La Corrosion Avec La Temperature

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N° d’ordre 05 ISAL 0060 Année 2005

Thèse

Evolution des propriétés d’un film


inhibiteur de corrosion sous
l’influence de la température et des
conditions hydrodynamiques :
caractérisation par techniques électrochimiques

présentée devant
L’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

pour obtenir
le grade de docteur

Ecole doctorale : Ecole doctorale Matériaux de Lyon


Spécialité : Microstructure et comportement mécanique
et macroscopique des matériaux – Génie des matériaux

par

Pascale BOMMERSBACH

Soutenue le 30 septembre 2005 devant la Commission d’examen

Jury

Président DALARD Francis Professeur (INP Grenoble – ENSEEG)


Rapporteur PEBERE Nadine Directrice de recherche CNRS (Toulouse)
Rapporteur TRIBOLLET Bernard Directeur de recherche CNRS (Paris)
ALEMANY-DUMONT Catherine Maître de conférences( INSA Lyon)
MILLET Jean-Pierre Professeur (INSA Lyon)
ROUVREAU Sabine Ingénieure (ASCOTEC Saint-Etienne)

Thèse préparée au sein du Laboratoire de Physico-Chimie Industrielle (LPCI)


2005
SIGLE ECOLE DOCTORALE NOM ET COORDONNEES DU RESPONSABLE

CHIMIE DE LYON M. Denis SINOU


Université Claude Bernard Lyon 1
Lab Synthèse Asymétrique UMR UCB/CNRS 5622
Bât 308
Responsable : M. Denis SINOU
2ème étage
43 bd du 11 novembre 1918
69622 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.44.81.83 Fax : 04 78 89 89 14
sinou@univ-lyon1.fr
ECONOMIE, ESPACE ET MODELISATION M. Alain BONNAFOUS
E2MC DES COMPORTEMENTS Université Lyon 2
14 avenue Berthelot
MRASH M. Alain BONNAFOUS
Responsable : M. Alain BONNAFOUS Laboratoire d’Economie des Transports
69363 LYON Cedex 07
Tél : 04.78.69.72.76
Alain.bonnafous∂ish-lyon.cnrs.fr
ELECTRONIQUE, ELECTROTECHNIQUE, M. Daniel BARBIER
E.E.A. AUTOMATIQUE INSA DE LYON
Laboratoire Physique de la Matière
Bâtiment Blaise Pascal
M. Daniel BARBIER 69621 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.43.64.43 Fax 04 72 43 60 82
Daniel.Barbier@insa-lyon.fr
EVOLUTION, ECOSYSTEME, M. Jean-Pierre FLANDROIS
E2M2 MICROBIOLOGIE, MODELISATION UMR 5558 Biométrie et Biologie Evolutive
http://biomserv.univ-lyon1.fr/E2M2 Equipe Dynamique des Populations Bactériennes
Faculté de Médecine Lyon-Sud Laboratoire de Bactériologie BP
M. Jean-Pierre FLANDROIS 1269600 OULLINS
Tél : 04.78.86.31.50 Fax 04 72 43 13 88
E2m2∂biomserv.univ-lyon1.fr
INFORMATIQUE ET INFORMATION M. Lionel BRUNIE
EDIIS POUR LA SOCIETE INSA DE LYON
http://www.insa-lyon.fr/ediis EDIIS
Bâtiment Blaise Pascal
M. Lionel BRUNIE 69621 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.43.60.55 Fax 04 72 43 60 71
ediis@insa-lyon.fr
INTERDISCIPLINAIRE SCIENCES-SANTE M. Alain Jean COZZONE
EDISS http://www.ibcp.fr/ediss IBCP (UCBL1)
7 passage du Vercors
M. Alain Jean COZZONE 69367 LYON Cedex 07
Tél : 04.72.72.26.75 Fax : 04 72 72 26 01
cozzone@ibcp.fr
MATERIAUX DE LYON M. Jacques JOSEPH
EDML http://www.ec-lyon.fr/sites/edml Ecole Centrale de Lyon
Bât F7 Lab. Sciences et Techniques des Matériaux et des
M. Jacques JOSEPH Surfaces
36 Avenue Guy de Collongue BP 163
69131 ECULLY Cedex
Tél : 04.72.18.62.51 Fax 04 72 18 60 90
Jacques.Joseph@ec-lyon.fr
MATHEMATIQUES ET INFORMATIQUE M. Franck WAGNER
Math IF FONDAMENTALE Université Claude Bernard Lyon1
http://www.ens-lyon.fr/MathIS Institut Girard Desargues
UMR 5028 MATHEMATIQUES
M. Franck WAGNER Bâtiment Doyen Jean Braconnier
Bureau 101 Bis, 1er étage
69622 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.43.27.86 Fax : 04 72 43 16 87
wagner@desargues.univ-lyon1.fr
MECANIQUE, ENERGETIQUE, GENIE M. François SIDOROFF
MEGA CIVIL, ACOUSTIQUE Ecole Centrale de Lyon
http://www.lmfa.ec-lyon.fr/autres/MEGA/index.html Lab. Tribologie et Dynamique des Systêmes Bât G8
36 avenue Guy de Collongue
M. François SIDOROFF BP 163
69131 ECULLY Cedex
Tél :04.72.18.62.14 Fax : 04 72 18 65 37
Francois.Sidoroff@ec-lyon.fr
« L’oisiveté est pire que la rouille, elle use plus que le travail. »

Pat L. WOLF
REMERCIEMENTS

C’est avec un réel plaisir et un grand enthousiasme que je me livre


à la rédaction de cette page. Bien plus que le point final du manuscrit
scientifique, cet exercice de style constitue, en effet, l’opportunité de m’accorder
une réflexion sur une période relatant trois années de vie très riches en
évènements.

Tout d’abord, je tiens à remercier très chaleureusement Madame


Catherine ALEMANY-DUMONT pour son implication exceptionnelle dans ce
travail. Sa disponibilité, son esprit volontaire, sa pugnacité à toute épreuve,
agrémenté quotidiennement de discussions constructives ont été le moteur de ce
travail.

Je remercie également vivement Monsieur Jean-Pierre MILLET


pour avoir accepté, lui aussi, de prendre en charge l’encadrement de ma
recherche.

Je suis très reconnaissante envers Mesdames Sabine ROUVREAU


et Christine GAILLON (ASCOTEC) pour leur collaboration qui a permis le
démarrage de ce travail, Monsieur Pierre DELICHERE (IRC-CNRS) pour ses
conseils avisés concernant l’interprétation des spectres XPS, sans oublier
Monsieur Valéry BOTTON (LMFA) pour son apport on ne peut plus fluide dans
son domaine coudé et parsemé d’embûches.

J’exprime bien entendu mes remerciements les plus sincères à


Monsieur Bernard TRIBOLLET (LISE-CNRS) et Madame Nadine PEBERE
(ENSCIACET-CNRS) pour l’intérêt qu’ils ont témoigné à mon travail tout au
long de ma thèse et pour finalement avoir accepté d’en être les rapporteurs. Je
remercie par ailleurs Monsieur Francis Dalard (LEPMI-ENSEEG) pour avoir
présider ce jury de thèse.
Un clin d’œil spécial à Madame Elisabeth ECCIDIO qui, par son
dynamisme, sa bonne humeur et sa gentillesse rendrait presque agréables les
tâches administratives, à Monsieur Robert DIEMIASZONECK qui, par son
calme olympien trouve toujours à se déjouer des situations les plus inextricables
dans lesquelles j’ai parfois pu l’embarquer, et à Monsieur Robert DI FOLCO
qui, par sa générosité, son ingéniosité et son savoir-faire inégalable aura
permis l’élaboration des dispositifs essentiels à l’obtention de résultats fiables et
donc exploitables.

A tous mes compagnons du LPCI : Fabien, Badr, Christophe,


Young-Pil, Lionel, Lilian, Bruno, Elena, Flori, David, Alexandre,…qui, pour
une raison ou une autre, se sont également lancés dans cette drôle d’aventure…

A tous les autres du LPCI, j’adresse mes remerciements les plus


sincères pour leur disponibilité, leurs conseils, les discussions scientifiques ou
non, et surtout pour les bons moments passés en leur compagnie. De même, je
ne saurai oublier tous les étudiants de passage au laboratoire : Mustapha,
Alice, Mohamed, Emilie, Estelle, François, Rémy, Laure,…

Je remercie également tous mes amis d’ici ou d’ailleurs, et


particulièrement ELENA, collègue le premier jour, amie le jour suivant, et ma
grande sœur à présent, RODICA pour notre complicité amicale si
immédiatement naturelle mais tellement précieuse à mes yeux, et MAËLENN
pour notre collaboration IR-EIS presque aboutie mais notre amitié 100 %
accomplie, ainsi que tous les autres y compris les footeux, matheux, voire les
deux …

Enfin,
Je ne saurais que trop remercier
Ma famille, toujours à mes côtés,
Et plus que jamais, en l’occurrence
A l’heure de la soutenance.
Sommaire

SOMMAIRE

Liste des symboles 5

Introduction 9

Chapitre 1 : Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs 13

1. Corrosion et protection 15
2. Les inhibiteurs de corrosion 15
2.1. Historique 15
2.2. Définition 16
2.3. Propriétés 16
2.4. Les classes d’inhibiteurs 16
2.4.1. Nature des molécules de l’inhibiteur 17
2.4.1.1. Les inhibiteurs organiques 17
2.4.1.2. Les inhibiteurs minéraux 17
2.4.2. Mécanismes d’action électrochimique 18
2.4.3. Mécanismes d’action interfaciale 19
2.4.3.1. Adsorption des molécules inhibitrices à la surface métallique 19
2.4.3.2. Formation d’un film intégrant les produits de dissolution du
substrat 19
2.5. Pouvoirs protecteurs des films formés 20
3. Les inhibiteurs spécifiques aux métaux ferreux 20
4. Conclusion du chapitre 1 24

-1-
Sommaire

Chapitre 2 : Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes 25

1. Matériaux 27
2. Cellule, montages et électrolyte 28
2.1. Cellule électrochimique à trois électrodes 29
2.2. Montage pour les mesures gravimétriques 31
2.2.1. Principe de la microbalance électrochimique à cristal de quartz 31
2.2.2. Montage du couplage électrochimie / microgravimétrie 33
2.3. Préparation de l’échantillon 34
2.4. Electrolyte 35
3. Techniques électrochimiques 36
3.1. Techniques stationnaires 36
3.1.1. Suivi du potentiel en circuit ouvert 36
3.1.2. Courbes de polarisation 36
3.2 Techniques transitoires 36
3.2.1. Méthode impulsionnelle : la chronoampérométrie 36
3.2.2. La méthode à balayage en potentiels : la voltamétrie 37
3.2.3. La méthode par modulation : la spectroscopie d’impédance
électrochimique (SIE) 37
3.2.3.1. Généralités 37
3.2.3.2. La SIE appliquée aux études sur les inhibiteurs de corrosion 38
3.2.4. Bilan 43
4. Méthodes d’analyses 45
4.1. La microscopie électronique à balayage 45
4.2. La microscopie à force atomique 46
4.3. La spectroscopie de photoélectrons X 47

Chapitre 3 : Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur 49

1. Nature de l’inhibiteur 51
1.1. Suivi des potentiels / temps pour différentes concentrations en inhibiteur 51
1.2. Courbes de polarisation 52
1.2.1. Domaine anodique 52

-2-
Sommaire

1.2.2. Domaine cathodique 53


1.3. Etude chronoampérométrique 55
2. Mécanisme de formation du film inhibiteur 56
2.1. Spectres d’impédance 56
2.1.1. Après 2 heures d’immersion 56
2.1.2. A des temps d’immersion importants 58
2.2. Mise en évidence de la contribution des oxydes-hydroxydes de fer dans la
construction du film 60
2.3. Analyses XPS 61
3. Etude du mode de dégradation du film inhibiteur 65
3.1. Détermination d’une concentration limite pour la formation du film 65
3.2. Etude par spectroscopie d’impédance 67
3.3. Analyses XPS 72
4. Conclusion du chapitre 3 72

Chapitre 4 : Influence de paramètres physiques liés aux conditions de


service du système : influence de la température 75

1. Mise au point bibliographique 75


2. Mise en évidence d’une température critique d’efficacité de l’inhibiteur 79
2.1. Etude sans inhibiteur 79
2.2. Etude en présence d’inhibiteur 81
2.3. Détermination d’une température critique d’utilisation de l’inhibiteur 83
3. Evolution du pouvoir protecteur avec la température 83
4. Evolution des mécanismes de formation du film inhibiteur avec la température 88
4.1. Effet de la température sur les mécanismes d’inhibition 88
4.2. Evolution des paramètres à l’interface 91
4.3. Effet d’un ajout de 5 % en inhibiteur sur la formation du film à 80 °C 92
4.3.1. Mise en évidence de la formation du film à température élevée 93
4.3.2. Evolution de la cinétique de formation du film 95
5. Conclusion du chapitre 4 98

-3-
Sommaire

Chapitre 5 : Influence de paramètres physiques liés aux conditions de


service du système : influence des conditions hydrodynamiques 99

1. Préambule : l’écoulement dans la configuration de l’EDT 101


1.1. Le transport de masse 101
1.2. Dépendance entre les contraintes d’écoulement et le rayon du disque de l’EDT103
2. Les inhibiteurs et l’hydrodynamique 105
2.1. Régime turbulent 106
2.2. Régime laminaire 106
3. Etude qualitative de l’effet de la vitesse de rotation sur le film inhibiteur 107
3.1. Nature du régime 107
3.2. L’inhibition sous l’effet de l’hydrodynamique 107
4. Etude de l’hydrodynamique à des temps courts 110
4.1. Cinétique d’adsorption 110
4.2. Diagrammes d’impédance après 2 heures 112
4.3. Décomposition des contributions 113
4.4. Evolution des paramètres à l’interface 117
5. Etude de l’hydrodynamique à des temps plus importants 119
6. Caractérisation des films inhibiteurs sous l’influence de la vitesse de rotation 123
6.1. Caractérisation de l’état de surface : analyses par AFM 123
6.2. Caractérisation de la composition chimique des films inhibiteurs : analyses par
XPS 126
7. Conclusion du chapitre 5 127

Conclusion générale / Perspectives 129

Références bibliographiques 133

Annexes 147

-4-
Liste des symboles

Liste des symboles

-5-
Liste des symboles

A : surface active résonante (cm²)

CB : concentration de l’espèce B au sein de la solution (mol.cm-3)

Cinh : concentration de l’inhibiteur (% massique)

Cdc : capacité de double couche (F)

Cf : capacité de film (F)

CPC : capacité des produits de corrosion (F)

d : épaisseur du film (m)

DB : coefficient de diffusion de l’espèce B (cm².s-1)

E : tension (V)

Ecorr : potentiel de corrosion (V)

Ea : énergie d’activation (kJ.mol-1)

EC : énergie cinétique du photoélectron éjecté (eV)

EL : énergie de liaison (eV)

e : vitesse d’écoulement linéaire du fluide (m.s-1)

eΦ : énergie d’extraction du spectromètre (eV)

F : constante de Faraday (96500 C)

f : fréquence (Hz)

fmax : fréquence maximale (Hz)

f0 : fréquence de résonance du quartz (Hz)

hν0 : énergie du rayonnement incident (eV)

I : intensité du courant (A)

Im(Z) ou Z’’ : partie imaginaire de l’impédance électrochimique (Ω)

il : densité de courant limite (A.cm-2)

icorr : densité de courant en l’absence d’inhibiteur (A.cm-2)

-6-
Liste des symboles

icorrinh : densité de courant en présence d’inhibiteur (A.cm-2)

j : unité imaginaire

L : longueur caractéristique du système (m)

n : nombres d’électrons échangés dans la réaction

Qdc : paramètre caractéristique du CPE de la double couche

Qf : paramètre caractéristique du CPE de film

R : constante des gaz (J.mol-1.K-1)

Re(Z) ou Z’ : partie réelle de l’impédance électrochimique (Ω)

Re : nombre de Reynolds (grandeur adimensionnelle)

Recrit : nombre de Reynolds critique (grandeur adimensionnelle)

Rf : résistance de film (Ω)

RΩ : résistance de l’électrolyte (Ω)

Rtc : résistance de transfert de charge (Ω)

RtcA : résistance de transfert de charge anodique (Ω)

RtcC : résistance de transfert de charge cathodique (Ω)

r : rayon de l’électrode (m)

rms : facteur de rugosité de surface (nm)

Sc : nombre de Schmidt (grandeur adimensionnelle)

Sh : nombre de Sherwood (grandeur adimensionnelle)

T : température absolue (K)

t : temps (h)

vbal : vitesse de balayage (V.s-1)

W : impédance de diffusion de Warburg (Ω)

Wδ : impédance de diffusion-convection (Ω)

ZC : impédance liée à la capacité

-7-
Liste des symboles

ZI : impédance liée à l’inductance

α : déphasage par rapport à l’axe des réels

∆m : variation de masse (g)

∆f : variation de fréquence (Hz)

χ² : facteur d’erreur

ε : constante diélectrique relative du film

ε0 : permittivité du vide (8,85.10-14 F.cm-1)

Ø : diamètre de l’électrode (m)

Φ : déphasage du courant alternatif par rapport au potentiel

λ : facteur préexponentionnel

µ : viscosité dynamique (Pa.s)

µQ : coefficient de vibration du quartz (µQ = 2,947.1011 dyne.cm-2)

ν : viscosité cinématique du milieu (cm². s-1),

θ : angle d’analyse du spectromètre (°)

ρ : masse volumique (g.cm-3)

ρQ : densité du quartz (ρQ = 2,648 g.cm-3)

τtot : frottement à la paroi (Pa)

τzr : cisaillement radial (Pa)

τzϕ : cisaillement tangentiel (Pa)

ω : pulsation (rad.s-1)

ωmax : pulsation maximale (rad.s-1)

Ω : vitesse de rotation de l’électrode (rad.s-1 ou tours par minute tpm)

-8-
Introduction

Introduction

-9-
Introduction

- 10 -
Introduction

En matière de protection, les inhibiteurs constituent un moyen original pour lutter


contre la corrosion. Un inhibiteur est un composé chimique que l’on ajoute, en faible quantité,
au milieu pour diminuer la vitesse de corrosion des matériaux. Il peut être destiné soit à une
protection permanente de la pièce (l’installation requiert alors une attention scrupuleuse), soit
à une protection provisoire (notamment lorsque la pièce est particulièrement sensible à la
corrosion).

Les nouvelles directives européennes concernant les rejets industriels étant de plus en
plus sévères en terme d’écologie, la mise au point d’inhibiteurs de corrosion éco-compatibles
et biodégradables devient, de nos jours, un enjeu important. C’est en particulier pour cette
raison, mais également pour leurs propriétés inhibitrices remarquables, que l’utilisation
d’inhibiteurs organiques a été largement plébiscitée au cours de cette dernière décennie.

La demande grandissante de l’utilisation d’inhibiteurs incite de nombreuses


entreprises à s’engager sur ce marché socio-économique. Les performances recherchées de
ces produits s’évaluent en terme de protections métallique et environnementale. C’est dans ce
contexte qu’une jeune entreprise, Ascotec, spécialisée dans le domaine de la formulation, la
production et la commercialisation de nouveaux inhibiteurs de corrosion s’est créée. Les
produits issus de cette société sont destinés aux secteurs industriels suivants : Peintures et
Revêtements, Huiles et Lubrifiants, Détergents, Encres, Bâtiment. A la demande, en 2001, de
l’incubateur d’entreprise Créalys, le LPCI a apporté son soutien scientifique au projet
« ASCOTEC », avec l’appui financier de la Région Rhône-Alpes.

L’inhibiteur testé dans notre étude, fourni par cette société, est destiné à être intégré à
des huiles utilisées dans l’usinage mécanique, afin de limiter la corrosion des outils de coupe
et des pièces en acier. Il est composé, entre autres, d’un acide carboxylique et d’une amine
tertiaire. Nous attendons, par l’effet synergique de ce mélange de molécules organiques, une
meilleure inhibition que celle obtenue par l’utilisation individuelle de chaque molécule.

- 11 -
Introduction

Ce manuscrit est divisé en cinq chapitres.

Le premier est consacré à une présentation générale relative aux inhibiteurs de


corrosion et plus particulièrement à une mise au point bibliographique sur les inhibiteurs
spécifiques aux métaux ferreux, soulignant ainsi, les rôles essentiels joués respectivement,
dans l’inhibition, par l’acide carboxylique et l’amine tertiaire.

Le second chapitre présente les conditions expérimentales de l’étude ainsi que les
techniques électrochimiques et les méthodes de caractérisation de surface mises en œuvre.

Les résultats expérimentaux sont regroupés dans les trois chapitres suivants.

Tout d’abord, la caractérisation générale de l’inhibiteur sera réalisée dans le chapitre 3.


Il s’agit alors d’une part d’identifier le type et le mode d’action de l’inhibiteur, et d’autre part,
d’étudier les mécanismes de formation et de croissance du film ainsi que les phénomènes
responsables de sa dégradation dans le temps.

Ensuite, l’influence des paramètres liés aux conditions de service sera abordée dans les
deux derniers chapitres.

Ainsi, le chapitre 4, axé sur l’influence de la température, consistera à identifier


l’évolution des mécanismes de formation du film dans l’intervalle 20-80 °C.

Enfin, le dernier chapitre abordera l’effet de l’hydrodynamique sur la cinétique de


formation du film dans le temps (jusqu’à 10 jours). Nous évaluerons l’importance du rôle de
l’écoulement et en particulier des contraintes de cisaillement sur la stabilité et la morphologie
du film protecteur, en particulier pour des temps d’immersion importants.

- 12 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

Chapitre 1 :

LUTTE CONTRE LA CORROSION PAR


L’UTILISATION D’INHIBITEURS

1. Corrosion et protection ______________________________________ 15


2. Les inhibiteurs de corrosion ____________________________________ 15
2.1. Historique ________________________________________________ 15
2.2. Définition_________________________________________________ 16
2.3. Propriétés _________________________________________________ 16
2.4. Les classes d’inhibiteurs _____________________________________ 16
2.4.1. Nature des molécules de l’inhibiteur ________________________ 17
2.4.1.1. Les inhibiteurs organiques_____________________________ 17
2.4.1.2. Les inhibiteurs minéraux ______________________________ 17
2.4.2. Mécanismes d’action électrochimique _______________________ 18
2.4.3. Mécanismes d’action interfaciale ___________________________ 19
2.4.3.1. Adsorption des molécules inhibitrices à la surface métallique _ 19
2.4.3.2. Formation d’un film intégrant les produits de dissolution du
substrat ________________________________________________________ 19
2.5. Pouvoir protecteur des films formés ____________________________ 20
3. Les inhibiteurs spécifiques aux métaux ferreux ____________________ 20
3.1. Le rôle des amines __________________________________________ 22
3.1.1. Les amines filmantes ____________________________________ 22
3.1.2. Les amines neutralisantes _________________________________ 22
3.2. Le rôle des acides carboxyliques : un effet complexant _____________ 23
4. Conclusion du chapitre 1 _______________________________________ 24

- 13 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

- 14 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

1. Corrosion et protection

Tout ce qui nous entoure est susceptible de se détériorer. Lorsque l’attaque


destructive s’effectue par des moyens physico-chimiques voire biologiques, il s’agit, pêle-
mêle, de gonflement ou vieillissement du plastique, de pourriture du bois ou encore
d’érosion du granit, etc… Par contre, lorsque la détérioration irréversible d’un métal a lieu
par réaction chimique ou électrochimique avec son environnement, il s’agit de corrosion,
pouvant être de différentes formes : uniforme, localisée, etc… les propriétés des matériaux
sont alors altérées.

En matière de protection contre la corrosion, il est possible d’agir sur le matériau


lui-même (choix judicieux, formes adaptées, contraintes en fonction des applications, …),
sur la surface du matériau (revêtement, peinture, tout type de traitement de surface, …) ou
sur l’environnement avec lequel le matériau est en contact (inhibiteurs de corrosion).

2. Les inhibiteurs de corrosion

2.1. Historique

Tout comme pour bien d’autres domaines, il est difficile de déterminer l’origine
exacte de l’inhibition considérée comme une technologie à part. Néanmoins, il y a
quelques décennies, il a été observé que le dépôt calcaire formé à l’intérieur des conduites
transportant certaines eaux naturelles protégeait cette conduite ; plutôt que d’améliorer
sans cesse la résistance à la corrosion des conduites en agissant directement sur ces
dernières, il s’avère plus pratique d’ajuster les concentrations minérales des solutions
transportées, qui sont à l’origine des dépôts calcaires « protecteurs ». En 1945, on comptait
moins de 30 papiers traitant de l’inhibition. Dans un article de 1948 [WAL-48], Waldrip se
référait à un rapport datant de 1943 au sujet de sa discussion concernant la protection
contre la corrosion des puits de pétrole. De nombreux articles concernant l’inhibition ont
été rédigés durant la période couvrant 1945 à 1954 : ceux-ci traitaient entre autres de
- 15 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

l’inhibition dans les domaines de l’aviation, des chaudières, des circuits de refroidissement,
des moteurs diesel, des sels de déneigement, des raffineries de pétrole, des pétroliers….
Les articles publiés durant cette période témoignent d’un grand développement
technologique en matière d’inhibition. Durant les quarante dernières années, un nombre
croissant de résumés, d’articles et autres ouvrages évoquant ce sujet a été recensé : au total,
en 1970, 647 articles traitant de l’inhibition sont dénombrés [HAM-73].

2.2. Définition

La définition d’un inhibiteur de corrosion n’est pas unique, néanmoins celle retenue
par la National Association of Corrosion Engineers (NACE) est la suivante : un inhibiteur
est « une substance qui retarde la corrosion lorsqu’elle est ajoutée à un environnement en
faible concentration » [NAC-65].

2.3. Propriétés

Un inhibiteur de corrosion doit abaisser la vitesse de corrosion du métal tout en


conservant les caractéristiques physico-chimiques de ce dernier. Il doit être non seulement
stable en présence des autres constituants du milieu, mais également ne pas influer sur la
stabilité des espèces contenues dans ce milieu. Un inhibiteur est définitivement reconnu
comme tel s’il est stable à la température d’utilisation et efficace à faible concentration. Il
peut être utilisé en vue d’une protection permanente (surveillance primordiale du
dispositif) ou plus couramment en vue d’une protection temporaire : durant une période où
la pièce est particulièrement sensible à la corrosion (stockage, décapage, nettoyage,…) ou
encore lorsque la pièce est soumise à des usinages très sévères comme le perçage,
taraudage, forage, filetage,…

2.4. Les classes d’inhibiteurs

Il existe plusieurs possibilités de classer les inhibiteurs, celles-ci se distinguant les


unes des autres de diverses manières :

- 16 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

la formulation des produits (inhibiteurs organiques ou minéraux),


les mécanismes d’action électrochimique (inhibiteurs cathodiques,
anodiques ou mixtes),
les mécanismes d’interface et principes d’action (adsorption et/ou formation
d’un film).

2.4.1. Nature des molécules de l’inhibiteur

2.4.1.1. Les inhibiteurs organiques


Les molécules organiques sont promises à un développement plus que certain en
terme d’inhibiteur de corrosion : leur utilisation est actuellement préférée à celle
d'inhibiteurs inorganiques pour des raisons d’écotoxicité essentiellement. Les inhibiteurs
organiques sont généralement constitués de sous-produits de l’industrie pétrolière [FIA-
02]. Ils possèdent au moins un centre actif susceptible d’échanger des électrons avec le
métal, tel l’azote, l’oxygène, le phosphore ou le soufre. Les groupes fonctionnels usuels,
permettant leur fixation sur le métal, sont :

le radical amine (-NH2),


le radical mercapto (-SH),
le radical hydroxyle (-OH),
le radical carboxyle (-COOH).

2.4.1.2. Les inhibiteurs minéraux


Les molécules minérales sont utilisées le plus souvent en milieu proche de la
neutralité, voire en milieu alcalin, et plus rarement en milieu acide. Les produits se
dissocient en solution et ce sont leurs produits de dissociation qui assurent les phénomènes
d’inhibition (anions ou cations). Les principaux anions inhibiteurs sont les oxo-anions de
type XO4n- tels les chromates, molybdates, phosphates, silicates,… Les cations sont
essentiellement Ca2+ et Zn2+ et ceux qui forment des sels insolubles avec certains anions
tels que l’hydroxyle OH-. Le nombre de molécules en usage à l’heure actuelle va en se
restreignant, car la plupart des produits efficaces présentent un côté néfaste pour
l’environnement.

- 17 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

2.4.2. Mécanismes d’action électrochimique


Dans la classification relative au mécanisme d’action électrochimique, on peut
distinguer les inhibiteurs anodique, cathodique ou mixte (regroupant alors les deux
premières propriétés). L’inhibiteur de corrosion forme une couche barrière sur la surface
métallique, qui modifie les réactions électrochimiques en bloquant soit les sites anodiques
(siège de l’oxydation du métal) soit les sites cathodiques (siège de la réduction de
l’oxygène en milieu neutre aéré ou siège de la réduction du proton H+ en milieu acide),
voire les deux (figure 1.1).

H+ H+
Fe2+
Fe2+
H+ H+

e- e- e-
a) blocage des sites CATHODIQUES b) blocage des sites ANODIQUES

Figure 1.1 : Formation des couches barrières a) cathodiques et b) anodiques interférant


avec les réactions électrochimiques, dans le cas d’une étude en milieu acide

[d’après SCH-73]

Les inhibiteurs anodiques doivent être utilisés avec précaution. En effet, si le film
protecteur est altéré par une rayure ou par une dissolution, ou si la quantité d’inhibiteur est
insuffisante pour restaurer le film, la partie exposée se corrode en piqûre profonde. En
matière de corrosion localisée, la corrosion par piqûre est une forme particulièrement
insidieuse : l’attaque se limite à des trous, très localisés et pouvant progresser très
rapidement en profondeur tout en conservant le reste de la surface indemne.

- 18 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

2.4.3. Mécanismes d’action interfaciale

2.4.3.1. Adsorption des molécules inhibitrices à la surface métallique


L’adsorption est un phénomène de surface universel car toute surface est constituée
d’atomes n’ayant pas toutes leurs liaisons chimiques satisfaites. Cette surface a donc
tendance à combler ce manque en captant atomes et molécules se trouvant à proximité.
Deux types d’adsorption peuvent être distingués : la physisorption (formation de liaisons
faibles) et la chimisorption.

La première, encore appelée adsorption physique conserve l’identité aux molécules


adsorbées ; trois types de forces sont à distinguer :
Les forces de dispersion (Van der Waals, London) toujours présentes,
Les forces polaires, résultant de la présence de champ électrique,
Les liaisons hydrogène dues aux groupements hydroxyle ou amine.

La chimisorption, au contraire, consiste en la mise en commun d’électrons entre la


partie polaire de la molécule et la surface métallique, ce qui engendre la formation de
liaisons chimiques bien plus stables car basées sur des énergies de liaison plus importantes.
Les électrons proviennent en grande majorité des doublés non appariés des molécules
inhibitrices tels que O, N, S, P,… (tous ces atomes se distinguant des autres de par leur
grande électronégativité). L’adsorption chimique s’accompagne d’une profonde
modification de la répartition des charges électroniques des molécules adsorbées. La
chimisorption est souvent un mécanisme irréversible.

2.4.3.2. Formation d’un film intégrant les produits de dissolution du substrat


Cette forme d’inhibition, appelée également inhibition «d’interphase » traduit la
formation d’un film tridimensionnel entre le substrat corrodé et les molécules d’inhibiteur
[LOR-80, MAN-85, KAR-98]. Les inhibiteurs d’interphase ne se contentent ainsi pas
d’être adsorbés aux interfaces métal/oxyde et oxyde/électrolyte, mais sont également
incorporés dans les couches barrières (en formant des complexes par exemple) ; ainsi ces

- 19 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

molécules inhibitrices d’interphase conduisent à des réseaux homogènes et denses


présentant de fait une faible porosité et une bonne stabilité.

2.5. Pouvoir protecteur des films formés

Quel que soit le type de mécanisme par lequel agit l’inhibiteur, le pouvoir
protecteur de ce dernier caractérise le ralentissement de la corrosion, c’est-à-dire la
diminution du courant de corrosion (ou de la vitesse de corrosion). Le pouvoir protecteur
d’un inhibiteur s’exprime par l’équation (1.1) :

icorr − icorr inh


Pouvoir protecteur (%) = .100 (1.1)
icorr

icorr et icorrinh représentent respectivement les courants de corrosion en l’absence et


en présence d’inhibiteur. Il est possible d’accéder aux valeurs des courants de corrosion de
manière expérimentale, plus précisément en se basant sur des dispositifs relevant d’études
électrochimiques (voir chapitre 2).

3. Les inhibiteurs spécifiques aux métaux ferreux

D’une manière générale, pour chaque matériau existe une famille d’inhibiteurs
propice à une protection satisfaisante face à la corrosion. Par exemple, pour le cuivre, les
dérivés azolés sont très souvent utilisés comme inhibiteurs de corrosion et présentent une
remarquable efficacité dans certaines conditions [ASS-02]. Pour les études des métaux
ferreux, en milieux neutres ou alcalins, les inhibiteurs de corrosion sont divers et variés ;
ces derniers sont répertoriés dans le tableau 1.1 :

- 20 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

Tableau 1.1 : Inhibiteurs les plus utilisés pour la protection des métaux ferreux

Molécules inhibitrices Matériaux Références


amine grasse, polyamines acier (XC35) [DUP-81]
phosphonates et acides phosphoniques acier (XC35) [TO-97]
alkylamine fer (99.99%) [TSU-00]
acides phosphoniques / amine grasse acier (4340)
[MAN-85]
ou acides polyacryliques / amine grasse
alkylimidazole acier (XC38) [SHR-96]
Amines grasses / sels d’acide
phosphonocarboxylique acier (XC35) [OCH-02]

carboxylates acier [MER-80]


benzoates fer [TUR-85]
phosphonates acier [SHI-88]
benzimidazole acier (XC38) [LOP-03]
acides phosphoniques acier (XC28) [KAR-98]

Toutes ces molécules inhibitrices permettent d’obtenir de bons rendements en


terme d’inhibition de métaux ferreux en milieux neutre et alcalin, qu’elles soient utilisées
indépendamment les unes des autres ou de manière synergique. Tous ces composés
organiques contiennent les atomes N, O, S ou P ; chacun de ces éléments est susceptible
d’échanger des électrons avec le métal à protéger. Les molécules inhibitrices les plus
communément utilisées sont les amines ou encore les sels d’acides carboxyliques, qui se
trouvent également être présents dans l’inhibiteur étudié pour la suite de ce travail ;
intéressons-nous alors plus en détail à leur mode d’action respectif.

- 21 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

3.1. Le rôle des amines

Les amines primaires, secondaires ou tertiaires sont très souvent utilisées pour la
protection de pièces en milieu aqueux naturel. Toutefois, il faut distinguer deux rôles bien
distincts de protection effectués par l’amine : une action filmante et une action
neutralisante.

3.1.1. Les amines filmantes


Les amines filmantes ont pour fonction de former une barrière constituée d’une
couche mono moléculaire d’un produit à chaîne plus ou moins longue. L’ancrage de la
partie hydrophobe s’effectue préférentiellement sur la surface métallique à protéger par le
biais du principal site actif de l’amine : l’azote N, également présent dans les amides, les
ammoniums quaternaires ou les imidazolines. L’extrémité non adsorbée (la partie
hydrophile) peut adsorber à son tour des molécules d’hydrocarbures provoquant un
accroissement de la barrière hydrophobe. Suzuki et al. [SUZ-96] attribuent à l’amine un
rôle d’agent chélatant (agent comportant plusieurs atomes donneurs arrangés) formant une
couche épaisse et non adhérente à la surface du matériau, capable de bloquer le processus
de réduction de l’oxygène dissous. Pour Tsuji et al. [TSU-00], dans les solutions acides, les
alkylamines comme les alkanethiols sont fortement chimisorbés à la surface métallique en
partageant leurs électrons entre l’azote et les atomes de fer. Il en résulte alors une très
bonne inhibition à la surface du métal en milieu acide. Or, il n’en est pas de même dans les
milieux neutres aérés. L’inhibition à la surface même du matériau est quasi inexistante, par
contre, l’alkylamine (classé comme base forte) s’adsorbera préférentiellement aux oxydes
et hydroxydes ferreux et ferriques (acides forts), résultant justement de la mauvaise
protection du métal. Tsuji et al. supposent que la couche ainsi adsorbée est bien plus
protectrice contre la corrosion du fer dans une solution aqueuse contenant des molécules
d’oxygène.

3.1.2. Les amines neutralisantes


Les amines neutralisantes ou d’alcalinisation du milieu sont destinées à réagir
chimiquement avec les espèces acides pour les neutraliser. Ces propriétés tendent à être
exploitées pour abaisser l’activité des protons de la solution corrosive : en milieu neutre, à
température ordinaire, le déplacement du pH amène le métal dans une zone où la corrosion

- 22 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

est ralentie. Contrairement aux amines filmantes, les amines neutralisantes ne protègent
pas contre la corrosion liée à la présence d’oxygène dissous dans l’électrolyte.

D’un point de vue appliqué, les éthanolamines sont souvent utilisées soit pour
neutraliser les composants acides dans les lubrifiants, soit pour fournir l’alcalinité requise
pour protéger contre l’oxydation des métaux (des métaux ferreux ne doivent pas s’oxyder
dans des conditions alcalines).

Les amines neutralisantes sont ainsi caractérisées par :


leur basicité,
leur capacité de neutralisation du milieu,
leur coefficient de partage,
leur stabilité thermique : ces produits de nature organique sont
généralement fragiles et peuvent être dégradés par une température
excessive ; cette stabilité thermique permet de déterminer la température
maximale d’utilisation des amines.

De par leur multifonctionnalité combinant des propriétés de bases faibles à des


propriétés d’adsorption, les amines sont considérées comme un groupement fonctionnel
très efficace face à la corrosion des métaux ferreux. Dans certains cas, leurs rendements
d’inhibition peuvent être améliorés lorsqu’elles sont combinées à d’autres types de
molécules, et dans de nombreux cas aux acides carboxyliques.

3.2. Le rôle des acides carboxyliques : un effet complexant

Les travaux de Suzuki [SUZ-96] ont précisé le rôle essentiel joué par l’acide
carboxylique constituant l’inhibiteur. L’acide carboxylique réagit avec les ions fer III pour
former une couche précipitante fine et dense d’un complexe partiellement soluble à la
surface métallique. Le groupement carboxylique intervient sur le processus anodique,
bloquant quasiment la dissolution métallique lors de la corrosion de l’acier.

Alexander et al. [ALE-01] ont également focalisé leur étude sur le rôle de l’acide
carboxylique et de ses dérivés dans l’inhibiteur. Ils ont observé une concentration plus

- 23 -
Chapitre 1 – Lutte contre la corrosion par l’utilisation d’inhibiteurs

importante de l’acide aux endroits les moins recouverts par le film inhibiteur sur la surface
métallique; l’acide se placerait préférentiellement dans les défauts du film.

4. Conclusion du chapitre 1
Les inhibiteurs de corrosion constituent un moyen de lutte récent contre la
corrosion des métaux et des alliages ; l’originalité de cette méthode provient du fait que le
traitement anticorrosion ne se fait pas sur le métal lui-même, mais par l’intermédiaire du
milieu corrosif [BER-02].

Les molécules inhibitrices peuvent agir suivant différents mécanismes, leur


conférant ainsi des performances d’inhibition fonction du milieu d’étude.

En particulier, pour la protection des métaux et alliages ferreux, les inhibiteurs à


base de groupements amines ou d’acides carboxyliques (voire les deux combinés),
présentent des pouvoirs protecteurs satisfaisants et sont actuellement largement utilisés,
notamment en raison de leur faible toxicité vis-à-vis de l’environnement.

- 24 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

Chapitre 2 :
DISPOSITIFS EXPERIMENTAUX, MILIEU ET
METHODES

1. Matériaux ................................................................................................... 24
2. Cellule, montages et électrolyte ................................................................ 25
2.1. Cellule électrochimique à trois électrodes................................................ 25
2.2. Montage pour les mesures microgravimétriques...................................... 27
2.3. Préparation de l’échantillon...................................................................... 30
2.4. Electrolyte................................................................................................. 30
3. Techniques électrochimiques........................................................................ 31
3.1. Techniques stationnaires........................................................................... 31
3.2. Techniques transitoires ............................................................................. 32
4. Méthodes d’analyses...................................................................................... 40
4.1. Le Microscope Electronique à Balayage (MEB ou Scanning Electronic
Microscopy – SEM)......................................................................................... 40
4.2. La Microscopie à Force Atomique (Atomic Force Microscopy – AFM). 41
4.3. La Spectroscopie de Photoélectrons X (X-ray Photoelectron Spectroscopy
– XPS).............................................................................................................. 41

- 23 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

Ce chapitre a pour but de présenter les méthodes expérimentales, électrochimiques


et d’analyse, utilisées dans cette étude. Une description des matériaux, de l’électrolyte, et
des montages effectués permet, dans un premier temps, de fixer une démarche
expérimentale assurant une bonne reproductibilité des résultats. Les techniques
électrochimiques sont à leur tour présentées, de manière à souligner leur intérêt et leur
pertinence dans l’étude des inhibiteurs. Les méthodes d’analyse chimique et de
topographie de surface utilisées permettent d’apporter des informations souvent
complémentaires aux résultats issus des techniques électrochimiques.

1. Matériaux

Les métaux ferreux sont des matériaux largement utilisés dans l'industrie ; leurs
applications s’étendent du bâtiment aux boîtes de conserves alimentaires, en passant par les
composés électroniques ou les coques de certains bateaux [UNC-05]. Les outils de coupe
et les pièces couramment usinées sont en grande majorité constitués de métaux ferreux.
Dans ce contexte, ces matériaux sont soumis à de nombreuses sollicitations extérieures
agressives les rendant, de fait, vulnérables face à la corrosion (échauffement en
température, hydrodynamique, …).

Le matériau testé dans cette étude est l’acier SAE 1038 (désigné anciennement par
la norme française AFNOR XC38). Les lettres XC signifient qu'il s'agit d'un acier non allié
de nature fine dont les fourchettes d'analyse sont relativement étroites. La composition de
l'acier XC38 est donnée dans le tableau 2.1 suivant :

Tableau 2.1 : Analyse typique de l’acier XC38


Eléments
C Mn Si S P Ni Cr Mo Cu Al
(autres que Fe)
Teneur (%) 0,36 0,66 0,27 0,02 0,015 0,02 0,21 0,02 0,22 0,06

Les teneurs en éléments normaux d'élaboration Mn, Si, S, P, Cu, Al ainsi que N et
O (quelques millièmes de %) sont relativement faibles. La faible proportion de ces
éléments permet de se baser sur le diagramme Fer-Carbone ; les frontières seront très peu
déplacées par leur présence. Toutefois, malgré leurs basses teneurs, les éléments
"résiduels" affectent considérablement le comportement mécanique de l'acier.

Une observation, après attaque métallographique de la surface de l’acier, a permis


de vérifier sa composition. En particulier, les différentes phases constitutives ont pu être
mises en évidence. L’attaque est effectuée en trempant quelques secondes l’acier,

- 24 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

préalablement poli, dans une solution de « nital » (mélange d’acide nitrique et d’alcool
dans un rapport de 3/100) [LEV-]. Une analyse au microscope électronique à balayage
(voir paragraphe 4.1.) révèle les deux phases en présence. Comme le présente la figure 2.1,
la ferrite ou phase α apparaît bien plus claire que la perlite, constituée de ferrite et
cémentite (α + Fe3C).

Ferrite
(phase claire)

Perlite
(phase sombre)

Figure 2.1 : Photographie par microscopie électronique à balayage de la surface de


l’acier XC38 après attaque au « nital », révélant les deux phases en présence

2. Cellule, montages et électrolyte

Les pièces usinées et les outils de coupe en conditions de service sont soumis à des
contraintes importantes (échauffement, hydrodynamique,…). Ainsi, afin de prendre en
compte les conditions réelles d’utilisation de l’inhibiteur, deux montages ont été utilisés,
adaptés et développés (essais microgravimétriques).

2.1. Cellule électrochimique à trois électrodes

La cellule utilisée pour les essais électrochimiques est cylindrique, en verre et a une
contenance de 200 mL. Elle est munie d’une double-enveloppe permettant la régulation, si
nécessaire, de la température, par l’intermédiaire d’un bain thermostaté.

La cellule est surmontée d’un couvercle en Téflon® qui permet d’adapter :


• une électrode de référence au calomel saturée (ECS),
• une contre-électrode constituée d’un barreau de graphite,
• un réfrigérant lors des essais longues durées, menés à des températures
supérieures à 40 °C, permettant de condenser l’électrolyte évaporé.
L’électrode de référence est placée dans une allonge thermostatée à
température ambiante : en effet, le potentiel de l’électrode de référence
augmente de 6 mV par variation croissante de 10 °C.

- 25 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

• une électrode de travail, constituée d’un barreau d’acier XC38 ou de fer est
enrobée dans une résine époxi, qui permet de délimiter une section plane
(surface étudiée) et qui évite toute infiltration d’électrolyte [ESS-04].
L’ensemble est disposé sur une électrode à disque tournant (Radiometer
Analytical) (figure 2.2).

contact

éventuelle
arrivée de gaz

électrode
(en fer ou acier)
mise en résine

Figure 2.2 : Schéma de l’électrode à disque tournant (EDT)

La rotation de l'électrode peut être imposée de 0 à 5000 tours par minute (tpm)
grâce à un boîtier de contrôle CTV 101 de chez Radiometer. La rotation induit une
aspiration du fluide vers le disque et le projette en direction du bord par des forces
tangentielles, créant ainsi un mouvement en spirale (figure 2.3). L’électrode à disque
tournant permet ainsi d’imposer et de maitriser l’écoulement au voisinage de la surface
réactionnelle.
Axe de rotation

Direction de la rotation

Vue de profil Vue de dessous


Figure 2.3 : Ecoulement caractéristique de l’électrolyte au voisinage d’une EDT

- 26 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

Un paragraphe consacré aux phénomènes de transport de masse dans la


configuration de l’EDT introduira le chapitre concernant l’étude de l’influence de
l’hydrodynamique sur les inhibiteurs de corrosion (voir chapitre 5).

Toutes les études électrochimiques ont été réalisées avec un potentiostat Gamry de
type FAS1 (logiciels DC 105 et EIS 300). Le schéma du dispositif expérimental décrit
précédemment est présenté et détaillé sur la figure 2.4.

Figure 2.4 : Photographie de la cellule électrochimique à double-enveloppe (b),


équipée d’un bain thermostaté (a), d’un réfrigérant (c) et d’une allonge thermostatée (d)

2.2. Montage pour les mesures microgravimétriques

Quel que soit le mécanisme d’action de l’inhibiteur sur la surface à protéger,


d’infimes pertes et/ou prises de masse s’effectuent simultanément au niveau de la surface
active de l’électrode de travail (perte de masse par oxydation du métal mais gain de masse
par accumulation de produits de corrosion ou adsorption de molécules inhibitrices) [GAN-
00]. Ces changements gravimétriques peuvent être décelés par un outil récent : la
microbalance à cristal de quartz (Electrochemical Quartz Crystal Microbalance – EQCM).

2.2.1. Principe de l’EQCM


La technique même de l’EQCM consiste à mesurer les changements mécaniques
d’un cristal à la fréquence de résonance [RUB-95]. Pour un cristal de quartz oscillant,
l’équation de Sauerbrey (équation 2.1) décrit la réponse en fréquence :

- 27 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

−2 f 0 2 ∆m
∆f = 1
(2.1)
A( ρQ µQ ) 2

Avec :
• f 0 : fréquence de résonance du quartz (Hz),
• ∆m : variation de masse (g),
• A : surface active résonante (cm²),
• µQ : coefficient de vibration du quartz (µQ = 2,947*1011 dyne.cm-2),
• ρQ : densité du quartz (ρQ = 2,648 g.cm-3).

Cette équation repose sur certaines hypothèses dont notamment le fait que la masse
ajoutée est uniformément répartie. Au laboratoire, la microbalance Maxtek (RQCM) opère
avec un quartz calé à une fréquence de résonance de 5 MHz ; ainsi une variation de 0,1 Hz
correspond à une variation de masse de 2,42 ng pour une surface active de 1,37 cm² ;
autrement dit la sensibilité de ce cristal de quartz de coupe AT (ANNEXE 1) est de l’ordre
de 17,66 ng.cm-2.Hz-1. Dans la configuration électrochimique, l’électrode 1 du dessus
(figure 2.5) est en contact direct avec l’électrolyte et constitue l’électrode de travail.

Vue de dessus Vue de dessous

Contact
Surface active Electrode 1
Electrode 1
Electrode 2

Figure 2.5 : Description du cristal de quartz

La coupe transversale du cristal présentée sur la figure 2.6 permet de bien cerner le
phénomène réversible de la piézo-électricité : la tension appliquée entre les deux électrodes
produit une déformation du cristal, celui-ci entre alors en résonance.

électrode 1
QUARTZ ∆V
électrode 2

Pin 1 Pin 2
Contacts électriques

Figure 2.6 : Coupe transversale du cristal de quartz

- 28 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

La différence de potentiel est imposée via les 2 pins : la pin 1 établit le contact
électrique au niveau de la surface active qui joue ainsi le rôle de l’électrode de travail
tandis que la pin 2 fait contact au verso du cristal. Les deux électrodes sont constituées
d’un film mince composé de plusieurs matériaux : un formant la couche d’adhésion et
l’autre la couche extérieure. La couche d’adhésion est une fine couche métallique
intercalée entre le quartz et le revêtement. Afin d’étudier le comportement du fer lors de
son immersion dans la solution corrosive, l’électrode de travail (électrode 1) est revêtue de
trois couches au total : une couche d’adhésion en chrome, puis une couche d’or sur
laquelle est déposée par PVD (Physical Vapor Deposition) une couche de fer de l’ordre de
quelques nanomètres d’épaisseur [KUR-03]. La figure 2.7 présente la structure colonnaire
à croissance épitaxique observée par AFM (voir paragraphe 4.2.) ; l’image a été obtenue en
effectuant l’analyse de la surface du cristal.

Z: 50 nm
Y:
2.0
µm

400nm
m
.0 µ
X: 2
Figure 2.7 : Image AFM de la surface du quartz recouvert de fer

2.2.2. Montage du couplage électrochimie/microgravimétrie


Lors des études couplant les techniques électrochimiques et microgravimétriques,
le signal du potentiel est récupéré par la microbalance, afin de pouvoir suivre
simultanément les évolutions du courant et de la masse en fonction du potentiel appliqué
(notamment lors des études voltamétriques). Une cellule électrochimique a été réalisée afin
de conserver la géométrie horizontale de l’électrode de travail, constituée par le cristal de
quartz de la microbalance (figure 2.8).

- 29 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

PC
i = f (E)
POTENTIOSTAT Parstat 2263
Electrode de travail
Electrode de référence
Contre-électrode
DAC outpout

PC RQCM MAXTEK-
m = f (E) INC

récupération de E

Figure 2.8 : Montage pour les études intégrant la microgravimétrie

2.3. Préparation de l’échantillon

Afin d’obtenir des résultats fiables et reproductibles, l’électrode de travail subit,


avant chaque essai, un prétraitement, qui consiste en un polissage de la surface de
l’électrode au papier abrasif de granulométrie de plus en plus fine (SiC #800, #1200 et
#2400), suivi d’un rinçage à l’eau distillée puis d’un séchage sous un flux d’air. Tout
rinçage à l’alcool est proscrit car des molécules organiques issues de l’alcool pourraient
interagir avec les molécules contenues dans l’inhibiteur.

Aucune activation électrochimique particulière de la surface des électrodes n’a été


réalisée : une très bonne reproductibilité des expériences avec le traitement mécanique a,
en effet, été observée.

L’échantillon est alors fixé sur l’EDT puis immergé rapidement dans l’électrolyte.

2.4. Electrolyte

L’électrolyte est une solution composée de 100 ppm de chacun des sels suivants :
NaCl, Na2CO3 et Na2SO4 [AST-93]. La proportion de ces sels correspond à une solution
« synthétique » corrosive augmentant la sévérité des tests effectués dans l’eau permutée.
Chaque ion de l’électrolyte joue un rôle spécifique dans l’étude [RIG-73] (ANNEXE 2).

- 30 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

La concentration de cet électrolyte est proche de celles rencontrées dans les eaux des
circuits de refroidissement [OCH-04c].

L’inhibiteur étudié (fourni par la Société Ascotec [ASC-02]) est constitué entre
autres d’une amine tertiaire et d’un acide carboxylique, deux groupes fonctionnels
présentant comme centres actifs N et C et/ou O respectivement. L’effet indépendant et
synergique de ces deux molécules est détaillé dans le chapitre 1. Dans le cadre de notre
étude, l’inhibiteur est ajouté dans une gamme de concentrations comprises entre 0.1 et 5 %
en masse.

3. Techniques électrochimiques

Les techniques électrochimiques ont permis d’appréhender l’étude selon deux


points de vue. D’un point de vue phénoménologique d’abord, la caractérisation de
l’adsorption est possible soit par suivi dans le temps du potentiel en circuit ouvert,
caractéristique de la modification de l’interface entre un métal et son environnement, soit
par voltamétrie cyclique à vitesse de balayage élevée. L’aspect plus quantitatif (courbes de
polarisation à vitesse de balayage modérée, spectroscopie d’impédance,…) permet, quant à
lui, d’accéder à des vitesses de réaction et à des valeurs de paramètres physiques décrivant
l’état du système (capacité de double-couche, résistance de transfert, capacité du film,…).
Les méthodes électrochimiques peuvent être classées selon deux groupes distincts :
les méthodes stationnaires et les méthodes non-stationnaires dites transitoires.

3.1. Techniques stationnaires

Les techniques stationnaires permettent d’étudier un système se trouvant dans un


état quasiment d’équilibre thermodynamique ; elles prennent en compte tous les couples
rédox dans la solution [ROS-86].

3.1.1. Suivi du potentiel en circuit ouvert


Egalement désigné par potentiel d’abandon ou potentiel libre, il s’agit de la
grandeur électrochimique la plus immédiatement mesurable. Cette technique simple
apporte des informations préliminaires sur la nature des processus en cours, à l’interface
métal / électrolyte : corrosion, passivation,…

3.1.2. Courbes de polarisation


Les courbes courant-tension stationnaires ont permis d’estimer la vitesse de
corrosion et d’appréhender la formation du film inhibiteur. En effet, la présence du film

- 31 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

formé peut se caractériser sur ces courbes par l’invariance du courant sur un large domaine
de surtension appliquée.

Ces techniques stationnaires restent toutefois insuffisantes pour caractériser des


mécanismes complexes, mettant en jeu plusieurs étapes réactionnelles et ayant des
cinétiques caractéristiques différentes (ce qui est le cas lors des processus d’inhibition).
L’utilisation des techniques transitoires devient alors indispensable.

3.2. Techniques transitoires

Les différentes méthodes transitoires se différencient les unes des autres par la
forme du signal respectif appliqué : une impulsion, un balayage ou une modulation.

3.2.1. Méthode impulsionnelle : la chronoampérométrie


La chronoampérométrie consiste à suivre l’évolution du courant en fonction du
temps lorsque le système est soumis à une surtension. Cette technique est intéressante dans
le cadre des études sur les inhibiteurs de corrosion, car elle permet d’avoir accès à
l’évolution des cinétiques de formation du film selon différentes conditions expérimentales
(température, concentration en inhibiteur, vitesse de rotation de l’électrode,…). De plus, la
mesure du courant résiduel (courant mesuré à la fin du temps d’acquisition) donne une
bonne estimation de la compacité et de l’efficacité de la couche barrière formée à
l’interface [ROS-98, BRE-94].

3.2.2. La méthode à balayage en potentiels : la voltamétrie


Les mesures de voltamétrie cyclique reviennent à effectuer des balayages linéaires
en potentiels autour d’une position donnée et d’observer les éventuelles apparition et/ou
disparition des phénomènes électrochimiques (oxydation et/ou réduction). Certains
paramètres, tels la vitesse de balayage, permettent de rendre compte de la réversibilité de
certaines réactions. Dans l’étude des inhibiteurs, cette technique a été mise en oeuvre
notamment pour caractériser l’adsorption des molécules inhibitrices au matériau et ce dès
les premières minutes d’immersion.

3.2.3. La méthode par modulation : la spectroscopie d’impédance


électrochimique (SIE)

3.2.3.1. Généralités
La mesure de l’impédance électrochimique consiste à étudier la réponse du système
électrochimique, suite à une perturbation qui est, le plus souvent, un signal alternatif de
faible amplitude.
La force de cette technique par rapport aux précédentes, est de différencier les
phénomènes réactionnels par leur temps de relaxation. Seuls les processus rapides sont
caractérisés à hautes fréquences ; lorsque la fréquence appliquée diminue, apparaîtra la
- 32 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

contribution des étapes plus lentes, comme les phénomènes de transport ou de diffusion en
solution [LAN-93].

En pratique, la mesure d’impédance consiste à surimposer, à un point de


fonctionnement stationnaire, une perturbation sinusoïdale ∆E de faible amplitude notée
I∆EI et de pulsation ω = 2Пf (en rad.s-1) ; le potentiel imposé à l’électrode est égal à E(t) =
E + ∆E avec ∆E = I∆EI exp (jωt). Il en résulte alors un courant sinusoïdal ∆I de même
pulsation ω, superposé au courant stationnaire I, tel que I(t) = I + ∆I avec ∆I = I∆II exp
(j(ωt -Ф)), Φ correspondant au déphasage du courant alternatif par rapport au potentiel.

L’objectif de l’analyse d’un spectre d’impédance est d’associer à chacune des


étapes observables sur les diagrammes de Nyquist et/ou de Bode des grandeurs physiques
représentatives. Ceci peut être abordé par la modélisation du spectre en proposant un
circuit électrique équivalent (CEE), composé d’un certain nombre d’éléments simples ; les
éléments les plus couramment utilisés sont :
• la résistance d’impédance R, uniquement modélisée par sa partie réelle
(indépendante de la pulsation) ;
−j
• la capacité d’impédance Z C = ;

• l’inductance d’impédance Z I = jLω .

L’interprétation des diagrammes par l’intermédiaire de CEE doit respecter deux


conditions primordiales :
• tous les éléments du circuit doivent avoir une signification physique
précise, associée aux propriétés physiques du système ;
• le spectre simulé à partir du CEE doit être le plus fidèle possible au spectre
expérimental et l’erreur ne doit pas présenter de caractère systématique en
fonction de la fréquence.

3.2.3.2 La spectroscopie d’impédance électrochimique appliquée aux études sur


les inhibiteurs de corrosion.
Dans le cadre des études sur les inhibiteurs de corrosion, la spectroscopie
d’impédance permet, en particulier, de déterminer le mode d’action du produit [TAK-04].
Il peut s’agir d’une simple adsorption sur le substrat, ou de la formation d’un film
tridimensionnel à l’interface.

3.2.3.2.1. Adsorption simple


Dans le cas d’une adsorption de l’inhibiteur, le spectre d’impédance est représenté,
dans le plan de Nyquist, par une boucle capacitive plus ou moins aplanie, pouvant
présenter un déphasage par rapport à l’axe des réels (figure 2.9).

- 33 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

(a) (b)
Figure 2.9 : Déphasage α observé au niveau du repère du spectre : (a) Cas idéal, en
théorie pour une surface uniformément accessible, (b) Spectre obtenu dans la plupart des
cas pratiques

Dans la majorité des travaux, ce déphasage α est expliqué par les inhomogénéités
de la surface de l’électrode : celles-ci proviennent soit de la formation de produits de
corrosion ou encore de l’oxydation du métal et induisent ainsi une modification de la
surface active de l’électrode comme cela est décrit sur la figure 2.10. Pour exemple, ce
comportement lié au déphasage n’est pas obtenu sur électrode de mercure : en effet, tout
comme un liquide, celle-ci est parfaitement lisse à l’échelle atomique [EIS−04]!

Figure 2.10 : Inhomogénéités à la surface de l’acier, observées après immersion de


l’électrode dans l’électrolyte

D’autres auteurs attribuent encore ce déphasage à des variations d’épaisseur ou de


compositions d’un film ou revêtement à la surface de l’électrode [SCH-01].
C’est par un élément à phase constante (CPE) que l’on rend compte des
inhomogénéités de surface par l’intermédiaire du coefficient α. Un tel élément est décrit
1 −α
par Z CPE = ( jω ) . Dans un cas idéal d’uniformité d’accès à la surface active (électrode
C
de mercure), le coefficient α vaut 1 et la modélisation physique se traduit par un
condensateur plan.

- 34 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

Le CEE représentatif du mécanisme d’adsorption est représenté sur la figure 2.11.

Qdc, α1

RE Re WE

Rtc
Figure 2.11 : Circuit électrique équivalent proposé pour l’interface métal/électrolyte lors
de l’adsorption d’un film inhibiteur

Ce circuit est constitué d’un élément à phase constante (Qdc), utilisé pour rendre
compte des inhomogénéités précédemment décrites, de la résistance d’électrolyte (Re), et
de la résistance de transfert de charge (Rtc). La valeur de la capacité de double-couche est
obtenue par l’équation (2.2) :

Cdc = Qdc (ωmax)α-1 (2.2)

Avec ω = 2πf (f représentant la fréquence à laquelle la valeur imaginaire atteint un


maximum sur le diagramme de Nyquist).
L’adsorption progressive des molécules inhibitrices sur le substrat se caractérise,
sur le diagramme d’impédance, par une augmentation de la boucle capacitive, à savoir une
augmentation de Rtc conjointement à une diminution de Cdc.

3.2.3.2.2. Formation d’un film tridimensionnel


Dans le cas de la formation d’un film tridimensionnel, le diagramme d’impédance
est plus complexe. Pour un film suffisamment épais (quelques µm), le spectre d’impédance
dans le plan de Nyquist est formé de deux boucles capacitives plus ou moins découplées en
fréquences (figure 2.12).

- 35 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

-Zim

Diffusion/convection
Double-couche

Film

Zréel

Figure 2.12 : Diagramme d’impédance correspondant à l’interface métal/électrolyte après


adsorption et formation d’un film à la surface

La boucle à hautes fréquences peut être attribuée à la contribution du film


inhibiteur, quant à celle à basses fréquences, au transfert de charge à l’interface.
L’amélioration des propriétés du film se caractérise, sur le diagramme d’impédance, par
une augmentation de la taille des deux boucles. Un tel spectre peut être modélisé par le
circuit équivalent de la figure 2.13.
Qf , α2

Qdc , α1
RE Re WE

Rf
W Rtc
Figure 2.13 : Circuit électrique équivalent proposé pour l’interface métal/électrolyte après
adsorption et formation d’un film à l’interface

Rf représente la résistance du film inhibiteur. L’évolution de ce paramètre est liée


principalement à l’augmentation du pouvoir protecteur du film ou à la pénétration de
l’électrolyte à travers le film [DIG-96]. Cf représente la capacité du film et s’exprime par
la relation (2.3) :
A
C f = εε 0 (2.3)
d
Avec :
• ε : constante diélectrique relative du film,
• ε0 : permittivité du vide (8.85.10-14 F.cm-1),
• A0 : surface active,
• d : épaisseur du film.

- 36 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

L’évolution de Cf peut être attribuée principalement à deux phénomènes :


- une évolution de l’épaisseur du film
- une évolution de la constante diélectrique du film

Dans certaines études où le film est poreux (figure 2.14), une contribution
supplémentaire apparaît sur les diagrammes d’impédance aux basses fréquences (figure
2.12). Il s’agit de l’impédance de Warburg, notée ZW, caractéristique des phénomènes de
diffusion et qui s’exprime par l’équation (2.4):

∆E RT
ZW = = 1
(2.4)
∆I
CB n F A( jω D)
2 2 2

Avec :
• R : constante des gaz (J.mol-1.K-1),
• T : température (K),
• CB : concentration de l’espèce électrolysée au sein de la solution (mol.cm-3),
• n : nombre d’électrons échangés dans la réaction,
• F : constante de Faraday (F = 96500 C),
• A0 : surface active (cm²),
• D : coefficient de diffusion de l’espèce (cm2.s-1),

Elle est caractérisée, sur le diagramme de Nyquist, par une droite formant un angle
de 45 ° par rapport à l’axe des réels (figure 2.12). Afin de rendre compte de ce dernier
paramètre, une impédance de Warburg est introduite en série avec la résistance de transfert
de charge dans le CEE précédent.

XC 38

film inhibiteur pore


ions fers

Figure 2.14 : Schéma de l’interface électrode/électrolyte, avec la présence d’un film


inhibiteur poreux

La technique de l’impédance électrochimique permet une analyse plus complète du


mécanisme d’action de l’inhibiteur, comparativement aux méthodes stationnaires,
puisqu’elle permet de séparer les différents mécanismes intervenant lors du processus
- 37 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

d’inhibition. En effet, les propriétés du film ainsi que le mécanisme de transfert de charge
peuvent être identifiés et quantifiés, en particulier en fonction des différents paramètres
imposés au système.

3.2.4. Bilan
En guise de conclusion concernant les méthodes transitoires, le tableau 2.2 présente
les trois principales techniques, à savoir la chronoampérométrie, la voltamétrie et la
spectroscopie d’impédance, agrémentées de leurs formes respectives de signaux imposés et
de leurs réponses. Cette présentation permet de distinguer les différentes méthodes
(impulsions, balayages et modulation) sur lesquelles s’appuient ces techniques.

Tableau 2.2 : Tableau récapitulatif des différentes techniques transitoires

- 38 -
Chapitre 2 –Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

REPONSE
NOM DE LA FORME DU SIGNAL IMPOSE Quantité METHODE
TECHNIQUE graphique
E = f (temps) déterminée
Efin i

ChronoAmpérométrie I = f (t) IMPULSIONS


Saut Ein
t
i

v dE
linéaire E
I = f (E, )
dt
Rampe
Rampe triangulaire
Voltamétrie BALAYAGES
i
v dE
cyclique I = f (E, )
dt
- grande amplitude en E (plusieurs volts) E
- basses fréquences (< 100 Hz)
Excitation sinusoïdale
NIQUIST
NYQUIST

-Z im f décroissantes

ω = 2πf
Z re
Impédance Z = f (ω) MODULATION
BO DE
f c ro is s a n t e s
- faible amplitude en E (quelques mvolts) Φ lZ l
- très hautes fréquences (jusqu’à 100 kHz)

Log f

- 39 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

4. Méthodes d’analyses

L’étude de la structure cristalline et de la topographie des surfaces fait appel à


différentes méthodes, certaines fournissant une information au niveau microscopique
(microscopie électronique à balayage), d’autres renseignant à l’échelle atomique
(microscopie à force atomique). Les phénomènes d’adsorption, d’oxydation et de ségrégation
modifient la composition chimique des surfaces, qui diffère alors de celle de la masse. Les
nouvelles propriétés de surface qui en résultent peuvent changer radicalement le
comportement d’une pièce face aux agressions chimiques. Ainsi les méthodes de
caractérisations chimiques des surfaces (comme la spectroscopie de photoélectrons X) sont
souvent indispensables pour étudier les processus de corrosion [LAN-93].

4.1. Le Microscope Electronique à Balayage (MEB ou Scanning Electronic


Microscopy – SEM)

Le MEB est actuellement la technique la plus utilisée en matière de topographie à


l’échelle microscopique. Son avantage considérable par rapport à des microscopes optiques,
par exemple, réside dans le fait que l’image ne souffre pas d’une profondeur de champ
limitée.
Le principe de la microscopie électronique à balayage consiste à balayer la surface
d’un échantillon par un faisceau d’électrons finement localisé pour en collecter, par détecteurs
respectifs, les électrons secondaires et les électrons rétrodiffusés. Le matériau analysé doit
être conducteur afin d’éviter des phénomènes de charges dus aux électrons : la métallisation
peut s’effectuer par exemple au carbone ou encore à l’or.

L’association du microscope avec un microanalyseur permet la détection des rayons


X, caractéristiques de fond continu (1µm) pour établir la cartographie X de l’échantillon
analysé : il s’agit du mode EDS (X Energy Dispersive Spectroscopy). Ce mode établit une
carte de distribution des éléments présents sur une étendue choisie. Autant de cartes X sont
éditées qu’il y a d’éléments à analyser.

Les clichés ont été obtenus sur un microscope JEOL 840 A LGS couplé à un détecteur
Princeton Gamma Tech.

- 40 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

4.2. La Microscopie à Force Atomique (Atomic Force Microscopy – AFM)

L’AFM est l’une des méthodes d’observation et d’analyse aisée d’atomes et de


structures atomiques superficielles, dans une grande variété d’environnements (ultra vide, air,
huile, eau, etc…), pour une large gamme de températures et dans l’espace réel direct. Il s’agit
d’une analyse détaillée de la morphologie de surface de l’échantillon.
Le principe de cette technique consiste à balayer une surface à une distance de
quelques Angströms, à l’aide d’une pointe très fine et sensible aux propriétés de la surface
(magnétisme, forces électrostatiques, forces de Van der Waals, température, etc…)
En AFM, il existe 3 modes d’opération. L’AFM de contact est l’équivalent atomique
du profilomètre ou de l’aiguille d’un micro-sillon. La pointe est en contact direct avec
l’échantillon, et les forces répulsives en présence sont très fortes. L’AFM mode
résonnant force l’ensemble pointe-levier à vibrer à une fréquence proche de sa résonance
mécanique. Sous l’influence du gradient vertical des forces d’attraction de Van der Waals, la
constante élastique effective de l’oscillation est modifiée et la fréquence de résonance
déplacée. Ceci se traduit par une variation d’amplitude. Enfin, le « tapping mode » est un
développement récent de l’AFM qui résout les problèmes de risque d’endommagement par la
pointe de la surface de l’échantillon et des modifications éventuelles des propriétés de surface.
La rugosité peut être caractérisée par la hauteur moyenne des irrégularités sur une
surface plane et la longueur de corrélation entre les irrégularités. Un critère de rugosité
couramment utilisé est un critère statistique appelé rms représentant l’écart quadratique
moyen du profil.

Les études topographiques des surfaces des électrodes ont été effectuées sur un
microscope Digital Instrument 3100 en mode tapping.

4.3. La Spectroscopie de Photoélectrons X (X-ray Photoelectron Spectroscopy –


XPS)

Les électrons sont liés au noyau par une énergie de liaison EL.
Le principe de l’XPS repose sur la mesure de l’énergie cinétique EC du photoélectron
éjecté de son orbite après l’envoi de rayons X sur l’échantillon placé sous vide (10-7 torrs) ; le
tube à rayons X est équipé d’un monochromateur capable de sélectionner une longueur
d’onde de travail.
Le bilan énergétique suivant (équation 2.5) :

hν0 = EL + EC + eΦ (2.5)

- 41 -
Chapitre 2 – Dispositifs expérimentaux, milieu et méthodes

établit une relation entre les énergies EL, EC, hν0 (énergie en eV envoyée par la source
focalisée sur une longueur d’onde de travail) et eΦ correspondant à l’énergie d’extraction
propre à chaque spectromètre (de l’ordre de quelques eV).
Les signaux détectés se présentent sous forme d’un spectre d’intensités des
photoélectrons (nombres de coups par secondes) en fonction de l’énergie cinétique
correspondante. La mesure de EC permet d’atteindre les énergies de liaisons, rapportées au
niveau de Fermi des éléments et répertoriés dans les tables de Siegbahn. Dans certains cas, il
arrive que les rayons X éjectent un électron appartenant à une orbitale intérieure d’un atome.
Aussitôt, la lacune créée est comblée par un autre électron de cet atome provenant d’une
couche plus éloignée. Or, cet électron possède trop d’énergie pour sa nouvelle position et
l’atome de ce fait est dans un état d’excitation perpétuelle, l’incitant à libérer ce surplus
d’énergie, soit par l’émission d’un photon, soit par l’émission d’un électron d’une couche
externe, appelé alors électron Auger.
D’un point de vue appliqué, l’XPS permet d’effectuer des analyses élémentaires
qualitatives (détection au 1/100ème de monocouche) et semi-quantitative (proportion d’un
atome par rapport à l’autre en se basant sur les intensités des éléments). Des informations
concernant l’environnement chimique telles l’état des liaisons, le degré d’oxydation ou encore
la coordinence sont également accessibles par le biais de cette technique.

Les analyses ont été effectuées sur un ESCALAB 200R-VG Scientific Spectrometer,
utilisant une source raie Al KL2,3 (1486,6 eV).

- 42 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Chapitre 3 :

CARACTERISATION GENERALE DES


PROPRIETES DU FILM INHIBITEUR

1. Nature de l’inhibiteur__________________________________________ 51
1.1. Suivi des potentiels / temps pour différentes concentrations en inhibiteur
__________________________________________________________________ 51
1.2. Courbes de polarisation ______________________________________ 52
1.2.1. Domaine anodique ______________________________________ 52
1.2.2. Domaine cathodique _____________________________________ 53
1.3. Etude chronoampérométrique _________________________________ 55
2. Mécanismes de formation du film inhibiteur_______________________ 56
2.1. Spectres d’impédance _______________________________________ 56
2.1.1. Après 2 heures d’immersion_______________________________ 56
2.1.2. A des temps d’immersion importants ________________________ 58
2.2. Mise en évidence de la contribution des oxydes-hydroxydes de fer dans la
construction du film __________________________________________________ 60
2.3. Analyse XPS ______________________________________________ 61
3. Etude du mode de dégradation du film inhibiteur __________________ 65
3.1. Détermination d’une concentration limite pour la formation du film
inhibiteur___________________________________________________________ 65
3.2. Etude par spectroscopie d’impédance ___________________________ 67
3.3. Analyses XPS _____________________________________________ 72
4. Conclusion du chapitre 3 _______________________________________ 72

- 49 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

- 50 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Avant d’étudier l’effet, sur le film protecteur, des paramètres physiques liés aux
domaines d’application de notre inhibiteur, il convient, dans un premier temps, de le
caractériser de manière générale. Ainsi, ce chapitre a tout d’abord pour objectifs de
déterminer la nature de l’inhibiteur (anodique, cathodique) ainsi que son mode d’action
(film 2D ou 3D). Les mécanismes de formation et de croissance du film sont à leur tour
étudiés ainsi que les phénomènes responsables de son éventuelle dégradation.

1. Nature de l’inhibiteur

1.1. Suivi des potentiels / temps pour différentes concentrations en inhibiteur

La figure 3.1 présente l’évolution du potentiel en fonction du temps, pour


différentes concentrations d’inhibiteur (de 0 à 5 % en masse).

0.5 % 0.4 %
-0,30 0.3 %

-0,35 5%
E (V/ECS)

0.2 %
-0,40

-0,45

sans
-0,50 inhibiteur

0 20 40 60 80 100 120 140 160


Temps (min)

Figure 3.1 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la
solution A (cf. p.35) à différentes concentrations en inhibiteur, Ω = 1600 tpm

- 51 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

L’évolution du potentiel pour l’essai réalisé sans inhibiteur caractérise la corrosion


de l’échantillon avec formation de produits de corrosion. La stabilisation du potentiel libre
à une valeur de -500 mV.s-1 est atteinte après 30 minutes d’immersion. Lorsque les essais
sont conduits en présence d’inhibiteur, on observe un anoblissement du potentiel d’autant
plus marqué que la concentration en inhibiteur est importante. L’évolution du potentiel
libre, dans ce cas, traduit la formation d’une couche protectrice. L’essai mené à 0,2 %
d’inhibiteur présente une évolution intermédiaire, à savoir un anoblissement puis une chute
du potentiel libre après 40 minutes d’immersion, ce qui laisse présager une amorce de
corrosion. Le film formé dans ces conditions ne serait pas de nature à protéger l’acier
efficacement.

1.2. Courbes de polarisation

1.2.1. Domaine anodique


Les courbes de polarisation, tracées après 2 heures d’immersion, illustrent la même
tendance (figure 3.2).

1E-3

1E-4 sans 0.3 %

0.4 %
1E-5
0.2 %
0.5 %
I ( A.cm )
-2

1E-6 5%

1E-7

1E-8

1E-9

-0,6 -0,4 -0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0


E (V/ECS)

Figure 3.2 : Courbes de polarisation obtenues pour l’acier XC38 immergé dans la
solution A à différentes concentrations en inhibiteur, Ω = 1600 tpm

Les courbes dans le domaine anodique ont été tracées entre -200 et +1000
mV/Ecorr avec une vitesse de balayage de 0,5 mV.s-1. A titre comparatif, la courbe sans
inhibiteur est également présentée (---). En plus du déplacement du potentiel libre vers des
valeurs plus nobles, l’ajout d’inhibiteur en solution induit une diminution importante du

- 52 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

courant partiel anodique. Néanmoins, la diminution du courant n’est pas proportionnelle à


la teneur en inhibiteur introduite et une valeur limite du courant de corrosion est obtenue
dès 0,3 % en masse d’inhibiteur. Par contre, l’étendue de la zone passive pour laquelle une
densité de courant minimale est maintenue est d’autant plus grande que la concentration en
inhibiteur est élevée.

Les pouvoirs protecteurs de l’inhibiteur peuvent être calculés à partir de la relation


(1.1), rappelée ici :

icorr − icorr inh


Pouvoir protecteur (%) = . 100
icorr

où icorr et icorrinh correspondent respectivement aux densités de courant enregistrées


dans la solution A en l’absence et en présence de l’inhibiteur. Ces courants ont été
déterminés soit par intersection des tangentes aux courbes anodiques et cathodiques au
niveau du potentiel de corrosion (pour icorr), soit par prolongement du plateau anodique au
potentiel de corrosion pour icorrinh.

Le pouvoir protecteur atteint 78 % pour 0,2 % d’inhibiteur et plus de 95 % pour 0,3


% d’inhibiteur.

1.2.2. Domaine cathodique


Les courbes de polarisation dans le domaine cathodique, présentées sur la figure
3.3, ont été obtenues en appliquant +20 à -800 mV/Ecorr (vbal = 0,5 mV.s-1). L’inhibiteur
n’agit pas sur la réduction de l’oxygène dissous, puisque le même courant partiel
cathodique est obtenu pour les essais conduits avec et sans inhibiteur.

- 53 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

1E-4

1E-5

I (A.cm )
-2
1E-6

1E-7 sans inhibiteur


0.5 % d'inhibiteur

1E-8

-1,4 -1,2 -1,0 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2


E (V/ECS)

Figure 3.3 : Courbes de polarisation (domaine cathodique) obtenues pour l’acier


XC38 immergé dans la solution A avec et sans inhibiteur, Ω = 1600 tpm

Ainsi, l’inhibiteur étudié peut être considéré comme un inhibiteur anodique. En


effet, les précédents essais ont révélé que :
● l’inhibiteur, ajouté à la solution A, décale le potentiel de corrosion vers des

valeurs plus nobles,


● sa présence en solution ne perturbe pas la réaction cathodique, et diminue de

façon importante la densité de courant anodique,


● le plateau anodique est plus étendu lorsque la concentration en inhibiteur

augmente.

Une bonne efficacité de l’inhibiteur est obtenue que celui-ci soit ajouté à 0,3 ou 0,5
% en masse, néanmoins, le plateau anodique est d’autant plus important que la
concentration en inhibiteur est élevée. Afin de discerner une évolution des propriétés du
film inhibiteur formé à 0,3 % et 0,5 % massique, une étude chronoampérométrique a été
menée.

- 54 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

1.3. Etude chronoampérométrique

Les courbes chronoampérométriques ont été tracées pour chacune des deux
concentrations en imposant -0,1 V/ECS (soit environ + 200 mV/Ecorr), de façon à mener
l’essai dans la zone du plateau anodique (figure 3.4).

concentration en inhibiteur :

0,5 %
0,1
0,3 %
I (mA.cm )
-2

0,01

-2
1E-3 1 µA.cm

0 5 10 15 20 25 30 35
temps (min)

Figure 3.4 : Chronoampérométries (E = -0,1 V/ECS) pour XC38 dans la solution A à 0,3
et 0,5 % en inhibiteur, Ω = 0

A cette valeur de potentiel, la densité de courant enregistrée pour 0,5 % d’inhibiteur


diminue plus rapidement et atteint une valeur plus faible que pour une solution à 0,3 % en
inhibiteur. Comme il a été mentionné dans le chapitre 2 (voir paragraphe 3.2.1. p. 36), la
mesure du courant résiduel permet, entre autre, d’estimer la « compacité » du film
protecteur [ROS-98, BRE-94]. Ainsi, le film formé à 0,5 % d’inhibiteur aurait une
compacité voire une morphologie plus à même de bloquer la réaction de dissolution
métallique.

- 55 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

2. Mécanismes de formation du film inhibiteur

2.1. Spectres d’impédance

2.1.1. Après 2 heures d’immersion

Les spectres d’impédance obtenus au potentiel de corrosion sont enregistrés après 2


heures d’immersion pour différentes concentrations en inhibiteur. Les diagrammes de
Nyquist et de Bode sont présentés sur les figures 3.5 et 3.6. Dans l’encadré de la figure 3.5,
un agrandissement des spectres est proposé, afin de discerner, en particulier, les
diagrammes obtenus sans inhibiteur et à une concentration de 0,2 %. Les tailles des
boucles capacitives, déphasées par rapport à l’axe des réels, augmentent avec une
concentration croissante en inhibiteur. Ce type de diagrammes est généralement interprété
comme un mécanisme de transfert de charge sur une surface inhomogène [DUP-81]. Les
valeurs des résistances de polarisation, déterminées à partir des limites à basses fréquences
sur les diagrammes de Nyquist, confirment un pouvoir protecteur satisfaisant à partir de
0,3 % en inhibiteur.
concentration en inhibiteur :
75 6
sans hautes
0.2 % 4
fréquences
60 0.3 % 0.1 Hz

0.4 % 10 mHz
2
0.5 %
5 % 1 Hz 10 mHz
45
- Z'' (kΩ.cm )

0
2

0 2 4 6 8

30

15
0.1 Hz
1 Hz 10 mHz
0
0 15 30 45 60 75 90
2
Z' (kΩ.cm )

Figure 3.5 : Diagrammes d’impédance de Nyquist obtenus pour l’acier XC38 après 2
heures d’immersion dans la solution A et différentes concentrations en inhibiteur,

Ω = 1600 tpm

- 56 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

(a) (b)

10
0 concentration en inhibiteur :
5 sans
-10 10
0,2 %
-20 0,3 %
0,4 %

Z (Ω.cm²)
-30 0,5 %
Phase (°)

4
10 5%
-40 concentration
en inhibiteur :
-50 sans
0,2 % 3
-60 0,3 % 10
0,4 %
-70
0,5 %
-80 5%
2
10
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 3.6 : Diagrammes d’impédance en représentation de Bode, obtenus pour l’acier


XC38 après 2 heures d’immersion dans la solution A à différentes concentrations en
inhibiteur, Ω = 1600 tpm

(a) représentation de la phase en fonction de la fréquence

(b) représentation du module en fonction de la fréquence

Sur le diagramme de Bode, une seule constante de temps est détectée pour les
concentrations en inhibiteur comprises entre 0,3 et 0,5 % (figure 3.6.a). Avec un ajout
d’inhibiteur de 5 % en masse, il apparaît une deuxième constante de temps : ce
comportement révèle la présence de deux contributions différentes. La première, localisée
dans les hautes fréquences, peut être associée au film et la seconde au transfert de charge à
l’interface. Les deux contributions commencent déjà à être discernables pour une
concentration de 0,5 % en inhibiteur, si l’on se base sur l’épaulement que l’on distingue
entre 0,1 et 10 Hz. Les valeurs des modules dans le domaine des hautes fréquences nous
renseignent sur une valeur de conductivité plus grande à 5 % qu’aux concentrations
inférieures.

Ces observations montrent que l’inhibiteur forme, à la surface de l’acier, une


couche tridimensionnelle dont les propriétés évoluent avec la concentration introduite. En
particulier, l’évolution du diagramme de Bode pour une teneur de 5 % en inhibiteur peut
être connectée à une augmentation de l’épaisseur du film [OCH-02, OCH-04c]. Pour les

- 57 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

solutions contenant moins de 0,5 % d’inhibiteur, la contribution du film ne peut pas être
mesurée après 2 heures d’immersion.

2.1.2. A des temps d’immersion importants


Pour des temps d’immersion plus longs, des modifications du film inhibiteur ont pu
être caractérisées par spectroscopie d’impédance. En effet, la figure 3.7 présente les
diagrammes d’impédance obtenus lors des tests conduits sur 60 heures. La taille des
boucles capacitives augmente avec le temps, caractérisant le blocage de la réaction de
transfert de charge par la présence d’un film inhibiteur : ce film est de plus en plus résistant
à la dissolution active de l’acier. L’élargissement de la phase après 6 heures d’immersion
peut être associée à l’apparition d’une deuxième constante de temps attribuable au film.
Cette évolution des diagrammes d’impédance dans le temps confirme que l’inhibiteur
n’agit pas seulement par une simple adsorption (comme pouvait le montrer les spectres
d’impédance obtenus après 2 heures d’immersion et pour des teneurs en inhibiteur
comprises entre 0,3 et 0,5 % massique), mais forme un film tridimensionnel à la surface du
matériau. A présent, les valeurs des modules dans le domaine des hautes fréquences nous
renseignent sur une valeur de conductivité d’autant plus grande avec le temps croissant
d’immersion.

- 58 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

10 mHz
200 (a)
temps d'immersion (h) :
2
150 6

-Z'' (kΩ.cm²)
24
48
60
100

10 mHz
50

0.1 Hz
0
0 50 100 150 200 250 300
Z' (kΩ.cm²)

6
0 10
(b)
temps d'immersion (h) :
5
-20 10 2
6
Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

24
-40 4 48
10 60
temps d'immersion (h)
-60 2
3
6 10
24
-80 48
60 2
10
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 3.7 : Diagrammes d’impédance obtenus pour l’acier XC38 immergé dans la
solution A + 0,5 % en inhibiteur, pour différents temps d’immersion, Ω = 1600 tpm

(a) représentation de Nyquist

(b) représentation de Bode

- 59 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

2.2. Mise en évidence de la contribution des oxydes-hydroxydes de fer dans


la construction du film

Une étude en milieu désaéré a permis de recueillir des informations


supplémentaires sur la nature du film formé à l’interface. Ces informations ont pu être
recueillies grâce à l’évolution des potentiels libres en milieu désaéré en présence ou non
d’inhibiteur (figure 3.8).

-0,30 0,5 %
-0,35

solution aérée
-0,40
-0,45
E (V/ECS)

-0,50
-0,55
-0,60 sans
-0,65

désaérée
-0,70

solution
-0,75 sans
0,5 %
-0,80
0 20 40 60 80 100 120 140
Temps (min)

Figure 3.8 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la solution
A seule et avec 0,5 % en inhibiteur, en milieu aéré et désaéré, Ω = 1600 tpm

Comme cela a été vu précédemment (voir figure 3.1.), en milieu aéré, le potentiel
en circuit ouvert diffère totalement lorsque l’inhibiteur est en solution (que ce soit au
niveau de son évolution dans le temps ou de la différence de potentiels de l’ordre de 300
mV obtenue après 2 heures). L’évolution du potentiel pour l’essai mené avec 0,5 %
d’inhibiteur reflète la formation du film et plus précisément l’adsorption des molécules
inhibitrices à la surface métallique, lui conférant cette allure caractéristique vers des
valeurs de potentiels plus nobles [FEL-02]. Au contraire, en milieu désaéré, les allures des
potentiels dans la solution A en présence ou non d’inhibiteur suivent la même tendance
dans le temps. De plus, après 2 heures d’immersion, les mêmes valeurs de potentiels sont
enregistrées (environ – 750 mV/ECS), témoignant du même état de surface de l’électrode
dans les deux cas, et en particulier, d’aucune formation de film.

- 60 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Ainsi, l’oxygène en solution est un facteur essentiel pour la formation du film


inhibiteur. Ce dernier nécessiterait, pour sa formation, des oxydes-hydroxydes de fer issus
de la dissolution de l’électrode métallique.
Afin de valider ce résultat, des analyses XPS ont été réalisées sur deux électrodes
respectivement corrodée dans la solution A (électrode 1) et protégée dans la solution A +
0,5 % en inhibiteur (électrode 2).

2.3. Analyse XPS

Les analyses ont été effectuées après 24 heures d’immersion dans l’électrolyte,
temps volontairement long pour s’assurer de la formation du film dans le cas de l’électrode
2. La figure 3.9 décrit les signaux du fer, révélant une modification de la surface de
l’électrode, selon que l’acier est dans la solution A seule ou dans celle contenant
l’inhibiteur. Pour l’électrode 2, deux analyses avec des angles différents ont été réalisées :
la première (pour un angle θ = 90°), vise à caractériser la profondeur de la couche
protectrice, et la deuxième (pour un angle θ = 30°), détermine la composition chimique de
la surface du film.

4500
4000 Fe 2p
(1)
3500
Coups (s)

3000
(2a)
2500 (2b)
2000

1500 1 sample 1 1
électrode C
2a électrode
électrode
sample P2 (90°
(θ = 90°)
2 (90°)
1000 2b électrode
sample P (30= 30°)
2 (30°)
2 (θ

740 730 720 710 700 690


Energie de liaisons (eV)

Figure 3.9 : Spectres XPS de Fe2p pour l’acier XC38 immergé dans la solution A
(électrode 1), dans la solution A + 0.5 % en inhibiteur (électrode 2)

Le spectre obtenu pour l’électrode 1 décrit un pic très discernable vers 710 eV ; ce
pic correspond à la forme oxydée du fer, caractérisant les produits de corrosion formés à la

- 61 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

surface. Pour l’électrode inhibée ou électrode 2, en plus du pic à 707 eV caractéristique du


fer métallique pour l’analyse menée en profondeur, on observe les pics liés aux formes
oxydées du fer dans toute l’épaisseur du film. Cependant une proportion plus importante de
ces espèces a pu être détectée en profondeur (tableau 3.1).

Tableau 3.1 : Energies de liaison pour chaque élément du spectre (en eV). Entre
parenthèses, les valeurs données en pourcentage correspondent au rapport de l’aire des
pics

O1s O1s O1s


Fe2p3/2 N1s
(O2-) (OH-) (H2O)

529,5 531,0
Echantillon 1 710,5 - -
(59%) (41%)

Echantillon 2 707 + 529,3 531,5 533,0


399,6
(θ = 90°) 709,7 (47%) (38%) (15%)

Echantillon 2 707 + 529,3 531,6 532,9


399,5
(θ = 30°) 710 (30%) (50%) (20%)

En s’appuyant sur la déconvolution du spectre de l’oxygène (O1s), présentée sur la


figure 3.10, ce dernier apparaît dans trois états chimiques (tableau 3.1). Ceux-ci
correspondent respectivement à la forme oxyde O-Fe (529,3 eV), à la forme hydroxyde
HO-Fe (531,5 eV) et à l’eau adsorbée (533,0 eV) [KAR-98, FEL-99, BEN-99]. Certains
auteurs avancent que ce dernier signal est également confondu avec celui du groupement
carboxylique (O = C – O-) présent dans la molécule de sels d’acide carboxylique [OCH-
04c].
Seuls O2- et OH- sont identifiés sur le spectre de la figure 3.10.a, résultant de la
mesure pratiquée sur la surface de l’électrode corrodée (électrode 1). Ces oxydes et
hydroxydes sont constitutifs des produits de corrosion formés à la surface métallique dans
la solution A.

- 62 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

O 1s
O 1s

2-
-
O
OH

Sample 1 1
électrode

a)

O 1s
O 1s
2-
OH
- O

H2O

Sample 22 (α = 90°)
Sample
électrode P (θ
2 (α = 90°)

b)

O 1s
O 1s
-
OH

2-
O
H2O

Sample 2
Sample 2 ( = 30°)
électrode Pα
2 (α == 30
(θ 30°)
°)

c)

Figure 3.10 : a) Spectre XPS sur O1s dans la solution A,

b) Spectre XPS sur O1s, dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur (angle d’analyse 90°),

c) Spectre XPS sur O1s, la solution A + 0,5 % d’inhibiteur (angle d’analyse 30°)

- 63 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Sur la figure 3.10.b, les analyses réalisées avec un angle θ = 90° (dans la
profondeur de la couche) sur l’électrode 2, révèlent également une contribution
significative des oxydes-hydroxydes de fer. Cette observation confirme que l’inhibiteur
incorpore, lors de la formation du film, les premiers produits de corrosion. Il y a pourtant
moins d’oxydes O2- détectés sur la surface de l’électrode 2, lorsque l’analyse est réalisée
avec un angle θ = 30° (figure 3.10.c). Moins de produits de corrosion subsisteraient à la
surface du film et la principale contribution proviendrait alors des composés organiques de
l’inhibiteur. En effet, des traces d’azote ont été identifiées sur l’échantillon 2, et de plus, en
quantité plus importante à l’extrême surface du film (N/Fe = 0,2 pour θ = 90° et N/Fe = 0,4
pour θ = 30°). L’azote, témoin de la présence du film inhibiteur, est associé à la
contribution de l’amine ; l’azote de l’amine génère un pic à environ 400 eV (tableau 3.1)
[WEL-97, BEN-99]. La présence des autres contributions et en particulier le pic observé à
536 eV sera discuté dans le paragraphe 3.3. p. 72.
Une photographie par MEB de la tranche de la surface de l’électrode a été réalisée
après que cette dernière ait été respectivement plongée dans la solution A seule (figure
3.11.a) et dans la solution A contenant 5 % d’inhibiteur (figure 3.11.b). La différence
majeure observée entre les deux clichés est la présence d’espèces globuleuses sur
l’électrode inhibée, attribuée au réseau intégrant les molécules inhibitrices et les produits
de corrosion.
(a) (b)
10µ 10µ

XC38 / sol.A 20 kV x3700 XC38 / sol.A + 0,5 % inh. 20 kV x3700

Figure 3.11 : Photographies MEB de la tranche de la surface de l’électrode (a)


sans inhibiteur, (b) avec inhibiteur

Ces différentes études, appuyées sur des méthodes complémentaires


d’électrochimie et d’analyse de surface, ont révélé que le film inhibiteur formait, à la
surface de l’acier, une couche tridimensionnelle qui intègre les premiers oxydes-

- 64 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

hydroxydes de fer issus de la dissolution métallique. Le film formé, également appelé film
d’interphase, forme un réseau homogène et compact dont les propriétés mécaniques,
structurales et chimiques dépendent étroitement des conditions particulières de
l’expérience (concentration en inhibiteur, température, vitesse de rotation de
l’électrode,…) [MAN-85, LOR-80, LOR-83]. Felhosi et al. pensent que certaines
substances dissoutes de l’électrolyte peuvent engendrer des réactions secondaires formant
alors des précipités à la surface du métal [FEL-00]. D’après Lopez et al., il existe certains
inhibiteurs ne pouvant être efficaces que si les produits de corrosion de l’acier sont des
carbonates ou sulfures de fer, et non si ce sont des oxydes [LOP-03].

De plus, le film est efficace, après 2 heures d’immersion, à partir de 0,3 %


d’inhibiteur. Cependant, les courbes chronoampérométriques ont révélé une différence de
comportement au niveau de la vitesse de formation du film et de sa structure entre 0,3 et
0,5 % d’inhibiteur.

3. Etude du mode de dégradation du film inhibiteur

3.1. Détermination d’une concentration limite pour la formation du film


inhibiteur

Afin d’étudier les mécanismes responsables de la dégradation du film par


spectroscopie d’impédance électrochimique, il convient de déterminer, dans un premier
temps, une concentration limite pour laquelle la formation du film est possible mais pas
durable. Les tests potentiodynamiques et chronoampérométriques précédents menés avec
une concentration en inhibiteur de 0,3 % massique laissent présager que cette
concentration constitue cette limite. Aussi, des essais par voltamétries cycliques ont été
réalisés respectivement dans la solution A seule et dans la solution A avec 0,3 % ou 0,5 %
d’inhibiteur (figures 3.12.a, 3.12.b et 3.12.c).

- 65 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

(a)
0,15
4 2 1
3
0,10

I (mA.cm )
-2
0,05

0,00
-0,6 -0,4 -0,2
E (V/ECS)
-0,05 cycle : 1
2
3
-0,10 4

(b)
2
0,15
1 3
0,10
I (mA.cm )
-2

0,05
4

0,00
-0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9

-0,05 E (V/ECS)
cycle : 1
2
-0,10
3
4

(c)

0,15 4
2
1
0,10
I (mA.cm )
-2

0,05

3
0,00
-0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9 1,2

-0,05 E (V/ECS)
cycle : 1
2
-0,10 3
4

Figure 3.12 : Voltamétries cycliques effectuées à Ω =0 sur XC38 immergé (a) dans la
solution A, (b) dans la solution A + 0,3 % en inhibiteur, (c) dans la solution A + 0,5 % en
inhibiteur

- 66 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Les différents cycles pour chaque électrolyte ont été obtenus en imposant un
balayage (20 mV.s-1) de -100 mV/Ecorr jusqu’à une surtension anodique conduisant à une
densité de courant égale à 0,1 mA.cm-2, puis retour au potentiel initial.
Les voltamogrammes obtenus dans la solution sans inhibiteur sont proposés à titre
de référence : ils sont représentatifs d’une dissolution active de l’acier (figure 3.12.a). Les
courbes voltamétriques tracées en présence d’inhibiteur décrivent des allures différentes.
En effet, pour les essais conduits à 0,3 % d’inhibiteur, l’ébauche du plateau anodique
observé au retour du deuxième cycle laisse place, à l’issue du quatrième cycle, à une
évolution du courant caractéristique de la corrosion active de l’acier (figure 3.12.b). Lors
des différents cycles, le potentiel appliqué favorise la dissolution du fer. L’apport en
inhibiteur est alors insuffisant pour restaurer le film : il perd alors son efficacité. Les essais
conduits avec 0,5 % d’inhibiteur sont caractéristiques, quant à eux, de la formation d’une
couche protectrice très efficace, puisque des densités de courant décroissantes sont
obtenues au cours des quatre cycles (figure 3.12.c). Dans ce cas, la quantité d’inhibiteur
ajoutée est suffisante pour réagir avec l’ensemble des oxydes de fer formés au cours des
différents cycles, ce qui conduit à la formation d’un réseau homogène.
Aussi, 0,3 % d’inhibiteur constitue une concentration limite pour la formation du
film. Afin de comprendre précisément le mode de dégradation pour cette teneur, des essais
sur des temps d’immersion importants ont été menés par spectroscopie d’impédance
électrochimique.

3.2. Etude par spectroscopie d’impédance

Les spectres d’impédance pour 0,3 % d’inhibiteur sont reportés sur la figure 3.13.
Ceux-ci décrivent une augmentation de l’impédance totale du système avec le temps
jusqu’à 36 heures. Cette évolution suggère une forte inhibition du processus de dissolution
s’opérant à la surface [JAM-04]. Tout comme cela avait déjà été observé pour 0,5 %
d’inhibiteur, après 6 heures d’immersion, le diagramme de Bode présente un élargissement
de la phase, qui peut être attribué à la contribution du film (figure 3.13.b). Cependant,
après 36 heures, le diagramme de Nyquist rend compte d’une diminution de la boucle
capacitive (figure 3.13.a) : l’efficacité de l’inhibiteur chute. A partir de 48 heures, un retour
de boucle dans le domaine des basses fréquences peut traduire une instabilité du système.

- 67 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

temps d'immersion (h) : 2 6 24 36 42 46 48

(a)
300

- Z'' (kΩ.cm²)
10 mHz
200 15
hautes
fréquences
10 0,1 Hz

100 5
1 Hz 10 mHz
0
0 5 10 15 20
0
0 100 200 300 400 500
Z' (kΩ.cm²)

10
0 (b)
temps d'immersion (h) :
-10
4 2
-20 10 6
24
Z (Ω.cm²)

-30
Phase (°)

36
-40 48

-50 temps d'immersion (h) :


3
2 10
-60 6
-70 24
36
-80 48
2
-90 10
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 3.13 : Diagrammes d’impédance obtenus pour l’acier XC38 immergé dans la
solution A + 0,3 % en inhibiteur, pour différents temps d’immersion, Ω = 1600 tpm

(a) représentation de Nyquist

(b) représentation de Bode

Afin de comprendre cette perte d’efficacité, une modélisation de l’interface métal /


électrolyte a été réalisée par l’intermédiaire d’un circuit électrique équivalent (figure 3.14).

- 68 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

Ce CEE est, en général, utilisé pour les études des revêtements [BEA-76].

Qf, α2

Qdc ,α1
RE Re WE

Rf
RtcA

Figure 3.14 : Circuit électrique équivalent (CEE) proposé pour modéliser les phénomènes
interfaciaux avec deux constantes de temps

Il est constitué de deux éléments à phase constante (CPE), comprenant


respectivement un composé Q et un coefficient α. Le coefficient α peut caractériser
différents phénomènes physiques comme les inhomogénéités de surface résultant des
rugosités de surface, des impuretés, de l’adsorption de l’inhibiteur, de la formation d’une
couche poreuse,…[VEL-90, LOR-86]. La capacité (respectivement Cf et Cdc) est alors
calculée en se basant sur la formule de Brug [BRU-84].

Ce CEE est constitué d’éléments décrivant les propriétés du film inhibiteur


(capacité du film donnée indirectement par (Qf, α2) et résistance du film Rf) et d’autres
éléments relatifs aux processus de corrosion (capacité de double couche donnée
indirectement par (Qdc, α1) et résistance de transfert de charge Rtc) à la surface métallique.
En confrontant le CEE avec les spectres expérimentaux obtenus précédemment, il est
possible d’établir une évolution, dans le temps, des paramètres physiques relatifs au film
inhibiteur et au mécanisme de corrosion. Une bonne corrélation est obtenue entre les
données expérimentales et simulées non seulement sur les spectres observés, mais
également par le biais des valeurs du facteur d’erreur χ2, incluses pour chaque ajustement
entre 1,21.10-3 et 5,48.10-4.
Les évolutions des paramètres Cdc et Rtc pour 0,3 % en inhibiteur sont décrites sur
la figure 3.15 et celles de Cf et Rf sur la figure 3.16. Les analyses de ces évolutions

- 69 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

respectives ont permis de proposer des interprétations concernant la perte d’efficacité de


l’inhibiteur après 36 heures.

1000 60

800 50
Rtc (kΩ.cm )
40
2

Cdc (µF.cm )
600

30
400
20

-2
200
10
0
0
0 10 20 30 40 50
Temps (h)

Figure 3.15 : Evolution dans le temps, des paramètres Rtc (-■-) et Cdc (-○-) pour 0,3 % en
masse d’inhibiteur

40
120

100 30
Rf (kΩ.cm )
2

Cf (µF.cm )

80

20
60
-2

40
10

20
0 10 20 30 40 50
Temps (h)

Figure 3.16 : Evolution dans le temps, des paramètres Rf (-■-) et Cf (-○-) pour
0,3 % en masse d’inhibiteur

Rf correspond à la résistance électrique du transfert ionique à travers les pores du


film. Rf diminue avec le temps : cette évolution correspond à la pénétration de l’électrolyte
dans les pores du film. Conjointement à ce phénomène, la diminution de la capacité du

- 70 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

film Cf serait liée à une augmentation de l’épaisseur du film ; en effet, le film gonflerait
sous l’influence d’une prise en eau, la capacité du film ayant l’expression 2.3, rappelée ici :
A
C f = εε 0
d

où ε représente la constante diélectrique relative du film, A la surface active et d


l’épaisseur du film. ε0 est la permittivité du vide (8,85.10-14 F.cm-1).
L’effet de l’augmentation de la constante diélectrique avec l’infiltration de
l’électrolyte, qui tend à faire augmenter la valeur de Cf n’a qu’une répercussion mineure.
De plus, la valeur relativement élevée de Cf dès le début de l’expérience est liée à la nature
même de la couche, formée en partie par les premiers oxydes-hydroxydes de fer.
L’interprétation physique de Rf et Cf est en accord avec les évolutions respectives de Rtc et
Cdc pendant la période d’immersion. En effet, la diminution régulière de la valeur de Cdc
avec l’augmentation de Rtc durant les 36 premières heures d’immersion indique la
diminution du processus de corrosion. Cette observation montre que les pores du film
inhibiteur ne sont pas encore ouverts à la surface active. Après ce délai, la tendance est
inversée, traduisant un début de corrosion. C’est à ce moment que la prise en eau est si
importante que le nombre de chemins permettant d’établir le contact entre l’électrolyte et
le substrat s’accroît considérablement. La dissolution active de l’électrode métallique n’est
plus retenue par le film, alors détérioré, et les produits de corrosion s’amassent à la surface
de l’électrode.

Toutes ces observations peuvent contribuer à énoncer certaines hypothèses sur le


mécanisme de dégradation des propriétés inhibitrices. L’inhibiteur, de nature anodique, est
adsorbé à la surface métallique et forme un film protecteur qui intègre les premiers
produits de corrosion (inhibiteur d’interphase). La croissance de ce film, suivant une
organisation tridimensionnelle, accroît la résistance du métal face à la dissolution
métallique. Cependant, la morphologie de cette couche est de nature à laisser s’infiltrer
l’électrolyte, cette pénétration même étant à l’origine de phénomènes de corrosion après
environ 36 heures. C’est à la fin de cette période critique d’infiltration que le film est
totalement dégradé. En particulier, cette dégradation est caractérisée par une nette
augmentation de Cf ; la notion de capacité de film n’a plus aucun sens physique puisque le
film n’existe plus [DIG-96].

- 71 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

3.3. Analyses XPS

Des analyses XPS, réalisées après 24 heures d’immersion, ont permis de valider les
mécanismes de détérioration du film inhibiteur par une prise en électrolyte croissante, qui
provoque finalement, au bout de 36 heures, la perte d’efficacité du film.
Sur les figures 3.10.b et 3.10.c, les pics identifiés à 536,5 eV correspondent à la raie
Auger du sodium (plus précisément à une transition Na KL1L23) [MOU-92]. Celle-ci
caractérise la présence de l’électrolyte. Cette détection est en accord avec une infiltration
de l’électrolyte dans le film, et particulièrement dans sa partie externe (voir le rapport
Na/Fe dans le tableau 3.2).
Na/Fe

Echantillon 1 0,1

Echantillon 2 (θ = 90°) 0,6

Echantillon 2 (θ = 30°) 1,4

Tableau 3.2 : Valeurs issues des analyses XPS après 24 heures d’immersion

4. Conclusion du chapitre 3

L’inhibiteur étudié est un inhibiteur anodique, bloquant uniquement la dissolution


métallique et n’influant pas sur la réduction de l’oxygène dissous en solution. Il forme une
couche tridimensionnelle à la surface du matériau qui incorpore les oxydes-hydroxydes de
fer issus de la corrosion de l’acier.
Le film formé, également appelé film d’interphase, forme un réseau dense dont les
propriétés dépendent du taux d’inhibiteur introduit. En effet, après 2 heures d’immersion,
l’inhibiteur présente un pouvoir protecteur satisfaisant dès 0,3 % massique. Néanmoins, le
film formé à cette teneur n’est pas en mesure de protéger durablement l’acier. La perte

- 72 -
Chapitre 3 – Caractérisation générale des propriétés du film inhibiteur

d’efficacité peut alors être attribuée à une prise en eau progressive du film, qui conduit
après 36 heures, à une corrosion importante [BOM-03, BOM-04].
Au contraire, le film formé à 0,5 % d’inhibiteur est vraisemblablement plus dense
ou plus compact. Il est capable de bloquer l’infiltration de l’électrolyte et donc, permet
d’assurer une protection durable de l’acier, jusqu’à au moins 60 heures.

- 73 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Chapitre 4 :

INFLUENCE DE PARAMETRES PHYSIQUES


LIES AUX CONDITIONS DE SERVICE DU
SYSTEME :

INFLUENCE DE LA TEMPERATURE

1. Mise au point bibliographique___________________________________ 77


2. Mise en évidence d’une température critique d’utilisation de l’inhibiteur
____________________________________________________________________ 79
2.1. Etude en l’absence d’inhibiteur ________________________________ 79
2.2. Etude en présence d’inhibiteur ________________________________ 81
2.3. Détermination d’une température critique d’utilisation de l’inhibiteur__ 83
3. Evolution du pouvoir protecteur avec la température _______________ 83
4. Evolution des mécanismes de formation du film inhibiteur avec la
température__________________________________________________________ 88
4.1. Effet de la température sur les mécanismes d’inhibition_____________ 88
4.2. Evolution des paramètres à l’interface dans la gamme 40 – 50 °C _____ 91
4.3. Effet d’un ajout de 5 % d’inhibiteur sur la formation du film à 80 °C __ 92
4.3.1. Mise en évidence de la formation du film à température élevée ___ 93
4.3.2. Evolution de la cinétique de formation du film ________________ 95
5. Conclusion du chapitre 4 _______________________________________ 98

- 75 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

- 76 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Lors de l’usinage mécanique (découpes, forages, perçages,…), des échauffements


locaux, dus en grande partie aux frottements des surfaces, au niveau des pièces usinées ou
des outils de coupe sont constatés. Ces élévations de température peuvent avoir une
incidence importante sur la formation du film inhibiteur.
Le but de ce chapitre est de déterminer, s’il existe, une température critique
d’utilisation de l’inhibiteur et d’identifier l’évolution des mécanismes de formation du film
en fonction de la température dans l’intervalle 20-80 °C. Avant d’étudier l’influence de la
température sur la formation et la stabilité du film inhibiteur, une étude préliminaire mais
nécessaire dans la solution A* a été effectuée afin de caractériser l’effet de ce paramètre sur
la vitesse de corrosion de l’acier.

1. Mise au point bibliographique

L’influence de la température sur l’efficacité des inhibiteurs, notamment en milieu


acide a fait l’objet de plusieurs articles ; lors de décapages et détartrages à haute
température, pour enlever les produits de corrosion sur les installations métalliques, les
inhibiteurs ont pour rôle de protéger ces dernières face aux attaques acides [GOM-98a,
GOM-98b, CHE-02, CHE-04, CHE-05, HAM-73, AUD-99, POP-03, RAD-65].

Gomma a étudié l’effet de la température sur l’efficacité de plusieurs inhibiteurs de


corrosion utilisés soit pour la protection de l’acier (par les acides tartarique et/ou malique
en présence ou non de cations fer dans l’intervalle 35-55 °C) [GOM-98a], soit pour la
protection du cuivre (par le benzotriazole dans l’acide sulfurique dans l’intervalle 30-65
°C) [GOM-98b]. Ces deux études ont révélé une diminution du pouvoir protecteur de
l’inhibiteur avec une augmentation de la température. Chetouani et al. ont abouti aux
mêmes constatations lors de leurs essais sur l’action inhibitrice de composés organiques de
type bipyrazolique [CHE-05] et de dérivés de la pyridazine [CHE-02] sur la corrosion du
fer pur en milieu acide dans l’intervalle de températures 20-80 °C.

*
solution A : composition indiquée dans le paragraphe 2.4 du chapitre 2, p. 35

- 77 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Dans ces études, la dépendance, de type Arrhenius, observée entre le courant de


corrosion et la température, permet de calculer la valeur de l’énergie d’activation (équation
4.1):
⎛ −E ⎞
iCORR = λ exp ⎜ a ⎟ (4.1)
⎝ RT ⎠
Avec :
iCORR : densité de courant de corrosion (A.cm-2)
λ : facteur préexponentionnel
Ea : énergie d’activation (kJ.mol-1)
R : constante des gaz parfaits (J.mol-1.K-1)
T : température absolue (K)

La comparaison des énergies d’activation obtenues en présence (Eai) ou non (Ea)


d’inhibiteur permet de prévoir la dépendance du pouvoir protecteur de l’inhibiteur avec la
température.

En 1965, Radovici [RAD-65] propose un classement des inhibiteurs reposant sur


cette comparaison. Il distingue :
1. les inhibiteurs pour lesquels Eai > Ea, qui s’adsorbent sur le substrat par des
liaisons de nature électrostatique (liaisons faibles). Ce type de liaisons sensibles à
la température ne permet pas de lutter efficacement contre la corrosion quand la
température augmente.
2. les inhibiteurs pour lesquels Eai < Ea. Ces inhibiteurs présentent, quant à eux,
une augmentation du pouvoir protecteur avec la température. Les molécules
organiques de l’inhibiteur s’adsorbent à la surface métallique par liaisons fortes
(chimisorption). Gomma rappelle que, pour Machu, les inhibiteurs de cette
catégorie sont les plus efficaces [GOM-98b]. Putilova et al. considèrent que
l’augmentation du pouvoir protecteur avec l’augmentation de la température est
due au changement de nature de l’adsorption : à des faibles températures,
l’inhibiteur est adsorbé physiquement tandis que la chimisorption est favorisée à
haute température [PUT-60].
3. les inhibiteurs pour lesquels Eai = Ea. Cette catégorie ne présente pas
d’évolution du pouvoir protecteur avec la température ; très peu de composés
appartiennent à cette dernière catégorie.

- 78 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Les études portant sur l’influence de la température sur les films inhibiteurs par
spectroscopie d’impédance sont peu nombreuses [CHE-02, CHE-04, CHE-05, POP-03].
Seul Popova a réellement exploité cette technique lors de ses essais sur des dérivés du
benzimidazole [POP-03]. Il a, en particulier, mis en évidence que la diminution du pouvoir
protecteur avec la température était liée à un déplacement de l’équilibre d’adsorption /
désorption. Néanmoins, malgré cette évolution, il montra qu’un pouvoir protecteur
satisfaisant pouvait être atteint à température élevée (60 °C) si la concentration en
inhibiteur était suffisante pour maintenir une couche inhibitrice adsorbée.

2. Mise en évidence d’une température critique d’utilisation de


l’inhibiteur

En général, la température a un effet important sur les phénomènes de corrosion : la


vitesse de corrosion augmente lorsque la température d’essai augmente, et cette
augmentation de température induit, de fait, des changements sur l’action des inhibiteurs
[BOM-05b, BOM-05c].

2.1. Etude en l’absence d’inhibiteur

Le suivi du potentiel en circuit ouvert permet d’enregistrer les modifications à


l’interface entre le matériau et l’environnement. La figure 4.1 présente l’évolution du
potentiel libre de l’acier XC38 dans la solution A, pendant 2 heures, respectivement à
chaque température d’essais. Quelle que soit la température, l’évolution du potentiel en
fonction du temps est caractéristique d’un mécanisme de corrosion avec formation de
produits de corrosion. Le potentiel diminue pendant les 20 premières minutes puis se
stabilise à des valeurs comprises entre -500 et -550 mV/ECS. Cependant, l’allure des
courbes dans la gamme de températures 20-40 °C (traits en continu) tend légèrement à
différer de celle observée dans la gamme 50-80 °C (traits en pointillé). Cette évolution peut
être attribuée à une dissolution plus rapide de l’acier pour les températures supérieures à 50
°C. L’observation de la surface de l’électrode après les essais révèle une quantité plus

- 79 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

importante de produits de corrosion à partir de 50°C, ce qui confirme les remarques


précédentes.

-0,45 20 °C 50 °C
30 °C 60 °C
40 °C 80 °C

60
E (V/ECS) -0,50 20

30

50 40
-0,55
80

-0,60
0 20 40 60 80 100 120
Temps (min)

Figure 4.1 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la solution
A à différentes températures, Ω = 1600 tpm

Les courbes de polarisation obtenues dans l’intervalle de potentiels -500 à +1500


mV/Ecorr avec une vitesse de balayage de 0,5 mV.s-1 sont présentées sur la figure 4.2.
Celles-ci confirment et complètent les renseignements issus des courbes potentiel/temps.
En particulier, l’augmentation des densités de courant anodique et cathodique avec la
température confirme l’augmentation des cinétiques de corrosion de l’acier avec ce
paramètre.

0,01 40 °C

1E-3

30 °C
1E-4
i (A.cm )
-2

20 °C température (°C) :
1E-5 20
30
1E-6 40
50
60
1E-7 80

-1,2 -0,9 -0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9 1,2


E (V/ECS)

Figure 4.2 : Courbes de polarisation obtenues pour l’acier XC38 immergé dans la solution
A à différentes températures, Ω = 1600 tpm

- 80 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

2.2. Etude en présence d’inhibiteur

L’évolution du potentiel libre en fonction du temps enregistrée dans la solution A


avec 0,5 % en masse d’inhibiteur aux différentes températures montre l’existence de deux
domaines de température bien distincts, où le comportement de l’acier semble différent
vis-à-vis de la corrosion (figure 4.3).

Dans le domaine 50-80 °C, malgré des valeurs de potentiels plus nobles que dans la
solution A seule, la diminution importante du potentiel durant la première heure
d’immersion est caractéristique de la corrosion de l’échantillon ; l’observation de la surface
de l’acier après les essais confirme cette remarque.

20
-0,30
30
40

20 °C
30 °C
E (V/ECS)

-0,35
50 40 °C
50 °C
60 °C
60
80 °C
-0,40

80

-0,45
0 20 40 60 80 100 120
Temps (min)

Figure 4.3: Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la solution A
avec 0,5 % en masse d’inhibiteur à différentes températures, Ω = 1600 tpm

A 50 °C, l’évolution du potentiel libre est légèrement différente de celle enregistrée


à 60 et 80 °C. En effet, le potentiel ne chute qu’après 30 minutes d’immersion. Ce
comportement peut caractériser un début d’inhibition. Néanmoins, le film formé à cette
température ne serait pas de nature (de par sa composition ou morphologie) à protéger
l’acier durablement.

- 81 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Dans le domaine de températures 20-40 °C, le potentiel augmente d’une vingtaine


de millivolts puis se stabilise après 30 minutes d’immersion pour atteindre une valeur de
l’ordre de -300 mV/ECS. Cette allure est caractéristique de la formation d’un film à la
surface de l’électrode active : Felhosi et al. attribuent, en effet, l’augmentation continue
dans le temps du potentiel en circuit ouvert à l’adsorption spontanée des molécules
inhibitrices à la surface métallique [FEL-02] . L’observation de l’électrode, après 2 heures
d’immersion et pour cette dernière gamme de températures, confirme la présence du film
inhibiteur, la surface étant exempte de tout produit de corrosion apparent.

Les courbes de polarisation obtenues dans la solution A avec 0,5 % en inhibiteur


sont présentées sur la figure 4.4. La présence d’un plateau anodique pour des températures
inférieures à 40 °C caractérise le blocage de la réaction d’oxydation du métal par la
formation du film protecteur. Ce plateau anodique est d’autant plus important que la
température est proche de 20 °C.

En revanche, pour des températures strictement supérieures à 50 °C, les allures des
courbes (anodiques et cathodiques) sont les mêmes que celles obtenues lorsque le métal est
immergé dans la solution A seule (figure 4.2) : les ordres de grandeur des densités de
courant sont importants et comparables à ceux obtenus dans la solution A.

0,01
80
60
1E-3
50
1E-4
i (A.cm )

30
-2

40
1E-5
20 température (°C) :
1E-6 20
30
40
1E-7 50
60
1E-8 80

-1,2 -0,9 -0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9 1,2 1,5
E (V/ECS)

Figure 4.4 : Courbes de polarisation obtenues pour l’acier XC38 immergé dans la solution
A + 0,5 % en inhibiteur à différentes températures, Ω = 1600 tpm

- 82 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

2.3. Détermination d’une température critique d’utilisation de l’inhibiteur

La température 50 °C semble constituer une température critique d’utilisation de


l’inhibiteur. La figure 4.5 permet de visualiser ce comportement : elle présente l’évolution
des valeurs des potentiels libres obtenus après 2 heures d’immersion en fonction des
températures étudiées, pour l’acier XC38 plongé respectivement dans la solution A seule et
contenant l’inhibiteur.

-0,25

-0,30

-0,35 avec inhibiteur


E (V/ECS)

-0,40

-0,45

-0,50

-0,55 sans inhibiteur

20 30 40 50 60 70 80
Température (°C)

Figure 4.5 : Evolution des potentiels en circuit ouvert en fonction des températures
d’essais, obtenus après 2 heures d’immersion de l’acier XC38 dans la solution A (—○—)
et dans la solution A avec inhibiteur (—▲ —)

3. Evolution du pouvoir protecteur avec la température

Le pouvoir protecteur de l’inhibiteur à chaque température est déterminé par la


relation 1.1, rappelée ici :

icorr − icorr inh


Pouvoir protecteur (%) = . 100
icorr

- 83 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

avec icorr et icorrinh représentant respectivement les courants de corrosion dans la


solution A seule et en présence d’inhibiteur. La détermination des courants de corrosion a
été effectuée grâce aux tracés potentiodynamiques. Ces différents tracés sont présentés
dans les tableaux 4.1 et 4.2 (ci-après p. 86 et 87). Par souci de clarté, les courbes de
polarisation obtenues avec et sans inhibiteur sont superposées sur le même graphe à une
température donnée.

La valeur de chaque courant de corrosion, pour les essais effectués sans inhibiteur,
a été déterminée par l’intersection, au potentiel de corrosion, des tangentes respectives aux
courbes anodique et cathodique. Concernant les essais réalisés dans la solution avec
inhibiteur, et aux températures 20, 30 et 40 °C, la valeur du courant de corrosion a été
déterminée en prolongeant le plateau anodique jusqu’au potentiel de corrosion. La figure
4.6 présente l’évolution des courants de corrosion en fonction de la température.

800
700 740 760

736
600 617
i corr (µA.cm-²)

500 515

400
300 275 320

345
200
100 175
2 19
0 17
Solution A
20 30 40 solution A + 0,5 % en inhibiteur
50
60
Température (°C) 80

Figure 4.6 : Evolution, en fonction de la température, des courants de corrosion calculés


pour chaque essai respectivement dans la solution A seule ou en présence de 0,5 % en
inhibiteur

De manière générale, les valeurs des densités de courant augmentent avec la


température, que l’on soit ou non en présence d’inhibiteur dans la solution. L’évolution

- 84 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

des courants de corrosion dans la solution A présente une croissance régulière de 275 à 760
µA.cm-2, confirmant une dissolution métallique croissante avec l’augmentation de la
température.

En présence d’inhibiteur, une nette augmentation du courant de corrosion à partir


de 50 °C est à noter. En effet, entre 20 et 40 °C, les courants ne dépassent pas 20 µA.cm-2,
tandis qu’au-delà, ils passent de 175 µA.cm-2 à 50 °C à 736 µA.cm-2 à 80 °C.

Finalement, l’évolution des pouvoirs protecteurs en fonction de la température est


portée sur la figure 4.7. Cette représentation confirme la valeur de la température critique
TC déterminée précédemment. En effet, l’inhibiteur présente un pouvoir protecteur très
satisfaisant (> 94 %) jusqu’à 40 °C, alors qu’il chute considérablement après 50 °C : il
n’est plus que de l’ordre de 3 % à 80 °C.

100
99 %
90 94 % 96 %

80
Pouvoir protecteur (%)

70 72 %
60
50 53 %
40
30
20
10 3%
0
20 30 40 50 60 70 80
Température (°C)

Figure 4.7 : Evolution du pouvoir protecteur de l’inhibiteur en fonction de la température

- 85 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Tableau 4.1 : Pour chaque température d’essais (respectivement 20, 30 et 40 °C) :


représentation des courbes de polarisation sans (---) et avec (—) inhibiteur, valeurs des
densités de courant sans et avec inhibiteur, et valeurs des pouvoirs protecteurs

Courbes de polarisation Pouvoir


Température icorr icorrinh
(---) sans inhibiteur protecteur
(°C) (µA.cm-2) (µA.cm-2)
(—) avec inhibiteur (%)
0,01

1E-3

1E-4

275 2,1
I (A.cm )

99,24
-2

1E-5

20 1E-6

1E-7
± 35 ± 0,4 ± 0,45
1E-8
-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2
E (V/ECS)

0,01

1E-3

1E-4
320 19 94,06
I (A.cm )
-2

1E-5
30
1E-6
± 60 ±3 ± 0,51
1E-7

-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2


E (V/ECS)

0,01

1E-3

515 17
I (A.cm )

96,69
-2

1E-4

40 1E-5
± 95 ±2 ± 0,48
1E-6

1E-7
-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2
E (V/ECS)

- 86 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Tableau 4.2 : Pour chaque température d’essais (respectivement 50, 60 et 80 °C) :


représentation des courbes de polarisation sans (---) et avec (—) inhibiteur, valeurs des
densités de courant sans et avec inhibiteur, et valeurs des pouvoirs protecteurs

Courbes de polarisation Pouvoir


Température icorr icorrinh
(---) sans inhibiteur protecteur
(°C) (µA.cm-2) (µA.cm-2)
(—) avec inhibiteur (%)

0,01

1E-3

617 175 71,63


I (A.cm )

1E-4
-2

50 1E-5

1E-6
± 137 ± 16 ± 0,39
1E-7
-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2
E (V/ECS)

0,01

1E-3
740 345
I (A.cm )

53,37
-2

60 1E-4
± 150 ± 95 ± 0,36
1E-5

-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2


E (V/ECS)

0,01

1E-3

760 736
I (A.cm )

1E-4
3,16
-2

80 1E-5

1E-6
± 120 ± 74 ± 0,01
1E-7
-0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2
E (V/ECS)

- 87 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

4. Evolution des mécanismes de formation du film inhibiteur avec


la température

Afin d’appréhender l’évolution du comportement du film inhibiteur avec la


température, une étude de l’influence de ce paramètre sur les mécanismes de formation du
film a été menée par spectroscopie d’impédance électrochimique.

4.1. Effet de la température sur les mécanismes d’inhibition

La figure 4.8 présente les diagrammes d’impédance en représentation de Nyquist et


de Bode, tracés aux différentes températures étudiées après 2 heures d’immersion.

Pour des températures inférieures à la température critique de 50 °C, les


diagrammes de Nyquist décrivent une boucle capacitive déphasée par rapport à l’axe des
réels. La limite à basses fréquences de ce diagramme permet de calculer la valeur de la
résistance de transfert de charge. Ainsi, la décroissance de la taille de la boucle avec la
température confirme une légère diminution de l’efficacité du film. Cependant, les
mécanismes de formation à 2 heures restent inchangés puisqu’il existe une simple relation
de proportionnalité entre les diagrammes.

Le diagramme de Bode pour l’essai mené à 20 °C, présente dans la gamme de


fréquences 0,1 à 10 Hz (partie grisée sur la figure 4.8.b), un léger épaulement qui peut être
attribué à la contribution du film.

Une étude impédancemétrique, menée jusqu’à 60 heures d’immersion et à 40 °C a


été réalisée (figure 4.9). Comme pour les essais effectués à température ambiante, la taille
de la boucle capacitive augmente avec le temps. Cette évolution a déjà été discutée dans le
chapitre 3 et a été attribuée à une augmentation de l’efficacité du film liée à une
augmentation de son épaisseur.

- 88 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

température (°C) : 0,8 hautes


80 20 fréquences
30
40 0,4 1 Hz

60 50 0.1 Hz

-Z'' (kΩ.cm²)
60
80 0,0
10 mHz

0,0 0,4 0,8 1,2


40
0.1 Hz

20 10 mHz

0
0 20 40 60 80 100 120
Z' (kΩ.cm²)

(a)

0
température (°C) :
-10 2
10 20
30
-20
40
Phase (°)

50
Z (kΩ.cm²)

-30
1 60
température (°C) : 10 80
-40
20
30
-50
40
50 0
-60 10
60
-70 80

-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

(b)

Figure 4.8 : Diagrammes d’impédance obtenus pour l’acier XC38 immergé dans la
solution A + 0,5 % en inhibiteur à différentes températures, Ω = 1600 tpm

(a) représentation de Nyquist

(b) représentation de Bode

Le même type de diagramme d’impédance et la même évolution dans le temps sont


observés dans la gamme de températures 20-40 °C. Ainsi, la température n’agirait pas sur
les mécanismes de formation du film mais plutôt sur sa morphologie : le film semblerait
moins résistant à l’agressivité du milieu.

- 89 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

(a) temps d'immersion (h) : 2


4
300 6
24
48

- Z'' (kΩ.cm )
60

2
200

100

10 mHz

0
0 100 200 300 400 500
2
Z' (kΩ.cm )

10
0 (b) 3
10
temps d'immersion (h) :
-10
2
-20 6
2
10 24
-30
Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

48
-40 60
1
-50 temps d'immersion (h) : 10
2
-60
6
-70 24 0
48 10
-80 60
-90
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 4.9 : Diagrammes d’impédance (a) en mode Nyquist (b) en mode Bode obtenus
pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % en inhibiteur à 40 °C, pour
différents temps d’immersion Ω = 1600 tpm

- 90 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Pour des températures supérieures à 50 °C, les spectres d’impédance sur le


diagramme de Nyquist de la figure 4.8.a décrivent 2 boucles capacitives déphasées et mal
découplées. Ces diagrammes sont comparables à ceux obtenus sans inhibiteur. La boucle à
hautes fréquences peut être attribuée au transfert de charges à l’interface et la boucle à
basses fréquences à la diffusion de l’oxygène dissous à travers les produits de corrosion
[DUP-81]. De plus, la valeur de la limite à basses fréquences de ces diagrammes pour 60 et
80 °C est très faible et du même ordre de grandeur que pour les essais conduits sans
inhibiteur (Rtc = 300 Ω.cm2), ce qui confirme l’absence du film protecteur à l’interface.

4.2. Evolution des paramètres à l’interface dans la gamme 20 – 40 °C

Pour des températures comprises entre 20 et 40 °C et après 2 heures d’immersion,


la contribution du film protecteur n’est pas encore quantifiable (du fait probablement de
son épaisseur) et l’ajustement paramétrique des spectres d’impédance expérimentaux a été
réalisé avec le circuit électrique équivalent (CEE) de la figure 4.10.

Qdc , α1

RE Re WE

RtcA

Figure 4.10 : Circuit électrique équivalent (CEE) proposé pour les spectres
obtenus dans la gamme de température 20 - 40 °C

Les spectres expérimentaux et simulés sont bien corrélés et les valeurs issues de
l’ajustement paramétrique sont présentées dans le tableau 4.3.

- 91 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Tableau 4.3 : Valeurs des paramètres issus de la simulation par le CEE pour les
températures de 20 à 40 °C dans la solution A avec inhibiteur

χ²
T Re Rtc Cdc
α1 (facteur
(°C) (Ω.cm²) (kΩ.cm²) (µF.cm-²)
d’erreur)
20 206 0,83 99,8 87,2 9,56.10-4
30 197 0,79 25,4 37,5 3,20.10-3
40 113 0,79 26,1 28,1 4,81.10-3

Le maintien de la capacité à une valeur relativement faible pour les températures


comprises entre 20 et 40 °C témoigne de l’adsorption des molécules inhibitrices à la
surface de l’échantillon. Par contre, la diminution de Rtc traduit l’augmentation, à
l’interface, du transfert de charges lié à la dissolution du fer plus rapide quand la
température augmente. Ainsi, quand la température augmente, le film formé serait moins
de nature (morphologie, structure, homogénéité) à protéger l’acier efficacement.

Le tableau 4.3 présente également l’évolution du paramètre α1∗. On note une


diminution de ce paramètre avec la température. D’après Popova, cette évolution en
présence d’inhibiteur peut résulter non seulement d’une augmentation des rugosités de
surface liée à la corrosion croissante de l’échantillon, mais également au déplacement de
l’équilibre d’adsorption / désorption tendant vers la désorption de l’inhibiteur [POP-03].

4.3. Effet d’un ajout de 5 % d’inhibiteur sur la formation du film à 80 °C

Plusieurs résultats expérimentaux ont déjà révélé l’importance du rapport


« molécules inhibitrices / oxydes-hydroxydes métalliques » : ce rapport doit être respecté

*
Rappel : le coefficient α peut caractériser différents phénomènes physiques comme les

inhomogénéités de surface résultant des rugosités de surface, des impuretés, de l’adsorption de l’inhibiteur,

de la formation d’une couche poreuse,…[VEL-90, LOR-86]

- 92 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

afin d’assurer une protection contre la corrosion (et qui plus est, dans le temps). Citons
pour exemple, les essais réalisés à 20 °C pour deux concentrations différentes en inhibiteur
(0,3 et 0,5 % en masse). La cinétique de dissolution du fer est la même durant les
premières heures d’immersion pour les deux concentrations, mais le réseau formé entre les
molécules inhibitrices à 0,3 % et les oxydes de fer n’est pas de nature à protéger la surface
de l’acier durablement. En effet, la perte d’efficacité dans le temps a été corrélée à une
prise en eau progressive, probablement liée à une moins bonne cohésion ou compacité du
réseau (comparativement à celui obtenu à 0,5 %). Lorsque la température d’essais
augmente, pour une même quantité d’inhibiteur, le rapport évolue considérablement. Ainsi,
à 80 °C, l’apport de 0,5 % d’inhibiteur n’est pas suffisant pour intéragir avec tous les
produits de corrosion formés. La complexation entre les oxydes-hydroxydes de fer et les
molécules inhibitrices, qui assure la compacité du réseau, ne concerne plus qu’un petit
pourcentage de l’interphase.

4.3.1. Mise en évidence de la formation du film à température élevée

La figure 4.11 présente l’évolution du potentiel libre avec le temps d’immersion,


pour des essais menés à 5 % en inhibiteur, à des températures de 20 et 80 °C. Les courbes à
0,5 % en inhibiteur aux deux mêmes températures servent uniquement d’essais de
référence, la possibilité ou non de formation du film dans ces conditions expérimentales
ayant déjà été discutée précédemment.

- 93 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

-0,30 avec 0.5 % (20°C)


avec 5 % (20°C)

Potentiel (V/ECS)
-0,35 avec 5 % (80°C)

-0,40

avec 0.5 % (80°C)


-0,45
0 20 40 60 80 100 120
Temps (min)

Figure 4.11 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la solution
A avec inhibiteur en proportion 0,5 ou 5 % en masse, à 20 et 80 °C, Ω = 1600 tpm

A 80 °C et pour une concentration de 0,5 % (---), l’allure décroissante du potentiel


dans le temps est caractéristique de la dissolution active du matériau. L’effet d’un apport
plus important en inhibiteur est nettement discernable : en plus d’un gain en potentiel de
l’ordre de 100 mV, l’allure du potentiel libre pour l’électrode immergée dans la solution A
+ 5 % en inhibiteur (—) révèle la formation du film à la surface métallique (augmentation
sur quelques minutes puis stabilisation du potentiel libre). Néanmoins, l’écart de potentiels
observé après 2 heures d’immersion pour les essais réalisés à 5 % d’inhibiteur aux 2
températures laisse présager une efficacité réduite du film à 80 °C.

Les courbes de polarisation présentées sur la figure 4 .12 confirment et complètent


ces résultats. En particulier, à 80°C, le plateau anodique n’apparaît que pour une surtension
de l’ordre de 500 mV/Ecorr. Cette observation permet de révéler un blocage non instantané
de la réaction de dissolution du fer par rapport aux essais réalisés à température ambiante
(le plateau anodique n’apparaît pas directement au-delà du potentiel de corrosion).

- 94 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

0,1

0,01 avec 0.5 % (80 °C)

1E-3

1E-4

i (A.cm )
avec 5 % (80 °C)

-2
1E-5

1E-6 avec 5 % (20 °C)


1E-7

1E-8

1E-9
-0,8 -0,4 0,0 0,4 0,8 1,2
Potentiel (V/ECS)

Figure 4.12 : Courbes de polarisation obtenues pour l’acier XC38 immergé dans la
solution A avec inhibiteur en proportion 0,5 ou 5 % à 20 et 80 °C, Ω = 1600 tpm

4.3.2. Evolution de la cinétique de formation du film


Afin de comprendre le blocage non instantané du processus de corrosion à 80 °C
pour 5 % d’inhibiteur, une étude couplant la chronoampérométrie et la microgravimétrie a
été mise en œuvre.
La figure 4.13 présente respectivement l’évolution des courants (—) et des masses
(- - -) en fonction du temps pour les températures 20 et 80 °C, lorsque l’on applique une
tension de -100 mV/ECS. Cette surtension permet de se placer avant le plateau anodique
décrit sur la courbe potentiodynamique réalisée pour 5 % en inhibiteur. A 20 °C, une
densité de courant anodique très faible (2 µA.cm-2) est enregistrée dès les cinq premières
minutes ; or, cette valeur n’est atteinte qu’après 30 minutes à 80 °C. Les essais
microgravimétriques montrent que cette évolution du temps d’obtention du courant
résiduel est liée aux quantités de produits de corrosion et de molécules inhibitrices
engagées dans la « construction du film ». En effet, une masse croissante est détectée sur la
surface du quartz durant les 30 premières minutes (elle atteint 25 µg.cm-2) pour l’essai
menée à 80 °C et 5 % alors que la prise de masse n’est pas décelable pour celui réalisé à 20
°C et 0,5 %.

- 95 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

0,06 30

0,05
25
0,04
20

m (µg.cm )
i (mA.cm )
-2
0,03
i m 15
20 °C
0,02 80 °C

-2
10
0,01
5
0,00
0
-0,01
0 10 20 30 40 50 60
Temps (min)

Figure 4.13 : Chronoampérométries (E = -0,1 V/ECS) et chronogravimétrie obtenues pour


l’acier XC38 immergée dans la solution A avec 5 % d’inhibiteur à 20 et 80 °C, Ω = 0

Le tableau 4.4 suivant récapitule les trois cas de figures qui soulignent l’importance
du rapport évoqué précédemment.

- 96 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

Tableau 4.4 : Récapitulatif de l’importance du rapport « concentration en


inhibiteur / produits de corrosion »

Conditions L’inhibiteur est-il


Schéma explicatif
expérimentales efficace ?

Cinh = 0,5 %

OUI
T = 20 °C
CAS N° 1

Cinh = 0,5 %

NON
T = 80 °C
CAS N° 2

Cinh = 5 %

OUI

T = 80 °C
CAS N° 3

molécule d’inhibiteur

produits de corrosion

métal

- 97 -
Chapitre 4 – Influence du paramètre température

5. Conclusion du chapitre 4

Afin de se rapprocher des conditions dans lesquelles l’inhibiteur peut être placé en
service, l’influence de la température sur la formation et la tenue du film protecteur a été
testée dans l’intervalle 20-80 °C.

Dans un premier temps, il a été mis en évidence que 50 °C constituait une


température critique d’utilisation de l’inhibiteur. En effet, pour des températures
inférieures à 50 °C, la formation du film est possible et le pouvoir protecteur satisfaisant
(> 94 %). Par contre, pour des températures au-delà de 50 °C, l’efficacité de l’inhibiteur
chute considérablement pour n’être plus que de 3 % à 80 °C.

L’évolution du pouvoir protecteur avec la température a pu être corrélée à une


augmentation importante de la cinétique de dissolution des ions fer plutôt qu’à une réelle
évolution des mécanismes réactionnels. Quand la température augmente, le réseau formé
par complexation entre les oxydes-hydroxydes de fer et les molécules inhibitrices ne
concerne plus qu’une proportion de plus en plus faible de l’interphase, qui est alors
majoritairement recouverte de produits de corrosion.
Cette approche souligne l’importance du rapport « concentration en inhibiteur /
produits de corrosion », en particulier lorsque l’inhibiteur forme une couche
tridimensionnelle mettant en jeu, lors de sa formation, des étapes successives d’adsorption
/ complexation.

Enfin, cette approche a pu être confirmée par une étude couplée microgravimétrie /
chrononampérométrie menée à 80 °C et pour 5 % d’inhibiteur. Le film formé dans ces
conditions présente un pouvoir protecteur satisfaisant après 2 heures d’immersion.
Néanmoins, la formation d’un réseau dense capable de bloquer complètement la
dissolution du fer est retardée puisque la complexation entre les molécules de l’inhibiteur
et les oxydes-hydroxydes engage plus de produits et a lieu sur une épaisseur plus
importante.

- 98 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Chapitre 5 :

INFLUENCE DE PARAMETRES PHYSIQUES


LIES AUX CONDITIONS DE SERVICE DU
SYSTEME :

INFLUENCE DE L’HYDRODYNAMIQUE

1. Préambule : l’écoulement dans la configuration de l’EDT _____________ 101


1.1. Le transport de masse _________________________________________ 101
1.2. Dépendance entre les contraintes d’écoulement et le rayon du disque dans le
cas de l’EDT _________________________________________________________ 103
2. Les inhibiteurs et l’hydrodynamique ______________________________ 105
2.1. Régime turbulent ____________________________________________ 106
2.2. Régime laminaire ____________________________________________ 106
3. Etude qualitative de l’effet de la vitesse de rotation sur le film inhibiteur 107
3.1. Nature du régime d’écoulement _________________________________ 107
3.2. L’inhibition sous l’effet de l’hydrodynamique______________________ 107
4. Etude de l’hydrodynamique à des temps courts______________________ 110
4.1. Cinétique d’adsorption ________________________________________ 110
4.2. Diagrammes d’impédance après 2 heures _________________________ 112
4.3. Décomposition des contributions ________________________________ 113
4.4. Evolution des paramètres à l’interface ____________________________ 117
5. Etude de l’hydrodynamique à des temps plus importants _____________ 119
6. Caractérisation des films inhibiteurs sous l’influence de la vitesse de rotation
______________________________________________________________________ 123
6.1. Caractérisation de l’état de la surface : analyses par AFM ____________ 123
6.2. Caractérisation de la composition chimique des films inhibiteurs : analyses
par XPS _____________________________________________________________ 126
7. Conclusion du chapitre 5 ________________________________________ 127

- 99 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

- 100 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

De par les divers domaines d’applications de l’inhibiteur, l’étude de l’influence de


l’hydrodynamique sur la formation et la tenue du film est incontournable. En effet, ce
paramètre conditionne considérablement le transport de masse à l’interface, et il est
responsable des contraintes de cisaillement, plus ou moins importantes, suivant l’écoulement
au niveau de la surface active.

Dans ce chapitre, un préambule consacré au transport de masse dans la configuration


de l’électrode à disque tournant (EDT) rappelle, dans un premier temps, la notion de régime
d’écoulement. Puis, est abordé l’effet de l’hydrodynamique, aux temps courts (2 heures), sur
la cinétique de formation du film. Enfin, la dernière partie de ce chapitre est axée sur le rôle
de l’écoulement et en particulier des contraintes de cisaillement sur la stabilité et la
morphologie du film protecteur, pour des temps d’immersion importants (jusqu’à 10 jours).

1. Préambule : l’écoulement dans la configuration de l’EDT

1.1. Le transport de masse

En 1942, Levich est le premier à développer la théorie décrivant le transport de masse


vers une EDT [LEV-42, LEV-44]. L’hypothèse de Levich repose sur un état de surface du
disque uniformément accessible, c’est-à-dire que tous les sites du disque décrivent une
activité équivalente. Le critère de Levich est donné par la relation (5.1) :

k = 0, 62 DB 2 / 3ν −1/ 6 Ω1/ 2 (5.1)

et le courant limite s’exprime par l’équation (5.2) :

il = nFCB k (5.2)

Avec :
• il : densité de courant limite (A.cm-2),
• n : nombre d’électrons engagés dans la réaction étudiée,

- 101 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

• F : constante de Faraday, dont la valeur est 96500 C,


• CB : concentration (mol.cm-3) de l’espèce B électroactive,
• DB : coefficient de diffusion de l’espèce B (cm². s-1),
• ν : viscosité cinématique du milieu (cm². s-1),
• Ω : vitesse de rotation de l’électrode (rad.s-1).

On peut calculer l’évolution du courant limite de diffusion convection en fonction de


ω (équation 5.3) :

il = 0, 62nFCB DB 2 / 3ν −1/ 6 Ω1/ 2 (5.3)

Le critère de Levich peut également s’exprimer sous forme adimensionnelle, en


fonction des nombres de Sherwood Sh (5.4), de Schmidt Sc (5.5) et de Reynolds Re (5.6). Dans
les systèmes à convection forcée, et entre autres dans la configuration de l’EDT, le nombre de
Sherwood Sh caractérise la vitesse du transport de masse :

S h = 0, 62 Re1/ 2 Sc1/ 3 (en régime laminaire) (5.4)

ν
Sc = (5.5)
D

uL Ωr 2
Re = = (5.6)
ν ν

avec u la vitesse d’écoulement linéaire du fluide et L la longueur caractéristique du


système. Dans le cas de l’EDT, u = Ωr et L = r, avec Ω la vitesse angulaire en rad.s-1.
L’estimation du nombre de Reynolds critique Recrit permet de prévoir le régime
d’écoulement. Pour beaucoup d’auteurs, dans la configuration de l’EDT, Recrit ≈ 105 [LEV-
42].

• Re < Re crit : régime laminaire

• Re > Re crit : régime turbulent

Il est possible d’accéder à un nombre de Reynolds pour un système donné, à partir de


dimensions accessibles, telles r et Ω (ANNEXE 3). Pratiquement, il est difficile d’atteindre le

- 102 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

régime turbulent, pour une EDT, néanmoins quelques auteurs [DAG-68] ont pu travailler
dans une telle configuration ; le nombre de Sherwood s’exprime alors par [LAN-93] :

S h = 0, 0117 Re 0,896 Sc 0,249 (en régime turbulent) (5.7)

1.2. Dépendance entre les contraintes d’écoulement et le rayon du disque dans le


cas de l’EDT

Les lois régissant la mécanique des fluides permettent d’établir un lien entre les
contraintes d’écoulement générées par le fluide et le rayon de l’EDT (figure 5.1).


ϕ
r er

Figure 5.1 : Représentation de l’EDT en coordonnées polaires (r,ϕ)

Dans la configuration de l’EDT, en régime laminaire, et en supposant que le fluide est


incompressible et newtonnien (ces fluides ont un coefficient de viscosité indépendant du
gradient de vitesse ; c’est le cas des gaz, des vapeurs, des liquides purs de faible masse
molaire,..), l’équation (5.8) est proposée d’après Levich :
⎧u = r ΩF (ξ ) ⎫
⎪⎪ ⎪⎪ Ω ρΩ
⎨v = r ΩG (ξ ) ⎬ où ξ = z =z (5.8)
⎪ ⎪ ν µ
⎩⎪ w = ν Ω H ( ξ ) ⎭⎪
ν représente la viscosité cinématique (cm².s-1) et µ la viscosité dynamique (Pa.s).

- 103 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Le frottement à la paroi s’exprime par l’équation (5.9) :

τ tot = τ zr2 z =0
+ τ z2ϕ z=0 (5.9)

● τzr est le cisaillement radial (dû à la force centrifuge) et s’exprime par :


⎡ ∂u ∂w ⎤
τ zr = µ ⎢ + ⎥ (5.10)
⎣ ∂z ∂r ⎦

∂u ∂u ∂ξ ρΩ
Avec : = × = r ΩF '(ξ ) (5.11)
∂z ∂ξ ∂z µ
∂w ∂ξ
= 0 car =0 (5.12)
∂r ∂r

Donc : τ zr 0 = r ρ 1/ 2 Ω3/ 2 µ 1/ 2 F '(0) (5.13)

F’(0) = 0,510 (d’après Schlichting) [SCH-79]

● τzϕ est le cisaillement tangentiel et s’exprime par :


⎡ 1 ∂w ∂v ⎤
τ zϕ = µ ⎢ + ⎥ (5.14)
⎣ r ∂ϕ ∂z ⎦
∂w
Avec : =0 (5.15)
∂ϕ

∂v ∂v ∂ξ ρΩ
= × = r ΩG '(ξ ) (5.16)
∂z ∂ξ ∂z µ

Donc : τ zϕ 0 = r ρ 1/ 2 Ω3/ 2 µ 1/ 2G '(0) (5.17)

G’(0) = 0,616 (d’après Schlichting)

Finalement,

τ tot = 0, 6162 + 0,5102 ρ 1/ 2Ω3/ 2 µ 1/ 2 r

τ tot = 0,800 ρ 1/ 2Ω3/ 2 µ 1/ 2 r (5.18)

- 104 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Les contraintes de cisaillement dépendent linéairement du rayon de l’électrode pour


une vitesse de rotation donnée. Les contraintes liées à l’écoulement du fluide sont plus
importantes au bord de l’électrode qu’en son centre. La figure 5.2 présente l’évolution du
frottement à la paroi en fonction du rayon de l’électrode pour deux vitesses de rotation
respectivement Ω = 100 et Ω = 3200 tpm, avec ρ = 1 g.cm-3 et µ = 0.001 Pa.s-1. Pour une
même position sur l’électrode, le frottement à la paroi est approximativement 100 fois plus
important à 3200 tpm qu’il ne l’est à 100 tpm.

-3
-5 3,5x10
1,8x10
-5
1,6x10 Ω= 100 tpm -3
3,0x10 Ω = 3200 tpm
-5
1,4x10 -3
2,5x10
frottementτ (Pa)
frottementτ (Pa)

-5
1,2x10
-3
-5 2,0x10
1,0x10
-6 -3
8,0x10 1,5x10
-6
6,0x10 -3
1,0x10
-6
4,0x10
-4
-6 5,0x10
2,0x10
0,0 0,0
0,000 0,002 0,004 0,006 0,008 0,010 0,000 0,002 0,004 0,006 0,008 0,010
distance r (m) distance r (m)

Figure 5.2 : Evolution du frottement à la paroi (τ) en fonction de la position sur


l’électrode

2. Les inhibiteurs et l’hydrodynamique

L’influence de l’hydrodynamique sur les performances des inhibiteurs de corrosion, en


régimes laminaire et turbulent, a fait l’objet de relativement peu d’études.
En général, l’effet de la vitesse est défavorable aux performances d’un inhibiteur de
corrosion, et particulièrement lorsque des régimes turbulents sont atteints. Cependant, dans
certains environnements, il arrive que de faibles vitesses soient favorables à l’efficacité de
l’inhibiteur [HAM-73].

- 105 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

2.1. Régime turbulent

En terme d’applications industrielles, les inhibiteurs de corrosion organiques sont les


plus appropriés pour la protection contre la corrosion interne des conduites en acier destinées
au transport des produits pétroliers. En particulier, quelques travaux sur les mécanismes
d’inhibition des inhibiteurs à base d’imidazoline ont déjà été effectués à l’échelle du
laboratoire sur électrode à cylindre tournant (ECT) ou sur boucle de circulation, visant à
simuler les conditions d’écoulement dans les pipelines [TAN-87, KLE-94].
Récemment, des auteurs se sont penchés sur le comportement de l’inhibiteur sous
écoulement multiphasé : le transport multiphasé est particulièrement développé car, d’un
point de vue économique, il est bien plus intéressant de transporter le pétrole et le gaz de
manière combinée. Les études ont été menées dans une boucle de circulation dont le diamètre
des conduites est élevé (∅ = 10 cm) [HON-02a, HON-02b, CHE-99] : des régimes
turbulents ont ainsi été atteints. De même, Heeg et al. ont étudié la tenue de films inhibiteurs
dans des écoulements à jet liquide sur une ECT [HEE-98].
Tous ces précédents travaux, menés majoritairement par spectroscopie d’impédance,
révèlent une diminution des performances de l’inhibiteur lorsque les débits de fluide
augmentent. Cette évolution est attribuée à un endommagement voire une éjection du film
sous l’effet des turbulences ou impacts de bulles à l’interface.

2.2. Régime laminaire

Ochoa et al. [OCH-04b, OCH-04c] ont étudié le comportement de l’interface acier


au carbone / NaCl 200 mg.L-1 en présence d’un inhibiteur (mélange amines grasses et sels
d’acide phosphonocarboxyliques) dans la configuration de l’EDT. Les auteurs ont montré en
particulier que la vitesse de rotation de l’électrode conditionne les propriétés inhibitrices du
film, puisque des densités de courant de plus en plus faibles sont enregistrées avec une
augmentation de la vitesse de rotation de l’électrode.
Des études XPS ont été réalisées pour comparer les compositions chimiques du film
inhibiteur formé sous différentes conditions hydrodynamiques. Le film formé à 2000 tpm est
plus fin que celui formé à 100 tpm. De plus, les spectres de l’oxygène obtenus à vitesse
élevée, présentent un pic supplémentaire attribuable au chélate formé entre le carboxylate et

- 106 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

les ions Fe3+. Ce chélate, localisé préférentiellement dans les défauts du film, renforce la
couche protectrice [ALE-01, SUZ-96].
Ainsi, une augmentation de la vitesse de rotation de l’électrode conduit à une
diminution de l’épaisseur du film et à la formation de défauts, ces derniers favorisant la
formation de chélate.

3. Etude qualitative de l’effet de la vitesse de rotation sur le film


inhibiteur

3.1. Nature du régime d’écoulement

Tous les tests sont effectués sur une électrode de travail de diamètre fixe et égal à 6
mm. Pour un tel diamètre d’électrode et pour des vitesses de rotation d’électrode n’excédant
pas 3200 tpm, le nombre de Reynolds se trouve bien en dessous de sa valeur critique : le
régime laminaire est alors conservé durant toute notre étude.

3.2. L’inhibition sous l’effet de l’hydrodynamique

Le suivi du potentiel de corrosion de l’acier plongé dans la solution A + 0,5 % en


inhibiteur en fonction du temps, avec et sans rotation (figure 5.3), permet de mesurer l’effet
de l’hydrodynamique sur le comportement du film inhibiteur (formation et/ou tenue dans le
temps) ; l’essai est conduit sur plus de 250 heures. A vitesse de rotation nulle (—), le potentiel
libre se stabilise après 10 heures d’immersion. Malgré les chutes de potentiel (correspondant à
une légère détérioration du film qui se reforme spontanément [YAM-92]), le film joue son
rôle protecteur pendant environ huit jours ou 200 heures (maintien du potentiel à une valeur
relativement stable et égale à –270 mV/ECS).

- 107 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

-0,24 (a)

-0,27

-0,30
E (V/ECS)

-0,33

-0,36
vitesse de rotation (tpm) :
-0,39 0
3200

-0,42
0 50 100 150 200 250
Temps (h)

-0,24 (b)

-0,26 Ω=0

-0,28
E (V/ECS)

-0,30

-0,32 Ω = 3200 rpm

-0,34

-0,36
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Temps (h)

Figure 5.3 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la
solution A + 0,5 % en inhibiteur, pour deux vitesses de rotation, (a) sur 250 heures, (b) zoom
sur 40 heures

Avec une vitesse de rotation de 3200 tpm (—), l’évolution du potentiel libre est
différente. Tout d’abord, une augmentation relativement marquée du potentiel pendant les
cinq premières heures d’immersion peut être attribuée :
● à un transport plus rapide de l’inhibiteur,

● à un abaissement des courants anodiques

● à une augmentation du transport de masse de l’oxygène dissous vers l’interface, qui

a pour effet d’augmenter le courant cathodique de réduction de l’oxygène (figure 5.4) et par
- 108 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

conséquent de déplacer le potentiel d’équilibre vers des valeurs plus nobles (figure 5.5) [FEL-
02].

Ω = 400tpm
E
Ω = 1600tpm
Ω = 3200tpm

Figure 5.4 : Représentation des contributions respectives anodique et cathodique des


courbes courant-tension ; schéma explicatif de l’anoblissement du potentiel de corrosion avec
l’augmentation de la vitesse de rotation de l’électrode

-0,26

-0,28
Potentiel (V/ECS)

-0,30

-0,32

-0,34 vitesse de rotation (tpm) : 0


400
1600
-0,36 3200

0 20 40 60 80 100 120
Temps (min)

Figure 5.5 : Suivi du potentiel en circuit ouvert de l’acier XC38 immergé dans la
solution A + 0,5 % en inhibiteur, pour différentes vitesses de rotation

A Ω = 3200 tpm, les chutes de potentiel (observées sur la figure 5.3.a), liées à une
détérioration du film se produisent à la fois plus précocement et plus fréquemment ; ceci

- 109 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

laisse présager une évolution de la structure du film ou une rupture partielle de ce dernier,
sous l’effet des contraintes imposées par l’écoulement. L’observation de la surface métallique
après 50 heures d’immersion sous une vitesse de rotation de 3200 tpm a été obtenue par
microscopie optique (figure 5.6).

100 µm

100 µm

Figure 5.6 : Visualisation par microscope optique de l’état de surface obtenu après 50
heures d’immersion dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur, Ω = 3200 tpm

Le profil typique d’une EDT en régime laminaire est observé, à savoir des spirales
logarithmiques issues de l’axe de rotation [BON-83].

L’écoulement agirait d’une part sur la vitesse de formation du film, et d’autre part sur
sa structure et sa stabilité, si l’on considère des temps d’immersion plus importants [BOM-
05a].

4. Etude de l’hydrodynamique à des temps courts

4.1. Cinétique d’adsorption

Afin de suivre l’évolution de la cinétique d’adsorption du film en fonction de la vitesse


de rotation de l’électrode, des voltamétries cycliques (vbal = 20 mV.s-1) ont été tracées, dans le
domaine anodique, dès les premières minutes d’immersion (figure 5.7).

- 110 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

(a) Ω = 0
3
cycle : 1
0,15 4
2
3
2
4
1
0,10
I (mA.cm )
-2

0,05

0,00
-0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9 1,2
E (V/ECS)
-0,05

(b) Ω = 3200 tpm


0,15 cycle : 1 2
2 3
3 1
0,10
I (mA.cm )
-2

0,05

0,00
-0,6 -0,3 0,0 0,3 0,6 0,9 1,2
E (V/ECS)
-0,05

Figure 5.7 : Voltamétries cycliques effectuées sur XC38 immergé dans la solution A +
0 ,5 % d’inhibiteur, (a) à Ω = 0, (b) à Ω = 3200 tpm

A vitesse de rotation nulle (figure 5.7.a), il faut attendre l’issue du troisième cycle
pour obtenir un courant de corrosion faible de l’ordre de 15 µA.cm-2 ; à Ω = 3200 tpm, ce
courant est déjà quasiment atteint à partir du deuxième cycle (figure 5.7.b), ce qui traduit
l’accélération de la cinétique d’adsorption avec la vitesse de rotation de l’électrode.

- 111 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

4.2. Diagrammes d’impédance après 2 heures

Les spectres d’impédance, en représentation de Nyquist, obtenus au potentiel de


corrosion après 2 heures d’immersion présentent une boucle capacitive quelle que soit la
vitesse de rotation appliquée (figure 5.8).

vitesse de rotation (tpm) : 0


80 400 0
1600
3200 -10
-20
60
- Z'' (kΩ.cm )

10 mHz
2

-30
Phase (°)
-40
40 0,1 Hz -50 vitesse de rotation (tpm) :
0
-60 400
1600
20 -70
3200
-80
1 Hz 10
-3 -2
10
-1
10
0
10
1
10
2
10 10
3
10
4
10
5
10
6
0
0 20 40 60 80 100 120 Fréquence (Hz)
2
Z' (kΩ.cm )

Figure 5.8 : Diagrammes d’impédance tracés au potentiel de corrosion pour l’acier


XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur pour différentes vitesses de rotation

La boucle capacitive est d’autant plus grande que la vitesse de rotation est élevée.
Or, au potentiel de corrosion, les deux réactions anodique et cathodique ont lieu
simultanément à la surface de l’électrode ; aussi, l’évolution de la boucle capacitive avec la
vitesse de rotation peut être attribuée non seulement à une évolution du film avec
l’hydrodynamique, mais également à une évolution du mécanisme de diffusion convection de
l’oxygène dissous : il s’agit alors de décomposer les différents processus s’établissant dans
chaque domaine.

- 112 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

4.3. Décomposition des contributions

Afin de séparer les différentes contributions possibles au potentiel de corrosion, des


spectres d’impédance ont été tracés à des surtensions anodique et cathodique. Les surtensions
appliquées, dans chaque domaine, ont été déterminées grâce aux tracés potentiodynamiques
présentés sur la figure 5.9. Dans le domaine cathodique, l’étude est réalisée à -700 mV/Ecorr
et, dans le domaine anodique, une surtension de +300 mV/ECS est appliquée afin de
s’affranchir de toute contribution cathodique.

1E-3 1E-6

1E-4
-0,3 -0,2 -0,1 0,0
1E-5
I (A.cm )
-2

1E-6
1E-3

vitesse de rotation (tpm) :


1E-7
0
400
1E-8 1E-4

1600
-1,2 -1,0 -0,8 3200

-1,2 -0,8 -0,4 0,0 0,4


E (V/ECS)

Figure 5.9 : Courbes potentiodynamiques tracées pour un acier XC38 immergé dans
la solution A + 0,5 % en inhibiteur, pour différentes vitesses de rotation (vbal = 0,5 mV.s-1)

Pour les trois vitesses étudiées, les spectres tracés dans le domaine cathodique (à -700
mV/Ecorr) présentent deux boucles capacitives (figure 5.10.a). La boucle à hautes fréquences
peut être attribuée au transfert de charges et la boucle à basses fréquences au mécanisme de
diffusion convection. Une diminution de la taille des deux boucles capacitives sur le
diagramme de Nyquist est à noter lorsque la vitesse de rotation augmente ; cette évolution a
déjà été discutée dans les travaux de Duprat [DUP-81]. Elle est liée à une augmentation du
transport par diffusion convection de l’oxygène sous l’effet de la rotation de l’électrode.

- 113 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Cette évolution des spectres d’impédance avec la vitesse de rotation dans le domaine
cathodique indique que l’évolution des diagrammes obtenus au potentiel de corrosion serait
plutôt attribuable à une amélioration du comportement du film.
(a)
3
vitesse de rotation (tpm) :
hautes 400
0,4
fréquences 1600
3200

2 0,2 1 Hz
-Z'' (kΩ.cm²)

0,1 Hz
10 mHz
0,0
0,0 0,2 0,4 0,6

0.1 Hz
1
1Hz

0.1 Hz

10 mHz
0
0 1 2 3 4
Z' (kΩ.cm²)

(b)
10
0
vitesse de rotation (tpm) :
400
-10 1600
3200
Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

-20 1
vitesse de rotation (tpm) :
-30 400
1600
3200
-40
0
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
-3
10
-2 -1
10 10
0 1
10 10
2
10
3
10
4
10
5 6
10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 5.10 : Diagrammes d’impédance (a) en mode Nyquist et (b) mode Bode, tracés
à -700 mV/Ecorr pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur pour
différentes vitesses de rotation

- 114 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Les spectres d’impédance dans le domaine anodique ont été obtenus indépendemment
les uns des autres, l’électrode étant pour chaque expérience immergée pendant deux heures
dans la solution sous la vitesse imposée (figure 5.11). Cette étude dans le domaine anodique
confirme le résultat émis précédemment concernant la seule contribution anodique des
spectres obtenus au potentiel de corrosion. En effet, dans la région des hautes fréquences, la
boucle capacitive relative au transfert de charge augmente très légèrement avec la vitesse de
rotation (figure 5.11.a).

- 115 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

(a)

vitesse de rotation (tpm) :


300
400 10 mHz
1600
3200

-Z'' (kΩ.cm²) 200

100 4
hautes
fréquences
2
0.1 Hz
1 Hz 0
0 2 4 6 8 10
0
0 100 200 300 400
Z' (kΩ.cm²)

(b)

100
-20

Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

-40 vitesse de rotation (tpm) : 10


400
1600
-60 3200
1

-80
0,1
-2 0 2 4 6
log f (Hz)

Figure 5.11 : Diagrammes d’impédance (a) en mode Nyquist, (b) en mode Bode
(phase), tracés à +300 mV/Ecorr pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0.5 %
d’inhibiteur pour différentes vitesses de rotation

- 116 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

4.4. Evolution des paramètres à l’interface

Une évolution des paramètres du film et des processus de corrosion en fonction de la


vitesse de rotation permet de quantifier l’effet bénéfique de l’hydrodynamique sur la
formation du film après 2 heures d’immersion.
Le circuit électrique équivalent décrivant l’ensemble des phénomènes mis en jeu lors
de la réaction d’inhibition est présenté sur la figure 5.12. Or, nous avons mis en évidence
qu’au potentiel de corrosion après deux heures d’immersion l’évolution des diagrammes
d’impédance avec la rotation était liée à la seule évolution du film sans effet de diffusion,
observée uniquement aux surtensions anodiques. De plus, après 2 heures d’immersion, le film
n’est pas encore complètement quantifiable : il faut attendre 6 heures d’immersion pour
déceler sa contribution sur les diagrammes de Bode (voir partie 2.1.2. du chapitre 3).

electrolyte

Qf , α2

Qdc , α1
REF
RE
CE Ree
R
W
WE

Rf W R
RtcA
W tA

Wδ RtcC
R XC 38
tC XC38

Figure 5.12 : Circuit électrique équivalent général proposé

Ainsi, la contribution de la branche cathodique (résistance de transfert de charge de


réduction de l’oxygène dissous RtcC associée à l’impédance de diffusion convection Wδ) est
soustraite du circuit. Il en est de même pour les contributions du film (Qf et Rf). Le CEE
général présenté sur la figure 5.12 se réduit alors au circuit simplifié de la figure 5.13.

- 117 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Qdc, α1

RE Re WE

R tcA
Figure 5.13 : Circuit électrique équivalent proposé après simplification

Les spectres expérimentaux et ajustés (par le CEE de la figure 5.13) concordent de


manière satisfaisante dans toute la gamme de fréquences étudiées (figure 5.14).

80 vitesse de rotation (tpm) :


0
400
1600
60 3200
ajustement 10 mHz
- Z'' (kΩ.cm )
2

40
0,1 Hz

20

1 Hz
0
0 20 40 60 80 100
2
Z' (kΩ.cm )

Figure 5.14 : Spectres expérimentaux et spectres ajustés par le CEE proposé sur la
figure 5.13

Les valeurs des paramètres obtenues sont répertoriées dans le tableau 5.1.
Lorsque la vitesse de rotation de l’électrode augmente, RtcA augmente conjointement à
une diminution de Cdc. Ces évolutions respectives caractérisent d’une part un blocage
croissant du transfert de charges à la surface de l’électrode et d’autre part une diminution de la
surface de contact liée à l’adsorption de l’inhibiteur.

- 118 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Tableau 5.1 : Valeurs des paramètres RtcA , α et Cdc en fonction de la vitesse de


rotation (le facteur d’erreur de l’ajustement χ² est précisé pour chaque vitesse étudiée)

χ²
Ω RtcA Cdc
α (facteur
(tpm) (kΩ.cm-2) (µF.cm-²)
d’erreur)

0 50 0,81 107 9,8.10-4

400 65 0,88 80 6,96.10-4

1600 98 0,83 98 9,56.10-4

3200 121 0,88 71 7,99.10-4

Ainsi, une augmentation de la vitesse de rotation permet d’obtenir une meilleure


résistance à la corrosion après 2 heures d’immersion : l’effet hydrodynamique est bénéfique à
la formation du film.
Qu’en est-il à présent de l’effet de la vitesse de rotation sur le comportement du film
inhibiteur pour des temps d’immersion plus importants ?

5. Etude de l’hydrodynamique à des temps plus importants

Les spectres d’impédance électrochimique tracés après 10 heures d’immersion à


différentes vitesses de rotation de l’électrode sont présentés sur la figure 5.15. A l’inverse de
ceux obtenus après 2 heures, les spectres observés à 10 heures laissent apparaître une boucle
capacitive dont la taille diminue avec la vitesse de rotation, laissant présager une diminution
du pouvoir protecteur du film.
Cette observation montre une évolution de l’effet de l’écoulement sur le film avec le
temps d’immersion.

- 119 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

vitesse de rotation (tpm) :


0
100 10 h 400
-Z '' (kΩ.cm²) 3200

2h
10mHz
50

10mHz

0
8 1012
50 6
100 4 (h)
Z' (k 2 mps
Ω .cm² 150 0 Te
)

Figure 5.15 : Diagrammes d’impédance en mode Nyquist tracés au potentiel de


corrosion pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur pour trois
vitesses de rotation après 2 heures et après 10 heures

Les figures 5.16 et 5.18 présentent les diagrammes d’impédance, en représentation de


Nyquist, après 140 et 250 heures, pour des vitesses de rotation respectivement égales à Ω = 0
et Ω = 3200 tpm.
Quelle que soit la vitesse de rotation de l’électrode (Ω = 0 ou 3200 tpm), on observe
un élargissement de la phase après dix heures d’immersion que l’on attribue à l’apparition
d’une deuxième constante de temps relative au film inhibiteur (figures 5.17.a et 5.19.a).
Si l’on prolonge encore le temps d’immersion (140 heures et plus), on observe, dans le
domaine des hautes fréquences, une diminution de la valeur du module, plus importante à Ω =
3200 tpm qu’à Ω = 0, révélant une augmentation importante de la résistance de l’électrolyte
(figures 5.17.b et 5.19.b). Cette diminution peut être attribuée à une augmentation de la
conductivité de l’électrolyte, due à la présence de plus en plus importante des ions fer dans la
solution. La dissolution métallique est plus forte à Ω = 3200 tpm, ce qui confirme la
détérioration précoce du film.

- 120 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Ainsi, l’hydrodynamique agirait non seulement sur la vitesse de formation du film à


des temps courts mais ce paramètre aurait également une incidence sur la structure du film
pour des temps plus conséquents.

temps d'immersion (h):


2
60 10mHz
10
140
250
- Z'' (kΩ.cm )
2

40

0.1Hz
20 hautes
1 fréquences
10mHz

0
0 1 2 3
0
0 20 40 60 80 100
2
Z' (kΩ.cm )

Figure 5.16 : Diagrammes d’impédance en représentation de Nyquist tracés au


potentiel de corrosion pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur à
différents temps d’immersion à Ω = 0

(a) (b)
10
0 100 temps d'immersion (h):
2
-10
10
-20 140
10 250
-30
Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

-40
-50 temps d'immersion (h): 1
-60 2
10
-70 140
250
-80 0,1
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence (Hz) Fréquence (Hz)

Figure 5 .17 : Diagrammes d’impédance en représentation de Bode (a) phase et (b)


module, tracés au potentiel de corrosion pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5
% en inhibiteur à différents temps d’immersion à Ω = 0

- 121 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

temps d'immersion (h):


100 2
10
140 10mHz
80 250

- Z'' (kΩ.cm )
2
60
2

40 0.1Hz
1 hautes
fréquences
20

0.1Hz 10mHz 00 1 2 3
0
0 20 40 60 80 100 120 140
2
Z' (k )
Figure 5.18 : Diagrammes d’impédance en représentation de Nyquist tracés au
potentiel de corrosion pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur à
différents temps d’immersion à Ω = 3200 tpm

(a) (b)
10
100
0
temps d'immersion (h):
-10
2
-20 10 10
140
-30 250
Z (kΩ.cm²)
Phase (°)

-40 1
temps d'immersion (h):
-50
2
-60 10 0,1
140
-70 250
-80
0,01
-3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6
10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Fréquence(Hz) Fréquence (Hz)

Figure 5.19 : Diagrammes d’impédance en représentation de Bode (a) phase et (b)


module, tracés au potentiel de corrosion pour l’acier XC38 immergé dans la solution A + 0,5
% en inhibiteur à différents temps d’immersion à Ω = 3200 tpm

- 122 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

6. Caractérisation des films inhibiteurs sous l’influence de la vitesse


de rotation

Afin de valider les résultats issus des études électrochimiques par impédancemétrie
qui révèlent la détérioration du film sous l’effet de l’écoulement pour des temps d’immersion
importants, des techniques de caractérisation de surface (AFM) et de composition (XPS) ont
été mises en œuvre. Les mesures ont été réalisées sur deux électrodes, immergées pendant 24
heures dans la solution A avec 0,5 % d’inhibiteur, l’une fixe et l’autre soumise à une vitesse
de rotation de 3200 tpm.

6.1. Caractérisation de l’état de la surface : analyses par AFM

La figure 5.20 présente l’image AFM de la surface de l’électrode, obtenue sans aucune
agitation après 24 heures d’immersion dans la solution inhibitrice. L’état de surface est
relativement homogène et lisse (rms = 7,5) : le critère de rugosité couramment utilisé est un
critère statistique appelé rms et représentant l’écart quadratique moyen du profil.
Plusieurs analyses ont été effectuées sur la surface de l’électrode afin de prouver le
caractère homogène du film.

rms = 7,5

Figure 5.20 : Image AFM de la morphologie de la surface de l’électrode obtenue


après 24 heures d’immersion dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur à Ω = 0

- 123 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

L’analyse de surface sur l’électrode soumise une vitesse de rotation de 3200 tpm
pendant 24 heures, rend compte d’une morphologie différente de la couche protectrice. Trois
analyses AFM ont été effectuées respectivement aux positions A, B et C (figure 5.21).

A B C
Distance (mm)
(centre/lieu d’analyse )
0 3
1,5 5,5 3

Figure 5.21 : Localisations des 3 positions pour les analyses AFM

Les résultats, présentés sur la figure 5.22, révèlent une évolution de la topographie de
la surface selon la position analysée. La rugosité de surface diminue considérablement du
centre de l’électrode à sa périphérie (le facteur rms varie de 53 à 5,4). Cette évolution peut
être liée à l’évolution du coefficient de frottement le long du rayon de l’électrode (voir
paragraphe 2.1). En effet, la rugosité du film diminue lorsque les contraintes
hydrodynamiques augmentent. L’hydrodynamique aurait ainsi une action érosive sur la
couche protectrice.

- 124 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

A.

rms = 52,9

B.

rms = 14,9

C.

rms = 5,4

Figure 5.22 : Images AFM de la morphologie de la surface, au centre de l’électrode


(position A) , au milieu (position B) et à la périphérie ( position C), obtenues après 24 heures
d’immersion dans la solution A + 0,5 % d’inhibiteur à Ω = 3200 tpm

- 125 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

6.2. Caractérisation de la composition chimique des films inhibiteurs : analyses


par XPS

L’adsorption de l’inhibiteur sur la surface métallique pour différentes vitesses de


rotation a été suivie en analysant les pics caractéristiques C1s, N1s, et O1s. Ces éléments
constituent les témoins de la présence des composants majeurs de l’inhibiteur, à savoir :
l’acide carboxylique et l’amine. De plus, l’oxygène caractérise soit la présence d’oxydes-
hydroxydes de fer (pics à 530 eV et 531,5 eV), soit la présence de chélates formés entre les
ions carboxylates et le substrat oxydé (pics à 533 eV) [OCH-04b, SUZ-96]. Les analyses
quantitatives de ces éléments (données en pourcentage atomiques par rapport au fer) sont
présentées dans les tableaux 5.2 et 5.3. L’azote et l’oxygène sont respectivement présents
dans les mêmes proportions au centre (A) et à la périphérie (C) de l’échantillon, alors qu’une
plus grande quantité de carbone est détectée à la périphérie de l’électrode qu’en son centre.

Tableau 5.2 : Energies de liaison pour chaque élément du spectre (en eV). Entre
parenthèses, les valeurs données en pourcentage correspondent au rapport de l’aire des pics

O1s O1s O1s


Fe2p3/2
(O2-) (OH-) (H2O)

Ω = 3200 tpm
706,8 529,7 531,7 533,6
(24 heures)
710,2 (45%) (46%) (9%)
Position A

Ω = 3200 tpm
706,5 529,5 531,7 533,6
(24 heures)
710,0 (44,5%) (48%) (7,5%)
Position C

- 126 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

Tableau 5.3 : Valeurs issues des analyses XPS après 24 heures d’immersion,

Ω = 3200 tpm

C/Fe O/Fe N/Fe


Position A
5,9 3,2 0,3
(centre)

Position C 9,1 3,5 0,3


(bord)

Dans la littérature, l’évolution de la proportion en carbone sur la surface de l’électrode


est attribuée au mode d’action des carboxylates [WEI-71, ZEC-76]. En effet, il est probable
que ces composés forment un complexe avec le cation métallique, issu de la dissolution de
l’électrode [SUZ-96]. Le complexe serait incorporé dans la couche hydroxydes-oxydes
ferreux pour combler les pores. Alexander et al. avancent que ce type de complexe semble se
former préférentiellement là où le film est défectueux [ALE-01]. Ainsi, ceci pourrait
expliquer la proportion plus importante de carbone à la périphérie de l’électrode, là où les
contraintes hydrodynamiques sont les plus importantes.

7. Conclusion du chapitre 5

Le paramètre hydrodynamique, modulé dans notre étude par la vitesse de rotation de


l’EDT, agit non seulement sur la formation du film inhibiteur mais également sur sa tenue et
sa morphologie lors de temps d’immersion plus importants.
L’évolution des valeurs de la capacité de la double couche et de la résistance de
transfert de charge à chaque vitesse de rotation, obtenues par spectroscopie d’impédance au
potentiel de corrosion, après 2 heures d’immersion, a permis de révéler que la formation du
film dépendait fortement de la vitesse de rotation de l’électrode. Le film se forme d’autant
plus rapidement que la vitesse de rotation est élevée.
Pour des temps d’immersion importants (supérieurs à 5 jours), les contraintes
hydrodynamiques liées à l’écoulement sont responsables d’une déformation et d’une

- 127 -
Chapitre 5 – Influence des conditions hydrodynamiques

détérioration du film protecteur. En effet, des frottements plus importants à la périphérie ont
une action érosive sur le film et induisent l’apparition de défauts. La prédominance des
défauts provoque dès lors la formation de chélates (mesurée par XPS) entre les ions
carboxylates et les ions fer, préférentiellement localisés sur le bord de l’électrode.

- 128 -
Conclusion générale – Perspectives

Conclusion générale
Perspectives

- 129 -
Conclusion générale – Perspectives

- 130 -
Conclusion générale – Perspectives

Ce travail de thèse avait pour objectif de caractériser le comportement d’un inhibiteur


de corrosion, destiné à être intégré à des huiles afin de protéger les outils de coupe et les
pièces usinées en acier dans le domaine de l’usinage mécanique.

Dans un premier temps, la caractérisation générale de l’inhibiteur a été effectuée. Il


s’agit d’un inhibiteur d’interphase anodique intégrant, lors de sa formation, les premiers
oxydes-hydroxydes de fer issus de la dissolution de l’acier. L’étude de l’évolution du pouvoir
protecteur avec la teneur en inhibiteur a révélé que 0,3 % massique constituait une
concentration critique d’utilisation du produit. En effet, à cette teneur, la formation du film est
possible et une efficacité intéressante est obtenue après deux heures d’immersion, mais la
structure de la couche barrière ne permet pas une protection prolongée de l’échantillon. La
dégradation du film a alors pu être corrélée à une prise en eau progressive qui entraîne, après
36 heures d’immersion, une corrosion complète de l’acier.

Les paramètres liés aux conditions de service de l’inhibiteur (température et


hydrodynamique) influencent de manière significative la formation et l’évolution dans le
temps, du film protecteur. Les essais visant à caractériser leur effet respectif ont été réalisés
majoritairement pour une teneur de 0,5 % d’inhibiteur, teneur pour laquelle le film est
efficace après 60 heures.

Les essais concernant l’effet de la température ont été menés dans l’intervalle 20 – 80
°C. 50 °C constitue une température critique : en dessous de cette température, la formation
du film est possible et les pouvoirs protecteurs satisfaisants (supérieurs à 94 %), alors qu’au-
delà de cette température le pouvoir protecteur chute, pour n’être plus que de 2 % à 80 °C.
L’évolution du pouvoir protecteur avec la température a pu être corrélée à une évolution
importante de la cinétique de dissolution du fer, plutôt qu’à une réelle évolution des
mécanismes réactionnels. L’importance du rapport oxydes-hydroxydes de fer / molécules
inhibitrices a ainsi été soulignée et validée par une approche couplée microgravimétrie /
chronoampérométrie, menée à 80 °C pour 5 % d’inhibiteur. Le film formé dans ces conditions

- 131 -
Conclusion générale – Perspectives

est plus épais et présente un pouvoir protecteur satisfaisant après deux heures d’immersion.
Toutefois, sa cinétique de formation est ralentie puisque le phénomène de complexation (entre
les molécules inhibitrices et les oxydes de fer), à l’origine de la formation du film, engage
plus de produits.

L’étude de l’influence des conditions hydrodynamiques (induite par la rotation de


l’électrode) sur les propriétés du film a finalement été réalisée. Les diagrammes d’impédance
ont été tracés au potentiel de corrosion ainsi qu’à des surtensions anodiques et cathodiques,
afin de séparer et quantifier l’évolution des différentes contributions intervenant à l’interface
(réduction de l’oxygène dissous, diffusion à travers le film, dissolution du fer). Ceci a permis
de mieux appréhender l’effet de l’écoulement sur la seule formation et stabilité du film. Ainsi,
les conditions hydrodynamiques interviennent :
● sur la formation du film, puisque celui-ci se forme d’autant plus rapidement que

la vitesse de rotation est élevée,


● sur la morphologie et la composition chimique du film, pour des temps

d’immersion importants. Les contraintes liées à l’écoulement sont responsables


d’une déformation et d’une détérioration du film, en particulier sur les bords de
l’échantillon, où les frottements sont les plus importants.

Finalement, ce travail nous a permis de maîtriser l’effet d’un écoulement laminaire sur
l’action d’un film inhibiteur. Une perspective intéressante de ce travail serait d’aborder l’effet
d’un écoulement turbulent sur le film protecteur. Une collaboration avec le laboratoire de
mécanique des fluides de l’INSA a déjà permis de déterminer l’influence d’un écoulement
turbulent sur le transport de masse dans la configuration du cylindre tournant.
En terme d’hydrodynamique, nous attendons beaucoup de l’exploitation de la
technique de la microbalance dans des conditions d’écoulement : à l’instar du Laboratoire
Interface et Systèmes Electrochimique de Paris, l’utilisation de la microbalance à jet immergé
permettrait de contrôler l’écoulement du fluide (similaire à l’EDT).
Enfin, pour aborder concrètement la situation industrielle, des tests complémentaires
pourraient être menés simultanément en température et sous écoulement contrôlé, afin de
coupler les 2 principales contraintes extérieures étudiées jusqu’à présent.

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Annexes

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ANNEXE 1

Coupes et directions de vibration des cristaux de quartz

L’utilisation du quartz impose que le cristal soit découpé en lames d’où seront tirés des
parallélépipèdes, des cylindres et des lentilles dont les dimensions définiront les propriétés
vibratoires. Ces lames doivent être très précisément orientées par rapport aux axes
cristallographiques du cristal.

Orientation des coupes AT et BT d’un cristal de quartz

On appelle axe Z (ou axe optique) l’axe de symétrie d’ordre 3, parallèle à la longueur du
quartz. Aucune propriété piézoélectrique ne lui est associée. L’axe X (ou axe électrique) et
l’axe Y (ou axe mécanique) sont dans un plan perpendiculaire à Z. Il existe 3 axes X et 3 axes
Y déduits les uns des autres par rotation de 120° autour de Z . C’est par rapport à ces axes que
sont définies les « coupes » utilisées pour les applications principalement électroniques du
quartz. Ces coupes sont baptisées de noms conventionnels ( X, Y , NT, CT, AT, …). Chacune
d’elles est optimale dans une gamme de fréquences donnée, et, à chacune correspondent des
performances thermiques particulières.

L’orientation de la coupe AT est à 35,25° par rapport à l’axe Z et la coupe BT à -49° par
rapport à l’axe Z

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Une lame de quartz piézo-électrique, de coupe et de dimensions particulières, possède
un certain nombre de fréquences de résonance mécanique propres. Le cisaillement d’épaisseur
permet l’obtention de fréquences élevées allant de 0,8 à 30 MHz et jusqu’à 150 MHz . Il
s’applique principalement aux coupes AT et BT. Lorsqu’un potentiel électrique est appliqué à
travers le cristal, le quartz de coupe AT subit une contrainte de cisaillement dans la direction
de vibration :

Direction de vibration

a)
t = 3π /2ω ; x = -xmax

b)
t = 0 ; x = 0 (le cristal a le
maximum d’énergie
cinétique)

c)

t = π /2ω ; x = +xmax

Direction de vibration d’un résonateur de quartz de coupe AT

t est le temps nécessaire au cristal pour atteindre le maximum de la contrainte durant


l’oscillation. Le cristal a le maximum d’énergie potentielle pour x = +/- xmax

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ANNEXE 2

Le rôle particulier de chaque ion constituant l’électrolyte

Les ions chlorures sont fortement adsorbés sur l’acier, rendant la passivation du
matériau plus difficile. Les effets des ions sulfates ne sont pas aussi sévères et dans la plupart
des cas bien plus bénéfiques à la passivation du matériau que les ions chlorures. Les sulfates
peuvent être à l’origine de la coagulation de certains inhibiteurs de corrosion. Dans les eaux
« dures », les ions carbonates offrent une inhibition naturelle en formant des dépôts de
calcaires. Dans les eaux « douces », l’utilisation des inhibiteurs de corrosion est fortement
recommandée à cause de l’effet acide généré par un excès de dioxyde de carbone.

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ANNEXE 3

Accès rapide au nombre de Reynolds d’un système donné (d, Ω)

Expérimentalement, afin de connaître rapidement la nature du régime, il est possible


d’accéder à une valeur approximative de Re pour une électrode de diamètre donnée d (mm),
tournant à une vitesse Ω (tours par minute) en se référant à la réglette de la figure :

Re (ν=10−2cm².s-1)

ω (tpm)
Ω d (mm)

66
3200

1600

Réglette permettant la détermination de Re pour des paramètres géométriques données

La conversion est graduelle : tout d’abord le bord du disque est affecté par la turbulence
qui s’étend graduellement jusqu’au centre en augmentant la vélocité de rotation. Toutefois,
des turbulences peuvent apparaître avant Recrit si le disque vibre de manière axiale ou radiale
ou encore si la surface n’est pas homogène, ce qui entraîne des remous supplémentaires dans
la solution.

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