de désigner un monument à lui tout seul : on pense
évidemment aux arcs de triomphe de toute sorte.
ARC-EN-CIEL
Par: (pas credité)
Le roi des Belges a nommé un Premier ministre qui devrait réunir un nouveau
gouvernement qu'on appelle déjà un gouvernement arc-en ciel. Il comportera en effet des
Verts, des libéraux, dont la couleur est le bleu, et des socialistes dont la couleur varie
entre le rose et le rouge. On a donc cette idée de couleurs qui coexistent, et sont
juxtaposées, comme dans un arc-en-ciel. Et trois couleurs au moins sont nécessaires pour
que l'expression puisse fonctionner, même si l'arc-en-ciel en comprend traditionnellement
sept. Mais deux couleurs seraient insuffisantes : tout juste un domino.
C'est également en Afrique du Sud qu'on a également utilisé cette image récemment, à
propos de la culture post-apartheid ; on se côtoie, on s'accepte, l'image évoque la
multiplicité des cultures, des traditions et des couleurs. C'est l'opposé du melting pot,
cette expression américaine employée telle quelle en français, qui signifie littéralement le
creuset où se fondent les métaux, et qui évoque l'Américain type, unique, quelle que soit
son immigration d'origine.
Mais, cette métaphore n'a plus très bonne presse aux Etats-Unis. On lui préfère par
exemple celle du saladier (salade bowl) où sont censées cohabiter toutes sortes de
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légumes de formes et couleurs différentes.
Mais l'arc-en-ciel a sur cette comparaison l'avantage d'une symbolique ancienne qui
évoque la paix puisque ce phénomène d'optique a toujours représenté l'alliance du Ciel et
de la Terre, notamment dans la mythologie grecque, où l'arc-en-ciel passe pour l'écharpe
d'Iris, la messagère des Dieux.
Je me suis laissé dire que des Russes allaient effectuer le premier (oui, le premier !) tour
motorisé de l’Arctique. Quelle n’a pas été ma surprise et mon admiration ! De là le désir
légitime d’en savoir un peu plus sur l’Arctique, région délaissée parce que réfrigérante.
Le continent arctique (oh, c’est suffisamment grand pour qu’on parle de continent) est
donc une région située à l’intérieur du cercle polaire nord.
L’Arctique et l’Antarctique sont donc des noms qui s’appliquent à des continents, mais
aussi des océans (océan glacial arctique… Brrrr !). Alors, voyons rapidement d’où
viennent les autres noms des océans principaux, le Pacifique et l’Atlantique (l’Indien,
c’est trop facile).
L’Atlantique tire son nom d’Atlas, géant mythologique, censé supporter les colonnes qui
maintenaient le ciel au-dessus de la terre. Et certaines de ces colonnes, les colonnes
d’Hercule, passaient pour être situées juste au-delà du détroit de Gibraltar. La mer, qui
s’étendait au-delà, a donc pris le nom d’Atlas, dont on disait aussi qu’il régnait sur une île
mystérieuse et invisible, l’Atlantide…
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donna au navigateur une idée flatteuse et fausse de cet océan apparemment bienveillant.
ARDOISE
Par: (pas credité)
L' "ardoise" est au départ une pierre fragile, mais imperméable qui se débite aisément en
plaques, et dont on se sert communément pour couvrir les maisons. Les toits d'"ardoise"
sont donc une réalité courante du paysage français. Mais ce n'est pas parce que les
toitures ont été endommagées qu'on parle d' "ardoise" après la tempête.
L' "ardoise" a d'autres propriétés : instrument typique de l'écolier, elle a été très utilisée
dans les écoles (elle évoque l'école à l'ancienne...) pour que les élèves puissent inscrire
leur réponse dessus à la craie, et les effacer ensuite ; c'était donc une sorte de tableau noir
portatif.
Mais on utilisait aussi les "ardoises" dans les bistrots pour noter les consommations à
crédit des clients, avoir une trace de ce qu'ils devaient, et tout effacer lorsqu'ils réglaient
leur dette. "Ardoise" est donc devenu synonyme de crédit ouvert chez un commerçant :
"j'ai une ardoise chez Camille".
D'où quelques expressions aujourd'hui désuètes : "tenir l'ardoise" = tenir les comptes, et
par extension, être chargé de compter les points au jeu. Et même "faire l'ardoise" : noter
les écarts des coureurs cyclistes.
Mais le mot sert souvent aussi à désigner le total de ce qu'on a à payer = synonyme de la
note de l'addition (ces dernières images viennent aussi du vocabulaire des restaurants,
mais sans idée de crédit). Ainsi, parle-t-on de l' "ardoise" de la tempête : son coût
financier.
ARGENTIER
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Après Bombay, c’est Davos… les forums succèdent aux forums, l’économique au social,
et on voit se réunir, dans cette paisible bourgade suisse (paisible et cossue), un certain
nombre de décideurs économiques et de ministres des Finances des pays les plus riches
de la planète. Les grands argentiers… comme on dit en plaisantant. En plaisantant et
aussi pour reprendre un cliché très utilisé par les médias, toujours friands de ce genre
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d’images…
Pourquoi grand argentier ? Le mot, on s’en serait douté, dérive d’argent. Il existe depuis
longtemps et au XIIème siècle, il désigne en ancien français l’ancêtre du banquier. Celui
qui change de l’argent, qui fait office de trésorier, et même qui prête de l’argent. Au
XIVème siècle, il a désigné l’officier payeur, celui qui distribue les salaires, pour le
compte du roi de France, ou d’un puissant seigneur.. Puis bien plus près de nous
(XIXème siècle), le mot a pris un usage satirique pour désigner un homme riche, un
capitaliste (cf. les caricatures des premiers patrons d’industrie de la révolution industrielle
et du début du XXème siècle… l’homme ventripotent, à chaîne de montre en or, chapeau
haut de forme, et plus tard, cigare…). Mais cet usage n’a pas duré. Aujourd’hui, on parle
donc de grand argentier, pour parler du ministre des Finances comme si on singeait une
fonction officielle d’une monarchie passée. Et le modèle linguistique est clair dans nos
têtes : on se souvient du grand moutardier, du premier moutardier du Pape, cité pour la
première fois au XVIIIème siècle, et dont on a cru qu’il correspondait à une charge
authentique créée par Jean XXII au XVème siècle. Sans grand moutardier, il n’y aurait
peut-être pas de grand argentier.
Y a t-il d’autres sobriquets pour désigner un ministre des Finances ? On parle parfois,
toujours sur le même modèle, de grand financier… Mais sans ça, pas grand chose.
Mentionnons quand même Bercy, métonymie récente qui renvoie au ministère des
Finances français. Récente, parce que le ministère est localisé à Paris, dans ce quartier,
depuis 1989. Si « Bercy » a succédé à la « rue de Rivoli », on peut noter que l’expression
est vague, et qu’elle renvoie la plupart du temps à un ensemble d’énarques anonymes qui
constitue l’entourage du ministre, plutôt qu’à la personne du ministre de l’Economie lui-
même.
ARGUS
Par: (pas credité)
On fête les 70 ans de l’Argus de l’automobile. Un bail ! Ce pourrait être mon père.
L’Argus de l’automobile est un journal qui répertorie (presque) tous les modèles de
voitures disponibles sur le marché français, et donne à chacun un prix moyen, une
cotation estimée. Ainsi l’Argus est un observateur du marché. Mais attention, vous ne
trouverez pas de cotation pour une Peugeot 1961 : c’est trop vieux et la voiture n’est plus
cotée à l’Argus. Cette dernière expression sert plaisamment pour désigner quelque chose
de très vieux, voire quelqu’un (en général plaisanterie machiste pour parler d’une
femme), et pourtant une rose d’automne est plus qu’une autre exquise.
Pourquoi ce nom d’Argus était-il lié de si près à l’oeil ? Une fois encore, c’est un
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vaudeville olympien qui va nous fournir la clé.
Argus est un personnage qui a laissé des images de lui assez contrastées. Parfois on le
représente avec un oeil unique, mais extrêmement efficace ; parfois il en a quatre (deux
devant, deux derrière), parfois, répartis sur tout son corps. En tout cas, il est d’une force
prodigieuse, et ne rechigne pas à faire la police, il délivre l’Arcadie d’un taureau
monstrueux, puis d’un méchant satyre qui ravageait les troupeaux, enfin d’Echidné, fille
monstrueuse de Tartare et de Gaïa.
Mais, surtout, il fut geôlier d’Io, sa lointaine parente (notez comme c’est difficile à
prononcer).
Io est une jeunesse dont Zeus s’amourache. Mais, le hasard n’est rien auprès du Destin ;
Zeus a beau être Zeus, il y est soumis. Et un rêve prémonitoire avait averti Io que Zeus
devait l’aimer, et qu’à cette fin, elle devait se rendre au bord du lac de Lerne pour l’y
rencontrer. Les devins, interrogés, lui enjoignent d’obéir, sinon, toute la famille sera
foudroyée. Bon, bon...
Mais Héra, femme jalouse, veille et Zeus transforme Io en génisse pour la protéger. Héra
soupçonne la vérité et ordonne que la génisse soit surveillée jour et nuit par Argus, qui ne
dormira jamais que de la moitié de ses yeux. La guerre continue et Zeus dépêche Hermès
qui tue Argus en lui jouant une musique mortelle.
Et Io ? Elle fuit, laissant partout des traces de son passage et de son nom : elle longe les
côtes du golfe qui, depuis, s’appelle Golfe Ionien, puis passe en Asie Mineure par un
détroit que depuis, on appelle le Bosphore : passage de la vache.
ARMADA
Par: (pas credité)
1) Terme issu de l'espagnol. Désigne à l'origine une flotte armée. Le mot s'est répandu au
XVIème siècle lorsque le roi d'Espagne Philippe II organisa une expédition maritime
composée d'une flotte géante destinée à envahir l'Angleterre (1588). Elle fut dénommée
"l'invincible armada". Elle fut détruite par la tempête, et les derniers vaisseaux furent
anéantis par les Anglais.
3) Par extension "armada" désigne toute flotte nombreuse, mais aussi, plus largement, et
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plus récemment toute quantité élevée : une "armada de bagages", une "armada de
serviteurs", etc. Souvent avec l'idée d'un assemblage hétéroclite, un peu désordonné, où la
quantité n'est synonyme d'efficacité et de bonne organisation, sans doute par référence à
l'échec de l'"armada" historique.
D'où le fait que le mot soit souvent employé avec une nuance de moquerie, de dérision.
ARMES A FEU
Y.AMAR : Mon amie Suzy est ingénue. Elle arrive derrière moi, met
ses mains sur mes yeux et crie "Boum c'est moi !" Elle arrive
"comme un boulet de canon". C'est-à-dire qu'elle est très
impétueuse, Suzy !
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E.LATTANZIO : ... Et par RADIO FRANCE INTERNATIONALE.
ARMISTICE
Par: Yvan Amar
« Armistice »... le mot n’est pas si facile à prononcer. Construit sur le modèle de solstice,
son étymologie est un peu étrange : il est formé à partir de deux racines latines, arma, les
armes, et stare qui signifie, entre autres choses : se tenir, se tenir debout, et qu’il faut
comprendre ici plutôt dans le sens se tenir immobile, être à l’arrêt… C’est donc l’arrêt
des armes. Est-ce la paix ? Presque… pas encore. Cela veut dire qu’on ne se tue plus, ce
qui est déjà beaucoup, que l’on arrête les hostilités, et qu’on va ensuite négocier la paix,
signer les traités, etc. Est-ce un synonyme de trêve ? Non, car la trêve est souvent
comprise comme un moment sans guerre… au milieu d’une guerre. La trêve est
provisoire ; l’armistice est définitif.
Et le « cessez-le-feu » alors ? Le sens est proche ; mais les emplois sont différents :
armistice s’emploie essentiellement pour celui du 11 novembre. Cessez-le-feu est bien
plus fréquent dans le vocabulaire journalistique et militaire d’aujourd’hui. Mais, il a un
côté moins solennel, moins officiel aussi qu’armistice. Le mot est aussi très récent : il
n’apparaît pas avant 1945, et c’est la traduction littérale d’une expression anglaise : cease
fire. Au départ, il ne désigne pas un accord entre deux parties, mais un ordre donné par un
commandant à ses hommes. Donc une décision unilatérale… Sait-on jamais si la
réciproque va se déclencher, et au même moment, et en face… ? Mais de nos jours,
l’expression renvoie quand même à l’idée d’un accord…
Quant à « capitulation », il indique une relation encore différente entre les deux parties…
L’une reconnaît explicitement qu’elle a perdu la partie… Ça n’a d’ailleurs absolument
pas été toujours le cas. Au Moyen-âge, le mot capitulation était synonyme de convention,
pacte. Puis, il a signifié « convention qui règle les conventions auxquelles se rend une
place » On a encore l’idée d’une négociation, d’une reconnaissance de la défaite à
certaines conditions.
D’autre part, cette capitulation ne symbolise pas la fin d’une guerre, mais plutôt la fin
d’une étape dans la guerre… c’est une bataille perdue, l’organisation de ce qu’on
appellerait aujourd’hui une reddition… Alors que depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale, le mot capitulation est presque toujours assimilé à l’idée de capitulation sans
condition… sens qu’on donne à celle du 8 mai 1945, lorsque les Nazis ont reconnu la
victoire totale des alliés.
ASCENSION
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Par: (pas credité)
L'Ascension ! Chic, on chôme, pour se souvenir qui Jésus-Christ, apparu après sa mort à
ses disciples et aux Apôtres, s'était élevé dans le ciel. De ce dernier miracle, il est peu fait
mention dans les Evangiles (sinon celui de Luc), mais les Actes des Apôtres l'attestent ;
c'est assez pour chômer, chômons donc ! Cet exploit a de toute façon le mérite de nous
familiariser avec le sens du mot ascension : élévation verticale, de la Terre vers le Ciel.
Soyons pour finir plus urbains : loin du miracle ou du jarret d'acier, prenons pour un fois
l'ascenseur. Mot et choses sont français, dus au cerveau inventif d'Edoux, qui en 1867,
met au point un appareil d'élévation pour personnes, avec autant d'à-propos comme
inventeur qui comme linguiste. Succès pour l'engin et le vocable, sans concurrence
menaçante, malgré l'anglais lift qui tenta sa chance et nous laissa liftier (garçon
d'ascenseur).
L'ascenseur est aujourd'hui si ancré dans notre monde qu'il a généré. La pittoresque
expression de renvoyer l'ascenseur : rendre service, une fois venu le succès, à ceux qui
vous ont aidé avant que le succès soit au rendez-vous ; et plus généralement rendre un
service pour une autre. L'expression devrait très positive, illustrant des valeurs de
solidarité et de fidélité ; pourtant elle est souvent péjorative, à propos de ceux qui utilisent
leur pouvoir pour favoriser leurs amis - à propos par exemple, dénominations qui ne sont
pas dictées par la compétence, mais des dettes de reconnaissance. Mais l'expression se
comprend d'autant mieux si on se rappelle les ascenseurs de jadis, qui ne servaient qu'à
monter, et qu'il fallait, une fois en haut faire redescendre à vide, pour que le prochain
utilisateur le trouve tout prêt.
ATELIER
Par: (pas credité)
Une exposition intitulée « Ateliers » s’ouvre au musée de la vie romantique à Paris. Et, en
effet, ce mot d’ « atelier » est à sa place dans un musée. Il évoque le lieu de travail d’un
artiste, notamment d’un peintre ou d’un sculpteur. Mais, ce n’est pas le premier sens du
mot : revenons donc en arrière.
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Le mot – et il est impossible de le deviner – dérive d’attelle, et d’estelle, mots qui
signifient copeau, petit morceau de bois, en ancien français. C’est d’ailleurs cette attelle
qui va donner l’attelle qu’on connaît encore aujourd’hui en médecine, cette languette de
bois qui permet de maintenir droit provisoirement un membre cassé, dans la position la
plus propre à sa guérison (pendant que l’os se ressoude par exemple).
Petit retour en arrière : vers le XVIe siècle, le mot va s’employer à propos d’artisanat,
d’art, comme on dirait aujourd’hui. En tout cas, Rey le relève sous la plume de Bernard
Palissy, dont on sait qu’il brûlait ses meubles pour chauffer ses fours. Les attelles étaient
donc de luxe. Et dans le langage des artistes, et aussi de la critique d’art, l’ « atelier »
finira par renvoyer non seulement au lieu de travail du peintre, mais à un lieu collectif,
sous l’autorité d’un maître, et par extension, presque à une école. En particulier,
lorsqu’on parle de la peinture italienne (ou flamande) : Telle œuvre est de l’ « atelier » de
Michel-Ange, c’est-à-dire faite par l’un, ou plusieurs de ses élèves, avec éventuellement
des conseils, voire un coup de main du maître. C’est cette connotation collective
d’entraide et de convivialité qui permet de comprendre les emplois qu’on peut en faire
aujourd’hui, dans le milieu scolaire, en particulier : un « atelier » est un genre de séance
de travaux pratiques, en petits groupes. De même que dans un colloque, après les grand
messes des séances plénières, on peut se retrouver en « ateliers », pour plancher sur tel ou
tel sujet précis.
ATELIER
Par: (pas credité)
Conférence au théâtre de l’Atelier. Voilà qui remet à l’honneur ce théâtre et son nom -
atelier- aux significations multiples. D’abord, pourquoi ce nom pour un théâtre ? Il
évoque un travail collectif et modeste, de comédiens qui se considèrent un peu comme
des élèves, en tout cas comme des artistes qui travaillent, tentent, apprennent sans cesse.
Depuis longtemps, le mot a eu un sens particulier dans le domaine artistique : l’atelier
d’un peintre représente l’endroit où il travaille : grande pièce, très claire, mais toujours
exposée au Nord. Mais il représente également l’ensemble des élèves du peintre. Il fait
alors référence à une époque, la Renaissance, et à un travail collectif et anonyme de la
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part des élèves qui travaillent sous la direction du Maître.
Le mot est, par ailleurs, assez en usage. Souvenez-vous de ces vacances de rêve que nous
passâmes l’an dernier au Club Chèvre et Nature : on ne voyait pas les enfants de la
journée : le matin, Emilie allait à l’atelier de percussions incas, l’après-midi, avec
Quentin, c’était ravaudage de voiles et légendes locales. Quant à Josette et moi (plus
Anne-Ingrid qui nous collait), on s’était trouvé des penchants communs à l’atelier «
Retrouvons en nous l’art primitif ».
Atelier est donc un mot très actuel, et à la mode, qui implique : une activité en petits
groupes, qui ressemble un peu à des « travaux dirigés » (il y a la plupart du temps un
meneur de jeu, un animateur) ; ça s’emploie (dans ce sens) plutôt hors contexte scolaire.
Le sens de travail en petits groupes semble d’ailleurs l’emporter : on trouve le mot lié à
des activités (parfois) plus sérieuses, en tout cas plus intellectuelles, et moins liées aux
loisirs. Dans un congrès, ou un colloque, les ateliers rivalisent avec les commissions,
sous-commissions, tables rondes...
L’étymologie est inattendue : le mot vient d’attelle = petit morceau de bois, puis par
dérivation, tas de bois. Son premier sens a donc été celui de menuiserie, puis il a
représenté tout lieu de travail artisanal.
Le mot a, aujourd’hui, gardé ce sens local, lié à l’artisanat : lieu où un artisan fabrique,
répare, transforme. Ce peut être aussi une arrière-boutique, communiquant avec un lieu
de vente qui a pignon sur rue. Mais le mot est lié au travail manuel : atelier de couture, de
confection ; atelier de garage (chef de garage, etc.).
Sans quitter la production et le monde ouvrier, on utilise ce mot dans les usines. Mais il
s’agit là des secteurs, des étapes de la production, et ça évoque alors des salles immenses
où l’on effectue tel ou tel type de travail. Chez Renault, atelier de peinture, atelier tôlerie,
etc.
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Au premier sens, il s'agit de l'enveloppe gazeuse qui entoure le
globe terrestre. C'est de la vapeur humide. L'atmosphère est donc
associée à ce qu'on respire - ce qui explique l'évolution
sémantique : impression diffuse qui émane d'une situation : c'est
l'inexplicable; c'est l'air qu'on y respire.
Climat a bien des points communs avec atmosphère, bien que le mot
au figuré soit moins employé.
ATOME
Par: (pas credité)
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"Avoir des atomes crochus" : façon familière et pittoresque d'évoquer des
sympathies avec d'autres personnes, et souvent liées à des ressemblances,
à une certaine identité. C'est un peu la version prosaïque des fameuses
"affinités électives". (L'expression est la tradition française de l'œuvre
célèbre de Goethe : "affinités profondes entre deux personnes qui font
qu'elles se choisissent mutuellement". Notons que cette expression, Goethe
l'avait tirée du Dictionnaire de Physique de Gehler et qu'à l'origine, elle
renvoie à un phénomène chimique d'échange moléculaire).
Les physiciens de notre temps ont une définition un peu plus précise de
l'atome. Au sens moderne, l'atome, c'est une partie insécable (qu'on ne
peut pas couper) de la molécule.
Notons que l'on parle couramment "du nucléaire" ("le nucléaire, non
merci" : slogan écologiste de ces dernières années), mais jamais de
l'atomique.
Notons enfin d'autres dérivés du mot atome qu'on emploie de plus en plus
fréquemment dans le langage courant :
*atomiser : au sens propre, "réduire un corps en particules extrêmement
fines". Dans un sens plus large, on dira par exemple qu'une "ville
nouvelle est atomisée" : qu'elle se dissémine, qu'elle semble éclatée en
éléments hétérogènes.
*atomiseur : au sens de pulvérisateur (cf. parfum, flacon ou atomiseur).
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ATTENTAT
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Dieu sait qu’on l’entend ce nom ! Hélas, il est lié à une actualité presque quotidienne…
Et on sait bien ce qu’il veut dire. C’est une agression criminelle dirigée contre une ou
plusieurs personnes, ou contre un lieu. Mais, la particularité du mot tient à ce qu’il n’est
pas employé dans le cas de violences privées. Si un homme veut tuer sa belle-mère qu’il
ne supporte pas, ou sa femme pour croquer l’héritage, ou le mari de sa belle pour couler
des jours heureux, on parlera de crimes, mais pas d’attentats.
Les attentats sont des violences publiques. Parfois ciblées : attentat contre un chef
d’Etat… Les meurtres de Kennedy, de Sadate, d’Henri IV, si on veut prendre des
exemples historiques, plus ou moins lointains, sont des attentats. Parfois, la violence est
aveugle, et l’attentat frappe au hasard : c’est le propre des attentats terroristes.
Et on précise souvent le moyen par lequel l’attentat est perpétré : attentat à la bombe, au
plastique, à la voiture piégée…
Lorsqu’on parle d’attentats suicide, on comprend aussi facilement de quoi il est question :
le terroriste perd délibérément la vie dans l’attentat, se tue en tuant les autres. On
l’appelle parfois « kamikaze », et ce mot désigne davantage le tueur que l’acte lui-même.
C’est un mot japonais qu’on a d’abord utilisé, en dehors de la langue japonaise, durant la
Seconde Guerre mondiale : les « avions kamikazes » étaient ces petits avions bourrés
d’explosifs, qui venaient s’écraser sur les porte-avions américains pour les couler.
Le mot japonais signifie « les vents supérieurs » ou « les vents du Seigneur » et font
référence à un épisode ancien de l’histoire japonaise : à la fin du XIIIème siècle, deux
typhons ont successivement détruit les flottes mongoles qui venaient envahir le Japon. Et
ils ont été nommés comme s’ils étaient des éléments envoyés par la Providence pour
sauver la nation japonaise. On se rend compte du glissement sémantique qui a fait utiliser
ce mot pour désigner les « avions-suicide »… Mais il s’agissait aussi de motiver les
pilotes… en les comparant à des instruments providentiels.
Si l’on revient aux mots du terrorisme contemporain, on parle aussi souvent de bombe
humaine, et parfois de human bomb, en anglais, en référence à la menace qui avait pesé
sur une école maternelle de la banlieue parisienne. Le terroriste, lui-même, s’était appelé
HB, Human bomb.
Terminons avec des exemples moins dramatiques : on parle aussi d’attentat à la pudeur,
aux bonnes mœurs. Notons que la construction grammaticale est la même que pour «
attentat à la bombe », mais que la formule précise le domaine de l’outrage, et non pas
l’arme du crime. D’ailleurs, quand il s’agit d’attentat à la pudeur, l’arme du crime est
souvent pudiquement passée sous silence.
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ATTITUDE
Par: (pas credité)
Le mot attitude n'a au départ rien à voir avec tout ça. Emprunté à
l'italien, il entre en français par l'intermédiaire du vocabulaire de la
peinture, vers le XVIIème siècle. L'attitude est la pose d'un personnage dans
un tableau, d'autant plus significative qu'elle est codée, notamment chez
Poussin, l'un des premiers à employer le mot. Une façon de se tenir, une
prosternation, une supplication sont alors des attitudes. Et encore
aujourd'hui, dans le lexique du dessin et de la danse, on appelle attitude
la position du corps. Le mot déborde dans le langage pictural et peut
désigner la façon de se tenir d'un être vivant. Bien entendu, très vite, le
terme se pare d'un manteau psychologique : une attitude désinvolte
tient-elle plutôt à un déhanchement, à un regard, à une intention ? Une
attitude désinvolte, c'est aussi ne pas répondre à un courrier ou afficher
son insouciance. L'attitude est donc un comportement et plus encore une
façon de réagir et une disposition mentale par rapport à quelqu'un : une
attitude indolente, insolente ; untel a changé d'attitude à mon égard… Avec
l'idée qu'il s'agit le plus souvent d'une façon d'être délibérément adoptée :
quelle attitude adopter ? fermer les yeux, réprimer, laisser faire, etc.
On parle ainsi de l'attitude des groupes sociaux, de gouvernements, d'états :
l'attitude d'un pouvoir par rapport à l'intégrisme, des Etats-Unis par
rapport à Israël, etc.
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ATYPIQUE
Par: Yvan Amar
Mot bizarre, qui longtemps a été rare et plutôt scientifique, atypique est devenu en
quelques années l’un des mots les plus à la mode, dans un certain vocabulaire qui veut
faire chic. Les Nuits atypiques de Langon, près de Bordeaux, dans le Sud-Ouest de la
France, l’un des festivals de « musiques du monde » les plus originaux, en témoigne avec
éclat..
Le sens du mot est simple ! atypique signifie original, qui s’écarte de la norme, de la
moyenne. En clair, est atypique, ce qui n’est pas représentatif d’un ensemble, et difficile à
cataloguer. La décomposition du mot est d’ailleurs éclairante : a typique… ce qui n’est
pas typique. Il ne reste plus qu’à expliquer le mot typique et le tour est joué.
Typique est l’adjectif qui correspond à type. Et le mot type a des sens divers, mais il en
est un qu’on peut retenir : tupos en grec désigne le relief qu’on applique à une pièce de
monnaie, à l’aide d’un moule ou d’un système de frappe. Et ce relief est donc toujours le
même pour toutes les pièces frappées du même sceau. Le mot type a donc évolué vers le
sens de « genre » « catégorie ». Ce qui est typique est donc ce qui représente le modèle
d’une série d’identiques… Mais attention, le sens général du mot typique est plus souple
que cela… Si tous les objets en question sont réellement identiques, aucun n’est plus
représentatif que l’autre… En revanche, pour des éléments qui ne sont pas absolument
semblables, mais qui sont des caractéristiques communes, on peut dégager celui qui sera
tout à fait typique, c’est à dire qui représente une sorte de moyenne. Ainsi peut-on parler
de la fermette normande typique, du fonctionnaire typique etc…
On pourrait donc penser que ce mot correspond toujours à ce qui ne se fait pas remarquer,
ce qui ne présente aucune originalité, ce qui est couleur muraille… Et pourtant,
l’évolution du mot suit un cheminement bien différent. On évoque souvent ce qui est
typique de ce qu’on connaît mal, de ce qui est lointain, exotique. . Typique est alors
proche de pittoresque : c’est la couleur locale : le costume typique des bretonnes, c’est la
coiffe., la grande robe noire et les sabots… Le mot typique est parfois presque synonyme
de folklorique. Au point que ce qu’on appelle la musique typique, c’est la musique
d’Amérique Centrale ou d’Amérique du Sud…Attention, il y a un autre adjectif avec
lequel il ne faut pas confondre typique : le fonctionnaire typique, n’est pas le
fonctionnaire typé.
Et cet autre mot a suivi une évolution de sens particulière… Par rapport à ceux qui
habitent en France, par exemple, on parlera d’un méridional typé pour parler de
quelqu’un au teint basané, à la chevelure très noire. Ou bien (même si c’est plus rare…)
de quelqu’un dont l’origine nordique est très typée : cheveux très blonds, yeux très
clairs… Celui qui est typé correspond donc fortement à un genre d’image toute faite de
son origine géographique, mais en s’éloignant d’autant plus d’un modèle central : le
nordique très typé est bien différent du « Français moyen ».
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ATYPIQUE/TYPIQUE
Par: (pas credité)
Les Nuits atypiques de Langon (Gironde) est un festival musical et culturel qui a pris un
nom original et pourtant assez à la mode. Que sont ces nuits atypiques ? Des nuits ou des
soirées qui vont mêler des genres de musiques fort différentes, sans soucis d'unité de
style, de genre ou de géographie. Seule la fantaisie du programmateur est responsable de
ces assemblages.
En ces temps où les festivals se multiplient, il était normal que l'un d'entre eux veuille se
singulariser par son côté unique, original. Et c'est là le sens de cet adjectif : "atypique",
mot assez rare, mais bien en cour et qu'on entend de plus en plus. Ce qui est atypique,
c'est ce qui ne se compare à rien, ne ressemble à rien. Ça a un côté un peu inexplicable et,
en tout cas, ça sort de la norme. C'est, en fait, l'opposé du mot représentatif : l'atypique ne
représente que lui-même et ce n'est en rien le modèle d'un genre. C'est l'exception, le cas
isolé et bizarre, unique, de son espèce.
"Typique" a un usage courant qui est un peu différent : il renvoie à un bon exemple du
comportement de quelqu'un : il te recommande 100 fois d'être ponctuel, et lui arrive avec
1/2 heure de retard. Ca, c'est typique de Ferdinand ! Ou : "c'est typiquement Ferdinand !".
Ca veut dire "c'est tout lui", c'est un comportement qui donne bien une image de lui. La
signification profonde de l'adjectif est : ça peut paraître bizarre mais c'est habituel chez
lui. Un couple essaie vainement d'avoir un enfant pendant 10 ans. En désespoir de cause,
les époux décident d'en adopter un. Trois mois plus tard, Suzanne est enceinte : c'est
typique, c'est à dire : c'est étrange mais, en fait, c'est classique, ça se passe souvent
comme ça.
Attention, le mot "typique" a aussi d'autres emplois, notamment lorsqu'il s'applique à des
phénomènes culturels, dans un vocabulaire touristique : un petit village, une église, une
coutume, une danse folklorique. Il s'agit de ce qui est étrange aux yeux de l'observateur
mais qui correspond bien à la culture qu'il découvre. Y a-t-il une influence du mot
pittoresque (familièrement abrégé en pitto dans les années 70) ? C'est possible, d'autant
que les deux mots se ressemblent un peu : inversion de consonne entre "typique" et
"pitto".
78
AU PIED DE LA LETTRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Pourquoi au pied de la lettre ? Parce que c’est une expression toute faite, figée, qui
signifie, littéralement, sans tenir compte du sens figuré. Si, par exemple, vous étrennez un
bureau tout neuf, et que vous vous frottiez contre des murs fraîchement repeints, qui
laissent quelques traces sur votre veste… vous pourrez dire… j’ai essuyé les plâtres, et je
prends l’expression au pied de la lettre… puisque essuyer les plâtres signifie supporter les
petits désagréments d’une situation toute neuve, et donc qui n’est pas encore vraiment
rôdée… En effet, à la fin d’un chantier, les plâtres doivent bien sécher, pour que les
surfaces soient réellement fixées.
Mais avec le mot lettre, on a de nombreuses expressions comme, par exemple, avant la
lettre…. C’est-à-dire par anticipation, avant que telle ou telle chose soit réellement
ancrée… Le Greco… peintre cubiste avant la lettre… c’est-à-dire avec une logique qui, à
cette époque ne se nommait pas, ne correspondait pas à une école clairement théorisée…
AUDIT
79
Par: (pas credité)
Un audit est donc un examen, un genre d’inspection, suivi d’un diagnostic sur les causes
de ce qui ne marche pas bien, et de conseils sur la façon de remédier au mal, quand mal il
y a. Mais la plupart du temps, quand on commande un audit, c’est que l’on subodore que
tout ne se passe pas parfaitement. C’est déjà presque mauvais signe. Et lorsqu’on parle
d’audit, bien souvent, même si on veut guérir une situation, il y a comme une intention de
sanctionner. On a comme l’impression que tout ça n’est pas clair, qu’on va découvrir du
pas joli joli, qu’on va mettre au clair ce qui veut se cacher…
Le mot est assez étonnant, et d’ailleurs il surprend. D’abord par sa prononciation, « audite
», avec un « t » final qui se fait entendre. Ce n’est pas dans la tradition de la langue
française. Alors comment l’expliquer ? C’est que le mot est un anglicisme. Et en anglais,
on prononce les consonnes finales : il n’y en a pas de muettes. Mais les choses sont plus
compliquées car audit n’est pas un simple anglicisme, ou tout au moins pas un anglicisme
simple. Il vient du latin et on ne sait pas exactement quand on l’entend si cette
prononciation doit plus à l’anglais (et le mot ne sonne nullement anglais) ou au latin.
Le mot est entendu en français depuis une trentaine d’années, mais il s’est beaucoup
répandu récemment.
Son domaine d’emploi est d’ailleurs en extension. Il est, au départ, presque uniquement
financier (c’est d’ailleurs encore son sens majoritaire). Un audit est un examen des
comptes, une vérification comptable, destiné à voir si un établissement est bien géré, s’il
n’y a ni malversation, ni gâchis, ni mauvaise gestion. Mais maintenant, on audite à peu
près tout. Oui, on audite. Car le verbe auditer existe, dans le sens de « faire un audit ».
Ces mots viennent, on l’a dit, du latin, et plus précisément du verbe audire = entendre,
écouter, puis comprendre.
On comprend donc bien le glissement de sens : on est à l’écoute de quelque chose pour
savoir comment il va, comment il fonctionne. Et la métaphore est bien proche d’une
image médicale. On ausculte. Le rapport du médecin au malade est au départ très
sensoriel : il regarde, palpe, écoute. Il écoute un souffle, un cœur, un pouls… C’est ça
ausculter. Et l’audit n’est pas loin.
Rappelons pour finir que la famille audio a donné quelques autres rejetons dans le
domaine juridique : auditeur de justice. Ou dans le domaine de l’évaluation : on parle
d’audimat pour connaître (même approximativement) le nombre des auditeurs d’une
chaîne de radio ou des spectateurs d’une chaîne de télévision.
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AUDIT
Par: (pas credité)
Audit ? Un mot bizarre, un mot d'ailleurs anglo-latin. Anglo-latin ? Oui, puisque c'est un
emprunt à la langue anglaise qui date de la première moitié du 20ème siècle, mais qui
s'est surtout répandu à partir de 1970. Mais c'est également un mot qui dérive du latin, et
qui d'ailleurs a gardé une manière d'étrangeté orthographique et sonore : il se termine par
un "t" prononcé, comme si la consonne finale était suivie d'un "e" muet. Notons en
passant que ça correspond à une tendance du langage technocratique actuel. Cf coût.
Audit dérive donc directement du latin audio - un verbe qui signifie écouter, mais qui
n'est pas sans lien avec quelques significations voisines : ausculter, estimer, évaluer. Il
débouche ainsi facilement sur l'image de l'augure, ou du médecin qui écoute, déduit,
comprend et interprète. Ca tient du Savant et du magicien ; ça tient de la science et du
prodige.
Le mot, dans la langue contemporaine, s'est donc spécialisé dans le sens d'expertise dans
le domaine de la gestion comptable et de la santé financière. Un audit est une sorte de
bilan en ce qui concerne une société ou une activité. S'il s'agit de l'affaire France, la chose
est d'importance. Audit désigne à la fois l'expertise et l'expert ("Le gouvernement a
nommé un audit ..."). Et il faut se souvenir que le nom, plus complet, d'auditeur a désigné
et désigne encore un haut fonctionnaire: auditeur du Châtelet - dès le 13ème siècle,
auditeur à la Cour ou du Conseil d'Etat, de nos jours.
Le français moderne s'est volontiers accommodé de termes qui dérivent de cette même
origine, ainsi audimat. L'audimat est au départ la marque déposée d'une technique pour
évaluer l'audience de programmes de télévision. On procédait à l'aide d'un appareil
nommé audimètre. L'audimètre s'étant perfectionné, on l'a fait fonctionner
automatiquement. Et c'est ce croisement d'audimètre et d'automatique qui a donné
audimat. Audimat est aujourd'hui un mot courant qui s'utilise comme un nom commun.
Mais la mode d'un tel nom explique le renouveau de certains autres, dans certains de leurs
sens : audience par exemple, fleur du même arbre, et qui désigne bien souvent le public
touché par une émission et par conséquent le taux d'écoute. Et du sens de taux d'écoute,
on passe à celui d'impact, d'écho, de répercussion.
AUSTRALIE
Par: (pas credité)
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Référendum en Australie sur le type de régime politique souhaité par les Australiens.
Australie, Australiens, c'est bien beau, mais d'où ça vient tout ça ? Du latin, évidemment.
Et ça ne date pas d'hier, puisque le nom était inventé bien avant que la contrée ne fût
découverte.
L'Australie n'a donc aucun rapport linguistique avec l'Autriche, qui symbolise au
contraire le pays de l'est - Oster Reich. Mais, l'expression latine "orientalis regnum" ayant
été abrégée en "Austria", un croisement illogique semble avoir quand même eu lieu.
Et ce radical se retrouve dans d'autres mots géographiques : l'"Austronésie" - mais ce mot
est sorti d'usage, supplanté par "Océanie".
Plus actuel, l'Afrique australe (le sud du continent africain) - où l'on trouva d'ailleurs des
restes d'"australopithèques" ; l'hémisphère austral, l'hémisphère sud, qui s'oppose à
l'hémisphère boréal -cette désignation n'est pas courante, mais intéressante en ce que
Borée est un vent du nord, symétrique d'"Auster".
A côté d'Australie, est-ce qu'on trouve d'autres termes qui évoquent ce point cardinal et
qui finissent par désigner une région. Oui.
Le Midi. Le mot déjà ne désigne cette direction que par image : le "midi" étant le milieu
du jour, et le soleil étant à cette heure orienté au sud. En France, toute la partie sud du
pays peut être désignée par ce mot, avec des expressions toutes faites (l'accent du midi),
et des plaisanteries (Limoges ? midi moins le quart…)
Quant au Sud, il peut désigner des régions différentes, qu'on identifie selon le contexte,
en particulier le Sud des Etats-Unis (et les Sudistes : référence à la guerre de Sécession).
Mais, on parle plus souvent aujourd'hui du dialogue Nord/Sud, de la coopération
Nord/Sud. Les deux mots opposent davantage les pays nantis au Tiers-Monde.
AUTHENTIQUE
Elf Authentique Aventure. C'est le nom d'une course internationale qui se déroule dans le
nord-est du Brésil. 800 km à parcourir par des moyens très divers : cheval, VTT,
escalade, kayak, bateau à voile… rien apparemment qui utilise le pétrole. L'image qu'Elf
veut donner d'elle-même ne serait-elle pas légèrement entachée d'hypocrisie ? En tout
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cas, Elf se veut propre, et authentique. On se souvient que ce même adjectif est employé
dans des publicités qui mettent en avant de beaux hommes tannés, broussards durs à
cuire, décalqués de l'Harrison Ford aventurier, célèbre il y a quelques années.
Dans le genre jargon américanoïde apprécié des jeunes, à signaler l'amusant roots,
littéralement racines, qui s'emploie comme synonyme de rude, rugueux, mal dégrossi, qui
n'a pas le poli de la sophistication : une musique, un hébergement de fortune, un vieil
oncle un peu "roots". Ça correspond un peu à "nature" -parfois modulé en "nature aux
pommes".
Revenons à notre "authentique", un vieux mot dont le premier sens est original,
notamment en matière juridique : un document "authentique", c'est-à-dire qui n'est pas un
faux, et dont l'autorité est reconnue.
L' "authentique" n'est donc ni une imitation ni une copie. Une "authentique "montre 1930.
Un "authentique" Stradivarius.
Et le mot signale que l'objet auquel il s'applique non seulement n'est pas une copie mais
n'est pas un faux qu'on essaie de faire frauduleusement passer pour le vrai : un
"authentique" Van Gogh. De là le sens du mot "authentifier" : certifier "authentique".
"Authentique" n'a pas les mêmes emplois que véridique, qui plus qu'à un objet ou une
personne s'applique à une histoire, à un récit : une anecdote véridique (ou "authentique"),
mais pas un Van Gogh véridique.
Quant à véritable, mot plus courant et plus neutre, il atteste lui aussi la vérité de quelque
chose. Il peut s'appliquer au Van Gogh. Parfois à une histoire, mais dans une expression
toute faite : la véritable histoire de Godefroy de Bouillon. Et de toute façon, dans cet
emploi, il sera plutôt placé après le nom, pour que son sens ait plus de force : c'est un
rubis véritable.
AUTOCARISTE
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Et pourtant, "autocariste" n’est pas très fréquent, et le mot a un côté un peu rétro. De
même simplement qu’autocar, dont il dérive. Mais, l’autocar subsiste pourtant. Le mot
désigne un mode de transport collectif, grand véhicule qui transporte des passagers d’une
ville à l’autre. Et souvent, il est abrégé en car, simplement. Mais, il a tenu bon, face à bus,
qui reste le spécialiste du transport à l’intérieur d’une ville, alors qu’en anglo-américain
par exemple, le bus a pris toute la place, ou que s’en faut : coach est quasiment sorti
d’usage, face à bus, en tout cas en Amérique. Et pourtant, l’autocar venait du monde
anglo-saxon. Autocar est né en anglais, et le mot désigne d’abord une voiture, rapidement
abrégée en car, ce qui reste le mot usuel en anglais d’aujourd’hui. Mais il est passé en
France avec la signification qu’on lui connaît, et qu’il a gardée.
AUTORITÉ
Par: Yvan Amar
Après la réalité du retrait israélien, on accentue le fait que la bande de Gaza est
maintenant passée sous le contrôle de l’autorité palestinienne… On sent bien que cette
expression est vague, et que le vague de sa signification est révélateur d’une certaine
situation politique… D’ailleurs, le flou ne rôde pas uniquement autour de ce mot
d’autorité… La bande de Gaza n’est pas plus précise… Et si l’on parle de territoires… on
voit bien que la langue, la langue des médias notamment, mais pas uniquement,
s’embourbe un peu dans l’imprécis… sachant que tout ça n’a pas de position, de statut
officiel, et reconnu de la même façon par tous… Alors, on nage dans le provisoire…
même si ça dure des années…
Le territoire donc n’est pas un état… Et l’autorité… n’est pas un gouvernement… Qu’est-
ce qu’on lui reconnaît alors ? Le fait d’exister… Non pas une reconnaissance officielle…
mais juste celui de se rendre à l’évidence… Il y a un pouvoir palestinien, même s’il est
parfois menacé ou ébranlé, ou contesté... Et pour faire avancer une situation provisoire, il
faut pouvoir se parler… donc avoir des interlocuteurs… L’autorité est un interlocuteur
international…
Pourquoi ce mot ? Il est particulièrement ambigu. D’abord, on l’a déjà noté, il est
officieux.. Contrairement au mot pouvoir qui représente une puissance indubitable, même
s’il n’est pas toujours légitime. Le mot d’autorité ne porte aucune idée de pérennité… Il
donne l’impression d’être employé pour une organisation vague qui remplace un pouvoir
inexistant, un pouvoir vacant. Comme si l’autorité, c’était du temporaire, du « en
attendant »… du provisoire, parce qu’il faut bien expédier malgré tout quelques affaires
courantes… Cette autorité est-elle là pour parer au plus pressé ? En tout cas, ça fait
longtemps que ça dure… et c’est avec elle qu’on traite, quand on a à traiter…
Mais, pourquoi parler d’ambiguïté à propos de ce mot ? Parce que, en même temps
qu’elle est transparente, presque inexistante d’un point de vue protocolaire, elle n’a rien
du n’importe comment… Le mot autorité évoque quelque chose d’assez administratif…
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Non pas une gestion des affaires publiques à la sauvette, sans trace et sans protocole…
Mais, au contraire, de la paperasse, de la signature, du tampon, des traces… Puisque, par
exemple, c’est un mot qui s’est utilisé en France pour désigner certains organismes
officiels : Haute autorité de l’audiovisuel, etc.
AUX ARMES
Par: (pas credité)
L'association guadeloupéenne "Aux arts citoyens !" organise un festival de cinéma ("Noir
tout couleurs").
"Aux arts citoyens !", c'est bien sûr une citation et un clin d'œil : on entend en filigrane
"Aux armes citoyens !", fragment célèbre de la sanglante antienne qui fait notre hymne
national. C'est donc une référence à "La Marseillaise". Et cette exclamation martiale a un
sens précis, évoque un danger imminent et une nécessité de s'armer pour y faire face.
Cette exclamation a d'ailleurs un statut linguistique particulier : elle est relativement
anonyme et le locuteur est dans la position du "un pour tous" qui parle ? Peu importe !
Mais il s'adresse indistinctement à tous ceux qui sont susceptibles de l'entendre. Cet appel
à s'armer, et par delà, à combattre, est ancien (XIXème siècle : "as armes !"), et noté par
Alain Rey comme ayant une utilisation figurée (du courage !). Une citation de Stendhal
l'atteste, mais cette acception me semble rare .
On peut noter d'autres exclamations d'un type voisin de celle-ci, exhortant au combat, ou
au contraire encourageant la débandade. Et nombre d'entre elles ont une origine maritime.
"Branle-bas de combat !" Cette exclamation est parfois employée (mais presque toujours
de manière un peu plaisante) comme un appel à la mobilisation : tout le monde doit se
préparer à quelque chose ("on annonce l'inspecteur ; branle-bas de combat !"), et on n'est
pas si loin de "tout le monde sur le pont !". Mais, en même temps, cette interjection
évoque le plus grand désordre, la panique générale. A l'origine, le "branle-bas" est la
manœuvre qui consiste pour l'équipage à installer ou ranger les hamacs pour la nuit.
"Sauve qui peut !" exprime plus encore l'affolement et entérine la règle du "chacun pour
soi". Ce subjonctif à valeur impérative signifie : que celui qui peut se sauver le fasse,
mais l'expression est figée, au point qu'on l'utilise parfois à la manière d'un nom : un
"sauve-qui-peut" général est une panique collective.
Quant à "SOS", si cette expression n'est pas plus rassurante, elle évoque quand même un
appel à l'aide et non un appel à la fuite. "SOS" correspond à un code rythmique
facilement identifiable dans l'alphabet morse : …---…, c'est-à-dire trois points, trois
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traits, trois points. On a bâti tout un roman séduisant, autour des initiales des mots "Save
Our Souls" (sauvez nos âmes), qui n'a pas le commencement d'un début de preuve, mais
permet de briller en société.
AVALANCHE
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"plaque à vent" = plaque de neige instable formée par amoncellement dû au
vent (d'où son nom) qui se détache parfois et entraîne les skieurs dans
sa chute.
Roxane Decore a-t-elle « avalé son chapeau » avec la ficelle quand elle a appris que
Philippe Séguin se présentait à la première place de sa liste aux élections municipales ?
C’est ce qu’imagine le quotidien Libération, qui suppute que la candidate, rétrogradée de
fait à la deuxième place, a dû en éprouver un certain dépit, qu’elle a malgré tout été
contrainte de cacher.
Elle aurait donc « avalé son chapeau », comme elle aurait pu avaler la pilule, ou avaler
des couleuvres. Ces deux expressions sont, en effet, assez voisines pour leur sens : il
s’agit de supporter, sans protester, sans se plaindre, en feignant même la bonne humeur,
des affronts ou des humiliations. Pourquoi la pilule ? Parce que les médecines sont
censées être mauvaises au goût, pour être efficaces. C’est faux, bien sûr, mais c’est ce
qu’on dit.
Et pourquoi « avaler des couleuvres » ? Ce serpent est inoffensif, mais c’est malgré tout
un serpent, sinueux et gluant, qui évoque peut-être l’hypocrisie et le mensonge. Cette
valeur péjorative est renforcée par la proximité du mot couleur. Faire « avaler des
couleurs » alors ? Cela signifiait faire croire des choses fausses, inventées ; peintes ?
comme des couleurs ? C’est peut-être l’origine de l’expression, aujourd’hui sortie
d’usage. Mais, les couleurs étaient des mensonges, des sornettes. Un sens dont on sent la
trace dans l’expression « sous couleur de… »
Quant à « avaler », l’image est évidente : il s’agit d’ingérer, d’accepter quelque chose. On
peut l’avaler, mais aussi ravaler sa fierté, son orgueil, sa fureur, quand, au dernier
moment, ce sentiment est sur le point de s’exprimer, on l’étouffe et le rentre au plus
profond de soi : on le ravale.
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AVENT
Par: (pas credité)
AVENTURE
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Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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AVENTURE
Par: (pas credité)
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tentative de la prise de pouvoir du général Boulanger.
AVEUGLEMENTS
La conférence de l’ONU sur le sida s’est achevée par une déclaration étrange : un certain
nombre de mots n’y figurent pas comme « homosexualité », « prostitution », « droit des
hommes », « droit des femmes ». Un certain nombre de pays, en général, religieux
islamistes, mais pas seulement, s’y sont opposés. Et ces absences s’expliquent en fonction
des idéologies portées par certains pouvoirs. Si l’on veut voir dans le sida, non pas une
maladie épidémique, mais un fléau venu de l’étranger, ou même le signe d’une punition
divine, on évitera en effet de trop parler des causes objectives de son existence. Il y a
donc un certain nombre de tabous autour de certains mots.
Est-ce que par là, on n’hésite à appeler un chat un chat ? L’expression est ancienne en
français. Il s’agit, quand on appelle un chat un chat, de ne pas avoir peur d’appeler les
choses par leur nom : « J’appelle un chat un chat et Rollet un fripon », disait-on déjà au
XVIIème siècle. Métaphore obscène, mais dont l’obscénité est bien cachée. Le chat était,
au départ, un chas, c’est-à-dire un trou, notamment celui d’une aiguille. Et le mot était
souvent utilisé comme image du sexe féminin. L’expression voulait donc dire « parler
crûment des choses crues ». Et la proximité d’une autre image, celle de la chatte, qui
représente aussi le sexe féminin, a aidé au changement orthographique : du chas, on passe
au chat.
On parle parfois aussi de la politique de l’autruche. La légende veut que cet animal,
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quand il est effrayé, se cache la tête dans le sable. Il ne voit plus le danger, et imagine
alors qu’il a disparu. On dit également « faire l’autruche », ou même se mettre la tête
dans le sable.
Dernière expression, se voiler la face (= refuser d’affronter la réalité, et même de
l’envisager) est moins pittoresque, mais elle a le même sens.
AVEUGLES
Ce n’est pas vraiment le jour des aveugles, mais c’est le World Braille day. Laissons
tomber l’acrimonie que pourrait provoquer cet anglicisme : c’est comme ça que ça
s’appelle. Et c’est le jour du Braille. Le Braille ? Le système d’écriture et de lecture
destiné aux aveugles, basé sur des signes en relief, des points saillants qu’on peut
reconnaître au toucher. Ne cédons pas à la tentation mal placée de plaisanter sur le nom
Braille, en pensant que c’est plutôt l’inventeur d’un alphabet pour sourds – un alphabet
qui crie. Non ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Louis Braille, aveugle à trois ans et
nostalgique de ce qu’il avait vu, inventa en 1825 un alphabet toujours en vigueur
aujourd’hui. Et à partir de ce système, on peut donc construire une image tactile de la
langue, de même qu’on peut écrire des partitions musicales que les aveugles peuvent lire
et apprendre par cœur avant de jouer la musique ainsi notée.
Le 3 janvier est donc un jour pour les aveugles, et aussi pour les malvoyants ou les non
voyants...
Un mot sur ces mots… Aveugle : beau mot, vrai mot populaire, bien différent de son
origine, qui est latine. Pas un mot, mais deux : Ab oculis – expression abrégée puisque
vraisemblablement, il s’agissait au départ de l’expression orbus ab oculis, littéralement
privé de ses yeux. A moins que cela vienne d’alboculus, dérivé d’albus, blanc. Cet
adjectif désignait un malade atteint de cataracte. Et, en fait, ce qui est bizarre c’est que la
couleur associée à la cécité est bien plus souvent le blanc que le noir. Le très blanc, le très
brillant indique ce qu’on ne voit pas parce que c’est trop facile à voir. Ça crève les yeux,
dit-on, à propos d’une évidence extrême. Mais, on ne dit ça qu’à propos de quelque chose
qu’on devrait voir, et qu’on ne voit pas. Ou que tout le monde ne voit pas. L’image est
facile à comprendre : « ça vous rentre de force dans les yeux » ; donc, ou bien on le voit
très bien… ou bien on ne voit plus rien car les organes de la vue sont trop sollicités…
Mais, on parle aussi bien de clarté aveuglante (au sens propre : si vous sortez d’une pièce
obscure en plein soleil, il faut attendre que les yeux s’accommodent…) et au sens figuré :
quelque chose de si évident qu’on n’en a pas conscience…
AVIAIRE
Par: Yvan Amar
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La grippe aviaire poursuit son chemin, et l’inquiétude aussi, puisqu’on ne sait pas
exactement quels sont les risques d’épidémie. Et quel est le danger exact représenté par
les propagateurs de la maladie, les oiseaux, et notamment les oiseaux migrateurs.
Car la grippe aviaire, c’est bien la grippe des oiseaux. Tout au moins la grippe dont le
virus est transmis par les oiseaux… Car la peur dont on témoigne est celle de voir les
humains menacés sur une grande échelle… pas les oiseaux…
L’adjectif « aviaire » se comprend facilement, même si son emploi est rare : il signifie «
qui se rapporte aux oiseaux ». Et il ne date pas vraiment d’hier. On a parlé de « peste
aviaire », de « grippe aviaire », de « maladie aviaire » depuis l’extrême fin du XIXème
siècle. Le mot est resté savant. Mais, le risque d’épidémie qu’on semble courir
aujourd’hui fait que le mot est infiniment plus courant. Une autre expression, peu
employée car technique est « péril aviaire », qui désigne les dangers que les oiseaux
représentent sur les aéroports : se prendre dans une turbine d’avion, par exemple… Et ce
n’est pas un pléonasme. Et pourtant, « avion » et « aviaire » sont de même racine. «
Aviaire » a donc un rapport direct aux oiseaux… En effet, avis veut dire oiseau en latin.
Mais, bizarrement, la racine est restée assez stérile jusqu’au XIXème siècle : personne ne
s’était avisé de dériver des mots français de cette origine. Enfin… soyons sérieux : si on
fait réellement de l’étymologie, on s’avise que le mot oiseau lui-même dérive (oh,
lointainement !) d’avicellus, petit oiseau. Mais, c’est une dérivation populaire qui nous
ferait remonter au plus ancien Moyen-âge… Une pie n’y reconnaîtrait pas ses petits. Et le
français contemporain a bien du mal a reconnaître son ancêtre latin. Mais, le siècle
industriel arrive, et soudain. Hop ! On s’intéresse à la science… et la science s’intéresse
aux oiseaux.
Là encore, attention ! : c’était déjà le cas auparavant. Mais, les scientifiques, souvent
snobs et en quête de reconnaissance et de sérieux, s’adressaient au grec plus qu’au latin.
Donc, on avait des dérivés d’ornithos : ornithologie, ornithomancie (divination d’après le
vol des oiseaux) apparaissent au XVIIème, XVIIIème… Mais au XIXème, on fait de la
science appliquée : on invente donc l’aviculture, l’élevage des oiseaux, et l’aviculteur,
celui qui la pratique. On n’élevait donc pas les oiseaux avant ? Si si… mais de façon bien
plus épisodique, presque familiale… On parlait d’oisellerie, d’oiseleur… pas
d’aviculteur. Papageno, par exemple, dans l’opéra « la Flûte enchantée de Mozart » est un
« gai pipeur d’oiseaux »… Charmant… mais pas industriel !
Mais là, où l’histoire de la langue déjoue les calculs les plus astucieux, c’est lorsque le
inventions s’en mêlent. La magie de l’oiseau… c’est qu’il vole. Et c’est en voulant voler
que l’homme a le plus emprunté à l’oiseau, je veux dire à l’avion… qui dérive
directement d’avis. Le mot a été créé par Clément Ader qui mettait ses pas dans ceux de
La Landelle et de Ponton d’Amécourt, visionnaire du langage qui, vers 1860, anticipait
sur les inventions à venir, et créait les mots d’aviateur et d’aviation.
AVION
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
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On vient de fêter le centenaire du premier vol de l’histoire. Ou presque… En fait, il s’agit
du premier vol des frères Wright, alors que Clément Ader avait volé avant eux ! Mais ils
avaient volé plus longtemps et plus haut, le bond était peut-être plus convaincant…
alors… !
En tout cas, le mot avion ne leur est pas attribué. Il revient à Ader, qui emploie le mot dès
1875, avant de déposer en 1890 le premier brevet officiel d’un « appareil ailé pour la
navigation aérienne ». Quand Ader forge ce nom d’avion, c’est beaucoup plus à titre de
nom propre, pour baptiser ses appareils : Avion I, Avion II, etc. Le mot n’a pas de
véritable sens générique. Et de toutes façons, avant même que l’invention soit bien
assurée, le terme perd de la vitesse : on ne parle pas d’avion, mais d’aéroplane. Et
Apollinaire le déplore, en célébrant le premier inventeur, Ader l’aérien : « Il lui restait un
nom, il n’en reste plus rien ».
Ce n’est pas qu’aéroplane soit laid ou mal formé : on comprend bien d’ailleurs son
origine : qui plane sur l’air. Le mot est populaire à tel point qu’on l’abrège : on dit « aéro
» pour aéroplane, comme on dit auto pour automobile. Et le mot se décline : biplan,
monoplan, etc.
En revanche, l’origine du mot avion est moins transparente : il vient du latin avis, qui
signifie oiseau. Et la création du mot fait suite à celle d’un autre, aviation, inventé vers
1863 par un nommé La Landelle, un visionnaire, qui parle d'aviation avant qu’on ait
construit le premier avion ! Et vers 1930, Dieu sait pourquoi, le mot aéroplane, à son tour
devient désuet, et il cède la place à « avions ». Alors même que le mot d’aéroplane reste
aujourd’hui utilisé pour désigner les vieux « coucous » de l’époque héroïque.
AVION
Par: (pas credité)
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toutes les abréviations en "o" qui nous transportent.
En tout cas, avion tient bon, par exemple, face à des anglicismes
: "jet" par exemple (= avion à réaction, = à turbine) qui a eu un
certain succès dans les années 60, quand cette technique s'est
répandue.
"Zinc" est resté d'un emploi limité (pour les connaisseurs, les
vrais amateurs, ceux qui pilotent).
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"Coucou", familier également, renvoie à une machine antique et
petite.
Sans ça, on utilise des termes qui évoquent leur longueur de vol :
long courrier, moyen courrier (moyen de transporter les dépêches),
ou leur capacité : gros porteur, moyen porteur, petit porteur.
AVORTEMENT
Par: (pas credité)
L'étymologie est perceptible avec l'adjectif abortif, où l'on retrouve le " b ", qui a été
remplacé par " v " dans les autres termes, pilule abortive : pilule dite aussi pilule du
lendemain qui a été expérimentée, puis, plus ou moins abandonnée, et qui permettait une
contraception après l'acte sexuel et non avant comme la pilule contraceptive classique.
2) IVG : Lorsque l'avortement a été légalisé en 1974 (loi Weil) le terme technique officiel
retenu a été " interruption volontaire de grossesse ", très vite abrégé en IVG. L'usage de
cette expression peut s'expliquer à partir de deux considérations :
IVG met l'accent sur le caractère volontaire de l'accent (choix de la femme). Alors que
l'avortement peut être accidentel. Le langage courant a une locution pour désigner
l'avortement accidentel : la " fausse couche ".
Le langage courant a donc tendance aujourd'hui à différencier nettement les deux
interruptions.
Le mot avortement avait pris un sens péjoratif. IVG, par son caractère d'appellation
technique, rétablissait la neutralité morale et juridique de l'acte.
On parlera de " commandos anti-IVG " pour désigner les militants " anti-avortement ".
Dans les expressions faisant référence aux personnes hostiles à la loi en vigueur on
retrouve concurremment les deux expressions.
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l'absence physique du nouveau-né.
Les enfants morts sont censés devenir des anges dans la mythologie populaire (image de
pureté et d'innocence).
L'expression a tendance à devenir " historique " avec l'évolution des mœurs.
Avorter : outre le sens propre le verbe est couramment employé au sens figuré pour
désigner une action qui échoue. Un complot avorté, une entreprise avortée. = qui ne
parvient pas à terme. Expression assez voisine, mais plus imagée : " étouffé dans l'œuf " :
le coup d'état a été étouffé dans l'œuf. Œuf = embryon.
Avorton : animal né avant terme, d'où au sens figuré et de façon méprisante, gomme petit,
mal fait, laid.
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Y.AMAR : Mais ça s'explique : chaque fois que "monter" pourra
avoir un complément d'objet, que son sens soit ou non figuré, il
se conjuguera avec l'auxiliaire "avoir".
B. A. BA et ABC
Par: (pas credité)
"Lire en fête", nous dit-on… Soit. Encore faut-il pouvoir. C'est-à-dire
"savoir" lire, et donc associer les lettres aux syllabes, et les sons aux
sens. Bref, savoir son B.A. BA.
Voici une expression beaucoup plus orale qu'écrite, qui vient tout droit
du vocabulaire de la lecture, et qui désigne les premières choses qu'il
faut connaître dans une activité : "je ne suis pas très fort avec
l'Internet, mais je connais le B.A. BA" ; je connais donc les rudiments.
Moins lié à la langue orale, on a l'ABC - expression faite, bien sûr, avec
les trois premières lettres de l'alphabet. Elle a parfois le même sens que
le B.A. BA, mais désigne souvent un petit livre , un manuel d'initiation,
dont le titre imite celui d'un livre d'apprentissage de la lecture : ABC de
la photographie, du petit électricien, etc.
BABEL
Par: (pas credité)
Un vent mauvais souffle sur Babelsberg, studio de cinéma allemand, situé près de Berlin,
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et racheté par la société Vivendi. Il paraît qu’on va licencier… En tout cas, le nom de ces
studios fait rêver : Babelsberg. Le Mont Babel ? Ce n’est pas exactement la tour de
Babel, mais ça y fait penser. Et Babel, pour l’histoire des langues, c’est un mot-clé… A
cause de la tour de Babel…
Encore une malédiction dont l’Eternel, dans l’Ancien Testament a frappé les humains.
L’étonnant est que ces malédictions fondent l’humanité. Après l’exil hors du Paradis
Terrestre (enfanter dans la douleur et gagner son pain à la sueur de son front), voici la
dispersion du genre humain sur toute la surface de la terre et la multiplication des langues
qui fait que les peuples ne s’entendront plus, ne se comprendront plus, et par voie de
conséquence, se feront la guerre…
Pourquoi ? Parce qu’ils ont construit la Tour de Babel, grande tour qui prétend aller
jusqu’au ciel, donc faire concurrence à la puissance divine.
Cet épisode légendaire se place, dans la Bible, juste après le Déluge, et mérite quelques
explications.
Ce temple-tour était probablement apparenté aux ziggourats, temples à étages, sortes de
pyramides babyloniennes qu’on trouvait en Mésopotamie.
Et le nom de Babel signifierait peut-être bab-ili – la porte de Dieu… ce qui, en effet,
accrédite l’image d’une tour reliant l’homme au ciel. On a voulu y voir également un lien
avec la racine ballal qui, en hébreu, signifie brouiller, confondre. Puisque les langues ont
été confondues… Mais, rien n’est moins sûr.
Ce qui semble attesté, certain, c’est que Babel et Babylone sont deux formes du même
nom, et désignent la même ville – même si la légende n’a pas toujours placé cette ville au
même endroit. Et Babylone, dans la Bible, n’a pas une bonne image. Capitale des
Mésopotamiens, elle représente l’ennemi, le païen : elle symbolise non seulement la
vanité de l’homme, mais la grande ville en ce qu’elle représente le vice, et la corruption :
la Grande Babylone, c’est la Grande Prostituée. Ce fut Rome, et plus récemment, New
York.
BABY
Par: (pas credité)
C'est le nom du salon "du tout jeune enfant…" qui s'est tenu à Paris et qui met en vedette
un terme anglais, très bien compris en français et depuis assez longtemps, mais qui
d'ailleurs est presque un peu désuet.
"Baby" évidemment signifie "bébé", et c'est même de ce mot anglais que dérive notre mot
français. Dont acte. Mais, dans les années 50, dans une langue familière et amusée, on a
commencé à employer le mot "baby" avec un sens que les Américains lui donnaient
parfois : de façon un peu machiste, un peu nonchalante aussi, "baby" est l'équivalent de
"poupée" : c'est une façon pour un homme d'appeler une femme. Et ce genre d'emploi
bien sûr est très en rapport avec la mode de l'Amérique et même du rock naissant : "baby"
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traîne derrière lui un parfum de roman policier et de paroles de chansons.
Aujourd'hui, même si ce genre de jargon fait partie du cabinet des curiosités d'après-
guerre, on retrouve "baby" dans quelques emplois, notamment en composition.
"Baby-sitter" est très courant, ainsi que son dérivé "baby-sitting", pour désigner la garde
d'une jeune enfant en l'absence de ses parents. Et le salaire du "baby-sitter" sert très
souvent d'argent de poche à de jeunes étudiants ou étudiantes.
Enfin le "baby-foot" est devenu très français. Lui disparaît progressivement des arrière-
salles des cafés, mais au moins, sa prononciation avait perdu tout accent : "baby" et non
"béby"…
BACCALAUREAT
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à l'université ou dans les grandes écoles. Cette coïncidence à
fait la fortune du mot : préparer, passer son bac : le terme est
devenu très usuel.
BACCHUS
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
C’est aujourd’hui que se termine le 39ème congrès mondial bachique, congrès qui permet
de déguster tour à tour des vins du Lubéron, du Ventoux, du Châteauneuf du Pape… et
un colloque sur les vins du Nouveau-Monde… Une réunion, somme toute, plutôt
sérieuse, ce que ne laissait pas forcément augurer l’adjectif bachique, qui n’évoque pas
une manifestation sobre ou bien pensante.
Bachique, en effet, évoque un usage du vin immodéré (contrairement aux slogans anti-
alcoolique – « consommez avec modération »…), évoque les délires de l’ivresse, et
l’oubli de soi. Une fête bachique fait donc penser à une truculence qui se lâche, à un
temps qui va suspendre les bonnes manières et les bons usages.
Car bachique vient de Bacchus, le dieu du vin latin, qui n’allait pas seul, en général, mais
avait toute une suite de Silènes, de satyres, et de bacchantes, un mot qui, avant de
désigner familièrement en français, de grosses moustaches, renvoyait à des déités
féminines, inquiétantes, dépoitraillées, d’une force extrême et dangereuse, qui se
livraient, sous l’empire de l’alcool, à des danses folles et désordonnées.
Et, en plus de Bacchus et de bacchantes, on a aussi le mot bacchanale – fêtes antiques et
très populaires, qui correspondaient à un genre de carnaval débridé qui permettait qu’on
se vengeât des avanies du quotidien.
101
Si le nom de Bacchus n’a pas d’histoire personnelle à proprement parler, il n’en est pas
de même avec son homologue grec, Dionysos qui signifie deux fois né. Car Dionysos
était, comme beaucoup d’autres, fils de Zeus, et de la belle Sémélé, qui aurait eu
mauvaise grâce à refuser les œillades d’un soupirant, qu’on connaissait dans le civil, pour
le dieu des dieux. Mais Sélémé était coquette et, un jour, elle se permet de demander à
Zeus de lui apparaître dans toute sa splendeur, avec tous ses attributs. Zeus, qui avait juré
de lui exaucer son souhait, quel qu’il fût, dut s’exécuter et apparut environné de tous les
éclairs qui lui servaient d’apparat ordinaire. Mal en prit donc à la belle qui fut foudroyée
sur le champ. On a beau s’appeler Zeus, on ne ressuscite pas toujours les morts, et le dieu
se contenta de retirer du ventre de sa bien-aimée, l’enfant qu’elle portait. Mais l’enfant
n’était pas prêt encore à naître. Zeus s’ouvrit donc la cuisse, y fourra son fils, qui en
ressortit quelques mois plus tard… Deux fois né, donc, et pour de bon sorti de la cuisse
de Jupiter.
BACCHUS
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Savez-vous qu’il existe un congrès mondial bachique ? Mais oui ! C’est un congrès qui
permet de déguster tour à tour des vins du Lubéron, du Ventoux, du Châteauneuf du
Pape… Une réunion, somme toute, plutôt sérieuse, ce que ne laissait pas forcément
augurer l’adjectif « bachique », qui n’évoque pas une manifestation sobre ou bien
pensante.
« Bachique » en effet, évoque un usage du vin immodéré (contrairement aux slogans anti-
alcoolique – consommez avec modération…), évoque les délires de l’ivresse, et l’oubli de
soi. Une fête bachique fait donc penser à une truculence qui se lâche, à un temps qui va
suspendre les bonnes manières et les bons usages.
Car « bachique » vient de Bacchus, le dieu du vin latin, qui n’allait pas seul, en général,
mais avait toute une suite de Silènes, de satyres, et de bacchantes, un mot qui, avant de
désigner familièrement en français, de grosses moustaches, renvoyait à des déités
féminines, inquiétantes, dépoitraillées, d’une force extrême et dangereuse, qui se
livraient, sous l’empire de l’alcool, à des danses folles et désordonnées.
Si le nom de Bacchus n’a pas d’histoire personnelle à proprement parler, il n’en est pas
de même avec son homologue grec, Dionysos qui signifie deux fois né. Car Dionysos
était, comme beaucoup d’autres, fils de Zeus, et de la belle Sémélé, qui aurait eu
mauvaise grâce à refuser les œillades d’un soupirant, qu’on connaissait dans le civil, pour
le dieu des dieux. Mais, Sélémé était coquette, et un jour elle se permet de demander à
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Zeus de lui apparaître dans toute sa splendeur, avec tous ses attributs. Zeus, qui avait juré
de lui exaucer son souhait, quel qu’il fût, dut s’exécuter et apparut environné de tous les
éclairs qui lui servaient d’apparat ordinaire. Mal en prit donc à la belle qui fut foudroyée
sur le champ. On a beau s’appeler Zeus, on ne ressuscite pas toujours les morts, et le dieu
se contenta de retirer du ventre de sa bien-aimée, l’enfant qu’elle portait. Mais l’enfant
n’était pas prêt encore à naître. Zeus s’ouvrit donc la cuisse, y fourra son fils, qui en
ressortit quelques mois plus tard… Deux fois né, donc, et pour de bon sorti de la cuisse
de Jupiter.
BADMINTON
Par: (pas credité)
Les championnats de « badminton » ont commencé. Le jeu paraît rétro, mais après tout, il
pourrait devenir à la mode, comme il l’a été, un peu, en France, dans les années 60. Son
succès relatif avait coïncidé avec celui des maisons de campagne chez les cadres,
fermettes normandes & Cie, et comme le terrain de tennis était trop onéreux à construire
derrière les pommiers, on se rabattait sur le badminton : un filet planté dans le pré, deux
raquettes et un volant... le tour est joué. Le nom est pourtant plus ancien que cela. On
l’entend d’abord en 1873, aux Etablissements de bains de Badminton House, dans le
Gloucesteshire. L’origine anglaise semble donc bien établie.
Pas si vite ! C’est comme le thé : rien de plus britannique et c’est pourtant un emprunt
aux Indes. C’est d’ailleurs là que le jeu a été le plus en faveur, et qu’il est né, d’un
croisement du « poona » malais et du « volant » français. Français ? Mais oui, Madame,
c’est comme j’ai l’honneur de vous le dire : le volant est une vieille tradition française,
même si Jean-Jacques Rousseau prétend que c’est un jeu de femmes... Déjà en 1611, on
vous explique l’essentiel : « le volant est un petit tuyau farci de trous où l’on met des
plumes, et dont on se sert pour jouer avec une palette ou une raquette ».
Vous voyez donc que ce genre de jeu pratique avec aisance l’aller-retour linguistique,
comme le tennis d’ailleurs. Tout le monde sait que le nom de ce sport est emprunté au
français « tenetz », exclamation traditionnelle au Jeu de Paume, lorsqu’on envoie la balle
à son adversaire.
D’autres jeux proches de ceux-là ont aussi des histoires linguistiques originales et
voyageuses, comme « ping-pong », onomatopée anglaise, dont on a faussement imaginé
par la suite qu’elle avait une consonance extrême-orientale, sous prétexte que les Chinois
excellent dans cette discipline. Il paraitrait que le jeu doit son nom à une chanson à la
mode dans les music-halls londoniens de la moitié du XIXème siècle. En tout cas, même
si le terme officiel est « tennis de table » (après une brève tentative de « tabular tennis »),
il nous laisse le très français, et très étrange « pongiste ».
Le « pong-ball » a vécu, après un feu de paille dans les années 30-40 : tennis miniature,
103
sur un terrain plus petit, avec un filet moins haut.
Mais le « squash » fait rage chez les jeunes urbains qui rêvent de le rester, et ne craignent
pas l’accident cardio-vasculaire. Et là, l’onomatopée ne peut renier son origine anglaise
(squash = écraser, presser).
BAISER
Par: (pas credité)
L’exposition Rodin qui se donne à voir actuellement à Paris aurait pu nous suggérer de
gloser le mot « penseur ». Mais, finalement, le « baiser » l’a emporté : belle sculpture de
l’artiste, bel acte, beau symbole, beau mot, il a recueilli nos suffrages.
Ce « baiser » qui nous vient du basium bas-latin a dès le départ quelques échos érotiques.
Ce mot évoque, tour à tour, le respect, l’affection, l’amour, mais l’image du « baiser »
amoureux semble l’emporter aujourd’hui. Ce qui a redynamisé des mots un peu enfantins
comme bise ou bisou lorsqu’on insiste sur le caractère non amoureux du mot : ces dérivés
chastes évitent l’équivoque.
BALADE ET BALLADE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
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« Cela commence comme une balade… ». C’est le titre, très bucolique, d’un négligé
étudié, travaillé par un impitoyable marketing politique, que Laurent Fabius a donné à
son dernier livre. Il nous permet, au moins, de nous demander ce qu’est une balade. Oh,
c’est une simple promenade, une flânerie, le plus souvent sans but bien précis et, en tout
cas, sans but utilitaire : on fait ça pour le plaisir, à son rythme. Et le mot sert même, de
façon ironique, pour désigner un voyage qui s’est bien passé, qui n’a pas été trop fatigant
: Paris-Nice en une étape ? Aujourd’hui, avec l’autoroute, c’est une balade. Et le verbe se
balader trouve exactement les mêmes échos. Toutefois, on peut remarquer que ce verbe
est pronominal : se balader. Existe-t-il, à une forme qui ne soit pas réflexive, qui se passe
du double pronom ? Oui, mais c’est nettement plus rare, et uniquement avec une intention
péjorative : balader quelqu’un, ce peut être au sens propre : lui faire faire un trajet qu’il
n’avait pas l’intention d’accomplir : un chauffeur de taxi vous balade si, pour aller de la
Tour Eiffel à Notre-Dame, il vous fait passer par Montparnasse et la Porte
d’Aubervilliers. Et, par extension, quelqu’un vous balade s’il vous fait des promesses
qu’il ne pourra tenir, s’il vous raconte des bobards en vous faisant espérer des choses que
vous ne pourrez jamais obtenir.
Alors attention, il ne faut pas confondre ce mot de balade avec la ballade avec deux « l ».
Le mot est ancien, et appartient à la langue artistique : une ballade est une chanson, en
particulier, une chanson à danser : le mot est de la même famille que « bal », et que les
verbes qui signifient danser en italien et en espagnol, par exemple. Puis, c’est un poème
d’une forme particulière, avec des strophes, dont la dernière s’appelle un envoi, qui est
généralement dédié à un personnage particulier, que l’on appelle Prince… Mais, le mot
était resté dans le vocabulaire musical (souvenons-nous des ballades de Chopin…), et il
est encore très utilisé, sous influence anglo-américaine, pour désigner un air lent…
Alors, bien sûr, il ne faut pas confondre les deux mots, avec leurs deux orthographes
différentes. Mais, rappelons quand même qu’ils appartiennent à la même famille (se
balader au Moyen-âge, c’était, pour des musiciens de rues, des baladins précisément, aller
de village en village en demandant l’aumône).
Et les deux mots se voient réconciliés avec la création baladeur, mot français
recommandé pour que les francophones évitent le mot walkman…
BALKAN ET FINLANDE
Par: (pas credité)
105
Le point, donc, sur deux mots qui dérivent d’une dénomination
géographique, et qui, tous deux, ont désigné un processus politique
compliqué, et d’une façon péjorative : balkanisation et finlandisation.
« Balkan » vient d’un mot utilisé par les Turcs, mais d’origine
persane, qui veut dire montagne. La chaîne des Balkans est en
Bulgarie, mais quand on parle des Balkans, on entend une réalité
géographique bien plus large : toute la région péninsulaire qui englobe
la Grèce, la Macédoine, l’Albanie, la Bulgarie, la Roumanie, la partie
européenne de la Turquie, et encore, parfois on remonte bien plus
au Nord.
BALLON
106
Par: (pas credité)
Ballon est donc bien le nom générique encore utilisé pour désigner ce genre
d'engins (enveloppe + nacelle) qui vole.
Au sens figuré, on a au moins une expression, "envoyer", "lancer", parfois même
"tenter un ballon d'essai", c'est-à-dire faire une manœuvre d'approche pour
sonder quelqu'un, évaluer ses dispositions par rapport à une idée, un
projet. Cette locution se comprend aisément si l'on se souvient que les
ballons ont depuis longtemps servi -et servent encore- à des expériences
scientifiques dans l'espace. En même temps, le ballon une fois lancé ne se
contrôle plus et ne se laisse pas ramener au sol à volonté. Un peu
d'histoire maintenant : si le principe du ballon fascine depuis longtemps,
il faut passer rapidement au-dessus de Gusmao, cet intrépide et malchanceux
prêtre brésilien et attendre le 5 juin 1783 pour voir le premier ballon
s'élever majestueusement avec Etienne et Joseph Montgolfier à bord. La
montgolfière était née (et en passant, n'oublions pas une acclamation
spéciale pour Joseph Montgolfier, inventeur prolifique et héros du langage
qui réussit à donner son patronyme à une invention, la montgolfière et son
prénom à un autre, le Joseph étant un papier chimique filtrant).
107
BALLON D'OR
Par: (pas credité)
BAN
Par: (pas credité)
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L’Afghanistan ne saurait être considéré comme au ban des nations. En revanche le
régime actuellement en place là-bas pourrait bien l’être. Et la rime ban/taliban ne joue pas
en la faveur de ceux-ci.
Mais comment comprendre cette expression « mettre au ban » ? Le ban a d’abord été une
proclamation, un commandement dont la non-observation entraînait une peine. On
comprend ainsi qu’en français, le mot se soit spécialisé dans le sens d’exil, l’un des
châtiments envisageables pour le coupable. Et de là viennent des mots comme bannir ou
bannissement. Mais ce verbe bannir a une histoire très complexe et il a en ancien français
deux sens principaux différents : proclamer et expulser. De ces deux significations
dérivent deux séries de mots, différents, presque opposés.
Bannir a voulu dire proclamer par ban (encore aujourd’hui on proclame les bans d’un
mariage), et par extension, convoquer. De là la tournure : convoquer le ban et l’arrière-
ban, c’est-à-dire convoquer tout le monde jusqu’au plus modeste. C’était aussi convoquer
une armée.. Mais c’est l’autre sens qui a fini par s’imposer : exclure, chasser d’un
territoire. Le bannissement est donc une sanction juridique.
L’expression « mettre au ban » existe donc encore aujourd’hui. La sanction est plus
morale que pénale, même si elle correspond souvent à des conséquences très concrètes.
On peut mettre quelqu’un au ban de la société, comme on peut mettre un gouvernement
et l’État qu’il représente au ban des nations, en raison de sa politique ou de ses méthodes.
BANALISER
109
mot "banalisé" est ici particulier. Il s'agit de voitures de
police qui n'ont aucun signe distinctif. On ne peut donc pas les
reconnaître.
Y. AMAR : Des voitures sans uniforme pour ainsi dire. Des voitures
qui épient sans képi. On parle parfois aussi d'ambassade
banalisée, c'est-à-dire des ambassades qui n'en sont plus, qui ont
perdu leurs avantages d'extraterritorialité. De même un campus
universitaire, lorsqu'il cesse d'être universitaire est banalisé.
Il redevient un terrain comme un autre.
BANANE
Par: (pas credité)
1) Expression (mettre, glisser sur) une "peau de banane" (sous les pieds, les
pas de quelqu'un) : manœuvre déloyale tendant à provoquer la chute de
quelqu'un (au sens imagé). Allusion au caractère glissant de la peau du
fruit.
110
'français-banane', ou plutôt une version francisée par l'acte littéraire
qu'emploie Raphaël Confiant" (sous la plume de P. Lepape, LE MONDE
du 18 juin 1993).
BANANE
Par: (pas credité)
111
La banane, c'est au choix un kayak fatigué, un meuble déjeté, une médaille
militaire, une prise électrique (fiche banane), un butoir vertical de
pare-chocs. L'art capillaire la caresse dans le sens du poil : c'est une
longue mèche souvent gominée qui s'enroule sur elle-même et pendouille sur
le front d'adolescents pensifs ; ou bien c'est le chignon qui forme un
rouleau vertical à la Grace Kelly (la banane a toujours été plus distinguée
que la choucroute - enfin, à mon avis).
Est-ce que c’est nouveau ? C’est plus haut. Et l’interdiction se double d’une impossibilité.
Avant, il y avait une ligne tracée. Et les « lignes continues » se devaient d’être comme
des murs que les voitures au grand jamais ne devaient franchir. Les « lignes discontinues
», on pouvait, si ce n’était pas dangereux. Les « lignes continues »… mon Dieu. Il y a
longtemps, ces lignes étaient jaunes. C’est la couleur qui est restée dans l’imaginaire
linguistique. Une « ligne jaune », même de façon imagée, c’est un interdit. Le flirt,
112
d’accord, mais attention, il y a une ligne jaune à ne pas franchir.
Les lignes sont maintenant blanches, pour correspondre à des normes nationales ou
européennes, mais on ne parle jamais de ligne blanche. Et l’expression « ligne continue »
est assez administrative : c’est celle du Code de la route, ou du gendarme qui vous dresse
un procès-verbal.
Mais on a aussi les « bandes chantantes », ces bandes qui, lorsqu’on roule dessus,
émettent un bruit plus ou moins mélodieux qui doit avertir le conducteur qu’il s’écarte du
droit chemin. Mais c’est plus pour l’informer que pour le sanctionner ou le sermonner.
BAPTEME
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
La Reine d’Angleterre va baptiser le paquebot Queen Elizabeth II. (Et on le dit ainsi en
français, en gardant le nom anglais et en traduisant l’adjectif numéral).
Alors qu’est-ce que c’est que ce baptême ? Une cérémonie, avec une série d’actes rituels
obligés, parmi lesquels, le plus souvent, on arrose le bateau avec une bouteille qu’on
casse sur sa coque. Champagne ou alcool de prix… cela, en tout cas, s’apparente à un
sacrifice, et symbolise un aval, une bénédiction donnée au bateau : tu existes, tu es un
grand maintenant, tu peux aller affronter les dangers de la mer. Ce rituel, même s’il est
encore souvent teinté de religiosité, dérive d’une pratique beaucoup plus explicitement
religieuse.
Mais, comme le mot baptême a plus d’un sens, il convient de bien s’orienter…
En effet, ce nom baptême renvoie à trois significations principales : la bénédiction, la
nomination et la première fois.
Premier sens religieux, donc. C’est le sacrement administré pour purifier un être humain
– le plus souvent un enfant – du pêché originel, et l’admettre ainsi dans la communauté
chrétienne. Baptizein signifie en grec immerger, plonger, et renvoie au rituel de l’eau
purificatrice. On a, donc, le nom baptême, le verbe baptiser (administrer le baptême), le
113
participe baptisé (pour celui qui a reçu le baptême)…
Deuxième sens : baptiser signifie donner un « nom de baptême », donc nommer, puisque
la cérémonie du baptême sanctifie et entérine le nom que les parents (ou les parrain et
marraine) donnent à l’enfant. Mais, le verbe s’emploie plus couramment quand il s’agit
de donner à quelqu’un un surnom (J’ai un nouveau briquet que j’aime déjà comme un
fils. Je l’ai baptisé Jojo). On a également formé débaptiser (changer le nom) et rebaptiser.
La rue de Leningrad à Paris a été débaptisée après la chute du régime soviétique, et
rebaptisée Saint Petersbourg, comme la ville qu’elle célèbre.
BARON
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Après les barons du gaullisme et les barons de la finance, voilà que les barons de la
drogue occupent la scène médiatique. Il s’agit, donc, à l’évidence de personnages
importants, plutôt les gros poissons que le menu fretin. Et il est étrange que ce mot de «
baron » ait pu prendre un tel sens alors qu’il occupait l’avant-dernier rang dans la
hiérarchie nobiliaire : Chevalier, baron, vicomte, comte, marquis, duc, prince, et
ensuite… mon Dieu, irons-nous jusqu’aux princes du sang, au roi, etc.
Pourtant, à l’origine, le baron n’a rien d’obscur : dans la première hiérarchie féodale, et
désigne un grand seigneur du royaume.
Voilà l’un des rares mots empruntés au francique ; et dans cette langue, à l’origine, le
baron est un « homme libre ». La tradition nobiliaire a pu ensuite lui réserver un sort plus
modeste. Mais la langue anglaise, et même américaine, a redoré son blason : un baron est
un magnat, c’est-à-dire un personnage tout puissant, et surtout dans la presse et
l’industrie.
On notera également qu’en France, et dans une langue argotique, le baron est un
comparse, un compère.
Au jeu du bonneteau, par exemple, c’est un complice du maître du jeu, qui feint d’être un
passant, un joueur comme un autre. Il va jouer, et bien souvent gagner. Et donner ainsi
confiance aux autres, qui ainsi vont imaginer que gagner n’est pas si difficile, que le jeu
est honnête, que tout le monde a sa chance.
Ou alors c’est celui qui fait semblant d’être le passant choisi au hasard pour répondre au
magicien, à l’illusionniste : « Prenez une carte ; ne me la montrez pas, remettez-la dans le
paquet… »
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BAROQUE
Par: (pas credité)
115
de l'époque, les instruments de ce temps-là font partie de tout un
courant musical qui, depuis une trentaine d'années, s'efforce de
replacer la musique dans son contexte.
Septembre : première manifestation pour célébrer l'an 2000. 20 "barges" sur la Seine sur
lesquelles prennent place des orchestres de percussions.
"Barge" ? C'est-à-dire des péniches, des bateaux à fond plat, destinés à transporter de
lourdes charges, en général, en eau douce (mais pas toujours : "barges du
débarquement").
"Barge" est de la famille de barque, mot ancien, hérité du latin probablement, mais qui
vient du grec et avant de l'egyptien.
"Barque" : le mot est encore courant mais ne désigne que de modestes esquifs,
notamment utilisés pour la pêche.
Usages figurés : "mener sa barque" (conduire sa barque), familier et positif = (bien)
mener sa vie, avec intelligence et adresse.
Dérivés très courants avec des sens figurés spécifiques. 2 séries : (s') "embarquer" et
"débarquer".
M' "embarquer", ou plus souvent "s'embarquer" ont été utilisés dans des sens différents
particuliers : être engagé dans une affaire, une entreprise, une aventure : "Tu as signé un
contrat avec Jules ? Mon Dieu, dans quelle histoire tu t'embarques !" Avec l'idée que,
quand on est parti, on est parti, engagé. On ne peut plus descendre, abandonner sur une
simple impulsion. C'est comme si on était en pleine mer.
Transitif, le verbe "embarquer" a un autre sens familier, proche de l'un de ses sens
propres : "embarquer", c'est prendre avec soi, dans le bateau : "j'ai embarqué son briquet"
= je l'ai pris, je suis parti avec son briquet (soit exprès, soit par mégarde). Mais c'est
toujours partir avec quelque chose qui ne vous appartient pas, qu'on n'aurait pas dû
prendre.
Quant au verbe "débarquer", il a plusieurs sens figurés : "Tu débarques !" signifie tu es
nouveau venu, tu n'es au courant de rien - comme si tu débarquais sur une terre inconnue.
"Ils ont débarqué à quatre, sans prévenir" veut dire "ils sont arrivés à l'improviste" avec
l'idée que ces quatre-là étaient un peu envahissants et importuns.
Enfin, - et toujours de façon familière, très familière, "débarquer" quelqu'un, c'est le
congédier.
116
BARRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Les édiles de Deuil-la-Barre veulent secouer le cocotier… Quoi quoi quoi ! ! Quel
cocotier ? ? Deuil-la-Barre, il faut d’abord le savoir, est une charmante localité de la
région parisienne. Mais pêcherait-elle par son nom? C’est que les responsables de la
mairie de Deuil-la-Barre ont décidé d’un référendum pour connaître le sentiment de leurs
administrés sur le nom de la commune. Alors, on ne veut plus de Deuil-la-Barre ? Trop
funèbre ? Justement pas… C’est ça l’étonnant : ce n’est pas « Deuil » qui gêne : c’est la
barre ! ! ! Parce que la barre évoque une barre d’immeubles, que ça fait un peu peuple, un
peu cité de banlieue mal famée, et que donc le standing et, par conséquent, le prix du
mètre carré s’en ressent. C’est donc une affaire tout à la fois d’image et de gros sous : les
promoteurs immobiliers voudraient que ces parages ne voient pas leur responsabilité
entamée.
Il est vrai que, depuis quelques années, (mettons une vingtaine, pas plus…) on parle de
barre d’immeubles… Pour désigner des blocs immobiliers, construits en général entre les
années soixante et les années quatre-vingt, fort laids, fort compacts, où peuvent s’entasser
des milliers d’occupants. Ce sont souvent des HLM (habitations à loyer modéré), établis
dans des banlieues populaires… Et il est vrai que cet urbanisme sauvage n’a rien fait pour
établir une tranquillité sereine chez ses habitants. Le mot « barre » dit bien ce qu’il veut
dire : c’est bien en forme de barre – quoiqu’on pourrait objecter que la plupart du temps,
une barre évoque plutôt quelque chose d’horizontal, qui s’étend en largeur. Alors que les
immeubles, en question, sont le plus souvent construits en hauteur. La naissance des
codes barres auraient-elles un impact là-dessus ? Pas sûr… Et pourtant… On parle donc
également de tours. Et souvent, on a parlé méchamment de cages à poules, ou de cages à
lapins… notamment dans les années soixante, quand c’était nouveau, et que les
moqueries étaient neuves également. Et ces expressions renvoyaient à la fois à une idée
d’enfermement, de passivité, et à une idée de grégarisme, c’est-à-dire d’uniformité : tous
pareils dans nos petits appartements. Et tous conditionnés.
La barre est donc l’unité de construction de la cité… qui est aussi le mot par lequel on
désigne un ensemble de barres… Et selon le contexte, on voit bien si on est encore ou
non dans le cadre de la cité médiévale ou antique, ou dans un univers moderne et plus
terrible. Quant à cet ensemble de barres, il est planté en général sur une dalle, nom par
lequel on désigne l’esplanade nue et éteinte où l’on ne peut pas faire grand chose d’autre
que traîner…
BARRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
117
E.LATTANZIO : C'est-à-dire qu'ils demandaient un niveau très élevé
pour admettre les élèves. "Placer la barre très haut", l'image
bien sûr vient du sport, du saut en hauteur. La barre est celle
au-dessus de laquelle il faut sauter. Chaque fois qu'un sauteur a
réussi à la franchir, on la remonte. Si, au départ, elle est
placée très haut, il est difficile de concourir. Et au figuré, le
sens est évident.
Le petit "haut" est à la mode - ou plutôt le "p'tit haut". Le mot ne s'écrit pas, ou très peu.
Il se prononce dans un langage spécialisé et probablement éphémère. Et il traduit le mot
anglais "top" somme toute peu utilisé tel quel.
Ajusté, minimal, "tendance" et juvénile, le "p'tit haut" vit actuellement de belles journées
et remplit les armoires des jeunes filles, à moins qu'il ne couvre légèrement le haut de
leur corps. Le haut ? Oui, le haut ! Et voilà tout justement l'origine du mot, qui est censé
recouvrir la peau, approximativement du nombril jusqu'au cou.
118
Pourquoi insister sur "p'tit" ? Peut-être parce que le "haut" est déjà utilisé avec d'autres
significations, et désigne alors la partie supérieure d'un vêtement double : "haut" de
pyjama, "haut" de maillot de bain, voire de jogging… Mais les yeux plongent vers le sol,
ils seront parfois arrêtés à mi-pente, par les "bas" : ainsi se nomme le voile transparent ou
opaque qui enveloppe la jambe et s'arrête en haut de la cuisse, le collant étant réservé aux
"bas" qui prennent toute la taille. Ces indications par rapport à l'espace ne datent pas
d'hier, puisque jadis, les hommes (alors que les "bas" et les "hauts" d'aujourd'hui sont
généralement réservés aux femmes) portaient des chausses, et que ce vêtement se divisait
en "haut" et en "bas" de chausses.
BASILIQUE
Inaugurer des "basiliques", ça fait partie du travail des papes. Et c'est encore plus facile
quand il s'agit d'une "basilique" un peu ancienne, comme la Saint-Pierre, dont on
inaugure guère que la nouvelle façade enfin restaurée. Mais pourquoi "basilique" ? C'est
peut-être la seule vraie question.
La "basilique" nous vient du grec : on sent bien qu'elle est de la même famille "due le
basileus", le roi, ou tout au moins celui qui détient le pouvoir (le mot n'est pas
symboliquement monarchique).
La "basilique" est donc au départ le siège de l'Archonte Roi à Athènes, le siège du plus
haut magistrat de la cité.
Le mot passe ensuite à Rome, et la "Basilique" est le nom d'un grand édifice romain où se
pratiquent pêle-mêle le droit et les affaires. On s'y retrouve donc.
Et à partir du IVème ou du Vème siècle, "basilique" commence à désigner des églises
chrétiennes. Pourquoi ? Ça reste encore une relative énigme, mais la grande "basilique"
Constantine, construite à Jérusalem sur l'emplacement du tombeau du Christ n'y est pas
pour rien.
Une "basilique" est donc restée une église qui avait la faveur du pape. Mais ce n'est pas le
nom qu'on donne à n'importe quelle grande église ? La raison en est simple : les grandes
églises sont, en général, le siège des évêques et des archevêques et, par conséquent,
bénéficient d'une appellation spéciale : nous sommes dans une "cathédrale". La
"cathédrale" est à l'origine un trône royal, puis une chaire d'évêque, ce qui explique
quelques expressions franco-latines encore courantes en français : un cours "ex cathedra"
est fait en chaire par un professeur. On s'oppose là aux travaux pratiques et on est dans
l'exemple type du cours magistral.
BASQUE
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Par: (pas credité)
C'est le festival de la culture basque. Parlons un peu de cette langue étrange, bizarre.
Elle est parlée par près de 800 000 personnes, et ses huit dialectes tentent de s'unifier en
un seul " Euskara batua " (" Euskara " désigne la langue basque en basque).
La langue est étrange car c'est la seule langue régionale parlée en France qui ne soit pas
d'origine indo-européenne. D'où vient-elle ? Peut-être du Caucase, c'est le plus
vraisemblable ; mais on a aussi parlé du berbère. En tout cas, on est sûr de rien. Peu
d'emprunts du français au basque ; les accents, les racines sont trop différentes. On a
quand même quelques réalités locales : l'izard, sorte de chamois. Alors que l'orignal
(appelé parfois, à tort, l'original) est un élan d'Amérique - le mot vient d'orein, cerf, en
basque.
On a déjà parlé de bizarre, vu qu'en basque, bizar, c'est la barbe, le poil. Le mot a de
toutes façons transité par l'espagnol, et peut-être l'italien. Un long voyage, donc.
Terminons par bagarre, dont la terminaison est proche de bizarre, et qui rend hommage
au caractère fier et indépendant de cette langue basque.
BASQUE
Par: (pas credité)
C'est le festival de la culture basque. Parlons un peu de cette langue étrange, bizarre.
Elle est parlée par près de 800 000 personnes, et ses huit dialectes tentent de s'unifier en
un seul " Euskara batua " (" Euskara " désigne la langue basque en basque).
La langue est étrange car c'est la seule langue régionale parlée en France qui ne soit pas
d'origine indo-européenne. D'où vient-elle ? Peut-être du Caucase, c'est le plus
vraisemblable ; mais on a aussi parlé du berbère. En tout cas, on est sûr de rien. Peu
d'emprunts du français au basque ; les accents, les racines sont trop différentes. On a
quand même quelques réalités locales : l'izard, sorte de chamois. Alors que l'orignal
(appelé parfois, à tort, l'original) est un élan d'Amérique - le mot vient d'orein, cerf, en
basque.
On a déjà parlé de bizarre, vu qu'en basque, bizar, c'est la barbe, le poil. Le mot a de
toutes façons transité par l'espagnol, et peut-être l'italien. Un long voyage, donc.
Terminons par bagarre, dont la terminaison est proche de bizarre, et qui rend hommage
au caractère fier et indépendant de cette langue basque.
BATON
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
120
E.LATTANZIO : A l'occasion de l'un des derniers voyages du
Président Chirac, la presse a dit qu'il avait repris son "bâton de
pèlerin".
BATONNIER
Par: (pas credité)
121
fallait, lors d'une cérémonie porter au Doyen choisi par la confrérie
religieuse et juridique de Saint-Nicolas, la bannière (ou bâton) du Saint.
Première mention du bâtonnier : 1602.
BAVURE
Par: Yvan Amar
122
accréditer l’expression… Pour désigner une erreur grave, souvent tragique, effectuée par
des services de la police ou de l’armée… en tout cas par des forces de l’ordre, qui ont les
moyens d’exercer leur pouvoir.
Alors, on voit bien que le mot est ce qu’on appelle un « euphémisme »… qui en dit le
moins possible pour minimiser une réalité…
Et ce mot, au départ, porte le point de vue des forces qui sont en faute… Elles
reconnaissent leur faute… Avec embarras… Ou plutôt, il s’agit de reconnaître son erreur,
plutôt que sa faute… Parler d’une bavure ce n’est pas se déclarer coupable, c’est
reconnaître qu’on a fait une erreur d’appréciation.
L’image est, d’ailleurs, très parlante… Qu’est-ce que c’est qu’une bavure ? Le fait de
baver… Mais aussi, et c’est déjà au figuré, le fait de colorier au-delà du trait… C’est un
mot de peintre… La peinture a un peu dégouliné… Elle a dépassé la limite… L’image
renvoie, donc, a une idée de « tolérance » qui a été mal gérée… : Comme si on pouvait se
permettre certaines choses, certaines privautés, certaines rudesses… mais pas trop… Et la
bavure… c’est d’aller un peu trop loin dans ce qui n’était pas permis, pas officiel… mais
qui était une pratique admise… Alors, on peut parler de bavure, lorsque la victime est
plus fragile qu’on pensait… On malmène un cardiaque… Un infarctus ? C’est la bavure !
Ou plus souvent encore, quand on se permet une privauté… avec la mauvaise personne…
Un questionnement un peu brutal, un tutoiement… avec quelqu’un qui se révèle être….
un président de Tribunal… un membre du personnel diplomatique… C’est la bavure…
Ou bien … on tire sur une voiture anonyme… et c’est celle de l’otage libérée… En
admettant que ça se soit passé comme ça… !
BEATLE
Par: Yvan Amar
123
mot ne veut rien dire en anglais. Il est vraiment inventé. Mais avec des évocations
indirectes.
D’abord, il se prononce sensiblement comme le mot beetle écrit b-e-e-t-l-e, qui signifie
scarabée. Les quatre jeunes gens dans le vent voulaient-ils passer pour des scarabées,
après avoir été des scarabées d’argent (silver beetles) ? Probablement pas. Et on peut
penser que c’est de façon très délibérée qu’ils ont choisi un nom qui n’existait pas tel quel
dans le dictionnaire de leur langue maternelle. Mais, cette proximité reste dans l’esprit de
tous les anglophones. Pour les Français, évidemment, c’est différent.
Le mot de « beatle » évoque autre chose : le beat, c’est-à-dire le battement, ce qui évoque
le tempo, le rythme. On dit davantage aujourd’hui, chez les musiciens, la pulse, la
pulsation. Le mot n’est peut-être pas si courant en français, d’abord parce qu’il peut
évoquer un calembour grivois. Mais, en anglais, il évoque la musique. Et en 1960, on
parle en Angleterre de beat music, musique rythmée, genre de rock à la mode ! Mais, il y
a aussi ce qu’on a appelé la beat generation. Qui, elle, a déjà atteint son apogée lorsque
les Beatles se font connaître. C’est ainsi qu’on a appelé tout un mouvement culturel,
surtout littéraire, qui a secoué l’Amérique d’après-guerre avec des poètes comme Allen
Ginsberg ou des romanciers comme Jack Kerouac, par exemple : mouvement libertaire et
révolte, dont le nom joue sur une autre ambiguïté du mot beat : la beat generation ce
serait plutôt la génération épuisée. Mais enfin, son influence n’est pas tout à fait éteinte
lorsque naissent les Beatles, et dans l’esprit du public en tout cas (même s’il n’y avait rien
de volontaire de la part des Beatles), on fait le lien.
Et à partir du succès phénoménal de ce groupe, on créera enfin des mots, diffusés tant
dans les pays de langue anglaise qu’en France ou dans les pays francophones, de
beatlemania : La folie Beatles !
BEAUTE
Par: (pas credité)
Ces quatre derniers jours, on a vu fleurir à Pantin, dans la Région parisienne, un salon
intitulé "Afro'dit", un salon de la beauté noire.
Tout commence bien sûr par un jeu de mots. Aphrodite était en Grèce la déesse de
l'amour et réputée pour sa beauté.
Et "afro" est un radical dérivé d'Afrique qui évoque non seulement ce qui est africain,
mais plus encore peut-être ce qui est "à l'africaine", ou d'origine africaine. Ainsi, toujours
dans le domaine de l'apparence extérieure, parle-t-on des "coiffures afro", d'une "mode
afro". D'autre part, on sait que les Noirs des Etats-Unis sont souvent appelés afro-
américains (terme prétendument neutre, qui est censé faire pièce à toute forme de
racisme, et dont l'efficacité n'est pas parfaitement avérée).
En tout cas, "Afro'dit" est un salon de la beauté où on a pu avoir un aperçu de toutes les
techniques, toutes les modes d'embellissement, de maquillage des visages et des corps
féminins (il y a encore un relatif tabou sur le maquillage masculin).
124
Et le mot "beauté", dans une acception particulière, recouvre précisément ce domaine.
Dans les magazines féminins, la rubrique "beauté" est consacrée à tous les conseils qui
aideront les lectrices à être fières de leur apparence. De même, on peut aller dans un
Institut de beauté pour différer l'outrage des ans.
Pourtant, cette expression "Institut de beauté" paraît parfois un peu vieillie. On parle plus
facilement aujourd'hui d'"espace beauté", de "club beauté" ou de "centre d'esthétique".
Car ce mot d'"esthétique" est aussi très utilisé. Les femmes qui y travaillent sont des
"esthéticiennes".
Et si on a vraiment le besoin ou les moyens d'aller se refaire la fois une beauté et une
santé, on peut se tourner vers la "thalassothérapie" ("thalassa" veut dire mer, en grec) qui
utilise des moyens en rapport avec cette mer régénératrice qui nous fait rêver : un bon bol
d'iode, des bains d'algues ou à remous, quand ce n'est pas "l'épilation laser
bioélectronique".
On a bien sûr d'autres images équivalentes : "les faucons et les colombes", par
exemple "Hawks and doves" qui naissent aux Etats-Unis, en 1966, au début de la
guerre du Vietnam, puis qui s'exportent en Israël autour de la Guerre des Six Jours.
125
Quant aux "belligérants", ce sont simplement ceux qui sont impliqués dans un conflit
armé. Le mot est un peu abstrait, journalistique, peu fréquent dans la langue courante
parlée. Il ne dérive pas directement de "bellum", mais de toute la locution latine
"bellum gerere" (faire la guerre), ou plus précisément de la contraction qui existait
déjà en latin : "belligerare".
BEMOL
Par: (pas credité)
L’étymologie du mot est un peu compliquée. Le signe du bémol est rond, avec une petite
queue ; donc il ressemble un peu à un b minuscule. Pourquoi mol ? Le mot hérité de
l’italien, puis de l’allemand est, bien sûr, de la même famille que mou (mollis) qui
signifie, entre autres, mineur. Le mode mineur est parfois considéré comme « adouci », «
émollient », par rapport au majeur. Et il se caractérise par l’abaissement d’un demi-ton du
troisième degré de la gamme. On a donc, dans la gamme de do par ex., un mi bémol pour
faire une gamme mineure.
Le premier des sens figurés est donc très facile à comprendre. Le bémol permet de «
baisser le ton ». Et mettre un bémol a voulu dire, veut parfois encore dire « baisser le ton
», le prendre sur un autre ton, se radoucir. « Au début, il s’est énervé ; mais quand Jojo
est sorti de la voiture et l’a toisé du haut de ses 2m07, il a mis un bémol ». De même, on
dit « mettre la pédale douce », si l’on veut utiliser une autre image musicale (la pédale
douce, dite « una corda », permet, au piano, une frappe plus enrobée de la corde. Elle
s’oppose à la pédale d’expression).
Dernier sens figuré assez souvent entendu : revoir à la baisse, corriger par défaut : le
directeur financier a mis un bémol au financement du projet.
Et dans ce dernier sens comme dans d’autres, on entend même l’étonnant néologisme
bémoliser.
126
BENOIT
Par: Yvan Amar
C’est donc Benoît qu’il se nomme, le nouveau Pape… Et quand je dis « qu’il se nomme
», je l’entends, au sens propre. Car l’un des premiers avantages de la papauté, l’un des
premiers au sens chronologique, l’un des premiers actes d’un Pape, sinon le premier
(après j’imagine une rapide action de grâce), c’est de se prendre un nom de pape. On ne
s’autoproclame pas… mais on se nomme.
Cette nomination ne saurait s’entendre comme une vanité. Ce n’est pas de l’auto-
engendrement… c’est, au contraire, se relier au passé, à une tradition, à un référent…
Peut-être le saint qui porte ce nom… ou le précédent pape qui l’a porté… Mais
l’étymologie, le premier sens du nom ne saurait être tenu pour tout à fait négligeable…
Le Pape défunt comme celui qui l’avait très brièvement précédé, s’appelait Jean-Paul, ce
qui les plaçait dans la continuité des deux papes précédents, Jean XXIII et Paul VI. Nom
assez étonnant pour un pape : c’était inaugurer une possibilité de noms doubles… C’était
également prendre un prénom qui correspondait à une génération, à une époque… En
français, tout au moins, le prénom Jean-Paul est un vrai prénom de la deuxième moitié du
XXème siècle. Au lieu que ce nom le mette un peu à l’écart de la communauté séculière,
il semblait l’y plonger plus profondément… Jean-Paul c’est d’abord le nom de votre
voisin, de votre cousin, de votre collègue, de votre ancien patron… de mille personnalités
dont on a les noms en mémoire…, de Sartre à Belmondo, que du pape.
Pour Benoît, l’affaire est différente. Non que Benoît ne soit un prénom courant dans le
français d’aujourd’hui (on a tous un ancien patron qui s’appelle Benoît…), mais c’est un
vrai nom de pape… avec une longue lignée derrière soi (une bonne quinzaine).
Et un sens !
Rappelons-nous d’abord que Benoît n’est qu’un nom français… qui dérive de benedictus,
en latin, « béni ». Et « bénir » est un verbe difficile à comprendre, qui rassemble deux
idées : le dire… et le bien. Bénir quelqu’un, c’est donc… non pas dire du bien de lui
(c’était le sens premier du verbe latin… louer…), mais prononcer une formule qui lui
attirera les bienfaits de Dieu, invoquer la puissance divine en faveur de quelqu’un. Etre
béni… c’est donc peut-être être placé sous le regard bienveillant de Dieu…
Mais, si ce participe a donné quelques prénoms français… (Bénédicte, Benoîte), il a aussi
donné des adjectifs. Benoît… qui n’est guère usité… et dont le sens a dérivé de
l’étymologie… qui ne signifie plus « béni », mais confit en dévotion… et parfois un peu
Tartuffe… De toute façon, il n’est pratiquement jamais utilisé… alors que « benoîtement
», l’adverbe qui en dérive, l’est parfois… avec le sens de « naïvement »… ou alors avec
une fausse, une feinte naïveté…
Quant à « benêt », autre adjectif de la même famille, il a tourné le dos à sa signification
d’origine pour signifier simplement béta, niais…
BERCER
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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E.LATTANZIO : Cessez donc de vous bercer d'illusions!
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BERNE
Par: Yvan Amar
« Drapeaux en berne » ! Laïcité en berne ! Deux titres relevés dans la presse d’hier, et qui
tous les deux font références au grand battage officiel qui fait suite à la mort du Pape.
Image figurée lorsqu’on parle de laïcité en berne… comme l’ont fait ceux qui pensent
qu’on en faisait un peu trop pour la mort de ce pape, et que l’église et l’Etat se mêlaient
d’un peu trop près… Le mot n’est jamais employé que sous cette forme adverbiale, « en
berne », et on l’entend parfois, appliqué à divers usages : une mine en berne, le chapeau
en berne… ce qui veut dire… souvent triste, mais parfois aussi déconfit, minable, la
queue entre les jambes…
L’origine du mot « berne » est peu claire. Même si l’on est sûr que le sens actuel est
hérité du vocabulaire maritime néerlandais. Le mot signifierait bord, ourlet, comme si le
drapeau, roulé sur lui-même évoquait un ourlet…
Alors attention : il ne faudrait pas confondre ce mot avec le verbe berner et sa famille : il
s’agit de deux tribus différentes.
« Berner » veut dire duper, tromper quelqu’un avec l’idée qu’on l’a bien eu, qu’on l’a
joué, mené en bateau, qu’on lui a fait croire ce qui n’était pas… Il s’agit, au départ, d’une
brimade très spéciale qui consiste à faire sauter quelqu’un dans une couverture… et hop !
et hop ! Le même mot servait, d’ailleurs, à désigner le vannage du blé, qu’on faisait
sauter au-dessus d’un crible. Et le « berne », ou « bren », désignait la partie grossière du
son, celle qui ne passait pas à travers les mailles du crible, le rebut.
Et c’est vraisemblablement de ce verbe qu’est dérivée l’expression « bernique », désuète,
plus guère en usage, mais amusante, qui veut dire… des clous ! des nèfles ! autrement
dit… rien du tout… Qu’est-ce que j’ai gagné dans cette histoire ? « Bernique ».
BEURRES
Par: (pas credité)
129
Le petit beurre, le biscuit est l'orgueil de la ville de Nantes. Notons d'abord
que ce mot est le pluriel irrégulier le plus célèbre du français, grâce à cette
vieille blague de potaches : un "petit beurre", des touilloux. Mais par delà
la fantaisie du calembour, doit-on s'étonner que le petit beurre soit une
mine d'or ? Oui et non, puisque le beurre a toujours entretenu une relation
très équivoque à la richesse, symbolisant tantôt la faiblesse et l'absence,
tantôt l'abondance, la prospérité et le luxe.
Paradoxe donc, du fait que presque toutes les autres locutions qui font
intervenir cette matière en exaltent le prix : le beurre, c'est le gras du
riche, le signe cossu du bourgeois : "ici, on fait la cuisine au beurre".
Dans cet ordre d'idée, le beurre représente d'abord le petit superflu :
c'est ce qui transforme la tranche en tartine (une tranche de pain/une
tartine de beurre).
Cela commence pourtant de façon assez modeste : "le beurre dans les épinards",
c'est un peu de luxe dans une vie ardue. Et l'expression s'utilise presque
toujours pour désigner un revenu de complément, un "en plus" par rapport
au revenu de base qui permettra de se payer un petit extra. Déclaré ou pas
au percepteur, "le beurre dans les épinards" n'a rien d'illégal. Mais
"l'assiette au beurre" est beaucoup plus louche : expression plutôt désuète
mais parlante, elle évoque une situation qui permet des profits indirects,
pas forcément licites, ni déclarés (commissions, pots-de-vins, avantages
en nature, tout est bon). Souvent liée à la corruption politique,
l'expression est devenue le titre d'un célèbre journal satirique du début
du siècle. (Cf. les radis/radicaux ). En tout cas, on voit bien que le
beurre, c'est la richesse, l'argent.
On comprend donc facilement que "faire son beurre", c'est amasser une fortune
personnelle.
BIBENDUM
Par: (pas credité)
Les "bibs" font la Une ? Pour répondre à cette question, il faut savoir ce que c'est qu'un
130
"bib", mot familier qui désigne (ou a désigné - c'est peut-être un peu ancien) les
travailleurs de chez Michelin, à Clermont-Ferrand. Pourquoi "bib" ? Parce que c'est
l'abréviation de "bibendum" qui est la mascotte et l'emblème de la marque. "Bibendum"
est en effet un gros petit bonhomme rigolard, représenté sous la forme d'un empilement
de pneus, et qui représente depuis plus d'un siècle ce fabricant de pneumatiques.
"Bibendum" est donc un mot d'origine à la fois plaisante et latine, prononcé comme le
latin d'autrefois (bibendome) et qu'on peut mettre sur le même plan que quelques autres
mots qui, en français, dérivent de cette forme gérondive : "mémorandum" (ce qu'il faut se
rappeler), et "référendum" qui évoque la nécessité de demander un avis, d'opérer une
consultation populaire.
BIBLIO
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
A Cahors se déroule en ce moment un salon des livres anciens. Endroit rêvé pour
rencontrer des bibliophiles. Et les bibliophiles sont ceux qui aiment les livres, cela se
comprend aisément, puisque biblios signifie livre en grec, et que -phile vient du verbe
philein, aimer. Mais il ne suffit pas d’aimer les livres pour être bibliophiles. Il faut aimer
les livres anciens, les livres rares, les livres précieux, parce qu’ils sont célèbres et qu’il
n’en reste que peu d’exemplaires, parce qu’ils sont fabriqués dans des matériaux nobles
et beaux. Enfin il y a mille raisons pour qu’un livre ancien soit recherché. Mais le
bibliophile en général n’est pas seulement celui qui aime les livres : il les connaît, il s’y
connaît, et bien souvent, il les collectionne.
Le mot bibliomane existe aussi, plus rare, et presque toujours ironique, pour pointer le
côté fétichiste ce celui qui aime un peu trop les livres. Le bibliomane non seulement aime
les livres, mais il les adore, il en est fou : c’est pour lui une manie.
Le mot bibliographie est un peu savant, mais quand même beaucoup plus fréquent : il
s’agit d’une liste de livres, avec parfois un commentaire critique, qui indique une série de
131
livres portant sur un même sujet. Et on en trouve à la fin d’ouvrages ou d’articles qui
traite du sujet en question. Vous avez lu un court article sur la disparition des dinosaures.
Si vous voulez en savoir plus, la bibliographie vous aidera à vous orienter à travers les
principaux livres qui exposent ce problème.
Bibliothèque enfin est un mot à sens multiples. Ce peut être l’endroit où l’on va
emprunter, ou consulter des livres. Mais ce peut être aussi l’ensemble de livres que l’on
possède. Ou encore le meuble qui les contient, ou encore la pièce où ils sont conservés.
BIBLIOTHEQUE
Par: (pas credité)
132
pas vraiment des mots entrés durablement dans la langue française,
mais qu'on forge, entend, comprend sans problème : BDthèque,
CDthèque, cassetothèque, partothèque (partitions musicales),
multimédiathèque, etc ...
BIDON
Par: (pas credité)
"Bidon" et "bidule" sont-ils frères ? Pas sûr, il semble que les origines
soient différentes. Mais en tout cas les deux mots se ressemblent, et si
c'est "bidule" qui a donné "bidouille", l'inconscient linguistique a évidemment
relié "bidouille" et "bidon". C'est pourtant d'un autre sens qu'il s'agit :
133
"bidouiller", c'est bricoler avec ingéniosité et bouts de ficelle un objet
technologique pour le réparer ou lui donner des capacités qu'il n'a pas ou
n'a plus. On "bidouille" un vieux moteur, un ordinateur, ou une moulinette à
carottes pour en faire un pommeau d'arrosage.
BILLARD
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
BILLETS
134
Par: (pas credité)
Alors qu’est-ce que c’est ? L’étymologie du mot est un peu obscure et controversée, mais
le billet est presque toujours un objet, matérialisé par un petit bout de papier ou de carton.
Le mot s’utilise d’abord pour ce qu’il y a d’écrit dessus. Il a, paraît-il, désigné une lettre
de cachet (c’est-à-dire un ordre d’emprisonner), puis une formule magique – mais ça,
c’est du passé lointain.
On parle encore de billet pour le spectacle. Il sert à entrer dans la salle, prouve que vous
avez payé votre place. A partir de là, quelques expressions : billet de faveur (vx pour
invitation, « exo »). Billetterie, ensemble des opérations de guichet, lors d’un spectacle :
on parle des recettes de billetterie.
On parle aussi des billets qui servent de bons de transport : billets de train, d’avion, etc.
Là encore, ils servent de récépissé, et attestent qu’on a payé son passage.
Et puis bien sûr, les billets de banque.
Mais, cette expression est loin d’être la première. On a parlé d’abord de lettre (lettre de
change, etc.) puis de billet d’épargne, de billet de change, avant que ces espèces fussent
monnaie courante. (Un mot sur les assignats, ces billets dont la valeur était gagée par une
assignation sur les biens nationaux ?).
BIO
Par: (pas credité)
135
Le salon Biovision a ouvert ses portes récemment (le 26 à Lyon). Biovision ! Pensez un
peu, on n'allait pas s'en priver. Ce salon a un sous-titre plus ou moins éclairant : premier
forum international des sciences du vivant. C'est dire qu'on nous propose tout à la fois
une vision panoramique sur le bio et une vision bio du monde.
"Bio" est donc un nom, un adjectif ? Dans son usage actuel et jargonnant, oui, plus ou
moins. Et il évoque le naturel, l'écologique, le sain. Le sens est plutôt vague et fait penser
globalement à une façon de retrouver un accord harmonieux avec la nature, au-delà de
toutes les pollutions et métamorphoses liées à la technologie moderne. Et au-delà de la
simple référence à la nature, ce préfixe fait allusion à des énergies terriennes, voire
cosmiques, avec lesquelles il faudrait se remettre en phase (on oriente son lit vers Vesoul,
on est sensible aux mauvaises vibrations du radiateur, les montres à quartz vous donnent
de mauvais rêves). Le mot n'a rien de vulgaire, mais ainsi abrégé (car il dérive de
"biologique", on va le voir), il sous-entend comme une connivence entre celui qui
l'emploie et celui qui l'entend. On va comme ça, le samedi matin, au marché "bio", c'est-
à-dire où l'on vend des produits issus de l'agriculture "biologique". Et même si tout le
monde sait qu'il s'agit d'un langage un peu relâché, et soumis aux caprices de la mode, il
arrive d'entendre des phrases telles que : "il est assez bio, il mène une vie très bio, on a
passé des vacances super bio". On est donc tenté de guetter ses biorythmes, cycles
occultes en rapport avec les marées, les éclipses, les planètes et l'éternel retour du tiers
provisionnel. On n'achète que des sacs biodégradables faits dans des matières que les
micro-organismes peuvent détruire.
Et tout cela dérive de la biologie, une science assez récente, puisque le mot n'apparaît
qu'en 1802, mis au goût du jour épistémologique par Lamark. La discipline a d'abord été
globalisante, regroupant toutes les études des êtres et phénomènes vivants, y compris la
zoologie et la botanique. Quand des dernières disciplines ont pris suffisamment
d'importance pour être totalement autonomes dans le champ scientifique, la biologie s'est
spécialisée dans l'observation de la vie même dans ce qu'elle a de plus spécifique, à
travers ses manifestations les plus isolables, et donc les plus ténues; tissus, cellules. On
parle ainsi de biologie cellulaire, moléculaire, etc.
Le préfixe a eu tant de succès qu'il a même servi à composer le nom d'un héros
transformable, aux pouvoirs imprévus, qui hante une bande dessinée japonaise : Bioman
qui, par un retournement plaisant, dans l'argot des jeunes, désigne parfois le père (celui
qui vous a donné la vie) : "Mon bioman, hier, il n'était pas de bon poil, il ne fallait pas lui
marcher sur les pieds.
BIODIVERSITE
Par: Yvan Amar
136
C’est le mot qu’on entend depuis quelques jours. On l’entendait déjà avant… mais sa
présence s’est fait nettement plus insistante ces jours derniers, grâce d’ailleurs au
Président de la République française… La « biodiversité » mot à mot, c’est la diversité du
vivant. Puisque bios, c’est la vie en grec. Et par « biodiversité », on entend la multiplicité
infinie des espèces, les millions d’herbes différentes, les millions d’insectes différents qui
vivent sur notre planète, dans l’air comme dans l’eau. Ce préfixe grec, on en a déjà parlé
souvent… Car il est productif… « Biologie », mais aussi « biodégradable », « bioéthique
»… Non seulement, il est productif, mais on voit qu’il est à la mode… Attention, ce mot
de mode n’est pas péjoratif… Mais, cela veut dire que ce qu’il évoque correspond bien à
des préoccupations ou même à des inquiétudes qui sont celles d’aujourd’hui, et qui
n’étaient pas celles, d’il y a une génération ! Là où jadis, à l’école, on apprenait les
sciences naturelles (après d’ailleurs la leçon de choses des années 50…), on apprend
maintenant les SVT, sciences de la vie et de la terre… On voit bien que c’est sur ce
terrain que la science avance, et qu’en même temps la technologie avance… On en sait de
plus en plus… Mais ce savoir est de plus en plus une menace possible… Donc, on
réfléchit sur cette « bios ».
Et on s’aperçoit que sa richesse tient en grande partie à sa diversité… Au fait qu’elle
prend mille formes… Et la diversité est aujourd’hui très appréciée…
Mais l’histoire du mot est étrange. Le sens premier de « divers », et de diversus en latin
est : qui va dans des directions opposées… Verto veut dire d’abord tourner…, mais s’est
souvent compris dans le sens de changer. Le verbe s’emploie, par exemple, à propos du
sort, de la fortune, de la vie… qui est changeante, imprévisible… Première « biodiversité
» qui insinuerait que la vie d’un même être vivant est variable…
Ce qui est « divers » est donc ce qui part dans tous les sens. Mais justement ce qui part
dans tous les sens est imprévisible… Donc… le mot « divers » a connu un destin
changeant… Il a fait peur… Il a signifié imprévisible dans le sens… qui peut changer
pour le pire… qui peut mal tourner… Et donc méchant, cruel… La diversité a été
synonyme de bizarrerie et même de méchanceté jusqu’à la fin du Moyen-âge…
Alors que, maintenant, le mot « diversité » évoque non seulement ce qui est différent,
mais ce qui est très différent, presque opposé… Si l’on parle de la « diversité » du talent
d’un artiste, cela signifie qu’il s’illustre dans des domaines très divers, très différents…
que parfois on ne peut comparer les différentes formes qu’il aborde…
Quant aux faits divers… ce sont justement les petites nouvelles inclassables,
intéressantes, mais imprévues, qui ne sont pas la conséquence d’une situation qu’on avait
déjà largement exposée ou analysée…
BIS
Par: (pas credité)
137
dizaines de mètres de son emplacement d'origine. Et voilà qu'on
inaugure un "Olympia bis" (c'est ainsi que les médias l'ont
présenté).
BIZUTH
Par: (pas credité)
La rentrée scolaire évoque toute une série de mots familiers, liés à l’école, dans toutes les
mémoires de ceux qui ont passé l’âge d’y aller.
On pourrait donc penser que l’argot des écoles, essentiellement oral et proféré par de
jeunes bouches, est quelque chose de volatile, changeant, incessamment renouvelé… Il
138
n’en est rien, en tout cas pour une partie de cet argot, qui a parfaitement intégré le
langage stable.
Ainsi en est-il du "bizuth", élève de première année d’une Grande Ecole, et par extension,
nouveau venu au lycée, ou au collège…
Le h final est longtemps resté facultatif, et l’origine du mot est obscure : peut-être le
"bésu", le "niais" en patois de Genève, lequel se serait légèrement transformé, pour
sembler plus mystérieux, ou plus savant (un peu comme dans le mot "khâgne", qu’on
aurait pu écrire "cagne" – la paresse : le mot désigne par ironie une classe préparatoire à
l’entrée à l’Ecole Normale Supérieure où l’on travaille beaucoup, et son orthographe est
artificiellement compliquée pour mettre en scène et railler l’érudition à laquelle sont
confrontés les "khâgneux").
139
américaines leurs confèrent un certain prestige.
BLACK-OUT
Par: (pas credité)
140
désigne l'encre noire avec laquelle les censeurs occultent les
passages censurés dans les journaux. Allusion au caviar, de
couleur noire. L'expression d'ailleurs vient de Russie, elle a été
employée la première fois pour désigner la censure tsariste.
L'idée de noir = caché se retrouve dans l'idée du travail au noir.
BLED
Par: (pas credité)
"Djurassic bled", titre humoristique d'une sortie qui, au TNP de Villeurbanne, change le
contexte géographique des ambitions hollywoodiennes. Calembour, bien sûr avec
Jurassic park, mais c'est le mot "bled" qui nous intéresse.
Le nom a émigré depuis longtemps de l'arabe algérien, mais sa caractéristique est d'avoir
fait une sorte d'aller retour avec les référents d'Afrique du Nord : d'abord très lié à ses
origines, il s'en est ensuite presque totalement éloigné pour y revenir en ce moment, et
marquer le vocabulaire des jeunes beurs.
Au départ donc, le mot vient de l'arabe "blad", qui signifie contrée, pays. Déformé en
"bled", il intègre l'argot militaire, puis le jargon colonial, pour désigner tout ce qui, dans
le pays colonisé (en l'occurrence l'Algérie), n'est pas une grande ville. C'est donc autant la
rase campagne que les villages (cf. ailleurs en Afrique, l'utilisation du mot "brousse", qui
n'est pas totalement sans rapport).
Mais le mot passe en français pendant la guerre de 1914, avec le sens très francisé du
petit village. Le "bled" se détache assez bien de ses origines et évoque volontiers un
hameau bien français mais qui a gardé de son étymologie le mépris du colonisateur. Le
mot devient donc assez péjoratif pour désigner une très petite localité, à l'écart, privée des
commodités des grandes agglomérations : "C'est un bled", c'est-à-dire il n'y a rien à y
faire, ni commerces rares ni lieux culturels, etc.
Le mot a été récemment remotivé du fait du développement d'un argot jeune parfois
marqué au coin du "petit beurre". Le "bled" renoue avec ses origines algériennes, et on
entend même une expression plaisante et bizarre : "bledman", qui désigne soit un
immigré de fraîche date, soit quelqu'un qui est resté fortement attaché aux traditions
algériennes et ne souhaite pas spécialement toutes les abandonner au profit de la vie
"moderne".
Des synonymes ? Pas tant que ça ! A part l'image encore plus péjorative du "trou", du
"trou paumé". Alors, c'est vrai, on a le "patelin", beaucoup plus neutre, dérive à partir de
"pâtis" : petit pâturage médiocre, terre inculte où l'on met les bêtes à paître pour reposer
les pâturages plus gras.
Quant à "hameau", le mot vient du "ham" francique, lui-même apparenté au mot "home".
141
Ça renvoie à une image de maisons à l'écart d'un village, rassemblées en petites grappes.
Attention, en France, un "hameau" n'est pas une commune. Et le mot est neutre, sans
aucun écho péjoratif.
S'il reste du temps, on peut évoquer tous les noms péjoratifs qui s'attachent aux habitants
des "trous" qui ne sont pas troués. Mais plutôt des "bouseux", des "cul-terreux", des
"ploucs".
BLEU
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
« Banlieues bleues » est le nom d’un célèbre festival de musique qui se déroule, en ce
moment, pour la vingtième année, dans la banlieue nord parisienne.
Mais aussi parce que « banlieue bleue » est le pendant de « banlieue rouge »… façon dont
on qualifiait une partie de la ceinture urbaine parisienne, qui votait à gauche et était un
bastion de la culture ouvrière parisienne.
En revanche, le bleu est plus souvent synonyme du noir, de l’obscurité : « Je suis dans le
bleu » signifie « je n’y comprends rien », « je ne distingue rien de précis », « je ne
m’oriente pas ». C’est ce que pourra dire le Commissaire dans une enquête qui n’avance
pas. L’image est encore en usage, bien que là encore, elle soit un peu ancienne.
Comme « je n’y ai vu que du bleu… » reformulation probable de « je n’y ai vu que du
feu ».
« Etre bleu » signifie également être extrêmement surpris, stupéfait, sidéré. Parfois, en
mauvaise part, quand on a été pris de cours, pris de vitesse, qu’on n’a pas eu le temps de
réagir (Suzy a pris le volant et a décidé qu’ils iraient manger au Grand Véfour. Il en est
resté bleu et s’est laissé faire »).
Mais, parfois aussi pour exprimer l’admiration (être bleu d’admiration). Dans les deux
cas, on a l’idée qu’on reste muet et immobile : être bleu, c’est rester pétrifié.
Et dans ce catalogue d’expressions un peu désuètes, on peut finir par « en voir de bleues
142
» qui est un genre de modulation d’une autre expression colorée : « en voir des vertes et
des pas mures ».
BLINDER
Par: (pas credité)
Le détroit de Gibraltar "blindé" ? C'est en cours, nous dit-on, puisque les autorités
espagnoles s'efforcent de contrôler le trafic clandestin qui s'y déroule (immigration,
drogues, etc.). Ce canal, a priori permettant un passage est-ouest, Méditerranée-
Atlantique, est en fait un point clé de la communication Sud-Nord. D'où l'intérêt de le
"blinder", c'est-à-dire d'en faire une porte qu'on ne force pas. Car c'est bien cette image
qui est à l'œuvre, celle de la porte "blindée", dont les serruriers dans leurs publicités nous
ont rebattu les oreilles, avec leurs cinq points, leurs cornières et leur prétendue
inviolabilité. On dit parfois aussi "cadenassé", mais plus souvent "verrouillé". La
métaphore fait appel à un système presque archaïque, apparemment pas très solide, le
verrou. Mais on parle bien de "verrouiller les frontières", ou même de "verrouiller un
service" quand on envisage d'en resserrer la discipline et surtout d'empêcher les fuites :
nul n'a à savoir ce qui se passe ici - surtout pas la presse (ça s'est entendu à propos de
police, de justice ou d'armée notamment).
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BLUES
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
BOITE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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E.LATTANZIO : Aujourd'hui débute le week-end "Sciences en fête".
Dans le cadre de ces manifestations le Musée du Temps de Besançon
organise un concours de "boîtes à temps".
145
...
BONHOMME
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Après le discours du Premier ministre français devant le Parlement, voilà qu’on parle à
propos de son style, de « libéralisme bonhomme ». Cela correspond assez bien à tout ce
qu’on a dit depuis sa nomination, de son allure, de sa figure, de son attitude… c’est-à-dire
peut-être pas de la politique qu’il va mettre en œuvre, mais de l’image qu’il veut donner.
Bonhomme… c’est-à-dire simple et modeste, peu intimidante, mettant en avant des
apparences de bon sens.
Puis, le mot va glisser d’une allusion sociale à une autre plus individuelle : le bonhomme
est un homme d’un certain âge : il s’oppose au jeune homme… c’est l’homme naïf, puis
facilement le mari trompé.
Aujourd’hui, le mot s’emploie encore couramment, mais souvent avec un sens plus
neutre : le bonhomme est le quidam, l’inconnu : « un bonhomme qui passait m’a indiqué
mon chemin ».
Mais, le mot a pris également un autre sens : le bonhomme évoque une silhouette : un
bonhomme de neige, un bonhomme dessiné en trois coups de crayon, un petit bonhomme
vert qui incarne un martien… et dans ce sens, le mot est vraiment d’un seul tenant : au
lieu, au pluriel de dire des bonshommes, on dira plus souvent (et de façon un peu
enfantine) des bonhommes.
Enfin, la bonhomie correspond à une certaine bonne humeur, un peu fataliste : une façon
de prendre les choses du bon côté, mais avec un air de dire… ça passera…
BOOMERANG
Par: (pas credité)
On donne le "boomerang", pièce de Bernard Da Costa, mise en scène par Myriam Boyer,
au studio des Champs-Elysées.
Le mot vient de l'anglais d'Australie (1823, Sydney Gazette). Probablement, le nom d'une
ethnie de la Nouvelle Galle du Sud (Australie) qui a fini par désigner un genre de massue
de jet dont se servaient lesdits Boomerangs.
146
Puisque précisément, sa particularité est de revenir à l'envoyeur quand il a raté sa cible
(bois, courbure, sûreté du geste millénaire y sont pour beaucoup).
Une dernière expression, au sens voisin, bien qu'un peu différent : les effets pervers :
effets secondaires négatifs, imprévus, opposés à l'effet général escompté (les effets
pervers du progrès, d'une loi sociale, etc.).
Les « santiags » sont des « bottes ». Et la « botte », objet et nom, n’est pas neuve. Mais
cette « chaussure » montante a depuis longtemps évoqué un univers particulier. La « botte
», c’est une « chaussure » d’extérieur, solide, qui protège. « Chaussure » de chasseur, de
guerrier, de cavalier souvent, elle est associée à un comportement considéré comme très
147
masculin, voire viril, et viril au sens de brutal : on n’entre pas au paradis avec ses « bottes
».
A propos de « bottes », c’est sans à propos (allusion à un esprit un peu rustre, qu’on prête
à ceux qui ont des « bottes » ? bavardage de corps de garde ?).
Les « bottes » représentent aussi le pouvoir, le pouvoir arrogant, le pouvoir qui fait peur
et qu’on courtise : lécher les « bottes » = complimenter, flatter dans un but intéressé. Etre
à la « botte » de quelqu’un, c’est être à sa disposition absolue, servile. Etre sous la « botte
», c’est être sous la domination, mais là, en général, pour une collectivité plus que pour
un individu : la Pologne, sous la « botte » allemande en 1940.
Et les bruits de « bottes » évoquent des risques de guerre, ou même plus souvent des
coups d’état militaires.
Quant à « botter », le verbe évoque aussi une évidente rudesse : c’est donner un coup de
pied, chaussé de « bottes », c’est en général « botter » le train, « botter » le cul,
expression familière, mais figée qui, là encore, évoque l’autorité musclée et méprisante.
Mais, on avait aussi « graisser ses bottes », et « laisser ses bottes » : se préparer à partir, à
mourir.
BOUC EMISSAIRE
Par: Yvan Amar
Des associations accusent le plan Villepin de faire des étrangers « des boucs émissaires ».
C’est un titre que j’ai relevé dans le Monde daté d’aujourd’hui… Je ne souhaite pas du
tout me prononcer sur le fond du débat, mais simplement éclairer le sens et l’usage de
l’expression bouc émissaire… Le plan du ministre de l’Intérieur français a suscité des
réactions contrastées dans le monde politique et associatif… Certains le critiquent donc,
en disant qu’il pourrait avoir une conséquence fâcheuse : faire des étrangers des boucs
émissaires, c’est-à-dire faire porter aux étrangers des responsabilités qui ne sont pas les
leurs, les rendre responsables de certains malheurs ou points noirs de la vie actuelle alors
qu’ils n’y sont pour rien… Mais, ce n’est pas tout… Dans l’idée qu’il y a des boucs
émissaires, on a aussi l’idée qu’on cherche à détourner l’attention… On pointe le doigt
sur de faux coupables, pour que le public… en s’y intéressant, oublie d’autres problèmes,
se focalise sur un point… et donc en oublie d’autres… Double fonction donc de ces
boucs émissaires.
L’histoire de l’expression nous fait remonter loin dans le temps, puisqu’elle trouve son
origine dans la Bible. Et dans un geste symbolique, un rituel d’absolution, de purification.
Tous les ans, au jour de l’Expiation, le grand prêtre du peuple d’Israël déchargeait les
pêcheurs de leurs pêchés. Et tout un rituel sacré permettait d’en charger un animal, un
bouc… qui se retrouvait coupable pour tout le monde… On n’avait plus ensuite qu’à
chasser le bouc dans le désert… Il quittait la tribu emportant tous les pêchés avec lui…
On a donc compris pourquoi il s’agissait d’un bouc ! Mais pourquoi « émissaire »… Le
mot est difficile… Il signifie, en effet, envoyé (il est de la même racine que le mot
mission, missionné…) et, en effet, le bouc est envoyé… dans le désert. Mais, ce mot
148
d’émissaire, dans l’expression qui nous occupe a une autre origine, même si les deux se
sont confondues… Il traduit un mot latin qui signifie « qui écarte les fléaux, les
catastrophes… et ce mot était la traduction d’une expression de l’ancien hébreu qui
signifiait « destiné à Azazel… », le mauvais ange.
Mais, les animaux de cette famille ont souvent mauvaise presse… Bizarre, pour des bêtes
souvent très pacifiques… Le mouton noir, par exemple. Que citait, il y a à peine quelques
jours, Jacques Chirac… Pourquoi est-il montré du doigt… Parce que les moutons sont
blancs, en général. Et que le blanc est la couleur de l’innocence, et le noir, celle de la…
noirceur… des mauvaises pensées… Peut-être parce que le mouton noir évoque
justement le bouc… mauvaise odeur, mauvais caractère qu’on lui prête…
Mais, au-delà de tout ça, on a également l’image de la brebis galeuse… celle qu’il faut
éloigner du troupeau pour qu’elle ne le contamine pas… puisqu’elle est malade et qu’on
la dit contagieuse… Image strictement inverse du bouc émissaire qui part avec les maux
des autres…
BOUCLIER
Par: (pas credité)
Le "bouclier humain" fait-il partie des tactiques mises en place par Milosevic ? Cette
expression qu'on a déjà entendue pendant la guerre d'Irak renvoie à un dispositif de
défense : placer autour des cibles stratégiques des civils, étrangers au conflit, ou en tout
cas à la nation ou à un groupe attaqué. Le dispositif se veut dissuasif, susceptible d'éviter
l'attaque ou le bombardement.
On comprend le sens de l'expression : il s'agit d'un bouclier, parce qu'il protège la cible en
la rendant intouchable. Il ne s'agit pas d'amortir le coup qui serait porté, mais d'interdire
ce coup. Cette idée de dissuasion, on la retrouve plus ou moins dans d'autres expressions
récentes : "bouclier nucléaire" …
L'image est ancienne puisque, pendant longtemps, la locution "faire un bouclier de son
corps" a été utilisée, pour dire protéger à ses risques et périls, avec un dévouement
extrême. Elle est hors d'usage aujourd'hui, mais on comprend et utilise encore "faire un
rempart de son corps", même si l'image est parfois un peu théâtrale. Le sens est tout
différent avec "la levée de boucliers", expression fréquente qui renvoie à une protestation
véhémente, collective, presque unanime et un peu institutionnelle (députés, syndicats,
personnalités…). L'origine est à chercher dans l'histoire romaine : "lever son bouclier"
était le signe qu'on refusait d'obéir à un ordre (cf. avec un autre sens dont la symbolique
est plus claire, mettre la crosse en l'air).
149
la protection, et d'une certaine façon avec la bénédiction, l'assentiment de l'ONU, etc. Il
s'agit donc là d'une opération couverte et mise en route par l'ONU. Et au sens propre,
l'"égide" est aussi un "bouclier", celui de Jupiter d'abord, puis de Pallas Athéna, arme
défensive redoutable : en effet, Persée, après avoir coupé la tête de la Méduse (hideuse
Gorgone), l'avait offerte à Athéna qui l'avait fixée au centre de son bouclier. Et cette tête
pétrifiait ceux qui posaient sur elle leur regard.
On finit avec l'"écu", moins mythologique et plus médiéval, et dont la postérité est plus
économique que militaire. Ce "bouclier" de chevalier, souvent symbolique de l'identité de
son possesseur est devenu souvent une partie importante de son blason. Donc "écu" a fini
par signifier "armoiries", et comme l'"écu" du Roi de France était représenté sur certaines
pièces de monnaie, l'"écu" est devenu la pièce. De là, de nombreuses expressions, sorties
d'usage aujourd'hui (avoir des "écus" moisis, cela ne lui fait pas plus peur qu'un "écu" à
un avocat, etc.) Devenu sigle de l'European currency unit, l'"écu" a failli devenir la
monnaie européenne. Mais l'euro veillait au grain.
BOUCLIER FISCAL
Par: Yvan Amar
La réforme des impôts présentée récemment par l’administration des Finances, en France,
a soulevé des inquiétudes et suscité des commentaires. Mais, l’un des points les plus
commentés concerne ce fameux bouclier fiscal qu’on nous propose. Drôle d’expression
en vérité. Que recouvre-t-elle ? En deux mots, ce bouclier fiscal viserait à limiter à 60%
des revenus du contribuable les impôts cumulés suivants : impôts sur le revenu, impôt sur
la fortune (le fameux ISF), taxe d’habitation et taxe foncière.
Comment expliquer cette image ? Elle est inattendue, certes, mais on peut mieux la
comprendre en explorant les évocations qu’elle fait naître : un bouclier sert d’abord à se
protéger. On veut donc répandre l’idée que cette disposition protègera le contribuable.
Contre des effets pervers possibles du calcul de l’impôt qui pourrait lui faire payer trop
par rapport à ce qu’il gagne. En d’autres termes, l’administration des impôts veut faire
passer l’idée qu’elle protège ses administrés contre des débordements dont elle pourrait
être la cause. Le recours à cette formulation montre le désir qu’a le gouvernement de
frapper les esprits en employant une image totalement inattendue. D’ailleurs, cette image,
elle semble étonnante parce qu’elle en supplante une autre : celle du plafond, du
plafonnement.
C’est comme ça qu’on dit, en général : on plafonne les impôts. C’est-à-dire qu’on leur
met une limite supérieure pour éviter qu’ils ne montent trop haut. Mais là, c’est comme si
on assistait à un bouleversement de perspective : au lieu de placer un rempart en haut,
empêcher l’impôt de monter inconsidérément, on plaçait le rempart de façon frontale. Ce
n’est pas seulement qu’on empêche l’impôt d’aller trop haut, c’est qu’on l’empêche de
venir frapper le contribuable au cœur… Enfin, certains contribuables, puisque cette
mesure par sa nature même, ne pourra favoriser tout le monde.
Et, du même coup, on évoque tout un univers de chevalerie, de tournoi. On transporte la
150
logique fiscale au Moyen-âge… Enfin, n’exagérons pas : on sait que cette image du
bouclier a été récemment employée dans un domaine qui n’avait rien de médiéval : on se
souvient de l’opération « bouclier du désert » lancée par les Etats-Unis en prélude à la
première guerre du Golfe, en 1990.
BOUFFON
Par: (pas credité)
151
vient peut-être d'un pléonasme expressif, puisque la syllabe
"bouff" évoque souvent les joues gonflées, à cause de sa
prononciation. C'est peut-être ce genre de formation expressive
qui a abouti à des mots comme bouffer, bouffi, bulle, ballon.
Yvan Amar
BOUGER
Par: (pas credité)
Ce qui montre bien que cette expression « ça bouge » est à la mode, et même qu’elle
représente, qu’elle est symbolique du parler des jeunes…
Le mot s’emploie dans des emplois divers… On n’a qu’à se souvenir de la célèbre
152
chanson « Bouge de là » popularisée par le chanteur MC Solaar. Bouge de là, c’est-à-dire
dégage, tire-toi, va-t-en ! C’est bien sûr de l’argot.
Le verbe peut contenir d’autres évocations : les syndicats n’ont pas bougé. Ça veut dire
qu’ils n’ont pas réagi, qu’ils ne se sont pas manifestés, qu’ils ont laissé faire, en fait… Et
« se bouger », dans une langue plus familière encore… veut dire se donner soudainement
du mal, réagir : « Faut que tu te bouges si tu veux trouver du travail cet été » – sous-
entendu, ça ne te tombera pas « tout cuit » dans la bouche.
Quelques dérivés : on avait bien bougillon, mais hélas, le mot a totalement disparu, alors
qu’au milieu du XIXème siècle, le bougillon était un jeune enfant très remuant, incapable
de se tenir tranquille.
BOULANGER
Par: (pas credité)
153
qui fabrique les boulenc, sortes de pains ronds, dérivés de la bolle
néerlandaise. Est-ce que ces pains ronds sont des boules ? Non, c'est le
hasard : la bolle ne semble pas avoir de rapport avec l'origine bulla.
La boulangerie est en général associée à d'autres activités : le plus
souvent, les enseignes précisent : boulangerie-pâtisserie, et souvent même
confiserie.
Pâtisserie et pâtissier dérivent bien sûr de pâte, donc de pasta, mais par
l'intermédiaire du provençal pastiz, dont on a déjà vu que l'histoire était
extrêmement compliquée.
De toute façon, au départ, le pâtissier, c'est celui qui fait des pâtés. Il
est donc beaucoup plus proche de celui qu'on appelle aujourd'hui le
charcutier, voire le traiteur. La pâtisserie a d'ailleurs eu mauvaise
réputation en ce qu'elle faisait aussi office de cabaret, et qu'elle était
souvent synonyme de lieu mal famé. Furetière lui-même déclare qu'il était
"honteux de les fréquenter, que les gens prudes n'y entraient que par
derrière et que c'était une effronterie d'y entrer par le devant". Mais
Furetière met tout cela au passé. Au XVIIème siècle, c'est déjà de
l'histoire ancienne. Toutefois ce n'est qu'au XIXème siècle que le pâtissier
délaisse pour de bon la charcutaille pour ne plus embrasser que les
gâteaux.
Quant à la confiserie, elle fait un peu désuète aujourd'hui dans la mesure
où cette activité (fabriquer des bonbons, des sucreries, et des chocolats…)
est presque exclusivement industrielle : La pie qui chante, Mars et Nestlé
ont eu raison de l'artisan confiseur.
Les viennoiseries, ces spécialités du petit déjeuner auraient leur origine
à Vienne, après la victoire des Austro-Hongrois sur les Turcs, en 1689.
Elles auraient imité les pâtisseries orientales, d'où la forme et le nom
du croissant, emblême, par ailleurs, des états musulmans, vaincus mais
inspirateurs, Et puisqu'on parlait d'enseigne, saluons, en cette matière
un néologisme : la croissanterie.
154
un chien-taureau, soit qu'on se souvienne qu'il gardait
efficacement les troupeaux de bovidés, soit que son cou puissant
évoque celui du taureau - les deux origines sont probablement
vraies toutes les deux.
BOURREAU
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Il y a peu de jours, à l’hôtel Drouot à Paris – et on sait que l’hôtel Drouot est un hôtel des
Ventes important, on a vendu aux enchères les quatorze carnets d’Anatole Deibler. De
quoi parle-t-on dans ces fameux carnets qui se sont arrachés pour une somme assez
rondelette ? Les souvenirs du bourreau ; les souvenirs de 395 exécutions capitales, 395
têtes tranchées, 395 guillotinnages – je sais que le mot n’existe pas, mais vu le nombre de
ces actions, on aurait aussi bien pu le créer pour Deibler. Car Anatole Deibler a été
bourreau de 1885 à 1939, sinistre longévité pour un sinistre métier.
Mais est-ce un vrai métier que d’être bourreau ? Aujourd’hui, heureusement, cette charge
155
– pas un métier, certainement mais ce mot de charge, qui est celui qui convenait sent
encore son ancien régime n’existe plus en France.
Le mot bourreau dérive du verbe bourrer, dont un des sens était maltraiter, taper, faire
mal à quelqu’un. On a encore l’expression « bourrer de coups », par exemple pour
attester ce sens. Quant au mot bourru, on l’emploie de nos jours dans le sens « peu
aimable, toujours de mauvaise humeur » et souvent avec un sous-entendu positif : il est
bourru, mais sous cette carapace se cache un grand cœur. Mais le vieux personnage du
moine bourru (popularisé par Sganarelle qui en parle à Dom Juan) rappelle que bourru
était souvent associé à terrifiant dans la langue classique.
Revenons à notre bourreau. On le sait, c’est l’exécuteur des hautes œuvres, c’est celui qui
tue un condamné à mort, qui comment donc cet assassinat légal. On peut remarquer
qu’on ne dit jamais que le bourreau tue. C’est pourtant vrai, mais ça répugnerait à la
langue administrative. On dit qu’il exécute. Qu’il exécute quoi ? La sentence. Et par un
glissement de sens exécuter quelqu’un a signifier le tuer, sur ordre, suite à une décision.
Alors les bourreaux sont toujours vivants, avec des sens différents. Le mot est parfois
employé comme synonyme de tortionnaire, celui qui torture.
Et on le trouve dans des expressions imagées et bien moins effrayantes :
Le bourreau des cœurs – séducteur impénitent, employé pour des hommes uniquement
qui réduisent les cœurs féminins à leur merci, mais aussi qui les brisent . A la chaîne, ils
séduisent et abandonnent. Bourreau de travail et cette expression est encore plus étrange.
Le bourreau de travail est celui qui traille énormément. Pourquoi bourreau. Il exécute son
travail ? Ou le met à mort, en vient à bout alors que d’ordinaire on s’attend à ce que ce
soit le travail qui vienne à bout du travailleur. Tout cela est possible mais bizarre. Encore
un des charmes de la langue française.
BOURSE
Par: (pas credité)
L'ensemble des entreprises cotées forme le marché boursier. Le particulier qui a des
actions en bourse achète et vend. Lorsqu'il s'agit d'une personne qui a un " portefeuille "
assez réduit, on dit qu'il " boursicote " : le mot, comme celui de bourse vient d'un petit
sac, le boursicot où l'on plaçait ses petites économies. Expression dérivée. Ses actions
sont en hausse, en baisse : expressions imagées pour dire que quelqu'un a plus ou moins
de chance de réussir, qu'il a aussi plus ou moins de " crédit " dans une affaire, qu'on lui
fait ou non confiance, qu'il est plus ou moins bien vu des personnes dont il sollicite les
faveurs ( monde du travail ou de la vie privée ).
156
2- A la baisse, à la hausse. Traditionnellement on parle de cours de Bourse en hausse ou
en baisse. Cette terminologie décrit un état de fait objectif : les cours sont en hausse ou en
baisse aujourd'hui, à l'heure considérée. La valeur des actions, dans sa globalité est en
hausse ou en baisse. Cette terminologie a donné naissance aux mots " haussier et baissier
" pour désigner les attitudes des investisseurs qui spéculent sur l'une des deux possibilités
de la côte.
BOUTEILLE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : C'est simplement être fin saoul. Ce n'est pas d'une jeune
femme grisée par son cavalier qu'on parle ici : le jeune homme est
une expression ancienne qui désigne une bouteille contenant entre
trois et quatre litres. Donc, lorsqu'on avait son jeune homme ...
on avait bu plus que de raison.
157
ce terme pour désigner une bouteille à double contenance.
BOUTEILLE
Par: (pas credité)
Ces appellations ne datent que du XIXème siècle. Mais c'est surtout selon les contenances
qui vont changer les mots - avec des dénominations anciennes ou encore actuelles qui
donnent lieu parfois à des expressions :
"Avoir son homme" = être complètement ivre (le jeune homme était une grande
"bouteille" contenant quatre litres environ).
La "bouteille" la plus fréquente contient elle (75 à 80 cl). Il n'y a guère que le vin très
ordinaire qu'on avait coutume de vendre par litre - et on parlait alors de "litron", mot qui a
une connotation un peu peuple. Quand la contenance est moindre, on a des noms
158
particuliers : "le pot Lyonnais" = 50 cl, la "fillette" notamment en Anjou et dans la région
nantaise. Ou encore le "magnum", et là on est au-dessus de la "bouteille" standard (150 cl
pour le Bordeaux, 160 pour le Champagne). Bien sûr, cet emploi dérive du latin grand,
mais, honte à l'orgueil national, il a été emprunté à l'Angleterre, où il est attesté fin
XVIIIème, bien avant d'être en usage en France.
On a aussi la "Marie-Jeanne" (225 cl), et le double magnum (300 cl). Mais, il existe une
autre série utilisée pour le Bordeaux, et le Champagne. Là encore, merci les Anglais.
Jeroboam, roi d'Israël est décrit comme fort et vaillant . Il n'en faut pas plus pour que les
Anglais désignent par là une grande bouteille de boisson alcoolisée.
BOYCOTT
Par: (pas credité)
Boycott ou boycottage. On a beaucoup entendu les deux ces jours derniers. On aurait pu
croire que, le mot se répandant, il est senti comme de plus en plus français, et donc
spontanément francisé. Il n’en est rien : boycottage existe depuis de XIXème siècle,
depuis que le mot nous est arrivé d’Irlande. Mais, le nom boycott, à l’anglaise, est
également utilisé. Une nuance ? Boycott pour le procédé, et boycottage pour l’opération ?
C’est donc un mot irlandais ?… Enfin c’est plutôt un mot anglais, passé par l’Irlande.
Le sens d’abord : boycotter veut dire refuser systématiquement toute transaction
commerciale avec un producteur, une firme, un magasin, dans un but de rétorsion. A la
question, maintes fois posée, faut-il boycotter Lu, nous allons donc répondre : voyons
d’abord l’histoire de ce mot.
159
magasin quand on n’y va pas.
BRADER
Par: Yvan Amar
Va-t-on brader EDF ? Oui pour les uns ; non pour les autres. Il s’agit, en tout cas,
d’évaluer la façon dont le gouvernement va opérer la privatisation de cette société du
service public, qui gère, vend, distribue l’électricité en France. Car, on le sait, c’est ça le
sens du sigle EDF : électricité de France. Et EDF est sur le point d’ouvrir son capital,
c’est-à-dire de se vendre par fragments, et par conséquent, d’entrer en bourse… ce qu’on
appelle une privatisation, puisque des titres pourront être acquis par des investisseurs
privés. Ce qui est, en gros, le mouvement inverse d’une nationalisation.
Privatiser, soit. Encore faut-il que le bien public ne soit pas vendu au-dessous de son prix.
Et donc que son propriétaire actuel, l’Etat, ne soit pas lésé. On peut donc se demander s’il
est opportun de privatiser, si on le fait au meilleur moment, et dans les meilleures
conditions. Autrement dit, si on n’est pas en train de brader EDF. Et c’est le mot-cliché
qui revient sans cesse. Son sens est clair : céder à vil prix, au-dessous du prix. Et le mot
ne s’emploie jamais que dans une intention polémique : si on le prononce, c’est pour
accuser le gouvernement : personne n’irait se vanter de brader le service public ! On peut
donc proposer divers synonymes : dilapider, gaspiller, solder, se débarrasser de… De
toute façon, on dénonce ! Qui dénonce ? Si on est bien dans le vocabulaire de la
polémique, ce vocabulaire n’appartient pas définitivement à une famille politique . La
plupart du temps, c’est vrai, on entend parler de braderie lorsqu’un gouvernement, de
tendance plutôt libérale, veut faire passer un opérateur du service public entre des mains
privées. On est donc enclin à penser que brader est un mot des tribunes de la gauche, qui
fustigent la droite. Mais, il y a un peu plus de quarante ans, où trouvait-on se mot ? Il
émanait des rangs de la droite et de l’extrême droite qui s’insurgeaient contre la
décolonisation : De Gaulle brade l’Algérie ! C’est donc un mot qui voyage dans les
idéologies.
Il est vieux d’ailleurs, ce mot. On le trouve dès le XVème siècle en français, qui
l’emprunte à la langue flamande : braden veut dire rôtir ! On est bien loin du sens actuel.
Et si l’on suit le dictionnaire historique d’Alain Rey, on découvre que le mot a vu son
sens évoluer : flamber, rôtir… puis brûler, laisser brûler… donc laisser perdre, gâter ! Le
mot s’utilise en français, mais surtout semble-t-il, en français de Belgique, restant
relativement proche de ses origines. Et capter par les brocanteurs et chiffonniers : brader,
c’est casser le prix du marché et se débarrasser d’une marchandise à tout prix : liquider,
en quelque sorte.
160
Et là, le mot peut être récupéré avec un écho tout différent, et plutôt positif : on organise
des braderies… c’est-à-dire des opérations de soldes extrêmement avantageux pour les
acheteurs, dans le but de se débarrasser des fins de stock.
Et on parle de plus en plus de braderie, soit quand un magasin ferme, soit même
lorsqu’une foire convie tous les particuliers qui veulent faire un peu de place à vendre,
sans vraiment de désir de profit, tout ce qui les encombre : la braderie n’est plus très loin
du vide-grenier.
BRAGUETTE
Par: (pas credité)
Télébraguette… C’est clair : il s’agit de programmes qui vous flattent par vos bas
instincts. Qu’on imagine vulgaires, grivois, suscitant des intérêts et des excitations
douteuses. Laissons aux programmateurs leurs responsabilités. C’est cette expression qui
nous intéresse, comme si ce qu’on montrait à la télévision s’adressait plus à la braguette
qu’à la tête.
Notons d’abord l’étrange machisme de ces expressions : la braguette est une pièce
d’habillement masculin, (et les dessous de ceinture n’évoquent pas plus les femmes) alors
que les programmes de la télévision, pour vulgaires qu’ils soient, s’adressent aux
hommes comme aux femmes, et qu’il n’est pas sûr que ces émissions soient regardées par
une forte majorité masculine.
Tout ça se passe au-dessous de la ceinture, autre expression indirecte qui évoque une
sexualité assez mécanique et basse : rires gras et érections hâtives. On parle souvent de
plaisanteries qui se situent au-dessous de la ceinture… Et la braguette se situe
évidemment dans ce même registre : elle évoque une sexualité fruste, et donne même lieu
à des expressions peu ragoûtantes telles qu’escaladeuse de braguette ou braguetteur
(séducteur brutal, d’après Rey).
Deuxième remarque : la braguette est métonymique, et l’expression fait allusion au
contenu, même si elle ne désigne que le contenant.
Au fait ! La braguette aujourd’hui est la fente pratiquée dans les pantalons masculins, qui
s’ouvre ou se ferme à l’aide de boutons ou de dangereuses fermetures éclair, et sert (le
plus souvent) à faire pipi rapidement et à peu de frais : clic clac. Maintenant, on
s’expliquera facilement combien le ricanement est facile et l’imagination vagabonde.
La braguette a une longue histoire : avant d’être l’ouverture qu’on connaît, c’était une
petite poche attachée à la ceinture. Et en fait, la braguette est une pièce de la brague, ou
braie.
La brague a été, au Moyen-Age, la partie saillante de la cuirasse, située au dessous de la
161
ceinture : la localisation de la braguette se dessinait déjà. Mais encore auparavant, la braie
ou brague était le pantalon des Gaulois.
BRAS DE FER
Par: Yvan Amar
Un nouveau préfet vient d’être nommé à la tête de la Préfecture de Paris. Ce sera Pierre
Mutz, et non pas Claude Guéant. C’est-à-dire que ce sera la personnalité soutenue par le
Président de la République et non celle qui avait les faveurs du ministre des Finances. Et
pour citer la presse d’hier, cette nomination a fait l’objet d’un long bras de fer entre
Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Un bras de fer ! En voilà une expression imagée…
qui exprime bien l’idée d’un affrontement vif entre les deux hommes politiques. Vif et
qui dure…. Quand chacun campe sur sa position. Quand aucun des deux ne veut céder.
Pas de dialogue, pas de discussion, pas de négociation. Et, d’ailleurs, l’expression
s’emploie souvent dans des cas où il est impossible d’abandonner un pouce de terrain…
ou deux ou trois… On cède ou on ne cède pas … On est donc dans une logique du tout ou
rien. On l’emporte ou l’on plie… Et c’est bien l’image… Il y a celui qui fait plier et celui
qui plie.
« Plier » ou « faire plier »… C’est bien de cela qu’il s’agit dans le jeu… ou l’épreuve
physique qui est à l’origine de l’expression. On l’a tous fait… ou presque ; on a tous
lancé ou relevé ce défi un peu bête : les adversaires s’assoient face à face, posent leur
coude sur la table, avant-bras contre avant-bras, main contre main. Et on pousse…
Jusqu’à ce que l’un des duellistes fasse pencher l’autre, amène son avant-bras contre la
table.
Pourquoi « bras de fer » ? L’image est fréquente pour évoquer la force, la solidité… le
fer, c’est solide… L’image du bras est-elle aussi fréquente ? On la trouve à plus d’un
détour de phrase, représentant l’autorité et la force, le bras symbole de la personne…
Rappelons-nous le Cid : « Ce bras qu’avec respect toute l’Espagne admire/ Ce bras qui,
tant de fois, a sauvé cet empire/ Tant de fois raffermi le trône de son roi/ trahit donc ma
querelle, et ne fait rien pour moi ? Il s’agit ici du bras qui tient l’épée, d’un bras à deux
bouts, pourrait-on dire… D’un côté, il aboutit à l’épée qui est son prolongement… De
l’autre, il aboutit à la volonté qui l’anime… Il est donc comme le moyen terme entre
l’arme et l’esprit…, vrai symbole de la force…
Mais, le bras, plus souvent encore, est symbole de l’activité… quand il s’anime, et de la
passivité ou de l’abandon quand il reste inerte… : les bras ballants (= sans avoir rien à
faire)… les bras croisés (quand on n’a rien à faire.. ou qu’on refuse délibérément de faire
quoi que ce soit, en particulier, de travailler, de s’activer…) Ou même baisser les bras :
renoncer à lutter, reconnaître qu’on ne pourra rien faire contre une situation qu’on
déplore…
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BRAVO !
Par: (pas credité)
Bravo ! L’exclamation sert à témoigner son admiration. Le mot nous vient de l’italien.
On l’entend encore, d’autant qu’on a gardé le superlatif italien, même s’il est un peu
emphatique, ou employé par ironie: bravissimo. Le nom s’accorde à la française (les
bravos fusaient – et non les bravi) alors que jusqu’à la fin du 19è siècle, on utilisait
encore le féminin brava lorsqu’on acclamait une femme. Homme ou femme, le mot
renvoie en tout cas au rituel de la scène, et les bravos du public s’adressent aux
comédiens et aux musiciens, à la fin d’une pièce, d’un morceau de musique, d’un concert.
Et c’est par rapport à ce mot de bravo qu’on comprend mieux ce qu’est un morceau de
bravoure : pièce musicale ou scène de théâtre, ou encore tirade qui permet d’exhiber, de
faire valoir au mieux ses qualités. Il s’agit en général de montrer une exécution brillante,
virtuose, spectaculaire, dans un morceau à effet, un peu démonstratif, où on se met en
valeur.
Mais attention, bravo est un mot bizarre : souvent cri d’enthousiasme, il peut être
prononcé de façon tout à fait calme : jeune homme, je vous dis bravo. En même temps, il
correspond à un geste : l’applaudissement. C’est donc un mot qu’on dit et qu’on fait. On
peut applaudir avec plus ou moins de chaleur, et on en module l’expression : applaudir à
tout rompre. Applaudir des deux mains est un pléonasme pittoresque et expressif, dont
l’emploi a un sens un peu particulier : il signifie qu’on exprime avec force – mais dans un
langage un peu ampoulé, son approbation. On est là tout à fait sorti du monde du
spectacle. Le député a applaudi des deux mains en apprenant que le gouvernement allait
augmenter le Smic. On exprime donc un accord plus que des félicitations.
L’applaudimètre nous fait revenir dans la salle de spectacle. Le mot est un peu ancien –
radio-crochet etc. Le chanteur l’a emporté à l’applaudimètre (l’appareil, bien sûr est
imaginaire).
Quant à l’ovation, c’est le stade suprême des acclamations, qui réunit applaudissements et
exclamations d’enthousiasme. L’anglicisme standing ovation, porté par un effet de mode,
est d’ailleurs de plus en plus employé par des benêts, le plus souvent ignares. L’ovation
au départ, est une cérémonie romaine où l’on acclamait un général victorieux qui allait
sacrifier une brebis (ovis) pour rendre grâces aux dieux. A moins qu’ovation ne vienne
d’une onomatopée grecque, ancêtre de notre hourrah, qui exprimait le plus haut degré de
l’enthousiasme : Euhoï !
BRETZEL
Par: (pas credité)
163
PARLER AU QUOTIDIEN DU 16 JANVIER 2002
Le bretzel est à l’honneur. Enfin, à l’honneur, cela me plaît à dire. Mettons « en vedette ».
A-t-on failli parler du bretzel maudit ? A-t-il manqué coûter la vie au président des Etats-
Unis ? Est-il la cause de l’ecchymose que celui-ci arbore au haut de la pommette gauche
?
C’en est assez, en tout cas, pour qu’on s’interroge sur le passé de ce mot modeste, qui
désigne un petit gâteau apéritif. La pratique de l’étymologie suscite d’étranges
comportements. On ne peut s’empêcher au bout d’un temps d’avoir une sorte de réflexe
intuitif, quand on évalue, soupèse, scrute un mot. On se fait sa petite idée… Parfois
juste… Et parfois, on tombe complètement à côté.
Bretzel, par exemple. « J’ai tout de suite vu le « bret », « bread », « bröt » »… Le pain
était là. Restait le zel. Le sel. Un petit pain salé…c’est tout à fait ça.
Une rapide interrogation circulaire pour savoir ce qu’en pensent ceux qui m’entourent…
Vous ne devinerez pas les trésors d’imagination que telle interrogation pouvait susciter.
Bretzel ? Bien sûr, c’est une ville autrichienne. Ne vous y fiez pas : aucun rapport.
Bretzel ? Alfred Bretzel ? Ce sera quelque ancêtre du grand pianiste. Mon Dieu, quel
manque de rigueur !
Alors qu’en pense Alain Rey, dont on peut espérer qu’il ne se livre pas à ce genre de
gamineries ? Eh bien d’après lui, la première attestation du mot se situe en 1492. Ça ne
vous dit rien ? Et la découverte de l’Amérique, alors ? Troublant. Le bretzel apparaît à
l’horizon de l’Ancien Monde au même moment que le Nouveau. Amérique et bretzel, la
main dans la main…
Le bretzel balbutie encore : c’est la forme bréchale qu’on trouve à Neufchâtel. Le haut
allemand disait « brezitella », emprunt au bas-latin ; le haut allemand est parfois si haut
qu’il touche le bas-latin qui est parfois si bas… « brachitella ». Tout ça dérive de
brachium, le bras. Cette gâterie est donc un genre de pâtisserie aux petits bras. Ainsi, se
comprend la forme de cette croustillade légère, saupoudrée de sel ou de cumin en Alsace.
On en servait jadis dans les brasseries pour accompagner la bière. Aujourd’hui, on les sert
avec des boissons apéritives, en concurrence avec des noix de cajou, des cacahuètes, des
olives ou parfois des petits morceaux de fromage. Les boulimiques peuvent même se
payer le célèbre « mélange apéritif » qui propose une intéressante compilation de tout ce
qui se fait de mieux en la matière. Mille goûts dans la bouche ? Tout ça ne vaut pas un
bon bretzel.
BRICOLAGE
Par: (pas credité)
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Bricoler, c'est faire de petits travaux plutôt accessoires, non
spécialisés, que tout le monde peut faire, (ou presque), pour réparer une
panne, aménager la maison. L'idée qui prime est celle de travail non
professionnel. Donc avec les moyens du bord, un outillage parfois
approximatif, et beaucoup d'imagination et de sens de la débrouille. Il
s'agit au départ de récupérer et de détourner outils et matériaux de leur
fonction première.
BRICOLE
Par: (pas credité)
Avez-vous le bonheur d’avoir un mari qui bricole, ou une femme qui bricole ? Ça vous
change la vie. C’est ma vraie idée du bonheur – ou presque – d’avoir quelqu’un qui, à la
maison, puisse changer le joint d’un robinet qui fuit, réparer la prise ou repeindre la salle
de bains.
Bricoler, c’est en effet savoir effectuer une petite réparation, alors que ce n’est ni votre
métier, ni votre spécialité. Ça nécessite d’être adroit, inventif, débrouillard…
Et surtout, il faut utiliser des matériaux à des fins qui ne sont pas leur destination
première : on cale une pile avec une pièce de monnaie, on fixe un pied de chaise avec un
vieux bout de fil de fer…
165
Bricoler peut être transitif, et dans cet emploi, il a souvent le sens de réparer, à condition
que cette réparation soit faite avec des moyens de fortune… « Je t’ai bricolé ton poste de
radio : il remarche… mais pour combien de temps ? »
Ce sens s’est installé en français depuis la moitié du XXème siècle, ou un peu avant…
mais le mot, lui-même, est bien plus ancien, et on l’a longtemps trouvé avec des sens
différents.
La bricole est, au départ, une arme de guerre, un genre de catapulte. Puis, il a désigné la
bretelle d’un portefaix, c’est-à-dire, en gros, d’un déménageur. Aujourd’hui encore, le
mot appartient au vocabulaire technique de ceux qui déménagent les appartements, ou
transportent des meubles.
Enfin, le verbe bricoler, dans un sens tout à fait moderne, signifie qu’on se livre à divers
petits travaux, pas vraiment suivis, pas vraiment importants : on s’occupe à droite à
gauche, on bricole…
BRONZETTE
Par: (pas credité)
Vive les vacances ! Voici que revient le temps du bronzage. Se faire bronzer : obsession
de quelques vacanciers – c’est-à-dire exposer sa peau au soleil pour lui faire prendre une
teinte agréablement caramélisée. Ce n’est qu’une mode esthétique, qui fait penser qu’un
corps bruni est plus joli. Jadis, au contraire, on se protégeait du soleil, et rien n’était plus
désirable qu’une peau laiteuse, pour les canons de la beauté occidentale. Mais
aujourd’hui, on aime se faire bronzer – enfin surtout les blancs, car lorsqu’on bénéficie
d’une couleur naturelle, cet avantage vous dispense des tracas du bronzage.
Bronzer, c’est donc se rapprocher de la teinte du bronze, cet alliage de cuivre et d’étain.
Souvenons-nous en passant que ce verbe a eu, au temps passé, un autre sens figuré :
rendre résistant comme le bronze, ce que nous rappelle cette formule qui eut son heure de
gloire : il faut que le cœur se brise ou se bronze.
Mais revenons aux vacances : pour soigner son bronzage, plusieurs expressions plus ou
moins familières : on pratique la bronzette, le bronzing, la grande bronze (familier, sur le
modèle de la grande bouffe, ou de la glisse… Il y a toute une mode de formation de
substantifs féminins à partir de verbes du 1er groupe, en –er), le tournedos, etc.
Un début de bronzage, qui hésite entre bonne mine et léger fonçage de la peau, est un
hâle, et le verbe hâler s’emploie couramment, suite plutôt à un séjour au grand air qu’à
une exposition délibérée au soleil cuisant.
166
Le mythe du bronzage a donné naissance aux « bronzés », personnages comiques,
satiriques et un peu vulgaires d’une série de films populaires. Mais ne pas confondre avec
l’euphémisme déplaisant à connotation raciste : il est bronzé, (variante de basané) pour
dire il a un type d’Afrique du Nord.
Depuis quelques années, le bronzage n’a plus si bonne presse, et on parle beaucoup des
dangers du soleil sur la peau. Se sont donc beaucoup développés les produits qui
protègent des méfaits des rayons du soleil : après avoir activé le bronzage, ils le freinent.
Ainsi a-t-on parlé de crème solaire, d’huile solaire, d’ambre solaire (marque déposée), et
aujourd’hui, l’expression écran total (même si elle est techniquement fallacieuse, paraît-
il) s’est généralisée. Et la formule est si répandue qu’elle sert de façon figurée, pour faire
un titre d’émission consacrée au cinéma, ou faire comprendre que quelqu’un laisse son
répondeur téléphonique branché en permanence pour ne pas être dérangé : l’écran total
est devenu l’intensif du filtrage.
BROUILLON
Par: (pas credité)
Mais, le mot brouillon n’appartient pas en propre (passez-moi cette coquetterie) au jargon
littéraire ; il est bien plus souvent relié au monde de l’école : les élèves ont un cahier de
brouillon, pour travailler, s’exercer, mais pas pour remettre à leur professeur un travail
fini. Le brouillon est donc destiné à être recopié, mis au propre. On oppose donc le propre
et le brouillon.
Brouillon dérive évidemment de brouiller : idée d’un travail dont l’inscription témoigne
d’hésitations d’essais, d’améliorations… donc qui n’est pas net, pas fixé.
Des synonymes ? Oui, mais qui sont moins propres (encore ce jeu de mots stupide !) à
l’école, et nous font revenir davantage à la création artistique.
Une esquisse, une ébauche, par exemple. Mais, on pense plus à un plan, un projet, les
grandes lignes (des linéaments, disait-on), qu’au premier état d’une réalisation.
Ces deux mots semblent appartenir, pour leur sens littéral, au domaine de la peinture ou
des arts graphiques. Etymologiquement, ce n’est pas tout à fait vrai.
167
L’esquisse vient d’un mot italien qui signifie tache d’encre, tache d’un liquide qui gicle.
Au-delà de la symbolique éjaculatoire, l’image nous renvoie à une image d’une création
jaillissante et incontrôlée, qui précède la forme que lui donnera le travail. Et on retrouve
cette même image lorsqu’on parle d’un premier jet, première rédaction d’un texte.
L’ébauche, elle, vient d’un verbe qui signifie au départ dégrossir, émonder, en parlant
d’un tronc dont on veut faire une poutre.
A noter que les deux verbes ébaucher et esquisser signifient aujourd’hui commencer,
n’avoir pas fini : ébaucher un geste, esquisser un refus : on comprend l’intention, bien
que son expression ne soit pas achevée.
BROUILLON ET PALIMPSESTE
Par: (pas credité)
168
sur un même matériau de départ : "repentir" d'abord. Au-delà de
son sens religieux, le mot désigne les changements qu'un artiste
peut opérer sur une oeuvre, une fois que celle-ci est terminée.
Parfois, on utilise de façon technique, le terme italien
"pertimento", notamment en peinture, lorsqu'un peintre a recouvert
un fragment de toile déjà peint par autre chose. Et on ne parle de
"pentimento" que si l'on devine, grâce au travail du temps, le
premier état sous le deuxième.
BÂTIR – CONSTRUIRE
Par: (pas credité)
Voici deux mots, à peu près synonymes, mais qui pourtant ne s’emploient pas toujours
dans les mêmes contextes, ni avec les mêmes nuances.
« Bâtir » peut parfois s’employer sans complément, de façon « absolue ». Mais, à part ça,
on peut bâtir une maison ou, au figuré, un projet…
Au départ, le mot veut dire « fortifier » – et même auparavant, « tisser » : on retrouve une
séquelle de cette signification encore aujourd’hui, lorsqu’en couture, on parle de « bâti
»…
Enfin, c’est presque toujours lui qu’on emploie dans l’expression « bâtir des châteaux en
Espagne », c’est-à-dire imaginer des projets grandioses, un avenir radieux, tout cela hors
de la réalité…).
« Edifier » est un autre verbe de sens assez proche, quoiqu’il indique une certaine
envergure : on « édifie » un château, une ville, un immeuble… pas une hutte, bien que ce
soit le sens étymologique : aedem aedificare : construire une hutte, en latin.
169
« Elever » est moins concret encore. Et l’image de verticalité que comprend le mot
correspond souvent à un hommage rendu.
Le verbe « ériger » a, lui aussi, des sens très voisins, mais il s’emploie essentiellement en
ce qui concerne des statues, qui pointent vers le ciel.
BUDGET
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Ah Dieu sait qu’on en parle des budgets en ce moment, des arbitrages budgétaires, des
choix budgétaires du gouvernement français, qui semble avoir favorisé les ministères du
maintien de l’ordre : surveiller et punir comme disait Michel Foucault. Mais tout ça ne
nous explique pas ce qu’on appelle un budget. C’est la somme d’argent allouée à un
service, à une institution ou même celle dont dispose une personne privée, un ménage,
une famille. Si je vous dis mon budget mensuel est de mille euros, cela veut dire que j’ai
mille euros qui rentrent par mois. Tout compris : salaire, allocations familiales, bourse
d’étude pour les enfants. Et qu’avec ça, je devrai me débrouiller pour payer le loyer, les
vêtements, le cinéma, l’assurance de la voiture et les vacances des enfants. On voit donc
que le mot budget indique non seulement la somme dont on dispose, mais aussi son
organisation, la répartition des différents postes budgétaires comme on dit. Alors le mot
fait un peu administratif. Mais il est, surtout dans le langage des bureaux, assez productif
: on dit budgéter ou budgétiser. Les mots sont du bout des lèvres dans le Robert 2002. On
leur donne à peu près le même sens.. Pour moi, il semble qu’il y ait une petite différence,
dans leur emploi : budgétiser, c’est inscrire une dépense au budget. Alors que budgéter
peut être employé dans le sens d’ évaluer le coût d’une opération, et voir comment ces
sommes vont se répartir. A l’inverse, on a formé débudgéter pour signifier qu’on
supprime un poste du budget. Et en particulier qu’on transfère une dépense publique vers
un organisme privé.
Et on a même entendu l’adjectif plaisant budgétivore : qui grève le budget, qui dévore le
budget à belles dents, qui coûte cher.
Budget, est un mot que le français a emprunté à l’anglais, qui l’avait auparavant emprunté
à l’ancien français. Aller retour fréquent. La bougette est en effet un petit bouge, c’est à
dire un petit sac de cuir qui peut servir de bourse
Et en Angleterre, comme le rappelle Alain Rey dans son dictionnaire, le Chancelier de
l’Échiquier, chargé des finances, était chargé d’ouvrir le Budget (open the budget)
BUDGET
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
170
Ah Dieu sait qu’on en parle des budgets en ce moment, des arbitrages budgétaires, des
choix budgétaires du gouvernement français, qui semble avoir favorisé les ministères du
maintien de l’ordre : surveiller et punir comme disait Michel Foucaut. Mais tout ça ne
nous explique pas ce qu’on appelle un budget. C’est la somme d’argent allouée à un
service, à une institution ou même celle dont dispose une personne privée, un ménage,
une famille. Si je vous dis mon budget mensuel est de mille euros, cela veut dire que j’ai
mille euros qui rentrent par mois. Tout compris : salaire, allocations familiales, bourse
d’étude pour les enfants. Et qu’avec ça, je devrai me débrouiller pour payer le loyer, les
vêtements, le cinéma, l’assurance de la voiture et les vacances des enfants. On voit donc
que le mot budget indique non seulement la somme dont on dispose, mais aussi son
organisation, la répartition des différents postes budgétaires comme on dit. Alors le mot
fait un peu administratif. Mais il est, surtout dans le langage des bureaux, assez productif
: on dit budgéter ou budgétiser. Les mots sont du bout des lèvres dans le Robert 2002. On
leur donne à peu près le même sens. Pour moi, il semble qu’il y ait une petite différence,
dans leur emploi : budgétiser, c’est inscrire une dépense au budget. Alors que budgéter
peut être employé dans le sens d’ évaluer le coût d’une opération, et voir comment ces
sommes vont se répartir. A l’inverse, on a formé débudgéter pour signifier qu’on
supprime un poste du budget. Et en particulier qu’on transfère une dépense publique vers
un organisme privé.
Et on a même entendu l’adjectif plaisant budgétivore : qui grève le budget, qui dévore le
budget à belles dents, qui coûte cher.
Budget, est un mot que le français a emprunté à l’anglais, qui l’avait auparavant emprunté
à l’ancien français. Aller retour fréquent. La bougette est en effet un petit bouge, c’est à
dire un petit sac de cuir qui peut servir de bourse.
Et en Angleterre, comme le rappelle Alain Rey dans son dictionnaire, le Chancelier de
l’Echiquier, chargé des finances, était chargé d’ouvrir le Budget (open the budget).
BUDGET
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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budget-vacances, de budget-transport avec le sens "somme d'argent
réservée à un certain usage".
BUG ET BOGUE
Par: (pas credité)
On sait que la plupart des ordinateurs ont été programmés pour que seuls les deux
derniers chiffres d'un millésime changent lorsqu'on passe à une nouvelle année.
Or, le 1er janvier 2000, ce sont les quatre chiffres qui changent... Alors bug ? ou bogue ?
"Bug" est bien sûr un anglicisme. Ce mot anglais désigne un insecte qui a ordinairement
mauvaise presse : une punaise.
Avec une ambiguïté : un "bug" informatique n'est justement pas un virus informatique :
un "bug" est un défaut de conception, alors qu'un virus est un élément perturbant introduit
délibérément pour gêner ou détruire un programme.
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Cette francisation se confirme au niveau des dérivés du mot : "déboguer", "débogage"
n'ont plus rien d'anglais.
BULLE
Par: (pas credité)
Qui "bosse", qui "bulle" ? C'est le thème d'une enquête récente menée par un grand
hebdomadaire français, et qui pose la question du sens de ces mots, familiers tous les
deux. "Bosser", c'est travailler. "Buller" - puisque le verbe existe, c'est le contraire, à peu
près, c'est ne rien faire, ou pas grand chose, sans que le mot soit réellement péjoratif. Ça
évoquerait plutôt une oisiveté tranquille et heureuse, de même que l'expression "coincer
la bulle", qui semble plus familière encore, et qui bizarrement est plus ancienne, et
semble même à l'origine de la tribu.
Et cette origine est, paraît-il, militaire. Dans l'artillerie, il convient (il convenait peut-être
: les progrès sont constants dans ce domaine) que l'affût de certaines armes fût bien
précisément horizontal pour que le tir pût être soigneusement ajusté. Il fallait donc
vérifier cette horizontalité, à l'aide d'un "niveau", petit appareil qui indique qu'il est à
l'horizontale lorsque la "bulle" qui surmonte une certaine quantité d'eau est comprise
entre deux repères précis. Il faut donc coincer cette "bulle" dans le logement adéquat -
une corvée qui n'est pas trop pénible à accomplir.
"Bulla", en latin, évoque une petite boule, en particulier celle qui est accolée au sceau
d'une lettre ou d'un parchemin. Par extension, la "bulle" a désigné le sceau lui-même ;
puis la missive, d'où l'usage d'appeler ainsi les décisions du pape. Un recueil de "bulles" a
été appelé un "bullaire", et le mot "bulletin" est de la même origine.
Maintenant, le mot a pris d'autres sens, à partir de son image légère et transparente. En
particulier, la "bulle" des prématurés, milieu clos et aseptisé, dans une maternité, où ces
nouveau-nés, arrivés un peu tôt sont mis à l'abri des agressions extérieures, et protégés
contre les attaques infectieuses.
De là, l'expression "être dans sa bulle" : être dans son monde à soi, isolé, sans grand souci
du monde extérieur, de la foule, du bruit, de "la vie qui va", au profit d'un repli protecteur
et un peu frileux.
BUNKER
Par: (pas credité)
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Henri Konan Bédié, ancien dirigeant ivoirien, récemment déposé par Robert Gueï, s'est -
paraît-il -réfugié dans son "bunker" de Daoukro, qu'il a ensuite quitté.
Au sens figuré, on emploie parfois le terme pour désigner un endroit très difficile d'accès,
bien défendu, à la manière d'un camp retranché : "Le patron se terre dans son bunker.
Impossible d'avoir un rendez-vous".
Quant à la "casemate", c'est un mot qui nous vient de l'italien, mais dont le sens n'est pas
très éloigné. Camouflées souvent, cuirassées puis bétonnées, c'étaient aussi des abris
défensifs, où l'on pouvait nicher des batteries d'artillerie, et qui étaient aménagées à flanc
de coteau.
OPA
Par: Yvan Amar
Alors sigle de quoi ? C’est la première question qu’on se pose. Une OPA est une offre
publique d’achat… Et c’est la plus célèbre opération de toute une série qui se décline en
quatre possibilités : OPA, OPE (offre publique d’échange), OPRA (offre publique de
rachat d’actions), OPR (offre publique de retrait). Quatre actions économiques qui nous
font entrer dans le monde mystérieux de la haute finance… sans qu’on sache trop à quoi
ça nous expose…
174
Et, en fait, bien que le mot OPA évoque le plus souvent une opération de conquête
économique, on distingue entre OPA hostile ou pas, OPA amicale ou inamicale. Je vous
l’accorde, l’OPA amicale est plutôt rare… Ou simplement, on n’en parle peu… Si elle est
si cordiale, elle ne fera pas couler beaucoup d’encre. Et, donc, le terme ne se répandra pas
hors du jargon économique. En revanche, celle qu’on dit inamicale suscite commentaires
et polémiques. Non contente d’être publique, elle est à la une de l’actualité. Et alors en
quoi ça consiste ? Simplement à ce qu’un investisseur propose de racheter toutes les
actions de ce groupe, à n’importe quel possesseur, et à un prix plus haut que celui qui est
au même moment coté en Bourse... A quelle fin ? C’est simple : pour prendre le contrôle
de l’action. Ce côté agressif, presque militaire, en tout cas stratégique de ce mouvement
se sent jusque dans la grammaire qui permet de l’exprimer : on dit « lancer » une OPA
comme on dit lancer une attaque.
ETAT D'URGENCE
Par: Yvan Amar
L’expression a été prononcée beaucoup depuis quelques jours, et elle émeut. Elle est faite
pour, ne nous étonnons pas ! En effet, l’état d’urgence renvoie à une loi qui date de 1955,
qui a été promulguée durant la guerre d’Algérie, appliquée une seule fois depuis, en
Nouvelle-Calédonie. Elle évoque, donc, une situation particulièrement grave, qui
permettrait au pouvoir exécutif d’avoir des pouvoirs étendus, et de prendre rapidement
des mesures qui, en temps normal, ne peuvent l’être qu’après consultation d’élus, de
représentants du peuple… Donc le mot en impose, ne serait-ce que parce qu’il évoque
une situation d’exception : un état d’urgence, ça se déclare, ça se décrète. Et ça fait donc
immanquablement penser à ces états exceptionnels : on décrète l’état de siège ; on décrète
la Patrie en danger… Il y a là une solennité qui, au-delà même des dispositions que
permet cette déclaration, fait ressortir la situation comme grave. C’est la magie du mot.
175
Car à y regarder de plus près, l’expression est extrêmement vague, même si elle recouvre
des implications juridiques précises.
Elle est vague parce qu’elle manque de complément : de quelle urgence s’agit-il.
L’urgence de faire quoi ?
Car l’urgence elle-même ne désigne que le fait qu’on soit pressé, qu’on se trouve dans la
situation de faire quelque chose sans retard. Vous rappelez-vous la célèbre scène du Dom
Juan de Molière, où Elvire vient voir chez lui le séducteur ? Voilà un état d’urgence : le
sujet dont Elvire veut entretenir Dom Juan (le salut de son âme) ne supporte pas de
retardement ! Il y a, donc, urgence lorsqu’il y a péril en la demeure… Au sens propre.
Puisque, dans son premier sens, cette expression signifie qu’il y a péril à rester sans agir,
sans rien faire : il y a danger à demeurer sans rien faire. Le nom urgence a donné le verbe
urger, peu usité, et souvent de façon un peu plaisante ou ironique : ça urge… A part ça, le
nom s’emploie souvent dans l’expression « en cas d’urgence ». C’est-à-dire s’il se
produit quelque chose qui nécessite une intervention, une décision immédiate, pour régler
un problème grave. Car, en fait, le mot prend son sens à la jonction de ces deux idées :
c’est à la fois pressé et important. Et en général imprévu, qui dérange le train-train, la
routine : le docteur Dupont n’est pas là : on l’a appelé pour une urgence.
Et si cet exemple mettait en scène un médecin, ce n’est pas totalement pour rien : c’est
que le mot urgence a souvent un usage médical. Et même qu’on appelle « urgences » un
service particulier des hôpitaux : on va aux urgences : le service où l’on peut arriver sans
rendez-vous, car un problème de santé rend nécessaire le recours à des soins spécialisés.
Et les séries télévisées ont d’ailleurs beaucoup fait pour populariser le mot.
CA PASSE OU CA CASSE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
176
Y.AMAR : L'idée contenue dans "ça casse" est différente. On peut
la comparer à "ça coince", mais dans cette dernière phrase, on n'a
pas l'idée du quitte ou double. Si ça coince (une voiture qui
manoeuvre par exemple) on s'arrête, on recule, on braque ... puis
ça passe.
CA VA
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Ca va Evelyne ?
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sens. Si quelqu'un par exemple oublie de vous tenir la porte, vous
pouvez lui crier énergiquement "Ca va pas ? Ca va pas la tête ?"
C'est-à-dire "qu'est-ce qui vous prend ?" On voit (et l'omission
de la négation le prouve) que l'expression est bien familière.
CAÏD
Par: (pas credité)
On en parle beaucoup, de ces "caïds", notamment en ce moment dans les banlieues. Les
"caïds", ce sont les chefs de bande, ceux qui, dans un milieu où la loi peut avoir du mal à
se faire respecter, commandent ou se font respecter. Il s'agit là d'une loi parallèle non
écrite et officieuse, bien sûr : une loi hors-la-loi, parfois loi des hors-la-loi. Mais, dans des
circonstances difficiles, les autorités peuvent parfois avoir des échanges avec ces "caïds",
lorsque ceux-ci sont susceptibles d'exercer un contrôle que la police n'arriverait pas à
faire accepter. Jeu dangereux en tout cas.
Mais, le mot "caïd" a été employé bien avant que l'on se préoccupe des quartiers
difficiles. Dans les prisons en particulier, la discipline imposée par le système
pénitentiaire est souvent doublée par une autre hiérarchie, interne et clandestine. Et les
"caïds" font régner leur pouvoir. Ça ne veut pas forcément dire que l'administration
carcérale se repose sur ce système : on n'est pas dans le système des kapos (emprunt à
l'allemand ; référence aux camps de concentration).
Mais, on parle aussi des "caïds" de la pègre, puisque ce mot est présent depuis longtemps
en argot, pour désigner les grands chefs de bande.
Mais, le mot "caïd" vient de l'arabe, langue dans laquelle il n'a aucunement un sens
argotique. C'est un chef, simplement, et le mot dérive -paraît-il- d'une forme d'un verbe
178
qui signifie commander. Dans les pays arabes, il a désigné un notable officiel. Le mot
arabe a peut-être transité par l'espagnol, mais a probablement été remotivé par l'argot
colonial.
Bientôt Noël ? Tout de suite des cadeaux. Avec un arrêt perplexe sur ce mot
dont l'évolution sémantique a été inattendue et sinueuse. "Cadeau" vient du
provençal "cabdel", de la même famille que le latin "caput" = "tête", puis chef,
etc. Et "cabdel" a d'abord signifié lettre capitale, majuscule. Dans les
manuscrits, en effet, les capitales étaient souvent décorées d'ornements à
la plume, parfois d'ailleurs de têtes de personnages. Pour toutes ces
raisons, on parlait de lettres cadelées, puis de cadeaux. Le sens du mot a
évolué, pour désigner des fioritures, tous les "en-plus" dont les maîtres
de calligraphie ornaient les exemples qu'ils donnaient à leurs élèves. De
là, on est passé au sens de paroles superflues mais mielleuses, qui
enjolivaient le discours et tournaient la tête de l'auditeur. Au XVIIe siècle,
le sens change encore, et le cadeau devient un artifice de
séduction pour gens aisés : c'est une partie de plaisir offert à des dames,
avec repas somptueux et accompagnement musical (Cf. le moderne "et mon petit
cadeau ?"). On attendra enfin la fin du XVIIIème pour trouver le sens moderne.
La question qu'on se pose donc est simple : pendant toutes ces années,
comment faisait-on pour parler de ce qu'on offrait à quelqu'un ? Deux mots
principaux : "don" et "présent", avec, en gros, deux sens différents : le "présent"
est l'objet offert, et le "don" est plutôt le geste d'offrir.
179
fréquente, l'expression "faire présent" = "donner".
"Don" est également assez rare, avec souvent un sens juridique (mais
attention, on a aussi "dation" et "donation") ou plutôt officiel. Dans un
musée, par exemple: "don" de l'artiste.
Mais le mot a un autre sens quand il évoque une qualité, une disposition
naturelle, et qu'il renvoie alors non pas à donner mais à être doué (mais
les deux verbes sont au départ de la même famille): "don" du ciel, "don" des
langues…
CAFÉ
Par: (pas credité)
"Il a le dos large le café"… Si l'on en parle aujourd'hui, c'est qu'on a le prétexte d'une
renégociation compliquée des accords commerciaux qui le concernent. Mais si l'on dit
qu'"il a le dos large", c'est qu'il accueille la plus large des métonymies et qu'il désigne
toute une série de choses différentes.
Une graine d'abord, celle du "caféier" - il faut bien commencer par le commencement - et
l'on sait que ce grain, torréfié comme il faut et moulu comme il se doit, permet qu'on y
fasse passer de l'eau chaude qui prendra sa couleur, son arôme et son charme. Le "café"
est donc essentiellement une boisson : ce n'est pas le seul sens du mot, ni le premier mais
c'en est pour ainsi dire la signification centrale, celle d'où fusent toutes les autres.
Ce "café" boisson peut passer du partitif au comptable : on dit du "café" (en général) -
"Balzac buvait du café, beaucoup de café"… - mais "je peux aussi commander un café ou
deux ou trois", c'est-à-dire une, deux ou trois tasses.
Mentionnons au passage l'expression "ça, c'est un peu fort de café !" qui joue sur la "force
du café" : plus la boisson est concentrée en "café", plus on dit qu'il est "fort". Et cette
locution signifie simplement "c'est exagéré, abusif…".
Et passons tout de suite à la couleur qui se module avec le lait : "café au lait" désigne en
général une couleur de peau, sans que l'expression soit nullement péjorative, méprisante
ou raciste. C'est assez rare pour être signalé, tant la langue a mauvaise réputation.
Mais le "café" est une affaire sociale : il peut se boire seul ou à plusieurs, et bien qu'on en
boive à peu près quand on veut, on le considère traditionnellement plus à sa place à
certains moments - notamment après le repas, et spécialement le déjeuner. Le "café" est
donc devenu une heure de la journée et désigne même un type d'habitation : "Passe pour
le café", signifie "passe après le déjeuner" (sous-entendu : "je ne t'invite pas pour le
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déjeuner, mais à venir me voir juste après").
Enfin, le "café" est un lieu, bien sûr, celui où l'on sert, où l'on boit du "café", mais celui
où l'on se rencontre, où l'on parle. Au départ, le mot a été dissocié d'estaminet, de cabaret,
lieu où l'on buvait du vin, lieu de rencontre considéré comme plus trivial, alors qu'au
"café", les discussions étaient plus relevées. Mais, bien vite, le "café" est devenu plus
large et plus usuel : on y boit ce qu'on veut, et la notion de lieu de convivialité est
toujours très vivante à travers des expressions récentes ou même assez nouvelles, qui
renvoient au spectacle ou à l'activité qu'on pratique dans ces établissements : "café-
concert", "café-théâtre", "café-musique", et même "cybercafé".
CAISSE
Par: (pas credité)
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Y.AMAR : Au sens le plus littéral, d'abord : on se sert d'une
caisse, ou d'une petite caisse (une cassette) pour y ranger ses
biens : argent, bijoux, etc ... Cf. Molière et "les beaux yeux de
CAISSE
Par: (pas credité)
La "caisse" au départ, c'est un simple coffre, mais très vite, le mot s'est
spécialisé pour désigner le coffre où l'on serrait les biens les plus
précieux : argent et bijoux.
Ce qui explique le glissement de sens : une "caisse" est devenue un
182
établissement financier qui reçoit, administre et parfois distribue des
fonds : "caisse d'assurance maladie", "caisse d'épargne" ….
Enfin, dernier emploi argotique qui date des années 70 : une "caisse" c'est
une voiture. D'où les expressions : c'est pas pour dire, mais il y a de la
"caisse" ( = la circulation est difficile), ou bien, plus courant : "à fond
la caisse" (= pied au plancher).
L’avenir est-il à la calculette ? Mystère ! L’avenir nous le dira. Mais, en tout cas, le
présent est à la calculette : l’arrivée de l’euro et le relatif désarroi qu’il peut provoquer
chez eux (ils sont nombreux) qui ont encore un peu de mal à savoir ce que valent les
choses avec cette nouvelle monnaie. Donc, on calcule, on convertit. Et pour calculer, on
peut s’en remettre à sa tête, mais on peut aussi avoir recourir à quelque béquille
électronique : la calculette.
La calculatrice existe donc depuis un certain temps. D’abord, machine de bureau, assez
importante, et au fonctionnement mécanique, on l’a appelée machine à calculer, sur le
modèle machine à écrire, ou machine à coudre. Comme sa taille se réduit ; qu’elle
s’autonomise, on en réduit aussi le nom : calculatrice, féminin de calculateur. Une
183
seconde en compagnie de ce calculateur, mot qui existe encore, avec un sens très
particulier. Il s’applique à un homme, pour préciser non seulement que c’est quelqu’un
qui calcule bien, qui connaît le calcul (Cf Beaumarchais : « Il fallait un calculateur ; ce
fut un danseur qui l’obtint »), mais quelqu’un qui manque de spontanéité, dont les
réactions et les attitudes sont dictées par l’intérêt, l’ambition, le calcul, froid, rapide et
cynique.
La calculatrice, machine bête et sans âme, est exempte de tous ces vices : on disait qu’elle
se réduisait ; en effet, et au fur et à mesure qu’elle devient « de poche », son nom se
réduit aussi, et devient plus familier : on parle de calculette.
Remontons encore dans le temps pour parler du boulier, l’ancêtre de notre calculette. Très
ancien moyen de compter, petite machine formée de tringles sur lesquelles coulissent des
boules qui représentent des unités, des dizaines et des centaines… mais dont bizarrement,
le nom n’apparaît en français que tardivement, vers le XIXème siècle.
CALENDRIER
Par: (pas credité)
Une exposition sur les calendriers met ce mot à l’honneur, alors même qu’on l’emploie
souvent dans le sens tout à fait particulier d’emploi du temps : « on a un calendrier chargé
» quand les activités se succèdent sans pause ou presque. C’est évidemment ce qu’on
appelle une métonymie. Le calendrier qui aide à organiser le temps est mentionné à la
place du temps organisé. Et la métonymie va bon train peut-être parce que le mot
commence comme « calepin » ou « carnet », qui plus encore que le « calendrier » servent
à mémoriser les choses à faire.
Le calendrier est, en tout cas, un objet – souvent un rectangle de carton qu’on peut
accrocher au mur, et sur lequel il est loisible d’écrire, de colorier, de marquer, de quelque
façon les moments occupés et ce qui les occupera.
On parle souvent de calendrier des Postes – ceux qui, avec leurs belles et naïves images
sont distribués en fin d’année par les facteurs à qui on en profite pour donner leurs
étrennes…
Mais, le mot vient du latin calenda. Ce mot désignait le premier jour du mois, alors que le
quinzième était appelé « ides ». Et les Calendes étaient connues parce que
traditionnellement, c’était le jour choisi pour qu’on paye se dettes.
Mais ce n’est pas seulement ce qui explique l’expression « renvoyer aux calendes… »
c’est-à-dire « à jamais ». Cette locution ne se comprend que si l’on sait qu’elle est
tronquée. Il faut comprendre « renvoyer aux calendes grecques ». Or, le calendrier grec
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ne connaissait pas les Calendes. C’était donc renvoyer à une date imaginaire.
CALENDRIER
Par: (pas credité)
185
contrôle des naissances qui tendait à développer les méthodes
contraceptives. Ça date de cette époque. Mais le terme a été
traduit par "régulation" ou "contrôle" des naissances et non
"calendrier des naissances", qui serait trop déterministe.
CALENDRIER
Par: (pas credité)
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comme anglicisme dans les années soixante, époque où il était en
vogue : souvenons-nous du "planning familial", mouvement pour le
contrôle des naissances qui tendait à développer les méthodes
contraceptives. Ça date de cette époque. Mais le terme a été
traduit par "régulation" ou "contrôle" des naissances et non
"calendrier des naissances", qui serait trop déterministe.
C’est aujourd’hui que sort en France un nouveau film intitulé « Iznogoud »… Film, on le
sait, tiré d’une bande dessinée célèbre, dont les personnages font maintenant partie de
l’imaginaire français. Si le petit monde d’Iznogoud a eu du succès, cela se mesure à cela
seul que certains traits de ces histoires sont même connus de ceux qui ne les ont jamais
lues. Ainsi, la phrase qui est devenue un cliché figé : « Il veut être calife à la place du
calife. » Son sens est simple. Il exprime le désir profond de celui qui veut prendre le
pouvoir. Et donc éliminer celui qui le possède. Mais, la phrase est amusante : Le
malheureux vizir ne dit pas qu’il « veut être calife »… ni qu’il « veut prendre la place du
calife »…
Mais, il utilise cette répétition délibérément maladroite : être calife à la place du calife…
Ce qui donne un caractère à la fois sot et enfantin à ce dessein à la fois noir et naïf.
Régression, envie, mauvais sentiments… ce qui fait rire est justement l’exagération du
trait. Iznogoud est un stéréotype, méchant et prévisible, en même temps qu’il est bête et
inefficace… Car le malheureux n’arrive jamais à ses fins. Et sa phrase récurrente est
souvent citée lorsqu’on veut mettre à nu les intentions profondes de quelqu’un, qu’on
révèle ainsi être aussi basses et primaires que celles d’Iznogoud.
Et dans cette phrase, le mot « calife » symbolise le pouvoir, et même le pouvoir absolu,
sans partage, sans limite, pouvoir du caprice d’un seul. Et, de turbans en babouches,
l’imagerie d’Iznogoud se situe dans un Orient de bazar et de pacotille : on sait que «
calife » est le nom de certains souverains musulmans, mais il évoque cet Islam ancien qui
séduisait, fascinait, faisait peur… cet orient mystérieux que révèle ces mots de « calife »,
de vizir (conseiller du souverain… le grand Vizir faisant fonction de Premier ministre
dans l’empire Ottoman, il est par définition celui qui tente t’être calife à la place du
calife…)… tout ce monde d’intrigues que recèle, pense-t-on, le sérail. « Sérail », c’est-à-
dire palais du sultan de Constantinople, ou palais des potentats orientaux en général, qui
renvoie à toute une rêverie de Schéhérazade… « Nourri dans le sérail, j’en connais les
détours », dit Racine déjà dans Bajazet, au XVIIème siècle.
CAMION
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
187
Sévérité accrue et enquête sur les excès de vitesse montrent du doigt certaines catégories
de véhicules : les motos et les camions, peut-être plus que les véhicules dits légers.
Mais si les camions roulent trop vite, on peut quand même se demander ce que c’est
qu’un camion. Chose récente (début 20ème), mais mot ancien puisqu’il apparaît au
14ème siècle.
D’où vient-il ? Un régal pour le chroniqueur, un cauchemar pour l’étymologiste : on n’en
sait rien, rien n’est concluant, mais les pistes sont nombreuses.
Reportons-nous au point fait par Alain Rey dans son dictionnaire historique..
Est-ce à rapprocher du provençal ou espagnol caminar – cheminer ? Peu probant.
Notamment parce que la syllabe ca- ne s’est pas transformée en cha- (Ce qui se produit
par exemple pour les mots de la famille de chemin).
Le bas-latin chamulcus (chariot bas) est-il plus concluant ?Pas sûr ! (Et c’est le fragment
–mulcus qui risque de poser problème).
Alors le toujours étonnant Pierre Guiraud (cité aussi par A. Rey) propose de se concentrer
sur l’idée de petitesse, et renvoie au petit chat.(chamion).
En tout cas, le mot a eu plusieurs significations et a désigné plusieurs objets (petit chariot,
petite épingle, petit vase à délayer le badigeon. Voiture sans roue, il a été le véhicule dans
le quel les vinaigriers paraît-il transportaient la lie du vin utilisé. . Puis ça a désigné une
charrette. Enfin un véhicule utilitaire servant au transport des marchandises, qui en est
l’acception courante et actuelle.
On a parlé d’abord de camion-auto. Et aujourd’hui, on parle on adjoint encore souvent
une apposition au mot: camion-citerne… pour préciser son usage.
Alors il y en a de gros… et on parle de poids-lourds, de gros-culs de façon tout à fait
familière. On parle aussi de remorque (ou de camion-remorque) ainsi que de semi
remorque, lorsque la remorque est directement attachée et articulée à la cabine qui la
tracte. Ou bien on a les petits modèles, fort différents. Et il y a plus de différences entre
une camionnette et un camion qu’entre une savonnette et un savon.
Quant à ceux qui les conduisent, ce sont des camionneurs (vieux et lié à une idée de gros
bras) ou des routiers (plus professionnels).
Et l’expression « beau comme un camion » n’est pas récente puisque, toujours d’après A.
Rey, on la trouve dès 1955 sous la plume de René Fallet.
A noter surtout sa féminisation, qui n’est en rien péjorative, et qui montre plutôt le fait
qu’elle soit une expression figée : belle comme un camion
CAMOUFLET
Par: (pas credité)
Il semble que les camouflets que les Etats-Unis infligent à la Chine populaire soient, en
ce moment, de plus en plus nombreux : réception du Dalaï-lama, visite du président
taïwanais, etc. Mais, si l’on entend fréquemment ce mot de camouflet, on peut se
demander ce qu’il signifie vraiment.
188
On comprend qu’il s’agit d’un affront, d’une vexation humiliante pour celui qui la subit.
Et pour celui qui l’inflige, il s’agit d’un geste délibéré, provoquant et ostentatoire. Le
camouflet n’a donc rien d’une gaffe.
Le mot est d’usage soutenu, littéraire même. Et il apparaît au XVIIème siècle, une époque
où on ne badine pas avec l’honneur.
D’autant qu’à l’origine, le geste est franchement déplaisant : on soufflait dans un cornet
de papier qu’on avait enflammé, et un gros panache de fumée allait suffoquer votre
interlocuteur. Une blague de carnaval, notamment dans le nord de la France, dont la
symbolique rappelle les fameux pieds de nez. D’ailleurs, au XVIème siècle, au lieu de
camouflet, on parlait de nasarde : une chiquenaude sous le nez de quelqu’un, qui
correspondait un peu au soufflet.
Parmi les synonymes de camouflet, on trouve aussi l’avanie, mot à l’histoire compliquée
et intéressante : Au XVIème, on parlait de vanie, imposition infligée par les Turcs aux
Chrétiens. Les Italiens en ont fait l’avania, qui est devenue avanie. Aujourd’hui, le mot
signifie plutôt outrage qu’on a fait subir, outrage mortifiant.
CAMPAGNE
Par: (pas credité)
L’usage du mot dérive d’une image militaire : une « campagne » est une expédition, un
projet stratégique mis en œuvre et géographiquement orienté, et même le plus souvent
géographiquement dénommé : « campagne » de Russie, de France, d’Italie. Elle se
caractérise par un certain nombre de moyens déployés et d’objectifs à atteindre, au-dessus
desquels plane le plus souvent une idée de conquête.
Ce qui explique les extensions de sens : « campagne » électorale, mais aussi
189
publicitaire…
Mais pourquoi « campagne » ? C’est que le mot, en français, mais avant en italien, a
d’abord eu le sens de « terrain d’opérations militaires » : la « campagne », c’était d’abord
le champ de bataille.
CAMPAGNE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : On s'y dépayse. Dans les années 30, on faisait une partie
de campagne et dans les années 60 les cadres supérieurs allaient
dans leur maison de campagne.
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comprendre leurs idées et convaincre leurs électeurs.
CAMPAGNE
Par: (pas credité)
191
Mais étymologiquement, la campagne, c'est ce qui est "plat", comme
un "champ". Ça s'opposerait plutôt à la montagne.
CAMPING
Par: (pas credité)
Les vacances approchent. Voici que s’en revient le temps des migrations saisonnières.
Mais ces migrations sont chères. Comment les aborder ? Le camping est souvent une
solution économique, pittoresque, inconfortable et d’un aimable grégarisme. Le principe
en est simple : on plante sa tente, et voilà un hébergement tout trouvé. Le mot désigne
une pratique (on fait du camping, on part en camping), mais désigne également le site qui
accueille les campeurs : un camping en bord de mer.
192
Le mot a d’ailleurs fait quelques petits : camping-car (mot qui n’existe pas en anglais),
camping gaz (marque déposée) ou caravaning, dont la formation et la terminaison
viennent, bien sûr, en droite ligne de camping.
La terminaison ne fait pas de doute : le mot est anglais d’origine. Mais il est parfaitement
intégré au lexique français : personne ne se hasarderait à employer, ou même à
recommander le campage ou la campaison.
Campement et camper (et camping évidemment) dérivent de campus. Camper c’est donc
s’installer en pleine campagne et s’établir à la fortune du pot. Quand on part, on lève le
camp, on décampe, et ce dernier mot a pris une nuance de rapidité expéditive, pressée par
les événements. Ce qui donne de manière familière : fiche le camp, foutre le camp.
Le camp finit par être assimilé à l’armée elle-même, et par extension, à prendre le sens de
parti, de côté, dans le contexte d’un conflit : il faut choisir son camp, changer de camp, le
camp des europhobes et celui des europhiles…
CAMPING
Par: (pas credité)
Les vacances approchent. Voici que s’en revient le temps des migrations saisonnières.
Mais ces migrations sont chères. Comment les aborder ? Le camping est souvent une
solution économique, pittoresque, inconfortable et d’un aimable grégarisme. Le principe
en est simple : on plante sa tente, et voilà un hébergement tout trouvé. Le mot désigne
une pratique (on fait du camping, on part en camping), mais désigne également le site qui
accueille les campeurs : un camping en bord de mer.
Le mot a d’ailleurs fait quelques petits : camping-car (mot qui n’existe pas en anglais),
camping gaz (marque déposée) ou caravaning, dont la formation et la terminaison
viennent, bien sûr, en droite ligne de camping.
La terminaison ne fait pas de doute : le mot est anglais d’origine. Mais il est parfaitement
intégré au lexique français : personne ne se hasarderait à employer, ou même à
recommander le campage ou la campaison.
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La pratique du camping est, en effet, d’abord anglaise et correspond à l’avènement du
scoutisme. Et chez Baden-Powell, les parfums d’aventure se conjuguent avec les parfums
militaires : le mot camping existe déjà en anglais, avec le sens de campement :
installation provisoire d’un groupe de soldats qui peut aller de l’escouade à l’armée, pour
une nuit, une semaine ou une saison…
Campement et camper (et camping évidemment) dérivent de campus. Camper c’est donc
s’installer en pleine campagne et s’établir à la fortune du pot. Quand on part, on lève le
camp, on décampe, et ce dernier mot a pris une nuance de rapidité expéditive, pressée par
les événements. Ce qui donne de manière familière : fiche le camp, foutre le camp.
Le camp finit par être assimilé à l’armée elle-même, et par extension, à prendre le sens de
parti, de côté, dans le contexte d’un conflit : il faut choisir son camp, changer de camp, le
camp des europhobes et celui des europhiles…
CANARD
Par: (pas credité)
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pas comme tous les autres, qui fait tache, dans un groupe, une
communauté, une famille. Chez les Deloeil, tous les enfants ont
fait de brillantes études : un à Polytechnique, un à Normale Sup',
un à l'ENA. Il n'y a que Gaspard qui a raté son CAP, c'est le
canard boiteux, ou le vilain petit canard.
On dit la même chose de celui qui ne fait pas chorus, qui émet un
autre son de cloche : à la soirée chez Untel, tout le monde a fait
l'éloge de Chose. Il n'y a que Gégé, qui est toujours le vilain
petit canard, qui a rappelé que sous sa direction le chiffre
d'affaires avait commencé à chuter, qu'il avait été compromis dans
une négociation douteuse, etc.
CANCAN
Par: (pas credité)
Féerie... Un spectacle dont on nous promet monts et merveilles. Féerie : 100 artistes, dont
60 Doriss girls, dont la filleule de Line Renaud, Michelle Rushowi...
On nous assure que la grande tradition du lieu -Le Moulin Rouge- sera respectée. Mais,
j'espère au moins que les règles élémentaires du "cancan" seront respectées, car le Moulin
Rouge sans le "cancan"...
195
symbolise l'argutie inutile et la péroraison cuistre.
Mais revenons au mouvement : de quoi s'agit-il ? D'une danse, héritée du quadrille, qui
devient à la mode à partir de 1830 à Paris dans les bals populaires. Ce sont ces pas
tapageurs et excentriques qui seront illustrés à la fin du siècle et à la Belle Epoque dans
les revues que présentent les grands cabarets parisiens.
Le "cancan" devient donc danse de spectacle : les danseuses costumées sont en ligne,
lèvent, étendent et montrent leurs jambes, leurs caleçons, leurs froufrous, leurs plumes,
faisant ainsi des "révélations intéressantes", et poussant des cris aigus qui excitent,
semble-t-il, au plus haut point les spectateurs. Toute cette musique et cette chorégraphie
sont assez précisément réglées, profitant des contributions de musiciens savants, comme
Offenbach évidemment avec "La Vie parisienne", mise en abîme de tout ce petit monde,
et auparavant avec le "cancan" fort entraînant de la fin d' "Orphée aux Enfers".
C'est donc toute une image du plaisir et de la bourgeoisie qui s'encanaille au tournant du
siècle que symbolise le "cancan", qu'on appelle d'ailleurs volontiers le "french cancan"
pour souligner de façon publicitaire le succès qu'il a parmi les riches voyageurs étrangers
(les Anglais, traditionnellement, mais aussi l'image du Brésilien de "la Vie parisienne").
CANNIBALE ET ANTHROPOPHAGE
Actualité tragique : on parle de cannibalisme. Encore faut-il savoir ce qu’on entend par
là. Le cannibalisme, c’est le fait pour un humain de manger un autre humain.
Le mot date des grandes découvertes ; il semble même qu’on doive son importation à
Christophe Colomb, qui aurait découvert non seulement le Nouveau Monde, mais aussi le
cannibalisme. Enfin, c’est aller un peu vite en besogne : il a peut-être simplement
découvert le mot. Et encore, le mot préexistait. Mais il a pu le ramener en Europe. D’où ?
De ces îles qu’il avait découvertes, et sur lesquelles il avait découvert des Indiens, dont il
ne reste aujourd’hui aucun survivant ? Ces Indiens parlaient Arawak, et ce mot de
cannibale était peut-être d’ailleurs celui qui les désignait. Cannibale serait alors de la
même famille que Caraïbe, et le mot n’aurait au départ rien de sanguinaire. Mais comme
les explorateurs de ces nouvelles contrées imaginaient souvent les pires pratiques de la
part de ceux qu’ils découvraient, cannibale a pris le sens de mangeur d’homme et le mot
est rentré en Europe, par l’espagnol, qui l’a cédé au latin, qui l’aurait lui-même cédé à
l’italien, d’où le français l’aurait tiré. Tout un voyage en somme…
196
Le mot a eu du succès, a parfois été utilisé dans un sens affaibli, pour dire simplement
cruel, sanguinaire, mais ce n’est plus vraiment le cas maintenant. En revanche, il arrive
qu’on le voit utilisé comme un adjectif : un festin cannibale, lit-on à propos par exemple
du festin de Thieste, qui commença à manger son fils ! Quand ça ? Où ça ? Oh ! C’était il
y a bien longtemps, puisqu’il s’agit d’une légende de la mythologie grecque, qui met en
scène la fameuse famille des Atrides. Preuve que le cannibalisme n’est pas l’apanage des
Arawaks.
CANOE/KAYAK
Par: (pas credité)
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Dérivés : le verbe canoter et "canotage" qui désigne l'activité
consistant à faire du canot en rivière pour le plaisir.
Distraction rendue célèbre par les plaisanciers du XIXe siècle sur
la Seine ou la Marne.
Yvan Amar
CANTINE
Par: (pas credité)
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C'est la rentrée scolaire cette semaine pour beaucoup d'enfants et pas mal
d'adultes, et voilà qu'on se pose des questions sur les cantines,
relativement désertées par les élèves des milieux défavorisés.
La cantine, c'est l'endroit où l'on mange, dans les écoles ou même les
collectivités.
Cette cantine ("cantoche" en argot scolaire) rassemble les "demi-
pensionnaires", ceux qui sont inscrits à la demi-pension, qu'on distingue
des pensionnaires (mais ils sont aujourd'hui bien peu nombreux) et des
externes, ceux qui rentrent déjeuner chez eux. Et pour manger, on va au
réfectoire - mot d'origine latine qui s'inscrit, au départ, dans le monde des
monastères. L'étymologie en est pittoresque puisque le mot vient du latin
"reficere" = refaire. Au réfectoire, donc, on se refait - on refait ses
forces.
Revenons à la cantine qui, au départ, est une caisse où l'on range les
bouteilles, pendant les campagnes militaires. Le sens de coffre s'est
conservé pour désigner une grosse malle solide, qu'on utilise le plus
souvent dans le cas de déplacement long et lointain : la cantine fleure bon
l'outremer.
Mais le mot est resté proche de l'armée pendant longtemps, la cantine a été
la buvette mobile, où les soldats pouvaient s'abreuver, ce qui nous a
donné la "cantinière".
Quant à la restauration collective "sur le terrain" - en particulier pour
nourrir des équipes en déplacement, elle s'exprime souvent par un
anglicisme le catering, que, par plaisanterie, on entend souvent transformé :
on va déjeuner "chez Catherine".
CAOUTCHOUC
Par: (pas credité)
Un mot aux sonorités insolites, dont on parle aujourd'hui car des esprits sérieux se sont
réunis pour remettre à jour les modalités de son commerce international.
Mais que nous évoque ce "caoutchouc" ? des bottes, des gommes ou des pneus…
En tout cas, une idée de souplesse et d'élasticité. "Il est en caoutchouc", "Il a un corps en
caoutchouc", dit-on parfois de quelqu'un - souvent un enfant- qui a un corps extrêmement
souple. Le "caoutchouc" est la matière "facile" par excellence.
Ce mot étrange vient d'Amérique du Sud, d'une langue qui est ou fut parlée au Pérou -on
ne sait même pas exactement laquelle. Le "c" final se prononce rarement, et d'ailleurs
disparaît lorsqu'on forme un adjectif dérivé du mot : "caoutchouteux"…
199
Mais attention, le "caoutchouc" n'est pas l'"élastique," un mot qui lui vient du grec, et qui
veut dire "qui s'étire". En effet, est "élastique" un corps qui peut se déformer pour
reprendre ensuite sa forme initiale. Et au sens figuré, on parlera par exemple d'"horaires
élastiques", pour désigner des horaires qui peuvent s'étirer. C'est le contraire de "rigide",
ça a à voir avec souple, en plus ironique et familier peut-être.
Le sens figuré peut être plus abstrait également : une "morale élastique" est celle qui ne
s'embarrasse pas trop de scrupules, peut se déformer en fonction des intérêts de celui qui
la met en avant, grâce à des raisonnements tortueux ou sophistiqués.
Enfin, un "élastique" est un petit ruban "caoutchouteux" qui sert à réunir des objets -
notamment des billets de banque. Est-ce à cause de ça qu'existe l'expression familière "il
les lâche avec des élastiques" ? Elle signifie "il est avare", "dur à la détente". L'image
peut s'expliquer de plusieurs manières. Soit notre économe a bien du mal à sortir ses
billets de la liasse qui les retient grâce à ce fameux "élastique", soit il souhaite les faire
revenir dans sa poche, et les attache avec un "élastique" qui permettra ensuite qu'on les
récupère mécaniquement.
CAPITAL
Par: (pas credité)
Alors qu'est-ce que le "capital" ? Le mot dérive d'un terme latin désignant la tête. Et dès
le XVIème siècle, dans un emploi que les Français empruntent aux Italiens, le "capital"
est la partie la plus importante d'un bien financier. D'abord, le "capital" représente l'argent
qu'on a emprunté : c'est la dette qu'on rembourse, à l'exclusion des intérêts. Et le mot dans
ce sens est en concurrence avec principal -c'est la partie principale de ce qu'on doit
rendre. Cf. La Fontaine : "Je vous paierai, lui dit-elle/Avant l'août foi d'animal/Intérêt et
principal".
Le "capital", bien vite, a aussi désigné la somme investie dans une entreprise, sans
qu'aucun caractère péjoratif s'attache au vocable.
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Mais enfin Marx vint. Le "capital" est publié en 1867, et le mot y prend un sens
particulier : c'est la richesse considérée comme moyen de production. A partir de là, on
va opposer "capital" à travail, "capitaliste" à prolétaire, "capitalisme" à socialisme. Les
bases de tout un vocabulaire sont jetées, avec certaines expressions plus saillantes que
d'autres : le grand "capital", "capitalisme" sauvage, etc.
Au sens figuré, de façon bien plus récente, le mot "capital" est employé, souvent en
domino avec une apposition, dans le sens d'un avoir qu'on a au départ, qu'on ne doit pas
gaspiller, et éventuellement faire fructifier, ou tout au moins conserver en bonne
condition le plus longtemps possible : "capital-santé", "capital-beauté", ou même
"capital" de confiance, de sympathie.
CAPTER
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
« Ah pardon, j’avais pas capté ! ». « On capte très mal, ici. Je te reçois très mal, sur mon
téléphone ! »… Le verbe capter est très utilisé de nos jours, avec des sens et des usages
fort différents. Mais bizarrement, avec un éventail de sens qui n’ont rien à voir avec ceux
auxquels on nous avait habitués.
Le verbe latin captare, qui signifie prendre, attraper, nous a donné des mots qui évoquent
l’emprisonnement et la détention : capture, captif, captivité…
Mais, cette racine a également donné des mots au sens plus positif : captiver, qui signifie
d’abord faire prisonnier, mais aussi retenir l’attention de quelqu’un. Et captivant, c’est-à-
dire passionnant – un livre, un film captivant…
On appelle aussi de cette façon des instruments qui relayent une information : sur les
voitures modernes, on parle des capteurs qui, lorsqu’il pleut, font mettre en marche les
essuie-glace, lorsque le soir tombe, allument les phares.
Et puis, on parle de capter à propos de ces appareils qui captent des ondes : on capte bien
RFI à Ouagadougou. Les téléphones mobiles utilisent aussi ce vocabulaire (enfin… ceux
qui parlent dans les téléphones, plutôt que les téléphones eux-mêmes…).
Enfin, l’argot contemporain emploie le verbe capter pour dire comprendre. Mais, plus
pour dire comprendre une situation, une signification générale qu’un mot particulier…
Jojo m’a fait un signe discret, et j’ai tout de suite capté : il valait mieux partir sans
demander notre reste…
201
CARDINAL
Par: (pas credité)
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cardinal en a bénéficié pour son manteau. La pourpre cardinalice
est donc le signe de la dignité de cette fonction, ce qui
occasionna la bourde célèbre de Jules Janin : " Le homard, ce
Cardinal des mers...".
CARNAGE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Le mot s’est, hélas, beaucoup, entendu et beaucoup lu ces derniers jours. Comme si
c’était un mot horrible, superlatif, destiné à exprimer l’horreur superlative. Et le mot
évoque deux choses : l’ « assassinat » en grand nombre (la plupart du temps). Et la fureur
de tuer, ou la folie de tuer… qui se manifeste par une sorte de désordre de l’horreur. Et
par l’ « horreur » montrée… sang, blessure, mutilation, corps qu’on ne reconnaît plus
pour ce qu’ils sont, ou ce qu’ils étaient. L’extrême violence dissout l’identité des corps.
Et l’horreur vient de ce qu’on ne voit plus un corps, ou des corps, même souffrants : on
ne voit plus que de la chair… ce qui nous fait retrouver l’étymologie du mot, encore
sensible sous la prononciation.
On peut remarquer, d’ailleurs, que ce sens actuel et terrible n’est nullement le sens
d’origine. « Prendre carnage », au Moyen âge signifiait s’incarner. Puis, le mot a désigné
les périodes où la religion catholique autorisait qu’on mangeât de la viande (hors carême
et hors vendredi… ou l’on mangeait « maigre »).
203
CARNAVAL
Par: (pas credité)
204
désigné une personne grotesquement accoutrée, comme déguisée pour
le carnaval. On trouve notamment l'expression dans le Bourgeois
Gentilhomme.
CARNAVAL
Par: (pas credité)
E.LATTANZIO : Ça y est, c'est le carnaval : vieille fête
populaire, encore vivante et pas uniquement touristique dans des
endroits très divers (Nice, Lille, Bâle, Antilles, Rio...). Et le
carnaval évoque des images de déguisement, de liesse populaire
débridée.
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Pâques). Mot ancien, qui aujourd'hui, sans être archaïque, sent
bon le Moyen-Age. D'ailleurs on le trouve dans de nombreuses
expressions anciennes ou sorties d'usage.
CARTE
Par: (pas credité)
Le mot vient d'un mot grec qui signifie au départ rouleau de papyrus. D’où vient ce mot
grec ? Nul ne semble trop le savoir aujourd’hui, mais une carte, en français moderne, est
essentiellement un rectangle de papier plus ou moins rigide (sauf dans le cas, où ce mot
de carte désigne un plan, une représentation géographique).
C’est le sens de carte à jouer qui a donné naissance au maximum d’expressions figurées
qui font apparaître le mot : brouiller les cartes (rendre une situation, a priori claire,
difficile à comprendre en en modifiant la donne), le dessous des cartes (les enjeux cachés,
secrets d’une situation), jouer cartes sur table (ne pas masquer ses intentions), jouer sa
dernière carte (opérer son ultime manœuvre)…
Mais, tous ces emplois sont plutôt anciens, renvoient à des images et des pratiques
anciennes. Et la carte a connu des avatars multiples en des périodes plus récentes, ou
même tout à fait contemporaines.
La carte est d’abord un document officiel, qui souvent témoigne d’une qualité, et d’abord,
de qui on est : c’est la carte d’identité. Cette carte, bien plus récente que tous les
passeports ou sauf-conduits qui ne servaient qu’en cas de voyage, marque l’avènement
d’une société bureaucratique, où le tampon, le timbre sont le signe nécessaire et suffisant
de qui on est. Et ce tampon, qui donne son sens à tout document officiel, est comme une
signature anonyme d’une administration souveraine.
206
La carte, imposée par l’administration sert donc à compter, recenser pour dominer. Cf la
réglementation de la prostitution avec les filles en cartes, c’est-à-dire fichées.
Mais, si la carte est le signe de la soumission à l’administration, elle est souvent aussi le
signe qu’on est quelque chose dans cette administration. Elle peut donc devenir symbole
de droit, de devoir, de pouvoir: carte d’électeur, carte tricolore, carte de presse… une
carte en impose, coupe les files et ouvre les portes. Et la carte est un symbole
profondément laïque (Il a sa carte du Parti ; il a rendu sa carte, déchiré sa carte ;
cérémonie de la reprise des cartes…).
La carte a également servi de support à toute une série d’objets technologiques. Voisinant
dans le portefeuille avec la carte d’identité, les cartes contemporaines servent de passe-
partout.
Pour payer d’abord, avec ce qu’on appelle – et c’est purement français – la carte bleue.
Quand on est plus riche, elle est dorée, mais l’expression carte bleue, bien qu’en perte de
vitesse, est toujours comprise et employée comme synonyme de carte bancaire. Les
initiales, CB étant les mêmes, ça facilite. On dit souvent aussi carte de crédit, qui fait plus
administratif.
Pour voyager en ville, on utilise une autre carte, l’orange, à la fois pendant de la carte
bleue et nique à la carte grise qu’elle voulait éclipser de sa gaieté.
CARTE ET PLAN
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
En Allemagne, dans la ville de Halle, on expose actuellement la plus vieille carte du ciel
que nous connaissions.
Alors qu’est-ce qu’une « carte » ? Une représentation. De la terre, du paysage qui nous
entoure, le plus souvent. Mais aussi parfois du ciel… la preuve… Et à quoi sert une «
carte » ? A s’orienter, à se reconnaître… Comment permet-elle qu’on se reconnaisse ? En
représentant le réel en miniature.
Ce mot de « carte » vient du grec khartès, qui signifie, au départ, rouleau de papyrus, puis
feuille, document écrit…
« Carte » est concurrencé par « plan »…. Le sens est-il le même ? Le mot « plan »
s’utilise plus volontiers lorsqu’il s’agit d’une zone plus petite… et plus contrastée…
On parle de carte de France, de carte d’une région…
On parle du plan d’une ville, d’un quartier… ou même d’une maison.
Si le mot « carte » met l’accent sur le support (le papier… on notera d’ailleurs que carte
est de la même famille que carton…), « plan » accentue l’idée qu’il s’agit d’une
représentation en deux dimensions : un plan, c’est plat. Là encore, les deux mots sont de
la même famille. « Plan » signifie, en effet, au départ, lisse, sans aspérité, sans relief….
On ne peut donc pas représenter les montagnes, sinon par des codes graphiques : cotes,
courbes de niveau… Mais, on ne peut pas non plus représenter la courbure de la terre.
207
Est-il pour autant impossible de faire un plan de toute la planète… ou même d’une large
partie de la planète à cause de cette difficulté… ? Non. Il y a des systèmes, imparfaits
bien sûr, mais bien pratiques quand même, de projections : on représente donc de façon
plane une sphère. Et, en toute logique, on appellera ça un planisphère, c’est-à-dire une
carte du monde…
Longtemps, ces cartes du monde ont été également appelées mappemondes. L’origine est
simple : mappa est un autre mot latin pour dire carte ; le mot représente quelque chose de
plat… la mappa mundi est donc la carte du monde, et souvent la mappemonde
représentait, l’un au-dessus de l’autre les deux hémisphères.
Mais un glissement de sens a fait qu’on entend, en général, autre chose par «
mappemonde », aujourd’hui : c’est la représentation du globe terrestre, c’est-à-dire une
petite sphère sur laquelle sont dessinés océans et continents, et qui parfois peut tourner
autour d’un axe oblique, à l’image de la Terre qui tourne sur elle-même, autour d’un axe
oblique par rapport au plan orbital de sa révolution solaire.
CARTON
Par: (pas credité)
La Coupe du monde nous inonde de cartons : jaune pour la menace, rouge pour
l'expulsion, vert pour faire entrer les soignants sur le terrain lorsqu'un joueur à terre ne se
relève pas... Si bien qu'une nouvelle expression voit le jour : un joueur a été cartonné,
c'est-à-dire qu'on a brandi un carton à son encontre.
Néologisme de sens, mais pas de mot, car cartonner existe déjà, et déjà avec un sens
figuré expressif : cartonner, c'est très bien réussir : j'ai cartonné à mon examen (j'ai eu 14
aux trois premières épreuves, et 17 à la dernière). Le sens se comprend à partir de faire un
carton qui vient du vocabulaire du tir : le carton, c'est la cible : faire un carton, c'est tirer
dessus, et en particulier ne pas la manquer. Bien sûr, dans un langage expressif, faire un
carton sera utilisé dans un contexte plus réel : "Jo la gachette a fait un carton sur la belle
Susie, un peu câline avec Gégène". L'idée de tir bien ajusté est vite remplacée par celle de
tir violent, et le mot est passé dans le lexique du football avec ce sens : cartonner, c'est
souvent "tirer un boulet", "fusiller"... Et par extension (et en dehors du football),
cartonner a été utilisé au passif, un peu dans le sens d'"allumer". "Il roulait à 80 dans le
couloir du bus, et sans lumière... Il s'est fait cartonner par les flics". On voit bien qu'on est
dans un registre familier.
Carton vient bien sûr de carte, qui est un emprunt à l'italien. Et carton a gardé un sens
plus près de l'étymologie que carte : carta signifie papier, et cartone papier renforcé,
comme carton. Tout naturellement, carton devient donc synonyme de carte à jouer,
notamment dans l'expression taper le carton, mais aussi moins courant aujourd'hui, battre
: manier, tripoter le carton. Enfin, le carton qui avait dans les années 60 le sens familier
de cartable (par ressemblance) a été immortalisé par Linda de Souza, avec sa valise en
carton, symbole un peu convenu du pauvre immigré perdu dans le nouveau pays où il
arrive.
208
CAS
Par: (pas credité)
Mot bref, ancien, très idiomatique et plutôt atypique. Et le mot est difficile à définir, tant
ses utilisations sont nombreuses, diverses, et liées à la phrase où il apparaît. Le cas , c’est
ce qui arrive, ce qui se produit. Et ça correspond souvent à une éventualité, une
hypothèse, une possibilité. Si c’est fermé, qu’est-ce que tu fais ? Dans ce cas-là, je garde
mon sang-froid, je sors mon rossignol et je crochète la porte.
Le mot est donc parfois tout bonnement synonyme d’hypothèse : plusieurs cas sont à
envisager. Et il s’utilise aussi lorsqu’on anticipe sur un futur possible, et sert à exprimer
une idée de condition : en cas de mauvais temps, nous rebrousserons chemin. En cas de
malheur, prévenez ma famille. De même la tournure au cas où, qui introduit une
proposition circonstancielle, et qui correspond un peu à si, ou si jamais : il introduit une
idée d’hypothèse peu probable : j’ai pris mon imperméable au cas où il se mettrait à
pleuvoir. Parfois même, on abrège : j’ai pris mon parapluie, au cas où… = pour parer à
toute éventualité (Cf. anglais just in case).
L’expression le cas échéant est intéressante : littéralement, c’est une manière de
pléonasme : si cette chute tombe. D’ailleurs, les deux mots cas et échéant sont de la
même famille. Cela signifie donc si cette possibilité vient à se réaliser, et en fait, ça
revient à dire si c’est nécessaire : Réglez-moi l’allumage ; le cas échéant, remplacez les
bougies.
Le cas est donc une affaire, y compris dans un vocabulaire précisément juridique : dans le
cas Gerber, le procureur a requis 20 ans. Dans le cas Tristano, Maître Billard est l’avocat
de la défense.
Ou dans un lexique médical : le cas de Monsieur Douglas n’est pas bien grave ; celui de
Monsieur Caine semble bien plus inquiétant.
Mais Zorn… c’est un cas.
CASINO
Par: Yvan Amar
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Faut-il créer un casino à Lille dans le Nord de la France ? Y a-t-il un crise du personnel
des casino en ce moment… ? Pour une raison ou pour une autre, on parle beaucoup des
casinos en ce moment…
Le mot casino, comme sa terminaison le laisse supposer est d’origine italienne… Il dérive
de casa, la maison…. C’est donc au départ un petite maison. Maison de campagne
d’abord… puis le mauvais esprit s’en mêle, et la maison devient plus sulfureuse…
maison close, maison de prostitution, et en italien d’aujourd’hui, c’est encore l’un des
sens du mot. Puis le mot désigne une maison de jeu… et il a beaucoup de succès au 19è
siècle. Mais à l’époque , on ne fait pas que mettre sa fortune en jeu dans les casinos… On
y boit, on y danse, on y regarde danser… Et le mot envoie aussi à un lieu de spectacle,
notamment à partir du Second Empire, et des débuts de la Troisisème République. C’est
de cette époque que datent certains établissements qui font fait la gloire du gai Paris, et
dont certains existent encore… Moulin Rouge allez-vous dire… Certes mais aussi le
casino de Paris, qui présente encore aujourd’hui des revues et des spectacles.
Ces endroits sont faits pour les joueurs… Et ce mot pris dans un certain contexte, évoque
immanquablement ceux qui viennent jouer de l’argent. Il est jouer signifie il joue
régulièrement… ou simplement il est enclin à jouer, il pourrait facilement s’y laisser
prendre… Mais bien sûr il y a des degrés dans cette inclination…. Tout jouer n’est pas
flambeur… Et par flambeur, on entend celui qui joue gros jeu… Car le verbe flamber qui
signifie depuis longtemps dépenser beaucoup, a signifié auparavant jouer gros jeu..
Pourquoi ? Parce que être flambé voulait dire être ruiné, et en particulier s’être ruiné au
jeu. Mais aussi parce que le flambeau pendant longtemps a été le nom des jeux d’argent.
CASSEURS
Par: Yvan Amar
« Sarkozy ressort la loi anticasseurs ». C’est le titre du quotidien Libération d’hier, qui
fait réentendre un néologisme, un mot inventé dans les années 70 : anticasseurs… Et le
210
mot était né avec cette loi du 8 juin 1970, abrogée en 1981, et directement issue des
événements de mai 68 et de l’agitation étudiante endémique qui avait suivi durant
quelques années. Ce nom officieux, bien sûr, mais largement popularisé à l’époque, avait
beaucoup fait pour établir dans l’usage le mot de casseur, qui lui existait déjà avant.
Qu’est-ce qu’on appelle un casseur à la fin des années 60 ? C’est celui qui commet des
déprédations au cours d’une manifestation publique. Des déprédations ? C’est-à-dire qu’il
abîme, qu’il détériore, qu’il brise… Qu’il brise quoi ? Ce peut être une vitrine, une cabine
téléphonique, une voiture… un peu tout et n’importe quoi, il est vrai… tout ce qui se
trouve dans la rue à portée des manifestants qui expriment ainsi leur rage, leur colère, leur
exaspération, en s’en prenant tout autant au mobilier urbain, à des propriétés publiques
qu’à des biens privés. Un geste, donc, qui est fait pour donner corps à une fureur, mais
aussi qui est fait pour être vu, ou tout au moins pour laisser une trace. Pour manifester
comme on dit… Et ces « casses » s’opéraient dans le cadre de manifestations politiques
ou sociales, collectives en tout cas, où tout un groupe manifestait. C’était, d’ailleurs,
l’une des dispositions les plus contestées de cette loi anticasseurs que d’engager une
responsabilité collective : un individu pouvait être tenu responsable de faits commis lors
d’une manifestation du fait d’avoir participé à cette manifestation au moment même où
les actes étaient commis.
On voit bien donc que ces mots de casseurs et d’anticasseurs on été imaginés par ceux qui
voulaient lutter contre ces manifestations et rétablir l’ordre sans états d’âme : ces mots
sont marqués par le pouvoir de l’époque, et on se rappelle les slogans tels que « les
casseurs seront les payeurs ! ». Quand on emploie ce mot de casseur, c’est qu’on veut
casser du casseur : on utilise une sorte d’effet boomerang, d’effet symétrique, qui
préfigure déjà la fameuse formule de Charles Pasqua, « nous allons terroriser les
terroristes…»
L’image du mot « casse » est assez différente de celle du mot « casseur ». Ce mot, un peu
familier, est toujours vague : il évoque une dégradation consécutive à une certaine
violence… des dégâts quoi ! Mais, souvent, des dégâts inévitables ou en tout cas qu’il
faut accepter : gare à la casse dit-on. Ou après une opération, voire une bataille: il n’y a
pas eu trop de casse : c’est-à-dire « on n’a pas à déplorer trop de pertes…» Mais on sent
bien qu’on les met les pertes dans un des plateaux de la balance, qu’on les compare avec
les gains…
Quant au verbe casser, lui, il a presque toujours, au sens figuré, un sens vraiment violent :
c’est détruire de façon définitive. Non pas neutraliser, mais anéantir : casser un
mouvement de grève, et non négocier. Ou l’expression figée, un peu langue de bois «
casser le service public », formule très syndicale qui évoque les appétits supposés de
l’industrie privée de démolir les patients acquis du secteur public (Poste, SNCF, écoles
publiques, etc.)
CASSEURS ET VANDALES
Par: (pas credité)
211
Les lycéens attirent les casseurs - pas toujours, mais ça s'est produit
récemment, lors des manifestations lycéennes. Les casseurs, c'est-à-dire
ceux qui cassent, qui -à la faveur d'une manifestation revendicative-
brisent des vitrines ou brûlent des voitures. Ce sont en général les fins
de manifestations qui sont les plus propices à ce qu'on considère souvent
comme des débordements " d'éléments incontrôlables " . Pour le coup, ça
s'est passé avant l'heure prévue pour le rassemblement, et ça montre bien
que casseurs et manifestants appartiennent à deux populations différentes.
Le terme de casseurs dans ce sens apparaît au début des années 70, et il
est même entériné par la loi dite anticasseurs (juin 70 - souvenez-vous
de la formule : les casseurs seront les payeurs).
Casseur est à peu près synonyme de vandale, si ce n'est que les vandales
ont une activité moins systématiquement collective, et moins liée à la vie
politique. Toutefois, casseurs et vandales saccagent ou détériorent des
biens, publics ou privés sans raison apparente, et de façon gratuite. La
gamme est assez étendue, depuis le noircissage des dents des belles filles
sur les affiches, jusqu'aux incendies volontaires, en passant par
l'arrachage des fleurs des jardins publics. Même si le pillage est parfois
au bout du chemin, la plupart de ces actes donnent l'impression d'une
violence gratuite, et ils expriment souvent, de façon brute leur colère et
leur frustration. Le vandalisme n'est donc pas sans signification.
C'est l'Abbé Grégoire, sous la Révolution, qui a répandu l'usage du mot
vandale, et de son corréla vandalisme, pour désigner et stigmatiser
l'attitude de certains révolutionnaires à l'égard du patrimoine artistique
et religieux. Le mot existait auparavant, mais avec le sens vague de
pillard, voleur, etc.
Mais, son origine est bien plus ancienne. Les vandales formaient un peuple,
souvent associé aux Goths, Ostrogoths, Wisigoths… tous ceux qu'on a
appelés les barbares et qui déferlèrent sur l'Europe du sud-ouest pour
mettre à sac l'Empire Romain décadent.
Pour les Romains, c'étaient déjà de vieilles connaissances : Pline puis
Marc-Aurèle ainsi que Tacite, en font mention. Venus des bords de la
Baltique, ils s'étaient installés en Dacie, avant de pousser vers la Gaule,
l'Italie, et l'Afrique du Nord…
Pourquoi cette réputation de déprédateur ? En 455, les vandales s'étaient
emparés de Rome, avaient pillé la ville, puis commencé à persécuter les
premiers Chrétiens.
Si le mot vandale reste aujourd'hui à la limite du langage familier,
vandalisme appartient surtout au jargon administratif : "des actes de
vandalisme ont été commis".
CATALYSEUR
212
Par: (pas credité)
A propos, par exemple, des conditions de travail qui, c'est vrai, semblent se détériorer,
des conducteurs de bus ou de métro, on entend régulièrement dire que le dernier incident,
même anodin, souvent grossi, déformé, voire inventé par la rumeur, a catalysé le
mécontentement et donc provoqué une grève surprise, un débrayage imprévu.
Des synonymes ?
Le "déclencheur", une image mécanique dont l'emploi est voisin. Mais le "déclencheur"
est la première étape, même minime, de la série d'événements déclenchés : il n'a pas ce
caractère un peu magique du "catalyseur" qui ne participe pas vraiment à l'action.
Dans le même genre, on a "déclic", mais dont l'image est souvent positive : levée d'un
blocage, d'une inhibition, d'une amnésie ("J'étais sûr de connaître cette grande brune, dans
la file du téléski, mais... Et perplexe, je continuais de la fixer... Et elle, agacée, à la fin :
"Mais qu'est-ce qu'il veut le monsieur ?" Ça a été le déclic : c'était ma crémière".
On terminera avec deux images : la goutte d'eau (qui fait déborder le vase) et l'étincelle
(qui met le feu aux poudres).
On a l'idée d'une série de petits faits qui, progressivement, se sont accumulés, empilés
sans produire d'effets spectaculaires, jusqu'à ce que...
CAUSE TOUJOURS...
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
« Cause toujours… » C’est le titre d’un film de Jeanne Labrune qui vient de sortir en
France, et reprend avec, à propos, une expression assez courante, un peu vieillie
d’ailleurs… Et dont la formule complète est « Cause toujours, tu m’intéresses… » Phrase
ironique qui signifie « Tu peux toujours parler, je ne t’écoute pas… » mais qui signifie
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surtout « Je ne ferai pas ce que tu veux que je fasse, je ne tiendrai aucun compte de ce que
tu me conseilles de faire, ce que tu me demandes de faire… »
« Couvre-toi bien, mon chéri, ne prends pas froid… Fais attention en traversant… Ne
parle pas à des inconnus… N’accepte pas de cadeaux de ceux que tu ne connais pas…
- Cause toujours, tu m’intéresses ! »
Phrase familière, bien sûr, et peu aimable.
« Causer » est un vieux mot français dont le sens principal est s’entretenir avec
quelqu’un, discuter… Le mot est, bien sûr, relié au mot cause, qu’il faut comprendre dans
son sens juridique : une cause est un procès. Causari, en latin, signifie plaider. Et, en
ancien français, causer signifie faire comparaître quelqu’un en justice, plaider, et par
extension, raisonner, expliquer.
Ce sens est totalement oublié du français moderne, qui utilise ce verbe dans le sens
général de discuter. Le mot était plus utilisé jadis. Il est plutôt en perte de vitesse, mais
encore bien présent dans la langue d’aujourd’hui. « Asseyons-nous et causons, comme dit
Monseigneur le Cardinal… » est une phrase bien significative du style d’Alexandre
Dumas…
Mais au XXème siècle, le verbe a acquis une réputation un peu peuple. On le disait
vulgaire. Et surtout, on ne se privait pas de montrer du doigt une tournure incorrecte, et
très courante : causer à quelqu’un… sur le modèle de parler à quelqu’un… Or, il faut dire
« causer avec quelqu’un »... L’expression « causer à quelqu’un » est donc devenue
symbole de la faute de français populaire, faite par celui qui n’a pas assez fréquenté
l’école (« Je t’ai pas causé à toi… » « Eh, là, on vous cause quand même ! ». « Je lui
cause plus à lui : c’est plus mon copain ! »
D’ailleurs, ce mot de causer est souvent associé à un bavardage excessif. On n’est pas
loin du « parler pour ne rien dire… » et on frôle le caquetage incessant… « Tu causes, tu
causes, c’est tout ce que tu sais faire… »
Deux substantifs en sont issus, eux aussi, un peu vieillots : « causette » (un brin de
causette, c’est-à-dire quelques mots échangés ; une conversation banale, imprévue,
spontanée…)
Et « causerie », peu usité également qui évoque une conversation familière, à l’ancienne.
Souvenons-nous des causeries au coin du feu dont Pierre Mendès-France avait fait un
instrument de communication politique.
CAVALE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Y.AMAR : L'un comme l'autre sont tombés sous les balles des
policiers; c'est ça qui a mis fin à leur "cavale". Qu'est-ce que
c'est que ce mot familier mais très employé ?
CEINTURE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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Avec les vacances qui se rapprochent, et les grandes migrations qu’elles entraînent,
reviennent les conseils de prudence sur les routes et en voiture. L’inventivité n’a pas
manqué : « Un petit clic vaut mieux qu’un grand choc… » En particulier, les injonctions
de boucler sa ceinture de sécurité. Aucun slogan n’a encore dit « bouclez-la ! ». Ça serait
mal venu.
On a aussi évité « Ceins-toi »… Parce que le verbe ceindre n’est pas si fréquent, qu’il
sonne de façon un peu archaïque. Mais aussi parce que le pluriel en serait « Ceignez-vous
», slogan encore plus malheureux, dans la mesure où il évoque davantage saigner que
ceindre.
Ceindre est donc un vieux mot , qui vient du latin cingere, signifiant entourer. Et, en
particulier, s’entourer. Et assez vite, le mot, même s’il a donné ceinture, s’est spécialisé
dans des emplois plutôt nobles, et symboliques : on ceint l’épée… ce n’est pas qu’on
s’entoure de l’épée, mais on le porte, et on s’entoure du dispositif, du baudrier qui la
retient. D’ailleurs, on ne se ceint pas uniquement la taille : on peut ceindre une couronne,
une tiare, un diadème – dans un langage ancien… Et plus récemment, on a ceint l’écharpe
municipale, celle qui symbolise l’autorité et le prestige du maire.
Quant à la ceinture… elle aussi a plus d’un tour dans son sac, et plus d’un sens à ses
passants. On trouve le mot dans des expressions diverses, sans grand rapport les unes
avec les autres : se serrer la ceinture veut dire se priver par nécessité, par manque
d’argent… vivre chichement, par la force des choses, se priver du superflu… et même
parfois du nécessaire : quand on se sert la ceinture, c’est littéralement qu’on maigrit, faute
d’avoir suffisamment à manger… Alors, on passe au trou suivant.
CENT
Par: (pas credité)
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On a en fait un triple écueil : le mot est homonyme de monnaie déjà
existante (Etats-Unis, Pays-Bas…), la prononciation pose un problème,
enfin le mot en français est homonyme du nombre cent.
Et cette dernière question est multipliée du fait que le nombre comme
l'unité monétaire se comptent et se multiplient eux-mêmes : "Puisque c'est
vous, Madame Lattanzio, je vous les fais à cinq cents…". Vous imaginez le
casse-tête.
CENTIMES ET SOUS
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Par: (pas credité)
Opération « pièces jaunes » organisée par les Hôpitaux de Paris. On comprend de quoi il
s’agit : chacun mettra de côté, chaque fois qu’il y pensera des pièces jaunes, c’est-à-dire
des pièces de peu de valeur : 5, 10, 20 centimes. Son train de vie n’en sera nullement
modifié, mais l’amas de toutes ces pièces jaunes constituera une somme non négligeable,
versée aux Hôpitaux... Dans les systèmes français actuels, ces pièces jaunes sont donc
celles qui ont le moins de valeur. On voit que les images changent, puisque jadis les «
jaunets », c’étaient les pièces d’or, celles qui valaient beaucoup, au contraire. Mais, les
unités monétaires ont souvent des subdivisions qui évoquent dans l’inconscient collectif,
et dans de multiples expressions, ce qui ne vaut pas cher. Le « centime » n’est peut-être
pas assez vieux pour tenir cette place, bien qu’il date de la Révolution, et que parfois on
l’emploie dans les mêmes circonstances que sou (« Je n’ai plus un centime, ça ne vaut pas
un centime). On verra qu’il en sera de « cent », centième du futur euro. Mais le denier ou
le sou sont bien plus riches et plus évocateurs.
Le « denier » n’évoque ni une monnaie récente, ni même une monnaie française (bien
qu’elle le fût), mais plutôt l’Antiquité, et les « trente deniers », prix de la trahison du
Christ. Il n’est donc pas si étonnant de le retrouver dans des expressions religieuses, avec
souvent le sens d’obole, de don gratuit : « denier de Saint-Pierre » (destiné à la Papauté),
« denier du culte », dons des fidèles destinés à subvenir aux besoins des prêtres depuis
qu’ils ne sont plus rétribués par l’Etat.
Ce qui est paradoxal car le « sou », au départ, dérive de « solidus » en latin, qui
correspond au français massif, pur.
Et les premiers sous sont d’or chez les Romains, puis les Mérovingiens. Ensuite, on en
fait en argent, puis en cuivre, et le sou ou le sol, puisque les deux formules cohabitent,
finit par se dévaluer terriblement. Il vaut un douzième de livre, et sous la Révolution,
même s’il survit au système décimal, il ne vaut pas plus de cinq centimes. Il gardera très
longtemps cette valeur, même fantomatique, alors qu’aucune pièce ne l’atteste plus. Mais,
il y a quelques années, on parlait encore de pièces de vingt sous, de quarante sous, de cent
sous, après avoir parlé des « petits sous » (cinq centimes), et « des gros sous » (dix
centimes).
Le mot est encore très employé dans de nombreuses expressions familières, pour évoquer
par exemple la pauvreté : « je suis sans le sou », « je n’ai pas un sou ». Mais aussi pour
évoquer le compte avaricieux de son pécule : « être près de ses sous », « une fortune
amassée sou après sou ».
Le mot est également une métaphore familière et à la manière enfantine, de l’argent, quel
qu’en soit la quantité.
« Ça vaut beaucoup de sous », « c’est une affaire de gros sous » (avec un sous-entendu,
méprisant, voire suspicieux).
218
Enfin, les sous, lorsqu’il n’y en a pas ou peu, servent simplement à exprimer une négation
renforcée et expressive. « Ça ne vaut pas un sou » ; il n’est pas psychologue pour deux
sous.
CERCLE
Par: (pas credité)
Mais, le « cercle vertueux », ça vient de sortir. C’est une expression forgée de façon
inversement symétrique sur la précédente, qu’on utilise en économie, pour parler d’une
conjoncture favorable, et même d’un enchaînement positif et cumulatif de bonnes phases
: plus ça va, mieux ça va, et mieux ça va, plus ça s’améliore (on ne voit pas pourquoi ça
s’arrêterait…).
Alors, l’image du « cercle » est un peu bizarre, car il s’agit d’une situation évolutive, et
non d’une situation qui se mord la queue. On aurait pu donc penser que la spirale
convenait mieux.
Mais, cette image du « cercle » désigne aussi un réseau : on parle d’un « cercle d’amis ».
Souvent, on parle aussi d’un « cercle » très fermé – ce qui est étonnant : un « cercle » est
nécessairement fermé, sinon ce n’est plus un « cercle ». Mais, dans cette circonstance, le
« cercle fermé » est un cercle sélectif, où l’on entre difficilement. Un « cercle » est
d’ailleurs également un club privé : « ce soir, je dîne à mon cercle ».
Et si l’on veut « élargir le cercle », on fait référence à une situation imaginée de gens qui
se parlent en formant un « cercle » : on l’élargit dès qu’on admet une personne de plus.
CEREALES
Par: (pas credité)
"Au petit déjeuner, un grand bol de "corn flakes", et je suis en forme pour toute la journée
!"
"Corn flakes" : "odieux" anglicisme rentré dans la langue française, tout comme la rentrée
219
dans l'alimentation des Français qui ont troqué au petit déjeuner la traditionnelle tartine
de pain beurrée pour ce qu'on traduit joliment en français par des "pétales maïs".
Car les "corn flakes" sont en effet à base de maïs, c'est-à-dire de "céréales". Les
"céréales" sont redevenues à la mode dans l'alimentation de l'homme moderne et si on les
consomme sous forme de "pétales" ou sous des formes les plus improbables, ("céréales"
pour enfants), elles sont extrêmement anciennes et ont longtemps constitué la base de
l'alimentation humaine.
Le mot "céréale" lui-même vient de loin. En ancien français, c'est sous la forme d'un
adjectif qu'il apparaît et il désigne tout ce qui est relatif au blé. Il vient du nom propre
Cérès qui était le nom latin de la déesse des moissons. Il ne prend son sens moderne qu'au
XVIIIème siècle. Il a donné à son tour l'adjectif "céréalier" qui renvoie à la culture des
"céréales".
Les "céréales" sont, pour la plupart, des plantes dont les grains peuvent servir à
l'alimentation des hommes et des animaux domestiques. Parmi les plus connues le blé,
cultivé en France à date très ancienne. Mot dont l'étymologie reste obscure. (Rien à voir
avec "produit d'un champ"). En ancien français, "blé" désignait non seulement le "blé"
mais aussi "champ de blé". On entend d'ailleurs encore ce sens dans le mot "déblayer",
qui, à l'origine, signifiait "enlever le blé du champ" et d'où sont dérivés les substantifs
"délayement" et "déblai", sur lesquels on a forgé parallèlement "remblayer" et "remblai".
Le mot latin qui désignait le blé, "fromentum" n'a pas été totalement évincé par le mot
germanique, blé, il a donné "froment". Il est difficile de définir nettement les rapports
entre le blé et le froment. Ce dernier apparaît comme un synonyme littéraire de blé, mais
désigne aussi une meilleur qualité de blé (farine de froment).
Mais bien des "céréales" sont d'origine exotique, et leur nom garde cette empreinte
exotique. Le "sarrasin" par exemple : il fait son apparition au XVe siècle, et son nom n'est
autre que le nom du peuple. Le mot latin "Sarraceni" (d'où est issu "Sarrasin") désigna
d'abord un peuple de l'Arabie ; puis il a été étendu au haut Moyen Age, à tous les peuples
de l'Orient de religion musulmane. Le nom a été donné à la "céréale", peut-être à cause de
son origine orientale, peut-être à cause de la couleur foncée de son grain, qui lui valu
aussi le nom de "blé noir".
Le "maïs", lui, a été importé d'Amérique au début du XVIe siècle. Il porte le nom que lui
ont donné les Espagnols, emprunté par ceux-ci à la langue d'un peuple indigène de l'île
d'Haïti. Cette dénomination propagée sans doute par les agronomes, a évincé les noms
populaires de "blé de Turquie", "blé d'Espagne".
220
Le "riz" est mentionné depuis le XIVe siècle sous la forme "ris". C'est un emprunt à
l'italien "riso", issu du latin "oryza" lui-même emprunt d'un mot grec d'origine orientale.
Le "Z" qui termine le mot français sert surtout à distinguer "riz" des divers mots "ris",
parmi lesquels le "ris de veau".
Aujourd'hui, les "céréales" sont à la mode : "pain 7 céréales", "pain complet", "barre
céréales", etc. Le mot s'emploie sans plus de précision pour désigner les mélanges de
"céréales" que l'on mange, par exemple, au petit déjeuner : flocons d'avoine, pétales de
maïs, müesli…
CERVEAU
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Un cerveau d’Al Qaïda arrêté par les autorités américaines. C’est ainsi que certains
journaux français ont rendu compte de l’arrestation, il y a quelques jours de Ramzi Ben
Al Shaïda au Pakistan. Et dire de lui qu’il est un cerveau, c’est envisager qu’il fait partie
de l’Etat-major de l’organisation terroriste, qu’il est un de ceux qui élaborent et mettent
en œuvre sa stratégie.
Le mot cerveau dans cet emploi n’est pas récent : on peut presque le dater et remonter
alors au milieu des années 60, à la fameuse attaque du train postal en Angleterre. Le fait
divers avait marqué l’époque : une bande organisée avait réussi, avec une précision toute
militaire a arrêté et dévalisé un train qui convoyait une énorme somme d’argent.
L’attaque avait été minutieusement préparée et exécutée. Après, il faut bien dire que les
choses s’étaient gâtées, et la plupart des malfaiteurs s’étaient fait prendre assez vite. Mais
le chef de la bande n’avait pas été repéré tout de suite, et les journaux l’avaient appelé «
le cerveau ». Ce qui renvoie à l’idée d’une intelligence calculatrice, froide, et qui ne se
mêle pas d’exécution.
Mais le mot renvoie parfois à une simple idée d’intelligence scientifique : on a parlé de
fuite des cerveaux quand les chercheurs désertaient certains pays pour être accueillis dans
d’autres, où on leur offrait de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail.
Et ne confondons pas le cerveau avec la cervelle. Au figuré, cette dernière, au lieu
d’évoquer l’intelligence, évoque toujours l’étourderie ou la sottise : tu n’as pas de
cervelle… cervelle d’oiseau, de linotte. Quant à se brûler la cervelle, c’est ce qu’on ne
fait qu’à la dernière extrémité.
CESAR
Par: (pas credité)
221
Jules César est considéré comme le fondateur de la monarchie
impériale romaine. En effet, après avoir un temps constitué une
triumvirat avec Pompée et Crassus, il obtient le gouvernement de
la Gaule cisalpine (Italie du Nord) et de la Narbonnaise (la Gaule
méridionale). C'est de là qu'il entreprendra la conquête de la
Gaule entière. Après cette victoire, sa rivalité avec Pompée le
conduit à la guerre civile. Vainqueur définitif en 1945 des
dernières résistances, il manoeuvre alors pour garder le pouvoir.
Nommé plusieurs fois consul, il est également dictateur à
plusieurs reprises, avant d'être nommé dictateur à vie en Février
1944.
222
titre, plusieurs fois introduit, ne s'impose qu'avec le fameux
Ivan le Terrible en 1547, qui se fait introniser tsar dans
l'église de l'Assomption du Kremlin (encore existante). Par souci
de modernisme, Pierre le Grand lui substitue le titre
d'"imperator"! mais le mot tsar se maintient dans le langage
courant avec les termes de tzarine (épouse) et tsatévitch
(héritier) jusqu'en 1917.
C'EST DE MA FAUTE
Par: (pas credité)
"C'est pas ma faute"… Titre d'un film qui honore en ce moment les écrans français…
Mais est-ce une faute de dire "c'est pas ma faute" ? Oui, disons-le franchement ; c'est une
syntaxe relâchée et familière qu'on rencontre à l'oral bien plus qu'à l'écrit. Il faudrait dire
pour être correct : "ce n'est pas de ma faute". L'usage de la préposition est obligatoire. Le
plus curieux de l'affaire est que la norme correcte s'est inversée avec le temps. En français
classique, en effet, la préposition non seulement n'est pas obligatoire mais elle était
considérée comme fautive - du bas langage comme on disait - mais cette manière de
parler a fini par se généraliser plus ou moins, et l'emporter : la règle a changé.
Peut-on dire qu'il reste une trace dans une sorte de français d'église, traduit du latin
d'église ? Il s'agit de la prière mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa,
traditionnellement traduite par "c'est ma faute, c'est ma faute, c'est ma très grande
faute"… Il s'agit plus d'une traduction spécifique que d'un souvenir de l'ancienne syntaxe,
dans la mesure où le sens est un peu différent : il ne s'agit pas de désigner une
responsabilité, sens de l'expression actuelle c'est de ma faute - "ce sera de ta faute si on
rate le train" = "ce sera à cause de toi" - mais plutôt de montrer la faute elle-même, voici
ma faute, en quelque sorte, pour la reconnaître (et l'expier ? Dieu ! expie-t-on jamais une
faute originelle…). D'ailleurs le latin, sans verbe, est mille fois plus elliptique et
expressif. A tel point d'ailleurs que cette expression latine est passée en français avec un
sens affaibli et spécifique : faire son mea culpa, c'est reconnaître qu'on a eu tort, regretter
publiquement qu'une action ou une attitude n'était pas fondée.
223
Si nous revenons à l'expression actuelle courante, on remarque qu'elle est en concurrence
avec une autre forme considérée comme incorrecte : celle qui sait utilise la préposition à
au lieu de la préposition "de" : "c'est la faute de ma mère". L'exemple typique de la faute
de français.
Rappelons pourtant que c'est un trait du langage populaire fort ancien, et que tout
populaire qu'il soit, il a acquis des lettres de noblesse, en particulier grâce à un refrain
célèbre, "c'est la faute à Voltaire", "c'est la faute à Rousseau", rendu plus célèbre encore
par Victor Hugo qui le fait chanter par Gavroche juste avant sa mort : "Je suis tombé par
terre, c'est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau, c'est la faute à Rousseau".
Cette tournure a donné lieu à quelques expressions toutes faites, familières elles aussi :
"c'est la faute à personne, c'est la faute à pas de chance"…
Et étrangement, mise à la forme interrogative, elle ne remplace par aucune autre, et n'a
plus réellement de caractère familier ; "à qui la faute" ?
C'EST MA CROIX
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
224
utilisation figurée. Un calvaire, c'est une situation éprouvante.
Marie-Céleste me fait éprouver un calvaire, prendre le métro aux
heures de pointe, c'est un calvaire ...
CHABADABADA
Par: (pas credité)
225
E.LATTANZIO : "Mixte"! Ce mot seul évoque le mélange. Ne nous
montrons pas trop vite voluptueux : il est des mélanges de toutes
sortes. Est mixte ce qui est formé d'éléments appartenant à des
structures différentes. Le "mixte", vers 1250, c'était par exemple
ce repas rituel fait de pain et de vin à l'Abbaye de Citeaux,
mais on a aussi des sculptures mixtes : bois et cuivre, etc ...
CHAGRIN
Par: (pas credité)
Voilà un mot bien ancien, mais encore tout à fait employé en français d’aujourd’hui. Un
gros chagrin, par exemple, expression qui appartient souvent au vocabulaire enfantin…
Le chagrin évoque bien un sentiment de tristesse et ses manifestations. Avec quelques
spécialisations, comme le chagrin d’amour, expression convenue (et néanmoins fort
utile), qui a d’ailleurs des équivalents : on parle aussi de peines de cœur. Mais attention,
la nuance n’est pas exactement la même : le chagrin d’amour est un mot sérieux, voire
compatissant. Si l’on parle de peines de cœur, on est plus volontiers ironique. Non que
l’on considère que ces peines sont inventées… mais on les raille. D’ailleurs, le pluriel ne
correspond à rien de particulier : « Il a des peines de cœur » ne signifie pas spécialement
qu’il en a souvent, à répétition : le mot a valeur de singulier. Mais les expressions sont
figées : on ne parle pas de peine d’amour (ou rarement) : il est vrai qu’on a quand même
le titre de la pièce shakespearienne « Peines d’amour perdues ». Et on ne parle jamais de
chagrin de cœur…
226
Chagrin s’utilise parfois en tant qu’adjectif : être un peu chagrin, avoir un esprit chagrin.
Mais le sens n’est pas toujours le même : l’esprit chagrin voit toujours les choses en noir,
voit le mal partout et se désespère de toute chose. Et c’est plus une disposition d’esprit
qu’une tristesse dont la cause est précise. On dit également, en employant une expression
au féminin « avoir l’humeur chagrine ».
Terminons avec le verbe chagriner, d’un emploi peu fréquent, mais assez distingué…
parfois synonyme euphémistique d’ennuyer : « Ça vous chagrinerait de recommencer ce
travail ? »
Attention, ne pas confondre avec la peau de chagrin, celle dont parle Balzac, par
exemple, dans le roman du même nom. C’est là une réelle peau tannée, dont on se servait
en maroquinerie.
CHAIR
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
227
humain. Souffrir dans sa chair, c'est souffrir physiquement,
matériellement ... pas seulement de façon intellectuelle.
CHAMBRE - HEMICYCLE
Par: (pas credité)
228
mondiale qui fait référence à l'uniforme des soldats français,
Assemblée qui reflétait l'état d'esprit patriotique des Français
après le conflit.
229
Vème République, "Chambre des Députés". La topographie
parisienne n'a suivi le changement politique qu'avec un retard certain,
puisque ce n'est que dans le courant des années 80 , sous
l'impulsion de Laurent Fabius, que la station de métro "Chambre
des députés" a pris le nom "d'Assemblée Nationale".
CHAMEAU
Par: (pas credité)
230
vie. Ainsi viens-je d'apprendre que se déroule actuellement à
Laayoune (localité marocaine) la plus grande course de dromadaires
du monde, organisée dans le cadre de la semaine sociale et
culturelle de Laayoune.
231
n'est qu'il évoque une couleur : manteau en "poils de chameau"
(là, c'est aussi la matière) ou pull-over "camel". Le mot anglais
a pris le relais, d'autant mieux compris en France qu'il a été
popularisé par une marque de cigarettes (dont l'effigie est
précisément un dromadaire).
CHAMEAU
Dans le Nord du Niger, à Ingal, une grande et internationale foire aux chameaux vient de
se dérouler.
Aux "chameaux" ? Et oui. Mais qu'est-ce exactement qu'un "chameau" ? Dans la langue
courante, le mot est générique, et il désigne tous les animaux qui appartiennent à ce
genre. Parfois, pour être plus précis, on regimbera si l'on entend parler d'un "chameau" à
une bosse alors qu'il en faut deux pour accréditer ce terme, et qu'une seule bosse nous
conduit immanquablement au "dromadaire".
Depuis le XIXème siècle, ce mot de "chameau" a été une insulte sexiste, méprisante et
fort désagréable à l'égard des femmes. Elle n'est plus guère en usage actuellement, mais
elle a en gros correspondu à "salope" ou "putain". On voit que l'intention insultante est
très lourde et très grossière (allusion au fait qu'un chameau "se monte" ? à la difformité
de la bosse ? les deux probablement, mêlés d'un peu d'exotisme - l'injure est d'ailleurs
sensiblement contemporaine des conquêtes coloniales).
Au XXème siècle, l'injure est toujours en usage, mais elle s'affaiblit, perd plus ou moins
son caractère sexuel pour devenir l'équivalent de "peste", ou "vipère". Aujourd'hui, son
usage est bien désuet, mais le plus étonnant a été l'utilisation de ce mot masculin pour
insulter des femmes.
La sobriété proverbiale des "chameaux" a parfois servi d'image métaphorique ("il est
sobre comme un chameau"), mais ce n'est pas si fréquent.
Quant au "dromadaire", on l'a d'abord pris comme adjectif : un "chameau dromadaire"
était celui qui courait très vite. En effet, "dromadaire" est de la famille de "dromè", la
course en grec, mot qui est à l'origine de l'hippodrome, ou du vélodrome… Pour autant,
les "camelodromes" ne se sont pas installés dans la langue française.
CHAMPIGNON
Est-ce la saison ? C’est toujours, plus ou moins la saison des « champignons », mais au
début de l’automne, après la pluie, il est bien agréable d’aller en ramasser en forêt…
« Champignon », un drôle de mot, bien français, sans cousinage dans les langues
européennes. Le mot vient du latin, mais d’une ellipse latine : en effet, on parle en latin,
de fungus campaniolus, de « champignon campagnard ». Et c’est l’adjectif qui a survécu :
un « campagnard ».
232
Le végétal est bien connu, formé, en général d’un pied et d’un chapeau – d’une pédicule
et d’un bulbe si on veut conserver un langage technique. Certains sont comestibles,
d’autres non. Non seulement ça, mais ils sont parfois mortels ; en tout cas vénéneux – et
non pas venimeux comme les serpents.
Les variétés en sont nombreuses, dont les noms sont comme une promenade dans la
musique du français : vessie de loup, pleurotes, oreilles de lièvre, cèpes, morilles,
chanterelles… jusqu’aux trompettes de la mort, qui paradoxalement sont exquises. Quant
à la truffe, ce diamant de la cuisine, comme disait Brillat-Savarin, elle pousse sous la
terre, mais a donné quelques rejetons à la langue française : truffé de… signifie bourré
de… Un terrain truffé de mines peut-on dire, ou un texte truffé de fautes d’orthographe.
Le mot grec mukos nous a également laissé quelques traces, mais plutôt dans le
vocabulaire dermatologique : une mycose est une infection , caractérisée par des parasites
qui font leur nid sous l’épiderme : comme on dit couramment, on a des « champignons ».
CHANCELIER
L’Allemagne en mal de Chancelier !… C’est ce qui ressort des élections législatives qui
ont eu lieu dimanche dernier, et dont le résultat serré empêche l’émergence incontestée
d’une majorité gouvernante, et d’un leader pour la conduire. A la proclamation des
résultats, on attendait donc encore le Chancelier… Quel drôle de mot, quel drôle de
titre… C’est ainsi qu’on appelle en Allemagne, le chef du Gouvernement. Depuis
relativement longtemps : depuis 1871, puisque le premier Chancelier fut Otto von
Bismarck. Mais, Bismarck était un Chancelier bien différent de ceux que nous
connaissons aujourd’hui : Chancelier impérial, il n’était ni élu directement, ni issu d’un
vote : il était nommé par l’Empereur. Mais, la fonction de Chancelier a survécu à
l’Empire. En 1919, la République de Weimar succède à cet Empire mais garde ses
chanceliers. Et Hitler, en 1933, sera (brièvement) Chancelier de la République. Avec le
Troisième Reich, le Chancelier disparaît, mais cette fonction de Kanzler réapparaît à
partir de 1949, et Konrad Adenauer est le premier Chancelier fédéral.
En fait, le mot est bien vieux, en français comme en allemand et il a désigné des fonctions
très diverses à travers les époques. Encore maintenant, selon les pays, il est associé à des
situations variées.
233
Garde des Sceaux. Et précisément, la garde du sceau, d’abord sous la monarchie, était
l’apanage du Chancelier. Ce qui explique qu’on parle encore de chancellerie dans les
ambassades… où l’on délivre des documents qui portent le sceau de la République.
Le mot s’est retrouvé dans les administrations religieuses ou même universitaires.
Mais, aujourd’hui, on le trouve surtout à l’étranger, pour désigner des fonctions bien
précises.
En Grande-Bretagne, le Chancelier de l’Echiquier est le Ministre des Finances. Pourquoi
Echiquier ? Au départ, à cause du tapis à carreaux, comme un échiquier, qui recouvrait la
table où se faisaient les comptes. Et, en Allemagne, on l’a vu, c’est le chef du
Gouvernement.
CHANDELLE
La chandelle est une sorte de mèche tressée enveloppée de suif qui était autrefois le
système d’éclairage des pauvres, les gens fortunés lui préférant la bougie faite d’une cire
plus délicate qui venait de Bougie sur la côte algérienne (on disait une chandelle de
Bougie, puis simplement une bougie). C’est peut-être parce que l’objet en lui-même a eu
tant d’importance dans l’histoire des hommes que le mot chandelle a eu une telle fortune
dans notre langue. On le retrouve dans quantité d’expressions.
La chandelle était, comme le vin et le pain, un objet essentiel de la vie quotidienne, il est
donc lié à l’idée de valeur : la chandelle est précieuse, comme le pain et le vin. « Brûler la
chandelle par les deux bouts » : dépenser à tort et à travers, gaspiller, mais aussi plus
largement « se dépenser », « vivre avec excès ». Expression très ancienne qui date du
XVIème.
Autre expression « le jeu n’en vaut pas la chandelle » qui dans l’usage courant signifie «
cela n’en vaut pas la peine ni les frais envisagés ». Cette expression date du XVIème
siècle, le jeu en question est à l’origine « toute activité où l’on a besoin de s’éclairer »
234
(jeu de cartes ou de table…), : si le jeu n’est pas intéressant, il ne vaut pas la chandelle
qu’on dépense pour l’éclairer. On est passé du domaine du jeu à tout type d’activité : «
pour obtenir ce travail, il faudrait faire la cour au patron et au sous-chef : le jeu n’en vaut
pas la chandelle ».
Et puis quand quelqu’un vous a rendu un grand service, vous a délivré d’une charge, d’un
problème, a réglé une situation difficile, vous direz que vous lui devez une « fière
chandelle ». Cela signifie que vous avez une dette de reconnaissance envers lui. A
l’origine de cette expression, une pratique religieuse qui consiste à faire brûler un cierge à
l’église pour remercier un saint de l’« aide » qu’il vous a apportée. Pourquoi « fière », le
mot ne vient pas de l’adjectif fier, mais de fidare : confier, vouer, se fier, est il a une idée
de fidélité, de foi : une fière chandelle : une chandelle que l’on fait brûler pour témoigner
de sa foi en un saint.
Enfin pour finir en lumière : « voir 36 chandelles » : « être ébloui », « sonné », « j’ai fait
une chute à skis, j’ai dévalé la pente les quatre fers en l’air, j’en ai vu 36 chandelles ! ».
CAVALE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : L'un comme l'autre sont tombés sous les balles des
policiers; c'est ça qui a mis fin à leur "cavale". Qu'est-ce que
c'est que ce mot familier mais très employé ?
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plus récemment qu'on a utilisé ce mot comme un nom commun : "la
cavale".
CHANGER DE BRAQUET
Par: Yvan Amar
« Il faut changer de braquet. Le ‘non’ progresse sur des arguments simples, le ‘oui’ doit
faire de même ». Cette phrase toute récente de Jacques Chirac est un excellent indice de
la vivacité de l’expression « changer de braquet », qui existe depuis quelques dizaines
d’années, mais se répand dans la langue journalistique, politique, et dans la langue
courante, assez rapidement. Elle fait partie de ces expressions à la mode qui s’entendent
quelque temps, puis ne s’entendent plus, ou alors s’ancrent durablement dans les façons
de parler…
En gros, la plupart du temps, la formule signifie à peu près la même chose que « passer à
la vitesse supérieure ». Alors, ça ressemble à accélérer, mais l’image est différente… Il ne
s’agit pas d’une accélération continue, progressive… Mais du passage à un autre rythme,
à un autre fonctionnement… La phrase évoque un changement d’attitude : c’est tout un
fonctionnement qui doit être plus rapide, plus énergique… La phrase, souvent, représente
une volonté de remuer l’interlocuteur… réveille-toi, secoue-toi, bouge-toi… ! Ça doit
servir d’électrochoc !
Les deux expressions ont un point commun, ce sont des images empruntées au
fonctionnement de moyens de transports : voiture (changer de vitesse), vélo (changer de
braquet). Et ces images représentent un principe de transmission de l’énergie, et un
moyen de démultiplier cette énergie.
On sait que les voitures ont, en général, une boîte de transmission qui s’échelonne selon
plusieurs paliers, plusieurs vitesses… sauf si la boîte est dite automatique… Et on passe,
en général, de la première à la quatrième… Anciennement, les voitures peu puissantes
236
n’avaient que trois vitesses. Les camions, les tracteurs ont bien souvent plus que quatre
rapports. Et aujourd’hui, les voitures ont, le plus souvent, cinq vitesses. Mais, l’idée qu’il
n’y en a que quatre est restée dans l’expression « en quatrième vitesse… »
Et quand on conduit, on démarre en première (vitesse), on passe en seconde quand on a
atteint une certaine vitesse, puis en troisième, etc. Changer de vitesse correspond donc à
une allure particulière.
De même, le verbe « rétrograder »… passer à la vitesse inférieure est également utilisée
de façon figurée.
Et pour le braquet, c’est la même chose, à peu près, de façon mécanique, sur le pédalier
d’un vélo… Le petit ou le grand braquet correspondent à un rapport différent du
développement du coup de pédale. Et on ne peut passer sur le petit braquet que si l’allure
est suffisante et le pédalage pas trop difficile… Quand on a de l’élan, quand on est en
pente, par exemple…
Mais, il est intéressant de revenir à la citation de Jacques Chirac. Il semble qu’il utilise
l’expression avec un sens différent. Comme s’il ne s’agissait pas vraiment de changer de
rythme, mais de changer de registre, de ton d’argumentaire… On passe du quantitatif
(plus ou moins vite) au qualitatif.
CHANGER DE BRAQUET
Par: Yvan Amar
« Il faut changer de braquet. Le non progresse sur des arguments simples, le oui doit
faire de même ». Cette phrase toute récente de Jacques Chirac est un excellent indice de
la vivacité de l’expression « changer de braquet », qui existe depuis quelques dizaines
d’années, mais se répand dans la langue journalistique, politique, et dans la langue
courante, assez rapidement. Elle fait partie de ces expressions à la mode qui s’entendent
quelques temps, puis ne s’entendent plus, ou alors s’ancrent durablement dans les façons
de parler…
En gros, la plupart du temps, la formule signifie à peu près la même chose que « passer à
la vitesse supérieure ». Alors ça ressemble à accélérer, mais l’image est différente… Il ne
s’agit pas d’une accélération continue, progressive… Mais, du passage à un autre rythme,
à un autre fonctionnement… La phrase évoque un changement d’attitude : c’est tout un
fonctionnement qui doit être plus rapide, plus énergique… La phrase souvent représente
une volonté de remuer l’interlocuteur… réveille-toi, secoue-toi, bouge-toi… ! Ça doit
servir d’électrochoc !
Les deux expressions ont un point commun, ce sont des images empruntées au
fonctionnement de moyens de transports : voiture (changer de vitesse), vélo (changer de
braquet). Et ces images représentent un principe de transmission de l’énergie, et un
moyen de démultiplier cette énergie.
On sait que les voitures ont, en général, une boîte de transmission qui s’échelonne selon
plusieurs paliers, plusieurs vitesses… sauf si la boîte est dite automatique… Et on passe,
237
en général, de la première à la quatrième… Anciennement, les voitures peu puissantes
n’avaient que trois vitesses. Les camions, les tracteurs ont bien souvent plus que quatre
rapports. Et aujourd’hui, les voitures ont le plus souvent cinq vitesses. Mais, l’idée qu’il
n’y en a que quatre est restée dans l’expression « en quatrième vitesse… ».
Et pour le braquet, c’est la même chose, à peu près, de façon mécanique, sur le pédalier
d’un vélo… Le petit ou le grand braquet correspondent à un rapport différent du
développement du coup de pédale. Et on ne peut passer sur le petit braquet que si l’allure
est suffisante et le pédalage pas trop difficile… Quand on a de l’élan, quand on est en
pente, par exemple…
CHANSON
Par: (pas credité)
C’est un genre qu’on trouve dans les cabarets, assez en déclin par rapport à ce qu’il a été,
mais qui survit, après de grandes années aux XIXème et XXème siècles, entre fantaisistes
et music-halls.
Et la chanson elle-même a une histoire qui montre qu’elle n’est pas toujours chantée.
Chansons(s) (surtout au pluriel), signifie souvent « histoires », « sornettes », donc
invention, mensonge. Avec, parfois, cette vague idée que ces histoires sont
invraisemblables. Le mot peut d’ailleurs être compris dans le sens de « version d’une
238
histoire ». « C’est une nouvelle chanson qu’il nous a chantée là. ».
Alors que la chanson, c’est tout différent. C’est une pièce chantée, courte, modeste,
souvent populaire, qui associe paroles et musique, avec souvent une structure fixe,
refrain/couplet. On a à l’esprit une forme à cellules répétées et mémorisables.
Le mot s’emploie dans le cadre d’un répertoire populaire (ce qu’on appellerait
aujourd’hui « variétés ») alors que dans la musique classique, on parlera de mélodie,
d’air, voire en empruntant à l’allemand, de lied.
CHANSONNIER
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
De toutes façons, la satire est un genre littéraire qui existe depuis longtemps. Attention à
l’orthographe : il ne faut pas confondre satire et satyre : rien à voir, même si la proximité
peut se prêter aux jeux de mots de toutes sortes. Le satyre (du latin) est un demi-dieu très
porté sur les nymphes qui symbolisent la libido rustique qui semble puiser sa force dans
la nature même.
Alors que la satire, avec un « i » et non un « y », vient de la satura latine, qui désigne
d’abord une salade. Et oui, une macédoine de légumes, voire de fruits.
Et bizarrement, pratiquement tous les mots désignant ce genre de préparations ont donné
lieu à des sens dérivés : quelle salade, quel salmigondis… c’est-à-dire quelle situation
compliquée, emberlificotée, mélangée. Comme s’il y avait dans le fait de mélanger des
éléments disparates une audace suspecte et vaguement comique.
Le pastiche, c’est la même chose, lié au pastis qui dérive de pâte, désigne un pâté
mélangé, puis une situation incompréhensible, puis une boisson mélangée elle aussi, et
239
qui se trouble…
Quant à la farce… ce mot concentre en lui toutes les situations qu’on vient d’évoquer…
Et bien, la satire, elle aussi, est un méli-mélo, puis une danse, puis encore une pièce de
théâtre qui mélangeait les genres : vers, prose, musique, danse… C’est toujours l’idée du
mélange, de quelque chose qui résiste à la définition, à l’étiquette, qui est à cheval sur
plusieurs domaines. C’est enfin un genre littéraire qui parodie, imite en forçant le trait,
caricature pour dénoncer en faisant rire… C’est ainsi qu’on parle encore maintenant de
journal satirique (c’est ainsi que se présente le Canard… paraissant le mercredi) ou de
trait satirique, ou d’intention satirique…
CHANTER – CHANTAGE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Chantage affreux, ignoble, terrifiant… Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier
l’opération de chantage dont sont victimes, en ce moment, les pouvoirs publics français.
On connaît l’affaire : un groupe inconnu exige de l’argent… faute de quoi, il menace de
se livrer à un certain nombre d’attentats terroristes. Est-ce une rançon qui est demandée ?
Ça s’apparente à ça, (demande d’argent exigée, remise de l’argent dans un endroit précis,
qui sera récupéré par des mains anonymes etc…) mais on n’utilise pas toujours ce mot
qui appartient au vocabulaire du rapt : les malfaiteurs demandent de l’argent et
s’engagent à rendre quelque chose.
Dans le cas de figure qui nous occupe, ils demandent de l’argent en échange de quoi ils
s’engagent à NE PAS FAIRE quelque chose. C’est donc de l’extorsion sous la menace.
Mais, le sens actuel est sensiblement différent. Il s’apparente plutôt à « faire cracher » (de
l’argent) bien que cette expression soit fort vulgaire. L’image s’est enrichie d’un mot,
courant, pour désigner celui qui fait « chanter » sa victime : c’est le maître chanteur –
construction logique pour celui qui « apprend à chanter » à quelqu’un, le fait chanter… Et
pourtant le maître chanteur, le Meistersinger allemand n’est pas le professeur de chant
mais le chanteur expérimenté, et même celui qui se rapproche un peu de l’aède antique, le
poète qui chante et déclame ses vers. Là, encore, l’image est un peu obscure. A noter
enfin le vide linguistique dont s’agrémente cette image. Il y a bien un mot pour désigner
celui qui menace (le maître chanteur) mais aucun pour désigner la victime : on ne dit pas
le « chanté », mais seulement la victime du chantage. On ne dit pas « il s’est fait
chanter… » mais « il a été victime d’un chantage… »
240
me dit »… au sens de « si ça me plaît »…
Et c’est comme « si je chantais » signifie c’est comme si je n’avais rien dit : l’expression
s’emploie à propos de paroles, d’ordres, de conseils absolument pas suivis d’effet :
comme si on n’avait rien fait.
CHARBONNIER
Par: (pas credité)
Malgré ses allures un peu rudes, le «charbonnier» vient d’une illustre famille, dérive de
carbo (le résultat d’une combustion), et compte dans sa parentèle aussi bien le carburateur
que l’hydrocarbure. On pourrait croire que la vie n’a pas toujours été tendre avec lui, que
la dureté de son travail lui colle à la peau.
En effet, celui «qui fait ou vend du charbon» en porte la trace. Noir comme un
«charbonnier» en est le signe, et l’expression s’applique souvent, par plaisanterie à celui
qui a besoin d’un bon récurage. Mais réduire le mot à cette seule fonction serait bien
réducteur.
L’un des aspects pour lequel le «charbonnier» est le plus connu est sa foi. Naïve, qui ne
s’interroge pas sur ses fondements, a-t-on dit bien souvent, et un peu vite. Mais surtout
inébranlable, solide comme le roc, de celle qui déplace les montagnes.
Mais ce dont le «charbonnier» est peut-être le plus fier, c’est d’être maître chez soi. Et
au-delà de l’affirmation, un peu machiste, il est vrai du pouvoir que le maître de maison a
sur sa maisonnée quel que soit son statut social, ce dicton bonhomme trace la frontière de
la sphère publique et de la privée : ce n’est pas seulement que l’humble travailleur trouve
toujours quelqu’un chez lui à commander. C’est aussi que le regard d’autrui n’a pas à
juger de ce qui ne le regarde pas, et qu’on n’a pas à se laisser tyranniser par la
conformisme et le qu’en dira-t-on. C’est enfin l’affirmation d’un mur au-delà duquel le
protocole se renverse : à l’extérieur je peux n’être qu’un pauvre «charbonnier». A
l’intérieur, je suis le maître de maison, commandant le même respect que n’importe quel
autre maître de maison. Pour illustrer le proverbe, se raconte une anecdote probablement
inventée, mais révélatrice : François Ier ayant passé la porte d’une cabane de
«charbonnier» se serait fait traiter de façon très libre et très cavalière par le maître des
lieux qui ne l’avait pas deviné. Le roi, royal, ne lui en aurait pas tenu rigueur, et aurait
prononcé la phrase historique.
Aurons-nous le temps de parler de la charbonnerie, cette société secrète née en Italie, qui
essaima en France sous la Restauration ? On parle plus de l’Italienne que de la Française,
241
et les carbonari sont restés dans l’histoire.
CHARCUTERIE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
CHARISME
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
242
Mot à la mode, c’est sûr… Depuis, disons quinze ans… De plus en plus utilisé dans le
langage courant, et souvent dans un contexte politique ou médiatique. Qu’est-ce que c’est
? Un genre de séduction, un magnétisme personnel, une aura, qui fait qu’on séduit son
entourage, ou qu’on le stimule, qu’on le galvanise… On fait une impression, quoi… Et en
général, une impression collective, sur un public, ou un groupe, bien plus souvent que sur
une seule personne. C’est donc bien différent de la séduction individuelle…
Le mot vient du grec charisma, mot qui, au départ, désigne des dons spirituels
extraordinaires : miracles, prophétie, visions… octroyés par la grâce divine. Le charisme
est donc d’abord un terme de théologie. On parlait, jadis, du charisme d’infaillibilité du
Pape, censé avoir reçu de Dieu, en tant que chef de l’Eglise catholique, ce don admirable
de toujours juger juste, et de ne jamais se tromper. Mais, on parlait aussi bien du charisme
de Sainte-Thérèse d’Avila, qui avait reçu le don de communiquer avec Dieu, ou de
Bernadette Soubirou, dont les entretiens avec la Vierge Marie sont restés célèbres…
Le charisme ainsi redéfini rejoint donc un peu l’idée du « charme ». Ces deux mots ont la
même origine, font partie de la même famille. Et charme, qui dérive de carmen, avait lui
aussi, au départ, un sens sacré : chant sacré, oracle, sens qu’il a gardé assez longtemps. Et
jusqu’au XVIIè siècle, il a clairement renvoyé à une idée d’influence divine.
Peu à peu, le mot a perdu cette référence, gardant pourtant de façon plus ou moins
confuse l’idée de sortilège, d’envoûtement : exercer un charme, être sous le charme, un
charme opère… « Sous l’effet d’un charme, il avait passé la nuit à chasser avec le
Diable… et il ne s’était pas aperçu que cette chasse avait duré cent ans… »
CHARRETTE
Par: (pas credité)
LU, AOM, Moulinez… La liste des licenciements planifiés, qu’on appelle souvent
pudiquement plans sociaux s’allonge… Et on entend souvent le mot charrette, pour
désigner chaque nouvelle étape de ces licenciements collectifs.
Image étrange dont l’origine est à chercher dans l’histoire de France. L’expression fait
allusion aux charrettes des condamnés à mort de la Terreur . Dans le courant de l’année
1793, la guillotine fonctionnait beaucoup et les condamnés étaient transportés de leur
prison jusqu’au lieu de l’exécution dans des charrettes. C’était pratique peut-être… c’était
243
surtout symboliquement humiliant : beaucoup de ces condamnés étaient des ci-devant,
c’est-à-dire des aristocrates, plus habitués au carrosse qu’à la charrette. Et la charrette ,
cette voiture à deux roues, tirée ordinairement par un homme, parfois par un animal
(cheval ou bœuf) était un objet rustique : la voiture du paysan, ce qu’on utilise pour
transporter son foin… Alors pensez ! pour des marquises…
On voit comment le nom a pu être usité plus tard, pour désigner des paquets d’hommes
dont on brise l’avenir sans s’émouvoir.
Mais ce mot de charrette a un autre sens figuré : Etre charrette, c’est être pressé de finir
un travail, c’est être presque hors délais : débordé, aux abois parce qu’il faut que tout soit
fini à temps. Et cette expression a une origine toute différente : elle vient de l’Ecole des
Beaux-Arts. Les étudiants en architecture, pour passer leur diplôme, devaient présenter au
jury une maquette correspondant à un plan précis. Cette maquette était réalisée dans des
ateliers, et non à l’Ecole elle-même. Le jour de l’examen, on devait la transporter. Mais
comment ? Sur une charrette pardi, l’affaire étant fragile et encombrante. Et cette
charrette, traditionnellement, était (paraît-il) tirée par des bizuths de l’Ecole, de jeunes
élèves de première année. N’empêche ! la maquette devait être prête à temps, quand la
charrette arrivait. L’apprenti architecte était donc « charrette ». Le mot s’est conservé,
mais ne s’emploie bien sûr que dans un usage assez familier.
CHASSE A COURRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
244
fait un peu image journalistique forcée.
CHASSEUR
Par: (pas credité)
Enfin, l'expression chasser sur les terres de quelqu'un veut dire qu'on
lui fait concurrence sur un terrain qu'il considère comme lui appartenant -
une chasse gardée pour ainsi dire.
CHASSEURS DU FREICHUTZ
Par: (pas credité)
245
On reprend le Freischütz à l'Opéra de Nancy, illustre opéra de Weber, dont le titre,
quoiqu'on en dise pose un petit problème à l'auditeur français : traditionnellement, on ne
le traduit pas, avec ce clin d'oeil de connivence entre mélomanes avertis : on sait de quoi
on parle.
Créé en Allemagne en 1821, le Freichütz fut présenté peu de temps après en France, en
1824, sous le titre "Robin des Bois". L'adaptation n'était pas mauvaise, mais convenait
essentiellement pour un opéra chanté en français. Quand il est chanté en allemand, ce qui
est le cas général, on garde le titre allemand, d'autant qu'il n'a pas de réel équivalent en
français. Littéralement, il signifie "tireur d'élite", mais cette expression évoque plutôt des
policiers actuels, planqués sur des toits, que les chasseurs de légende qui vendent leur
âme au diable, et participent à un concours de tir pour gagner la main de la fille du prince.
N'aurait-on pas pu trouver un meilleur synonyme que "tireur d'élite" ? Difficile, il n'y en a
pratiquement pas, à part peut-être un "bon fusil", une "bonne gâchette", (métonymie
comparable à "fine lame"), assez peu usités et qui n'ont pas le caractère superlatif du
"tireur d'élite", a fortiori du Freischütz.
Mais c'est toute la culture alémanique (Guillaume Tell et compagnie : là encore, l'opéra
rôde) qui est friande de ce genre d'adresse : il faut viser juste, lièvre, pomme ou cible.
"Viser" est un verbe important dans le sens figuré "chercher à atteindre" : "je me sens
visé" ; "c'est le Premier ministre qui est visé par ces propos". Le verbe a même souvent
un sens carrément abstrait, qui le rapproche de tenter (= avoir pour objectif) : "cette
manoeuvre vise à déstabiliser le Gouvernement". "Vous visez bien haut en courtisan,
Marinette" (= vous êtes ambitieux, vous voyez grand).
Quant au mot "cible", pour revenir à nos tireurs, il est souple et productif actuellement.
Au départ, il vient du vocabulaire du tir à l'arc, et de l'alémanique, passant par le
fribourgeois (que vous disais-je ?). Ce carreau qu'on doit toucher de son projectile est à
l'origine de nombre d'expressions figurées (pan dans le mille !). Depuis longtemps, on dit
que quelqu'un est la cible (des railleries ou des attaques), c'est-à-dire qu'il est visé.
Le mot est très utilisé dans le jargon commercialo-médiatique.
Mais attention, ne nous méprenons pas ; la "cible" c'est qui on vise, non pas ce qu'on vise
et "cible" est en fait l'abrégé de l'expression "public-cible". Il s'agit du public qu'on veut
toucher, atteindre avec plus ou moins de précision dans le processus : cette émission
s'adresse aux jeunes, avec un coeur de cible représenté par les lycéens urbains de 15-18
ans.
CHAUFFARD
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Un chauffard en justice ! C’est ainsi qu’on présente le procès, qui se déroule aujourd’hui,
de celui qui a tué un piéton Avenue de la Grande-Armée à Paris avant de prendre la fuite,
246
le 14 décembre 2001.
Mais indépendamment de ces couples, on trouve nombre de mots construits avec cette
terminaison, et péjoratifs, plus ou moins.
En effet, motard, conducteur de moto, ne l’est pas du tout au départ. Fêtard – celui qui
aime faire la fête – ne l’est pas tellement plus. Un peu ironique tout au plus. Quoique
souvent il s’emploie au sens de celui qui exprime bruyamment et un peu vulgairement sa
joie des agapes, souvent de nuit et dans des lieux publics avec petits chapeaux de rigueur
et refrains braillés fort.
Et puis il y a l’ironie de celui qui emploie le terme et veut montrer son désaccord : Le
patriotard est un patriote excessif, dont on veut dénoncer l’excès. Le soixante-huitard, qui
succède d’ailleurs au quarante-huitard est celui dont on se moque parce que longtemps
après que la mode en est passée, il s’affuble encore des oripeaux des événements de 1968.
Le ramenard est le frimeur, celui « qui la ramène ». Le cornard – et là, c’est plus vieux
mais aussi plus méchant et plus populaire est le cocu, celui à qui on a fait porter les
cornes. Et bien sûr ce dernier mot en évoque un autre, encore plus vulgaire, mais qui n’a
rien de vieilli, et que la peur du scandale me retient de prononcer ici.
CHEMIN DE FER
Par: (pas credité)
247
les Anglais (railway) puis réempruntée par les Français au moment
du développement des trains.
CHEQUE
Qui sont les "sans-chéquier" ? L'enquête du CREDOC sur ce sujet a au moins l'avantage
de nous familiariser avec ce mot nouveau, construit sur le modèle des héros de la
précarité : "sans-papier", "sans-domicile fixe", "sans abri", etc. Bien sûr, "sans chéquier"
n'est pas dans le dictionnaire, et il y a peu de chances qu'il y soit jamais, mais le mot est
formé sur un modèle productif, et il est aisément compréhensible. En tout cas, les "sans-
chéquier" dont on parle ne sont pas exactement ceux qui n'ont pas de "chéquiers", mais
ceux qui n'en ont plus, ceux à qui leur banque leur a interdit d'en avoir. "Sans" a donc à
double titre un sens privatif (indiquant ce qu'on n'a pas, parce qu'on en a été privé).
Le "chéquier", c'est évidemment le "carnet de chèques". Le premier mot est plus rapide,
plus moderne, plus technique, et tend plus ou moins à s'imposer : le "carnet de chèques"
fait vieux.
Quant au "chèque", inutile de s'étendre, tout le monde sait ce qu'est ce récépissé qui
permet de débiter au profit d'un créditeur une certaine somme de son compte en banque.
Le mot s'installe en français au début du XVIIIème siècle, et on l'emprunte à l'anglais
"cheque" ou "check". Mais, l'origine du mot anglais est compliquée et controversée. Le
"chèque" semble bien venir de l'"échec" qui, au départ, représente le jeu stratégique qu'on
connaît, et qui nous vient de Perse (Shakh mat = le roi est mort = "échec et mat").Le "jeu
d'échecs" a donc donné l'"échiquier" et comme, semble-t-il, les banquiers du Moyen âge
avaient coutume de compter leurs sous sur de petits tapis à carreaux, l'"échiquier" est
devenu à la fois la métonymie de trésor (trésor royal anglais - chancelier de l'Echiquier)
et également de vérification. D'où cette idée du "chèque", bordereau de crédit.
L'idée de vérification est encore primordiale en anglais, et le franglais, si jargonnant qu'il
soit, nous en fournit des exemples : (checklist, checkpoint Charlie, etc.).
Quelques expressions bancaires techniques : "chèque barré" (obsolète, tous les "chèques"
sont automatiquement barrés. Le "chèque barré" ne peut être endossé par quelqu'un
d'autre que celui à l'ordre duquel il est émis). "Chèque sans provision", et familièrement
248
dans le même sens, "chèque en bois". Cette dernière expression est curieuse, mais elle
semble se comprendre en référence à quelques expressions qui font du bois un synonyme
de fausseté ou d'artifice ("sabre de bois", "langue de bois"… N'importe, c'est quand même
curieux).
L'expression "chèque en blanc" s'est vu confier un sens figuré, au-delà de son sens propre
("chèque signé", sans indication d'ordre ou de somme, qu'on remet à quelqu'un qui aura
soin de remplir les indications manquantes en fonction de ses besoins). Cela nécessite
bien sûr la plus grande confiance, et l'expression s'emploie souvent dans un contexte
politique et électoral. Nous ne donnerons pas un "chèque en blanc" à nos députés, à la
gauche, au gouvernement, etc. C'est-à-dire, nous leur donnons pouvoir de nous
représenter à condition qu'ils rendent des comptes, qu'ils défendent un certain
programme, et les intérêts de ceux qui les ont portés là où ils sont.
L'usage des "chèques" s'est étendu à d'autres pratiques que bancaires, "chèque-
restaurant", "chèque repas", "chèque emploi-service"… Avec, en général, une forme du
document bien spécifique : plus large que haut.
249
C'était Parler au Quotidien, une émission proposée par le Centre
National de Documentation Pédagogique ...
CHEVAL
Par: (pas credité)
« Tu as mangé du cheval » est une expression familière qui correspond à peu près à « tu
as mangé du lion » : « tu débordes d’énergie ».
Quant au « cheval de retour », c’est un récidiviste dans l’argot des prisons, et par
extension, un politicien qui revient inlassablement, malgré toutes les casseroles et le
discrédit qui l’accompagnent.
CHEVAL
Par: (pas credité)
250
PARLER AU QUOTIDIEN DU 25 MAI 2001
Vive le cheval ! On y revient. Les boucheries chevalines ont le sourire. Mais, l’expression
« boucherie hippophagique » fait plus chic, alors que le sens est exactement le même. On
y vend de la viande de cheval, propre à la consommation.
« Tu as mangé du cheval » est une expression familière qui correspond à peu près à « tu
as mangé du lion » : tu débordes d’énergie.
Le cheval, c’est homme, de façon familière : « C’est pas le mauvais cheval » ( = le
mauvais bougre).
Quant au « cheval de retour », c’est un récidiviste dans l’argot des prisons, et par
extension, un politicien qui revient inlassablement, malgré toutes les casseroles et le
discrédit qui l’accompagnent.
CHEVAL DE BATAILLE
Par: Yvan Amar
Durant cette journée mondiale de lutte contre la drogue, il a été dit et redit que cette lutte
était le « cheval de bataille » de nombreux chefs de gouvernements… plus encore de
nombreuses personnalités politiques pendant leur campagne électorale (quelle que soit,
d’ailleurs, leur politique une fois leur campagne terminée).
Pourquoi « cheval de bataille » ? Quelle drôle d’image… comprise de presque tous, mais
dont l’origine est surprenante !
Le sens de l’expression est donc bien connu : il s’agit d’un sujet de prédilection, dont
quelqu’un parle souvent : « On s’est mis à discuter du temps qu’il faisait… Et hop !
Pedro a enfourché son cheval de bataille, et s’est mis à assassiner le réchauffement
climatique ». On l’a compris, le réchauffement climatique est le cheval de bataille de
Pedro… Non seulement, il en parle tout le temps, mais il en parle avec passion,
exubérance… même peut-être avec excès… Car, si on souligne le fait que le
251
réchauffement climatique est son cheval de bataille… c’est qu’on en est presque agacé…
Qu’on s’en moque un peu, en tout cas… Et qu’on considère qu’il en parle trop… trop
souvent… en manquant de distance… sans se rendre compte qu’il se répète, qu’il ennuie
peut-être ses interlocuteurs. Un dernier mot sur les sujets qui peuvent être des chevaux de
bataille : ce sont le plus souvent des réquisitoires… non seulement une idée qu’on a
plaisir à exprimer, mais un sujet, une réalité, une menace qu’on veut combattre, dont on
veut décrire tous les vices, qu’on aimerait terrasser comme Saint-Georges son dragon.
On a remarqué aussi que c’est pratiquement toujours le même verbe qu’on emploie avec
cette image : enfourcher son cheval de bataille. Qui file la métaphore cavalière. Et donne
bien cette idée de départ galopant : ça y est … c’est reparti… Le discours coule comme
un cheval qui court…
Pourquoi « de bataille » ? C’est un peu mystérieux… On peut se dire, bien sûr, que pour
la bataille on gardait son cheval le plus fougueux. On est loin du percheron… Et on
aboutit aussi à cette idée que l’image évoque une discussion enflammée, batailleuse : on
est dans le registre de la polémique.
… Et étymologiquement, polémique renvoie bien à l’idée de bataille… « polémos » en
grec… L’expression vient-elle de l’anglais ? C’est possible ! En tout cas, elle existe dans
cette langue… On y enfourche son cheval de bois, son hobby horse… comme si,
justement, cette compulsion à parler toujours du même sujet était d’autant plus ridicule
qu’on est dans le faux, le faire semblant, le jeu enfantin… Comme le cheval de bois qui
imite le vrai…
CHEVEU
Par: (pas credité)
252
L'idée du cheveu comme synonyme du "très peu" se retrouve
d'ailleurs dans l'idée de "couper en 4", c'est-à-dire "raffiner à
l'excès", "chinoiser", "chercher la petite bête".
Terminons avec les soucis : "se faire des cheveux", c'est se faire
du souci, du mouron..., c'est probablement une abréviation de
l'image "se faire des cheveux blancs".
CHEZ
Par: (pas credité)
Maxim's : cent ans de vie parisienne. Tel est le sujet d'une conférence que Pierre Cardin a
donnée le 20 janvier (pour ceux que ça intéresse), chez Maxim, ce célèbre restaurant
parisien de la rue Royale. C'est que "chez Maxim's" a été l'une des adresses chics par
excellence.
Mais, en fait, c'est la préposition "chez" qui nous intéresse spécialement. "Chez" indique
souvent une désignation commerciale : une entreprise, une marque : "chez" Renault, on
fait des voitures, et "chez" Danone, des yaourts. Il s'agit donc des voitures de la maison
Renault et des yaourts de la maison Danone -et ce n'est pas tout à fait par hasard que je
parle de la maison Renault : c'est en effet l'image qui est à l'origine de la préposition.
Revenons quand même à Maxim's le célèbre restaurant de la rue Royale à Paris. Il a une
enseigne à l'anglaise avec cette apostrophe s qui est l'équivalent anglais de notre "chez".
253
"Je vais dîner chez Maxim's" est donc un pléonasme. Ce pléonasme déclasse-t-il celui qui
s'en rend coupable ? Il classe tout autant parmi les cuistres méprisants celui qui le relève.
Le piège à rats socio-linguistique a enfermé dans la même cellule cette victime et ce
bourreau.
D'une faute l'autre : on sait bien que la tarte à la crème du bon usage consiste à conspuer
ceux qui disent "au dentiste" pour "chez le dentiste", "au docteur" pour "chez le docteur".
C'est qu'il ne faut pas confondre le lieu lui-même et celui qui l'occupe : on dit "chez
l'épicier", mais on dit "à l'épicerie" ; "chez le médecin", mais "au dispensaire", ou "à
l'hôpital". On sait aussi que l'ancien français usait sans vergogne de la préposition "à"
devant un nom de personne, dans un cas particulier : on disait "aller à l'évêque", "au
ministre", pour dire s'adresser, avoir recours "au ministre" ou "à l'évêque", de même
qu'aujourd'hui, dans un français familier on dit "aller aux flics", pour dire porter plainte.
En veut-on encore qu'en voilà un peu : "chez" a bien d'autres emplois, en particulier à
l'époque de "chez les Romains", dans l'oeuvre de "chez Turner", dans la personnalité de
"il y a chez Evelyne une grâce que j'aime tout particulièrement".
CHEZ
Par: (pas credité)
254
important et chic, et que cette modestie n'est plus rien qu'une coquetterie
commerciale.
D'une faute l'autre : on sait bien que la tarte à la crème du bon usage
consiste à conspuer ceux qui disent *au dentiste, pour chez le dentiste,
*au docteur, pour chez le docteur. C'est qu'il ne faut pas confondre le
lieu lui-même et celui qui l'occupe : on dit chez l'épicier, mais on dit à
l'épicerie ; chez le médecin, mais au dispensaire, ou à l'hôpital. On sait
aussi que l'ancien français usait sans vergogne de la préposition à devant
un nom de personne, dans un cas particulier : on disait "aller à" l'évêque,
au ministre, pour dire s'adresser, avoir recours au ministre ou à l'évêque.
De même qu'aujourd'hui, dans un français familier, on dit "aller aux" flics,
pour dire porter plainte.
CHEZ LE COIFFEUR
Par: (pas credité)
Tous, ruons-nous au Grand Hôtel, pour voir l’exposition des dessins de coiffure de
Christophe Carita (30 ans de dessins de coiffure... rendez-vous compte !). Et un mot pour
rappeler qu’on dit « chez le coiffeur », plutôt qu’« au coiffeur » : l’enfance de l’art.
Quel beau métier d’être coiffeur ! Et quelle belle sociabilité que celle des salons de
coiffure où l’on se parle sans se connaître, anonymes sous les mêmes blouses. C’est peut-
être cette habitude du bavardage qui allonge l’attente des clients, et permet de
comprendre cette expression qui berça mon enfance : « cinq minutes de coiffeur » (c’est-
à-dire bien souvent une bonne demi-heure).
La coiffure est quand même un métier d’artisanat qui a pris soin parfois de rechercher une
certaine respectabilité dans la façon de se dénommer. Ainsi, pour se démarquer du
populaire, les coiffeurs chics affichaient souvent à leur devanture « Haute Coiffure ».
Affichaient, disons-nous, car l’expression fait un peu années soixante. Aujourd’hui, le
coiffeur qui veut se pousser du col se dit « visagiste », cet esthète-créateur qui est au
coiffeur de base ce que le paysagiste est au jardinier (et le calque entre les deux est
évident).
Le vocabulaire de la coiffure change également avec les années, mais certaines formules
255
se sont si bien implantées qu’elles sont encore dans les mémoires, même si elles sont plus
rarement appliquées à nos cheveux : « indéfrisable, mise en plis, permanente ». D’autres
sont plus modernes : « minivague, balayage, brushing », seul anglicisme de cette liste.
Un peu d’histoire maintenant, pour revenir aux noms du coiffeur. L’argot l’appelait -
l’appelle encore parfois, mais c’est plus rare- le « merlan ». Merlan était au départ un
sobriquet donné aux perruquiers qui, poudrant leurs postiches se poudraient avec (1744).
Tout au moins y a-t-il mimétisme entre l’ouvrier et l’objet qu’il travaille qui fonde la
comparaison avec le merlan, poisson saupoudré de farine avant qu’on le frie (c’est bien la
première fois que je me vois contraint d’employer le subjonctif de frire - mais pas moyen
de faire autrement).
CHINE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Visite d’Etat du Président chinois, année de la Chine en France, défilé du Nouvel an sur
les Champs-Elysées… On en parle, en ce moment, de la Chine. Mais, d’où vient le mot ?
… C’est une autre paire de manches…
Ce qu’on sait, en tout cas, c’est que ce n’est pas un mot chinois. Mais, son origine se perd
un peu dans la nuit des temps car ce radical, on le connaît depuis fort longtemps. Cette
racine semble être d’origine indienne. Sa première apparition semble pouvoir être datée
du IIIème siècle avant notre ère : c’est comme ça qu’était nommé, par les Indiens, le
royaume unifié par la dynastie des T’sin. Les géographes grecs parleront ensuite de «
Sinai »… Marco Polo -au XIIIème siècle- parle, lui, de Cathay, mot qui dérive
probablement de la même veine. Et les mots Chine et chinois se stabilisent en moyen
français.
En tout cas, les habitants du pays, eux-mêmes, n’ont jamais eu recours à cette famille de
mots : Chung Kuo, Tchong Ha… ; ne nous hasardons pas trop dans des prononciations
qu’on maîtrise mal… mais ça veut, en général, dire le jardin du milieu ou l’Empire du
milieu. Les Chinois, comme presque tous les peuples, ont ordonné la représentation du
monde autour d’eux. A la semblance de l’univers pascalien, l’ethnocentrisme est partout.
256
presque toujours dans le langage.
Et la Chine, étant fort loin de ce qu’on appelle l’Occident, mais constituant en même
temps une civilisation organisée et incontestable (contrairement à l’Amérique par
exemple, continent découvert mais considéré comme à coloniser, à exploiter et à
christianiser, un point c’est tout), elle a d’abord servi à exprimer l’inconnu et
l’incompréhensible. A commencer par sa langue, dont la structure et l’écriture sont si
différentes des langues européennes. De là l’expression « C’est du chinois » c’est-à-dire «
on n’y comprend rien ». Non pas pour parler d’un texte chinois, mais pour parler de
quelque chose d’incompréhensible. Et, en général, incompréhensible parce que
compliqué. « L’informatique, pour moi, c’est du chinois ! » Comme on le voit, il ne s’agit
même pas forcément de langue.
Le chinois est donc associé à une complication extrême et parfois à une recherche de
complication inutile : « chinoiser », c’est chercher la petite bête, être trop pointilleux,
ergoter…
CHINE
Par: (pas credité)
257
accompagne hamburgers et steak tartares.
CHINE
La semaine culturelle chinoise organisée à Paris par l'Unesco nous donne l'occasion de
parler de la Chine, et même du chinois.
Pourtant, peu de mots en français sont issus de cette langue. "Thé", bien sûr, mais il a fait
un si grand voyage, transitant par la langue malaise… Quelques autres rares mots font
entendre un souvenir de leur accent comme "shantung", une étoffe de soie, du nom d'une
province ; "kung-fu" ou "kumkwat", encore très liés à leur origine exotique. "Ketchup",
par contre, a pris une forte autonomie, alors qu'à l'origine, il signifie saumure de poisson,
et que le produit de base est probablement assez éloigné du condiment favori des steaks
tartares et hamburgers.
Mais c'est le mot "Chine" lui-même qui est intéressant, et d'origine indienne.
Enfin, c'est un peu plus compliqué : "Tsinta" est le nom d'une dynastie chinoise du IIIème
258
siècle. Mais ce sont les Indiens qui ont fini par nommer le pays d'après le nom de cette
famille régnante, alors qu'en Chine, on parlait d'Empire du Milieu.
L'adjectif "chinois" a bien des sens péjoratifs en français : un "supplice chinois" est censé
être cruel, raffiné, s'étirer en longueur et en subtilité. Les "chinoiseries administratives"
sont des méandres tortueux, des complications infinies et inutiles. Quant à "chinoiser",
c'est être pointilleux à l'excès, chercher la petite bête avec un certain mauvais esprit.
CHOC
Y.AMAR : Vous avez bien dit "état de choc". L'expression "de choc"
s'est répandue : traitement de choc, thérapie de choc, etc ...
259
Y.AMAR : C'était Parler au Quotidien, une émission proposée par le
Centre National de Documentation Pédagogique ...
CHOCOLAT
Par: (pas credité)
« Chocolat » est un mot si fréquent qu’on ne se pose guère de questions sur son origine :
il sonne français depuis longtemps. Il vous vient pourtant de loin : c’est l’un des rares
mots que nous ayons empruntés à la langue Nahuatl, une langue indienne, encore parlée
au Mexique, qui, en plus du chocolat, nous a livré la tomate…
C’est donc le « chocolatl » qu’on a connu au départ, dans une langue où « atl » signifie
eau. Le chocolat est bien considéré au départ comme une boisson.
Le mot est passé par l’Espagne, arrivé en France vers le XVIIème siècle, et a ondulé
autour de Louis XIV : sa mère, Anne d’Autriche, avait du goût pour ce breuvage, et sa
première femme, née Infante d’Espagne, avait amené avec elle ses habitudes…
Le chocolat n’a pas totalement éclipsé le cacao. Le mot vient aussi du nahuatl, et désigne
spécifiquement la graine. Aujourd’hui, on peut acheter du cacao en poudre, mais le mot
chocolat est réservé à la dénomination du produit élaboré, transformé, comme la pâte
qu’on mange où la boisson onctueuse qu’on boit.
Chocolat, c’est aussi une couleur – celle du produit, marron foncé… et même un mot
qu’on retrouve dans une expression familière : « nous sommes chocolat », c’est-à-dire, «
nous avons fait chou blanc », « nous nous sommes fait avoir », « nous n’avons récolté
aucun des bénéfices qu’on attendait ».
CHOCOLAT
Par: (pas credité)
260
du 16ème siècle dit "chocolat", restitution approximative,
probablement de "cacaualt", "alt", c'est l'eau, cacaualt, c'est
l'eau de cacao, i.e. la boisson en cacao.
Plusieurs étapes :
Anne d'Autriche (femme de Louis XIII) introduit le goût de cette
boisson.
Puis, c'est la reine Marie-Thérèse, femme de Louis XIV, infante
d'Espagne qui le redouble et introduit les chocolatières en métal
précieux. L'habitude se fixe sous la Régence.
261
fait... (le sort du fugitif ?). En tout cas, le même sens que "je
suis chocolat", avec probablement une influence mutuelle.
CHOEUR
Par: (pas credité)
262
échappé à la tradition religieuse. Pourtant, le mot choeur y est
encore bien souvent associé - par exemple dans enfant de choeur -
les enfants qui servent la messe, censés être purs et innocents,
ce qui explique l'utilisation goguenarde qu'on fait de
l'expression "ce ne sont pas des enfants de choeurs" = ils
connaissent la vie, et bien souvent ils ne sont pas exempts de
reproche.
CHOEUR/CHORALE
Par: (pas credité)
263
nous).
Le mot orchestre à la même étymologie grecque que chœur. Orchestre : lieu
de la scène où se tenait le chœur à l'origine. Aujourd'hui lieu où se
tiennent les musiciens (la fosse d'orchestre). Cf aussi le verbe orchestrer
au sens figuré (= diriger).
Cf. aussi l'expression familière "le chœur des vierges" : allusion au fait
que les chœurs étaient autrefois composés de jeunes filles. Signifie sur le
mode ironique, le fait que plusieurs personnes font cause commune en
protestant, en s'offusquant excessivement d'une décision anodine.
CHOMEUR
Par: (pas credité)
264
correspond, bien sûr, à l'apparition de la Révolution
industrielle.
CHOREGRAPHIE
Par: (pas credité)
265
Ceci est lié à son origine récente et savante. En français, le vocabulaire
de la danse est d'une autre origine.
Le mot "danse" qui s'est imposé en français a sans doute une origine
germanique, dont il est malaisé de trouver l'étymon. Le verbe "danser"
s'impose cependant au XIIème siècle, il désigne une danse à caractère
solennel ou élégant, par opposition à "baller" qui vient de la langue d'oc
(plus anciennement du bas-latin) et désigne les danses populaires. Ce verbe
"baller" a disparu au XVIIème siècle, il a survécu en espagnol ("danser" se
dit "bailar") mais aussi en français sous forme de "bal" : ce mot a été
synonyme de "danse" jusqu'au XVIème (ou XVIIème) siècle.
Parmi tous les clichés qui ont la faveur des médias ou du monde des spectacles, il en est
un qu’on a entendu à peu près à toutes les occasions, et avec toutes les variantes possibles
: « Chronique d’une mort annoncée »… qui est, au départ, le titre d’un roman du grand
romancier colombien Garcia Marquez… et qu’on a retrouvé sous les formes « Chronique
d’une défaite annoncée », « d’une victoire annoncée », « d’une éviction annoncée »…. Ce
titre, étrangement, a eu un retentissement et un succès infiniment plus grands que le
roman lui-même. Plus étrange encore, on l’a relativement peu entendu, ces derniers
jours… alors que, pour une fois, on est dans l’exacte situation où cette formule serait
pertinente, au sens littéral. Mais, on peut noter, de façon très compréhensible d’ailleurs,
l’embarras journalistique entourant les derniers jours de Yasser Arafat : une mort
annoncée, au futur (elle est inévitable, le coma est irréversible…) alors qu’elle n’était pas
encore annoncée au présent : « Yasser Arafat EST mort ».
266
beaucoup plus que l’inconscience que suppose un coma…
Alors, aujourd’hui, c’est bien davantage l’après Arafat qui est évoqué. Et là encore, c’est
un cliché que l’on retrouve souvent, pour marquer qu’on s’interroge sur ce qui a suivi une
période donnée. Surtout quand elle était très marquée par un homme, une personnalité…
1) Chuchoter : vient de l'ancien français "chucheter" = parler à voix basse, qui s'est
maintenu pour désigner le cri du moineau. Apparaît au XVIIe mais ne s'emploie vraiment
qu'à partir du XVIIIe.
Former sur l'onomatopée "chu" qui suggère l'idée d'un sifflement assourdi.
Introduit d'abord comme emploi intransitif, devient transitif au XVIIIe, avec un sens
péjoratif parfois : susurrer des mots doux, des conseils intéressés, etc., souffler, glisser
discrètement pour séduire ou tromper.
S'est employé au sens "gronder, se plaindre confusément". Au sens figuré, par exemple,
murmurer = gronder, protester pour le peuple, on parlait aussi du murmure populaire,
pour désigner un mécontentement diffus mais perceptible (même sens que gronder).
Par la suite, il en vient à désigner le fait de parler à voix basse et par analogie, il désigne
le bruit léger que font le vent, l'eau qui coule, etc. Evolution sans doute liée à l'évolution
de la prononciation de "ou" en "u".
267
A la période moderne - "faire des commentaires à mi-voix" et "répandre des bruits". "On
murmure dans les couloirs de l'assemblée que…".
CHUT !
Par: (pas credité)
Un mot, à cet égard, est bien utile : "Chut !". Ce mot se situe à
mi-chemin entre le son et le geste : un doigt vertical au travers de la
bouche, qui symbolise la bouche fermée, qui ne parle plus.
C'est donc l'image sonore du silence qu'exprime ce "chut", qui nous fait
frôler l'onomatopée : ce chuintement est bien silencieux, évoque le bruit
assourdi.
Et le verbe "chuchoter" en dérive, avec son substantif "chuchotement",
parfois transformé en chuchotis, sur le modèle de gazouillis.
"Susurrer" suit le même chemin, mais son sens est parfois différent :
"chuchoter", c'est parler à voix basse. "Susurrer", c'est parler pour n'être
entendu que de quelqu'un qui est très près de vous : la voix, totalement
détimbrée, ne porte pas.
CHUT
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
268
E. LATTANZIO : Et d'ailleurs, vous avez joint le geste à la parole
: vous avez posé verticalement le doigt sur vos lèvres, pour
m'indiquer que je devais me taire, comme si vous vouliez sceller
vos lèvres et m'inviter à en faire autant.
269
CHUTE
Par: Yvan Amar
La chute… C’est le titre d’un film qui vient de sortir en France, après être sorti en
Allemagne, et qui relate les derniers jours de la vie d’Hitler, jusqu’à son suicide dans son
bunker… Et le film, d’ailleurs, suscite une polémique autour de la façon dont la personne
d’Hitler est traitée et montrée. Rien, dans ce titre, ne laisse imaginer a priori le sujet
historique du film : il pourrait s’agir de n’importe quelle chute… On peut, d’ailleurs,
noter au passage que ce titre a déjà été utilisé par Camus pour l’un de ses plus beaux
récits.
Alors de quelle chute s’agit-il ? Celle d’Hitler ? Celle du IIIème Reich tout entier ? L’un
se confondant avec l’autre ? On peut remarquer que ce mot de « chute » est souvent
utilisé pour désigner la fin d’un régime : la chute de la royauté. Ou d’un chef d’Etat, en
général d’ailleurs un potentat… la chute de Napoléon, de Mussolini. Voire d’une ville,
quand elle symbolise un certain pouvoir : la chute de Saïgon. Et, dans ces emplois, «
chute » est toujours ou presque synonyme de disparition violente, tumultueuse, brutale…
Un effondrement. La chute n’est donc pas l’échec… Sauf s’il s’agit d’un échec
retentissant…
Mais, par exemple, parlerait-on de chute à propos de l’échec à l’élection présidentielle de
1981 de V. Giscard d’Estaing ? Une défaite, un échec… mais pas une chute.. même s’il
était président sortant.
Toutefois, on peut faire une exception en se rappelant les régimes parlementaires des
IIIème et IVème Républiques, par exemple… On parlait de la chute d’un gouvernement,
de la chute du Président du Conseil… On disait même « Telle affaire pourrait bien faire
chuter le Président du Conseil ! » Et l’image était parlante, car ces échecs pouvaient être
très soudains…
Cela dit, la chute est souvent une forme accélérée de la décadence… Ce qui se trouve
dans d’autres domaines que la politique : souvenons-nous de la Chute de la maison
Usher, belle nouvelle d’Edgar Poe.
Au sens figuré toujours, la chute peut évoquer une baisse brutale et inattendue : chute de
température, de popularité…
Mais, au sens propre, le mot « chute » évoque souvent ce qui tombe alors que ça ne
devrait pas tomber (la chute d’une statue, de quelqu’un qui tombe, ayant glissé sur le
verglas… Mauvaise chute !)
Pourtant, le mot s’applique également à ce qui tombe de façon tout à fait naturelle : chute
d’eau, chute de neige, chute des feuilles… Ce qui tombe du ciel… quoi.
Alors, terminons avec un peu d’étymologie… D’où vient-il ce mot « chute » ? Du verbe «
choir »… Mais, le bizarre de l’affaire est que le verbe est presque sorti d’usage… En tout
cas, il n’est pas d’usage courant. « La bobinette cherra » n’est plus compris aujourd’hui
alors que le Petit Chaperon rouge comprenait parfaitement la phrase au XVIIème siècle. «
270
Il a chu dans le ruisseau… » est plaisant… Il n’y a guère que l’infinitif « choir » qui soit
encore employé… « Il m’a laissé choir »… pour « il m’a laissé tomber »… Là encore,
c’est plaisant… mais on comprend !
CIEL
Par: (pas credité)
271
D'ailleurs le nombre n'a pas tant d'importance : on a dit "au 3ème
ciel..." et les chiffres sont symboliques. Se souvenir de Boris
Vian : "envoie-moi au ciel !" (fais-moi mal Johnny !).
CIGARE ET PIPE
Par: (pas credité)
272
Y. AMAR : Casser sa pipe : expression familière
attestée dès le XVIIème siècle mais avec le sens de
"enrager". Le sens "mourir" apparaît au XVIIIème , Cf le
titre d'un journal le jour de la mort de G. BRASSENS :
"G. BRASSENS casse sa pipe", allusion au fait que le
chanteur fumait la pipe.
CINEMA
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
273
du cinéma puisque c'est en 1995 que l'on a fêté son centenaire.
CINEMATHEQUE
Par: Yvan Amar
Une nouvelle cinémathèque à Paris, inaugurée avant-hier officiellement, et qui ouvre ses
portes aujourd’hui… c’est un événement, qui fait entendre plus souvent qu’à l’ordinaire
le mot compliqué de cinémathèque. Qu’est-ce que c’est donc que cette nouvelle
274
cinémathèque ? Un lieu culturel, un peu mondain en ce moment parce qu’il est tout neuf,
où l’on se presse pour voir l’exposition consacrée aux Renoir père et fils, le père, peintre
impressionniste et le fils cinéaste… Mais sans ça, la cinémathèque… c’est un cinéma,
tout simplement. Un cinéma comme les autres ? Pas vraiment… Un cinéma du service
public qui montre des films anciens ou modernes mais réputés relativement rares, qu’on
ne voit pas souvent, et qu’on projette, en général, autour de différentes thématiques… Un
cinéma donc qui, d’abord, n’est pas soumis aux aléas de la rentabilité, ni aux caprices du
marché, ou aux sorties des films récents. Mais qui montre des films, un peu comme un
musée montre ses collections et organise des expositions temporaires. La cinémathèque
est donc le temple des cinéphiles et de la cinéphilie… C’est-à-dire ? De l’amour, que dis-
je de l’amour, de l’intérêt qui se transforme en culte, pour le cinéma. On y voit donc des
maniaques, qui arrivent en avance, s’assoient toujours à la même place, savent déjà tout
sur le tournage, les acteurs, le troisième assistant au montage… du film qu’ils ont déjà vu
sept fois…
Ils sont à la Cinémathèque, non pas dans une cinémathèque : la Cinémathèque française,
historique, qu’on a connue Avenue de Messine, au Palais de Chaillot, et qui est
maintenant rue de Bercy, dans l’est de Paris.
Pourquoi « cinémathèque » ? On a formé ce mot, qui n’est pas récent (il apparaît en
1921) sur le modèle de bibliothèque, bien sûr. Bibliothèque : endroit où l’on conserve des
livres, et où le public peut les consulter, les emprunter parfois. Mais, le mot s’emploie
également à propos d’une bibliothèque personnelle… et il signifie alors collection de
livres, ensemble des livres que l’on possède. Enfin, le même mot peut voir son sens
s’étendre à la pièce, voire au bâtiment où ces livres sont gardés.
Le mot « bibliothèque » est formé à partir du grec. « Biblios » c’est le livre. Quant à «
théqué », c’est un mot qui signifie, au départ, coffre, case, endroit de rangement, et même
parfois, tombe… un endroit où l’on garde des objets pour longtemps donc... qui a permis
de former ce mot qui évoque le rangement des livres. Ou le rangement, la possession, la
conservation des films pour cinémathèque…
Cette formation à partir de –tèque est très productive aujourd’hui. On a fait médiathèque,
depuis que les bibliothèques prêtent à leurs usagers des revues, des journaux, des disques,
des films… La vidéothèque est l’officine spécialisée dans le prêt des cassettes de films :
on ne voit pas les films, comme à la cinémathèque : on les emprunte seulement.
Quant à la discothèque, son destin est plus libre encore : le mot peut désigner un service
de prêt de disques. Mais, le plus souvent, il désigne le lieu où l’on va écouter de la
musique, danser, passer ses nuits blanches.
275
plusieurs fois quand ce footballeur a agressé un spectateur qui
soutenait l'équipe adverse. Il a pété les plombs, c'est-à-dire
qu'il a perdu le contrôle de lui-même et s'est laissé aller à une
conduite inacceptable.
CIRE
Par: (pas credité)
276
PARLER AU QUOTIDIEN DU 10 JUILLET 2001
Mais la cire, alors… Le mot vient du latin cera, et désigne d’abord la cire naturelle,
matière un peu grasse, produite par les abeilles, dont on a fait longtemps des bougies et
qu’on a utilisée pour cacheter les lettres. On l’utilisait aussi, dans la première moitié du
XXème siècle pour y graver les premiers enregistrements sonores. D’où l’expression (peu
employée, il est vrai, sinon dans un jargon un peu spécialisé) vieille cire, pour dire vieil
enregistrement, historique, et qui gratte : Caruso et Cie.
L’encaustique est une pâte qui sert à l’entretien ou à la peinture. Elle était faite, au départ,
d’un mélange de cire fondue et d’essence de térébenthine. On l’a donc souvent nommée
«cire».
Et de cet emploi, on a tiré le verbe cirer : nettoyer, frotter, faire briller avec de la cire. Et
cette activité s’est d’abord appelée le cirage. Mais le mot de cirage a débordé ce premier
emploi pour désigner bien vite une cire teintée, destinée notamment à l’entretien du cuir.
Autre expression : « cirer les pompes de quelqu’un ». L’image est parlante : la position
semble servile, et singe une marque de respect hyperbolique : on nettoie ce qui chez
l’autre est le plus sale. Ça veut dire, bien sûr, flatter obséquieusement, fayoter.
CIRQUE
Par: (pas credité)
277
Avec toutes ses célébrations et rétrospectives, le cirque est en
ce moment particulièrement à la mode et propose un vocabulaire
très particulier. Les mots désignant ces artistes sont, eux, très
anciens, ils viennent souvent du Moyen-Age et même de
l'antiquité, comme le mot "acrobate" par exemple. Ce n'est qu'à
partir du début du siècle qu'on a utilisé ce mot pour désigner les
"équilibristes" et les "trapézistes". Mais le mot remonte lui-même
à beaucoup plus loin dans le temps : il vient du grec "akrobatos"
qui signifie littéralement "celui qui marche sur la pointe des
pieds". Pendant très longtemps d'ailleurs, on a utilisé ce terme
pour désigner les danseurs de l'Antiquité, puis de l'idée de
danse, on est passé à l'idée de danse dans l'espace, de jeu avec
l'équilibre. Le mot a désigné plus spécialement ces exercices
périlleux où l'artiste défie les lois de la pesanteur.
Mais les acrobates ne sont pas des "funambules" qui pourtant, eux
aussi, sont des virtuoses de l'équilibre. Le mot "funambule", lui,
vient du latin, il est composé du mot "funis" : corde et de la
racine "ambulare" : marcher. Le "funambule" est donc celui qui
marche sur un fil. De nos jours, il est en concurrence avec un mot
qui lui est de formation radicalement française et donc plus
populaire : "le fil-de-fériste", celui qui se tient en équilibre
sur un fil de fer.
278
avec le "paillasse", le "pitre", celui qui a le nez rouge et les
chaussures trop grandes, qui est bouffon et grotesque aussi bien
dans sa mise que dans son comportement ou ses paroles.
CIRQUE
Par: (pas credité)
Les Nouveaux Nez , Que Cir Que, le Cirque O, le cirque Plume, Archaos… Ce
qu'on appelle, peut-être un peu abusivement le " Nouveau Cirque " fleurit
en ce moment plus que jamais. Pourtant, ce nouveau cirque d'antan en est
plus vivant que jamais. Bonne raison pour s'interroger sur ce mot ?
Pourquoi pas…
Le nom du genre est une métonymie, dans la mesure où cirque a d'abord
désigné une forme. Le cirque, de la famille de circa = autour était chez
les Romains une construction circulaire - c'est-à-dire ronde, qui
accueillait des jeux sanglants et populaires. Le mot, en français a
d'ailleurs gardé un sens différent et géographique : Mourèse, Gavarni
Navacelle sont d'impressionnantes zones encerclées de montagnes.
Et ce n'est qu'au 19ème siècle, que le mot s'est spécialisé dans le sens du
spectacle qu'on lui connaît aujourd'hui : Le cirque Franconi, avec ses
divertissements équestres a probablement été le premier cirque très célèbre
en France. Et de l'espace circulaire où se déroule le spectacle, le mot a
fini par désigner le spectacle lui-même. Quant à cet espace circulaire, il
fallait pour être précis lui trouver un nom bien à lui : ça a été la piste.
Le mot vient de l'italien perstare = broyer, qui désignait le chemin suivi
par les chevaux le long du manège. Et le sens du mot a évolué du parcours à
l'espace qu'il délimitait.
Un mot sur ce qu'on fait sous le chapiteau maintenant (le chapiteau,
c'est-à-dire la tente qui abrite le spectacle - et chapiteau, comme piste
fonctionnent souvent comme métonymie du cirque).
Parmi les numéros les plus traditionnels, on trouve les jongleurs, les
funambules, les acrobates, les clowns.
Le jongleur n'est pas nouveau, mais au Moyen-Age, le mot avait un sens
différent : il dérive de jocus, plaisanterie. Et au départ, le jongleur
plaisante, raconte des blagues, dit des poèmes, et petit à petit se livre à
des tours d'adresse en même temps. Les tours prévalent, et voilà notre
jongleur moderne, avec balles, massues, torches…
Le funambule est un danseur de corde (un peu comme un fildeferiste) dont le
nom est calqué sur le latin (funis = corde ; ambulare = marcher).
Les acrobates viennent du grec : ce sont ceux qui marchent sur la pointe
des pieds, et par extension les danseurs. Graduellement, le mot, en
français, s'est spécialisé pour désigner les équilibristes qui se livrent à
des exercices périlleux qui défient la pesanteur.
On finit sur le clown, bouffon du cirque anglais, parfois orthographié
279
cloune au siècle dernier, qui a désigné un personnage comique conventionnel
qui s'est imposé pour englober de façon générique tous les personnages
comiques typés (Paillasse, Auguste, clown blanc, etc.).
CIRQUE
Par: (pas credité)
Les fêtes de fin d'année sont une bonne occasion pour emmener les enfants
au cirque. Le sens du mot "cirque" est clair : il désigne un type de
divertissement qui présente, en général sous forme de revue, une succession
de numéros exécutés par différents artistes. Des numéros qui font rire, et
d'autres qui font frissonner, puisque tout l'art du cirque oscille entre le
comique et la prouesse. On est en tout cas dans un monde d'excès et
d'outrance, d'extraordinaire, qui, transposé dans la langue courante, va
évoquer l'incongru et le désordonné.
Ce qui explique des expressions telles que "qu'est-ce que c'est que ce cirque ?"
ou "arrête ton cirque !".
Mais plus que la pétaudière, l'expression aura tendance à évoquer la
comédie, le caprice à orientation hystérique, mis en scène par son auteur.
Et ces locutions s'emploient souvent (et familièrement bien sûr) pour
désapprouver une demande ou une attitude jugée excessive ou incongrue.
Mais ces expressions n'appartiennent pas spécialement au langage des
circassiens. Les circassiens, passionnés de cirque ou de gens de métier -
avec un nom pour les nommer qui utilise par calembour celui d'un peuple
disparu, qui jadis vivait au nord du Caucase, en Circassie.
Aucun souvenir, dans tous ces emplois de l'origine du mot "cirque" qui, bien
sûr, a partie liée avec le cercle : un cirque n'est rien d'autre qu'un
espace circulaire. Et cet espace est techniquement dénommé piste - un
cercle dont la dimension est fixe : treize mètres cinquante de rayon,
calculés d'après la longueur de la chambrière.
C'en est assez pour nous convaincre : le cirque a son jargon pittoresque,
balançant entre batoude et léotard, entendu des banquistes opaques aux
280
pantres. (Batoude : tremplin de saut ; léotard : maillot des acrobates,
conçu par Jules Léotard, l'inventeur du trapèze volant ; banquistes : gens
du voyage ; pantre : goy).
Une dernière expression pour finir : travailler sans filet qui fait
référence aux acrobates, et particulièrement aux trapézistes : en général,
ils font tendre un filet de sécurité au-dessous d'eux, qui les rattrape en
cas de chute. Travailler sans filet, c'est donc tenter quelque chose sans
solution de repli, sans possibilité de rattraper un raté ou un imprévu.
CIRQUE/ARTS DE LA RUE
Par: (pas credité)
281
l'éloquence facile et mensongère, par exemple un homme politique à
la parole trop séduisante. Il est curieux de noter que
l'étymologie (marionnette) coïncide avec une certaine idée moderne
de la politique (les Guignols de Canal+).
CIVIL, CIVIQUE
Par: (pas credité)
282
Y.AMAR : Ce qui est civique renvoie au civisme, à un monde de
citoyen, à la "vertu". Ce mot porte l'idée d'un devoir, d'une
obligation librement consentie, alors que "civil" renvoie à la
contrainte de la loi, la menace sourde, la peine possible.
CLAIR
Par: (pas credité)
« C’est clair ! » C’est devenu le mot de passe d’une génération. En quelques courtes
années, cette expression, si éclatante, si transparente, d’apparence modeste et lumineuse,
est devenue le tic de langage le plus entendu chez les jeunes gens, tic de langage d’autant
plus étonnant que cette expression ne contredit en rien la signification ordinaire et
traditionnelle de l’adjectif. Si bien que la tournure ne choque pas, et que d’ailleurs, on la
remarquerait à peine, n’était sa fréquence. Alors quel sens lui donner, ou plutôt quelle
nuance, quel effet de sens ? « C’est clair » signifie simplement bien sûr, évidemment : «
c’est clair il va rater son train, vu l’heure »…
On peut toutefois remarquer que la vogue de l’adjectif, utilisé dans une formule aussi
simple et plate, fait suite à un certain nombre de nuances qui ont affecté le mot.
L’expression « en clair » a été également très en faveur. D’abord, elle est souvent usitée
comme simple équivalent de « bref », « pour nous résumer », notamment dans la langue
politique ou la prose journalistique. Mais, elle est aussi indissociable du souci (parfois
démagogique) du « parler vrai » qui a tant séduit la langue politique. « En clair », c’est-à-
283
dire, sans fioritures, sans circonvolutions ni langue de bois. C’est l’expression qui est
employée pour montrer qu’on traduit un euphémisme : l’entreprise va opérer un
redéploiement de ses effectifs dans le cadre d’une restructuration. « En clair, on va
licencier 2 000 personnes. Le directeur a reconnu un léger dysfonctionnement ». « En
clair, il a avoué une grossière erreur ».
Le message clair est également très à la mode : « le Secrétaire général du parti chose a
envoyé un message clair aux militants, aux électeurs ».
CLAIR
Par: (pas credité)
"J'ai tout compris : c'est l'inspecteur qui est l'assassin ! C'est clair
comme de l'eau de roche". C'est ce qu'on peut dire au beau milieu d'un
film policier quand, tout à coup, la vérité vous saute aux yeux. C'est
évident, on ne peut pas s'y tromper. C'est clair comme de l'eau de roche !.
D'ailleurs, on utilise souvent cette expression pour montrer que les choses
abstraites sont aisément compréhensibles : "Mon oncle m'a montré comment
on se servait de son ordinateur. Il explique bien : avec lui, c'est clair
comme de l'eau de roche".
284
Enfin, la comparaison avec une source sert spécialement
à évoquer l'origine d'une information. Un journaliste, par exemple,
doit parfois chercher des renseignements confidentiels et tenter de percer
les secrets. Et ceux qui lui disent ce qu'il veut savoir, ne souhaitent pas toujours
que ça se sache. Si le journaliste ne les trahit pas, on dit qu'il ne révèle pas ses
sources, qu'il protège ses sources.
Et, dans ce cas-là, ces sources mystérieuses sont ses informateurs.
CLASSE
Par: (pas credité)
La première "classe" disparaît à cette rentrée sur le réseau ferré de la banlieue parisienne,
comme ce fut le cas pour le métro en 1991. A la joie de certains, au dépit de certains
autres, on voit tout de suite que ce mot de "classe" introduit d'abord une idée de
hiérarchie et de distinction.
Il vient, sans originalité, du latin "classis" qui renvoyait au départ aux différentes
divisions de citoyens susceptibles d'être appelés sous les armes. Et d'ailleurs, en français,
on a pu garder un sens militaire : "être de la classe 90", c'était avoir été appelé sous les
drapeaux en 1991 ; "faire ses classes", c'était avoir été initié aux premiers rudiments du
maniement des armes. Mais le service national ayant été réformé, ce vocabulaire, sous
cette forme en tout cas, va disparaître.
Et la première "classe", elle, est liée à une idée de supériorité : elle indique un
"classement", un jugement qui donne l'idée d'une plus grande valeur, plus grande
importance, plus grande qualité. On a même une expression "hors classe" qui est comme
un superlatif de première "classe" et qui sort tout droit du vocabulaire de la hiérarchie.
Et le langage familier des jeunes d'aujourd'hui s'est emparé du mot en lui attribuant un
parfum de chic, de distinction, tout en l'utilisant dans une syntaxe particulière (et
relâchée, bien sûr) : non pas seulement "il a de la classe" - et l'expression existe aussi
dans une langue très correcte, mais "il est classe".
CLAVECIN
Par: (pas credité)
285
Le clavecin est aujourd'hui à la mode - on en trouve même en kit - bien que cet
instrument ait connu son heure de gloire du 18ème siècle. Drôle de mot, composé, et en
fait mot-valise, c'est-à-dire condensé à partir de deux autres mots : clavi et cymbalum.
Clavis signifie touche, clé. Et le cymbalum est un instrument à percussion qui existe
encore (on frappe des cordes tendues sur un cadre). C'est l'un des instruments principaux
de la musique traditionnelle tzigane d'Europe Centrale.
Notre clavecin, ancêtre du piano, mais dont le mécanisme pince les cordes au lieu que le
piano les frappe, a quelques cousins : le clavicorde ; l'épinette, petit clavecin souvent
portable. Son étymologie est fort discutée. Le mot pourrait venir de l'épine à cause des
becs, ces petites épines qui pincent les cordes lorsqu'on actionne les touches. Ou bien de
Spinetti, facteur vénitien d'instruments de musique. Le virginal, autre petit clavecin, ainsi
nommé soit parce que c'était l'instrument des jeunes filles, soit parce qu'il avait un son
très pur.
Le clavecin a bien sûr un fils (ou un bâtard), le piano. Ce dernier mot est l'abréviation de
deux mots italiens qui le composent à l'origine piano-forte, car la dynamique de son
clavier permet qu'on en joue soit doucement (= piano en italien), soit fort (forte en
italien). Notons qu'aujourd'hui, on parle encore de piano-forte en français pour désigner
un instrument construit dans la deuxième moitié du 18ème siècle, qui n'avait pas encore
tous les perfectionnements du piano moderne.
CLIMAT
Par: Yvan Amar
La conférence de Montréal sur le climat qui vient de se tenir a mis en avant tous les
problèmes de réchauffement de la planète et de modification du temps. En bref, on a parlé
du climat… et, d’ailleurs, en a souvent fait référence à cette conférence comme à la
conférence du climat. Bonne occasion de se demander ce que c’est exactement que le
climat. Ou tout au moins que ce mot climat… De la façon la plus générale, cela désigne
l’ensemble des conditions météorologiques qui règnent sur une certaine région : le temps
qu’il fait tout au long de l’année dans une certaine région. On distingue donc divers
climats selon les régions : méditerranéen, continental, tropical sec, tropical humide… Et
ensuite, on affine : le climat continental qui règne à Berlin n’est pas le même bien sûr que
celui de Moscou…. Et si une minuscule portion de terre est soumise à un climat
particulier, on peut même parler de micro climat…. Le mot de climat est donc un mot
plutôt scientifique qui appartient au vocabulaire de la géographie… tout au moins de la
météorologie différenciée selon les régions du globe auxquelles elle s’applique. On parle
d’ailleurs de climatologie, pour désigner l’étude des climats.
Mais, le mot a bien d’autres emplois, pas toujours aussi scientifiques. Dans la langue
courante, on parle de climat pour désigner le temps qu’il fait pendant une moment : A
286
Noël, on a souvent un climat très doux dans les îles du golfe du Morbihan... Mais, l’an
dernier, pas de chance ! nous avons eu un climat détestable pendant toute la semaine
qu’on y a passée. Autant dire, nous avons eu un temps détestable…
D’où vient-il ce mot ? Du latin, plus anciennement du grec. Mais avec un changement de
sens lorsqu’il passe d’une langue à l’autre… Car clima en latin désigne une portion du
ciel. Et même l’inclinaison du ciel. Le mot vient du grec klinein, une racine qu’on
retrouve justement dans le verbe incliner…. Il s’agit donc de la pente du ciel qui nous
abrite, qui nous surplombe. Au départ, donc, pas de relation précise au temps qu’il fait :
c’est simplement d’une certaine zone qu’il s’agit, une portion de la terre – on n’ose même
pas dire du globe puisqu’à l’époque la rotondité de la terre est inconnue…. Mais, la
géographie aidant, le mot prendra son sens moderne.
Mais, ce serait trop simple si l’on s’arrêtait là : il en a bien d’autres sens. Et il suit à peu
près la même trajectoire figurée que le mot atmosphère : un climat, c’est aussi une
ambiance, un sentiment collectif. On peut parler d’un climat de franche gaieté, qui règne
à un repas. D’un climat de tristesse, d’angoisse. D’un climat électrique, quand la tension
est trop forte, et très sensible. Il s’agit, en fait, de ce qu’on ressent, de ce qu’on perçoit,
avec sa peau, son intuition, sa sensibilité. Un peu comme on perçoit, sans le théoriser,
qu’un climat est humide, sec, qu’il fait lourd, comme on dit avant l’orage.
Enfin, utilisé de façon absolue, le mot peut faire contraste avec une certaine indifférence.
Si je dis que, dans un morceau de musique, il y a un climat… même sans lire lequel, j’ai
bien montré qu’il faisait quelque chose à l’auditeur, qu’un frisson passait sur
l’assistance…
CLIP ET SPOT
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
On parle beaucoup des clips en ce moment, dans la campagne électorale. Cela désigne
ces très courtes productions que les candidats font réaliser, qui ne fonctionnent pas
exactement comme des espaces publicitaires, mais qui pourtant s’en rapprochent par leur
format bref et ramassé.
287
Quant au clip, l’onomatopée n’en est pas absente : le mot pourrait être rendu en français
par coupure, au sens de coupure de presse : une article qu’on a découpé. Clip, en anglais
désignant des ciseaux (en particulier pour tondre les moutons), le mot est devenu
synonyme de montage, coupe dans la pellicule, et par dérivation, extrait, morceau
coupé… de là le sens actuel.
CLOCHE
Festival international de "cloches"… soit, mais une "cloche", tout à fait entre nous,
qu’est-ce que c’est ?
Sa forme a excité les imaginations linguistiques, soit pour désigner d’autres objets
ressemblants ("cloche à fromage", "chapeau cloche"…), soit pour alimenter diverses
images :
- "Se taper la cloche", c’est faire bombance, avec au départ l’idée de s’enivrer - le vin
vous cogne sur la tête
- "Se faire sonner les cloches" (familier), c’est se faire réprimander. La "cloche" évoque
bien sûr la tête. On se fait donc taper sur la tête –au figuré– avec en plus l’idée d’un
vacarme assourdissant. On est étourdi de reproches, et le pluriel de "cloche", s’il brouille
un peu la logique de l’image, sert d’intensif.
- "Un son de cloche" évoque aussi la version donnée d’une histoire. "L’autre son de
cloche" étant la même histoire, vue par la partie adverse (une dispute racontée par l’un,
puis par l’autre…). Cf le vieux proverbe "Qui n’entend qu’une cloche n’entend qu’un
son".
- "Quelle cloche celui-là !" Expression familière pour dire quel idiot ! Et bien souvent la
"cloche" est le naïf, celui qui se fait avoir. Pourquoi ? Peut-être parce que la "cloche"
balance d’un côté, puis de l’autre, et que le mot a d’abord désigné un indécis…
Mais le sens péjoratif du verbe "clocher" est d’une tout autre origine. Ce "clocher"-là
288
vient de cloppicare (Cf clopin-clopant) qui, en latin tardif, remplace claudicare avec le
sens de boiter. "Il y a quelque chose qui cloche" = il y a quelque chose qui boite, qui va
de travers.
CLOCHE
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
La cloche est donc un objet qui sert à manifester un signal, un signal collectif de
rassemblement, d’appel, d’alarme : la cloche du repas (sur un bateau justement), la cloche
de la messe, la cloche de l’incendie, le tocsin qui sonne quand l’ennemi arrive… Cette
cloche est donc apparemment un facteur de cohésion sociale, un média à l’ancienne dont
toute une communauté connaît le code : A la soupe ! Aux abris ! Au secours !…
Elle représente donc ce qui permet à la communauté de fonctionner en tant que telle.
Comment expliquer alors que cloche soit à de significations inverses, que le verbe
clocher veuille justement dire « ne pas fonctionner » ?
C’est que le verbe clocher justement ne procède pas au départ du nom cloche, même si
l’imaginaire linguistique l’y rattache pour une question d’homonymie, de proximité
sonore. Clocher dérive du latin cloppus ou du verbe cloppicare, déformation de
claudicare, qui veut dire boiter. Et l’expression « à cloche pied » se comprend
parfaitement par rapport à cette étymologie.
Difficile, pour une famille de mots d’être ainsi l’héritière de deux significations opposées.
Mais la jonction a pu se faire grâce à une ancienne image. La cloche, par sa forme, est
souvent assimilée à la tête (Cf se faire sonner les cloches = se faire réprimander… en
289
prendre plein la tête…). Et l’image de la cloche fêlée représente depuis longtemps la tête
qui ne fonctionne plus très bien : Ilm a la cloche fêlée… il a un petit grain, il tourne pas
très rond…… Voilà : on avait trouvé l’astucieux grain de sable qui permettait à l’image
de fonctionner dans un sens ou dans l’autre.
CLONE
Y.AMAR : A Genève, en ce moment, on parle de "clonage", à
l'Organisation Mondiale de la Santé. C'est en effet le thème du
débat qui vient de s'ouvrir et qui va concerner l'un des problèmes
aigus de la bioéthique actuelle.
290
les autres, ou plus conformes à un modèle, plus désireux de coller
à l'image que le patron se fait d'eux!
COLLE
"Il est resté scotché au plafond". Expression familière, et même argotique, plutôt
amusante, pour désigner une réalité qui l'est beaucoup moins. L'expression s'emploie pour
parler de quelqu'un qui garde des séquelles d'un usage de drogues. Non seulement, il
"plane" (image d'un envol supposé : légèreté aérienne), mais il est resté "en haut",
"scotché au plafond".
A l'inverse, lors des grèves des compagnies d'aviation, les avions restent "scotchés" au sol
: jeu de mots sur le fait qu'ils restent "collés" au sol, parce qu'ils ne "décollent" pas. De
même, on dira familièrement "aujourd'hui, je n'ai pas décollé de mon ordinateur" pour
dire qu'on est resté derrière son écran toute la journée.
"Scotcher" signifie donc "coller", dans la langue familière évidemment. C'est que
"Scotch" est une marque déposée de ruban adhésif qui a longtemps connu une position de
quasi monopole sur le marché. Ce mot de "scotch" est donc devenu synonyme de papier
collant, et "scotcher", au premier sens du verbe, signifie fixer à l'aide de ruban adhésif.
Mais tout ce qui colle donne facilement lieu à des usages figurés.
Le verbe "coller", au sens propre veut dire "faire adhérer". Mais en langue familière, "ça
colle" veut dire "ça marche", "c'est d'accord". C'est vraisemblablement l'image des deux
pièces du puzzle qui s'imbriquent l'une dans l'autre qui est à l'origine de cette acception.
A l'inverse "ça ne colle pas" signifie "ça n'est pas logique, pas vraisemblable". Ça ne
cadre pas avec le contexte. Ou alors ça renvoie à une idée de mésentente,
d'incompatibilité d'humeur : "entre eux deux, ça ne pouvait pas coller".
COLLEGE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
291
Collège, le temps de la contre-réforme. C’est le titre d’un texte, signé par François Dubet,
et que publiait hier Libération. Et le collège, en France du moins est au centre de toutes
les réflexions sur le système éducatif français, depuis un e bonne vingtaine d’années.
Qu’est-ce que c’est. C’est l’établissement scolaire qui couvre les classes de la 6è à la 3è.
Et on l’appelle le collège unique , puisque c’est le parcours obligé de l’itinéraire scolaire.
Alors qu’en sortant du collège, toute sorte d’orientations son possibles : différents lycées,
préparation au CAP, au BEP etc.
Mais le mot au départ, ne désigne pas forcément un établissement scolaire. C’est un corps
de personnes qui ont entre eux une certaine égalité. Des frères ? Pas exactement. Mais de
collègue à confrères, la différence n’est que d’usage. Dans un collège, a priori, on a tous
les même droits. Et rappelons-nous l’étymologie : legere en latin est à l’origine du verbe
français élire. On comprend mieux peut-être l’expression collège électoral : ensemble des
gens qui sont censés voter pour élire un de leurs représentants.
Pourtant les premières acceptions du mot ont été religieuse : un collège est un ensemble
de prêtres. (collège des augures, collège épiscopal) Et on parle encore de sacré collège :
l’ensemble des cardinaux, donc ceux qui vont élire le Pape.
Mais dans un contexte éducatif, le mot est ancien également. Pour des Ecoles souvent très
prestigieuse et d’un très haut niveau. Et le Collège de France en est encore un signe
tangible.
Mais attention aux faux amis, ou aux fausses équivalences : en anglais, et notamment,
aux Etats-Unis, le collège correspond à peu près à notre lycée en France.
COLLEGE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Collège, le temps de la contre-réforme. C’est le titre d’un texte, signé par François Dubet,
et que publiait hier Libération. Et le collège, en France du moins est au centre de toutes
les réflexions sur le système éducatif français, depuis un e bonne vingtaine d’années.
Qu’est-ce que c’est. C’est l’établissement scolaire qui couvre les classes de la 6è à la 3è.
Et on l’appelle le collège unique , puisque c’est le parcours obligé de l’itinéraire scolaire.
Alors qu’en sortant du collège, toute sorte d’orientations son possibles : différents lycées,
préparation au CAP, au BEP etc.
Mais le mot au départ, ne désigne pas forcément un établissement scolaire. C’est un corps
de personnes qui ont entre eux une certaine égalité. Des frères ? Pas exactement. Mais de
collègue à confrères, la différence n’est que d’usage. Dans un collège, a priori, on a tous
les même droits. Et rappelons-nous l’étymologie : legere en latin est à l’origine du verbe
français élire. On comprend mieux peut-être l’expression collège électoral : ensemble des
gens qui sont censés voter pour élire un de leurs représentants.
Pourtant les premières acceptions du mot ont été religieuse : un collège est un ensemble
de prêtres. (collège des augures, collège épiscopal) Et on parle encore de sacré collège :
l’ensemble des cardinaux, donc ceux qui vont élire le Pape.
Mais dans un contexte éducatif, le mot est ancien également. Pour des Ecoles souvent très
prestigieuse et d’un très haut niveau. Et le Collège de France en est encore un signe
tangible.
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Mais attention aux faux amis, ou aux fausses équivalences : en anglais, et notamment,
aux Etats-Unis, le collège correspond à peu près à notre lycée en France.
COLONISATION
Par: Yvan Amar
Colonus en latin renvoie à un cultivateur, à un paysan, celui qui travaille une terre qui lui
appartient, ou pas. Car colonus a aussi le sens de métayer.
Les colons sont donc compris d’abord comme ceux qui vont exploiter des terres
lointaines. Ce sens, on le trouve déjà en latin, ou la colonia désigne un établissement de
Romains dans une région contrôlée par Rome... On a, donc, déjà ces deux idées
importantes : on envoie un groupe de gens travailler une terre qu’on s’est appropriée.
L’idée a été reprise par l’Occident, notamment au XIXème siècle, même si la pratique est
bien plus ancienne… C’est quand même à cette période que la pratique s’est généralisée,
surtout pour la France. C’est donc ce qu’on appelle la colonisation, le fait de multiplier
les colonies, de les administrer, et de régler le problème de leur relation avec le pays qui
en est possesseur. Car c’est bien d’un rapport de possession qu’il s’agit : la France
(comme l’Angleterre et d’autres…) avait des colonies. Et les terres colonisées n’avaient
pas le même statut que le territoire national : c’était à la France ; ce n’était pas la
France… même si les positions officielles pouvaient varier entre colonie proprement dite,
territoire sous mandat, protectorat, tutelles, etc. Il n’y a pas eu un seul modèle, et ces
modèles ont changé avec le temps. Ainsi pouvait-on entendre, avant l’autodétermination
de l’Algérie, des formules telles que « l’Algérie, c’est la France », qui semblait opposer
l’Algérie aux colonies explicites.
Il n’empêche : ces colonies n’étaient pas, dans l’ensemble, terres de la République, ou de
la monarchie (sous Louis-Philippe, par exemple) ou de l’Empire, sous Napoléon III. On
parlait pourtant de l’Empire colonial, et la IIIème République s’accommodait fort bien de
293
la formule. Mais justement, l’Empire colonial était un apanage de la République… Et la
décolonisation a consisté à délier ce lien qui a peut-être eu quelques aspects positifs mais
s’est surtout caractérisé par une violence certaine.
Le comble de l’habileté : écosser les petits pois avec des gants de boxe.
Le comble du pâtissier : faire des éclairs !
Tous les enfants sont friands de ces petites histoires plus ou moins drôles qui énoncent les
« combles », c’est-à-dire « le plus haut degré » d’un vice ou d’une qualité…
Dans le langage courant, on l’utilise volontiers au sens figuré pour suggérer l’idée d’un
sommet, d’un point culminant qu’un état peut atteindre.
« Le jour de son mariage, il était au comble de la joie ».
« Ce problème de maths, c’est le comble de la facilité ».
Encore issu du domaine architectural, le faîte. « Etre au faite des honneurs », « Etre au
faîte de la gloire », c’est-à-dire être arrivé à ce point culminant d’où l’on ne peut plus
après que redescendre. Le faîte c’est dans un édifice la poutre qui forme l’arête supérieure
d’un comble et sur laquelle s’appuient les chevrons. Par extension, on utilise le mot pour
désigner la partie la plus haute de quelque chose d’élevé : une montagne, un arbre…
294
Parfois ces métaphores architecturales sont encore trop faibles, parce qu’elles renvoient à
une dimension humaine, et lorsque l’on veut évoquer de façon superlative cette idée de
domination, de sommet absolu, on va utiliser des mots qui renvoient cette fois au cosmos.
On pourra dire par exemple d’un artiste, d’un écrivain, qui connaît le succès, la gloire, et
qui atteint la maîtrise absolue de son art, qu’il est à son zénith. L’expression d’ailleurs est
souvent figée : « être à son zénith » ou encore « être au zénith », « parvenir au zénith ».
Le mot est d’origine arabe (= « chemin au-dessus de la tête »). En astronomie, il désigne
le point de la sphère céleste située sur la verticale ascendante de l’observateur.
Si l’on entend bien la référence astronomique dans le mot zénith, on l’a un peu oubliée
dans un mot savant qui, pourtant, appartient aussi à ce vocabulaire, le mot apogée.
Apogée, du grec apogeios, « qui est éloigné de la terre », désigne en astronomie le point
où la lune est la plus éloignée de la terre. Par extension d’ailleurs, on pourra dire que le
soleil est à son apogée quand la terre est en aphélie (lorsque son orbite atteint le point où
elle est la plus éloignée du soleil).
Dans un vocabulaire plus courant, on désigne par apogée le moment où une qualité,
morale ou physique, est parvenue à son plus haut degré d’élévation.
« B-B, dans Et Dieu créa la femme, était à l’apogée de sa beauté ».
« La bataille d’Austerlitz fut l’apogée de la gloire militaire napoléonienne ».
On note que ce mot désigne uniquement des sommets heureux. On ne dira pas qu’on est à
l’apogée du malheur ou de la misère. On utilisera dans ce cas plus volontiers le mot
comble, qui, bien qu’il désigne lui aussi étymologiquement une position élevée, peut
s’inverser : « Etre au comble du malheur ».
Notons que pour dire en termes plus savants ces excès vers le bas, on pourra utiliser le
mot paroxysme qui, lui, appartient à l’origine au vocabulaire médical, où il désigne la
période d’une maladie où les symptômes sont les plus aigus. Au sens figuré, désigne le
point d’extrême intensité d’un sentiment, d’une émotion, généralement négatifs. « La
haine était à son paroxysme ».
COMETE
Par: (pas credité)
295
C'est en fait, paraît-il, un astre à petit noyau qui, lorsqu'elle approche
du soleil, émet une atmosphère passagère de gaz, de poussière de roches, à
l'instar d'une chevelure diffuse, rendue lumineuse par la lumière solaire
au contact des gaz. Et c'est cette queue, droite et bleutée qui peut
atteindre plusieurs centaines de milliers de kilomètres qui a valu à la
comète son nom et sa réputation. Ce phénomène énigmatique qu'est
l'apparition d'une comète en a fait rêver plus d'un, et la langue a gardé
quelques traces de ces fulgurances. Certaines, bien sûr, s'évanouissent avec
le temps. On sait des ans qui reçurent le nom d'année de la comète ; on eut
la mode à la comète (en 1756), les crus de la comète en 1811 (les vins
étaient, paraît-il, fameux), etc.
Enfin, on tire des plans sur la comète, expression imagée, au sens assez
vague. Cela veut dire échafauder des projets incertains et mirifiques, avec
peut-être une référence aux travaux d'Halley qui, le premier, avait
découvert la récurrence des comètes, et prévu la date de leur réapparition.
Mais, souvenons-nous aussi que dans l'argot du bagne, tirer des plans
voulait dire faire un projet d'évasion. Sur la comète pourrait bien n'être
qu'un intensif pittoresque.
La comète, dans la langue de tous les jours (et tous les jours, l'envie me
prend de parler de comète), est bien souvent assimilé à l'étoile filante.
Rien n'est plus absurde, puisque l'étoile filante n'est rien qu'un
agglomérat de matière entré à l'occasion dans l'atmosphère. L'enchaînement
est implacable : frottement avec l'air, donc chaleur, donc désintégration,
donc traînée lumineuse. Et cette chevelure d'un instant nous induit en
erreur, en mettant sur le même plan deux apparitions que des mondes
séparent. Celles qu'on a appelées tour à tour étoiles erratiques, volantes,
tombantes (et enfin filantes) - et qui appellent si fort le vœu, ont deux
synonymes : météore ou météorites. Attention à l'orthographe de météorite :
sans H (pas comme dans aérolithe, etc). Mais peu importe son genre : plutôt
une météorite aujourd'hui, alors que jadis c'était un météorite. Précisons
enfin une petite différence de sens : la météorite est un fragment de
météore qui finit par tomber par terre.
COMMERCE
Par: (pas credité)
Et en voilà un mot qu'on entend et qu'on lit. Comme si le monde moderne tout entier se
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résumait à cette préoccupation. Vous voulez un prétexte pour en parler ? L'Organisation
mondiale du commerce organise, à Seattle, une réunion ministérielle et les mouvements
anti-OMC, les ONG de tous poils, associations de consommateurs, économistes,
sociologues se mobilisent pour réfléchir aux dangers dont ce genre de réunion est porteur.
Tout ça ne nous dit pas ce qu'est le "commerce". Le mot est simple, vient du latin, est
formé de "cum" (préfixe bien connu), et "merx", la marchandise. "Commercium" existe
déjà en latin, avec des sens que le mot français moderne ne renie pas :
- lieu où l'on vend et où l'on achète - donc par extension boutiques, magasins ("il y a
beaucoup de commerces dans ma rue", c'est-à-dire de boutiques de proximité, où l'on
peut se procurer des produits de nécessité courante : alimentation, vêtements,
quincaillerie de base, banque et café-tabac… "J'habite donc une rue commerçante").
- fait de vendre et d'acheter ("il a le sens du commerce").
A partir de cette première série de sens, s'en est bâtie une autre : le "commerce" est
devenu synonyme de relation avec autrui. Mais étonnamment, cette direction aboutit plus
ou moins à un cul-de-sac, et ces significations ne sont plus très productives. Pourtant, à
partir du XIVème siècle, "commerce" a désigné une certaine façon d'être avec les autres
et de se conduire en société. Il nous en est resté l'expression, un peu désuète, mais
toujours comprise "être d'un commerce agréable", alors qu' "avoir commerce avec
quelqu'un", dans le sens "entretenir des relations avec lui" est totalement sorti d'usage. De
même, le sens péjoratif de "relations sexuelles" n'appartient plus qu'à la langue ancienne.
COMMISSAIRE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
297
Un mot très actuel, puisqu’il correspond à une fonction toujours en vigueur : le
commissaire de police est un fonctionnaire, assez important, avec d’ailleurs toute une
grille hiérarchique à l’intérieur de ce grade : le commissaire est chargé d’un
commissariat, mais on a aussi des commissaires divisionnaires.
C’est surtout le roman policier qui a donné sa célébrité au mot. Mais on peut noter que
dans ce sens le mot est strictement français… On trouvera des inspecteurs, des enquêteurs
et des détectives dans le roman noir américain par exemple… mais pas de commissaire.
Le titre s’applique également à d’autres fonctions, bien différentes.
Un commissaire est chargé d’un commissariat, quel qu’il soit. Et lorsqu’on parle par
exemple du Haut commissariat à l’énergie atomique, il a à sa tête un Haut Commissaire.
Autre sens : on appelle commissaire le responsable et l’organisateur d’une exposition.
Et on a également le commissaire-priseur, fonction très différente, qui désigne le
responsable d’une vente aux enchères. C’est lui qui a le fameux marteau, qui est
responsable du bon déroulement de la vente, prononce les mots proverbiaux « adjugé,
vendu » etc. Et si on l’appelle priseur, c’est qu’il prise, c’est à dire qu’il estime la valeur
des objets à vendre, et qui fixe le prix auquel ils sont proposés aux acheteurs éventuels.
COMMODE
Par: (pas credité)
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d’accommodant est une personne arrangeante, qui accepte de composer qui sait arrondir
les angles.
COMPIL
Par: (pas credité)
Revenons à notre compilation. Le mot est ancien. Il désigne d’abord des documents
réunis, puis est arrivé un sens assez dépréciatif : une compilation est un ouvrage sans
originalité, qui se contente de piocher dans les travaux antérieurs pour en faire une sorte
de résumé plus ou moins synthétique. L’origine du mot est tout à fait éclairante, puisque
compilare en latin signifie piller. Le compilateur ne serait donc rien qu’un pilleur.
Mais le mot compilation, dans son sens moderne, a des synonymes : un recueil, ouvrage
où sont recueillis des morceaux d’origines différentes, et choisis par un éditeur. Mais on
parlera aussi bien d’un bouquet, d’une anthologie (c’est exactement la même image de la
brassée de fleurs réunies avec art), ou d’un florilège ( là encore c’est pareil, sauf que
florilège – fleurs choisies – vient du latin alors qu’anthologie vient du grec). Laissons aux
cuistres et aux précieux ces mots exquis que sont le chrestomathie, le spicilège ou l’ana…
COMPIL
PARLER AU QUOTIDIEN DU 17 AOUT 2001
L’intégrale ou la compil ? En voilà une question énigmatique ! Préférez-vous
l’œuvre complet d’Eddy Mitchell ou la compil… c’est-à-dire des extraits choisis,
certaines de ses chansons seulement – les meilleures ou prétendues telles. Et compil
est bien entendu l’abréviation de compilation. Abréviation débraillée ? familière ?
Peut-être, oui, mais qui concurrence sérieusement une autre formule abrégée et
beaucoup plus anglicisante : le best of, c’est-à-dire mot à mot le meilleur de…,
toujours suivi du nom de celui ou de celle dont on présente les meilleurs moments.
299
Parfois on a traduit directement cette expression de l’anglais : le meilleur d’Eddy
Mitchell, et même parfois, le tout meilleur, pour traduire « the very best of… ». Est-
ce d’un bien meilleur goût ? C’est discutable…
Revenons à notre compilation. Le mot est ancien. Il désigne d’abord des documents
réunis, puis est arrivé un sens assez dépréciatif : une compilation est un ouvrage
sans originalité, qui se contente de piocher dans les travaux antérieurs pour en faire
une sorte de résumé plus ou moins synthétique. L’origine du mot est tout à fait
éclairante, puisque compilare en latin signifie piller. Le compilateur ne serait donc
rien qu’un pilleur.
Mais le mot compilation, dans son sens moderne, a des synonymes : un recueil,
ouvrage où sont recueillis des morceaux d’origines différentes, et choisis par un
éditeur. Mais on parlera aussi bien d’un bouquet, d’une anthologie (c’est
exactement la même image de la brassée de fleurs réunies avec art), ou d’un florilège
( là encore c’est pareil, sauf que florilège – fleurs choisies – vient du latin alors
qu’anthologie vient du grec). Laissons aux cuistres et aux précieux ces mots exquis
que sont le chrestomathie, le spicilège ou l’ana…
COMPLICE et COMPLICITE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
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passer, aux yeux des autres, pour un quidam anonyme. Il sait quoi
dire et quand intervenir pour que le prestidigitateur passe pour
un vrai magicien.
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